République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 18 mai 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 7e session - 23e séance
M 894-A
La commission des transports s'est réunie à quatre reprises pour débattre de cette motion. Présidée par notre collègue M. René Longet et en présence de M. le président du département de justice et police et des transports M. Gérard Ramseyer, M. François Brotsch, secrétaire adjoint, ainsi que de M. Sandro Manzoni à certaines séances.
«Le plus important, c'est de rendre le futur possible (A. de Saint-Exupéry). Mue par cette utopie technologique, la commission a été favorablement impressionnée par les propos de MM. Rodolphe Nieth et Pierre Weiss, porte-parole de ce projet ambitieux.
Les arguments ne manquent pas. Le concept révolutionnaire de Swissmétro: souterrain à vide d'air partiel, sustentation et guidage électromagnétiques, moteur linéaire, sont autant de technologies nouvelles qui propulseront la Suisse dans le peloton de tête des pays industriels en la matière.
L'augmentation constante du trafic (120 milliards de passagers), dont la voiture se taille la part du lion, soit 80% contre 18% au train, exige une technologie de pointe si l'on veut obtenir un transfert modal d'importance. Il faut donc diminuer le temps de parcours (57 minutes entre Genève et Zurich), augmenter la capacité d'un convoi (800 personnes), ainsi que la cadence dans les deux sens. Cette réalisation aurait en outre l'avantage de préserver l'environnement par l'absence de bruit et d'encombrement et délesterait les voies CFF pour le trafic régional et des trains de marchandise. Seule ombre au tableau, le coût: 25 à 28 milliards de francs si l'on réalise la liaison Genève-Saint-Gall (13 milliards) et Bâle-Bellinzone (12 à 15 milliards).
Il y a loin de la coupe aux lèvres. Le tableau positif ci-dessus n'a cependant pas annihilé le sens critique des commissaires, ce qui a conduit la commission à auditionner le professeur Philippe H. Bovy, de l'EPFL, ainsi que Théo Weiss, directeur de la traction et des ateliers CFF. Vous pouvez trouver le résumé que nous a transmis le professeur P.-H. Bovy à la chancellerie.
Après l'audition de ces deux personnalités, les questions sont plus nombreuses que les réponses. Pourquoi a-t-on vendu la peau de l'ours avant de l'avoir tué? Parler de demande de concession dans un délai de trois à quatre ans est non seulement illusoire, mais trompeur. La technologie du tube sous vide d'air est une pré-esquisse sur laquelle aucune recherche fondamentale n'a été entreprise en Suisse; c'est dire que, pour arriver à un prototype, ce n'est pas par année qu'il faut compter, mais par dizaine d'années.
Les USA, dans les années 70, ont fait des recherches dans un domaine similaire, recherches qu'ils ont abandonnées en raison des coûts prohibitifs et de l'extraordinaire complexité logistique de tels systèmes et des très hauts risques potentiels. Un point sur lequel les promoteurs sont relativement discrets, c'est la sécurité. Lorsqu'on connaît les exigences fédérales en la matière (par exemple la nécessité, dans un tunnel, de deux couloirs de 1,50 m de large longitudinalement, avec des sorties permettant de rejoindre un autre tunnel), on est en droit de se demander comment ce problème sera résolu dans un tube hermétique ne laissant qu'un espace de 20 cm entre les parois du tube et le métro.
La question du transbordement semble avoir été sous-évaluée (2 à 3 minutes selon les promoteurs). Une exploitation «sous vide» fonctionne avec des sas dans les stations pour assurer le transbordement des passagers à la pression atmosphérique, l'étanchéité des portes doit être parfaite, ce qui contraint d'en limiter le nombre. Comment alors prétendre que plusieurs centaines de voyageurs vont pouvoir descendre et monter en quelques minutes?
Mais revenons à l'aspect technologique de la propulsion par moteur linéaire, sustentation et guidage magnétiques. Après plus de 20 ans de recherches et plus de 3 milliards de dollars d'investissement en recherche et développement, les deux très grandes puissances industrielles mondiales que sont l'Allemagne et le Japon ne parviennent pas à mettre en exploitation commerciale un tel système. Et pourtant ils se sont limités au fonctionnement en surface et non sous-terre. C'est ce qui explique le peu d'enthousiasme de l'EPFZ et des industriels outre-Sarine qui portent un jugement plus pragmatique sur les gros investissements et la rentabilité à terme d'un tel projet.
Beaucoup d'autres questions restent ouvertes, comme l'eurocompatibilité. Tout ce qui est développé en Europe est à roues sur rail, type TGV. L'extraordinaire force du système TGV est la réutilisation/valorisation de tout le patrimoine ferroviaire existant, notamment les gares situées au coeur des villes. La croissance du réseau TGV s'effectue organiquement et graduellement par la création de nouveaux tronçons à haute vitesse (515 km/h, performance acquise en 1990 sur le tronçon Atlantique), cela en parallèle avec ce qui existe.
Les courtes distances entre les principales gares en Suisse sont-elles compatibles avec l'exploitation rationnelle du système, sans parler des coûts d'exploitation?
La Suisse se distingue par une offre de transports publics la plus complète du monde. Avec Rail 2000 sa performance peut s'améliorer de 17%. N'est-ce pas la direction à prendre? Investissements prévus: Rail 2000 (7,4 milliards), Alptransit (14 milliards), Swissmetro (28 milliards). Peut-on digérer tout cela?
Au terme de son rapport, le soussigné est tombé sur un article, dans les «Cahiers de l'électricité» de mars 1995, de Marcel Jufer, professeur à l'EPFL, sur l'étude de Swissmetro intitulé «L'heure de vérité en 1998». Le ton plutôt optimiste de cet article laissait entrevoir une réalisation prochaine d'un prototype. Or, force est de constater que les questions soulevées par le professeur sont encore plus nombreuses que celles émises par la commission. Cela confirme que la plupart des études menées sont à l'état de recherche fondamentale et pas encore à celui de la concrétisation.
La probité des propos du professeur Marcel Jufer m'incite à reprendre une partie de ses conclusions: «La conviction de ces divers partenaires de la nécessité d'une étude sérieuse du projet ne doit pas être confondue avec une volonté d'imposer la solution Swissmetro. Il s'agit surtout d'apporter de nouveaux éclairages dans le domaine des systèmes de transports avec, peut-être, une solution nouvelle, mais qui auront dans tous les cas des retombées utiles pour l'ensemble du secteur de transports. Cette phase durera quatre ans.»
Dans ce domaine éminemment technique et prospectif, la commission n'a pas voulu s'ériger en juge en prenant parti pour l'un ou l'autre des protagonistes. Par contre, la majorité des commissaires ne pouvaient suivre les motionnaires, tant dans les considérants que dans l'invite, ceux-ci étant un peu déphasés par rapport à la réalité. En conséquence, elle vous propose un tel libellé.
C'est par 10 oui et 3 abstentions que la majorité de la commission vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de soutenir, avec les modifications précitées, la motion 894.
Débat
M. Jean-Claude Genecand (PDC), rapporteur. Parfois l'actualité vient confirmer ou infirmer un rapport. En l'occurrence, l'information donnée, le 27 avril dernier, par les médias, au sujet de Swissmetro, est plutôt réjouissante.
En effet, le géant allemand, Daimler-Benz, a conclu un accord de collaboration avec le groupe suisse, en mettant 500 000 F dans la corbeille de la mariée.
Mais le plus important est l'expérience de vingt ans de recherches sur un moyen de transport à sustentation et guidage électromagnétique. Je rappelle que les recherches menées, tant en Allemagne qu'au Japon, concernent un métro à air libre et non souterrain, comme celui projeté par le groupe suisse.
M. Rodolphe Nieth a fait preuve, à la radio, du même optimisme qu'en commission, promettant, si tout allait bien, de donner le premier coup de pioche à la fin du siècle. Il a tout de même avoué que cette nouvelle collaboration permettrait de choisir le meilleur système de traction. C'est dire que les vingt ans de recherches de Daimler-Benz apporteront une contribution de poids, mais cela veut dire aussi que les ingénieurs suisses n'étaient pas dans une phase finale, comme ils l'ont prétendu en commission.
Si la commission n'a pas voulu s'ériger en juge dans un débat d'experts, c'est parce qu'elle n'en avait ni les moyens, ni les compétences.
Cependant, il faut garder la tête froide, tenir compte des incertitudes de ce projet et considérer, surtout, la distance qui sépare l'état actuel des recherches et la réalisation du prototype, voire sa commercialisation.
Sans risque de se tromper, on peut dire que cette distance équivaudra à une génération. Dès lors, il ne faut pas mettre tous les oeufs dans le même panier. Nos moyens financiers étant ce qu'ils sont, nous devons, pour l'heure, privilégier «Rail 2000» et les transversales alpines.
C'est pourquoi les conclusions de la commission suggèrent au Conseil d'Etat de suivre les travaux de recherche de cette nouvelle technologie, d'inciter surtout notre université à collaborer avec les promoteurs du projet et, subsidiairement, de faire rapport sur l'état d'avancement des travaux.
C'est dans cette perspective que la commission vous invite, dans sa majorité, à soutenir la motion nouvellement libellée.
M. Armand Lombard (L). Laissez-moi exprimer mon enthousiasme, non seulement vis-à-vis de la motion, mais par rapport à sa version au sortir de la commission.
Nous sommes devant un projet auquel, effectivement, Genève n'apportera pas grand-chose, ni un montant quelconque. Le canton de Genève peut seulement se positionner pour dire à un inventeur qu'il approuve son oeuvre, qu'il y a une direction à suivre et que le tout s'inscrit dans le cadre du développement de notre pays.
On pourrait considérer certains aspects de ce projet, et j'ignore si mes collègues écologistes m'autorisent à le dire, comme étant de pointe sur le plan de l'environnement et du traitement de l'environnement technologique moderne.
C'est peut-être aller loin, peut-être devrons-nous déchanter, mais il y a là une tentative de rechercher un système de transport différent de ceux qui existent, notamment de celui qui, n'ayant pu être utilisé en Allemagne, a fait que Daimler-Benz s'intéresse au projet suisse.
Les trains à grande vitesse, en surface et sur viaducs, étant à écarter, parce que bruyants et encombrants, ce projet pourrait être considéré comme une grande avancée technologique de la capitale de l'environnement que nous voulons fonder.
Je m'exalte, mais, après tout, il faut savoir rêver.
Par ailleurs, il est très important, en matière de politique suisse des transports, de prévoir des transversales qui nous lieront à un système de transport européen et qui permettront peut-être - pourquoi pas ? - à notre pays ou au promoteur d'un tel projet, de développer ce système de transport européen.
Il est donc important de soutenir cette motion, car nous demandons, nous, libéraux, au canton et au Conseil d'Etat de dire le soutien des institutions politiques à un projet technique de grande envergure.
Cette proposition n'a rien de surprenant, car il est nécessaire d'utiliser, dans un partenariat bien compris, tous les éléments d'une communauté, d'une cité, qu'il s'agisse de ses institutions politiques, de ses entreprises ou de ses chercheurs, pour établir un projet qui ait une chance de se concrétiser.
J'aimerais encore juste mentionner à M. Genecand que j'ai été auditionné par la commission, à laquelle j'ai eu le privilège d'inviter MM. Nieth et Weiss - ce qui n'est pas mentionné dans son excellent rapport.
Avec un projet tel que celui-ci, à l'instar d'un institut du cerveau qui était le projet de base de Swissexpo, nous avons affaire à une vision de développement technologique bien plus enthousiasmante que certains projets «microscopiques».
Je vous serais donc reconnaissant de soutenir cette motion marquée au sceau de l'espoir en l'avenir.
M. Chaïm Nissim (Ve). Je me joins à mon préopinant pour féliciter M. Genecand de son excellent rapport. Sa teneur me redonne confiance dans notre système politique. Je trouve extraordinaire qu'un député, qui se trouve être artisan-boulanger, ait une telle hauteur de vue... (Rires et exclamations.) ...qu'il parvienne à considérer un projet aussi complexe avec autant d'honnêteté, à démontrer tout ce qu'il contient de fou, de critique et de logique.
C'est un rapport exemplaire qui nous montre comment on devrait travailler dans ce Grand Conseil.
M. Jean-Philippe de Tolédo (R). Il est vrai que ce rapport est excellent et qu'il parle d'un concept révolutionnaire pour Swissmetro.
Au-delà des obstacles techniques et des batailles d'experts inhérents à un concept aussi novateur, il faut souligner l'esprit d'entreprise et la créativité qui en ressortent.
Esprit d'entreprise, créativité, voilà deux éléments essentiels à la revitalisation de notre économie tragiquement morose.
Tout doit donc être fait pour encourager et soutenir les entrepreneurs et créateurs d'aujourd'hui, car ils osent prendre des risques, en dépit d'innombrables entraves commerciales, administratives et juridiques, souvent très difficiles à surmonter.
Si Genève pouvait se distinguer en soutenant des projets novateurs ou, mieux encore, en accueillant des entrepreneurs créatifs - bientôt nous aurons l'occasion de vous faire des propositions dans ce sens - cela serait très cohérent avec «l'esprit de Genève».
Pour toutes ces raisons, le groupe radical vous invite à soutenir cette motion.
M. Pierre Vanek (AdG). Je serai bref, nos propos, ce soir, n'ayant pas pour objet de rouvrir tout un débat sur Swissmetro. De plus, en commission, nous avons eu des informations très intéressantes, qui sont à disposition des groupes et des députés.
Je me contenterai de faire quelques observations.
D'abord, je ne suis pas surpris qu'un artisan-boulanger puisse avoir une hauteur de vue et dire des choses intelligentes en politique. (Applaudissements.) Pour répondre à M. Chaïm Nissim, il y a, dans cette République, des ouvriers, des employés, des gens simples, des mères de famille, qui sont parfaitement capables d'avoir une certaine hauteur de réflexion par rapport aux considérations parfois émises dans cette enceinte.
Concernant l'enthousiasme du rapporteur à propos des 500 000 F placés par Daimler-Benz dans ce projet, je ne dirais pas, venant d'une telle entreprise, qu'il s'agit d'un investissement énorme et d'une marque de confiance absolue. C'est un petit «sugus». D'ailleurs, l'essentiel du débat n'est pas là.
Ensuite, nous avons entendu M. Lombard présenter Swissmetro comme un grand projet écologique. Je ne partage pas cette opinion. Je crois que Swissmetro est un projet qui va à l'encontre d'une politique des transports qui tient compte, pour ce pays, des critères écologiques.
Mais j'ai aussi entendu, avec satisfaction, que M. Lombard était enthousiasmé par la motion telle qu'elle est ressortie des travaux de la commission. Si mes souvenirs sont exacts, ses collègues libéraux n'avaient pas accepté la version amendée que nous avions soutenue. Aussi, voudrais-je souligner le fait que la version amendée a, à mes yeux, le mérite de remplacer les invites de la motion initiale qui demandait l'intérêt actif du Conseil d'Etat, ce qui, évidemment, est maintenu, mais également le soutien des autorités genevoise à ce projet. Nous avons supprimé cette dernière invite, estimant que l'on ne se trouvait pas dans une phase où l'on pouvait engager le soutien du canton de Genève. Il fallait s'y intéresser, et non pas le soutenir.
La deuxième invite, également retirée, demandait que le canton de Genève participe, avec les autres cantons romands, à un programme de promotion du projet de Swissmetro. Nous avons évité, là aussi, d'avoir à nous prononcer de manière prématurée, quand on connaît l'état d'avancement de l'élaboration de ce projet.
Quant à la troisième invite de la motion initiale, qui demandait un rapport avant la fin 1994, il n'est guère besoin d'en parler.
Nous soutiendrons donc la motion dans sa version amendée par la commission.
M. René Longet (S). Je dirais d'abord à notre ami Chaïm Nissim que, le jour où les ingénieurs parviendront à faire des petits pains comme M. Genecand, notre monde se portera mieux ! Ceci pour la petite histoire.
Sur le fond, nous pouvons, aujourd'hui, nous rallier à ce texte, car, lors de sa présentation, il nous a paru, à la fois, partiel et trop enthousiaste.
Il ne s'agit pas pour nous de modérer cet enthousiasme, mais d'insister sur le fait que la commission a réussi à situer ce projet dans son contexte.
Ce ne sont pas les grands projets qui manquent ! Ce qui fait défaut, en revanche, ce sont les grands projets qui aient un sens et qui réussissent. Et dans le domaine des transports, nous commençons à avoir quelques soucis. Le projet «Rail 2000», soumis au vote voici dix ans, est sérieusement enlisé. Les prix s'envolent. Idem pour les tunnels alpins. Il est donc clair qu'avant de se lancer dans d'autres grands travaux, des transports absolument nouveaux, du troisième type, en quelque sorte, il faut situer le projet dans son contexte et refuser de foncer, tête baissée, ceci n'ayant rien à voir avec un refus des innovations technologiques.
Le balisage effectué nous paraît excellent. En effet, après avoir travaillé en commission et auditionné les uns et les autres, nous avons introduit dans la motion des critères qui nous semblent importants :
- le critère élémentaire de l'eurocompatibilité, puisqu'on ne va pas faire un Swissmetro que pour la Suisse;
- le critère, tout aussi évident, de la sécurité;
- le critère du coût;
- le critère du transfert modal en surface. Si l'on réalise ce type de transport au cours du XXIème siècle, il faudra qu'il y ait un véritable transfert modal.
Enfin, il y a le critère d'un système établi en réseau, un axe unique Genève-Zurich étant impensable pour un pays aussi fédéraliste que le nôtre.
Sur la base de la motion telle qu'elle est sortie de la commission, nous pouvons donc aller de l'avant.
Toutefois, je ne pourrais terminer mon intervention sans avoir signalé à M. Lombard et au parti libéral une contradiction particulièrement importante.
Le parti libéral, qui a initié cette affaire, et M. Lombard, qui en a été le fer de lance, en appellent ici très directement à l'intervention de l'Etat, à son soutien d'une politique technologique. Quelques points plus loin, dans l'ordre du jour, nous avons une motion 936-A, déposée par les socialistes, qui sollicite, précisément, une politique de soutien aux innovations, une politique industrielle, une politique économique plus active. Dès lors, nous nous étonnons que le même M. Lombard se soit répandu en commentaires sarcastiques sur les propositions du groupe socialiste.
La collectivité doit intervenir d'une manière sélective, en partenariat, comme vous l'avez dit. Mais alors, soyez logique : quand vous soumettez un projet, nous l'étudions. Quand nous soumettons le principe général, acceptez-le, et cela sera de la cohérence !
M. Andreas Saurer (Ve). Il me semble qu'il y ait un grand consensus par rapport à cette motion. Bref, tout le monde, il est beau, tout le monde, il est gentil. Je m'en réjouis donc !
Toutefois, il serait utile de tenir un langage un peu plus clair par rapport à cette motion, et d'admettre, telle qu'elle est présentée ici, qu'elle vide la précédente de son essence même.
C'est une motion fort sympathique, mais qui, en fait, ne demande strictement rien.
Et si nous avons fait cette motion, c'est que toutes les auditions ont démontré que ce projet en est actuellement au stade prototechnique, pour ne pas dire protozoaire...
M. Olivier Vaucher. ...ou proto-Saurer !
M. Andreas Saurer. Actuellement, nous ne pouvons absolument pas juger de sa faisabilité. Si vous vous contentez de rêver, Monsieur Lombard, et que vos songes vous permettent de vous «rouler dans la farine de M. Genecand», c'est très bien ! Mais soyons clairs, cette motion n'apporte pas grand-chose.
Encore une observation par rapport à la participation de Mercedes. 500 000 F de Mercedes, c'est comme si je vous donnais cinq à dix francs. Aucun problème, Monsieur Lombard, je vous les donne volontiers.
Ne nous racontons pas des histoires en prétendant que le projet a reçu un soutien substantiel de cette entreprise. C'est une aumône, qui l'arrange pour des raisons qui lui sont propres, mais ce n'est pas pour autant que Swissmetro sera un objet plus crédible.
M. Armand Lombard (L). Nous répondrons à M. Longet, quand nous discuterons de la motion qui suit dans l'ordre du jour.
D'ailleurs, je prévenais, dans ma première intervention, ce qu'il allait me dire, en déclarant que tout libéral que l'on est, on ne dénigre jamais un partenariat dans un projet. Il faut, et je me répète, que tous les partenaires de la cité collaborent et soient actifs pour qu'un projet réussisse. Par conséquent, je ne me trouve absolument pas à contre-pied.
Libre à M. Saurer de considérer que la motion est vide de sens, que tout cela n'est qu'un jeu politique ! Personnellement, je considère qu'il s'agit d'une motion des plus valables, parce qu'apportant un soutien.
Sans doute, Monsieur Saurer, n'avez-vous jamais rien entrepris de ce genre, sinon vous sauriez qu'au début d'un tel projet le soutien de tout un Grand Conseil, sans parler d'aide financière, permet d'avancer. En effet, seuls le courage et le don de soi permettent d'élaborer de grands projets. Ces termes font partie du rêve, et le rêve est à l'aube du projet.
Si bien que 500 000 F - on peut toujours pleurer - feront toujours plus que dix balles, Monsieur Saurer, même par rapport au milliard prévu pour les développements.
Cela dit, c'est mieux que rien, et c'est du travail pour quelques personnes, et ce sont des emplois qui se créent aux environs de Lausanne. Tant mieux si ce projet est un protozoaire. Je ne sais pas ce que c'est, votre protozoaire, mais il doit aussi commencer sa vie !
C'est vrai, il ne s'agit pas d'un projet en train d'aboutir. Nous aidons avec notre proposition, et de par la position de ce parlement, à conduire ce protozoaire sur le chemin de la vie.
M. Pierre Vanek (AdG). Je croyais avoir dit tout ce que j'avais à dire. Mais je dois reprendre la parole après avoir entendu M. Lombard. Il a déclaré que cette motion, telle qu'elle est sortie des travaux de la commission, implique un soutien de ce parlement, de cette République, au projet Swissmetro.
Or, très précisément, nous avons, dans les invites de la motion originale, supprimé tout ce qui avait trait à un soutien explicite : soutien des autorités genevoises dans la première invite; le programme de promotion qui, évidemment, est également un soutien dans l'invite numéro 2.
Ce qui figure, dans cette motion, est l'intérêt que nous devons porter à ce projet, le fait que l'université peut collaborer, de par ses propres recherches technologiques et scientifiques, et que le Conseil d'Etat doit nous faire des rapports sur ce dossier.
Si nous nous en tenons là, c'est bien volontiers que nous accepterons cette motion, ainsi expurgée de tout soutien explicite.
Si M. Lombard, qui prend ses rêves pour la réalité, vient me dire que mon vote sera interprété comme un soutien au projet Swissmetro, je m'abstiendrai ou voterai contre cette motion.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. George Bernard Shaw a dit : «Il y a les gens qui voient les choses comme elles sont et qui se demandent pourquoi. Et il y a ceux qui rêvent les choses comme elles n'ont jamais été, et qui se demandent pourquoi pas.». Rodolphe Nieth et Pierre Weiss appartiennent à la seconde catégorie.
Personnellement, je trouve très bien que ce Grand Conseil apporte un soutien, au moins moral, à un projet. Je trouve très bien que nous puissions, avec le département de l'instruction publique, examiner dans quelle mesure nous pouvons inciter l'université à s'y intéresser.
Le Conseil d'Etat accorde à cette motion sa plus grande bienveillance.
La présidente. La parole n'étant plus demandée, je vais mettre aux voix la motion amendée, telle qu'elle figure en page 4 du rapport de M. Genecand. J'attire néanmoins votre attention sur le fait que la motion initiale ne figurait pas dans le rapport. Dans le cadre de vos travaux en commission, nous allons préciser la procédure qui doit être suivie, parce que le jour où des recherches devront être faites, cela compliquera la tâche des députés désireux de consulter, ultérieurement, le résultat de nos débats.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
MOTION
concernant la réalisation de Swissmetro/Eurometro
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
- la nécessité d'inventer et de réaliser en Suisse des technologies d'avant-garde;
- de créer des emplois nouveaux par ces technologies de pointe;
- de favoriser de telles études par un financement mixte;
- de renforcer les liaisons transfrontalières et européennes;
- de ne pas succomber aux polémiques démobilisatrices que suscite un projet innovateur,
invite le Conseil d'Etat
- à prendre un intérêt actif aux études en vue de l'élaboration du projet Swissmetro dans une dimension européenne, cela en concertation avec les cantons intéressés et la Confédération;
- à inciter l'université de Genève à collaborer à ce programme en liaison avec les autres instituts de recherche concernés, notamment dans les aspects techniques, socio-économiques et environnementaux;
- à faire rapport régulièrement au Grand Conseil sur l'état de ce dossier.