République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 17 février 1994 à 17h
53e législature - 1re année - 4e session - 4e séance -autres séances de la session
No 4
Jeudi 17 février 1994,
soir
Présidence :
M. Hervé Burdet,président
La séance est ouverte à 17 h.
Assistent à la séance : MM. Claude Haegi, président du Conseil d'Etat, Jean-Philippe Maitre, Guy-Olivier Segond, Philippe Joye, Gérard Ramseyer et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président. Je prie l'assistance de bien vouloir se lever.
Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux à la prospérité de la patrie qui nous a confié ses destinées.
2. Personnes excusées.
Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Michel Balestra, Claire Chalut, Laurette Dupuis, Bernard Lescaze, David Revaclier et Christine Sayegh, députés.
3. Procès-verbal des précédentes séances.
Le procès-verbal des séances des 27 et 28 janvier 1994 est adopté.
4. Discussion et approbation de l'ordre du jour.
Le président. Le point 38, (RD 217-A - naturalisations) est renvoyé à une prochaine séance.
Les rapports de grâce, point 9, son renvoyés à demain vendredi à 17 h, après l'accueil des astronautes.
5. Remarques sur la liste des objets en suspens.
Le président. les questions écrites suivantes ont été renvoyées au Conseil d'Etat les 2 et 3 décembre 1993 et n'ont pas encore reçu de réponses :
de M. Christian Ferrazino : Votation : une question ou une devinette ? (Q 3509)
de M. René Longet : Déontologie militaire. (Q 3510)
de Mme Claire Torracinta-Pache : Fonctionnaires et liberté d'établissement. (Q 3512)
6. Déclaration du Conseil d'Etat et communications.
Le président. Nous avons appris la récente hospitalisation de Mme Micheline Spoerri. Des fleurs lui ont été adressées. Nous lui souhaitons tous un prompt rétablissement. (Mme Spoerri entre à ce moment dans la salle. Sourires et applaudissements la saluent.)
Nous travaillons dès aujourd'hui avec le nouveau règlement du Grand Conseil. Vous en avez un exemplaire dans votre pupitre et vous en recevrez un supplémentaire à domicile. Je vais m'efforcer d'appliquer les nouvelles dispositions. J'espère que vous ferez de même. Je requiers toute votre indulgence s'il m'arrivait de m'égarer, comme je ferai preuve de compréhension si vous oubliez l'une ou l'autre de celles-ci.
Le président du Grand Conseil genevois, accompagné de M. Eric Perrin, chef du protocole, a reçu le 11 février 1994 une délégation de quatre députés du parlement angolais, à la tête de laquelle se trouvait M. Almeida. Cette délégation était également accompagnée de M. Laurent Monnier, chargé de cours à l'Institut du développement, ainsi que de M. Domingo Calvino de Carvallo, économiste statisticien à la CNUCED. (Brouhaha intense.) Les entretiens ont porté sur la situation actuelle en Angola et la guerre civile qui a repris dans ce pays au lendemain des élections législatives et présidentielles de 1992, ainsi que sur les perspectives de paix compte tenu de la situation géopolitique dans les pays limitrophes et en Afrique australe. (Le président tape sur sa cloche pour obtenir le silence.) La délégation angolaise se trouve à Genève pour prendre part aux travaux de la commission des droits de l'homme actuellement réunie à Genève et durant laquelle le vice-ministre des affaires étrangères est intervenu le 11 février. (Le chahut persiste.)
Je veux bien taper encore sur cette cloche à réitérées reprises, mais si vous ne vous taisez pas, vous n'entendrez rien du tout, Monsieur Blanc !
M. Claude Blanc. Mais moi, j'me tais ! (Rires.)
7. Correspondance.
Le président. La correspondance suivante est parvenue à la présidence :
Il est pris acte de cette correspondance.
Il en est pris acte.
Cette lettre figurera au Mémorial.
Le président de la commission d'aménagement du canton a reçu copie de cette lettre qui sera abordée au point 32 de l'ordre du jour traitant cet objet.
Ce courrier sera traité lorsque sera abordé le point 20 de l'ordre du jour qui traite de cet objet.
Il en est pris acte.
8. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Le président. Les projets de lois suivants sont retirés par le Conseil d'Etat :
M. Dominique Belli(R). Je vous informe que je reprends à mon compte la participation de Maurice Giromini au projet de loi suivant :
M. Max Schneider(Ve). Je signale que je reprends à mon compte la participation de M. Yves Meylan au même projet.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Le président. La demande d'interpellation suivante est parvenue à la présidence :
Cosignataires : Sylvie Hottelier, Pierre Vanek, Jacques Boesch, Jean-Pierre Rigotti, Danielle Oppliger.
Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
e) de questions écrites.
Le président. Nous avons reçu la question écrite suivante :
Elle sera transmise au Conseil d'Etat.
Par ailleurs, le Conseil d'Etat nous a transmis réponse à la question écrite suivante :
QUESTION ÉCRITE
de M. Laurent Moutinot (S)
Dépôt: 2 décembre 1993
L'étiquette féminine. A quand le «e» muet ?
Le service des votations fournit aux bureaux de vote du canton une étiquette/badge «président» et une autre «vice-président».
De nombreuses présidentes et vice-présidentes sont déjà intervenues auprès du service et même du Bureau de l'égalité afin d'obtenir une désignation féminine de leurs fonctions. Sans succès à ce jour.
Le Conseil d'Etat est-il prêt à donner les instructions nécessaires pour que le service des votations, en respect avec le principe de l'égalité des sexes, distribue des étiquettes masculines et féminines ?
RÉPONSE DU CONSEIL D'ÉTAT
du 2 février 1994
Le Conseil d'Etat, comme le service des votations et élections (SVE) partage les préoccupations de M. Laurent Moutinot, député, en matière d'égalité des sexes. C'est pourquoi le SVE a suggéré aux quelques présidentes ou vice-présidentes qui ont pu lui en faire la remarque, de compléter le badge remi par un «e» muet, ce qui a toujours été possible.
Le SVE a rappelé à cette occasion la teneur de l'article 20 A de la loi sur la forme, la publication et la promulgation des actes officiels (B 2 1) qui dispose:
«Dans la législation genevoise, toute désignation de personne, de statut ou de fonction vise indifféremment l'homme ou la femme, sous réserve des domaines liés aux différences biologiques des sexes.»
Pour des raisons budgétaires et afin de ne pas gaspiller les stocks existants, les badges actuels seront encore utilisés pour quelques opérations; dès l'automne 1994, le SVE mettra en circulation de nouveaux badges portant la mention «responsable du local de vote» qui pourront être portés sans modification orthographique aussi bien par des hommes que par des femmes.
Le président. Nous avons reçu à la présidence la candidature de M. Jean Maye, présentée par le parti démocrate-chrétien.
M. Jean Maye est élu tacitement.
Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Raymond Courvoisier, présentée par le parti radical.
M. Raymond Courvoisier est élu tacitement.
Le président. Aucune candidature ne nous étant parvenue pour cette élection, celle-ci est reportée à la prochaine séance.
Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Nicole Valli-Jaquet, présentée par le Rassemblement pour une politique sociale du logement.
Mme Nicole Valli-Jaquet est élue tacitement.
Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. François Chaix, présentée par le parti libéral.
M. François Chaix est élu tacitement.
M. Jean Spielmann (AdG). Lors de l'une des dernières séances de l'année passée, j'avais interpellé le Conseil d'Etat pour soulever les problèmes liés à Swissair, notamment en ce qui concerne les employés du nettoyage des cabines. En effet, Swissair avait décidé, après avoir convoqué son personnel dans la journée, de licencier la quasi-totalité ou, plus précisément, de les vendre à une entreprise de nettoyage qui n'était pas installée dans le canton à ce moment-là. J'avais demandé au Conseil d'Etat de garantir au moins les acquis des employés en domiciliant cette entreprise à Genève. D'autre part, j'avais soulevé le problème important du respect des conventions collectives de travail. Le Conseil d'Etat avait répondu partiellement et j'en avais été satisfait.
Aujourd'hui, il faut bien dire que le problème n'est pas réglé pour le personnel de nettoyage. Après les séances des 28 septembre, 25 novembre et 13 janvier de cette année, la convention collective n'a toujours pas été signée. Malgré le fait que l'ensemble des entreprises genevoises de nettoyage et des associations genevoises des entrepreneurs de nettoyage aient demandé à l'entreprise Asco de respecter les conventions collectives en vigueur dans ce canton, cette dernière continue de refuser d'y adhérer et oppose un refus à toute forme de négociation. J'interpelle donc le Conseil d'Etat sur ce premier point pour lui demander, au titre de sa triple responsabilité : responsable du Conseil d'Etat, membre du conseil d'administration de Swissair et président de l'aéroport, d'intervenir par l'une ou l'autre de ces voies afin que le minimum soit respecté au niveau des conventions collectives.
Dans le même cadre, je demanderai également au Conseil d'Etat d'intervenir de façon urgente au sujet des problèmes de l'entretien des véhicules utilitaires et des installations de Swissair. De nombreuses personnes se trouvent aujourd'hui quasiment sans travail par le fait que l'on a renoncé à une série de travaux d'entretien, ou tout du moins parce qu'on les a espacés. Cela engendre des problèmes non seulement au niveau de la propreté des avions, mais aussi au niveau de la sécurité. Tout cela est inquiétant. Je demande donc au Conseil d'Etat d'agir rapidement pour assurer le respect des conventions collectives et des contrats signés entre l'employeur et les employés à Swissair.
Le président. Le Conseil d'Etat donnera les réponses aux deux interpellations de M. Spielmann après le point 19 de notre ordre du jour.
Mme Liliane Johner (AdG). Ma question s'adresse au département des finances et contributions.
Le Conseil d'Etat a fait publier dans les journaux une décision de soumettre à l'amende toutes les personnes qui n'auraient pas rempli leur déclaration d'impôts en date du 31 mars. De plus, les demandes de délai seront payantes. Je veux bien admettre que la République ait besoin d'argent, je veux bien admettre également que des contribuables envoient leur déclaration au mois de décembre, mais vous aurez toujours les irréductibles, avec ou sans amende !
Par contre, vous mettez les services sociaux et les associations chargées d'établir ces déclarations dans une situation inextricable. Comment voulez-vous absorber tout cela dans ces délais ? Et je ne vous parle pas de la panique qui règne surtout parmi les personnes âgées ! Qui prendra en charge les amendes qui seront infligées aux indépendants pour qui les fiduciaires mettent des mois à établir un bilan ? Enfin, je vous demande si l'administration fiscale va pouvoir établir ses taxations dans un délai aussi bref que celui exigé des contribuables pour remplir leur déclaration ! Je vous remercie de bien vouloir étudier la possibilité de revenir sur cette décision et de vous en tenir à ce qui se faisait jusqu'à présent.
Le président. La réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de Mme Johner aura lieu après le point 36 de notre ordre du jour.
M. Max Schneider (Ve). Mon interpellation concerne le département des travaux publics et les jardins familiaux de Plan-les-Ouates.
Le rôle socio-économique et culturel joué par les jardins familiaux de Genève n'est plus à souligner. Je pense que tout le monde en est bien conscient. De plus, dans la conjoncture actuelle de chômage et de crise économique que nous connaissons, ces jardins appelés auparavant «jardins ouvriers» retrouvent donc toute leur importance.
Voilà dix-huit ans que le Groupement des jardins familiaux de Plan-les-Ouates sait qu'ils devront être déplacés pour permettre la construction de la route d'évitement de Plan-les-Ouates. Des mesures ont déjà été prises. Depuis 1986, l'Etat a acheté, par la société immobilière Jacqueline, un terrain à aménager pour y transférer les jardins familiaux de Plan-les-Ouates.
Malheureusement, malgré l'assurance que le chef du département, depuis 1986, a donnée aux dirigeants de ces jardins familiaux, aucun terrain n'a été préparé pour ce transfert. Au début de septembre 1993, lors de l'enquête publique pour cette route de contournement de Plan-les-Ouates, ces gens ont fait opposition, non par esprit de polémique, mais par souci de faire respecter leurs droits, puisqu'on leur avait assuré que le terrain de remplacement serait prêt avant le début des travaux, ce qui n'est pas le cas. Le retard est peut-être dû au changement de Conseil d'Etat. En tout cas, à la mi-janvier, ils ont eu la confirmation qu'ils devraient déménager de Plan-les-Ouates pour le 30 avril sans possibilité de prolonger ce délai.
Vu l'urgence de la situation, vu l'importance des travaux nécessaires pour aménager les abris et la construction d'un dépôt pour l'outillage et les engrais, vu le temps qu'il faut pour préparer la terre, je demande au Conseil d'Etat de bien vouloir me dire ce qu'il a envisagé pour le déménagement des dix premiers jardins familiaux ?
Ces parcelles doivent-elles bien être de 250 m2 et non de 200 comme cela avait été prévu ?
Il y a cinq cents demandes de jardins familiaux. Trouveront-elles une réponse positive dans l'année en cours ?
Le président. La réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Max Schneider sera donnée après le point 35 de notre ordre du jour.
M. Christian Ferrazino (AdG). Mon interpellation urgente est rendue nécessaire suite à l'absence de réponse du président du Conseil d'Etat à l'intervention urgente que j'avais développée à la précédente séance. La courtoisie la plus élémentaire m'avait amené à penser que M. Haegi aurait placé sa réponse à l'ordre du jour de cette séance, puisqu'il voulait se renseigner, chiffres à l'appui, pour y répondre de la façon la plus précise possible. En consultant l'ordre du jour de cette séance, je m'aperçois qu'il faut davantage de temps à M. Haegi pour y répondre, puisque cette réponse n'y figure pas.
Alors, je m'adresse au département des travaux publics, et plus particulièrement à M. Joye. Je lui demanderai d'avoir la bienséance de répondre à cette interpellation urgente concernant - je le rappelle en substance et très brièvement - l'arrêté pris le 24 janvier dernier par le Conseil d'Etat au sujet des catégories de logements où ne sévirait plus la pénurie. J'avais souligné que le Conseil d'Etat s'était non seulement contredit en l'espace de quelques jours, puisqu'il avait pris un arrêté en novembre dernier dans lequel il disait précisément le contraire, à savoir que cette pénurie existait toujours à Genève, toute catégorie confondue, mais j'avais surtout relevé que le Conseil d'Etat, en fondant son arrêté du mois de janvier et concluant qu'il n'y aurait plus de pénurie pour les logements d'une et de deux-pièces, s'était uniquement basé sur une approche quantitative, c'est-à-dire sans tenir compte le moins du monde du montant des loyers. Or, la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation, que M. Joye applique quotidiennement, fait obligation au Conseil d'Etat, lorsqu'il prend un arrêté, de tenir compte - ce sont les articles 8 et 9, Monsieur le président - du montant des loyers, c'est-à-dire du prix à la pièce.
J'aimerais savoir comment le Conseil d'Etat peut justifier de prendre un arrêté en violation flagrante des dispositions des articles 8 et 9 de la LDTR qui lui font obligation de tenir compte du prix à la pièce et en violation également de son propre règlement ? Je fais ici allusion à l'article 8 du règlement d'application de la LDTR, qui précise, en son alinéa 2, deuxième phrase, que vous devez également tenir compte du prix à la pièce.
Si vous abordez la pénurie, comme la loi vous impose de le faire, en tenant compte d'une approche qualitative et non pas seulement quantitative, le Conseil d'Etat devrait revoir sa décision, à savoir son arrêté du 24 janvier, ce qui éviterait que le Rassemblement pour une politique sociale du logement, comme il l'a déjà d'ores et déjà annoncé, ne soit contraint de saisir le Tribunal fédéral de cette affaire.
Le président. La réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Christian Ferrazino interviendra après la réponse qui sera donnée à M. Max Schneider, soit après le point 35 de notre ordre du jour.
EXPOSÉ DES MOTIFS
L'explosion du chômage depuis 1991 et son maintien vraisemblable à un niveau élevé, même en cas de reprise économique, conduisent de nombreux chômeurs et chômeuses à épuiser leurs indemnités de chômage, y compris après le passage par une occupation temporaire.
Pour mémoire, signalons qu'à fin décembre 1993, 16 310 chômeurs et chômeuses étaient recensés, soit un taux de chômage de 7,9%. Sur ce nombre, 4188 personnes étaient au chômage depuis plus d'un an, soit 26% du total des sans-emploi.
Actuellement nous ne disposons pas de données quantitatives permettant de cerner le phénomène des personnes en fin de droit. La seule statistique disponible est partielle: il s'agit des chômeuses et chômeurs qui, après avoir épuisé toutes leurs prestations de chômage (indemnités fédérales, cantonales, occupation temporaire), demandent l'aide de l'assistance publique auprès de l'Hospice général.
Il est indispensable de saisir de manière exhaustive la réalité des chômeurs en fin de droit pour permettre de prendre les mesures qui s'imposent tant du point de vue d'une politique de l'emploi que d'une prise en charge sociale de ces personnes.
Débat
M. Bernard Clerc (AdG). L'annuaire statistique du canton de Genève 1993 nous apprend que notre République compte 3 080 bovins, 5 370 porcs, 2 260 moutons, 90 chèvres et 17 500 poules. J'arrête là cette énumération.
M. Claude Blanc. Et 21 ânes ! (Rires.)
M. Bernard Clerc. Quel rapport me direz-vous avec le problème des chômeurs en fin de droit ? Le rapport est évident. D'un côté nous disposons de données extrêmement précises concernant la production agricole, de l'autre nous avons un vide presque total pour tenter de cerner un problème fondamental qui touche aux conditions d'existence de plusieurs milliers de personnes si on tient compte des familles de ces chômeurs ! Chacun en conviendra, cette situation ne peut pas durer !
Dans l'exposé des motifs de notre motion, nous avons fait état du nombre important des chômeurs de longue durée. Les statistiques relatives au chômage définissent la notion de «longue durée» comme le fait d'être sans travail depuis plus d'un an. Cette partie des chômeurs et chômeuses est donc susceptible, à terme, d'alimenter - si je puis dire - la catégorie des personnes en fin de droit, mais cela ne suffit pas pour évaluer l'ampleur du phénomène. En effet, nombre de chômeurs et chômeuses sont indemnisés pour des périodes inférieures à un an. Il suffit de penser aux jeunes en fin de formation, aux femmes qui cherchent une activité à la suite d'un divorce, à celles et ceux qui n'ont pas cotisé suffisamment et qui bénéficient seulement de 170 indemnités, soit pour une période d'environ huit mois.
A fin décembre 1993, 209 dossiers de personnes arrivées en fin de droit étaient recensés à l'Hospice général, mais ce chiffre est loin de représenter la réalité. En effet, nombreux sont ceux qui ne souhaitent pas faire appel à l'assistance publique et certains disposent d'économies qui ne leur permettent pas d'obtenir l'aide de l'assistance. Bref, ces données ne peuvent prétendre représenter valablement l'importance du phénomène, puisqu'il se situe en aval du problème. Pour obtenir un chiffre exhaustif, il faut aller à la source, c'est-à-dire recenser effectivement les personnes qui ont épuisé l'ensemble des prestations de chômage auxquelles elles peuvent prétendre, qu'il s'agisse des indemnités fédérales ou cantonales, ou qu'il s'agisse de l'occupation temporaire.
Vous savez tous que le problème des chômeurs en fin de droit est une réalité, mais nous sommes incapables aujourd'hui d'en mesurer l'ampleur. Ce n'est pas parce qu'une réalité n'est pas quantifiée qu'elle n'existe pas. Vous le savez, les réalités finissent toujours par s'imposer. Pour éviter que la réalité des chômeurs en fin de droit ne s'impose dans les plus mauvaises conditions, mettons en place un outil qui nous permettra d'en saisir l'importance. A partir de là, nous pourrons débattre des moyens à mettre en oeuvre pour lutter contre la désinsertion professionnelle des personnes concernées.
C'est pourquoi nous vous demandons de bien vouloir accepter cette proposition de motion.
M. Nicolas Brunschwig (L). Nous avons pris connaissance avec intérêt de la proposition de motion de M. Clerc, de M. Champod et de Mme Strubin. Il nous apparaît cependant que certains éléments ne sont pas très clairs ou pas très précis à ce stade. Par exemple, qu'appelons-nous chômeurs en fin de droit ? Faut-il les considérer sur le plan fédéral ou cantonal ? Vous savez que les prestations cantonales sont importantes à Genève.
Ce sujet a été abordé lors de débats en commission, entre autres à la commission des finances, et certains estimaient qu'il faudrait que l'Hospice général puisse mettre en place une certaine planification par rapport aux charges qui lui incomberaient et aux personnes qui feraient appel à lui. Il y a des difficultés techniques importantes, et il nous semblerait, même si nous ne nous opposons pas du tout à cette motion, utile de l'étudier en commission de l'économie et d'auditionner une personne du service cantonal de statistique à ce sujet.
Nous vous proposons, dès lors, de renvoyer cette motion à la commission de l'économie.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. La motion qui vous est proposée pose un problème qui a fait l'objet de différentes évocations - comme l'a rappelé M. Brunschwig - dans le cadre de la préparation du budget 1994 en commission des finances. Je voudrais vous donner les quelques informations que je possède sur ce qui se fait actuellement.
Il y a environ une année, nous avons mis en place, avec M. Segond, un groupe de travail interdépartemental entre le département de l'économie publique et le département de l'action sociale, précisément pour travailler sur la problématique du chômage de longue durée et sur les mesures en cours de façon à améliorer la coordination entre l'Hospice général et l'office cantonal de l'emploi. Toute une série de mesures pratiques sont déjà le fruit du travail conjoint de ces deux départements.
Il est évident que, dans le cadre de ce travail, le manque d'informations plus approfondies sur la problématique du chômage de longue durée est apparu plus crûment encore. C'est la raison pour laquelle j'ai proposé, à la fin de l'année passée, aux partenaires sociaux de se réunir pour une journée de travail de façon à poser les jalons d'une amélioration de l'information sur ces questions, en particulier par des programmes ciblés résultant de mandats confiés à l'université et au service cantonal de statistique. Nous nous sommes donc rencontrés avec les partenaires sociaux, avec l'université, avec l'Hospice général, pas plus tard que le 4 février. Nous avions pris cette décision en tout début de cette année sur la base des analyses que nous avions faites et qui étaient d'ailleurs documentées par des réflexions soumises par deux professeurs d'université mandatés à cet effet, le professeur Yves Flückiger, d'une part, et le professeur Lalive d'Epinay, d'autre part.
Les réflexions qu'ils nous ont transmises sont très intéressantes et nous ont permis de déboucher d'ores et déjà sur un certain nombre de conclusions opérationnelles.
Tout d'abord, nous confierons au service cantonal de statistique le mandat d'approfondir un certain nombre de données brutes qui existent déjà dans le système Plasta pour les intégrer dans ce que je serais tenté d'appeler un véritable tableau de bord de l'emploi permettant, mois après mois, de suivre de manière plus détaillée non seulement ce qui existe déjà en matière de renseignements et sur l'emploi en général, mais, plus particulièrement, sur la problématique des chômeurs en fin de droit.
Par ailleurs, afin de mieux cerner cette réalité des chômeurs en fin de droit, nous confierons un mandat à l'université pour qu'elle puisse suivre, avec le service cantonal de statistique, le parcours d'une population déterminée de chômeurs sur la base d'une enquête sociologique approfondie, cela même lorsque ceux-ci n'ont plus de droits sur le plan fédéral et cantonal, qu'ils n'ont plus droit à l'assistance et qu'ils sont sortis du système du régime des prestations de l'Hospice général.
Je peux vous assurer que nous allons de l'avant avec ce type de mandat de manière tout à fait résolue, parce que nous manquons, effectivement, d'instruments pour piloter sur le plan politique plus sérieusement encore la problématique du chômage de longue durée.
Voilà ce que je pouvais vous dire à ce sujet. Tous ces travaux sont en cours. Ils ont été relayés par une motion devant votre Conseil, probablement à la suite d'un certain nombre d'informations qui vous sont parvenues. Sur cette base, je vous indique que le Conseil d'Etat reçoit très volontiers cette motion et il vous fera rapidement un rapport sur la structure du mandat confié, sur les opérations qui sont engagées et leur planification. L'objectif sur lequel nous sommes absolument d'accord est d'améliorer très sérieusement la base de données à disposition, s'agissant plus particulièrement du problème des chômeurs de longue durée.
M. Jean Montessuit (PDC). L'exposé que vient de nous faire le président Jean-Philippe Maitre démontre clairement que cette motion n'est pas une idée originale.
En effet, elle est née à la suite des débats qui ont eu lieu à la commission des finances après le travail effectué entre les partenaires sociaux - comme vient de l'expliquer M. Maitre - ce qui n'enlève rien, d'ailleurs, à sa valeur. Je ne vois donc pas l'intérêt de la renvoyer en commission, puisque le travail est déjà en cours. Renvoyons-la directement au Conseil d'Etat ! Cela nous permettra d'obtenir les renseignements plus rapidement, ce qui ne sera que mieux.
Je propose donc à mon collègue de retirer sa proposition.
M. Bernard Annen (L). Après les explications qui viennent de nous être fournies, nous retirons notre proposition de renvoi en commission.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue:
MOTION
invitant le Conseil d'Etat à créer une statistique relative aux chômeurs en fin de droit
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
- la progression importante du nombre de chômeurs et en particulier des chômeurs de longue durée;
- l'absence d'une statistique relative aux chômeurs qui ont épuisé leurs prestations de chômage;
- la nécessité de disposer d'une telle donnée dans le cadre de la lutte contre le chômage et la mise en place d'un dispositif d'aide aux chômeurs en fin de droit,
invite le Conseil d'Etat
à mettre sur pied une statistique mensuelle permettant de cerner l'importance du phénomène des chômeurs en fin de droit et son évolution.
M. Gilles Godinat (AdG). Depuis le détachement de Roto-Sadag SA de la Tribune de Genève et son rachat par MM. Capt, Baud et Domenjoz, fin 1990, la Caisse d'Epargne du Canton de Genève, par l'intermédiaire de M. Zimmermann, a assuré une ligne de crédits. Courant 1991, le retard dans le paiement des débiteurs, la baisse du volume des commandes, la récession ainsi que la restructuration de l'entreprise ont entraîné seize licenciements sur cent trente employés, en 1992. La Caisse d'Epargne avait déjà exigé, à la fin 1991, des mesures d'assainissement, en particulier une diminution de 10% de la masse salariale, pour passer de 10 à 9 millions en 1992.
La direction de l'entreprise repoussa l'offre des travailleurs de se constituer comme actionnaires et exigea d'eux d'autres sacrifices. Ainsi, malgré les contributions de solidarité consenties par les salariés pour favoriser la situation financière de l'entreprise, qui se sont montées à près de 860 000 F pour une période de seize mois depuis l'été 1992, et malgré le plan social misérable imposé aux seize licenciés d'alors - 30 000 F en tout et pour tout pour ces seize personnes, sur une économie réalisée par l'entreprise de 1,3 million avec ces réductions d'effectif - l'entreprise annonce de nouvelles difficultés financières à la fin 1992.
Mais cela ne l'empêche pas d'investir, en décembre, dans l'achat de quinze machines à l'entreprise Barut, d'embaucher, en février 1993, dix employés de cette entreprise en faillite et de procéder à d'autres investissements d'envergure comme l'acquisition d'une presse quatre couleurs et l'installation de copie de plaques offset sans film. En mars 1993, la direction annonce une baisse du chiffre d'affaires; elle indique également que la contribution de l'entreprise pour compenser la perte de revenus des personnes concernées par le chômage partiel, contrepartie de la baisse des salaires récupérés sous forme de contribution de solidarité, s'élève à environ 1% de la masse salariale sur huit mois d'exploitation.
Force est donc de constater que l'on a peu chômé dans cette entreprise, au maximum dix jours par personne sur huit mois. Par conséquent, il y a lieu de conclure que les difficultés financières ne proviennent pas principalement d'un manque de travail. Cela n'empêche pas la direction de suivre les consignes bancaires : réduire les charges de 18% avec un plan d'investissement de 1,2 million en 1993 et 1994 en équipements nouveaux, et de 1,8 million pour les trois années suivantes, c'est-à-dire 3 millions sur quatre ans. A fin 1993, la Banque cantonale propose de reconstituer le capital social par 2 millions et exige, en contrepartie, des mesures de restructuration : licenciement de vingt-cinq employés, les nonante employés restants étant sommés de renoncer définitivement au salaire acquis et d'accepter ainsi, définitivement, une diminution mensuelle de leurs revenus de l'ordre de 120 F par mois pour les petits salaires et de 650 F pour les plus élevés.
Voilà la situation actuelle. Les représentants du conseil d'administration exercent donc un chantage en menaçant de procéder à un dépôt de bilan en cas de refus des salariés de se soumettre à ces mesures, alors que, dans le même temps, le gouvernement, qui a la haute main sur la nouvelle BCG, proclame sa volonté de défendre l'emploi, voire d'en créer. Cet exemple illustre une démarche qui nous semble tout à fait contradictoire. Un chômage partiel plus important était tout à fait envisageable dans cette entreprise dans laquelle on aurait pu répartir le travail entre plusieurs mains. En effet, des diminutions d'horaires avaient été proposées par les représentants des salariés et pouvaient être négociées. Mais cette mise au pied du mur a acculé le personnel, le couteau sous la gorge, à accepter le plan de démontage.
Ainsi, dans un secteur du secondaire sinistré enregistrant une perte d'emplois en deux ans de 10%, la BCG encourage et suscite des mesures de restructuration entraînant un chômage structurel accru. Ces procédés doivent-ils être considérés comme «La Politique» de la Banque cantonale, avec un grand L et un grand P ? Devons-nous y voir les effets du syndrome Hubert Raymond, cet affairiste spéculateur dont l'incurie a été couverte par un institut bancaire voisin ? Nous osons espérer que non !
Cette politique reste-t-elle une politique de «dumping salarial» ? C'est inacceptable du point de vue social. Plus encore, c'est une politique hérétique du point de vue économique. Elle cautionne la concurrence déloyale et la dépréciation de la valeur du travail créées dans les entreprises industrielles du canton. Oui, les travailleurs de Roto-Sadag ont commis l'erreur de croire sur parole leur chef d'entreprise, M. Domenjoz, qui leur avait assuré que les baisses de salaire ne seraient pas utilisées pour baisser les prix, mais bien pour pallier aux difficultés de trésorerie suscitées par les clients mauvais payeurs et pour honorer les intérêts de la ligne de crédits de la Banque cantonale.
Non, le législatif ne peut pas admettre qu'une de ses institutions exerce un chantage au dépôt de bilan sur les salariés pour qu'ils concèdent un abattement de 9% sur la masse salariale sans contrepartie ! Le législatif de ce canton ne peut également pas admettre que l'on soutienne des chefs d'entreprise qui utilisent des fonds publics pour mener une politique dont le but avoué est de gagner des parts de marché en s'appropriant des commandes en cassant les prix et en étant en concurrence déloyale avec les entreprises saines qui n'ont ni les réserves ni la caution financière pour résister à ces attaques !
Nous demandons donc tout d'abord au gouvernement d'engager ses institutions pour sauver l'emploi, y compris dans les arts graphiques où le marché intérieur représente plus de 80% de ses activités. Ensuite, et dans le cas d'espèce, nous demandons le maintien du soutien de la Banque cantonale à Roto-Sadag et qu'il soit conditionné à des mesures d'assainissement au niveau de la conduite de la société. En d'autres termes, la banque, qui a libéré un crédit-relais de 2 millions, doit influer sur le conseil d'administration pour qu'il confie le poste de commande de la société à un administrateur responsable.
Mes deux questions sont les suivantes :
Quelle politique le Conseil d'Etat entend-il mener pour préserver les emplois dans le secteur des arts graphiques ? Considère-t-il les décisions des employeurs de Roto-Sadag et la contribution en matière de politique économique de la Banque cantonale impliquée dans le conseil d'administration depuis quatre ans comme un exemple à suivre ?
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Je vous donne quelques informations en réponse aux questions qui viennent d'être posées au sujet de Roto-Sadag.
Il faut savoir, Monsieur le député, qu'à la fin de l'année dernière Roto-Sadag, à raison des dispositions légales, code des obligations en particulier, aurait été dans l'obligation de déposer son bilan. A l'époque, en effet, la fiduciaire chargée du contrôle des comptes, qui assume sa propre responsabilité dans le cadre du nouveau droit de la société anonyme, était à la veille de saisir le juge pour demander une mise en faillite de Roto-Sadag, tout simplement parce que les pertes de la société se chiffraient en multiple de son capital. Les conditions légales pour la mise en faillite de Roto-Sadag étaient donc réunies.
C'est dans ce contexte et afin de sauver les emplois de Roto-Sadag que la Caisse d'Epargne du canton de Genève a été approchée, précisément, par la fiduciaire chargée du contrôle des comptes, pour examiner les solutions qui pouvaient et qui devaient être prises d'urgence. C'est ainsi que la Banque cantonale, nouvellement constituée, a décidé de procéder à la recapitalisation de Roto-Sadag de façon à permettre de ramener le ratio existant entre le capital de la société et l'état de ses dettes à un niveau acceptable au regard des normes du code des obligations.
Dans ce contexte, qu'il me soit très clairement permis de vous dire, Monsieur le député, que l'intervention de la Caisse d'Epargne, désormais Banque cantonale, loin d'avoir conduit au licenciement d'un certain nombre d'employés, a permis de sauvegarder nonante emplois. Sans cette intervention Roto-Sadag se serait ni plus ni moins retrouvée en faillite immédiatement, à teneur de l'application impérative des dispositions du code des obligations. Un plan social doit également être mis sur pied par l'intermédiaire de la Banque cantonale, tout en respectant les conventions collectives USL-SLP, et ce malgré la situation extrêmement préoccupante de l'entreprise.
La Banque cantonale, sur la base de ce que nous connaissons - mais nous ne connaissons pas tout, puisque certaines interventions relèvent du secret bancaire - a agi dans cette affaire d'une manière irréprochable. On peut au contraire se féliciter de son intervention sans laquelle Roto-Sadag serait une entreprise morte nous laissant cent quinze employés sur les bras. Celle-ci a permis de sauver nonante emplois sur la base d'un plan social qui permettra probablement de sauver la substance de cette entreprise, dont les compétences sont incontestables.
Je vous signale enfin que j'ai reçu, au tout au début du mois de janvier, les délégués du Syndicat du livre et du papier ainsi que ceux de l'Union suisse des lithographes pour faire le point avec eux et leur faire part de l'état actuel de mes connaissances du dossier et des informations obtenues de la Banque cantonale de façon que la partie syndicale ait une vue claire de la situation.
Voilà, Monsieur le député, les quelques informations que je pouvais vous donner en réponse à votre interpellation.
L'interpellation est close.
Mme Claire Torracinta-Pache (S). Le 23 mars 1993 était inauguré à Genève l'atelier de formation continue, fruit d'une heureuse collaboration entre l'Université ouvrière de Genève et la Fédération des syndicats patronaux. Inspiré d'une réalisation neuchâteloise, fonctionnant à entière satisfaction et répondant à un réel besoin, l'atelier propose des cours de remise à niveau de culture générale. Il vise principalement à combler des lacunes de base en français et mathématiques tout en initiant à l'informatique, par l'utilisation de didacticiels. L'atelier s'adresse aux personnes ayant besoin d'une formation complémentaire pour atteindre le niveau de fin de scolarité obligatoire, leur permettant ainsi l'accès à une formation plus poussée ou à un emploi.
La priorité est donnée aux chômeurs et le financement des cours est alors pris en charge par l'assurance-chômage après contrôle de l'office cantonal de l'emploi. Les responsables de cet office - il est utile de le rappeler - se félicitèrent à l'époque de la création de ce nouvel outil de lutte contre le chômage, tout en lui prédisant un succès immédiat. Or, dix mois plus tard, force est de constater que ce n'est pas le cas. Prévu pour accueillir une vingtaine d'étudiants par jour, l'atelier n'a jamais fait le plein et il n'en restait plus que deux à la fin de l'automne, alors qu'il est évident que, sur les 16 000 chômeurs du canton, des centaines d'entre eux auraient besoin de ce type de cours.
L'information sur l'atelier est donnée par l'office cantonal de l'emploi, par l'office d'orientation et de formation professionnelle, les syndicats, l'Université ouvrière de Genève et la presse. Les candidats intéressés remplissent une demande à l'atelier qui leur fait passer des tests et fixe avec eux le programme de leur formation. Munis de cette inscription, ils se rendent ensuite à l'office cantonal de l'emploi qui donne son accord ou non au projet. Hélas, l'office, qui devrait être le premier pourvoyeur d'élèves, octroie d'une manière de plus en plus restrictive son accord à ce type de formation. Jusqu'au mois de septembre, pas de problème, les demandes sont presque toutes acceptées. Mais, dès la rentrée, les refus se succèdent et les raisons invoquées apparaissent arbitraires aux yeux des responsables de l'atelier. Il faut préciser que, depuis le début, ce dernier a eu trois interlocuteurs successifs à l'office cantonal de l'emploi. Actuellement il s'agit de la personne chargée des cas dits «difficiles». On peut, à ce propos, s'étonner de l'amalgame fait entre les personnes désireuses d'améliorer leurs connaissances en français et en mathématiques et les cas dits «difficiles». Or, sans une ferme volonté de l'office cantonal de l'emploi d'utiliser les fonds à disposition pour permettre aux chômeurs d'améliorer leurs connaissances de base indispensables à une formation ultérieure, l'atelier ne se remplira pas.
Ces considérations m'amènent à poser au Conseil d'Etat les questions suivantes :
Comment l'office cantonal de l'emploi diffuse-t-il l'information sur les cours de formation proposés aux chômeurs ?
Y a-t-il une centralisation et une coordination des renseignements utiles en la matière, qu'ils proviennent du secteur public ou d'organismes privés, associations professionnelles, etc. ?
Quel est le parcours d'une offre de formation ?
Qui décide si tel ou tel chômeur peut bénéficier ou non d'un certain type de formation ?
Quels sont les paramètres financiers pris en compte pour accepter ou refuser un cours ?
Envisage-t-on une évaluation a posteriori d'une formation accordée ?
Y a-t-il une différence entre placeurs et conseillers en recyclage ?
Quel est leur nombre, leur formation, leur rôle, leur tâche ?
Enfin, les ressources de l'atelier étant manifestement sous-employées, ne faudrait-il pas mener une réflexion sur la possibilité de l'ouvrir à un plus large public et sur les possibilités de financement y relatives ?
En conclusion, j'ajouterai que si je fonde cette interpellation sur le cas de l'atelier de formation continue, d'autres prestataires de cours évoquent les mêmes questions. Je vous remercie par avance, Monsieur le conseiller d'Etat, des réponses que vous voudrez bien me donner.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. L'interpellation de Mme Claire Torracinta-Pache pose le problème du fonctionnement du centre de formation continue des travailleurs et des relations qui existent entre celui-ci et l'office cantonal de l'emploi, plus particulièrement, même si ce centre est en relation avec d'autres institutions publiques ou privées. Il est vrai que le centre de formation continue des travailleurs, créé de concert par l'Université ouvrière de Genève et la Fédération des syndicats patronaux, est un instrument destiné à répondre d'une manière générale aux personnes qui ont besoin d'obtenir un niveau de fin de scolarité obligatoire. L'objectif du centre de formation continue est de favoriser l'accès à une formation professionnelle ou à un emploi.
Je suis d'accord avec vous, Madame Torracinta-Pache, sur l'ambiguïté quant à la localisation d'une partie de la demande à l'office cantonal de l'emploi auprès de la personne chargée des cas dits «difficiles». Cela ne donne pas une bonne image et nous allons y remédier. Nous l'avons d'ailleurs déjà fait sur la base d'indications que je vous donnerai dans un instant. Ce niveau de formation s'adresse, en particulier, à une population relativement peu scolarisée et qui est réunie sous le label effectivement peu heureux de «cas difficiles».
Les conseillères et conseillers en placement sont parfaitement informés des prestations du centre et, sur la base de ce qui m'a été dit, n'hésitent pas à en proposer le bénéfice lorsqu'il leur semble que le besoin s'en fait sentir. Selon les personnes questionnées à l'office de l'emploi, toutes les demandes, qui se justifient objectivement au regard des dispositions applicables en matière de lois fédérales sur l'assurance-chômage, ont été agréées.
Je tiens à vous indiquer que je ne me suis pas satisfait de cette seule réponse. En effet, j'avais effectivement été interpellé par des représentants de syndicats sur le fonctionnement du centre et, en particulier, sur le fait qu'il n'avait probablement pas le succès qu'on attendait. J'ai donc demandé que ce sujet soit approfondi à l'office cantonal de l'emploi, à la fin de l'année dernière. Je peux vous dire que l'office cantonal de l'emploi a été chargé d'assurer une meilleure coordination avec le centre de formation continue. Pas plus tard que le 19 janvier dernier, les chefs de section du service de placement, les conseillères et conseillers en placement et en recyclage - c'est-à-dire tout le personnel chargé de ce type de prestations - ont passé un après-midi entier au centre de formation continue des travailleurs pour être mieux informés sur les prestations qu'il offre. Le but était de les sensibiliser à cet outil de travail à disposition pour qu'ils puissent mieux l'utiliser. Je réponds donc ainsi à l'une de vos préoccupations.
Par ailleurs, j'ai demandé que l'information sur les prestations du centre soit améliorée. C'est ainsi que, désormais, l'office cantonal de l'emploi tient systématiquement à disposition des demandeurs d'emploi, tant dans ses locaux du Glacis-de-Rive que dans ses différentes agences, l'ensemble du matériel édité par le centre de formation continue des travailleurs.
J'aimerais tout de même que vous sachiez, Madame la députée, que l'office cantonal de l'emploi n'a évidemment pas le pouvoir de contraindre des personnes, qui pourraient en tirer le plus grand profit, à suivre les cours en question. Cela limite donc cette action.
Vous vous demandez de quelle manière on pourrait mieux utiliser les prestations de l'atelier de formation continue et vous suggérez de mener une réflexion sur la possibilité d'ouvrir ce centre à un plus large public. C'est une question qui peut se poser. J'estime qu'il ne nous appartient pas directement d'y répondre. Nous voulons bien le faire en concertation avec le centre de formation continue, mais la réponse appartient d'abord à ce dernier. Vous devez être conscients que, dans le contexte actuel du chômage et du nombre important de demandeurs d'emploi, beaucoup de prestataires de formation ou de perfectionnement professionnel, à quelque titre que ce soit, s'adressent à l'office cantonal de l'emploi pour bénéficier de l'envoi de demandeurs d'emploi, subvention à la clé. Vulgairement dit, il y a un «fromage» ! D'aucuns savent où il se trouve ! Je ne porte pas un jugement de valeur sur le centre de formation continue ! J'ai moi-même participé à son inauguration et j'estime que c'est un instrument valable que nous devons privilégier et mieux utiliser.
Dans ce contexte - en réponse à l'une de vos interventions - je vous indique que la commission de réinsertion professionnelle a précisément pour objectif, avec les partenaires sociaux - l'office cantonal de l'emploi et l'office d'orientation et de formation professionnelle - de procéder à une évaluation de la qualité des cours et des prestations de perfectionnement professionnel qui sont offerts. Elle va également être chargée de procéder, de manière beaucoup plus systématique, à une évaluation suivie des prestations après qu'elles ont été données, afin de contrôler dans le temps l'adéquation de la justification d'une subvention accordée avec le but pour lequel elle est effectivement accordée. M. Bernard Gabioud, qui s'occupe maintenant de ce secteur, a organisé un programme de travail avec les partenaires sociaux. La prochaine réunion du conseil de surveillance du marché de l'emploi aura lieu la semaine prochaine et nous allons précisément mettre en place les structures opérationnelles permettant d'assurer un nettement meilleur suivi de l'ensemble des cours dispensés.
Madame la députée, je réponds globalement, de la façon suivante, à votre interpellation.
L'atelier de formation continue des travailleurs est un instrument valable, qui n'a probablement pas été utilisé comme il aurait dû l'être. Les instructions nécessaires ont été données pour y remédier en organisant un meilleur contact entre le placement, les conseillers en recyclage et ledit atelier et en organisant également un meilleur suivi de l'ensemble des prestations des écoles et autres prestataires de cours de cette nature, en particulier avec l'atelier de formation continue.
Mme Claire Torracinta-Pache (S). M. Maitre a répondu partiellement à quelques-unes de mes questions. Je reviens donc sur certaines de celles-ci.
Vous me dites, Monsieur le président, que l'on va améliorer l'information sur les cours. J'en suis ravie ! Mais s'il s'agit simplement d'afficher côte à côte les offres de cours dispensés à Genève, cela me semble insuffisant ! J'aimerais donc bien avoir des précisions sur la manière d'obtenir une meilleure information pour diffuser ces cours.
Je vous ai également demandé le nombre des placeurs et des conseillers en recyclage, s'il y avait une différence entre eux et quelle était leur formation. Ces questions n'ont pas obtenu de réponse !
Vous me dites que l'on ne peut pas forcer un chômeur à prendre un cours; bien entendu ! Mais mon interpellation va en sens contraire !
J'aimerais savoir quels ont été les vrais motifs de l'office cantonal de l'emploi pour refuser les cours dispensés par l'atelier de formation continue ? Bien entendu, je ne vous donnerai pas de noms ! On a refusé, par exemple, à une jeune personne le cours de perfectionnement en raison du manque d'emploi dans les bureaux. Cette personne est vendeuse et souhaitait se recycler pour devenir employée de bureau, mais il lui manquait des bases en français et en mathématiques. Je trouve ce motif un peu court !
Autre exemple de refus qui touche aux paramètres financiers. Je l'ai évoqué, mais vous n'y avez pas répondu. Une technicienne en bâtiment qui voulait se recycler comme agente de voyage s'est entendu répondre qu'elle n'avait pas cotisé assez longtemps et qu'on lui avait déjà financé un cours. J'aimerais donc savoir si l'on peut bénéficier des cours une seule ou plusieurs fois.
Voici un autre exemple qui me semble encore plus curieux ! L'office cantonal de l'emploi a répondu à une caissière de cafétéria, qui avait le projet de devenir vendeuse-caissière pour améliorer sa situation professionnelle, que les caissières étaient formées sur place par les entreprises et que ce n'était pas le moment de la couper du monde du travail.
Je me demande donc si les personnes qui reçoivent les demandes de cours sont réellement formées pour cela et si elles sont capables de discerner ce qui est nécessaire ou non à la personne qui sollicite ces cours.
Je vous signale que j'ai posé des questions non seulement à l'atelier de formation continue, mais aussi aux Cours commerciaux. Les réponses font invariablement état que quelque chose ne va pas tant au niveau de l'orientation donnée aux chômeurs qu'au niveau du financement. Je le répète, j'ignore comment cela se passe au niveau du financement des cours. Peut-on bénéficier plusieurs fois d'un tel financement ? J'aimerais vous entendre à ce sujet, Monsieur le conseiller d'Etat, cette fois ou dans une autre séance, si vous le préférez.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Je vais tenter d'apporter un certain nombre de renseignements complémentaires à vos questions.
En ce qui concerne l'amélioration de l'information, il est évident qu'il ne suffit pas de mettre des prospectus à disposition. Il s'agit de faire prendre conscience aux placeurs et aux conseillers en recyclage de l'intérêt de conduire les demandeurs d'emploi aux cours appropriés à leur cas pour améliorer leurs chances de placement. Les placeurs, dans ce contexte, ont la mission de concourir à ce placement. Les conseillers en recyclage sont, en règle générale, mis en oeuvre par les placeurs qui constatent que des éléments supplémentaires dans le cursus de formation seraient nécessaires pour améliorer les chances de placement. A ce moment-là, les conseillers en recyclage peuvent, sur la base de l'examen du dossier de l'intéressé et d'un contact individuel avec cette personne, juger des cours les plus appropriés.
Vous évoquez un certain nombre d'exemples, Madame. Ces exemples anonymes sont utiles et importants ! Je souhaiterais, si vous le voulez bien, que vous me donniez les noms des personnes en question en aparté, car pour pouvoir remédier à cet état de choses il faut reposer la réflexion sur des cas concrets. Sur quelques cas qui ne vont pas, il y en a des centaines qui vont bien ! Il est intéressant pour nous d'avoir des dossiers concrets pour pouvoir vérifier si les réponses qui ont été données ne sont pas adéquates et en tirer des conclusions.
J'aimerais toutefois en savoir plus, car d'autres éléments entrent peut-être en ligne de compte, éléments que vous ne connaissez pas mais que les placeurs ou conseillers en recyclage concernés peuvent m'indiquer. Leur appréciation peut diverger. Quoi qu'il en soit, je constate qu'il y a de toute façon un problème de communication, parce que l'on a affaire à des gens qui sont déçus par la réponse qu'on leur a donnée. Cela ne veut pas dire que l'on doit nécessairement satisfaire tout le monde lorsque les conditions ne sont pas remplies, mais on doit au moins leur donner des explications complètes et claires. Je désirerais donc davantage de renseignements pour m'aider à approfondir la question sur les dossier que vous avez évoqués, pour savoir s'il y a lieu de corriger ou de rattraper ce qui peut l'être.
Par ailleurs, je suis en train de réexaminer tout le fonctionnement du service de placement, car le développement du nombre de chômeurs impose de nouvelles méthodes de travail et une nouvelle approche. Nous ne pouvons pas considérer que le service de placement de l'office cantonal de l'emploi possède une structure établie une fois pour toutes. Elle évolue en fonction du nombre de chômeurs, hélas en augmentation. La nature des demandes auxquelles nous devons faire face est elle aussi qualitativement différente. Il suffit de se référer, en particulier, au chômage de longue durée. L'intervention de tout à l'heure l'a bien fait comprendre.
Voilà les informations complémentaires que je puis vous donner à ce stade. Je vous donnerai des renseignements supplémentaires pour répondre en détail à vos questions. De votre côté, essayez de me donner des indications plus précises. Je les recevrai volontiers.
L'interpellation est close.
Le président. Nous saluons à la tribune du public la présence d'une classe de sommeliers et de boulangers, dans le cadre du cours de civisme du centre d'enseignement professionnel pour l'industrie et l'artisanat, sous la conduite de M. Roth.
Nous saluons également la présence d'élèves d'une classe d'éducation physique du cycle d'orientation de Cayla, sous la conduite de Mme Pini.
Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). Pardonnez-moi, Monsieur le président du département, de vous interpeller sur un certain nombre de points dont vous venez de dire que vous vous occupiez activement !
L'office cantonal de l'emploi traite, on vient de le dire, tous les mois plusieurs centaines de ces dossiers qui affectent la vie, le destin d'une femme, d'un homme, de leur famille. On a parlé de 16 310 chômeurs pour la fin de l'année 1992. On ne sait pas combien se trouvent en fin de droit pour les raisons que l'on vient d'évoquer.
Est-ce en raison de l'insuffisance du personnel tant en nombre qu'en compétence que cet office fonctionne mal ? Pour traiter chacun des dossiers, il utilise des délais exagérément longs. De plus, l'accueil des chômeurs est souvent déplorable. Je suis favorable à une étude portant sur l'expérience des demandeurs d'emploi et des chômeurs en fin de droit demandeurs de placement temporaire. Bien sûr, les déclarations de ces personnes sont souvent empreintes de la détresse ou de l'angoisse que suscite leur situation. Elles peuvent être exagérées. Il serait également intéressant de connaître l'expérience des employeurs qui se sont impatientés pendant des mois avant d'obtenir une réponse à leur demande d'emploi temporaire.
Je traiterai ici de trois points seulement, particulièrement importants.
Le premier concerne, comme l'a évoqué ma collègue Claire Torracinta-Pache, la formation spécifique des placeurs et des placeuses. Selon les témoignages recueillis, il arrive très souvent que ces derniers n'ont aucune idée de la qualification, de l'expérience professionnelle, des capacités des chômeurs et des chômeuses à placer. Ils n'engagent aucune démarche ni ne disposent d'aucune méthode spécifique pour cerner ces qualifications. Il y a là manifestement là un manque de compétence professionnelle pour orienter les interlocuteurs. Il en résulte très souvent des propositions de placement - j'ai recueilli toute une série de témoignages de chômeurs en fin de droit - quasi au hasard, souvent en contradiction avec tout bon sens ! On a par exemple proposé à un licencié universitaire de travailler en cuisine, alors qu'il existe certainement des places dans des bibliothèques ou dans des administrations publiques où ses compétences pourraient être plus utilement employées.
Le deuxième problème concerne tout simplement les caractéristiques de l'accueil. L'accueil des chômeurs et chômeuses qui arrivent à l'office cantonal de l'emploi est souvent de nature plus répressif qu'accueillant. Il est certainement indigne d'un service public. Les citoyens et citoyennes au chômage sont souvent traités comme des importuns - surtout lorsqu'on les voit à plusieurs reprises - comme des assistés infantilisés, voire comme des malfaiteurs en puissance !
Je donne un exemple qui corrobore celui de Mme Torracinta-Pache. Lorsque les chômeurs se pressent devant les murs où sont affichées les indications de placement, de cours, etc., quelqu'un les fait reculer, mettre en rang ou asseoir, car ils font du bruit en discutant. On les traite comme à l'école enfantine ! C'est extrêmement vexatoire pour un certain nombre de personnes qui en sont à leur Xème démarche pour trouver un emploi. L'office de l'emploi n'a pas une fonction punitive, mais une fonction d'accueil, de conseil et d'orientation. Il faudrait que les chômeurs et les chômeuses puissent s'exprimer, discuter, trouver un accueil humain et un appui qualifié à l'office. Je le sais, la tâche est très difficile, mais cette difficulté est le propre de toute activité de soutien social aux personnes dans la difficulté et la détresse.
Je demande donc au Conseil d'Etat, et plus précisément au conseiller d'Etat Jean-Philippe Maitre, de poursuivre ses efforts de réforme de ce service le plus rapidement possible, puisque, visiblement, il ne fonctionne ni à satisfaction des demandeurs d'emploi ni à satisfaction des employeurs potentiels. Lorsque ces derniers demandent une secrétaire, ils reçoivent successivement trois comptables ! Les personnes qui leur répondent au téléphone sont manifestement peu qualifiées et disent qu'elles n'ont personne à placer ! Il est souvent arrivé que les employeurs potentiels repèrent, par eux-mêmes, les chômeurs susceptibles de correspondre à leurs besoins, s'adressant ensuite à l'office cantonal de l'emploi pour que le dossier soit orienté dans leur direction..
Le troisième problème à résoudre est un peu différent de celui que je viens d'évoquer, mais il émarge à celui évoqué par Mme Claire Torracinta-Pache. La réglementation actuelle de l'assurance-chômage ne permet pas aux chômeurs et chômeuses de se réorienter véritablement dans une autre profession. Les cours de plus d'un an ne sont pas pris en charge. Les reconversions ne sont pas financées. Le chômeur admis dans une école professionnelle de plus d'un an perd toutes ses allocations. L'OCE verse quatre cents allocations, plus cinquante allocations pour terminer un cours.
Il faudrait donc permettre des reconversions pour des personnes issues de secteurs professionnels réellement bouchés dans des métiers offrant des possibilités de travail à long terme. Je pense au social, aux professions de la santé, par exemple. Les textes de lois actuels sont suffisamment souples pour pouvoir mettre en place des procédures de reconversion courtes, mais elles excluent les reconversions à long terme, celles de plus d'une année. J'aimerais donc qu'on examine cette proposition pour permettre à certains chômeurs et chômeuses de suivre une formation de base de longue durée tout en continuant à percevoir les allocations de chômage.
Je me réserve, le cas échéant, de revenir sur ce dernier sujet à travers une motion.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Dans votre interpellation, Madame la députée, vous soulevez un certain nombre de points importants. Votre conclusion globale et amalgamée est parfaitement injuste ! Prétendre de façon générale que les collaborateurs de l'office cantonal de l'emploi ne sont pas compétents et que rien ne marche me paraît tout à fait incorrect ! Effectivement, les procédures d'un certain nombre de points doivent être améliorées, cela ne fait pas l'ombre d'un doute ! Je m'emploie non pas à couvrir les défaillances, mais plutôt à les résoudre. Je trouve injuste de tirer des conclusions très générales qui pourraient être démotivantes si, par ailleurs, les employés de l'office cantonal de l'emploi n'en n'avaient pas déjà vu d'autres !
A cet égard, probablement qu'un séjour de votre part à la commission de l'économie du Grand Conseil serait instructif. En effet, celles et ceux parmi vos collègues qui siègent dans cette commission ont eu l'occasion au cours de ces dernières séances de prendre contact de manière plus directe, à ma demande, avec l'office cantonal de l'emploi pour organiser un certain nombre de visites dans des agences, pour avoir des renseignements sur ce qui se fait, sur ce qui se passe sur les forces, mais aussi, de manière tout à fait lucide, sur les faiblesses de la structure actuelle, et en sont revenus avec des conclusions singulièrement plus nuancées - c'est un euphémisme - que les vôtres !
En réalité, la plupart des membres de la commission de l'économie du Grand Conseil, vos collègues, ont constaté qu'il y avait un certain nombre de choses qui devaient être améliorées à l'office cantonal de l'emploi - c'est incontestable - mais qu'il y avait également un degré d'engagement du personnel, des procédures, des prestations, qui étaient probablement exemplaires et uniques en Suisse.
Je vous en prie, afin de progresser tous ensemble, évitons l'amalgame parce qu'il est particulièrement démotivant, et attaquons-nous aux amélio-rations à apporter dans certains secteurs !
La caisse cantonale genevoise de chômage est considérée comme l'une des caisses les plus performantes en Suisse. A l'époque, il y a environ deux ans, il y a eu des problèmes que nous avons corrigés et cette caisse est actuellement à jour. J'aimerais bien, Madame - je le dis sans polémique - que toutes les caisses syndicales soient à l'image de la caisse cantonale genevoise d'assurance-chômage. Je n'ai jamais entendu vos milieux dénigrer le fonctionnement de certaines formations syndicales !
Prenez le service de la main-d'oeuvre étrangère. Il est exemplaire ! Tous les partenaires sociaux s'en félicitent. Prenez le régime des occupations temporaires. Il fonctionne parfaitement !
A cet égard, Madame, vous avez évoqué, s'agissant des occupations temporaires, le fait que certaines personnes sollicitées pour des occupations temporaires étaient envoyées à des postes qui ne correspondaient pas nécessairement à leurs qualifications. C'est un problème qui est dans la nature des choses. Nous avons effectivement des occupations temporaires à proposer qui ne sont pas forcément en adéquation avec le profil professionnel de la personne concernée. Mais vaut-il mieux proposer à quelqu'un un travail aussi près que possible de son profil professionnel ou ne rien lui proposer du tout et l'envoyer à l'Hospice général ? Poser la question, c'est y répondre ! Il est vrai que nous devons parfois assumer des occupations qui ne correspondent pas toujours au profil professionnel de la personne, mais c'est mieux que rien ! De ce point de vue, le système mis en place par le législateur genevois est bon.
D'ailleurs, je vais vous donner un exemple tout à fait concret. Nous avons dû accueillir, il y a quelque temps, au département de l'économie publique, un architecte en occupation temporaire pour un travail tout à fait ciblé dans le cadre de la promotion économique. Dieu sait si les profils professionnels sont pourtant différents ! Eh bien, cette personne a tellement été emballée par le travail qui lui a été demandé - il s'agissait de creuser un certain nombre de comparaisons internationales sur les coûts de certaines prestations économiques à Genève - et son bagage professionnel s'est tellement enrichi qu'elle a pu retrouver un emploi dans un secteur un peu différent, toujours lié à l'industrie du bâtiment, mais plus en rapport avec la gestion. Cette occupation temporaire lui a ouvert de nouveaux horizons !
Les placeurs ont une tâche difficile. Madame, j'aimerais que vous soyez attentive à cette constatation de base qui est, hélas, incontournable : vous pourriez avoir les meilleurs placeurs du monde - et je ne prétends pas qu'il n'y ait pas de progrès à faire dans ce domaine - vous ne feriez pas de miracle dès lors que vous n'avez, grosso modo, qu'une place de travail à offrir pour dix-huit à vingt chômeurs ! C'est la réalité des chiffres actuels entre le nombre de places vacantes et le nombre de demandeurs d'emploi. On ne peut pas faire de miracle, et je vous demande simplement d'avoir l'honnêteté de tenir compte de ces considérations.
Enfin, vous avez évoqué les questions relatives à la réglementation actuelle sur l'assurance-chômage et, notamment, sur les problèmes liés à la formation courte et au recyclage ciblé permis par le droit actuel. Il y a une lacune ! Le problème se situe au niveau du droit fédéral. Vous savez que ce problème est actuellement en cours d'examen, puisque dans la révision partielle de la loi fédérale sur l'assurance-chômage, qui est actuellement à l'examen devant la commission du Conseil des Etats, il est expressément proposé que, désormais, la loi fédérale sur l'assurance-chômage puisse financer des formations de base plus longues que les simples perfectionnements professionnels. Le débat est donc déjà en cours et votre préoccupation à cet égard est justifiée. Je serais tenté de dire que c'est l'une des rares propositions vraiment satisfaisantes de la nouvelle loi fédérale sur l'assurance-chômage, dont la modification est proposée actuellement aux Chambres fédérales. Nous espérons voir l'aboutissement de cette proposition le plus rapidement possible.
Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). Merci, Monsieur le conseiller d'Etat, de vos réponses.
J'ai insisté au début de mon interpellation pour dire que l'expérience dont je faisais part était fondée sur des témoignages de chômeurs et de demandeurs potentiels, en soulignant la possible exagération de leurs propos. Je n'ai pas enquêté moi-même dans les offices de placement, dont je connais par ailleurs quelques-uns des placeurs et leur compétence. N'empêche que le sentiment général, très largement partagé - je l'ai dit, dans des situations de détresse et de difficulté, ce sentiment peut être exagéré - n'est pas bon !
C'est ce qui m'a amenée à dire qu'un dysfonctionnement général était à la base de ce mauvais sentiment. Je n'ai pas du tout critiqué toute la caisse cantonale. Les critiques portent toujours sur l'accueil, sur la formation spécifique et sur les compétences des orientateurs et des placeurs et placeuses. C'est un problème qui doit être saisi, car il est non seulement ressenti par les chômeurs et les chômeuses, mais encore davantage par les employeurs qui s'adressent à l'office cantonal pour avoir des chômeurs en fin de droit. Ils s'impatientent au bout de quelque temps, ils cherchent par eux-mêmes et ils trouvent presque toujours. Ils reviennent ensuite à l'office cantonal de l'emploi pour dire qu'ils ont trouvé la personne qu'il leur faut et qu'ils désirent obtenir son dossier. Ce n'est pas tout à fait normal ! Le mécontentement est général !
L'interpellation est close.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Je réponds de la manière suivante aux questions posées par M. Jean Spielmann.
Je me réfère, pour l'essentiel, à ce que j'ai dit au mois de décembre à l'occasion de l'interpellation de M. Spielmann sur le même sujet.
Y a-t-il des faits nouveaux ? Il a été allégué que Swissair chercherait à réaliser une opération semblable à celle réalisée à propos du service d'entretien des cabines pour le secteur d'entretien des véhicules. Les renseignements obtenus auprès de Swissair montrent que cette préoccupation est infondée. Je dois vous dire, cependant, qu'il y a un problème. On a reproché à Swissair - peut-être non sans pertinence - lors de la «privatisation», entre guillemets, ou lors de la délégation, pour être plus précis, de son service de nettoyage des cabines, d'avoir procédé de manière trop brutale et de ne pas avoir suffisamment informé le personnel. C'est peut-être vrai. Swissair y est allée de manière un peu rapide, mais peut-être était-ce nécessaire pour aboutir !
Maintenant, Swissair s'y prend à l'avance et informe le personnel de son intention de rationaliser le service d'entretien des véhicules; alors on lui impute des intentions qu'elle n'a pas ! En l'état actuel de mes informations, Swissair n'a pris aucune décision quant à une délégation à une entreprise tierce du service d'entretien des véhicules. Des études sont en cours pour rationaliser ce service. En effet, dans la nouvelle gestion de Swissair, ce service en tant que tel peut probablement dégager une meilleure rentabilité par quelques mesures de rationalisation. Je ne sais rien de plus pour l'instant, mais nous suivons ce dossier avec attention.
Vous avez parlé du problème de la convention collective, s'agissant de l'entreprise qui a bénéficié de la sous-traitance du nettoyage des cabines, l'entreprise Asco. Celle-ci n'est pas signataire de la convention collective qui a été passée avec l'Association genevoise des entreprises de nettoyage. Je tiens tout de même à vous dire qu'il y a un paradoxe. La réalité est un peu différente de ce que vous imaginez. Asco demande expressément à l'AGEN de pouvoir être signataire de la convention collective qui a été signée pour ce qui est de la partie syndicale par le SIT. Or, je crois savoir qu'il y a une certaine réticence de la part du SIT à admettre Asco au nombre des entreprises faisant partie de la convention collective, simplement parce que le personnel d'Asco n'est pas un personnel syndiqué SIT. Il est affilié à d'autres syndicats, en particulier la VPOD. Dans ce contexte, le SIT ne voit pas d'un très bon oeil cette espèce de concurrence qui vient s'introduire dans le secteur du nettoyage.
Je tiens également à vous dire que du côté patronal il y a une certaine résistance à ce que Asco entre dans la convention collective de l'AGEN pour la simple raison que les salaires de référence actuels sont, en règle générale, supérieurs aux salaires de base moyens de la convention collective. On a probablement un peu peur que la venue d'Asco dans la convention collective ait un effet d'aspirateur vers le haut d'une partie des salaires. Le problème ne vient donc pas d'Asco, il concerne plus particulièrement l'Association genevoise des entreprises de nettoyage et les partenaires à la convention collective, aussi bien sur le plan syndical que sur le plan patronal.
Les interpellations urgentes de M. Spielmann sont closes.
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 106 de la loi fédérale sur la circulation routière, du 19 décembre 1958;
vu l'ordonnance réglant l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière, du 27 octobre 1976;
vu les articles 101, 118, 119 et 122 de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847,
Décrète ce qui suit:
Article 1
Délégation
1 Le Conseil d'Etat peut déléguer à un organisme privé (ci-après le délégataire) l'ensemble des activités découlant de la législation internationale, fédérale et cantonale et relevant des domaines d'activité du service des automobiles et de la navigation (ci-après le service).
2 La délégation confère le droit et le devoir exclusifs d'exercer ces activités sur l'ensemble du territoire du canton.
3 Les conditions de la délégation ainsi que leurs modalités d'application sont stipulées dans un contrat de droit public avec le délégataire.
Art. 2
Conditions
de reprise
1 Le délégataire doit reprendre l'ensemble du personnel du service en fonction à la date de prise d'effet de la délégation.
2 L'article 24, alinéa 5 de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux n'est pas applicable.
3 Les membres du personnel du service en fonction à la date de prise d'effet de la délégation restent affiliés à la caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève (CIA).
4 L'Etat met à la disposition du délégataire, moyennant loyer, le patrimoine immobilier et mobilier utilisé par le service.
Art. 3
Délégataire
1 Le délégataire doit être un organisme de droit privé constitué selon les règles du droit suisse et ayant son siège à Genève.
2 Il doit veiller à ce que les membres de son personnel respectent les intérêts du délégant. En particulier, ils ne doivent pas solliciter ou accepter pour eux-mêmes ou pour autrui des dons ou d'autres avantages en raison de leur situation officielle déléguée. De même, ils sont tenus, même après la cessation des rapports de travail, de garder le secret envers quiconque sur les affaires dont ils ont eu connaissance.
Art. 4
Attribution
1 Le délégataire a en charge l'exécution, en son nom et pour le compte de l'Etat, des activités énoncées à l'article 1.
2 Le délégataire est investi du pouvoir de décision au sens de l'article 5 lettre g de la loi sur la procédure administrative, est réputé autorité administrative selon la teneur de son article 1 et acquiert le droit et le devoir d'exercer les charges et les compétences, objet de la délégation, pour le compte de l'Etat, afin d'assurer la continuité du service public.
3 Il ne peut exercer d'autres activités impliquant un conflit d'intérêts avec l'objet de la délégation.
Art. 5
Exercice de
la délégation
1 Le délégataire se conforme aux principes et règles du droit public dans ses rapports avec les citoyens.
2 Il doit appliquer le droit international, fédéral et cantonal, ainsi que les instructions données par le Conseil d'Etat et le département de justice et police et des transports.
3 Les décisions prises par le délégataire dans le cadre des compétences qui lui sont attribuées peuvent faire l'objet d'un recours au Tribunal administratif, sous réserve de celles devant être déférées au Département fédéral de justice et police ou à d'autres instances fédérales ou cantonales.
Art. 6
Financement
1 Le délégataire assume les dépenses de fonctionnement et les investissements nécessaires. Il perçoit les recettes correspondant à la contrepartie des prestations fournies.
2 La couverture financière des activités de la fourrière demeure à charge de l'Etat.
3 Le prix des prestations est fixé par tarif et actualisé par le Conseil d'Etat, en tenant notamment compte du maintien de l'équilibre financier du délégataire, des capacités de maîtrise des coûts et des possibilités de rationalisation.
Art. 7
Surveillance
1 Le délégataire est placé sous la surveillance du Conseil d'Etat.
2 Celui-ci doit contrôler que la tâche d'intérêt public est exercée effectivement et efficacement dans le respect des garanties dont jouissent les administrés.
3 Le délégataire doit notamment fournir au Conseil d'Etat toutes les informations requises en relation avec l'activité déléguée.
4 La Commission de contrôle de l'informatique de l'Etat exerce la surveillance sur les fichiers informatisés relatifs à la délégation, tenus par le délégataire.
Art. 8
Responsa-bilités
1 Le délégataire répond personnellement et exclusivement de ses dettes et engagements.
2 Dans l'exécution des tâches déléguées, il assume vis-à-vis des tiers la responsabilité de l'Etat et vis-à-vis de celui-ci celle découlant de la délégation.
Art. 9
Soumission à
d'autres lois
Le délégataire est soumis de plein droit aux lois sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985, et sur les informations traitées automatiquement par ordinateur, du 17 décembre 1981.
Art. 10
Durée et fin
de délégation
1 Sous réserve des clauses de dénonciation contractuelles, la délégation est accordée pour une durée déterminée, n'excédant pas 20 ans.
2 A l'échéance, une nouvelle adjudication de délégation doit être mise en soumission publique, conformément à l'article 11.
Art. 11
Soumission et
adjudication
1 La délégation fait l'objet d'une adjudication suite à une soumission publique.
2 L'avis d'ouverture d'une inscription a lieu par publication dans la Feuille d'avis officielle.
3 L'adjudication s'opère parmi les soumissionnaires qui remplissent les conditions fixées dans le cahier des charges en tenant compte en premier lieu des garanties d'efficacité, de solvabilité, d'indépendance et de correction en affaires.
Art. 12
Exécution
de la loi
1 Le Conseil d'Etat arrête les dispositions d'exécution de la présente loi.
2 Le Conseil d'Etat fixe par règlement les conditions et modalités particulières du transfert des activités et tâches, de la reprise du personnel, de la mise à disposition du patrimoine immobilier et mobilier, de l'exercice de la surveillance sur le délégataire et de la fixation et actualisation des prix des prestations.
Art. 13
Modification
à d'autres lois
(B 7 1)
1 La loi sur la responsabilité de l'Etat et des communes, du 24 février 1989, est modifiée comme suit:
Art. 7 (nouvelle teneur)
Organismes
délégataires,
corporations
et établissements
de droit public
Les dispositions de la présente loi sont applicables aux organismes privés au bénéfice d'une délégation d'exécution de tâches publiques ainsi qu'aux corporations et établissements de droit public dotés de la personnalité.
** *
(D 3 1)
2 La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit:
Art. 414 (nouveau)
Perception
L'impôt sur les véhicules à moteur et sur leurs remorques est fixé et perçu par le département de justice et police et des transports. Cette compétence peut être exercée par un organisme privé au bénéfice d'une délégation d'exécution de tâches publiques.
Art. 424, al. 1 (nouvelle teneur)
Dégrèvement
1 Dès que les plaques de contrôle sont déposées en mains de l'autorité compétente ou de son délégataire, l'impôt cesse d'être dû et le montant correspondant à la période non courue est restituée au détenteur.
Art. 429 (nouvelle teneur)
Non-paiement
de l'impôt
Le retrait du permis de circulation et des plaques de contrôle est ordonné lorsqu'à son échéance l'impôt n'a pas été payé. Au besoin, la police saisit les permis et plaques sans préjudice des sanctions pénales prévues par la loi.
Art. 433 A, al. 2 (nouvelle teneur)
2 Lorsque le permis de navigation n'est pas restitué avant cette date à l'autorité ou à son délégataire, l'impôt est dû pour l'année entière.
Art. 433 B (nouveau)
Perception
1 L'impôt sur les bateaux est fixé et perçu par le département de justice et police et des transports.
2 Cette compétence peut être exercée par un organisme privé au bénéfice d'une délégation d'exécution de tâches publiques.
Art. 436 (nouvelle teneur)
Non-paiement
de l'impôt
Le retrait du permis de navigation est ordonné lorsqu'à son échéance l'impôt n'a pas été payé. Au besoin la police saisit le permis sans préjudice des sanctions prévues par la loi.
Art. 437 A, al. 2 (nouvelle teneur)
2 Le Conseil d'Etat édicte les prescriptions nécessaires à l'exécution du présent titre. Il fixe le tarif des émoluments perçus par le département de justice et police et des transports ou son délégataire pour les opérations nécessitées par le contrôle des bateaux et celui de la navigation.
** * *
(E 3,5 1)
3 La loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits, du 29 mai 1970, est modifié comme suit:
Art. 8, al. 1, 6° bis (nouveau)
6° bis
décisions du délégataire en application de la loi autorisant la délégation à un organisme privé des tâches du service des automobiles et de la navigation (B 4 0,5, art. 5, al. 3);
Art. 8, al. 1, 42° et 44° (nouvelle teneur)
42°
décisions du département de justice et police et des transports ou de l'organisme délégataire prises en application du chapitre III de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière (H 1 0,5, art. 18);
44°
décisions refusant ou retirant un permis de conduire ou de navigation du département de justice et police et des transports ou d'un organisme privé au bénéfice d'une délégation d'exécution de tâches publiques (H 2 1, art. 23, al. 1 et art. 51, lettre a);
** * *
(F 1 13)
4 La loi sur les renseignements et les dossiers de police et la délivrance de certificats de bonne vie et moeurs, du 29 septembre 1977, est modifiée comme suit:
Art. 4, al. 1, lettre d (abrogée)
** * *
(H 1 0,5)
5 La loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière, du 18 décembre 1987, est modifiée comme suit:
Art. 9, 2e phrase (nouvelle)
Cette compétence peut être exercée par un organisme privé au bénéfice d'une délégation d'exécution de tâches publiques.
Art. 18 (nouvelle teneur)
Au Tribunal
administratif
Les décisions du département de justice et police et des transports ou d'un organisme privé au bénéfice d'une délégation d'exécution de tâches publique prises en application du chapitre 3 de la présente loi peuvent faire l'objet d'un recours au Tribunal administratif sous réserve de celles devant être déférées au Département fédéral de justice et police.
** * *
(H 2 1)
6 La loi sur la navigation dans les eaux genevoises, du 26 novembre 1987, est modifiée comme suit:
CHAPITRE V
SECTION 3 (nouvelle)
Art. 26 A (nouveau)
Délégation
La compétence pour l'exécution des activités des articles 21 à 27 peut être exercée par un organisme privé au bénéfice d'une délégation d'exécution de tâches publiques.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Nous avons l'honneur de vous présenter ci-après l'exposé des motifs à l'appui du projet de loi autorisant la délégation des tâches, le transfert du personnel et la mise à disposition des patrimoines immobiliers et mobiliers du service des automobiles et de la navigation à une entreprise privée.
I. Vers la modernisation du service public
La modernisation de l'Etat doit être une des priorités de cette législature. En effet, les déficits catastrophiques, la stagnation des recettes fiscales sont des problèmes autant structurels que conjoncturels. L'impasse budgétaire ne peut donc être résolue sans réformes de grande ampleur et fixation de stratégies nouvelles.
L'Etat assume des tâches de natures diverses, qu'elles soient de prestations, d'autorité, de sécurité, à caractère social ou de formation. Moderniser l'Etat consiste donc à chercher à ce que les tâches de régulation et de protection sociale que la collectivité s'est fixées continuent à être assumées et le soient, si possible, plus efficacement. Le train de vie de l'Etat dépassant, chacun le sait, le cadre de ses revenus permanents, une hiérarchisation des activités de l'Etat, ainsi qu'une évalution de leur raison d'être (obligation légale, politique générale, etc.) doit aujourd'hui être réalisée.
Dans ce sens, l'étatisation d'activités relevant pour l'essentiel de la production de biens et de services peut légitimement être analysée en termes d'opportunité et de nécessité.
Car s'il est parfaitement normal que les processus de décisions, de contrôles et de financement s'appliquent à la fonction de régulation de l'Etat, ils ne sont pas pour autant garants d'un meilleur service à la clientèle en ce qui concerne les activités de production de services.
Des solutions comme la sous-traitance, la décentralisation administrative ou le partenariat public/privé offrent des possibilités à exploiter pour des services dont les mécanismes traditionnels de fonctionnement rendent de plus en plus difficile la satisfaction des nouvelles exigences des usagers dans le domaine du service public.
II. Un projet pour le service des automobiles et de la navigation
Le projet de loi vise la délégation des tâches d'un service public et non la privatisation desdites tâches.
En d'autres termes, il n'est pas question que l'Etat cesse d'exercer les activités en abandonnant son monopole de droit et en les livrant aux seules règles du marché de l'économie libérale.
En effet, les expériences hasardeuses dans le monde visant à libéraliser le contrôle technique des automobiles par exemple ont toutes échoué ou sont en cours de déliquescence. A titre d'exemple et selon toute vraisemblance, un centre de contrôle technique sur quatre fermera ses portes en France dans les douze prochains mois, faute de résultats financiers suffisants.
Sans préjudice de surcroît de l'inconstitutionnalité et de l'illégalité d'un tel processus, la privatisation aux termes de la définition qui précède apparaît ainsi à l'évidence impraticable, contraire à l'efficacité et à la qualité recherchée, ainsi qu'en contradiction avec les aspirations légitimes des citoyens en matière de sécurité routière, d'intérêt collectif et d'égalité de traitement.
La délégation en revanche est l'acte par lequel l'Etat accorde à un tiers le pouvoir d'exercer une activité qui lui est dévolue. Le tiers assure l'accomplissement de la tâche d'intérêt public sous la surveillance de l'Etat. Le respect des contraintes imposées par la collectivité est ainsi, contrairement à la privatisation, assuré dans un tel cas. Le recours à un organisme privé offre en plus une flexibilité plus grande, une gestion plus près des moyens mis en oeuvre, une efficacité accrue et des possibilités de financement par l'exploitation privée elle-même.
III. Objet de la délégation
De nombreux Etats en Europe (Allemagne, Espagne, etc.) confèrent déjà à des sociétés privées le contrôle technique des véhicules, voire plus généralement des activités dans le domaine de la sécurité routière, de la sécurité aérienne et de la protection de l'environnement.
Le projet soumis consiste à user du pouvoir d'organisation dont jouissent les cantons pour l'application du droit fédéral sur la circulation routière, en vertu de leur autonomie cantonale, en transférant à un organisme de droit privé les activités assumées jusqu'à présent par le service des automobiles et de la navigation.
Le projet s'étend à l'exercice de l'ensemble des activités considérées comme un tout homogène et assumées par le service des automobiles et de la navigation. L'observation de la mission, des activités et tâches du service des automobiles et de la navigation a en effet permis de considérer que, si l'ensemble de son domaine de compétences pouvait être confié à une entreprise privée dans le respect des intérêts généraux de l'Etat et de ceux des particuliers, ce domaine de compétences devait néanmoins rester homogène pour garantir une efficacité optimale et éviter toute dispersion. Une délégation parcellaire ou à plusieurs entreprises privées en marché concurrentiel serait incompatible avec la bonne exécution de la mission à remplir. C'est la raison pour laquelle la délégation est revêtue d'un caractère total et exclusif, en ce sens qu'elle ne peut être accordée qu'à une seule entreprise privée pour la durée de la délégation.
Sont concernés par la délégation, et pour l'essentiel, la gestion administrative de l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière, les mesures administratives, la facturation et l'encaissement des impôts sur les véhicules à moteur, les examens théoriques et pratiques de conduite, les contrôles techniques des véhicules, la fourrière, la gestion administrative de l'admission des personnes et des bateaux à la navigation, de même que les tâches de logistique relatives à l'ensemble de ces domaines d'activités.
IV. Constitutionnalité et légalité de la délégation
Trois jurisconsultes ont examiné la conformité d'une telle délégation sous l'angle du droit public, fédéral et cantonal: le professeur Thomas Fleiner, directeur de l'Institut du fédéralisme de l'université de Fribourg, M. J. Voyame, avocat et ancien directeur de l'Office fédéral de la justice, et M. P.-A. Manfrini, docteur en droit et avocat au barreau de Genève.
Tous trois parviennent à la conclusion que, pour autant que le canton puisse assurer que l'entreprise privée fera une bonne exécution du droit international, fédéral et cantonal, dans le secteur de la circulation et de la navigation, une délégation à une entreprise privée est tout à fait réalisable.
Les conditions à la délégation postulées par les avis de droit se déclinent en quelques exigences, à savoir:
- l'existence d'une loi de délégation formelle du Grand Conseil définissant le cadre dans lequel l'Etat peut transférer l'exercice des tâches publiques exercées par le service des automobiles et de la navigation;
- l'exercice d'un pouvoir d'instruction et de surveillance de l'Etat sur l'entreprise privée;
- la fixation par l'Etat des prix perçus par l'entreprise privée auprès des usagers à raison des activités déléguées;
- la garantie de l'observation des principes constitutionnels fédéraux et des grands principes qui gouvernent l'activité administrative par le délégataire: égalité de traitement, suprématie de la loi, primauté de l'intérêt public, principe de la proportionnalité, etc.;
- l'accessibilité pour tout administré aux mêmes possibilités de recours envers les décisions prises par le délégataire qu'à l'égard des décisions prises par l'autorité administrative elle-même;
- l'application d'une procédure d'adjudication par soumission publique;
- la conclusion d'un contrat de droit public entre l'Etat et l'entité privée, donnant notamment à cette dernière un mandat clair et lui déterminant sa tâche.
V. Objectifs de la délégation
L'activité du service des automobiles et de la navigation, fonction de multiples facteurs, est très marquée par l'environnement social, économique et politique, au niveau national et cantonal. La croissance démographique (examens de conduite), l'évolution du marché automobile, la variation du pouvoir d'achat des ménages et entreprises (immatriculations de véhicules), la réglementation des contrôles techniques, etc., jouent des rôles prépondérants au niveau du volume d'affaires à traiter. Les obligations de ce service supposent donc, peut-être plus qu'ailleurs, une grande flexibilité dans la réponse à la demande. La dernière modification de la réglementation sur la périodicité des contrôles techniques illustre comment de nouvelles exigences ne peuvent être satisfaites de manière efficace et au meilleur coût que par un ajustement des moyens mis en oeuvre.
Ce passage d'une périodicité régulière à trois ans à une périodicité croissante (4 ans/3 ans/puis tous les deux ans) a accru de quelque 10 000 unités, dans une situation économique propice au vieillissement du parc automobile, le nombre d'inspections nécessaires pour les véhicules anciens.
Une gestion flexible, une utilisation optimale des investissements et des actifs à disposition, telles que les rend possibles l'exploitation par une entreprise privée permettent, en outre, une maîtrise de l'évolution des coûts des prestations et la suppression d'un excédent de dépenses qui, en 1991, a alimenté le déficit de l'Etat de près de 5 millions de francs et de quelque 4 millions pour 1992 compte tenu que l'impact des nouveaux tarifs n'est intervenu qu'au cours du dernier trimestre.
Comme le souligne le professeur Thomas Fleiner, «le principe budgétaire qui ne permet pas de prévoir des «profit centers» disposant d'une comptabilité indépendante ne permet pas non plus aux responsables des services de l'administration (offices, départements, ...) de prendre des décisions stratégiques pour le développement de leurs propres entités et de décider de leurs besoins en personnel et en matériel en fonction de leurs activités».
Les objectifs de la délégation consistent donc à:
- rendre le service des automobiles et de la navigation plus économique en respectant la qualité de la prestation;
- rechercher la satisfaction du client par l'introduction d'éléments de motivation plus forts pour le personnel;
- assurer les investissements nécessaires à l'exploitation du service par le marché financier privé;
- gérer au plus près les équipements et installations actuels;
- alléger les finances publiques de l'excédent de charges d'exploitation découlant de l'activité du service des automobiles et de la navigation;
- percevoir une contribution relative à l'actif mis à disposition.
VI. Mise en oeuvre et concertation
Le présent projet de loi, les objectifs poursuivis et les axes de la mise en oeuvre ont été présentés au personnel du service des automobiles et de la navigation, aux partenaires sociaux et aux milieux intéressés.
Le projet de loi a pour but de matérialiser le cadre de l'attribution des tâches d'une unité organique de l'Etat à un organisme privé.
Comme le rappellent les avis de droit, la loi doit être un acte qui:
- fixe le principe de la délégation des tâches à une entreprise privée comprenant le pouvoir de prendre des décisions administratives;
- assujettit l'organisme privé aux règles et aux principes du droit public;
- instaure le pouvoir de surveillance et d'instruction exercé par l'Etat sur l'entreprise délégataire;
- énonce les principes en matière de conditions à remplir par le délégataire ainsi que la durée maximum de la délégation;
- confirme l'existence d'un contrôle possible des décisions par le juge administratif.
L'attribution de la délégation nécessite naturellement le règlement de nombreux autres points importants telles les modalités de passage pour le personnel, les conditions financières, notamment de fixation des prix des prestations ou encore de mise à disposition des locaux et infrastructures existantes. Ces modalités seront définies après l'adoption du projet de loi dans un règlement d'application, dans le cahier des charges en vue de la procédure d'appels d'offres et/ou dans le contrat de droit administratif avec le délégataire.
Dans ce contexte, le Conseil d'Etat, parallèlement à la procédure parlementaire, a décidé de créer une commission ad hoc de suivi dont la mission est d'assurer une concertation sur les questions relatives au passage du personnel du service des automobiles et de la navigation à un organisme privé. Cette commission sera composée de cinq membres élus par le personnel du service des automobiles et de la navigation (dont un cadre intermédiaire et deux inspecteurs), de deux membres de l'UAPG, de deux membres de la CGAS (dont un du Cartel) et d'un représentant de l'UPCP, ainsi que de trois à sept représentants de l'office du personnel de l'Etat, du département de justice et police et des transports et de la direction du service des automobiles et de la navigation.
Elle sera présidée par le conseiller d'Etat chargé du département précité.
Les étapes de la mise en oeuvre de ce projet sont les suivantes:
- renvoi du projet de loi au Grand Conseil et ouverture de la concertation sur les modalités pratiques;
- examen en commission, rapport et adoption de la loi par le Grand Conseil;
- rédaction et adoption par le Conseil d'Etat du règlement d'application de la loi;
- adoption par le Conseil d'Etat du cahier des charges en vue d'un appel d'offres;
- ouverture de l'appel d'offres et délai pour le retour des soumissions;
- évaluation des offres;
- attribution de la délégation à une entreprise déterminée par arrêté du Conseil d'Etat;
- signature d'un contrat de droit public avec l'entreprise délégataire;
- entrée en vigueur de la délégation: janvier 1995.
VII. Commentaire article par article
Article 1
Cet article constitue le fondement juridique de la délégation du pouvoir de l'Etat relativement au domaine concerné.
Constitutionnellement, le législateur est appelé à coordonner les activités étatiques et à déterminer la structure fondamentale de l'administration ainsi que ses attributions.
A fortiori, les diverses formes d'organisation qui s'écartent de l'administration centrale échappent à la compétence du Conseil d'Etat.
C'est donc au Grand Conseil, par une loi formelle, d'habiliter le Conseil d'Etat à confier, par un contrat de droit public, à une entreprise privée, l'exercice des activités publiques assumées jusqu'alors par le service des automobiles et de la navigation.
L'article énonce l'objet de la délégation (al. 1), y prescrit l'exigence d'une délégation exclusive à un seul organisme privé et l'obligation qui lui est faite d'exercer les activités déléguées (al. 2). Le délégataire de tâches publiques ne jouit pas en la matière de la liberté de commerce et de l'industrie.
Les règles de la concurrence ne sont ni ne doivent être applicables, comme indiqué ci-dessus. Enfin, il impose la conclusion d'un contrat de droit public (al. 3) fixant les conditions de la délégation et ses dispositions d'exécution. Il s'agira notamment de régler les modalités financières de mise à disposition des locaux et infrastructures existantes, les procédures de surveillance, les conditions autres que celles découlant de la présente loi à remplir par le délégataire, ainsi que les clauses de dénonciation du contrat.
Article 2
Il n'est point besoin de s'attarder à démontrer que la valeur fondamentale du service des automobiles et de la navigation, en tant qu'entreprise publique de prestations, repose sur son personnel et les compétences professionnelles de celui-ci. Le passage à une entité privée doit donc être géré de façon à satisfaire une grande majorité dudit personnel.
La première garantie accordée à celui-ci consiste en l'obligation faite au délégataire de reprendre l'ensemble du personnel en fonction à la date de prise d'effet de la délégation (al. 1). Cette obligation vise sans distinction les fonctionnaires, employés et apprentis. La reprise doit être faite pour une durée indéterminée ou pour la date correspondant à l'échéance d'engagement pour le personnel au bénéfice d'un contrat de durée déterminée avec l'Etat.
Au-delà de l'opération de transfert, il convient de souligner que les activités du service des automobiles et de la navigation existent par la volonté étatique. Les lois, ordonnances et règlements, qui fondent la raison d'être et le fonctionnement du service des automobiles et de la navigation, garantissent ainsi la continuité du marché. La garantie d'emploi, liée à la pérennité des services de l'Etat, suit ainsi le fonctionnaire qui passe de la fonction publique à l'entreprise privée délégataire, dans cet environnement particulier.
La délégation s'inscrit dans une logique de continuité. Elle ne s'apparente donc pas à un simple processus de cessation de rapports de service avec l'Etat qui laisserait le personnel du service des automobiles et de la navigation incertain quant à l'avenir de ses rapports de travail avec le délégataire. Dans ce contexte, l'application de l'alinéa 5 de l'article 24 de la loi sur le statut du personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux doit être exclue. Cette disposition vise en effet à préserver les intérêts économiques d'un fonctionnaire qui est congédié à la suite d'une suppression du poste et pour lequel l'Etat n'est pas parvenu à lui confier une fonction correspondant à ses capacités. Tel n'est pas le cas en l'espèce. Par le régime légal de la délégation, chaque employé, qui le voudra bien, est en effet assuré par l'Etat d'être au bénéfice d'un contrat de travail avec le délégataire pour une durée équivalant à celle du contrat régissant ses rapports avec l'Etat et aux conditions indiquées ci-dessus.
L'alinéa 3 assure au personnel le maintien de son affiliation à la caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève (CIA). Il s'agit d'éviter les problèmes d'interface entre la prestation au libre passage accordée par la CIA et le système de prévoyance de la caisse du délégataire, notamment du rattrapage de cotisation à la charge du personnel concerné.
Pour les autres modalités de transfert du personnel, la commission ad hoc de suivi assurera la concertation. Il s'agira notamment d'évoquer les droits et obligations figurant dans l'avant-projet de cahier des charges.
S'agissant de l'alinéa 4, il est prévu de mettre à disposition du délégataire les immeubles, les terrains et les actifs mobiliers du service des automobiles et de la navigation. La maintenance, l'entretien, l'adaptation des immeubles ainsi que le remplacement des équipements mobiliers seraient à la charge du délégataire ainsi que les nouveaux investissements nécessaires tant à la bonne marche du service que pour conserver une avance technologique indispensable à l'amélioration de la productivité.
Article 3
Cet article fixe les dispositions essentielles relatives au délégataire. Son alinéa 1 requiert que l'organisme prévu soit constitué selon les règles du droit suisse et ait son siège à Genève. Cette exigence est notamment fondée sur des raisons de surveillance de l'Etat sur ledit organisme.
L'alinéa 2 vise à ce que les personnes physiques qui agissent pour le délégataire offrent des garanties comparables à celles des fonctionnaires vis-à-vis des administrés. Il est le complément logique du principe énoncé à l'article 5, alinéa 1. Il s'agit en effet d'éviter que les justiciables ne risquent de voir affaiblies les protections dont ils jouissent dans leurs rapports habituels avec l'autorité. Deux devoirs des fonctionnaires sont concernés: l'interdiction d'accepter ou de solliciter des dons en raison de leur situation officielle et l'obligation de discrétion. Ces deux devoirs, excédant les obligations légales des employés prévues au titre 10e du Code des obligations, seront obligatoirement intégrés comme clauses contractuelles dans les contrats individuels de travail conclus avec le délégataire.
Article 4
Il est fait obligation au délégataire d'exécuter les tâches confiées. En ce sens, l'entreprise et les membres de son personnel sont tenus au respect de l'intérêt de l'Etat et doivent s'abstenir, notamment au travers des activités déléguées, de tout ce qui pourrait lui porter préjudice. De même, l'entreprise ne pourrait confier à des tiers, sans l'accord préalable de l'Etat de Genève, tout ou partie de l'exécution des tâches déléguées.
Selon l'alinéa 2, le délégataire est investi du pouvoir de décision et devient ainsi autorité administrative au sens de l'article 5 de la loi genevoise sur la procédure administrative, avec les droits et devoirs qui en découlent. Cette disposition confère au délégataire privé un pouvoir d'autorité qui lui permet de décider, dans un cas d'espèce, des mesures individuelles et concrètes ayant pour objet de restreindre ou d'annuler des droits ou des obligations, de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits et obligations.
Son alinéa 3 fait enfin interdiction à l'entreprise d'exercer toute activité parallèle qui puisse nuire ou impliquer un conflit d'intérêt relativement à l'objet de la délégation.
Article 5
Le délégataire doit bien évidemment se conformer au droit public. On songera en particulier à l'observation des principes constitutionnels fédéraux, la suprématie de la loi, les droits de fond et procéduraux déduits de l'article 4 de la Constitution fédérale, le respect des principes régissant les activités administratives, l'inviolabilité du droit de recours des citoyens contre des décisions prises par le délégataire, etc.
Article 6
Le financement des dépenses de fonctionnement et des investissements d'équipement ou d'infrastructure est à la charge du délégataire, comme indiqué sous commentaire de l'article 2, alinéa 3.
Pour le service de la fourrière, un régime particulier a été prévu. Les installations occupées par la fourrière de même que son fontionnement intrinsèque ne permettent pas la couverture des charges par l'émolument. Il est proposé de préserver l'unité du service des automobiles et de la navigation et de faire bénéficier la fourrière de la gestion pratiquée par la société d'exploitation privée. Le délégataire se charge donc de gérer et d'organiser pour le compte de l'Etat le service de la fourrière en prenant à cet effet les mêmes mesures d'efficacité et en mettant en oeuvre les mêmes outils de gestion qui prévaudront pour l'organisme tout entier.
Pour couvrir les dépenses, à l'exclusion de celles de la fourrière, le délégataire perçoit des émoluments correspondant à la contrepartie des prestations fournies. Le montant de chaque émolument (ou prix de la prestation) est tarifé, s'agissant d'une activité non concurrentielle pour laquelle les règles du marché ne sont pas applicables.
La perception des recettes fiscales sur les véhicules à moteur et les bateaux constitue une activité importante. Elle sera dédommagée sur la base d'une indemnité forfaitaire fixée entre 3% et 4%. Ce pourcentage est celui qui est concédé à l'employeur lorsque celui-ci retient l'impôt à la source ou aux cantons lorsqu'ils perçoivent la redevance sur le trafic des poids lourds pour le compte de la Confédération.
Article 7
L'existence d'une surveillance de l'Etat sur le délégataire est une autre garantie donnée aux administrés et destinée à leur assurer, dans leurs rapports avec le délégataire, des mêmes protections que s'ils se trouvaient en présence de l'Etat lui-même.
L'autorité de surveillance de l'Etat portera notamment sur l'égalité devant la loi et l'usage du pouvoir public qui est délégué. Dans le domaine de l'informatique, la commission de contrôle de l'informatique de l'Etat pourra notamment s'assurer d'office que les dispositions légales et réglementaires concernant le traitement confidentiel des informations sont observées pendant les opérations de traitement automatique des données.
Article 8
En tant qu'entité dotée de la personnalité juridique, le délégataire assume la responsabilité de ses dettes et de ses engagements. Il répond au même titre que l'Etat des actes licites et illicites que ses employés commettent dans l'exercice de leur activité, conformément à la loi sur la responsabilité de l'Etat et des communes. La même étendue de responsabilités s'applique au délégataire lui-même.
Article 9
Cet article est une disposition particulière de l'article 5, alinéas 1 et 2. Il met un accent particulier sur l'application par le délégataire des mêmes règles en matière de procédures et de protection des données que celles prévalant pour les services de l'Etat.
Il rappelle par ailleurs la soumission du délégataire à la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985.
Article 10
La délégation est accordée pour une durée déterminée, fixée compte tenu des impératifs de gestion et du temps nécessaire à un amortissement raisonnable des investissements. L'octroi d'une nouvelle délégation par contrat de droit public à l'échéance d'une précédente période de délégation est possible. Elle doit respecter la procédure de mise en adjudication par soumission publique de l'article 11.
Article 11
Cet article fixe la procédure formelle de transfert des activités de l'Etat. Pour garantir l'égalité des droits et assurer un concours stimulant entre les éventuels intéressés, l'alinéa 1 prévoit le recours à une soumission publique.
Un cahier des charges contenant les spécifications ainsi que les renseignements nécessaires à la formulation de l'offre seront mis à la disposition des soumissionnaires. Le délai de soumission sera fixé de manière à donner aux soumissionnaires assez de temps pour formuler leur offre avec soin.
L'adjudicataire devra au minimum répondre aux conditions de l'alinéa 3. Il s'agit de confier la délégation à une structure adaptée, notamment fondée sur l'indépendance de l'organisme par rapport aux milieux économiques avec lesquels il sera appelé à entretenir des relations administratives ou techniques (assurances, entreprises de la branche automobile, etc.).
Article 12
Pas de commentaires.
Article 13
Il s'agit d'adaptations techniques de certaines lois concernant les domaines d'activités délégués, aux fins d'assurer leur conformité à la présente loi. Les lois modifiées désignent soit le département, soit le service des automobiles et de la navigation, comme autorité compétente pour prendre des décisions. Selon le droit existant, le département et le service agissent ainsi en tant qu'unité organique de l'administration. Ni le département, ni le service ne peuvent donc se défaire d'une attribution précise de compétence que la loi leur a conférée. Il convient donc d'ancrer dans ces lois spéciales la possibilité d'attribuer ces compétences à un organisme privé au bénéfice de la présente loi de délégation.
VIII. Conclusion
Le Conseil d'Etat a exprimé et concrétisé à plusieurs reprises sa ferme volonté de redresser les finances publiques. Le projet qu'il vous soumet constitue une mesure d'assainissement doublée d'une volonté de réforme et de modernisation du service public, conforme à l'évolution, de plus en plus marquée sur le plan international, des structures de l'administration publique des services.
Les exigences attachées au fonctionnement d'une société démocratique, l'évolution des esprits, l'émergence de nouveaux besoins imposent au service public des règles de comportement et d'actions qui prolongent et enrichissent les principes originels de fonctionnement. Il s'agit de faire progresser la qualité de la réponse apportée aux usagers du service des automobiles et de la navigation en s'appuyant sur une structure et un environnement privés adaptés aux besoins et à l'évolution de notre société.
Avec les assurances qu'offrent le présent projet de loi ainsi que celles qui découleront du contrat de droit public, en termes de conditions de transfert, de surveillance, de garantie de fonctionnement du service public, de respect des droits fondamentaux des individus, l'initiative d'une délégation des activités du service des automobiles et de la navigation à une entreprise privée est une mesure efficace et nécessaire.
Au vu des explications qui précèdent, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter le présent projet de loi.
Préconsultation
Le Le président. Nous allons fonctionner selon notre nouveau règlement et notamment selon son article 72 qui prévoit, je cite : «En préconsultation, un seul député par groupe peut prendre la parole. Son intervention ne peut excéder 5 minutes au maximum. Un seul conseiller d'Etat intervient. Son temps de parole ne peut excéder 10 minutes.»
M. Michel Ducret (R). Le char de l'Etat ne passe plus la visite, du moins pas sans une révision fondamentale !
Le groupe radical accueille donc cette proposition d'un bon oeil, puisqu'elle vise à en alléger la charge. Nous entendons l'étudier sereinement dans une commission, que nous souhaitons ad hoc. Pour nous, ce projet concocté par le magistrat socialiste Bernard Ziegler et repris tel quel avec son département par M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat, est une concrétisation des possibilités de désengager l'Etat de tâches qui ne doivent pas être essentiellement et directement assurées par les pouvoirs publics. Directement parce qu'il s'agit en l'état d'une délégation à terme, ce qui est important pour éviter l'instauration d'un monopole permanent, et non d'une privatisation au sens propre du terme.
Nous savons qu'un tel système est possible. L'exemple allemand des «TüV», depuis 1905, le démontre à l'envi; ils fonctionnent à satisfaction. Il nous appartient, par contre, de veiller aux conditions de cette délégation quant aux intérêts des citoyens contribuables, ainsi que de ceux de l'Etat lui-même et de ses employés actuels. C'est le but du travail de la commission qui sera désignée. Nous souhaitons que tous s'y rendent avec un esprit positif. Par avance, je vous en remercie.
M. Bénédict Fontanet (PDC). Mon groupe accueille avec intérêt et de manière favorable le projet de loi soumis par le Conseil d'Etat.
Il a le mérite de poser de manière concrète le rôle qui doit être celui de l'Etat. Faut-il ou non que le contrôle du parc automobile, les plaques de circulation, les permis de conduire, les permis de circulation soient effectivement strictement traités par des agents étatiques ? Le premier réflexe consisterait à dire oui; puisque cela a toujours été ainsi, il n'y a, a priori, aucune raison de changer. En réfléchissant, force est de constater que, compte tenu du type de tâches assumées par le service des automobiles, on ne voit pas pourquoi celles-ci ne pourraient pas être traitées par une entreprise délégataire privée. A la condition que des cautèles strictes soient posées au plan juridique, rien ne s'oppose à ce que tel soit le cas.
D'autres pays autour de nous, tout à fait civilisés et dont les systèmes juridiques sont avancés, connaissent ce mode de faire et on ne voit pas pourquoi cela serait différent à Genève. On s'aperçoit qu'en Suisse toute une série de tâches publiques impliquant l'exercice de la puissance publique sont susceptibles d'être déléguées. Cela peut être le cas des offices des poursuites et des faillites. A Genève, cet office appartient à l'administration cantonale, mais dans d'autres cantons ces offices sont gérés par des sociétés privées. Cela est expressément prévu par la loi fédérale qui réglemente en la matière. Les huissiers judiciaires ont aussi pour eux une part de la puissance publique. Ce sont eux qui, notamment, exécutent les jugements. A Genève, ce sont des personnes privées qui exercent cette fonction.
Notre groupe est donc heureux que le Conseil d'Etat amorce une réflexion sur la privatisation, sur la collaboration avec le secteur privé et qu'il envisage, pour certaines des tâches dévolues à l'Etat, la faculté de les déléguer à une entreprise privée. Aujourd'hui, l'état des finances publiques rend les choses particulièrement difficiles : c'est un défi à relever. Les tâches toujours grandissantes de l'Etat doivent amener ce dernier à se concentrer sur des activités essentielles et à faire tous les efforts possibles pour les plus défavorisés d'entre nous.
Cela étant, il nous apparaît indispensable que, dans le cadre de ce projet de loi - c'est ce que nous examinerons en commission - un certain nombre de garanties soient données. Il en va ainsi en matière de sanctions administratives et de retraits de permis. Est-il permis qu'une entreprise délégataire le fasse ? Il en va ainsi en matière d'informatique, de banques de données. Il en va ainsi pour le personnel qui doit avoir la garantie d'être repris par l'entreprise délégataire, à certaines conditions qui satisfassent les droits de ce même personnel. Il en va ainsi de la caisse de pension de ce même personnel. Et enfin, il en va du coût des prestations. En effet, le fait de déléguer ne doit pas engendrer des coûts supplémentaires qui seraient supportés par les contribuables. Je pense qu'il conviendra d'être particulièrement stricts à cet égard dans le contrat de droit administratif qui sera, le cas échéant, passé entre le Conseil d'Etat et l'entreprise délégataire.
En conclusion, nous saluons les efforts de réflexion faits par le Conseil d'Etat qui a le courage de sortir des sentiers battus. Il nous oblige à nous interpeller sur ce que doit être le rôle, les tâches essentielles de l'Etat dans les périodes difficiles que nous connaissons. Nous serons heureux d'examiner tout cela dans une commission dont nous souhaitons également qu'elle soit une commission ad hoc.
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Notre groupe a pris connaissance avec inquiétude et perplexité du projet du Conseil d'Etat concernant le service des automobiles et de la navigation. Ce projet de délégation, comme on souhaite le nommer - excusez-moi si le mot privatisation m'échappe parfois, mais il faut reconnaître que la marge de différence est faible - a suscité de très nombreuses discussions au sein de notre groupe parlementaire, mais également de notre parti, ce qui n'est pas forcément habituel pour un sujet touchant les transports privés parce qu'il pose le principe général de la privatisation.
Si nous ne sommes pas opposés, par principe ou par dogmatisme, à tout projet de délégation du service public au privé, il y a néanmoins quelques critères à respecter avant d'effectuer lesdits transferts.
Premier critère. Nous estimons que certaines tâches doivent rester en main de l'Etat. Ce sont toutes les tâches qui relèvent de la fiscalité et de l'autorité publique. Seul l'Etat dispose dans ces domaines de l'assise et de l'autonomie nécessaires pour appliquer les lois avec l'impartialité et la rigueur requises. Si la police ou les impôts étaient privatisés, la collectivité serait désarmée face à d'innombrables risques d'abus, de favoritisme, de corruption ou de partialité. Il est essentiel que dans ces domaines le monopole de l'Etat reste intangible. S'agissant du service des automobiles et de la navigation, on s'aperçoit donc que, selon ce critère, il est impossible de privatiser les tâches d'encaissement des taxes et impôts, de même que celles liées aux mesures administratives.
Deuxième critère : la concurrence. Nous estimons, en effet, que la privatisation doit déboucher sur des situations de concurrence entre plusieurs entreprises offrant le même service. On peut dire que les activités du SAN relèvent totalement du monopole et que l'entreprise qui serait appelée à le reprendre ne serait soumise à aucune concurrence. De ce fait, elle se trouverait dans la même situation que l'Etat. Pour devenir rentable, elle devrait augmenter fortement ses taxes et ses émoluments, et cela l'Etat peut également le faire.
Troisième critère : préservation du service public. On nous répond à cela que l'entreprise sera soumise à un contrôle rigoureux de l'Etat. Alors non seulement ses problèmes de coûts et d'efficacité seront identiques à ceux de l'Etat, mais en plus elle sera sous contrôle de l'Etat. L'intérêt pour une entreprise privée devient sinon nul au moins à démontrer.
Le dernier critère concerne la prévention du dumping social. On s'aperçoit en effet que pour être rentable la tentation de revoir les salaires à la baisse ou de se séparer de quelques employés pourrait être bien réelle.
Les critères que je viens d'énoncer ne peuvent manifestement pas s'appliquer au projet de loi tel qu'il nous est proposé par le Conseil d'Etat. Il est donc exclu que le parti écologiste le soutienne dans sa teneur actuelle. Par contre, nous ne nous opposerons pas à son renvoi en commission, car nous sommes conscients que la situation actuelle du SAN n'est pas satisfaisante et qu'elle doit être étudiée de manière très approfondie. En effet, il est totalement anormal qu'un tel service coûte 4 à 5 millions à l'Etat !
Notre groupe proposera en commission la transformation du statut actuel du SAN en établissement autonome de droit public, dont les tâches seraient définies dans un mandat de prestations. Les tarifs seraient fixés en accord avec le Conseil d'Etat de manière à couvrir la totalité des coûts, et l'établissement aurait la possibilité d'emprunter et d'investir pour son propre compte. Cela permettrait d'être plus proche des usagers qui devraient être représentés dans le conseil d'administration par des associations telles que l'ATE, le TCS et l'ACS.
Voilà quelles seront les propositions que nous défendrons en commission et qui, nous l'espérons, rencontreront un large écho.
M. Jean Spielmann (AdG). Il faut avant tout faire le distinguo entre une privatisation et ce qui ne l'est pas, notamment après les multiples déclarations faites par la presse et par certains responsables à ce sujet. Ce canton compte une série d'établissements et une série d'activités qui sont du ressort des établissements de droit public, comme l'aéroport, l'hôpital, les services industriels et les transports publics. Il est légitime de donner une certaine autonomie, y compris dans le domaine des investissements et de la gestion, à certains établissements. On pourrait ajouter d'autres propositions, dans le même contexte, pour les Cheneviers, la station d'Aïre, etc., afin d'avancer dans l'idée d'une centralisation des responsabilités.
Il en va bien sûr tout autrement pour les activités qui relèvent d'un acte d'autorité de l'Etat : police, sanctions, etc., dont les émoluments et les conditions financières sont fixés par l'Etat.
D'autre part, il y a aussi, au niveau du service des automobiles, une série d'activités incompatibles avec celles d'une entreprise privée. Je pense ici au rôle des inspecteurs qui ont un statut quasiment identique à celui d'un policier. Ils sont assermentés et doivent intervenir en cas d'accidents comme témoins ou comme experts dans le cadre des jugements des tribunaux. Leurs responsabilités sont grandes, car parfois les enjeux sont très importants. Je ne vois donc pas comment il serait possible de transférer ces charges au secteur privé en lui donnant le monopole en matière d'autorité.
Quelle serait la raison de ce changement ? On nous explique que le bureau des autos ne peut plus répondre aux besoins, suite aux décisions prises par le Conseil d'Etat de bloquer le personnel et de limiter les investissements. L'absurdité est poussée au maximum. On nous dit maintenant que la seule alternative est d'aller encore plus loin dans l'absurdité en privatisant. Ces activités ont des exigences d'égalité de traitement des citoyens devant la loi et devant les règlements. Il n'est pas possible de les transférer dans le domaine du privé, d'autant plus que, dans ce domaine, on connaît les problèmes qui existent au niveau des garages et des assurances. Des dispositions sont déjà prises qui sont irréalisables dans le cadre d'une telle privatisation.
On a aussi complètement pipé les dés financiers ! On vous a présenté les comptes de 1991 pour démontrer le déficit en oubliant de dire que, pour les comptes 1992, un tiers seulement des nouveaux émoluments ont été considérés. Il serait intéressant de voir ce qu'il en est pour 1993. On oublie de dire également qu'il y a des possibilités pour couvrir les frais de ce bureau et qu'en cas de privatisation les émoluments devront être augmentés. Ce sont les automobilistes qui en feront les frais ! Ils devront payer non seulement la charge de fonctionnement du bureau des autos, mais encore le bénéfice que prendra l'entreprise. En effet, je n'imagine pas que vous trouverez des philanthropes pour travailler à perte pour le bien de l'Etat et des automobilistes ! Il y a donc bien une volonté de reporter sur les automobilistes les bénéfices qui seront faits par ces entreprises.
Pour toutes ces raisons nous ne sommes pas d'accord avec ce projet de loi. Nous le combattrons et nous ferons la démonstration de l'absurdité de la politique conduite au niveau de la gestion de l'Etat et au niveau de la privatisation que vous êtes en train de mettre en route !
Mme Fabienne Blanc-Kühn (S). Que vous le vouliez ou non, vous n'échapperez pas aux questions de fond portant sur le rôle de l'Etat, les moyens qu'on lui accorde pour remplir ses tâches et les exigences pour un service public de qualité. Et il convient de prendre le temps de répondre à cette question même, et peut-être surtout, en cette période de difficultés budgétaires et économiques. La crise que nous vivons aujourd'hui s'inscrit dans un contexte international, bien que sévissant en Suisse plus tardivement qu'ailleurs en Europe. Nous devrions nous rappeler les méthodes employées ailleurs pour résoudre tant les difficultés budgétaires étatiques que la crise économique. Le résultat est clair : ni la déréglementation, ni les privatisations, ni le moins d'Etat n'ont permis de sortir de l'impasse. L'intervention étatique est même à nouveau souhaitée Outre-Atlantique.
Faisons une économie : celles des erreurs de nos pays voisins ! Et tentons de ne pas oublier que les difficultés actuelles ne sont par «Propres in Switzerland».
Le projet de loi proposé par le Conseil d'Etat s'inscrit dans une perspective de modernisation de l'Etat, la modernisation étant entendue comme la résolution de l'impasse budgétaire. Combler l'actuel déficit budgétaire ne pourra pas se faire par un unique projet de «modernisation». Nous savons bien que ce projet de loi est le premier d'une longue série qui amènera progressivement à une redistribution des prestations étatiques. Et ceci sans avoir fixé un cadre préalable délimitant l'intervention de l'Etat.
Comme s'il n'y avait jamais eu auparavant de réflexion sur le rôle de l'Etat et sur son évolution ! C'est vite oublier la portée de la motion 734, laquelle posait, précisément, la question de l'efficacité de l'Etat et donc de son rôle futur dans un contexte général de crise économique et budgétaire. Cette motion, malgré un premier rapport intermédiaire, n'a jamais eu de suite alors qu'elle était soutenue par l'ensemble du Parlement.
C'est pourquoi nous ne pouvons pas aborder le projet de loi proposé par le Conseil d'Etat comme s'il s'agissait d'une démarche isolée. Ce projet de délégation de tâches du service des automobiles et de la navigation à une entreprise privée est un premier ballon d'essai. Une tentative de déréglementation, qui ne restera pas isolée, dans l'unique but, dites-vous, d'assainir les finances.
La forme adoptée pour nous faire avaler la pilule est quelque peu contestable. Affirmer que les aspects juridiques liés à la délégation sont réglés par trois courtes citations, extraites des avis de droit demandés à cette occasion, n'est pas très sérieux. Bien que les membres de cette assemblée soient très occupés, ils sont parfaitement disponibles et capables d'aborder des avis de droit in extenso. Trois extraits, même présentés joliment par le miracle informatique, ne constituent pas une base juridique suffisante permettant de nous déterminer si la délégation à un organisme privé est possible dans le cas du SAN.
Les arguments économiques en faveur de cette délégation sont les investissements, par le biais du marché privé, et la suppression pour l'Etat de Genève de la perte d'exploitation du SAN. Pleurer sur les investissements, trente ans après la construction de la halle technique, fait figure de larmes de crocodile. Il y a belle lurette que ces bâtiments sont amortis, et s'il n'y a pas eu d'investissements, à qui la faute ? Si les appareils sont dinosauriens, cherchez l'erreur ! La situation financière sera certainement équilibrée par une diminution des charges, notamment par une péjoration des conditions de travail et par une augmentation des taxes. Le SAN avait déjà été redimensionné ces dernières années et il n'avait pas été nécessaire de supprimer des postes pour arriver à cette fin.
Cette étape a bizarrement été oubliée dans ce dossier puisque la «revue de presse», c'est un bien grand mot, qui nous est soumise, date des années 1982 et 1986 quand on a bien voulu faire figurer les dates !
L'état de la trésorerie et les comptes d'exploitation relevant du modèle privé sont extrêmement réjouissants : le simple passage du public au privé fait enregistrer une augmentation de la trésorerie et des comptes d'exploitation. Ces tours de magie nous semblent être réalisés par de la grosse, très grosse ficelle !
En ce qui concerne l'exercice du pouvoir de surveillance de l'Etat, et plus particulièrement la mise en demeure du délégataire, rien n'est dit sur l'obligation de maintenir et de restituer, après vingt ans, les installations au moins en l'état : donc pas d'obligation d'investissements.
Silence aussi sur l'obligation d'effectuer sans retard les contrôles sur les véhicules. Quant à la clause de résiliation immédiate du contrat de délégation et curatelle d'exploitation, aucune sanction n'est prévue. Voilà un pouvoir de surveillance qui semble atteint de forte myopie !
Le chapitre consacré au personnel laisse déjà augurer quelques surprises de taille. Ainsi, il est prévu une garantie, au besoin à titre individuel, des principaux droits et devoirs existants lors du transfert. Le personnel du SAN n'a que faire de garantie à titre individuel, mais veut une convention collective de travail garantissant au moins les conditions de travail actuelles s'appliquant non seulement à celles et ceux qui seront transférés, mais également aux futurs employés. Le même principe doit s'appliquer pour l'affiliation à la CIA.
Je crois que si ce projet avait été présenté par un magistrat socialiste, notre position aurait été la même et le projet aurait été combattu comme il l'est ce soir. (Aahh sur les bancs de la droite et rires.) La seule différence porte sur le fait qu'une nouvelle législature est entamée et que l'exécutif, en 1994, a une conception de l'Etat différente de celle qui était la sienne avant novembre 1993. (Quolibets et réflexions fusent.)
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste ne s'oppose pas au renvoi de ce projet de loi en commission... (Aahh de satisfaction.) ...qui devrait être ad hoc, mais il s'opposera à l'entrée en matière sur le projet de loi tel que proposé actuellement.
M. Michel Halpérin (L). Bien qu'il émane d'un magistrat socialiste, le groupe libéral accueille avec faveur le projet qui vous est soumis. Je n'aurai pas besoin d'insister longtemps, puisque nous aurons l'occasion de le faire au cours des débats de la commission ad hoc qui recevra ce texte.
Je ferai simplement remarquer quelques-uns des paradoxes qui émaillent déjà les propos des adversaires de ce projet.
On nous dit, par exemple, qu'il est regrettable qu'une entreprise reçoive le monopole de ces travaux tout en nous proposant de les confier à un établissement de droit public.
On nous explique que le monopole n'est pas la concurrence, tout en oubliant de nous parler du principe de soumission qui prévaut.
On se plaint sur les bancs écologistes du tort qui va être fait aux usagers automobilistes; voilà bien une sollicitude inhabituelle de leur part ! (Rires.)
Ce projet a un but économique évident, qui a déjà été rappelé. Il s'agit de moderniser le fonctionnement de ce service, et nous savons que dans les tâches prioritaires que l'Etat doit accomplir, il n'a plus les moyens ni les ressources matérielles et humaines de procéder à cette modernisation.
C'est très simple, si nous renoncions à ce genre de délégation, nous nous retrouverions probablement dans la même situation que celle qui a prévalu ces dernières années dans d'autres monopoles que nous avions l'habitude de considérer comme sacrés. Aujourd'hui, par exemple, en matière de téléphone nous ne sommes plus aussi compétitifs que bien des pays voisins, qui ont renoncé avant nous à des tâches de monopole ou d'Etat. Voilà déjà une raison de moderniser. On pourrait, plus sérieusement encore, considérer que si l'Etat n'avait pas assumé dans l'ex-Union soviétique les responsabilités d'un certain nombre de centrales, il n'y aurait pas eu vingt mille accidents de type nucléaire ces deux ou trois dernières années.
Nous avons des tâches prioritaires à accomplir dans un Etat qui n'a plus les moyens d'y faire face. Il faut aujourd'hui qu'il choisisse. En faisant le choix de renvoyer ces travaux à une entreprise qui répondra aux exigences et au contrôle de l'Etat, il fait le choix le plus raisonnable : celui de donner des prestations qui seront payées par les usagers à leur coût réel tout en permettant une bonne modernisation de ces services. Voilà pourquoi ce projet mérite d'être accueilli favorablement.
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Permettez-moi de vous rappeler comment s'est développée cette mesure gouvernementale de restructuration d'un service public, de faire le point sur la situation d'avancement du dossier et de vous rappeler, en conclusion, quelques vérités élémentaires à la base de ce projet.
Il faut rappeler que, sous l'impulsion d'un magistrat socialiste, M. Bernard Ziegler, un groupe de travail a été créé en 1992. Il a «planché» sur ce projet environ deux ans. Il a rendu, à l'automne 1993, un rapport final comprenant aussi bien les études techniques, économiques que juridiques. A mon arrivée à la tête du département, en décembre 1993, M. Ziegler a expressément attiré mon attention sur ce dossier en insistant sur l'urgence de sa présentation. En effet, des bruits commençaient à courir dans le personnel et, par simple égard envers ce personnel, nous ne pouvions pas maintenir plus longtemps l'équivoque.
J'ai donc pris la décision, avec l'équipe de projet, de publier ce dossier en lui donnant un maximum de transparence. Le 13 janvier nous avons d'abord présenté ce dossier au personnel, par égard envers ce qu'il faisait au SAN, puis à la presse pour qu'elle puisse travailler en connaissance de cause, puis aux partenaires sociaux, eu égard à leur rôle essentiel dans les relations avec le personnel et, enfin, aux milieux concernés. Nous avons été motivés par une volonté de totale transparence, de totale loyauté envers notre personnel et de totale clarté en matière de ligne politique. Eh bien, surprise, ce langage a dérangé d'aucuns, nostalgiques de la langue de bois sur fond d'entrechats et de valses-hésitations ! Comprenne qui pourra !
Mais chacun doit se persuader ici que ce gouvernement n'a pas envie de revenir aux tergiversations incessantes du temps jadis, ce qui n'exclut nullement une volonté ferme et permanente de dialogue. Et le dialogue, j'y arrive !
La majorité du personnel du SAN a élu une délégation, le 19 janvier 1994. A ce jour, aucune critique fondée n'a pu être formulée sur cette élection, et même le recours que mon département a dû rejeter traitait du projet lui-même et non pas des conditions de son lancement. La délégation du personnel a donc siégé à trois sur cinq pendant deux séances, puis à cinq sur cinq tout à fait normalement depuis la troisième séance, sans aucun problème. Les syndicats ont été invités; les deux représentants de l'UAPG ont d'abord rencontré les deux représentants de la CGAS, MM. Beer et Thorel, avec un état d'esprit tout à fait positif et constructif démontrant qu'ils effectuent avec honneur la tâche d'un syndicat : défendre ses adhérents. Dès la seconde séance, le délégué de l'UPCP a siégé. Dès la troisième séance, le cartel a occupé son fauteuil vide et, depuis, nous travaillons avec tous les syndicats. Même plus ! A la dernière séance, et pour déférer à la demande des syndicats, nous avons créé une table pour les observateurs. C'est ainsi que la CGAS, le cartel, la FTSP et le SIT ont des observateurs !
Mesdames et Messieurs les députés, avez-vous souvent vu dans une concertation de ce genre cinq représentants du personnel entourés par neuf représentants de six syndicats différents et, en face, trois délégués du département de justice et police et des transports ! Je le dis ouvertement, cette concertation me plaît ! Elle est constructive, elle est intellectuellement honnête et parfaitement franche.
J'aimerais rappeler très rapidement ici, pour ceux qui ne l'auraient pas encore compris, qu'il y a deux cheminements différents. D'une part, le cheminement parlementaire et démocratique qui est celui du projet de loi. Une commission siégera, elle auditionnera qui elle veut. Il y aura un vote en plénum et même, peut-être, un recours à l'avis du peuple. Et, simultanément, il y a une commission de suivi travaillant sur le cahier des charges qui sera celui que nous pourrons imposer à l'entreprise délégataire. Pourquoi, dès lors, d'aucuns - et pas des moindres - s'acharnent à parler de précipitation dans ce dossier ? Simplement parce que nous avons fixé clairement le nombre des séances, la durée de ces séances et que nous avons transmis aux représentants du personnel des objectifs écrits. Si fixer des objectifs et des délais en entérinant au fur et à mesure les points d'accord c'est faire preuve de précipitation, c'est à se demander pourquoi certains journalistes critiquent, dans un gouvernement, les méthodes que leur propre journal utilise journellement !
Des voix. Des noms !
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Pour faire le point de la situation, je vous dirai que la direction du SAN édite un journal sur ce projet. Les membres de la commission ad hoc, si c'est le cas, recevront ce journal qui indique chaque fois au personnel ce qui s'est dit, ce qui s'est fait et ce qui reste à faire. A l'heure actuelle, la commission a fixé son programme de travail. Elle a «planché» sur tous les éléments que je vais vous énoncer rapidement : la durée du temps de travail, la responsabilité civile et pénale des employés, le domicile, la nationalité des employés, la sauvegarde du secret, le maintien du personnel du SAN à la CIA, une bonne partie des conditions de traitement, les primes, les gratifications, les heures supplémentaires et les allocations. Voilà ce que cette commission a déjà réussi à faire en quatre séances de nonante minutes, avec - je le répète - la collaboration intelligente et constructive des syndicats présents !
Je conclurai en vous rappelant simplement que cette commission a deux objectifs, le premier qui va de soi, et le second qui vous surprendra ! Le premier est de définir le cahier des charges qui sera celui de l'entreprise délégataire qui met to-ta-le-ment... (M. Ramseyer martèle ce mot.) ...à l'abri de toute surprise ce personnel. Et les syndicats patronaux et ouvriers - cela arrive ! - ont même souhaité que cette commission choisisse elle-même l'entreprise délégataire, en fonction des conditions sociales qu'elle fera au personnel. Décidément, on ne peut pas en faire plus !
Pour terminer, je dirai que ce projet s'inscrit dans une modernisation et un redimensionnement de l'Etat. Ce qui fonctionne à l'étranger doit fonctionner chez nous, nous en sommes tous et toutes convaincus. Ce projet s'inscrit également dans la volonté absolue de maintenir et de sauvegarder les intérêts de notre personnel du service des automobiles et de la navigation, raison pour laquelle je ne doute pas que toutes celles et ceux qui sont sincèrement attachés au redressement de l'Etat de Genève approuveront ce projet. Cela étant, je souhaite également qu'une commission ad hoc prenne en charge l'étude de ce dossier. C'est dans cet esprit que je vous remercie de votre attention. (Vifs applaudissements de la droite.)
Ce projet est renvoyé à une commission ad hoc.
Le président. Cette commission sera composée de Mmes et MM. : Michel Halpérin, Nicolas Brunschwig, Pierre Ducrest, Claude Lacour, Michel Balestra pour le parti libéral, Christian Ferrazino, Jean Spielmann, Pierre Vanek pour l'Alliance de gauche, Micheline Calmy-Rey, Fabienne Blanc-Kühn pour le parti socialiste, Michel Ducret, Pierre Froidevaux pour le parti radical, Bénédict Fontanet, Jean Montessuit pour le parti démocrate-chrétien et Fabienne Bugnon pour le parti écologiste.
La séance est levée à 19 h.