République et canton de Genève

Grand Conseil

M 974
6. Proposition de motion de Mmes et MM. Elisabeth Häusermann, Roger Beer, Dominique Belli, Thomas Büchi, Jean-Philippe de Tolédo, Hervé Dessimoz, Daniel Ducommun, Michel Ducret, John Dupraz, Pierre Froidevaux, Pierre Kunz, Bernard Lescaze, David Revaclier et Michèle Wavre concernant des cours d'éducation de la santé. ( )M974

LE GRAND CONSEIL,

invite le Conseil d'Etat

à introduire dans l'instruction publique, tant primaire qu'au cycle d'orientation et dans les écoles secondaires de l'enseignement post-obligatoire, une éducation à la santé intégrée dans les horaires scolaires à raison de deux heures-leçons mensuelles par exemple, conçue et assurée par des professionnels de la santé.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Par cette motion, nous demandons qu'un cours d'éducation à la santé général et continu soit intégré dans la formation des enfants et des jeunes. Personne ne songerait à mettre en question, aujourd'hui, la place qu'occupe l'éducation physique à l'école. A raison de deux heures hebdomadaires, depuis l'école primaire jusqu'au secondaire supérieur, la gymnastique constitue une part, mais une part seulement, d'une éducation à la santé. On estime à juste titre que cette éducation physique est nécessaire quand bien même les enfants et les jeunes développent en dehors de l'école une activité physique naturellement intense.

En proposant qu'une éducation à la santé plus générale soit introduite dans l'horaire même de l'enseignement, nous pensons non seulement à l'hygiène corporelle ou nutritionnelle mais bien davantage à une éducation ouverte sur l'ensemble des questions qui peuvent, de l'enfance à l'adolescence et même jusqu'au seuil de l'âge adulte, contribuer à l'épanouissement des individus ou, dans le cas contraire, entraver celui-ci. Les professionnels de la santé savent ce que pourrait être cette éducation, à l'écoute des besoins, âge par âge.

Aujourd'hui, les coûts de la santé pèsent de plus en plus lourdement sur les budgets, tant privés que publics, et il est difficile d'imaginer des solutions acceptables pour les contenir au niveau des thérapies seulement. Les toxicodépendances gagnent une part toujours plus importante de la jeunesse, et cela est une réalité, même lorsqu'elles ne prennent pas la forme extrême de scènes ouvertes. On sait que le tabagisme et l'alcoolisme s'installent dans la vie des individus dès leur adolescence et que la consommation du cannabis se banalise entre 15 et 20 ans. D'une manière générale, les conditions de vie sont autrement plus dangereuses qu'autrefois (on pense à la circulation ou à la pratique des sports) et de multiples facteurs génèrent des situations de stress, entraînant des effets qui ont nom absentéisme, accidents ou maladies, et même tentatives de suicide et suicides. Dans ce domaine, concernant le suicide des jeunes, la Suisse occupe une position peu enviable: c'est là une réalité devant laquelle nous ne pouvons pas nous résigner. Le stress est loin désormais d'épargner les adolescents.

Il est très utile de se rapporter, au sujet de la santé et des styles de vie des jeunes de 15 à 20 ans vivant en Suisse, à la récente étude nationale mandatée par l'office fédéral de la santé publique et menée en 1992 et 1993 par l'Institut universitaire de médecine sociale et préventive de Lausanne: c'est une photographie de la santé des adolescents en Suisse, région par région, extraordinairement instructive. Devant les chiffres fournis, tirés des réponses de 10 000 jeunes, devant les réalités en termes de vie que recouvrent ces données, il devient urgent d'oser penser une éducation à la santé réfléchie, continue, organisée pour répondre aux besoins des enfants et des adolescents, doive trouver désormais sa place dans la formation dispensée par l'instruction publique.

Qu'il vaille mieux prévenir que guérir est une évidence, en théorie. Certes, quelque chose se fait déjà, mais ce quelque chose est beaucoup trop réduit. Entre 12 et 19 ans, un élève peut n'avoir eu en classe, au mieux, au cours de ses 60 à 65 mois de scolarité et de ses 7 000 à 8 000 leçons, qu'une dizaine de leçons (y compris celles consacrées à l'éducation routière) dévolues à la santé en général. Dans le même temps, c'est tout de même, et heureusement, à 300 leçons d'éducation physique qu'il aura participé. Une véritable éducation à la santé n'est pas faite de l'addition des actions menées ici ou là, dans les divers établissements: elle doit se mesurer à l'importance qu'elle prend dans la vie scolaire des moins de 20 ans, en temps, en considération, en prise avec les besoins à la fois de la société et des individus eux-mêmes.

C'est donc à un véritable changement d'échelle en la matière que nous pensons en vous proposant d'inviter le Conseil d'Etat à introduire un cours d'éducation générale à la santé dans les horaires. Nous sommes convaincus que les transformations intervenues dans nos sociétés, dans nos modes de travail et de vie, rendent cette adaptation indispensable désormais.

Bien sûr, nous n'ignorons pas que l'horaire scolaire des enfants et des jeunes est déjà plein. Il s'est rempli au fil des temps et il est difficile aujourd'hui d'y faire de la place pour ce que l'évolution du temps, précisément, apporte de nouveau. Tout y apparaît indispensable, notamment aux yeux des enseignants. Nous croyons pourtant qu'il faut avoir le courage, périodiquement, d'évaluer ce qui est enseigné quant à son opportunité et quant à la manière dont, d'un ordre de l'enseignement à un autre, ce qui est enseigné se construit dans la continuité. Dans ce domaine, nous persistons à croire que l'instruction publique «peut et doit faire mieux». Il va de soi que les élèves ont le droit qu'on ne leur fasse pas perdre leur temps à l'école mais qu'ils puissent, au contraire, utiliser celui-ci de manière judicieuse et équilibrée. Ne conviendrait-il d'ailleurs pas, afin de dépister les améliorations possibles, de soumettre les réformes envisagées à des jeunes de 22 à 25 ans par exemple, pour connaître la réaction des usagers qu'ils furent, hier, de notre instruction publique, et des bénéficiaires dont ils sont devenus aujourd'hui? Pour que l'école s'adapte à son temps, elle doit entendre non seulement ceux qui la servent, les enseignants, mais aussi ceux qu'elle sert, ceux qui sont formés par elle au premier rang.

Mesdames et Messieurs les députés, éduquer à la santé, c'est éduquer à la vie, c'est renforcer la prévention et la possibilité, pour chacun, de mieux se prendre en charge face aux aléas de l'existence.

Débat

M. Pierre Froidevaux (R). «Mens sana in corpore sano», cette maxime du premier siècle avant notre ère, répétée depuis régulièrement par tous les collégiens, signifie aujourd'hui, dans son acceptation courante, que la santé du corps est une condition préalable à la santé de l'esprit. Or, si nous revenons à son auteur, le poète Juvénal, il exprimait dans ses vers que «l'homme vraiment sage ne demande au ciel que la santé de l'âme avec la santé du corps».

Le développement des sciences, notamment médicales, nous a fait croire que tout serait bientôt expliqué par la description de phénomènes physiques, et les tenants de cette théorie peuvent encore avoir raison. Mais je n'en suis pas, et je crois davantage en l'équilibre entre le développement physique et mental. Aussi souhaiterais-je, avec vous tous, que nous revenions, du moins en partie, au sens primaire de la maxime de Juvénal.

En travaillant avec vous dans ce parlement, je ressens fortement le désir politique d'une réappropriation de sa santé par l'individu, chacun devenant individuellement responsable de son état. Cette volonté trouvera un début de réalisation lorsque l'individu trouvera des valeurs de référence, et ces valeurs s'enseignent !

Les motionnaires, soit le groupe radical, vous proposent d'instituer dans nos écoles des cours d'éducation à la santé adaptés à toute la scolarité. Il s'agirait de cours aussi bien développés que les autres matières enseignées, et qui feraient appel à l'ensemble des sciences assurant le développement psycho-moteur de l'enfant, selon Piaget.

A Genève, des cours d'éducation à la santé sont déjà dispensés dans nos écoles :

- Trois heures en 4ème et 6ème primaire, consacrées à un cours sur l'histoire de la vie;

- Deux heures en 7ème du cycle, consacrées à une information sur les drogues légales et illégales;

- Quatre heures en 8ème du cycle, consacrées à une information sur la sexualité et la prévention du sida;

- Deux heures facultatives en 9ème du cycle, consacrées à une information sur les drogues illégales ou autres sujets.

Parallèlement à cet enseignement, nos écoles publiques genevoises disposent du service de la santé de la jeunesse, et, pour tenter d'être exhaustif, je me dois encore de citer le CIPRET (Centre d'information pour la prévention du tabagisme) et la FEGPA (Fédération genevoise pour la prévention de l'alcoolisme), qui sont deux associations, dont les membres se déplacent dans les écoles sur demande, en général dans les collèges organisant des séminaires de deux heures.

Tout ce qui est fait est déjà bien, et j'exprime ma reconnaissance à tous ceux qui consacrent leur vie ou une partie de celle-ci à cet enseignement spécifique.

La volonté clairement exprimée par cette motion est d'approfondir la nature de ces cours dans une logique de formation et d'éducation. Le rôle éducatif de l'école est déjà un débat à lui tout seul, mais force est de constater que l'éducation de nos enfants est supportée, en grande partie, par l'école. L'énumération des causes serait fastidieuse, mais elles ont, à mon sens, en commun le manque de disponibilité de l'adulte, en partie détourné de sa famille pour des raisons sociales.

Ce désengagement familial peut se manifester par des troubles de l'humeur chez l'enfant, particulièrement manifestes à l'adolescence : une étude menée très récemment par l'Institut de médecine sociale et préventive de Lausanne, Berne et Zurich, réalisée sur mandat de l'Office fédéral de la santé publique, démontre la gravité de ces phénomènes. Cette enquête nationale, intitulée «La santé des adolescents en Suisse», porte sur dix mille adolescents de 15 à 20 ans, en phase d'apprentissage ou en période de scolarité. Elle est une vaste source de connaissances de l'état de santé de nos générations montantes. Elle met notamment en évidence que notre jeunesse vit parfois un tel désarroi, que celui-ci se manifeste par une demande d'appui psychologique pour 48% des jeunes filles et 31% des garçons, mais aussi par une attitude générale qui prétérite gravement la santé de nos adolescents : 8% des adolescentes sexuellement actives ont eu une grossesse, en général non désirée, et leur toxicomanie à l'héroïne est cinq fois plus élevée que dans la population générale !

A l'heure où nous sommes confrontés à des choix économiques, nous nous devons de favoriser des programmes de prévention. Mais la prévention se fait par rapport à un état de santé idéal. Un état de santé idéal, cela se définit et cela s'enseigne. Son enseignement est la clé indispensable pour ouvrir la porte à la prévention.

Les motionnaires n'ignorent pas qu'ajouter des heures de cours aux programmes apparemment surchargés de nos écoles pourrait paraître utopique. Nous demandons deux heures mensuelles, dont l'une pourrait occuper la troisième heure d'éducation physique prévue par les ordonnances fédérales de 1972 et 1987, et qui n'a pu être enseignée jusqu'ici par manque de place dans les salles de gymnastique. Ces deux heures montrent notre volonté d'équilibrer le temps consacré à un corps sain et à un esprit sain. Nous sommes prêts à en discuter dans la commission de l'enseignement.

Mme Janine Hagmann (L). Cette motion est intéressante. Les coûts de la santé pèsent de plus en plus lourdement sur les budgets tant privés que publics. Personne ne peut donc nier l'importance de la prévention, ce qui a été déjà débattu, à plusieurs reprises, dans cette enceinte. En proposant cet enseignement régulier d'éducation à la santé, les motionnaires pensent apporter leur contribution à la prévention.

Croyez-vous vraiment qu'il est possible d'empêcher les dépendances au tabagisme, à l'alcool, à la drogue, en introduisant des cours dans les plans d'études ? Pour résister à ces tentations, il faut être fort. La construction du caractère, de la personnalité, du sens des responsabilités, s'échafaude, en premier lieu, au sein de la famille.

Les motionnaires parlent des facteurs qui génèrent des situations de stress, entraînant des effets ayant pour noms absentéisme, accident, maladie ou suicide. Pour les prévenir, ils proposent l'introduction de deux heures de leçons mensuelles, à caser dans les plans d'études.

Il me semble que, depuis quelque temps, l'école a bon dos. Trop de sectes se développent à Genève ? Demandons à l'école de faire de la prévention ! La violence prend des proportions insoutenables ? Demandons à l'école de faire de la prévention ! Introduisons des cours de culture religieuse ! N'oublions pas d'attirer l'attention sur la problématique de l'égalité des sexes ! Et j'en passe...

Maintenant, pour prévenir, entre autres, ces situations de stress, un cours d'éducation à la santé devrait être introduit. Si l'on additionne tout ce que l'on voudrait placer dans l'horaire scolaire, nous aboutirions nécessairement, même pour l'enseignement primaire - qui n'est pourtant pas soumis aux tranches horaires de 45 minutes comme les autres ordres d'enseignement - à ce qu'on pouvait lire dans le «micro-trottoir» de la «Tribune de Genève» du 17 février, en provenance de la bouche même de notre estimée présidente, pourtant du même groupe politique que les motionnaires. Voici sa réponse à la question : «Que pensez-vous de la nouvelle maturité ?», je cite : «En introduisant de nouvelles disciplines, on élargit l'éventail des choix possibles. On ne peut offrir de tels choix sans contrepartie, à savoir, en l'occurrence, une réduction des branches obligatoires.».

L'horaire de l'écolier n'a pas changé depuis longtemps. A part 20 minutes de moins par semaine à l'école primaire, les élèves du cycle et du postobligatoire ont un emploi du temps très chargé, cause peut-être de stress. Les représentants des programmes aimeraient alléger. Chaque année, il est nécessaire d'adapter le savoir et la formation à l'évolution de la société. Une hausse des qualifications est requise sur le marché de l'emploi. Un surplus de culture générale et des exigences de compatibilité européenne sont sans cesse souhaités.

Dès lors, faut-il introduire l'obligation de cette éducation à la santé qui, prise en charge par le service de santé de la jeunesse, existe déjà dans les écoles et dans les institutions ? Le bilan de l'année scolaire 1993-1994 est très positif. Il existe une formation adulte, des actions de promotion de la santé et une participation au réseau de santé communautaire. Quant aux grandes communes, nombreuses sont celles qui organisent leur propre éducation à la santé.

C'est pourquoi, au nom du groupe libéral, je ne peux accepter le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat et vous demande qu'elle passe, comme l'a proposé mon préopinant, à la commission de l'enseignement.

M. Andreas Saurer (Ve). J'ai l'impression que nous sommes en présence d'une motion que nous pourrions appeler «La santé radicale garantie». Il est certes louable de se préoccuper de la santé et, en particulier, de la prévention. Mais il me semble vraiment qu'en son nom on se permet d'envoyer tout et n'importe quoi, et au Conseil d'Etat, et à l'école, et ailleurs encore !

Nous sommes évidemment tous d'avis que la prévention revêt un aspect très important. Ainsi nous sommes à même de prévenir collectivement des facteurs de risques que nous connaissons parfaitement bien. Je pense au tabac, à l'alcool et aussi à un certain type d'alimentation pour laquelle on pourrait faire plus qu'il n'a été fait jusqu'à maintenant.

Vous savez, par ailleurs, qu'une motion écologiste, pendante au Conseil d'Etat, demande, précisément, que soit renforcé ce type de prévention.

Vous parlez de la santé et c'est très bien ! Que l'école se préoccupe également de la santé, c'est très bien aussi ! Mme Hagmann et vous-même, Monsieur Froidevaux, avez fait allusion aux cours donnés à l'école primaire et au cycle d'orientation. Mais attention ! Nous savons ce qui est néfaste pour la santé; mais dire ce qui est bien pour elle est infiniment plus complexe. La santé ne se réduit pas à un comportement juste. En effet, j'ai presque le sentiment que votre motion laisse entendre qu'il suffit de savoir ce qu'il faut faire pour être en bonne santé.

Malheureusement, ce n'est pas si simple. Il ne suffit pas d'avoir un comportement juste pour être en bonne santé. Personnellement, j'ai de la peine à accepter des directives qui disent de ce qui est juste au niveau du comportement. Nous pouvons informer à propos de ce qui pose des problèmes, oui, et nous devons le faire. Mais quant à prétendre pouvoir dire ce qui est juste ou pas... Nous, les Verts, ne sommes absolument pas d'accord d'entrer dans une telle société normative.

Consultez une documentation médicale et voyez la définition qui est donnée de la santé ! C'est très décevant. Généralement, elle est définie par l'absence de la maladie. Mais définir la santé est extrêmement difficile. L'OMS a donné une définition de la santé qui me semble n'être guère applicable bien que très belle, puisque elle réduit la santé à un état statique.

Pour moi, la santé est beaucoup plus une capacité d'équilibration pour, d'une part, s'adapter à une situation changeante et, d'autre part, pour changer le milieu. Mais chacun doit trouver son équilibre entre ce qu'il faut maintenir et ce qu'il faut changer. Et ce n'est pas au niveau de l'enseignement que l'on peut inculquer la capacité d'équilibration. C'est à chacun de la trouver, tant bien que mal, à travers sa vie.

Nous sommes entièrement d'accord avec une prévention et des informations concernant des facteurs de risques connus. Elles ne sont pas très nombreuses et l'on peut faire mieux. En revanche, enseigner la santé positive est entrer dans une société normative, une méthode que nous condamnons.

Dans ce sens, je rejoins tout à fait la proposition de Mme Hagmann de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement pour que l'on réfléchisse à ce problème très vaste, et ceci d'une manière plus sérieuse que le parti radical ne l'a fait.

M. Henri Gougler (L). Permettez à un de vos collègues qui a pratiqué ce sport, c'est-à-dire l'enseignement de la santé, pendant plusieurs années au cycle d'orientation, de vous donner son point de vue.

Il faut s'être trouvé devant une classe de ces chères têtes blondes qui, sachant qu'il n'y aura pas de notes, pensent déjà à la prochaine récréation, pour connaître la gageure d'enseigner une telle chose. Ce n'est pas une sinécure.

Mon cher confrère et néanmoins ami Froidevaux vous a indiqué le nombre d'heures données actuellement. Il y a quelques années, nous en donnions plus et nous nous étions déjà heurtés à un holà du corps enseignant en raison de programmes de plus en plus chargés. Et s'il faut encore les alourdir, avec un plus grand nombre d'heures d'enseignement de la santé, avec des enfants peu motivés et des parents qui, souvent, le sont encore moins, quel sera le rendement de l'exercice et quel en sera le bénéfice, je vous le demande ?

Néanmoins, tout système étant perfectible, nous pensons qu'on en discutera plus sereinement à la commission de l'enseignement.

M. Philippe Schaller (PDC). Voici le deuxième épisode de la grande saga sur la santé de nos amis radicaux. Espérons qu'elle sera moins longue que le feuilleton «Dallas» et elle touchera sûrement, après les jeunes, les adultes et les personnes âgées.

Toutefois j'aimerais repêcher cette motion au nom du groupe démocrate-chrétien, parce qu'elle a le mérite de soulever un certain nombre de problèmes; investir dans la prévention vaut mieux que dépenser pour la réparation et les dépenses sociales.

Néanmoins, je pense qu'il manque quelques réflexions à votre projet de motion. Je crois que le bien-être et le mal-être des gens, notamment des jeunes, sont le reflet du bien-être et du mal-être de la société en son entier. C'est peut-être le reflet du malaise ambiant, du «no future», comme diraient les jeunes aujourd'hui.

M. Froidevaux, vous avez mentionné, et ceci fort heureusement - car vous n'en faites pas mention dans votre motion - que le principal intéressé, en l'occurrence le service de santé de la jeunesse, fait un travail important. En commission, nous avons entendu M. Lehmann nous en parler. Lors de la précédente motion au sujet des parturientes, vous aviez fait la même erreur en ne mentionnant pas les sages-femmes.

Un grand travail est fait au sein du service de santé de la jeunesse. Il y a un grand nombre d'intervenants, il y a un grand nombre d'interventions. Prétendre simplement, Mesdames et Messieurs les radicaux, que l'instruction publique peut faire mieux avec ce qu'elle a n'est pas juste ! Reportez-vous au document signé par M. Lehmann, vous y lirez que l'office de la jeunesse a besoin de ressources en personnel et en matériel.

Toutefois, votre motion, je pense, sera utile, car elle permettra à la commission de la santé de réfléchir à ce que nous pouvons apporter à ce service, de voir quelles collaborations trouver au sein de la société pour apporter un souffle nouveau à l'office de la jeunesse.

Dire simplement, dans le cadre de votre motion, que l'instruction publique peut et doit faire mieux, n'est pas suffisant. Ce parlement doit apporter un soutien politique clair et volontariste dans ce sens et, effectivement, accorder à l'office de la santé de la jeunesse les moyens d'accomplir sa mission obligatoire par la loi genevoise et par la loi fédérale.

Si ce parlement le souhaite, votre motion ira en commission et rejoindra une autre motion qui va être déposée inter-partis sur l'introduction d'une troisième heure d'éducation physique et de santé.

M. Gilles Godinat (AdG). Notre groupe a accueilli cette motion avec intérêt. Nous trouvons que le terme d'éducation à la santé est inapproprié; nous lui aurions préféré «information» ou «promotion de la santé».

Il est vrai que le rapport fédéral sur la santé des adolescents est préoccupant. Il y a matière à réflexion dans ce domaine, notamment en ce qui concerne les troubles psychiques et les troubles alimentaires chez les adolescents. C'est une réalité dont il faut tenir compte et nous devons en discuter.

Nous aurions intérêt à l'aborder aussi en commission de la santé, puisque les problèmes de la santé des adolescents sont, au premier chef, visés dans cette motion.

Bien que l'affirmation d'une recrudescence des toxicodépendances me paraisse discutable, les rapports fédéraux ne la confirmant pas, je suis absolument d'accord, en revanche, avec celle ayant trait à l'augmentation de la problématique dépressive et des risques de suicide.

C'est également pour cela que nous soutenons le renvoi de la motion à la commission de la santé.

M. Dominique Hausser (S). Le sixième toubib de l'enceinte s'exprime... (Rires.) Il est clair que la promotion de la santé et la santé d'une population préoccupent le groupe socialiste, comme l'ensemble des groupes de ce parlement.

Toutefois, l'invite formulée par les motionnaires est limitée en regard de l'ampleur des problèmes rencontrés. Ce n'est effectivement pas avec deux heures mensuelles d'enseignement que l'on peut espérer inculquer à nos jeunes une culture de la santé, et c'est en commission que nous pourrons en débattre et voir de quelle manière nous pourrons, en tant que parlementaires, exprimer une volonté qui ne soit pas seulement orale mais aussi financière.

Effectivement, le service de santé de la jeunesse intervient depuis de nombreuses années dans les écoles, mais il a, aujourd'hui, de plus en plus de peine à le faire, étant donné les restrictions budgétaires et les restrictions de personnel que l'unité d'éducation à la santé subit, comme l'ensemble des services de notre administration.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. J'avoue que ce qu'a dit M. Saurer, s'agissant de la santé idéale, devrait être souligné par rapport à l'idéal de santé défendu par cette motion. Je constate que dans ce parlement, on vit, de plus en plus, dans le mythe des cours donnés. A l'heure où les éducateurs se posent un certain nombre de questions sur la façon dont les élèves apprennent, je m'aperçois qu'au Grand Conseil de ce canton il n'y a bientôt plus une session où l'on ne dépose pas une motion prévoyant des cours sur un sujet ou sur un autre.

Il y a eu des demandes concernant la réintroduction des cours d'instruction civique; une autre concernant la troisième heure de gymnastique apparaîtra dans une prochaine motion; il y a eu les moyens à utiliser pour lutter contre la violence, la pédagogie des valeurs, et je suis certaine d'oublier, dans mon énumération, un certain nombre de sujets pour lesquels vous avez, les uns et les autres, évoqué des heures de cours supplémentaires ou remplacées aux programmes.

Si je suis d'accord avec les motionnaires sur la nécessité - et j'engage, en cela, les enseignants, et d'ailleurs, ils s'y engagent déjà d'eux-mêmes - à réfléchir à ce que nous enseignons, comment nous l'enseignons et s'il est toujours opportun de l'enseigner, voire de l'enseigner de cette façon, je ne suis pas certaine du tout, et je vous le dis tout net - et les médecins, en leur for intérieur, le savent aussi - que l'on puisse espérer que des heures de cours soient le bon moyen d'inciter les jeunes à être conscients de leur capital-santé, de la façon dont ils peuvent le gérer et éviter de le gaspiller, en dépit de toutes les tentations qui les entourent.

Il est vrai que l'on peut toujours faire mieux et il n'est pas exact de dire que nous démantelons ou amputons un service qui, par conséquent, ne peut pas faire ce qu'il devrait faire.

Il est clair que nous ne disposons pas de moyens illimités. Il est clair aussi que nous avons parfois des possibilités extérieures que nous pourrions exploiter et qu'il conviendrait d'examiner.

A mon sens, s'il faut faire mieux, c'est en direction des groupes de la santé qui se mettent en place dans les différents collèges, pour permettre de réagir aux problèmes et de les traiter à partir de réalités.

Car ce qui motive les jeunes et les humains, en général, c'est bien souvent une pédagogie qui part d'une réalité et la façon dont on y est attentif.

Avant que vous en discutiez en commission - celle de l'enseignement serait toute indiquée pour traiter de ce problème, et pour déterminer ce qui est du domaine de l'enseignement et comment intéresser les jeunes à une problématique de ce type - je vous dirai, en guise de boutade, qu'en matière de prévention l'action vaut parfois mieux que les mots. En sont la preuve certains distributeurs installés tout récemment !

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'enseignement et de l'éducation.