République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7093-A
9. Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur les heures de fermeture des magasins (J 3 14). ( -) PL7093
Mémorial 1994 : Projet, 1952. Commission, 1969.
Rapport de majorité de M. Alain-Dominique Mauris (L), commission de l'économie
Rapport de minorité de Mme Micheline Calmy-Rey (S), commission de l'économie

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Dans sa séance du 27 mai 1994, le Grand Conseil a renvoyé le projet de loi 7093 à la commission de l'économie.

Présidée successivement par M. Claude Blanc, Mmes Micheline Spoerri et Yvonne Humbert, la commission a, durant cinq séances, examiné ce projet. Elle a bénéficié de la participation de M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat chargé du département de l'économie publique, de MM. Jean-Claude Manghardt, secrétaire général, Bernard Berger, secrétaire adjoint, Jacques Folly, directeur de l'inspection du commerce et du contrôle des prix et de Mme Pascale Byrne-Sutton, inspectrice cantonale adjointe de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail.

PRÉAMBULE

Dans la première séance de commission du 30 mai 1994, M. J.-P. Maitre a relevé que ce projet de loi concrétise un accord des partenaires sociaux dans le cadre des négociations des principales conventions collectives de la branche (Migros, Coop et le commerce de détail non alimentaire). Cette modification cherche à moderniser les conditions présidant aux heures de fermeture des magasins. Elle s'inscrit dans un contexte se référant à la précédente révision en 1991 de la loi sur les heures de fermeture des magasins (ci-après LHFM).

Ce projet ne doit pas, par ailleurs, entraîner une dégradation des conditions de travail des employés. En tout état de cause, la marge de manoeuvre du législatif cantonal est très réduite, voire nulle, pour agir directement sur le statut des employés. Le récent remodelage des conventions collectives citées précédemment a permis aux partenaires sociaux de s'entendre sur un certain nombre de modifications développant les conditions cadres et améliorant le statut des employés par le biais de cette fermeture retardée hebdomadaire.

Une fermeture retardée des magasins serait souhaitable compte tenu de la situation de forte concurrence du commerce de détail genevois par rapport à la couronne frontalière et aux communes vaudoises qui autorisent déjà des horaires plus étendus. De plus, la crise économique qui sévit depuis déjà 4 ans, a frappé très durement le secteur de la distribution à Genève. Dès lors, cet assouplissement minimum devient impératif.

Rappelons encore que la LHFM est une loi cantonale de prescriptions de police qui fixe les heures de fermeture des magasins, et non leur ouverture, et n'influence pas les rapports de travail entre employés et employeurs (cette matière étant du ressort du droit fédéral, des conventions collectives ou des contrats individuels de travail).

AUDITIONS

Séance du

6 juin 1994

La commission a procédé aux auditions suivantes:

Communauté genevoise d'action syndicale (CGAS) et SIT

(Mmes Haidari et Glauser, MM. Beer, Perret et Pagani)

Les syndicats ayant négocié les conventions collectives mentionnées sont favorables à cette modification dans la mesure où un tel projet ne conduit pas à une aggravation des conditions de travail du personnel de la vente. C'est pourquoi les syndicats demandent fermement que la loi mentionne l'obligation, pour tout exploitant qui voudrait ouvrir son magasin jusqu'à 20 h, de se conformer aux usages professionnels de la branche.

Fédération des artisans et commerçants (FAC)

(MM. Desplanches et Genecand)

Comme le commerce genevois est très touché par, notamment, la concurrence frontalière et les grands commerces, cette ouverture retardée pourrait être une expérience positive. Néanmoins, la FAC craint que les petits magasins soient mis à l'écart, face aux grandes surfaces. C'est pourquoi elle souhaite que la fermeture retardée ne soit pas pratiquée qu'au seul Centre-Ville, ce qui pénaliserait les petits commerces dans les quartiers.

Séance du

13 juin 1994

Groupement des grands magasins de Genève

(MM. Rolland et Siegrist)

Ce groupement est en voie de constitution et rassemble les différents grands commerces de Genève, et plus particulièrement les grands magasins du secteur non alimentaire du Centre-Ville.

Le groupement considère qu'un tel projet répond aux besoins de la clientèle et contribuera au maintien de l'emploi dans le secteur. Les fermetures retardées se généralisant de plus en plus sur le plan suisse et européen, ce projet contribuera à la restauration de la capacité concurrentielle du commerce genevois.

Union des associations patronales genevoise (UAPG)

(MM. Aeschbach, Mossaz, Mévaux et Mme Desbaillets)

Le 1er janvier 1994, les conditions générales de travail du commerce de détail non alimentaire, à l'issue des négociations entre les partenaires sociaux concernant l'ouverture prolongée, une fois par semaine jusqu'à 20h, ont été acceptées. Le personnel ne sera pas amené à dépasser les limites de travail de jour fixées par la Loi fédérale sur le travail.

Ce projet de loi est issu d'un très large consensus et pour l'UAPG, répond aux voeux des organisations syndicales qui ne voulaient pas que les ouvertures retardées se fassent au détriment du personnel de vente. Il répond aux voeux et préoccupations des commerçants et satisfait aux nouveaux besoins du consommateur et à la population en général. Ils remettent un document informatif.

Séance du

20 juin 1994

Coop Genève et Société Coopérative Migros

(MM. R. Quaglia et C. Hauser)

M. M. R. Quaglia parle au nom du Trade Club et de la Coop qui approuvent ce projet de loi qui est un compromis entre les diverses parties. MM. Quaglia et Hauser insistent sur les importantes difficultés que rencontre le commerce à Genève, en particulier le secteur alimentaire. En effet, la compétition frontalière, et dans une moindre mesure régionale, profite de conditions plus favorables: horaires, accessibilité et prix. Le succès des récentes ouvertures de Thoiry et Etrembières, qui visent en priorité le marché genevois est, à cet égard, significatif. Ils indiquent que l'élargissement des heures d'ouverture aurait un effet positif sur le maintien de l'emploi.

Les heures d'ouverture des magasins jouent, en effet, face à la concurrence, un rôle important.

MM. R. Quaglia et C. Hauser se déclarent disposés à faire l'expérience d'ouvrir jusqu'à 20 h un maximum de leurs magasins.

Comité travail et santé

(Mmes B. Cardozo et C. Misteli, MM. D. Lopreno etG. Milliquet)

Bien que cosignataire de la convention collective avec les partenaires sociaux pour une ouverture prolongée des magasins, le Comité travail et santé indique que le SIT l'aurait ratifiée uniquement pour ne pas être exclu de cette convention. En fait, il s'opposerait résolument à ce projet de loi.

Le comité pense que la vente ne fait pas partie des services nécessaires 24 h sur 24 h. Il existe des distributeurs automatiques pour pallier aux demandes nocturnes. Prolonger l'ouverture des magasins n'est pas une solution et pourrait venir rompre un équilibre déjà totalement instable. C'est le temps consacré au travail payé qui doit baisser.

AVIS DE DROIT

Les commissaires ont reçu trois avis de droit:

· ceux de M. A. Berenstein et de M. P. Sidler, remis par les syndicats et

· celui de M. P.-L. Manfrini, demandé par la commission.

Avis de droit du professeur Alexandre Berenstein

Les syndicats intéressés ont demandé cet avis de droit pour justifier leur projet d'amendement d'autoriser la fermeture retardée aux commerces qui se seraient engagés à respecter les usages de la convention collective du travail.

Selon M. A. Berenstein, cela ne serait pas contraire aux principes découlant de la constitution fédérale. Cette insertion dans la loi ne violerait ni le principe de la face dérogatoire du droit fédéral, ni la garantie de la liberté du commerce et de l'industrie, mais instituerait des mesures de politique sociale.

Le canton pourrait, sans modifier les règles de protection fixées par le législateur fédéral, tenir compte des besoins de protection des travailleurs. Le projet des syndicats n'imposerait donc pas de nouvelles règles de protection légale. Il ne serait pas question de réglementer impérativement les conditions de travail d'une façon différente de celle qui a été choisie par le législateur fédéral; il s'agit seulement d'utiliser une faculté laissée aux cantons, sans modifier les obligations imposées aux employeurs par la loi sur le travail, mais en faisant en sorte que les mesures destinées à faciliter l'exercice du commerce, en cas de fermeture retardée, ne soient pas prises au détriment des travailleurs.

L'idée n'est pas d'imposer l'adhésion d'un individu à une convention collective de travail ni d'imposer à cet individu l'observation des conditions de travail prévues dans une telle convention, mais simplement d'autoriser les exploitants qui respectent les usages en matière de conditions de travail à retarder, un soir par semaine, la fermeture de leur magasin.

Enfin, par rapport à la liberté du commerce et de l'industrie, le Professeur A. Berenstein prétend qu'il s'agit d'une mesure prise dans l'intérêt général, qui ne s'ingérerait pas dans la libre concurrence, mais instituerait des mesures de politique sociale, qui ne sont pas prohibées par la constitution fédérale.

Avis de droit de M. Pierre Sidler, avocat

M. M. P. Sidler affirme que la doctrine reconnaît qu'une convention collective est l'expression de l'usage dans la branche lorsque la grande majorité des employeurs et des travailleurs de ladite branche, et de la région concernée, y est admise. Dès lors, l'ensemble des conventions collectives du commerce de détail, concernerait plus de 15 000 emplois sur les 21 000 répertoriés et serait, à Genève, l'expression des usages dans la branche.

M. M. P. Sidler conclut que sans violer le principe de la force dérogatoire du droit fédéral, subordonner l'ouverture retardée des magasins au respect des usages de la branche paraît légitime. D'autant plus que l'ouverture retardée est une faculté et non une obligation. Ceux qui souhaitent en bénéficier doivent en contrepartie, respecter les usages.

Avis de droit de M. Pierre-Louis Manfrini, avocat

A l'unanimité les commissaires avaient décidé de demander sur les différentes propositions d'amendement de la commission, l'avis du M. P.-L. Manfrini, ainsi que sur le projet du Conseil d'Etat.

La réglementation par le droit public cantonal des heures de fermeture des magasins a été légitimée tant à l'égard du droit fédéral que de l'article 31 de la constitution fédérale. S'agissant de la LT, ces normes cantonales sont explicitement réservées par l'article 71c, dans la mesure où les prescriptions de police cantonale visent des dispositions qui n'ont pas pour but principal la protection des travailleurs. Si tel devait être le cas, nous aurions à faire à une forme de détournement de pouvoir qui ne serait pas constitutionnellement admissible en regard de la force dérogatoire du droit fédéral. De plus, le Tribunal fédéral a jugé inconstitutionnelle l'obligation faite à l'employeur, qui n'est pas partie, d'appliquer des conventions collectives.

M. M. P.-L. Manfrini précise que le canton ne peut pas asseoir son exigence du respect des usages professionnels sur une norme de droit fédéral. Il n'y a pas place dans le domaine des heures d'ouverture des magasins pour un engagement de respecter les usages professionnels. On ne voit pas en quoi, sous l'angle purement technique, le respect des usages professionnels par l'employeur est de nature à garantir la réalisation de l'objectif de la réglementation sur l'ouverture des magasins.

La connexité entre le but principal de la réglementation cantonale de police de commerce et la charge envisagée apparaît, sous l'angle juridique, pour le moins ténue.

Dans l'amendement proposé par la minorité, le respect des usages professionnels équivaut à s'immiscer dans les rapports entre employeurs et employés.

Ainsi, le texte proposé par le Conseil d'Etat ne pose pas de problème de constitutionnalité, alors que ce serait le cas pour les projets d'amendement.

M. M. P.-L. Manfrini propose une solution alternative à laquelle la majorité de la commission s'est ralliée.

DISCUSSION

S'il semble s'être dégagé une unanimité pour modifier l'horaire de fermeture, le débat a néanmoins porté sur l'article 14 du PL 7093. Est-ce possible ou souhaitable d'obliger tous les commerces ouverts une fois par semaine jusqu'à 20 h, d'appliquer les conventions collectives ou de se conformer à l'usage? L'avis de droit demandé par la commission à M. P.-L. Manfrini est catégorique. Il y a une différence essentielle entre l'article 25A et l'article 14 de la LHFM. L'article 25A se rapporte à la suppression de la demi-journée de fermeture hebdomadaire des magasins, dont le personnel est au bénéfice de la semaine de 5 jours de travail, et non pas à l'ensemble des conditions de travail; il est considéré comme une mesure de politique sociale en accord avec le droit fédéral. L'article 14 traite de la fermeture des magasins; cela ressort du droit cantonal, c'est une mesure de police qui doit respecter le droit fédéral en vigueur (LT). On ne peut pas, dès lors, prendre comme prétexte cet article pour régler un problème employeurs-employés. Il existe aussi un grand nombre de petits magasins qui ne pourraient appliquer les conventions collectives ou les usages; les imposer reviendrait à exclure ces commerces d'un avantage dont ils ont grand besoin pour survivre.

M. M. P.-L. Manfrini a clairement argumenté contre les amendements de Mme Calmy-Rey. Soulignons que M. P.-L. Manfrini a pris la responsabilité de faire une proposition qui va aussi loin que possible pour satisfaire tout le monde. Les deux autres avis de droit ne contiennent pas de proposition. Les conventions collectives et les conventions de branche seront appliquées dans tous les magasins qui y sont soumis. Les autres, surtout les petits commerces que l'on trouve encore dans certains quartiers, se réfèrent au code des obligations. Dans ce cas, il est illégal de vouloir leur imposer les conventions. En tout temps, ils pourraient revenir pour réclamer le respect du droit.

A ce stade, il est apparu essentiel à la majorité des commissaires, d'arrêter de faire de l'épicerie juridique. La direction prise est celle d'un engagement politique clair en faveur des commerces genevois, tout en assurant un maximum de protection aux employés.

Nous ne devons pas nous leurrer, la mesure envisagée d'une heure de plus par semaine n'est pas une panacée. Toutefois, elle permettra au moins de sauvegarder plusieurs emplois, mieux encore, de donner des impulsions pour en créer d'autres, grâce à l'élargissement des heures d'ouverture. L'horaire hebdomadaire reste fixé par les contrats de travail. Il ne s'agit pas de confondre horaire de travail hebdomadaire et heures de fermeture des magasins. L'employé n'aura donc pas d'augmentation de sa durée hebdomadaire de travail.

Dès lors, la majorité de la commission a estimé que la proposition faite par M. P.-L. Manfrini est la meilleure, car elle garantit la non-péjoration des conditions de travail tout en respectant les dispositions du droit fédéral.

VOTES:

Article 14

Premier amendement, alinéa 1, de Mme Calmy-Rey:

"Une autorisation peut être accordée par le département, permettant une ouverture un soir par semaine jusqu'à 20 h en dérogation aux heures normales de fermeture, aux magasins qui respectent les règles usuelles en matière de conditions de travail en vigueur dans la branche."

jugé contraire au droit fédéral au vu des conclusions de l'avis de droit de M. P.-L. Manfrini est rejeté par:

  9 voix contre  (5 LIB - 2 RAD - 2 PDC)

  6 voix pour (3 ADG - 2 SOC - 1 PEG)

Deuxième amendement, alinéa 1, de Mme Calmy-Rey voulait compléter celui proposé par M. P.-L. Manfrini pour l'alinéa 1 avec:

"Le Conseil d'Etat définit par arrêté les conditions d'octroi de cette autorisation dérogatoire, auxquelles doivent souscrire unanimement les associations professionnelles intéressées".

compte tenu qu'il équivaudrait à une extension déguisée des conventions collectives est rejeté, par:

  9 voix contre  (5 LIB - 2 RAD - 2 PDC)

  6 voix pour (3 ADG - 2 SOC - 1 PEG)

Amendements de M. P.-L. Manfrini:

Alinéa 1

"Alinéa 1: Une autorisation peut être accordée par le département permettant aux magasins de rester ouverts un soir par semaine jusqu'à 20 h en dérogation aux heures normales de fermeture."

est approuvé par:

  8 voix pour (5 LIB - 1 RAD - 2 PDC)

  4 voix contre (2 ADG - 2 SOC)

  3 abstentions (1 RAD - 1 PEG - 1 ADG)

Alinéa 2

"Alinéa 2: Le Conseil d'Etat définit par règlement les conditions d'octroi de cette autorisation dérogatoire, après consultation des partenaires sociaux intéressés."

est accepté par:

  8 voix pour (5 LIB - 1 RAD - 2 PDC)

  4 voix contre (2 ADG - 2 SOC)

  3 abstentions (1 RAD - 1 PEG - 1 ADG)

Alinéa 3

"Alinéa 3: Dans les limites de la législation fédérale sur le travail, le Conseil d'Etat en élaborant son règlement veille notamment à ce que, à défaut d'accords entre les partenaires sociaux dans la branche, l'octroi des autorisations n'entraîne pas de détérioration de la situation du personnel".

Cet amendement est approuvé par:

  9 voix pour (5 LIB - 1 RAD - 2 PDC - 1 PEG)

  5 voix contre (3 ADG - 2 SOC)

  1 abstention (RAD)

Puis, l'ensemble de l'article 14 est accepté par:

  8 voix pour (5 LIB - 1 RAD - 2 PDC)

  5 voix contre (3 ADG - 2 SOC)

  2 abstentions (RAD - PEG)

Articles 14 A (nouveau) et 15 (nouvelle teneur)

Ces articles n'ont pas suscité de remarques particulières.

CONCLUSION

L'accord intervenu entre les partenaires sociaux à propos de la convention collective a montré la volonté des employeurs-employés d'agir pour offrir aux commerces des horaires adaptés à l'exigence de la clientèle d'aujourd'hui, dont nous sommes parties.

Les discussions ont beaucoup porté sur les conditions de travail des employés. Il a été relevé que les conditions existantes à Genève sont parmi les plus favorables aux employés en Suisse et donc, sans doute, dans le monde. L'article 14 ne serait être un prétexte pour les syndicats d'étendre leur sphère d'influence. D'autres intérêts majeurs doivent être pris en considération: le choix du consommateur, les difficultés économiques et la volonté politique. Le développement de la société pousse de plus en plus les consommateurs à faire leurs achats après le travail, souvent en famille, et à conserver le samedi pour d'autres formes de loisirs. Ce débat interpelle bien l'ensemble de la population du canton de Genève et ne peut pas se limiter seulement aux rapports employeurs-employés.

Le client est celui qui permet aux commerces de vivre et de se développer. Le client est très mobile et exigeant. "Genève gagne" est une sensibilisation très louable, mais qui, sans volonté politique, reste une illusion.

De plus, une ouverture des commerces le soir créerait une animation dans les quartiers bénéfique à tous. Plusieurs exemples, dans d'autres villes suisses notamment, ont été cités (voir tableau annexé).

Dès lors, la majorité de la commission de l'économie, après:

· avoir consciencieusement délibéré et procédé à de nombreuses auditions

· s'être entouré d'avis de droit et avoir consulté le département de l'économie publique

· avoir acquis la certitude que ce projet de loi est une aide bienvenue pour le commerce genevois

· s'être rendu compte que dans beaucoup d'autres cantons de telles mesures avaient déjà été accordées à satisfaction

· qu'une telle mesure ne peut qu'avoir des effets bénéfiques pour l'emploi dans cette période de difficultés économiques

 vous recommande, par:

  9 voix pour (5 LIB - 2 RAD - 2 PDC)

  5 voix contre (3 ADG - 2 SOC)

  1 abstention (1 PEG)

d'approuver le projet de loi 7093 amendé comme suit:

PROJET DE LOI

modifiant la loi sur les heures de fermeture des magasins

(J 3 14)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi sur les heures de fermeture des magasins, du 15 novembre 1968, est modifiée comme suit:

CHAPITRE II

Fermeture le soir

SECTION 1

Principes généraux

Art. 9, al. 1 (nouvelle teneur)

Heures normales de fermeture

1 Sous réserve des régimes particuliers indiqués ci-après, ou prévus par le règlement, et des dispositions relatives aux fermetures retardées, les magasins doivent être fermés, du lundi au vendredi à 19 h 30, le samedi à 18 h pour les magasins appartenant essentiellement à la branche de l'alimentation et à 17 h pour les autres magasins.

SECTION 3

Fermeture retardée (intitulé, nouvelle teneur)

Art. 14 (nouvelle teneur)

Fermeture hebdomadaire

1 Une autorisation peut être accordée par le département permettant aux magasins de rester ouverts un soir par semaine jusqu'à 20 h en dérogation aux heures normales de fermeture.

2 Le Conseil d'Etat définit par règlement les conditions d'octroi de cette autorisation dérogatoire, après consultation des partenaires sociaux intéressés.

3 Dans les limites de la législation fédérale sur le travail, le Conseil d'Etat en élaborant son règlement veille notamment à ce que, à défaut d'accords entre les partenaires sociaux dans la branche, l'octroi des autorisations n'entraîne pas de détérioration de la situation du personnel.

Art. 14 A (nouveau)

Fermeture en décembre

Pendant la période du 10 décembre au 3 janvier, les magasins peuvent rester ouverts, en plus de l'ouverture hebdomadaire jusqu'à 20 h, 2 soirs jusqu'à 21 h 30 avec faculté de servir la clientèle jusqu'à 22 h. Les conditions relatives, notamment, à la compensation des heures supplémentaires et à l'occupation du personnel sont fixées par le département d'entente avec les associations professionnelles intéressées.

Art. 15 (nouvelle teneur)

Désignation des soirs

Le département, après avoir pris l'avis des associations professionnelles intéressées, désigne chaque année le soir pour la fermeture retardée hebdomadaire. Il procède de la même manière pour les 2 soirs de décembre.

RAPPORT DE LA MINORITÉ

On ne sait ce qu'il y a de plus surprenant à propos de ce projet de loi, qu'il fasse l'objet d'un affrontement entre la gauche et la droite ou qu'il ait pu être le sujet d'une attitude aussi évolutive, on pourrait dire aussi peu claire, de la part du Conseil d'Etat. On a d'ailleurs peine à croire aujourd'hui que ce projet illustre un processus de création législative marqué au départ par un accord entre partenaires sociaux, tant les opinions sont divergentes et les camps retranchés. Et pourtant, le sort des vendeurs et des vendeuses du canton, comme celui des entreprises, mérite un débat dépassant les affrontements traditionnels.

A. La donnée économique ou l'ouverture retardée jusqu'à 20 h

Le but recherché en autorisant une ouverture hebdomadaire retardée jusqu'à 20 h est de donner au commerce genevois quelque moyen de lutter contre la concurrence très vive des nouveaux centres commerciaux établis dans le canton de Vaud et dans la zone frontalière. Le consommateur étant libre de consommer là où bon lui semble, les horaires sont un des facteurs d'attractivité que Genève ne peut pas négliger.

Un magasin peut actuellement ouvrir tous les soirs jusqu'à 19 h 30, mais le personnel est libéré au plus tard à 19 h. Le samedi, il doit fermer ses portes à 17 h (18 h pour le commerce alimentaire). Il peut ouvrir 6 jours durant, sauf le dimanche et les jours fériés, pour autant que la semaine de 5 jours soit respectée pour les travailleurs et les travailleuses de l'entreprise.

Des exceptions sont prévues pour des ouvertures nocturnes deux fois par année au cours du mois de décembre et pour une ouverture le 31 décembre.

Dans le canton de Vaud, il existe à Nyon et à Chavannes deux ouvertures hebdomadaires jusqu'à 20 h, alors qu'en France les magasins peuvent ouvrir tous les soirs jusqu'à 21 h, du lundi au samedi, et y compris le dimanche matin si le commerce est essentiellement voué à l'alimentaire ou s'il occupe peu d'employé(e)s.

Il semble bien que l'existence de plusieurs régimes différents en matière d'heures d'ouverture dans une même région permet aux ménages aux prises avec des difficultés horaires de se rendre là où les heures d'ouverture sont les plus souples. Il s'agit donc d'améliorer les conditions cadres et la compétitivité des entreprises dans un secteur qui a bien souffert ces dernières années. Le commerce de détail comptait en effet 150 chômeurs en juillet 1990, il en comptait plus de 1 200 en janvier 1994, pour un total de 21 000 places de travail. Sans être un remède miracle aux problèmes que rencontre aujourd'hui le commerce genevois, on peut penser que l'ouverture hebdomadaire retardée jusqu'à 20 h sera une mesure utile.

Il convient de dire encore pour clore ce chapitre que la nouvelle convention collective du commerce non alimentaire prévoit un abaissement de la semaine hebdomadaire de travail à 39 h 45 pour celles et ceux qui travailleront jusqu'à 20 h, que près des 3/4 des emplois du secteur sont concernés par la compensation, mais qu'il n'est néanmoins pas question que les groupes socialiste, écologiste et de l'alliance de gauche acceptent la présente loi telle qu'elle nous est proposée. Nous ne saurions en effet aller jusqu'à ignorer la dimension sociale et cautionner une précarisation accrue des conditions de travail des salariées et des salariés les plus mal loti(e)s du canton.

B. L'aspect social ou le respect des règles usuelles en vigueurdans la branche

Les conditions générales de travail du commerce de détail non alimentaire ont été renouvelées au 1er janvier 1994. Les parties signataires de ces conditions générales, soit les associations de détaillants rattachées à la Fédération patronale genevoise du textile et de l'habillement, d'une part, les syndicats Actions et Interprofessionnel de travailleuses et travailleurs et la Société suisse des employés de commerce, d'autre part, ont négocié depuis le début de l'année 1993 pour parvenir à ce résultat. A l'issue de ces discussions, les partenaires sociaux ont demandé au Conseil d'Etat de modifier la loi sur les heures de fermeture des magasins, afin de permettre aux commerces genevois de rester ouverts une fois par semaine jusqu'à 20 h.

Le 4 mars, c'est-à-dire avant le dépôt du projet de loi modifiant la loi sur les heures de fermeture des magasins, les partenaires sociaux se sont à nouveau exprimés sur la question de l'ouverture prolongée: dans une lettre adressée à M. J.-Ph. Maitre, lettre à en-tête de la commission paritaire du commerce de détail non alimentaire, ils demandaient au conseiller d'Etat chargé du département de l'économie publique de conditionner l'ouverture hebdomadaire jusqu'à 20 h au respect des conditions de travail en usage dans le secteur.

Face à cette demande, la réponse du Conseil d'Etat est tout en subtilités. L'article 14 du projet de loi 7093 propose «que les conditions relatives, notamment, à l'occupation du personnel sont fixées par le département d'entente avec les associations professionnelles intéressées». L'exposé des motifs du projet mentionne bien le respect des usages mais ne fait nulle part référence au rapport de condition entre le respect des usages et l'ouverture retardée.

Mesdames et Messieurs les députés, l'enjeu de la discussion au sujet du respect des règles usuelles est très important. Sur un total de 21 000 emplois, 7 000 (y compris les grands magasins) sont couverts par la convention collective du commerce de détail non alimentaire, 8 000 par des conventions d'entreprises (Migros, Coop, Naville) ou par des conventions de sections numériquement moins importantes (pharmacie, quincaillerie, boulangerie, pâtisserie, boucherie, etc.). Le respect des règles usuelles concerne donc 6 000 vendeurs et vendeuses dont il s'agit de développer la protection sociale.

Selon une étude réalisée par le laboratoire d'économie appliquée de l'université de Genève pour le compte de «Genève gagne», on constate que les salaires sont en moyenne inférieurs dans le commerce de détail à ceux recensés dans l'ensemble de l'économie genevoise. Cette étude fait état d'un salaire statistique moyen de 3 078 F par mois pour du personnel non qualifié, sans certificat fédéral de capacité, alors que pour les autres secteurs de l'économe, ce même salaire se monte à 3 910 F par mois.

Certes, les entreprises affiliées à la convention collective de travail font des efforts pour améliorer les conditions de travail et de salaire dans la vente. La convention collective genevoise concernant le secteur non alimentaire est la seule de notre pays. Les vendeurs et les vendeuses sont également bien défendus dans les conventions de la Coop et de la Migros. C'est ainsi que la Migros offre à ses employé(e)s des conditions de salaire supérieures de 10 à 15% à la moyenne suisse. Reste que l'on rencontre des cas de magasins non soumis à la convention avec des salaires inférieurs à 2 500 F, on y trouve des statuts d'auxiliaire, c'est-à-dire des contrats quasiment sur appel ou, si l'on n'est pas appelé, il n'y a pas de chômage, pas de LPP, pas de perte de gains. On y trouve des gens qui travaillent 45, parfois 50 heures par semaine sans protection sociale, des requérants d'asile sont employés à plein temps pour un salaire de l'ordre de 1 500 F par mois.

C. Les travaux de la commission ou comment ce qui semblaitun consensus peut devenir un affrontement

Les travaux de la commission ont commencé dans une sorte d'unanimisme de bon aloi, M. Maitre ayant calmé les craintes exprimées en disant, je cite: «On essaie... d'avoir un ancrage dans les textes permettant de donner des garanties aux employés» (procès-verbal de la commission, n° 16, p. 4).

Et dès lors, confiant, le groupe socialiste a proposé 3 amendements à l'article 14, amendements dont l'objectif était soit d'inscrire la référence aux usages dans la loi ou, si impossibilité juridique il y avait, d'inscrire dans la loi la règle de l'unanimité des partenaires sociaux pour adopter les compensations prévues, le projet ne garantissant pas de manière suffisante l'obligation du respect des usages en contrepartie de l'ouverture retardée des magasins. En effet, dans le projet du Conseil d'Etat, le rapport de condition se trouve relégué à un niveau infra-légal et le projet comportait selon nous trois risques:

1. Une fois la loi votée, le Conseil d'Etat pourrait ne pas adopter la contrepartie - soit le respect des usages dans la branche - par voie d'arrêté.

2. Le fait de prévoir dans un arrêté et non dans la loi la condition du respect des usages rend le système fragile. Dans l'hypothèse où l'arrêté était cassé par les tribunaux à l'occasion d'un recours d'un intéressé, la condition du respect des usages serait annulée, alors que le principe de l'ouverture retardée, inscrit dans la loi, serait, lui, maintenu.

3. Si les conditions relatives à l'occupation du personnel sont fixées d'entente entre le département et les associations professionnelles intéressées, sans la règle de l'unanimité, un certain nombre de problèmes se posent, par exemple, qu'arrive-t-il en cas de désaccord entre les associations professionnelles? L'autorisation d'ouvrir une fois par semaine jusqu'à 20 h pourrait-elle alors être donnée sans la condition du respect des usages?

Dès lors, un avis de droit ayant été demandé pour régler les problèmes de rédaction juridique, c'est l'esprit serein que les membres de la commission ont procédé aux diverses auditions demandées.

Il y a eu en fait 3 avis de droit, celui de Me Manfrini, souhaité par la commission, et deux autres avis demandés par le syndicat Actions, respectivement à M. Alexandre Berenstein et à Me Pierre Sidler, portant sur le fait de savoir s'il est juridiquement possible de prévoir dans la loi qu'une autorisation d'ouverture prolongée jusqu'à 20 h ne puisse être accordée qu'aux entreprises qui respectent les usages professionnels en vigueur dans la branche. Les conclusions de ces 3 avis ne convergent pas.

M. Berenstein affirme «que l'insertion dans la loi genevoise sur les heures de fermeture des magasins d'une disposition autorisant les exploitants à retarder la fermeture de leurs magasins un soir par semaine, à la condition de justifier de l'observation des règles usuelles en matière de conditions de travail, ne serait pas contraire aux principes découlant de la constitution fédérale».

Me Sidler conclut à peu près dans les mêmes termes. Me Manfrini soutient quant à lui que ni l'inscription dans la loi du rapport de condition, ni même la règle de l'unanimité des partenaires sociaux ne sont possibles. Sans entrer dans le détail des amendements socialistes et sans en donner les raisons précises, il les rejette en bloc pour favoriser une solution plus en retrait, qui finalement a obtenu l'aval de la commission.

C'est ainsi, Mesdames et Messieurs les députés, que les arguments juridiques ont pu être utilisés pour refuser l'inscription du rapport de condition demandé par les partenaires sociaux dans la loi.

Il est vrai, Mesdames et Messieurs, que Me Manfrini a été aidé par l'existence d'un malentendu et le fait qu'aucun véritable dialogue sur le fond n'a pu véritablement avoir lieu, le malentendu ne s'étant dissipé qu'au cours de la toute dernière séance de la commission. En parlant de garanties, le département ne se ralliait pas implicitement à la position des partenaires sociaux et il n'entendait manifestement pas la même chose que nous, le nous s'appliquant à la minorité de la commission. Nous voulions la garantie qu'une ouverture retardée ne pourrait pas se faire sans une amélioration des conditions de travail pour les employés et les employées du secteurs qui ne sont pas couverts par une convention collective. Le département, si l'on se réfère à la solution qu'il a finalement imposée à la commission, voulait la garantie qu'aucune détérioration de la situation du personnel de vente ne puisse résulter d'une plus grande flexibilité dans les heures d'ouverture.

La modification du texte de l'article 14 adopté en commission clarifie les choses. Une ouverture jusqu'à 20 h n'entraînera pas de détérioration dans la situation du personnel. Elle laisse ouverte la voie d'une amélioration au cas où il y aurait accord des partenaires sociaux. Reste que pour les commerces non sousmis à la convention collective, le département n'aura pas, selon les termes de M. Maitre, «le pouvoir d'interdire l'ouverture jusqu'à 20 h sous prétexte qu'ils refusent de respecter les usages de la branche» (procès-verbal de la commission, n° 20, p. 6).

La minorité de la commission ne peut accepter la solution choisie car elle subordonne la dimension sociale à la logique économique. Pour nous, en effet, il ne saurait y avoir ouverture retardée sans une harmonisation des conditions de travail de la branche et ce pour l'ensemble des employé(e)s et par conséquent sans une amélioration de la protection sociale pour les employés et les employées du secteur qui ne sont pas couverts par une convention collective, c'est-à-dire pour les plus défavorisés dans un secteur déjà fort défavorisé.

Et que l'on ne vienne pas nous dire ici que le problème est une impossibilité juridique. Les conclusions de 2 avis de droit démontrent le contraire.

Il ne s'agit pas, en définitive, d'une problématique juridique. Il s'agit de joindre l'amélioration des conditions cadres pour les entreprises de la branche à l'extension d'une clause de protection sociale aux travailleurs et travailleuses non couverts par une convention collective de travail. Il s'agit d'un engagement pour plus d'équité sociale.

En conséquence de quoi, Mesdames et Messieurs les députés, la minorité de la commission vous demande d'exprimer clairement votre volonté de conditionner le respect des usages concernant les conditions de travail et l'ouverture retardée jusqu'à 20 h en acceptant l'amendement à l'article 14 que nous vous proposons ci-après:

Art. 14, al. 2 (nouveau)

Le Conseil d'Etat définit par arrêté les conditions d'octroi de cette autorisation dérogatoire, auxquelles doivent souscrire unanimement les associations professionnelles intéressées.

La minorité de la commission n'acceptera la loi que pour autant que cet amendement soit voté. Dans le cas contraire, il la combattra.

Annexes

1 avis de droit de M. A. Berenstein

1 avis de droit de Me P. Sidler

1 avis de droit de Me Manfrini

Premier débat

M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur. Nous pouvons nous étonner de constater l'évolution de ce projet de loi qui, au départ, semblait recueillir l'unanimité et qui, aujourd'hui, devient l'enjeu d'exigences sans commune mesure avec l'idée de départ.

Certains ont décelé dans ces soixante petites minutes supplémentaires hebdomadaires l'opportunité de promouvoir leurs idées. Rappelons-nous qu'au début de l'année l'ensemble des partenaires sociaux sont tombés d'accord avec l'idée d'une fermeture retardée. Il suffit de lire, par exemple, l'article 8 alinéa 2 b des conditions générales de travail du commerce de détail non alimentaire pour s'en rendre compte. En aucun cas il ne faut confondre horaire de travail hebdomadaire avec fermeture retardée. Les heures faites le soir seront donc rattrapées. Contrairement à ce qui est affirmé dans le rapport de minorité, les commissaires de la majorité n'ont pas voulu subordonner la dimension sociale à la logique économique, mais davantage empêcher la détérioration des conditions de travail là où il n'y a pas de convention collective, tout en adaptant l'heure de fermeture au climat de la concurrence.

Les commerces de la couronne genevoise ont depuis plusieurs années compris la nécessité de suivre ce mouvement européen de fermeture retardée. Nous constatons que ce qui devait être une simple modification d'une loi cantonale devient le prétexte à un débat sur les améliorations des conditions de travail sans respecter les négociations paritaires. Les syndicats écrivent : «Ouvrir les magasins jusqu'à 20 h doit permettre de contraindre toutes les entreprises intéressées à respecter la convention collective de travail.». Voilà comment on change le cavalier de cheval, l'objectif n'est plus l'amélioration de la capacité concurrentielle du commerce genevois, mais bien d'imposer à l'ensemble du commerce genevois le respect des usages ou des conventions collectives.

Certes, l'enjeu pour les syndicats est intéressant. Ce qu'ils n'ont pas obtenu des employeurs d'un secteur où ils sont peu représentés, ils tentent, par le biais du Grand Conseil, de le généraliser à l'ensemble du secteur de la distribution. Il n'y a pas, Madame Calmy-Rey, de malentendu à ce sujet, au contraire, c'est une volonté délibérée reprise par l'ensemble de la minorité qui est donc clairement exprimée par votre amendement. Soyons donc très attentifs pour que cette petite part de gâteau bienvenue dans la disette actuelle vécue par Genève ne devienne pas indigeste. Mais, si nous ne voulons pas faire de l'épicerie juridique, force est de reconnaître que les amendements de la minorité ont été correctement et consciencieusement analysés par M. Manfrini.

Mme Micheline Calmy-Rey, rapporteuse de la minorité. Ça, c'est pas vrai !

M. Alain-Dominique Mauris, rapporteur de la majorité. Vous n'avez qu'à vous reporter aux pages 4 et suivantes de l'avis de droit. D'ailleurs, M. Manfrini indique les raisons précises pour lesquelles ils ne sont pas acceptables en regard du droit fédéral. Il rappelle, Madame Calmy-Rey, que le Tribunal fédéral a jugé inconstitutionnelle l'obligation faite à l'employeur qui n'est pas partie d'appliquer des conditions collectives de travail, sans compter bien sûr les effets néfastes que pourrait avoir l'obligation d'appliquer ces conventions sur les petits commerces de quartier qui ont le plus grand besoin de voir assouplir leur horaire hebdomadaire. Signalons, pour ceux qui sont sensibles à ces petits commerces de quartier, qu'ils favorisent une animation non négligeable que nous ne voudrions pas voir disparaître.

Leur imposer de facto le respect des usages serait totalement contre-productif et irait donc à l'encontre de ce qui légitime une convention collective de travail, c'est-à-dire des négociations paritaires. Avons-nous donc le droit de nous immiscer dans les rapports employeurs/employés ? Non, la majorité de la commission l'a refusé ! Par contre, elle veut empêcher une péjoration des conditions de travail pour les employés soumis à la fermeture retardée d'une heure par semaine qui ne sont pas liés par des conventions collectives. M. Manfrini a pris le risque de proposer un amendement faisant un pas dans ce sens et voulant écouter nos préoccupations à ce sujet.

Cette loi, le commerce genevois et les consommateurs l'attendent. Elle permettra d'améliorer les conditions-cadres de l'économie genevoise et d'aider à restaurer la capacité concurrentielle du commerce genevois tout en assurant aux employés des conditions de travail acceptables.

Mme Micheline Calmy-Rey (S), rapporteuse. M. Mauris s'est donné la peine de faire un rapport de majorité dont le ton est serein et raisonnable. Je me devrais de le remercier, s'il n'omettait de parler de l'enjeu essentiel de ce débat, à savoir de l'enjeu social qui pose problème, pour se concentrer sur la donne économique sur laquelle tout le monde est d'accord.

Tout le monde ou presque dans ce parlement est en effet d'accord pour dire qu'il faut améliorer les conditions-cadres et la compétitivité du commerce de détail genevois. Plus précisément, tout le monde est d'accord avec l'idée d'une ouverture hebdomadaire retardée jusqu'à 20 h. Et cela pour deux raisons :

L'une pour répondre à un besoin réel du consommateur et de la consommatrice. Faire ses courses après le travail est devenu le lot commun de beaucoup d'entre nous, et il est vrai qu'il faut se hâter pour y arriver avant 19 h.

L'autre parce que le secteur du commerce de détail a beaucoup souffert ces dernières années. De cent cinquante chômeurs en janvier 1990, il est passé à plus de mille deux cents à la même époque de 1994 et aussi parce qu'il faut lutter dans ce secteur contre la concurrence très vive de nouveaux centres commerciaux établis dans le canton de Vaud ou en zone frontalière.

Il est néanmoins hors de question que les groupes socialiste, écologiste et de l'Alliance de gauche acceptent la loi telle qu'elle nous est proposée ce soir. Nous souhaitons, comme les partenaires sociaux, c'est-à-dire les associations patronales et les syndicats d'employés, le SIT et le Syndicat Action, lier l'ouverture hebdomadaire jusqu'à 20 h au respect des conditions de travail en usage dans le secteur.

Nous ne faisons ici que reprendre la demande de la commission paritaire du secteur concerné qui, le 4 mars dernier, a écrit à M. Jean-Philippe Maitre dans ce sens. Sur un total de vingt et un mille emplois, sept mille, y compris ceux des grands magasins, sont couverts par les conventions collectives du commerce de détail non alimentaire, huit mille par des conventions d'entreprises comme celle de la Coop, la Migros ou Naville ou par des conventions de sections numériquement moins importantes, comme par exemple dans la pharmacie, la quincaillerie, la boulangerie, etc. Le respect des règles usuelles concerne donc six mille vendeurs et vendeuses dont il s'agit de développer la protection sociale. Parmi eux, on rencontre des cas de personnes gagnant moins de 2 500 F par mois à plein temps. Certains ont des statuts d'auxiliaire, c'est-à-dire des contrats quasiment sur appel où si l'on n'est pas appelé on n'a pas droit au chômage, pas droit à la LPP, pas droit à de quelconques indemnités de perte de gain. Certains travaillent quarante-cinq à cinquante heures par semaine, sans protection sociale. On a même vu récemment des cas de requérants d'asile employés à plein temps pour 1 500 F par mois. C'est de cela dont il s'agit quand on parle de l'extension de la protection sociale dans ce secteur !

Contrairement à ce qui a pu être récemment écrit, il ne s'agit pas de vouloir imposer une superconvention collective à tout le monde, il ne s'agit pas d'aligner du jour au lendemain les conventions collectives signées par les diverses organisations patronales du grand et du petit commerce sur l'une d'entre elles. C'est mauvaise foi que de le prétendre. Partout où il y a des conventions, elles s'appliquent. Par exemple pour tout ce qui est non alimentaire, c'est la convention du non alimentaire signée d'ores et déjà par un grand nombre de toutes petites entreprises qui s'applique. Là où il n'y en a pas, par exemple dans certaines branches de l'alimentaire, une négociation devrait s'engager sur la constitution d'usage, sur la base des conventions partielles d'ores et déjà existantes dans ce secteur.

Par rapport à la prise en compte de la dimension sociale, le projet de loi du Conseil d'Etat comporte des risques, notamment le risque qu'une ouverture retardée soit autorisée sans condition aucune. Monsieur le président du département, nous n'avons plus confiance, nous n'avons même plus le sentiment que vous ferez respecter ce qui figure actuellement dans la loi, à savoir que le département veillera à ce que les conditions de travail ne soient pas péjorées au cas où il n'y aurait pas d'accord entre les partenaires sociaux.

Cela fait six mois que l'on essaye de savoir ce que vous voulez. Une fois vous dites oui, une fois vous dites non, puis vous dites peut-être, puis vous dites que tout cela sera dans l'arrêté. Il semble bien aujourd'hui que la seule chose qui y figurera sera le quart d'heure de pause supplémentaire pour celles et ceux qui travaillent jusqu'à 20 h. Mesdames et Messieurs, la minorité de la commission ne peut pas prendre le risque d'une ouverture retardée sans condition aucune. La solution choisie subordonne la dimension sociale à la donne économique. Et que l'on ne vienne pas nous dire, comme l'a dit M. Mauris, qu'il s'agit d'un problème juridique. Deux avis de droit démontrent le contraire. Il n'a cité que M. Manfrini. Deux autres avis de droit, dont celui de M. Berenstein, affirment le contraire.

C'est pourquoi nous n'accepterons la loi que si notre amendement est voté. Dans le cas contraire nous la combattrons.

M. Jean-Philippe de Tolédo (R). «Il faut supprimer les prescriptions en matière d'heures de fermeture des magasins, car les lois portant sur l'heure de fermeture des magasins ne sont un moyen ni admissible ni utile pour protéger les intérêts du personnel.». Telle est la déclaration et la recommandation de la Commission des Cartels dans sa publication de décembre 1992.

Cette recommandation nous semble quelque peu brutale à nous autres radicaux. Nous lui préférons une approche par étape, aussi nous ne vous demanderons pas de supprimer les prescriptions en matière d'heures d'ouverture des magasins, du moins pas tout de suite.

Le problème des horaires de fermeture des magasins n'est pas nouveau, puisqu'une première proposition avait été faite en 1988 et, malheureusement, elle a été rejetée. A l'époque, il est vrai, on parlait de nocturnes jusqu'à 21 h 30, alors qu'aujourd'hui il est tout simplement question d'une ouverture prolongée de soixante petites minutes, une fois pas semaine. Il est aussi vrai qu'en 1988 nous n'étions pas encore entrés dans la crise économique, nous n'avions pas seize mille chômeurs et les centres commerciaux périphériques du canton de Vaud et de la zone frontalière n'existaient pas.

Ces derniers sont d'ailleurs à l'évidence une des conséquences de ce vote négatif de 1988. Et puis, il faut se rappeler encore qu'à ce moment là c'était la mode de la fameuse croissance zéro qui a contribué au blocage de l'essor économique de notre canton. C'est donc en terre sainte et en zone frontalière que les entrepreneurs genevois ont été contraints de développer leurs affaires créant des emplois, malheureusement, de l'autre côté de la frontière. (Commentaires.) Je dis malheureusement pour ceux qui restent de ce côté ! Ajoutez à cela une succession de décisions absurdes en matière de circulation et vous avez le résultat : aujourd'hui, un Genevois sur deux va régulièrement faire ses courses dans les centres commerciaux dont certains sont ouverts tous les soirs jusqu'à 21 h, y compris le samedi. Ainsi, vous l'aurez compris, si les commerçants tiennent tellement à cette ouverture prolongée, c'est qu'elle constitue un premier pas permettant au commerce genevois de rester compétitif dans l'environnement économique excessivement concurrencé...

Une voix. Concurrentiel !

M. Jean-Philippe de Tolédo. Non, concurrencé ! On pourra en débattre tout à l'heure !

Vouloir faire de cette ouverture prolongée un vecteur de progrès des conditions de travail serait une excellente idée si le problème n'était pas posé à l'envers. En effet, l'amélioration des conditions de travail doit être une conséquence du succès de cette ouverture prolongée et non pas une condition préalable.

J'aimerais encore préciser que le but de cette ouverture prolongée est avant tout de permettre aux clients - et bien à eux - de faire leurs courses à des heures plus pratiques pour eux. Questionnés d'ailleurs à ce sujet, il s'avère qu'environ deux tiers d'entre eux sont intéressés par cette nouvelle possibilité de shopping. Il faut cependant se garder de croire qu'il suffit de laisser les magasins ouverts un petit peu plus longtemps pour que les clients s'y précipitent. Malheureusement, cela ne se passe pas comme cela !

C'est pourquoi, si l'on veut assurer le succès de cette ouverture prolongée, il convient encore de rassembler les efforts de plusieurs secteurs de l'économie tels que cafetiers-restaurateurs, cabarets-dancings, parkings, transports publics - qui sont très favorables - et d'autres encore de façon à créer un contexte d'animation qui incitera les Genevois à magasiner entre 19 et 20 h.

En conclusion, le groupe radical pense que ces ouvertures prolongées répondent à une réelle demande de la population. Nous soutiendrons le projet de loi qui vous est proposé. Cependant, conscients des efforts que cela va demander pour faire de ces soixante minutes de commerce supplémentaire un véritable succès, nous attendons avec intérêt le résultat d'un éventuel référendum que certains ont annoncé. Peut-être est-ce M. Maitre, puisque apparemment ce sont les conseillers d'Etat qui annoncent les référendums ! En effet, il n'est pas dans les intentions des milieux du commerce d'offrir à la population une prestation dont elle ne voudrait pas.

M. Bénédict Fontanet (PDC). Mme Calmy-Rey n'en sera pas surprise, mais moi je fais confiance à M. Maitre pour ce qui est de l'application... (Rires.) ...de la loi que nous vous invitons à voter ce soir. Vous avez tort, Madame Calmy-Rey, de ne pas faire confiance à M. Maitre...

M. Chaïm Nissim. Ça fait des années qu'il nous démontre le contraire !

M. Bénédict Fontanet. ...même s'il n'est pas issu de vos propres bancs !

Le commerce genevois souffre à n'en pas douter de conditions de concurrence discriminatoires par rapport à son environnement immédiat, que ce soit en France voisine ou encore dans le canton de Vaud. La loi qui est proposée ce soir à nos suffrages est une mini réforme - une réformette, dirais-je, si je ne voulais pas insulter mon conseiller d'Etat favori - qui ne permet d'ouvrir qu'une heure de plus par semaine les commerces à Genève. Il n'y a donc là rien de bien révolutionnaire, mais que d'énergie déployée en commission à propos de ce projet.

Dans un monde dans lequel la compétitivité et la concurrence sont de plus en plus déguisées et fortes - on peut peut-être le regretter à certains égards - nous nous devons de donner au commerce genevois des conditions-cadres meilleures qui lui permettent de lutter à armes égales avec les commerces du canton de Vaud ou encore de France voisine, si nous voulons maintenir à Genève un commerce dynamique dont il faut rappeler qu'il est le premier employeur de notre canton.

Avec le projet de loi que nous vous proposons d'adopter ce soir, nous sommes bien en deçà des conditions qui existent en France voisine, d'une part, et dans le canton de Vaud dans le voisinage immédiat, d'autre part. Nous vous invitons donc à adopter avec enthousiasme ce projet de loi qui est bienvenu au jour où le commerce genevois se bat dans un environnement concurrentiel particulièrement difficile.

Quant à l'amendement qui vous est proposé par la minorité de la commission, il doit être, à mon sens, refusé pour deux raisons.

Je n'entends pas me livrer à un large débat juridique sur les mérites respectifs des différents avis de droit, cela serait à n'en pas douter épouvantablement ennuyeux et je ne tiens pas à lasser ce parlement...

Une voix. Alors, tais-toi ! (Rires et quolibets.)

M. Bénédict Fontanet. Je vais me taire, rassurez-vous !

...je n'en demeure pas moins convaincu que la proposition qui nous est faite revient de facto à empiéter sur le droit fédéral et à obtenir, de facto également, une extension des conventions collectives, ce qui n'est pas dans notre secteur de compétences. La commission de l'économie est allée aussi loin qu'elle le pouvait lorsqu'elle a prévu, notamment en son article 14, alinéa 3, que le Conseil d'Etat devait veiller à ce que les autorisations données d'ouvertures retardées jusqu'à 20 h n'entraînent pas de préjudices pour le personnel. Nous faisons confiance au Conseil d'Etat pour que les mesures à prendre figurent dans l'arrêté à adopter concernant cette ouverture supplémentaire - une petite heure par semaine, jusqu'à 20 h, c'est donc une demi-nocturne - et n'aient pas de conséquences sur les conditions de travail du personnel.

Le second motif - à supposer que cet amendement soit juridiquement recevable - qui nous pousse à le refuser est le fait que, s'il devait être voté, il reviendrait en fait à jouer le jeu des grands commerces et risquerait de mettre dans une situation difficile les petits commerces de proximité, que nous souhaitons voir maintenus dans les quartiers de notre ville. Il est tout de même un peu curieux, Mesdames et Messieurs de la minorité, que vous souhaitiez favoriser les grands commerçants par rapport aux petits.

Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à voter le projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission et à refuser l'amendement qui vous est proposé par la minorité de la commission.

M. Pierre-Alain Champod (S). Pour l'essentiel, le rapport de Mme Calmy-Rey explique bien la situation et les raisons pour lesquelles ce dossier pose problème alors que, précisément, il ne devrait pas en poser.

En effet, depuis quelques mois, dans de nombreuses commissions, il n'est plus possible de trouver des accords et de faire un travail de négociation qui est la base du travail parlementaire. La majorité politique de l'Entente ne cherche pas à trouver des solutions. Elle veut voter vite pour montrer qu'elle est majoritaire et qu'elle détient le pouvoir. Résultat : une multitude de rapports de minorité, des débats qui n'ont pas abouti en commission et qui reviennent en plénière.

Ce dossier est un exemple typique de ce que je viens de dire. Au départ, la proposition de prolonger jusqu'à 20 h, une fois par semaine, l'heure de fermeture des magasins recueille l'accord de presque tout le monde. Les partenaires sociaux sont d'accord sur le principe, la majorité des groupes l'est également.

La gauche et les syndicats posent une seule condition : c'est que ce privilège accordé aux magasins d'ouvrir une heure de plus par semaine soit assorti à une condition, celle qui respecte les usages de la profession. Cette exigence nous semble particulièrement cohérente avec la politique de notre pays s'agissant des rapports de travail. En effet, il est normal que les intérêts des employés et ceux des patrons soient contradictoires sur certains points. Le problème n'est pas de nier ce conflit, mais de trouver un moyen de le gérer. En Suisse, les négociations paritaires sont la voie habituelle utilisée pour gérer ce type de problèmes.

Dans le domaine de la vente, la grande majorité des employés sont soumis à une convention collective ou à un accord entre partenaires sociaux, puisque quinze mille personnes sont assujetties à un tel accord et que sept mille ne le sont pas. La majorité des patrons a signé des accords avec les syndicats et, parmi elle, on trouve non seulement les grands commerces mais aussi une majorité de petits commerces.

Nous ne demandons pas de rendre la convention collective obligatoire, comme cela a été dit à plusieurs reprises par erreur. La loi dit que l'heure de fermeture normale est inchangée, mais que, par dérogation, le Conseil d'Etat peut autoriser l'ouverture des magasins une heure supplémentaire par semaine. Nous suggérons que la condition pour bénéficier de cette dérogation soit le respect des usages dans la profession. Nous avons fait un pas dans la voie d'un compromis, puisque l'amendement que nous vous proposerons en deuxième débat précise en son article 14, alinéa 2 :

«Le Conseil d'Etat définit par arrêté les conditions d'octroi de cette autorisation dérogatoire auxquelles doivent souscrire unanimement les associations professionnelles intéressées.».

Nous sommes donc loin d'une obligation de signer une convention collective pour tous les commerçants. En revanche, il est vrai que ceux qui veulent ouvrir une heure de plus devront respecter les usages de la profession. En procédant ainsi, on encourage le développement des accords entre partenaires sociaux. De plus, on évite de pénaliser les commerçants qui jouent le jeu de ces accords entre partenaires sociaux. Enfin, en acceptant notre amendement, vous faites en sorte que la concurrence n'ait pas lieu dans le sens de la sous-enchère salariale, mais entre les commerces sur la gestion, la qualité des produits et la qualité des services.

Actuellement, en donnant les mêmes avantages aux commerces qui sous-payent leur personnel par rapport à ceux qui respectent les conventions, la concurrence se fait uniquement sur la sous-enchère salariale. Mme Micheline Calmy-Rey a rappelé tout à l'heure quels étaient les montants de ces salaires. En parlant de salaires, je signale à M. de Tolédo que si la majorité des gens vont faire leurs courses en France ce n'est pas en raison des horaires d'ouverture plus large, mais essentiellement en raison de la différence de coût des produits entre Genève et la France voisine.

M. Claude Blanc. La différence de salaires ! (Rires et remarques.)

M. Pierre-Alain Champod. Comme je l'ai dit la majorité des signataires des conventions collectives et des accords sont des petits patrons. Je pense qu'il faut les encourager, car ils jouent le jeu des accords paritaires. Sur le plan juridique, nous avons reçu en commission trois avis de droit. Un dit que ce que nous proposons n'est pas possible, deux prétendent le contraire. Nous avons vainement proposé d'entendre les trois experts en commission pour compléter leur argumentation. Je suis certain que si cette audition avait pu avoir lieu nous aurions pu trouver une formulation qui nous satisfasse.

Compte tenu de ce que je viens de dire, le groupe socialiste vous invite à accepter l'amendement que nous vous proposerons en deuxième débat. Vous démontrerez ainsi que vous êtes non seulement attachés à une fermeture retardée des magasins, mais que vous êtes également favorables au règlement des conflits du travail par des accords entre partenaires sociaux.

M. Max Schneider (Ve). En 1992, lorsque j'étais déjà dans ce Grand Conseil, le 18 septembre, nous avons adopté une loi sur le service de l'emploi et la location de services qui remplaçait la loi du 30 avril 1955 sur le droit genevois aux innovations introduites par la loi fédérale sur le service de l'emploi et la location de services du 6 octobre 1989.

C'est un des éléments nouveaux qui est apparu après le vote que nous avons eu en commission. L'article 8 de cette loi avait la teneur suivante :

«Le Conseil d'Etat veille à ce que les salaires bruts et les prestations sociales soient conformes en matière de location de services aux normes usuelles de la profession dans laquelle le personnel exerce sa mission.».

C'est exactement ce que nous demandions en commission et cela nous a été refusé. Un arrêt du Tribunal fédéral, suite à la loi votée ici dans ce Grand Conseil, a malheureusement donné tort au Conseil d'Etat, dans un recours effectué par une entreprise.

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Elle a donné tort au Grand Conseil !

M. Max Schneider. Voilà pourquoi le groupe écologiste, que je représentais dans cette commission, n'ayant pas la facilité de comprendre tout ce débat juridique entre Mes Manfrini, Berenstein et Ziegler qui faisaient des avis de droit différents, s'était abstenu lors du vote. Mais aujourd'hui on se rend compte avec cet élément nouveau que les engagements du projet de loi pouvaient être démantelés au niveau fédéral. C'est bien là une des raisons de mon abstention.

Nous avons tous reçu, de la part de la Fédération des artisans et des commerçants de Genève, une explication de leur position lorsque nous avions auditionné en commission leurs représentants, membres du comité, dont le président nous avait assuré qu'il n'y avait pas de problème et qu'ils étaient prêts à signer une convention collective qui donne certaines garanties quant aux conditions de travail. L'heure supplémentaire serait compensée soit en temps soit en salaire. La FAC jouait donc parfaitement le jeu. Mais, durant l'été, ils ont fait une enquête auprès de leurs membres - vous avez certainement tous reçu cette lettre - qui, à une majorité de 71,95%, ne voulaient plus ou pas de convention collective pour l'ensemble des professions du petit commerce.

Cela montre que cette abstention n'est pas un refus de dialogue, mais il est bien difficile d'avoir une position claire et précise, parce que les partenaires sociaux ne se sont pas encore mis d'accord. Le débat de ce soir ne porte pas sur l'ouverture jusqu'à 20 h - elle pourra se faire ou ne pas se faire...

Une voix libérale. Mais si, c'est le fond du problème !

M. Max Schneider. Non, ce n'est pas la seule question. Si c'était le cas, le groupe écologiste et le parti écologiste dans son ensemble ne s'opposeraient pas à l'ouverture prolongée d'une heure par semaine. (Enorme aaaahhhh de satisfaction ironique de l'Entente.)

A priori, le groupe écologiste demande depuis longtemps le partage du travail comme proposé dans la lettre de la FAC que nous appelons aujourd'hui «redistribution de l'emploi». Ces petits commerçants offrent la flexibilité. Pour survivre il leur faut de la souplesse, et le groupe écologiste va dans leur sens.

Mais nous ne pouvons pas accepter qu'il y ait des gens dans notre société - peut-être pas parmi nous - qui sont directement concernés par des salaires extrêmement bas - jusqu'à 1 500 F - comme Mme Calmy-Rey l'a évoqué, et qui ne sont pas conventionnés. C'est pour ces six mille personnes que le débat a lieu dans le secteur non alimentaire. C'est la raison du conflit et il faut trouver un consensus. Je ne pense pas - et ce n'est pas notre rôle dans ce Grand Conseil - qu'il faut prendre position. C'est aux partenaires sociaux de s'arranger entre eux. Comme ils n'y sont pas arrivés, cette loi arrive au Grand Conseil. C'est un piège pour la droite comme pour la gauche, car nous ne pourrons pas en débattre ici, ou tout du moins la solution ne sera pas adéquate.

La solution qui aurait pu faire l'affaire, je l'ai sur ce papier... (Aaahhh de satisfaction.) Nous étions presque arrivés à un accord entre les partenaires sociaux, employeurs et employés. 8 août 1990, de nombreux employeurs avaient accepté cette convention collective : signataires, cent quatre-vingt-huit; de l'OCIRT, quarante-six; non signataires, deux cent septante-trois. Cela fait un total de cinq cent sept employeurs. Il aurait fallu en avoir deux cent cinquante-quatre pour avoir la majorité. Il n'y en avait plus que vingt à trouver. Le département de l'économie publique aurait dû inciter les partenaires sociaux à trouver cette majorité. Ceux-ci auraient pu aller à Berne faire légaliser cette convention collective pour l'ensemble du commerce de détail non alimentaire...

Le président. Monsieur Schneider, je vous prie de conclure !

M. Max Schneider. Le Conseil d'Etat aurait donc pu faire appliquer cette convention collective pour l'ensemble de ce secteur. On est passé à deux doigts, à vingt employeurs, pour y arriver. Nous sommes dans une situation de blocage. Il aurait bien mieux valu que le Conseil d'Etat retire son projet de loi et que l'on relance ces négociations. Il me semble qu'il serait facile de trouver vingt employeurs de plus pour signer, s'il y avait une réelle volonté politique. S'il y a une volonté de conflit, il est clair qu'il faudra s'engager dans ce projet de loi.

M. Bernard Clerc (AdG). Le vocabulaire n'est pas innocent. Chacun aura remarqué que le rapport de majorité se garde bien d'employer l'expression «ouverture nocturne». Pourtant, le dictionnaire donne de ce terme la définition suivante en matière commerciale - je sais que M. Blanc aime bien les dictionnaires :

«Ouverture en soirée de certains magasins.»

Jusqu'à preuve du contraire, 20 h se trouve en soirée. Au-delà du vocabulaire, les vendeuses et les vendeurs interrogés par le Comité travail et santé savent bien qu'il s'agit de travailler le soir, d'autant plus que le retour à domicile se situerait, en moyenne, pour 94% d'entre eux à 20 h 45. Ce n'est pas pour rien qu'ils sont très majoritairement opposés à cette ouverture nocturne et les discours que nous entendons sur l'unanimité me laissent pantois. Mais le fait de ne pas utiliser le mot «nocturne» est révélateur de la tentative de faire passer en douceur ce projet de loi. A défaut de pouvoir agir sur la rotation de la terre, les partisans du projet de loi ont préféré changer de vocabulaire : «ouverture retardée des magasins» passe mieux dans la population qu'«ouverture nocturne». Voilà pour la forme.

Venons-en au fond. Cette loi sur l'ouverture nocturne des magasins se veut une réponse à la concurrence. Je cite le rapport de majorité : «...comme une contribution au maintien de l'emploi dans le secteur de la vente.».

Parlons de la concurrence. Il est curieux de constater que la Migros, par exemple, qui se déclare favorable à l'ouverture nocturne, vient d'ouvrir deux grands centres commerciaux en France voisine, n'hésitant pas - si on suit l'analyse du rapport de majorité - à se concurrencer elle-même. Qu'est-ce que cela signifie ? Pourquoi la concurrence est-elle plus vive aujourd'hui qu'hier en matière de distribution ? Pour une raison essentielle : le pouvoir d'achat de la majorité de la population ne se développe plus, et ce facteur n'est pas conjoncturel. La hausse constante de la consommation que nous avons connue dans les trente années d'après-guerre est terminée sauf, évidemment, pour la petite minorité qui continue à disposer de revenus élevés et qui fréquente les commerces de luxe genevois. Pour celle-là, ni les prix ni les heures d'ouverture des magasins ne jouent de rôle dans leurs habitudes de consommation.

Or, si la masse globale de la consommation n'augmente pas, les commerces sont contraints, pour maintenir leurs profits, de conquérir des parts plus grandes d'un marché dont le volume global a tendance à stagner et même à diminuer en période de crise. Dans cette course aux parts de marché, les grands commerces sont en position de force. L'ouverture nocturne des magasins est évidemment beaucoup plus facile pour un grand magasin qui dispose d'une masse critique lui permettant de rester ouvert jusqu'à 20 h sans difficulté. Il n'en est pas de même pour le petit commerçant déjà contraint d'effectuer un nombre d'heures de travail important. Au cas où ce projet de loi entrerait en vigueur, il est prévisible que, dans la durée, nombre de petits commerces devront fermer boutique, les grandes surfaces accaparant de ce fait une part plus importante du marché. C'est ainsi que, dans un premier temps, les grandes surfaces ouvriront presque toutes leurs magasins le soir, puis progressivement ne garderont ouverts en soirée que les grands d'entre eux ou les mieux situés. Cet élément ressort d'ailleurs de l'audition en commission des directeurs de la Coop et de la Migros qui se sont déclarés disposés à faire l'expérience - notez bien le mot «expérience» - d'ouvrir jusqu'à 20 h un maximum de leurs magasins - c'est-à-dire pas tous.

Certes, cette redistribution des parts de marché ne sera pas linéaire. Elle n'affectera pas les différents secteurs de la distribution de la même manière ni dans le même temps. Mais, à moyen terme, c'est bien le processus qui se réalisera.

Si nous ne sommes pas dupes de la guerre commerciale qui se cache derrière l'ouverture nocturne des magasins, ce qui nous préoccupe principalement c'est la question de l'emploi qui lui est liée. Quand le rapporteur de majorité parle de maintenir les emplois - il n'ose quand même pas dire augmenter le nombre de postes de travail - il est soit naïf, soit une personne peu au fait des données statistiques. En effet, le recensement des entreprises de 1991 montre qu'entre 1985 et 1991 le commerce de détail a perdu cent soixante et un établissements et six cent quarante-cinq emplois alors que, dans le même temps, l'ensemble du canton connaissait une augmentation de dix-huit mille neuf cent quarante-deux postes de travail. Cela est déjà le signe d'une concentration de la distribution. Or, cette concentration ne pourra que s'accélérer avec les ouvertures nocturnes et elle fera disparaître nombre de petits commerces sans augmenter les emplois dans les grandes surfaces. En effet, qu'en est-il de la structure du commerce de détail à Genève ? L'avez-vous étudiée, Monsieur le rapporteur de majorité ? Pourquoi la passez-vous sous silence ? Soit vous l'ignorez - ce qui m'étonnerait - soit vous n'en parlez pas parce que vos propos sur l'emploi ne résisteraient pas à l'analyse.

Le commerce de détail comprend trois mille six cent neuf établissements assurant entre un et quatre emplois par entreprise, soit un total de cinq mille deux cent quarante-quatre emplois. Cela représente 75% du total des entreprises du commerce de détail et 24% de l'ensemble des emplois de ce secteur. Si nous ajoutons à ces chiffres les établissements assurant entre cinq et neuf emplois, cela désigne 90% des entreprises du secteur et 40% des postes de travail, soit huit mille huit cent vingt-sept postes. Vous le savez bien, ce sont ces entreprises-là qui souffriront le plus de la concurrence accrue due à l'ouverture nocturne par la difficulté à assurer le temps supplémentaire d'ouverture et par le glissement d'une part de la consommation vers les grandes surfaces et les centres commerciaux. Les commerçants membres de la Fédération des artisans et commerçants ne s'y sont pas trompés, eux qui se prononcent à 70% contre l'ouverture nocturne, ce qui n'empêche par leur fédération - bel exemple de démocratie - de se prononcer en faveur du projet de loi.

Mais, me direz-vous, les pertes d'emplois dans le petit commerce seront compensées par des engagements dans les grandes entreprises de distribution. Vous savez bien que cela ne sera pas le cas. S'il est prévu que le temps de travail fixé par convention collective ne sera pas modifié à la hausse, rien n'empêchera les employeurs d'exiger les heures supplémentaires nécessaires à l'ouverture nocturne plutôt que de procéder à des engagements. Dans un secteur où le travail à temps partiel représente près de 28% des emplois, ce glissement ne posera pas de problème, d'autant plus que les conditions salariales ne sont pas particulièrement bonnes. Ainsi, dans la pratique, nous assisterons à une augmentation réelle du temps de travail. Dans ce secteur, comme dans beaucoup d'autres, l'heure est à la rationalisation et à la déréglementation avec pour corollaire des diminutions d'emplois.

Voilà la réalité économique dont le rapport de majorité ne parle pas, et pour cause. Certes, je sais que le petit commerce est loin de toujours pratiquer des conditions de salaire et de travail favorables aux employés, mais est-ce beaucoup mieux dans les grands magasins ? Sur le papier, dans les conventions sans doute, dans les faits c'est une autre histoire ! Ce qui est certain, par contre, c'est que l'ouverture nocturne des magasins sera globalement défavorable du point de vue de l'emploi, contrairement à ce que vous affirmez dans le rapport de majorité. Par ailleurs, compte tenu de l'impossibilité légale d'obtenir l'extension de la convention à tout le secteur du commerce de détail, les salariés de cette branche seront perdants sur deux fronts : celui de l'emploi et celui des conditions de travail.

Non, ce projet de loi ne favorisera pas l'emploi, il contribuera à des pertes de postes de travail !

Non, ce projet de loi n'améliorera pas les conditions de travail des vendeuses et des vendeurs, mais contribuera à les péjorer !

Oui, ce projet de loi est un pas de plus dans le sens de la déréglementation et vers une ouverture nocturne des magasins plusieurs fois par semaine !

Voilà les raisons principales pour lesquelles nous nous y opposerons par tous les moyens.

M. Armand Lombard (L). Suite aux propos négatifs de M. Clerc, je remarque qu'il ne propose strictement rien pour améliorer la situation du commerce genevois, si ce n'est de tenter de contrecarrer les projets de lois qui lui sont soumis.

A priori, il y a une bonne donne pour le commerce genevois. Notre Cité, visitée par nombre d'étrangers, possède une bonne dynamique interne. Les acteurs de ce projet sont au nombre de cinq :

- les grands commerces qui luttent pour un centre commercial urbain et métropolitain par rapport à la région;

- les petits commerces qui se doivent non seulement de ne pas mourir, non seulement de survivre, mais de se développer dans ce centre urbain;

- les employés salariés qui doivent maintenir une certaine qualité et qui doivent voir se développer leur qualité de vie;

- une cité urbaine - ne l'oubliez pas - qui se ferme - je ne parle pas des horaires, mais du centre-ville en général - et qui doit se redonner des raisons d'être visitée par sa population et

- une région qui a besoin d'un certain nombre de commerces à l'extérieur. Je ne m'étonne absolument pas des ouvertures de la Migros, de la Coopérative, en Haute-Savoie ou dans le pays de Gex. C'est parfaitement normal qu'une métropole ait autour d'elle un certain nombre de centres. L'essentiel étant que ce centre reste attrayant pour la population.

Les objectifs de cette donne sont au nombre de trois :

- un commerce de la Genève urbaine, diversifié avec des emplois créés. Monsieur Clerc, même si on a des raisons d'être gris, tristes ou pessimistes, il y a des possibilités de développer encore le commerce, et le petit commerce en particulier.

- une qualité de vie à maintenir, même dans une situation difficile, même dans une concurrence exacerbée, même dans le cadre de salaires qui, à l'évidence, sont faibles, mais qui doivent se maintenir par rapport à des salaires français qui représentent la moitié des salaires suisses. Je ne dis pas que c'est simple, mais ce n'est pas impossible à solutionner. Les partenaires doivent tenter de résoudre ces équations;

- la survie et le développement du tissu urbain, artisanal, convivial et commercial du centre-ville. C'est un objectif véritablement important.

Cette donne me paraît parfaitement «travaillable» et nous nous trouvons ainsi avec le résultat suivant :

- un projet de loi qui nous est soumis ce soir. C'est un premier pas dans l'objectif global que je vous trace, mais c'est un projet positif qui va dans la bonne direction;

- l'imbroglio politique qui commence à être habituel et grotesque.

Evidemment, le projet qui nous est soumis est partiel. Il est le début d'une action, mais ce n'est pas un grand pas comme celui d'Amstrong lorsqu'il a marché sur la lune. Ce ne sera pas très important ni pour l'humanité, ni pour Genève, ni pour le commerce.

Pour ce qui est de l'imbroglio, laissez-moi dire que notre institution politique semble se prendre singulièrement pour le centre du monde et pour le centre de Genève. Nous aussi, Grand Conseil, sommes concurrencés. Vous à gauche, vous protestez contre cette concurrence - je veux parler de l'économie privée, de la société civile, la justice - mais peut-être que finalement la population a davantage confiance dans ses autres institutions. Il faut dire que les grotesques mascarades que nous offrons souvent à la population dans cette enceinte y sont certainement pour quelque chose ! Nous devrions être prudents. Nous ne sommes pas seulement en train de nous envoyer des fions, mais nous salissons l'image de l'institution politique de Genève.

J'en reviens au commerce. A l'évidence, ce projet de loi est combattu par l'extrême-gauche qui a décidé de casser l'Entente, de casser le gouvernement, de casser tout ce qu'il peut : casser les riches, casser les socialistes... (Grand éclat de rires.)

Une voix de la gauche. Casser les banquiers !

M. Claude Blanc. Casser les pieds !

M. Armand Lombard. Cassez tout ce que vous voulez, cela nous est égal. (Brouhaha.) Les écologistes ont été tentés dans ce projet de loi par la création, par le maintien ou par le développement d'un tissu urbain. Mais ils sont tiraillés par d'autres arguments qui leur paraissent plus importants. La gauche humaniste joue le coeur, Madame Calmy-Rey, mais elle joue sans la tête ! (Hilarité générale.) «Le projet est utile» dites-vous, «Bonne idée, mais» «On serait d'accord, si», «On est tous d'accord, mais pas ce coup-là !» (Rires.) On pose des conditions, on tente délicatement d'introduire dans le secteur privé, mine de rien, des compétences réservées jusque-là aux partenaires sociaux et strictement aux partenaires sociaux dans des domaines dans lesquels, jusqu'ici dans notre pays, on pouvait essayer de trouver un consensus amenant à des solutions concertées.

Mme Calmy-Rey affirme dans ce rapport ne pas vouloir sacrifier la dimension sociale à la logique économique. Mais la logique, Madame, c'est la survie du commerce genevois urbain, ce sont les emplois au centre-ville, c'est le petit commerce pour lequel il faut trouver des bases sociales et économiques jouables !

Notre groupe, pour toutes ces raisons, soutient, bien sûr, pleinement ce projet de loi et rejette vigoureusement votre amendement. En effet, nous pensons qu'il faut savoir agir dans des directions positives et dynamiques et non pas monter sans cesse les détails en épingle. (Bravos et applaudissements.)

M. Claude Blanc (PDC). Je vais tenter d'être encore plus radical que M. Lombard ! (Aaahhh, rires et quolibets.)

Le rapport de minorité et les jérémiades qui l'entourent ne sont, à mon point de vue, qu'un monument d'hypocrisie ! Vous savez très bien, Messieurs les représentants de la minorité, qu'à trop vouloir vous allez tout casser ! Vous savez très bien qu'en tentant d'introduire dans ce projet de loi l'amendement que vous voulez y introduire - avec la bénédiction du vénérable grand-père Berenstein - vous courez le risque majeur de vous faire casser par le Tribunal fédéral ! Et vous le faites en connaissance de cause, et là réside votre hypocrisie. Vous savez que si nous acceptons votre proposition le Tribunal fédéral nous cassera et qu'il n'y aura pas de loi, c'est ce que vous voulez !

En réalité, vous voulez casser ceux qui, à Genève, font l'effort de trouver de la valeur ajoutée qui permettra d'assumer les charges sociales de l'Etat. Vous n'arrêtez pas de faire des jérémiades, de déposer motion après motion à chaque séance du Grand Conseil pour demander à l'Etat ce qu'il fait pour promouvoir l'économie, pour lutter contre le chômage, toutes choses parfaitement théoriques et, vous le savez, toutes choses qui n'amènent pas un sou de plus dans la marge des entreprises, marge qui est destinée à payer des salaires, salaires qui sont destinés à payer des impôts, impôts qui sont destinés à faire tourner le ménage de l'Etat !

Vous le savez très bien, mais vous voulez tarir la vache. Vous savez que, ce faisant, vous détruisez l'Etat, mais cela vous est égal, pourvu que vous puissiez, aux yeux de ceux que vous prétendez défendre, vous targuer de venir au secours des plus faibles ! En réalité, vous leur rendez un bien mauvais service. C'est une meule de moulin que vous lui attachez au cou au moment où il se noie alors que nous nous essayons de lui lancer une bouée. (Brouhaha et commentaires.) C'est exactement ce qu'il faut vous dire. Madame Calmy-Rey, vous avez beau sourire... (Rires.) ...c'est votre volonté. Vous voulez détruire l'économie et ensuite vous nous accuserez de n'avoir rien fait pour la sauvegarder !

En ce qui concerne cette notion de convention collective, votre position est également hypocrite. En effet, vous savez très bien que les grandes entreprises, celles que M. Clerc vient de vilipender avec tout son fiel... (Ohhh de réprobation.) ...ont signé ces conventions collectives. Celles que vous visez sont précisément les petites entreprises qui n'ont pas, pour toutes sortes de raisons, les moyens de les signer. Vous voulez les poignarder dans le dos en faisant semblant de les défendre ! En voulant étendre l'effet des conventions collectives à l'ensemble du commerce de détail, vous voulez favoriser les gros et tuer les petits tout en feignant de faire le contraire.

Je suis navré, mais vous n'êtes que des hypocrites et nous ne vous suivrons pas ! (Applaudissements des radicaux et des démocrates-chrétiens.)

M. Gilles Godinat (AdG). Je ne ferai pas de diatribe sur l'hypocrisie des uns et des autres.

Par contre, Monsieur Armand Lombard, avant d'intervenir dans la discussion, je ne puis accepter l'épithète de «casseur» ! Je vous prie de regarder humblement ce que votent vos collègues à Berne, par rapport à la révision de la loi sur le chômage, par rapport à la suppression de l'indexation AVS, par rapport à la révision de la loi sur le travail.

M. Nicolas Brunschwig. Ça, c'est le Conseil national ! On n'y est pas encore !

M. Gilles Godinat. Je vous prie de regarder de ce côté-là pour voir où sont les casseurs ! Le dogme néolibéral sur l'horaire de travail, d'après la nouvelle définition prévue sur le travail de nuit qui serait de 23 h le soir à 6 h du matin, me fait penser que votre horaire idéal serait que le jour dure vingt-quatre heures sur vingt-quatre ! (Les commentaires vont bon train.)

Le président. Voulez-vous laisser parler M. Godinat !

M. Gilles Godinat Cela dit, lors de la préconsultation concernant le projet de loi 7093, notre groupe avait développé les principaux arguments contre la modification de la loi sur les heures de fermeture des magasins. Je ne veux pas y revenir. Nous avions abordé les questions d'ordre politique, d'ordre économique, d'ordre social et d'ordre syndical. Nous avions fait le choix de suivre la voie syndicale et la voie de nos collègues socialistes qui pensaient pouvoir ancrer, effectivement, dans la loi un principe qui nous paraissait juste, c'est-à-dire de faire bénéficier les travailleurs les moins protégés de ce canton d'une protection sur le respect des usages en la matière. Or, il semble - nous étions déjà sceptiques - que ce soit très délicat.

Sur le fond, nous tenons à rappeler que notre préoccupation est essentiellement liée à l'étendue des horaires, car, comme l'a dit mon collègue Jean-Philippe de Tolédo, il faut comprendre que nous mettons le doigt dans un engrenage. C'est principalement pour cette raison que nous sommes opposés à ce projet, car c'est une première mesure qui sera suivie par d'autres... (On entend mal M. Godinat qui parle en se tournant vers les uns et les autres.)

Une voix. Micro !

M. Gilles Godinat. On ne peut plus parler debout !

Une voix. Parle plus fort !

Une autre voix. Mets-toi à genoux !

Une autre voix. Parle en face du micro, ça ira mieux !

M. Gilles Godinat. Oui, mais j'aime bien vous regarder !

Une voix. Ils sont mignons, mais vas-y ! (Rires et quolibets fusent.)

M. Gilles Godinat. Monsieur le président, faites quelque chose !

Le président. Monsieur Godinat, veuillez continuer et terminer, si c'est possible !

M. Gilles Godinat. Fondamentalement, notre groupe ne peut accepter un processus de déréglementation des horaires de travail. Il faut rappeler la motion des députés de l'Entente qui propose l'ouverture prolongée dans les services de l'administration. Nous refusons cette politique ! (Commentaires et interpellations des uns et des autres.)

Sur la question de fond, en commission de l'économie, nous avions souhaité faire entendre un groupe de «préventologues» qui travaillent sur les questions de prévention dans le domaine de la santé, maternelle et infantile entre autres, au service de santé de la jeunesse. Je vous transmets le message qu'ils n'ont pas pu transmettre en commission : «Il semble qu'avec l'ouverture nocturne des magasins - que vous appelez pudiquement ouverture retardée - les conséquences sur la vie familiale et la vie sociale sont importantes. On assiste, de fait, à une détérioration de la qualité des relations dans la famille.». C'est une réalité. Nous vous avons démontré aussi - mon collègue Clerc l'a fait - qu'il n'existe aucune garantie que l'ouverture nocturne des magasins va être créatrice d'emplois à Genève.

Pour terminer - puisque j'ai visiblement de la peine à défendre mes arguments; en effet, je suis tout le temps interrompu, Monsieur le président ! - j'insiste sur l'aspect de la prévention. En tant que médecin, c'est mon souci principal. Or, j'estime que la dérégulation des horaires engendre des problèmes de santé et des coûts sociaux induits dont vous ne tenez absolument pas compte dans votre démarche.

Mme Anita Cuénod (AdG). J'aimerais vous faire partager quelques réflexions du comité «Travail et santé». Pour commencer, je voudrais préciser que les courses, les visites médicales et les tâches administratives, pour moi et pour beaucoup de femmes, représentent une deuxième journée de travail et non un temps de loisirs. C'est pourquoi l'ouverture prolongée des magasins n'est pas une solution, c'est le temps consacré au travail payé qui doit baisser.

Que signifie une heure de plus, si petite soit-elle ? Les conditions de travail du personnel de vente, vous le savez très bien, sont composées dans sa grande majorité...

Une voix. Vous pourriez au moins avoir la politesse d'écouter !

Mme Anita Cuénod. Est-ce que je peux parler, Monsieur Dupraz ? Alors taisez-vous !

...par des femmes. Ces conditions sont très dures. D'une manière générale, le travail dans la vente signifie : des bas salaires, peu de qualifications, des conditions de travail pénibles : l'air conditionné, les courants d'air...

M. Armand Lombard. Ou bien c'est l'air conditionné, ou bien ce sont les courants d'air !

Mme Anita Cuénod. ...la lumière artificielle, le bruit ambiant et le travail debout... (L'oratrice est gênée par les remarques qui fusent de toutes parts.) Vous me laissez continuer ? Vous êtes vraiment...

De plus, elles font souvent des heures supplémentaires qui ne peuvent pas être compensées en temps ou dont elles préfèrent le paiement en raison de leur très bas salaire. Elles font les heures de travail et de déplacement au moment où les autres, en particulier les enfants, sont à la maison entre 18 et 20 h, tous les jours de la semaine, chaque samedi jusqu'à 17 ou 18 h, sans compter les déplacements, la veille des jours de fête, le 31 décembre jusqu'à 17 h et les deux nocturnes avant Noël jusqu'à 22 h. Elles n'ont pas deux jours de congé consécutifs par semaine et dans les commerces non conventionnés - six mille personnes sont concernées - elles n'ont qu'un jour et demi de congé hebdomadaire, à moins que le magasin ne soit ouvert six jours sur sept. Pour de nombreuses employées, le travail est précaire, puisque leur temps de travail - et donc leur salaire - peut varier de 20% d'un mois à l'autre.

Dans ce contexte, une heure de travail de plus le soir - ce qui veut dire une soirée entière de moins pour soi, pour se reposer, pour être avec sa famille - c'est une heure de trop, parce qu'elle vient rompre un équilibre déjà totalement instable.

M. Nicolas Brunschwig (L). Essayons de revenir à l'essentiel.

Syndicats et associations professionnelles approuvent à 100% cet accord. Je parle de l'accord et non des modalités d'application de l'accord.

La seule divergence réside dans le verrou qui devrait figurer dans la loi et qui imposerait aux entreprises non conventionnées d'appliquer les conventions collectives. Ce serait donc manifestement une extension déguisée de la convention collective. Or, les conditions juridiques d'extension de conventions collectives sont l'obtention d'un certain nombre de majorités que M. Schneider a essayé d'évoquer. En l'occurrence, ces majorités, qui sont en tout cas au nombre de deux : la majorité des emplois, celle-ci est acquise, car la totalité des grands employeurs appliquent les conditions des conventions collectives et la majorité des entreprises. Malheureusement - je le regrette avec vous - nous n'avons pas la majorité nécessaire.

Dans une société libérale, nous ne pouvons pas imposer à des entreprises ou des employeurs d'adhérer à une convention collective si, pour un certain nombre de raisons, qui sont par ailleurs peut-être tout à fait valables dans leur cadre précis, ils ne veulent pas appliquer les conditions de cette convention collective.

Dès lors, manifestement, accepter les amendements proposés ferait courir un risque juridique évident à la loi en tant que telle. Alors nous nous retrouverions de nouveau à la case «départ». Nous ne voulons pas prendre ce risque ! C'est la raison de la divergence.

Avant de conclure, je ferai quelques remarques, tout d'abord à M. Clerc. Il est d'ailleurs excusable, car je pense qu'il connaît mal le commerce de détail et, en plus, il ne faisait pas partie de la commission, donc je ne lui en veux pas plus que cela. A Genève, nous avons la meilleure convention collective de Suisse, nous avons les meilleures conditions de travail de la branche, en Suisse et même du monde. Il faut le savoir, Monsieur Clerc ! De plus, toutes les villes de Suisse, sauf Genève et Lausanne, ont au minimum une ouverture retardée ou une ouverture nocturne par semaine.

Enfin, votre discours est paradoxal pour ne pas dire cocasse, dans la mesure où vous voulez protéger les petits commerces qui, de manière générale, sont ceux dont les conditions de travail sont les plus dures et de très loin dans la branche de la distribution. Dès lors, Monsieur Clerc, une fois de plus, votre position est absolument ambiguë, pour ne pas dire incompréhensible. Cela dit, il semblerait que votre stratégie d'opposition systématique - qui est d'ailleurs aussi stérile qu'électoraliste - arrive à vous faire plaisir en tout cas à vous !

Mon autre remarque concerne les différences de prix. Il est vrai que les prix sont différents entre la France et la Suisse, personne ne le nie et surtout pas les directeurs des principales coopératives Migros et Coop qui l'ont explicité longuement en commission. Ces différences de prix sont beaucoup plus fortes dans le commerce alimentaire que dans le commerce non alimentaire pour deux raisons qu'il faut connaître. En effet, on ne peut pas se plaindre des différences de prix sans en connaître les causes : d'une part, la politique agricole suisse, avec ce qu'elle implique en termes d'approvisionnement pour les centrales alimentaires et, d'autre part, les niveaux de salaires. Il faut savoir que les salaires français sont au maximum la moitié de ceux pratiqués à Genève - je pense à Thoiry ou à Etrembières, donc à quelques kilomètres à peine. Monsieur Ecuyer, ne dites pas que ce n'est pas vrai !

M. René Ecuyer. Non, je dis que c'est un scandale !

Une voix. Oui, c'est un scandale, mais c'est comme ça !

M. Nicolas Brunschwig. Vous devez connaître ces causes pour pouvoir être conséquents. (Les commentaires vont bon train.)

Enfin et conclusion, ce projet de loi doit être examiné avec une vision «multicritères». Le premier de ces critères est manifestement les conditions de travail des employés concernés dans ce secteur. Nous ne le nions pas et nous pensons que nous avons été aussi loin que possible dans le cadre du respect du droit fédéral avec la proposition que nous faisons. Le deuxième critère est l'attente des consommateurs. Nous pouvons vous dire que nous sommes certains - nous avons fait des études sérieuses et des statistiques sur le sujet - que cette attente est réelle pour un grand nombre de consommateurs, même si certains n'en expriment pas le désir ou la volonté dans cette enceinte aujourd'hui.

Enfin, il s'agit de donner un très léger plus au niveau des conditions-cadres. Très léger, car, au niveau des entreprises de distribution, la plupart auraient désiré bien davantage, mais nous estimons que c'est un bon test pour voir de quelle manière réagit la population genevoise à ce sujet. (Applaudissements.)

M. Pierre Kunz (R). Monsieur Clerc, vous brassez tellement de chiffres... (Grand désordre. M. Kunz a de la peine à parler.)

Le président. La parole est à M. Kunz, vous attendrez votre tour, Monsieur Vanek ! (Rires et quolibets.) Monsieur Kunz, nous vous écoutons !

M. Pierre Kunz. Vous brassez tellement de chiffres que cela devient de la bouillabaisse ! (Rires.) Monsieur Clerc, puisque vous parliez aussi de réalité économique, j'aimerais vous faire remarquer qu'un seul chiffre compte dans ce domaine. En 1992, 600 millions de francs de dépenses de consommation ont été effectuées par les Genevois de l'autre côté de la frontière. Aujourd'hui, on peut estimer, sur le total des dépenses de consommation des Genevois, à 7 ou 8% les dépenses effectuées de l'autre côté de la frontière. Voilà l'origine du problème de l'emploi, Monsieur !

Monsieur Clerc, hier soir, vous et vos amis - vous n'étiez d'ailleurs pas tellement préoccupés par notre santé ! - (Eclat de rires.) nous avez occupés pendant six tours d'horloge et vous vous êtes lamentés sur l'arrogance et sur le mépris que la majorité afficherait à votre égard. Hier soir, comme aurait dit Vigny, vous pleuriez, vous priiez, vous gémissiez pour que nous vous accordions la concertation que vous voulez tant. Hier soir, bien sûr, vous n'avez pas pensé aux sujets de discussion d'aujourd'hui !

Comment pourrions-nous, devant tant d'incohérences, tant de volte-face dans vos milieux, dans les milieux syndicaux que vous prétendez défendre ou représenter, continuer à vous considérer comme des partenaires ? En effet, votre attitude montre que vous en êtes restés à la défense d'intérêts purement corporatistes ! (Le chahut provoqué par l'Alliance de gauche augmente et l'orateur est obligé de hausser le ton.) Que vous êtes complètement détachés de l'intérêt de Genève à long terme ! (Le président tente vainement de calmer l'assemblée.) Que vous n'avez aucune cohérence ! Que vous n'êtes pas prêts à faire des efforts ! Que vous n'avez aucune intention de faire les révisions nécessaires... (L'orateur s'arrête de parler, car le chahut est indescriptible.) ...et cela signifie que vous aurez bien de la peine, effectivement, à nous faire travailler encore beaucoup en commission !

M. Max Schneider (Ve). Je regrette de prendre la parole une deuxième fois, mais j'avais trop d'informations à donner pour un temps si bref. Mais je ne vais pas m'allonger... (Hilarité générale.) Je voudrais souligner que le groupe écologiste n'acceptera pas l'entrée en matière sur ce projet de loi. Nous estimons que la décision est du ressort des partenaires sociaux et de l'Entente pour obtenir une majorité afin de légaliser cette convention à Berne et nous invitons le département de l'économie publique à s'y attacher.

J'aimerais savoir - ma question va peut-être vous surprendre, mais ma dernière information date du mois d'août 1990 - combien d'employeurs manqueraient aujourd'hui pour obtenir cette majorité.

S'agissant des petits commerçants, puisque certains s'y intéressent, notamment sur les bancs de la droite, je vous demande pourquoi vous avez refusé en commission que les grandes surfaces puissent ouvrir dans les zones moins attractives, afin de générer une animation propice à la venue des chalands. C'est la teneur de la lettre que vous avez reçue de la FAC. Juridiquement, n'aurait-il pas été possible d'inclure cette possibilité dans la loi, puisque, justement, c'était la demande des petits commerçants ?

Pour toutes ces raisons, nous n'entrerons pas en matière sur cette loi. En ce qui concerne les amendements, j'ai déjà fait part de l'arrêt du Tribunal fédéral tout à l'heure.

M. Pierre Vanek (AdG). Je ferai une parenthèse avant d'intervenir sur le fond de ce débat.

Tout à l'heure, Monsieur le président, je vous ai demandé de faire voter une motion d'ordre. (Interpellé par un député.) Ta gueule ! (L'assemblée hue l'orateur.)

Le président. Monsieur Vanek, je vous rappelle le respect que vous devez à vos camarades et amis députés. (M. Vanek ne laisse pas le président parler.) Monsieur Vanek, c'est moi qui parle, pour l'instant !

La séance est suspendue ! Fermez les micros ! (Le président fait évacuer la tribune par les huissiers.)

 

La séance est levée à 16 h 40.