République et canton de Genève

Grand Conseil

No 27

Jeudi 8 juin 1995,

nuit

Présidence :

Mme Françoise Saudan,présidente

La séance est ouverte à 20 h 45.

Assistent à la séance : MM. Olivier Vodoz, président du Conseil d'Etat, Jean-Philippe Maitre, Claude Haegi, Philippe Joye et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

La présidente donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance : MM. Guy-Olivier Segond, Gérard Ramseyer, conseillers d'Etat, ainsi que MM. René Ecuyer, Alain-Dominique Mauris, Jean-Pierre Rigotti et Philippe Schaller, députés.

3. Correspondance.

La présidente. La pétition suivante est parvenue à la présidence:

P 1074
concernant l'école d'ingénieurs et les écoles techniques et des métiers. ( ) P1074

M. Pierre Vanek(AdG). Je demande la lecture de cette pétition. (Appuyée.)

PÉTITION

concernant l'école d'ingénieurs et les écoles techniques

Considérant:

1. la diminution constante ces dernières années du nombre de places d'apprentissage offertes par les entreprises. Par exemple, les chiffres à la fin avril 1995 indiquent plus de 1 600 candidats pour 1 100 places;

2. l'augmentation constante des effectifs d'élèves dans l'apprentissage à plein temps aux écoles techniques et des métiers (ETM);

3. les déclarations publiques de la présidente du département de l'instruction publique affirmant, à maintes reprises, le nécessaire développement quantitatif et qualitatif de la filière professionnelle;

4. qu'après avoir subi, compte tenu des effectifs, une forte réduction de leurs ressources, les ETM sont actuellement l'objet de coupes budgétaires sans précédent, se traduisant par:

· une suppression de 5 postes sur 123 (-4%) alors que les effectifs prévus à la rentrée sont de 770 élèves au lieu de 726 actuellement (+6%);

· une forte réduction des crédits de fonctionnement des laboratoires et des ateliers, impliquant une dégradation importante des conditions d'enseignement de la pratique professionnelle;

· la suppression d'une classe de première année en mécanique, afin de faire passer les effectifs d'élèves en atelier de 12 à 14, qui aura pour conséquence une dégradation de la qualité de la formation et des conditions de sécurité;

· des effectifs trop élevés dans les branches théoriques, de culture générale notamment, alors qu'il s'agit d'une population d'élèves extrêmement hétérogène;

5. que plus de 120 candidats, répondant aux critères d'admission, se verraient refuser l'accès aux formations dispensées aux ETM, par manque de places faute de ressources; ainsi, sont inscrits:

· 125 candidats pour 96 places en mécanique;

·  80 candidats pour 42 places en électricité et électronique;

·  96 candidats pour 42 places en horlogerie;

6. les engagements de 1982 et 1985 du Conseil d'Etat précisant des maxima de 18 élèves en classes de théorie et 12 en atelier;

7. la loi sur l'instruction publique;

les parents, les élèves et les enseignants des ETM demandent au Grand Conseil de bien vouloir intervenir, de toute urgence, auprès du Conseil d'Etat, pour:

1. affecter aux ETM les ressources permettant l'accueil, pour la rentrée 1995 notamment, des candidats remplissant les conditions d'admission, l'ouverture des classes nécessaires et le respect des maxima de 18 élèves en classe de théorie et de 12 en atelier;

2. la non-suppression des postes aux ETM et l'engagement d'enseignants, en nombre suffisant, en rapport avec l'ouverture des classes et l'augmentation des effectifs d'élèves;

3. l'attribution des crédits nécessaires aux équipements et au bon fonctionnement de l'ensemble des centres d'activités dont les ateliers, les laboratoires et le centre de documentation.

N.B. : 648 signatures

AGEEITAssociation genevoise des enseignantsde l'école d'ingénieurs et des écoles techniquesPrésident Souhail Mouhanna

4, rue de la Prairie1201 Genève

La présidente. Cette pétition est renvoyée à la commission des pétitions.

4. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

La présidente. La proposition de motion suivante est parvenue à la présidence :

M 1009
de Mmes et MM. Florian Barro (L), Sylvie Châtelain (S), Hervé Dessimoz (R), Marlène Dupraz (AG), John Dupraz (R), Christian Ferrazino (AG), Yvonne Humbert (L), René Koechlin (L), Liliane Maury Pasquier (S), Geneviève Mottet-Durand (L), Jean Opériol (DC), Chaïm Nissim (E), Martine Roset (DC) et Olivier Vaucher (L) demandant au Conseil d'Etat d'entreprendre, en collaboration avec la commune du Grand-Saconnex, l'étude nécessaire, puis d'engager la procédure en vue d'un déclassement en zone 5 de développement de la bande de terrain, construite de villas, le long du chemin de Marchery. ( )   M1009

Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.

Par ailleurs, nous prenons acte du retrait de la motion suivante:

M 822
de MM. André November, Jacques-André Schneider et Robert Cramer, reprise par Mme Sylvia Leuenberger, concernant l'introduction du contrôle budgétaire dans l'administration publique. ( )   M822

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

La présidente. La demande d'interpellation suivante est parvenue à la présidence :

I 1938
de M. René Longet (S) : renvoi d'un requérant d'asile : suite de la réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente 80, du 23 mars 1995 : établissement de fait et leçon à tirer de cette affaire. ( )   I1938

Cosignataires : Liliane Maury Pasquier, Dominique Hausser, Sylvie Châtelain, Christine Sayegh, Pierre-Alain Champod.

Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance. 

e) de questions écrites.

Néant.

RD 242-1
5.  Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'examiner une éventuelle incompatibilité de M. Yves Zehfus, appelé à remplacer M. Jean-Pierre Lyon, député démissionnaire. ( -) RD242
Rapport de Mme Fabienne Bugnon (E), commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil

Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse. La commission des droits politiques s'est réunie pour étudier l'éventuelle incompatibilité de M. Yves Zehfus, né le 2 novembre 1953. Originaire de Genève, il exerce le métier de facteur auprès des PTT. Madame la présidente, la commission n'a relevé aucune incompatibilité.

E 774
6.  Prestation de serment de M. Yves Zehfus, nouveau député, remplaçant M. Jean-Pierre Lyon, démissionnaire. ( ) E774

M. Yves Zehfus est assermenté.

(Applaudissements.)

E 775
7.  Tirage au sort d'un membre suppléant de la commission de grâce en remplacement de M. Jean-Pierre Lyon, député démissionnaire. ( ) E775

La présidente. Le sort a désigné M. Bernard Clerc.

PL 7247
8.  Projet de loi de Mme et M. Christine Sayegh et Laurent Moutinot modifiant la loi sur l'organisation judiciaire (E 2 5). ( ) PL7247

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, est modifiée comme suit:

Art. 64 A (nouveau)

Activité professionnelle accessoire

1 Les magistrats du pouvoir judiciaire ne peuvent, en principe, pas exercer une activité lucrative accessoire.

Exceptions

2 Les fonctions suivantes sont toutefois autorisées:

a) membre d'une commission juridictionnelle ou administrative si la qualité de magistrat est requise par la loi;

b) juge suppléant au Tribunal fédéral;

c) enseignant universitaire.

Arbitrage

3 Les magistrats du pouvoir judiciaire peuvent accepter des mandats d'arbitrage, à condition que:

a) le président ou la présidente de la juridiction concernée, si l'activité judiciaire n'en est pas perturbée, donne son accord;

b) le 33% du revenu de cette activité soit versé sur un fonds destiné à financer l'assistance juridique.

Art. 65 (nouvelle teneur)

Les dispositions contenues dans les articles 63 à 64A ne sont pas applicables aux suppléants des tribunaux.

EXPOSÉ DES MOTIFS

La fonction de magistrat du pouvoir judiciaire est un poste à temps complet et rémunéré selon l'échelle prévue à l'article 2, alinéa 1, de la loi du 21 décembre 1973 (B 5 7) concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat et des établissements hospitaliers.

En date du 25 septembre 1992, un projet de loi avait été soumis au Grand Conseil pour instaurer une certaine souplesse dans la charge de magistrat et permettre des postes partiels. Toutefois, ce projet, quelque peu avant-gardiste, n'a pas encore rencontré une majorité d'adhérents.

Les quelques exceptions au principe du plein temps se déduisent de la loi, des règlements et de l'usage.

En effet, les juges sont notamment sollicités à titre privé pour rendre des sentences arbitrales.

Cette pratique, qui fait l'objet à l'intérieur des différentes juridictions d'un règlement en application de l'article 78, alinéa 1, LOJ, n'est pas à prohiber car elle permet, hors tribunaux, de bénéficier de l'expérience de ces magistrats dans des litiges où la voie arbitrale est plus adéquate.

Ces mandats d'arbitrage sont bien évidemment rémunérés et de manière substantielle.

Il serait en conséquence raisonnable qu'un magistrat, en fonction, partage le revenu d'activités accessoires avec les justiciables et en reverse une partie sur un fonds destiné à financer l'assistance juridique.

Il y a lieu, en effet, de ne pas perdre de vue que ce travail accessoire est en relation directe avec l'activité principale, laquelle est souvent déterminante pour choisir l'arbitre.

Il est à relever que, dans le milieu hospitalier universitaire, la pratique privée est également possible et un système de rétrocession d'honoraires existe aussi en application de l'article 11A de la loi sur les établissements médicaux. La part d'honoraires concernée est affectée à un fonds de recherches scientifiques.

Le présent projet de loi propose que le 33% des honoraires soit affecté au fonds de l'assistance juridique, ce pourcentage pourra bien évidemment être discuté, voire modulé en commission.

Aussi, Mesdames et Messieurs les députés, vu les explications données, nous vous remercions de faire bon accueil à ce projet de loi.

Préconsultation

Mme Christine Sayegh (S). En principe, le poste de magistrat du pouvoir judiciaire est à plein temps. Toutefois, certaines exceptions sont admises et font l'objet de règlements permettant au magistrat de se consacrer, à temps partiel, à des commissions et à des arbitrages. Il n'est cependant fait aucune allusion à l'aspect lucratif desdites activités. Or, certaines d'entre elles - particulièrement les mandats privés d'arbitrage - induisent un travail important et, par conséquent, des honoraires élevés.

Au nom de l'égalité de traitement - comme c'est le cas dans le domaine hospitalier universitaire - il nous semble opportun qu'une partie de ces honoraires revienne aux administrés. Nous proposons de l'affecter à l'assistance juridique accordée de manière trop restrictive, voire refusée, pour certaines procédures.

En effet, de nombreuses prestations ne sont plus incluses dans le tarif horaire de l'assistance judiciaire, particulièrement en droit de la famille, où le justiciable est le premier pénalisé.

Il est évident que les modalités d'application que nous proposons pourront être discutées en commission. Nous vous remercions de bien vouloir renvoyer ce projet à la commission judiciaire.

Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.

PL 7248
9.  Projet de loi de Mme et M. Laurent Moutinot et Christine Sayegh modifiant la loi d'application dans le canton de Genève de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et faillite (E 2 5). ( ) PL7248

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi d'application dans le canton de Genève de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 16 mars 1912, est modifiée comme suit:

Art. 4, al. 3 (nouveau)

3 Si un fonctionnaire de l'office est nommé administrateur spécial au sens de l'article 237, alinéa 2, de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du11 avril 1889, les honoraires qu'il perçoit pour ce mandat sont versés à la caisse de l'Etat.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Dans la mesure où ils sont nommés à plein temps et rétribués en conséquence, les fonctionnaires de l'office des poursuites et faillites devraient vouer tout leur temps de travail à leur tâche. Il arrive cependant que les fonctionnaires de l'office soient désignés par l'assemblée des créanciers en qualité d'administrateurs spéciaux au sens de l'article 237 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite et rétribués pour ces mandats.

Cette situation pose problème.

Le règlement d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale pose d'ailleurs le principe de l'incompatibilité pour les fonctionnaires d'exercer une autre activité rémunérée sans l'accord du Conseil d'Etat et, le cas échéant, avec réduction de traitement (art. 7 à 9 du règlement).

Le cumul d'un emploi de fonctionnaire à plein temps avec une autre activité rémunérée n'est pas acceptable, par principe, et pour deux raisons au moins :

 à l'heure où le travail est rare et où les projets tendant à son meilleur partage n'avancent que lentement, il convient au moins de limiter à 100% l'emploi de chaque travailleur et d'éviter ainsi la suroccupation;

 le fonctionnaire à plein temps doit vouer toute son énergie à sa tâche et la possibilité d'un second emploi peut laisser désagréablement à penser que l'Etat n'est pas assez exigeant envers ledit fonctionnaire.

Dans un domaine aussi sensible que les poursuites et faillites il importe que la population sache que les fonctionnaires vouent tout leur temps à leur tâche et qu'ils n'ont aucun intérêt pécuniaire qui les en distrairait.

Pour toutes ces raisons, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à réserver bon accueil au présent projet de loi.

Préconsultation

Mme Christine Sayegh (S). Ce projet de loi procède de la même logique que le précédent. En complément de l'exposé des motifs, je précise que le travail généré par l'administration d'une faillite se substitue au travail afférent au poste du fonctionnaire mandaté. Pourtant, ce dernier reçoit son salaire et des honoraires de mandataire. Dans un tel cas, nous proposons que les honoraires perçus pour ce mandat soient versés à la caisse de l'Etat.

Je souhaite que nous puissions discuter cette question en commission judiciaire et je vous remercie de bien vouloir renvoyer ce projet de loi à ladite commission.

Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.

M 1003
10. a)  Proposition de motion de Mmes et MM. Anita Cuénod, René Longet, Chaïm Nissim, Maria Roth-Bernasconi, Fabienne Bugnon, Danielle Oppliger et Bernard Clerc concernant le personnel administratif, technique, de service et domestique des missions diplomatiques et fonctionnaires internationaux de Genève. ( ) M1003
R 295
b)  Proposition de résolution de Mmes et MM. Anita Cuénod, René Longet, Chaïm Nissim, Maria Roth-Bernasconi, Fabienne Bugnon, Danielle Oppliger et Bernard Clerc concernant le personnel administratif, technique, de service et domestique des missions diplomatiques et fonctionnaires internationaux de Genève. ( ) R295

(M 1003)

LE GRAND CONSEIL,

- considérant les conditions de travail dans lesquelles se trouve fréquemment le personnel engagé par des diplomates ou des fonctionnaires internationaux;

- vu le flou juridique entourant ce problème et la nécessité de clarifier les responsabilités;

- vu la contradiction entre le fait d'accueillir un nombre important d'organisations humanitaires et la situation faite à certains de ces employés,

invite le Conseil d'Etat

- à accorder, en matière de permis de travail, en cas de litige avec l'employeur et en cas de besoin, une autorisation provisoire durant la procédure d'approbation du permis humanitaire, ou une autorisation de travail dans le cadre du délai de cinq ans prévu par l'article 18, alinéa 2, lettre b, LSEE, et à réserver, le cas échéant, des unités sur le contingent à cet effet;

- à autoriser, en cas de besoin et à titre de secours, l'hospice général à faire des avances à des anciens employés des missions diplomatiques ou de diplomates et de fonctionnaires internationaux en attente d'une décision de justice ou de départ, moyennant cession de la créance.

(R 295)

LE GRAND CONSEIL,

- considérant les conditions de travail dans lesquelles se trouve fréquemment le personnel engagé par des diplomates ou des fonctionnaires internationaux;

- vu le flou juridique entourant ce problème et la nécessité de clarifier les responsabilités;

- vu la contradiction entre le fait d'accueillir un nombre important d'organisations humanitaires et la situation faite à certains de ces employés,

invite le Conseil d'Etat

à intervenir auprès du Conseil fédéral dans le sens suivant:

- que les personnes travaillant dans les missions diplomatiques ou au service de diplomates et de fonctionnaires internationaux soient traitées sous le régime du permis B, hors contingent;

- que les catégories qui ne seraient pas régies de cette manière bénéficient d'un statut clairement défini dans une ordonnance et non pas seulement dans une directive du département fédéral des affaires étrangères (DFAE);

- qu'il soit institué une agence de recrutement comme intermédiaire obligatoire pour le recrutement du personnel en cause, agence avec laquelle les employeurs passeraient contrat, tout en gardant le libre choix de leur personnel;

- que dans l'intervalle le contenu des directives du DFAE soit revu afin que les informations qu'elles contiennent correspondent effectivement à l'état des exigences pertinentes (notamment au contenu du contrat-type cantonal pour le personnel de maison), et leur application contrôlée.

EXPOSÉ DES MOTIFS

La presse s'est souvent fait l'écho de conditions de travail discutables et même parfois scandaleuses réservées à certains employés domestiques engagés par des diplomates ou des fonctionnaires internationaux.

Confrontés à un nombre important de dysfonctionnements dans le traitement et le respect des lois en vigueur dans notre canton, s'agissant de ces employés, nous souhaitons faire des propositions concrètes afin d'essayer de remédier aux flous juridiques qui permettent d'inacceptables comportements et surtout provoquent des situations dramatiques pour une catégorie de personnel dont la protection est très lacunaire. Pour ceux qui estimeraient que les autorités helvétiques, fédérales ou cantonales, n'auraient rien à dire dans de tels cas, nous citerons le récent jugement du Tribunal fédéral (du 16 novembre 1994) confirmant la compétence de la juridiction suisse dans un cas de litige entre un employé d'ambassade et son employeur.

Rappelons que ces employés domestiques sont parfois payés bien en dessous de la norme du contrat-type genevois, qui prévoit un salaire de 2 230 F par mois. Lorsqu'il y a litige entre employeur et employé, ce dernier perd automatiquement non seulement son salaire, son gîte et son couvert, puisqu'il a l'obligation de loger au domicile de son employeur, mais aussi sa carte de légitimation équivalant à un permis de travail et de séjour, et doit donc trouver un autre emploi ou quitter la Suisse dans le délai de 30 jours (trois mois pour le personnel administratif et technique des missions, tels que chauffeurs, gardes, etc.).

Certains syndicats s'intéressent de près à ces problèmes, et parmi eux le Syndicat sans frontières (SSF), organisme de défense qui regroupe plusieurs centaines de membres. Le SSF a été à maintes reprises alerté par de nombreux cas de litiges et a été amené à assurer une défense juridique et un soutien dans une trentaine de procédures allant jusqu'au Tribunal des prud'hommes. Procédures qui prennent du temps, il est vrai, mais pour lesquelles l'absence forcée des plaignants représente un déni de justice, puisqu'il est actuellement impossible à ces personnes de rester à Genève jusqu'au jugement.

Le Conseil d'Etat, suite à l'interpellation du 17 novembre 1994 de Mme Anita Cuénod, a répondu qu'il était conscient de l'existence d'un véritable problème, et qu'une nouvelle structure serait mise en place à court terme, en accord avec la Confédération (Mémorial 1994, no 42, pages 5305-5306). Nous avons pris note, dans l'intervalle, de la décision de créer une instance de médiation par le biais de la nomination de deux personnes.

Après une étude approfondie de la situation, nous avons décidé de proposer une double démarche. Tout d'abord, d'envisager au niveau cantonal d'accorder, d'une part, une autorisation provisoire de travail durant le cours de la procédure, d'autre part, d'autoriser l'Hospice général à allouer une avance pécuniaire, moyennant cession de créance, dans le cas de dénuement momentané pendant une recherche d'emploi ou dans l'attente du jugement, ce personnel n'étant pas au bénéfice de l'assurance-chômage.

Sur le plan fédéral, nous invitons le Conseil d'Etat à intervenir auprès du Conseil fédéral afin que les personnes travaillant dans les missions diplomatiques ou au service de diplomates ou de fonctionnaires internationaux bénéficient d'un permis B hors contingent ainsi que d'un statut clairement défini par une ordonnance, et non d'une directive à bien plaire du DFAE.

Il s'agirait aussi de mettre sur pied une agence de recrutement responsable des conditions de travail et des contrats, s'inspirant de ce qui existe en Allemagne, l'agence de Bonn pour l'OTAN par exemple.

Enfin, nous demandons que le contenu des directives du DFAE, aussi longtemps qu'elles restent en vigueur, soit mis en conformité avec les exigences du contrat-type cantonal pour les personnels concernés et que son application soit contrôlée, en particulier en matière d'assurances sociales et maladie.

Pour ces motifs, nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un bon accueil à la présente proposition de motion.

ANNEXE

ÉLÉMENTS JURIDIQUES RELATIFS AU STATUT DES EMPLOYÉSDE DIPLOMATES OU DE FONCTIONNAIRES INTERNATIONAUX

1. Catégories d'employés

Il existe à Genève 140 «missions permanentes» représentant les Etats auprès des Organisations des Nations Unies et 2 bureaux d'observateurs permanents ainsi que des «missions spéciales» (ex. Délégations des USA et Russie à la conférence sur le désarmement) et des observateurs (ex. OUA, Ligue des Etats arabes).

Ensuite il y a les organisations internationales (de l'ONU telles l'OIT, l'OMS ou indépendantes tels le CERN ou le GATT ou l'OMC p. ex.).

La structure de leur personnel est la même. Voici les catégories et autorisations de séjour et de travail, appelés «cartes de légitimation», accordées par le DFAE; avec indication de la couleur du trait apposé au milieu de la carte pour les distinguer :

 Carte  dans les missions  dans les organisations

 B (rouge) Chef de mission Secrétaire/ directeur général

  (= représentant permanent

  avec rang d'ambassadeur)

 C (rose) Diplomate Hauts fonctionnaires

 D  Personnel

  administratif Professionnels

  et technique   (brun)

  (ex. secrétaires,

  traducteurs)

   (bleu)

 E (bleu) Personnel de  Personnel des services généraux

   service 

   (ex. chauffeurs, huissiers,

   nettoyeuses, domestiques de

   l'ambassadeur chef de mission)

Ces employés et fonctionnaires peuvent à leur tour avoir à leur service des employés domestiques appelés «personnel privé» qui reçoivent les cartes suivantes:

 F (jaune) Domestiques des diplomates et hauts fonctionnaires

 Attestation  Domestiques des consuls et des fonctionnaires internationaux

2. Juridiction et droit applicable aux relations de travail

a) Les fonctionnaires internationaux et membres des organisations internationales sont engagés par des contrats qui échappent à la législation suisse. Leurs litiges de travail sont soumis à des tribunaux internationaux tel le Tribunal administratif de l'OIT dont le siège et à Genève ou le Tribunal administratif de la Ligue des Etats arabes au Caire.

Les diplomates et certains membres des missions de la catégorie du personnel administratif et technique sont des fonctionnaires de l'Etat de la mission et engagés par un acte de nomination. Ils ont généralement la nationalité de l'Etat qui les engage et sont en principe affiliés aux caisses de pension et de sécurité sociale des fonctionnaires de cet Etat. Les contrats des autres membres des missions et celui des employés privés sont soumis au droit privé et régis par le droit privé et public suisse (ATF 110 II 255; JAR 1994. 123, JAR 1993, 111; Tribunal des prud'hommes de Genève ci-après: TPH du 16.9.1992 Groupe XII C. c/Qatar cons. A.2; TPH Gr. XII, 1.2.1995, R. c/Qatar cons. II.22). A quelques rares exceptions près, ces employés sont recrutés sur place ou dans des pays tiers comme le Maroc, les Philippines, le Pérou, la Colombie, le Pakistan, Sri Lanka, etc. On dit qu'il s'agit d'«employés locaux». Ceux des catégories D et E (personnel dit: «ATS» pour Administratif, technique et de service) bénéficient toutefois de certaines immunités et exemptions fiscales qui les soustraient aux lois suisses sur la sécurité sociale. Tous les litiges du droit du travail relatifs à ces contrats de droit privé peuvent être portés devant les tribunaux locaux du lieu où le travail est ou a été accompli (art. 343, al. 1, CO qui est de droit impératif, art. 361 CO).

b) Le contenu du droit est fixé en premier lieu par le contrat d'engagement. S'agissant du personnel «ATS» des missions, leur contrat se réfère quelquefois à des règlements internes. Ces contrats et règlements ne peuvent toutefois déroger aux dispositions impératives du code des obligations suisse (CO) et de la loi suisse sur le travail. A défaut de dispositions contractuelles, ce sont les dispositions du CO qui s'appliquent (vacances, paiement des heures supplémentaires à 125% du tarif horaire, délais de résiliation, salaire en cas de maladie, etc.).

Quant au personnel privé (domestiques) des diplomates et fonctionnaires, leurs conditions de travail sont également régies en priorité par leur contrat et, à défaut, par le contrat-type pour les travailleurs de l'économie domestique cantonal (CTT) qui a force de loi et s'impose aussi dans les relations avec les employeurs diplomates et fonctionnaires internationaux (Directive du DFAE OI 6, du 1.4.1987; TPH Gr. XII, 30.8.1993 H.c/ D. fonctionnaire international). A Genève, le CTT modifié le 20 avril 1989 (J/3/21) prévoit pour les employés domestiques de plus de 20 ans un salaire minimum de 2 230 F par mois en espèces (art. 16, al. 1) plus les prestations en nature (logement, nourriture et blanchiment). L'employeur ne peut déroger à certaines dispositions du CTT, notamment à celles portant sur le salaire, qu'au moyen d'un accord écrit signé par les deux parties. A défaut d'un accord écrit, c'est le salaire minimum prévu par le CTT qui s'applique. Toutefois, même écrit, un accord ne peut, selon la jurisprudence du TPH, sous peine de nullité, porter sur un salaire en espèces inférieur à 1 485 F (en 1994) par mois pour un emploi à plein temps (TPH Gr. XII, 27 mai 1994 T. c/ un fonctionnaire international). Or, la majorité des diplomates et fonctionnaires internationaux versent aujourd'hui encore des salaires largement inférieurs (de 300 F, 600 ou 1 000 F par mois).

c) Les Directives édictées par le DFAE n'ont aucune force de loi. Elles ne font que fournir aux diplomates des indications sur les lois en vigueur en Suisse. Malheureusement, ces indications sont parfois erronées. Ainsi l'on peut lire dans la Directive OI 6 du 1er avril 1987 «à titre d'indication» que «le contrat-type de travail pour les travailleurs de l'économie domestique du canton de Genève du 24 juin 1986 parle d'un salaire minimum pour les employés âgés de plus de 20 ans de 1 200 F par mois....», alors que le CTT du 24 juin 1986 fixait un salaire en espèces de 1 800 F par mois! A ce jour, ces directives n'ont pas été modifiées, alors même que le salaire minimum en espèces a constamment été adapté à l'indice des prix et est aujourd'hui, comme dit plus haut, de 2 230 F!

3. Statut du point de vue de la police des étrangers

Le statut de tous ces fonctionnaires, diplomates et employés locaux est régi par les lois suisses et notamment par la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE) qui stipule, à son article 1er, que tout étranger a le droit de résider sur le territoire suisse s'il est au bénéfice d'une autorisation de séjour ou d'établissement, ou si, selon cette loi, il n'a pas besoin d'une telle autorisation. L'ordonnance limitant le nombre des étrangers, du 6 octobre 1986 (OLE), n'est pas applicable, en l'état de son texte, aux membres des missions diplomatiques et permanentes et des postes consulaires, ni aux fonctionnaires internationaux, à leurs épouses et enfants célibataires âgés de moins de 21 ans qui font ménage commun, ni à leur personnel privé, s'ils sont au bénéfice d'une «carte de légitimation établie par le DFAE» (art. 4, al. 1, OLE). Sur trois points la situation des employés internationaux diffère de celle des autres étrangers:

a) L'autorisation de séjour et de travail est accordée par le DFAE par le biais de «cartes de légitimation» ou d'«attestations d'identité» dont les conditions de délivrance ne sont pas spécifiées dans une loi mais résultent d'une pratique du DFAE qui n'est publiée nulle part et n'a donc fait l'objet d'aucun débat. De par leur nature ces cartes sont des autorisations de séjour conditionnelles (liées à un employeur particulier, tel Etat ou fonctionnaire ou diplomate) au sens de l'article 5 LSEE. Comme les autorisations de séjour du type «B», les cartes sont d'une durée limitée. Elles sont valables au 31 décembre d'une année, mais renouvelables. Les conditions de leur renouvellement ne sont pas spécifiées dans une loi mais résultent d'une pratique établie par le DFAE d'un commun accord avec l'office fédéral des étrangers (OFE) et formulée dans des «directives administratives». Les séjours sont autorisés selon ces directives «jusqu'à l'échéance du contrat en cours».

b) Les Etats sont libres dans leur choix des membres du personnel de la mission, en vertu des accords de siège conclus par la Suisse avec l'ONU ou avec d'autres organisations internationales, ratifiées par l'Assemblée fédérale (ex. pour les diplomates avec l'ONU ratifié le 29.9.1955, RS 0.192.120.1) ou les décisions unilatérales du Conseil fédéral des 31 mars 1948, 20 mai 1958 et 14 juillet 1964 aux termes desquels la Suisse a décidé d'accorder aux membres des «missions permanentes» les mêmes privilèges et facilités qu'aux membres des «missions diplomatiques» (ambassades) à Berne (actuellement en vertu de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18.4.1961, ci-après: CV, RS 0.191.01). Cette liberté de choix est toutefois soumise à certaines réserves (CV art. 7). Ainsi la Suisse peut déclarer que telle personne n'est pas «acceptable» (CV art. 9) ou limiter l'effectif des missions dans les limites de ce qu'elle considère «raisonnable et normal» (CV art. 11). En cas de licenciement, l'étranger qui n'est pas au bénéfice pour un autre motif d'un permis B ou C dispose aux termes des directives de 3 mois pour trouver un autre emploi international.

S'agissant du personnel domestique, le libre choix n'est pas absolu. Il résulte de la volonté politique de la Suisse d'attirer les organisations internationales et de son devoir contenu dans la Convention de Vienne «d'exercer sa juridiction sur les domestiques privés de façon à ne pas entraver d'une manière excessive l'accomplissement des fonctions de la mission.» (art. 37, ch. 4, CV). Selon les «directives» CD 4 du DFAE du 1er avril 1987, l'autorisation de séjour d'un domestique (carte jaune catégorie F) qui n'a pas le permis B ou C n'est délivrée que si l'employé n'est pas marié, assure la garde de ses enfants à l'étranger, et s'engage à vivre sous le même toit que son employeur ! Son permis («carte de légitimation») ne peut pas être renouvelé en cas de changement d'employeur s'il a déjà résidé 4 ans en Suisse. S'il y a résidé moins de 4 ans au moment de son licenciement, l'étranger bénéficie de 30 jours pour trouver un nouvel emploi international.

A l'instar des autres étrangers, les employés internationaux et leurs domestiques doivent être engagés à l'étranger sauf en cas de renouvellement de leur ancienne carte s'ils sont réengagés dans les délais de 30 jours ou de 3 mois mentionnés ci-dessus.

c) A la fin du contrat pour lequel les cartes ont été délivrées, l'employé n'est pas averti de son obligation de quitter la Suisse ou de retrouver, le cas échéant, un nouvel emploi international dans les délais fixés par les directives. Généralement, l'employeur lui demande de lui restituer la carte. C'est alors le canton qui prend le relais et accorde à l'étranger, à sa demande, un délai de départ en conformité avec l'article 12 LSEE. C'est aussi lui qui reçoit et statue sur les demandes de permis humanitaire (art. 13 f OLE) ou d'établissement.

4. Immunités de juridiction

En vertu de la Convention de Vienne applicable par analogie sur décision du Conseil fédéral, chaque catégorie de membres des missions bénéficie d'immunités qui augmentent avec le grade. Tous, y compris les domestiques, bénéficient d'exemptions fiscales sur les salaires qu'ils reçoivent du fait de leurs services. Nous verrons plus loin quelles sont leurs immunités du point de vue de leur obligation d'affiliation aux assurances sociales suisses. L'immunité de juridiction civile est accordée:

a) aux diplomates et hauts fonctionnaires des organisations internationales (mais pas aux agents consulaires: art. 43, al. 1, Convention de Vienne sur les relations consulaires du 24.4.1963, RS 0.191.02) notamment à l'égard des bailleurs de leur appartement privé et du personnel privé engagé par eux-mêmes à leur service personnel, sauf s'ils ont leur résidence permanente en Suisse (permis B ou C) ou la nationalité suisse (CV art. 38, ch. 1). Leur immunité cesse au moment où ils quittent la Suisse à la fin de leurs fonctions ou après un délai raisonnable de départ accordé par le DFAE (CV art. 39, ch. 2). Cela signifie que tant qu'ils sont en poste en Suisse ils ne peuvent être ni assignés devant un tribunal suisse ni faire l'objet de mesures de poursuites pour un litige qui les oppose à leur personnel domestique ou leur bailleur.

Après leur départ, et à l'égard des diplomates résidents ou suisses et aux consuls, l'immunité de juridiction subsiste en ce qui concerne les seuls actes officiels, c'est-à-dire des actes qu'ils ont accomplis dans l'exercice de leurs fonctions comme membre de la mission (CV art. 39, ch. 2, 2e phrase).

Le DFAE peut être requis par l'employé, par l'intermédiaire du département cantonal de justice et police, de solliciter la levée de l'immunité auprès de l'Etat ou de l'organisation pour lequel travaille le diplomate. Le DFAE refuse systématiqument de donner suite à ces requêtes sans même motiver sa décision, ni la communiquer au requérant, attendant régulièrement que le diplomate ait quitté le pays !

b) aux Etats (représentés par les missions) uniquement à l'égard de leurs employés qui occupent un poste à responsabilité et dont l'activité est étroitement liée à l'exercice de la puissance publique (activité de gouvernement ou de iure imperii).

Selon la plus récente jurisprudence du Tribunal fédéral, l'Etat étranger ne peut invoquer l'immunité de juridiction à l'encontre d'un employé subalterne, engagé en vertu d'un contrat de droit privé, dont le salaire est relativement bas, surtout s'il a été recruté sur place ou dans un pays tiers (ATF Ie Cour de droit public, du 13.12.1994, dans la cause R. c/ Iraq; ATF 110 II 255 ss). A l'égard des pays européens qui ont ratifié la Convention européenne de Bâle sur l'immunité des Etats, du 16 mai 1972 (RS 0.273.1), l'immunité de juridiction est cependant étendue aux employés subalternes qui ont la même nationalité que l'Etat employeur ou n'ont pas eu leur résidence permanente en Suisse au moment de leur engagement (art. 5, ch. 2). Les domestiques privés des chefs de mission du rang d'ambassadeur peuvent assigner l'Etat dont l'ambassadeur est le représentant permanent en Suisse, car c'est lui leur emloyeur. Ils reçoivent d'ailleurs une carte de légitimation du type E à raie bleue.

5. Assurances sociales (assurance-maladie, accident professionnel et non professionnel (LAA) et AVS/AI/AC)

Sont obligatoirement assurés les domestiques privés qui ne sont pas soumis aux dispositions de la sécurité sociale du pays de leur employeur ou d'un pays tiers. Leur employeur diplomate est tenu d'observer les obligations que lui impose la législation suisse en la matière, notamment de déduire les cotisations (art. 33, ch. 4 CV; prise de position du Conseil fédéral sur la motion Spielmann du 2.3.1992 cons. 3 b), BO CN 1992 11980).

Seuls les membres des missions qui ont la nationalité suisse ou leur résidence permanente en Suisse (permis B ou C) sont assurés et affiliés obligatoirement à l'AVS/AI et assurance-chômage (ATF des assurances, Ie Chambre, du 19.12.1994, dans la cause M. c/ Caisse de compensation du canton de Genève cons. 4b) et Conseil fédéral surmotion Spielmann, cons. 2c). Les missions sont toutefois dispensées de payer la part employeur des cotisations AVS/AI/AC.

Les autres membres des missions et diplomates non résidents et non suisses ne peuvent s'affilier en Suisse que si une convention bilatérale avec leur pays d'origine le prévoit (CV art. 33, ch. 5 et 37, ch. 2 et 3; des tractations seraient en cours avec certains pays européens) ou si la LAVS est modifiée dans ce sens qu'elle admettrait l'affiliation volontaire comme pour les Suisses de l'étranger.

Quant à l'assurance-accident (LAA), les employés des missions et employés consulaires ne sont assurés que si leur mission en fait la demande et s'engage à payer sa part de cotisations (OLAA art. 3, al. 3; RS 832.202), alors même que la Convention de Vienne n'interdit l'affiliation obligatoire à la sécurité sociale qu'aux employés qui ne sont pas résidents permanents (permis B ou C), ni Suisses ! Tous les membres de la mission ne pourraient donc s'affilier contre la volonté de leur employeur que si la loi est modifiée en ce sens qu'ils soient admis à s'affilier volontairement à l'instar des indépendants (voir art. 4, al. 1, LAA).

Le Conseil fédéral doit prochainement édicter un règlement d'application de la nouvelle loi sur l'assurance-maladie dans lequel il peut restreindre de la même manière l'obligation d'assurance des membres des missions et autoriser l'affiliation volontaire.

6. Statut des employés après la résiliation de leur contrat

Un problème majeur rencontré réside dans la discrimination des employés internationaux par rapport aux autres étrangers bénéficiaires d'un permis de séjour qui perdent leur emploi. Alors que les permis de ceux-ci sont transformés après 10 ans ou 5 ans pour les Européens en permis d'établissement (type C), et ne sont pas révoqués aussitôt après le licenciement, ce qui leur permet de chercher un nouvel emploi dans le cadre du contingent cantonal jusqu'à l'expiration de la validité annuelle de leur permis, l'employé international doit, selon les directives, quitter le pays dans les 30 jours (domestiques privés) ou les 3 mois (membres des missions) quelle que fût la durée de son séjour en Suisse.

Dans la pratique, le canton de Genève accorde aujourd'hui, en cas de litige avec l'employeur, des délais de départ jusqu'à la première audience du Tribunal des prud'hommes si celle-ci peut être fixée à une date pas trop éloignée, ce qui n'est jamais le cas dans les litiges avec les Etats, car ceux-ci doivent être assignés par la voie diplomatique ce qui prend jusqu'à 8 mois, et le double si l'Etat ne se présente pas et invoque de manière dilatoire une prétendue immunité diplomatique. Plus la carrière de l'employé en Suisse était longue, plus les autorités sont enclins à accorder des délais longs de départ. Mais durant ces délais de départ, l'étranger n'a pas le droit de travailler ! Il doit donc vivre aux crochets des autres. N'ayant souvent pas un sou, l'étranger ne pourra pas non plus se payer le billet d'avion pour revenir en Suisse pour l'audience du tribunal, s'il quitte notre pays. Comme il n'est plus domicilié régulièrement en Suisse, l'Hospice général n'est pas autorisé à lui accorder des subsides ou une avance pour lui permettre de partir dans son pays dans des conditions dignes.

Seule solution: inciter le canton de Genève à accorder de son propre chef une autorisation de séjour et d'emploi jusqu'à 5 ans sur la base de l'article 18, alinéa 2, lettre b, LSEE qui lui permet d'accorder de telles autorisations à la main-d'oeuvre dans le service de maison et l'agriculture sans requérir l'approbation de Berne et à conférer à l'Hospice général le droit d'allouer des avances, par exemple moyennant cession de sa créance contre son employeur.

Berne exige le départ dans les délais susmentionnés (30 jours ou 3 mois) même si l'employé a résidé et travaillé en Suisse durant 15 ou 20 ans (sans, bien sûr, cotiser aux assurances sociales et notamment à l'assurance-chômage). C'est alors le canton de résidence qui doit être sollicité pour un permis humanitaire (art. 13f OLE) accordé dans des cas «d'extrême rigueur». Or, si Genève accorde volontiers un tel permis, celui-ci doit encore trouver approbation par la section de M. Fornero de l'office fédéral des étrangers (OFE) à Berne qui se distingue par une pratique hyper-répressive. Genève doit négocier au compte-gouttes les approbations.

De plus, l'OFE fait traîner en longueur la procédure d'approbation des permis humanitaires au point que celle-ci peut durer plus d'une, voire deux années. Et si, durant cette période, le canton peut accorder des autorisations de travail «provisoires» aux conditions de l'article 18, alinéa 5, LSEE aux «étrangers obligés d'exercer sans délai une activité lucrative», Genève n'accorde ces permis que parcimonieusement et n'informe pas l'étranger de ce droit, ni même de sa décision de lui délivrer un permis humanitaire sous réserve d'approbation, comme l'exige pourtant la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF Persine, cons. 4b).

Enfin, si l'étranger obtient son permis B humanitaire, un grave problème surgit si, ancien employé de mission, il ne retrouve pas du travail ou s'il est âgé de plus de 60 ans, puisqu'il n'a été affilié ni à l'AVS, ni à l'assurance-chômage.

Débat

Mme Anita Cuénod (AdG). Tout d'abord, je tiens à saluer la décision du Conseil d'Etat de nommer trois médiateurs : MM. Maurice Aubert, Francis Blanchard et Laurent Marti. Il est grand temps d'envisager des solutions, sur le plan cantonal, pour combattre les injustices dont souffrent certains employés domestiques ou membres du personnel administratif, technique et de service des milieux internationaux à Genève. Nous devons notamment nous préoccuper des abus flagrants dénoncés par les quelques personnes ayant le courage d'entreprendre une procédure judiciaire.

Pour mémoire, je vous rappelle que ces personnes se trouvent dans l'impossibilité de retrouver un emploi pendant la durée des procédures. De surcroît, elles doivent quitter le territoire dans un délai de trente jours ou de trois mois, selon leur catégorie professionnelle. Néanmoins, des prolongations de séjour leur sont souvent octroyées par le Conseil d'Etat. Elles peuvent alors demeurer à Genève sans avoir le droit d'y travailler.

C'est pourquoi nous invitons le Conseil d'Etat à leur accorder soit une autorisation provisoire de travail pendant l'approbation d'un permis humanitaire, soit une autorisation de travail, dans le cadre du délai de cinq ans, prévu par l'article 18, alinéa 2, lettre b, de la loi sur le séjour des étrangers. Durant toute la procédure judiciaire, cette loi permet d'accorder de telles autorisations à la main-d'oeuvre employée dans le service de maison et l'agriculture, sans que soit requise l'approbation de la Confédération.

Par ailleurs, il nous semble important d'envisager, par le biais de l'Hospice général, une aide de secours en cas de difficultés majeures. En effet, les victimes de ces litiges sont confrontées fréquemment à des situations d'extrême précarité. Elles se retrouvent sans emploi et, par conséquent, sans revenus, ne touchent pas d'indemnités de l'assurance-chômage, puisqu'elles ne bénéficient, pour la plupart, d'aucune couverture sociale. Les employés domestiques, contraints d'habiter chez l'employeur, se retrouvent sans logement. L'Hospice général pourrait, par exemple, allouer des avances moyennant cession de la créance contre l'employeur.

Les services du département de l'économie publique se sont-ils déjà préoccupés de la situation de ce personnel, dont le salaire se situe fréquemment en deçà de celui prévu dans le contrat-type cantonal ?

N'oublions pas que la Genève internationale, pour laquelle nous nous battons tous, risque d'être sévèrement prétéritée si elle conserve cette attitude de tolérance, proche du laisser-aller, sous prétexte de non-ingérence dans les milieux diplomatiques et internationaux, vis-à-vis de certains individus peu respectueux de la législation cantonale et des directives du Département fédéral des affaires étrangères.

Il est certain que l'implantation d'autres organisations internationales à Genève risque d'être compromise, à l'avenir, par ce manque de rigueur et de courage caractéristique des autorités et par un laisser-faire digne des trois singes de la fable : «Je n'ai rien vu, rien entendu et rien dit !».

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Les nombreux avantages offerts par notre pays et notre canton aux missions diplomatiques permettent d'imaginer que soient facilement acceptées les légères contraintes imposées par nos projets de motion et de résolution. D'autant plus qu'ils visent uniquement au respect fondamental des droits de la personne.

Si les différents faits relatés dans la presse ont ému l'opinion publique, ils ne représentent, hélas, que la pointe de l'iceberg. En effet, le personnel employé par les missions diplomatiques est fréquemment exploité, sous-payé et parfois maltraité. Sa protection est quasiment nulle, puisqu'il ne dispose même pas, dans la plupart des cas, d'un élémentaire contrat de travail. Sans la création du Syndicat sans frontières et ses constantes dénonciations, ce problème serait sans doute resté longtemps ignoré.

Mme Anita Cuénod vous ayant largement fait part de nos propositions, je ne souhaite pas y revenir. Le groupe des Verts et moi-même partageons pleinement ses préoccupations.

Nos autorités cantonales se félicitent lorsqu'une nouvelle organisation internationale s'établit à Genève. Nous partageons cette fierté d'accueillir de nombreuses représentations, gouvernementales ou non, symboles d'une ville ouverte sur le monde. Nous ne saurions pourtant tolérer qu'au sein de ces organisations les droits humanitaires les plus élémentaires soient bafoués. Le personnel des missions diplomatiques établies dans notre canton doit bénéficier des protections sociales en vigueur. Les propositions que nous vous soumettons leur garantissent une protection sociale et matérielle. Aussi, nous vous prions de les accepter.

En outre, la résolution permet d'envoyer un message clair à nos autorités fédérales, en mettant fin à un flou juridique douteux et en traitant le personnel des missions diplomatiques sur un pied d'égalité avec les autres travailleurs.

Il me semble parfois que les autorités cantonales et fédérales proposent de trop nombreux avantages aux missions diplomatiques pour les inciter à s'établir dans notre pays. Aussi, en acceptant nos propositions, elles démontreront qu'il n'existe pas de traitements différenciés dans le domaine de la protection des travailleurs et que nos lois doivent être appliquées et respectées par tous. C'est dans ce sens que nous vous soumettons ces deux projets et que nous souhaitons les voir acceptés.

M. René Longet (S). A de multiples reprises, la situation des employés de missions diplomatiques et de fonctionnaires internationaux a défrayé la chronique. Le Conseil d'Etat y a été sensible et a nommé récemment une instance de médiation reconnue de toutes les parties. Toutefois, nous ne pouvons pas nous en contenter et nous comptons interdire fondamentalement cette situation d'esclavagisme. En effet, les intéressés ne sont, parfois, pas même libres de leurs mouvements, ne sont payés que quelques centaines de francs et doivent se contenter d'une chambrette, souvent obscure, dans une résidence de diplomates ou de fonctionnaires internationaux.

En tolérant cet état de fait, inadmissible sur le plan humain, nous nuisons au rôle international de Genève déjà difficile à défendre.

La responsabilité incombant au Grand Conseil consiste à identifier les problèmes et à s'efforcer de les résoudre. Il se doit d'être plus efficace qu'une simple instance de médiation.

Dans la motion, nous avons mis en évidence les situations qui sont du ressort du canton. En effet, certains moyens d'action sont à sa disposition. Ces derniers sont illustrés dans l'annexe juridique de l'exposé des motifs, par plusieurs jugements, notamment du Tribunal fédéral.

En cas de litige entre un employé et son employeur, en l'occurrence des diplomates ou des fonctionnaires internationaux, certaines mesures peuvent être prises sur le plan cantonal. Cela évitera que la procédure devant les prud'hommes ne soit retirée et que le plaignant ne soit plus établi à Genève au moment du jugement.

Nous proposons soit de permettre au plaignant de demeurer à Genève, soit de lui procurer une aide financière pour subsister jusqu'à ce que le jugement intervienne. Ces deux mesures sont véritablement du ressort du canton, et le Grand Conseil est donc parfaitement habilité à les accepter ce soir.

Sur le plan fédéral, nous avons retenu principalement quatre mesures concrètes :

- assujettir à la sécurité sociale l'ensemble du personnel engagé par des diplomates ou des fonctionnaires internationaux;

- régir cette situation par un texte d'ordonnance - reprenant les directives émises par le Département fédéral des affaires étrangères - en tant que décision du Conseil fédéral, ce qui est tout de même plus contraignant;

- adapter le texte de ces directives au contenu du contrat-type du droit cantonal, auquel elles ne font que renvoyer. Il est tout de même choquant que les chiffres de ces deux documents diffèrent complètement;

- mettre sur pied à Genève une agence de recrutement, comme l'Otan l'a fait à Bonn, qui servira d'intermédiaire entre employés et employeurs. Cette mesure novatrice garantira un équilibre entre les partenaires contractants, en l'occurrence l'agence et les employeurs. Ainsi, nous éviterons au personnel engagé, souvent originaire de pays où les conditions de vie difficiles ne leur donnent aucune marge de manoeuvre, d'accepter des conditions de travail abusives.

Le Grand Conseil se doit de répondre à l'appel de ces esclaves des temps modernes s'il compte donner une image positive de Genève. En nommant une instance de médiation, le Conseil d'Etat a fait un pas dans cette direction. Ce soir, nous vous proposons d'aller plus loin.

C'est pourquoi sachant pertinemment que nos deux propositions seront combattues, il m'importe de parler ouvertement de cette situation scandaleuse et des mesures à prendre pour y remédier.

En conclusion, je souhaite vous avoir fait partager l'état d'esprit positif qui anime les auteurs et vous invite à accueillir favorablement cette motion et cette résolution.

M. Pierre Froidevaux (R). Le groupe radical partage les préoccupations des motionnaires et des auteurs de la résolution 295. En effet, chacun d'entre nous, quelle que soit son obédience politique, poursuit le but de travailler à la justice sociale. Cependant, les mesures à prendre, les moyens engagés et la foi en un projet peuvent différer selon nos sensibilités. Nous clamons avec vous l'universalité des droits de l'homme et nous nous engageons politiquement à aboutir au même but que vous. Néanmoins, nous privilégions une voie plus consensuelle, propre à mieux conforter nos espérances.

Les difficultés rencontrées par nos fonctionnaires internationaux et leurs accompagnants sont de notoriété publique et n'ont évidemment pas échappé à notre Conseil d'Etat. Certaines situations sont des drames d'autant plus indicibles que les personnes prétéritées parlent parfois une langue étrangère incomprise à Genève. Pourtant, ces victimes remplissent les conditions fixées par l'Hospice général et bénéficient d'emblée du soutien public. A cet égard, les députés contrôleurs aux comptes, particulièrement ceux de l'Hospice général, connaissent parfaitement les données du problème.

Néanmoins, notre action politique doit viser un but positif, en ce qui concerne l'aspect particulier des relations de travail, Nous avons à coeur de donner une image accueillante de Genève, en acceptant l'autre avec ses différences. Or, la clarification de nos relations réciproques implique, pour le moins, un temps de réflexion commune.

Genève est une ville de paix où de nombreux conflits sont résolus. Ne prenons pas de mesures volontaristes et pugnaces ! Montrons l'exemple d'une conciliation efficace à tous niveaux, en soutenant la mise en place par le Conseil d'Etat de cette instance de médiation, nommée «amiable compositeur», personnifiée par Me Maurice Aubert, ancien président de notre Conseil et ancien vice-président du CICR. Son rôle consiste à relever les différends impliquant des personnes bénéficiant de privilèges et de l'immunité diplomatique. Pour mener à bien sa tâche, il dispose également des avis et conseils de MM. Francis Blanchard, ancien président du Bureau international du travail, et Laurent Marti, ancien délégué au CICR.

Par ailleurs, je salue l'immense travail préliminaire fourni par notre collègue, Mme Anita Cuénod, qui attirait notre attention récemment sur ce problème. Je me félicite également de la rapide réponse de notre exécutif.

Toutefois, cette ambassade auprès des fonctionnaires internationaux est délicate. Nos personnalités locales affrontent parfois des situations relevant de cultures et de moeurs très dissemblables. Elles doivent en tenir compte au cours de leur réflexion concernant des situations, dont la teneur est parfois si dramatique qu'elle provoque leur ire. En effet, une véritable reconnaissance mutuelle constitue la condition préalable indispensable à une bonne compréhension de nos lois.

Finalement, nos lois et moeurs suivent la courbe du temps ! Qui aurait pu imaginer, il y a cinquante ans, un évêque annonçant sa paternité «urbi et orbi» et, de surcroît, bénéficiant du soutien de ses ouailles ?

En définitive, notre groupe n'entrera pas en matière sur ces deux projets et engage ce Grand Conseil à en faire autant. Par contre, il vous propose de suivre attentivement l'action de notre «amiable compositeur» et d'étudier rapidement les propositions qu'il ne manquera pas de nous faire parvenir.

M. Michel Halpérin (L). J'aimerais simplement ajouter aux propos excellents de notre collègue M. Froidevaux quelques éléments importants à mes yeux.

Naturellement, que l'esclavagiste soit diplomate, fonctionnaire international ou simplement citoyen, personne n'est insensible à la situation des personnes qu'il réduit à un état confinant à l'esclavage. Toutefois, les solutions doivent être en harmonie avec le but visé. Or, ce n'est pas le cas ce soir.

En effet, même si la résolution s'oriente bien dans cette direction, je relève qu'une telle démarche entreprise auprès de Berne serait, à rigueur des accords de siège, irrémédiablement vouée à l'échec.

Quant à la proposition de motion, j'ai le sentiment que nous abordons le problème de manière inadéquate. En effet, inviter le Conseil d'Etat à accorder des conditions particulières d'octroi de permis de travail ou une aide financière de l'Hospice général à des travailleurs de l'économie domestique, sous prétexte qu'il s'agit d'employés de missions diplomatiques ou de fonctionnaires internationaux, alors que les employés domestiques de citoyens ordinaires de ce canton ne pourraient y accéder, créerait une catégorie nouvelle dans les inégalités de traitements.

Paradoxalement, ce statut privilégierait uniquement les employés domestiques des missions diplomatiques ou ambassades, victimes de mauvais traitements. Or, nous savons pertinemment qu'il se trouve un certain nombre de clandestins dans cette économie, en dehors des missions diplomatiques ou des ambassades, qui, le cas échéant, ne bénéficieraient pas de l'octroi d'un permis de travail.

De sorte que nous devrions créer progressivement une nouvelle catégorie de permis de travail, destinée, contre toute logique, à permettre à ceux qui n'ont plus de travail de rester en Suisse, alors que ceux qui en auraient ne pourraient pas le faire. Nous devrions alors rétablir cette inégalité de situation. C'est ce que j'appelle une réponse inadéquate à un problème réel.

C'est la raison pour laquelle nous devons nous concentrer sur les résultats de cette mission nommée «amiable compositeur», qui en est encore à ses balbutiements, avant de rechercher de nouvelles réponses, dont nous avons de surcroît la certitude qu'elles n'en sont pas vraiment.

Voilà pourquoi, le groupe libéral, comme le groupe radical, n'entrera pas en matière sur ce projet.

Mme Maria Roth-Bernasconi (S). L'«esclavage moderne» existe dans une ville comme Genève qui accueille les organisations internationales protégeant les droits de l'homme et de la femme.

Malheureusement, il ne suffit pas de clamer l'universalité des droits de l'homme et de la femme. Je déplore que vous autres, Mesdames et Messieurs de l'Entente, refusiez ces propositions de motion et de résolution, et cela uniquement parce qu'elles ne viennent pas de votre bord. (Brouhaha.)

En effet, je trouve vos arguments particulièrement mesquins, lorsque vous avancez que l'octroi de permis relève d'une inégalité de traitement, alors qu'il est prévu par la loi fédérale. A mes yeux, dès lors qu'il existe une inégalité de fait, un traitement inégal peut également s'appliquer.

De surcroît, nos propositions stipulent clairement que ces permis seront octroyés uniquement en cas de litige. Il est nécessaire de prendre conscience, au vu des risques encourus par les plaignants, lorsqu'ils ont le courage d'affronter un tribunal, qu'il s'agit de personnes extrêmement maltraitées. Nous savons pertinemment que les cas relatés dans la presse ne représentent que la pointe de l'iceberg.

C'est pourquoi je vous demande d'agir concrètement en acceptant ces deux propositions, afin d'éviter que cette situation honteuse ne porte un grave préjudice à la renommée de la Genève internationale !

Mme Anita Cuénod (AdG). Ayant écouté les propos de M. Michel Halpérin, j'ai le sentiment qu'il n'a pas bien compris mes précédents arguments.

En effet, les cas où l'on demande une autorisation de travail pour une personne en litige, victime de très mauvaises conditions de travail, sont suffisamment graves pour qu'elle ose porter plainte et entamer une procédure judiciaire.

Or, si cette personne demande une autorisation de séjour afin de demeurer à Genève le temps nécessaire pour mener à bien cette procédure, il paraît logique qu'elle puisse subvenir à ses besoins et bénéficier d'une autorisation de travail. Cette proposition d'une grande simplicité est du pur ressort des droits de l'homme. Pourtant, je pense que vous ne l'avez pas comprise.

M. Bernard Clerc (AdG). Le refus des groupes libéraux et radicaux d'entrer en matière sur ces propositions de motion et de résolution est une grave erreur.

Le développement du secteur international à Genève ne peut se fonder sur l'exploitation éhontée, dénoncée régulièrement par le Syndicat sans frontières, d'une certaine catégorie de personnel.

Je vous citerai un cas parmi des dizaines d'autres : la situation d'une jeune Philippine, engagée comme employée de maison au tarif de 200 dollars mensuels. Dès son entrée en service, son employeur lui a confisqué son passeport. Elle travaille dix-huit heures par jour, sans vacances, ni week-end, et, n'ayant pas de chambre personnelle, elle dort dans celle des enfants. Je tairai la nationalité de l'ambassadeur. En effet, il m'importe peu qu'il soit africain, asiatique, sud-américain ou européen, seules les conditions imposées à son personnel m'intéressent ce soir.

Par ailleurs, je tiens à relever que, lors de l'attribution du siège de l'OMC à Genève, la ville de Bonn possédait dans son dossier des articles de presse relatifs à ce genre de cas et en usait pour faire valoir sa candidature !

Indépendamment de la défense des conditions de travail de ce personnel domestique, nous n'avons aucun intérêt à faire perdurer cette situation. C'est pourquoi nous vous demandons d'accepter et d'étudier ces projets de motion et de résolution en les renvoyant en commission.

Par ailleurs, j'aimerais signaler à M. Froidevaux que la voie consensuelle qu'il prône a été utilisée depuis plusieurs années déjà. En effet, la mission suisse auprès des organisations internationales était censée jouer ce rôle d'intermédiaire. Malheureusement, les résultats obtenus ont été très décevants.

En ce qui concerne la résolution, j'aimerais répondre à M. Halpérin. Je pense que, même si la démarche à entreprendre à Berne est vouée à l'échec, il demeure important d'exprimer une volonté politique à ce sujet.

Au cas où la majorité de ce parlement refuserait d'entrer en matière, nous considérerons qu'elle approuve les pratiques scandaleuses de certains employeurs du secteur international.

Le cas échéant, nous estimerons que les luttes menées par le Syndicat sans frontières, y compris la dénonciation publique de certains agissements, se justifieront pleinement. A ce titre, nous nous trouverons naturellement du côté de l'exploité et non de l'exploiteur.

En ce qui nous concerne, nous tenons à garder, quelles qu'en soient les conséquences pour la Genève internationale, l'image d'une ville solidaire et non d'une ville où règne l'exploitation !

M. Bénédict Fontanet. Je suis un peu surpris du chantage de M. Clerc... (Huées, sifflets.) Il nous menace, si nous n'acceptons pas ces propositions, de manifester sur la place publique pour dénoncer «ces horribles employeurs des missions internationales» !

En dépit des affirmations de l'un des préopinants, je n'ai pas le sentiment de vivre dans un canton où règne l'esclavagisme. En réalité, dans la majorité des cas, les missions diplomatiques et les fonctionnaires internationaux traitent convenablement leurs employés. Il s'agit donc de ne pas faire un amalgame douteux et détestable.

Certes, quelques cas absolument scandaleux méritent d'être dénoncés. Ils constituent toutefois des exceptions. Il est erroné de dire que, dans le secteur international, le personnel est plus maltraité que dans les autres secteurs genevois, qui comportent également des employeurs méritant le traitement que vous souhaitez réserver à ceux du secteur international.

Cependant, il est difficile de régler les situations anormales d'un personnel employé par des diplomates ou fonctionnaires internationaux, au vu des processus juridique, politique et de négociation, existants dans ce domaine.

Par voie de conséquence, nous sommes convaincus que le Conseil d'Etat, dans la grande sagesse qui le caractérise, a mis sur pied une instance de médiation qui fera ses preuves. Le médiateur et les personnes chargées de l'assister venant d'être nommés, nous attendrons les résultats de leur travail, avant de nous lancer plus avant dans d'autres «aventures».

De surcroît, les mesures proposées ce soir nous semblent totalement inadéquates. Tout d'abord, vous proposez d'octroyer des permis humanitaires aux plaignants qui se voient révoquer leur carte de légitimation. Or, vous savez pertinemment que, dans de tels cas, l'office cantonal de la population et les autorités genevoises accordent souvent des prolongations de permis, afin de permettre aux plaignants de séjourner à Genève le temps nécessaire à l'obtention de permis humanitaire.

En outre, vous proposez d'octroyer des permis sur le contingent cantonal. Or, sauf erreur de ma part, ce dernier est de cinq cent trente-cinq nouvelles unités de permis annuels et il se justifie principalement par des motifs économiques. En effet, ce contingent suffit à peine à satisfaire les besoins de l'économie genevoise. Il serait donc inadéquat de l'utiliser pour des raisons purement humanitaires, sauf dans des cas exceptionnels. Sur ce plan, les propositions faites dans la motion ne sont pas réalistes.

Par ailleurs, dans la proposition de résolution, vous remettez en cause, purement et simplement, l'ensemble du système actuel. Loin de moi l'idée de dire qu'il est parfait et non modifiable ! J'observe toutefois dans votre première invite que le personnel employé par des diplomates ou des fonctionnaires internationaux y est mieux traité que ses employeurs, bénéficiant pourtant d'immunité. En effet, selon leur statut, ces derniers doivent quitter le canton, à moins de prendre leur retraite à Genève, dès lors que leur fonction s'achève. Il serait donc parfaitement illogique que leur personnel soit mieux traité qu'ils ne le sont !

Dans ce domaine délicat, chaque situation doit être traitée par la concertation et la négociation, et non par l'adoption de mesures contraignantes.

C'est pourquoi notre groupe n'entrera pas non plus en matière sur les deux projets qui nous sont soumis ce soir.

M. Michel Halpérin (L). Je suis tout de même un peu surpris que les bonnes intentions affichées par les promoteurs de ces textes s'effritent aussitôt que nous ne sommes pas de leur avis ! Faut-il entendre par là que ceux qui posent le problème proposent forcément des solutions adéquates et que ceux qui n'y adhèrent pas immédiatement sont non seulement contre eux, mais sont, de surcroît, les complices objectifs des exploiteurs ?

C'est la réponse que plusieurs d'entre vous m'ont faite à l'instant. Je m'en étonne sans excès, mais avec un peu de regret tout de même. En effet, j'avais pris la peine de dire que je n'étais pas plus insensible que vous au destin de certaines de ces victimes.

En revanche, je trouve un peu singulier que vous n'ayez pas remarqué que ces victimes sont le plus souvent employées par ces mêmes ambassades qui ne paient pas leurs dettes aux entrepreneurs genevois. Par conséquent, elles posent des problèmes d'une nature différente, mais finalement comparable. Il s'agit, en effet, de pays qui manquent apparemment de budget pour faire face à leurs obligations.

Certains jours, leur situation vous émeut davantage. Aujourd'hui, sous prétexte que certains d'entre eux se conduisent mal, vous prétendez mettre l'ensemble de la communauté internationale bénéficiant de l'hospitalité de nos murs sous une sorte de tutelle et de contrôle. C'est une notion de la non-hospitalité incriminée qui me paraît parfaitement dangereuse pour l'image d'une Genève accueillante à l'égard des organisations internationales et des missions diplomatiques. Il n'est peut-être pas superflu ce soir de répéter que la plupart d'entre elles se conduisent admirablement bien.

Il est vrai que cette politique d'amalgame consistant à noyer les fautifs dans l'anonymat des innocents est un mauvais procédé politique, dommageable pour l'image genevoise et nos relations avec les organisations internationales et les missions diplomatiques. A ce titre déjà, même si votre projet était adéquat, il mériterait, dans la recherche des intérêts supérieurs du canton, d'être rejeté.

Comme il se trouve que, de surcroît, il est inadéquat et que, par gentillesse pour les auteurs du projet, je m'en étais tenu à cette remarque tout à l'heure, vous pouvez dès maintenant le rejeter, sans regret.

Mme Christine Sayegh (S). J'aimerais recentrer le débat au niveau du conflit de travail. Dès lors qu'un employé subit de mauvaises conditions de travail, il peut en parler d'abord au niveau d'une conciliation, en s'adressant au tribunal des prud'hommes. S'il est au bénéfice d'une carte de légitimation, cela constituera un frein énorme. En effet, aussitôt qu'il souhaitera saisir les autorités compétentes, sa carte de légitimation lui sera retirée. Il ne disposera alors plus de moyens suffisants pour subsister et, dans la majorité des cas, sera renvoyé de Suisse.

L'essentiel, tant dans cette motion que dans cette résolution, consiste à garantir des moyens de défense en cas de mauvaises conditions de travail faites à l'employé d'une ambassade ou d'une mission diplomatique. Sans qu'il s'agisse de la majorité des cas, certains abus sont particulièrement extrêmes à Genève. Aussi, est-il nécessaire de prendre en considération cette motion et cette résolution.

Par la suite, s'il s'avérait que les permis de séjour à octroyer sont incompatibles avec le droit supérieur du canton, il serait possible d'y apporter des modifications. En aucune façon, je ne pense qu'il faille rejeter cette motion et cette résolution d'un revers de main, comme le suggérait M. Halpérin.

Mme Anita Cuénod (AdG). Tout d'abord, j'aimerais répondre à M. Bénédict Fontanet. En effet - Mme Christine Sayegh le mentionnait déjà dans ses propos - les employés domestiques engagés par des missions diplomatiques ou des fonctionnaires internationaux sont peu nombreux à être concernés par ces propositions. Il s'agit toutefois de situations, dont la gravité justifie pleinement notre proposition d'accorder des autorisations de séjour et de travail pendant les litiges. Ces mesures exceptionnelles ne s'appliqueront pas à la majorité des cas.

Par ailleurs, Monsieur Fontanet, vous soulignez le fait que le Conseil d'Etat octroie déjà des délais supplémentaires à ces personnes, afin qu'elles demeurent à Genève pendant la procédure judiciaire. Nous le savons pertinemment, mais nous souhaitons simplement que les intéressés puissent subvenir avec dignité à leurs besoins en travaillant pendant cette période.

Il semble, Monsieur Fontanet, que vous ne comprenez pas exactement notre position. Je vais donc résumer la résolution.

Cette résolution vise essentiellement à combler le flou juridique entourant les conditions de travail dans le but de clarifier, tant que faire se peut, les responsabilités. Elle vise aussi à donner quelques pistes nouvelles et intéressantes à explorer d'abord, puis à réaliser, comme la structure mise en place pour l'Otan à Bonn !

En s'inspirant de ce modèle pertinent, Berne pourrait mettre sur pied une agence de recrutement responsable, non pas du choix des employés, mais des conditions de travail et des contrats.

Il est urgent de conférer un statut clair et précis aux personnes travaillant dans les missions diplomatiques ou au service de fonctionnaires internationaux. Il faut qu'ils puissent bénéficier d'un permis B hors contingent, ainsi que d'un statut issu d'une ordonnance fédérale et non plus d'une directive plus complaisante que contraignante.

Enfin, en attendant que ces invites prennent forme et deviennent des projets concrets, il nous semble impératif que le contenu des directives du Département fédéral des affaires étrangères soit revu et corrigé et, notamment en ce qui concerne le contrat-type cantonal, qu'il y figure tel qu'il est établi actuellement et non avec les chiffres datant d'avant 1986.

Et last but not least, que l'application de ces directives soit contrôlée - ce qui me semble quand même être un strict minimum - en particulier en matière de couverture sociale.

Mme Claire Chalut (AdG). J'ignorais qu'à partir de ce soir l'esclavagisme était entré en vigueur à Genève, ville où se tient annuellement la Conférence des droits de l'homme. C'est pourquoi je pose une question et que ceux qui possèdent la science infuse y répondent ! Comment peut-on accueillir régulièrement ladite conférence dans un canton où certains employés de missions diplomatiques ou de fonctionnaires internationaux doivent faire, plusieurs jours durant, la grève de la faim, pour que l'on respecte leurs droits et qu'ils obtiennent leur dû ?

Etant donné que le Conseil d'Etat est saisi de ce problème depuis plusieurs années, quand prendra-t-il des mesures véritablement efficaces ? Il ne s'agit pas d'attendre que les employeurs ne respectant pas les règles élémentaires de travail deviennent plus nombreux et représentent la majorité pour réagir !

Que ceux qui sont réellement attachés aux droits de l'homme soient conséquents avec eux-mêmes, en les respectant pleinement !

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Autant vous dire à quel point je regrette ce type de débat sur un projet aussi important ! En effet, nous souhaitions simplement attirer l'attention sur ces situations problématiques qui ne représentent peut-être pas, Monsieur Fontanet, la majorité des cas, mais qui n'en existent pas moins. Vous ne nierez pas les cas relatés dans la presse !

Actuellement, certains employés, engagés par des missions diplomatiques ou des fonctionnaires internationaux, ne sont ni reconnus, ni respectés !

Messieurs Halpérin et Fontanet, si le contenu de cette motion et de cette résolution ne vous satisfait pas, il est toujours possible d'en discuter en commission et de l'améliorer. Dans l'intervalle, le Conseil d'Etat sera à même d'estimer l'efficacité des mesures qu'il entend appliquer.

C'est pourquoi, si vous jugez ce problème sérieux, comme vous l'avez dit, votre devoir est d'accepter le renvoi en commission ! Dans le cas contraire - et je ne procède à aucun chantage - je conclurai que vous en niez l'existence même !

En ce sens, je ne partage pas l'opinion de Mme Roth-Bernasconi qui suppose que ce projet vous irrite parce qu'il n'est pas issu de vos rangs. A mes yeux, nous n'avons simplement pas réussi à vous convaincre de la réalité de cette situation problématique. En dépit de ces considérations, je plaide pour un renvoi en commission. Il s'agit d'un petit pas qu'il vous sera aisé de faire !

M. Pierre Vanek (AdG). Beaucoup d'arguments ayant déjà été développés, contrairement à la préopinante, Mme Fabienne Bugnon, je ne regrette pas ce débat. Par contre, je regrette qu'une majorité de ce Grand Conseil soit insensible, malgré ses dires, à certains abus notoires relevant effectivement des droits de l'homme, perpétrés par des employeurs de missions diplomatiques ou des fonctionnaires internationaux à l'encontre de leur personnel, et qu'elle refuse d'entrer en matière sur les mesures concrètes et élémentaires que nous proposons.

J'ajouterai à l'excellente formule de Me Halpérin, selon laquelle les députés de la gauche accusent leurs collègues de droite d'être des complices objectifs des exploiteurs, que certains d'entre eux sont également les complices subjectifs d'employeurs, maintenant leur personnel dans des conditions insoutenables ! Ce qui est plus grave et n'arrange pas leur cas !

Par ailleurs, M. Fontanet nous accuse de procéder à des amalgames douteux. A ce titre, il souligne que le contingent concernant les permis de travail suffit juste aux besoins économiques de Genève et qu'il est donc inadéquat d'octroyer de nouveaux permis pris sur ce contingent. Il affirme également que la majorité des employeurs des missions diplomatiques ou fonctionnaires internationaux traite parfaitement bien leurs employés. Par conséquent, puisqu'elles s'appliqueraient à un nombre de cas très restreint, nos propositions ne peuvent poser aucun problème relatif au contingent !

A mon avis, ces projets devront être adoptés, soit par ce Grand Conseil, soit par un futur Grand Conseil, dont la majorité sera légèrement plus sensible aux conditions inhumaines subies par certaines personnes dans notre canton.

M. Bernard Clerc (AdG). Je souhaite également relever à votre intention, Monsieur Halpérin, que j'ai procédé à un amalgame uniquement parce que vous rejetiez le renvoi de nos propositions en commission. En fait, il est pour le moins curieux que vous refusiez d'entrer en matière tout en admettant que le problème existe !

Par ailleurs, je suis surpris que vous sous-entendiez que nos propositions pourraient éventuellement fâcher le personnel des missions diplomatiques ou des organisations internationales. Etant donné que la motion propose uniquement des mesures concrètes, permettant au personnel lésé de se défendre, j'estime qu'en tant qu'avocat vous devriez favoriser des mesures mettant les justiciables sur un pied d'égalité !

Malheureusement, je crains que la seule chose qui vous importe dans ce débat sont les conditions-cadre pour les organisations internationales. Vous n'avez rien à faire des quelques «zébus» vivant dans des conditions pitoyables pour autant que les conditions-cadre pour l'implantation de nouvelles organisations internationales soient maintenues. Voilà votre position de fond et nous ne l'acceptons pas !

Je vous le répète, nous continuerons à défendre ces catégories de travailleurs. Si vous ne voulez pas résoudre ce problème, les articles de presse continueront à alimenter les dossiers des villes concurrentes de Genève, que vous le vouliez ou non !

Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). J'aimerais également m'exprimer sur le problème de l'amalgame et de la généralisation. Je pense que les combats pour la justice se mènent presque toujours sur la base d'exploitations et d'injustices commises à l'égard d'un petit nombre. En ce qui concerne le viol, par exemple, la majorité des femmes n'en sont pas l'objet... (Brouhaha. L'oratrice est interrompue.)

La présidente. Monsieur Godinat, je vous en prie ! Votre collègue est en train de s'exprimer. Les échanges oratoires entre MM. Godinat, Grobet et Dupraz n'ont rien à faire dans ce débat !

Des voix. Dupraz est un salopard !

La présidente. M. Dupraz, veuillez modérer vos expressions, s'il vous plaît. Je vous prie de retourner à votre place afin que Mme Deuber-Pauli puisse s'exprimer ! Eu égard au débat et au problème délicat abordé, je vous prie de vous calmer !

Mme Erica Deuber-Pauli. Les combats pour la reconnaissance des droits des victimes d'injustices flagrantes reposent parfois sur une minorité de cas. Dans le cas du viol, par exemple, les victimes ne représentent pas la majorité. C'est à partir d'un petit nombre de cas que le caractère criminel du viol a été reconnu après de longues années !

Depuis de nombreuses années, le combat que mène le Syndicat sans frontières, sans obtenir d'autres réactions de la classe politique genevoise que quelques interventions clairsemées, mérite mieux que les affrontements qui ont lieu dans cette salle. C'est à ce titre que je demande que cette motion et cette résolution soient prises en considération.

La plupart d'entre vous n'entendent parler des victimes impliquées dans ces conflits du travail - en général, il s'agit de femmes - que par les journaux. Il faut savoir qu'elles sont nombreuses à subir des dommages, des traumatismes et des séquelles de longue durée. Actuellement, elles ne sont considérées que par le Syndicat sans frontières et quelques assistants sociaux. Cette situation ne fait pas honneur à la communauté genevoise.

C'est pourquoi, au nom de l'esprit de Genève et du respect de la personne humaine, quelle que soit sa provenance, célébrés à l'occasion du cinquantième anniversaire de l'ONU, nous nous devons de prendre en considération ces propositions !

A plusieurs reprises cet hiver, au cours des débats portant sur la célébration du cinquantième anniversaire de l'ONU, certaines personnalités de la Ville m'ont demandé s'il existait un moyen de faire taire M. Luis Cid, fondateur de ce syndicat combatif, afin de ne pas entacher les cérémonies de célébration dudit anniversaire. J'ai répondu à chacun qu'il était accessible et je leur ai donné son numéro de téléphone.

J'espère bien qu'aujourd'hui, dans un climat qui fasse honneur à Genève, nous puissions entamer avec le Syndicat sans frontières un débat sur les problèmes abordés ce soir !

M. René Longet (S). J'aimerais ajouter un mot à l'intention de M. Halpérin qui nous a débité, tout à l'heure, quelques sophismes de son crû. Monsieur Halpérin, vous nous accusez de créer un amalgame entre les situations correctes et les abusives. Or, si ce reproche peut nous être adressé, il vaut tout aussi bien pour le Conseil d'Etat. En effet, ce dernier a non seulement pris en considération ces situations, mais les a jugées suffisamment graves pour mobiliser trois personnalités. De deux choses l'une, soit le problème existe et nous sommes tous concernés, soit il n'existe pas et il s'agit d'un mauvais raisonnement !

D'autre part, vous avez vous-même employé les termes d'esclavage et d'esclaves au cours de votre première intervention, c'est donc que vous reconnaissez, avec nous, que certaines situations sont intolérables.

Par conséquent, vous ne pouvez pas dire que nos propositions sont inutiles, les refuser d'un revers de main et, la conscience tranquille, dormir sur vos deux oreilles avec le sentiment d'avoir servi «la patrie qui vous a confié ses destinées».

Monsieur Halpérin, soit vous reconnaissez l'existence du problème et votre devoir est de chercher à le résoudre, soit vos interventions tentent, en réalité, d'escamoter ces situations ! Je ne tiens pas à vous faire un procès d'intention, mais j'aimerais avoir affaire à des arguments plus substantiels.

D'autre part, j'aimerais vous dire, puisque vous vous êtes particulièrement exprimé sur ce sujet, ainsi qu'aux autres, que vous vous êtes contentés de démolir les différentes propositions sans jamais entrer en matière.

En effet, six propositions vous sont faites. Nous avons analysé le problème et avons pris la peine, en tant que parlementaires de milice, d'étudier de près le sujet. Notre travail a abouti à l'élaboration de deux propositions du ressort du canton et quatre de celui de la Confédération. Or, vous affirmez, sans argumenter réellement sur ces propositions, que cela n'a aucune valeur !

C'est pourquoi je dis à tous ceux qui s'apprêtent à voter contre nos propositions que la solution proposée par le Conseil d'Etat est une demi-mesure. Elle est insatisfaisante et hybride. En somme, on admet l'existence d'un problème grave, sans se donner les moyens de le résoudre. En revanche, nous proposons des moyens d'action concrets que vous suggérez d'écarter d'un revers de main. Cela relève d'une attitude de pharisiens. Nous espérons que la majorité ne la partage pas !

Enfin, je pensais que nous avions appris à dépasser le type d'affrontement qui a lieu ce soir. Ces derniers mois, nous avions eu des expériences heureuses et avions trouvé, tant bien que mal, des solutions tous fronts politiques confondus.

D'ailleurs, les partisans de solutions concrètes se sont félicités des efforts consentis de part et d'autre. Ce soir, à cause de certains discours manichéens préparés à l'avance - qui ne tiennent ainsi pas compte de notre argumentation - nous nous retrouvons en pleine guerre de tranchées, ce qui, à vous entendre, vous déplaît !

En réalité, les véritables victimes de cette guerre de tranchées ne sont pas les classes politiques qui se disputent. Pour ma part, j'en vois deux :

- Les premiers touchés sont naturellement ces esclaves, ces employés maltraités par leurs employeurs, en l'occurrence des missions diplomatiques et des organisations internationales. Or, un seul esclave est déjà un esclave de trop !

- La seconde victime est, naturellement, la Genève internationale et son image.

En conclusion, nos propositions de solution sont réalistes. Acceptez au moins d'en discuter en commission !

M. Michel Halpérin (L). Je ne souhaite pas alimenter ce flot d'attention que j'ai involontairement suscité. D'un côté, les propos bienveillants, persuasifs et attentionnés de M. Longet tentent de me faire quitter mes sophismes et mon pharisaïsme naturels. De l'autre côté, il y a les provocations de M. Clerc, à la limite de la grossièreté, qui, comme M. Vanek, a le droit de fantasmer et de me prêter les turpitudes qu'il lui plaît. En somme, ces propos me sont indifférents.

Puisqu'il le faut, je souhaite ajouter quelques mots sur le contenu des propositions qui nous sont faites ce soir.

La résolution qui nous est proposée, Monsieur Clerc, tend à assujettir les organisations internationales et les missions diplomatiques à un régime qui n'est pas celui des conventions de siège. En ce sens, la résolution n'est pas acceptable. Elle constitue ce que j'appelle un effort de mise sous tutelle des organisations internationales et des missions diplomatiques. C'est le sens qu'il fallait donner à mon précédent propos, puisque vous avez besoin que je l'explicite !

Quant à la motion, elle ne vise pas directement les missions diplomatiques. Elle vise la politique d'octroi de permis de séjour et de travail à Genève. Je prétends que l'on ne réforme pas une politique aussi difficile sur de tels cas. Cela ne signifie pas, bien entendu, que nous soyons insensibles à la problématique posée par chacun des individus maltraités !

En revanche, ce que je ne suis pas prêt à accepter, Mesdames et Messieurs, au titre des leçons d'humanitarisme que vous pensez donner, le coeur palpitant dans une main et les pavés dans l'autre, c'est que vous nous fassiez des procès d'intention sur notre aptitude à ressentir !

Vous n'avez pas, une fois de plus, le monopole de la sensibilité. Nous sommes aptes, comme vous et parfois mieux que vous, à le faire. Durant ces dernières années, l'Entente a montré qu'elle savait choisir parfois la sensibilité au détriment des choix économiques. Il ne faut pas non plus nous faire prendre, à chaque fois, des vessies pour des lanternes !

Nous ne voulons pas, à l'occasion de ces scandales occasionnels et ponctuels que vous avez dénoncés, recréer une politique différente en matière d'organisations internationales et de missions diplomatiques.

Pour finir, Monsieur Longet, nous voulons donner une chance à une politique qui vient d'être amorcée et qui n'a encore fait ses preuves ni dans un sens, ni dans l'autre. Cette précipitation, cette bousculade à laquelle vous nous conviez, montrent bien le peu de foi que vous avez vous-même dans la véritable portée de ces textes.

Mme Barbara Polla (L). Dans la lignée des précédents propos, j'aimerais souligner que, contrairement aux apparences, la prise en considération du problème abordé ce soir est totalement partagée par notre groupe. Seuls les moyens abordés pour régler le problème nous différencient.

La solidarité est une valeur éminemment libérale, même si ce terme est généralement associé à d'autres partis. (Rires.)

Nous sommes confrontés à un problème concernant un petit nombre de personnes, mais nous sommes parfaitement conscients qu'il est très grave pour les intéressés.

A mes yeux, la seule raison qui nous oppose sur ce sujet consiste en ce que les mesures proposées, que vous taxez de demi-mesures, proviennent du Conseil d'Etat. Au vu de la composition actuelle du Conseil d'Etat, vous choisissez fondamentalement la méfiance envers ses propositions, alors qu'elles n'ont même pas encore été testées ! En revanche, nous faisons confiance au Conseil d'Etat et préférons attendre les résultats de ces mesures.

En réalité, si une «guerre de tranchées» se déroule véritablement ce soir, le problème abordé n'en est pas la cause, puisque des solutions concrètes sont d'ores et déjà mises en place pour le résoudre. Au fond, seules les attitudes de confiance ou de méfiance envers le Conseil d'Etat déterminent la divergence de nos choix. Notre groupe choisit, bien entendu, la confiance envers le Conseil d'Etat !

M. Bénédict Fontanet. Le fait de ne pas être d'accord avec les invites de la motion et de la résolution ne signifie pas que nous soutenons les exploiteurs et que nous nous faisons les complices de personnes n'agissant pas convenablement vis-à-vis de leurs employés.

Tout comme vous, nous dénonçons les excès. Quant à soutenir et renvoyer en commission une résolution et une motion qui proposent des solutions qui ne sont ni réalistes, ni raisonnables sur le plan juridique, et qui ne tiennent pas la route... Mesdames et Messieurs, cela n'est tout simplement pas sérieux !

Monsieur Longet, vous avez à coeur le consensus et souhaitez que l'on ne travaille pas par le biais des clivages politiques que vous vous plaisez à dénoncer. Très bien ! Présentez-nous des propositions de motion et de résolution dont les invites tiennent raisonnablement compte de ce qui peut être fait dans ce domaine délicat et je m'engage personnellement à la contresigner.

En revanche, je ne peux m'engager à contresigner un texte dont les tenants et aboutissants ne tiennent pas la route, ne sont pas sérieux et ne correspondent pas aux réalités politiques et juridiques.

Avant d'aller plus avant sur ce sujet, il m'apparaît indispensable que nous constations d'abord les résultats de la politique mise en place par le Conseil d'Etat.

Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Je peux admettre que la gauche n'a pas le monopole de l'humanitarisme mais, de son côté, la droite n'a pas non plus le monopole du savoir ! Or, Monsieur Fontanet, vous affirmez, sans le prouver, que cette motion et cette résolution ne tiennent pas debout. Il est évident que, si tel était le cas, nous pourrions toujours en discuter en commission.

Si vous admettez l'existence de ce problème d'esclavage pour certaines personnes à Genève, vous pouvez renvoyer nos propositions en commission.

Par ailleurs, s'il ne faut pas légiférer parce que seule une minorité de cas est concernée, nous pourrions également abolir le code pénal puisqu'il prend en considération de nombreux cas particuliers. Nous pourrions également laisser courir tous les criminels dans la nature !

En conclusion, Monsieur Fontanet, j'accepte volontiers d'entendre vos arguments juridiques en commission.

M. Pierre Vanek (AdG). J'aimerais ajouter quelques mots pour... (Chahut.) Ce débat est important et nous irons jusqu'au bout ! La buvette est disponible pour ceux qui ne sont pas intéressés et estiment qu'ils ont mieux à faire.

A l'instant, Mme Polla plaidait pour que nous fassions confiance au Conseil d'Etat, en attendant les résultats des mesures mises en place sur ce dossier. Elle estimait donc que nos propositions étaient prématurées.

Pourtant, cette situation existe depuis de nombreuses années à Genève et on l'a simplement laissé pourrir. Il a fallu attendre que le Conseil d'Etat soit poussé aux dernières extrémités pour qu'il réagisse. En réalité, l'affaire devenait trop visible. Elle dérangeait les milieux concernés, non pas à cause des problèmes concrets rencontrés par les victimes maltraitées, mais parce qu'elle nuisait à l'image de la Genève internationale. C'est alors seulement que le Conseil d'Etat a pris une demi-mesure. Est-ce une raison valable pour faire confiance au gouvernement? Je ne le crois pas !

A l'instant, M. Fontanet nous invectivait. Il affirmait, sans le démontrer en aucune façon, que nos propositions n'étaient pas raisonnables et qu'elles ne tenaient pas debout. Or, comme l'a souligné M. Longet, nos propositions sont issues d'une réflexion intelligente sur le sujet. Certes, elles peuvent faire l'objet d'améliorations et c'est pourquoi nous nous devons de les renvoyer en commission.

Par ailleurs, permettez-moi de sourire, voire de ricaner, lorsque Mme Polla avance que la solidarité est une vertu éminemment libérale. En effet, on connaît parfaitement l'offensive en règle, menée par ce gouvernement à majorité libérale, contre une série de mesures de solidarité sociales, concrètes dans ce canton. Néanmoins, je m'abstiendrai d'orienter le débat, qui se prolongerait alors jusqu'à minuit, dans cette direction.

Permettez-moi à nouveau de sourire, voire de ricaner, en rappelant la formule de Me Halpérin qui parlait de ce monopole de l'humanitarisme qui n'appartiendrait pas à la gauche. Il disait que, sur certains sujets, les libéraux ont su faire preuve de sensibilité, parfois au détriment des choix économiques.

Ce n'est pas en ces termes, Mesdames et Messieurs les députés, que les questions se posent. Il ne s'agit pas pour se donner bonne conscience - et certains d'entre vous en sont parfois capables - de faire preuve d'un peu de sensibilité, parfois... au détriment des choix économiques. Il s'agit de savoir si l'on veut appliquer, de manière conséquente, les droits de l'homme dans ce canton. Le cas échéant, il faut donner des moyens de défense à ceux qui en ont le plus besoin.

Par ailleurs, M. Fontanet a dévoilé sa véritable opinion en disant qu'en appliquant nos propositions les employés de missions diplomatiques ou de fonctionnaires internationaux seraient «mieux traités» que leurs employeurs. Ce type de raisonnement est basé sur un pur formalisme juridique et ne prend pas en considération les situations concrètes de ces employés. (Chahut.) Je tiens à parler des inégalités de revenus et d'accès à la justice. Sur ce point, vous faites également fausse route en balayant des propositions absolument nécessaires.

En conclusion, lorsque nous passerons au vote de ces propositions, je demanderai qu'il se fasse à l'appel nominal afin de regarder si certains députés de l'autre bord, puisqu'il paraît qu'il y en a parfois, ont... (La présidente interrompt l'orateur.)

La présidente. Monsieur Vanek, pourriez-vous baisser légèrement le ton, s'il vous plaît !

M. Pierre Vanek. Volontiers ! J'aimerais savoir si l'un ou l'autre de ces députés de droite fera preuve de cette «sensibilité» qu'évoquait tout à l'heure Me Halpérin.

Mme Anita Cuénod (AdG). Je tiens à apporter la réponse suivante à Mme Barbara Polla :

La seule raison qui sous-tend votre opposition et celle du groupe libéral - qui se refuse à consacrer du temps et à travailler sur cette motion en commission - est que vous estimez que les mesures prises sont tout à fait suffisantes. Vous allez donc attendre les résultats de cette action avant d'en entreprendre une autre.

Je crois, Madame Polla, que vous n'imaginez pas ce qu'est le travail de médiation. Cela ne se fait pas du jour au lendemain. Cela réclame diplomatie et sensibilité, un examen au cas par cas : c'est très long ! Nous n'aurons donc pas de résultats, a fortiori quantifiables, avant longtemps. Or, nous ne pouvons pas attendre...

Votre argument ne me convainc donc pas et ne m'empêchera pas de proposer parallèlement d'autres mesures, telles celles demandées dans notre motion.

M. Max Schneider (Ve). Je garde l'espoir que ce débat connaisse ce soir un résultat heureux ! En effet, au point 28 de notre ordre du jour, nous avions lancé une motion dont les invites n'ont pas été agréées pour le renvoi en commission. Pourtant, grâce à un député humaniste et sensible, M. Belli, nous avons trouvé un consensus à l'unanimité, afin de renvoyer en commission ladite motion en modifiant ses invites.

C'est pourquoi, après avoir entendu les déclarations de M. Fontanet et pour connaître un peu M. Halpérin, je pense qu'ils peuvent, en tant que juristes, apporter des éléments intéressants en commission. Ils peuvent même prendre ce sujet au sérieux et proposer des modifications, comme cela s'est déjà fait pour certains sujets économiques, bien qu'il s'agisse en l'occurrence d'un sujet humaniste.

Par conséquent, pour ne pas entrer dans un débat «gauche-droite» interminable, je propose de travailler en commission sur cette résolution et sur cette motion. Pour ce faire, il n'est pas nécessaire d'accepter, en séance plénière, toutes les invites de la résolution ou de la motion. Nous en serons quittes pour les étudier en commission.

En fait, les personnes mal payées par les missions diplomatiques ou les fonctionnaires internationaux, nous donnent une véritable échelle de valeur. En effet, dans certains pays tiers-mondistes, notamment d'Amérique du Sud et du Moyen-Orient, ces mêmes employés sont nettement plus mal payés qu'ils ne le sont à Genève. C'est pourquoi, lorsqu'ils accompagnent leurs employeurs en Suisse, ils acceptent de travailler pour des salaires extrêmement bas en échange desquels ils acquièrent la chance de vivre à Genève et d'apprendre une langue étrangère.

Par conséquent, cette motion et cette résolution ne font pas un procès aux missions diplomatiques ou fonctionnaires internationaux; elles cherchent simplement à trouver un terrain de discussion.

Compte tenu du fait que les groupes libéral, radical et démocrate-chrétien reconnaissent l'existence du problème, sans accepter forcément les invites proposées qui peuvent être remodelées en commission selon les sensibilités, j'estime que le renvoi en commission peut être accepté.

En conclusion, je vous invite à clore ce débat et à accepter le renvoi en commission de nos propositions.

M. Olivier Vodoz, président du Conseil d'Etat. Il est vrai que ce problème préoccupe le gouvernement et tel était déjà le cas avant le début de cette législature. Mon ancien collègue, M. Bernard Ziegler, en charge du département de justice et police dans l'ancien gouvernement, avait déjà tenté de trouver des solutions à un problème beaucoup plus complexe que le débat de ce soir ne le laisse paraître. En effet, ce problème relève des Conventions de Vienne et des obligations de droit international public du pays hôte, en l'occurrence la Suisse, ainsi que de notre droit national, respectivement cantonal.

Si les solutions étaient aussi simples que celles qui sont esquissées aujourd'hui, il est probable qu'elles auraient été trouvées et ce, déjà sous la précédente législature, voire avant.

Concernant le personnel des missions diplomatiques ou des fonctionnaires internationaux à Genève ou ailleurs, il est vrai que certains problèmes existent. Cependant, il ne faut pas généraliser. Dans la majorité des cas, le corps diplomatique et les différentes organisations bénéficiant d'immunité et de privilèges diplomatiques respectent leurs engagements.

Le Conseil d'Etat - et encore une fois, c'était déjà le cas dans la précédente législature - a mis en place des directives et un contrat-cadre. En effet, il tient à faire comprendre que, dans ce pays également, la liberté syndicale existe et que les autorités entendent la défendre. A chaque fois, nous avons essuyé des refus.

Il est vrai que, pendant les négociations sur l'Organisation mondiale du commerce, nous avons été soumis à rude épreuve. En effet, les Conventions de Vienne, signées par la Suisse, nous sont à chaque fois opposées.

Par ailleurs, j'aimerais rendre hommage à la mission suisse à Genève, représentante de l'Etat hôte, qui pratique depuis de nombreuses années - dans des circonstances beaucoup plus difficiles actuellement - ce métier d'«amiable compositeur» pour tenter de résoudre ce problème.

En outre, j'aimerais également rendre hommage au Centre social protestant qui, en collaboration avec d'autres services sociaux, pendant de nombreuses années, a tenté de résoudre efficacement les situations douloureuses vécues par certaines victimes.

Nous participions ce matin, à Berne, à une séance de plus de quatre heures, en présence du secrétaire d'Etat, M. Kellenberger, durant laquelle nous avons consacré une grande partie de notre temps à traiter de ce problème.

Si le Conseil d'Etat souhaite que cette résolution et cette motion soient rejetées en l'état, c'est parce qu'il s'est engagé à faire accepter par la communauté diplomatique résidant à Genève cette solution d'«amiable compositeur» dont les directives comprennent treize points. Leur objectif est de contribuer «à l'apaisement des conflits de droit privé dans lesquels peuvent être impliquées des personnes bénéficiant de privilèges et d'immunité diplomatique ou consulaire».

Le Conseil d'Etat a pu obtenir l'adhésion de la communauté internationale, y compris celle du directeur général des Nations Unies, auprès desquelles sont accréditées les missions diplomatiques à Genève. En regard du droit international public, leur adhésion est importante.

Dans l'arrêté du 31 mai 1995, nous avons nommé, pour une première durée limitée au 29 février 1996, M. Maurice Aubert, ancien président de votre Grand Conseil, au poste d'«amiable compositeur».

Nous allons prochainement étrenner cette nouvelle structure et espérons ardemment qu'elle portera ses fruits. Lorsque je parle de «structure», je pèse mes mots. En effet, compte tenu des Conventions de Vienne, le comité diplomatique chargé de résoudre ces problèmes avec l'Etat hôte et Genève, ainsi qu'avec la direction du siège européen des Nations Unies, ne veut, en aucun cas, de véritable «structure».

C'est pourquoi nous avons misé sur cette formule novatrice d'«amiable compositeur» dont l'équipe sera donc dirigée par M. Maurice Aubert. Elle sera chargée de créer un climat de confiance et de résoudre les cas douloureux auxquels certains employés de missions diplomatiques sont confrontés.

Cette instance de médiation pourra aplanir les difficultés que posent, d'une part, les résultats incertains des tribunaux de prud'hommes et, d'autre part, l'exécution des décisions de notre juridiction face à d'autres Etats. Pour une fois, nous avons réussi à trouver une solution agréée par les milieux diplomatiques. Il nous faut, à tout prix, la tester avec l'appui de la Confédération suisse.

C'est la raison pour laquelle, au nom du Conseil d'Etat, nous vous demandons de suspendre les mesures proposées par les motionnaires et les auteurs de la résolution, afin de nous permettre de faire le point sur notre formule d'«amiable compositeur» à la fin du mois de février 1996, soit dans dix mois à peine.

Nous avons toutefois remis les textes de cette motion et de cette résolution au Département fédéral des affaires étrangères, avec lequel nous avons abordé ces problèmes au cours de notre séance de ce jour, à Berne.

Nous espérons pouvoir progresser dans la résolution de ces problèmes et poursuivons notre réflexion. Une nouvelle séance est, d'ores et déjà, prévue avec la délégation fédérale; elle sera conduite, au plus haut niveau, par le secrétaire d'Etat. En définitive, par le biais de cet «amiable compositeur», nous souhaitons aboutir à des solutions encore plus durables et définitives.

Le Conseil d'Etat est intervenu à de multiples reprises, auprès de la Confédération, en faveur des domestiques ayant servi dans des missions diplomatiques. Ces derniers, après avoir été congédiés, avaient engagé des procédures devant nos juridictions de prud'hommes et notre intervention leur avait permis de demeurer à Genève, en dépit du fait que leur carte de légitimation leur avait été retirée et que, en vertu de la loi fédérale et des modifications effectuées en 1990, ils devaient quitter la Suisse.

Le Conseil d'Etat a cherché à ce que, dans certains cas, les règles soient assouplies. Il n'a obtenu satisfaction que sur le fait qu'il est désormais possible - l'office cantonal de la population l'a confirmé - aux personnes engagées dans une procédure auprès du tribunal des prud'hommes ou auprès d'autres instances juridiques de demeurer à Genève, au moins jusqu'au moment de leur comparution personnelle, afin qu'elles s'expriment et connaissent, le cas échéant, les résultats des expertises médicales.

Telle est la position actuelle du Conseil d'Etat sur ce dossier extrêmement délicat, où Genève est constamment comparée aux autres villes internationales qui, elles, appliquent à la lettre les dispositions des Conventions de Vienne.

Il est vrai que nous disposons, enfin, des décisions du Tribunal fédéral. Malheureusement, elles ne concernent que deux cas qui ne sont pas exactement aussi clairs que ceux que nous connaissons aujourd'hui.

Voilà pourquoi je vous demande, au nom du Conseil d'Etat, de ne pas entrer en matière sur ces propositions de motion et de résolution et d'attendre les résultats obtenus par cette instance de médiation d'«amiable compositeur». Les personnes désignées entreront en fonction dans ces prochains jours.

Si cela s'avérait nécessaire, nous pourrions faire le point de la situation à la fin du mois de février 1996 et, le cas échéant, aboutir à d'autres solutions, étant donné que les autorités fédérales poursuivent intensément leur réflexion. Je vous remercie donc de suivre l'avis du Conseil d'Etat.

M. Pierre Meyll (AdG). Bien que je considère avec beaucoup de compréhension les déclarations faites par le président du Conseil d'Etat, je regrette qu'il ait assisté, impassible, à ce débat de chiffonniers qui ne faisait pas honneur à notre Grand Conseil. Je regrette qu'il n'ait pas pris la parole aussitôt que la situation s'est envenimée, ce qui aurait rendu le débat beaucoup plus constructif.

Il va sans dire que, personnellement, je suivrai l'avis du Conseil d'Etat.

M. Olivier Vodoz, président du Conseil d'Etat. Je tiens à vous dire que, très rapidement après le début du débat, j'ai informé la présidente que j'entendais, en tant que président du Conseil d'Etat, intervenir sur ce dossier. Il se trouve que vous avez utilisé vos temps de parole. Pour ma part, je déplore également le débat qui a eu lieu sur cette question extrêmement difficile, complexe et douloureuse.

M. Bernard Annen (L). Je n'irai pas jusqu'à dire que je rejoins les propos de M. Meyll, mais j'aimerais vous faire une proposition peu usuelle. En effet, je suggère de retirer ce point de l'ordre du jour et de prévoir sa mise à l'ordre du jour, dans une dizaine de mois, comme le souhaite le Conseil d'Etat.

Mme Maria Roth-Bernasconi (S). J'aimerais savoir pourquoi le renvoi en commission de nos propositions n'est pas souhaité. Etant donné que trente affaires sont en cours en commission judiciaire, si cette motion est renvoyée en commission, elle ne sera traitée, au plus tôt, que dans six mois.

M. Christian Grobet (AdG). Comme cela a été relevé par certains - et je le sais pour avoir siégé au Conseil d'Etat - ce problème est ancien. M. Vodoz a eu raison de souligner le fait que l'autorité fédérale, en maintes occasions, n'a pas assumé ses obligations et a même tenté de s'en décharger sur le Conseil d'Etat.

Monsieur Vodoz, vous venez de déclarer que l'autorité fédérale traîne les pieds pour donner suite à certaines demandes que vous lui avez adressées. Bien que cela n'exclue pas tout à fait la responsabilité du Conseil d'Etat, je partage votre avis. Il est vrai qu'il s'agit, d'abord, d'un problème de l'autorité fédérale.

Sans vouloir jeter de l'huile sur le feu, je pense que, précisément, le renvoi de cette motion en commission permettrait à celle-ci d'entendre des représentants de l'autorité fédérale. Et cela donnerait peut-être du poids aux interventions du Conseil d'Etat. Par ailleurs, nous pourrions arriver à un consensus qui prévoirait que la commission ne rende pas son rapport avant l'année prochaine.

Je suis convaincu que si la commission demandait à entendre des représentants de l'autorité fédérale et que ces derniers voyaient les députés soutenir le Conseil d'Etat, la position de celui-ci en serait alors renforcée.

M. Olivier Vodoz, président du Conseil d'Etat. Le sens profond de mon intervention est qu'il faut obtenir, en particulier, la confiance du corps diplomatique.

Telle a été la tâche principale à laquelle, au nom du Conseil d'Etat, nous nous sommes attelés. C'est ainsi que nous avons obtenu de siéger, depuis le début de cette année, au comité diplomatique, alors qu'auparavant seule la Confédération suisse, en raison de ses compétences primaires, entendait y siéger.

Le Conseil d'Etat a déclaré que nous devions être dans la délégation du pays hôte, compte tenu des problèmes auxquels nous étions confrontés et du fait, rappelé par M. Grobet, que la compétence principale, essentiellement dans le domaine des Conventions de Vienne et dans celui du droit international public, incombe exclusivement à la Confédération.

Le Conseil d'Etat a pris ces mesures, après que d'autres eurent été auparavant refusées, parce qu'il considère qu'il est de son devoir, en tant que gouvernement de cette Genève internationale, capitale des droits de l'homme, de prendre ses responsabilités.

J'ai besoin de votre confiance pour amener le corps diplomatique à prendre en considération ces problèmes, dès lors qu'il a donné son aval à la mise en place de cette instance de médiation.

Dans le cas contraire, je crains, en regard des Conventions de Vienne, que certaines personnalités, bénéficiant d'immunité diplomatique, ne s'arc-boutent sur leurs positions, qu'elles ne rejettent sur la Suisse les obligations découlant des accords internationaux et qu'elles n'adoptent une position dure qui desservira les intérêts des personnes pour lesquelles nous souhaitons trouver des solutions.

Voilà pourquoi, le Conseil d'Etat a besoin de ce laps de temps pour aboutir à des résultats concrets.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). En tant que coauteur de ces deux propositions, j'aimerais dire que, si nous nous basions uniquement sur le discours de M. Vodoz, nous pourrions simplement retirer ces propositions et attendre quelques mois les résultats de l'instance de médiation mise en place par le Conseil d'Etat, pour remettre à l'ordre du jour, le cas échéant, cette motion et cette résolution.

Cependant, le discours de certaines personnes de l'Entente est allé trop loin. Maintenant, accepter de retirer ces motions reviendrait à cautionner leur discours, c'est-à-dire cautionner la négation d'un fait qui existe. C'est pourquoi nous ne pouvons pas retirer cette motion et cette résolution et vous demandons, à nouveau, de les renvoyer en commission. C'est une manière élégante de ne pas les rejeter et également de mettre un terme à ce débat.

La présidente. La procédure que nous allons suivre est fixée à l'article 78 de notre règlement qui prévoit qu'au cours de la délibération les propositions suivantes peuvent être formulées :

a) le renvoi en commission;

b) l'ajournement à terme;

c) le rejet d'une proposition.

L'ajournement à terme ayant été proposé par notre collègue M. Bernard Annen, nous allons d'abord voter sur le renvoi en commission, puis sur l'ajournement à terme, en fonction des propositions du président du Conseil d'Etat, qui parlait du mois de mars 1996. Ensuite, nous voterons au fond les propositions de motion et résolution.

Monsieur Vanek, vous avez bien demandé l'appel nominal... (Appuyé.) Va-t-il porter sur le renvoi en commission ou sur le vote de fond ?

M. Pierre Vanek. Il portera sur le vote du renvoi en commission.

La présidente. Acceptez-vous, étant donné que la motion et la résolution figurent au même point de l'ordre du jour, que nous fassions un vote sur ces deux objets en même temps?

M. Pierre Vanek. Oui !

La présidente. Monsieur Blanc, vous n'êtes pas d'accord. Bien, alors nous ferons deux appels nominaux, un pour chacun de ces sujets.

M 1003

La présidente. Tout d'abord, nous prenons la proposition de motion concernant le personnel administratif, technique, de service et domestique des missions diplomatiques et fonctionnaires internationaux à Genève. Nous nous prononçons sur le renvoi en commission.

Celles et ceux qui acceptent la proposition de renvoyer cette proposition de motion en commission répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non.

La proposition de renvoyer cette proposition de motion en commission est rejetée par 47 non contre 43 oui et 3 abstentions.

Ont voté non (47):

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Claude Basset (L)

Roger Beer (R)

Janine Berberat (L)

Nicolas Brunschwig (L)

Thomas Büchi (R)

Hervé Burdet (L)

Anne Chevalley (L)

Hervé Dessimoz (R)

Jean-Claude Dessuet (L)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

Jean-Luc Ducret (DC)

Michel Ducret (R)

John Dupraz (R)

Henri Duvillard (DC)

Catherine Fatio (L)

Bénédict Fontanet (DC)

Pierre Froidevaux (R)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Henri Gougler (L)

Janine Hagmann (L)

Michel Halpérin (L)

Claude Howald (L)

Yvonne Humbert (L)

René Koechlin (L)

Pierre Kunz (R)

Claude Lacour (L)

Bernard Lescaze (R)

Armand Lombard (L)

Olivier Lorenzini (DC)

Michèle Mascherpa (L)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Vérène Nicollier (L)

Jean Opériol (DC)

Barbara Polla (L)

David Revaclier (R)

Micheline Spoerri (L)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Jean-Philippe de Tolédo (R)

Pierre-François Unger (DC)

Olivier Vaucher (L)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Michèle Wavre (R)

Ont voté oui (43):

Fabienne Blanc-Kühn (S)

Jacques Boesch (AG)

Anne Briol (E)

Fabienne Bugnon (E)

Matthias Butikofer (AG)

Micheline Calmy-Rey (S)

Claire Chalut (AG)

Pierre-Alain Champod (S)

Liliane Charrière Urben (S)

Sylvie Châtelain (S)

Bernard Clerc (AG)

Jean-François Courvoisier (S)

Anita Cuénod (AG)

Erica Deuber-Pauli (AG)

Laurette Dupuis (AG)

Christian Ferrazino (AG)

Jean-Claude Genecand (DC)

Luc Gilly (AG)

Gilles Godinat (AG)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Christian Grobet (AG)

Dominique Hausser (S)

David Hiler (E)

Liliane Johner (AG)

Sylvia Leuenberger (E)

René Longet (S)

Gabrielle Maulini-Dreyfus (E)

Liliane Maury Pasquier (S)

Pierre Meyll (AG)

Laurent Moutinot (S)

Chaïm Nissim (E)

Danielle Oppliger (AG)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Martine Roset (DC)

Maria Roth-Bernasconi (S)

Andreas Saurer (E)

Christine Sayegh (S)

Max Schneider (E)

Jean Spielmann (AG)

Evelyne Strubin (AG)

Claire Torracinta-Pache (S)

Pierre Vanek (AG)

Yves Zehfus (AG)

Se sont abstenus (3):

Claude Blanc (DC)

Nelly Guichard (DC)

Pierre Marti (DC)

Etaient excusés à la séance (4):

René Ecuyer (AG)

Alain-Dominique Mauris (L)

Jean-Pierre Rigotti (AG)

Philippe Schaller (DC)

Etaient absentes au moment du vote (2):

Marlène Dupraz (AG)

Elisabeth Häusermann (R)

Présidence:

Mme Françoise Saudan, présidente.

M. Bernard Annen (L). Ma proposition était en faveur d'un compromis possible. Etant donné la position extrême de Mme Bugnon et la fermeté avec laquelle l'appel nominal, auquel nous venons d'assister, a été demandé, je me vois contraint de retirer ma proposition d'ajournement à terme.

La présidente. Bien. Cette proposition n'étant pas reprise, nous allons passer au vote concernant la motion 1003.

La proposition de motion est mise aux voix.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Cette proposition de motion est rejetée par 47 non contre 40 oui.

R 295

La présidente. Nous passons au vote sur le renvoi en commission de la proposition de résolution 295. Conformément à la demande qui nous a été faite, nous allons procéder à l'appel nominal.

Celles et ceux qui acceptent la proposition de renvoyer cette proposition de résolution en commission répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non.

La proposition de renvoyer cette proposition de résolution en commission est rejetée par 49 non contre 41 oui et 3 abstentions.

Ont voté non (49):

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Claude Basset (L)

Roger Beer (R)

Janine Berberat (L)

Claude Blanc (DC)

Nicolas Brunschwig (L)

Thomas Büchi (R)

Hervé Burdet (L)

Anne Chevalley (L)

Hervé Dessimoz (R)

Jean-Claude Dessuet (L)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

Jean-Luc Ducret (DC)

Michel Ducret (R)

John Dupraz (R)

Henri Duvillard (DC)

Catherine Fatio (L)

Bénédict Fontanet (DC)

Pierre Froidevaux (R)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Henri Gougler (L)

Nelly Guichard (DC)

Janine Hagmann (L)

Michel Halpérin (L)

Claude Howald (L)

Yvonne Humbert (L)

René Koechlin (L)

Pierre Kunz (R)

Claude Lacour (L)

Armand Lombard (L)

Olivier Lorenzini (DC)

Pierre Marti (DC)

Michèle Mascherpa (L)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Vérène Nicollier (L)

Jean Opériol (DC)

Barbara Polla (L)

David Revaclier (R)

Martine Roset (DC)

Micheline Spoerri (L)

Jean-Philippe de Tolédo (R)

Pierre-François Unger (DC)

Olivier Vaucher (L)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Michèle Wavre (R)

Ont voté oui (41):

Fabienne Blanc-Kühn (S)

Jacques Boesch (AG)

Anne Briol (E)

Fabienne Bugnon (E)

Matthias Butikofer (AG)

Micheline Calmy-Rey (S)

Claire Chalut (AG)

Pierre-Alain Champod (S)

Liliane Charrière Urben (S)

Sylvie Châtelain (S)

Bernard Clerc (AG)

Anita Cuénod (AG)

Erica Deuber-Pauli (AG)

Laurette Dupuis (AG)

Christian Ferrazino (AG)

Jean-Claude Genecand (DC)

Luc Gilly (AG)

Gilles Godinat (AG)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Christian Grobet (AG)

Dominique Hausser (S)

David Hiler (E)

Liliane Johner (AG)

Sylvia Leuenberger (E)

René Longet (S)

Gabrielle Maulini-Dreyfus (E)

Liliane Maury Pasquier (S)

Pierre Meyll (AG)

Laurent Moutinot (S)

Chaïm Nissim (E)

Danielle Oppliger (AG)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Maria Roth-Bernasconi (S)

Andreas Saurer (E)

Christine Sayegh (S)

Max Schneider (E)

Jean Spielmann (AG)

Evelyne Strubin (AG)

Claire Torracinta-Pache (S)

Pierre Vanek (AG)

Yves Zehfus (AG)

Se sont abstenus (3):

Elisabeth Häusermann (R)

Bernard Lescaze (R)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Etaient excusés à la séance (4):

René Ecuyer (AG)

Alain-Dominique Mauris (L)

Jean-Pierre Rigotti (AG)

Philippe Schaller (DC)

Etaient absents au moment du vote (2):

Jean-François Courvoisier (S)

Marlène Dupraz (AG)

Présidence:

Mme Françoise Saudan, présidente.

La présidente. Nous passons au vote sur le fond de la résolution 295.

Mise aux voix, cette proposition de résolution est rejetée.

M 1004
11.  Proposition de motion de Mmes et MM. Christian Grobet, Jean Spielmann, Pierre Vanek, René Ecuyer, Luc Gilly, Claire Chalut et Laurette Dupuis concernant la réalisation du réseau des Transports publics genevois. ( ) M1004

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

 les études menées depuis 1975 sur le développement du réseau des transports publics;

 la votation populaire du 12 juin 1988 sur la loi concrétisant l'initiative pour des transports publics efficaces;

 le réseau adopté par le Grand Conseil le 12 février 1993 lors de l'adaptation de la loi sur le réseau des Transports publics genevois (TPG) et figurant au plan annexé à ladite loi;

 la demande d'extension de la concession pour le réseau de tramways à cinq sections figurant au plan annexé à la loi précitée adressée à l'office fédéral des transports, à Berne, le 6 décembre 1993 par les TPG;

 l'enquête publique portant sur cette demande de concession qui s'est tenue durant le mois de mars de cette année;

 le rapport du Conseil d'Etat du 26 avril 1995 sur la mise en oeuvre de la loi sur le réseau des transports publics,

invite le Conseil d'Etat

 à orienter les nouvelles études portant sur le futur réseau des TPG dans le sens de donner la priorité à la liaison Cornavin-Meyrin, en se référant, à cette fin, aux études relatives à cette liaison, menées au début des années 1980 dans le cadre du projet de croix ferroviaire envisagé à l'époque, et en tenant compte des réservations faites au profit des transports publics lors des travaux d'aménagement de la rue de la Servette et de la route de Meyrin;

 dans l'attente de l'aboutissement de ces études et de l'obtention de la concession d'exploitation de cette future ligne de transport, à engager dès maintenant, c'est-à-dire, comme prévu, la réalisation des étapes d'extension du réseau tramway, telles que décidées par le Grand Conseil dans le plan de réseau annexé à la loi sur les réseaux des transports publics,

à faire rapport au Grand Conseil sur:

 le coût total des études consacrées depuis 1975 aux projets de transports publics et plus particulièrement au projet de métro automatique léger et au projet d'extension du réseau tramways tels que retenus dans la loi sur le réseau des transports publics;

 les résultats de l'enquête publique portant sur la demande d'extension de la concession de tramways aux 5 sections figurant au plan annexé à la loi sur le réseau des transports publics;

 le coût estimé pour la réalisation de chacune de ces cinq sections.

EXPOSÉ DES MOTIFS

C'est en 1974 déjà que le Grand Conseil a exprimé sa volonté de favoriser une utilisation intensive des transports publics et a voté un crédit de 2,5 million de francs portant sur l'étude du futur réseau des TPG, qui devait comporter un développement de l'infrastructure lourde, c'est-à-dire le tramway, afin de répondre, par la mise en place de moyens de transport de grande capacité, à la demande en déplacements et favoriser un véritable transfert modal de l'automobile au profit des transports publics. C'est dès 1978 que les services de l'Etat préconisent la réalisation d'une croix ferroviaire de tramway, sous forme de quatre branches de tram interconnectés et reliant la place Bel-Air à Moillesulaz, Meyrin, Onex et Carouge, ce qui impliquait la réalisation des deux branches de Meyrin et d'Onex. La branche de Meyrin était considérée comme prioritaire compte tenu de l'importance des déplacements entre les deux rives.

Au moment où les études de la croix ferroviaire arrivaient à leur terme, des députés déposèrent en avril 1985 une motion demandant une étude de faisabilité d'un métro automatique léger, laquelle eut pour effet de différer dans le temps la réalisation de l'extension du réseau tramway. Finalement, la réalisation d'un réseau de métro automatique léger se révéla d'un coût insupportable pour le budget de l'Etat, ce qui amena le Conseil d'Etat à recommander, dans le cadre du futur réseau d'infrastructure lourde des TPG, la réalisation d'une seule ligne de métro, celle de Rive-Cornavin-Meyrin, réalisable en deux étapes, complétée de la nouvelle ligne de tram 13 avec ses prolongements par étapes en direction de Sécheron et de Lancy, option approuvée par le Grand Conseil dans le cadre de la loi du 12 février 1993 et qui est matérialisée dans le plan annexé à ladite loi.

Cette décision a été concrétisée par une demande de concession adressée le 6 décembre 1993 par les transports publics genevois à l'office fédéral des transports et mise à l'enquête publique durant le mois de mars 1995, laquelle porte sur cinq sections du réseau tramway adopté par le Grand Conseil, à savoir:

 la section «Stand» entre le boulevard Georges-Favon et la rue de la Corraterie;

 la section «Acacias» entre Plainpalais et la rampe du Pont-Rouge;

 la section «Grand Lancy» entre la rampe du Pont-Rouge et le chemin des Palettes;

 la section «Palettes» entre le Bachet-de-Pesay et le chemin des Palettes;

 la section «Sécheron» entre Cornavin et la place des Nations.

Aujourd'hui, on apprend, dans le rapport du Conseil d'Etat relatif à la réalisation du futur réseau d'infrastructure lourde des TPG, que celui-ci s'est reconverti, pour des raisons de coût, au tramway ce dont on peut se féliciter quoiqu'on doive constater qu'il est prêt à investir un milliard de francs pour la traversée de la rade et sa liaison avec la Route Blanche, mais qu'il n'est pas d'accord d'investir une telle somme dans une ligne de métro moderne et performante qui devait constituer, selon son propre aveu, l'ossature de base du futur réseau des TPG.

Retour 20 ans en arrière !

En effet, le rapport précité indique qu'au lieu de poursuivre l'étude de la ligne de métro décidée par le Grand Conseil, le Conseil d'Etat veut y renoncer au profit d'un autre projet, qui ne figure pas dans le plan adopté par le Grand Conseil le 12 février 1993 tel qu'annexé à la loi sur le réseau des transports publics. Le Conseil d'Etat en revient, en fait, à la branche de Meyrin de la croix ferroviaire de tramway proposée il y a 20 ans en arrière et qui avait été tant décriée par certains.

A part le temps énorme qui a été perdu entre-temps et surtout les millions dépensés en pure perte pour le projet de métro automatique léger, il faut relever que le Conseil d'Etat recommande de réaliser sa nouvelle ligne de transports en partant d'Annemasse, ce qui nécessitera beaucoup de temps en raison des accords compliqués à négocier avec la France. Mais surtout, il prévoit, en deuxième étape seulement, la liaison Cornavin-Meyrin, alors que depuis 20 ans tous les spécialistes s'accordent à dire que la priorité sur le plan du développement des transports publics est de mettre en place un moyen de transport rapide et de grande capacité entre Meyrin, Cornavin et le centre-ville. Cette priorité est devenue plus évidente que jamais, dans la mesure où les autobus reliant Meyrin au centre-ville sont tellement bondés aux heures de pointe que certains passagers ne peuvent y monter et restent sur le trottoir malgré des fréquences de bus toutes les 3 minutes et la présence de bus accélérés.

En procédant à un dédoublement coûteux de la ligne 12 à partir de la gare des Eaux-Vives, le Conseil d'Etat reporte à nouveau la création d'un moyen de transport efficace et de grande capacité là où le besoin se fait le plus sentir, ce qui est grave.

Abandon du projet d'extension de la ligne de tram 13

Mais plus grave encore, c'est le renvoi aux calendes grecques des projets d'extension de ligne de tram 13 dont les plans sont prêts depuis 18 mois et dont les diverses étapes devaient, selon la programmation retenue, être réalisées successivement dès l'achèvement des travaux de la ligne de tram 13 qui va être inaugurée le 27 mai prochain.

Cette décision est inconcevable. Non seulement la justification de la ligne 13 et de l'important investissement consenti est remise en cause, alors que le Conseil d'Etat dans un souci de cohérence avait conditionné sa réalisation à sa prolongation par les deux branches complémentaires des Acacias et de Sécheron avec des parkings d'échange à leur extrémité, mais c'est tout le développement de l'infrastructure lourde des TPG, attendue depuis 20 ans, qui est remise en cause.

Cette remise en cause est inadmissible et bafoue la volonté populaire exprimée massivement lors de la votation du 12 juin 1998. Il est, par ailleurs, injustifiable d'abandonner au profit d'un nouveau projet, encore au stade d'ébauche, la réalisation d'une extension du réseau tramway, dont les études ont été très coûteuses, dont les plans sont prêts et dont l'exécution par étapes a été conçue de manière à entraîner un investissement annuel modéré à la mesure des moyens financiers de notre canton, soit environ 15 millions de francs par année contre 50 millions de francs par année pour l'évitement autoroutier de Plan-les-Ouates.

Le nouveau projet du Conseil d'Etat est non seulement d'un coût très onéreux, ce qui risque de le faire échouer au détriment du projet actuel, mais son étude et surtout son aboutissement demanderont encore de nombreuses années. Enfin, le tracé de cette nouvelle ligne destinée à relier Annemasse à la gare Cornavin est tout sauf attractif avec son détour par le pont de la Coulouvrenière. Ce tracé ne tient pas compte du projet élaboré par le département des travaux publics en 1987, à la suite des critiques quant au concept de la croix ferroviaire et de son noeud central à Bel-Air, projet qui proposait de réaliser une liaison directe du tram 12 avec la gare Cornavin et la rive droite du lac par une déviation de cette ligne à Longemalle, afin d'emprunter le pont du Mont-Blanc et monter ensuite directement par la rue de la Servette en direction de Meyrin. Le «chemin des écoliers» retenu par le Conseil d'Etat démontre qu'il n'est pas prêt à favoriser les transports collectifs pour les rendre véritablement attractifs. Ce n'est pas en proposant des détours, et surtout de cette importance, aux transports publics que l'on va inciter la population à les utiliser de manière intensive pour de longs trajets, ce qui est pourtant le but du développement des TPG.

C'est aujourd'hui que la réalisation tant attendue du réseau des TPG, qui a fait l'objet de longs débats au Grand Conseil et d'un consensus général, doit être poursuivie par étapes selon la volonté clairement exprimée par le peuple dont la volonté a été concrétisée par le Grand Conseil. En proposant un nouveau projet et en engageant de nouvelles études, le Conseil d'Etat démontre qu'il veut en fait différer une nouvelle fois la poursuite de la réalisation du réseau de tramway décidée par le Grand Conseil.

Le Conseil d'Etat marque clairement sa volonté d'arrêter le développement des transports publics au profit de celui du réseau routier, qui a été très largement privilégié ces dernières années (notamment avec la réalisation de l'autoroute de contournement ainsi qu'une série d'autres aménagements routiers) et qui continue à être privilégié avec l'accélération du chantier de l'évitement autoroutier de Plan-les-Ouates, la prolongation non urgente de l'avenue de Lect à Meyrin (20 millions de francs) et surtout le projet hors de prix de la traversée de la rade (un milliard de francs). Il n'est dès lors pas étonnant qu'il ne reste plus d'argent pour le développement du réseau des transports publics et que le Conseil d'Etat, qui se trouve dans l'impasse, veuille engager de nouvelles et longues études pour éviter de devoir réaliser ce qui a été décidé et qui, en ce qui concerne le réseau tramway, est d'un coût bien plus modéré que les projets routiers.

Cette politique va à l'encontre de toutes les décisions prises ces 20 dernières années par le Grand Conseil qui sont rappelées dans le résumé ci-annexé. Le Conseil d'Etat est expressément invité à revoir sa position et à continuer à exécuter l'extension de réseau tramway, conformément aux décisions prises par le Grand Conseil.

ANNEXE

Rappel des études réalisées depuis 1970

1970: mise à l'étude du plan directeur des transports publics

C'est le 30 novembre 1970 que le Conseil d'Etat, suite aux préoccupations du Grand Conseil sur les problèmes de circulation à Genève, décida de créer un groupe interdépartemental chargé de l'élaboration d'un plan directeur des transports. Il s'agissait, par l'établissement d'un tel plan, de «définir une politique des transports adaptée aux aspirations légitimes de la collectivité, aux techniques nouvelles, aux moyens financiers et, en tenant compte de l'économie générale et des dispositions légales, de fixer des objectifs précis».

Le 6 avril 1973, le Grand Conseil était saisi par le Conseil d'Etat d'un projet de loi portant sur une demande de crédit de 2,5 millions de francs pour l'élaboration d'un plan directeur des transports. Le rapport de la commission de développement du canton, à laquelle ce projet avait été renvoyé, fut débattu lors de la séance du Grand Conseil du 14 novembre 1974. Ce rapport indiquait que «d'emblée, les députés ont souhaité que l'hypothèse de travail fondamentale soit l'utilisation intensive des transports publics».

Au vu de l'importance accordée à cet objectif et des divergences de vues à ce propos entre les députés et le Conseil d'Etat, les députés ont exprimé le désir de «pouvoir discuter avec le Conseil d'Etat des choix qu'il allait être appelé à faire au cours de l'étude», en précisant à ce sujet que «l'Etat sera appelé à prendre un certain nombre de dispositions et de choix; des options importantes seront à prendre et les députés veulent y être associés».

Cette volonté a été confirmée par l'adjonction d'un article 3 au projet de loi voté le 14 novembre 1974 disposant qu'«au terme de chaque phase de l'étude appelant une option fondamentale, le Conseil d'Etat adresse un rapport au Grand Conseil».

1978: la proposition d'une croix ferroviaire tramway

Le premier rapport du Conseil d'Etat portant sur la première phase d'étude du plan directeur des transports fut présenté au Grand Conseil lors de sa séance du 24 février 1978. Ce rapport concluait sur la nécessité de développer les TPG, qu'«une amélioration de matériel et des lignes s'impose», qu'«il est indispensable que les TPG se dotent d'un organisme de planification et introduisent la gestion centralisée de leur trafic».

Lors de l'examen de ce rapport en commission, le département des travaux publics présenta la phase II de l'étude du plan directeur des transports comportant deux rapports intermédiaires. Le deuxième portait notamment sur quatre variantes de développement du réseau des TPG, dont celle d'une croix ferroviaire de tramway comportant à partir de la place Bel-Air deux nouvelles lignes de tram reliant Meyrin et Onex, qui devaient être connectées à la ligne de tram 12 dans le but de réaliser des liaisons directes et sans transbordement entre la rive gauche et la rive droite du lac afin de répondre aux besoins prioritaires sur le plan des transports.

Dans son rapport approuvé lors de la séance du Grand Conseil du 15 juin 1979, la commission du développement concluait à l'approbation des divers principes de politique générale des transports proposés par le Conseil d'Etat et demandait en particulier, en ce qui concerne le schéma des transports publics, la poursuite d'«une étude comparative des quatre variantes de réseaux des TPG suivantes:

a) maintien du réseau actuel;

b) réorganisation du réseau actuel;

c) réorganisation et extension du réseau actuel;

d) réorganisation, restructuration et développement du réseau, notamment concept en forme de croix ferroviaire.»

1981: les projets d'extension du réseau tramway

Le Conseil d'Etat présenta, lors de la séance du Grand Conseil du 16 janvier 1981, son deuxième rapport consacré à l'avancement des études du plan directeur des transports, lequel portait sur la deuxième phase d'étude matérialisée par un volumineux rapport technique intitulé rapport intermédiaire no 3. La partie du rapport d'accompagnement du Conseil d'Etat consacré au réseau des TPG relève que ce «volet de l'étude, que nous considérons comme le plus important du plan, présente les comparaisons des variantes envisageables pour l'organisation du réseau des TPG à l'horizon 1990». Le Conseil d'Etat met en avant, dans ce cadre, la prolongation de la ligne de tram 12 jusqu'au Bachet-de-Pesay à court terme et la réalisation des branches vers Meyrin et Onex, le Conseil d'Etat précisant que celle «vers Meyrin devrait être entreprise en premier, afin de mieux équilibrer le réseau». Le rapport intermédiaire no 3 préconisait notamment d'entreprendre des études complémentaires de faisabilité pour une croix ferroviaire et le Conseil d'Etat concluait son rapport au Grand Conseil en insistant sur le fait que «des décisions de principe sont nécessaires, afin que dans la phase III du plan il soit procédé à la mise au point de la variante choisie».

La commission de développement n'ayant pas réussi à terminer l'étude du rapport du Conseil d'Etat avant la fin de la législature, elle décida de présenter au Grand Conseil un rapport intermédiaire portant uniquement sur le choix de la variante de réseau des TPG considérant que c'était la question la plus urgente à trancher pour que les TPG puissent aller de l'avant avec l'adaptation de ce réseau. Le Grand Conseil approuva, lors de sa séance du 9 octobre 1981, les conclusions du rapport de la commission de développement du canton traitant la partie du rapport intermédiaire no 3 consacrée au développement du réseau des TPG et qui recommandait de retenir la variante «1 D adaptée» portant sur la réorganisation du réseau des TPG de l'époque, variante permettant «une évolution aisée du réseau des TPG avec de nouvelles lignes de tram si le Grand Conseil en décide ainsi».

1984: dépôt de l'initiative «pour des transports publics efficaces»

Suite à cette décision du Grand Conseil, le Conseil d'Etat avait chargé le département des travaux publics de conduire l'étude de faisabilité du projet de croix ferroviaire qui était en cours lorsqu'un groupe de citoyens, proclamant leur volonté de rattraper le retard pris depuis 20 ans par les TPG, décida de lancer une initiative populaire «pour des transports publics efficaces». Cette initiative préconisait une série de mesures destinées à favoriser le développement des TPG dont l'adoption d'un réseau réalisable à l'horizon de l'an 2000 comportant notamment la réalisation de la croix ferroviaire sous forme d'une liaison par tramway sur les axes Palettes - Carouge - Bel-Air - Meyrin et Moillesulaz - Bel-Air - Onex. L'initiative avait pour but de faire aboutir ce projet envisagé depuis 1978 et sur lequel le Grand Conseil allait devoir se prononcer sur la base de l'étude de faisabilité en cours.

1985: demande d'étude d'un métro automatique léger

Cette initiative, à l'ordre du jour de la séance du Grand Conseil du 15 mars 1984, fut renvoyée à la commission des TPG. Cette commission, à l'occasion de l'examen de cette initiative, fut sensibilisée par un nouveau mode de transport: le métro automatique léger (VAL) fonctionnant dans la ville de Lille et proposa au Grand Conseil d'adopter une motion demandant une étude de faisabilité et de coût de la réalisation d'un métro à guidage automatique, parallèlement à celle de la croix ferroviaire, motion qui fut renvoyée au Conseil d'Etat lors de la séance du Grand Conseil du 18 avril 1985.

Fin 1985: projet de croix ferroviaire tramway

Peu de temps après, le Conseil d'Etat présenta, lors de la séance du Grand Conseil du 1er novembre 1985, son 3e rapport consacré à l'avancement des études du plan directeur des transports, lequel portait sur des compléments au rapport intermédiaire no 3 de la deuxième phase d'étude du plan directeur des transports. Le rapport était, pour l'essentiel, consacré à l'étude de faisabilité de la croix ferroviaire, notamment des 3 variantes envisagées au centre-ville pour la branche de Meyrin et les deux variantes retenues pour celle d'Onex. Les conclusions du Conseil d'Etat relatives à la croix ferroviaire étaient réservées, en ce sens qu'il considérait que l'attractivité du projet n'était pas suffisante en raison de l'exiguïté des voiries dans le secteur Bel-Air - Saint-Gervais et la concentration en un seul endroit (Bel-Air) de l'interconnexion des lignes de tram. Il demandait à poursuivre les études avant de prendre une décision définitive. Quant au métro automatique léger, le Conseil d'Etat, qui n'avait pas encore pu mener l'étude de faisabilité demandée, fit part, dans les conclusions de son rapport, de son appréciation selon laquelle «un tel mode de transport risque d'être d'un coût disproportionné par rapport aux moyens financiers de notre canton».

Lors de la séance du 1er octobre 1987 du Grand Conseil, le Conseil d'Etat présente son rapport sur la motion demandant une étude faisabilité et du coût de réalisation d'un métro à guidage automatique. Le rapport est positif et l'étude fait l'objet d'une présentation devant les députés par les mandataires chargés de mener celle-ci. Les députés approuvent la conclusion que l'étude doit être poursuivie.

1988: la loi sur le réseau des transports publics est approuvée par le peuple

Lors de sa séance du 17 mars 1988, le Grand Conseil approuve le contre-projet que la commission des TPG proposa d'opposer à l'initiative populaire pour des transports publics efficaces. Etant donné que la commission des TPG s'était divisée entre partisans du tram et partisans du métro et que cette guerre des tranchées risquait de compromettre le succès de l'initiative, alors qu'une majorité de la commission était favorable sur le principe du développement des transports publics, la majorité préféra reporter le choix entre ces deux modes de transports à plus tard et adopta un contreprojet à l'initiative sous forme d'une loi qui se bornait à formuler un certain nombre d'objectifs à atteindre avec le développement des transports publics à l'horizon de l'an 2000 avec l'obligation pour le Conseil d'Etat d'adopter en 1989 au plus tard un plan directeur du réseau pour l'horizon 1992-1994 et en 1991, au plus tard, le plan directeur du réseau comprenant le choix du projet retenu pour le développement des transports publics, c'est-à-dire le choix entre le tram et le métro automatique léger.

Cette loi sur le réseau des TPG fut approuvée en votation populaire du 12 juin 1988 à une majorité de près de 80% des votants.

Le soir de la votation, le Conseil d'Etat annonça qu'il recommandait, sur la base des études qui avaient été poursuivies entre-temps, un réseau de transports publics comportant un réseau RER pour les transports régionaux et un réseau métro pour le trafic urbain, complété de lignes de rabattement dont une partie seraient réalisées sous forme d'une extension du réseau tramway. Le Conseil d'Etat voulait mettre fin à la «guerre des tranchées» qui s'était déclenchée entre les partisans du métro automatique léger (majoritaires à l'époque au Grand Conseil) et les partisans du tramway, ce qui risquait de bloquer tout le processus de développement du réseau des TPG. Il misait, en conséquence, sur la complémentarité des trois réseaux étudiés.

1992: plan du réseau horizon 2000-2005

Le Conseil d'Etat poursuivit les études dans ce sens, adopta le 31 janvier 1990 le plan directeur du réseau des TPG 1990-1994 et présenta des rapports successifs sur le projet du futur réseau, devenu le réseau horizon an 2000-2005. Le rapport final porté à l'ordre du jour du Grand Conseil du 18 juin 1992 recommande l'adoption d'un «réseau de base pour les transports publics de l'agglomération, réalisable à l'horizon 2000-2005, soit une échéance appréhendable, qui comprend:

 une infrastructure lourde associant:

 un métro automatique léger reliant le centre-ville (Rive) à Meyrin, avec un prolongement ultérieur vers l'hôpital cantonal et au-delà;

 le réseau de quatre lignes de tramway déjà prévues par le plan directeur des transports publics 1990-1994, et dont la réalisation va au-delà de 1995;

 une infrastructure légère adaptée de lignes de véhicules sur pneus.

Ce rapport indiquait que le Conseil d'Etat ne faisait pas de propositions pour un réseau RER, vu le coût de celui-ci à la charge du canton, et comportait un projet de loi modifiant et complémentant la loi sur le réseau des transports publics approuvé en votation populaire.

1993: le réseau futur des transports publics est enfin adopté

Le 12 février 1993 le Grand Conseil approuva ce projet de loi et adopta ainsi le nouveau réseau des transports publics prévoyant la réalisation, matérialisée par un plan annexé à la loi:

 d'une ligne de métro Rive-Meyrin réalisée en deux étapes, la première reliant Rive à Cornavin;

 d'une extension du réseau tramway avec la ligne 13 reliant le rond-point de Plainpalais à Cornavin avec des étapes ultérieures successives en direction de Sécheron (branche Sécheron) et Lancy (branche Acacias), y compris la liaison entre les Palettes et le Bachet-de-Pesay. Une liaison entre Bel-Air et le pont de la Coulouvrenière était également prévue afin d'assurer la jonction entre la ligne 12 et la ligne 13 à partir de Bel-Air.

L'article 4 de la loi prévoit que le Conseil d'Etat présente tous les deux ans au Grand Conseil un rapport sur l'état d'avancement de la réalisation des infrastructures prévues par la loi et la prochaine étape de réalisation ainsi que les modalités de financement des infrastructures.

L'article 9 de la loi dispose que le financement des infrastructures nouvelles de métro et de tramway est assuré notamment par une participation de l'Etat inscrite au budget de l'Etat jusqu'à concurrence de 30 millions de francs par an.

Le chantier de la ligne de tram 13 fut ouvert durant le premier semestre de l'année 1993, au courant de laquelle le plan général de la ligne de métro Rive-Meyrin fut mis à l'enquête publique. Début décembre 1993, le projet d'extension du réseau tram, dont les plans étaient achevés, et la demande de concession y relative, fut adressé à l'office fédéral des transports pour sa mise à l'enquête publique, qui ne fut ouverte qu'au mois de mars 1995.

1995: le Conseil d'Etat remet en cause 20 ans de travail !

C'est à ce moment-là que le Conseil d'Etat a remis aux députés un rapport succinct portant sur un nouveau projet de «métro léger transfrontalier» à voie métrique visant à relier l'agglomération d'Annemasse, Genève et le pays de Gex. Du dossier, il résulte qu'il ne s'agit nullement d'un métro, qui exige un site propre intégral, mais d'un tramway qui relierait Annemasse à la gare des Eaux-Vives en empruntant la voie de chemin de fer existante, avant de se raccorder à la ligne de tram 12 jusqu'à Bel-Air et grâce à la future liaison avec le pont de la Coulouvrenière rejoindre la gare de Cornavin par la ligne de tram 13. Une seconde étape prévoit la réalisation d'une ligne de tram en direction de Meyrin, puis ultérieurement vers Saint-Genis.

Cette ligne de tramway remplacerait la ligne de métro prévue entre Rive et Meyrin. Elle implique une convention internationale entre la Suisse et la France, complétée d'un accord tripartite entre les autorités locales concernées et les TPG, en tant qu'exploitants de la future ligne transfrontalière. Un accord devra être trouvé sur le choix du matériel et surtout les études du tracé de cette nouvelle ligne entre Cornavin et Meyrin devront être entreprises.

Dans son rapport du 26 avril 1995 sur la mise en oeuvre de la loi sur le réseau des transports publics, qui aurait dû être consacré d'après l'article 6 de loi sur le réseau des transports publics à l'état d'avancement des futures lignes de métro et de tramway, le Conseil d'Etat, après avoir évoqué un certain nombre d'adaptations du réseau d'infrastructure légère, aborde les études de l'infrastructure lourde en évoquant en deux pages seulement le projet de métro franco-genevois pour lequel il a donné sa préférence. Il annonce qu'il proposera au Grand Conseil de renoncer en conséquence au projet de métro automatique léger et de modifier la loi sur le réseau des transports publics et le plan annexé dans ce sens.

En ce qui concerne des lignes de tramway, également évoquée en deux pages seulement dans ce rapport le Conseil d'Etat indique qu'il entend, pour le moment, réaliser uniquement la petite liaison entre Bel-Air et le pont de la Coulouvrenière par la rue du Stand ainsi que le prolongement de la ligne de tram 12 depuis le Bachet-de-Pesay aux Palettes, programmée depuis 10 ans et dont la réalisation, différée depuis 5 ans, est liée aux travaux d'évitement autoroutier de Plan-les-Ouates actuellement en cours. En ce qui concerne les trois autres lignes de tram correspondant à la prolongation de la ligne de tram 13 en direction de Sécheron, d'une part, et des Acacias, puis de Lancy, d'autre part, le Conseil d'Etat indique qu'«elles ne devraient être exploitées qu'après la mise en service du métro entre Annemasse et Meyrin, selon un calendrier et des modalités d'exploitation qu'il est prématuré d'esquisser aujourd'hui».

ANNEXE

feuille A4

Plan A4

Débat

M. Christian Grobet (AdG). Lors de la dernière séance du Grand Conseil, nous avons évoqué le rapport du Conseil d'Etat portant sur le développement du réseau des transports publics genevois. Ce rapport mentionnait notamment la recommandation du Conseil d'Etat d'abandonner le projet d'un métro automatique au profit d'un nouveau projet, le métro léger, pour relier Annemasse à la gare de Cornavin, dans un premier temps, la gare de Cornavin à Meyrin, dans un deuxième temps.

Ce rapport a déjà fait l'objet d'une première séance de la commission des transports où, d'emblée, les difficultés inhérentes à ce nouveau projet sont apparues. L'opportunité de réaliser en priorité un doublet du tram 12, alors que d'autres besoins en transports publics ne sont pas satisfaits, a également été évoquée.

Il est évident que la mise au point du projet, envisagé aujourd'hui par le Conseil d'Etat, prendra de nombreuses années. Il y aura un grand nombre de difficultés à surmonter. Les oppositions les plus diverses se manifesteront. De plus, il faut savoir que la procédure d'obtention d'une concession fédérale est particulièrement longue. J'en veux pour preuve que la demande de concession pour l'extension du réseau tramway, faite sur la base d'un dossier très élaboré et déposée par les TPG le 8 décembre 1993, a été étudiée pendant plus de quinze mois par les autorités fédérales. Et comme M. Stucki l'a relevé, les autorités fédérales ont demandé des adaptations avant que cette demande de concession ne soit mise à l'enquête publique dans le courant du mois de mars.

Dès lors, il est indispensable que le projet d'extension du réseau du tram 13 soit réalisé prioritairement, tel qu'il a été étudié et mis au point, et tel qu'il a fait l'objet de la demande de concession précitée. Il est incompréhensible que le Conseil d'Etat veuille reporter la réalisation de l'extension de la ligne 13, dont la première étape vient d'être inaugurée avec un magnifique succès, à l'échéance de la mise en service de la deuxième étape du projet de métro léger Annemasse-Meyrin. Autant dire que c'est reporter cette extension à dix ans, voire aux calendes grecques !

Or, quand le projet de la ligne du tram 13 entre le Rond-Point de Plainpalais et Cornavin a été élaboré, le Conseil d'Etat avait considéré, fort justement, que cet investissement ne se justifiait que dans la mesure où cette ligne 13 était prolongée, d'une part, en direction de Sécheron, c'est-à-dire à l'aboutissement de l'autoroute Lausanne-Genève, à l'entrée est de Genève, et, d'autre part, jusqu'aux Acacias, à savoir au débouché de l'autoroute de contournement sur la route des Jeunes.

Le Conseil d'Etat avait même demandé que ces deux branches supplémentaires soient complétées, à Sécheron et aux Acacias, par deux parkings d'échange.

L'autoroute de contournement, avec l'évitement de Plan-les-Ouates, sera définitivement achevée d'ici deux ou trois ans. Dès lors, un flot important de voitures se déversera, via la route des Jeunes, sur la route des Acacias et au quartier de la Jonction, où les entrées de la ville sont déjà engorgées. Par voie de conséquence, il est urgent que soit réalisé le complément indispensable à l'autoroute de contournement, à savoir le tram - ce moyen de transport enfin reconnu pour sa performance ! - afin de rendre possibles les déplacements jusqu'au centre-ville.

Le but de cette motion vise à ce que les promesses faites à l'époque soient tenues. A cet égard, je souligne que les extensions du tram 13 en direction de Sécheron et des Acacias avaient bel et bien été programmées, contrairement à ce qu'a déclaré M. Stucki, directeur des TPG, devant la commission des TPG. Il semble avoir oublié que le Conseil d'Etat les avait intégrées dans le plan directeur des transports publics pour la période 1990-1994. Il faut dire que l'on espérait, à l'époque, que le chantier de la ligne 13 s'ouvrirait en 1991 et non en 1993. C'est d'ailleurs en raison de ce retard de deux ans, dû aux problèmes liés à l'obtention de la concession, que le chantier de ces deux branches n'a pas pu être ouvert dans le cadre du plan directeur des transports publics 1990-1994.

Toujours est-il que le Grand Conseil lui-même, dans la loi du 12 février 1993, a adopté le plan d'extension du réseau tramway, dont les branches Acacias et Sécheron, tel qu'il figure sur le plan annexé à la loi.

Nous vous demandons, par conséquent, de bien vouloir renvoyer cette motion en commission pour qu'elle soit traitée simultanément avec le rapport du Conseil d'Etat, relatif à l'extension du réseau tramway, et pour que les engagements pris et la volonté exprimée par ce Grand Conseil dans la loi du 12 février 1993 soient respectés.

M. Philippe Joye. Je réponds aux invites de cette proposition de motion 1004 qui, évidemment, sera renvoyée en commission.

1) La première invite et notre choix du premier tronçon de métro léger.

Pourquoi avons-nous choisi, pour ce premier tronçon, le trajet Cornavin-Annemasse ? Ce choix a été dicté par l'idée de montrer au plus vite un résultat tangible de la politique des transports. Ce passage était relativement facile à réaliser, parce que disposant d'un tracé prêt à recevoir une infrastructure ferroviaire nouvelle. Les comptages ont permis de recenser cent mille passages quotidiens de la frontière à Fossard-Mon Idée, dont la moitié hors des heures de pointe. Cela prouve l'existence d'une demande importante pour ce tronçon.

2) La deuxième invite et l'extension du réseau tramway.

Je vous donne l'état exact des demandes. Les procédures d'obtention de la concession fédérale sont en cours pour les cinq sections suivantes : Stand, Acacias, Grand-Lancy, Palettes et Sécheron. La priorité est donnée à la réalisation des sections Stand et Palettes, le reste suivra et la liaison Cornavin-Meyrin également. Il n'y a pas d'interruption prévue dans les processus de demandes de concessions. Il est normal de terminer le réseau de la rive gauche et de poursuivre, comme cela vient d'être dit, vers Sécheron et Stand.

3) Pour ce qui est de la troisième invite, mon département a pu fournir les ordres de grandeur suivants pour ce qui est du coût des études consacrées au projet des transports publics : 800 000 F en 1985, pour les trams de la croix ferroviaire; 800 000 F en 1987, pour l'étude d'opportunité et de faisabilité d'un métro automatique léger; 13 800 000 F de 1989 à 1994, pour les études TC 2000, soit environ 15 400 000 F. Les études TC 2000 comprennent notamment les études du réseau ferroviaire, ainsi que les études de la ligne du tram 13. Ces dernières, comme on le sait, ont été concrétisées.

4) La quatrième invite et les résultats de l'enquête publique.

L'Office fédéral des transports a délégué l'office des transports et de la circulation pour mener l'enquête publique portant sur la demande d'extension de la concession de tramways aux cinq sections figurant au plan annexé à la loi sur le réseau des transports publics. Les remarques, les questions et les oppositions formulées dans le cadre de l'enquête publique seront publiées et pourront faire l'objet d'un débat dès qu'elles auront été traitées.

5) Je conclus en répondant à la dernière invite.

Dans la demande de concession déposée en 1993, le coût estimé à la charge de l'Etat pour la réalisation des cinq sections était de 155 millions, celui de la réalisation des deux prochaines sections, Stand et Palettes, se montant à 15 millions par an.

Je vous serais reconnaissant de renvoyer la motion en commission, parce que l'on pourra y discuter, sereinement et techniquement, de tous les problèmes.

M. Hervé Dessimoz (R). La motion de l'Alliance de gauche me semble superfétatoire sur le fond, du fait qu'une majorité de ce parlement, lors de la dernière session, a renvoyé le rapport du Conseil d'Etat en commission pour y discuter des options prises par le gouvernement.

Par conséquent, j'estime que cette motion est inutile.

Néanmoins, après avoir écouté M. Grobet, je tiens à rappeler certaines choses, puisque je présidais la commission des transports pendant le débat sur la loi des transports.

La ligne 13 a fait l'objet d'une négociation très serrée entre les commissaires et le Conseil d'Etat pour que soit garantie la réalisation du métro automatique léger. Nous avions ainsi négocié une priorité avec la réalisation, d'abord, de la ligne 13, puis avec celle de la première étape Cornavin-Rive du métro. M. Grobet lui-même, en tant que président du département des travaux publics, était venu déposer devant la commission sur ce projet.

Les étapes d'extension Cornavin-Meyrin et les étapes de l'extension de la ligne 13 étaient prévues à l'échéance de 2005. Personnellement, je suis très à l'aise, Monsieur Grobet, par rapport à ce problème, puisque dans un article écrit le 3 juin 1993, je disais ceci : «A propos du métro, le coût des deux étapes est à peu près similaire, malgré les longueurs de dessertes très différentes, tout simplement par le fait que l'étape Cornavin-Rive doit passer sous le lac et sous les rues de Genève. La densité des liaisons transport public au centre-ville nous permet d'imaginer que la liaison Cornavin-Rive puisse être exécutée en deuxième étape. La liaison entre la ville de Meyrin et la gare de Cornavin, passant par l'aéroport de Cointrin, posant moins de difficultés techniques, constituant un segment plus spectaculaire du réseau, devrait sensibiliser plus de monde à utiliser régulièrement les transports publics.». Je concluais en disant que cette liaison, en première étape, constituerait également un service appréciable pour la commune de Meyrin, qui compte plus de vingt mille habitants. Et en cela, je ne suis pas tout à fait d'accord avec le conseiller d'Etat Philippe Joye, quand il estime que la priorité est sur la rive gauche, plutôt bien desservie avec la ligne du tram 12.

La motion, du fait qu'elle reprend des arguments que nous avions à l'époque défendus en commission, mérite d'y être renvoyée, mais je pars du principe que, sur la base du rapport du Conseil d'Etat, on pouvait entamer la discussion sans la porter, ce soir, au niveau du parlement.

M. Chaïm Nissim (Ve). Après avoir lu ce projet de motion, j'ai relu le rapport du mois dernier, le RD 240. En les comparant, j'ai été très frappé par le fait que nous nous apprêtons peut-être à dépenser un milliard pour construire la traversée de la rade. Or, ce milliard pèse de tout son poids sur les décisions que nous prenons en ce moment, concernant les transports publics. Je ne doute pas que le Conseil d'Etat est convaincu que le tronçon Cornavin-Meyrin est tout aussi urgent, sinon plus, que le tronçon qu'il s'apprête à construire en premier. Malheureusement, il est beaucoup plus cher. Il revient à 325 millions au lieu des 125 millions du tronçon Cornavin-Annemasse qui, lui, comporte déjà la voie de la micheline.

Je pense que, par manque d'argent, l'on prend des décisions pas forcément intelligentes, à long terme, pour le développement des transports publics. Il en est de même, à mon avis, pour les développements de la ligne 13. Il est urgent, et tout le monde sera d'accord dans ce Grand Conseil, de la prolonger jusqu'aux Palettes, d'un côté, et jusqu'à la place des Nations, de l'autre. Mais là encore, on manque d'argent, parce que l'on s'apprête à dépenser peut-être un milliard pour la traversée de la rade.

Je voudrais donc lancer un appel pour que cette votation ait lieu le plus vite possible, afin que nous sachions enfin si nous allons dépenser ce milliard ou pas. Dans la négative, et c'est évidemment le souhait des écologistes, nous aurions de l'argent pour prolonger la ligne du tram 13 et pour construire les tronçons les plus urgents du métro transfrontalier léger.

M. Michel Balestra (L). Cette motion est plutôt bien faite, plutôt exhaustive. Je ne dirais pas qu'elle est neutre dans ses objectifs, mais elle présente l'avantage de donner un support cohérent de discussion dans le cadre de la commission des transports, et ce en parallèle avec le rapport du Conseil d'Etat.

Vous vous souviendrez que je n'étais pas favorable au renvoi du rapport du Conseil d'Etat à la commission des transports. En revanche, mon groupe et moi le sommes pour cette motion, pour la bonne et simple raison que nous pourrons discuter d'options plus tranchées et plus fondamentales.

Toutefois, l'on y perçoit un procès d'intention au Conseil d'Etat. C'est dommage, parce qu'il fait bien son travail. Mais c'est la tâche de l'opposition de présenter des propositions différentes de celles du gouvernement en place. Il est regrettable que dans un exposé des motifs si exhaustif sur l'histoire, sur l'aventure, sur le périple du développement des transports publics à Genève, vous ayez oublié, Monsieur Grobet, de signaler qu'en 1975 la priorité aux transports publics avait été refusée par le peuple, suite au vote d'un référendum lancé par le TCS. C'est juste un tout petit oubli mais, malgré tout, je crois que, partis comme nous le sommes, nous pourrons faire un travail très constructif en commission.

M. Jean Spielmann (AdG). Certains font remarquer qu'il y a déjà un rapport et que l'on a déjà débattu des options prises par le Conseil d'Etat, mais je relève, quand même, de nombreuses contradictions.

On a dit que l'on pouvait examiner, en parallèle, le rapport du Conseil d'Etat renvoyé en commission et la motion. Mais les options divergent : il y a celles présentées par le RD 240 et celles préconisées dans la motion déposée aujourd'hui. C'est notamment le cas pour ce qui est du choix des réalisations, et c'est fondamental. Le tram 13 et l'écho très positif qu'il a suscité devraient nous engager pour la réalisation la plus légère et la plus rapide du développement des voies de tram, et nous inciter à déterminer, à la lumière des différents problèmes de la circulation, les tronçons les plus urgents à construire.

Dans son rapport 240, le Conseil d'Etat a clairement opté pour la rive gauche - il l'a confirmé tout à l'heure - avec le tronçon Cornavin-Annemasse. Or, on sait que ce trajet suscitera nombre d'interrogations, de remises en cause, de discussions concernant la voie de la micheline, entre autres avec les Français par rapport à la région transfrontalière, etc. En revanche, sur la rive droite, l'on ne peut plus se permettre d'attendre le départ de la mise en place d'un réseau de transport sur la route de Meyrin. Au passage, je rappelle qu'il était prévu de doter cette route d'une piste cyclable et d'un tram en site propre, lors du vote par ce Grand Conseil de son crédit de construction. Néanmoins, le Conseil d'Etat a construit la route de Meyrin sans respecter le vote du Grand Conseil, ce qui fait qu'aujourd'hui, sur cet axe, des gens ne peuvent pas monter dans le bus, faute de places aux heures de pointe, notamment aux Avanchets et à d'autres arrêts. Aujourd'hui déjà, il n'est plus possible de répondre à la demande de transport, malgré des bus de grandes dimensions et les essais faits avec des méga-bus. Aussi faudra-t-il, dans un avenir très proche, trouver le moyen de transport le plus performant, à savoir le tram, pour la route de Meyrin.

Dans la motion que nous défendons, il est vrai que nous reprenons l'option du Conseil d'Etat de prolonger la ligne 13 en direction de Sécheron et des Palettes, mais nous reprenons également celle qui donne la priorité à l'accélération des processus de réalisation sur la route de Meyrin, et c'est une priorité absolue ! En effet, le RD 240 dit en substance : «Nous allons construire jusqu'à Annemasse, ensuite nous examinerons le reste.». Ce n'est pas raisonnable. Il faut faire ce qui est possible, au moindre coût et le plus rapidement possible, afin d'insuffler une dynamique.

Monsieur Balestra, il est vrai qu'en 1975 la priorité absolue avait été refusée aux transports publics, mais de 1975 à aujourd'hui, les choses ont considérablement évolué et tout le monde se rend compte que si nous voulons créer des conditions-cadre favorables au développement économique, au déplacement des personnes et à des transports répondant aux besoins sociaux, on ne peut le faire, en milieu urbain, qu'en développant les transports publics. Le transport individuel, tout aussi nécessaire, devient complémentaire, parce qu'il a une fonction autre.

Il faut utiliser intelligemment nos deniers publics pour les investir sur les tronçons qui peuvent être rapidement mis en chantier. Les autorisations existent. Il n'y a pas d'opposition du côté des Acacias. De plus, des promesses ont été faites à la communauté carougeoise, lors de la réalisation du prolongement de la ligne 13 et du dépôt. On lui avait promis, en effet, de dégager cette artère en construisant un dédoublement jusqu'aux Palettes, du côté des Acacias. Il s'agit là aussi d'un secteur qui nécessite un développement urgent de transports publics.

Cette motion vient à son heure. Elle permettra à la commission de faire les choix qui s'imposent aujourd'hui. Il y a des contradictions évidentes entre la motion et le rapport 240 et il faudra les trancher. Pour ma part, je suis satisfait de constater que pratiquement sur tous les bancs de ce Grand Conseil, on accueille favorablement nos propositions. Je suis persuadé que la raison l'emportera et que les réalisations seront menées dans l'esprit même de cette motion.

M. Christian Grobet (AdG). Avant de répondre à M. Dessimoz, dont la déclaration ne correspond pas à la réalité, je voudrais revenir aux propos de M. Balestra. A juste titre, il a relevé que l'initiative sur les TPG, concrétisée par la suite, avait été rejetée en 1975, à l'issue d'une votation populaire. Mais elle ne l'avait été que sur un seul point, à savoir celui de «priorité absolue» des transports publics sur le trafic automobile. Cela ne signifiait pas que le peuple était opposé au développement des transports publics.

Le rappel historique des études, depuis 1975, annexé à la motion, n'est que le résumé, Monsieur Balestra, d'une longue saga qui aurait pu faire l'objet de tout un ouvrage. Par ce rappel, nous avons voulu simplement démontrer que c'est depuis 1975 que l'on parle du développement du réseau lourd des TPG et, plus particulièrement, du réseau tramway.

Alors, si l'on en parle depuis vingt ans et que l'on procède à des études - et je remercie M. Joye d'en avoir indiqué le montant élevé - c'est vraiment le moment de passer à la concrétisation et pas celui de reporter, après avoir réalisé avec succès le premier tronçon de la ligne 13, la suite de l'opération à dix ans.

Je suis navré d'apprendre, de la part du Conseil d'Etat, que ce dernier envisage de continuer à n'investir qu'une quinzaine de millions de francs par année pour le développement du réseau des TPG, alors que la loi prévoit que le montant attribué peut atteindre trente millions annuellement, et que cet énoncé était même destiné à induire un effort comparable à celui consacré, ces huit dernières années, à l'autoroute de contournement.

Or, que constate-t-on ? Alors qu'on voulait réduire l'effort pour l'autoroute de contournement, les investissements annuels y relatifs passent de trente à cinquante millions et, pour les TPG, on continue à piétiner avec douze ou quinze millions par année. Si, véritablement, il y a volonté, depuis vingt ans, de développer le réseau des TPG, c'est le moment de réaliser les projets qui sont prêts. Nous avons donc entendu avec satisfaction la déclaration de M. Joye qui diffère du rapport du Conseil d'Etat, puisque vous avez dit, Monsieur Joye, que les cinq sections mises à l'enquête publique seraient réalisées successivement, alors que le rapport du Conseil d'Etat, datant d'un mois, mentionne que trois de ces sections, à savoir les extensions de la ligne 13, seraient reportées à l'achèvement de la deuxième étape du métro léger Annemasse-Meyrin.

Je ne voudrais pas, Monsieur Dessimoz, qu'il y ait malentendu. Il est faux de dire, comme vous l'avez fait, qu'il avait été convenu que l'extension du tram 13 se ferait à partir de 2005. (Protestation de M. Dessimoz.) Alors, je vous ai mal compris. Toujours est-il que le plan du réseau annexé à la loi du 12 février 1995 est un réseau «Horizon 2005», ce qui veut dire qu'il devra être achevé à ce moment-là. L'idée, sans doute trop ambitieuse, était de réaliser simultanément le réseau tram et la ligne de métro automatique léger, avec, comme vous l'avez souligné, une première étape Rive-Cornavin.

Mais vous savez aussi bien que moi, Monsieur Dessimoz, que la mise au point du projet de métro allait prendre plusieurs années. Par conséquent, l'idée était d'avancer avec le réseau tram en attendant que démarre le réseau métro.

Le réseau métro automatique étant aujourd'hui reporté, vous savez comme moi et vous particulièrement, Monsieur Joye, en tant que chef du département des travaux publics, que l'étude d'un nouveau tronçon de tramway, qu'il s'agisse de celui de Cornavin-Meyrin qui, pour nous, est prioritaire, ou de celui Gare des Eaux-Vives-Annemasse, nécessite cinq ans, au minimum.

M. Claude Blanc. De votre temps, peut-être...

M. Christian Grobet. De mon temps, on a souligné la rapidité de la réalisation de la ligne du tram 13 et je souhaite au Conseil d'Etat de garder ce rythme. Je m'en contenterai, Monsieur Blanc !

En disant cinq ans, je suis même optimiste eu égard aux nombreuses difficultés qui surviendront. Par exemple, quand vous parliez de sites réservés, le projet, pour autant qu'il existe, n'a même pas résolu le problème des passages à niveau entre la gare des Eaux-Vives et Annemasse, qui incontestablement doivent disparaître sur une telle ligne.

Si on veut vraiment aller vers la France, il serait plus intelligent de prolonger simplement la ligne 12, à partir de Moillesullaz en direction d'Annemasse, en passant dans les quartiers résidentiels, ou, autre variante que j'avais suggérée en son temps, de remonter, depuis Moillesullaz, le Foron jusqu'à la ligne SNCF.

En revanche, je ne vois aucun sens au doublement de la ligne 12 entre Moillesullaz et la gare des Eaux-Vives et je suis ravi de vous entendre dire, Monsieur Joye, que nous serions sur la même longueur d'onde. (Contestation de M. Joye.) Inutile de froncer les sourcils, Monsieur Joye, on a le droit d'exprimer ses opinions... (Brouhaha.)

La présidente. Mais voyons, comme tout le monde est d'accord de renvoyer la motion en commission...

M. Christian Grobet. Mais cette dénégation est grave. Cela a été dit au caucus du PDC, voilà ! Je disais donc qu'il semblait y avoir un acquiescement du Conseil d'Etat, ce dont je me réjouissais, et qu'il serait plus rapide et efficace de prolonger la ligne du tram 12 de Moillesullaz à Annemasse, et que les Français la paient ! En attendant, que l'on réalise les tronçons programmés !

Dernière observation, Monsieur le conseiller d'Etat, si j'étais heureux de vous voir acquiescer à l'idée de la prolongation de la ligne 12, en revanche, j'ai été déçu d'apprendre que vous ne vouliez pas indiquer, pour le moment, l'état des oppositions à la procédure d'enquête publique de la concession pour les cinq sections d'extension du réseau tramway. Je ne vois pas ce qui vous empêche de dire quelles sont, aujourd'hui, les oppositions qui se sont manifestées pendant l'enquête publique du mois de mars. Il n'y a aucune raison d'attendre que ces oppositions soient traitées pour les connaître.

M. Hervé Dessimoz (R). Très brièvement, j'entends dire à M. Grobet qu'effectivement l'objectif était de réaliser pour 2005, je cite : «une ligne de métro reliant Rive à Meyrin, ainsi que quatre lignes de tramway». Je n'ai pas dit le contraire !

Deuxièmement, si la ligne 13 a été rapidement réalisée, c'est qu'il y avait une volonté politique manifeste de l'ensemble du parlement pour ce faire. Je vous rappelle que le prédécesseur, chargé du département des transports publics, a fait la quasi-unanimité dans ce parlement, sur le sujet ! Son esprit d'ouverture et son souci de traiter équitablement les différentes tendances du parlement ont fait que nous avons voté ce projet de loi consensuellement et dans l'enthousiasme, et que nous avons approuvé la réalisation rapide de la ligne 13.

Je pars du principe que, si tout le monde consacre ses forces à la réalisation de la liaison Cornavin-Meyrin, qui m'apparaît essentielle et prioritaire, elle se concrétisera rapidement. Mais je tiens à rappeler que la prolongation de la ligne 13 était prévue en deuxième étape; qu'elle n'était pas la priorité du moment, qui était reconnue pour le tracé place des Augustins-Cornavin. Je vois, Monsieur Spielmann, que vous m'approuvez, vous étiez à la commission.

M. Philippe Joye. Il va de soi que les tronçons suivants, notamment le tronçon dont parle M. Grobet, seront mis à l'enquête au plus vite, dès que l'on aura terminé la procédure des cinq demandes de concession en cours.

Pour ce qui est de l'état des oppositions à ce jour, nous avions demandé l'autorisation de les publier à l'Office fédéral des transports. Ce dernier s'est opposé à ce que les remarques, les questions et les oppositions formulées dans le cadre de l'enquête publique soient publiées et débattues avant qu'elles ne soient traitées.

En ce qui concerne la densité de charge du processus de construction d'une ligne de tram, hommage peut être rendu aux TPG, au DTPE et aux entreprises. Ils ont effectué un travail impeccable et permis la relative fluidité du trafic. Mais l'on constate que l'on ne peut guère charger plus le réseau. Aussi, un rythme de construction de quinze millions de francs par an n'est pas incorrect. Si faire se peut, on l'augmentera.

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission des transports.

M 1010
12.  Proposition de motion de Mme Elisabeth Reusse-Decrey concernant le règlement d'application des dispositions sur le séjour et l'établissement des étrangers (F 2 3). ( ) M1010

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le Tribunal fédéral a rendu récemment son verdict concernant un ressortissant étranger abusivement détenu dans le canton de Berne, et souligné que certaines applications cantonales de la loi sur les mesures de contrainte étaient contraires à la Convention européenne des droits de l'homme.

Suite à cet arrêt, notre Conseil d'Etat a dû se rendre à l'évidence: le règlement qu'il avait édicté en février 1995 n'était pas compatible avec les décisions de notre justice suprême. Il a donc décidé de le modifier et d'en voter une nouvelle teneur, parue dans la Feuille d'avis officielle du 2 juin 1995.

Cependant, il semble que le Conseil d'Etat fasse fausse route car, avec ce nouveau règlement, il:

- déroge à un principe constitutionnel fondamental en matière de liberté individuelle, puisque le principe d'un contrôle de la détention par un juge au plus tard dans les 48 heures est inscrit dans notre constitution, et que, le 16 juin 1988, notre Grand Conseil avait clairement estimé ne pas pouvoir déroger à ce principe dans le cas de détention en vue de refoulement;

- durcit le règlement en doublant la durée de détention qui ne dépend que du pouvoir discrétionnaire d'un fonctionnaire de police;

- ne tient pas les promesses rassurantes qu'il a avancées à plusieurs reprises l'année dernière quant à une application modérée des mesures de contrainte;

- prend de nouvelles décisions dans ce dossier chaud, sans aucune concertation avec les milieux intéressés ni même en informer la commission judiciaire du Grand Conseil actuellement saisie d'un projet de loi sur ce dossier;

- ne respecte toujours pas l'obligation faite dans la loi fédérale que ces personnes privées de liberté, mais n'ayant commis aucun délit, soient détenues dans des conditions et des lieux autres que les personnes purgeant une peine pour des raisons pénales.

Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, nous souhaitons que le Conseil d'Etat modifie dans les plus brefs délais le règlement qu'il vient d'adopter le 31 mai 1995 concernant l'application de la loi sur les mesures de contrainte.

Débat

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Je dirai juste un mot pour rassurer les députés libéraux. Si je suis la seule signataire de cette motion, ce n'est pas parce que je détiens le monopole du coeur, mais parce que, vu l'urgence, je n'ai pas eu le temps de négocier avec qui que ce soit.

Je me suis appliquée à rédiger un exposé des motifs suffisamment détaillé pour ne pas développer cette motion ce soir.

Je demande son renvoi au Conseil d'Etat.

M. Philippe Joye. Madame la présidente, la modification d'urgence du règlement dans le sens proposé soulève des questions juridiques très complexes, qui, avant tout amendement, doivent être examinées sérieusement et d'une façon approfondie par le Conseil d'Etat. S'impose notamment une consultation préalable de l'autorité judiciaire concernée. Il en va de même pour ce qui est des conditions de détention faisant l'objet des griefs de la motionnaire.

En conclusion, je souhaiterais que cette proposition de motion soit renvoyée au Conseil d'Etat.

La présidente. C'est ce que nous propose Mme Reusse-Decrey.

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

motion

concernant le règlement d'application des dispositions sur le séjouret l'établissement des étrangers

(F 2 3)

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- la récente modification, par le Conseil d'Etat, du règlement d'application des dispositions sur le séjour et l'établissement des étrangers et concernant l'application de la loi sur les mesures de contrainte;

- la décision de prolonger à 96 heures une détention strictement administrative, sans aucun contrôle judiciaire;

- le chapitre sur la liberté individuelle de la constitution genevoise, qui consacre le principe d'un contrôle de la détention par le juge au plus tard dans les 48 heures et auquel le Grand Conseil avait estimé en 1988 ne pas pouvoir déroger pour les détentions en vue du refoulement;

- le non-respect de la loi fédérale qui stipule clairement que les conditions et lieux de détention doivent être appropriés à des personnes n'ayant commis aucun délit,

invite le Conseil d'Etat

à modifier d'urgence le règlement du 31 mai 1995, respectivement du 15 février 1995, en rétablissant le principe d'un contrôle judiciaire de la détention dans les 48 heures, cas échéant en donnant cette compétence à un juge unique du Tribunal administratif plutôt qu'à une section formée de trois juges de ce tribunal, et en définissant un régime de détention administrative dégagée des contraintes liées au secret et à la sécurité en matière de détention préventive.

 

La séance est levée à 23 h 25.