République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 7 octobre 1993 à 17h
52e législature - 4e année - 8e session - 36e séance
M 873
EXPOSÉ DES MOTIFS
1.
Lors de la prochaine législature, notre Grand Conseil devra se prononcer sur plusieurs projets touchant à nos institutions. Les groupes libéral et radical ont suggéré diverses réformes du mode d'élection du Conseil d'Etat. Ce dernier vient de proposer des mesures quant à ses rapports avec les différents départements pris individuellement. Enfin, la commission du règlement est en passe d'achever ses travaux concernant le fonctionnement de notre Grand Conseil.
Dans le cadre de ces réflexions sur nos institutions cantonales, j'aimerais, avant de vous quitter, vous suggérer, chères et chers Collègues, de vous pencher également sur les rapports entre le Conseil d'Etat et le Grand Conseil.
J'ai en effet été étonné par la capacité de certains de nos conseillers d'Etat d'ignorer les propositions des députés, de ne pas y répondre, ou d'y répondre de manière imparfaite ou tardive.
De même, j'ai été frappé par le fatalisme de notre Grand Conseil. Il ne semble pas s'émouvoir que certaines de ses décisions demeurent sans réponse, ou qu'elles ne reçoivent des réponses très tardives, bien au-delà des délais fixés par le règlement de notre Grand Conseil, à un moment où les problèmes en cause ont perdu une bonne partie de leur actualité.
2.
Afin que mes propos soient plus concrets, j'indiquerai ci-après, à titre d'exemple dans un domaine qui m'est plus familier que les autres, celui du logement, ce qu'il est advenu de certaines décisions prises par notre Grand Conseil au cours de la présente législature.
Pour les besoins de mes propos, il s'agit nécessairement de cas où les demandes du Législatif n'ont pas été exhaussées. Bien évidemment, cela ne signifie pas que le Conseil d'Etat soit par ailleurs demeuré inactif dans le domaine du logement.
Voici donc sept exemples :
1. Le 30 novembre 1990, le Grand Conseil a demandé (M 692) au Conseil d'Etat de dresser un plan des zones agricoles, mentionnant les affectations réelles et délimitant les surfaces d'assolement des autres surfaces (Mémorial du Grand Conseil 1990, p. 5999).
Il s'agissait, entre autres, de dresser un inventaire des surfaces qui sont formellement inscrites en zone agricole, mais qui ne sont pas propices à la culture, de manière à savoir si elles pourraient être affectées à la construction de logements.
Cette motion est demeurée jusqu'à ce jour "en souffrance".
2. Dans la même logique d'une meilleure utilisation des surfaces disponibles, le Grand Conseil a demandé (M 524) le 13 septembre 1991 au Conseil d'Etat de dresser entre autres un inventaire des terrains non bâtis en zone de villas (Mémorial du Grand Conseil 1991, p. 3864). A ma connaissance, il n'a pas non plus été répondu à ce jour à cette proposition de motion.
3. Au début de la présente législature, la commission du logement a émis le voeu que le Conseil d'Etat définisse la politique qu'il entendait mener dans le domaine du logement et qu'il fixe des priorités. Une interpellation (I 1768) du soussigné formulait une demande analogue (Mémorial du Grand Conseil 1990, p. 6095).
A ce jour, il n'a pas été répondu à l'interpellation. En revanche, après une très longue réflexion, le Conseil d'Etat a finalement rédigé un document sur la politique qu'il préconisait pour le logement (RD 155; Mémorial du Grand Conseil 1991, p. 4203). Ce document a été jugé faible par les députés de la commission du logement. Le Chef du Département de l'intérieur, de l'agriculture et des affaires régionales a, dans ces conditions, indiqué que la Délégation du logement améliorerait ce programme politique. Depuis lors, il ne s'est toutefois rien passé.
4. Le coût de la construction des logements a préoccupé les députés. Par le biais d'une motion (M 706), ils ont demandé au Conseil d'Etat de procéder à une étude systématique du coût de la construction des logements à Genève (Mémorial du Grand Conseil 1991, p. 69).
Après avoir été informellement relancée quant à la suite qu'elle entendait donner à cette proposition de motion, la Délégation du logement du Conseil d'Etat a réuni les partenaires sociaux (milieux immobiliers, Rassemblement pour une politique sociale du logement) et leur a proposé de mandater un (des) expert(s) étranger(s). Diverses suggestions ont été faites à cet égard. Depuis lors, à ma connaissance, il ne s'est rien passé.
5. Une députée s'est interrogée au sujet de certaines pratiques relatives aux mandats donnés par les fondations immobilières de droit public (M 711). Le Conseil d'Etat a indiqué qu'il entendait y répondre en déposant un projet de loi (Mémorial du Grand Conseil 1991, p. 104, notamment p. 108). On attend, toujours, sauf erreur, et la réponse à cette motion, et le projet de loi en question.
6. Soucieux d'orienter la Fondation Cité Nouvelle II vers la construction de HBM, le Grand Conseil unanime a demandé (M 637) le 23 mars 1990 au Conseil d'Etat de modifier la composition du Conseil de cette Fondation (Mémorial 1990, p. 1270). Cette décision n'a à ce jour pas été suivie d'effets.
7. Trois députés (M 792) ont pris la peine d'examiner la législation en vigueur dans le domaine du logement et de signaler une série de lois désuètes ou contraires au droit fédéral, qu'il conviendrait d'abroger ou de modifier (Mémorial du Grand Conseil 1992, p. 2947). A ce jour, on n'a pas de nouvelles au sujet de cette motion.
3.
Personnellement, je ne pense pas que les demandes du Grand Conseil rappelées ci-dessus à titre d'exemple étaient exagérées ou infondées. Pour l'essentiel, elles émanaient d'ailleurs de députés de plusieurs partis. Plusieurs de ces motions étaient le fruit d'une concertation qui à l'initiative des socialistes a réuni au début de la législature tous les partis représentés au Grand Conseil.
Ces demandes avaient pour but d'améliorer l'information des députés afin que le législatif puisse progresser dans le "dossier du logement", en toute connaissance de cause, et sans esprit polémique.
Au demeurant, le Conseil d'Etat a réservé un bon accueil à chacune de ces demandes. Il n'a pas prétendu lorsqu'elles ont été examinées en séance plénière qu'elles étaient exagérées, infondées, ou qu'il lui était impossible de les satisfaire.
4.
Il me semble que pour un seul dossier, celui du logement, le nombre des propositions qui sont demeurées en souffrance est trop important. Cela démontre, à mon avis, l'existence d'un problème dans le fonctionnement de nos institutions.
Je suis d'ailleurs persuadé que dans d'autres domaines, selon les Conseillers d'Etat concernés, on pourrait faire des constatations analogues.
D'ailleurs, il suffit de rappeler que dans la liste des objets en suspens devant le Grand Conseil du mois de septembre 1993 (dernière liste publiée), il y avait sauf erreur 176 motions et résolutions auxquelles le Conseil d'Etat n'avait pas encore répondu.
5.
Les conséquences d'une telle apathie du Conseil d'Etat face aux demandes des députés doivent être appréciées.
D'abord, le Grand Conseil s'en trouve considérablement affaibli. S'il tolère ces pratiques sans réagir, le Législatif deviendra une "Chambre des parlottes", sans grande efficacité, à qui l'Exécutif pourra continuer à dire : "cause toujours, je fais ce que je veux".
Ensuite, ces pratiques découragent les députés. Seuls les plus courageux, les plus obstinés, les plus ambitieux ou les moins critiques trouvent encore de l'intérêt à consacrer de nombreuses heures à une activité politique dont ils tardent à voir les résultats.
6.
Les remèdes à ce mal ne sont pas aisés à concevoir. La solution réside avant tout dans les personnes. Les député(e)s doivent s'efforcer de ne pas inonder le Conseil d'Etat de demandes. La classe politique ne doit pas soupeser les mérites des parlementaires au nombre de leurs propositions, mais bien à leur qualité. Un des critères présidant au choix des membres de l'Exécutif devrait être leur capacité à dialoguer avec le Législatif, et à répondre à ses demandes. Autant de critères qui ne peuvent pas être consacrés dans des textes de loi.
Mais il est aussi envisageable de prévoir quelques mesures "techniques" pour améliorer le fonctionnement de nos institutions et donner un peu plus de crédit au travail des députés.
J'entrevois, très certainement parmi d'autres, les quelques mesures suivantes :
a) Allonger le délai entre le dépôt d'une proposition de motion ou de résolution et le débat au Grand Conseil. Le Conseil d'Etat pourrait alors mieux étudier la proposition, y répondre plus complètement de vive voix et, de la sorte, permettre que les propositions inutiles soient rejetées ou, au vu de la réponse, déclarées sans objet.
b) Modifier la définition de la motion (article 143 du règlement du Grand Conseil) de manière à la rendre vraiment contraignante pour le Conseil d'Etat.
c) Réappointer d'office à l'ordre du jour du Grand Conseil les demandes du Législatif auxquelles le Conseil d'Etat doit répondre, lorsque le délai légal de traitement est expiré.
d) Dresser, département par département, la liste des motions en souffrance, et la publier, notamment dans la FAO, à la fin de chaque législature.
e) Améliorer (c'est une vieille histoire !) les moyens à disposition des députés, pour qu'ils soient mieux informés par les services du Grand Conseil et qu'ils puissent dès lors s'abstenir de déposer toute une série de demandes d'informations, pouvant être obtenues par d'autres canaux.
7.
Mes chères et chers Collègues, désireux de prêcher par l'exemple, je vous invite avant tout à me dire haut et fort si vous trouvez que cette motion ne fait qu'encombrer davantage les tiroirs du Conseil d'Etat. Je ne me vexerai pas de votre sanction, ... et quand bien même je me vexerais... !
En toute hypothèse, je promets que ce sera là ma dernière proposition de motion.
Débat
M. David Lachat (S). Notre Grand Conseil est une grosse marmite où mijotent, et parfois bouillent, simultanément et pêle-mêle, une centaine de caractères, quelques caractériels... (Manifestations de toutes parts.)
Des voix. Des noms ! Des noms !
M. David Lachat. ...une droite et son extrême, une gauche et une autre gauche, (Rires.) un centre introuvable...
L'assemblée. Oooh !
M. Andreas Saurer. Et les écologistes, tu les mets où ?
M. David Lachat. On verra ! ...et en même temps on y trouve de l'humour et de la hargne, de la passion et de l'ennui, de l'amitié et quelques vieilles rancunes, du sérieux et du vite fait, de la discrétion et quelques fanfaronnades, de la sincérité et parfois du bluff. Compte tenu de sa composition, cette potion devrait vraiment être imbuvable mais, apparemment, ceux qui en ont goûté une fois l'apprécient, et il y en a même qui en redemandent ! (Rires.)
Si nous l'aimons tous, c'est qu'elle a bien relevé le goût de la cité, la saveur de la vie en société et le parfum indicible de l'expérience de la vie. Une épice rare et particulière donne à cette potion, à ce breuvage une senteur appréciable. Cette épice, c'est le dévouement. Quels que soient l'intérêt que l'on trouve au Grand Conseil et le temps dont on dispose, il faut passablement de dévouement pour assumer ses obligations de député. Et parce que l'on n'est jamais aussi bien servi que par soi-même, je m'arroge ce soir le droit de vous dire à toutes et à tous, chères et chers collègues, merci. Mille mercis pour votre disponibilité passée, et à vous qui vous représentez, deux mille mercis pour votre dévouement renouvelé.
Pour vous témoigner ma gratitude, je vous ferai cadeau de cette petite motion. Comme notre Grand Conseil, elle est un peu sérieuse, mais aussi un peu ironique, tout à fait inoffensive mais aussi un peu perfide. Comme je vous en fais cadeau, je sais que vous n'hésiterez pas à en faire ce qu'il vous conviendra. J'aurais aimé ce soir entendre la lourde charge, par exemple de M. Balestra, qui aurait «démonté» cette motion. Malheureusement, il est absent. Il me prive d'une joie. Quant aux conseillers d'Etat, ils sont deux, je pense...
Des voix. Quatre ! Quatre !
M. David Lachat. ...qui pourraient se sentir visés par quelques lignes de ma motion. Je leur tends, à l'un ma joue gauche, et à l'autre ma joue droite pour recevoir d'ultimes baffes !
Accordez-moi tout de même le bénéfice d'un peu de sincérité. Je suis convaincu que notre Grand Conseil fonctionnerait mieux, que la tâche de député, en plus d'être intéressante et attachante, deviendrait gratifiante si nous recevions toujours et en toutes circonstances des réponses à nos demandes. Relisez les rapports du Conseil d'Etat répondant à diverses motions et qui figurent au point 60 à 73 de notre ordre du jour. Certaines émanent de députés tout à fait oubliés qui siégeaient, je crois, à l'époque de Léon Nicole (Rires.) ou peut-être même sous James Fazy. (Rires redoublés.) Quant aux réponses du Conseil d'Etat, elles ont la fraîcheur, la jeunesse et le charme qu'aurait aujourd'hui Pauline Carton. (Hilarité.)
Merci au Conseil d'Etat de répondre à ma proposition de motion, s'il y consent un jour. Soyez rassurés, Messieurs les conseillers d'Etat, je suis tout à fait patient et j'ai pris une mesure de sauvegarde. Je me suis abonné au Mémorial jusqu'en 2014 (Rires.) et j'espère qu'à ce moment le conseiller d'Etat Fontanet y répondra. Non pas Bénédict, celui qui devrait être ce soir sur nos bancs, mais son fils. Il paraît qu'il lui ressemble étrangement ! (Eclats de rires.)
M. Claude Blanc (PDC). Je répondrai à ce morceau de bravoure par cette maxime : «Connais-toi toi-même !» (Rires.) Je constate, mon cher collègue, qu'à la veille de nous quitter définitivement, à notre grand malheur d'ailleurs, parce que nous vous avons beaucoup apprécié et nous vous regretterons toujours, (Rires narquois.) je constate que vous avez tendance à reporter sur le Conseil d'Etat un certain nombre de nos carences. Quand je dis carences, c'est peut-être un jeu de mots parce qu'en fait c'est peut-être de nos exagérations qu'il faudrait parler. Si vous vous plaignez que souvent le Conseil d'Etat met longtemps, très longtemps, ou même ne répond pas à un certain nombre de nos élucubrations, c'est peut-être que le temps aura fait son oeuvre et que le temps n'aura retenu que ce qui est important.
Je constate avec effarement, contrairement à ce que vous dites, combien nous nous comportons comme la mouche du coche qui n'arrête pas de piquer l'équipage mais qui ne sert à rien. Le nombre de motions inutiles et qui ne servent - du moins le croient-ils - qu'à mettre en valeur leurs auteurs, je ne pourrais pas les compter. L'ennui, c'est qu'une fois que l'on a cru se mettre en valeur au travers d'une motion, on attend que le Conseil d'Etat y attache l'importance que l'on croit qu'elle a et que, toutes affaires cessantes, il y réponde, il fasse une enquête, il mette en marche ses services pour donner une réponse à une question que l'on a d'ailleurs bientôt oubliée parce qu'il suffisait de se mettre en valeur un jour.
Je crois qu'il faut que nous nous prenions par la main, nous députés, ceux qui resteront et ceux qui viendront pour essayer d'être plus concis dans nos interventions, de ne plus faire de choses inutiles pour la République. Je crois que cela est du mauvais travail et si le Conseil d'Etat estime qu'il a autre chose à faire qu'à répondre à nos fantaisies, il faut l'en louer. Je ne pense pas que le Conseil d'Etat soit responsable de la situation que vous venez de décrire, c'est nous, députés, qui exagérons.
Mme Vesca Olsommer (Ve). J'aimerais directement passer à un cas concret qui démontre à quel point les rapports entre le Conseil d'Etat et le Grand Conseil pourraient être améliorés. En ouvrant les différents journaux de ce matin, que voit-on ? On y voit qu'une demi-page y est consacrée à M. Segond présentant le bilan de l'environnement genevois. M. Segond répond à une motion des écologistes (Manifestations diverses.) déposée en 1990. Motion acceptée par tout le parlement, ce dont nous sommes très reconnaissants. L'idée n'est évidemment pas d'apporter la moindre critique à M. Segond. Tant mieux pour lui si les journaux, ce matin, lui consacrent une demi-page, mais pourquoi alors les parlementaires n'ont-ils pas été informés en même temps que la presse à propos d'une motion sur laquelle ils ont tous travaillé ? Je trouve que c'est un peu ennuyeux, ce d'autant plus que, comme l'a dit M. Lachat, à partir du point 60 de l'ordre du jour il y a toute une série de motions, dont plusieurs ont été déposées par les écologistes concernant l'environnement, qui ont mis des années à recevoir une réponse et, lorsque celles-ci arrivent, elles sont pour le moins très brèves.
M. Nicolas Brunschwig (L). Cher Monsieur Lachat, tout est perfectible. Le Conseil d'Etat s'en doute, on y travaille d'ailleurs, le Grand Conseil aussi, rassurez-vous ! Et donc, bien évidemment, les rapports entre le parlement et le gouvernement. Mais ne faut-il pas aussi faire une certaine autocritique. Je parle comme M. Blanc du nombre de motions, interpellations ou autres questions écrites que nous déposons. Nous sommes atteints de logorrhée parlementaire. Parmi les nombreuses statistiques que nous adresse le service du Grand Conseil, nous pourrions peut-être avoir le coefficient du nombre d'actes parlementaires par député de chaque groupe et nous verrions alors que nous pourrions - en tout cas pour certains groupes - essayer d'avoir une autodiscipline.
M. Michel Jörimann (S). La motion de M. Lachat est non seulement nécessaire mais exceptionnellement urgente. Mme Olsommer vous l'a démontré tout à l'heure par un exemple concret. A mon tour de vous en présenter un d'actualité puisqu'il date de quelques minutes. Dans l'exposé des motifs, M. Lachat nous dit : «J'ai en effet été étonné par la capacité de certains de nos conseillers d'Etat d'ignorer les propositions et les réponses des députés, de ne pas y répondre ou d'y répondre de manière imparfaite ou tardive.».
Eh bien, il y a quelques instants, M. Spielmann a demandé au Conseil d'Etat comment il se faisait que les bâtiments officiels, c'est-à-dire l'Hôtel de Ville et le Palais de justice soient décorés de drapeaux «Genève gagne». Le Conseil d'Etat n'a pas répondu. Je le prie de bien vouloir nous répondre parce qu'à mon avis et à celui d'autres députés c'est tout à fait aberrant. Demain, on aura une banque qui pavoisera sur l'Hôtel de Ville, le surlendemain une marque de boisson américaine sur le Palais de justice ou une marque de viande de conserve ! Ce n'est plus possible, il y a quand même une séparation et une certaine éthique à avoir, et j'aimerais bien que le Conseil d'Etat nous réponde à ce propos. (Rires.)
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Après que vous avez mis ce point 28 sous un point particulier de l'ordre du jour, «présidence du Conseil d'Etat», je me sentais déjà frustré tout à l'heure quand la parole m'a été retirée. Je suis ravi maintenant d'avoir l'occasion de la prendre et je constate tout d'abord que M. Lachat a tenu des propos tout à fait agréables et pleins d'éloges à l'égard de ses collègues et de tout le plaisir que ceux-ci trouvaient à participer aux débats de ce Grand Conseil. Le Conseil d'Etat aussi du reste ! Je m'empresse de le dire, Monsieur le député ! (Rires.) Je dois dire que je suis étonné, après ces propos, que vous partiez après un premier tour de piste. En déposant cette motion, je me suis tout d'un coup demandé si vous n'aviez pas changé d'avis, mais je crois que c'est un peu tard maintenant. Peut-être vous imaginiez-vous que l'on vous répondrait dans quatre ans et que vous seriez à nouveau sur les bancs du Grand Conseil pour, précisément, entendre la réponse de la bouche de M. Fontanet.
Des voix. Fontanet fils !
Une autre voix. Le petit-fils de Guy !
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Le petit-fils ? Ah, alors là je n'étais pas tout à fait dans la course ! (Rires.) Comme pour «Genève gagne», Monsieur le député, nous avons été très surpris de voir tout à coup les bâtiments publics pavoisés avec certaines couleurs, à notre insu. Contrairement à ce que certains imaginent, nous avons considéré qu'il fallait que les bâtiments restent pavoisés aux couleurs officielles et c'est la raison pour laquelle nous avons, en toute collégialité, pris la décision à laquelle vous avez fait allusion tout à l'heure.
Cela étant dit, pour en arriver au fond du problème, M. Lachat a raison, Mme Olsommer également, nous pouvons faire mieux. Nous vous présentons notre mea culpa...
M. Claude Blanc. C'est l'moment ! (Rires.)
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. C'est le moment, voilà ! Surtout en fin de législature, c'est d'autant plus facile !
M. Claude Blanc. C'est votre testament ? (Eclats de rires.)
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Oh, on verra qui fait les testaments ! (Brouhaha.) Vous avez raison, on peut toujours faire mieux, mais j'aimerais quand même souligner que nous avons fait des efforts considérables pour répondre aux multiples interventions de ce parlement. J'ai pensé qu'il serait utile de demander une statistique à M. le sautier que je remercie. Vous serez peut-être intéressés de savoir que, depuis le début de la législature, pas moins de 262 motions ont été déposées, c'est-à-dire une par jour ouvrable et il y en a encore une 263ème avec celle de ce soir, si je comprends bien. Je ne doute pas que toutes ces motions étaient d'une importance toute particulière, notamment celle de M. Lachat qui, un soir, répondait à une résolution de «Genève gagne» et de la FMB et qui s'est cru obligé de déposer de son côté une motion nous demandant de faire le bilan sur un certain nombre de choses. Nous avons quand même réussi à répondre à 104 de ces motions, ce qui n'est pas mal du tout.
Une voix. Seulement ?
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Oui, seulement ! Parce que parfois lorsque l'on répond à des motions, on nous les renvoie car, paraît-il, les réponses ne sont pas assez complètes. Alors vous comprendrez que quand on nous reproche de répondre rapidement - ça m'est arrivé pour satisfaire certains amis politiques, (Chahut.) mais il paraît que c'était tellement rapide que ce n'était pas satisfaisant. M. Lachat nous parle dans sa motion des SDA. Alors si je vous racontais le roman des SDA et tous les problèmes que nous avons eus... Mais notez bien que le plan a été approuvé et qu'il est à votre disposition si vous voulez venir le consulter au département.
Je passe des motions aux questions déposées ; ça vous intéressera de savoir qu'il y a eu 202 questions et, évidemment, la palme, vous le savez, elle vous revient, Monsieur Andrié, avec toutes nos félicitations puisque vous avez déposé pas moins de 45 questions à vous tout seul ! (Bravos, applaudissements.) Je dois dire que si les 99 autres députés s'étaient mis dans la tête de battre le record de M. Andrié, si je calcule bien, Monsieur le ministre de l'éducation, nous aurions eu pas moins de 5 000 questions écrites auxquelles il aurait fallu répondre au cours de cette législature ! Alors comment faire au moment où vous nous demandez par ailleurs de réduire les effectifs et de nous occuper des grands problèmes de cette République ? Eh bien, en ce qui concerne les questions de M. Andrié, nous avons adopté une solution toute simple, nous les avons effectivement mises dans un tiroir, (Rires.) Monsieur Lachat, et nous espérons que M. Andrié ne les rappellera pas à la prochaine législature. (Eclats de rires, vifs applaudissements.)
M. David Lachat (S). Je remercie le président du Conseil d'Etat pour sa réponse complète et humoristique et, pour suivre le conseil de M. Blanc, je crois que je vais faire mon mea culpa.
Monsieur Blanc, mea culpa d'avoir déposé avec vous toute une série de motions sur le logement, avec votre accord et votre approbation. Effectivement, peut-être en avons-nous trop fait, nous sommes tous dans la même galère.
En définitive, ce que je souhaitais par cette toute petite motion, c'était susciter le débat et mettre le doigt sur des responsabilités partagées. Nous avons le tort, au Grand Conseil, de trop demander au Conseil d'Etat, et le Conseil d'Etat a peut-être eu le tort de ne pas trier dans toutes nos demandes celles qui sont importantes et celles qui le sont moins.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Si, si on trie !
M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. C'est pour cela qu'on n'a répondu qu'à la moitié ! (Rires.)
M. David Lachat. Et pour vous débarrasser d'une tâche supplémentaire, je retire ma proposition de motion.
L'assemblée. Non, non, non !
M. David Lachat. J'en ferai, si vous me le permettez, lorsque je serai redevenu petit citoyen, une pétition que je prierai de transmettre à la commission du règlement qui s'occupe de revoir le fonctionnement du Grand Conseil pour qu'elle veuille bien examiner quelques petites propositions que j'ai faites en page 6 de mon texte. On pourrait peut-être en ajouter une, c'est qu'effectivement la forme de la motion n'est pas toujours adéquate. Peut-être pourrait-on imaginer d'adopter une procédure un peu semblable à celle qui a cours au niveau fédéral, qui permettrait de transformer des motions, je dirais de second ordre, en postulats.
La présidente. Nous prenons acte du retrait de cette motion.
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat, dans sa générosité, l'accepte. (Rires.)
M. Pierre Meyll (T). Il me semble qu'une motion peut être reprise. Et si nous la reprenions tous ensemble ? (Rires.)
La présidente. Vous la reprenez ?
L'assemblée. Oui, oui !
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue:
MOTION
pour améliorer les rapportsentre le Grand Conseil et le Conseil d'Etat
Le Grand Conseil,
considérant :
le nombre important de décisions du Grand Conseil que le Conseil d'Etat ignore ou ne respecte pas;
la nécessité d'améliorer les rapports entre le Législatif et l'Exécutif;
l'opportunité de traiter cette question dans le cadre des réformes de nos institutions (Conseil d'Etat, Grand Conseil) en cours d'examen,
invite le Conseil d'Etat à :
Donner son appréciation sur l'état actuel des rapports à Genève entre le Législatif et l'Exécutif.
Se prononcer sur les considérations figurant dans la présente motion.
Expliquer les raisons pour lesquelles tant de propositions du Grand Conseil demeurent sans réponse dans les délais légaux.
Se prononcer sur les réformes proposées au point 5 de l'exposé des motifs de la présente motion, et formuler toutes autres propositions utiles pour améliorer les rapports entre le Conseil d'Etat et le Grand Conseil.