République et canton de Genève

Grand Conseil

No 33

Vendredi 23 septembre 1994,

soir

Présidence :

M. Hervé Burdet,président

La séance est ouverte à 17 h.

Assistent à la séance : MM. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat, Olivier Vodoz et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : MM. Jean-Philippe Maitre, Guy-Olivier Segond, Philippe Joye, Gérard Ramseyer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Bernard Annen, Florian Barro, Roger Beer, Dominique Belli, Hervé Dessimoz, Jean-Claude Dessuet, Pierre Ducrest, Laurette Dupuis, René Ecuyer, Catherine Fatio, Michel Halpérin, Elisabeth Häusermann, Liliane Maury Pasquier, Geneviève Mottet-Durand, Barbara Polla, David Revaclier, Jean-Pierre Rigotti, Martine Roset et Nicolas Von der Weid, députés.

3. Correspondance.

Le président. La correspondance suivante est parvenue à la présidence :

C 183
En date du 19 septembre, le CE nous adresse les réponses qu'il a fournies, suite aux procédures de consultation :- à Mme Trix Heberlein, présidente de la commission des institutions politiques du Conseil national, sur la révision des dispositions constitutionnelles relatives à l'Assemblée fédérale;- à M. Arnold Koller, conseiller fédéral, sur la modification de la loi fédérale sur la protection des marques et indications de provenance (LPM), de la loi fédérale sur l'amélioration de l'agriculture et le maintien d'une population paysanne (LAg), ainsi que de l'arrêté sur la viticulture. ( )C183

Il en est pris acte

C 184
Tous les textes prévus à l'ordre du jour n'ont pu être distribués à temps suite à un retard de l'imprimerie. Le Conseil d'Etat déplore ces circonstances. ( )C184
C 185
Le Conseil d'Etat nous fait parvenir le 19.09.94 un arrêt du TF concernant la loi sur la protection générale des rives du lac (PL 6620) rejetant le recours formé par la Fondation Le Reposoir. ( )C185
C 186
Les associations du personnel du Corps de police nous informent avoir adopté à l'unanimité une résolution adressée au Conseil d'Etat sur les mesures salariales contenues dans le projet de budget 1995. ( )C186

  Il est pris acte de ces courriers.

4. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant

M 941
5. Proposition de motion de Mmes et M. Elisabeth Reusse-Decrey, Liliane Maury Pasquier et Pierre-Alain Champod concernant la création d'une «carte-famille». ( )M941

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- que l'année 1994 a été déclarée par l'ONU «année internationale de la famille»;

- qu'en Suisse le vieillissement de la population devient un phénomène inquiétant;

- qu'une meilleure politique de la famille doit être mise en oeuvre, par des mesures multiples et diverses,

invite le Conseil d'Etat

à étudier la possibilité d'instaurer une «carte-famille» et à intervenir:

a) auprès d'instances publiques ou subventionnées afin qu'elles offrent lors d'activités en famille gratuité ou rabais importants aux porteurs de ladite carte, dès le deuxième ou troisième enfant;

b) auprès de collectivités privées afin de les inciter à agir de même.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Année internationale de la famille

En décembre 1989, l'assemblée générale de l'ONU a résolu que l'année 1994 serait déclarée «année internationale de la famille», et a fixé trois objectifs:

1) favoriser la reconnaissance de la contribution des familles au développement de la collectivité;

2) sensibiliser les gouvernements et le secteur privé aux problèmes de la famille;

3) inciter les organismes publics à formuler des politiques mieux adaptées aux diverses situations des familles.

A Genève un colloque est en préparation pour le mois de novembre, dont le programme prévoit différents débats, conférences et ateliers. Exemple: familles et valeurs éthiques, familles et organisation de la vie professionnelle, etc.

La famille et la société

Aujourd'hui chacun le reconnaît, la famille est une cellule de base de notre société. Elle est un facteur d'épanouissement pour l'individu, un lieu privilégié au sein duquel on fait l'apprentissage de la vie collective, du partage et du dialogue.

A ces avantages «internes», il faut en ajouter d'autres, «externes». En effet la famille contribue à la prospérité de notre société. Elle est une réalité d'intérêt général.

Par rapport à l'Europe, notre politique suisse d'aide à la famille se trouve en queue de peloton. L'investissement des parents pour la société et particulièrement des mères, n'est pas reconnu. «C'est une particularité helvétique: le travail productif est reconnu socialement, (droit à une retraite, aux indemnités en cas de chômage, etc.) mais le travail reproductif ne l'est pas !» (Pierre Gilliand)

Cette situation plutôt sombre a entre autres comme conséquence une baisse de la natalité. Cette diminution du nombre de naissances en Suisse est en effet probablement due à cette triste politique d'aide et de soutien aux familles, bien que d'autres facteurs interviennent certainement aussi. Le vieillissement de la population qu'elle induit entraînera dans notre pays, pour les décennies à venir un déséquilibre dangereux et néfaste sur le plan financier, à savoir une proportion très faible de jeunes qui travaillent par rapport aux personnes retraitées. (Un phénomène inverse se produisant dans les pays du Sud, il faudra dès lors compter avec des mouvements migratoires importants ou encore un recours accru aux travailleurs migrants qui deviendront indispensables pour notre économie).

Pour l'heure plusieurs sujets sont en cours de réflexion, tant sur le plan cantonal que fédéral, et il faut espérer qu'ils donneront rapidement lieu à des décisions concrètes. Ce sont là les véritables enjeux d'une vraie politique d'aide à la famille.

- assurance maternité

- augmentation des allocations familiales

- allocations familiales versées selon le principe «1 enfant - 1 allocation»

- augmentation du nombre de places de travail à temps partiel

- offre accrue de crèches, garderies, accueils familiaux

- logements mieux adaptés aux familles, etc.

La famille en 1994

En plus de la famille traditionnelle, consacrée par le Code Civil, il faut citer aussi les familles de fait qui sont de plus en plus nombreuses en raison de l'évolution sociale actuelle. Il s'agit en particulier des familles monoparentales, des unions libres, des familles reconstituées, des regroupements de plusieurs générations, etc. Chacune de ces situations représente, selon une structure qui lui est propre, cette cellule familiale évoquée plus haut et devrait être prise en compte dans le cadre de cette motion.

De même en ce qui concerne les grands-parents. Il n'est que temps de reconnaître le rôle important qu'ils jouent dans la garde de leurs petits-enfants. Le partage des valeurs, du savoir, du comportement avec les générations précédentes est une richesse à favoriser.

Genève: une «carte-famille» ?

Pour cette année 1994 et vu l'importance du rôle de la famille dans notre société, le Grand Conseil pourrait décider de la création d'une «carte-famille». (un peu à l'image de celle proposée par les CFF et valable, bravo, sur les TPG). Celle-ci, établie par la Chancellerie et moyennant un faible émolument pour les frais administratifs occasionnés, pourrait donner lieu à des rabais ou à la gratuité à partir du deuxième ou troisième enfant lors d'activités en famille. En effet, pour nombre d'entre elles, le théâtre, certains musées, les concerts, les fêtes, les manifestations sportives, le cinéma ou le restaurant sont des activités qu'il faut oublier: trop chères !

C'est pourquoi dans toute manifestation ou lieu entièrement ou partiellement subventionné par l'Etat, la «carte-famille» devrait pouvoir donner droit à des réductions. Quant aux lieux privés, ils pourraient faire l'objet d'une information et d'encouragements à agir de manière identique. Un restaurant par exemple qui tiendrait compte de la «carte-famille» n'y perdrait pas forcément. Une clientèle se construit aussi avec les familles.

Conclusion

Fêter la famille, parler d'elle, vanter ses mérites, glorifier l'importance de son rôle dans la société est une chose. Prendre des mesures, même minimes comme cette proposition, en est une autre. En cette année internationale de la famille, en signe de reconnaissance de sa valeur, notre Grand Conseil pourrait offrir aux familles un progrès concret: l'introduction d'une «carte-famille».

Pour ces raisons, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à répondre favorablement à cette proposition de motion.

Débat

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Que n'a-t-on pas dit cette année déjà sur la famille ! Elle a été vantée et glorifiée. Ses valeurs ont été soulignées, à juste titre, d'ailleurs, car je suis convaincue que la famille a un rôle essentiel à jouer au sein de notre société. Et pourtant, après neuf mois, cette année de la famille n'a encore accouché de rien de concret !

Le colloque prévu au mois de novembre à Genève comblera, nous l'espérons, ce vide et débouchera peut-être sur quelques propositions. Cette motion n'a pas la prétention de résoudre toute la problématique familiale, bien évidemment. Les grands axes d'une vraie politique de la famille sont cités dans l'exposé des motifs et je tiens à les rappeler : une véritable assurance-maternité, une augmentation des allocations familiales, des allocations familiales versées selon le principe : «Un enfant : une allocation» - motion que nous avions déposée il y a quelques mois - ainsi qu'une augmentation du nombre de places de travail à temps partiel et de places dans les garderies et les crèches.

Nos autorités doivent répondre à ces grandes questions dans les plus brefs délais. Mais la vie de famille est aussi faite de petits soucis quotidiens et, entre autres, d'interdits financiers. Cette motion tente d'y apporter une réponse partielle en créant une «carte-famille» qui permettrait de diminuer la charge financière lors de certaines activités, en famille justement.

A cet aspect matériel s'ajoute aussi l'encouragement aux activités en famille, au grand complet. En effet, le coût d'une activité force parfois une famille à se séparer pour permettre à deux ou trois de ses membres d'y participer. C'est pour ces raisons que nous vous demandons d'accepter cette motion avec bienveillance.

M. John Dupraz (R). Le groupe radical accueille cette motion avec intérêt.

En effet, la famille est la cellule de base de la société, et nous estimons que le groupe socialiste fait des propositions intéressantes dans cette motion. Les radicaux de Genève ont d'ailleurs fait des propositions concernant l'assurance-maternité.

Cette motion rejoint nos préoccupations et nous serons très heureux de pouvoir en discuter en commission.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je suis la suppléante de M. Segond et, à ce titre, je suis chargée de vous dire qu'il ne voit aucun inconvénient à ce que vous renvoyiez cette motion au Conseil d'Etat.

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission des affaires sociales.

 

PL 7149
6. Projet de loi du Conseil d'Etat instituant un crédit de soutien aux grandes manifestations. ( )PL7149

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Un crédit destiné à soutenir les grandes manifestations est accordé. Il figure pour un montant de 500 000 F au budget du département de l'instruction publique, inscrit sous la rubrique 365.23.

Art. 2

Le département de l'instruction publique fournira tous les 2 ans un rapport sur l'affectation de ce crédit.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Une ville ou une région ne peut se passer aujourd'hui d'une vie culturelle riche, rehaussée par de grands événements. Retransmis et amplifiés par les médias, facilement accessibles par les moyens de communication modernes et par une habile promotion, ces manifestations d'envergure focalisent l'attention sur un lieu et attirent à lui de nombreux visiteurs. Que l'on pense à Avignon et à son festival, à Vérone et à ses opéras ou, plus proche de nous, à Montreux et à ses festivals de jazz et de musique classique, ou encore à Nyon et son Paléo avec sa foule de spectateurs «bon enfant».

Comme le montre la lecture des titres de journaux («les expos du mois en Europe», les festivals de l'été), il existe dorénavant une géographie des hauts lieux de la culture, un agenda international des rendez-vous artistiques. On peut y voir un effet de mode, une recherche de plaisir, de rencontre ou de distinction, ou encore - dans le cadre des commémorations - un besoin d'identité et d'évocation du passé.

Il existe manifestement, par ailleurs, ainsi que l'illustrent des opérations comme les Clefs de Saint-Pierre ou les Ponts de Saint-Gervais, un besoin de la population de se rassembler, de se divertir, de vivre ensemble des moments de liesse collective.

L'apparition d'événements forts

Quelle que soit la raison de cet engouement pour l'événement culturel, un canton comme Genève en peut faire fi sous peine de perdre des touristes, d'être peu attractif pour de nouvelles entreprises ou organisations internationales. Il a de même tout intérêt à répondre à cette demande, dans la mesure où une fête est aussi l'occasion d'associer et de mettre en valeur les multiples cultures présentes dans notre communauté multinationale.

Des responsables, tant des secteurs privés que publics, ont pris conscience de cette nécessité de créer des moments forts qui rassemblent les énergies et attirent les foules.

Depuis quelques années ont ainsi vu le jour le Salon du livre, le Festival du film de Genève, la Fête de la musique, et dans un registre plus modeste les festivals Amadeus, Black Movie, etc. Au chapitre des événements uniques et non périodiques, des commémorations ont été ou vont être organisées comme le Tricentenaire de la naissance de Voltaire (1994), le centième anniversaire de l'apparition du cinéma (1995) ou le cinquantième anniversaire de l'ONU (1995). Cette liste serait, bien entendu, lacunaire si elle ne citait pas le festival de la Bâtie-Genève, subventionné par le département de l'instruction publique depuis 1979, qui, de fête conviviale dans un lieu de verdure, est devenu l'événement marquant de la rentrée avec sa riche et sélective palette de spectacles.

Les limites de ces initiatives

A l'exception de la Fête de la musique, dont les objectifs sont spécifiques (animations des rues, rencontres autour de la musique, bénévolat), ces entreprises, aussi ambitieuses soient-elles, butent sur certaines limites. Certes, le Festival du film de Genève opère une sélection européenne d'acteurs, de plus en plus couverte par les médias; certes, le Salon du livre et ses annexes attirent des visiteurs jusqu'en Suisse alémanique; certes, encore, la Bâtie connaît une fréquentation très large (plus de 40 000 personnes - spectacles payants et animations - en 1993), mais aucun de ces événements n'a encore acquis une taille et une renommée pleinement internationales.

Pour passer à cette dimension supérieure, il leur manque en particulier une assise financière plus large et sûre. Les organisateurs de ces manifestations doivent, année après année, repartir à zéro pour le financement de leur entreprise culturelle, n'étant jamais assurés jusqu'au gala d'ouverture d'équilibrer les comptes, étant empêchés, par conséquent, de faire une programmation longtemps à l'avance.

Il n'est nul besoin d'insister sur l'insécurité, et avec le temps l'usure, qui découlent de cette précarité matérielle. A la longue, la lassitude des responsables risque de les amener à choisir une autre ville, plus accueillante, pour leur manifestation.

Dans un tel contexte, la reconnaissance et l'engagement actifs des pouvoirs publics s'avèrent indispensables, même si leur apport financier, dans les budgets, ne représente qu'une pièce d'un puzzle complexe.

Soutenir les grandes manifestations

Nous sommes convaincus que la promotion de Genève comporte un volet culturel important, qu'il ne suffit pas d'un feu d'artifice, ou d'un cortège, aussi spectaculaires soient-ils, pour maintenir la réputation de notre région. Pour préserver, voire rehausser cette image, plusieurs conditions sans doute doivent être réunies: des infrastructures performantes (ex.: le Zénith), une formation et une production artistiques vivantes, des institutions prestigieuses (ex.: OSR et Grand-Théâtre) et des événements phares qui flattent le goût et frappent l'imagination.

C'est pour cette dernière raison que nous proposons d'introduire dans le budget culturel du département de l'instruction publique une nouvelle ligne de crédit intitulée «Grandes manifestations» (365.23). En procédant de la sorte, plusieurs objectifs seraient atteints, à savoir:

a) la prise en compte de la dimension événementielle et promotionnelle de la culture;

b) la volonté politique de jouer cette carte;

c) la reconnaissance des manifestations existantes;

d) la participation active, avec d'autres partenaires, au plan de financement de ces événements;

e) la volonté d'examiner toute initiative visant à conforter ces expériences ou à en lancer d'autres;

f) le traitement distinct des subventions aux grandes manifestations, ces aides étant actuellement insuffisantes et prélevées sur le crédit 365.27 au détriment du soutien à la jeune création et à l'innovation;

g) la recherche pour assurer, à terme, une base financière à des entreprises culturelles qui matériellement sont toujours à la limite de la survie.

Doté d'un montant de 500 000 F, ce crédit «Grandes manifestations» permettrait d'allouer, sous réserve de la présentation et de l'analyse des budgets des organismes concernés, des sommes de 50 000 à 200 000 F, soit à des manifestations régulières, soit à des événements uniques de type commémoration.

A plus long terme, ces attributions pourraient être revues à la hausse pour mieux assurer l'existence - sans parler de développement - de ces manifestations.

Des engagements plus substantiels devraient toutefois découler d'une étude d'impact et d'un plan de financement, associant d'autres partenaires.

Pour mesurer l'importance relative des sommes envisagées, il suffit de mentionner que les budgets du Festival de la Bâtie et du Festival du film de Genève tournent autour de 1,4 -1,5 million et que la subvention au premier est restée bloquée de 1990 à 1994 (165 000 F). Quant au coût d'une commémoration comme celle du Tricentenaire de la naissance de Voltaire, il se chiffre à 1,25 million, sans compter les prestations des services publics organisateurs.

Alimentation du crédit

Pour constituer un crédit «Grandes manifestations», des fonds sont réunis par trois voies:

 suppression de la lignebudgétaire de la Bâtiefestival de Genève (365.23) 165 000 F

 réduction de l'aide ponctuelleà la culture (365.27) 150 000 F

 suppression de la subventionà la bibliothèque publique etuniversitaire (362.01) 185 000 F

_______________________

  500 000 F

Conclusions

Sur la base de ces données, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter l'introduction de cette rubrique «Grandes manifestations». Il s'agit par ce biais rien moins que d'affirmer la position de Genève sur la carte culturelle européenne et de soutenir les temps forts de la vie communautaire de notre canton.

Préconsultation

M. Luc Gilly (AdG). J'attends de Mme Brunschwig Graf quelques explications au sujet de ce projet de loi.

En effet, une somme de 165 000 F destinée au Festival du Bois de la Bâtie est transférée d'une caisse à une autre. Ce festival ne perd pas d'argent, mais, depuis 1990, il n'y a pas eu d'augmentation.

Mais là n'est pas vraiment la question. Je voudrais des éclaircissements par rapport à la réduction de l'enveloppe pour l'aide à la culture. Qui va être prétérité ? Je n'ai pas compris, en lisant ce projet de loi, où passait l'argent destiné à la bibliothèque publique et universitaire, subvention qui a été supprimée. Ce n'est pas clair du tout. Lorsqu'on parle du Salon du livre comme étant une manifestation qui mérite le soutien des autorités genevoises, je m'en étonne. Je fréquente ce salon depuis son existence, or il s'agit d'une immense foire commerciale du livre et de la presse organisée par et pour les grandes maisons d'édition dans 80% des cas ! Cela justifie-t-il ces subventions extraordinaires ?

M. Bernard Lescaze (R). Le groupe radical trouve ce projet de loi intéressant et propose de le renvoyer à la commission des finances en tant qu'il instituerait un crédit de soutien aux grandes manifestations et permettrait ainsi au Conseil d'Etat de puiser plus librement dans un fonds, au gré des circonstances.

En revanche, il s'inquiète un petit peu de ce qu'une partie de ce fonds proviendrait de la suppression de la subvention à la bibliothèque publique et universitaire, à savoir supprimer une subvention permanente pour la redistribuer à de grandes manifestations qui, par essence, sont éphémères. De ce point de vue, notre groupe pense donc que ce projet mérite d'être étudié très attentivement en commission des finances, car il lui semble que ce n'est pas la meilleure solution. Il attend donc avec intérêt les explications du Conseil d'Etat à ce sujet.

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Je me trouvais l'autre soir à une séance qui réunissait des enseignants, des syndicats et des représentants de partis et de parents. Quelqu'un disait que la technique actuelle du DIP consiste à jeter des fleurs pour éblouir et pour profiter, pendant que personne ne fait attention, de tailler un maximum de branches !

Cette phrase m'a semblé coller parfaitement à ce projet de loi. On jette des fleurs, on institue un crédit de soutien aux grandes manifestations - ce qui est, en effet, une annonce plutôt enthousiasmante - mais, l'éblouissement passé, on se rend compte que la culture en prend un méchant coup !

En faisant quelques calculs, on découvre que ce crédit de 500 000 F est pris - nous dit-on - sur l'annulation de la subvention au Bois de la Bâtie, sur une diminution de l'aide ponctuelle à la culture et sur la suppression de la subvention à la bibliothèque publique, alors que nous pensons qu'il faudrait au contraire augmenter l'aide à cette dernière pour offrir des horaires plus larges au public. La subvention à la bibliothèque est de 241 000 F, mais seulement 185 000 F seront versés à ce fonds en faveur des grandes manifestations, ce qui est surprenant. Il y a donc 45 000 F qui s'envolent au passage.

Une voix. Faut apprendre à compter !

Mme Elisabeth Reusse-Decrey. Je ne continuerai pas dans les chiffres, parce qu'en effet c'est un petit peu difficile... pour certains...

Mais nous tenons à faire part de notre inquiétude, car des subventionnements aux secteurs tels que l'aide à la jeune création, à l'innovation, à la recherche, à l'interface culture-école, sont pris sur des rubriques d'aide à la culture, elle-même en diminution pour créer ce fonds. Pourtant, le document du DIP insiste bien sur ces points. D'ailleurs, ce Grand Conseil avait lui-même souhaité le maintien de subventions pour ces différents secteurs, il y a peu de temps encore. Aujourd'hui, ce projet de loi, sous couvert d'une aide supplémentaire, cache des coupes manifestes. Nous souhaiterions donc avoir un certain nombre d'explications en commission.

Nous proposons son renvoi à la commission de l'enseignement, puisque celle-ci travaille déjà sur le projet de loi concernant la culture.

Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Comme vient de le dire Elisabeth Reusse-Decrey, il serait plus judicieux de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'instruction publique et de l'enseignement. En effet, cette commission a déjà commencé à étudier le projet de loi du Conseil d'Etat relatif au soutien à la culture, projet qui s'acheminera probablement vers une loi-cadre. La proposition actuelle représente une partie de ce qui va se faire dans le projet de loi-cadre du soutien à la culture. Cette partie est du reste évoquée dans l'exposé des motifs du projet de budget du DIP. Je n'ai d'ailleurs pas très bien compris pourquoi elle apparaît maintenant sous forme d'un projet de loi. Je pense qu'il faut l'examiner à nouveau dans le cadre global qui est à l'examen à la commission de l'instruction publique.

Il faudra également examiner en commission, comme le disait Luc Gilly, les transferts peu clairs et obtenir des explications. En fait, ce projet de loi présenté maintenant, alors que le Conseil d'Etat travaille avec la commission de l'instruction publique, n'apporte aucune innovation. Il est seulement un soutien subsidiaire à des choses existantes, voire de l'esbroufe ! Pour le surplus, ce projet de loi clarifie, à l'intérieur d'un cadre global, le débat sur le soutien à la culture.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je peux parfaitement comprendre que ce projet soulève des questions.

Il n'est pas présenté en catimini, par le biais de rubriques arrangées, mais, au contraire, de manière à suggérer ces questions. Il ne faut donc pas dire que la phrase : «Tout ce qui brille n'est pas d'or.» pourrait s'appliquer à ce projet - pour paraphraser Mme Reusse-Decrey - au contraire, il tend à rendre les choses plus transparentes.

Vous discuterez en commission pour savoir s'il est nécessaire que l'Etat continue à subventionner la bibliothèque universitaire ou s'il ne serait pas plutôt souhaitable que ce soit la Ville qui s'en charge, car elle s'occupe déjà d'autres bibliothèques. Vous pourrez également apprécier s'il serait préférable, par le biais d'un projet de loi, de savoir ce que nous finançons chaque année.

Nous ne versons aucune subvention au Salon du livre. Je vous rappelle que nous tenons un stand dans ce salon dans le but de rendre une partie des livres accessible aux visiteurs, cela dans la mesure de nos moyens; c'est le rôle du département de l'instruction publique. Nous participons à différents festivals en collaboration avec la Ville et les élus, notamment de vos formations. A cet égard, nous préférons effectuer ces subventions dans la transparence, par un projet de loi, plutôt que de les effectuer dans l'ombre. Je vous rappelle que ce Grand Conseil a déjà voté au budget, l'année dernière - si ma mémoire est bonne - un projet de loi qui instituait l'aide à la diffusion pour un montant de 400 000 F. Nous souhaitons asseoir dans la même opération les rubriques qui figurent au budget sur la base de lois, ainsi que nous y oblige la loi de finance.

Madame Reusse-Decrey, dans cette affaire comme dans bien d'autres, lorsqu'on a affaire à onze mille personnes dans son département, je ne crois pas que l'on puisse se contenter de se payer de mots, ni de faire croire des choses et d'agir autrement ou en catimini, surtout dans le temps. Au contraire, ce projet de loi a pour objectif de rendre transparentes les choses qui ne l'étaient pas.

Vous pouvez examiner ce projet à la commission de l'instruction publique, mais je tiens à vous rappeler simplement que ce projet de loi accompagne le budget. Alors, si vous souhaitez que les 500 000 F d'aide à la culture y figurent, vous avez intérêt à traiter ce projet de loi avant le vote du budget. Je propose que la commission des finances en soit saisie, puisque vous êtes saisis du budget à la commission de l'enseignement. Je vous rappelle que vous avez des détails dans le document. Vous pourrez donc en prendre connaissance et demander les explications que vous jugerez nécessaires.

Je vous rappelle également que vous avez donné au département un délai de douze semaines pour mettre au point un nouveau projet de loi sur la culture. Vous n'arriveriez pas, dans ce délai, à entériner ce projet de loi. Alors, ces 500 000 F pour la culture ne seront pas versés, sachez-le !

Mis aux voix, ce projet est renvoyé à la commission des finances.

Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Pourquoi ne faites-vous pas voter la deuxième demande de renvoi ? Il est pourtant possible de renvoyer un projet à deux commissions !

Le président. Madame, nous avons fait l'expérience, à réitérées reprises, que le renvoi à deux commissions est tout à fait néfaste, parce que l'on ne sait plus qui rapporte.

Pour l'heur, ce projet a été renvoyé à la commission des finances. Nous pouvons attendre des commissaires aux finances qu'ils nous fassent leur rapport.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Puis-je rappeler aux commissaires de la commission de l'enseignement qu'ils m'entendent le 19 octobre sur le projet de budget ? Ils pourront alors recevoir toutes les explications nécessaires. La semaine prochaine, ils vont recevoir M. Ramuz, responsable des services administratifs et financiers, lequel se tient à leur disposition pour redonner tous les renseignements voulus. Je pense que vous aurez tout ce que vous souhaitez, autant que vous le voulez !

M. Jacques Boesch (AdG). Effectivement, le renvoi à la commission des finances peut être une bonne chose, mais son examen préalable devrait également avoir lieu à la commission de l'enseignement, au cours des débats de ces prochaines semaines.

Je voudrais intervenir sur un seul point. J'aimerais que la commission de l'enseignement fasse un rapport qui soit lu et entendu à la commission des finances pour que les discussions qui ont lieu au sein de cette commission ne soient pas perdues pour tous. J'insiste particulièrement sur ce point, Monsieur le président !

Le président. J'espère que vous obtiendrez ce que vous souhaitez ! De mémoire, il me semble que la commission des finances bouclera son examen du département de l'instruction publique le 20 octobre prochain.

M. Jacques Boesch (AdG). Il suffit que le procès-verbal de la commission de l'enseignement soit transmis à la commission des finances et que la lecture en soit faite pour que l'information soit claire.

Je vous rappelle que, l'année dernière, la commission de l'enseignement avait préparé à l'intention de la commission des finances toute une série de points à discuter. Par le plus grand et heureux des hasards, j'ai remplacé mon collègue, Jean Spielmann, à la commission des finances qui traitait, précisément, de ce point-là. J'ai pu constater que personne n'avait l'intention d'examiner ce rapport. J'ai donc dû intervenir, puis cela a été accepté, bien sûr. C'est la raison qui me pousse à insister sur ce point.

Tout le monde étant intéressé par la culture, c'est une bonne chose que ce thème soit discuté en commission des finances.

M. Claude Blanc (PDC). Nous sommes tous bien d'accord, mais j'insiste sur le fait qu'un projet doit être renvoyé à une seule commission.

Il ne faut pas revenir sur tous les quiproquos que nous avons vécus en d'autres occasions; encore tout récemment dans une affaire d'importance qui se trouvait à la commission des finances et à la commission de la santé, nous ne savions plus qui rapportait ni qui faisait quoi. Aussi, je vous conseille vivement, Monsieur le président, de garder une certaine rigueur !

M. John Dupraz. Renvoyez-le à la commission du temps perdu ! (Rires.)

Le président. Le projet est donc renvoyé à la commission des finances. Tous les députés en sont saisis; ils pourront l'examiner en commission de l'enseignement ou non, puis faire connaître leurs conclusions à la commission des finances, au plus tard pour le 20 octobre, si je me souviens bien. 

PL 7150
7. Projet de loi du Conseil d'Etat relatif au financement de la Fondation universitaire romande de santé au travail. ( )PL7150

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

Subvention annuelle

1 Afin de favoriser les activités communes engagées par les cantons de Vaud et Genève dans le domaine de la santé au travail, une subvention annuelle est versée à la fondation universitaire romande de santé au travail.

2 Dès le 1er janvier 1995, cette subvention de 819 000 F est inscrite au budget de l'Etat, sous la rubrique 35.00.00-361.12 (université).

3 Son financement est assuré par prélèvement sur le budget général de l'université sans que celui-ci ne soit augmenté du fait de cette nouvelle attribution.

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Rappel historique

L'institut de médecine sociale et préventive est né le 5 juin 1969 dans le cadre d'une collaboration étroite avec l'Organisation mondiale de la Santé. Cet institut de médecine sociale et préventive était constitué de trois piliers:

1° l'unité de médecine du travail et d'ergonomie;

2° l'unité d'épidémiologie, de sociologie et d'économie médicale;

3° l'unité de santé communautaire et de médecine tropicale.

Il ne sera question dans ce projet de loi que de l'évolution de l'unité de médecine du travail et d'ergonomie. Il y a lieu de rappeler que c'est grâce au professeur Paule Rey et à ses collaborateurs qu'un noyau s'est progressivement renforcé autour de l'unité de médecine du travail et d'ergonomie pour aboutir finalement à un centre universitaire d'études des problèmes d'écologie du travail (ECOTRA).

Mme Mme P. Rey en personne, qui a été la fondatrice et la directrice d'ECOTRA avant son départ volontaire à la retraite, avait accueilli très favorablement l'idée d'une collaboration soutenue entre les facultés de médecine de Lausanne et de Genève et avec son collègue lausannois, le professeur Lob. Le projet est donc l'aboutissement, comme il l'a été dit lors de sa conférence de presse du 18 janvier 1994 à Lausanne, d'un rêve ancien de 20 ans visant à rapprocher les deux institutions soeurs de Genève et de Lausanne dans le cadre de la médecine du travail. Comme on le verra, la réalisation de ce rêve ne se limite pas à Lausanne et Genève, mais il inclut, ce qui est essentiel, des perspectives pour d'autres cantons romands, à savoir le canton du Valais, le canton de Fribourg et le canton de Neuchâtel.

2. Création de la fondation universitaire romande de santé au travaille 18 janvier 1994

Il y a lieu de signaler que les efforts en vue de la mise en place d'une fondation universitaire romande de santé au travail ont été entrepris dans le cadre de la convention de collaboration entre les cantons de Vaud et Genève dans le domaine de la santé publique et des hôpitaux, dont le Grand Conseil a déjà eu connaissance avec le projet de loi 6906 relatif au financement de la collaboration Vaud/Genève déposé le 21 octobre 1992.

C'est en avril 1993 que l'idée de la fondation universitaire romande de santé au travail a été ratifiée par les chefs de département de l'instruction publique et de la santé publique des cantons de Vaud et Genève et par les rectorats des universités concernées, et c'est le 18 janvier 1994 que la fondation a été créée par acte notarié dans le canton de Vaud et inscrite au registre du commerce du canton de Vaud.

Il y a lieu de rappeler ici que le but de la fondation, selon l'article 2 de ses statuts, est le suivant: «La fondation a pour but principal d'organiser et de promouvoir la formation interuniversitaire prégraduée et postgraduée, la recherche et les services dans le domaine de la santé au travail dans les cantons fondateurs et en Suisse romande, ainsi que de développer toute autre activité dans ce domaine.»

L'acte constitutif de la fondation du 18 janvier 1994 est annexé au présent projet de loi. Il a été préparé par Me Pierre Rochat, notaire à Lausanne, et signé par Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat chargée du département de l'instruction publique du canton de Genève, et M. Philippe Pidoux, conseiller d'Etat chargé du département de l'intérieur et de la santé publique du canton de Vaud.

3. But de la fondation

Avant la création de cette fondation, les milieux universitaires se sont plaints parfois de la pauvreté de l'implication universitaire en Suisse romande de la médecine du travail. En proposant la fusion d'ECOTRA et de l'unité de médecine du travail de Genève avec les institutions vaudoises, il apparaît que l'ont constitue une masse critique de patients atteints de maladies professionnelles qui est beaucoup plus importante que celle actuellement couverte par le seul canton de Genève ou par le seul canton de Vaud.

Cette masse critique nouvelle n'a pas échappé à l'intérêt de la Caisse nationale suisse d'assurances qui se déclare prête à financer des projets de recherche portant effectivement sur une zone géographique qui s'étend à toute la Suisse romande.

Les cantons de Fribourg et du Valais ont également été intéressés à la création de cette nouvelle fondation et se proposent d'y participer, conformément à la possibilité qui leur est offerte par l'article 7 des statuts (un représentant de chaque canton associé à la fondation).

4. Proposition de motion 869

Le 25 juin 1993, une proposition de motion de Mmes et MM. Robert Baud, Maurice Giromini, Pierre Meyll, Catherine Rapp-Jotterand, Erica Sutter-Pleines et Nicolas von der Weid, concernant la dotation budgétaire du centre universitaire d'études d'écologie du travail (ECOTRA), a été renvoyée à la commission des finances.

Il est intéressant de noter que cette proposition de motion va exactement dans le sens du présent projet de loi. Le texte de l'exposé des motifs dit notamment ceci: «Le problème qui risque de se poser est celui de la dotation budgétaire de la part du canton de Genève pour la fondation santé au travail dont les travaux de création sont très avancés. Cette fondation sera probablement romande et regroupera les instituts et les centres d'études universitaires oeuvrant dans ce domaine. ECOTRA devrait pouvoir y apporter tout son dynamisme, son réseau et ses relations nationales et internationales. Cependant, il est indispensable dans ce cas que le centre dispose d'une dotation budgétaire égale à l'actuelle pour le moins.»

Or le but de la présente loi est précisément de doter la future fondation universitaire romande de santé au travail de la même dotation budgétaire que celle qui était affectée à ses activités dans le cadre du canton de Genève.

Par voie de conséquence, il a été proposé à la commission des finances de joindre sa réponse au présent projet de loi et d'en faire un tout.

5. Modalités du transfert

Le transfert budgétaire vers la fondation universitaire romande de santé au travail est réalisé par la voie contractuelle d'une convention de transfert qui a été signée le 17 mai 1994 entre, d'une part, le département de l'instruction publique et l'université de Genève (côté genevois), ainsi que le département de l'intérieur et de la santé publique (côté vaudois), et la fondation universitaire romande de santé au travail, d'autre part.

Un article 1er de cette convention a la teneur suivante: «La présente convention a pour objet la reprise par la fondation d'une partie des ressources, des biens et des obligations de l'université de Genève et du département de l'instruction publique (ci-après DIP) aux fins de garantir la poursuite des activités d'enseignement et de recherche dans le domaine de la santé au travail.»

L'article 2, alinéa 1, précise: «l'université de Genève s'engage à transférer à la fondation, dans le courant de l'année 1994, les montants inscrits à son budget 1994 correspondant aux salaires des personnes occupées, soit par l'ECOTRA, soit par le SOPRE, conformément à la liste annexée à la présente convention. Ces montants seront cependant imputés des salaires d'ores et déjà versés par l'université de Genève, du 1er janvier 1994 jusqu'à la reprise des intéressés par la fondation».

L'alinéa 2 dit: «pour les années 1995 et suivantes, l'université s'engage à verser à la fondation, au maximum la somme correspondante inscrite à son budget, sous la rubrique fondation universitaire romande de santé au travail, sous chiffre 365».

La Fondation universitaire romande de santé au travail, qui a tenu son premier conseil de fondation le 17 mai 1994, a adressé 9 propositions de contrats de travail à des membres du personnel de l'université de Genève touchés par ce transfert. Ces 9 personnes avaient un délai au 17 juin 1994 pour donner leurs réponses. Quatre collaborateurs genevois ont accepté de transférer leurs activités à Lausanne dès le 1er juillet 1994, trois autres ont refusé et se trouvent actuellement dans une procédure de reclassement suite à une suppression de fonction, au sens de l'article 24 de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du 15 octobre 1987, enfin deux personnes avaient un mandat d'assistant se terminant le 30 septembre 1994.

6. Financement

Il est proposé au Grand Conseil, sur les mêmes modalités que le financement du fonds Vaud/Genève dans le domaine de la santé publique et des hôpitaux (PL 6906), de prélever une subvention annuelle sur le budget de l'université, laquelle sera versée à la fondation universitaire romande de santé au travail, telle qu'elle est inscrite à la rubrique 361.12 dudit budget.

Il y a lieu donc de noter que cette subvention ne suivra pas une indexation annuelle, car les efforts de rationalisation menés par la fondation qui bénéficie d'une masse critique nouvelle étendue à la Suisse romande entière, devront permettre de financer l'adaptation au coût de la vie des salaires des collaborateurs transférés.

Au vu des explications qui précèdent, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter le présent projet de loi.

Annexe: acte constitutif du 18 janvier 1994

ANNEXE

Personne ne demande la parole en préconsultation.

Ce projet est renvoyé à la commission des finances.

PL 7151
8. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant : a) la loi sur l'encouragement aux études (C 1 1,5) b) la loi sur l'université (C 1 27,5)  (Taxes universitaires). ( )PL7151

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

La loi sur l'encouragement aux études, du 4 octobre 1989, est modifiée comme suit:

Art. 11 (nouvelle teneur)

Principe

1 Pour bénéficier de la gratuité au sens de la présente loi, l'étudiant doit suivre sa formation dans un établissement public d'enseignement non universitaire situé en Suisse.

Etablissements non universitaires subventionnés

2 A droit au remboursement des taxes jusqu'à concurrence d'un montant global de 3 220 F par an, l'étudiant qui suit sa formation dans un établissement non universitaire subventionné par le canton.

Etablissements universitaires suisses

3 Pour les enseignements dispensés par les établissements universitaires en Suisse, seul l'étudiant qui jouit du statut d'allocataire au sens de la présente loi bénéficie de la gratuité des études.

Etablissements à l'étranger ou établissements non officiels dans un canton confédéré

4 A droit au remboursement annuel des taxes jusqu'à concurrence d'un montant global correspondant à une allocation de base complète, l'étudiant qui suit sa formation dans un établissement d'enseignement à l'étranger, au sens de l'article 6, alinéa 1, lettre c ou d, ou dans un canton confédéré, au sens de l'article 6, alinéa 2, lettre b, pour autant:

a)

qu'il ait le statut d'allocataire au sens de la présente loi;

b)

que, sans être allocataire, le revenu déterminant du groupe familial du répondant ne dépasse pas la limite fixée pour l'octroi d'une allocation complète augmentée de la somme de base prévue à l'article 18, alinéa 1.

Modalité de remboursement

5 Le service des allocations d'études effectue le remboursement des taxes sur présentation des pièces justificatives.

Art. 2

La loi sur l'université, du 26 mai 1973, est modifiée comme suit:

Art. 63, al. 1 (nouvelle teneur)

Taxes

1 Sous réserve des dispositions de la loi sur l'encouragement aux études, les taxes universitaires sont fixées par le département, sur proposition du rectorat. Les taxes sont affectées principalement à l'encadrement des étudiants.

Art. 3

Entrée en vigueur

La présente loi entre en vigueur le 1er septembre 1995.

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Objectifs du projet de loi

Ces dernières années, le nombre des étudiants et des tâches de l'université de Genève sont en constante augmentation. En revanche, les moyens mis à sa disposition n'ont pas suivi cette évolution. A l'évidence, cette situation a, aujourd'hui, pour conséquence de mettre en péril l'encadrement des étudiants, qui n'a cessé de se dégrader.

Ainsi, l'université de Genève n'a pas d'autre choix que de renoncer au principe de la gratuité des études et d'augmenter les taxes qu'elle prélève auprès de ses étudiants. Dans ces circonstances, les objectifs de deux modifications législatives qui vous sont soumises sont les suivants:

a) de permettre à l'université de s'assurer de nouvelles ressources par l'augmentation des taxes de cours;

b) d'affecter ces nouvelles ressources à l'encadrement des étudiants;

c) de s'assurer que l'augmentation de ces taxes n'entrave pas l'accès aux études universitaires.

2. Situation actuelle

La loi sur l'université a déjà été modifiée au mois de juin 1990 afin de permettre à l'université de prélever des émoluments dans le cadre de la formation dite continue. L'article 5 et l'article 63, alinéa 2 de la loi sur l'université, ont été modifiés en conséquence. Depuis lors, l'université de Genève prélève des émoluments qui, selon le cursus de formation continue, se situent entre quelques centaines et quelques milliers de francs.

Quant aux taxes prélevées dans le cadre de la formation dite de base, soit celle sanctionnée par une licence, un diplôme d'études supérieures ou un doctorat, l'article 63, alinéa 1 de la loi, permet déjà à l'université de prélever des taxes universitaires, qui sont proposées par le rectorat et ratifiées par le département de l'instruction publique.

Tous les étudiants, quels que soient leur origine et leur domicile, paient une taxe dite fixe d'un montant de 65 F. La perception de cette taxe est destinée aux besoins propres des étudiants et de leurs associations.

En sus de cette taxe, l'université prélève des taxes dites semestrielles mais seulement auprès des étudiants confédérés, qui s'acquittent d'un montant de 300 F par semestre, et auprès des étudiants étrangers, qui versent pour leur part une taxe de 500 F par semestre.

Les taxes fixes et les taxes semestrielles prélevées auprès des étudiants confédérés et étrangers s'élevaient dans les comptes 1991 à 2 513 768,50 F (rubr. 35.433) et dans les comptes 1992 à 2 650 298,45 F. Le montant inscrit au projet de budget 1995 est de 4 750 000 F.

C'est le lieu de souligner que l'université de Genève est la seule en Suisse (voir annexe) qui ne perçoit pas de taxes de cours pour les étudiants ressortissants de son canton. En effet, toutes les universités de Suisse perçoivent des taxes de cours qui varient selon les facultés et/ou universités et dont la moyenne suisse se situe aujourd'hui à environ 400 F par semestre.

3. Modifications législatives proposées

L'article 63 de la loi sur l'université qui, comme on vient de le voir, permet déjà à l'institution de prélever des taxes, laisse cependant réservées les dispositions relatives à la loi sur l'encouragement aux études.

Or, la loi sur l'encouragement aux études prévoit actuellement la gratuité de la formation universitaire, à l'exception de la formation continue. Elle empêche donc l'université de percevoir des taxes auprès des étudiants genevois et, en principe, auprès des étudiants domiciliés dans le canton. Il convient de modifier la loi sur l'encouragement aux études afin d'ouvrir la possibilité de prélever des taxes, comme l'université en a d'ores et déjà le droit depuis l'année 1990 en matière de formation continue.

Dès lors, diverses modifications de l'article 11 de la loi sur l'encouragement aux études vous sont proposées, dont le but est de lever le principe de la gratuité des études universitaires pour les étudiants genevois ou domicilés à Genève. Cependant, l'étudiant dont les revenus ou celui de son répondant ne sont pas suffisants bénéficie en règle générale du statut d'allocataire. Il aura ainsi la possibilité de demander le remboursement des taxes. Par ce système, l'accès aux études ne sera pas entravé par des motifs financiers.

4. Ressources supplémentaires

Il convient de modifier l'article 63 de la loi sur l'université afin de garantir que les ressources supplémentaires prélevées auprès des étudiants au moyen des taxes semestrielles seront affectées à leur encadrement et non à d'autres tâches. Il est cependant impossible d'estimer à l'avance le montant global qui sera prélevé par l'université dans la mesure où il dépend de la demande aléatoire d'allocations d'études. Si les 6 474 étudiants genevois immatriculés en 1993 devaient payer une taxe de 1 000 F, la recette nouvelle serait de 6,5 millions de francs.

5. Directives financières

Le rectorat a d'ores et déjà fait connaître au département de l'instruction publique les principes qu'il entendait concrétiser:

a) principe d'une taxe unique de 500 F semestrielle pour tous les étudiants, quel que soit leur domicile ou leur origine. Ce faisant, l'université de Genève s'alignera sur la pratique adoptée par la majorité des universités suisses. Qui plus est, la perception d'une taxe égale pour tous les étudiants, quelle que soit leur origine, est «eurocompatible»;

b) statu quo quant à la perception d'une taxe fixe de 65 F par semestre;

c) exonération des taxes pour les assistants;

d) principe de l'indexation périodique de la taxe.

** *

Commentaires article par article

Loi sur l'encouragement aux études (C 1 1,5)

Article 11 (nouvelle teneur)

Alinéa 1

Le principe de la gratuité des études continue à s'appliquer aux études poursuivies dans les établissements publics d'enseignement non universitaire.

Alinéa 2

Le remboursement des taxes jusqu'à concurrence d'un montant global de 3 220 F par an continue à s'appliquer à l'étudiant non universitaire qui suit une formation dans un établissement subventionné par le canton (par exemple l'école du Bon Secours).

Alinéa 3

Seul l'étudiant universitaire qui est allocataire bénéficiera dorénavant du remboursement des taxes. Devraient donc payer une taxe semestrielle, les étudiants dont la limite du revenu déterminant, selon l'article 17 de la loi sur l'encouragement aux études, se situe au-dessus des montants suivants:

 Groupe familial Genève Hors Genève

 Parents Enfants

 1 1 73 790 F 78 950 F

 1 2 81 250 F 86 410 F

 1 3 88 710 F 93 870 F

 1 4 96 170 F 101 330 F

 2 1 81 250 F 86 410 F

 2 2 88 710 F 93 870 F

 2 3 96 170 F 101 330 F

 2 4 103 630 F 108 790 F

Alinéa 4

Dans le cas où une formation ne peut être acquise dans un établissement public en Suisse, la loi sur l'encouragement aux études actuelle prévoit un remboursement des taxes pour des formations suivies dans des établissements à l'étranger ou dans des établissements non officiels dans un canton confédéré lorsque le revenu déterminant du groupe familial du répondant ne dépasse pas le double de la limite fixée pour l'octroi d'une allocation complète.

L'équité exige que le régime de la gratuité des formations à l'étranger et des formations suivies dans des établissements non officiels en Suisse subisse également une restriction. Il convient cependant de tenir compte du fait que les taxes perçues dans ces établissements sont généralement bien supérieures aux taxes relativement modestes perçues par les universités suisses. Il est dès lors équitable que la gratuité ou le remboursement jusqu'à concurrence d'une allocation complète soit non seulement accordé aux allocataires mais également aux étudiants dépendant de leurs parents dont le revenu déterminant ne dépasse pas les limites de revenu pour l'octroi d'une allocation complète, augmentée de 37 000 F environ, soit les montants suivants:

 Groupe familial Formations à l'étranger et formations dans des établissements non officiels en Suisse

 Parents Enfants

 1 1 61 950 F + 36 710 F =  98 660 F

 1 2 69 410 F + 36 710 F = 106 120 F

 1 3 76 870 F + 36 710 F = 113 580 F

 1 4 84 330 F + 36 710 F = 121 040 F

 2 1 69 410 F + 36 710 F = 106 120 F

 2 2 76 870 F + 36 710 F = 113 580 F

 2 3 84 330 F + 36 710 F = 121 040 F

 2 4 91 790 F + 36 710 F = 128 500 F

Selon l'article 22 du règlement d'application de la loi sur l'encouragement aux études, un étudiant immatriculé à l'université de Genève qui suit pendant 1 ou 2 semestres des études dans une université en Suissee ou à l'étranger, dans le cadre des conventions sur la mobilité des étudiants, est considéré comme un étudiant inscrit à Genève.

Dans le but de favoriser la mobilité, le règlement du Conseil d'Etat prévoirait que ces étudiants ne soient pas pénalisés en ce qui concerne un éventuel remboursement des taxes.

Alinéa 5

Cet alinéa constitue une reprise de l'alinéa de la loi actuelle.

Loi sur l'université (C 1 27,5)

Article 63 (nouvelle teneur)

Alinéa 1

Les taxes universitaires continuent à être fixées par le département de l'instruction publique, sur proposition du rectorat. Il est précisé dorénavant que ces nouvelles ressources doivent servir principalement à l'encadrement des étudiants.

Pour ces motifs, nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter le projet de loi qui vous est présenté.

Annexe: taxes semestrielles d'immatriculation dans les universités suisses (état au 1er juin 1994)

Taxes semestrielles d'immatriculation dans les universités suisses

(Etat au 1er juin 1994)

 Université Etudiants Confédérés Etrangers

  domiciliés

  dans le

  canton

 Bâle 500.- 500.- 500.-

 Berne 530.- 530.- 530.-

 Fribourg 350.- 350.- 475.-

 Genève - 300.- 500.-

 Lausanne 450.- 450.- 450.-

 Neuchâtel 375.- 375.- 775.-

 Zurich 600.- 600.- 1 100.-  

 Saint-Gall 460.- 460.- 610.-

 ETHZ 400.- 400.- 500.-

 EPFL 400.- 400.- 500.-

Préconsultation

M. Jacques Boesch (AdG). Je dois vous avouer que, à la lecture de ce projet de loi, j'ai eu quelques doutes.

Je vous rappelle que nous avons débattu de ce problème au cours de ce printemps et qu'un rapport de minorité avait été établi relatant les propos des associations d'étudiants qui voyaient avec une très grande inquiétude l'introduction de taxes plus élevées. Ce rapport était fondé sur les conséquences engendrées par l'introduction de telles taxes à l'université de Zurich à laquelle un grand nombre d'étudiants n'avaient pas pu s'inscrire. Il me semble que nous sommes placés devant une manière subtile d'introduire un numerus clausus.

D'autre part, je vous avoue avoir été un peu surpris que l'on demande, au fond, au Grand Conseil de cautionner une décision qui relevait principalement du rectorat et du Conseil d'Etat, puisque - la loi le précise - c'est par voie réglementaire que l'on décide du montant de ces taxes. Le seul problème qui existe est de savoir s'il faut mettre en place ces taxes ou non. Nous désirons que la législation soit la moins lourde possible, mais, dans le cas particulier, on l'alourdit puisque l'on demande au Grand Conseil de légiférer en la matière. On voudrait que l'université ne fasse l'objet que d'une seule, voire de deux ou trois rubriques dans le budget, et on demande au Grand Conseil d'intervenir sur un point extrêmement particulier. Il y a là, me semble-t-il, un certain nombre de contradictions majeures. J'ai l'impression, à entendre les discours des uns et des autres, que l'on a la volonté de rendre l'université autonome et que, dans le même temps, on exige du Grand Conseil qu'il légifère pour soutenir une hausse des taxes, que les étudiants trouvent tout à fait inadéquate et contraire à la démocratisation des études.

Je ne sais pas s'il faut enterrer d'emblée ce projet, s'il doit être simplement examiné dans le cadre de la commission des finances qui pourrait faire des recommandations concernant le budget général de l'université, ou s'il faut le renvoyer purement et simplement en commission. Dans ce cas, je vous le dis tout de suite, nous demanderons un certain nombre d'auditions et nous l'examinerons très sérieusement, parce qu'il me semble que nous mettons la main dans un engrenage contraire à la démocratisation des études.

Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Notre groupe est prêt à entrer en matière sur le projet de loi concernant les taxes universitaires.

Ce n'est évidemment pas de gaieté de coeur que l'on abandonne le principe de la gratuité des études, mais il ne faut pas oublier que ce principe ne s'appliquait qu'aux Genevois, et pas aux Confédérés ni aux étrangers qui fréquentent notre alma mater. Il y a là une inégalité de traitement qui ne se justifie plus.

Nous sommes donc prêts à discuter sur la manière d'assurer un meilleur encadrement des étudiants, car une démocratisation des études passe, en plus de conditions financières d'entrée acceptables, par l'amélioration des conditions d'enseignement. Fréquentant l'université depuis maintenant trois ans, j'ai pu constater de mes propres yeux ce que signifie des séances de travail à cent étudiants, voire plus, de faire la queue pendant des heures et des heures pour voir l'assistant ou l'assistante et de courir tôt le matin pour avoir une place assise dans un auditoire. Il est difficile de stimuler la réflexion de plus de cent étudiants en même temps et encore moins de répondre à des questions éventuelles. Les personnes qui s'en sortent le mieux sont celles qui peuvent poser des questions à la maison, chez papa-maman ou, pour les plus âgés, auprès de leurs amis ayant fait des études auparavant. Encore faut-il avoir de tels amis !

L'amélioration de l'encadrement est donc, pour le groupe socialiste, la condition sine qua non pour que nous entrions en matière sur ce projet de loi.

Par ailleurs, il nous semble très important qu'une réflexion profonde soit menée concernant les conditions d'accès aux allocations d'études et l'exonération des taxes. Je connais personnellement plusieurs cas d'étudiantes vivant seules, un peu plus âgées que la moyenne, qui n'ont pas eu droit aux allocations d'études, car leurs parents gagnaient trop. Or, ces étudiantes vivent depuis longtemps de manière indépendante et ont gagné leur vie pendant de nombreuses années. Elles ont repris des études soit parce qu'un changement est intervenu dans leur vie, soit parce qu'elles se sont retrouvées au chômage. Quelle n'a pas été leur surprise quand on leur a demandé les fiches d'impôts de leurs parents, alors qu'elles ont trente ans, voire plus. Si ma mémoire est bonne, l'obligation d'entretien des parents vis-à-vis de leurs enfants ne dure pas toute la vie !

Il ne faut également pas oublier les étudiants qui vivent avec très peu de moyens et ne demandent pas d'allocation d'études. Ils choisissent de travailler à côté, voire d'emprunter une somme d'argent qu'ils devront rembourser plus tard. Ils doivent aussi pouvoir obtenir une exonération des taxes universitaires. Il faut faire très attention pour que cette taxe ne soit pas la goutte d'eau qui fait déborder le vase pour les personnes qui se trouvent à la limite d'être allocataires et qui doivent renoncer aux études pour cette raison. Il serait intéressant d'avoir des renseignements sur la situation sociale et économique des étudiants à Genève.

Il faudrait examiner si le fait d'assurer des études gratuites a, effectivement, amené plus de personnes à entreprendre des études, si certaines y renoncent pour des raisons purement financières, s'il s'avère que la majorité des étudiants est issue de milieux aisés et que ce n'est pas la question financière qui empêche les jeunes et les moins jeunes de faire des études. Il me semble possible d'adapter nos taxes universitaires à celles des autres cantons suisses. Dans ce cas, la démocratisation des études doit être réexaminée en amont du cursus scolaire pour y découvrir les failles qui ne permettent qu'à une certaine catégorie de personnes de s'épanouir dans des études universitaires. En effet, des coupes dans le budget de l'école primaire et secondaire ont probablement des incidences beaucoup plus graves sur la démocratisation des études que le fait de supprimer des taxes aux étudiants qui ont les moyens de les payer.

Mme Anne Briol (Ve). Ce projet de loi soulève plusieurs problèmes dont l'harmonisation des taxes, leur affectation et, indirectement, celui de l'augmentation de la taxe.

En ce qui concerne l'harmonisation des taxes, il va de soi que nous soutenons l'introduction d'une taxe non différenciée pour les Genevois, Confédérés et étrangers. Cependant, l'introduction d'une taxe annuelle, qui atteindrait 1 000 F et dont l'affectation n'est pas clairement définie, est contraire à la démocratisation des études et n'assure pas une amélioration de l'encadrement des étudiants. A ce propos, nous aimerions savoir ce que vous entendez par, je cite : «Les taxes sont affectées principalement à l'encadrement des étudiants.».

De plus, en période de conjoncture difficile, ceux qui ont bénéficié de privilèges durant les années d'abondance devraient comprendre qu'il faut donner la priorité au maintien des prestations offertes aux étudiants et ne pas porter atteinte à la démocratisation des études.

M. Armand Lombard (L). Ce projet s'inscrit bien dans la ligne de la réorganisation et du réaménagement d'un certain nombre d'éléments du service public aux fins de rendre l'université plus autonome, plus efficace et plus responsable financièrement. L'admission des modifications, dans la loi de l'université, des articles 5 et 63, alinéa 2, pour faire en sorte que les gens de la Cité utilisant les services de l'université payent ces services, avait été examinée. Maintenant, nous abordons un deuxième volet concernant les étudiants qui peuvent participer au développement de la Cité et de leur université.

Bien entendu, face au principe de la démocratisation des études auquel nous croyons tous - et qui a eu des effets remarquables au cours des dernières années - il y a le principe de l'utilisateur payeur. Dans ce projet de loi, on touche peu à l'un et l'autre de ces principes, puisqu'une taxe de 1 000 F par année correspond à un coût qui peut varier de 25 000 F à 120 000 F par an par étudiant. Ne parlons pas de problème financier global ou de brèche à la démocratisation des études; il n'en est pas question pour notre groupe.

Il faut également distinguer l'enseignement obligatoire - tâche de formation du gouvernement et de la société - financé par l'Etat et le post-obligatoire qui relève du choix de l'étudiant.

Enfin, il a été longuement discuté de ce problème lorsque la commission de l'université a traité la pétition 1004. Les auditions ont été multiples et je sens bien que nous allons recommencer cette procédure. Ma foi, il faudra en passer par là ! Même si le sujet avait déjà été bien décanté, je pense qu'il sera bon d'en rediscuter en commission.

M. Bernard Lescaze (R). Le groupe radical accueille ce projet favorablement et propose son renvoi à la commission de l'université, dans la mesure où il ne porte en réalité absolument pas atteinte au principe fondamental de la démocratisation des études, ou plus exactement de la démocratisation de l'accès aux études.

Comme vient de le souligner le préopinant, la taxe dont le montant reste à fixer - celui qui est proposé est de 1 000 F par an - ne remet pas du tout en question ce principe, dans la mesure où les prêts réels qui incombent à la collectivité sont vingt à cent fois plus élevés que ce montant. Il restera à déterminer soigneusement en commission les modalités de l'encadrement accru des étudiants que tout le monde réclame - et surtout eux-mêmes - à vérifier également dans quelle mesure la convention de 1905, qui réglementait les rapports entre la bibliothèque publique et universitaire et l'université et qui affectait à cette dernière la moitié des taxes fixes, resterait ou non en vigueur ou devrait être modifiée, puisque cela signifierait que 500 F devraient être versés à cette institution - je tiens à le rappeler au passage.

Plus important : je tiens d'ores et déjà à souligner devant ce Grand Conseil que l'augmentation des taxes universitaires à Zurich a fait baisser le nombre des étudiants inscrits de près de deux mille, sans que cela entraîne la moindre évolution sur le nombre des diplômes délivrés par cette université. Cela signifie qu'il y avait à Zurich et qu'il y a certainement à Genève un certain nombre de personnes qui ne s'inscrivent à l'université que pour bénéficier des avantages annexes du statut d'étudiant et qui ne suivent aucun cours et aucun séminaire. De ce point de vue, l'annonce de ce projet de loi est une bonne nouvelle, car cela permettra de clarifier la situation.

Mme Nelly Guichard (PDC). Comme le souligne l'exposé des motifs, les difficultés financières que nous traversons ne nous permettent plus d'accorder la gratuité aux étudiants genevois. Et comme tous les autres, nous serons obligés de percevoir une taxe dont la moyenne se situe aux environs de 500 F par semestre.

Notre groupe n'est pas opposé à cette mesure pour autant que la somme encaissée permette de pallier au manque d'encadrement des étudiants toujours plus nombreux dans notre université. Un montant annuel de 1 000 F ne semble pas excessif, puisque les étudiants que cela mettrait en difficulté et qui satisfont aux normes énoncées en page 5 du projet de loi peuvent demander une exonération s'ils sont au bénéfice d'une allocation d'études. Et ceci pour autant que le système tienne compte de la situation des étudiants plus âgés.

Notre groupe soutiendra donc le renvoi de cette motion à la commission de l'université.

Mme Marlène Dupraz (AdG). C'est un par parti, je crois ! Je ne sais pas si quelqu'un s'est déjà exprimé... (Commentaires de l'assemblée.)

Le président. On attend plus que vous, Madame !

Mme Marlène Dupraz. Excusez-moi, je me suis trompée !

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je tiens à rassurer tout le monde, ce projet de loi est tout à fait nécessaire. Nous serions, Monsieur Boesch, dans l'illégalité si nous ne modifions pas la perception des taxes...

M. John Dupraz. Ce ne serait pas la première fois !

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. C'est votre choix, Monsieur Dupraz, d'estimer qu'il est normal d'être dans l'illégalité ! Pour ma part, ce n'est pas ma conception ! (Commentaires et réflexions fusent.)

M. Claude Blanc. Tu te fais moucher, Dupraz !

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. En l'occurrence, sauf le respect que je porte à M. Dupraz, je signale à M. Boesch qu'il n'est pas question de contester la première partie du projet de loi, parce que nous ne pouvons pas percevoir des taxes si nous ne modifions pas cet article. Et puis, il serait faux de ne pas modifier l'article 63, alinéa 1, parce qu'il répond très justement au désir exprimé dans cette enceinte, à savoir que les taxes soient affectées principalement à l'encadrement des étudiants. Il me paraît donc tout à fait justifié de présenter ces deux projets de lois, et je me réjouis déjà des débats que vous aurez en commission.

Deuxième problème, Monsieur Boesch, comme l'a dit très justement M. Lescaze, ce qui s'est passé à Zurich nous montre qu'il n'y a pas de numerus clausus, parce que les étudiants en première année sont toujours aussi nombreux. En revanche, ceux qui s'égrenaient au fil des ans et à des âges que nous ne qualifierons pas tout à fait de canoniques ont bel et bien disparu. Ces informations viennent très directement de l'université de Zurich.

Enfin, vous aurez tout loisir, en commission, de prendre connaissance de l'application de la loi sur l'encouragement aux études et vous verrez que les mesures prises pour soutenir les étudiants, indépendamment des problèmes soulevés par Mme Roth-Bernasconi, sont suffisantes et forment un dispositif pratiquement unique en Suisse.

Mais Genève n'est pas unique sur ce seul point. C'est le dernier canton universitaire à pratiquer une discrimination entre ses propres ressortissants et les Confédérés. Nous avons été priés plusieurs fois par les cantons confédérés de bien vouloir nous aligner, non pas sur le montant des taxes, mais pour supprimer cette discrimination. Je vois mal, à l'heure de l'Europe - soutenue ici par tous les partis - comment nous pourrions continuer à maintenir cette discrimination.

Je me réjouis à l'avance des débats en commission à ce sujet. Je souhaite véritablement que nous approuvions ce projet de loi pour renforcer l'encadrement des étudiants.

Le président. Je mets aux voix la proposition de renvoi de ce projet à la commission des finances. Celles et ceux qui souhaitent ce renvoi répondront oui et celles et ceux qui le refusent répondront non.

Ce projet est renvoyé à la commission des finances.

(Contestation sur les bancs radicaux et démocrates-chrétiens.)

Une voix. Non, président, à la commission de l'université !

M. John Dupraz. Faut vous réveiller, Monsieur le président !

Une voix. Sois poli avec le président !

Le président. Le Bureau et les chefs de groupe avaient pensé à la commission des finances, si vous êtes d'un avis différent, c'est autre chose ! Alors, que celles et ceux qui souhaitent renvoyer ce projet à la commission de l'université lèvent la main.

Mise aux voix, la proposition de renvoi de ce projet à la commission de l'université est adoptée.

M 934
9. Proposition de motion de Mme et M. Claire Torracinta-Pache et René Longet concernant un soutien à l'édition, à la production locale du livre et à sa diffusion. ( )M934

LE GRAND CONSEIL,

considérant:

- le récent colloque consacré à Genève aux défis de l'édition;

- la précarité du métier d'éditeur et du statut du livre en Suisse romande;

- que la disparition des uns et des autres mettrait en danger la pérennité de notre culture ainsi qu'une activité économique qui ne doit pas être aban-donnée;

- que le livre ne peut être considéré comme un simple produit soumis aux lois du marché;

- qu'il est la base et la source de tout enseignement;

- qu'une vraie politique du livre doit être engagée, politique à laquelle les cantons doivent participer dans la mesure de leurs moyens;

- le projet de loi du Conseil d'Etat sur l'encouragement à la culture renvoyé en commission pour étude,

invite le Conseil d'Etat

à constituer un groupe de travail ou une commission, réunissant des représentants de l'Etat, de la Ville, des communes et du Cercle de la librairie et de l'édition à Genève, chargé-e d'étudier et de proposer des mesures d'encouragement et de soutien à la production locale du livre et à sa diffusion;

à étudier, en collaboration avec les départements de l'instruction publique romands, des mesures permettant de mieux faire participer les éditeurs romands à la réalisation de matériel pédagogique;

à étudier la possibilité de diffuser auprès des enseignants la liste des publications des éditeurs romands, en particulier des éditeurs genevois;

à encourager les enseignants à développer au maximum le goût du livre chez l'enfant et à favoriser l'accès des élèves au livre, dans son intégralité;

à sensibiliser les enseignants au côté pernicieux de l'usage systématique de la photocopie en lieu et place du livre;

à inciter l'université à intensifier ses efforts pour mieux faire connaître les publications éditées en Suisse romande;

à élargir le cercle des bénéficiaires de l'aide aux jeunes créateurs à des auteurs du canton (bourse d'encouragement ou prix à la publication d'une première oeuvre, par exemple).

EXPOSÉ DES MOTIFS

«...l'idée que l'écrit et le livre ont des fonctions éternelles supplantera bientôt la griserie du progrès la plus infantile. Il apparaîtra que la formulation par le mot et la transmission de ces formulations par l'écriture ne sont pas que des auxiliaires importants, mais sont surtout l'unique moyen grâce auquel l'humanité peut accéder à une histoire et à une consciencedurable de soi.»

Herman Hesse, 1930

Le livre est un des principaux vecteurs de l'éducation et du savoir. Il est aussi l'expression de notre identité culturelle. De plus, sa production constitue une activité économique à préserver.

Or sans éditeur, pas de livre. Et il s'avère malheureusement que la situation des petits éditeurs romands est devenue extrêmement précaire. Il y a quelques décennies, Genève comptait plusieurs éditeurs d'importance, employant chacun des dizaines de personnes. Aujourd'hui, ils ne sont plus que quelques-uns à pratiquer ce métier, d'une manière artisanale, plus en tant que militants qu'en tant qu'entrepreneurs, avec 2 ou 3 employés. «Nous nous sentons comme au moment d'une noyade» déclarait récemment une éditrice genevoise. La diffusion et la promotion du livre coûtent de plus en plus cher et la concurrence sur le marché français est très forte. En Suisse romande, 80% des livres vendus proviennent de France. Dans sa plus grande partie, la production est le fait de quelques grosses entreprises, basées à Paris, investissant une bonne part de leur chiffre d'affaires dans le marketing et la publicité. Le livre est considéré comme un simple produit, sans utilité publique et l'accès au marché devient très difficile pour les petits éditeurs. Particulièrement pour les Romands qui, parallèlement, voient les aides stagner ou diminuer. Comparée à l'édition française qui bénéficie du soutien actif des pouvoirs publics à tous les niveaux (Etat, région, département), l'édition suisse ne peut compter que sur des aides cantonales ou communales ponctuelles et disparates d'un canton à l'autre. Sur le plan fédéral, Pro Helvetia distribue quelques fonds pour des traductions, des livres de poche, des ouvrages sur la Suisse et l'Office fédéral de la culture accorde aux organisations professionnelles des éditeurs une subvention destinée au financement de leur participation à des foires du livre à l'étranger. C'est peu.

Si nous ne mettons pas rapidement en place une véritable politique du livre à tous les niveaux, les éditeurs romands ne pourront survivre, mettant ainsi en péril la pérennité de l'identité culturelle de la minorité francophone de Suisse romande tout en faisant disparaître un secteur d'activité économique. Les cantons ont un rôle non négligeable à jouer dans cette politique qui s'inscrit parfaitement dans l'esprit du projet de loi du Conseil d'Etat sur l'encouragement à la culture, actuellement en commission pour étude.

Diverses propositions à ce sujet ont été formulées lors du colloque «L'état des lieux de l'édition à Genève», colloque qui s'est déroulé au Centre européen de la culture en mars 1994. Plusieurs des mesures préconisées ressortissent aux compétences cantonales: création de bourses ou de prix d'encouragement à de jeunes auteurs, aide à la publication de catalogues d'éditeurs, promotion du livre pour enfants auprès des enseignants et des publications romandes à l'université, participation des éditeurs romands à la réalisation du matériel pédagogique et étude de ses implications économiques, etc. Certaines de ces propositions sont reprises dans notre motion. D'autres devraient être étudiées par le groupe de travail faisant l'objet de notre première invite.

Tels sont les motifs qui nous ont incités à déposer cette motion. Nous souhaitons la renvoyer à la commission chargée de l'étude du projet de loi sur l'encouragement à la culture. Afin que le rôle essentiel du livre soit reconnu et que l'édition, en tant qu'activité économique, puisse survivre.

Bibliographie:

Livre blanc «Etat des lieux de l'édition à Genève», Editions Zoé 1994, suivi de «propositions».

CAMPUS, magazine de l'université de Genève, mai-juin 1994.

Daniel Pennac, «Comme un roman», Editions Gallimard 1992.

Bertil Galland, «Les éditeurs en saltimbanques» dans Le Nouveau Quotidien.

Débat

Mme Claire Torracinta-Pache (S). Le thème de cette motion est probablement moins politique et moins polémique que certains sujets que nous traitons. Ici, pourtant, il nous semble que ce soutien à l'édition et à la production locale du livre que nous vous proposons aujourd'hui, M. Longet et moi-même, revêt plus d'importance qu'il n'y paraît au premier abord.

Je ferai, si vous le permettez, une remarque personnelle. En y réfléchissant, j'ai réalisé que si je n'avais pas eu des parents et des enseignants m'ayant donné le goût du livre, je ne serais probablement pas ici ce soir devant vous. J'imagine que je ne suis pas la seule dans ce cas dans cette enceinte.

Il y a un an, le parlement a renvoyé à la commission de l'enseignement - et nous y avons fait allusion tout à l'heure - un projet de loi sur l'encouragement à la culture. L'article 1 de ce projet de loi définit la mission du canton en la matière de la manière suivante : «Le canton encourage la vie culturelle dans toute sa diversité.». Or, souvent, lorsqu'on parle d'encouragement et de soutien à la culture, on pense d'abord musique, théâtre, peinture, et on pense surtout subventions. On oublie que le livre est le premier vecteur de la culture, que la production locale du livre contribue à la pérennité de notre culture romande et qu'il y a diverses manières de soutenir cette production et pas seulement par des aides financières, même si, bien sûr, elles sont nécessaires.

La situation des petits éditeurs s'est dégradée au fil des ans. L'édition est devenue une véritable industrie avec sa logique marchande, et la concentration des moyens rend l'accès au marché des petits très difficile. En fait, le livre est considéré comme un produit ordinaire. Par ailleurs, le livre, contrairement à d'autres productions culturelles, ne bénéficie pas toujours des mêmes avantages, notamment lors des discussions du GATT sur l'exception culturelle ou lors de l'application des taux de la TVA.

Or, sans éditeurs pas de livres, et sans éditeurs romands ou genevois pas ou peu de livres exprimant notre culture, notre identité, notre spécificité; tant il est vrai que même des auteurs talentueux, s'ils traitent d'études spécifiquement genevoises, auront bien du mal à se faire publier à Paris et encore plus de mal, le cas échéant, à rentabiliser leurs livres sur le marché. Si nous admettons que le livre a une utilité publique - et c'est notre cas - nous devons donc considérer que sa production et sa diffusion doivent être encouragées et soutenues au même titre que d'autres productions culturelles.

Bien entendu, en ces périodes de restrictions budgétaires, il sera difficile de dégager de nouveaux fonds pour ce secteur. Il sera non seulement difficile de les dégager, mais encore de les maintenir, car certains pourraient être tentés de supprimer des crédits culturels qui ne font pas partie de leurs priorités.

Je dois honnêtement signaler qu'il existe déjà quelques fonds publics, municipaux surtout, et cantonaux destinés à des prix littéraires, mais cette aide est beaucoup moins importante que dans d'autres cantons.

Il est d'autres mesures, n'ayant pas d'incidences financières - ou alors très minimes - qui pourraient être prises par les autorités cantonales pour agir dans notre sens. Le colloque sur l'état des lieux de l'édition à Genève en a fait l'inventaire et certaines sont reprises dans notre motion. Je n'y reviens pas en détail. Je les résumerai de la manière suivante :

- D'abord, réunir dans un groupe de concertation des représentants des cantons, de la Ville, des communes et des petits éditeurs pour étudier d'une manière constante et systématique toutes les mesures qui seraient de nature à les soutenir;

- Voir dans quelle mesure on pourrait mieux associer les éditeurs romands à la publication du matériel scolaire. Actuellement, c'est «Corome», le groupement des départements de l'instruction publique des cantons romands et les économats cantonaux, qui s'en charge. Il y a là peut-être une piste à étudier;

- Promouvoir, ou en tout cas intensifier, les publications locales genevoises et romandes dans tous les ordres d'enseignement, depuis l'école enfantine jusqu'à l'université;

- Tenter par tous les moyens de développer le goût du livre chez l'enfant et cela dès les premières classes, en évitant de recourir trop systématiquement à l'usage de la photocopie qui, outre le fait qu'elle soulève le problème des droits d'auteurs, ne remplacera jamais l'accès au livre dans son intégralité;

- Enfin, il me semblerait judicieux, sans créer de nouveaux fonds, d'étudier la possibilité de faire bénéficier certains jeunes auteurs d'aides actuellement accordées à d'autres jeunes créateurs dans le canton de Genève.

Un mot encore avant de conclure sur un point qui me paraît important. Aider les petits éditeurs à vivre ou à survivre, c'est aussi préserver des emplois, directement ou indirectement, liés à cette activité. En cette période de morosité économique, cela doit être une de nos priorités.

Nous avons demandé le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement, puisqu'elle est déjà chargée de l'étude du projet de loi sur l'encouragement à la culture et je forme le souhait - si vous êtes d'accord de la renvoyer à cette commission - qu'elle puisse auditionner les représentants des éditeurs qui avaient d'ailleurs envoyé une lettre de soutien à cette motion.

M. Bernard Lescaze (R). Cette motion a un caractère éminemment sympathique à la première lecture, et les problèmes soulevés sont suffisamment importants pour que notre groupe soit parfaitement d'accord de la renvoyer à la commission de l'enseignement.

Nous tenons toutefois à formuler quelques réserves et quelques remarques. Comme vous le savez certainement, avant de promouvoir l'édition de livres qui resteraient en stock, il faut en promouvoir la lecture. A notre avis, les pouvoirs publics ont un rôle indispensable, que ce soit sur le plan municipal ou cantonal, pour encourager la lecture. Si les livres dorment dans des stocks, vous pouvez donner des aides autant que vous le voulez aux auteurs et aux éditeurs, cela ne sert à rien ! Il faudra donc respecter le dépôt légal qui est en voie d'être supprimé, mais cela est une autre histoire.

Certaines de vos invites sont excellentes, notamment celle qui recommande une coordination romande des manuels scolaires. On peut regretter, à cet égard, qu'au cours des dernières années, le département de l'instruction publique - qui avait une autre direction - ait perdu des milliers, des centaines de milliers de francs et des dizaines et des dizaines d'heures à s'efforcer de mettre sur pied, tout seul, un manuel d'histoire qui n'a jamais vu le jour, alors que le canton de Vaud avait élaboré à l'époque un manuel qu'il avait offert à Genève et dont cette dernière n'a pas voulu. Du coup, après une quinzaine d'années, le canton de Vaud a élaboré un autre manuel d'histoire sans la participation des Genevois, et, au moment où ce manuel sort, Genève a finalement décidé, il y a deux ou trois ans, d'adopter l'ancien manuel vaudois qui avait été rejeté avec un peu de mépris quinze ans auparavant ! Mais on n'a jamais calculé les coûts de cet échec. Effectivement, une certaine coordination ne peut être que positive dans certains autres domaines que je connais sans doute moins bien.

Ensuite, vous souhaitez que l'université développe ses efforts pour mieux faire connaître les publications éditées en Suisse romande. Mais, à l'époque de la coordination romande, je vous signale qu'il existe à Lausanne un centre d'étude des lettres romandes rattaché à la faculté des lettres de l'université de Lausanne extrêmement actif et dynamique. Il est bien connu même de nos étudiants genevois. On peut encore davantage le faire connaître, mais si nous devions faire des efforts dans ce sens, il faudrait, bien entendu, s'associer étroitement à ce qui se fait à Lausanne où les archives littéraires romandes se sont établies et où un travail très positif est effectué.

Enfin, je constate que l'on pourrait également, très simplement, sans coût aucun, recommander, dans les leçons de français du cycle d'orientation à Genève, l'emploi d'ouvrages écrits à l'origine en français et non pas de traductions de livres anglais ou allemands. Autant il est intéressant de connaître la littérature d'autres pays, autant je pense qu'à un âge relativement tendre, lors des leçons dans sa langue maternelle, l'enfant devrait lire des livres écrits originellement en français et, pourquoi pas, par des auteurs suisses romands, si possible. Ce sont des mesures très simples, très efficaces et qui ne coûtent rien.

C'est pourquoi nous nous réjouissons que votre motion soit renvoyée à la commission de l'enseignement, mais, de grâce, ne donnez pas à de nombreux éditeurs romands de faux espoirs sur d'éventuelles subventions. Vous connaissez fort bien la situation financière de l'Etat et vous savez également très bien que l'on peut faire de l'édition, et même de l'excellente édition, sans avoir recours aux subventions.

Mme Nelly Guichard (PDC). Voici une proposition de motion qui arrive à point nommé pour être étudiée par la commission de l'enseignement dans le cadre du projet de loi sur l'encouragement à la culture, les problèmes qu'elle soulève dans ces invites allant précisément dans le sens de cette loi.

Les sondages montrent que le lecteur romand «consomme» beaucoup de livres, mais ses habitudes sont surtout orientées vers la littérature française, avant tout pour des raisons d'édition et aussi en raison des habitudes prises à l'école et pendant les études. C'est dans cette direction qu'il faut chercher des pistes. Donner envie de lire aux enfants est un des buts de l'école, mais faire connaître aux jeunes - aux enseignants aussi, d'ailleurs - la littérature, les auteurs romands, voilà qui est peu courant et qui mérite réflexion et, si possible, stimulation. Celle-ci ne vient pas uniquement de l'école, mais cette dernière reste un vecteur important.

C'est pourquoi notre groupe soutient le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement.

M. Armand Lombard (L). Actuellement, l'édition genevoise n'est pas au mieux et pourtant elle a eu ses heures de gloire au cours des siècles. Je vous rappelle - ce sera vite fait, car les moments pointus de l'édition genevoise n'ont pas été fréquents - qu'au XVIème siècle l'imprimerie et la diffusion des oeuvres genevoises au moment de la Réforme ont eu un énorme développement - je pense en particulier à Robert Estienne. Ensuite, les choses se sont faites à Paris, centre culturel naturel de la francophonie. Puis, une édition relativement florissante est apparue pendant la guerre - vous vous rappelez peut-être des éditions Gébert - et, plus récemment, le Salon du livre a redonné une certaine vigueur à la distribution du livre et aux éditeurs.

La motion qui nous est soumise relève bien le problème de l'édition romande et sa solution est positive, mais partielle : elle en appelle aux services du département de l'instruction publique. Pour moi, les éditeurs genevois traversent un mauvais moment par manque de coordination, par manque d'une nécessaire dynamique et par manque de masse critique. En effet, même si les livres sont bons, la masse critique est trop faible : quatre cent mille personnes à Genève, ou même un million et demi pour la Suisse romande - et encore, un livre genevois n'atteint jamais ou rarement Fribourg, il faut déjà que le livre soit très très très bon et que l'éditeur soit farouchement dynamique !

Une des solutions serait donc d'élargir la masse de lecteurs potentiels. Cela signifie qu'il faut passer par Paris, ce que font les écrivains français. Nous pouvons toutefois, en Suisse romande, trouver un certain nombre de pistes, mais ce «nous pouvons» n'est pas l'Etat, à mon sens, mais les éditeurs. Du reste, ils travaillent dans ce sens-là, mais, maintenant, ils doivent se mobiliser pour créer un marché plus large.

Le groupe libéral est prêt à étudier les propositions de cette motion avec intérêt en commission. Il ne retiendra pas la proposition concernant la photocopieuse pernicieuse, qui ne nous paraît pas être une trouvaille ! Le groupe de travail proposé entre l'Etat, la Ville, les communes et la librairie est une suggestion positive, mais il faut y intégrer les éditeurs. Il ne faut pas qu'il y ait trois représentants du secteur public contre un malheureux du cercle de la librairie. Il faudrait plus d'équilibre.

L'Etat doit être un partenaire de la Cité par sa capacité à promouvoir un certain développement au niveau du département de l'instruction publique. Mais je n'irai pas jusqu'à suivre mon collègue Lescaze qui propose de se limiter aux oeuvres d'écrivains romands dans les écoles. A mon avis, il faut continuer à puiser dans la littérature française, même si l'édition genevoise doit se réveiller, s'outiller et se dynamiser. L'Etat est un partenaire, il peut être un stimulateur, mais je ne crois pas qu'il puisse être plus. C'est un des points intéressants de la mise au point d'une structure régionale : on ne peut plus se contenter de travailler à la petite échelle qui est la nôtre.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Le travail en commission montrera ce qu'il est possible de faire au niveau de l'Etat et ce qui ne l'est pas, s'agissant de cette motion. Il montrera également quelles sont les limites entre le fait de favoriser un contexte dans lequel les éditeurs peuvent s'épanouir et entre le fait de soutenir une profession plutôt qu'une autre. Ce débat ne manque pas d'intérêt.

Je vous signale, par ailleurs, que cette motion est le corollaire de certaines démarches effectuées par les éditeurs genevois depuis le mois de mars de cette année. Le département les a entendus et a travaillé sur la base d'un groupe de travail pour savoir ce qu'il était possible de faire. Ces mêmes éditeurs ont reçu, le 21 juillet de cette année, la réponse à pratiquement toutes les questions posées dans la motion. Il sera intéressant de savoir ce qu'il en est du point de vue de la commission, mais je tiens à ce que ce débat ait lieu par rapport à l'ensemble de la culture pour déterminer les limites d'une intervention de l'Etat. Vous verrez que cette intervention, si vous ne voulez pas troubler l'ensemble du marché, doit être forcément limitée.

Vous me permettrez une petite remarque ironique. Nous discutions tout à l'heure du projet de loi sur les grandes manifestations et, à ce point-là de l'ordre du jour, M. Gilly contestait le Salon du livre, ce qui me semble paradoxal !

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'enseignement et de l'éducation.

M 729-A
10. Rapport de la commission de l'enseignement et de l'éducation chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Erica Deuber-Pauli, Claude Blanc, Alain Sauvin, Fabienne Bugnon, René Koechlin et Françoise Saudan concernant la reconnaissance de «La Voie Lactée» comme école spéciale. ( -) M729
Mémorial 1991 : Annoncée, 1935. Développée, 2262. Commission, 2276.
Rapport de M. Roger Beer (R), commission de l'enseignement et de l'éducation

Introduction

C'est lors de la séance du Grand Conseil du 30 mai 1991 que la proposition de motion concernant la reconnaissance de La Voie lactée comme école spéciale (M 729) a été renvoyée à la commission de l'enseignement et de l'éducation. Sous la présidence de Mme Yvonne Humbert, la motion a été abordée une première fois le 12 juin 1991. Ensuite, sous la présidence de M. Pierre-François Unger, les commissaires ont retravaillé cette motion les 11 et 18 mai 1994.

M. Dominique Föllmi, alors conseiller d'Etat chargé du département de l'instruction publique. MM. André Barthassat, directeur adjoint du service médico-pédagogique (SMP), Benvenuto Solca, adjoint de direction au SMP, ainsi que Jean Lehmann, directeur de l'office de la jeunesse, assistaient également à ces séances, notamment pour répondre aux différentes questions des commissaires. Qu'ils trouvent ici la reconnaissance des députés pour leur efficace collaboration.

Enfin, la commission a procédé à l'audition des représentants de La Voie lactée. Les députés ont entendu Mme Catherine Formica, présidente de l'Association des parents, Mme Dina Borel, directrice de La Voie lactée, ainsi que Mme Danielle Bellet.

Objet de la motion

Avec leur projet, les motionnaires entendent rendre le Grand Conseil et le Conseil d'Etat attentifs aux problèmes d'une école spéciale, La Voie lactée. Il s'agit d'une institution privée qui reçoit des enfants de 6 à 12 ans souffrant de problèmes du domaine psychique (comportement, personnalité, etc.). Souvent, les élèves présentent également de grosses difficultés scolaires. La Voie lactée essaie de préparer ses élèves à intégrer ou réintégrer la scolarité obligatoire, soit au niveau primaire, soit au niveau des cycles d'orientation. Lorsqu'il n'y a pas de possibilité d'intégration à 12 ans, l'enfant peut être gardé jusqu'à 14 ans pour ensuite accéder à une classe préprofessionnelle ou entrer en préapprentissage.

La Voie lactée offre une réponse alternative aux problèmes des enfants; son slogan résume d'ailleurs parfaitement l'objectif et l'esprit de l'institution: «Vivre, c'est formidable. Mieux vivre, c'est le but de La Voie lactée».

Ces enfants sont envoyés à La Voie lactée soit par le service médico-pédagogique de certaines communes (Meyrin, Lancy, Eaux-Vives) ou même par des inspecteurs et des maîtres principaux. Des psychiatres privés ont également recours à La Voie lactée. L'école est organisée en 4 groupes de 6 enfants qui travaillent chacun avec un responsable. Il s'agit de 4 psycho-pédagogues à plein temps; chacun est chargé d'enseigner certaines matières. Dans d'autres domaines, comme le sport, ces groupes éclatent; les enfants se rendent alors dans les écoles publiques de Meyrin où salle et matériel sont mis à leur disposition. Enfin, le repas étant considéré comme un moment éducatif, les enfants mangent à l'école ou dans le cadre des cuisines scolaires meyrinoises.

Les méthodes utilisées dans cette institution sont inspirées de la psychologie génétique (Piaget), de la psychologie dynamique (Dolto) et de la pédagogie active et technique (Freinet). La Voie lactée considère l'enfant comme un tout et l'apprentissage scolaire comme un moyen de développement global. La Voie lactée n'est donc pas uniquement une école destinée à des enfants qui ne présentent que des problèmes scolaires. Les parents collaborent au travail d'évaluation et rencontrent régulièrement les responsables de l'institution. Ils sont associés aux travaux et suivent de près l'évolution de leur enfant. L'excellent niveau de cette institution est reconnu par les centres de formation. En effet, La Voie lactée reçoit de nombreux stagiaires, issus par exemple de l'école d'infirmière en psychiatrie, de l'école d'études sociales où encore de la FAPSE (faculté de psychologie et des sciences de l'éducation).

La Voie lactée a été créée en 1986 par deux psycho-pédagogues formés à l'université de Genève chez Jean Piaget. Dès sa 2e année, La Voie lactée a bénéficié d'une reconnaissance cantonale implicite en tant qu'école spéciale: 8 enfants sont alors pris en charge par l'assurance-invalidité. Il y aura même jusqu'à 18 enfants reconnus par l'AI. Le service médico-pédagogique (SMP) confirme cette reconnaissance. La Voie lactée adresse alors à l'office fédéral des assurances sociales (OFAS) sa demande de reconnaissance comme école spéciale bénéficiant de l'assurance-invalidité (AI).

En 1990, la décision tombe, sévère et abrupte: sans reconnaissance formelle de l'Etat de Genève, l'assurance-invalidité n'accorde plus de contributions financières aux enfants inscrits à La Voie lactée. En fait le DIP avait décidé de ne plus reconnaître cette école. Il est évident que sans ces subsides de l'assurance-invalidité (AI), de nombreux enfants en situation psychique, psychologique, affective ou scolaire difficile ne pourront plus bénéficier de l'enseignement prodigué par La Voie lactée.

La présente motion demande donc au Conseil d'Etat d'expliquer, voire de revoir sa position vis-à-vis de La Voie lactée en reconnaissant cette institution comme école spéciale d'utilité publique. Cela permettrait également à l'office fédéral des assurances sociales de revenir sur sa décision de 1990.

Auditions

Lors de la première séance, en 1991, la commission de l'enseignement et de l'éducation a auditionné Mmes Borel et Bellet, fondatrices de La Voie lactée. Aucune solution n'avait été trouvée par les députés de l'époque. C'est pourquoi, après les élections et avec le renouvellement de la commission, les députés ont souhaité procéder à une nouvelle audition, notamment pour évaluer l'actualité de la motion ainsi que l'évolution de la situation de cette institution. Cette fois, Mme Dina Borel était accompagnée de Mme Catherine Formica, présidente de l'Association des parents.

Les représentantes de La Voie lactée décrivent leur institution et répondent aux questions des députés. Le succès de l'école continue, mais les difficultés financières dues à la non-reconnaissance de l'AI vont en s'aggravant. Un résumé de cette intervention a été remis aux députés. Il figure en annexe au présente rapport. Au fil de la discussion, il s'avère que tout le problème de la reconnaissance de La Voie lactée par le DIP semble venir de la formation et des titres des collaborateurs de l'institution.

En fait, il semble bien que La Voie lactée couvre des besoins auxquels le département de l'instruction publique ne peut actuellement pas répondre. Les classes spécialisées qui existent déjà n'offrent pas la même approche psycho-pédagogique qui semble faire le succès de cette institution. Actuellement, La Voie lactée est surveillée par un inspecteur, un superviseur et un psychiatre qui visite l'école tous les 15 jours.

En ce qui concerne le budget de La Voie lactée, les responsables estiment qu'il faudrait pouvoir disposer de 120 F par enfants pendant 180 jours scolaires, cette somme comprenant le repas de midi. Actuellement, la somme maximum demandée atteint 15 000 F par an. Il est clair que cet écolage est très élevé et qu'il arrive souvent que des parents ne puissent pas l'acquitter. C'est alors l'institution elle-même qui entreprend des recherches de fonds pour venir en aide à ces parents.

Travaux de la commission

Trois ans se sont écoulés depuis le dépôt de cette motion. Le bien-fondé et la valeur de La Voie lactée ont été longuement exposés lors de la séance du 30 mai 1991 (pages 2262 à 2276 du mémorial, N°20, 52e législature). Ces différents propos restent parfaitement d'actualité, mais la problématique concernant la reconnaissance de cette école a évolué. Dorénavant, la formation des institutrices et des instituteurs suivra une voie universitaire. Les études pédagogiques traditionnelles ont vécu. De ce fait, la reconnaissance des «enseignants» de La Voie lactée, de formation psycho-pédagogique universitaire, devrait pouvoir être considérée sous un angle nouveau.

Il s'avère également qu'une reconnaissance formelle de l'école et de ses enseignants par le DIP n'entraîne pas obligatoirement le versement de subsides. Cette reconnaissance est toutefois nécessaire, voire indispensable pour que l'OFAS, l'Office fédéral des assurances sociales, participe à l'écolage de certains enfants. C'est pourquoi, après avoir entendu les représentants du DIP - dont la position a évolué de façon favorable -, les députés ont estimé que la motion 729 et ses invites au Conseil d'Etat méritaient réponse. Ils suivent donc les invites de cette motion.

Finalement, c'est à l'unanimité, Mesdames et Messieurs les députés, que les commissaires vous proposent de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat en l'invitant:

1. à faire connaître les raisons qui ont conduit à la décision de non-reconnaissance;

2. à examiner le cas échéant sa position et à veiller à assurer à tous les enfants de La Voie lactée le versement de l'assurance-invalidité et la subvention cantonale;

3. à reconnaître La Voie lactée comme école spéciale d'utilité publique;

4. à intervenir auprès de l'office fédéral des assurances sociales pour le faire revenir sur sa décision.

Annexe: intervention de Mme Dina Borel, directrice de La Voie lactée

ANNEXEDébat

Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). Permettez-moi, tout d'abord, de remercier M. Roger Beer pour l'excellent rapport qu'il a rédigé sur les travaux de la commission, le président de la commission, M. Unger, qui a activé les travaux de cette motion, pendante devant la commission de l'enseignement depuis trois ans, et puis, bien sûr, Mme la présidente du département qui a su lever les obstacles qui paraissaient insurmontables au départ. Je la prie de transmettre également mes remerciements à M. Jean Lehmann, directeur de l'office de la jeunesse, qui s'est montré particulièrement fair-play dans cette affaire.

Il convient aussi de saluer le travail qui est effectué depuis huit ans dans l'école de «La Voie Lactée» auprès d'enfants qui ont des difficultés d'apprentissage et d'adaptation en vue de leur intégration scolaire, professionnelle et sociale. Il faut souligner encore l'extraordinaire ténacité des responsables de cette école qui ont continué leur mission auprès de ces enfants, malgré les difficultés, avec une force de conviction acquise à la fois par leur formation et leurs premières expériences. Cette formation s'est effectuée dans notre université. Ce sont des anciennes étudiantes, puis collaboratrices de Jean Piaget, qui dirigent «La Voie Lactée», et c'est peut-être cette formation remarquable qui leur a donné, d'une part, la compétence de réussir là où d'autres échouent, et, d'autre part, cette ténacité dans la poursuite de leurs objectifs. Nous avons été témoins de cette obstination, et nous sommes particulièrement contents qu'une motion émerge unanimement des travaux de la commission.

Nous serons également très heureux le jour où les invites de cette motion obtiendront tous leurs effets positifs.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Je voudrais m'associer aux remerciements de Mme Deuber-Pauli pour M. Beer et surtout remercier la commission de l'enseignement pour son unanimité.

Cette motion a été déposée en mai 1991, nous sommes en septembre 1994. Je vous avais alors dit mon enthousiasme pour le projet de cette école. Aujourd'hui, je suis extrêmement satisfaite que tous les membres de la commission reconnaissent son utilité publique. Il aura fallu la ténacité de l'équipe enseignante, la ténacité des parents, leur foi permanente dans ce projet pédagogique pour faire vivre, ou plutôt survivre, l'école sans les subventions de l'assurance-invalidité.

Aujourd'hui, cette motion est renvoyée au Conseil d'Etat. Ses invites sont très claires, aussi j'espère qu'elle sera traitée très rapidement par ce dernier pour intervenir auprès de l'Office fédéral de manière déterminée.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Le renvoi de cette motion nous impose de travailler dans des délais rapides.

Je relèverai simplement que les esprits changent, ce qui n'est pas nécessairement une mauvaise chose. En l'occurrence, je pense que c'est une très bonne chose qui montre la façon d'appréhender le problème en fonction d'objectifs et non pas en fonction des embûches administratives que l'on envisage à telle ou telle étape d'un projet. C'est, je crois, le rôle de l'administration de regarder ce qui est fait, pourquoi cela est fait, s'il est possible que ce soit fait et non pas de se préoccuper si tel ou tel article du règlement peut empêcher ce qui est à faire. Ce dossier a beaucoup évolué. Il y avait un certain nombre de conditions à remplir, notamment de la part de l'institution à l'égard de l'institution fédérale, et nous allons tenter de la faire reconnaître par l'autorité fédérale. Nous étudions ce dossier de manière intelligente et non avec des oeillères. C'est cela qui a changé. La ténacité de la commission, la ténacité de l'institution et l'ouverture d'esprit des deux partenaires ont permis de faire évoluer la discussion au cours des dernières années, il faut le saluer.

Je me joins à tous ceux qui souhaitent que ce dossier aboutisse.

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

MOTION

concernant la reconnaissance de La Voie lactée comme école spéciale

LE GRAND CONSEIL,

considérant:

que l'école active La Voie lactée est une école en nom collectif à but non lucratif, consacrée à la prise en charge spécifique et personnalisée d'enfants présentant des difficultés d'apprentissage et d'adaptation en vue de leur intégration scolaire et sociale;

que la création de cette école en 1986 a été encouragée par les responsables du service médico-pédagogique dépendant du département de l'instruction publique, qui n'a, depuis lors et jusqu'en 1990, cessé d'y envoyer des enfants et de reconnaître à ceux-ci le droit aux subsides scolaires de l'assurance-invalidité et, par conséquent, a reconnu à cette école les qualités répondant aux besoins scolaires de ces enfants;

que le département de l'instruction publique - par l'entremise du service médico-pédagogique - a au surplus explicitement reconnu La Voie lactée comme école spéciale et verse aux enfants bénéficiaires de l'assurance-invalidité un subside de 16 F par jour scolarisable;

que La Voie lactée compte actuellement 23 élèves, dont 15 au bénéfice de l'assurance-invalidité (elle en a eu jusqu'à 19);

que l'automne dernier, l'office fédéral des assurances sociales a communiqué sa décision de ne pas reconnaître La Voie lactée comme école spéciale et, par conséquent, de priver à l'avenir ses élèves du droit aux subsides de l'assurance-invalidité;

que la reconnaissance de La Voie lactée comme école spéciale susceptible de recevoir pour ses enfants les subsides de l'assurance-invalidité passe par la reconnaissance cantonale;

que cette décision place les parents dans une situation financière telle que certains ne pourront pas payer l'écolage de leurs enfants à La Voie lactée,

invite le Conseil d'Etat

1. à faire connaître les raisons qui ont conduit à la décision de non-reconnaissance;

2. à examiner le cas échéant sa position et à veiller à assurer à tous les enfants de La Voie lactée le versement de l'assurance invalidité et la subvention cantonale;

3. à reconnaître la Voie lactée comme école spéciale d'utilité publique;

4. à intervenir auprès de l'office fédéral des assurances sociales pour le faire revenir sur sa décision.

 

I 1906
11. Interpellation de Mme Erica Deuber-Pauli : Ouverture de l'institut d'architecture universitaire de Genève. ( )I1906

Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). La loi votée le 24 juin 1994 par le Grand Conseil a décidé l'ouverture d'un nouvel institut d'architecture de l'université de Genève, en remplacement de l'école d'architecture de l'université de Genève, jugée obsolète, pour le 1er octobre 1994. On se souviendra qu'en juin il restait plusieurs démarches à mener de front. Il fallait mettre sur pied une commission d'évaluation des fonctions chargée d'établir un préavis sur les enseignants sortants et proposer des nominations pour le nouvel institut. Le rectorat s'en est chargé, la commission a rendu son rapport le 15 juillet, rapport que le rectorat a approuvé. Le collège des recteurs et doyens s'est contenté pour sa part, le même jour, d'en prendre acte sans proposer formellement de nomination. Des lettres sont parties le jour même pour informer les trente-cinq enseignants, qui avaient fait acte de candidature et avaient été entendus, du résultat du travail d'évaluation de la commission les concernant.

Il fallait, en second lieu, préparer un plan social de réinsertion pour les enseignants non retenus. Le rectorat s'était engagé à examiner chaque cas et à ne licencier personne. Le rectorat devait s'en charger. Il ne l'a pas fait jusqu'à présent. Il envisage désormais de le faire. En effet, il doit auditionner les personnes non retenues, leur accorder des entretiens afin qu'elles puissent bénéficier d'un examen attentif de leur avenir professionnel. Mme Brunschwig Graf, présidente du département, a annoncé que cela serait fait selon un calendrier qui nous satisfait. Mais, pour avoir négligé de l'annoncer quand partaient les lettres d'information du 15 juillet, on se trouve aujourd'hui devant un recours contre les conclusions de la commission d'évaluation. Les recourants ont constitué un avocat qui plaidera le vice de procédure, le non-respect du délai référendaire pour déposer les conclusions de la commission d'évaluation devant le rectorat et devant le CRD. En effet, tout cela s'est passé le 15 juillet, soit quinze jours avant l'échéance de ce délai référendaire. Mais attention, même si le recours des personnes non retenues est légitime - je comprends que l'on puisse faire recours dans une telle situation - l'artillerie que pourrait produire un avocat risque d'être faible. En effet, le 15 juillet, la commission d'évaluation s'est contentée de donner un avis, sans prendre de décision. Le conseil des recteurs et doyens n'a pas pris non plus de décision; seules des lettres d'information ont été envoyées aux trente-cinq candidats entendus leur donnant le résultat de la consultation de la commission consultative.

Rappelons que Mme Brunschwig Graf, elle-même, avait appuyé cette loi avec énergie et qu'elle s'était battue contre ceux - dont certains d'entre nous sur ces rangs - qui allaient trop vite en besogne. Elle s'est battue pour que cette loi entre en vigueur cet automne. Rappelons également que dans notre rapport de minorité, déposé par M. Boesch, il était demandé que la commission d'évaluation des fonctions soit étayée, qu'elle reçoive l'approbation unanime du rectorat, du Conseil d'Etat et, bien sûr, qu'elle donne satisfaction à la commission de l'université du Grand Conseil. C'est donc une procédure parfaitement transparente qui s'est déroulée au cours du mois de juillet, irréprochable selon les règles de l'université, sous la direction du professeur Robert Roth et avec l'approbation de notre Grand Conseil.

Or, dans sa conférence de presse donnée le 13 septembre, qui présentait la situation actuelle de l'école, sur laquelle je ne reviens pas ici, soit en substance que l'école n'ouvrirait le ler octobre que pour le troisième cycle et que l'ouverture du deuxième cycle était renvoyée à octobre 1995, Mme Brunschwig Graf a dit, je cite : «En application de l'article 43, alinéa 3, de la loi sur l'université, chaque dossier de candidature des membres du corps professoral sera soumis individuellement à un expert scientifique ou fera l'objet tout prochainement d'une audition ad hoc.».

L'objet de mon interpellation est que ce texte me paraît ambigu. Madame la présidente, si cela signifie que l'on repart à zéro et qu'une nouvelle commission réévalue tout le monde pour déposer d'autres conclusions, je le dis d'emblée, cela me paraît inacceptable ! La seule procédure acceptable consiste - dès lors que la commission d'évaluation des fonctions a fait son travail au mois de juillet - à ce qu'une commission d'experts, nommés par le Conseil d'Etat, examine les dossiers scientifiques des professeurs ordinaires recommandés par la commission d'évaluation et énonce un préavis de nomination à l'intention du Conseil d'Etat. Cette démarche doit s'accompagner, bien entendu, de la mise en oeuvre du plan social de réinsertion avec audition et examen des dossiers des candidats non retenus pour voir avec ceux-ci comment poursuivre leur carrière professionnelle. Mais les deux démarches ne sauraient être confondues sans remettre fondamentalement en question une procédure approuvée par notre Grand Conseil, activée par le rectorat et approuvée par le Conseil d'Etat.

Je vous demande donc, Madame la présidente, de me donner une réponse à cette interrogation. Je sais qu'il est question de repêchage de certains candidats non retenus. Si cela était le cas et si cela devait se justifier, c'est bien entendu à la commission chargée d'examiner le plan social de réinsertion qu'il incomberait de proposer ce repêchage en recommandant certains candidats au rectorat.

J'insiste particulièrement sur la séparation des deux procédures. Il y a eu négociation entre le DIP et les syndicats, le SIT en particulier, et il a été décidé de ne pas changer en cours de route, sous la pression, la procédure décidée. Nous acceptons - sans gaieté de coeur, d'ailleurs - le renvoi de l'ouverture du deuxième cycle en 1995, pour des raisons techniques majeures qui font obstacle à la nomination des professeurs nécessaires cette année. Nous acceptons cette procédure tout en disant que, s'il y avait eu moins d'atermoiements au rectorat, l'ouverture du 2ème cycle aurait pu avoir lieu. Mais je vous demande au moins, Madame la présidente, de respecter les procédures mises en oeuvre en juillet et de procéder comme je l'ai précisé.

Enfin, en conclusion, il reste trois choses à faire : ouvrir le deuxième cycle en octobre 1995, procéder à la nomination des professeurs retenus par la commission d'évaluation des fonctions après un préavis du rectorat et mettre en oeuvre le plan social. Si ce plan avait été entrepris à temps, on aurait évité le désordre qui a suivi la nouvelle des résultats de la commission d'évaluation des fonctions. Si au demeurant le recteur, sous la pression des doyens ou de Mme la présidente du DIP, entend tout recommencer, nous, nous envisageons de ne pas accepter cette procédure.

Je vous rappelle aussi, pour que l'information soit complète, que le règlement et les plans d'étude du nouvel institut d'architecture ont été approuvés par l'université, avec félicitations, que le choix des professeurs invités pour assurer le deuxième et le troisième cycle avait été pressenti, que ceux-ci donnaient toute satisfaction à ceux qui les ont vus et qu'il faut aujourd'hui encore, pour que cet institut d'architecture fonctionne, trouver des locaux, ce que j'engage le Conseil d'Etat à favoriser par des recherches assidues. L'institut d'architecture, lui-même, a procédé à des recherches, a fait des propositions et il serait utile que celles-ci aboutissent.

Enfin, la loi prévoit le dépôt d'un rapport du Conseil d'Etat devant le Grand Conseil à fin décembre au sujet de l'ouverture de l'institut d'architecture. Je me réjouis que ce rapport fasse état d'un climat de confiance reconstitué et d'un peu d'enthousiasme pour l'ouverture du nouvel institut.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. J'ai failli remercier Mme Deuber-Pauli de sa leçon. En effet, elle m'a expliqué quelle était la procédure que j'étais censée mettre ou non en place !

Ma réponse pourrait se limiter à une explication de texte, Madame Deuber-Pauli. Le mot «ou» n'est pas «et». Il donne le choix d'une alternative. Il y a ceux qui sont soumis à l'expertise scientifique et ceux qui sont soumis à une procédure ad hoc. Le «ou» veut bien dire ce qu'il veut dire. Cela concerne effectivement ceux qui n'ont pas été retenus en termes de proposition.

Je suis toujours un peu gênée, lorsque les interpellations commencent par nous prêter des intentions ou des formulations qui pourraient laisser penser que nous n'avons pas l'intention de respecter ce qui a été voulu et ce qui a été dit. J'ai déjà eu l'occasion de dire en privé quelle était l'intention du département. Cela a été précisé et répété aux différentes parties et il n'y a aucune ambiguïté ni dans le texte ni dans nos intentions, ni même d'ailleurs dans les lettres envoyées par le rectorat. L'ambiguïté n'existe pas.

Cela étant, je précise - pour être tout à fait claire - qu'il n'était pas possible d'entériner les décisions de la commission par le Conseil d'Etat dès lors que le collège des recteurs et doyens ne s'était pas prononcé. C'est tout. Cela a été expliqué en conférence de presse, et je crois qu'il n'y a pas lieu d'y revenir.

Je tiens malgré tout à souligner ici que la procédure n'a pas été modifiée à cause des recours et des oppositions, mais bel et bien parce que l'université, dans sa procédure de rectification, n'avait pas terminé son travail. En effet, il est important qu'un institut fonctionne avec transparence, s'agissant du choix de ses enseignants, ceux déjà en place ou ceux qui seront choisis sur la base d'un concours et d'un appel d'offres international.

Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). Je remercie Mme la présidente du département des précisions apportées. Je la remercie en particulier de l'avoir fait publiquement, ce qui était mon objectif.

Les dernières informations que je possède concernent la manière dont la commission d'experts sera constituée pour la nomination des professeurs. Le rectorat songe en effet à ne pas désigner lui-même des experts, mais à faire appel pour cela à l'EPFL. J'aimerais bien que cette consultation d'expertise pour les nominations des professeurs se déroule sereinement, et je remercie d'avance Mme la présidente du département d'y veiller.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Il serait souhaitable, pour la sérénité des débats, pour la sérénité des démarches avec l'institut, qu'à chaque stade de la procédure on évite d'expliquer en séance plénière ce qui est encore du domaine des tiroirs et des réflexions du rectorat. En effet, c'est quand même le département qui devra approuver les propositions des experts, et je souhaite vivement que ce type de choses en cours de procédure ne soit pas abordé en séance publique ! (Applaudissements.)

Cette interpellation est close.

 

M. Claude Blanc (DC). Les députés qui ont eu la curiosité de se rendre à la buvette tout à l'heure ont appris avec plaisir que c'était l'anniversaire du président et qu'il offrait un verre à tous ceux qui y passaient ! (Rires et applaudissements.) Je tiens donc d'abord à le remercier; nous avons bu à sa santé en sachant qu'il avait soif sur son perchoir. Je tiens également à lui souhaiter une longue et heureuse vie ! (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur Blanc !

M. Jean Opériol(PDC). Je confirme quant à la forme les propos de mon collègue Blanc et je vous invite à répéter l'exercice lors de la séance de nuit, car c'est aussi mon anniversaire. (Toute l'assemblée applaudit.)

P 1032-A
12. Rapport de la commission de l'enseignement et de l'éducation chargée d'étudier la pétition concernant un grave conflit à l'Ecole Le Bon Secours à propos de l'avenir de la formation. ( -)P1032
Rapport de Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S), commission de l'enseignement et de l'éducation

Le 29 avril, une conférence de presse tenue par le syndicat SIT et par des enseignantes de l'Ecole de soins infirmiers et de sages-femmes Le Bon Secours, rendait public le conflit qui opposait depuis plusieurs mois la direction de l'école et le Conseil de Fondation d'une part et des enseignantes et les syndicats d'autre part au sujet de l'avenir de la formation des sages-femmes à Genève.

Dans la foulée, le même jour, une pétition était déposée au Grand Conseil et 4 enseignantes du secteur sages-femmes donnaient leur démission surprise. Le mois précédent une enseignante du même secteur avait déjà annoncé son départ, ce qui portait donc à 5, sur un total de 9, le nombre de démissionnaires.

Geste de mauvaise humeur? Démarches excessives? Situation suffisamment grave et détériorée pour en arriver à une réaction si extrême?

Doutant dans un premier temps de la nécessité de se pencher sur un dossier aussi chaud, la commission de l'enseignement a su prendre le recul nécessaire et appréhender le problème avec discernement et objectivité. La qualité du travail et de la réflexion s'en est ressentie et le vote unanime des députées et députés en fin des travaux de commission en est la preuve concrète. Que les commissaires en soient ici remerciés.

Les événements des derniers mois

- Durant le dernier trimestre de l'année 1993, les divergences sur l'avenir de la formation des sages-femmes s'amplifient. Une partie des enseignantes et la responsable de la formation des sages-femmes à l'Ecole Le Bon Secours ne partagent pas les choix faits par la direction du Bon Secours et le Conseil de Fondation.

- En décembre 1993, la responsable du secteur sages-femmes est licenciée avec effet immédiat. L'association suisse des sages-femmes (ci-après ASSF), section de Genève, en est avertie par l'intéressée.

- Fin 1993 - début 1994, estimant ne pouvoir dialoguer avec la direction, l'ASSF, section de Genève, tente de nombreuses démarches auprès du DIP et du Conseil de Fondation afin d'être entendue. Demande exprimée aussi en décembre 1993, par la seule représentante du milieu des sages-femmes au Conseil de Fondation, de nommer une commission neutre, afin d'évaluer la situation et de trouver une solution aux conflits. Ces interventions restent sans résultats. Ce n'est que le 16 mai 1994, que le Conseil de Fondation entendra une délégation de la section genevoise de l'ASSF, alors que le conflit a déjà éclaté publiquement.

- Le 10 février 1994, l'assemblée générale de la section genevoise de l'ASSF vote à l'unanimité une résolution mandatant le comité afin qu'il entreprenne les démarches nécessaires pour garantir l'autonomie de la formation. C'est sur la base de ce mandat que le comité déposera sa pétition le 29 avril 1994.

- Enfin ce même 29 avril, estimant ne plus pouvoir travailler dans de telles conditions, quatre des huit enseignantes restantes remettent leur lettre de démission, dont l'adjointe de la responsable de secteur licenciée en décembre.

- De leur côté, la direction du Bon Secours ainsi que les quatre enseignantes restant en fonction contestent les accusations et reproches et assurent que l'autonomie de la formation des sages-femmes est tout à fait respectée au sein de l'Ecole Le Bon Secours, puisqu'une sage-femme en est responsable.

Travaux de la commission

Dès le début des travaux, les commissaires ont clairement affirmé qu'il ne leur incombait pas de se prononcer sur le licenciement de la responsable du secteur sages-femmes. Le dossier a été porté devant le Tribunal des prud'hommes, et c'est à cette instance seule d'analyser la situation et de rendre son verdict.

Par contre, sur les problèmes soulevés par les pétitionnaires et leurs demandes, il est du ressort du Grand Conseil d'y rendre une réponse.

Pour mieux comprendre.....

L'Ecole de soins infirmiers et de sages-femmes Le Bon Secours est une fondation de droit public, dirigée par Mme M-T. Engelberts, directrice. Un Conseil administre la fondation. Il lui incombe d'assurer la réalisation des buts fixés par la loi, et il établit chaque année un rapport de gestion qu'il soumet au Conseil d'Etat. C'est la direction de l'école qui a la charge d'établir les programmes. Ceux-ci sont ensuite soumis au Conseil de Fondation, puis au département.

L'Ecole est subdivisée en secteurs, gérant chacun une formation et avec à la tête de chacun d'eux un ou une responsable qui est cependant dépendant de la directrice quant aux choix de formation. Un des reproches formulés par les pétitionnaires est que dans les discussions visant à prendre les décisions concernant la formation des sages-femmes, seule une de ces responsables ressort de cette profession, les autres représentant tous la profession d'infirmier - ère, de même que la directrice générale. D'où l'impression d'être minorisées dans les approches spécifiquement sage-femme et de manquer d'autonomie dans les choix.

Le Conseil de Fondation connaît aussi le même genre de décalage. Aucun des deux médecins nommés n'est obstétricien, et sur les 8 sièges délégués à des représentants des professionnels, 7 sont occupés par des infirmières ou infirmiers. Une seule sage-femme siège donc au Conseil de Fondation.

A titre de comparaison, le centre d'enseignement des professions de la santé et de la petite enfance (CEPSPE) a à sa tête une directrice administrative, et sous sa surveillance, un collège de direction, formé des directeurs de chaque école (physiothérapeutes, pédicures, hygiénistes dentaires, etc.). A Genève, parmi toutes les formations des professions de la santé, seule celle de sages-femmes n'a donc pas de statut d'école.

Enfin, dans les autres cantons, on trouve deux types de structure: soit il s'agit d'écoles de sages-femmes indépendantes, soit d'écoles conjointes à une formation de soins infirmiers, mais disposant chacune d'une direction propre. Genève là aussi fait figure d'exception en étant le seul canton où la formation de sages-femmes n'appartient pas à une école propre avec sa direction propre.

Critères de la Croix Rouge

C'est la Croix-Rouge suisse qui édicte les directives concernant, entre autres, les formations en soins infirmiers et celle de sages-femmes. C'est cet organisme qui assure ensuite la reconnaissance des diplômes en fonction de la formation dispensée par l'école. Chaque profession fait l'objet de directives propres.

De nouvelles directives de la Croix-Rouge suisse pour les soins infirmiers sont parues en 1992, et les écoles ont maintenant 8 ans pour s'adapter à ces nouvelles exigences. Celles prévues pour la formation de sages-femmes sont en cours d'élaboration et ne paraîtront qu'en 1995.

L'Ecole Le Bon Secours a très justement entrepris de mettre sur pied un nouveau système de formation (ci-après NSF), afin de répondre aux directives 1992 de la Croix-Rouge suisse pour les formations d'infirmières et infirmiers. Cependant la direction a voulu entraîner dans ces réformes le secteur sages-femmes, avant même que les directives ne soient sorties pour cette profession. D'où un certain nombre de tensions supplémentaires.

Auditions

La commission a choisi d'auditionner divers partenaires impliqués dans la problématique soulevée par cette pétition.

8 juin 1994, audition de trois membres du comité de la section genevoise de l'ASSF, Mmes Bettoli, Masur et Fuhrer. Ces personnes font un rapide rappel historique du rattachement de la formation de sages-femmes à l'Ecole Le Bon Secours, et en soulignent les aspects positifs et négatifs. Du côté des avantages, on peut relever l'accès à une meilleure infrastructure, tels que des locaux adéquats, une bibliothèque, du matériel audio-visuel, ainsi que des financements permettant de rétribuer des enseignants vacataires. Mais des inconvénients importants apparaissent aussi: perte du nom d'école, du statut d'école, d'une commission propre, d'une directrice et d'un budget.

Les pétitionnaires insistent sur le fait que la profession de sage-femme n'est pas une simple spécialisation de la profession d'infirmière, ce que confirment d'ailleurs les recommandations internationales (OMS, UNICEF, ICM). Elles précisent encore qu'elles ne sont pas opposées à des cours communs, qui existent d'ailleurs déjà, mais qu'elles ne peuvent accepter un tronc commun ou une formation sous forme de spécialisation. Elles demandent donc un véritable statut d'école avec des objectifs propres à leur formation, afin de mettre sur pied d'égalité la formation des sages-femmes avec celles de toutes les autres professions de la santé à Genève et d'éviter ainsi les risques d'emprise ou de pression d'une profession sur l'autre.

15 juin 1994, audition de Mme Engelberts, directrice de l'Ecole Le Bon Secours, et des quatre enseignantes non-démissionnaires. Après avoir rappelé l'histoire de l'Ecole Le Bon Secours, tant Mme Engelberts que les enseignantes assurent que l'identité professionnelle des sages-femmes n'est pas en danger et que l'autonomie est totalement respectée. Au surplus, la directrice précise qu'elle n'occupe pas ce poste en tant qu'infirmière, mais plutôt en tant que gestionnaire. Elle estime que le conflit n'est lié qu'au licenciement de la responsable du secteur sages-femmes et que les démissions sont une sorte de «coup d'état» qui a échoué. Mme Engelberts laisse deux gros classeurs comportant lois, règlements, organigrammes, etc., à disposition de la commission.

15 juin 1994, audition de Mme Cattani du SIT et de Mme Pernot, responsable adjointe du secteur sages-femmes, démissionnaire.

Mme Cattani explique les raisons du conflit qui porte sur des options divergentes quant à la formation et sur une impression d'emprise d'une profession sur une autre. Elle souligne que le syndicat aurait préféré l'option de la concertation et de la conciliation, mais que face à l'impossibilité de se faire entendre, le recours au Grand Conseil par voie de pétition devenait la seule issue restante.

Quant à Mme Pernot, elle explique que les enseignantes sages-femmes qui ont démissionné ne l'ont pas fait de gaîté de coeur. Pour la plupart elles travaillaient dans ce secteur depuis longtemps, et n'avaient pas de nouvel emploi en vue. Leur geste pouvait entraîner des conséquences graves sur leur avenir professionnel et n'a pas été fait à la légère. Cependant elles ne pouvaient à leur avis plus accepter et cautionner ce qui se passait au Bon Secours dans le cadre de la formation des sages-femmes, ni travailler dans un climat détérioré à ce point.

22 juin 1994, audition de Mme Feyler, directrice du centre d'enseignement des professions de la santé et de la petite enfance (CEPSPE).

Le fonctionnement du CEPSPE décrit par Mme Feyler montre la différence avec l'Ecole Le Bon Secours. Le CEPSPE comprend sept écoles de la santé à plein temps, une huitième pour les enseignements professionnels sous forme d'apprentissage, et une neuvième forme les éducatrices et éducateurs pour les jeunes enfants. Chaque école est autonome et chaque directeur nommé est un professionnel de la discipline enseignée dans l'école; en outre chaque école est entourée d'une commission consultative et peut avoir un conseiller scientifique.

Le directeur de chacune de ces écoles est responsable de la pédagogie, des règlements d'études et du programme de son école. Un conseil de direction les réunit tous pour les questions de gestion du centre.

22 juin 1994, avis du département par la voix de M. Ramuz, puis par la cheffe du Département, Mme Brunschwig Graf.

M. Ramuz insiste sur le nouveau système de formation. Il estime que la réflexion doit être menée avec un certain nombre d'experts, et bien sûr avec la Croix-Rouge Suisse, à même d'accepter ou non ce nouveau programme.

Madame la Présidente Brunschwig Graf informe les commissaires qu'elle rencontrera la direction du Bon Secours quelques jours plus tard sur le NSF et appréciera s'il est judicieux de poursuivre ce NSF avec les sages-femmes, étant donné que les directives les concernant ne paraîtront que l'année prochaine. Elle reconnaît qu'un certain nombre de points devront être abordés quant au fonctionnement, tant à l'intérieur du Bon Secours qu'au Conseil de Fondation. A la question de la création d'un véritable statut d'école, soit au sein même du Bon Secours, soit par un transfert au CEPSPE, Madame la Présidente Brunschwig Graf estime que la seconde hypothèse serait une erreur.

Dans une lettre citée à la commission, le Professeur Béguin, médecin chef du service d'obstétrique de l'Hôpital Cantonal, précise «qu'il ne serait pas heureux que l'école de sages-femmes puisse se séparer du giron d'une école générale du type Bon Secours». Il aurait été intéressant de savoir si le Professeur Béguin jugeait par là que l'école de sages-femmes ne devait pas quitter le Bon Secours, ou si le CEPSPE pouvait lui aussi jouer ce rôle «d'école générale de type Bon Secours».

Tout le monde s'accordait en tous les cas pour dire qu'il n'était pas judicieux de créer une nouvelle école, totalement indépendante, bruit farfelu qui avait couru dans la république après la démission de la majorité des enseignantes.

Conclusion

A l'issue des auditions et après discussion, les députées et députés de la commission de l'enseignement et de l'éducation ont estimé que la pétition soulevait un réel problème.

Les tensions entre les professions de sages-femmes et de soins infirmiers doivent remonter à Genève bien loin dans le temps, et ne cesseront certainement pas de sitôt ! Il suffit pour s'en rendre compte de consulter quelques mémoriaux du Grand Conseil sur ce sujet. Il en va de deux professions, qui peuvent paraître peu éloignées l'une de l'autre, et pourtant fort différentes. La sage-femme est la seule professionnelle de la santé formée en référence à la bonne santé et non à la maladie. Chaque profession veut, et à juste titre, garder son autonomie et sa spécificité et craint une emprise d'une autre formation.

Si le Grand Conseil n'a bien évidemment pas la possibilité d'intervenir sur les tensions entre formations, il se doit par contre de mettre en place, par l'intermédiaire des choix politiques qu'il fait, des systèmes de formation et d'exercices des professions qui laissent le moins de place possible à des conflits potentiels. Seule une garantie mutuelle d'autonomie des différents professionnels de la santé et l'égalité des statuts de formation peut permettre ensuite la collaboration interdisciplinaire sur le terrain.

Visiblement à Genève, la formation des sages-femmes subit un certain nombre de dysfonctionnements, de manque d'autonomie sur les options de la formation et d'inégalités avec les autres professions de la santé, tant sur le plan cantonal qu'inter-cantonal.

C'est pourquoi à l'unanimité les commissaires ont décidé du renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat, en lui demandant d'intervenir afin de donner plus d'autonomie et d'indépendance à la formation des sages-femmes, de s'assurer qu'une meilleure prise en compte de leurs attentes puisse être accordée et de rendre rapport au Grand Conseil d'ici janvier 1995.

PÉTITION

concernant l'école de sages-femmes: grave conflit à l'école Le Bon Secours à propos de l'avenir de la formation à Genève

L'école de sages-femmes existe à Genève depuis 1886. Jusqu'à la fin des années 1970, elle faisait partie intégrante de la maternité de l'Hôpital cantonal.

En 1981, elle est rattachée à l'école Le Bon Secours. Elle perd son titre, n'a plus de directrice et devient un programme au sein de l'école Le Bon Secours, dirigée par une infirmière.

Depuis cette période et malgré des réorganisations et changement de nom de l'école Le Bon Secours, la formation de sages-femmes reste sans statut d'école et sans direction propre. Les sages-femmes ont dès lors beaucoup de mal à maintenir et à faire valoir leurs options pour leur formation professionnelle.

Cette situation aboutit à la crise actuelle:

- licenciement de la responsable du secteur sages-femmes en décembre 1993, avec cessation immédiate (d'une heure à l'autre) des relations de travail;

- demandes réitérées de la section genevoise de l'Association suisse de sages-femmes (ASSF) auprès du département de l'instruction publique et du Conseil de fondation du Bon Secours pour être entendue au sujet de la situation et consultée à propos de l'avenir de la formation, demandes qui n'ont pas abouti;

- dégradation du climat au sein de l'école Le Bon Secours entraînant la démission surprise de 5 enseignantes du secteur sages-femmes sur 9, dont l'adjointe à la responsable de secteur, licenciée elle-même en décembre.

En conséquence, le comité de la section genevoise de l'ASSF, mandaté par vote de l'assemblée générale du 10 février 1994 pour entreprendre les démarches nécessaires pour garantir l'autonomie de la formation, demande aux autorités genevoises:

1. de revoir le statut de la formation des sages-femmes au sein de l'école Le Bon Secours;

2. de définir pour l'école de sages-femmes un statut analogue à celui des autres écoles du domaine de la santé, comprenant notamment la nomination d'une directrice sage-femme;

3. pour ce faire, d'engager une réelle concertation avec les milieux professionnels concernés et notamment les sages-femmes représentatives de la profession.

N.B.: 5 signatures

Association suisse des sages-femmesSection de Genève

Pour adresse:

Lorenza Bettoli, présidente

32, ch. des Grands-Buissons

1233 Bernex

(Les syndicats SIT, SSP et VPOD soutiennent cette pétition.)

Débat

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S), rapporteuse. Je ne vais pas rajouter grand-chose étant donné que nombre de députés doivent être extrêmement pressés d'aller à la buvette !

J'ai oublié de préciser au début de ce rapport que les séances de commission avaient été présidées par Mme Claude Howald, et j'espère qu'elle ne m'en tiendra pas rigueur.

Ce rapport a été rédigé au début de l'été. Entre-temps, la directrice du Bon Secours a rencontré la cheffe du département de l'instruction publique. Peut-être y a-t-il quelque chose de nouveau qui ne figure pas dans ce rapport. Je laisse donc Mme Brunschwig Graf nous dire s'il y a quelque chose de nouveau à faire savoir.

Mme Janine Hagmann (L). Comme vous avez pu le lire dans le rapport en votre possession, un vent de fronde a soufflé sur l'Ecole de soins infirmiers et de sages-femmes du Bon Secours !

Un licenciement et quatre départs ont provoqué le dépôt d'une pétition au Grand Conseil. Mais, rassurez-vous, ce vent n'a pas ébranlé la vénérable maison qui est restée calme, le personnel prenant fait et cause pour l'institution. Une équipe complète a très vite permis de retrouver un fonctionnement normal qui, entre parenthèses, a la même organisation interne que l'institut d'études sociales. Il n'est pas du ressort du parlement de régler les conflits internes. Il semble qu'il y ait eu une certaine confusion entre, d'une part, l'organisation, la structure, la fonction et, d'autre part, la formation elle-même.

Les sages-femmes forment un microcosme à l'intérieur d'un autre microcosme plus grand. L'important est donc de leur préserver leur véritable identité. Actuellement, les programmes de formation sont en pleine évolution et nous savons qu'une concertation entre la cheffe du DIP, la directrice du Bon Secours et les institutions hospitalières a eu lieu.

S'il est nécessaire que les sages-femmes aient une autonomie professionnelle, il est évidemment bénéfique de profiter d'un enseignement commun. Il est prévu de mettre en place des réseaux plus rentables, mais sans confusion dans les thèmes réels. Les sages-femmes sont des soignantes spécialistes en obstétrique qui ont la possibilité d'émettre un diagnostic médical dans les cas d'accouchement. A Genève, en moyenne, chaque année vingt-huit bébés naissent à la maison avec la seule aide de la sage-femme. C'est pourquoi il est important que le nouveau système de formation soit mis en place avec discernement pour que les sages-femmes soient véritablement reconnues.

C'est pourquoi, le groupe libéral vous recommande d'accepter le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat et d'attendre sereinement le rapport que ce dernier remettra au Grand Conseil.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Comme vous le constatez à la lecture de ce rapport, le Conseil d'Etat devra fournir lui-même un rapport d'ici janvier 1995, ce à quoi il s'est engagé en commission.

Nous avons d'ores et déjà évoqué, avec Le Bon Secours, les problèmes de structure et de programmes futurs. Les discussions sont en cours. Vous recevrez des informations détaillées dans le rapport de janvier 1995. Cela étant, il me semble qu'il n'y a pas lieu de revenir sur cette pétition, sinon pour dire que si les députés ont souhaité la renvoyer au Conseil d'Etat c'est parce qu'ils ont envoyé un message clair à l'Ecole du Bon Secours stipulant de ne pas négliger le rôle des sages-femmes à l'intérieur de cette école et de traduire dans les structures une transparence qui permette à ces sages-femmes de se sentir à l'aise. C'est un point qui a été défendu au Bon Secours par le département. Cela sera certainement suivi d'effets dont nous vous relaterons le détail.

Mises aux voix, les conclusions de la commission (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.

IU 35
13. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de Mme Micheline Calmy-Rey concernant la faculté de médecine. ( ) IU35
Mémorial 1994 : Développée, 3033.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Mme Calmy-Rey semble tout à coup se souvenir de la question qu'elle avait posée il y a une semaine !

Finalement, il est bon qu'une semaine ait passé parce que mes explications seront plus précises qu'elles ne l'auraient été la semaine dernière.

En préambule, je tiens à dire que la question de l'admission aux études de médecine est un réel problème sur le plan suisse et la croissance du nombre d'étudiants pose toutes sortes de problèmes qui augmentent au fur et à mesure des études, étant donné que ces études, contrairement à d'autres, sont liées à la fréquentation de laboratoires en première année et, surtout, à la disponibilité en lits pour la formation clinique, ce qui ne permet pas de dépasser un certain nombre d'étudiants par groupe. C'est donc un débat qui s'effectue, au niveau suisse, à la Conférence universitaire suisse.

Cela étant posé, une certaine inquiétude émerge depuis une année, qui a été évoquée par différents cantons et par le secrétaire de la conférence à une séance qui a eu lieu en juin. Lors de cette séance, le problème du nombre des étudiants a été soulevé. La proposition du canton de Zurich d'introduire un numerus clausus basé, à l'époque, sur le tirage au sort a également été évoquée. Cette proposition a été discutée au sein de la CUS et a été très énergiquement refusée, sur mon intervention, par huit voix contre quatre.

Le 5 juillet, il y a eu une séance entre les différents cantons universitaires pour savoir comment répartir le nombre des étudiants. Le doyen de la faculté de médecine de Genève a fait savoir qu'un nombre d'étudiants supérieur à deux cent trois posait de gros problèmes à la faculté. Ce nombre avait d'ailleurs déjà été augmenté, puisque le nombre idéal était de cent quatre-vingts. Les cantons universitaires de Zurich, de Berne et de Genève avaient émis les plus expresses réserves suite à une répartition d'étudiants supplémentaires. Dans l'intervalle, les cantons de Zurich et de Berne - je dois le dire, sans avertir les autres cantons, ni la Conférence universitaire suisse - ont fait savoir par communiqué qu'ils avaient décidé d'introduire un numerus clausus basé, cette fois, sur l'âge.

Je n'interviendrai pas sur les commentaires que l'on peut imaginer sur une telle sélection, mais l'objectif des études universitaires n'est pas précisément de vieillir les étudiants, au contraire. Par ailleurs, ce procédé étant remis en cause par les étudiants devant le Tribunal fédéral, il n'y a pas lieu d'y revenir.

Cela étant, l'intervention de Mme Calmy-Rey, certainement motivée par une lettre du président de la CUS - un peu anachronique sur deux plans puisqu'elle est partie le 22 juillet - disait aux étudiants de faire attention à leur inscription en raison de l'introduction à la rentrée d'une procédure de sélection dans certaines universités. Cette lettre est arrivée - dirais-je - entre la poire et le fromage, après la diffusion de Berne et de Zurich et alors que les autres cantons avaient clairement fait savoir au départ qu'ils étaient défavorables à cette procédure.

Par la suite, le canton de Genève, sollicité pour accueillir des étudiants en surnombre à l'université de Zurich et de Berne, a fait savoir que s'il était disposé, quel que soit leur nombre, à accueillir tous les étudiants préinscrits à Genève, il n'était pas disposé, compte tenu des dispositifs mis en place à Berne et à Zurich, à accueillir les étudiants inscrits dans ces deux universités avant le 1er juin. Il a pris un arrêté du Conseil d'Etat, l'a fait connaître à la Conférence universitaire suisse et à la commission de l'accord intercantonal qui est censée l'entériner. Vous devez savoir que ce type de procédure est nécessaire. Les chiffres ne sont pas absolus dans la mesure où c'est seulement après le 15 septembre que nous connaissons le nombre d'étudiants inscrits définitivement à l'une ou l'autre université.

Cela nous a montré que l'université de Berne, contrairement à ce qu'elle craignait, n'a pas été obligée d'appliquer le numerus clausus, qu'elle peut même reprendre sept étudiants rattachés à l'université de Genève. L'université de Genève accueillera cette année deux cent quatorze étudiants, sauf retrait probable, tout en veillant à ce que les moyens nécessaires pour cet enseignement soient mis en place. L'université de Genève n'appliquera donc pas de numerus clausus, au contraire, puisque le nombre d'étudiants sera supérieur à deux cent trois.

Nous avertissons déjà le Grand Conseil que les discussions qui ont lieu à la CUS, en ce moment même, portent sur 1995/1996 et, donc, que ce problème est loin d'être résolu. La Conférence universitaire suisse, l'année dernière - je n'y siégeais pas à l'époque - avait suggéré la possibilité d'introduire un test pour l'entrée aux études de médecine. J'ai émis quelques réserves, au nom du canton de Genève, car je souhaitais avoir la position de la faculté de médecine. C'est donc par ce biais que nous examinerons l'opportunité de ce test.

J'invite ce Grand Conseil à réfléchir sur l'avenir des études de médecine, - pas pour la rentrée 1994/1995 qui est réglée - sur leur organisation, leur révision et l'opportunité d'un test d'entrée. J'invite également ce Grand Conseil à prendre conscience que les universités sont interdépendantes. Lorsqu'une université prend une décision comme celle prise par Zurich ou Berne, ce n'est pas sans conséquence pour les autres universités. C'est la raison de la réaction du canton de Genève, qui ne souhaitait pas assumer ce que les autres cantons ne voulaient pas prendre en charge en raison du manque de solidarité.

La question des tests est importante et devra être examinée avec soin. Il est évident qu'un seul canton ne pourra pas rester en dehors d'une décision qui serait prise majoritairement à la CUS, faute de quoi le nombre des étudiants augmenterait fortement et nous ne serions pas en mesure de les absorber indéfiniment. C'est une question délicate. J'en informerai la commission de l'université si elle le souhaite, une fois que la faculté de médecine aura pris position.

Cette interpellation urgente est close. 

PL 7123
14. Projet de loi de Mmes et MM. Nicolas Brunschwig, Bernard Annen, Michel Balestra, Claude Blanc, Claude Basset, Daniel Ducommun, René Ecuyer, Jean-Pierre Gardiol, Bernard Lescaze, Sylvia Leuenberger, Jean Montessuit, Christine Sayegh et Claire Torracinta-Pache sur la surveillance de la gestion administrative et financière et l'évaluation des politiques publiques (D 1 4). ( )PL7123

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

CHAPITRE I

Système de contrôle interne

(système qualité)

Article 1

But

1 Les services de l'Etat, ainsi que les établissements publics et les organismes subventionnés (ci-après entités), mettent en place un système de contrôle interne adapté à leurs missions et à leur structure, dans le but d'appliquer les principes de gestion mentionnés aux articles 2 et 3 de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.

2 Les communes s'inspirent des principes des chapitres I et II de la présente loi, sous réserve des dispositions particulières qui leur sont applicables.

Art. 2

Définition

1 Le système de contrôle interne est un ensemble cohérent de règles d'organisation et de fonctionnement et de normes de qualité qui ont pour but d'optimiser le service au public, la qualité des prestations et la gestion des entités et de minimiser les risques économiques et financiers inhérents à l'activité des entités.

2 La mise en place et la maintenance du système interne de contrôle incombe à la direction des entités.

Art. 3

Certification

Toute entité est encouragée à soumettre son système de contrôle interne à une autorité de certification désignée par le Conseil d'Etat.

CHAPITRE II

Surveillance interne de la gestionadministrative et financière de l'Etat

Art. 4

Principes

1 La surveillance interne de la gestion administrative et financière de l'Etat est assurée par l'inspection cantonale des finances (ci-après l'inspection).

2 Elle exerce cette surveillance selon les critères de la régularité, de la légalité et de la rentabilité, ainsi que selon les principes généraux de la revision et de l'audit.

3 Elle examine, au titre de la rentabilité, si les ressources sont employées de manière économique; elle analyse le prix de revient des prestations.

4 L'inspection est à disposition du Conseil d'Etat et de la commission des finances du Grand Conseil dans leur exercice de la haute surveillance de l'administration.

Art. 5

Entités concernées

L'inspection exerce son activité :

a)

auprès des départements, de la chancellerie et de leurs services;

b)

auprès des institutions cantonales de droit public;

c)

auprès des institutions privées dans lesquelles l'Etat possède une participation financière majoritaire ou une représentation majoritaire au sein des organes supérieurs de l'institution;

d)

auprès de tout organisme privé bénéficiant d'une aide financière de l'Etat.

Art. 6

Compétences

1 L'inspection est notamment compétente pour:

a)

la revision des comptes;

b)

le contrôle des valeurs du patrimoine et des inventaires;

c)

l'examen par rapport au système de contrôle interne de la réalisation des objectifs de la gestion à tous les stades de leur exécution, sous les angles juridique, comptable, économique, financier, organisationnel et informatique;

d)

la surveillance et la coordination des activités de revision exercées par des organes internes ou externes désignés.

2 L'inspection participe à l'élaboration des prescriptions sur le contrôle, la revision, la comptabilité, le service des paiements et la tenue des inventaires.

Art. 7

Déroulement

1 L'inspection a tout pouvoir d'investigation. Elle effectue son contrôle de sa propre initiative, selon un programme qu'elle soumet au Conseil d'Etat ou sur mandat confié par le Conseil d'Etat.

2 Dans le cadre de l'exécution de son mandat, les dispositions légales sur le maintien du secret ne peuvent pas être invoquées vis-à-vis de l'inspection.

3 L'inspection peut s'adjoindre des spécialistes lorsqu'un mandat de surveillance nécessite des connaissances particulières.

Art. 8

Rapports et droit d'être entendu

1 Toute intervention de l'inspection donne lieu a un rapport.

2 Préalablement à la rédaction de son rapport, l'inspection clôt son examen par un entretien final avec les responsables de l'entité. Elle discute notamment des mesures correctives déjà prises ou à prendre.

3 Les rapports sont remis au chef du département dont dépend l'entité examinée et au chef du département chargé des finances.

Art. 9

Contrôles par des experts ou fiduciaires

1 Le Conseil d'Etat peut confier des missions relevant des compétences de l'inspection à des mandataires externes spécialisés.

2 Les entités ou organes des institutions ou sociétés, visés à l'article 5, lettres b et c, chacun pour leur part et avec l'accord du Conseil d'Etat, confient directement de telles missions à des mandataires externes spécialisés.

3 Le Conseil d'Etat peut dispenser l'inspection d'intervenir simultanément dans ces cas. Il appartient néanmoins à cette dernière de prendre connaissance des rapports établis par les mandataires externes et de formuler toutes observations qu'elle juge nécessaires à ce sujet à l'autorité qui a confié la mission.

Art. 10

Obligation de renseigner en matière de contrôle de gestion

Si, lors d'une revision, les mandataires externes constatent des défauts, des erreurs ou des lacunes dans la gestion des entités contrôlées, ils doivent en saisir à bref délai, par un rapport séparé, soit le conseiller d'Etat duquel relève le service ou l'institution en cause, soit l'autorité qui a confié le mandat.

Art. 11

Organisation

1 L'inspection est autonome et indépendante. Administrativement, elle dépend du département chargé des finances

2 Elle est placée sous la direction d'un fonctionnaire nommé par le Conseil d'Etat. Ce dernier en informe la commission des finances du Grand Conseil.

3 Le personnel de l'inspection est assermenté. Il doit vouer tout son temps à sa fonction et ne peut accepter aucune autre fonction rétribuée d'ordre public ou d'ordre privé.

Art. 12

Pouvoir réglementaire

Le Conseil d'Etat fixe, par voie de règlement, l'organisation et le fonctionnement de l'inspection.

Art. 13

Rapport annuel

1 Au début de chaque année, soit jusqu'au 30 avril, l'inspection adresse au Conseil d'Etat un rapport résumant son activité durant l'exercice écoulé. Il mentionne en particulier:

a)

la liste des entités contrôlées avec mention de l'étendue des travaux effectués;

b)

les conclusions générales sur les constatations faites, notamment sur d'éventuelles irrégularités, ainsi que les mesures correctives déjà prises ou à prendre;

c)

les conclusions auxquelles donnent lieu les rapports de mandataires externes dont il a pris connaissance ainsi que les observations éventuelles qu'il a formulées à ce sujet.

2 Ce rapport est communiqué à la commission des finances du Grand Conseil et à la commission d'évaluation des politiques.

3 La commission des finances du Grand Conseil peut appeler le chef de l'inspection à lui donner les renseignements complémentaires dont elle pourrait avoir besoin pour l'exercice de son mandat.

Art. 14

Devoir de secret des experts et du personnel des fiduciaires

1 Les experts et le personnel des sociétés fiduciaires sont tenus au secret de fonction. Ils ne peuvent en aucun cas, lors d'une activité étrangère à leur mandat, faire état de renseignements dont ils ont eu connaissance dans l'exercice de ce mandat.

2 Ils sont également tenus de garder le secret même après la fin de leur mandat.

CHAPITRE III

Evaluation des politiques publiques

Art. 15

Principes

1 Il est créé une commission externe d'évaluation des politiques publiques (ci-après commission d'évaluation), chargée de seconder le Conseil d'Etat et le Grand Conseil dans leurs tâches d'évaluation des politiques de l'Etat et des services publics, ainsi que des entités dépendant de l'Etat.

2 L'évaluation peut s'étendre aussi aux entités qui ne dépendent pas directement de l'Etat, mais qui sont subventionnées par lui.

Art. 16

Mise en oeuvre

1 La commission d'évaluation agit en principe sur la base et dans le cadre de mandats, limités dans le temps, qui lui sont confiés soit par le Conseil d'Etat, soit par la commission des finances du Grand Conseil.

2 De tels mandats peuvent porter notamment sur:

a)

l'évaluation des politiques publiques du point de vue des principes de la proportionnalité et de la subsidiarité,

b)

l'évaluation de l'organisation des administrations et entités publiques en regard des buts politiques que le législateur leur assigne;

c)

l'évaluation du rapport coût/utilité des prestations et des dépenses consenties par rapport aux effets escomptés.

3 Lorsqu'il s'agit d'une entité dépendant de l'Etat ou d'une entité qui, sans en dépendre, est subventionnée par lui, le mandat est donné exclusivement par le Conseil d'Etat, agissant soit de son propre chef, soit à la demande de la commission des finances du Grand Conseil.

4 La commission d'évaluation peut engager de son propre chef un projet d'évaluation, après en avoir informé le Conseil d'Etat et avoir discuté avec lui le but, la portée et les modalités d'exécution du mandat. Elle en informe également la commission des finances.

Art. 17

Relations avec les autorités

La commission d'évaluation entretient des contacts réguliers avec le Conseil d'Etat et la commission des finances.

Art. 18

Relations avec l'inspection cantonale des finances

Le président de la commission d'évaluation reçoit personnellement les rapports de l'inspection. Il juge de l'opportunité de les diffuser aux membres de la commission d'évaluation.

Art. 19

Composition

1 La commission d'évaluation est composée de 16 membres désignés par le Conseil d'Etat, après consultation de la commission des finances du Grand Conseil.

2 Les membres sont choisis parmi des personnalités représentatives de la diversité culturelle et sociale du canton et qui se sont acquis par leur formation ou leur expérience une large autorité dans le domaine de la gestion économique et politique.

3 Ces personnes sont indépendantes. Elles ne peuvent appartenir en particulier ni à l'administration cantonale, ni aux pouvoirs politiques de l'Etat de Genève, ni aux conseils d'entités dépendant à un titre ou à un autre de l'Etat, ni à l'administration d'établissements de droit privé dans lesquels l'Etat détient une participation lui conférant une influence prépondérante.

4 Les membres de la commission d'évaluation sont assermentés.

Art. 20

Durée du mandat

1 Les membres de la commission d'évaluation sont désignés pour une période de 8 ans non renouvelable.

2 L'organe est renouvelé par moitié tous les 4 ans.

Art. 21

Nomination du président

1 Le Conseil d'Etat nomme pour 4 ans le président de la commission d'évaluation parmi les membres de celle-ci après consultation de la commission des finances. Il est rééligible.

2 La commission d'évaluation règle elle-même son organisation interne et son mode de fonctionnement.

Art. 22

Secrétariat

1 La commission d'évaluation dispose des services d'un secrétaire permanent, qualifié dans les domaines de l'audit et de l'évaluation des politiques, qui dépend administrativement de l'inspection.

2 Le secrétaire de la commission d'évaluation a le statut d'agent spécialisé.

Art. 23

Honoraires

Les honoraires des membres de la commission sont fixés par le Conseil d'Etat.

Art. 24

Secret

1 Les membres de la commission d'évaluation sont tenus au secret de fonction, de même que les personnes qui les assistent. Ils ne peuvent en aucun cas, lors d'une activité étrangère à leur mandat, faire état de renseignements dont ils ont eu connaissance dans l'exercice de ce mandat.

2 Ils sont également tenus de garder le secret même après la fin de leur mandat.

Art. 25

Désistement

Les membres de la commission d'évaluation doivent se désister lorsque l'exécution du mandat met en cause directement ou indirectement leur intérêt personnel ou celui de l'institution ou de l'entreprise dans laquelle ils travaillent ou exercent une fonction de direction ou d'administration.

Art. 26

Pouvoirs d'investigation

1 La commission d'évaluation peut exiger de l'entité soumise à évaluation, la communication de tout dossier, document ou renseignement en sa possession.

2 Demeurent réservées les dispositions légales ou réglementaires relatives au secret de fonction.

3 Sur demande expresse de la commission d'évaluation, le conseiller d'Etat dont dépend l'entité soumise à évaluation peut délier un fonctionnaire du secret de fonction.

Art. 27

Experts

1 La commission d'évaluation peut s'entourer de l'avis d'experts si elle juge nécessaire leur intervention pour l'exécution d'un mandat d'évaluation.

2 Dans ce cas, elle établit un budget qu'elle soumet à l'approbation du Conseil d'Etat.

Art. 28

Auditions

1 La commission d'évaluation établit la liste des personnes qu'il souhaite auditionner dans le cadre de l'exécution d'un mandat. Il adresse cette liste au conseiller d'Etat concerné, une semaine au moins avant l'audition.

2 Les personnes interrogées reçoivent le procès-verbal de l'audition. Elles peuvent apporter des observations à ce document dans un délai de 5 jours après réception.

Droit de réplique

3 Une fois que la commission d'évaluation a rédigé ses recommandations, elle les adresse à la direction des entités directement concernées. Celle-ci dispose d'un mois pour présenter son avis qui est consigné en annexe du rapport de la commission d'évaluation.

Art. 29

Rapports

1 La commission d'évaluation adresse ses rapports au Conseil d'Etat et à la commission des finances lorsque celle-ci est à l'origine du mandat.

2 Le rapport mentionne la méthode de travail, dresse la liste des personnes auditionnées et présente des recommandations et des propositions, ainsi que les mesures correctives déjà prises ou à prendre.

3 Au cas où l'exécution du mandat requiert un délai prolongé, la commission d'évaluation peut établir un ou plusieurs rapports intermédiaires.

4 Préalablement à l'établissement de son rapport, la commission d'évaluation fait connaître au Conseil d'Etat ou au conseiller d'Etat intéressé les conclusions auxquelles elle aboutit.

5 Une fois par an au moins, le Conseil d'Etat renseigne le Grand Conseil et la commission d'évaluation sur les mesures qu'il a prises pour faire suite aux conclusions et propositions contenues dans les rapports de cette dernière.

Art. 30

Suite d'un rapport demandé par la commission des finances

1 Lorsque la commission des finances du Grand Conseil confie elle-même un mandat à la commission d'évaluation, soit directement, soit par l'intermédiaire du Conseil d'Etat, elle met en délibération le rapport.

2 Elle transmet ensuite ce rapport au Conseil d'Etat pour qu'il se prononce par écrit à ce sujet.

3 Si le rapport concerne une entité dépendant de l'Etat, ou qui, sans en dépendre, est subventionnée par lui, la réponse du Conseil d'Etat mentionne l'avis de l'entité en cause.

Art. 31

Rapport

annuel

1 La commission d'évaluation établit chaque année son rapport d'activité qu'elle adresse au Conseil d'Etat avant le 31 mars. Ce dernier le communique au Grand Conseil pour information.

2 Le rapport annuel contient au moins le mandat et les conclusions des rapports déposés durant l'année.

CHAPITRE IV

Dispositions particulières et finales

Art. 32

Missions d'organisation

1 Le Conseil d'Etat peut confier à un service de l'Etat, ou à des mandataires externes spécialisés, des missions d'organisation.

2 Les entités ou organes des institutions visés à l'article 5, lettre b et c, peuvent également, chacun pour leur part et avec l'accord du Conseil d'Etat, confier de telles missions à des experts ou à des sociétés fiduciaires.

Art. 33

Clause abrogatoire

La loi sur le contrôle financier cantonal et le contrôle de gestion, du 7 mai 1976, est abrogée.

Art. 34

Modification à une autre loi    (D 1 9)

La loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993, est modifiée comme suit:

Art. 72 (abrogé)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le présent projet de loi est déposé par les membres de la commission des finances du Grand Conseil.

Elaboré sur son mandat par les services du département des finances, il renforce les organes de contrôle, de surveillance et d'évaluation de l'Etat, leur indépendance et leurs pouvoirs d'investigation.

Il comble plusieurs lacunes de la loi actuelle sur le contrôle financier et le contrôle de gestion. Il instaure un contrôle de gestion permanent, fondé, d'une part, sur la certification des systèmes de contrôle interne des services par un organe spécialisé extérieur à l'administration et, d'autre part, sur l'examen par l'organe de surveillance interne dont les prérogatives sont étendues aux notions de rendement et de rentabilité.

Le présent projet de loi renforce également les pouvoirs de la commission de contrôle de gestion qui devient la commission externe d'évaluation des politiques publiques. Son champ d'activité est élargi, ce qui justifie le changement d'appellation. Ses compétences s'étendront de l'examen classique des coûts des services publics en regard de l'utilité des prestations jusqu'à et y compris l'examen de l'efficacité des lois, la répartition des tâches entre les secteurs privé et public et entre les collectivités, selon les principes de la subsidiarité et de la proportionnalité.

En outre la commission d'évaluation des politiques pourra décider seule de l'ouverture d'une enquête. Les conclusions de ses rapports seront rendues publiques une fois par an.

Le présent projet de loi reprend les propositions évoquées en commission. Il s'inspire en outre et fait la synthèse :

a) des propositions de la commission de contrôle de gestion;

b) des propositions du contrôle financier cantonal;

c) des réflexions issues de l'étude des motions 734 et 822 notamment;

d) des recommandations des instances académiques et professionnelles en matière de contrôle de gestion et d'évaluation.

Le présent projet de loi a pour but de remplacer la loi sur le contrôle financier cantonal et le contrôle de gestion, du 7 mai 1976 (D 1 4). Il s'inscrit dans le droit fil de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 13 octobre 1993 (D 1 9), en marge du traitement de l'initiative 100 «Pour réduire les dépenses abusives de l'Etat de Genève».

L'efficacité, la rationalité et l'économie sont des principes de gestion et d'évaluation qui s'imposent aux responsables des affaires publiques comme à ceux des affaires privées. Toutefois, la nature particulière les biens et des services publics, notamment l'absence d'un marché et d'une concurrence, le statut du personnel et les mécanismes politiques de choix et de régulation exigent de la part des services et des administrations publics une vigilance accrue de leurs modes de fonctionnement.

Les experts de l'OCDE notent deux grands dénominateurs communs à l'évolution des modes de gestion du secteur public : l'accent mis sur la mesure de la performance et les résultats et une plus grande souplesse de gestion grâce à une délégation des responsabilités de gestion des entités et agences publiques. Cependant, relève encore l'OCDE, «les efforts d'évaluation restent largement ad hoc et inadéquats dans la plupart des pays». (Evolution dans la gestion publique, Examen 1993, OCDE, Paris 1993.)

Les travaux de la commission des finances s'inscrivent donc dans un effort de longue haleine auquel s'attellent les collectivités publiques de tous les pays et qui visent à donner aux services publics une culture davantage axée sur les prestations et la satisfaction des usagers.

Le présent projet de loi tire sa légitimité d'une conjonction de quatre groupes d'événements:

1. Sensibilisé par les déficits considérables des comptes d'Etat depuis 1989, le Grand Conseil a adopté plusieurs motions enjoignant le Conseil d'Etat de lui faire rapport sur les moyens propres à améliorer la gestion économique, budgétaire et financière de l'Etat.

2. La commission des finances a étudié, pour sa part, au cours de nombreuses séances durant le premier semestre 1993, une loi sur la gestion administrative et financière, loi qui est entrée en vigueur au 1er janvier 1994. Au cours de ces travaux, plusieurs commissaires ont évoqué, à réitérées reprises, la problématique du contrôle de gestion.

3. L'initiative 100 «Pour réduire les dépenses abusives de l'Etat de Genève», demandant de soumettre l'Etat à un audit global, en cours d'examen, manifeste également cette exigence populaire forte d'une saine gestion des finances publiques.

4. Enfin, l'examen des derniers rapports de la commission de contrôle de gestion et les débats en commission ont montré que le contrôle de gestion actuel fondé sur un principe de milice devait être renforcé et rendu permanent et plus efficace. Les commissaires ont souhaité accroître l'indépendance des organes de surveillance, leur donner des moyens adéquats, augmenter la publicité des rapports et étendre le domaine des contrôleurs à l'évaluation des politiques et aux notions de coût/utilité des prestations publiques et de rentabilité.

La commission des finances a ainsi procédé à un examen général de la situation, elle a auditionné la commission de contrôle de gestion, ainsi que le comité de l'initiative 100, elle s'est enquise des procédures de contrôle en cours au niveau fédéral.

Elle a finalement acquis la conviction qu'une révision totale de la loi sur le contrôle financier cantonal et le contrôle de gestion pouvait constituer une réponse adéquate à l'ensemble des requêtes et des revendications déposées, y compris les exigences de l'initiative 100. Elle souligne que cette révision est le complément indispensable à la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève et s'inscrit dans un environnement général qui voit partout le renforcement des pouvoirs des organes de contrôle et de surveillance tant internes qu'externes.

Les groupes politiques et la commission de contrôle de gestion ont alors présenté une série d'amendements. Le département des finances s'est ensuite vu confier la tâche de reprendre ses matériaux et de rédiger un projet de synthèse.

Au total depuis le 12 janvier 1994, date du début des travaux de la commission des finances sur ce sujet, le projet a été discuté durant onze séances exactement.

Finalement tous les groupes se sont mis d'accord pour déposer le présent projet de loi devant le Grand Conseil.

Architecture du projet de loi

Le projet s'articule autour de 3 idées-forces:

a) l'introduction d'un système de normes de contrôle du fonctionnement des services et leur certification par un organisme spécialisé extérieur aux administrations;

b) la surveillance de la gestion administrative et financière avec un accent sur la révision des comptes, d'une part, et sur les notions de rendement et de rentabilité économique, d'autre part;

c) l'évaluation des politiques, il s'agit là d'un domaine nouveau qui doit offrir au Conseil d'Etat et au Grand Conseil un instrument approprié de mesure du succès ou de l'échec d'un programme ou d'une politique par rapport aux dispositions légales et budgétaires votées.

L'évaluation des politiques

C'est le principe le plus novateur de la loi. Il est le complément indispensable du contrôle de gestion. Cette dernière fonction fait l'objet elle-même d'un redéploiement; d'une fonction exercée par une commission de milice, elle prend la dimension d'une fonction permanente.

Le contrôle de la gestion est en premier lieu placé sous la responsabilité des services eux-mêmes. Il leur appartient de s'organiser en conséquence et se doter des instruments nécessaires. C'est d'ailleurs le but poursuivi par le système de contrôle interne (voir plus bas). La surveillance de la gestion est exercée, à un deuxième niveau, par le contrôle financier cantonal que la commission des finances a souhaité renommer «Inspection cantonale des finances» en raison précisément de l'élargissement de ses compétences. A un troisième échelon, la commission de contrôle de gestion, elle aussi rebaptisée, conserve ses compétences dans le domaine de l'examen des coûts du service public, mais cet examen s'étend aussi à l'évaluation concomitante de l'utilité de la prestation, de sorte que les 2 faces du rapport coût/bénéfice soient bien appréciés.

La commission de contrôle de gestion demeure l'organe extérieur supérieur d'examen du fonctionnement de l'Etat.

Sa nouvelle appellation de commission d'évaluation des politiques marque la volonté de la commission des finances d'ouvrir un nouveau champ à l'investigation des sages, précisons que ces nouvelles attributions ne limitent en rien le domaine de compétence actuel des experts. Une lecture attentive de l'article 16 du projet de loi démontre, en effet, que les prérogatives de la commission d'évaluation s'étendent bien du contrôle de gestion à l'examen de questions plus vastes et plus complexes, telles que la pertinence, l'efficacité, la rationalité de la répartition des tâches entre le secteur public et le secteur privé, la répartition des tâches entre les collectivités publiques entre elles, l'évolution des dépenses publiques par habitant, etc.

En outre, ce même article 16 consacre le principe de l'indépendance de la commission d'évaluation qui obtient le droit d'ouvrir une enquête de sa propre initiative. Le principe de publicité est également renforcé par la publication annuelle d'un rapport d'activité qui devra contenir au moins les mandats et les conclusions des rapports spécifiques.

Enfin, la création d'une fonction de secrétaire, expert en matière d'évaluation, augmentera sensiblement l'efficacité du travail de la commission tout en soulageant ses membres d'un certain nombre de travaux rédactionnels.

L'évaluation des politiques est une activité relativement nouvelle en Suisse. A ce jour, seul le parlement fédéral s'est doté d'un tel organe.

L'université de Genève conduit cependant, depuis plusieurs années, sous la direction du professeur Charles-Albert Morand, des travaux relatifs à cette problématique avec un accent particulier sur l'évaluation législative. Selon une communication récente que le professeur Morand a eu l'occasion de donner à l'invitation du Sénat français, les motifs qui militent en faveur du développement d'un tel instrument d'évaluation sont les suivants :

a) le souci d'assurer l'effectivité des lois et de freiner la croissance inflationniste des textes;

b) le souci de choisir des instruments d'actions plus adéquats qui prennent du champ par rapport à la législation autoritaire, laquelle mélange objectifs et moyens, et prétend dicter une conduite pour des décennies;

c) le besoin de réduire l'incertitude provoquée par une législation de type interventionniste cherchant à influencer des systèmes sociaux autonomes. Ce besoin de sécurité a débouché sur le développement des études d'impact préalables ou consécutives;

d) l'idée de favoriser l'apprentissage. C'est toute la problématique des lois expérimentales permettant d'acquérir une meilleure connaissance d'un domaine d'intervention et d'établir un consensus progressif autour d'une réforme qui ne fait pas l'unanimité.

Disposant de compétences académiques reconnues dans ce domaine, le canton de Genève pourrait favoriser l'acquisition indispensable d'expériences concrètes, nécessaires au développement d'un pôle d'excellence en matière d'évaluation.

La surveillance de la gestion administrative et financière

La création d'une inspection cantonale des finances correspond au développement récent des organes de contrôle interne dont la tâche s'étend aux notions de rendement et d'efficacité. Cette nouvelle dénomination s'accorde d'ailleurs pour partie avec la pratique actuelle du contrôle financier cantonal qui, pour exercer sa mission de révision, développe des activités d'audit de rendement et d'efficacité, notamment en matière informatique.

Cette nouvelle approche est préconisée par le «Manuel suisse de révision», en particulier dans son nouveau chapitre «Administration publique» dont la rédaction (confiée notamment au chef du contrôle des finances du canton de Berne) vient d'être achevée.

Il apparaît, en effet, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé, qu'un dysfonctionnement de type organisationnel ou qu'un défaut d'objectifs clairs peut entraîner de graves conséquences financières. Il est dès lors pleinement justifié d'étendre le champ d'examen de l'inspection interne au fonctionnement d'un service en regard du système de contrôle interne qu'il s'est donné. Une bonne organisation est non seulement source d'économies, mais aussi facteur de réduction des risques spécifiques à chaque activité.

Un tel mandat est en outre conforme aux recommandations de l'Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI) qui souligne la nécessité d'étendre la révision à l'examen de la rentabilité au sens large, ainsi que d'accroître l'indépendance et les moyens des organes de contrôle.

Le système de contrôle interne

Le système de contrôle interne est un mode d'organisation dans lequel chaque collaborateur est responsable de la qualité du produit livré, peu importe que le produit soit fini ou non que son interlocuteur soit un collègue, un supérieur, un autre service ou un usager du service publique. Dans chaque cas, en effet, il le considère comme un client qu'il a pour mission de satisfaire. Symétriquement, lorsque lui-même est client, il est en droit d'attendre d'un collègue, d'un supérieur, d'un autre service ou d'un fournisseur extérieur une prestation de qualité.

Le système de contrôle interne est donc un ensemble de règles d'organisation et de normes de gestion et de comportement que se donne une entreprise ou une administration à partir d'un cadre général (à l'Etat, la loi sur la gestion administrative et financière et ses directives et les règles de procédure) et dont le respect intelligent garantit la qualité des processus de «production» et, partant, la qualité des prestations livrées.

Le système de contrôle interne peut comporter divers instruments de gestion (charte, cahiers des charges, controlling, qualité totale, contrôle interne, etc.). Chaque entité est responsable d'adapter ces instruments à ses besoins selon le principe de la proportionnalité et de l'économie des moyens. En effet, si le contrôle diminue le coût du risque, il augmente le coût opérationnel.

La certification

Dans le secteur privé, le marché joue un rôle déterminant de sélection des entreprises. Cependant, même dans le secteur privé, la complexité croissante de l'organisation économique, l'obligation de satisfaire le client non seulement par le meilleur rapport qualité/prix possible, mais aussi celle d'anticiper ses besoins, de lui garantir une livraison dans les délais, de livrer des marchandises ou des services sans défaut, non polluants tout au long de la chaîne de production-consommation-élimination, pousse les entreprises à soumettre leur système de production à l'inspection régulière d'organismes spécialisés et indépendants.

Une telle démarche correspond à une assurance qualité. De plus en plus d'entreprises offrent cette garantie à leur clientèle, au public, à leurs actionnaires. Certaines s'en servent même comme argument de vente et élément constitutif de leur image de marque.

Cette évolution résulte finalement du constat que le prix qui a valeur traditionnellement d'indicateur sur le marché n'est plus toujours suffisant. Les clients ne se contentent plus du rapport qualité/prix standard, ils réclament des garanties supplémentaires sur les conditions de production, de commercialisation et d'élimination des produits.

En s'ouvrant au monde de la certification, l'Etat démontre qu'il ne craint pas de se mesurer aux exigences qui sont celles de l'économie générale. Il offre donc une garantie d'efficacité.

Commentaire article par article

Chapitre I

Système de contrôle interne (système qualité)

Art. 1But

Le contrôle financier est une activité bien définie et largement codifiée tant dans le secteur privé que dans le secteur public.

Le contrôle de gestion a pour but d'examiner si les ressources sont employées de manière économique et si le coût calculé des prestations est proportionnel à leur utilité, examen qui n'est pas toujours évident dans le secteur public en raison de la nature généralement non commerciale des prestations.

Le contrôle de gestion applique des règles qui laissent une large part à l'interprétation et qui sont souvent liées à la nature des prestations livrées et au contexte économique, social et politique. Il s'avère donc nécessaire de fonder le contrôle de gestion sur l'examen d'un système de contrôle interne qui renvoit la responsabilité de la gestion aux services eux-mêmes et celle de la qualité à chaque collaborateur.

Art. 2Définition

Le système de contrôle interne ne présente en soi aucune innovation. Il est assimilable à des règles de gestion dont le but est le pilotage d'un système de production de biens et de services et la finalité de garantir l'excellence d'un service, la qualité totale des prestations, la maîtrise des coûts.

Art. 3Certification

Tout système de contrôle interne peut être certifié par un organisme habilité. la notion de certification répond au constat que toute entité n'est jamais assez vigilante à l'égard de son système de contrôle interne, y compris de la qualité de ses prestations.

Cette constatation est particulièrement vérifiée dans les systèmes publics qui ne subissent pas la pression de la concurrence. En principe, l'organe de certification est extérieur et indépendant.

Chapitre II

Surveillance interne de la gestion administrative et financière de l'Etat

Art. 4Principes

Le terme «surveillance» a été préféré au terme «contrôle» utilisé dans le premier chapitre. Il est nécessaire d'éliminer autant que possible le risque d'ambiguïté. Le mot «contrôle» prend, en effet, dans le monde des gestionnaires, chaque jour davantage le sens anglo-saxon de maîtrise, pilotage, direction, commande, ajustement continu. C'est dans ce sens que le mot contrôle est utilisé dans le premier chapitre.

La notion classique de contrôle renvoie au «contre rôle», à la tenue à double des registres. Il s'agit suvent d'un acte de vérification formelle. Lorsqu'il est exercé par un tiers étranger au service, le contrôle est perçu comme une fonction statique qui intervient après l'achèvement d'un processus. La surveillance, en revanche, s'inscrit dans une dynamique. Elle vise en priorité à responsabiliser les chefs de service à travers la mise en oeuvre et le respect du système de contrôle interne et non à jouer un «contre rôle».

Le terme «inspection» désigne l'autorité chargée de la surveillance permanente des comptes et de la gestion.

L'inspection exerce son mandat selon différents points de vues. Un dysfonctionnement de type organisationnel peut en effet avoir des conséquences financières directes ou indirectes non négligeables. C'est la raison pour laquelle, fidèle à la tendance relevée dans plusieurs cantons et à la Confédération, la commission des finances a ajouté au rôle traditionnel du contrôle financier des compétences pour vérifier:

a) si les ressources sont employées de manière économique;

b) si la relation entre les coûts et l'utilité est correcte;

c) si les dépenses consenties ont l'effet escompté.

Ces notions sont mentionnées à l'alinéa 3 du présent article et à l'alinéa 1, lettre c, de l'article 16.

Art. 5Entités concernées

L'article 5 reprend l'article 1 de la loi actuelle avec quelques simplifications.

Art. 6Compétences

Cet article comble une lacune du système actuel et institue un contrôle de gestion permanent. L'évolution récente tend très clairement à attribuer au contrôle financier des compétences en matière de contrôle de rentabilité. Cette évolution s'inscrit dans la logique d'une intégration forte du contrôle au processus de production.

Le contrôle interne traditionnel, le contrôle de caisse et l'inventaire sont des fonctions assumées par des personnes désignées par les services en fonction de leur système de contrôle interne.

L'alinéa 2 consacre une pratique courante. La direction du contrôle financier cantonal a été étroitement associée à l'élaboration de la présente loi comme à celle de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève.

Art. 7Déroulement

Cette disposition est reprise de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève. L'organe de surveillance peut intervenir à tout moment (en respectant bien entendu le principe de la proportionnalité).

La remise d'un programme au Conseil d'Etat n'a qu'une portée informative, elle ne saurait réduire les droits d'intervention de l'inspection, ni son indépendance.

Art. 8Rapports et droit d'être entendu

Le principe du rapport et celui de la discussion finale figurent actuellement à l'article 9 du règlement de la loi actuelle.

Art. 9Contrôles par des experts ou fiduciaires

L'article reprend les termes de l'article 4 de la loi actuelle.

Art. 10Obligation de renseigner

Reprise de l'article 6 actuel, il n'est plus nécessaire de spécifier l'obligation de renseigner pour l'inspection, puisque son mandat s'étend désormais au contrôle de gestion.

Art. 13Rapport annuel

L'article 13 reprend les principes évoqués aujourd'hui par l'article 5 et répond au souhait de la commission de contrôle de gestion.

Chapitre III

Evaluation des politiques publiques

Art. 15Principes

Cet article renforce et élargit les pouvoirs de l'organe extérieur d'examen.

Les attributions de la commission externe d'évaluation portent sur l'évaluation des politiques.

La démarche d'évaluation peut s'intéresser à toutes les raisons des dysfonctionnements constatés, qu'ils soient d'origine économique, législative, politique ou structurelle. La commission pourra examiner, par exemple, la pertinence de la répartition des tâches entre le secteur privé marchand, le secteur privé bénévole et le secteur public, entre les collectivités publiques elles-mêmes, l'organisation des services et les méthodes de travail, le rapport coût/utilité des prestations, l'évolution des dépenses publiques par habitant en comparaison intercantonale, etc.

Art. 16Mise en oeuvre

La commission d'évaluation des politiques pourra ouvrir une enquête de sa propre initiative. Il s'agit d'une innovation importante qui accroît sensiblement le pouvoir de la commission.

La discussion préalable avec le Conseil d'Etat ne doit pas restreindre la portée de cette disposition, elle a pour but au contraire de coordonner et d'ajuster la lettre de mission et d'assurer ainsi une qualité optimale du rapport final.

Au surplus, l'article 16 reprend le libellé de l'article 9 actuel, à l'exception des termes «exclusivement» et «spéciaux».

Art. 20Durée du mandat

Le principe d'un seul mandat d'une certaine durée garantit à la fois la pérennité de la commission et l'indépendance de ses membres.

Art. 21Nomination du président

L'article 21 reprend le libellé de l'article 12 de la loi actuelle, en ajoutant que le Conseil d'Etat consulte la commission des finances avant la nomination du président.

Art. 22Secrétariat

La mise à disposition de la commission d'évaluation d'un(e) secrétaire permanent(e) qualifié(e) dans les domaines de l'évaluation législative et de l'évaluation des politiques est une proposition nouvelle. Elle a pour but d'améliorer l'efficacité du travail de la commission.

Le statut d'agent spécialisé, prévu à l'alinéa 2, limite la durée du mandat à deux périodes de 4 ans. Ainsi évitera-t-on à la fois le risque d'une prise de pouvoir du titulaire et celui de la routine.

Art. 24Secret

L'article 24 reprend l'article 15 de la loi actuelle sans modification.

Art. 28Auditions

Il s'agit d'une procédure nouvelle qui a pour but d'informer les départements sans porter préjudice au pouvoir d'investigation de la commission d'évaluation.

L'alinéa 3 est également une nouvelle disposition. Elle propose une solution plus adéquate en permettant un droit de réplique des entités avant l'établissement du rapport définitif.

Art. 24Secret

L'article 24 reprend l'article 15 de la loi actuelle sans modification.

Art. 29Rapports

L'article 29 reprend pour l'essentiel le libellé de l'article 21 de la loi actuelle.

Art. 31Rapport annuel

Entre le principe général de publicité des rapports de la commission d'évaluation et une confidentialité nécessaire à l'établissement d'une certaine relation de confiance entre la commission d'évaluation et les services, l'article 31 opte pour la voie médiane du rapport annuel, dans lequel figurent au moins le mandat et les conclusions des rapports particuliers.

Chapitre IV

Dispositions particulières et finales

Art. 32Missions d'organisation

Cet article reprend des dispositions existantes.

Art. 33Clause abrogatoire

Le présent projet de loi remplace la loi sur le contrôle financier et le contrôle de gestion.

Art. 34Modification à une autre loi

L'article 72 de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève est repris sans modification aux articles 7 et 11 du présent projet de loi.

Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir réserver un bon accueil à ce projet de loi.

Préconsultation

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Si ce projet de loi provient de la nécessité, entre autres, de répondre à l'initiative 100 «Halte aux déficit», c'est également une réponse à notre motion 696, devenue 734, suite à des amendements, ainsi qu'à notre motion 822 qui demandait, en substance, une méthode de contrôle de gestion de l'administration, la mise en place d'un système d'audit pour évaluer les pratiques administratives, l'établissement des coûts réels des différentes prestations, l'analyse du rapport entre ces coûts et la qualité des prestations offertes par l'Etat, et, enfin et surtout, de faire appel à l'initiative et à la responsabilité des collaborateurs de l'administration pour étudier dans chaque département la possibilité de rationaliser les dépenses.

Le projet de loi qui vient d'être déposé et qui a fait l'objet d'un travail approfondi répond en grand partie à nos préoccupations, aussi nous l'acceptons.

Deux points ont toutefois été un peu laissés de côté et nous proposerons des amendements éventuellement en commission, je veux parler de la participation et de la responsabilité des collaborateurs de l'Etat, d'une part, et, d'autre part, du rapport qualité/prix. Si nous disons «oui» au contrôle du budget, à la rationalisation des dépenses et aux économies, nous pensons que le simple calcul financier qui consiste à supprimer une prestation n'est pas suffisant. Il faut évaluer le rapport «qualité des prestations offertes» et «besoins de la population». Parfois, même si le prix est élevé, cela devient un facteur secondaire devant la nécessité de garder un service pour la population.

Par conséquent, ces deux facteurs «rapport qualité» et «responsabilité des fonctionnaires» devront être revus dans ce projet de loi.

Mme Claire Torracinta-Pache (S). Ce projet de loi résulte, en fait, de l'insatisfaction constante et répétée des membres de la commission des finances qui ne peuvent pas assumer pleinement leur rôle, à savoir le contrôle des comptes et de la gestion du Conseil d'Etat. Ce contrôle est devenu extrêmement important en période de restrictions budgétaires où des choix politiques sont proposés, choix qu'il faudrait pouvoir faire en toute connaissance de cause, ce qui est malheureusement rarement le cas, même si les fonctionnaires et les conseillers d'Etat jouent le jeu de la transparence et de l'information.

Nous sommes une commission formée de députés de milice, et nous sommes souvent en position de faiblesse face à l'administration et au Conseil d'Etat. C'est pourquoi l'idée d'avoir des instruments plus performants à disposition, concernant à la fois un contrôle interne de la gestion financière et administrative de l'Etat ainsi qu'un contrôle externe chargé d'évaluer les politiques publiques, a recueilli l'appui de tous les groupes politiques.

Pour le groupe socialiste - et c'est ce qui me différencie de ma collègue, Mme Leuenberger - cette réflexion s'est amorcée bien avant le dépôt de l'initiative 100, et nous l'aurions menée avec ou sans cette dernière. Nous nous battrons pour que cette loi soit défendue en tant que telle et non pas uniquement comme un éventuel contreprojet à l'initiative 100.

Si des amendements doivent encore être présentés, nous les discuterons en commission des finances à laquelle je vous recommande de renvoyer ce projet.

M. Bernard Clerc (AdG). Au départ de ce projet de loi existait la volonté d'améliorer l'efficacité de la commission de contrôle de gestion. C'est ce qui avait motivé le travail au sein de la commission des finances et le rapport avec l'initiative 100 intitulée «Contre les dépenses abusives de l'Etat». Evidemment, nous nous y opposons fermement.

En fin de course, malheureusement, nous sommes arrivés à un projet de loi qui peut être à certains égards utilisé comme une machine de guerre contre le service public.

Je m'explique. En lisant l'exposé des motifs, nous nous apercevons que l'on parle constamment de notion de rendement, de rentabilité, de répartition des tâches entre les secteurs public et privé - ce qui ouvre évidemment largement la voie à des privatisations - de subsidiarité, de proportionnalité - mais on ne dit pas par rapport à quoi - et, du coup, d'utilité des prestations publiques. Nous sommes favorables à l'amélioration de l'efficacité du secteur public, mais nous pensons que cette amélioration passe par la participation du personnel, par l'allégement de la hiérarchie et en facilitant l'initiative de ce même personnel. C'est là qu'existent réellement des gains de productivité importants.

La lecture de l'exposé des motifs donne également l'impression que l'on arrive à un glissement où, finalement, l'organe d'évaluation des politiques publiques - quasiment par un audit qui serait censé être neutre - aboutirait, en fait, à proposer des solutions qui mettraient le parlement devant des faits accomplis, et nous n'aurions pas d'autre choix, au nom de la soi-disant objectivité ou analyse scientifique, que ceux proposés par cette commission.

Dans ce sens, nous exprimons donc les plus grandes réserves à propos de ce projet de loi.

M. Nicolas Brunschwig (L). Dans ces périodes extrêmement difficiles financièrement parlant, il paraît adéquat d'avoir des outils qui correspondent à la meilleure gestion possible. C'est sans doute dans cet ordre d'idée que l'année passée nous avons voté à l'unanimité, sauf erreur, une loi de finance - nous pouvons l'appeler ainsi - et cette année la commission des finances à la quasi-unanimité a décidé de déposer ce projet de loi qui renforce, restructure le système de surveillance de la gestion de l'évaluation des politiques publiques.

Cette loi est basée sur un triple niveau :

- Tout d'abord la volonté de renforcer et de responsabiliser les services eux-mêmes par rapport à cette tâche. Ce premier élément répond déjà au souci évoqué par Mme Leuenberger. Nous examinerons avec grand plaisir ce point pour voir si nous pouvons aller encore plus loin dans le cadre des travaux que nous aurons en commission.

- Le renforcement de l'inspectorat interne qui s'appelle pour l'instant le contrôle financier cantonal. Manifestement, cet organisme a des compétences et des possibilités pour effectuer un travail plus approfondi, qui ne s'arrête pas exclusivement à un strict contrôle financier. Ce service peut donner une appréciation sur la qualité de la gestion et des productivités des différents services de l'Etat, comme cela se fait d'ailleurs dans beaucoup d'organismes.

- Une commission externe qui existe actuellement sous le nom de commission de contrôle de gestion. Dans le cadre de ce projet de loi, elle a un nouveau nom, mais ce n'est pas un changement aussi fondamental que certains ont bien voulu le laisser entendre dans leurs déclarations. Il s'agit manifestement d'un renforcement des possibilités, de l'efficacité et des pouvoirs de cette commission externe.

C'est pour toutes ces raisons que le groupe libéral soutient ce projet de loi et se réjouit de l'examiner en commission.

M. Claude Blanc (PDC). Ce projet de loi est l'émanation de la presque totalité de la commission des finances. Nous étions d'ailleurs tous d'accord et, finalement, l'Alliance de gauche n'a pas cru devoir nous suivre. C'est dommage !

Monsieur Clerc, vos propos m'ont étonné. Vous avez le sentiment que ce projet de loi pourrait être utilisé comme une machine de guerre contre le service public, si j'ai bien compris ? Mais, Monsieur Clerc, la meilleure défense du service public, c'est son excellence. Si nous voulons le rendre excellent - parce que tout est perfectible - nous devons nous donner les moyens d'y parvenir. En essayant de faire apprécier la qualité du service public par des gens qui lui sont étrangers, mais qui ont, eux, l'expérience de la vie et de la conduite sérieuse d'affaires qui marchent, je crois que nous n'avons rien à craindre. D'ailleurs, nous aurons toujours le contrôle politique des résultats que l'on nous soumettra et nous ne pourrons que nous féliciter d'avoir des éléments qui, en tant que parlementaires de milice, comme le disait tout à l'heure Mme Torracinta-Pache, nous échappent. Personne n'a rien à craindre, à mon avis, à tout mettre à la lumière et à essayer d'améliorer le fonctionnement des services de l'Etat. Vous avez un vieux réflexe conservateur vis-à-vis du service public, mais si ce dernier est bon - je le répète - il n'a rien à craindre.

La commission de contrôle de gestion rajeunit son look, au propre et au figuré. On voudrait que ses membres s'investissent davantage. Un des éléments de ce projet de loi est qu'il faut les rendre indépendants par le fait qu'ils seront désignés pour huit ans et qu'ils ne seront pas rééligibles. Cela veut dire qu'ils n'auront pas peur de déplaire à l'autorité qui les a nommés. C'est une bonne garantie. La nomination d'un secrétaire permanent spécialiste en la matière permettra de structurer et de suivre les travaux. Le Grand Conseil et le Conseil d'Etat pourront en cueillir les fruits. C'est un progrès pour tout le monde, mais surtout pour la qualité du service public.

M. Daniel Ducommun (R). Nous sommes également favorables à ce projet, mais nous n'émettrons pas les réserves formulées par M. Clerc.

Je rappelle qu'au départ de nos travaux ce projet était conditionné par deux contingences :

La première était la restructuration de la commission de contrôle de gestion, car elle devenait poussiéreuse, manquait d'indépendance dans son action et d'initiative. Elle travaillait en coulisses, puisque la plupart d'entre nous n'avait pas connaissance de l'ampleur et de la qualité de ses travaux.

La deuxième était d'apporter une réponse crédible à l'initiative 100 sur un audit général de l'Etat. Le comité «Halte aux déficits» ne doit pas être condamné sur ses actions, car les problèmes qu'il soulève sont pertinents. Malheureusement, les solutions proposées par ce comité sont excessives et inadaptables. C'est la raison pour laquelle le relais avec la commission des finances semble de loin être la meilleure solution.

La révision de la loi est donc nécessaire. Avec la commission d'évaluation politique, qui sera le rôle de la commission de contrôle de gestion, on touche l'approche à la qualité et à une structure de contrôle plus moderne.

Nous sommes donc solidaires de ce projet.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je me réjouissais que ce projet de loi revienne en séance plénière, car tant de choses ont été dites ou écrites à propos de ce projet de loi et, notamment, de l'actuelle commission de contrôle de gestion qu'il était temps de remettre l'église au milieu du village, si vous voulez bien me passer cette expression.

En effet, ce projet de loi a permis de faire le point à la commission des finances et à l'intérieur du département des finances sur l'évolution des idées et des moyens à disposition des collectivités publiques en matière de contrôle de la gestion et du contrôle comptable. C'est la raison pour laquelle nos idées ont été inspirées par ce qui s'est fait de plus récent au plan fédéral, comme déjà dans certains cantons, en matière d'inspectorat cantonal et, enfin, par l'excellence des travaux en matière d'analyse législative et d'évaluation législative, dont, comme je vous l'ai dit lors de notre précédente séance, le professeur Morand de notre université est un spécialiste suisse. La construction présentée me paraît répondre aujourd'hui plus que jamais tant aux besoins de votre Grand Conseil - comme cela a été dit par certains députés - qu'à ceux de l'Etat.

Contrairement à ce que pense M. Clerc, il n'y a aucune machine de guerre construite contre la fonction publique, puisque, d'ailleurs, le contrôle interne - le premier étage - doit se faire au sein des services par les services eux-mêmes. L'inspectorat cantonal - le deuxième étage - voit ses pouvoirs encore renforcés, notamment au niveau du contrôle de la gestion et pas seulement du contrôle comptable. Et enfin - troisième étage - la commission externe d'évaluation des politiques publiques dont les critères essentiels, comme on l'a voulu, sont l'indépendance, davantage de transparence, davantage de publicité au niveau des conclusions des rapports, une saisine beaucoup plus claire de cette commission d'évaluation et des compétences qui permettent aux membres de cette commission - ce sera un gros travail de les recruter - d'effectuer un travail efficace, tant pour votre parlement que pour nous.

Il n'était donc pas question, pour le Conseil d'Etat, d'essayer d'éliminer l'actuelle commission de contrôle de gestion, mais il était nécessaire, pour le contrôle d'Etat, de renforcer - comme vous l'avez souhaité, d'ailleurs, via deux motions antérieures - l'organisme chargé de l'évaluation des politiques et de l'adéquation des lois, des moyens à disposition de l'Etat pour l'exécution de ces lois par un meilleur contrôle. Il ne s'agit donc pas du tout d'un affaiblissement de cette commission externe, mais d'un renforcement. C'est un instrument très important tant pour le parlement que pour le Conseil d'Etat.

Je me réjouis donc que ce projet soit renvoyé formellement en commission pour être adopté rapidement, après les discussions complémentaires issues des réflexions de vos groupes, de telle sorte qu'au 1er janvier 1995 nous puissions être dotés de ce nouvel instrument.

Ce projet est renvoyé à la commission des finances.

PL 7157
15. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la Banque cantonale de Genève (D 2 4). ( )PL7157

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi sur la Banque cantonale de Genève, du 24 juin 1993, est modifiée comme suit:

Art. 5 (nouvelle teneur)

Surveillance

1 La Banque cantonale de Genève est soumise à la surveillance bancaire de la commission fédérale des banques conformément aux dispostions de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne, du 8 novembre 1934.

2 La commission fédérale des banques peut exiger de la banque et de l'organe de révision tous les renseignements et documents dont elle a besoin dans l'exécution de sa tâche.

3 La surveillance du respect des prescriptions légales cantonales est de la compétence du Conseil d'Etat.

Art. 11. al. 2, lettre g (nouvelle)

g) elle préavise sur la fusion, l'absorption et la dissolution de la banque.

Art. 12, al. 8 (nouveau)

8 Les administrateurs représentant l'actionnariat nominatif doivent être désignés jusqu'au 31 janvier précédant l'assemblée générale qui procède au renouvellement du mandat des administrateurs représentant l'actionnariat au porteur.

EXPOSÉ DES MOTIFS

En guise d'introduction, il doit être rappelé que dans le cadre des travaux préparatoires de la loi sur la Banque cantonale de Genève, tant le Conseil d'Etat que la commission ad hoc unanime du Grand Conseil avaient exprimé le voeu que la surveillance pleine et entière de la nouvelle banque puisse être confiée à la commission fédérale des banques (voir rapport de la commission du Grand Conseil du 12 février 1993, Mémorial du Grand Conseil, 1993,p. 1688 et suivantes, p. 1747).

Consulté à ce sujet, l'office fédéral de la justice avait alors conclu à l'impossibilité d'étendre la surveillance de la commission fédérale des banques aux domaines qui n'étaient pas de son ressort, sans modification préalable de la législation fédérale sur les banques et les caisses d'épargne.

Comme on le sait, la loi sur la Banque cantonale de Genève a été adoptée dans sa version définitive le 24 juin 1993 et la constitution de la Banque cantonale de Genève, issue de la fusion des deux anciens établissements bancaires cantonaux, est devenue effective le 1er janvier 1994. En l'état, la surveillance de la banque est confiée au Conseil d'Etat, conformément à l'article 5 de la loi qui stipule ce qui suit:

1 Le Conseil d'Etat exerce la surveillance sur l'organisation de la banque et sur les activités bancaires des membres de ses organes. Il veille à cet effet à ce que les personnes chargées d'administrer ou de gérer la banque jouissent d'une bonne réputation, présentent toutes les garanties d'une activité irréprochable et disposent des compétences professionnelles nécessaires.

2 Le Conseil d'Etat révoque, par décision motivée, tout administrateur ne jouissant plus d'une bonne réputation ou ne présentant plus les garanties d'une activité irréprochable.

3 Le Conseil d'Etat peut exiger de l'organe de révision et de la banque tous les renseignements et documents dont il a besoin dans l'exécution de sa tâche.

4 Dans son rapport de gestion annuel sur les comptes d'Etat, le Conseil d'Etat rend compte au Grand Conseil de son activité d'autorité de surveillance.

Depuis lors, les Chambres fédérales ont, de leur côté, complété la législation fédérale dans le sens souhaité par le Grand Conseil genevois. C'est ainsi qu'en date du 18 mars 1994, elles ont modifié la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne, du 8 novembre 1934, notamment l'article 3a, alinéa 2, comme suit:

2 Les cantons peuvent transférer l'intégralité de la surveillance bancaire qu'ils exercent sur leurs banques cantonales à la commission des banques. Dans ce cas, les banques cantonales doivent satisfaire aux exigences énumérées à l'article 3, 2e et 3e alinéas. La création et la liquidation des banques cantonales, ainsi que la surveillance du respect des prescriptions légales cantonales demeurent du ressort des cantons.

Pour sa part, l'article 3 a dorénavant la teneur suivante.

1 La banque ne peut commencer son activité qu'après en avoir obtenu l'autorisation de la commission des banques; elle ne peut s'inscrire au registre du commerce avant d'avoir reçu cette autorisation.

2 L'autorisation est accordée lorsque les conditions suivantes sont réunies:

a)

les statuts, les contrats de société et les règlements de la banque en définissent exactement le champ d'activité et prévoient l'organisation correspondant à cette activité; lorsque son but social ou l'importance de ses affaires l'exige, la banque doit instituer, d'une part, des organes de direction et, d'autre part, des organes préposés à la haute direction, à la surveillance et au contrôle, en délimitant les attributions de chacun d'entre eux de façon à garantir une surveillance appropriée de la gestion;

b)

la banque fournit la preuve que le capital minimum fixé par le Conseil fédéral est entièrement libéré;

c)

les personnes chargées d'administrer et de gérer la banque jouissent d'une bonne réputation et présentent toutes les garanties d'une activité irréprochable;

cbis)

les personnes physiques ou morales qui détiennent dans une banque, directement ou indirectement, au moins 10 pour cent du capital ou des droits de vote, ou qui de toute autre manière peuvent exercer un influence notable sur la gestion de la banque (participation qualifiée) donnent la garantie que leur influence n'est pas susceptible d'être exercée au détriment d'une gestion prudente et saine de la banque;

d)

les membres de la direction de la banque ont leur domicile en un lieu qui leur permet d'exercer la gestion effective des affaires et d'en assurer la responsabilité.

3 La banque remettra à la commission des banques ses statuts, ses contrats de société et ses règlements, et l'informera de toutes les modifications qui y seront aportées ultérieurement, en tant qu'elles ont trait au but social, à l'activité de l'établissement, au capital social ou à l'organisation interne. Les modifications ne pourront être inscrites au registre du commerce qu'après avoir été approuvées par la commission des banques.

4 Abrogé.

5 Toute personne physique ou morale qui envisage de détenir, ou de cesser de détenir, directement ou indirectement, une participation qualifiée au sens du 2e alinéa, lettre cbis, dans une banque organisée selon le droit suisse, est tenue d'en informer préalablement la commission des banques. Ce devoir d'information vaut également lorsqu'elle envisage d'augmenter ou de diminuer une telle participation et que ladite participation atteint ou dépasse les seuils de 20, 33 ou 50 pour cent du capital ou des droits de vote, ou descend en dessous de ceux-ci.

6 La banque annonce les personnes qui remplissent les conditions du5e alinéa dès qu'elle en a connaissance, mais au moins une fois par année.

7 Les banques organisées selon le droit suisse qui envisagent d'être actives à l'étranger par l'intermédiaire d'une filiale, d'une succursale, d'une agence ou d'une représentation en informent au préalable la commission des banques.

Ces modifications de la loi fédérale entreront en vigueur le 1er janvier 1995. Le Conseil fédéral se déterminera définitivement à ce sujet dans le courant de l'automne 1994.

Il faut savoir que le canton de Berne a d'ores et déjà adapté sa législation et prévu que la surveillance de la Banque cantonale bernoise sera à l'avenir soumise sans restriction à la surveillance de la commission fédérale des banques (loi du 6 septembre 1993).

Il est également intéressant de noter que, dans son rapport annuel de gestion 1993 (p. 151 et suivantes), la commission fédérale des banques a exprimé le souhait qu'à moyen terme, toutes les banques cantonales soient soumises entièrement à sa surveillance.

Dès lors, désireux de respecter la volonté du Grand Conseil, mais aussi son propre intérêt à être déchargé d'une tâche qu'il n'est pas en mesure d'exercer avec autant de compétence et d'efficacité que l'autorité fédérale créée précisément à cet effet, le Conseil d'Etat considère qu'il se justifie de modifier sans plus attendre la loi sur la Banque cantonale de Genève.

Commentaire article par article

Art. 5 (nouvelle teneur)

L'ancienne note marginale «Autorité cantonale de surveillance» est remplace par «Surveillance».

A son alinéa 1, cet article consacre le principe de la surveillance confiée à la commission fédérale des banques.

Quant à l'alinéa 2, il transfère à la commission fédérale des banques le droit accordé jusqu'ici au Conseil d'Etat d'obtenir de l'organe de révision tous les renseignements et documents dont elle a besoin dans l'exécution de sa tâche.

Enfin, l'alinéa 3 reprend la réserve de l'article 3a, alinéa 2, in fine, de la loi fédérale en conservant au Conseil d'Etat la compétence de surveillance sur le respect des prescriptions légales cantonales.

Art. 11, alinéa 2, lettre g (nouvelle)

La loi sur la Banque cantonale de Genève ne fait aucune référence à une fusion avec un autre établissement bancaire, respectivement à une absorption ou à une dissolution éventuelles de l'institution. Pour éviter les altermoiements déplorés à ce sujet lors de la reprise de la Banque vaudoise de crédit par la Banque cantonale vaudoise, il apparaît judicieux, sur le plan juridique et formel, de combler cette lacune et d'attribuer à l'assemblée générale le droit de donner un préavis à l'autorité cantonale (Grand Conseil) qui seule sera habilitée à prendre une telle décision, ceci en raison notamment de la garantie accordée par le canton (art. 4).

Art. 12, alinéa 8 (nouveau)

La proposition d'introduction de cette nouvelle disposition découle de raisons essentiellement pratiques pour permettre de respecter les délais légaux et statutaires. Il se justifie que les administrateurs désignés par l'actionnariat nominatif (canton et communes) soient connus avant la tenue de l'assemblée générale qui, elle, élit les administrateurs représentant l'actionnariat privé et marque à cette occasion le début d'une nouvelle période administrative.

L'échéance au 31 janvier a été choisie en tenant compte des nécessités des travaux administratifs préparatoires de l'assemblée générale ordinaire qui doit avoir lieu dans les six mois au plus tard après la clôture de l'exercice (art. 699, al. 2, du code des obligations), mais qui se tiendra en principe à la fin du premier trimestre de l'année.

Au vu des explications qui précèdent, nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un accueil favorable au présent projet.

Personne ne demande la parole en préconsultation.

Ce projet est renvoyé à la commission des finances.

PL 7033-A
16. Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi générale sur les contributions publiques (révision des taux d'imposition ) (D 3 1). ( -) PL7033
Mémorial 1993 : Projet, 4562. Commission, 4630.
Rapport de Mme Christine Sayegh (S), commission fiscale

Le Conseil d'Etat a déposé le 8 septembre 1993 un projet de loi tendant à réviser les taux d'imposition sur le revenu des personnes physiques.

Ce projet a été renvoyé le 16 septembre 1993 à la commission fiscale.

La commission fiscale, sous la présidence de Madame Christiane Magnenat Schellack puis de Monsieur Jean-Luc Ducret, s'est réunie tout d'abord en séance commune avec la commission des finances présidée par Madame Martine Brunschwig Graf les 22 et 29 septembre 1993, puis a ensuite continué ses travaux au cours de 8 séances, assistée par Messieurs Olivier Vodoz, conseiller d'Etat, président du département des finances, Daniel Brauen, administrateur général de l'administration fiscale, Pietro Sansonetti, directeur des affaires fiscales, Jean-François Mabut, secrétaire général du département des finances ainsi que Messieurs Denis Roy, directeur des services financiers de l'Etat, Dominique Frey, directeur adjoint de l'office cantonal de la statistique du département de l'économie publique ainsi que le professeur Fabrizio Carlevaro de l'université de Genève.

PREAMBULE

Dans un exposé des motifs très étayé, le Conseil d'Etat explique que le PL 7033 s'inscrit dans le cadre du plan d'assainissement des finances publiques.

Ce projet est commandé par l'affaiblissement de la croissance des revenus de l'Etat depuis 1987, la forte expansion des dépenses sociales et de la fonction redistributive de l'Etat, une augmentation considérable des charges financières et un développement continu des services publiques.

Les principaux objectifs sont:

a) moderniser le mode de calcul de l'impôt en substituant au barème par «tranches de revenu» un barème fonctionnel continu;

b) améliorer la transparence du système fiscal et réduire les coûts administratifs;

c) corriger les anomalies des barèmes actuels et réviser marginalement la charge fiscale.

Pour ce faire, le département des finances a sollicité du département de l'économie publique de l'université de Genève, une étude approfondie afin de concrétiser les objectifs définis et les appliquer à la taxation des revenus des personnes physiques.

PRESENTATION DE LA LOI

L'impôt cantonal sur le revenu des personnes physiques est calculé suivant des barèmes spécifiant le taux d'imposition marginal. Ceci signifie que le revenu imposable est divisé en tranches auxquelles on applique un taux d'imposition croissant. Le terme «marginal» qualifie le taux appliqué à un accroissement du revenu.

Cette manière d'imposer engendre des iniquités au motif que le taux d'imposition marginal progresse par paliers.

Pour supprimer cette iniquité, il y a lieu de remplacer la progression exprimée en tranches de revenu par une progression du taux d'imposition marginal calculé pour chaque franc supplémentaire, à savoir remplacer la croissance du revenu imposable «en escaliers» par une courbe continue.

Pour ce faire, le professeur Fabrizio Carlevaro et ses assistants ont établi une formule mathématique prenant en considération tous les paramètres de la loi actuelle.

Cette formule moderne n'est pas pour autant révolutionnaire puisqu'elle respecte aussi bien le principe que les conditions de l'imposition actuelle du revenu des personnes physiques.

Elle a le mérite de pouvoir être illustrée par une courbe qui permet de calculer directement le taux d'impôt effectif applicable à un revenu déterminé ainsi que le taux appliqué à chaque franc imposable du revenu.

Cette représentation graphique du barème continu est un instrument beaucoup plus accessible au contribuable à une époque où l'informatique a développé de manière très large l'image, laquelle se substitue toujours plus souvent au texte.

Cette courbe fiscale est également un outil de travail indispensable pour apprécier la masse fiscale et l'évolution des barèmes.

Tant sur le plan de l'économie publique que sur le plan politique, les décisions que l'on souhaite prendre peuvent être immédiatement visualisées.

En effet, et comme l'a rappelé Maurice Allais, Prix Nobel des sciences économiques en 1988: «La formulation mathématique a l'inappréciable avantage de forcer l'esprit à la réflexion et à la précision. Elle donne la possibilité de découvrir toutes les conséquences et rien que les conséquences des hypothèses admises, et, par suite, de mettre complètement en évidence leur contenu effectif.».

Ainsi, les mathématiques peuvent être au service des décisions politiques, preuve en est le présent projet où la commission fiscale a demandé à ce que la courbe présentée respecte la double neutralité de l'impôt, à savoir tant sur la masse fiscale, que sur la taxation des revenus.

C'est donc le premier exemple d'application d'une volonté politique à l'aide d'une formule mathématique.

Les explications plus spécifiques complèteront cette présentation dans le commentaire article par article.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Ce projet de loi mettait les commissaires devant deux options, soit une mini réforme qui se limitait à substituer à la progression de l'impôt par tranches de revenu une courbe de progression en francs, soit une maxi réforme qui nécessitait alors la discussion relative à l'introduction des quotients familiaux, du splitting, de toute la problématique des déductions fiscales et du moment où ces dernières doivent entrer en considération soit avant, soit après la détermination du revenu imposable.

En effet, la maxi réforme prévoyait une correction linéaire des barèmes fiscaux afin d'améliorer l'équilibre financier des comptes de l'Etat.

Les commissaires ont pris la décision par neuf voix et deux abstentions, de se limiter à l'étude de la mini réforme, d'étudier cette nouvelle conception mathématique du barème sans que cette dernière n'engendre une augmentation d'impôts.

Les commissaires ont toutefois admis que si l'on pouvait respecter une absolue neutralité quant à la masse fiscale totale, ceci était plus difficile pour la taxation à titre individuel puisque les tranches de revenu étaient réduites à des francs.

Le professeur Carlevaro et ses collaborateurs ont su traduire mathématiquement les conditions draconiennes que la commission fiscale a voulu et la majoration maximale d'impôts est de 100 F par an.

Cette majoration maximale se situe au niveau des salaires annuels de 20 000 F, mais on constate également que ce sont les mêmes revenus qui ont le plus fortement bénéficié de la suppression de la progression à froid conformément au tableau annexé.

Les écarts incontournables vu la modification du système vont manifestement vers une équité dans la taxation de l'impôt.

Après plusieurs remaniements du texte légal afin de passer d'une expression de spécialiste à un vocable accessible au contribuable, les dispositions des articles 30 à 33 B de la loi générale sur les contributions publiques ont été simplifiées et les courbes illustrant le barème fiscal ainsi que la formule mathématique y relative ont été placées en annexe de la loi.

Ces annexes font néanmoins partie intégrante de la loi et ont donc force de loi. Seul le Grand Conseil peut décider d'en modifier la teneur et il y lieu d'insister sur ce fait, car la pratique des annexes est récente et ne doit pas porter atteinte à la sécurité juridique.

Le projet de loi 7033 tel qu'il ressort des travaux de la commission se limite donc à reviser le mode de calcul de l'impôt selon la version adoptée par la commission fiscale du Grand Conseil le 20 mai 1994.

COMMENTAIRES ARTICLE PAR ARTICLE

Article 30 (nouveau)

Cette disposition fixe le montant forfaitaire des déductions personnelles en fonction de l'état civil des contribuables. Ce montant correspond au seuil d'assujettissement 1994.

Quant à l'alinéa 3, il vise les personnes taxées de manière limitée, au sens de l'article 32 C (nouveau), lesquelles ne bénéficient pas de la possibilité d'opérer des déductions personnelles.

Article 30 B (nouveau)

Cette disposition reprend la teneur de l'article 32, alinéa 2 actuel.

Article 31 A (nouvelle teneur)

Les conditions d'imposition des personnes seules avec enfants restent inchangées et le nouveau texte n'est qu'une modification technique en fonction des remaniements des dispositions législatives.

Article 32 (nouvelle teneur)

Cet article énonce le principe de l'imposition, son assiette et le mode d'application du taux d'imposition.

Article 32 A (nouvelle teneur)

Il s'agit du barème A (applicable aux contribuables célibataires, veufs, séparés de corps ou de fait, divorcés).

Spécification du barème continu flexible

L'opération a consisté à passer d'un taux d'imposition marginal qui progresse par paliers à un taux qui progresse de façon continue. Pour ce faire, le revenu imposable n'est plus divisé par tranches mais selon l'unité monétaire dans laquelle est exprimé le revenu, en l'espèce le franc suisse.

Il en résulte que le taux d'imposition croissant, s'appliquant à chaque franc de revenu imposable, ne peut plus être spécifié à l'aide d'un tableau mais fait l'objet d'une définition par l'intermédiaire d'une formule mathématique. La formule ainsi obtenue garantit la neutralité du taux d'imposition et répond donc aux deux conditions:

a) la minimisation des écarts par rapport au barème actuellement en vigueur;

b) la neutralité de la révision sur la production fiscale globale (absence de recettes supplémentaires).

Pour s'assurer de la révision neutre du barème A, cette dernière a été basée sur les données de l'année de taxation 1991 puis appliquée à l'année fiscale 1992.

Afin de supprimer la progression à froid, un paramètre spécifique a été introduit, lequel tient compte de l'année de référence, soit la première année de mise en vigueur du barème et de l'évolution du renchérissement annuel à Genève.

En respectant la neutralité de l'imposition fiscale actuelle, on constate que le taux d'imposition minimum du franc est de 0,22 % pour arriver à un taux maximum de 19 %.

Ces taux sont fixés dans la loi aux alinéas 2 et 3.

Article 32 B (nouvelle teneur)

Il s'agit du barème B (applicable aux contribuables mariés, non séparés de corps ou de fait)

Spécification du barème continu flexible des couples mariés

La loi actuelle prévoit l'imposition conjointe des revenus des époux vivant en ménage commun quel que soit le régime matrimonial. Dans un tel système, les revenus des époux sont additionnés et le revenu total du couple est imposé d'après un barème spécialement conçu pour eux. Pour éviter que l'imposition conjointe des époux ne décourage la constitution des familles, le barème B doit être décalé par rapport au barème A.

L'analyse des barèmes genevois actuels A et B montrent qu'ils sont différenciés quant au taux mais qu'ils comportent une liaison au niveau des tranches de revenu.

C'est pourquoi, en tenant compte des caractéristiques du barème B (seuil d'imposition et revenu imposable moyen des époux), il est possible mathématiquement d'arrimer le barème B sur le barème A, ce qui permet de reproduire au mieux le barème B actuel tout en corrigeant les irrégularités de progression du barème actuel.

En outre, le nouveau barème B respecte la règle fixée par le Tribunal fédéral relative à l'égalité d'imposition entre couples mariés et concubins. Enfin, un paramètre spécifique, semblable à celui de l'article 32 A, est également introduit pour supprimer la progression à froid.

Le taux marginal d'imposition est le même que pour le barème A et croît en conséquence entre 0,22 % et 19 %.

Ainsi, le barème est différent mais la progression est la même.

La formule mathématique qui en résulte respecte la neutralité sollicitée par la commission tout en rectifiant les irrégularités dues au système par tranches actuel.

Article 32 C (nouvelle teneur)

Le barème C qui figure dans l'actuel article 32 B est supprimé et remplacé par le barème A, car non seulement cette catégorie de contribuables est en constante diminution, mais encore la différence entre le barème A et le barème C n'est plus significative.

Article 33 (nouvelle teneur)

Conformément à la loi actuelle, les barèmes fiscaux doivent être adaptés au coût de la vie, ce qui est exprimé à l'alinéa 1.

Il a d'ailleurs été prévu dans la formule du calcul des barèmes les paramètres pour cette adaptation.

L'alinéa 2 précise que, moyennant certaines conditions économiques, il peut être proposé au Grand Conseil de déroger au principe de l'indexation des barèmes.

Bien que cette possibilité existe sans disposition légale spécifique puisqu'il suffit de déposer un projet de loi à ce sujet, la majorité de la commission a souhaité qu'elle figure formellement dans la loi.

(Cet alinéa a été accepté par quatre voix: 2 Rad, 2 Soc; 5 abstentions: 4 Lib, 1 PDCc et 3 oppositions AdG)

Article 33 A (nouvelle teneur)

Il s'agit de l'adaptation de certaines déductions admises sur le revenu brut (notamment frais médicaux, pharmaceutiques et dentaires, versement effectué à l'office cantonal des personnes âgées (OCPA), déductions sur le revenu des époux non séparés de fait ou de corps, le montant forfaitaire du seuil d'assujettissement et les différentes déductions personnelles). Cet article reprend le principe de l'article 33, alinéa 4 actuel et conserve le même pourcentage de variation de l'indice, soit 10 %.

La publication de la valeur de l'indice de renchérissement est faite sous forme de règlement.

CONCLUSIONS

Le passage à l'application d'un barème progressif continu en matière d'imposition fiscale est certainement une actualisation logique en regard des connaissances scientifiques et économiques ainsi que des possibilités informatiques en notre possession.

Toutefois l'étude de ce projet n'a pas été simple en raison de sa technicité et du vocabulaire spécifique employé par les spécialistes chargés des exposés explicatifs.

Il n'en reste pas moins qu'après s'être familiarisés avec les courbes fiscales et leurs paramètres, les commissaires ont été convaincus que cet outil moderne répond aux conditions limitatives d'une mini-réforme respectant la neutralité fiscale.

C'est ainsi que, par 9 voix (4 Lib, 2 Rad, 1 PDC, 2 Soc et 3 abstentions: AdG), la commission fiscale vous recommande, Mesdames, Messieurs les députés, de voter le présent projet de loi.

Annexes: - Tableau «Impôts selon le barème 1985, 1991, ancienne et nouvelle formule» (en %)

 - Idem (écart en points de %)

 - Courbe de la révision neutre du barème A 1991

 - Courbe de la révision neutre du barème B 1991

Premier débat

Mme Christine Sayegh (S), rapporteuse. Je vous signale une faute de frappe que vous aurez tous spontanément corrigée à la page 2 du rapport, aux deuxième et troisième alinéas, sous «Présentation de la loi» il est écrit «iniquité» au lieu de «inéquité».

Ce projet de loi avait deux ambitions. La première d'éliminer les inconvénients d'une progression de la taxation des revenus des personnes physiques par paliers et la seconde de revoir le taux d'imposition. Conformément à la volonté des citoyens et afin d'être efficace dans ses travaux, la commission fiscale a décidé de ne traiter que la première ambition et d'étudier le remplacement par une progression en francs et non plus en tranches de revenus du taux marginal d'imposition.

Si la formule mathématique vous paraît compliquée, c'est plutôt aux résultats que vous devez vous attarder, à savoir la courbe qui en résulte. La neutralité de l'impôt a été respectée tant au niveau de la masse fiscale globale qu'au niveau du taux d'imposition. Vous aurez certainement constaté un léger accroissement de l'impôt, au maximum 100 F par an pour certaines catégories de revenus, notamment entre 20 000 et 25 000 F et entre 100 000 et 150 000 F. Ces augmentations minimes - que l'on ne doit toutefois pas passer sous silence - s'expliquent par le fait que ces mêmes revenus ont été les plus privilégiés par la suppression de la progression à froid. C'est pourquoi j'ai aussi annexé à mon rapport, en page 18, un graphique qui vous montre la diminution de la charge fiscale résultant de la suppression de la progression à froid entre 1985 et 1991. Vous constaterez que cette légère augmentation est toujours très inférieure aux effets de ladite suppression. Vous constaterez également que la première courbe qui nous avait été présentée a été corrigée au plus près de la neutralité exigée. Cela procède d'une saine équité fiscale et l'on doit saluer ici les efforts du professeur Carlevaro et de ses collaborateurs pour le travail effectué. La courbe de progression du taux d'impôts est un instrument moderne et transparent qui permet de visualiser rapidement toute modification et de faciliter, en conséquence, la compréhension du contribuable.

Je vous invite donc à suivre les conclusions de la commission qui vous recommande, par neuf voix et trois abstentions, de voter le présent projet de loi.

M. Jean Spielmann (AdG). Nous souscrivons à l'idée qu'il faut trouver un instrument plus moderne pour modifier l'assiette fiscale sans avoir les inconvénients d'une modification par paliers et sans introduire de complications dans la législation. C'est une bonne idée de trouver un instrument de mesure permettant d'introduire des paramètres pour lisser la courbe, pour agir avec ponctualité et exactitude sur une modification fiscale en tentant d'en prendre les paramètres politiques au niveau de la progressivité de l'impôt, pour trouver un système de calcul qui évite les difficultés que nous avons connues avec la progression à froid. Sauf dans des cas marginaux, il n'était pas possible de modifier la courbe sans tenir compte des distorsions de ces dernières années - je n'ai pas besoin de rappeler les différentes complications intervenues suite aux barèmes-rabais successifs, que nous avions prévues lors de leur mise en place.

Je dois tout de même rectifier certaines appréciations complétées par le rapporteur. Si les modifications de l'assiette fiscale et les diminutions de la charge fiscale, par rapport à la suppression de la progression à froid et de la rectification des barèmes, ont effectivement touché certains contribuables davantage que d'autres, c'est aussi parce que ces contribuables sont ceux qui ont été les victimes de la progression à froid durant de nombreuses années. Je le répète, la progressivité de l'imposition fiscale s'arrêtait à un plancher de 75 000 F, cela durant toute la période de très forte inflation. Par conséquent, tous ceux qui avaient des revenus supérieurs à cette somme n'ont pas du tout été touchés par la progression à froid. On peut voir ces modifications sur le tableau de la page 18. Les revenus vers le haut ont subi moins de diminution en raison de la suppression de la progression à froid et des barèmes-rabais, précisément parce qu'ils se trouvaient trop hauts pour être touchés. Ensuite, les impôts spéciaux sur les gros revenus ont été introduits par voie de centimes additionnels qui n'étaient prélevés que sur l'impôt cantonal et qui ont été appliqués ensuite aux barèmes de base pour donner l'imposition que nous connaissions avant les décisions prises maintenant.

Nous sommes d'accord avec l'instrument de mesure mis en place, ce qui ne signifie pas que nous sommes satisfaits de la manière avec laquelle les impôts sont prélevés et des taux de progressivité. Mais il faut se mettre d'accord, quelles que soient notre option politique et notre conception de la perception fiscale, sur un instrument de mesure qui nous permet de discuter concrètement de la manière de modifier éventuellement, pour des raisons politiques, financières et économiques, les barèmes fiscaux. Nous pourrons le faire en toute connaissance en évitant l'introduction des multiples distorsions provoquées par les barèmes précédents.

Dernier problème qui mérite également d'être évoqué. Lors d'une modification d'un barème d'imposition de la fiscalité, on touche à des éléments tels que les déductions sociales sur le revenu. Il faut savoir si ces déductions doivent être effectuées avant le calcul de l'impôt, soit réduire le montant imposable, ou si elles doivent être effectuées sur la part de l'impôt à payer, ce qui est forcément différent. En effet, selon le système de modification que nous adopterons - il faut poursuivre ces réformes - la diminution et les déductions sociales sont très différentes au niveau du taux.

Aujourd'hui, paradoxalement, plus on gagne d'argent plus la diminution sociale est importante, puisqu'elle est toujours prise sur les tranches les plus élevées de la progression de l'impôt. On pourrait expliquer cela plus en détail, mais ce sont des problèmes compliqués qu'il faut traiter en commission. Les enjeux sont politiques. Aujourd'hui, rien n'est changé, mais ces problèmes restent en attente, car il faudra bien leur trouver des solutions.

Pour le moment, nous voterons cette modification technique qui permettra ensuite d'avoir un instrument beaucoup plus pointu et performant pour modifier l'assiette fiscale, ce qui me paraît nécessaire.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Tout d'abord, je vous remercie pour l'accueil réservé aux travaux de la commission fiscale sur ce projet extrêmement délicat et important. Vous devez vous rendre compte que vos collègues de la commission fiscale ont travaillé pendant de nombreuses séances avec l'appui - je le souligne - de l'université de Genève et du professeur Carlevaro et de son équipe d'assistants qui nous ont permis, par leur analyse mathématique, de mettre au point les formules qui se retrouvent dans la loi, d'une part, mais surtout de faire des simulations des résultats de ces formules pour vous, députés, et pour nous, Conseil d'Etat.

Aujourd'hui, par rapport au projet ambitieux que nous avions déposé, la première partie, dite technique, a abouti, comme on vient de le souligner. Cette partie répond exactement aux deux conditions posées par la commission fiscale de votre parlement, à savoir une double neutralité : neutralité au niveau global des revenus de l'Etat produits par la fiscalité - ce qui est le cas, puisque ces modifications n'apportent aucun revenu complémentaire à l'Etat - et neutralité de principe par rapport au contribuable individuel à quelques exceptions près - elles ont d'ailleurs été rappelées à juste titre ce soir - que l'on n'a pas pu corriger en raison d'une courbe extrêmement difficile résultant des ajouts successifs au fil des années. Cette double neutralité a été respectée.

Désormais, l'Etat de Genève est doté d'un instrument fiscal moderne qui va nous permettre d'adopter et d'adapter une politique fiscale aux souhaits de ce parlement. Dans le domaine social, précisément, il faudrait notamment savoir si une partie des déductions ne devrait pas porter sur le produit de l'impôt et non sur le revenu. D'autre part, il faudrait se déterminer sur une politique de la famille pour laquelle de multiples motions, résolutions et interventions de votre parlement, depuis plus d'une décennie, sont pendantes devant la commission fiscale de votre parlement. Grâce à la formule mathématique choisie, vous pourrez donc - ce que fera la commission fiscale d'ici quelques séances - reprendre le problème, notamment au niveau de l'imposition de la famille et débattre de problèmes tels que celui du quotient familial, du spleeting ou autres. Votre vote de tout à l'heure va permettre de doter l'Etat d'un instrument performant.

Je remercie Mme la rapporteuse de ce projet de loi - il était techniquement compliqué et les travaux ont été longs - de son rapport très clair. Je remercie les commissaires qui se sont penchés sur ces questions, ainsi que mes services de l'administration fiscale et de l'université. Dans certains domaines, nous avons tout à gagner à travailler - ce que nous faisons largement au département des finances - avec un certain nombre de départements de notre université.

Je vous remercie de faire bon accueil à ce projet et de le voter.

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

loi

modifiant la loi générale sur les contributions publiques

(révision du mode de calcul de l'impôt)

(D 3 1)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit:

Art. 30 (nouveau)

Déductions

personnelles

1 Il est déduit du revenu net annuel de chaque contribuable célibataire, veuf, séparé de corps ou de fait ou divorcé, un montant forfaitaire de 10 383 F.

2 Il est déduit du revenu net annuel de chaque contribuable marié, un montant forfaitaire de 20 662 F.

3 Les contribuables visés à l'article 32 C ne bénéficient pas des déductions des alinéas 1 et 2. Il en va de même pour le calcul de l'impôt dû en vertu de l'article 31 C.

Art. 30 B (nouveau)

Déduction

de veuvage

Il est déduit 2 000 F du revenu net annuel de chaque contribuable veuf âgé de plus de 60 ans et sans charge de famille.

Art. 31 A (nouvelle teneur)

Personnes seules avec enfant

1 Les contribuables célibataires, veufs, divorcés, séparés de corps ou de fait et qui tiennent ménage indépendant avec leurs enfants mineurs à charge au sens de l'article 31, alinéa 3, lettre a, sont imposés selon l'article 32 B (barème B) et bénéficient de la déduction personnelle de l'article 30, alinéa 2.

2 Lorsque l'imposition selon le barème B prend fin parce que l'enfant devient majeur et que cet enfant constitue une charge de famille au sens de l'article 31, alinéa 3, lettre b, la déduction pour charge entière ou celle pour demi-charge prévue pour lui selon l'article 31 est majorée de 2 000 F, si le contribuable est seul à en assumer l'entretien sans contribution de l'autre parent.

Art. 32 (nouvelle teneur)

Structure

de l'impôt

1 L'impôt total de base dû par le contribuable sur la totalité de son revenu est égal à la somme de l'impôt dû sur chaque franc de ce revenu, après les déductions autorisées.

2 L'impôt dû sur chaque franc du revenu imposable est calculé en appliquant un taux d'imposition, appelé taux marginal, qui progresse de façon continue jusqu'à un taux d'imposition maximum.

3 Le taux effectif de l'impôt (appelé également taux réel ou taux moyen) s'obtient en divisant le montant total de l'impôt de base dû par le revenu imposable.

Art. 32 A (nouvelle teneur)

Taux de l'impôt

personne seule

(barème A)

1 Le taux marginal applicable à chaque franc du revenu imposable du contribuable célibataire, veuf, séparé de corps ou de fait ou divorcé, est déterminé par le barème A dont la formule mathématique figure à l'annexe A de la présente loi.

2 Le taux marginal minimum est de 0,22 %.

3 Le taux marginal maximum est de 19,00 %.

Art. 32 B (nouvelle teneur)

Taux de l'impôt

couple marié

(barème B)

1 Le taux marginal applicable à chaque franc du revenu imposable du contribuable marié, non séparé de corps ou de fait, est déterminé par le barème B, dont la formule mathématique figure à l'annexe B de la présente loi.

2 Le taux marginal du barème B est lié au taux marginal du barème A. Il croît entre les valeurs limites du taux marginal du barème A.

3 Le barème B est également applicable dans les cas prévus à l'article 31 A, alinéa 1.

Art. 32 C (nouveau)

Taux de l'impôt

cas spéciaux

Lorsque le contribuable n'est imposable dans le canton que sur une partie de son revenu en raison du statut dont il bénéficie ou dont son conjoint bénéficie en vertu de conventions ou accords sur les relations diplomatiques ou consulaires, ou accords de siège d'organisation internationales, les taux d'imposition applicables sont ceux du barème A.

Art. 33 (nouvelle teneur)

Adaptation au renchérisse-ment

1 Les barèmes fiscaux A et B sont adaptés, chaque année, en fonction de la variation de l'indice genevois des prix à la consommation.

2 Lorsque la situation économique générale l'exige ou la nature particulière du renchérissement le justifie ou pour des raisons budgétaires impérieuses, le Conseil d'Etat peut proposer, avec la loi sur les dépenses et les recettes du canton de Genève, un projet de loi dérogeant au principe de l'indexation des barèmes.

Art. 33 A (nouveau)

Ajustement

des déductions

Lorsque l'indice genevois des prix à la consommation du mois de janvier a varié de 10% au moins par rapport au dernier ajustement, le Conseil d'Etat propose, avec la loi sur les dépenses et les recettes du canton de Genève, un projet de loi ajustant les déductions prévues aux articles 21, lettres k, p et t, 30, 30 A, 30 B, 31 et 31 A alinéa 2.

Art. 33 B (nouveau)

Publication

des barèmes

Avant la fin de chaque année civile, le Conseil d'Etat publie, dans le règlement, la valeur de l'indice de renchérissement It mentionné à l'annexe C de la présente loi, les barèmes A et B de l'impôt sur le revenu (taux effectifs et impôts de base) pour des montants de revenu imposable jusqu'à un million de francs, ainsi qu'une illustration graphique des barèmes A et B (taux effectif et taux marginal).

Art. 2

Entrée en vigueur

La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1995, mais au plus tôt en même temps que la loi sur l'imposition des personnes morales, du ... (à préciser) et la loi sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales, du... (à préciser).

Annexe A (Art 32 A)

Formule du barème A

1 La formule pour le calcul des taux d'imposition marginaux du barème A comporte deux membres de forme identique dont l'un entre pour 67% et l'autre pour 33% dans la formule.

tA(R) = 67% x t1(R) + 33% x t2(R)

où  t1(R) = tmin + (tmax-tmin)x [1- (1+R/Ct)-a1]

et   t2(R) = tmin + (tmax-tmin)x [1- (1+R/Ct)-a2].

2 Les lettres et symboles employés dans la formule ont la signification suivante:

tA(R)désigne le taux (en %) qui s'applique à chaque francs du revenu imposable (taux marginal du barème A);

R la valeur du franc imposé diminuée de 0,5 F;

tmin le taux d'imposition minimum (en %);

tmax le taux d'imposition maximum (en %);

Ct un paramètre destiné à l'adaptation du barème A au renchérissement (valeur en F), la lettre t désignant l'année d'acquisition du revenu;

a1 et a2 deux paramètres de progressivité (nombres purs).

3 Le taux croît, entre deux limites, en fonction du revenu imposable et de deux paramètres, commandant la courbe de progressivité du barème A:

tmin  = 0,22 %

tmax  = 19,00 %

a1 = 9108,17

a2 = 350,618

4 A titre illustratif et pour l'année de référence, l'application de la formule mathématique du barème A donne les courbes du taux effectif et du taux marginal suivantes. L'axe vertical exprime en pour cent le taux marginal, respectivement le taux effectif, et l'axe horizontal exprime en francs tous les niveaux de revenu imposable jusqu'à 500 000 F.

Annexe B (Art 32 B)

Formule du barème B

1 Le taux marginal du barème B est basé sur le taux marginal du barème A appliqué à la moitié du revenu imposable du contribuable marié. Ce taux est majoré en proportion de l'écart qui le sépare du taux marginal du barème A appliqué au revenu imposable total du contribuable marié. La proportion dans laquelle cet écart est pris en compte croît, entre deux limites, en fonction du revenu imposable et de deux paramètres commandant la courbe de progressivité de cette proportion:

tB(R) = tA(R/2) + q(R)x[tA(R+S)-tA(R/2)]

2 Les lettres et symboles employés dans la formule ont la signification suivante:

tB(R) désigne le taux (en %) qui s'applique à chaque franc du revenu imposable (taux marginal du barème B);

tA(R) le taux d'imposition marginal du barème A;

R la valeur du franc imposé diminuée de 0,5 F;

S la différence entre la déduction personnelle pour un couple marié et la déduction personnelle pour une personne seule;

q(R) un facteur de pondération croissant en fonction du revenu, assurant la liaison du barème B avec le barème A, dont la valeur est comprise entre deux limites selon la formule suivante:

q(R) = qmin + (qmax - qmin) x [1- (1+R/2Ct)-b1]b2

b1et b2  désignent deux paramètres de progressivité du facteur de pondération q(R) (nombres purs);

Ct le paramètre technique utilisé dans la formule du barème A pour l'adaptation du barème au renchérissement (valeur en F), la lettre t désignant l'année d'acquisition du revenu;

3 Les paramètres fixes de la formule figurant à l'alinéa 1 ont les valeurs suivantes:

qmin = 0

qmax = 1

b1 = 61'982

b2 = 100'000

4 A titre illustratif et pour l'année de référence, l'application de la formule mathématique du barème B donne les courbes du taux effectif et du taux marginal suivantes. L'axe vertical exprime en pour cent le taux marginal, respectivement le taux effectif, et l'axe horizontal exprime en francs tous les niveaux de revenu imposable jusqu'à 500 000 F.

Annexe C (Art 33)

Calcul de l'adaptation des barèmes au renchérisse-ment

1 La formule pour le calcul de l'adaptation des barèmes A et B au renchérissement est la suivante:

Ct = Co x It

2 Les lettres et les symboles employés dans la formule ont la signification suivante:

Co est la valeur du paramètre d'adaptation des barèmes A et B au renchérissement pour l'année de référence, divisée par 100;

It un indice traduisant l'évolution du renchérissement entre l'année de référence et l'année d'acquisition du revenu, correspondant à la moyenne des indices mensuels genevois des prix à la consommation de septembre de l'année précédant l'année d'acquisition du revenu à août de l'année d'acquisition du revenu rapportée à l'indice du mois de juin de l'année de référence. Le rapport multiplié par 100 est arrondi à une décimale.

3 L'année de référence est 1993. Pour cette année:

Co =  532'568

I1993 = 100

 

La séance est levée à 19 h 10.