République et canton de Genève

Grand Conseil

No 40

Vendredi 4 novembre 1994,

soir

Présidence :

M. Hervé Burdet,président

La séance est ouverte à 17 h.

Assistent à la séance : MM. Olivier Vodoz, Jean-Philippe Maitre et Guy-Olivier Segond, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Hommage.

Le président. Je vous prie de rester debout.

Nous avons appris le décès de Mme Louisa Vuille qui siégea dans notre Grand Conseil sur les bancs du parti du Travail, de 1961 à 1969.

Pour honorer sa mémoire, je vous prie d'observer un instant de silence. (Debout, l'assemblée observe un instant de silence.)

3. Personnes excusées.

Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat, Mme et MM. Philippe Joye, Gérard Ramseyer, Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Fabienne Bugnon, Catherine Fatio, Pierre Kunz, Michèle Mascherpa, Laurent Moutinot, Jean Opériol, Maria Roth-Bernasconi et Nicolas Von der Weid, députés.

4. Discussion et approbation de l'ordre du jour.

M. Daniel Ducommun(R). Je vous informe que la proposition de motion suivante est retirée par ses auteurs :

M 946
de Mme et MM. Michèle Wavre, Daniel Ducommun, Pierre Kunz et Bernard Lescaze concernant l'utilisation et la rentabilité du patrimoine de la FIPA. ( )  M946

En contrepartie, je sollicite de votre part la possibilité d'agir sur le même sujet par voie d'interpellation ordinaire que je souhaiterais pouvoir traiter dans le cadre du département de l'économie publique.

Le président. Nous avons effectivement reçu une demande d'interpellation de votre part. Si ce Grand Conseil est d'accord, nous autoriserons M. Ducommun à développer son interpellation à la place du point 74 de l'ordre du jour.

M. Christian Grobet (AdG). On peut se féliciter que les auteurs de la motion soient revenus à de meilleurs sentiments. La voix de la sagesse a dû leur être inspirée par un de leurs représentants au Conseil d'Etat. Nous regrettons néanmoins que cette motion soit retirée et simplement remplacée par une interpellation, parce que cela nous aurait donné l'occasion d'un débat intéressant sur la politique de l'Etat en matière d'aide à l'industrie, qui en a bien besoin, et de la nécessité de mettre à disposition de cette industrie des terrains bon marché.

Je constate que M. Ducommun a voulu éviter le débat, nous en prenons acte et, finalement, nous ne nous opposerons pas à ce qu'il développe, en catimini, en quelque sorte, ses idées sans que nous puissions intervenir.

M. Daniel Ducommun. Eh bien, déposez une motion, Monsieur Grobet !

Mise aux voix, la proposition de M. Daniel Ducommun est adoptée.

5. Déclaration du Conseil d'Etat et communications.

Le Le président. M. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat, ayant eu le chagrin de perdre son père, nous lui réitérons toute la sympathie du Grand Conseil.

6. Correspondance.

Le président. La correspondance suivante est parvenue à la présidence :

C 209
Par son courrier du 27 octobre, le Conseil d'Etat nous envoie copie de sa réponse à Mme Ruth Dreifuss, conseillère fédérale chargée du département de l'intérieur, suite à une demande de consultation concernant le projet d'ordonnance sur la sécurité d'installations et d'appareils techniques et l'ordonnance sur l'évaluation de la conformité des installations et appareils techniques. ( )  C209

Il en est pris acte.

C 210
En date du 26.10.94, les services du Parlement de Berne accusent réception de la résolution 275 (âge de la retraite des femmes) qui a été renvoyée aux Chambres fédérales le 17 juin 1994. ( )  C210

Il en est pris acte.

C 211
Par sa missive du 18 octobre, l'Association d'aide au développement remercie les députés qui ont contribué au succès de la kermesse Genève Tiers-Monde. ( )  C211

Il en est pris acte.

Par ailleurs, les pétitions suivantes sont parvenues à la présidence :

P 1051
Demande d'asile pour M. Kryeziu. ( )  P1051
P 1052
Bruit d'une porte d'immeuble. ( )  P1052

Elles sont renvoyées à la commission des pétitions.

7. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Le président. Les demandes d'interpellations suivantes sont parvenues à la présidence :

I 1914
de Mme Anita Cuénod (AG), sur la situation très précaire du personnel administratif, technique et de service des missions permanentes accréditées auprès de l'ONU et du personnel de service des fonctionnaires internationaux. ( )  I1914

Cosignataires : Jean-François Courvoisier, Christian Ferrazino, Gilles Godinat, Luc Gilly, Jean-Pierre Rigotti. 

I 1915
de Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S) : HES : Un large débat sur les plans fédéral et intercantonal. Quelle est la position de Genève ? ( )  I1915

Cosignataires : Claire Torracinta-Pache, Maria Roth-Bernasconi, Liliane Maury Pasquier, Sylvie Châtelain, Dominique Hausser. 

Ces demandes d'interpellations figureront à l'ordre du jour d'une prochaine séance.

I 1916
de M. Daniel Ducommun (R) : Quelle rentabilité pour la FIPA ? ( )  I1916

Cosignataires : Roger Beer, John Dupraz, Michèle Wavre, David Revaclier, Bernard Lescaze. 

Cette demande d'interpellation sera traitée au point 74 de notre ordre du jour, en lieu et place de la motion 946, retirée par ses auteurs.

e) de questions écrites.

Néant.

I 1916
8. Interpellation de M. Daniel Ducommun : Quelle rentabilité pour la FIPA ? ( )I1916

M. Daniel Ducommun (R). Mon interpellation s'adresse, bien sûr, au président Jean-Philippe Maitre et concerne la gestion de la FIPA en général. Notre groupe regrette que ce sujet ne puisse pas être formellement traité en commission de l'économie à l'appui d'une motion, mais, soyons réalistes, le climat qui s'est dégagé dans cette assemblée la semaine dernière n'est, semble-t-il, pas tellement propice à une remise en question fondamentale de certaines prestations de l'Etat et nous le regrettons.

Il n'est pas honnête de considérer que la conjoncture ou autre remède sorcier arrangera naturellement la situation des finances publiques, d'autant plus que toute augmentation de recettes fiscales rencontre, nous le savons bien, l'opposition populaire. Si nous ne venons pas contre vent, marée et, pourquoi pas, sarcasmes avec des pistes de réflexion telles que celles relatives à la FIPA, nous n'aurons pour marge de manoeuvre que de poursuivre les actions de réduction de la masse salariale et des postes de travail. 370 millions, c'est 3 700 postes de travail supplémentaires à supprimer. Nous ne voulons pas être les acteurs de ce jeu de massacre.

Monsieur Maitre, après ce préambule, dans nos sujets de préoccupation et notre volonté de recherche de nouveaux moyens financiers se trouve la gestion de la Fondation des terrains industriels Praille-Acacias dont vous êtes l'honoré président. Il n'est pas question d'affaiblir le tissu industriel de notre canton. Un secteur secondaire fort et performant constitue un socle de richesses fondamentales pour l'équilibre économique de Genève et sa région. Il ne faut donc pas supprimer quoi que ce soit mais mieux utiliser nos moyens et gérer plus efficacement le patrimoine de la FIPA.

Fort de ces considérations générales, nous vous remercions, Monsieur le président, d'apporter une réponse à nos diverses interrogations. Le rendement net réel des biens n'excède pas 3% et il est donc considéré comme insuffisant. Certaines rentes du droit de superficie ne sont plus en adéquation avec les conditions économiques actuelles. Une indexation tous les quinze ans est insuffisante. Des entreprises payeraient 9,50 F par m2 et par an de loyer, d'autres 100 F ! Est-ce normal ? Une politique de mixité, secteur secondaire, secteur tertiaire et autres activités, existe-t-elle ?

Autre réflexion. Un développement immobilier par voie verticale tel que le pratique le secteur tertiaire rentabilise, bien entendu, mieux le sol qu'une structure horizontale. De plus, lors de la révision du loyer, s'il nous paraît normal que pour moitié la référence soit à l'indexation à l'indice suisse des prix à la consommation, il n'est pas normal que pour l'autre moitié on tienne compte de la variation du taux hypothécaire, compte tenu de sa stabilité ces dernières années. En théorie, certains loyers pourraient donc baisser lors de la révision. Pourquoi ne pas envisager, également, la vente par la fondation aux superficiaires qui le souhaitent, en adaptant la loi sur la FIPA avec la haute autorité de notre Grand Conseil. Certaines entreprises le souhaiteraient.

Proposer la vente du terrain lorsqu'il y a changement de propriété de l'immeuble devrait être une des options à développer. Il n'apparaît pas qu'une socialisation du sol soit une saine politique dans le climat économique actuel. Une telle solution satisferait et l'entreprise et l'Etat dans le cadre d'un apport de trésorerie salutaire lorsque l'on doit emprunter auprès des banques 3 millions par jour pour faire tourner la machine. Enfin, et pour nous rassurer sur l'efficacité de cette gestion, un audit de la FIPA est recommandé, soit par un organisme spécialisé, soit par notre commission de contrôle de gestion, d'autant plus que certaines critiques sont formulées sur la qualité du management.

Nous serions heureux, Monsieur le président, que vous puissiez partager certaines de nos préoccupations, étant entendu que nous restons en tout temps à votre disposition pour tout complément d'information.

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Nous regrettons que cette motion ait été retirée, parce qu'elle aurait sans doute permis un débat sur la politique industrielle et d'opposer à votre débat de politique financière un vrai débat de politique industrielle. Vous l'avez retirée et vous souhaitez poser, en quelque sorte, les mêmes questions que par le biais d'une interpellation, raison pour laquelle nous vous répondons très volontiers.

Avant qu'elle soit retirée, le Conseil d'Etat estimait devoir dire qu'il ne pouvait pas approuver cette motion mais qu'elle avait son mérite malgré ce que l'on entend dire parfois sur la politique industrielle. Elle aurait permis de donner un certain nombre de renseignements, de recadrer la politique industrielle de ce canton et d'attirer l'attention du Grand Conseil, ou de certains députés qui semblent les méconnaître, sur une des conditions-cadres performantes que nous avons à Genève. Par votre interpellation, vous engagez un pur débat de politique financière et budgétaire. Nous souhaitons vous répondre et délibérer sur le vrai débat, qui est un débat de politique industrielle.

Le premier point par lequel vous souhaitez attirer l'attention du parlement est celui des loyers et de la réadaptation de ceux-ci, respectivement des rentes de droit de superficie. Permettez-moi de vous dire que la FIPA est parfaitement bien gérée et tous les loyers, toutes les rentes de droit de superficie, sont régulièrement réadaptés aux échéances statuaires et contractuelles. Du fait que la FIPA est bien gérée, il arrive parfois que certaines adaptations de droit de superficie portent sur des montants relativement réduits. C'est la raison pour laquelle le conseil d'administration de la FIPA, afin d'éviter des frais inutiles et notamment des frais notariés et autres frais administratifs, a estimé ne pas devoir les notifier mais les stocker de façon à les notifier à une autre échéance de réadaptation. C'est une gestion rigoureuse, ce qui évite d'engager des frais administratifs qui, à un moment donné, vont au-delà du montant en jeu. La FIPA est tellement bien gérée qu'elle a pu constituer des réserves. Ces réserves sont d'une telle importance que nous venons de prendre la décision, dans le cadre du budget 1995, de démobiliser une partie d'entre elles de façon à les apporter en supplément de recettes à l'Etat. Si ça, ce n'est pas de la bonne gestion, alors je ne sais pas ce qu'il faut entendre par bonne gestion !

Vous souhaitez, et là on entre dans un débat qui est plutôt celui de la politique industrielle, que les rentes de droit de superficie soient réadaptées, parce qu'elles correspondraient à une situation foncière qui ne serait pas en phase, si je puis dire, avec le marché. En d'autres termes, vous souhaitez - c'était notamment exprimé dans votre motion mais vous l'avez dit de manière un peu différente maintenant - que le prix du terrain à partir duquel le droit de superficie est calculé soit réadapté.

Très catégoriquement et en tout respect pour vos préoccupations, la réponse est non. Cela mettrait en péril un des aspects essentiels de la politique industrielle de ce canton qui consiste à pouvoir mettre des terrains bon marché à disposition des entreprises performantes qui nous honorent de leur présence et de leurs activités. Vous savez que dans l'industrie, en règle générale - il y a évidemment toujours des exceptions - on ne dégage pas des marges comparables à celles que l'on obtient dans un certain nombre d'activités de service. Dans ce contexte-là, il est de toute première importance que les charges foncières, qui font partie du prix de revient d'un produit industriel, restent les plus basses possibles, car c'est la seule façon de permettre aux industries de continuer à dégager des profits, de les réinvestir dans des produits nouveaux et d'innover dans des technologies nouvelles.

Très clairement, nous devons vous dire, Monsieur le député, qu'il n'est pas question de réadapter le prix des terrains et nous avons la fierté, à Genève - alors que nous avons par ailleurs un marché foncier qui n'est pas réputé par la modicité de ses prix - d'avoir des terrains industriels bon marché dans la zone industrielle Praille-Acacias, gérée par la FIPA, ainsi que dans d'autres zones de développement industriel, et des prix supportables pour les industries qui permettent véritablement à notre canton d'avoir une ambition industrielle grâce à cet outil de travail.

En outre, il y a la conjoncture actuelle et ses difficultés. Je voudrais vous donner, si je le pouvais - mais le secret de fonction, la loyauté et la discrétion que nous devons avoir à l'égard des entreprises nous en empêchent - une liste d'entreprises qui, en raison de la conjoncture actuelle, alors qu'elles sont en zone FIPA ou dans les autres zones de développement industriel, sur des terrains mis à disposition par l'Etat, nous demandent des moratoires sur les rentes de droit de superficie qu'elles doivent nous verser, des délais, parce qu'aujourd'hui elles sont dans des situations difficiles. Ce sont des délais auxquels nous consentons, car nous estimons que, sur le front de l'emploi, il est évidemment préférable de faire un effort de ce côté-là plutôt que de contraindre les entreprises à dégraisser leur effectif simplement pour leur permettre de payer les rentes de droit de superficie que l'Etat est en droit de recevoir.

C'est, Monsieur le député, une volonté politique industrielle et il n'est pas question d'y renoncer. Je voudrais, à cet égard, mettre le doigt sur ce qui me semble être une contradiction, connaissant, par ailleurs, les opinions légitimes auxquelles vous vous référez en termes de liberté de marché. Voudrait-on augmenter les rentes de droit de superficie au-delà de ce qu'exige la politique industrielle que nous voulons conduire, voudrait-on rehausser le prix des terrains pour le mettre en phase sur le marché que nous devrions, à ce moment-là, en tirer les conclusions nécessaires et supprimer purement et simplement la FIPA, car ce que vous nous demandez, Monsieur le député, c'est la négation de la FIPA. La considérer comme n'importe quel opérateur foncier dans ce canton serait la mettre en concurrence avec des opérateurs du privé, et nous n'avons pas cette ambition pour la FIPA. Ce n'est pas son rôle.

Si la FIPA devait opérer dans les mêmes conditions que celles du marché, elle se comporterait alors comme un promoteur ou comme une régie et elle n'aurait pas de justification. Laissons faire les opérateurs du secteur privé.

C'est parce que la FIPA est au service d'une politique industrielle dont l'un des aspects essentiels est d'avoir des terrains bon marché qu'elle a sa raison d'être. Alors, loin de diminuer son rôle, nous entendons au contraire le renforcer. Voilà la réponse que je voulais vous donner. Je vous remercie, Monsieur le député, au travers de cette motion transformée en interpellation, de nous avoir permis de préciser l'un des aspects essentiels de la politique industrielle de ce canton, aspect auquel nous n'entendons nullement renoncer. (Applaudissements.)

M. Daniel Ducommun (R). Je remercie M. Maitre de ses propos. Je ne peux évidemment pas partager tous ses arguments. Monsieur Maitre, la volonté politique industrielle que vous développez maintenant est louable. Vous subventionnez des entreprises situées dans les zones de vos fondations. Mais il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas que celles-ci, il y a d'autres entreprises dans le canton qui ont besoin d'avoir cette volonté de politique industrielle et qui ont besoin de bénéficier également de conditions-cadres qu'elles n'ont pas forcément. Monsieur Maitre, le débat n'est pas clos mais, à mon avis, ne fait que commencer, et c'est avec plaisir que nous pourrons y revenir.

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Un mot, Monsieur le député, pour dire que nous ne subventionnons pas les entreprises. Nous leur mettons à disposition les éléments de base leur permettant de développer leur activité et, parmi ces éléments de base, il y a des terrains équipés mis à disposition, à des prix compatibles avec l'activité industrielle et les marges que l'on peut dégager de cette activité.

Deuxième point. Toutes les entreprises industrielles qui se trouvent soit en zone industrielle Praille-Acacias, soit dans les zones industrielles de développement, sont logées à la même enseigne. Nous appliquons la loi générale sur les zones de développement industriel et c'est une loi qui, précisément, est un des instruments de politique industrielle. Il n'y a donc pas d'inégalité de traitement. Il pourrait y avoir inégalité de traitement - si c'est ce que vous vouliez dire - avec d'autres entreprises non industrielles. Mais vous savez, Monsieur le député, que l'inégalité de traitement consiste à apporter des réponses différentes à des situations identiques. La situation d'une entreprise du secteur tertiaire n'est pas identique à celle d'une entreprise industrielle, que ce soit en termes de charges foncières, d'équipements nécessaires, de dévestiture, ou autres.

Je puis donc vous dire que l'ensemble des industries exerçant leur activité dans les zones industrielles de développement ou stricto sensu dans la zone industrielle de Praille-Acacias, sont logées à la même enseigne avec des différences d'approche, puisque, dans la zone industrielle Praille-Acacias, la FIPA a pour mission de gérer cela directement et, à teneur de la loi, ne peut voter que des droits de superficie. J'aimerais vous dire que s'il y a plus de trente ans nos prédécesseurs au gouvernement - dont certains étaient d'ailleurs de votre parti - n'avaient pas eu un certain courage, malgré quelques avis qui, à l'époque, contestaient la mise en place d'un régime FIPA, il n'y aurait probablement plus d'industries dans ce canton. C'est dire qu'aujourd'hui, non seulement nous ne devons pas avoir l'ambition de détruire ce qui a été incontestablement utile mais de réfléchir à améliorer le système dans le sens d'une vraie politique industrielle et non pas d'une politique financière. Nous avons un devoir, si nous voulons maintenir une industrie dans ce canton, de ne pas alourdir les charges foncières qui sont un des points importants du prix de revient des entreprises.

Cette interpellation est close.  

Le président. J'ai le plaisir de saluer à la tribune du public la classe de troisième année de Mme Châtelain, de l'école de culture générale Jean-Piaget. (Applaudissements.)

RD 226
9. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la gestion de la Fondation des terrains industriels Praille et Acacias (FIPA) pour l'exercice 1993. ( )RD226

L'activité de la Fondation des terrains industriels Praille et Acacias (FIPA) au cours de l'exercice 1993 est décrite dans le rapport de gestion ci-joint, approuvé par le Conseil d'Etat le 19 septembre 1994.

La situation financière de la fondation demeure bonne.

- Le résultat d'exploitation, avant les attributions statutaires aux fonds d'amortissement, de renouvellement et de réserve générale, s'élève à 8 038 105,80 F (7 793 892,85 F en 1992);

- Le solde du résultat d'exploitation, après les attributions statutaires, 5 250 000 F, constitue la rétribution de la dotation de l'Etat de Genève (5 000 000 F en 1992).

La fondation a poursuivi en 1993 l'exécution des mandats qui lui ont été confiés:

- par l'Etat de Genève,

 en vue de l'équipement, de la mise en valeur et de la gestion des zones industrielles de Meyrin-Satigny (parties reliées au rail et non reliées au rail), de Plan-les-Ouates et de Vernier/Mouille-Galand, et,

 en vue de fournir au Conseil d'Etat des préavis circonstanciés lors de l'application éventuelle du droit de préemption de l'Etat de Genève, dans les zones précitées, en cas d'aliénation d'immeubles (L 1 19),

- par la Ville de Genève,

 en vue de la gestion des terrains industriels qu'elle possède à Vernier, entre la cité du Lignon et l'ancienne usine à gaz.

Le Conseil d'Etat vous recommande d'approuver le rapport de gestion de la FIPA pour l'exercice 1993.

Débat

M. Christian Grobet (AdG). Comme il arrive à l'Alliance de gauche de ne pas toujours être d'accord avec le Conseil d'Etat et de ne pas manquer de l'exprimer, il me paraît légitime, lorsque nous sommes d'accord avec le Conseil d'Etat, de le relever.

J'aimerais tout d'abord remercier le Conseil d'Etat, et plus particulièrement M. Jean-Philippe Maitre, pour les propos qu'il vient de tenir. J'ai, comme vous, regretté que cette motion ait été retirée parce qu'elle n'a pas donné l'occasion d'ouvrir un débat sur la question importante qui était posée. Mais les hasards de l'ordre du jour font que cette interpellation est tout de suite suivie du rapport de gestion de la FIPA. Par voie de conséquence, cela me donne l'occasion de poursuivre le débat sur la question évoquée.

Non seulement nous souscrivons totalement, Monsieur le conseiller d'Etat, à ce que vous venez de déclarer, mais nous nous félicitons, dans une situation difficile pour l'industrie, que vous ayez réaffirmé des choses importantes qui, à mon sens, sont des évidences. La condition sine qua non de la réussite d'une entreprise industrielle c'est de bénéficier d'un terrain bon marché. Ce n'est pas par hasard, Monsieur Ducommun, que dans de nombreux pays les municipalités mettent à disposition des terrains très bon marché pour l'industrie, notamment pour attirer des entreprises industrielles nouvelles dans leur municipalité. Il ne s'agit pas de tirer profit d'un terrain, comme le ferait un particulier, l'Etat a un autre rôle à jouer.

Ces terrains ne sont pas du tout mis en droit de superficie à perte. S'ils sont mis à disposition à bon marché, c'est simplement parce que l'Etat a mené une politique intelligente au lendemain de la guerre en créant un instrument exemplaire en la FIPA qui a pu acquérir de gré à gré des terrains très bon marché et les maintenir bon marché. J'aimerais confirmer - vous me permettrez de dire, Monsieur Maitre, pour l'avoir observé pendant douze ans au conseil d'administration de la FIPA, que je n'ai pas véritablement participé à la gestion - ce que vous avez dit, à savoir que la FIPA est excellemment bien gérée. Je trouve que vos critiques, Monsieur Ducommun, sont parfaitement injustes et qu'avant d'avancer certains faits vous feriez mieux d'être plus précis pour que le Conseil d'Etat puisse vous répondre.

La proposition de vendre des terrains de la FIPA, à laquelle nous nous opposerons avec la même vigueur que nous nous sommes opposés avec succès devant le peuple contre la tentative d'aliéner une partie du patrimoine de l'Etat à Versoix, est une politique à très courte vue. Certes, en vendant les «bijoux de la famille» comme le gouvernement français est actuellement en train de le faire, on peut peut-être résoudre des problèmes budgétaires à court terme sur un exercice ou deux.

Mais le problème, vous le savez aussi bien que moi, surtout dans le domaine dans lequel vous travaillez, c'est la revente des terrains par la suite. A cet égard, certaines entreprises à Genève, qui n'étaient pas installées sur des terrains en zone industrielle, je vous l'accorde, ont cependant donné des exemples particulièrement néfastes d'une spéculation telle que les terrains sur lesquels elles se trouvaient, comme Sécheron, les Charmilles, en passant par la SIP, Caran d'Ache et d'autres, sont devenus totalement inutilisables pour l'industrie parce que leur charge foncière est devenue insupportable.

Par voie de conséquence, la seule garantie que des terrains puissent rester bon marché, c'est précisément qu'ils restent entre les mains de collectivités publiques qui les mettent à disposition à un rendement normal. Certes, nous sommes d'accord avec vous qu'il ne s'agit pas de subventionner des entreprises ni de tirer un profit excessif et de créer des difficultés pour celles-ci.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.  

M 945
10. Proposition de motion de MM. Daniel Ducommun, Pierre Kunz, Bernard Lescaze et David Revaclier concernant les investissements et plus particulièrement les achats au sein de l'Etat de matériel, appareils, véhicules, machines, mobilier et équipements divers. ( )M945

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- l'effort en cours de redressement des finances publiques du canton, conformément au plan financier quadriennal 1993-96;

- la volonté populaire qui s'est maintes fois manifestée contre tout accroissement de la fiscalité;

- le taux d'amortissement moyen des biens de l'Etat réduit depuis 1992 de 10 à 6%;

- l'indispensable poursuite des efforts d'économies à réaliser,

invite le Conseil d'Etat

- à déclarer avec effet immédiat, au sein des départements et des régies en dépendant, l'obligation de justifier par leur nécessité impérieuse toutes les acquisitions de matériels, appareils, véhicules, machines, mobiliers et équipements divers, le cas de la recherche scientifique demeurant réservé.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Dans sa présentation des comptes 1993, le chef du département des finances indiquait qu'il éprouvait une satisfaction certaine en constatant que «l'Etat a pu maintenir un volume d'investissement brut de 562 millions de francs assurant ainsi un appui anticyclique, facteur de relance».

Les motionnaires partagent dans une certaine mesure la satisfaction du chef du département des finances. Il est en effet utile que l'Etat, en période de crise, contribue à l'effort de relance économique et de maintien de l'emploi par un volume d'investissements aussi important que possible dans le tissu productif local.

On doit cependant constater, d'une manière générale, que ces efforts devraient être mieux mesurés à l'aune des moyens financiers dont dispose le canton. Contrairement, en effet, aux nations, l'Etat de Genève ne dispose pas du privilège de battre monnaie, ce qui l'oblige à emprunter les capitaux destinés à cette relance et du même coup à alourdir une dette publique dont le poids deviendra vite insupportable pour les générations futures.

Jusqu'au rétablissement d'un équilibre durable des finances publiques, il faut donc réduire le volume des investissements de l'Etat, une mesure qui se justifie d'autant plus que, fort heureusement, la reprise économique est désormais engagée.

Par ailleurs, les motionnaires s'étonnent que figure dans la liste des investissements réalisés une multitude d'achats qui ne présentent aucun intérêt en termes de relance et d'emploi. Par exemple, en 1993, ce sont des dizaines de millions de francs qui ont été dépensés en matériel informatique, en véhicules, en centraux téléphoniques, en instruments de mesure, en matériel hospitalier, en appareils médicaux, en matériel pédagogique, en mobilier, en parcomètres, etc. Tous ces matériels proviennent, en effet, dans la très large majorité des cas, au mieux des cantons voisins, très généralement plutôt d'Allemagne, de France, du Japon ou des Etats-Unis.

Pourquoi ces acquisitions? Très généralement parce que ces équipements ont pour vertu d'être plus modernes, technologiquement plus évolués que les équipements remplacés, ceux-ci étant le plus souvent en bon, voire en excellent état. Mais leurs utilisateurs font valoir qu'ils sont «technologiquement usés, dépassés» ou encore que «les contrats de maintenance arrivent à échéance».

Cette approche, dans l'état actuel des finances genevoises, est anachronique et il convient de geler avec effet immédiat ce type de dépenses qui, répétons-le, n'apportent rien sur le plan de la relance et de l'emploi mais qui, par contre, contribuent à creuser les déficits budgétaires et à grossir les problèmes de trésorerie du canton.

Le gel que demandent les motionnaires s'avère d'autant plus nécessaire que dès 1992 le Parlement genevois a accepté de diminuer de 10 à 6% le taux moyen des amortissements. Une telle diminution, si l'on ne veut pas qu'elle ne reste qu'une mascarade comptable et si l'on veut éviter qu'elle se traduise à terme par un renforcement des difficultés financières du canton, impose en effet un ralentissement des investissements. Elle impose que les Genevois acceptent d'utiliser plus longtemps, de renouveler moins rapidement les équipements des services publics et qu'ils se fassent à l'idée que, pour un temps au moins, ils devront parfois se passer des équipements les plus sophistiqués.

Demeurent bien entendu réservés, s'agissant du gel susmentionné, les cas de nécessité impérieuse. Les motionnaires laissent au Conseil d'Etat le soin de définir précisément ce qu'on doit entendre par ces termes. Sommairement, on peut dire que la nécessité impérieuse concerne tous les cas dans lesquels les matériels, appareils, véhicules, machines et équipements divers sont physiquement usés à un point tel que leur maintenance et leur réparation ne sont plus possibles.

Demeurent aussi réservées les exigences formulées par les institutions publiques se livrant à la recherche scientifique.

En conclusion, on relèvera que le gel proposé ne peut avoir qu'un effet positif sur l'emploi dans les secteurs de l'entretien et de la maintenance qui regroupent de nombreuses PME et entreprises artisanales locales. Une fois la volonté de l'Etat clairement exprimée de faire durer ces équipements, on assistera d'ailleurs à une multitude de propositions et de solutions intelligentes en provenance des artisans et des PME concernés, propositions et suggestions qui permettront à l'Etat de réaliser aisément les économies attendues, économies qui, répétons-le, portent sur des dizaines de millions de francs chaque année.

On notera que cette motion reprend dans une certaine mesure, mais de manière plus pressante vu la situation, les objectifs et les motifs exprimés par la motion 863 adoptée par le Grand Conseil le 11 juin 1993 mais dont il apparaît que le Conseil d'Etat n'a guère tenu compte. Les motionnaires relevaient alors déjà que «le profit vient de l'entretien, de la longévité dubien (...). Créer des emplois dans cette perspective de maintenance, des emplois qualifiés et décentralisés, voilà une formule d'avenir pour une société moderne».

En vertu de ce qui précède, les motionnaires vous remercient, Mesdames et Messieurs les députés, de soutenir cette proposition de motion.

Débat

M. Bernard Lescaze (R). Je pense que les invites de la motion sont suffisamment claires pour montrer qu'il s'agit d'un problème relativement complexe mais susceptible d'offrir un certain nombre de pistes possibles d'économies. L'exposé des motifs donne en détail quelques-unes de ces pistes et il en existe certainement d'autres. Je propose donc que cette motion soit renvoyée pour examen à la commission des finances.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Voilà une motion que nous soutiendrons, car elle respecte trois principes nous tenant à coeur. Premièrement, la durabilité des objets, ceux qui orientent les achats vers des objets de qualité et ceux qui encouragent la fabrication d'objets durables, d'où, à long terme, diminution des déchets. Deuxièmement, la volonté d'imposer ce principe au Conseil d'Etat, et, enfin, la création d'emplois dans la perspective de maintenance du matériel, ce qui, de plus, favorise des emplois qualifiés et décentralisés. Nous ajouterons simplement, car les motionnaires n'en parlent pas mais cela était peut-être sous-jacent, qu'il faut absolument se soucier également, lors des achats, de porter le choix sur des appareils respectueux de l'environnement et peu gourmands en énergie.

M. Jean-Pierre Lyon (AdG). La proposition de motion de nos collègues est intéressante. Ce n'est pas une nouveauté, puisque la Ville de Genève a déjà appliqué ce système il y a quelques années sur les postes 314 à 318 qui correspondent à l'achat de biens et de matériels.

Je rappellerai à nos collègues motionnaires qu'il aurait été plus intéressant - comme la commission des finances de la Ville de Genève l'avait d'ailleurs fait pour cette dernière - dans la rédaction de cette motion, d'indiquer le pourcentage des postes. Je demanderai à nos collègues motionnaires quel est le pourcentage qu'ils prévoient. Est-ce 10 à 15% d'un poste, au maximum ? Si tel était le cas, cela voudrait dire que le Conseil d'Etat devra venir avec des propositions plusieurs fois par année pour compléter les biens, services et marchandises. J'aimerais que l'un des motionnaires nous renseigne sur ce point.

M. Bernard Lescaze (R). Je regrette, malheureusement, de ne pas pouvoir satisfaire M. Lyon à ce stade. Si je propose le renvoi en commission, c'est précisément pour que, face à l'ensemble de ces problèmes, les députés - et les collègues de son parti y seront, je l'espère, associés - puissent en étudier les pourcentages et les modalités. Je ne peux pas aller plus loin ce soir. M. Lyon a bien fait de rappeler l'exemple de la Ville de Genève, mais il est possible que pour l'Etat les choses ne puissent pas être appliquées exactement de la même manière.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. J'indique tout d'abord à ce Grand Conseil que le Conseil d'Etat ne s'oppose pas à ce que cette motion soit renvoyée à la commission des finances. Mais j'entends néanmoins, au nom du gouvernement, vous dire deux choses.

La première, c'est que l'exposé des motifs propose la réduction des investissements et je cite : «jusqu'au rétablissement d'un équilibre durable des finances publiques.». Permettez-moi de vous rappeler que le gouvernement a déjà pris les devants, puisque, à charge du budget, les investissements nets fixés dans le cadre directeur du plan de redressement doivent se situer à hauteur de 250 millions, et que pour le projet de budget 1995 les investissements nets à sa charge représentent 264,2 millions. Nous sommes donc virtuellement dans la cible pour un montant total brut d'investissements de 419,5 millions.

Je rappelle aussi qu'un certain nombre de milieux de ce Grand Conseil nous ont instamment demandé, l'an dernier déjà, de maintenir un volume certain d'investissements afin de permettre d'assurer la reprise de l'économie. C'est ce que nous avons fait et ce que nous continuerons à faire. Mais il est vrai que, si les investissements privés reprennent et que la tendance à la reprise se confirme, le gouvernement essaiera d'avoir une politique anticyclique et, par conséquent, de freiner quelque peu les investissements publics pour laisser se développer les investissements privés.

La deuxième mesure proposée est celle du gel, avec effet immédiat, d'un certain nombre d'équipements. Les membres de la commission des finances le savent bien, les équipements font l'objet d'un plan de renouvellement, tant au niveau de l'Etat qu'au niveau des établissements publics autonomes et il est présenté régulièrement à la commission les plans décennaux, par exemple de l'hôpital cantonal, en matière de renouvellement d'équipements.

J'ajoute au surplus que, depuis un certain nombre d'années, le Conseil d'Etat présente à votre Conseil, avec le projet de budget de l'année, le train de lois d'investissement enregistrant essentiellement, à part celle des rubriques budgétaires, les biens d'équipement auxquels la motion fait allusion. Je vous signale que, par cet instrument du train de lois d'investissement, les membres de la commission des finances, tout d'abord, et le Grand Conseil, ensuite, peuvent se déterminer sur les besoins en équipements, que ce soit en matière informatique ou de renouvellement de matériels de tout genre tels qu'évoqués dans la motion.

Vous avez donc, par ce biais et par la volonté de transparence du gouvernement, le moyen de vous déterminer. C'est si vrai que le train de lois d'investissement du projet de budget 1995 a fait l'objet de débats à la commission des finances et que l'ensemble des projets de lois qui vous ont été présentés en matière d'équipements ont été acceptés. J'entendais vous dire cela pour signifier ici que ce qui est demandé nous le réalisons déjà. Je suis parfaitement d'accord, comme indiqué au début de ma réponse, que nous allions plus loin dans la discussion à la commission des finances et que nous examinions, au niveau quantitatif, ce en quoi pourrait consister, non pas un gel immédiat, ce à quoi je m'oppose, mais une réduction encore complémentaire des équipements.

Sachez enfin que dans les domaines du parc des véhicules, informatique et des équipements médicaux, on va largement, depuis deux ans, au-delà des planifications de renouvellement pour, précisément, répondre à une des préoccupations des motionnaires.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). J'ai bien écouté les propos de M. Vodoz, conseiller d'Etat, mais je voudrais tout de même ajouter une petite chose en tant que membre de la commission des finances. J'ai remarqué que la marge de manoeuvre pour modifier les lignes budgétaires est toujours très faible, car les départements ont toujours d'excellentes raisons pour présenter et maintenir leurs demandes de crédits. Cette motion a pour nous toute sa raison d'être et c'est pour cela que nous souhaitons son renvoi en commission.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Mais, Madame la députée, le Conseil d'Etat, par rapport aux demandes formulées par les services, fait déjà toute une série d'arbitrages avant de vous présenter ce qui lui paraît indispensable. Ce choix, nous le faisons, il vous incombe ensuite à vous, et vous en avez le pouvoir, de déterminer si vous l'acceptez ou pas.

Nous aurons toujours de bonnes raisons de maintenir ce que nous considérons comme indispensable. A vous, à votre tour, d'avoir le courage de dire non si tel est votre sentiment et ne pas se retrancher derrière le fait que nos arguments sont bons.

Mise aux voix, la proposition de renvoi de cette proposition de motion à la commission des finances est adoptée.  

IU 43
11. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. John Dupraz : Augmentation de la taxe autos. ( ) IU43
Mémorial 1994 : Développée, 4117.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Ce qui est certain, Monsieur Dupraz, c'est que la traversée de la rade ne pourra pas se réaliser sans que quelqu'un la paie, que ce soit l'usager seul, par le biais d'un péage, les automobilistes du canton, par le biais de l'impôt autos, ou les contribuables genevois, par le biais de la fiscalité ordinaire, et cela que l'investissement soit fait directement par l'Etat ou par un groupe privé au bénéfice d'une concession de l'Etat, ou encore par une combinaison des deux.

L'augmentation de l'impôt autos, dont le produit serait affecté, comme déjà prévu par ce Grand Conseil, pour l'étude relative à la traversée de la rade, au paiement des charges financières et de l'amortissement, constitue donc une des hypothèses de financement à laquelle j'ai répondu à la suite d'une conférence de presse donnée par un de mes collègues du Conseil d'Etat à propos de la traversée de la rade. Les chiffres indiqués font référence à un ouvrage dont le prix de 700 millions comprend non seulement la traversée, mais la liaison jusqu'au plateau de Frontenex.

Enfin, je considère que les Genevois devront savoir, au moment de voter, comment la traversée de la rade sera financée. Je suis de ceux qui souhaitent la traversée de la rade, mais j'entends aussi dire, que cela fasse plaisir ou pas, comment on la financera.

Cette interpellation urgente est close.  

PL 6629-B
12. Rapport de la commission des affaires sociales chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Erika Sutter-Pleines, Pierre-Alain Champod et Alain Sauvin instituant une allocation d'insertion (J 7 12) (-) PL6629
Mémorial 1990 : Divers, 5374. Projet, 5400. Commission, 5434.
Mémorial 1993 : Rapport, 5794.
Rapport de première majorité de M. Philippe Schaller (DC), commission des affaires sociales
Rapport de deuxième majorité de M. Bernard Clerc (AG), commission des affaires sociales

RAPPORT DE LA PREMIÈRE MAJORITÉ

PRÉAMBULE

Mme Erika Sutter-Peines et MM. Pierre-Alain Champod et Alain Sauvin déposèrent 23 octobre 1990 le projet de loi 6629 (annexe 1, p 37). Il fut envoyé à la commission des affaires sociales lors de la séance du Grand Conseil du 9 novembre 1990 après avoir fait l'objet d'un seul débat de préconsultation. Ainsi, au cours de la précédente législature, ce projet, prévoyant d'instituer une allocation d'insertion octroyée sur la base d'un contrat de formation ou de réadaptation, a occupé les travaux de la commission durant une période de 9 mois. Conjointement, la commission a été saisie de la motion 684 (annexe 1, page 40) visant à introduire la notion plus générale d'un minimum social garanti permettant de couvrir les besoins des bénéficiaires en logement, en soins de santé et en formation (culture et loisirs).

Ces deux propositions ont pour origine des préoccupations communes: faire face à la pauvreté et à toute les formes de précarités engendrées par les mutations économiques et sociales ainsi que de tenter, pour les plus démunis, d'éviter l'assistance et l'exclusion.

Compte tenu de l'importance humaine, politique, sociale et financière des questions posées, de l'ampleur des travaux parlementaires, du grand nombres d'auditions et de documents remis aux commissaires, du renouvellement du parlement, la commission à l'unanimité, a pris la décision de suspendre ses travaux et:

 de présenter un rapport intermédiaire au Grand Conseil dont la rapporteuse fut Mme Françoise Saudan (annexe 1);

 d'adresser au Conseil d'Etat une proposition de motion concernant la pauvreté à Genève et les moyens d'y remédier (annexe 1, page 37) considérée comme une réponse à la motion 684 et d'attendre son rapport avant de poursuivre les travaux parlementaires;

 d'élaborer dans les plus brefs délais un projet de loi permettant de venir en aide aux chômeurs en fin de droit, réponse, du moins partielle, au projet de loi 6629 dont l'entrée en matière a été votée à l'unanimité.

C'est ce troisième volet qui est soumis à votre appréciation par le projet de loi 6629-B.

AVERTISSEMENT

Le projet de loi 6629-B est conforme à la demande et aux voeux exprimés, à l'unanimité, par les membres de la commission des affaires sociales afin d'éviter aux personnes, qui sont touchées par le chômage et qui ont épuisé leurs droits aux prestations de recourir à l'assistance publique. Il est estimé urgent de trouver une solution qui soit autre que l'assistance.

Pour des raisons de procédure législative et compte tenu que ce projet concrétise, pour une catégorie de citoyens, la demande des auteurs du projet de loi initial 6629, la lettre B a été adoptée, la lettre A se rapportant au rapport intermédiaire de Mme Françoise Saudan.

Le présent rapport se limitera exclusivement au projet de loi sur les prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin de droit. Pour les autres catégories de personnes touchées par l'exclusion et la pauvreté, le législateur a préféré attendre l'évaluation financière et l'impact sur le budget de l'Etat avant d'introduire la notion d'un minimum vital garanti en lieu et place de l'assistance.

INTRODUCTION

Pour bien comprendre le débat d'idées autour du revenu minimum vital, de la pauvreté, de la précarité et de l'exclusion, on ne peut s'épargner la lecture du remarquable et complet rapport intermédiaire de notre collègue Françoise Saudan, ni les exposés des motifs du projet de loi 6629 et de la motion 684.

Il est important que le législateur connaisse bien la situation en matière d'aide sociale dans notre canton, au niveau fédéral et européen. A cet égard, les auditions, bien résumées par la rapporteuse, apportent un éclairage majeur sur:

 la situation genevoise décrite par les membres de l'Hospice général;

 la pauvreté en Suisse, étude commentée et réalisée par M. Christian Marazzi;

 l'aide sociale développée dans le canton de Berne et les résultats obtenus dans le cadre de la lutte contre l'exclusion exprimée par M. Paul-André Berger;

 l'étude menée par l'Institut d'études sociales au sujet de la pauvreté, du revenu minimum et de l'impôt négatif commentée par Mme Anne-Lise Du Pasquier;

 l'analyse de la situation de la femme en Suisse décrite par Mme Béatrice Despland;

 la large réflexion du professeur Christian Lalive D'Epinay;

 l'exposé de M. Noël Constant, éducateur de rue;

 les réflexions de M. Michel Thiébaud, de l'office cantonal de l'emploi, de MM. Jean-Marc Guinchard, secrétaire de la Fédération des syndicats patronaux et Jean-Pierre Thorel, secrétaire à la Fédération des travailleurs de la métallurgie sur la situation des chômeurs en fin de droit.

Toutes ces personnes se sont élevées, avec vigueur, contre la pauvreté qui exclut et ont décrit ses différentes formes et les risques de précarité touchant des catégories de citoyens de plus en plus nombreuses. Il s'agit bien souvent de situations accidentelles faisant suite à une perte d'emploi, à une rupture familiale ou à une maladie.

Elles ont également dénoncé les imperfections du système de protection sociale helvétique, morcelées, mal coordonnées et compliquées. Ainsi, ce projet de loi permet de combler, en partie, ces imperfections pour une catégorie de citoyens tombés dans la précarité suite à une perte d'emploi.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

1. Déroulement des séances

Réunie sous la présidence de M. Pierre-Alain Champod, la commission a siégé les 22 et 29 mars ; 12, 19 et 26 avril; 3, 10, 17, 24 et 31 mai; 14 juin 1994 en présence de MM. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat, chef du département de l'action sociale et de la santé, et Jean-Pierre Rageth, directeur de l'action sociale au sein de ce département. Les commissaires ont pu bénéficier de l'appui du département pour l'élaboration du projet de loi et ont reçu toutes les informations disponibles et utiles pour l'évaluation et la mise en place du projet.

2. Généralités

La commission des affaires sociales, lors de la précédente législature, avait élaboré le cadre du projet de loi qui est maintenant soumis à ce nouveau parlement. Elle avait, en outre, mandaté le Conseil d'Etat de mettre en forme, un avant-projet conforme à ses voeux et à l'urgence de la situation des chômeurs en fin de droit et de remplacer pour eux les prestations d'assistance remboursables par les prestations sociales non remboursables. Les bénéficiaires potentiels étant définis, il fallait encore déterminer le montant du revenu pour ces allocations d'aide sociale.

Le département avait pour mandat de fournir les statistiques quant aux nombres potentiels d'ayants droit et d'apporter un certain nombre d'exemples comparant les différents modes de calcul et les montants entre l'assurance chômage, le revenu minimum d'aide sociale garanti aux rentiers AVS /AI, le barème de l'assistance publique et les prestations complémentaires fédérales. Les membres de la commission se sont également prononcés en faveur d'une contre-prestation demandée aux bénéficiaires sous forme de travaux d'utilité sociale ou de formation, voire de perfectionnement. L'application de la loi serait confiée à l'Hospice général.

Par ailleurs, suite à l'expérience du programme «solidarité 700ème» décrit dans le rapport de Mme Saudan (annexe 1, page 9), il est également proposé d'introduire dans la loi une allocation d'insertion en principe unique, d'un montant variant entre 1000 et 10'000 F. Les bénéficiaires seraient les mêmes que ceux ayant droit au revenu minimum d'aide sociale et qui présenteraient en outre un projet réaliste et réalisable, permettant soit une formation ou un recyclage professionnel, soit une réintégration dans la vie professionnelle et sociale ou éventuellement le rétablissement d'un équilibre financier gravement compromis; la responsabilité de la procédure étant également confiée à l'Hospice général.

Tous ces principes ont été adoptés par la commission des affaires sociales au mois d'octobre 1993; l'architecture du projet de loi devant être la même que celle sur les prestations cantonales complémentaires à l'assurance vieillesse et survivant et à l'assurance invalidité (J 9 7).

3. Discussion et vote article par article

Après avoir reçu du département toutes les informations utiles concernant les bénéficiaires potentiels:

 itinéraire type du chômage vers l'assistance (annexe 2),

 prestations octroyées par l'Hospice général aux chômeurs assistés (annexe 3),

 nombre de chômeurs, mois par mois (annexe 4),

 différents tableaux comparatifs d'interventions (annexes 5, 6 et 7),

l'entrée en matière a été adoptée à l'unanimité.

TITRE IBUT ET BÉNÉFICIAIRES

Article 1

Cet article précise que les bénéficiaires doivent avoir épuisé leurs droits aux prestations de l'assurance chômage (régime fédéral et régime cantonal) et être demandeur d'emploi. La loi s'applique également aux indépendants pour autant qu'ils aient renoncés définitivement à l'exercice d'une profession à titre d'indépendant, condition de la mise à l'octroi d'une occupation temporaire.

Adopté à l'unanimité.

Article 2

al. 1. Pas de commentaire.

al. 2 et 3. La durée de séjour pour les Confédérés ainsi que pour les requérants étrangers, les réfugiés et apatrides est sensiblement plus courte que celle figurant dans la loi sur les prestations cantonales complémentaires à l'assurance vieillesse et survivants et à l'assurance invalidité; il s'agit en effet de personnes ayant travaillé à Genève et ayant contribué à son essor économique. Financièrement le raccourcissement du délai n'engendre pas d'importants coûts supplémentaires, hormis que le montant de l'assistance est remboursable, mais les sommes perçues sont excessivement faibles (annexes 8 et 9).

Adopté à l'unanimité.

TITRE IIREVENU MINIMUM CANTONAL D'AIDE SOCIALE

CHAPITRE IMontant

Article 3

Pour pouvoir déterminer le montant du revenu minimum cantonal d'aide sociale garanti aux chômeurs, la commission a pris connaissance (annexes 10 et 11) de divers exemples de calculs issus de situations réelles de chômeurs en fin de droit traités par l'Hospice général. A cette occasion Mme Christine Boyer et M. Robert Cuenod, tous deux de l'Hospice général, ont commenté ces différentes simulations. Ces derniers comparent le revenu mensuel pour une personne seule, ou un couple avec un ou plusieurs enfants, entre l'assistance, les prestations complémentaires fédérales avec ou sans limite de loyer, et le revenu minimum cantonal d'aide sociale accordée dans le cadre de la loi sur les prestations cantonales complémentaires à l'assurance vieillesse et survivants et à l'assurance invalidité. Il ressort de cette analyse un certain nombre de différences non seulement dans le montant de l'allocation d'entretien, mais également dans le mode de calcul de prise en charge du loyer, de l'assurance maladie ainsi que des casuels. Par ailleurs, il faut savoir que si l'assistance n'est pas soumise à l'impôt, les autres revenus le sont. Trois facteurs influent sur le montant final disponible comparé aux prestations de l'assistance:

 le mode de prise en charge du loyer dans le système de prestations complémentaires fédérales et le revenu minimum d'aide sociale pour les rentiers, les personnes ayant un loyer plus élevé que les maximums admis voient leurs revenus disponibles diminués;

 le maximum pour une communauté dans le système de prestations complémentaires fédérales et le revenu minimum d'aide sociale pour les rentiers réduit le taux d'augmentation pour les familles lorsque le loyer est élevé;

 lorsqu'il existe d'autres ressources, l'impôt est calculé sur le revenu minimum et les autres ressources, ce qui augmente le taux d'impôt.

Ces différences de calcul trouvent leur explication dans l'esprit même des lois ainsi que de la définition de l'assistance qui a pour but d'assurer l'entretien, le loyer, l'assurance maladie et les transports.

Pour la situation des chômeurs en fin de droit, la volonté est d'assurer les prestations vitales pour leur permettre de passer le cap difficile et accidentel et ainsi leur donner le temps de retrouver une situation plus confortable. Les autres types de prestations s'adressent à des populations stabilisées.

L'évaluation du coût global pour les 192 dossiers entrant dans la définition des articles 1 et 2 ont été chiffrés; ainsi en transformant l'assistance en revenu minimum d'aide sociale, l'augmentation du coût pour les finances cantonales ne serait que de 88'000 F; par contre, en calquant le revenu minimum sur le modèle des prestations complémentaires fédérales, il s'agirait d'une augmentation de 176'800 F et sur le revenu minimum cantonal d'aide sociale aux rentiers, il s'agirait d'une dépense supplémentaire de 456'000 F.

Ces chiffres doivent être considérés avec prudence en raison de différents facteurs et inconnues: le nombre de dossiers à venir, la composition du groupe familial, le montant des loyers et de l'assurance maladie. Avant de se déterminer, les commissaires ont également pris connaissance des salaires minimums dans les différentes branches économiques les plus touchées (annexe 12).

Finalement, le montant retenu par les membres de la commission sera calculé sur les prestations d'assistance, soit 13'812 F par an pour une personne, comprenant l'entretien de base et les impôts.

Ce montant sera multiplié selon le mode de calcul de l'assistance:

a) 1,46 s'il s'agit de 2 personnes

b) 1,88 s'il s'agit de 3 personnes

c) 2,20 s'il s'agit de 4 personnes

d) 2,50 s'il s'agit de 5 personnes

e) plus 0,30 par personne supplémentaire au-delà de 5 personnes.

A cette somme de base s'ajouteront le loyer, l'assurance maladie de base ainsi que certains frais de vêtement et de maladie dans les limites du barème de l'assistance.

Deux propositions:

 la première, émanant du groupe écologiste, calquée sur le revenu minimum d'aide sociale destiné aux rentiers (21'164 F par an);

 la seconde, de l'alliance de gauche, sur le modèle des prestations complémentaires fédérales (16'812 F par an).

Toutes deux ont été refusées par la majorité de la commission.

Finalement, l'article 3 dans son ensemble a été adopté par 9 voix (5 libéraux, 2 radicaux, 2 démocrates-chrétiens) 6 abstentions (3 alliance de gauche, 2 socialistes, 1 écologiste).

Article 4

Cet article précise les conditions pour l'obtention des prestations d'aide sociale versées par l'Hospice général: ce sont les personnes dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum applicable.

Adopté à l'unanimité.

CHAPITRE IIRevenu déterminant

Article 5

al. 1. Cet alinéa définit les éléments déterminant le revenu:

a) il est introduit la notion d'une franchise déductible de 500 F par mois provenant d'une activité lucrative acceptée par 9 voix et 5 abstentions (libéraux) ceci afin de ne pas favoriser le travail «au noir» même si les mécanismes du marché rendent illusoires cette perspective;

b) pas de commentaire;

c) le montant retenu est le quart de la fortune nette excédant 6'000 F pour une personne seule et 12'000 F pour un couple; ce montant est également différent de celui de la loi sur les prestations cantonales complémentaires à l'assurance vieillesse et survivants et l'assurance invalidité.

Cette différence s'explique parfaitement en raison des groupes de personnes considérés et par les buts différents des deux lois.

d) pas de commentaire;

e) pas de commentaire;

f) les allocations font parties du revenu déterminant; elles sont un droit et leurs prestations sont attribuées sans tenir compte du revenu des bénéficiaires. Elles sont exportables et non remboursables. Un amendement pour supprimer ce revenu déterminant a été rejeté par 9 voix contre 1 et 5 abstentions;

g) pas de commentaire;

h) pas de commentaire.

al. 2. Cet alinéa assimile aux ressources de l'intéressé, celles de son conjoint et des enfants à charge:

a) pas de commentaire;

b) pas de commentaire;

c) cette disposition n'existe pas dans la loi sur l'OAPA. Cette clause s'applique aux couples, mariés ou non.

al. 3. Cet alinéa exclut du revenu déterminant un certain nombre de prestations des proches, de prestations à caractère d'assistance ainsi que les bourses et allocations d'étude:

a) pas de commentaire;

b) pas de commentaire;

c) pas de commentaire.

Adopté dans son ensemble par 9 voix pour et 5 abstentions.

Article 6

Les dépenses déductibles du revenu sont, comme dans le cadre de la loi sur le revenu minimum cantonal d'aide sociale, les intérêts de dettes, les frais d'entretien de bâtiments et les dettes hypothécaires jusqu'à concurrence du rendement brut de l'immeuble, ainsi que les primes d'assurances sur la vie, les accidents et l'invalidité avec plafond fixé par la loi.

Le loyer, lui, étant pris en considération entièrement.

Adopté à l'unanimité.

Article 7

Reprend les éléments votés par le parlement fédéral et la loi sur les prestations cantonales complémentaires à l'assurance vieillesse et à l'assurance invalidité.

Adopté à l'unanimité.

Article 8

Superposable à la loi sur les prestations cantonales complémentaires à l'assurance vieillesse et survivants et à l'assurance invalidité.

L'Etat n'exige pas la vente de l'immeuble qui sert de demeure permanente, mais le grève d'une hypothèque à son profit.

Adopté à l'unanimité.

Article 9

Cet article fixe les périodes et les dates de référence pour la fixation des prestations.

Adopté à l'unanimité.

CHAPITRE IIIPrestations

Article 10

al. 1, 2 et 3. Les prestations d'aide sociale sont accordées sur demande écrite et transmise à l'Hospice général.

al. 4. Même pouvoir conféré à l'Hospice général pour lutter contre les hausses de loyers. L'expérience faite dans le cadre de la loi sur les prestations cantonales complémentaires à l'assurance vieillesse et survivants et à l'assurance invalidité. A permis de faire des économies non négligeables.

Adopté à l'unanimité.

Article 11

Cet article traite de la modification de la situation du bénéficiaire qui pourrait modifier les prestations en cours.

Adopté à l'unanimité.

Article 12

Le renouvellement de la demande d'aide évite l'automaticité et exige qu'un bilan soit effectué entre le bénéficiaire et l'Hospice général.

Adopté à l'unanimité.

Article 13

Exclusion de cumul avec les prestations complémentaires fédérales ou cantonales, au bénéficiaire de l'assurance vieillesse et survivants et de l'assurance invalidité, ainsi que celle des prestations de l'assistance publique.

Adopté à l'unanimité.

Article 14

Cet article précise le montant des prestations en fonction de la différence entre le revenu minimum cantonal annuel d'aide sociale applicable et le revenu annuel déterminant de l'intéressé.

Adopté à l'unanimité.

Article 15

Cet article définit le début et la fin des prestations.

Adopté à l'unanimité.

Article 16

Cet article précise les modifications de calcul ainsi que les prestations minimales afin de simplifier le travail administratif.

Adopté à l'unanimité.

Article 17

Cet article précise l'incessibilité et l'insaisissabilité des prestations.

Adopté à l'unanimité.

Article 18

Cet article précise dans quelle situation le paiement des prestations peut être versé à un tiers qualifié ayant envers l'ayant droit un devoir d'assistance ou s'occupant de ses affaires en permanence (annexe 13).

Adopté à l'unanimité.

Article 19

L'Hospice général peut agir en faveur de l'intéressé si ce dernier ne veut pas ou ne peut pas le faire lui même.

Adopté à l'unanimité.

Article 20

Permet le remboursement de prestations indûment touchées, ceci cependant sans mettre dans une situation difficile un bénéficiaire de bonne foi.

Adopté à l'unanimité.

Article 21

Cet article donne le pouvoir à l'Hospice général d'avoir la mainmise sur les fonds, les valeurs et tous les autres biens meubles.

Adopté à l'unanimité.

Article 22

Cet article permet, lors du décès du bénéficiaire, de réclamer à sa succession et/ou aux héritiers qui l'on acceptée, le remboursement des prestations versées lors de l'aliénation de l'immeuble selon l'article 8. Toutefois, l'alinéa 3 protège le conjoint survivant.

Adopté à l'unanimité.

Article 23

Compensation des créances.

Adopté à l'unanimité.

Article 24

Cet article définit les périodes de prescription.

Adopté à l'unanimité.

Article 25

Cet article règle les dispositions liées à l'hypothèque légale envers l'Hospice général.

Adopté à l'unanimité.

Article 26

Pas de commentaire.

Adopté à l'unanimité.

CHAPITRE IVContre-prestations

Article 27

Introduit une notion nouvelle qui est la contre-prestation d'utilité sociale ou environnementale dont le temps consacré à cette activité sera nettement inférieur à celle d'une activité professionnelle. Cette contre-prestation doit essentiellement être considérée comme un lien, un contrat qui lie le bénéficiaire et la société.

Elle doit être considérée comme un élément revalorisant et non pas comme une contrainte. Elle ne doit pas être la création de «petits boulots précaires» ni être en concurrence avec les emplois rémunérés ou avec les occupations temporaires.

L'usage permettra d'évaluer les besoins, l'évolution des structures existantes, ainsi que l'inventaire de tous les postes convenant pour remplir cette contre-prestation.

Un certain nombre de lieux potentiels ont déjà été définis dans les établissements de soins et d'éducation, les lieux socio-culturels, les associations d'action sociale subventionnées, les lieux municipaux et cantonaux ouverts au public, restaurants scolaires, musées, bibliothèques, centres sportifs, archives de l'Etat, structures de prise en charge des personnes âgées etc. La formation et le recyclage restent prioritaires.

Adopté par 9 oui et 2 abstentions.

TITRE IIIALLOCATION D'INSERTION

L'allocation d'insertion est reprise de l'action «solidarité 700ème» (annexe 1, page 9, rapport intermédiaire de Mme Françoise Saudan), ceci avec deux modifications notables:

 les bénéficiaires seront exclusivement les personnes définies à l'article 1 de la présente loi;

 la composition de la commission chargée d'évaluer et d'examiner les demandes d'allocations.

Le bilan de l'Institut d'études sociales du programme d'action «solidarité 700ème» montre bien que la majorité des projets sont destinés soit au désendettement, soit à la formation. La commission d'évaluation pourra choisir des projets réalistes et réalisables dans les domaines définis à l'article 29; le remboursement d'une dette pourrait être considéré comme aide à la réinsertion pour autant que celle-ci ne soit pas trop importante.

Article 28

Définit les bénéficiaires et le montant maximum de l'allocation d'insertion qui est de 10'000 F. Cette allocation devrait lutter contre deux sortes de pauvreté, l'une provenant d'une situation particulière et accidentelle et l'autre dite structurelle.

Adopté par 10 voix et 5 abstentions libérales.

Article 29

La destination de l'allocation est précisée dans cet article: comme déjà mentionné, la possibilité d'un désendettement peut être envisageable si ce dernier permet la réinsertion professionnelle et sociale.

Adopté à l'unanimité.

Article 30

L'élaboration du projet pourra se faire avec les services sociaux existants ainsi que les autres organismes privés ou publiques dépendant notamment du département de l'action sociale et de la santé, du département de l'instruction publique et du département de l'économie publique.

Adopté à l'unanimité.

Article 31

La composition de la commission d'attribution est volontairement réduite à 7 membres sans suppléant de manière à ne pas diluer les compétences et de pouvoir assurer le suivi des dossiers. Les services sociaux privés sont représentés largement, ainsi que l'office cantonal de l'emploi, celui de l'orientation et de la formation professionnelle. La commission peut faire appel à des experts en cas de nécessité. La décision est notifiée par l'Hospice général.

Adopté à l'unanimité.

TITRE IVORGANISATION

Article 32

Cet article donne l'autorité à l'Hospice général pour exécuter la présente loi.

Adopté à l'unanimité.

Article 33

Cet article définit les modalités de décision de l'Hospice général.

Adopté à l'unanimité.

Article 34

Cet article permet à l'Hospice général d'obtenir des renseignements des différentes autorités, employeurs et organismes s'occupant du requérant.

Adopté à l'unanimité.

Article 35

Assermentation par le Conseil d'Etat des fonctionnaires, employés et auxiliaires chargés de l'application de la présente loi.

Adopté à l'unanimité.

Article 36

Les ressources nécessaires au versement des prestations d'aide sociale et des allocations d'insertion sont portées annuellement au budget de l'Hospice général.

Adopté à l'unanimité, moins une abstention.

TITRE VCONTENTIEUX

Article 37

Cet article règle le problème des réclamations.

Adopté à l'unanimité

Article 38

Cet article définit l'organe de recours.

Adopté à l'unanimité

Article 39

Pas de commentaire.

Adopté à l'unanimité.

TITRE VIDISPOSITIONS FINALES

Article 40

Le législateur a voulu que cette loi soit évaluée tous les deux ans et que le Conseil d'Etat présente au Grand Conseil un rapport communiquant les résultats de cette évaluation.

Article 41

Pas de commentaire.

Adopté à l'unanimité.

Article 42

Pas de commentaire

Adopté à l'unanimité.

Le projet de loi 6629 B sur les prestations accordées aux chômeurs en fin de droit a été adopté à l'unanimité des membres de la commission des affaires sociales.

TRAVAUX DE LA COMMISSION DES FINANCES

La commission des finances a étudié le projet de loi 6629-B dans sa séance du 14 septembre 1994 et entendu M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Après discussion, notamment sur les aspects et les implications financières du projet, la commission des finances a accepté le projet de loi par 9 oui, 2 non (lib.) et 3 abstentions (lib.-rad.).

Les principaux arguments des opposants portaient en premier lieu sur la difficulté d'évaluer avec précision le coût d'un tel projet, puis sur la transformation de l'assistance en un droit, ce qui pourrait provoquer une augmentation des demandes et finalement sur le risque qu'un tel projet de loi pourrait entraîner des abus possibles en faveur de personnes qui ne seraient pas des ayants droit.

CONCLUSION

Ce projet de loi, qui est soumis à votre approbation, Mesdames et Messieurs les députés, marque une volonté politique d'inscrire dans la législation cantonale une réponse en faveur d'une aide sociale autre que l'assistance aux personnes qui sont touchées par le chômage de longue durée.

Certes, certains regretteront que le revenu minimum d'insertion, proposé par ce projet de loi, ne s'adresse qu'à cette seule catégorie de citoyens; d'autres trouveront que le montant d'entretien, calqué sur le barème d'assistance, est insuffisant comparé, par exemple, au revenu minimum d'aide sociale destiné aux rentiers.

Toutefois, la majorité de la commission s'est ralliée à la proposition qui permettrait d'obtenir l'assentiment de ce parlement. Accepter des montants supplémentaires en matière de dépenses cantonales nous aurait obligés à trouver également des recettes supplémentaires et on ne peut faire abstraction des dernières votations tant cantonales que municipales en la matière.

Il faut aussi accepter que le calcul du niveau de revenu minimum reste empirique et que les réflexions théoriques sont plutôt décevantes. Il faudra attendre l'évaluation de ce projet de loi pour estimer ses effets sur la protection sociale et ses lacunes éventuelles.

Cette loi a la grande originalité, comme vous l'aurez compris à la lecture de ce rapport, d'offrir deux aspects obligatoires, incontournables et symbiotiques, qui sont le droit à recevoir une prestation en espèces, associé à une démarche d'insertion sur la base d'un contrat liant la société et le bénéficiaire. Ce dernier s'engage à participer à des actions d'insertion et de son côté la collectivité a l'obligation de tout mettre en oeuvre pour favoriser cette insertion sociale, professionnelle et économique.

Bien entendu, si ce revenu minimum cantonal d'aide sociale est un «plus» par rapport au système de l'assistance actuellement en vigueur, on ne peut que regretter qu'il pallie simplement les carences de l'assurance chômage et dans ce sens il s'agit d'un «moins».

Malheureusement, sur le plan fédéral, on ne voit pas quelle majorité politique pourrait aujourd'hui aboutir à une extension de l'assurance chômage. Il semble par contre se profiler à l'horizon des propositions qui iront dans le même sens que le projet de loi et resteront dans le domaine de l'aide sociale et non pas de la protection sociale (postulat accepté à la session printemps 1994 en faveur d'un revenu minimum pour les chômeurs en fin de droit).

Tout ceci ne dispense pas de mettre en place tous les moyens afin de favoriser l'acquisition de compétences professionnelles et d'avoir une politique volontariste en faveur de la création d'emplois. D'une manière bien plus large, on ne pourra pas éviter la réflexion sur le partage de la masse de travail disponible, ni sur la notion de revenu minimum évitant la pauvreté et l'exclusion pour les autres catégories d'exclus.

Les perspectives d'insertion par le travail uniquement, même si ce dernier restera le mode d'intégration le plus conforme au fonctionnement de notre système économique et social, ne sera probablement plus le seul, car si cela était le cas, les inactifs en nombre croissant ne pourraient plus être intégrés.

Même si cette notion de revenu minimum d'insertion, comme la plupart des actions de politique sociale, rencontre des limites, dont il faut avoir conscience, elle ne rend pas illégitimes tous les efforts de solidarité. Elle doit bien entendu nous inciter à rechercher des moyens encore et toujours plus adaptés pour les réduire et permettre ainsi une plus grande justice sociale.

Les membres de la commission des affaires sociales, à l'unanimité, vous demandent de bien vouloir accepter ce projet de loi 6629-B.

PROJET DE LOI

sur les prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin de droit

(J 7 12)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

TITRE IBUT ET BÉNÉFICIAIRES

Article 1

But

Afin d'éviter de devoir recourir à l'assistance publique, les personnes qui sont au chômage et qui ont épuisé leurs droits aux prestations de l'assurance-chômage (régime fédéral et régime cantonal) ont droit à un revenu minimum cantonal d'aide sociale, versé par l'Hospice général, qui peut être complété par une allocation d'insertion.

Art. 2

Bénéficiaires

1 Ont droit au revenu minimum cantonal d'aide sociale et peuvent bénéficier d'une allocation d'insertion les personnes:

a) qui ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire de la République et canton de Genève;

b) qui sont au chômage et qui ont épuisé leurs droits aux prestations de l'assurance-chômage;

c) qui n'ont pas atteint l'âge de l'assurance vieillesse fédérale;

d) et qui répondent aux autres conditions de la présente loi.

2 Le requérant suisse non genevois, doit avoir été domicilié dans le canton de Genève et y avoir résidé effectivement, sans interruption, durant les 3 années précédant la demande prévue à l'article 10.

3 Le requérant étranger, réfugié ou apatride, doit avoir été domicilié dans le canton de Genève et y avoir résidé effectivement, sans interruption, durant les 7 années précédant la demande prévue à l'article 10.

TITRE IIREVENU MINIMUM CANTONAL D'AIDE SOCIALE

CHAPITRE IMontant

Art. 3

Revenu mini-mum cantonal d'aide sociale

1 Le revenu minimum cantonal d'aide sociale garanti aux chômeurs en fin de droit s'élève à 13 812 F par année s'il s'agit d'une personne célibataire, veuve, divorcée, séparée de corps ou de fait.

2 Ce montant est multiplié par :

a) 1,46 s'il s'agit de 2 personnes;

b) 1,88 s'il s'agit de 3 personnes;

c) 2,20 s'il s'agit de 4 personnes;

d) 2,50 s'il s'agit de 5 personnes;

e) 0,30 par personne supplémentaire au-delà de 5 personnes.

3 Il peut être complété, dans les limites du barème de l'assistance publique, par des allocations ponctuelles destinées à prendre en charge certains frais, tels que les frais de vêtement ou les frais de maladie.

4 Le Conseil d'Etat indexe par règlement le revenu minimum cantonal d'aide sociale au taux décidé par le Conseil fédéral pour les prestations complémentaires fédérales. Il en est de même pour les autres montants en francs énumérés dans la présente loi.

Art. 4

Conditions

Ont droit aux prestations d'aide sociale versées par l'Hospice général les personnes dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum cantonal d'aide sociale applicable.

CHAPITRE IIRevenu déterminant

Art. 5

Revenu déterminant

1 Le revenu déterminant comprend:

a) les ressources en espèces ou en nature provenant de l'exercice d'une activité lucrative, sous déduction d'une franchise mensuelle de 500 F;

b) le produit de la fortune tant mobilière qu'immobilière;

c) le quart de la fortune nette excédant 6 000 F pour une personne seule ou 12 000 F pour un couple;

d) les rentes, pensions et autres prestations périodiques;

e) les prestations touchées en vertu d'un contrat d'entretien viager ou de toute autre convention analogue;

f) les allocations familiales et de formation professionnelle;

g) les sommes reçues au titre d'une obligation d'entretien en vertu du droit de famille;

h) les ressources dont un ayant droit s'est dessaisi.

2 Sont assimilées aux ressources de l'intéressé:

a) celles de son conjoint non séparé de corps ni de fait;

b) celles des enfants à charge, à l'exception de celles qu'ils tirent d'un travail accompli sous contrat d'apprentissage, qui ne sont comptées que pour moitié;

c) celles des personnes faisant ménage commun avec lui.

3 Ne font pas partie du revenu déterminant:

a) les aliments fournis par les proches en vertu des articles 328 et suivants du code civil;

b) les prestations provenant de personnes et d'institutions publiques ou privées ayant manifestement le caractère d'assistance;

c) les bourses et allocations d'études ainsi que les autres aides financières à l'instruction, versées aux personnes dont il a la charge.

Art. 6

Dépenses déductibles

1 Sont déduits du revenu:

a) les intérêts de dette;

b) le loyer ainsi que les frais d'entretien de bâtiment et les intérêts hypothécaires jusqu'à concurrence du rendement brut de l'immeuble;

c) les primes d'assurance sur la vie, contre les accidents, l'invalidité jusqu'à la concurrence d'un montant annuel de 300 F pour une personne seule et 500 F pour les couples et les personnes qui ont des enfants dont les ressources influencent le calcul de la prestation ainsi que les cotisations aux assurances sociales de la Confédération et à l'assurance-maladie;

d) les sommes versées au titre d'une obligation d'entretien en vertu du droit de famille;

2 L'Hospice général est autorisé à demander à la caisse-maladie du bénéficiaire toute information au sujet des cotisations qu'il doit acquitter.

Art. 7

Fortune

1 Sous déduction des dettes dûment justifiées, sont notamment considérés comme fortune de l'intéressé les éléments suivants, évalués conformément à la loi générale sur les contributions publiques du 9 novembre 1887:

a) les immeubles, quel que soit le lieu de leur situation;

b) les valeurs mobilières de toute nature, les mises de fonds, apports et commandites, représentant une part d'intérêt dans une entreprise, une société ou une association;

c) les créances hypothécaires et chirographaires;

d) le capital engagé dans une entreprise y compris les marchandises, les approvisionnements et les créances, mais à l'exception du matériel et de l'outillage;

e) les assurances-vie et vieillesse pour leur valeur de rachat;

f) l'argent comptant, les dépôts dans les banques et caisses d'épargne, les soldes de comptes courants et tous titres représentant la possession d'une somme d'argent;

g) le cheptel, tant mort que vif.

2 Les diminutions et les exonérations prévues aux articles 48, lettre e, et 50 de la loi générale sur les contributions publiques ne sont pas applicables.

3 Les biens dont l'intéressé s'est dessaisi comptent comme s'ils lui appartenaient.

4 Est assimilée à la fortune de l'intéressé celle de son conjoint non séparé de corps ni de fait et celle des enfants à charge.

5 Dans le cas visé à l'article 462, alinéa 1, du code civil, tant que le conjoint survivant n'a pas fait usage de son droit d'option sur la succession du prédécédé, un quart de cette succession est considéré comme fortune du survivant et les trois autres quarts sont considérés comme répartis par parts égales entre les enfants.

6 Les biens grevés d'un usufruit ne sont pas considérés comme fortune ni pour le nu-propriétaire ni pour l'usufruitier.

7 Pour les immeubles ne servant pas d'habitation principale aux intéressés ou les immeubles situés hors du canton ou à l'étranger, la valeur à prendre en compte est la valeur vénale.

Art. 8

Demeure personnelle

1 Dans le calcul des prestations, il n'est pas tenu compte de l'immeuble ou de la partie d'immeuble qui sert de demeure permanente à l'intéressé, à son conjoint et à ses enfants à charge, si ce bien est grevé d'une hypothèque au profit de l'Hospice général.

2 La valeur de l'immeuble est celle de l'estimation fiscale, calculée conformément à l'article 7, sous déduction des dettes grevant cet immeuble.

3 Celui à qui ne sont allouées des prestations qu'en vertu des dispositions ci-dessus ne peut être privé du bénéfice de la présente loi du fait d'une nouvelle estimation fiscale de l'immeuble.

Art. 9

Périodes et dates de référence

1 Pour la fixation des prestations sont déterminantes:

a) les ressources de l'année civile en cours;

b) la fortune au 1er janvier de l'année pour laquelle la prestation est demandée.

2 En cas de modification importante de ressources ou de la fortune du bénéficiaire, la prestation est fixée conformément à la situation nouvelle.

CHAPITRE IIIPrestations

Art. 10

Demande

1 Les prestations d'aide sociale sont accordées sur demande écrite de l'intéressé ou de son représentant légal.

2 Cette demande doit être remise à l'Hospice général.

3 Toutes pièces utiles concernant l'état civil, le domicile, la résidence, les enfants à charge, les ressources et la fortune de l'intéressé doivent être fournies.

4 L'intéressé doit s'engager par écrit à:

a) autoriser le propriétaire ou son représentant à communiquer à l'Hospice général toute notification de hausse de loyer;

b) donner mandat à l'Hospice général, en cas d'octroi de prestations, de le représenter en cas de procédure. L'Hospice général se réserve le droit d'engager la procédure.

Art. 11

Déclarations ultérieures

1 Le bénéficiaire ou son représentant légal doit déclarer à l'Hospice général tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations qui lui sont allouées ou leur suppression.

2 En outre, il doit signaler à l'Hospice général les droits qui peuvent lui échoir par une part de succession, même non liquidée. La même obligation s'applique à tous les legs ou donations.

3 L'Hospice général peut suspendre ou supprimer le versement de la prestation lorsque le bénéficiaire refuse de fournir ou tarde à remettre les renseignements demandés.

Art. 12

Réexamen périodique

1 Les prestations d'aide sociale sont accordées pour une période de 12 mois au maximum. Au-delà de cette période, une nouvelle demande doit être déposée.

2 Pendant cette période, le bénéficiaire des prestations d'aide sociale doit poursuivre activement ses démarches afin de retrouver un emploi.

Art. 13

Exclusion

du cumul

Les prestations d'aide sociale ne peuvent pas être cumulées avec:

a) les prestations complémentaires, fédérales ou cantonales, aux bénéficiaires de l'assurance-vieillesse et survivants et de l'assurance-invalidité;

b) les prestations de l'assistance publique.

Art. 14

Montant

1 Le montant annuel des prestations d'aide sociale correspond à la différence entre le revenu minimum cantonal annuel d'aide sociale applicable et le revenu annuel déterminant de l'intéressé.

2 Le montant annuel se divise en 12 prestations mensuelles.

Art. 15

Début et fin des prestations

1 Le droit à une prestation d'aide sociale prend naissance le premier jour du mois où la demande est déposée et où sont remplies toutes les conditions légales auquel il est subordonné.

2 Le droit à une prestation d'aide sociale s'éteint à la fin du mois où l'une des conditions dont il dépend n'est plus remplie.

Art. 16

Modifications de calcul; prestations minimales

1 A chaque stade des calculs prévus par la présente loi, les fractions de franc sont arrondies au franc supérieur pour la fixation des prestations.

2 Les prestations mensuelles minimales s'élèvent à 50 F.

3 Lorsque leur montant est inférieur à 50 F, les prestation mensuelles sont portées en compte et font l'objet d'un versement annuel unique.

Art. 17

Incessibilité et insaisissabilité

Les prestations sont incessibles et insaisissables.

Art. 18

Paiement

à un tiers

1 Si l'ayant droit n'emploie pas les prestations pour son entretien et pour celui des personnes à sa charge ou s'il est prouvé qu'il n'est pas capable de les affecter à ce but, les prestations sont versées à un tiers qualifié ayant envers l'ayant droit un devoir d'assistance ou s'occupant de ses affaires en permanence.

2 Les prestations versées à un tiers ne peuvent être compensées avec des créances à l'égard de l'ayant droit. Elles doivent être utilisées exclusivement pour l'entretien de l'ayant droit et des personnes à sa charge.

3 Le tiers qui reçoit les prestations doit, à la demande de l'Hospice général, lui faire rapport sur leur emploi.

4 Le conjoint est assimilé à un tiers.

Art. 19

Cession du droit ou obligation d'agir

L'attribution des prestations est subordonnée au choix de l'Hospice général:

a) soit à la condition que l'intéressé fasse valoir lui-même les droits nés en sa faveur par le fait de l'âge, d'un accident, d'une maladie, d'un décès ou de toute autre cause;

b) soit à la cession à l'Hospice général des droits visés à la lettre a, s'il ne s'agit pas de droits légalement incessibles.

Art. 20

Prestations perçues indûment

1 L'Hospice général réclame au bénéficiaire, à sa succession ou à ses héritiers qui l'ont acceptée, le remboursement de toute prestation payée indûment.

2 Toutefois, le bénéficiaire qui était de bonne foi n'est tenu à restitution, totale ou partielle, que dans la mesure où il ne serait pas mis de ce fait dans une situation difficile.

3 En particulier l'Hospice général peut renoncer à demander le remboursement des prestations versées si, pour des motifs indépendants du bénéficiaire, une succession ou part de succession lui a été effectivement attribuée avec retard.

4 Les héritiers sont solidairement responsables, mais seulement jusqu'à concurrence du montant de la succession.

Art. 21

Mainmise

1 L'Hospice général peut bloquer par écrit en main de toutes personnes, de tous établissements et de toutes administrations publics, les fonds, les valeurs et tous autres biens meubles, appartenant à celui qui est personnellement ou solidairement responsable des sommes dues lorsqu'il y a lieu de craindre la non-restitution de prestations touchées indûment.

2 Tout paiement fait au mépris de cette défense n'est pas opposable à l'office et rend ceux qui l'ont fait solidairement responsables des sommes dues.

Art. 22

Décès du bénéficiaire; aliénation de l'immeuble

1 Au décès d'une personne qui a bénéficié de l'application de l'article 8, l'Hospice général réclame à sa succession ou aux héritiers qui l'ont acceptée le remboursement des prestations versées dans la mesure où celles-ci ne l'ont été que grâce au jeu desdites dispositions.

2 Les héritiers sont solidairement responsables, mais seulement jusqu'à concurrence du montant de la succession.

3 Toutefois, sur les biens dont le conjoint survivant conserve la jouissance tout en demeurant personnellement au bénéfice de prestations, le remboursement ne peut être demandé qu'au décès dudit survivant.

4 Le remboursement des prestations versées est également exigible en cas d'aliénation de l'immeuble.

Art. 23

Compensation

Les créances de l'Hospice général découlant de la présente loi peuvent être compensées, à due concurrence, avec des prestations échues.

Art. 24

Prescription

Les restitutions prévues aux articles 20 et 22 peuvent être demandées par l'Hospice général dans les 5 années qui suivent le moment où il a eu connaissance du fait qui ouvre droit à restitution, mais au plus tard 10 ans après la survenance de ce fait.

Art. 25

Hypothèque légale

1 Il est accordé à l'Hospice général une hypothèque légale en garantie du remboursement des prestations allouées aux personnes qui bénéficient de l'application de l'article 8.

2 En dérogation à l'article 836 du code civil, cette hypothèque doit être inscrite au registre foncier : l'intéressé en est informé préalablement.

3 Peuvent être grevés de cette hypothèque les immeubles inscrits au registre foncier au nom du bénéficiaire ou au nom de son conjoint non séparé de corps ni de fait.

4 L'inscription a lieu sur la seule réquisition du président de la commission administrative de l'Hospice général qui a également la possibilité d'en demander la radiation.

5 Cette hypothèque prend rang après celles qui sont inscrites antérieurement; elle profite des cases libres.

Art. 26

Force exécutoire

Est assimilée à un jugement exécutoire au sens de l'article 80 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 11 avril 1889, toute décision de l'Hospice général ou d'une autorité de recours quand elle n'est plus ou pas susceptible de réclamation ou de recours.

CHAPITRE IVContre-prestations

Art. 27

Activité compensatoire

1 En principe, le bénéficiaire des prestations sociales s'engage à exercer une activité compensatoire d'utilité sociale ou environnementale.

2 Cette activité fait l'objet d'un contrat établi entre le bénéficiaire et l'Hospice général.

3 L'activité de formation professionnelle est assimilée à l'activité compensatoire.

TITRE IIIALLOCATION D'INSERTION

Art. 28

Allocation d'insertion

Les personnes qui ont droit au revenu minimum cantonal d'aide sociale versé par l'Hospice général peuvent également recevoir une allocation d'insertion, unique, d'un montant variable, de 1 000 F au minimum et de 10 000 F au maximum.

Art. 29

Destination de l'allocation

L'allocation d'insertion est destinée à financer, totalement ou partiellement, des projets, réalistes et réalisables, inscrits dans la durée et concernant l'un des domaines suivants:

a) formation et recyclage professionnel;

b) création d'une activité lucrative;

c) réinsertion professionnelle et sociale.

Art. 30

Demande

1 Le requérant présente par écrit une demande d'allocation d'insertion à l'Hospice général, accompagnée d'un descriptif et budget détaillés du projet envisagé.

2 Les services sociaux compétents ou d'autres organismes peuvent prêter leur concours à l'élaboration du projet.

Art. 31

Commission d'attribution

1 Les demandes d'allocation d'insertion sont examinées par une commission, nommée par le Conseil d'Etat, qui se compose:

a) du directeur de l'Hospice général, qui la préside;

b) d'un représentant de l'office de l'emploi;

c) d'un représentant de l'office d'orientation et de formation professionnelle;

d) de quatre représentants des services sociaux privés.

2 Les décisions de la commission sont notifiées par l'Hospice général, qui est lié par l'avis et les montants déterminés par celle-ci.

TITRE IVORGANISATION

Art. 32

Hospice général

1 L'Hospice général est l'organe d'exécution de la présente loi.

2 Il verse les prestations d'aide sociale et les allocations d'insertion.

3 Il procède à l'information la plus large possible auprès des intéressés.

Art. 33

Décisions

de l'Hospice général

1 Les décisions de l'Hospice général sont écrites et motivées. Elles mentionnent expressément dans quel délai, sous quelle forme et auprès de quelle autorité il peut être formé une réclamation.

2 Les décisions de l'Hospice général sont rendues dans un délai de 2 mois au maximum à partir du dépôt de la requête, dûment remplie et documentée. Si, en raison des difficultés de l'enquête ou pour toute autre cause, l'Hospice général n'est pas en mesure de rendre sa décision dans le délai, il peut accorder, sur demande écrite de l'intéressé, des avances sur les prestations d'aide sociale, remboursables en cas de décision négative.

Art. 34

Rensei-gnements

1 Les autorités administratives et judiciaires, les employeurs et les organismes s'occupant du requérant sont tenus de fournir gratuitement à l'Hospice général les renseignements et pièces nécessaires à l'application de la présente loi.

2 Celui qui demande pour lui-même ou pour autrui une prestation d'aide sociale ou une allocation d'insertion et celui qui reçoit une telle prestation doivent fournir à l'Hospice général tous les renseignements et toutes les pièces utiles au contrôle des éléments déterminants.

Art. 35

Secret

Les fonctionnaires, les employés et les auxiliaires chargés de l'application de la présente loi sont assermentés par le Conseil d'Etat. Ils sont tenus de garder le secret à l'égard des tiers sur leurs constatations et observations.

Art. 36

Ressources

Les ressources nécessaires au versement des prestations d'aide sociale et des allocations d'insertion prévues par la présente loi sont portées chaque année au budget de l'Hospice général.

TITRE VCONTENTIEUX

Art. 37

Réclamation

1 Si l'intéressé ou son représentant légal s'estime lésé par une décision de l'Hospice général, il peut former une réclamation, par écrit et dans les 30 jours qui suivent la notification de la décision, auprès du président de la commission administrative de l'Hospice général.

2 La décision sur réclamation du président de la commission administrative de l'Hospice général est écrite et motivée. Elle est rendue dans un délai de 2 mois au maximum à partir de la réception de la réclamation. Elle mentionne expressément dans quel délai, sous quelle forme et auprès de quelle autorité il peut être formé recours.

Art. 38

Recours

Si l'intéressé ou son représentant légal s'estime lésé par une décision sur réclamation du président de la commission administrative de l'Hospice général, il peut former un recours, par écrit et dans les 30 jours qui suivent la notification de la décision sur réclamation, auprès de la commission cantonale de recours en matière AVS-AI.

Art. 39

Remise

1 Les demandes de remise prévues à l'article 20, alinéas 2 et 3 doivent être formulées dans le délai de 30 jours dès la notification de la demande de remboursement.

2 L'alinéa 1 de l'article 37 est applicable.

TITRE VIDISPOSITIONS FINALES

Art. 40

Evaluation

1 Les effets de la présente loi sont évalués tous les 2 ans.

2 Le Conseil d'Etat présente au Grand Conseil un rapport communiquant les résultats de cette évaluation.

Art. 41

Règlement d'application

Le Conseil d'Etat édicte le règlement d'application de la présente loi.

Art. 42

Entrée en vigueur

La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1995.

RAPPORT DE LA DEUXIÈME MAJORITÉ

Le projet de loi qui vous est soumis est une nécessité. C'est pourquoi nous le soutenons. Mais notre appui ne signifie pas que nous adhérons à la politique de l'emploi qui lui est liée, ni au niveau du revenu minimum tel qu'il a été retenu par la majorité de la commission.

La question de l'emploi

Ce projet de loi est aujourd'hui nécessaire parce que, depuis 1990, le chômage dans notre canton a progressé considérablement comme l'indique le graphique ci-après représentant l'évolution, en moyenne annuelle, du nombre des chômeurs. Dans le même temps nous assistons à une augmentation importante des chômeurs de longue durée qui se traduit progressivement par l'existence de personnes en fin de droit malgré le système des occupations temporaires qui retarde la sortie du système de l'assurance chômage. Enfin il faut savoir qu'il n'est pas nécessaire d'avoir bénéficié de 400 indemnités de chômage pour se retrouver en situation de fin de droit puisque certaines catégories de personnes, des femmes divorcées par exemple, ne peuvent prétendre qu'à 170 indemnités.

Ce développement du chômage n'est malheureusement pas un phénomène passager qui serait lié à un seul fait conjoncturel. La crise économique que nous traversons à une composante structurelle importante. Les études relatives au chômage montrent que, même si la croissance économique devait se raffermir, il subsistera un seuil incompressible de chômage, ce que les économistes qualifient du nom barbare de résiduel. Celles et ceux qui ont le malheur de faire partie de ce résidu apprécieront. Et c'est bien à une partie d'entre eux que s'adresse le présent projet de loi.

De même que le développement du chômage à Genève ne peut être rapporté à une dimension conjoncturelle il ne peut s'expliquer non plus par une spécificité cantonale ou nationale. La montée du chômage est une donnée internationale qui concerne l'ensemble de l'économie mondiale même si des différences liées à des particularités nationales ou régionales existent. L'économie mondiale est entièrement dominée par les règles de l'économie capitaliste qui, aujourd'hui, pour restaurer ses taux de profits réduit la masse salariale sous des formes diverses: baisses de salaire absolues ou relatives, augmentation et flexibilité du temps de travail, suppression de postes de travail par des investissements de rationalisation.

Le chômage n'est pas une question de responsabilité individuelle mais bien une responsabilité collective et donc de politique de l'emploi. La politique sociale ne peut être séparée de la politique économique. Dans ce sens le présent projet de loi ne fait que répondre aux conséquences du développement du chômage et n'agit pas sur ses causes. Parler d'aide aux chômeurs en fin de droit sans parler de la politique économique qui crée le chômage c'est pour utiliser une image traiter la douleur causée par une maladie et non pas la maladie elle-même. La politique économique libérale fait la démonstration qu'elle n'est pas en mesure de répondre aux besoins de travail de l'ensemble de la population. Ainsi se crée progressivement cette société à deux voire plusieurs vitesses qui exclue de manière définitive un certain nombre de nos concitoyennes et concitoyens avec tous les coûts économiques et sociaux que cela induit.

Aujourd'hui pour traiter véritablement la question de l'aide aux chômeurs en fin de droit il faut parler du droit à l'emploi pour toutes et tous. Cela implique - tant dans les secteurs public que privé - une réduction massive et générale du temps de travail que les gains de productivité permettent d'ores et déjà. Cela est possible sans réduction de salaire à l'exception des fortes rémunérations qui accaparent une fraction trop importante de ces gains de productivité. Cette mesure globale peut être accompagnée dès aujourd'hui par la suppression des heures supplémentaires qui sont en augmentation alors que le chômage sévit! De même le remplacement systématique des salariés en congé est une source non négligeable de création d'emplois. De ce point de vue il convient d'appliquer de manière stricte les dispositions législatives existantes et, le cas échéant, en créer de nouvelles. Enfin au niveau des services publics il faut hélas rappeler l'incohérence qui consiste à supprimer des postes de travail dans le but de réaliser des économies budgétaires pour, dans le même temps, devoir dégager des dépenses supplémentaires afin de lutter contre les conséquences du chômage. Le coût actuel du chômage considéré dans toutes ses conséquences (allocations de chômage, infrastructures de prise en charge, occupations temporaires, frais médicaux liés aux problèmes de santé, frais d'assistance, pertes liées à la non utilisation des qualifications) est considérable. Ce qui est trompeur c'est que certains de ces coûts n'apparaissent pas immédiatement. Cela peut laisser croire qu'il est plus « économique » de supprimer des postes et de prendre en charge des chômeurs. L'économie apparente à court terme sera vite compensée par les conséquences à long terme.

Les chômeurs en fin de droit

A fin juin dernier ce sont environ 200 chômeurs ayant épuisé la totalité de leurs prestations de chômage (indemnités fédérales, cantonales, occupation temporaire) qui étaient contraints de recourir à l'assistance publique. Ce chiffre ne peut malheureusement qu'augmenter ces prochains mois. En effet le chômage de longue durée a ceci de pervers qu'il tend à exclure encore davantage ceux qui en sont victimes. Tout d'abord les employeurs renoncent souvent à engager une personne qui n'a pas de travail depuis longtemps car ils mettent en doute ses capacités à reprendre une activité salariée. Du côté du chômeur le fait de se trouver sans emploi pendant de nombreux mois le conduit à douter toujours davantage de ses possibilités et cela diminue sa capacité de travail au sens large du terme. De plus le sentiment d'inutilité développe chez le chômeur des troubles psychologiques et physiques qui diminuent fréquemment son aptitude au placement.

Exclu durablement du monde du travail, le chômeur voit ses conditions d'existence se dégrader, notamment sur le plan financier, par la diminution progressive du montant de ses indemnités. Lorsque les indemnités touchent à leur fin, le chômeur, s'il ne dispose pas d'autres ressources financières n'a pas d'autre choix que de solliciter l'aide de l'assistance publique. Cette démarche n'est pas innocente. Elle développe chez celles et ceux qui y sont contraints des sentiments de honte et d'humiliation, manifestation d'une atteinte à leur dignité. L'aide de l'assistance étant remboursable, des chômeurs renoncent à y recourir et ainsi se développe la précarité et la pauvreté. L'existence d'une couche de personnes sans emploi et sans revenus est un facteur de développement du travail au noir, du travail précaire de courte durée et sous payé, des petits boulots de toutes sortes. En retour ce type d'emploi contribue à la diminution globale d'offre de travail.

De ce point de vue le projet de loi sur les prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin de droit peut circonscrire les dégâts sur le plan social.

Les prestations cantonales aux chômeurs en fin de droit

En accordant aux chômeurs en fin de droit une prestation non remboursable et en dehors de l'assistance publique, le présent projet de loi permet de limiter les sentiments de gêne que nous avons évoqués et est positif de ce point de vue. A ce sujet on peut se poser la question de savoir pourquoi limiter le cercle des bénéficiaires aux seuls chômeurs en fin de droit et ne pas l'étendre à l'ensemble des personnes privées d'emploi. Ce système existe déjà dans le canton de Berne sous la forme des allocations spéciales qui remplacent largement le système d'assistance publique. De notre point de vue les prestations cantonales aux chômeurs en fin de droit ne doivent être qu'une étape en vue de l'instauration d'un revenu minimum cantonal d'aide sociale élargi à d'autres cercles de bénéficiaires. Cela étant, ce projet de loi permettra sans doute à des chômeurs en fin de droit qui ont renoncé à l'assistance publique pour les raisons évoquées précédemment de bénéficier du revenu minimum cantonal qui leur est destiné.

L'activité compensatoire prévue à l'article 27 devrait permettre, nous le souhaitons, de lutter contre le sentiment d'inutilité et la perte de confiance en soi que rencontrent de nombreux chômeurs. Cependant il faudra veiller à ce que ces activités n'empiètent pas sur des emplois existants mais donnent satisfaction à des besoins sociaux et environnementaux auxquels il n'est pas répondu aujourd'hui. Ces activités ne devront pas être le prétexte au développement d'emplois précaires et sous-payés. L'assimilation d'une activité de formation professionnelle à l'activité compensatoire est une mesure positive susceptible de répondre le plus efficacement au problème d'emploi rencontré par les chômeurs en fin de droit. On ne peut que regretter que de telles mesures interviennent si tardivement lorsque le chômeur est souvent découragé et/ou malade. Le vieil adage « mieux vaut prévenir que guérir » prend là aussi tout son sens: il serait plus judicieux que ces mesures interviennent dès le début voire avant la période de chômage.

Des critiques ont été émises - venant de milieux très divers - au sujet du principe de la contre-prestation. En ce qui nous concerne nous estimons que les éléments positifs de cette disposition l'emportent sur les risques évoqués plus haut. Outre l'élément de dignité et de reprise de confiance, la contre-prestation permet de ne pas évacuer le problème de l'emploi posé par les chômeurs en fin de droit. Etre prêt à verser un peu d'argent sans contrepartie pour ne plus entendre parler des chômeurs en fin de droit c'est nier le droit à l'emploi auquel doit pouvoir prétendre tout habitant de ce canton. Prévoir une activité compensatoire c'est aussi obliger la société à continuer à se poser le problème des sans emplois. Il est vrai que certains chômeurs, compte tenu de leurs handicaps psychologiques ou de santé, ne pourront pas momentanément ou définitivement répondre à l'offre de contre-prestation. La rédaction de l'article 27 permet de tenir compte de ces situations particulières.

Une autre limite du présent projet de loi réside dans l'exclusion du chômeur du système des assurances sociales liées à un emploi salarié: nous pensons notamment aux cotisations pour le 2ème pilier, à l'assurance chômage et aux allocations familiales. Exclu du monde du travail, le chômeur en fin de droit se retrouve également exclu du système des assurances sociales à l'exception des cotisations AVS/AI minimales. De ce point de vue la révision de la loi sur les allocations familiales devra tenir compte de ce phénomène.

La réserve la plus importante que nous formulons à l'endroit de ce projet de loi réside dans le montant prévu à l'article 3 au sujet du revenu minimum cantonal. Compte tenu du fait que ces prestations seront imposables le montant retenu correspond au montant des directives actuelles de l'assistance publique. Ce montant est manifestement insuffisant et ne permet pas d'assurer un revenu minimum comme le prétend le titre de la loi. Cela se vérifie notamment pas le fait que l'alinéa 3 de l'article 3 prévoit des allocations ponctuelles pour l'achat de vêtements ou les frais de maladie. L'objectif qui consiste à vouloir sortir les chômeurs en fin de droit du système de l'assistance se trouve ainsi partiellement compromis. La loi réintroduit l'obligation pour le chômeur de quémander pour assurer certains besoins essentiels comme se vêtir et se soigner.

La notion de revenu minimum est déjà définie dans notre législation cantonale au niveau de la loi sur les prestations cantonales aux personnes âgées. S'agissant de personnes à la retraite, notre Grand Conseil a estimé qu'un montant annuel de 21'264 F constitue un revenu minimum tel qu'il est défini de manière explicite dans la loi. Pourquoi, soudainement, ce revenu minimum descendrait à 13'812 F lorsqu'il s'agit de chômeurs en fin de droit? A-t-on moins de besoins lorsqu'on est chômeur que rentier AVS? A-t-on moins de besoins lorsqu'on doit chercher quotidiennement un emploi? A-t-on moins de besoins lorsqu'on est dans certains cas père ou mère de famille? A l'évidence le montant retenu ne permet pas d'assurer un revenu social minimum. Avec cette contradiction qu'un chômeur en fin de droit âgé de 60 ans touchera un montant inférieur à celui dont il pourra bénéficier au moment où il sera en âge AVS!

Prenons l'exemple d'un chômeur qui, dans son dernier emploi, recevait un salaire de 5'000 F par mois. Les indemnités de chômage s'élèvent à 70% de son dernier salaire soit à 3'500 F. Il paye un loyer de 800 F et ses cotisations d'assurance maladie sont de 220 F. Lorsqu'il sera mis au bénéfice de la prestation pour les chômeurs en fin de droit il touchera 2171 F soit le 43% de son dernier salaire. Lorsqu'il aura payé son loyer, son assurance maladie et ses impôts il lui restera 34 F par jour. Avec cette somme il devra se nourrir, payer le gaz et l'électricité, régler sa facture de téléphone, acheter son linge de corps, couvrir ses dépenses pour les soins personnels, assurer les dépenses nécessaires à l'entretien de son logement, payer ses frais de déplacement.

Mesdames et Messieurs les députés, nous vous laissons le soin de vérifier par vous-mêmes, au vu de ces chiffres, s'il s'agit bien là d'un revenu minimum. Nous pourrions par exemple essayer de vivre pendant un mois ou deux avec un tel montant. Peut-être la conception que la majorité de la commission a du revenu minimum pour les chômeurs en fin de droit serait-elle alors différente.

Sur le fond il ne peut y avoir plusieurs définitions du revenu minimum selon que l'on est chômeur, en âge AVS ou invalide. Le terme « revenu minimum » est clair: il s'agit d'une ressource indispensable pour assurer un minimum vital dans un lieu donné, en l'espèce le canton de Genève, et à une époque donnée. Parler de revenu minimum cantonal d'aide sociale dans deux lois différentes et prévoir deux montants différents est une incohérence. Par ailleurs cela va à l'encontre de la volonté de simplification et d'unification des barèmes souvent évoquée. C'est pourquoi nous vous proposons l'amendement suivant:

Art. 3

Revenu mini-mum cantonal d'aide sociale

1 Le revenu minimum cantonal d'aide sociale garanti aux chômeurs en fin de droit s'élève à 21'264 F par année s'il s'agit d'une personne célibataire, veuve, divorcée, séparée de corps ou de fait.

L'alinéa 3 est supprimé.

L'alinéa 4 devient l'alinéa 3.

Conclusion

En dépit des critiques que nous avons formulées notamment sur la question de l'emploi, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter ce projet de loi car du point de vue des chômeurs en fin de droit il est préférable de ne plus être soumis au régime de l'assistance publique et de contribuer ainsi quelque peu à restaurer leur dignité. C'est dans le même sens que nous vous demandons de voter notre amendement qui, outre le fait d'assurer un véritable revenu minimum du même niveau que celui pour les personnes âgées, n'est que justice par rapport à la contre-prestation que fourniront les bénéficiaires de la loi.

Premier débat

Le président. La lecture d'une lettre a été demandée. Il s'agit d'une lettre de l'UAPG. Je prie Mme la secrétaire de bien vouloir procéder à sa lecture.

Le président. Je prierai maintenant Mme la secrétaire de lire la réponse du Conseil d'Etat à la lettre qui vient d'être lue.

Le président. J'ajoute que j'ai fait disposer sur la table de chacun des députés la lettre de M. Guy-Olivier Segond adressée aux membres de la commission des affaires sociales du Grand Conseil, ainsi qu'à son président.

M. Philippe Schaller (PDC), rapporteur. J'aimerais apporter quelques précisions afin d'élargir le débat.

Pourquoi ce projet de loi ? Ce projet de loi de revenu minimum cantonal d'aide sociale est urgent et nécessaire parce que, même si certains croient encore, ou ont la certitude, que l'économie et la croissance peuvent assurer le plein-emploi, force est de constater que le chômage progresse dans tous les pays industrialisés.

Tous les groupes sociaux sont aujourd'hui affectés, le lien croissance-emploi est de plus en plus lâche et la durée du chômage s'allonge. Même si la croissance devait atteindre 2 à 2,5%, selon les estimations les plus optimistes, le gain de productivité du travail quant à lui sera vraisemblablement au-dessus de 2%. Ainsi, l'emploi ne pourra progresser que de 0,5%, ce qui correspond à l'augmentation de la population active. Le chômage restera donc celui que nous connaissons et cette perspective n'est pas acceptable parce que l'aide sociale telle que proposée aujourd'hui par le biais de l'assistance n'est pas acceptable sur le plan humain. Si la collectivité a le souci de la solidarité et de l'intégration, l'assistance, c'est bien le refus de la citoyenneté.

Ensuite, parce qu'une partie de nos concitoyens sont et seront sous-productifs en regard des normes de performance requises par la technologie et l'organisation d'une partie au moins du marché du travail, donc non employables, dit-on.

Enfin, parce que la paupérisation et la marginalisation ont un coût social important et inéluctable par le biais des problèmes psychiques : dépressions, alcoolisme, toxicomanie, délinquance, d'ailleurs il suffit de voir l'augmentation des demandes de rentes AI qui a passé de 7 à 14% en 1993. L'exclusion du monde du travail c'est aussi la fragilisation du tissu relationnel et social, c'est une véritable rupture du lien sociétal.

Si nous ne trouvons pas rapidement une autre solution à l'assistance, si nous ne développons pas une prise en charge différente, nous précipitons encore plus cette population vers l'isolement. Maintenant, le montant d'insertion est-il trop généreux ? La commission s'est penchée avec beaucoup d'attention sur cette question en analysant de nombreux dossiers que vous trouvez en page 98 du présent rapport. Il est vrai que nous avons comparé les prestations d'assistance, les prestations complémentaires fédérales et le revenu minimum cantonal d'aide sociale destiné aux rentiers. Finalement, la majorité de la commission s'est ralliée à la proposition qui vous est faite, soit de calquer le revenu sur l'assistance. Les propositions venant de l'Alliance de gauche et du groupe écologiste ont été refusées en commission.

Certains sont scandalisés. Nous l'avons entendu tout à l'heure lors de la lecture de la lettre de l'UAPG et par certains propos dans ce parlement que pour une famille de quatre personnes, avec un loyer de 1 600 F et le paiement des primes d'assurance-maladie, nous arrivions à un revenu de 4 800 F par mois. Cela représente 90 F par jour pour une famille de quatre personnes pour l'alimentation, l'habillement, les loisirs, l'éducation, etc. Personnellement, je ne pourrais pas faire vivre ma famille avec 90 F. Certains prétexteront qu'une partie de la population à Genève gagne ce montant - 4 800 F - pour une famille de quatre personnes, et c'est là que réside le malaise.

Une enquête faite par l'Hospice général montre qu'une famille de quatre personnes ayant un revenu de 50 000 F se situe dans les normes d'assistance. Il faut parfois être deux pour gagner 50 ou 60 000 F et c'est bien là que réside la difficulté du débat. Ce ne sont pas les allocations familiales qui viennent améliorer la situation et ce n'est pas pour rien que s'est établie la norme du deuxième salaire, et que nous avons le taux de natalité le plus bas d'Europe.

Cette loi va-t-elle engendrer des dépenses nouvelles ? La simulation proposée avec les normes du revenu minimum montre qu'il faut s'attendre à une augmentation de 88 000 F. Le rapport ne le cache d'ailleurs pas et les discussions en commission en ont fait état. Vous le retrouvez en page 7 du rapport, où il est dit, je cite :

«Ces chiffres doivent être considérés avec prudence en raison de différents facteurs et inconnues : le nombre de dossiers à venir, la composition du groupe familial, le montant des loyers et de l'assurance-maladie.».

Comment va-t-on financer un tel projet ? Il nous faudra réfléchir, ceci également pour financer le revenu minimum d'aide sociale pour les aînés, à introduire une contribution sociale généralisée sur les revenus, celle-ci existant déjà dans d'autres pays.

Autre question essentielle : mettons-nous notre économie en péril avec ces programmes sociaux ?

Depuis quelques mois, sur fond de récession économique, d'augmentation du chômage et de déficits importants des pouvoirs publics, la discussion sur les institutions de l'Etat social s'est accentuée. Des voix s'élèvent pour exiger un moratoire. Est-ce que la politique sociale ne doit s'appliquer qu'en période de prospérité ? Ceux qui préconisent le moratoire font ressortir en particulier que les coûts de l'Etat social ne sont plus supportables au regard de la compétitivité internationale. Cela est faux ! Même si les comparaisons sont difficiles en fonction des types de prélèvements fiscaux et salariaux, nous avons en Suisse les prélèvements les moins élevés des pays de l'OCDE, nous sommes à la vingtième place parmi les vingt-quatre autres pays. 31% chez nous versus 37% en Allemagne. La productivité helvétique est excellente en comparaison des autres pays de l'OCDE. Il n'est pas inintéressant de regarder les courbes de croissance du commerce extérieur et du commerce intérieur. Le commerce extérieur a vu ses ventes augmenter ces dernières années, ce qui montre que la Suisse est un pays compétitif.

Par contre, sur le plan intérieur, il y a une baisse des ventes, du commerce, cela simplement en raison des angoisses et des attentes face à l'avenir qu'ont un certain nombre de personnes dans notre pays. C'est justement dans les phases de récession que la couverture sociale revêt une importance majeure.

Tout bien considéré, on peut conclure que la compétitivité de la Suisse ne saurait être améliorée par un moratoire dans le domaine social et que, au contraire, en favorisant des aides sociales dont fait partie le projet de loi qui vous est soumis ce soir, nous favorisons dans une certaine mesure la relance, nous donnons un petit coup de pouce à cette relance. Il est certain que la présente loi n'est pas une finalité en soi. Cette loi marque une évolution, un premier pas, voulant apporter une réponse à cette catégorie de citoyens, apporter une réponse à l'exclusion. Son aspect novateur tient au fait que l'on a refusé d'enfermer ces bénéficiaires dans l'assistance, que l'on a voulu leur donner les moyens de s'insérer et qu'on leur a proposé de s'engager personnellement par un contrat. Ce projet doit mobiliser la pluralité des acteurs et combiner les actions économiques et sociales.

Ce projet de loi est un réel progrès social, c'est un contrat proposé aux plus démunis et aux plus faibles. Il ne rend pas, comme je l'ai écrit à la page 18 du rapport, légitimes tous les efforts de solidarité, il doit bien entendu nous inciter à rechercher les moyens encore et toujours plus adaptés pour les réduire et permettre ainsi une plus grande justice sociale. Péguy écrivait :

«Aussi longtemps qu'il y a un homme dehors, la porte qui lui est fermée au nez ferme une cité d'injustice et de haine.».

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. Ce projet de loi, une fois encore, pose la question des rapports entre la politique économique et la politique sociale. Cette loi, en fait, consacre d'une certaine manière l'échec de l'économie de marché à assurer un emploi à chacune et à chacun. (Exclamations de l'Entente.)

Une voix de l'Alliance de gauche. Ça vous fait rire ?

M. Bernard Clerc, rapporteur de la deuxième majorité. La crise actuelle est à la fois structurelle et conjoncturelle, mais elle est grave pas sa dimension structurelle. La réorganisation de l'économie conduit à des suppressions massives de postes de travail. Les nouveaux emplois, même avec le redémarrage conjoncturel, ne compensent pas, et de loin, ceux qui disparaissent, et en plus ils se trouvent fréquemment en rupture avec le niveau de formation et de qualification des personnes mises au chômage. Ainsi, des milliers de personnes dans notre pays se trouvent mises à l'écart du marché du travail.

Rappelons qu'à Genève en janvier 1992, 5,8% des chômeurs se trouvaient dans cette situation depuis plus d'un an. En septembre 1994, ce sont 29,8% des chômeurs - près de 30% - qui sont au chômage depuis plus d'un an. La loi qui nous est proposée n'agit pas sur les causes du chômage, elle agit sur ses conséquences. Agir sur les causes implique évidemment des mesures de politique économique différentes et novatrices. Il s'agit de poser, dès à présent, un nouveau droit, un droit minimum qui est le droit à l'emploi pour toutes et pour tous. Ce droit à l'emploi ne sera pas obtenu sans une réduction massive du temps de travail. Parallèlement, il est possible de créer de nouveaux emplois en supprimant les heures supplémentaires.

En 1992, 105 millions d'heures supplémentaires ont été réalisées dans notre pays, représentant l'équivalent de 54 000 postes de travail. Bien sûr, on ne peut pas faire un calcul schématique et dire qu'en supprimant automatiquement ces 105 millions d'heures supplémentaires nous aurons 54 000 postes de travail. Mais il est certain qu'il existe un gisement important de postes de travail à travers cette question des heures supplémentaires.

Venons-en maintenant à la question du revenu minimum. J'ai toujours pensé qu'un revenu minimum était un revenu adapté à la situation concrète du lieu dans lequel on se trouve et on vit et que, par conséquent, il ne pouvait pas y avoir un, deux, voire trois revenus minimums. Eh bien, dans le projet de loi qui nous est proposé, nous avons la définition d'un nouveau revenu minimum. Pourquoi ? Parce que, dans la loi sur les prestations complémentaires aux personnes âgées, il existe la définition d'un revenu minimum, mais ce n'est pas celui inscrit dans la loi qui vous est soumise aujourd'hui.

Alors de deux choses l'une, ou bien les prestations cantonales aux personnes âgées sont trop élevées, et il faut le dire, ou bien le revenu pour les chômeurs en fin de droit ne constitue pas un minimum. Vous l'aurez compris, c'est l'autre aspect de la question que nous retenons. Il faut savoir qu'un chômeur en fin de droit seul aura 600 F de moins par mois qu'une personne âgée recevant les prestations complémentaires, alors que, par ailleurs, il lui sera demandé d'effectuer une contre-prestation.

D'autre part, il y a une certaine contradiction entre la volonté de sortir les chômeurs en fin de droit du système de l'assistance et de réintroduire certaines règles de l'assistance par le biais de demandes spécifiques, comme pour les vêtements ou les soins médicaux. Cet aspect-là est la démonstration même que le revenu minimum qui vous est proposé est insuffisant pour assurer une vie normale à Genève. Autre contradiction, le chômeur en fin de droit âgé de 60 ans touchera 30% de moins que lorsqu'il se trouvera en âge AVS. J'aimerais bien que l'on m'explique le pourquoi de cette différence. La réalité, c'est qu'un chômeur en fin de droit vivant seul va se retrouver avec 34 F par jour pour se nourrir, payer sa facture de gaz et d'électricité, régler sa facture de téléphone, acheter son linge de corps, couvrir ses dépenses pour les soins personnels, entretenir son logement et payer ses frais de déplacement. Certains, aujourd'hui, osent prétendre que ce montant est suffisant, voire exagéré !

Redonner un droit aux chômeurs en fin de droit, c'est aussi leur redonner une dignité. Faites en sorte que cette dignité ne soit pas une dignité au rabais, parce que c'est non seulement leur propre dignité qui est en jeu, mais aussi votre, notre propre dignité. (Applaudissements.)

M. Nicolas Brunschwig (L). Permettez-moi tout d'abord de faire un rappel. Le projet de loi initial fut renvoyé à deux commissions. La commission des affaires sociales a longuement travaillé sur ce projet et a jugé de son opportunité, de ses grands principes et de ses modalités pratiques. La commission des finances, elle, n'a pu consacrer qu'une seule séance à ce texte. Il est alors apparu à quelques commissaires - pas seulement libéraux, Monsieur Dupraz - qu'il y avait un certain nombre de problèmes techniques qui ne semblaient pas être réglés de manière satisfaisante. Malheureusement, nous n'avons pas eu le temps matériel de proposer des amendements en commission et c'est pour cela que nous serons obligés de le faire ce soir.

Le groupe libéral approuve le principe du revenu minimum d'aide sociale ainsi que celui de l'allocation d'insertion. Cette démarche liant ce revenu social à une contre-prestation d'utilité publique est intéressante. De plus, une société doit être construite sur des principes de solidarité et de reconnaissance de la dignité humaine, cette loi répond très certainement à ce souhait. Il s'agit cependant de prendre en considération deux éléments.

Premièrement, il faut maintenir une certaine équité entre les différents groupes socioprofessionnels, les actifs ayant des revenus modestes, les chômeurs et les personnes en fin de droit. Il apparaît que, avec ce projet de loi, si l'on ne tient pas compte de certains amendements que nous proposerons dans le deuxième débat, les personnes ou les groupes familiaux en fin de droit pourraient, dans certaines situations, avoir des ressources supérieures à des personnes travaillant normalement et ayant des salaires modestes à moyens. De même, vous aurez fréquemment des chômeurs en fin de droit qui toucheront alors des montants plus importants que lorsqu'ils étaient au chômage. En effet, certaines situations peuvent amener l'Hospice à verser des montants largement supérieurs à 60 000 F par an. Cela nous semble anormal et fort démotivant pour les employés et les employeurs du canton.

Deuxièmement, des simulations financières ont été faites dans le cadre de l'étude de ce projet de loi sur la base de la situation actuelle des chômeurs en fin de droit qui sont à l'Hospice et qui touchent une prestation d'assistance, en principe remboursable; avec la nouvelle loi il s'agira d'un droit non remboursable. Cela est un immense progrès social qui, cependant, risque d'avoir des répercussions financières toutes autres que la simulation de la situation actuelle. Cette amélioration pourrait créer un effet d'aspiration non négligeable multipliant le nombre d'ayants droit qui renonceraient à des formes de solidarité familiale ou amicale au profit de ce nouveau droit. (Chuchotements sur les bancs de la gauche.)

De plus, cette loi qui fournira des revenus à tous les chômeurs en fin de droit vient en dernier. Dès lors, c'est elle qui assumera les risques liés à l'évolution économique et à d'éventuelles modifications de la législation fédérale ou cantonale. Le risque financier est dès lors énorme. Pour ceux qui ne sont pas à la commission des finances, vous pouvez quand même imaginer devant quel désarroi se trouvent les commissaires face à la situation actuelle et future et cela quelle que soit votre appartenance politique; renseignez-vous !

Il s'agit donc d'essayer d'en limiter l'ampleur en neutralisant les cas excessifs qui pourraient exister et qui devraient être rares, selon les dires du président du département. C'est donc bien des amendements techniques et non fondamentaux que nous allons vous proposer. Il s'agit principalement de supprimer la prise en considération des intérêts de dettes éventuelles dans le calcul. Pourquoi donc une partie du budget social de l'Etat devrait couvrir des sommes versées à des établissements bancaires ? Je serais très étonné de voir que les différents groupes de ce parlement ne nous suivent pas sur ce chemin-là. C'est donc dire qu'il y avait peut-être des éléments à vérifier des travaux issus de la commission des affaires sociales. Deuxièmement - cela nous semble très important - il s'agit de limiter le montant du loyer pris en considération. Dans la loi actuelle, il n'y a pas de limite. C'est d'ailleurs indiqué dans le rapport de majorité. Voici les amendements principaux.

Il y a aussi un amendement concernant la composition de la commission d'attribution de l'allocation d'insertion. Il nous apparaît qu'il faut qu'il y ait des représentants des partenaires sociaux pour pouvoir vérifier et juger de la qualité de projets ayant pour but la réinsertion professionnelle. Et qui connaît mieux qu'eux-mêmes la réinsertion professionnelle et l'activité économique de ce canton ?

En conclusion, le groupe libéral est en faveur de ce projet de loi mais avec les amendements évoqués, qui nous semblent indispensables dans le contexte budgétaire actuel et afin de garantir un certain équilibre entre toutes les catégories socioprofessionnelles.

M. Pierre-Alain Champod (S). Permettez-moi tout d'abord de faire une remarque en tant que président de la commission des affaires sociales. J'aimerais relever l'esprit dans lequel nous avons pu travailler sur ce sujet, en raison, sans doute, de l'importance dudit sujet. Personne ne peut être indifférent à la situation des chômeurs en fin de droit.

Dans le cadre de l'étude de ce projet, nous avons pu avoir un véritable dialogue, ce qui n'empêche pas, d'ailleurs, des désaccords mais qui permet de trouver des solutions. Cela étant dit, quelques remarques du député socialiste sur ce projet de loi.

Je commencerai par rappeler que ce projet concrétise partiellement le projet de loi déposé par notre parti en 1990 sur l'allocation d'insertion. Je dis partiellement, puisque le projet de loi que nous avions déposé à l'époque proposait de donner une allocation d'insertion à l'ensemble des personnes se trouvant dans une situation difficile, alors que le cercle des bénéficiaires du projet que nous étudions aujourd'hui est beaucoup plus restreint, puisqu'il ne concerne que les chômeurs en fin de droit. Ce projet de loi introduit un revenu minimum d'insertion, raison pour laquelle nous avons accepté, dans un premier temps, de limiter notre projet de loi initial aux chômeurs en fin de droit, car nous estimons que ce projet va dans le bon sens et qu'il est urgent de trouver une autre solution que l'assistance pour venir en aide aux chômeurs en fin de droit.

Nous avons déjà eu l'occasion d'exprimer, dans ce parlement, nos réticences pour un revenu minimum généralisé, ce que l'on appelle le RMG, qui comporte le danger de créer le salaire du pauvre. Le «I» de revenu minimum d'insertion introduit la notion d'insertion, élément dynamique à la fois pour le bénéficiaire et pour l'Etat, en obligeant ce dernier à faire autre chose que verser une aide financière et contribuer à réintégrer le bénéficiaire dans la société. Le projet qui vous est soumis ce soir propose trois types de prestations. Premièrement, une aide financière non remboursable, mais imposable, d'un montant équivalent à l'aide versée par l'assistance publique, c'est l'aspect revenu minimum, et deux mesures d'insertion, tout d'abord la contre-prestation que le bénéficiaire s'engage à fournir et, d'autre part, l'allocation d'insertion lui permettant de concrétiser un projet d'insertion ou de réinsertion professionnelle. Ce dernier point est sans doute l'aspect le plus novateur et dynamique de ce projet de loi.

Ce projet de loi n'est pas la solution avec un «S» majuscule au problème des chômeurs en fin de droit. Il n'est qu'un élément d'une stratégie de lutte contre le chômage et en aucun cas il ne doit nous faire oublier que nous devons continuer à travailler dans trois directions.

Premièrement, pour le traitement social du chômage, c'est-à-dire améliorer la législation tant fédérale que cantonale sur le chômage. A propos de la loi cantonale, j'ai toujours dit que l'occupation temporaire était une bonne mesure, car elle offre un vrai travail avec un vrai salaire. Le deuxième axe, c'est celui d'encourager la relance de l'économie, et le troisième est de prendre des mesures pour le partage du travail. Je rappelle à ce sujet que le chômage est la forme la plus injuste du partage du travail, puisque nous avons d'un côté des gens qui travaillent souvent à plein temps et de l'autre des gens chômant souvent à plein temps également. Ce dernier point sur le partage du travail est important dans la mesure où nous n'assistons pas aujourd'hui à un simple ralentissement de l'économie mais à une transformation de celle-ci.

Dans notre esprit, cette loi est avant tout expérimentale, d'où l'article sur l'évaluation. Si l'expérience est concluante, en particulier si les mesures d'insertion donnent de bons résultats, nous pourrions envisager de l'étendre à l'ensemble des assistés et de remplacer ainsi l'assistance par une prestation non remboursable, ce qui ne serait pas une grande nouveauté au niveau suisse, puisque, vous le savez sans doute, les cantons de Berne et du Jura ont déjà introduit depuis de nombreuses années les allocations spéciales, qui sont une forme de revenu minimum, versées à toute personne dans le besoin. Vous avez peut-être lu ces derniers jours que le Tessin venait d'introduire une mesure semblable.

Enfin, quelques remarques sur les prestations financières. Le projet, tel qu'il a été adopté par la commission, prévoit que le bénéficiaire puisse toucher une somme équivalente aux normes appliquées par l'Hospice général. Il faut rappeler aussi qu'il s'agit d'une prestation de comblement, c'est-à-dire qu'elle prend en compte les revenus des bénéficiaires et des personnes qui font ménage commun avec lui. Elle ne concerne, par conséquent, pas l'ensemble des chômeurs en fin de droit qui sont, hélas, bien plus nombreux que les deux cent cinquante assistés aujourd'hui par l'Hospice général. Les chômeurs ayant un conjoint travaillant n'auront, pour la majorité d'entre eux, pas droit à ces prestations, puisque le revenu du conjoint est très souvent supérieur aux normes d'assistance incluses dans ce projet.

Nous avons reçu, tout à l'heure, une liste d'amendements que certains députés du parti libéral souhaitent introduire dans ce projet de loi. Si, effectivement, le premier alinéa concernant la suppression de l'intérêt de la dette ne pose pas de problème, les amendements prévoyant de modifier les prestations financières accordées sont inacceptables, puisque, en modifiant les prestations, on arriverait, pour un certain nombre de situations, à ce que le revenu minimum d'insertion pour les chômeurs en fin de droit soit inférieur à ce que verse l'Hospice général aujourd'hui. Tout le projet a été basé sur le fait que les chômeurs en fin de droit doivent avoir les mêmes sommes que s'ils étaient à l'assistance. On ne peut pas, en plénière, faire des bricolages qui dénatureraient ce projet et le rendraient, par conséquent, inacceptable.

J'aurai l'occasion de revenir plus en détail sur les amendements lorsque nous serons en deuxième débat. Compte tenu de ce qui précède, le groupe socialiste vous invite à adopter ce projet de loi ainsi que l'amendement proposé par le second rapport de majorité.

Pour conclure, je dirai qu'il s'agit d'un projet modeste, puisqu'il ne concerne qu'un petit nombre de bénéficiaires, mais important, puisqu'il introduit une aide non remboursable liée à des mesures d'insertion. En ce sens, ce projet est moderne. Enfin, il ne doit pas nous faire oublier qu'on ne viendra pas à bout du chômage sans organiser un meilleur partage des emplois disponibles.

Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Sans reprendre tous les éléments qui ont déjà été développés concernant cette loi, je ferai un rappel de la perspective plus générale qui est à l'origine de tous ces travaux : le projet de loi socialiste, cité par M. Champod, et une motion écologiste, déposée le 23 octobre 1990, concernant un minimum social. Cette motion visait à introduire la notion plus générale d'un minimum social garanti permettant de couvrir les besoins des bénéficiaires en logement, soins de santé, formation, culture et loisirs, soit un revenu de citoyenneté.

La proposition de motion concernant le minimum social garanti tend, non seulement à introduire un minimum garanti permettant de couvrir les besoins des bénéficiaires en logement, soins de santé et formation, mais également à transformer l'assistance sociale en un droit, à lier l'aide financière et l'insertion sociale, à améliorer la formation et la participation des bénéficiaires de prestations sociales, à faire l'inventaire des besoins sociaux, des dépenses et des moyens disponibles, en un mot à établir un bilan social.

La proposition de motion demande également d'étudier le réaménagement et le financement de la sécurité sociale. L'exposé des motifs précise les conditions de mise en oeuvre du versement d'une allocation qui garantirait le minimum social aux habitants de Genève pour couvrir les besoins fondamentaux des personnes n'ayant pas de revenu ou n'ayant pas exercé d'activité lucrative. Il s'agirait d'une prestation découlant d'un droit social. Elle ne serait en conséquence par remboursable. Elle aurait également à sa base un contrat d'insertion portant sur la formation, l'éducation des enfants et diverses activités sociales. Elle exigerait, en outre, de la part des bénéficiaires un effort volontaire. Cette nouvelle forme de protection sociale ne devrait pas se substituer à une politique en faveur de l'emploi et aboutir ainsi à l'exclusion durable du monde professionnel.

L'opération «Solidarité 700ème» concrétisant une motion des deux mêmes partis a permis d'illustrer quelque peu la problématique de la pauvreté dans notre canton. L'étude des résultats deux ans après est en cours. Par ailleurs, l'évaluation de M. Rémi Jequier du total des dépenses du canton en matière de prévoyance sociale, d'une part, et du total des subventions accordées aux personnes physiques, à l'exclusion de l'Hospice général et des contentieux d'assistance, d'autre part, ainsi que les évaluations élaborées aussi selon la définition de la classification fonctionnelle suisse des dépenses publiques et selon le modèle de comptabilité des finances publiques établi par la Conférence des directeurs cantonaux des finances, ne constituent pas un bilan social ou un budget social. Le récent travail du professeur Gilliand ne produira pas non plus de modèle cantonal pour un bilan social. La cinquième invite de la motion écologiste reste donc à traiter, soit présenter un bilan social du canton. Je vous rappelle que la motion écologiste, reformulée, a été renvoyée au Conseil d'Etat.

Nous répondrons donc aujourd'hui, comme l'a dit M. Champod, très partiellement à la question suivante. Avons-nous les moyens, la volonté de lutter contre l'exclusion sociale que représente la pauvreté, de la prévenir et, finalement, de viser son éradication, but premier de la protection sociale ? La plupart des prestations sociales prenant appui sur les revenus, les mailles de protection laissent passer bon an mal an beaucoup de ceux qui sont en dehors du marché du travail. La sécurité sociale est, dans l'ensemble, conçue comme un substitut du marché de l'emploi en cas de perte accidentelle de la rémunération offerte par ce dernier. Elle est financée par les travailleurs et les employeurs selon la logique du risque et la technique de l'assurance.

Chaque proposition politique, à cet égard, non seulement ne change pas fondamentalement la redistribution des revenus, mais encore reste dans la même logique du droit qui naît par le travail rémunéré ou le pas assez de travail rémunéré, comme dans le projet que nous discutons aujourd'hui. Les écologistes estiment qu'à terme il faut un nouveau concept de cohésion sociale dans lequel la protection sociale serait au moins partiellement détachée du travail salarié. Quoi qu'il en soit, les mutations des réalités socio-économiques, les changements démographiques des structures familiales et le vieillissement de la population sont des facteurs de remise en cause de ce système de protection sociale.

L'introduction de la TVA, son utilisation et les actuels débats sur le poids des charges sociales sur le prix du travail vont encore accélérer ce débat. Nous aurons certainement encore à examiner un certain nombre de possibilités de fiscalisation de la protection sociale. Le financement du revenu garanti, allocation universelle, impôt négatif ou allocation d'insertion, une fois sorti du système centré sur le travail permettra de répondre plus logiquement à la nouvelle configuration des périodes alternées ou partielles, d'emplois, d'occupations familiales, de formation, de congés ou autres. Cette perspective permettra de rompre avec la société à deux vitesses que nous entérinons aujourd'hui avec notre projet.

Nous espérons que ce projet poursuivra bien son but, à savoir de donner de réelles chances d'échapper à la pauvreté, d'une part, parce que tout revenu minimum est source de liberté individuelle et, d'autre part, parce que le suivi prévu par la loi et l'allocation d'insertion élargissent les perspectives réservées aux chômeurs en fin de droit. L'esprit de la loi que nous soutenons est donc que l'attribution d'un RMI est un droit, qu'il implique des mesures d'accompagnement et, enfin, que sa finalité est l'insertion. Il reste encore des réponses larges à apporter. La crise qui nous occupe est non seulement une crise de l'emploi mais une crise du lien social et du sens. Il reste aussi, comme l'a dit M. Champod, la prévention, le partage et la prise en compte, à côté du travail, d'autant plus central qu'il est devenu rare, des autres activités individuelles et sociales.

En plus des amendements proposés par M. Brunschwig, nous en proposerons un autre, cité par MM. Schaller et Clerc dans le rapport, qui concerne l'article 3 et que vous trouvez en page 112. C'est aussi un amendement technique, Monsieur Brunschwig. Il s'agit aussi d'égalité de traitement. Nous aimerions que le deuxième revenu minimum cantonal que nous allons accepter ait le même montant que le premier que nous avons voté, soit celui dont bénéficie les personnes au bénéfice de rentes AVS ou AI, à moins que vous ne jugiez aussi que ces revenus-là sont trop élevés ! (Applaudissements.)

M. Bénédict Fontanet (PDC). Au grand soulagement, certainement, du président du Grand Conseil, je ne vais pas redire ce qu'ont dit mes préopinants avec plus de talent que je ne saurais en avoir. (Exclamations.) Je tiens à saluer le rapport de première majorité de M. Schaller qui est particulièrement complet, fouillé et dénote un travail important caractérisant mon ami Philippe Schaller et que mon parti politique salue... (Quolibets sur les bancs de l'Alliance de gauche.)

Ecoutez, ça fait du bien de se dire des gentillesses «parmi» de temps en temps, non ? Les dernières séances du Grand Conseil ont parfois été suffisamment vives pour que l'on puisse se jeter de temps en temps quelques fleurs, cela ne fait de mal à personne !

Le parti démocrate-chrétien salue l'introduction de ce revenu minimum d'insertion. Cet élément figurait dans le programme de notre parti politique et dans la plate-forme gouvernementale que nous avions proposée aux électeurs genevois l'automne passé. Il le salue et le regrette aussi parce que ce revenu minimum d'insertion c'est la démonstration que nos sociétés occidentales n'ont pas su réagir, n'ont pas su prendre les mesures nécessaires pour lutter contre le chômage et, plus particulièrement, pour protéger, préserver et aider les chômeurs en fin de droit. C'est là un phénomène qui nous dépasse certainement, nous Genevois, malgré toutes nos qualités et intelligences, c'est un phénomène international et je crois que le fait de passer d'un système d'assistance ayant des relents de charité - et les chômeurs en fin de droit ne doivent pas être traités par la charité - et un système de sécurité sociale conférant un certain nombre de droits aux personnes concernées est une excellente chose.

Ce système est certes palliatif, le mieux serait de pouvoir maintenir les emplois, de pouvoir donner du travail. C'est un problème qui nous dépasse un peu mais nous devons prendre, avec les moyens qui sont les nôtres, les mesures pour faire en sorte que les chômeurs en fin de droit aient un minimum de dignité et c'est cela que le projet de loi qui nous est soumis ce soir nous propose. C'est donc avec enthousiasme que nous le voterons.

S'agissant des amendements proposés par le parti libéral, nous sommes disposés à entrer en matière sur un certain nombre d'entre eux. En résumé et pour simplifier le débat de tout à l'heure, nous entrerons en matière sur celui ayant trait à la suppression de la prise en considération des intérêts de dette. S'agissant du second, portant sur le loyer, nous ne sommes pas disposés à entrer en matière tel quel, en ce sens que cela considérerait un retour en arrière par rapport à ce qui existe aujourd'hui et nous ne sommes pas disposés à ce que l'on revienne en arrière par rapport aux prestations d'assistance existant actuellement. Cela serait contraire aux engagements électoraux que nous avons pris, mais nous souhaitons, pour éviter des abus, proposer un contre-amendement qui ferait en sorte que ce soit le Conseil d'Etat qui fixe, par voie réglementaire, quels sont les montants des loyers qu'il faut prendre en compte. Cela, à l'évidence, n'a pas à figurer dans la loi. Il faut pouvoir l'adapter aux différentes situations particulières, ce n'est pas dans un texte de loi général qu'il faut le faire.

S'agissant du troisième amendement où l'on demande de prendre en considération la fortune de l'intéressé, vous aurez vu que, dans la détermination du revenu, on prend en compte les revenus de la fortune de la personne faisant ménage commun avec la personne qui demande ce revenu minimum d'insertion. Je ne vois pas très bien, Monsieur Brunschwig, comment vous articulez votre amendement à l'article 7, alinéa 4, avec l'article 6 de la loi - nous en discuterons tout à l'heure. A mon sens, juridiquement, ça ne va pas et cela pose un certain nombre de problèmes. Si cela devait être pris en considération tel quel, cela me paraîtrait être une incitation à la «décohabitation». Nous ne sommes pas disposés à entrer en matière sur cet amendement.

S'agissant de la proposition d'amendement à l'article 11, nous le voterons même si c'est un peu une tautologie, en ce sens que l'on répète ce que la loi permet déjà, puisqu'il va de soi que si l'on a menti à l'autorité en exécutant un travail non déclaré on peut se voir suspendre l'allocation dont on bénéficie. Enfin, nous sommes disposés à entrer en matière s'agissant de la composition de la commission et souhaitons que celle-ci soit également composée de personnes émanant des syndicats patronaux et des syndicats à proprement parler.

Voilà quelle est la position du parti démocrate-chrétien dans cette affaire et nous vous invitons, pour le surplus, à entrer en matière dans un premier temps sur ce projet de loi.

M. René Ecuyer (AdG). Je voudrais apporter quelques réflexions supplémentaires au sujet de cette nouvelle loi. Je féliciterai tout d'abord la commission pour l'excellent travail qui y a été fait. Les rapports qui nous sont présentés nous apportent des renseignements précieux et qui nous seront utiles pour notre travail. Nous disons que cette nouvelle loi constitue incontestablement un amélioration sociale et que nous allons la voter. Peut-être que certains d'entre vous s'en souviennent, il existait à Genève une loi édictée le 27 décembre 1940 concernant l'aide aux chômeurs âgés. A cette époque-là, on disait que les personnes âgées de plus de 55 ans, en fin de droit, avaient la possibilité d'obtenir une aide de l'Etat. On allait même un peu plus loin que la loi qui nous est proposée parce que l'on disait que l'aide aux chômeurs âgés pouvait également être accordée, à titre exceptionnel, aux personnes ayant exercé une activité lucrative indépendante si cette activité était analogue à celle d'un salarié. Cette loi a certainement dû être abolie pendant les périodes de haute conjoncture, mais nous voilà contraints de revenir en arrière.

Retirer les chômeurs en fin de droit du régime de l'assistance publique pour leur donner droit à un revenu minimum, c'est un bien, c'est nécessaire et indispensable aujourd'hui. Cela redonnera aux chômeurs un peu de leur dignité, surtout pour des gens qui ont perdu un droit fondamental qu'est le droit au travail, soit d'apporter son énergie intellectuelle et physique au fonctionnement de la société.

Quand je dis : «redonner un peu de dignité humaine», c'est simplement parce que, avec cette loi, l'humiliation demeurera quand même. Pour obtenir l'allocation d'insertion, il faudra intervenir de la même manière que pour les prestations aux personnes âgées. Il faudra s'entretenir avec un assistant social, répondre à différentes questions : Vivez-vous seul ? Avec qui ? Combien gagne votre femme ? Combien gagnent vos enfants ? Avez-vous de l'argent à la banque ? Combien ? Il faudra apporter des justificatifs aux réponses fournies et c'est un long processus. Possédez-vous une auto ? Combien vaut-elle ? Cela fait partie du patrimoine. Êtes-vous divorcé ? Payez-vous une pension ? On rentre donc dans la vie privée des gens et ce Grand Conseil a questionné plusieurs fois le Conseil d'Etat et l'a même invité à étudier l'automaticité du versement de l'allocation aux personnes âgées. Là aussi, je pense qu'il faudra par la suite améliorer cette loi, étudier cette automaticité pour éviter ce «déshabillage public».

Cette loi, je le répète, est un progrès dans son principe. L'allocation ne sera donc pas remboursable, contrairement au régime de l'assistance publique. Mais que va-t-il changer, dans l'immédiat, pour le chômeur en fin de droit ? Il touchera le même revenu de misère que lui assure l'Hospice général, soit 34 F par jour, comme l'a dit Bernard Clerc. 34 F par jour pour trois repas, pour s'habiller, c'est juste de quoi ne pas «crever» de faim. Il faut être raisonnable ! Lorsque l'on entend les milieux patronaux dire que c'est beaucoup, je m'interroge. Je dis juste de quoi ne pas «crever» de faim dans un monde qui reste un monde de richesses et d'opulence. Pour ce tarif, on enverra le bénéficiaire donner un coup de main dans les hôpitaux, les cuisines scolaires, cela pour combattre la morosité d'une vie d'exclu du travail.

Nous disons donc oui à cette nouvelle loi, mais nous allons rapidement tenter de l'améliorer. Nous vous proposerons tout à l'heure de porter ce minimum cantonal d'aide sociale garanti de 13 812 F à 21 264 F, ce qui correspond au minimum vital garanti aux retraités. Pour paraphraser le fait que, quelquefois, l'on est des «faiseurs de Suisses», je dois dire qu'avec 34 F par jour, nous sommes des «faiseurs de pauvres» ! Nous le serions d'autant plus si nous suivions l'amendement proposé par le parti libéral limitant à 600 F le loyer pour une personne seule. S'il a un loyer de 900 F, ce n'est pas 34 F mais 24 F par jour. Vous m'expliquerez ce que l'on peut faire avec ça.

Sur la solidarité familiale, je trouve la proposition de M. Brunschwig très bien. En regardant le contenu de mon portefeuille, je me dis que je devrais reprendre mon arbre généalogique, je suis sûr que j'ai de la parenté avec lui, ou encore avec la famille Lombard ! Ça me rendrait service et nous ferions là appel à la solidarité familiale ! En conclusion, l'Alliance de gauche approuvera le projet tel qu'il nous est soumis et refusera les amendements. (Applaudissements.)

M. Roger Beer (R). Je vais revenir au projet de loi et quitter le sujet sur les liens familiaux pouvant exister dans ce Grand Conseil !

Le parti radical accueille évidemment avec satisfaction ce projet de loi, mais en fait, de quoi s'agit-il ? Ce projet de loi présente tout simplement le transfert d'une aide sociale relevant de l'assistance, et donc remboursable, en un droit prenant la forme d'un revenu imposable. Ce droit se décompose en deux éléments : d'une part un bloc statique, le revenu minimum d'aide sociale et, d'autre part, une partie dynamique constituée par l'allocation d'insertion. Le projet que nous discutons ce soir représente la synthèse de quatre ans de travaux de commission. Vu la complexité de ce dossier et surtout vu l'éloignement initial des différentes positions, ce délai paraît maintenant raisonnable. Seulement voilà, il y a un problème de coût et de chômage.

Sur ce dernier point, vous serez d'accord avec moi pour dire que le problème du chômage est un problème de société, problème ayant lui-même entraîné la situation actuelle de crise et de sous-emploi. Le projet de loi n'entend pas apporter une réponse au chômage, il entend au contraire apporter une réponse à la population touchée par la fin du versement des indemnités de chômage.

Cette population en fin de droit, nous sommes bien obligés de la considérer dans toute son ampleur, avec tous ses problèmes. Notre société doit lui donner une place. Ces gens ont le droit de vivre et il faut éviter d'en faire des exclus. Il est clair que nous n'avons pas affaire là au prototype du gagnant ou à l'illustration de la réussite tant prônée par une certaine publicité agressive qui agrémente et nos rues et nos médias. Malgré tout, ces êtres humains existent, et nous devons nous en préoccuper.

L'idée véhiculée par ce projet de loi constitue une démarche politique essentielle. Cette proposition faisait d'ailleurs partie du programme de l'Entente, programme ayant conduit à l'élection du Conseil d'Etat actuel et de ce parlement. Cette proposition a comme objectif de redonner une dignité à des gens que la vie n'a pas épargnés. En accordant un droit à ces personnes, le revenu minimum d'aide sociale, en arrachant les bénéficiaires de l'assistance qui enlève souvent toute raison de vivre à ceux qui en dépendent, devrait donner une nouvelle motivation à ces mêmes gens. Nous passerons d'une attitude passive - qui est celle engendrée par l'assistance - à la nécessité d'un comportement actif qu'exige la contre-prestation que devront fournir les bénéficiaires.

Le coût global pose un problème, c'est vrai. Mais que savons-nous de l'évolution de la situation ? Elle va empirer, c'est malheureusement fort probable. Ce projet de loi n'y changera rien, mais la force de celui-ci est de définir un système lui-même basé sur des normes fédérales.

D'ailleurs, le principe du calcul du revenu minimum d'aide sociale est identique au principe du calcul des prestations complémentaires aux rentiers AVS/AI, justement défini par cette législation fédérale. Ce calcul est appliqué dans toute la Suisse et à Genève, il est, en particulier, appliqué aux 18 000 bénéficiaires de l'OAPA. Aujourd'hui, ces sommes sont déjà versées et prévues au budget de l'Hospice général. Ces calculs démontrent - et l'on est bien d'accord que le chiffre articulé correspond à la situation présente parce que personne ne sait de quoi sera fait l'avenir - qu'il faut aujourd'hui environ 400 000 F de plus.

Mais encore une fois, entre certains représentants de la gauche qui trouvent que l'on ne va pas assez loin et d'autres députés de la droite patronale qui estiment que l'on distribue des rentes de situation, ce projet de loi donne une solution intermédiaire et fort raisonnable. Je crois également que la comparaison entre une population qui travaille et la population des chômeurs en fin de droit est extrêmement difficile, voire tout à fait fausse. Les mentalités ne sont pas les mêmes.

Toute l'ineptie de certaines démonstrations, c'est d'appliquer un raisonnement cartésien de travailleur ou d'employé autonome à une population de perdants ne croyant plus à rien. Enfin, les quelques modèles prêtant à discussion ne concernent même pas 4% de la population actuelle des personnes en fin de droit. La loi qui, elle, répond à une situation générale et non à des cas particuliers, est juste.

Pour conclure, je dirai qu'aucun projet de loi n'est jamais parfait. Face aux quelques critiques dont cette proposition fait l'objet, je crois qu'il faut insister sur le fait que ce projet de loi contient une cautèle extraordinaire : l'évaluation après deux ans. Bien sûr, me diront certains, toute loi peut être modifiée en tout temps, mais là, l'évaluation de la loi est obligatoire et prescrite, voire comprise dans la loi elle-même. Nous verrons bien dans deux ans l'inadéquation, ou l'adéquation, du projet du loi à la problématique des chômeurs en fin de droit.

Finalement, le parti radical votera ce projet de loi. Il est même disposé à accepter deux amendements. D'une part, l'amendement demandant la suppression des déductions des intérêts de la dette, d'autre part, celui qui améliore la représentation des partenaires sociaux dans la commission d'attribution. Quant à la limitation des loyers, nous pensons également qu'il vaudrait mieux traiter cette question en fixant des limites dans un règlement du Conseil d'Etat. (Quelques applaudissements.)

M. Michel Balestra (L). L'objectif prioritaire, pour le parti libéral, c'est de retrouver le plus rapidement possible le plein-emploi. (Exclamations de la gauche.) C'est aussi la priorité qui a été annoncée par le Conseil d'Etat dans le discours de Saint-Pierre, car, sur ce point, nous sommes tous d'accord, le chômage est la plus cruelle des injustices sociales. Or, l'emploi dépend de la croissance économique et de l'augmentation de la productivité, mais, contrairement à ce que nous disait le député Schaller tout à l'heure, la productivité crée l'emploi, elle ne le détruit pas. D'ailleurs, M. Schaller nous a fait la démonstration que la productivité de la Suisse est une des plus importantes des pays de l'OCDE, mais c'est aussi le pays qui a un des taux de chômage les plus bas. En médecine, on analyse des situations vécues pour en tirer des théories, en économie, c'est la même chose.

A cela s'ajoute le fait inquiétant que, dans l'économie, 80% des postes de travail sont créés par des entreprises de moins de cinquante employés. Je dis inquiétant parce que les grandes créent toujours des emplois mais elles en créent en dehors de nos frontières; ne serions-nous plus compétitifs ? Je dis inquiétant parce que ce sont, précisément, ces petites entreprises qui sont les plus sensibles au déséquilibre structurel de l'économie, qui ont le plus besoin de collaborateurs avec des salaires raisonnables et d'une fiscalité incitative. Alors que le taux de naissance et de mortalité des grandes entreprises est très faible, elles existent et elles durent, et qu'il est à peine plus élevé pour les entreprises moyennes, les petites entreprises apparaissent et disparaissent en très grand nombre. C'est à cette occasion que dans l'économie des emplois se créent et disparaissent. Tout cela suggère un certain nombre de mesures de politique économique de nature à encourager cette catégorie d'entrepreneurs afin qu'ils se remettent à investir dans leur outil de travail avec la volonté d'en assurer la pérennité, par la conviction de pouvoir y parvenir. Tout cela suggère de ne pas créer des encoubles supplémentaires.

En dehors des réalités, il n'y a pas de politique possible. Monsieur Clerc, ne pensez-vous pas que les besoins en capitaux pour redresser le bloc de l'Est et payer l'ardoise du plus grand mensonge politico-économique de l'histoire sont largement responsables de la crise que nous traversons ? (Brouhaha.) Mais rassurez-vous, Monsieur Clerc, le capitalisme a déjà traversé des crises, ce n'est pas la première, il s'en est toujours remis, il a toujours fait progresser, au long de l'histoire, l'homme dans sa dignité, dans sa volonté et son plaisir d'entreprendre. Par contre, malgré un avocat du gabarit du député Schaller, je ne suis pas convaincu que le socialisme se remettra de sa dramatique implosion.

Le partage du travail implique le partage des revenus, Monsieur Clerc. Et au niveau où vous voulez placer le revenu minimum d'insertion, je doute que les salaires des employés suisses permettent encore aux entreprises établies sur notre territoire de réaliser un franc sur deux de leur chiffre d'affaires à l'exportation. Enfin, toutes ces recettes de cuisine qui ont été largement approuvées par M. Schaller faisaient déjà partie du programme commun de 1981. Douze ans après, je vous le répéterai toujours, on voit où l'on en est, et quand Mitterrand disait qu'il allait changer la société, il a changé le taux de chômage, mais il l'a décuplé. (Protestations de la gauche.)

C'est pour toutes ces raisons qu'à titre personnel je suis contre ce droit au revenu minimum, contrairement à mon groupe. Mais je me rallierai à lui et vous demande instamment de désamorcer le double effet de cette bombe à retardement.

Le premier effet, c'est l'explosion des coûts sociaux, et vous ne m'enlèverez pas de la tête que ce budget va exploser. Le deuxième, c'est que s'il est trop avantageux par rapport aux salaires minimums des conventions collectives, il va décourager les travailleurs qui travaillent et augmenter, Monsieur Beer, le taux de 4% de chômeurs en fin de droit dont vous nous parliez tout à l'heure.

Les quatre amendements qui vous sont présentés ce soir sont de nature à diminuer les effets induits par cette loi. Ils ne sont pas de nature à les supprimer. Mais permettez-moi de parler comme vous de minimum vital. Ces quatre amendements sont le minimum vital économique possible pour que Genève retrouve le plein-emploi. Quant à l'évaluation après deux ans, laissez-moi rire ! Qui acceptera de revenir sur des acquis sociaux dans deux ans si nous voyons que cette loi fait exploser les coûts sociaux ? C'est pourquoi nous devons la contrôler ce soir, c'est pourquoi, chers amis de l'Entente, vous devez réfléchir à deux fois avant de refuser nos amendements. (Applaudissements sur les bancs libéraux.)

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. Je ne suis pas étonné de la position de M. Balestra, le contraire m'aurait étonné. Lorsqu'il parle d'explosion des coûts sociaux, il faut savoir d'où elle vient. C'est bien votre politique économique qui crée l'explosion des coûts sociaux ! C'est bien le chômage qui crée l'explosion des coûts sociaux ! Vous pouvez tourner le problème dans tous les sens, Monsieur Balestra, les responsabilités se trouvent là où il y a le pouvoir économique et elles sont de votre côté et pas du nôtre !

Des voix de gauche. Bravo !

M. Bernard Clerc, rapporteur de la deuxième majorité. Vous avez pris beaucoup d'exemples étrangers, ils ne me concernent pas, ils ne m'intéressent pas, je me suis toujours battu...

Des voix libérales. Aaah !

M. Bernard Clerc, rapporteur de la deuxième majorité. Oui, Monsieur Annen. Je me suis toujours battu ici, dans ce pays et dans ce canton, pour un monde différent, pour plus de justice sociale, je n'ai pas à me référer à vos exemples étrangers.

J'ai lu dans la «Tribune de Genève» du 25 octobre que MM. Brunschwig et Gardiol disaient qu'il est choquant qu'une aide de l'Etat aux chômeurs puisse être supérieure au salaire d'un ouvrier. Vous allez être étonné, je suis d'accord avec vous ! C'est absolument choquant ! Mais ce qui l'est plus, c'est que des salaires soient tellement bas... (Rires sur les bancs libéraux.) ...qu'ils soient aux normes de l'assistance publique; voilà ce qui est choquant ! (Vifs applaudissements sur les bancs de la gauche et à la tribune du public. Commentaires de toutes parts.)

Je suis pour l'Europe, mais pas pour n'importe quelle Europe, je vous l'ai déjà dit. Prenons les choses un peu sérieusement. Vous parlez toujours de la concurrence internationale et des charges patronales. Que dit l'UBS ? Elle nous dit, dans une étude, que les cotisations sociales globales payées par l'employeur sont en Suisse de 15%. En comparaison avec l'Allemagne : 23%, les Etats-Unis : 21%, le Japon : 17%, la Suisse est à la traîne. En ce qui concerne la part des impôts au produit intérieur brut - c'est la société pour le développement de l'économie suisse qui le dit et, que je sache, ce n'est pas une officine de gauche - la moyenne OCDE est de 38,8%, la Suisse 32%, la Suède 50%, le Danemark 49%, les Pays-Bas 46%, le Japon 29%, les Etats-Unis 29%.

Des voix libérales. Et le chômage ?

M. Claude Blanc. Et Cuba ? (Brouhaha.)

M. Bernard Clerc, rapporteur de la deuxième majorité. Vous voulez que je continue ? Eh bien, je vais le faire. Les prestations familiales en pour-cent du produit intérieur brut. Moyenne européenne : 1,7%. En Suisse : 1%, au Danemark : 3%, en France : 2,2% comme au Royaume-Uni, en Allemagne : 1,9%. Je vais m'arrêter là, je ne vais pas vous accabler de chiffres. Je vais quand même vous citer un tout petit passage d'un article paru dans la «Tribune de Genève» du 31 octobre, que vous n'avez peut-être pas lu ou pas voulu lire. Il est de Claude Monnier et, que je sache, il est plutôt proche de vos milieux. Il dit et je cite :

«Je milite, on l'aura compris, pour une troisième raison en faveur d'un revenu minimum : l'intérêt économique général. Nous vivons dans un système de production et consommation de masse. Si une part non négligeable de cette masse est évincée du système, ce dernier sera menacé de gangrène tel un corps humain soudainement mal irrigué. Tout le monde doit avoir de quoi consommer. Le bon fonctionnement de l'économie en dépend et donc notre bien-être à tous. Pas besoin de morale ni de sermon, juste l'intérêt de chacun, c'est technique, c'est neutre, c'est suffisant.».

(Bravos et applaudissements de la gauche.)

M. Pierre Froidevaux (R). Le chômage devient une fatalité de notre société. La marche du temps impose à notre vie sociale de se confronter à définir de nouvelles limites. Ce soir, nous devons revoir ensemble le droit du citoyen en lui proposant que son revenu ne soit plus nécessairement lié à une activité professionnelle afin qu'il reste au moins un citoyen consommateur.

Il faudrait donc mettre en place un revenu minimum cantonal. Tous les partis seraient d'accord pour l'affirmer, sans doute parce qu'aucun économiste n'ose plus espérer le plein-emploi dans un contexte de mondialisation des marchés et d'une plus juste concurrence entre le Nord et le Sud, l'Est et l'Ouest.

Faut-il que ce RMAS soit un droit social, comme c'est le cas actuellement, ou un simple droit comme l'entend le projet ? Le résultat économique serait à peu près équivalent comme en attesterait le budget consacré à ce projet de loi dans les comptes 1995. Si les contraintes budgétaires sont équivalentes, il ne nous reste qu'à savoir ce qui est plus digne pour la personnalité humaine : avoir droit à une aide ou avoir un droit ?

La réponse des partis politiques va aujourd'hui dans le sens du droit. Mais je m'interroge alors sérieusement : où allons-nous ? Le droit au travail est fondamental à notre équilibre. Imaginez-vous, vous-même, lors d'un refus systématique de travail, qu'on vous dise : «inutile pour la société». Imaginez-vous la représentation que vous avez de vous-même, imaginez les relations que vous avez avec votre famille ou votre réseau d'amis ! Tout s'effondre ! Il y a de quoi perdre le sens des réalités. A cette personne qui, à mon sens, mérite le secours de la société, dorénavant vous le lui refuserez pour lui donner un droit, le droit de rester dans cet état. Ce droit, il ne peut que le manger, le fumer, le boire ou «l'héroïnomaniser». (Murmures.) Ne plus venir à son secours, cela équivaudra à créer une société à deux vitesses, deux sociétés qui bientôt ne se parleront plus.

L'évolution de la société serait ainsi cyclique : il y a longtemps, elle se partageait entre deux grands groupes, celui des esclaves, des serfs puis des ouvriers qui luttaient contre les nantis qui s'appelaient des patriciens, des seigneurs ou des industriels.

Une voix. Des libéraux !

M. Pierre Froidevaux. Demain, le déshérité s'appellera le chômeur et le nanti le travailleur. Ce dévalisé perdra son identité, sa personnalité pour être invectivé RMIste, puis SDF, génération après génération.

Plus d'un siècle de République a permis de façonner une société plus juste grâce au combat social des forces progressistes du canton dont les radicaux faisaient partie...

Des voix socialistes. Faisaient, faisaient ! (Rires et applaudissements.)

M. Pierre Froidevaux. ...et font encore partie. Aujourd'hui, avec ce projet de loi, on se replonge dans les affres d'une population qui se développe à l'ombre de l'autre. Celle-là aura ses propres règles du jeu comme cela se voit dans les autres parties du monde qui n'ont pas su éviter leurs ghettos, les banlieues françaises en sont un triste exemple.

J'aurais souhaité lire dans ce rapport l'avis des personnes concernées, c'est-à-dire les chômeurs en fin de droit. Tout au plus, j'ai pu découvrir, à la page 45, que l'Hospice général n'a pas été concerté avant le dépôt de ce projet de loi, qu'il en a été profondément choqué et qu'il craignait même qu'on remette en cause son travail. Je ne puis que rendre ici un vibrant hommage à l'Hospice général dont j'ai pu apprécier, à titre personnel, la qualité de ses nombreuses interventions qui en font un partenaire rassurant dans toutes les situations, mêmes les plus scabreuses. Lors de votre dernière prestation télévisée, Monsieur le conseiller d'Etat, tous les chômeurs présents ou interviewés ont demandé du travail, ajoutant même : «à n'importe quelle condition !». Personne ne vous a demandé des travaux d'intérêt public et personne ne vous a demandé de RMI.

Dans un instant vont venir les amendements libéraux qui sont très significatifs du malaise dans lequel nous plonge ce projet. On a accepté sans discussion la philosophie du RMAS, puis on se rend compte qu'il provoque des injustices criardes avec le marché du travail. On cherche un nouvel équilibre et on devient alors injuste avec les écorchés de la société, alors que la société est la plus juste possible en favorisant l'aide individuelle telle qu'elle le fait actuellement.

Je souhaiterais le renvoi de ce projet en commission... (Murmures.) ...afin que soit étudiés, tant l'image de la société que l'on veut développer que l'aspect de la dignité humaine. Devrait être aussi étudié, non pas le principe d'un RMAS, mais celui de revoir le mode de remboursement des dettes contractées auprès de l'Etat ou d'allocations d'insertion, comme promis par notre majorité lors du discours de Saint-Pierre.

Je voudrais ainsi éviter que, demain, M. Christian Ferrazino ne soit habillé de rouge, entouré de camarades vociférant l'extension de ce droit au nom de nouveaux principes et que Jean-Claude Dessuet soit repoussé par des habits noirs ensevelissant l'Etat croyant ainsi créer des places de travail, ces deux groupes ayant été élus par ceux que vous appelez, Monsieur le rapporteur, les exclus de la société, et qui le seront encore bien davantage demain grâce à ce projet asocial. (Protestations.)

Pour ces gens, je suggère que la loi prévoie d'emblée des «restos du coeur», des gares de métro, même sans métro, et de multiples foyers d'accueil pour toutes sortes de détresses humaines qui n'ont que leur bon droit, mais plus droit à l'aide de l'Etat. Nous pourrons réapprendre à soigner la tuberculose devenue incurable chez ces miséreux, ou même la lèpre, deux cas décrits maintenant à Paris !

Madame et Messieurs du Conseil d'Etat, cette fois-ci je ne vous suivrai plus dans le démantèlement des acquis sociaux. (Eclats de rires sur les bancs socialistes.)

Dans un instant, je vais me taire, je souhaiterais alors quelques secondes de silence consacrées à la réflexion. Lorsque vous aurez tendu votre main avec des billets de banque à un chômeur, voulez-vous retirer votre main de la sienne ou la lui tenir ? (Applaudissements sur les bancs libéraux.)

Le président. Je salue la présence à la tribune de notre ancien collègue Michel Rossetti, par ailleurs conseiller administratif de la Ville de Genève. (Applaudissements.)

M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Deux mots de la part du Conseil d'Etat à propos de ce projet de loi 6629 qui, après quatre années de travaux, au demeurant paisibles, de la commission des affaires sociales, a déchaîné ces dix derniers jours une agitation qui a fini par gagner certains d'entre vous.

De quoi s'agit-il ? Lorsque les chômeurs ont épuisé leur droit aux indemnités de l'assurance-chômage, du régime fédéral comme du régime cantonal, ils passent au régime de l'assistance publique et reçoivent des prestations financières qui ne sont plus versées au titre de l'assurance-chômage mais au titre de l'assistance publique.

Combien de personnes sont-elles concernées ? J'ai entendu les chiffres les plus fous. La réalité est simple et claire. Il y a environ 16 000 chômeurs indemnisés par l'assurance-chômage et 250 chômeurs qui ont épuisé leur droit à l'assurance-chômage et qui sont aujourd'hui à l'assistance publique. L'introduction du revenu minimum d'aide sociale pour ces 250 personnes a pour effet de transformer les prestations d'assistance publique en prestations d'aide sociale.

La prestation d'assistance publique est un devoir de la société. Le revenu minimum sera un droit individuel. La prestation d'assistance publique est, théoriquement, remboursable. Le revenu minimum ne l'est pas. La prestation d'assistance publique n'est pas imposable. Le revenu minimum le sera. La prestation d'assistance publique ne demande pas de contre-prestation de la part de son bénéficiaire, le revenu minimum demande une contre-prestation de la part de son bénéficiaire sous la forme d'un travail d'utilité sociale dans le secteur non marchand.

J'ai entendu les choses les plus folles et les plus idiotes à propos du système de calcul. J'ai vu la naissance de familles virtuelles dans laquelle on avait un homme et une femme au chômage, en fin de droit, plusieurs enfants, des pensions alimentaires, des loyers élevés...

Les libéraux contestant. C'est pas vrai !

M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Monsieur Brunschwig, vous m'avez donné la semaine passée un cas de ce type...

M. Nicolas Brunschwig. Avec deux enfants !

M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. ... J'ai fait établir l'analyse de la population de ces 250 chômeurs en fin de droit. Je vous ai communiqué cette analyse. 70% de ces personnes sont des personnes seules. Elles ne touchent pas des prestations de 50 000 ou 60 000 F comme vous essayez de le faire croire. La prestation versée, la prestation moyenne est de 2 090 F par mois. On est loin des chiffres que vous indiquez.

Le principe de calcul du revenu minimum d'aide sociale est un principe de calcul bien connu : c'est celui de la législation fédérale sur les prestations complémentaires accordées aux rentiers AVS/AI. Il est parfaitement connu des administrations sociales et il est appliqué pour 18 000 personnes âgées, bénéficiaires de l'OCPA. Il sera appliqué demain à 250 personnes supplémentaires, les chômeurs en fin de droit, pour une prestation moyenne d'environ 2 090 F. Les prestations accordées au titre du revenu minimum seront comparables aux prestations accordées au titre de l'assistance publique : les simulations qui ont été faites par l'Hospice général - nous vous avons communiqué vingts calcul correspondant à vingt situations réelles actuelles - démontrent que la dépense est, au total, identique, à 400 000 F près.

Enfin, pour démontrer que les amendements de certains députés libéraux avaient pour effet de revenir sur le barème de l'assistance publique, nous vous avons fait tenir trois calculs comparatifs sur ces vingt situations concrètes : le calcul au titre de l'assistance publique, le calcul au titre du revenu minimum et enfin le calcul au titre du revenu minimum, avec vos amendements. On a pu alors constater que ces amendements, pour plusieurs d'entre eux, avaient pour effet d'aboutir à des prestations inférieures à celles de l'assistance publique. Je ne sais pas si c'est ce que vous avez voulu, mais c'est en tout cas l'effet de ces amendements : c'est la raison pour laquelle, à l'exception de l'amendement relatif aux intérêts, nous ne les acceptons pas.

Dernier point, assez étonnant d'ailleurs : cette loi est une première ! Elle exige l'évaluation de la loi après une période de deux ans qui permettra au Grand Conseil, sur la base d'un rapport du Conseil d'Etat, de voir si les craintes exprimées relevaient de la réalité ou si, au contraire, elles relèvent du fantasme, ce que nous pensons.

Pour le reste, je vous remercie, dans ce premier débat, de bien vouloir entrer en matière sur un projet qui est le fruit de travaux conduits pendant quatre ans par la commission des affaires sociales, en collaboration avec le département de l'action sociale et de la santé, qui introduit une prestation nouvelle, importante, qui n'a pas l'impact financier que l'on dit mais qui assure, par un socle statique, le revenu minimum, et par un élément dynamique, l'allocation d'insertion, une garantie de revenu avec une contre-prestation pour une population limitée, celle des chômeurs en fin de droit.

M. Nicolas Brunschwig (L). Je regrette de devoir intervenir à nouveau, mais je ne peux accepter les exemples soi-disant anecdotiques que nous avons présentés à M. Segond. Monsieur le conseiller d'Etat, vous savez très bien que l'on a montré un certain nombre d'exemples qui, certes ne sont pas courants, je l'ai d'ailleurs dit dans mon texte, mais qui peuvent tout à fait exister et je n'ai jamais parlé de famille avec sept ou huit enfants.

M. Philippe Schaller. Ça existe ! (Rires.)

M. Nicolas Brunschwig. J'aimerais vous rappeler, Monsieur le conseiller d'Etat, que dans le dernier document que vous avez fait parvenir à certains députés, vous aboutissez, avec le projet de loi tel qu'il est formulé actuellement, à 56 000 F par année pour un couple avec deux enfants sans qu'il y ait de problèmes particuliers, c'est-à-dire sans intérêts de dette. Je vois que vous revenez sur ce plan-là et nous en sommes ravis. Nos exemples n'étaient pas forcément si idiots et anecdotiques ! Concernant la pension alimentaire, je crois qu'il y a passablement de divorces dans cette République et il s'ensuit forcément une pension alimentaire. (Ton fébrile de l'orateur.)

Dès lors, je ne peux accepter que vous remettiez en question des exemples n'étant absolument pas aussi farfelus que ce que vous nous avez laissé entendre. Si vous le voulez, nous pourrons vous le démontrer et c'est avec joie que nous voterons le renvoi en commission. Deuxièmement, vous faites sans arrêt référence à la situation actuelle. Vous savez très bien qu'une dynamique existera avec ce projet de loi. Je peux vous donner un exemple. Lorsque la France, en 1988, a adopté le RMI, cela coûtait 2 ou 3 milliards de francs français. En 1994, ce sera 19 milliards. (Applaudissements sur les bancs libéraux, sifflets dans la tribune du public.)

M. Jean-Pierre Lyon. Heureusement qu'il y a la France pour vous sauver !

M. John Dupraz (R). M. Brunschwig a alerté, depuis quelques jours, le landernau politique avec ce projet de loi et je dois dire que son comportement est particulièrement discourtois vis-à-vis des membres de la commission des affaires sociales, et surtout envers ses collègues députés libéraux, comme si nous n'avions pas pris en compte les problèmes financiers. C'était notre préoccupation numéro un. Vos collègues, notamment féminines, qui sont du reste très élégantes, Monsieur le président, contrairement à ce que vous avez laissé entendre dans une interview... (Rires et applaudissements.) ...ont été particulièrement efficaces et ont convaincu la commission sur certains points et, notamment, sur l'évaluation de la loi après deux ans d'application. Voyez-vous, Monsieur Brunschwig, j'ai l'honneur et le plaisir de connaître l'une de vos collègues, Mme Mottet, plus que d'autres, puisqu'elle habite près de chez moi. Nous habitons la même région...

Des voix. Aaah !

M. John Dupraz. ...elle est fille de paysanne et moi je suis paysan, nous ne sommes pas nés avec une cuillère dans la bouche comme vous et l'argent nous ne le jetons pas par les fenêtres ! Cette suspicion systématique que vous avez jeté sur les travaux de la commission est très désagréable et je ne l'accepte pas. Dans cette affaire, vous n'êtes que le porteur d'eau ou le mulet d'autres gens !

Aussi, je pense qu'avec toutes les explications qui ont été données par les uns et les autres et le travail sérieux, fouillé même au niveau financier, de la commission, je vous invite à voter ce projet de loi tel qu'il ressort de ses travaux. (Vifs applaudissements de toutes parts.)

Le président. Monsieur Froidevaux, maintenez-vous votre demande de renvoi en commission ?

M. Pierre Froidevaux. Oui, Monsieur le président !

Des voix. Mais non !

Une autre voix. Arrête tes conneries !

M. Claude Blanc (PDC). Sur la demande de renvoi en commission, je demande l'appel nominal. (Appuyé.)

Le président. L'appel nominal a été demandé, nous allons y procéder.

Celles et ceux qui acceptent le renvoi en commission répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.

Ont voté non (62) :

Roger Beer (R)

Dominique Belli (R)

Claude Blanc (DC)

Fabienne Blanc-Kühn (S)

Jacques Boesch (AG)

Anne Briol (E)

Thomas Büchi (R)

Micheline Calmy-Rey (S)

Claire Chalut (AG)

Pierre-Alain Champod (S)

Liliane Charrière Urben (S)

Sylvie Châtelain (S)

Bernard Clerc (AG)

Jean-François Courvoisier (S)

Anita Cuénod (AG)

Hervé Dessimoz (R)

Erica Deuber-Pauli (AG)

Jean-Luc Ducret (DC)

John Dupraz (R)

Marlène Dupraz (AG)

Laurette Dupuis (AG)

Henri Duvillard (DC)

René Ecuyer (AG)

Christian Ferrazino (AG)

Bénédict Fontanet (DC)

Luc Gilly (AG)

Gilles Godinat (AG)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Christian Grobet (AG)

Nelly Guichard (DC)

Elisabeth Häusermann (R)

Dominique Hausser (S)

Sylvie Hottelier (AG)

Claude Howald (L)

Liliane Johner (AG)

Bernard Lescaze (R)

Sylvia Leuenberger (E)

René Longet (S)

Olivier Lorenzini (DC)

Jean-Pierre Lyon (AG)

Pierre Marti (DC)

Gabrielle Maulini-Dreyfus (E)

Liliane Maury Pasquier (S)

Pierre Meyll (AG)

Chaïm Nissim (E)

Danielle Oppliger (AG)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

David Revaclier (R)

Jean-Pierre Rigotti (AG)

Martine Roset (DC)

Françoise Saudan (R)

Andreas Saurer (E)

Christine Sayegh (S)

Philippe Schaller (DC)

Max Schneider (E)

Evelyne Strubin (AG)

Jean-Philippe de Tolédo (R)

Claire Torracinta-Pache (S)

Pierre-François Unger (DC)

Pierre Vanek (AG)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Michèle Wavre (R)

Ont voté oui (23) :

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Claude Basset (L)

Nicolas Brunschwig (L)

Anne Chevalley (L)

Jean-Claude Dessuet (L)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

Michel Ducret (R)

Pierre Froidevaux (R)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Henri Gougler (L)

Janine Hagmann (L)

Michel Halpérin (L)

Yvonne Humbert (L)

René Koechlin (L)

Claude Lacour (L)

Armand Lombard (L)

Alain-Dominique Mauris (L)

Barbara Polla (L)

Olivier Vaucher (L)

Se sont abstenus (3) :

Janine Berberat (L)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Micheline Spoerri (L)

Etaient excusés à la séance (8) :

Fabienne Bugnon (E)

Catherine Fatio (L)

Pierre Kunz (R)

Michèle Mascherpa (L)

Laurent Moutinot (S)

Jean Opériol (DC)

Maria Roth-Bernasconi (S)

Nicolas Von der Weid (L)

Etaient absents au moment du vote (3) :

David Hiler (E)

Jean-Claude Genecand (DC)

Jean Spielmann (AG)

Présidence:

M. Hervé Burdet, président.

Le projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Le titre et le préambule, ainsi que les articles 1 et 2, sont adoptés.

Art. 3

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. J'ai déjà argumenté sur la contradiction qu'il y a à établir, à Genève, deux revenus minimums cantonaux d'aide sociale. Je crois qu'il y a, dans l'esprit d'un certain nombre de députés, l'idée - et cela ressort à travers plusieurs propositions d'amendements que, suivant le montant établi, des gens essaieront de profiter. A mon avis, c'est une mauvaise vision des choses, c'est mal connaître la réalité. Tout projet de loi, n'importe quelle situation économique ou sociale peut entraîner des gens à profiter. Ils constituent, bien heureusement, toujours une minorité. Nous ne faisons pas une loi en fonction de ceux qui profitent, nous faisons une loi en fonction de la population globale concernée.

Les montants indiqués sont vraiment minimaux et je vous recommande de les soutenir. Au cas où vous n'accepteriez pas cette proposition, nous nous réservons la possibilité de revenir plus tard avec un autre amendement.

M. Jean-Pierre Gardiol (L). Nous ne soutiendrons pas l'amendement de M. Clerc pour les raisons suivantes. J'aimerais être convaincu que chacun, dans cette salle, a bien compris ce que représente le revenu minimum cantonal.

En effet, selon la loi actuelle, chacun a bien compris qu'une personne seule touchera 13 812 F par année, que deux personnes toucheront 20 165 F, trois personnes 25 966 F et, enfin, cinq personnes 34 530 F. Mais, ces 34 530 F s'appelant bien des dépenses d'entretien, il faut bien prendre en considération qu'ont déjà été payés par l'Hospice général, le loyer, les assurances-maladie et accidents, les intérêts des dettes et que des éventuelles pensions alimentaires ont été également payées.

Les montants que je viens de vous indiquer sont effectivement des dépenses d'entretien, mais ils peuvent être assimilés à de l'argent de poche. (Vives contestations de la gauche, l'orateur est hué.) Cet argent sert à payer la nourriture... (Chahut, le président intervient.) ...des habits, des vacances... (Brouhaha.). Là où nous sommes pour une fois d'accord avec la commission, c'est que ces montants sont bien suffisants pour subvenir aux besoins de ces personnes, dans une situation qui ne doit être que transitoire.

Le président. Nous sommes en présence d'un amendement figurant à la page 112 du rapport de deuxième majorité de M. Clerc qui dit, je cite :

«Le revenu minimum cantonal d'aide sociale garanti aux chômeurs en fin de droit s'élève à 21 264 F par année s'il s'agit d'une personne célibataire, veuve, divorcée, séparée de corps ou de fait.».

L'alinéa 3 est supprimé. L'alinéa 4 devient l'alinéa 3.

Je pense que M. Clerc sera d'accord que les trois volets de l'amendement soient votés en une fois ?

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. L'amendement ne porte pas seulement sur le montant de base mais également sur l'alinéa 3 de l'article 3, puisque cet alinéa introduit la prise en charge, selon les normes de l'assistance publique, d'allocations ponctuelles telles que les frais de vêtements ou de maladie. Pour moi, il est évident que si vous acceptez le revenu minimum prévu pour les personnes âgées, cet alinéa doit être supprimé.

Cela est d'autant plus nécessaire que l'on réintroduit, par le biais de cet alinéa, un facteur «assistantiel» dans le sens où les gens doivent venir faire une demande, présenter des factures pour justifier qu'ils ont acheté une paire de pantalon, de souliers, etc. Il vaut mieux que les gens aient un revenu global plus élevé, qu'ils le gèrent à leur manière et qu'ils n'aient pas de comptes à rendre à travers des présentations de factures et des demandes de ce type-là. Il est bien évident que l'élévation du montant à 21 264 F implique la suppression de l'alinéa 3.

Mis aux voix, l'amendement de M. Clerc est rejeté.

Le président. Monsieur Clerc, voulez-vous présenter votre deuxième amendement ?

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. Je constate que ce parlement a décidé d'inscrire deux revenus minimums cantonaux d'aide sociale à Genève. Un pour les chômeurs en fin de droit, l'autre pour les personnes âgées. Je persiste à dire que cette situation est anormale. Cependant, je pense en ce moment en priorité aux chômeurs en fin de droit et je vais vous proposer un nouvel amendement consistant à retenir, comme revenu minimum, les montants pour les prestations complémentaires fédérales.

Je rappelle, à ce sujet, que ces prestations fixées par le Parlement fédéral et le Conseil fédéral viennent du principe que les rentes AVS ne constituent pas un montant suffisant pour vivre et qu'il faut combler cette différence par des prestations complémentaires fédérales. Ces normes sont valables pour toute la Suisse, indépendamment des niveaux de vie différents d'un canton à un autre. Il me paraît vraiment constituer un pis-aller par rapport à votre refus de tout à l'heure. Pour aller dans le sens de la logique que j'ai développée en ce qui concerne les aspects «assistantiels» de l'alinéa 3, je proposerai également une modification, c'est-à-dire que les frais de vêtements ne soient pas pris en charge, mais les frais de maladie oui, car, autrement, nous nous trouvons dans une situation pire qu'avec la loi telle qu'elle est actuellement. Je vous demande de bien vouloir accepter le montant de 16 812 F par année qui, je vous le rappelle, est le revenu minimum admis sur le plan fédéral.

Le président. Pour plus de clarté, je vous relis l'amendement de M. Clerc. Il porte sur l'article 3, alinéa 1, qui serait rédigé de la façon suivante :

«Le revenu minimum cantonal d'aide sociale garanti aux chômeurs en fin de droit s'élève à 16 812 F par année s'il s'agit d'une personne célibataire, veuve, divorcée, séparée de corps ou de fait.».

Quant à l'alinéa 3, il serait modifié de la façon suivante :

«Il peut être complété, dans les limites du barème de l'assistance publique, par des allocations ponctuelles destinées à prendre en charge certains frais tels que les frais de maladie.».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Mis aux voix, les articles 3 à 5 sont adoptés.

Art. 6

Le président. C'est à l'article 6 que figure le premier des amendements proposés par MM. Balestra, Brunschwig et Gardiol. Il consiste à supprimer la lettre a) de l'alinéa 1.

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Le président. Nous avons également, à l'article 6, le contre-amendement de M. Bénédict Fontanet portant sur l'alinéa 2, qui dirait :

«Le Conseil d'Etat fixe, par voie réglementaire, les limites du loyer maximum pris en compte.».

L'alinéa 2 devient l'alinéa 3.

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. Excusez-moi, Monsieur le président, je ne comprends pas ! Il y a un amendement libéral sur le loyer et, à mon avis, il faut d'abord voter sur cet amendement et c'est en fonction de celui-ci que nous verrons si nous modifions la lettre b).

M. Bénédict Fontanet (PDC). Mon amendement n'entre en ligne de compte que dans l'hypothèse où l'amendement libéral serait au préalable rejeté, ce d'autant que l'amendement libéral concerne l'article 6, alinéa 1, lettre b), tandis que l'amendement que M. Unger et moi-même vous présentons consiste à rajouter un alinéa 2 à cet article, l'alinéa 2 actuel devenant l'alinéa 3.

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. Il faut regarder les choses en face par rapport à la question du loyer. La proposition de limiter à 600 F pour une personne seule le montant du loyer, à 800 F pour un couple et 200 F par charge de famille, c'est de la provocation quand on connaît le prix des loyers à Genève. Cela veut dire, concrètement, que vous allez obliger des personnes à prendre sur la somme qu'il leur reste pour manger pour payer leur loyer. Je trouve cet amendement inadmissible et vous invite à le rejeter.

Vous avez un peu dans l'esprit, Mesdames et Messieurs les libéraux, que les gens sont, par définition, des «profitards» et que leur seul souci sera de prendre un appartement à 2 000 F pour bénéficier du revenu minimum pour les chômeurs en fin de droit. Ce n'est pas comme ça que les choses se passent dans la vie. Dans la vie, il y a des gens qui se retrouvent, excusez-moi du terme, dans la «merde» et c'est avec la situation qui était la leur auparavant qu'ils arrivent à l'assistance.

Alors, qu'allez-vous faire ? Vous allez dire à ces gens : «Nous n'allons pas prendre en charge le montant de votre loyer et vous vous serrez encore davantage la ceinture», ou encore, dans une famille avec enfants bien insérés dans un quartier : «Vous allez immédiatement déménager !». C'est absurde, surtout si l'on a à l'esprit que l'on vise la réinsertion de ces gens. Je pense qu'il faut aussi laisser une modalité d'application aux personnes chargées, sur le terrain, d'appliquer cette loi. Si des gens payant un haut loyer devaient se trouver dans une telle situation et que celle-ci devait perdurer, ils demanderaient eux-mêmes à changer de logement pour en avoir un autre, meilleur marché. Mais ne mettez pas, au départ, une limitation telle que la plupart des bénéficiaires vont être prétérités. Je vous demande instamment de refuser cet amendement.

M. Jean-Pierre Gardiol (L). M. Clerc prétend que les loyers mentionnés dans notre amendement sont de la provocation. Moi, je lui dirai qu'il devrait se renseigner sur les niveaux des loyers sociaux pratiqués à Genève. (Brouhaha.)

Il y a deux ou trois ans, Monsieur Clerc, nous avons voté dans cette enceinte une loi permettant de cumuler l'aide cantonale à l'aide fédérale. Grâce à cette loi - que vos amis de l'époque avaient d'ailleurs combattue - savez-vous à combien nous avons la possibilité d'arriver au niveau des loyers ? Je peux vous le dire, puisque, dans le fonds de prévoyance que j'ai le plaisir de gérer avec des partenaires sociaux et où tout se passe très bien, nous venons d'acquérir plusieurs immeubles où les quatre-pièces, après l'aide HLM, l'allocation personnalisée si les gens en ont besoin, la première aide fédérale AS I et, enfin, la deuxième aide fédérale, l'AS 2 qu'ils obtiennent s'ils en ont réellement besoin, les quatre-pièces reviennent à 450 F par mois. (Rires et applaudissements sur les bancs de l'Alliance de gauche.)

Je vous montrerai des exemples quand vous voulez et où vous voulez ! En considérant ce qui précède, il m'apparaît important que dans la loi figurent ces limites de loyer. Car si vous prenez le tableau, à la page 98 du PL, et lorsque vous voyez qu'une personne a la possibilité, aujourd'hui, de se faire payer son loyer par l'Hospice général dans une fourchette de 225 F - et jusqu'à certains montants que je ne conteste pas - mais que l'on voit aussi que des personnes célibataires se font payer par l'Hospice général des loyers jusqu'à 1 280 F, pour moi, Monsieur Clerc, c'est un scandale ! Si ces gens en sont là c'est qu'ils sont malheureusement au chômage depuis longtemps, puisque c'est après avoir épuisé leur droit, et il me semble que, pendant ce délai, ils ont aussi la possibilité d'essayer de trouver d'autres solutions plus économiques pour leur loyer sans être rabaissés à un niveau que nous n'accepterions pas non plus.

De ce fait et étant donné que demain cela deviendra un droit, moi, personnellement, si je suis la personne qui habite seule un logement avec un loyer que ce revenu minimum, revenu d'allocation... (L'orateur s'embrouille. Rires et quolibets.) ...je ne vois pas pour quelle raison certains auraient un loyer payé à hauteur de 250 F alors que d'autres le seront à 1 280 F. Si j'avais un loyer à 250 F, je revendiquerais un loyer à 1 200 F. Pourquoi ne pas vivre mieux quand on en a la possibilité ! (Protestations de la gauche.)

M. Bénédict Fontanet (PDC). Je regrette, à propos de cette question de loyer, le ton que prend le débat. Le chômage - et les chômeurs en fin de droit - est un sujet suffisamment grave pour que l'on s'y attache avec un maximum de dignité. S'agissant de ce problème de loyer, l'amendement qui nous est proposé...

M. Jean-Pierre Lyon. Tu parles d'entente !

M. Bénédict Fontanet. Pardon ? Ah, mais écoutez, nous ne sommes pas toujours forcément tous d'accord entre nous et on a le droit d'avoir des avis divergents sur un certain nombre de sujets ! C'est une bonne chose et c'est pour cela, mon cher collègue, que je ne suis pas dans le même parti politique que M. Gardiol. Et puis, un poète dit une fois que de «l'ennui naquît un jour l'uniformité». Ce Grand Conseil, Dieu soit loué, n'est pas l'exemple d'uniformité, ce qui est une bonne chose.

Une voix. Le Conseil d'Etat ? (Rires.)

M. Bénédict Fontanet. Le Conseil d'Etat n'est pas uniforme, il est homogène, c'est différent ! (Eclats de rires.) Sur cette affaire de loyer, nous n'acceptons pas cet amendement, car c'est un retour en arrière par rapport à la loi existant actuellement, soit une limitation, une réduction des prestations offertes actuellement par l'Etat de Genève et nous ne sommes pas d'accord avec ce principe. Nous souhaitons, dans la nouvelle loi, quand bien même elle consacre un droit différent par rapport à ce qui existait avant, que les prestations sociales soient maintenues à un niveau équivalent. Nous vous invitons donc à rejeter cet amendement.

M. Pierre-Alain Champod (S). Je suis extrêmement surpris d'entendre la manière dont M. Gardiol présente les choses. Comme l'a déjà dit M. Clerc tout à l'heure, les gens qui arrivent au chômage avaient un appartement, et quand ils sont au chômage, ils sont toujours dans le même appartement. Quant à dire qu'une personne au chômage va vite changer d'appartement ou prendre un loyer plus cher pour pouvoir toucher plus quand elle sera en fin de droit, j'aimerais que M. Gardiol me donne la liste des régies acceptant de louer des appartements plus chers à quelqu'un au chômage ! (Rires et applaudissements de la gauche.)

J'accepte volontiers que vous me montriez cette liste. Je rencontre quotidiennement des chômeurs en fin de droit dans mon travail et, quand ils recherchent un appartement meilleur marché que celui qu'ils ont, ils vont dans les régies où ils trouvent un appartement un peu meilleur marché et on leur dit non. Car la consigne de la régie, c'est de ne pas louer d'appartement aux personnes au chômage. C'est ça la pratique des régies aujourd'hui !

Une voix de gauche. Ah, ben bravo !

M. Jean-Pierre Gardiol. L'Hospice général donne la garantie.

M. Pierre-Alain Champod. Même quand l'Hospice général donne des garanties, les régies sont extrêmement réticentes. Vous donniez l'exemple de la construction du fonds de prévoyance où, grâce au cumul des aides, vous êtes arrivés à des loyers extrêmement bon marché, ce qui est très bien, on a toujours prôné l'aide à la pierre contrairement à d'autres dans ce parlement. J'espère vivement, vu les loyers très bas des appartements que vous allez mettre incessamment sur le marché, qu'il y aura, parmi les locataires, des gens qui seront au chômage, et en fin de droit.

M. Christian Grobet (AdG). Je dois dire que l'exemple donné par M. Gardiol pour en faire une sorte de référence pour les loyers de Genève est véritablement indécent.

Actuellement, il n'y a pas de logement à 450 F par mois, du reste, je pense que vous avez dû confondre le loyer de l'appartement avec le loyer à la pièce, qui sont deux choses complètement différentes.

M. Jean-Pierre Gardiol. Avec le garage !

M. Christian Grobet. Ah, il y avait le garage ! Pardon ! En tout cas, je vous défie de trouver, dans les annonces publiées par les régies de la place, des appartements à 450 F par mois, ça n'existe tout simplement pas ! Même si nous avions la chance d'en trouver, ce ne serait que des exceptions et vous le savez fort bien, les loyers de certains chômeurs peuvent être extrêmement élevés par rapport à la norme que vous venez d'indiquer. En matière de loyers à Genève, il y a une très grande diversité, c'est dire qu'il n'est pas possible, si l'on veut avoir un minimum d'équité dans ce domaine, de fixer des barèmes aussi bas que ceux que vous proposez.

M. Christian Ferrazino (AdG). Monsieur le président, vous regrettiez récemment, dans un article de presse, que vos collègues députés libéraux étaient peu distingués - c'est ce que j'avais cru comprendre - mais je n'avais pas compris qu'ils l'étaient peu dans les démonstrations...

Le président. C'est pas ce que j'ai dit et ce n'est pas le sujet !

M. Christian Ferrazino. ...qu'ils faisaient quand ils intervenaient au Grand Conseil. Effectivement, Monsieur Gardiol, les exemples que vous donnez sont inexistants, ou alors ils n'existent que dans votre tête ! Comme l'a rappelé Christian Grobet, ne nous faites pas rire avec des loyers à 450 F par mois, vous avez précisément confondu, Monsieur Gardiol, la notion du prix à la pièce avec le prix mensuel du loyer.

Mais, Monsieur Gardiol, que vous insultiez les chômeurs comme vous l'avez fait avec votre prise de position sur ce projet de loi est déjà inacceptable, mais que vous insultiez plus largement tous les locataires en faisant croire que les loyers à Genève sont si bas que, finalement, aucune aide ne devrait intervenir, c'est inadmissible ! Je vous rappelle simplement vos propos et ceux de votre groupe, qui ne cesse dans cette enceinte de vouloir développer l'aide personnalisée. Vous savez qu'aujourd'hui elle s'élève à plus de 17 millions et qu'elle n'est pas suffisante pour aider les locataires à faire face au paiement de leur loyer parce que, précisément, ceux-ci sont trop élevés à Genève.

Monsieur Gardiol, puisque manifestement vous avez des connaissances très relatives en la matière, je vous donnerai tout à l'heure, à l'issue de cette séance, un document que je pensais que vous aviez au moins pris soin de consulter, qui est le niveau des loyers à Genève, établi par l'office cantonal de la statistique. Avant d'affirmer des contrevérités, il serait peut-être bon de vous renseigner, ce d'autant plus que ces documents sont facilement accessibles et, en général, comme député vous les recevez même directement. La prochaine fois, ouvrez votre enveloppe quand vous recevrez quelque chose de l'office cantonal de la statistique et vous y verrez que le loyer moyen d'un appartement de quatre pièces à Genève, dans un immeuble construit entre 1971 et 1975, c'est-à-dire des immeubles fréquents à Genève, est de 1 311 F. C'est dire que de nombreux loyers sont plus chers que le chiffre que je viens d'articuler. Par conséquent, je ne peux que vous inviter à retirer votre amendement, ou alors à le modifier en tenant compte maintenant des chiffres que vous ne connaissiez pas !

Si vous preniez les loyers moyens et que vous faisiez en sorte que ces loyers soient bloqués pour des gens qui se trouveraient dans une situation nécessitant précisément l'allocation d'un revenu minimum, alors là, nous pourrions vous suivre. Mais soyez cohérent, soit vous modifiez cet amendement dans ce sens-là, en tenant compte du chiffre des loyers moyens, soit vous le retirez parce que c'est une pure provocation.

M. René Ecuyer (AdG). Je voudrais souligner l'état d'esprit de M. Gardiol. Ce qu'il propose est contraire à la loi que nous votons, puisque nous essayons de retirer les gens de l'assistance publique pour leur donner droit à un revenu. Or, en fixant un plafond à 600 F, on va proposer à ces gens d'aller demander des allocations pour compléter le loyer qu'ils paient. Encore une fois, on va tendre la main pour obtenir quelque chose.

Ce qu'il y a d'indécent, c'est qu'on laisse 34 F par jour à quelqu'un pour prendre trois repas, pour s'habiller, pour ses soins personnels. Ça fait moins de 10 F par repas et on va encore retirer là-dessus des sommes de 10 ou 15 F suivant le montant du loyer que la personne a à payer. En entendant parler M. Gardiol, je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il s'agit d'un noble distribuant le pain aux pauvres, et cela m'est insupportable. Je demande à l'assemblée de rejeter cet amendement, ou qu'il le retire, ce serait encore mieux.

M. Michel Balestra (L). Tout d'abord, je m'adresserai à mes collègues de l'Entente en leur disant que j'ai là, sous les yeux, le projet radical qui avait été présenté pour la campagne électorale et qui nous propose, sous le titre «L'allocation sociale universelle, un objectif déclaré à remplacer toutes les prestations sociales actuelles pour les transformer en un revenu minimum garanti.». La présentation de cette allocation sociale universelle prévoit, d'après nos collègues radicaux, dans son alinéa 2, je cite :

«...que dans les circonstances économiques que nous connaissons, ce revenu minimum garanti doit, par la rationalisation administrative qu'il permet, engendrer des économies et pas de dépenses nouvelles.».

La majorité actuelle sera jugée sur sa capacité de maintenir les prestations sociales acquises, comme elle l'a promis, mais surtout sur sa capacité à retrouver l'équilibre des finances publiques. Et comment voulez-vous atteindre cet objectif en votant de nouvelles dépenses que vous refusez de maîtriser ? (Protestations.)

Je vous rappelle que le budget de M. Segond est, pour 1995, en augmentation de 5,6%, c'est-à-dire de 80 millions de plus qu'en 1994. Et, Mesdames et Messieurs Ferrazino, Champod, Grobet, Ecuyer et compagnie, ce budget de plus de 80 millions, nous, nous le voterons, c'est-à-dire que ce qui sera distribué le sera par des gens courageux qui auront voté le budget, alors que l'on vous attend toujours pour voter les budgets. Comme, Mesdames et Messieurs de l'Entente, vous les voterez avec nous et que vous serez responsables de l'équilibre financier de l'Etat en 1996, je vous demande d'être raisonnables et de voter ces amendements.

M. Jean-Pierre Gardiol (L). Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, et loin de moi l'idée d'insulter les chômeurs, rassurez-vous ! Par contre, Monsieur Ferrazino, depuis que l'aide fédérale cumulée à l'aide cantonale existe, les loyers que je vous ai indiqués vont venir sur le marché, et il sera possible d'occuper ces appartements avec, par exemple, des gens bénéficiant du RMAS. Donc, ne dites pas que c'est une fiction et que ce n'est pas la réalité, vous le savez très bien.

Le président. Nous allons voter sur l'amendement de MM. Brunschwig, Balestra et Gardiol modifiant l'article 6, alinéa 1, lettre b) comme suit :

«Le loyer ainsi que les frais d'entretien de bâtiment et les intérêts hypothécaires jusqu'à concurrence du rendement brut de l'immeuble; mais au maximum de 600 F pour une personne seule, 800 F pour un couple, montant auquel on ajoute 200 F par charge de famille.».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Le président. Nous passons à ce que M. Fontanet a décrit comme un contre-amendement portant également sur l'article 6, alinéa 2.

«Le Conseil d'Etat fixe, par voie réglementaire, les limites du loyer maximum pris en compte.».

L'alinéa 2 devient l'alinéa 3.

M. Pierre-François Unger (PDC). Nous pensons qu'il est nécessaire qu'il y ait une limite vers le haut. Nous ne pouvions pas entrer en matière, Monsieur Balestra, sur la méticulosité avec laquelle vous aviez présenté les chiffres dans votre amendement. Mais le pire, au fond, qui pourrait arriver à ce projet est que l'on ait des exemples caricaturaux à donner lors de son évaluation dans deux ans. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons d'accepter cet amendement qui permet au Conseil d'Etat de fixer, par voie réglementaire, c'est-à-dire par voie souple, un loyer maximum pris en compte.

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 6 ainsi amendé est adopté.

Art. 7

Le président. Nous avons, à cet article, un amendement proposé par MM. Brunschwig, Balestra et Gardiol portant sur l'alinéa 4 modifié.

«Est assimilée à la fortune de l'intéressé celle de son conjoint non séparé de corps ni de fait et celle des enfants à charge, ainsi que celle des personnes faisant ménage commun avec lui.».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Mis aux voix, les articles 7 à 10 sont adoptés.

Art. 11

Le président. A l'article 11, nous avons un amendement de MM. Balestra, Brunschwig et Gardiol modifiant l'alinéa 3 comme suit :

«L'Hospice général peut suspendre ou supprimer le versement de la prestation lorsque le bénéficiaire refuse de fournir ou tarde à remettre les renseignements demandés, ou exécute une activité lucrative non déclarée.».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Mis aux voix, l'article 11 est adopté.

Mis aux voix, les articles 12 à 20 sont adoptés.

Art. 21

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. C'est simplement une correction de forme. A l'alinéa 2, il est dit :

«Tout paiement fait au mépris de cette défense n'est pas opposable à l'office et rend ceux qui l'ont fait solidairement responsables des sommes dues.».

Il faut lire : «...n'est pas opposable à l'hospice et rend...»

Mis aux voix, les articles 21 à 30 sont adoptés.

Art. 31

Le président. Nous sommes en présence d'un amendement de MM. Balestra, Brunschwig et Gardiol visant, dans un premier temps, à modifier la lettre d) comme suit :

«de deux représentants des services sociaux privés.».

La deuxième partie de cet amendement consiste à ajouter une lettre e) (nouvelle) dont le texte serait le suivant :

«de deux représentants des employeurs désignés par l'UAPG et de deux représentants des travailleurs désignés par la CGAS.».

M. Jean-Pierre Gardiol (L). Cet amendement concerne l'allocation d'insertion. Oui, Monsieur Ecuyer ! Je regrette profondément qu'il ne soit pas possible de confier la gestion et l'attribution des allocations prévues par ce projet de loi à un organe quadripartite englobant les partenaires sociaux, l'Etat et l'Hospice général. C'eût été une façon élégante et efficace d'introduire un dispositif en tenant compte des réalités économiques et sociales de notre canton.

Je vous encourage quand même, pour l'allocation d'insertion, à bien vouloir voter cet amendement.

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. J'entends à longueur d'année dire, et souvent avec raison, qu'il faut alléger les structures, ne pas faire de super-commissions, etc. Je rappelle le but de cette disposition qui est de trancher sur des demandes d'allocation. Personnellement, ça m'est égal si d'autres membres nous rejoignent, mais d'abord, pourquoi deux ? Cela fait passer le nombre de membres de sept à onze. On gonfle les choses pour une activité qui, à mon avis, n'est pas fondamentale.

D'autre part, je voudrais savoir si vous avez consulté la Communauté genevoise d'action syndicale, que vous citez, pour savoir si elle est d'accord de siéger dans cette commission, parce que vous avez sans doute consulté l'UAPG, mais je ne pense pas...

Une voix libérale. Y sont d'accord !

M. Bernard Clerc, rapporteur de la deuxième majorité. Alors, vous les mettez d'office ? Vous les avez consultés ?

M. Jean-Pierre Gardiol. Ouais !

M. Bernard Clerc, rapporteur de la deuxième majorité. D'accord. Il faut le savoir.

M. Pierre-Alain Champod (S). Monsieur le président, vous avez signalé un amendement pour cet article 31, mais il y en a un deuxième qui a été déposé auprès de vous.

Le président. On y viendra !

M. Pierre-Alain Champod. Comme il concerne le même article, les mêmes lettres, je pense qu'il est important de les faire voter en même temps.

Le président. Si nous parlons de la même chose, l'amendement est signé par Mmes Maulini-Dreyfus, Strubin et vous-même. Il consiste à ajouter une lettre e). Il est donc subséquent au premier amendement sur lequel nous sommes en train de discuter.

M. Pierre-Alain Champod. L'amendement libéral propose de modifier la lettre d) et d'ajouter une lettre e). L'amendement que nous proposons ne modifie pas la lettre d). Nous laissons donc les quatre représentants des services sociaux dans cette commission et acceptons l'idée d'y introduire les partenaires sociaux, mais à raison d'un représentant de la CGAS et un représentant de l'UAPG. Nous ne sommes, par contre, pas d'accord de modifier le reste de la commission pour plusieurs raisons.

Nous avons passé un certain nombre de séances de commission à discuter de la composition de cette commission. Nous nous sommes essentiellement basés sur l'expérience faite dans le cadre de l'action «Solidarité 700ème». Je rappelle qu'à cette occasion 1,2 million de francs ont été distribués à des personnes ayant présenté des projets d'insertion ou de réinsertion par une commission composée exclusivement de représentants de services sociaux. Nous avons souhaité introduire dans cette commission, en plus des représentants des services sociaux, un représentant de la formation professionnelle et un autre de l'office de l'emploi parce qu'il nous semblait utile d'avoir aussi ces avis. Pour le reste, nous avons pensé que la commission telle qu'elle avait fonctionné pour le 700ème avait bien fonctionné, raison pour laquelle, comme nous avions fait une expérience, on a voulu reprendre ce qui avait été expérimenté pour le mettre dans cette loi.

Nous ne sommes pas opposés à inclure les partenaires sociaux, mais à raison d'un représentant pour les milieux patronaux et un représentant pour les milieux des syndicats ouvriers.

Le président. Pour être tout à fait clair, nous allons voter sur la modification de la lettre d) et ensuite nous aborderons la lettre e).

La proposition d'amendement de MM. Balestra, Brunschwig et Gardiol est mise aux voix.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Cet amendement est adopté par 44 oui contre 42 non.

Le président. Nous poursuivons avec la première proposition pour la lettre e) émanant de MM. Balestra, Brunschwig et Gardiol. Je vous rappelle le libellé de cet amendement :

«de deux représentants des employeurs désignés par l'UAPG et de deux représentants des travailleurs désignés par la CGAS.».

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Le président. Est-ce que je peux déduire que l'amendement Champod, Maulini-Dreyfus et Strubin est retiré ?

Des voix. Non, non !

Le président. Je vais donc mettre au voix cet amendement dont le texte est le suivant :

«Un représentant des employeurs désigné par l'UAPG et un représentant des travailleurs désigné par la CGAS.».

Cet amendement est rejeté.

Mis aux voix, l'article 31 ainsi amendé, est adopté.

Mis aux voix, les articles 32 à 42 sont adoptés.

Ce projet est adopté en deuxième débat.

M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Au moment où le projet de loi 6629 sur le revenu minimum est ressorti de la commission des affaires sociales avec un avis unanime, le Conseil d'Etat, tirant les conséquences prévisibles de l'introduction du nouveau système, a déposé un projet de loi abrogeant la loi sur le fonds cantonal sur le chômage sur lequel vous êtes entrés en matière. Il est actuellement à l'examen auprès de la commission des affaires sociales qui va terminer ses auditions prochainement et se déterminera avant la fin de l'année.

Le Conseil d'Etat vous demandera donc de voter le troisième débat au moment où les deux projets auront été adoptés.

Le président. Sur le plan purement formel, il me semble que le troisième débat devrait porter également sur la motion 684-A, puisque le projet 6629 concrétise les objectifs de cette motion.

A cette heure-ci, il y a plusieurs solutions. Ou bien on prend son courage à deux mains et on finit l'ordre du jour sans interruption, ou bien on fait une pause.

Mise aux voix, la proposition de poursuivre la séance est adoptée.

P 926-A
13. Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition «Marbury v. Madison ou la République des lenteurs». ( -)P926
Rapport de Mme Michèle Wavre (R), commission des pétitions

Le Grand Conseil a reçu, le 12 février 1992, la pétition suivante:

PÉTITION

Marbury v. Madison ou la République des lenteurs

En date du 28 novembre 1991, le Grand Conseil élit le pétitionnaire soussigné à la charge de membre titulaire de la commission cantonale de recours en matière d'assurance-vieillesse et survivants, d'invalidité et d'allocations pour perte de gain.

A ce jour, le pétitionnaire n'a pu exécuter la tâche qui lui avait été confiée par le Grand Conseil, en raison de l'attitude de l'administration.

En effet, celle-ci fait obstacle à ce que le pétitionnaire exerce ses fonctions en invoquant le fait qu'il doit au préalable être «nommé» par arrêté du Conseil d'Etat.

Il est à relever que ce fait a été confirmé au pétitionnaire par un haut fonctionnaire il y a déjà quelques semaines de cela. Ledit haut fonctionnaire précisa que la procédure était tout à fait habituelle et que l'administration était en phase de «concertation», cette concertation devant conduire à une prochaine «finalisation».

Il est évident que l'attitude de l'administration est contraire à notre constitution. Ce au moins sous trois de ses aspects. Premièrement, cette attitude conduit l'administration à empiéter sur les compétences du Grand Conseil. Deuxièmement, elle est contraire au principe de séparation des pouvoirs. Troisièmement, elle est constitutive d'un déni de justice formel.

Il convient de remarquer que cette situation est rendue possible par le rapport de subordination hiérarchique existant entre le personnel du greffe de la commission et l'administration centrale de l'exécutif.

Par ces motifs, le pétitionnaire

invite le Conseil d'Etat

1. à veiller que, dans le cas d'espèce, l'administration ne fasse plus obstacle à la volonté qu'il a exprimée;

2. à veiller qu'une telle situation ne se produise plus, en étudiant, notamment, l'opportunité et les modalités d'un détachement du personnel administratif des commissions et des tribunaux.

N.B. : 1 signature

 Olivier Dobler

La commission des pétitions, dans son ancienne composition, a accueilli le pétitionnaire, M. Olivier Dobler, et a obtenu de lui toutes les précisions nécessaires quant à sa requête. Il demandait à être intégré de fait à la commission cantonale de recours en matière d'assurance-vieillesse et survivants, d'invalidité et d'allocations pour perte de gain à laquelle il avait été élu tacitement par le Grand Conseil.

A la législature suivante, la commission, dans sa nouvelle composition, a constaté que cette pétition était devenue sans objet, en raison du renouvellement complet des membres élus par le Grand Conseil à la commission cantonale de recours en matière d'AVS (élection du 27 janvier 1994). M. Dobler n'a pas été réélu ce jour-là.

La commission des pétitions vous recommande donc, Mesdames et Messieurs les députés, de classer cette pétition à l'unanimité des membres présents.

Mises aux voix, les conclusions de la commission (classement de la pétition) sont adoptées.  

P 1012-A
14. a) Rapport de la commission de la santé chargée d'étudier la pétition concernant l'hôpital cantonal. ( -)P1012
Rapport de Mme Barbara Polla (L), commission de la santé
M 949
b) Proposition de motion de Mmes et MM. Barbara Polla, Liliane Johner, Janine Hagmann, Claude Howald, Micheline Spoerri, Liliane Maury Pasquier, Danielle Oppliger, Jean-Philippe de Tolédo, Pierre Froidevaux, Gilles Godinat, Henri Gougler, Dominique Hausser, Andreas Saurer et Philippe Schaller sur les erreurs médicales. ( )M949

Rapport de Mme Micheline Spoerri (L), commission de la santé

La commission de la santé s'est réunie le 10 juin et les 2 et 30 septembre 1994 pour examiner la pétition 1012.

PÉTITION

concernant l'hôpital cantonal

Je m'appelle Marianne Lecoultre, j'ai 48 ans et je travaille à temps complet. J'élève seule mes trois enfants âgés respectivement de 16, 13 et 12 ans. Ayant été personnellement victime d'une grave erreur de diagnostic des analystes du service de pathologie de l'hôpital cantonal de Genève, je souhaite attirer votre attention sur les graves conséquences qui peuvent résulter pour l'ensemble de la population genevoise du mauvais fonctionnement d'un tel service.

Des examens médicaux effectués en septembre 1992 ont révélé que j'avais une tumeur ovarienne. J'ai donc subi très rapidement après cette découverte une opération ablative. Les biopsies et autres analyses des tissus prélevés auxquelles le service de pathologie de l'hôpital cantonal a ensuite procédé ont amené à la conclusion qu'il s'agissait d'un goitre ovarien malin et que mon cas devait être considéré comme un carcinome thyroïdien. La glande thyroïdienne étant donc touchée, j'ai été soumise à un bilan thyroïdien, puis j'ai été informée que je devais subir l'ablation totale de la thyroïde. Dans un cas de cancer, l'opération est une question de survie. J'ai par conséquent accepté l'opération.

Sans parler des désagréments purement physiques causés par cette opération qui nécessite un véritable égorgement, je suis maintenant condamnée à vie à suivre un traitement médicamenteux pour compenser l'absence de thyroïde. En outre, j'ai vécu pendant un an dans l'angoisse quotidienne de me croire cancéreuse et de risquer une récidive. Jusqu'à ce que je finisse pas apprendre, récemment, que j'avais en fait été victime d'un diagnostic erroné et que je n'avais pas de cancer. L'opération d'ablation de la thyroïde, et ainsi toutes ses désagréables conséquences, avait donc été inutile...

Dans mes recherches pour comprendre ce qui m'était arrivé, il m'est apparu qu'au moment où les analyses avaient été faites, plus personne ne dirigeait vraiment le service de pathologie, après que le département de la prévoyance sociale et de la santé publique eut pris des mesures administratives à l'encontre du chef de service, le Dr Vassilakos. Le fonctionnement normal du service n'était alors plus assuré, mettant ainsi en danger la qualité des diagnostics, comme l'atteste mon cas.

Il semble que je ne sois malheureusement pas la seule victime d'une telle erreur de diagnostic. Et quand bien même je serais la seule, il m'apparaît intolérable que la santé des citoyens soit ainsi mise en danger par des mesures purement administratives.

Je prie par conséquent le Grand Conseil d'examiner avec attention le fonctionnement du département de la prévoyance sociale et de la santé publique, ainsi que celui de l'hôpital cantonal, afin que de semblables risques ne soient plus créés au détriment des citoyens.

N. B.: 1 signature

Mme Mme M. Lecoultre

53, rue des Lattes

1217 Meyrin

1. Historique

a) Concernant Mme Lecoultre:

Mme Marianne Lecoultre, âgée de 49 ans, a subi en automne 1992 une opération ablative pour une tumeur ovarienne. Les analyses médicales subséquentes ont mené à la conclusion qu'il s'agissait d'un cancer d'origine thyroïdienne et Mme Lecoultre se soumet dès lors à une ablation totale de la thyroïde. Il apparaîtra par la suite que Mme Lecoultre a été victime d'une erreur diagnostique dont elle n'a, de plus, pas été informée dans les meilleurs délais. Tant l'erreur diagnostique que le manque d'information adéquate paraissent avoir été en rapport avec des problèmes d'organisation au sein du département de pathologie.

b) Concernant la division de pathologie gynéco-obstétricale

Avant 1991, le centre de cytologie et de dépistage du cancer, l'école suisse de cytologie et le registre genevois des tumeurs étaient directement rattachés au DPSSP (actuellement DASS). En 1991, le centre de cytologie et de dépistage du cancer et l'école suisse de cytologie ont été rattachés au département de pathologie, dont le centre est devenu une division. Le directeur du centre, le Dr Pierre Vassilakos, a alors été nommé médecin adjoint au département de pathologie.

La responsabilité de la division de pathologie gynéco-obstétricale semblait incomber de facto au Dr Vassilakos, mais sans que cette responsabilité n'ait été clairement précisée ni son cahier des charges détaillé. Cette situation équivoque s'est vue compliquée d'une part par le fait que la direction du département de pathologie a fait l'objet ces dernières années de plusieurs intérims, et d'autre part par le fait que le Dr Vassilakos a fait l'objet d'accusations quant à sa gestion, accusations qui ont mené à un procès. A la fin de ce dernier, il a été conclu que les accusations étaient sans fondement.

La direction du département de pathologie est aujourd'hui encore intérimaire.

2. Auditions

La commission a tout d'abord auditionné Mme Lecoultre. Mme Lecoultre a exposé ses problèmes avec une dignité qui a soulevé l'admiration de la commission. Elle n'a soumis à la commission aucune revendication personnelle mais a exposé son souci que la prise en charge de tous les patients ne soit pas mise en cause par des problèmes d'ordre administratif internes à l'Hôpital cantonal.

Les Drs Beeguer et Voegeli ont ensuite exposé à la commission un certain nombre de questions concernant l'organisation de la pathologie en rapport avec la façon dont se sont déroulés les événements concernant Mme Lecoultre.

Ces questions, résumées ci-dessous, sont au nombre de six:

1. Une ou des études concernant les avantages et les inconvénients du rattachement du centre de cytologie et de dépistage du cancer au département de pathologie ont-elles été effectuées, et si oui, quels en ont été les résultats?

2. La capacité du département de pathologie d'absorber le centre de cytologie et de dépistage du cancer a-t-elle été vérifiée, ceci en tenant compte des difficultés internes du susdit département?

3. Quelles sont les mesures qui ont été prises pour lever l'ambiguïté concernant la responsabilité du centre de cytologie et de dépistage du cancer et pour assurer le meilleur contrôle de qualité possible?

4. Comment expliquer les accusations dont a fait l'objet le Dr Vassilakos, et quelles en sont les personnes responsables?

5. Comment expliquer que la direction du DASS se soit exprimée dans les médias à ce sujet avant chose jugée?

6. Qu'est-ce qui a motivé le fait que Mme Lecoultre n'ait pas été informée dans les meilleurs délais dès que le corps médical s'est rendu compte de l'erreur dont elle avait fait l'objet?

3. Discussions de la commission

La commission retient dans son ensemble que si l'erreur médicale en tant que telle ne peut être toujours évitée, par contre l'information concernant une telle erreur doit pouvoir se faire très rapidement. Plusieurs commissaires insistent sur la responsabilité des médecins concernés à transmettre à leurs patients une telle information dans les meilleurs délais et dans les meilleures conditions. Tout problème administratif qui pourrait rendre une telle information difficile devrait immédiatement trouver une solution.

Il semble par ailleurs à l'ensemble de la commission que les problèmes administratifs auxquels se trouve confronté le département de pathologie débordent le cadre du travail de la commission et du contexte de la pétition 1012. En particulier, la commission estime qu'il n'est pas de son ressort de revenir sur les rapports entre le Dr Vassilakos, l'HCUG et le DASS (questions 4 et 5 ci-dessus) puisqu'un jugement a été prononcé. Elle estime également qu'il n'est pas de son ressort de pratiquer ni de mettre en route une enquête sur la situation actuelle du département de pathologie.

La commission de la santé propose dès lors, à l'unanimité des membres présents,

- d'une part, le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil, à titre de renseignement,

- et, d'autre part, une motion adressée au Conseil d'Etat.

Débat

Mme Micheline Spoerri (L), rapporteuse ad interim. Je souhaite simplement souligner à quel point la commission de la santé, à l'unanimité, a été sensible aux déclarations et à la dignité de Mme Lecoultre. Elle vous engage à adopter la proposition de motion figurant dans le rapport.

P 1012-A

Mises aux voix, les conclusions de la commission de la santé (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.

M 949

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

MOTION

sur les erreurs médicales

LE GRAND CONSEIL,

considérant:

- que les erreurs médicales peuvent être favorisées lorsque les responsabilités médicales ne sont pas clairement définies;

- qu'il est impératif que les patients soient adéquatement informés de toute erreur médicale dont ils auraient été victimes,

invite le Conseil d'Etat

1) à ce que le Grand Conseil soit informé sur la situation actuelle de l'organigramme des responsabilités du secteur clinique du département de pathologie et en particulier en ce qui concerne la cytologie;

2) à ce que les responsabilités hiérarchiques dans ce secteur clinique du département de pathologie, et en particulier en ce qui concerne la cytologie, soient clairement explicitées; et

3) à ce qu'il soit mis en oeuvre toute mesure adéquate permettant de s'assurer que tout médecin concerné informe ses patients d'éventuelles erreurs médicales dont ces derniers auraient été victimes, ceci dans les meilleurs délais et dans les meilleures conditions.

 

P 1045-A
15. Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : «Lettre ouverte du personnel des EPM au Conseil d'Etat et au Grand Conseil». ( -)P1045
Rapport de Mme Janine Hagmann (L), commission des pétitions

Déposée sous forme de pétition et munie de 1085 signatures, la lettre ouverte ci-dessous est parvenue au Grand Conseil le 13 septembre 1994.

Lettre ouverte du personnel des EPMau Conseil d'Etat et au Grand Conseil

Monsieur le président,

Madame la conseillère, Messieurs les conseillers,

Mesdames et Messieurs les députés-es,

Les signataires, membres du personnel des établissements publics médicaux genevois, vous demandent par la présente d'annuler la décision de fermeture de la Clinique genevoise de Montana et de retirer le licenciement des 84 collègues.

Nous sommes bien placés pour mesurer les implications sur le plan des prestations à la population, de la décision de fermeture précipitée de la Clinique genevoise de Montana.

La clinique accueille des patients de médecine interne générale et de réadaptation orthopédique, neurologique et cardiaque. Egalement, elle assure la suite des traitements de patients atteints d'affections psycho-somatiques et de maladies de la dépendance. Près de 50% des malades proviennent de l'HCUG, les autres étant référés par les médecins praticiens genevois. De 1980 à 1993 le nombre de patients admis par année a pratiquement doublé (520 à 1000). En revanche, la durée moyenne de séjour est passée de 45 à 24 jours.

La qualité des équipements, la compétence et la disponibilité du personnel, le cadre naturel exceptionnel du site, font de la Clinique genevoise un endroit de choix pour réussir des convalescences souvent difficiles et pour pallier la souffrance liée à des maladies chroniques ou évolutives. La surprise indignée face à la décision de fermeture manifestée par de nombreux patients anciens et actuels, par des médecins et soignants qui y ont exercé des responsabilités et par un grand nombre de simples citoyens, témoigne de l'attachement des Genevois à des prestations de santé irremplaçables et répondant à des besoins réels.

Nous sommes particulièrement indigné-es face à l'usage désinvolte que le Conseil d'Etat fait des notions de déficit et du taux d'occupation des lits, mettant par là en doute les performances de l'établissement.

Il parle de déficit d'exploitation de la clinique alors qu'il faut parler de subvention de fonctionnement respectant les dispositions de la constitution genevoise.

Certains insistent sur le taux d'occupation de la clinique - 72% - mais oublient de dire que le coût moyen de la journée y est le plus bas de tous les EPM (383 F en moyenne 1994 contre environ 1000 F à l'HCUG), que la part de subvention de l'Etat représente seulement le 55% du budget (taux le plus bas de tous les EPM) et ce pour des prestations hautement appréciées des malades et des médecins genevois.

En plus, la décision de fermeture bafoue les principes les plus élémentaires de la concertation avec les syndicats, tant prônée par le président du département de l'action sociale et de la santé. Elle ignore les conclusions des rapports paritaires «Prestations et effectifs» et anticipe les résultats du rapport d'expertise sur le dispositif sanitaire du canton que le chef du DASS a demandé au professeur Gilliand.

Enfin, le licenciement de 84 de nos collègues assorti du leurre d'un hypothétique reclassement dans les EPM genevois (à 200 km de leur lieu de résidence!), constitue une utilisation abusive de l'article 24 de la loi B 5,05; une violation notoire de l'accord passé le 6 avril 1993 entre le Conseil d'Etat et le Cartel intersyndical de la fonction publique ainsi que de la loi sur les établissements publics médicaux (K 2,1), qui établit que seule la commission administrative est compétente pour engager, nommer ou licencier le personnel. En outre, le Conseil d'Etat a empiété sur les prérogatives du Grand Conseil, qui est seul compétent pour modifier les lois et, partant, décider de la fermeture d'un établissement hospitalier.

Pour conclure, nous réaffirmons qu'à nos yeux cette décision est une mesure de démantèlement social, qui semble désormais la principale stratégie du Conseil d'Etat face à la crise des finances publiques.

Ainsi, défendre Montana, ses prestations et son personnel, est pour nous, personnel des EPM, non seulement une action de solidarité indispensable mais aussi un acte de défense de nos propres postes de travail et des prestations nécessaires en matière de santé publique.

Pour toutes ces raisons, les soussigné-es - employés-es des EPM - demandent au Conseil d'Etat et au Grand Conseil d'annuler la décision de fermeture de la Clinique genevoise de Montana et de retirer le licenciement des 84 collègues.

Décision de la commission

La commission a fait les constats suivants:

 d'une part, l'objet de cette pétition a été longuement débattu lors de la séance du Grand Conseil du 15 septembre 1994;

 d'autre part, le projet de loi 7148 sur la fermeture de la clinique genevoise de Montana a été accepté par le Grand Conseil par un vote de 48 oui, 42 non et 1 abstention;

 enfin, le lancement d'un référendum contre cette décision a été annoncé et permettra, s'il aboutit , au peuple de trancher.

En conséquence, la commission, estimant que le sujet est pour l'instant épuisé, vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, par 7 voix pour (2 dc, 2 rad, 3 lib), 2 voix contre (adg) et 2 abstentions (soc), de classer cette pétition.

Mises aux voix, les conclusions de la commission (classement de la pétition) sont adoptées.  

RD 227
16. Rapport du Conseil d'Etat communiquant au Grand Conseil le rapport quadriennal (1989 - 1993) de la commission mixte en matière de toxicomanie. ( )RD227

1. Par rapport à d'autres cantons, la politique genevoise en matière de toxicomanie présente, depuis plus de 15 ans, deux caractéristiques essentielles:

a) d'une part, il n'y a jamais eu de polémique sérieuse ou d'affrontement politique à propos d'un sujet aussi douloureux;

b) d'autre part, l'action conduite repose sur une approche convergente et intégrée dans différentes fonctions de l'Etat (prévention, action thérapeutique, action sociale, répression).

2. De manière générale, cette politique peut se résumer en 4 grands principes:

a) informer de la façon la plus adéquate pour prévenir la toxicomanie;

b) soigner dès que possible avant des dégâts irréversibles;

c) tout entreprendre en vue d'une réinsertion sociale réussie;

d) réprimer quand il le faut, notamment en utilisant les possibilités données à l'autorité judiciaire par la législation fédérale et par la législation cantonale.

3. Sous l'autorité du Conseil d'Etat, cette politique est mise en oeuvre à partir de la commission mixte en matière de toxicomanies (voir règlement K 1 27) qui réunit:

a) les partenaires publics (département de l'instruction publique, département de l'action sociale et de la santé, département de justice et police et des transports, pouvoir judiciaire);

b) les partenaires privés (médecins, pharmaciens, partenaires sociaux, associations privées).

4. Présidée par le Dr Gérard Eichenberger, cette commission qui dépend administrativement du département de l'action sociale et de la santé a pour mission, selon l'article 2 du règlement K 1 27:

a) d'élaborer à l'intention du Conseil d'Etat des projets concernant la politique gouvernementale en rapport avec des problèmes de dépendance à l'égard des stupéfiants, de l'alcool et du tabac ou de tout autre produit susceptible d'engendrer la dépendance;

b) de concrétiser et mettre en oeuvre, après leur approbation, les dispositions arrêtées par le Conseil d'Etat dans le domaine de la prévention, de l'action thérapeutique et de la réinsertion sociale;

c) d'émettre des préavis à l'intention du Conseil d'Etat, à propos de toute forme de demande d'intervention de l'Etat au chapitre de projets touchant le domaine des dépendances.

5. Vous trouverez, en annexe, le rapport quadriennal (1989-1993) de la commission mixte en matière de toxicomanies, qui comporte:

a) le rappel historique;

b) un bilan de la législature 1989-1993;

c) des perspectives d'avenir,

 ainsi qu'un document «Prévention des toxicodépendances auprès des jeunes» établi par le service de santé de la jeunesse.

Annexes:   rapport du Dr G. Eichenberger, président de la commission mixte en matière de toxicomanie (période 1989-1993);

   prévention des toxicodépendances auprès des jeunes.

M. Chaïm Nissim (Ve). Un seul mot avant que ce rapport ne soit renvoyé en commission. Je l'ai trouvé absolument superbe et je remercie le Conseil d'Etat de l'avoir écrit.

Le président. Avez-vous formulé une demande de renvoi en commission ?

M. Chaïm Nissim. Oui.

M. Andreas Saurer (Ve). Je demande le renvoi de ce rapport à la commission des affaires sociales.

Mise aux voix, la proposition de renvoi de ce rapport divers à la commission des affaires sociales est adoptée.

PL 7129
17. a) Projet de loi du Conseil d'Etat instituant des mesures d'encouragement aux départs anticipés (B 5 16). ( )PL7129
PL 7147
b) Projet de loi du Conseil d'Etat sur le blocage des traitements et de certaines prestations de l'Etat (B 5 7,6). ( )PL7147
PL 7156
c) Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la part du droit de vente attribuée au Fonds d'équipement communal et la commune du lieu (réduction temporaire d'un tiers à un quart de la part du Fonds d'équipement communal, limitation à 12 millions de F et suppresion d'intérêts en 1995) (réduction de la moitié à un quart de la part des communes sur les ventes volontaires aux enchères publiques de biens mobiliers) (D 3 6 - B 6 5). ( )PL7156
PL 7159
d) Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur les contributions publiques (réduction de la part des communes sur certains impôts et taxes) (D 3 1). ( )PL7159

(PL 7129)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Champ d'application

Les membres du personnel de l'Etat et des établissements publics, peuvent demander à bénéficier des prestations prévues à l'article 3 de la présente loi pour autant qu'ils ne soient pas affiliés à la caisse de prévoyance des fonctionnaires de la police et de la prison (CP) ou à la caisse de prévoyance des magistrats du pouvoir judiciaire et qu'ils ne fassent pas l'objet d'un licenciement ou d'une sanction autre qu'un avertissement ou un blâme.

Art. 2

Conditions à remplir

Les conditions cumulatives suivantes sont à remplir, sous réserve de l'article 4 de la présente loi, à dater de la fin des rapports de service:

a) compter 10 années de service au sens de l'article 17 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnelde l'Etat et des établissements hospitaliers, du21 décembre 1973;

b) pouvoir bénéficier dans un délai de 5 ans au maximum d'une rente de l'AVS, pour les membres du personnel dont l'âge légal de retraite est fixé à65 ans; dans un délai de 8 ans au maximum, pour les membres du personnel dont l'âge légal de retraite est fixé à 62 ans;

c) ne pas bénéficier avant 6 mois d'une rente de l'AVS;

d) ne pas être au bénéfice d'une pension complète d'invalidité de l'AI ou d'une caisse de prévoyance de droit public;

e) s'engager à ne plus travailler pour le compte de l'Etat de Genève ou d'un établissement public genevois, à l'exception d'une participation à un conseil d'administration, à une commission administrative ou à un conseil de fondation d'un organisme dépendant de l'Etat ou paraétatique.

Art. 3

Rente temporaire

1 Jusqu'à l'âge où le membre du personnel peut normalement prétendre à une rente de l'AVS, mais au maximum pendant une durée de 5 ans, une rente temporaire égale à 20% du dernier traitement mensuel de base à l'exclusion de toute indemnité peut être versée par l'employeur sous forme mensuelle, dès la fin des rapports de service.

2 Le complément temporaire de retraite ne peut être inférieur à la rente simple maximale de l'AVS en vigueur lors de la cessation des rapports de service, pour un taux d'activité de 100%.

Art. 4

Procédure

1 Les membres du personnel qui entendent bénéficier des dispositions prévues à l'article 3 de la présente loi doivent adresser une demande écrite par la voie hiérarchique jusqu'à la fin du mois de février de chaque année, pour un départ dans le courant de la même année.

2 Les délais réglementaires de congé et les termes de l'année scolaire ou universitaire, pour le corps professoral, doivent être respectés.

3 La demande ne peut être acceptée que si le poste concerné ou un poste financièrement équivalent dans un autre secteur du département, de l'établissement ou de l'institution, n'est pas repourvu à titre définitif ou provisoire pendant 6 mois au moins, quelle que soit la durée du versement de la rente temporaire.

4 Pour chaque rente temporaire versée, le département, établissement ou institution indiquera par écrit et de façon précise la compensation financière qui intervient dans chaque cas.

5 Si une demande ne peut être acceptée pour des raisons financières ou d'organisation, le chef du département, de l'établissement ou de l'institution, après avoir entendu la personne concernée, en informe le Conseil d'Etat qui statue en dernier ressort.

Art. 5

Entrée en vigueur

La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1995.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Les lois instaurant des mesures d'encouragement aux départs anticipés «PLEND» ont déployé leurs effets pour les les années 1993 et 1994.

PLEND 1993

464 postes de travail ont été libérés (2% des effectifs)

dont:

218 postes avec l'indemnité de départ (0,93%)

248 postes avec le Pont AVS (1,05%)

PLEND 1994

297 postes de travail ont été libérés (1,4% des effectifs)

dont:

166 postes avec l'indemnité de départ (0,78%)

131 postes avec le Pont AVS (0,62%)

Les objectifs fixés par le Conseil d'Etat soit 1% des effectifs en 1993 et 0,5% des effectifs en 1994 ont donc été largement atteints.

Néanmoins, la réalisation du plan financier quadriennal impose encore une réduction des effectifs de 2% en 1995, 1996 et 1997, ce qui portera à 11% la réduction totale des effectifs commencée en 1992 (1% en 1992, 2% en 1993 et 1994).

Le nombre des départs naturels (retraites ou démissions attendues) ainsi que les restructurations ne permettront pas à elles seules d'atteindre cet objectif de 11% de réduction des postes.

Nous proposons donc d'introduire un système de Pont AVS permanent dont l'objectif spécifique est de:

- disposer d'un moyen complémentaire permettant d'augmenter le taux de rotation de 1% en plus des départs naturels;

- faciliter aux jeunes et aux sans emploi l'accès à un poste au sein de la fonction publique;

- agir favorablement sur la structure d'âge du personnel;

- permettre aux personnes se trouvant à 5 années et moins de l'âge donnant droit à une rente AVS de quitter la fonction publique dans des conditions attrayantes et correctes.

Commentaire article par article

Article 1

Il s'agit du même cercle de bénéficiaire que pour le PLEND 1993/1994.

Article 2

Les conditions diffèrent quelque peu en ce sens qu'antérieurement un Pont AVS était versé dès l'âge de 60 ans et jusqu'au moment où naissait le droit à une rente de l'AVS soit 62 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes.

Le système de rente temporaire proposé maintenant part de 5 ans avant l'âge donnant droit à une rente de l'AVS soit 57 ans pour les femmes et 60 ans pour les hommes, actuellement. Exception faite pour les hommes dont l'âge légal est fixé à 62 ans et qui pourront bénéficier de la rente temporaire à partir de 57 ans, mais au maximum pendant une période de 5 ans.

Les autres conditions restent inchangées.

Article 3

La rente temporaire correspond à 20% du salaire de base mais au minimum à la rente simple maximale de l'AVS en vigueur lors de la fin des rapports de service.

La durée maximale du versement de la rente temporaire est fixée à 5 ans pour les femmes comme pour les hommes.

L'indemnité de départ, entre 50 et 60 ans n'est plus offerte - de même que les prestations sous forme de capital.

Article 4

Si la procédure reste inchangée, le financement sera assuré uniformément par l'obligation de ne pas repourvoir le poste libéré par un départ anticipé pendant au moins 6 mois.

Pour les années 1993 et 1994, la durée moyenne du versement des Ponts AVS correspondait à 3 ans; sur une base de 2 000 F par mois cela représente en 3 ans un coût de 72 000 F par poste.

En se basant sur un salaire brut moyen de 120 000 F (comprenant les charges sociales, prime de fidélité et indemnités) un «gel»de poste de 6 mois représente 60 000 F d'autofinancement et 12 000 F comme part non financée à charge de l'employeur.

A raison de 220 postes par an, soit 1% des effectifs, le coûtà charge des employeurs (Etat, EPM, EPA) s'élèverait ainsi à2,7 millions par an pour 1% des effectifs.

Si les mesures envisagées n'entraînaient pas les résultats escomptés, soit une diminution de 1% environ des effectifs par an, grâce aux départs anticipés, le Conseil d'Etat se réserve la possibilité d'examiner des possibilités complémentaires.

Compte tenu des enjeux du plan de redressement des finances publiques et du coût modéré de l'opération, nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter le projet de loi qui vous est soumis.

(PL 7147)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

CHAPITRE I

Traitements

Article 1

Blocage

  annuités

  primes de

  fidélité

Les augmentations annuelles octroyées au 1er janvier de chaque année au personnel de l'administration cantonale, au 1er septembre au corps enseignant primaire et secondaire et au 1er octobre au corps enseignant universitaire, au sens de l'article 2 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat et des établissements hospitaliers, du 21 décembre 1973, ainsi que les primes de fidélité (art. 16 à 19), sont bloquées au niveau atteint au 31 décembre 1994.

Art. 2

Fin du blocage

Lorsque la présente loi cesse de déployer ses effets:

  effets sur

  annuités

a) une augmentation annuelle est versée à chaque ayant droit en partant du niveau du traitement atteint en 1994, sans aucune compensation rétroactive, sous réserve d'augmentations extraordinaires intervenues pendant la période du blocage au sens du règlement d'application de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat et des établissements hospitaliers, du 17 octobre 1979;

  effets sur les

  primes de

  fidélité

b) la prime de fidélité est versée, sans compensation rétroactive, conformément à l'article 16 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat et des établissements hospitaliers, du 21 décembre 1973.

Art. 3

Champ d'application

La présente loi s'applique aux magistrats et aux membres du personnel de l'Etat, des établissements publics, et des institutions subventionnées régie par les normes salariales de l'Etat.

CHAPITRE II

Dispositions finales

Art. 4

Entrée en vigueur et durée d'application

1 La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1995 pour une durée d'une année.

2 Pour les augmentations annuelles, elle déploie ses effets jusqu'au 31 août 1996 pour les corps enseignants primaire et secondaire et jusqu'au 30 septembre 1996 pour le corps enseignant universitaire.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Lors de la phase terminale de l'élaboration du projet de budget de l'Etat de Genève, pour l'année 1995, et ce malgré de nombreux arbitrages, il est apparu que le déficit budgétaire dépassait trop fortement l'objectif des 361 millions de francs fixé dans le cadre du plan financier quadriennal 1993-1996 et dont le principe même a été admis lors de la votation populaire du 20 février 1994.

Compte tenu de cette situation et des incertitudes quant à l'évolution des recettes fiscales, le Conseil d'Etat s'est trouvé dans l'obligation d'envisager, comme en 1993, un blocage des augmentations réelles des traitements pour l'année 1995, ce qui implique:

a) la suspension du versement des augmentations annuelles de salaire (annuités);

b) la suspension de la progression de la prime de fidélité.

L'économie qui en résultera s'élèvera à 36 millions de francs et permet de présenter un projet de budget 1995 comprenant un déficit de 379 millions, montant proche de l'objectif fixé dans le cadre du plan financier quadriennal 1993-1996.

Commentaire article par article

Article 1

Cet article énonce le principe du gel des annuités et des primes de fidélité à leur niveau atteint au 31 décembre 1994. Comme le traitement de tous les membres de la fonction publique doit être pris en compte et qu'il y a disparité entre les dates auxquelles certains fonctionnaires touchent leurs annuités, la référence pour le blocage se situe sur la période d'une année, au lieu de se fixer sur une date précise. C'est ainsi que les enseignants et les professeurs d'université ne verront leurs annuités bloquées qu'au 1er septembre respectivement au 1er octobre 1995, puisque leurs annuités tombent à cette période, en raison du début de l'année scolaire et universitaire. Par contre, lorsque la loi cessera de déployer ses effets en 1996, le corps enseignant ne bénéficiera que plus tard, à savoir à nouveau au 1er septembre et au 1er octobre 1996, de la reprise des annuités, conformément à l'article 4, alinéa 2, de ce projet de loi.

Article 2

Cet article règle les modalités de reprise des annuités et des primes de fidélité après que la présente loi a cessé de déployer ses effets.

Annuités

Une seule augmentation annuelle sera versée lorsque la présente loi cessera de déployer ses effets.

Ainsi, par exemple, un membre du personnel se trouvant en classe 16, position 6, le 31 décembre 1994, pourra bénéficier de la classe 16, position 7, en 1996, sans compensation rétroactive. L'éventuelle annuité due normalement en 1995 sera simplement différée à l'année suivante.

Les augmentations extraordinaires prévues exclusivement au terme de la période probatoire ou en cas de promotion ne sont pas visées par la présente loi. Par contre, lorsqu'une promotion ne résulte pas du départ du titulaire antérieur mais d'une réévaluation d'un poste de travail effectuée en 1995, l'entrée en vigueur de la promotion est reportée à l'année 1996.

Prime de fidélité

La prime de fidélité sera bloquée au niveau atteint en 1994 soit:

a) pour les classes 4 à 8:

 35% d'un traitement mensuel de base après 5 ans de service puis +5% par année de service jusqu'au 100% après 18 ans de service;

b) pour les classes 9 à 33:

 20% d'un traitement mensuel de base après 5 ans de service puis +5% par année de service jusqu'à 100% après 21 ans de service.

Lorsque la présente loi cesse de déployer ses effets, l'article 16 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat et des établisseements hospitaliers, du 21 décembre 1973, devra être modifié et prévoir, dès 1996:

a) pour les classes 4 à 8:

 35% d'un traitement mensuel de base après 6 ans de service (au lieu de 5 ans de service actuellement);

b) pour les classes 9 à 33:

 20% d'un traitement mensuel de base après 6 ans de service (au lieu de 5 ans de service actuellement).

Article 3

Il convient de spécifier le champ d'application de la présente loi qui ne doit pas concerner que l'administration cantonale mais également les établissements publics et les institutions subventionnées soumises aux règles salariales de l'Etat.

Article 4

Prière de se référer au commentaire de l'article 1 ci-dessus.

En raison du refus populaire d'augmenter les recettes de l'Etat, celui-ci est invité à agir prioritairement sur les dépenses générales qui sont constituées à raison de 60% par les charges salariales.

La mesure proposée par le présent projet de loi permet de contribuer au respect du plan de redressement des finances cantonales d'ici à 1997, plan qui a obtenu l'aval du corps électoral genevois le 20 février 1994.

Nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir approuver le présent projet de loi qui vous est soumis.

(PL 7156)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

La loi sur les droits d'enregistrement du 9 octobre 1969 (D 3 6), est modifiée comme suit:

Art. 48, al. 5 (nouveau)

2 Pour la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1997, le quart de ce droit est attribué au fonds d'équipement communal; cette dotation est au maximum de 12 millions de F par an

Art. 54, al. 5 (nouvelle teneur)

5 Le quart des droits est attribué à la commune où les ventes ont eu lieu; la répartition est faite à la fin de chaque année.

Art. 2

Les statuts du fonds d'équipement communal, du 18 mars 1961 (B 6 5), sont modifiés comme suit:

Art. 5, lettre a (nouvelle teneur)

Ressources

Le fonds est alimenté par:

a) le tiers du droit sur les adjudications, ventes, apports et tous les autres actes civils et judiciaires translatifs, à titre onéreux, de la propriété ou de l'usufruit de biens immeubles, prévu par l'article 48 de la loi sur les droits d'enregistrement. Pour la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1997, le fonds est alimenté par un quart de ce droit; cette dotation est au maximum de 12 millions de F par an.

Art. 6, al. 3 (nouveau)

3 La rémunération du capital actif est suspendue pour 1995.

Art. 3

Entrée en vigueur

La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1995.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le présent projet de loi fait référence au rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la gestion du fonds d'équipement communal (RD 223) et tend à réintroduire une dérogation réduisant à un quart (au lieu de un tiers) la part du droit attribuée au fonds d'équipement communal, et cela pour une durée de trois ans.

Cette dérogation fut déjà admise dans le passé: une première fois en 1978 (loi 4697 du 10 novembre 1978) pour la période allant du 1er juillet 1978 au 31 décembre 1981; puis reconduite en 1982 (loi 5340 du 18 mars 1982) du 1er janvier 1982 au 31 décembre 1985; en 1987 (loi 5900 du 12 mars 1987) du 1er janvier 1986 au 31 décembre1989; en 1990 (loi 6428 du 2 mars 1990) et enfin en 1991 (loi 6736 du 19 septembre 1991) pour la période du 1er janvier 1992 au 31 décembre 1992.

Dès le 1er janvier 1993, la part du droit attribuée au fonds d'équipement communal était de nouveau de un tiers avec un montant au budget de 14 millions de F, et figurant aux comptes 1993 pour 13,5 millions de F.

Pour 1994, il a été prévu 12 millions de F au budget. A fin juin 1994, la part attribuée au fonds était déjà supérieure à 8,5 millions de F.

En effet, la reprise des opérations immobilières laisse, entre autres, à penser que le chiffre budgétisé pour 1994 sera largement dépassé.

C'est pourquoi, fort de ce constat, des mesures d'économies ont été prises dans le cadre du budget 1995 pour respecter le plan de redressement des finances. Dès lors, il a été budgétisé un montant identique à 1994, soit 12 millions de F correspondant donc à une part de un quart. Les intérêts sur cette part, qui représente une créance contre l'Etat, actuellement de 3,5%, sont en outre suspendus pour 1995.

La situation initiale sera rétablie dès 1998. De plus, compte tenu de la fortune du fonds, son activité ne devrait pas être touchée.

Par ailleurs, les ventes volontaires aux enchères publiques de biens mobiliers sont soumises au droit d'enregistrement de 5%, dont la commune du lieu se voit actuellement attribuée la moitié. Le même raisonnement sur la reprise des affaires justifie qu'en raison de la situation financière de l'Etat, cette part soit définitivement réduite à un quart.

Telles sont les considérations qui nous incitent à vous recommander, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter le présent projet de loi.

(PL 7159)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit:

Art. 87, al. 2 (nouvelle teneur)

2 L'impôt est perçu par l'Etat, qui en verse 15% à la commune dans laquelle est situé l'immeuble.

Art. 91 A (nouvelle teneur)

Partage de l'impôt

L'impôt est perçu par l'Etat, qui en verse 15% à la commune dans laquelle l'entreprise est située.

Art. 457, lettres b et c (nouvelle teneur)

lettre d (nouvelle)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le présent projet de loi vise à concrétiser certaines restrictions budgétaires prévues dans la loi sur le projet de budget 1995. Il s'agit de réduire la part des communes à certains impôts et taxes.

La première mesure vise la réduction de la part des communes à l'impôt spécial sur certains bénéfices et gains immobiliers. Le projet de loi préconise une réduction de la part de la commune de 20% à 15% par la modification de l'article 87, alinéa 2, de la LCP. L'économie générée en faveur de l'Etat par cette réduction est de l'ordre de 1 000 000 de F.

La seconde mesure concerne la part des communes à l'impôt spécial sur les bénéfices d'aliénation, de remise ou de liquidation de certaines entreprises. Le projet de loi préconise une réduction de la part des communes de 20% à 15% par la modification de l'article 91 A de la LCP. L'économie générée en faveur de l'Etat par cette réduction est de l'ordre de 84 000 F.

La troisième mesure concerne la part des communes aux taxes sur les compagnies d'assurances contre l'incendie. Cette taxe est de 5 centimes pour 1 000 F de somme assurée. Elle était répartie jusqu'à présent à raison de 40% aux caisses de secours des sapeurs-pompiers du canton, au prorata du nombre des sapeurs, 25% à la Ville de Genève et 35% aux autres communes.

Le présent projet préconise de diminuer la part à la Ville de Genève de 25% à 15% et la part des communes de 35% à 25%, les 20% ainsi générés, soit environ 1 200 000 F, étant au profit de l'Etat.

Telles sont les considérations qui nous incitent à vous recommander, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter le présent projet de loi.

Personne ne demande la parole en préconsultation.

Ces projets sont renvoyés à la commission des finances.

La séance est levée à 20 h 5.