République et canton de Genève

Grand Conseil

I 1922
11. Interpellation de Mme Elisabeth Häusermann : Quo vadis éducation civique ? ou/et Concours de circonstance ? ( )I1922

Mme Elisabeth Häusermann (R). Récemment, les membres de la commission de l'enseignement et de l'éducation ont reçu la nouvelle mouture 1994 du Mémento genevois adapté, comme vous le savez, tous les quatre ans après les élections cantonales et imprimé à nouveau à seize ou vingt mille exemplaires.

Ce Mémento genevois est offert gracieusement à tous les élèves du cycle d'orientation à la fin de leur scolarité obligatoire, comme aide-mémoire, pour ceux qui ont pu profiter d'une éducation civique appropriée, ou, pour les autres, comme manuel de base pour l'acquisition d'une culture civique nécessaire à l'accomplissement des devoirs civiques de tout citoyen qui se respecte.

Feuilletant cette oeuvre de A à Z, je me suis posé de sérieuses questions sur ma culture civique personnelle, pourtant testée à plusieurs reprises dans des joutes électorales aussi bien communales que cantonales et dans l'accomplissement de différentes tâches publiques, notamment comme présidente du Conseil municipal d'Onex.

«Ce que tu possèdes en propre, tu peux l'emporter sans crainte à la maison.». C'est sur ce vieil adage qu'ironisait mon père à l'époque pour justifier ses conseils de ne jamais se fier aux écrits, mais de s'interroger ! Après un premier moment d'étonnement, j'ai soumis cette cuvée du Mémento - vraisemblablement, pas une bonne année ! - à un éminent spécialiste en la matière, en l'occurrence au chef de service des votations/élections, M. Patrick Ascheri, qui a d'ailleurs, à plusieurs reprises, proposé son aide au responsable sans avoir été entendu.

Passons sur l'erreur qui mentionne que les radicaux, depuis 1993, n'ont pas plus de treize mandats au lieu des quinze réellement acquis; nous serons indulgents, mais il y a les autres, et de plus graves ! Ne parlons pas d'un septième parti introduit au Grand Conseil avec publication de son manifeste électoral entier ! Les habitants de Soral seront ravis d'apprendre que leur village fait partie des communes urbaines...

M. John Dupraz. (Levant les bras au ciel.) Hourra ! (Rires.)

Mme Elisabeth Häusermann. ...tout comme la plus grande commune viticole de Suisse : Satigny, citée dans les communes urbaines, avec, dans la même foulée, Meinier, Presinge, Bardonnex, Bernex et Collex-Bossy !

Vous saurez, dès aujourd'hui, qu'avec la Ville de Genève trente-huit communes urbaines et six communes rurales : Russin, Dardagny, Avully, Chancy, Gy et Jussy, forment notre canton. D'après quels critères, je vous le demande !

Pour l'anecdote, je cite à la même page : «Des communes rurales périphériques s'occupent essentiellement de vignes, de céréales et de produits maraîchers. Elles - c'est-à-dire les communes - poursuivent leurs activités dans la zone franche voisine sur quelque dix kilomètres !

A mon humble avis, ce serait presque un crime de distribuer ce Mémento aux élèves et aux enseignants en faisant croire qu'il est la bible de l'éducation civique tant il fourmille de fautes ! Quo vadis, alors, éducation civique avec, à la base, un manuel de cette qualité ?

Pour corriger les erreurs importantes contenues dans ce millésime, et cela dans un très bref délai, je proposerai pour ma part aux auteurs et aux autorités, c'est-à-dire à la présidente du DIP, de lancer, dans le cadre d'une éducation civique digne de ce nom, un concours avec des prix attrayants : un Mémento corrigé à l'heureux lauréat, une chaire d'éducation civique à l'université de Genève ou, pourquoi pas, la possibilité d'accompagner pendant toute une journée un conseiller d'Etat dans l'exercice de ses fonctions de gouverneur !

Je ne vais pas vous dévoiler la liste exhaustive établie par l'expert pour ne pas aider les petits futés qui, éducation civique oblige, pourraient trouver la solution au concours à l'aide du Mémorial de notre séance de ce soir ! Mais je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à faire travailler votre matière grise, à vous joindre aux chercheurs et, qui sait, aux heureux gagnants d'une journée bien accompagnée.

A ce constat et à cette invite, Madame la conseillère d'Etat, j'aimerais ajouter la question de l'utilité et du prix de l'exercice. Combien va nous coûter ce Mémento nouveau, qui inclut les corrections nécessaires tous les quatre ans ? Ne serait-il pas préférable, après avoir remis l'ouvrage sur le métier, de ne produire qu'un encart tous les quatre ans, avec les changements éventuels des forces politiques après les élections ?

Puisque l'heure est aux questions et avant que vous nous rendiez votre rapport sur l'éducation civique en général et sur la motion 907 en particulier, j'aimerais vous soumettre également celle posée par «Le Genevois», du 7 octobre 1994, ainsi libellée :

«En 1988, les étudiants de la société Adelphia lançaient une pétition qui a rapidement recueilli plus d'un millier de signatures. Celle-ci déplorait l'absence d'éducation civique à l'école et demandait que soient appliqués les textes légaux cantonaux et fédéraux prévoyant un enseignement d'instruction civique dans l'enseignement secondaire publique.».

La question de l'instruction civique à l'école est un vieux serpent de mer qui refait surface périodiquement !

En 1970, André Chavanne, toujours généreux, promettait. En 1976, Monique Bauer-Lagier, députée libérale, revenait à la charge devant le Grand Conseil, invitant le Conseil d'Etat à présenter une étude sur les moyens d'assurer cet enseignement à tous les élèves, et voici qu'en avril dernier, par une nouvelle motion, le Conseil d'Etat est invité à instaurer un cours obligatoire de droit politique pour tous les jeunes suivant une formation post-obligatoire. Vu les frais d'impression du Mémento et les éventuelles corrections, j'étendrai personnellement ce cours au cycle d'orientation pour permettre aussi aux futurs apprentis d'avoir des notions de base d'éducation civique. Entre 1970 et 1994, c'est un quart de siècle qui vient de s'écouler, et cette question n'est toujours par résolue !

Quelle suite le département de l'instruction publique a-t-il donnée à la pétition de la société Adelphia et à quels résultats concrets a-t-il abouti ?

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Madame Häusermann, en ce qui concerne la deuxième partie de vos questions, il faudra patienter un peu. En effet, un rapport va être déposé sur ce qui se fait et ce qui pourra se faire en réponse à toutes les motions et pétitions sur l'instruction civique. Ce rapport vous sera donc soumis très probablement à la prochaine session du Grand Conseil, ce qui vous permettra de prendre acte de nos projets.

S'agissant du manuel d'instruction civique, je vous avoue avoir moi-même repéré quelques erreurs. J'ai fait les commentaires nécessaires, mais les choses ne sont pas si simples, car personne n'avait dû prendre la peine de le lire les années précédentes. Ce manuel coûte 4,90 F l'exemplaire, ce qui n'est pas exorbitant, mais le malheur veut que nous suivions votre recette, Madame Häusermann. Cela signifie que nous remplaçons cent cinquante pages portant sur de menues corrections. C'est en fait la conception du manuel de Mémento civique qu'il faudrait revoir, car il est vrai que de modifications en modifications l'on arrive quelquefois à des aberrations.

Je vous remercie d'avoir soulevé quelques-unes des nombreuses coquilles avec humour. Nous vous rassurons en ce sens que nous avons d'autres documents que le Mémento d'instruction civique, mais, cela étant, ce dernier fera l'objet d'un examen beaucoup plus approfondi en vue de son amélioration.

Mme Elisabeth Häusermann (R). Je remercie notre conseillère d'Etat pour sa réponse et j'attends avec impatience les résolutions du rapport.

Cette interpellation est close.