République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 16 septembre 1993 à 17h
52e législature - 4e année - 7e session - 32e séance -autres séances de la session
No 32
MÉMORIAL
DES SÉANCES DU
GRAND CONSEIL
52e LÉGISLATURE
Jeudi 16 septembre 1993,
nuit
Présidence:
Mme Micheline Calmy-Rey,présidente
La séance est ouverte à 20 h 30.
Assistent à la séance: MM. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat, Dominique Föllmi, Jean-Philippe Maitre, Olivier Vodoz, Guy-Olivier Segond, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
La présidente donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Claude Haegi, Bernard Ziegler, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Charles Bosson, Hermann Jenni, Georges Jost, Albert Maréchal, Gérard Ramseyer, David Revaclier, Martine Roset, Michel Rossetti, Christine Sayegh, Philippe Schaller, Alain Vaissade, députés.
3. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
La présidente. La proposition de résolution suivante est parvenue à la présidence:
Mme Claire Torracinta-Pache (S). Il s'agit d'un projet de résolution concernant l'éventuelle fusion ou disparition du journal «La Suisse». Au vu de l'actualité, je souhaiterais que l'on puisse la développer au cours de la séance plénière d'aujourd'hui ou celle de demain.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
d) de demandes d'interpellations;
La présidente. La demande d'interpellation suivante est parvenue à la présidence:
Cosignataires: Maria Roth-Bernasconi, Martine Wenker Coskun, David Lachat, Irène Savoy, Pierre-Alain Champod.
Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
e) de questions écrites.
La présidente. La question écrite suivante est parvenue à la présidence :
Elle sera transmise au Conseil d'Etat.
Mme Fabienne Proz Jeanneret-Grosjean est assermentée.
5. Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels chargée d'étudier les objets suivants:
Comment exploiter au mieux la chaleur solaire?
C'est la question que se sont posée les Rentes Genevoises qui ont installé 30 m2 de panneaux solaires sur l'un de leurs immeubles. Ce complexe produit annuellement 20'000 Kwh de chaleur utile; cela représente le quart de la consommation totale. L'opération est rentable.
Une autre installation de 28 m2 est en construction et une étude est en cours pour réaliser 8 des 39 locatifs de cette même assurance viagère.
Bravo à ces responsables d'entreprise qui se risquent et concilient rentabilité avec écologie.
Comme rapporteur, cela me rassure, car j'ai lu et relu la conception cantonale de l'énergie et, je dois l'avouer, mon esprit pragmatique a de la peine à déceler cette étincelle d'où, du catalogue des actions, jaillira une réalisation prochaine.
Rappelons les principales dates qui précèdent l'acceptation de la conception cantonale de l'énergie. C'est le 7 décembre 1986 que la population genevoise a accepté l'article 160 c de la constitution, fondé sur l'initiative «l'énergie, notre affaire».
La loi sur l'énergie qui en découle est entrée en vigueur le 7 novembre 1987, puis, toute une série de loi sur l'énergie a complété l'article constitutionnel 160 c.
Loi sur l'énergie
chauffage électrique (16 septembre 1989);
encouragement au recours à l'énergie solaire au moyen de subventions (18 mai 1990);
rendre prioritaire le développement des énergies renouvelables (9 avril 1992);
modalités d'approbation de la conception cantonale de l'énergie (9 avril 1992);
obligation du calcul de l'indice de dépense d'énergie (9 avril 1992);
bâtiments des collectivités et établissements de droit public (9 avril 1992);
reprise de l'énergie par les Services industriels (9 avril 1992).
Loi sur les constructions et les installations diverses
climatisation (15 septembre 1989);
exigences en matière d'isolation de l'enveloppe des bâtiments (9 avril 1992);
décompte individuel des frais de chauffage et d'eau chaude sanitaire (9 avril 1992).
Loi sur l'organisation des Services industriels
obligation de reprise de l'énergie des autoproducteurs (9 avril 1992).
Au niveau fédéral, le moratoire nucléaire de dix ans était accepté en votation populaire le 23 septembre 1990. Il en est résulté un programme intitulé «Energie 2000».
Réduire les agents fossiles pour atteindre la consommation de 1990 d'ici l'an 2000;
réduire l'accroissement de la consommation d'électricité de telle sorte qu'il s'annule à l'horizon 2000;
contribuer, par des ressources indigènes, à la production de chaleur à raison de 3 % pour la même échéance;
contribuer à la production d'électricité par des ressources indigènes (sans hydro-électricité) pour 0,5 %;
accroître la production d'énergie hydro-électrique de 5 % d'ici à l'an 2000.
La commission consultative cantonale en matière d'énergie a travaillé pendant près de deux ans; c'est à partir de cette réflexion que le Conseil d'Etat livre la proposition de résolution ci-après, dont les postulats de base et le catalogue des actions vont être décrits.
La commission Energie et Services industriels s'est réunie le 18 juin 1993 sous la présidence de M. Hervé Burdet, en remplacement de Mme Micheline Calmy-Rey, présidente. Ont assisté à cette séance M. le conseiller d'Etat Jean-Philippe Maitre, chef du département de l'économie publique, M. Jean-Pascal Genoud, délégué à l'énergie.
Une passe d'armes s'échange entre des députés et M. Maitre, qui rap-pelle que les objectifs politiques sont clairs:
1. assurer un approvisionnement sûr, diversifié et respectueux de l'environnement. Il y a une clause antinucléaire qui se trouve dans la constitution;
2. valoriser les énergies indigènes;
3. maîtrise de la consommation d'énergie.
Ensuite, il y a un catalogue d'actions, la conception est un outil de travail. Mais certains députés reprochent que le terme de 2025 pour réaliser une décroissance de la consommation afin de parvenir à celle de 1990, est un objectif politique peu volontariste et peu crédible, même s'il y a d'autres objectifs à plus court terme. Nous ne nous sentons pas concernés par un délai si long, disent-ils encore.
Chacun, cependant, s'accorde à entrer en matière sur le fondement de cette conception, en laissant de côté les délais de réalisation.
Par souci de transparence, j'indique les votes sur chaque article et précise que, dans un vote d'ensemble, c'est à l'unanimité que la commission vous propose d'accepter la résolution 253.
Le Grand Conseil, vu l'article 10 de la loi sur l'énergie, décrète la conception cantonale de l'énergie du 10 février 1993 adoptée dans la teneur suivante; 4 postulats et les actions ci-dessous décrits:
Postulat 1
La politique cantonale en matière d'énergie doit promouvoir une utilisation économe et rationnelle de l'ensemble des agents utilisés par la collectivité genevoise.
(Approuvé à l'unanimité)
Postulat 2
La politique cantonale en matière d'énergie doit permettre la maîtrise de notre approvisionnement énergétique et promouvoir le développement prioritaire des énergies indigènes.
(Approuvé à l'unanimité)
Postulat 3
Indépendamment d'allocations budgétaires cantonales ou communales, le financement des mesures de politique énergétique peut faire l'objet d'un surcoût sur les prix des énergies consommées, dans le respect du droit fédéral et moyennant:
une base légale;
l'existence d'un intérêt public;
le respect du principe de proportionnalité.
(Accepté par 8 oui, 1 abstention - peg.)
Postulat 4
La politique cantonale en matière d'énergie doit prendre en compte les exigences de la protection de l'environnement.
(Approuvé à l'unanimité)
Catalogue des actions
Actions à caractère général
G 1: Planifier et coordonner l'information. Celle-ci doit faire l'objet d'un plan, dont la responsabilité incombe à l'office cantonal de l'énergie. Cette information a pour but de responsabiliser la population en l'associant aux efforts des autorités et de l'ensemble des milieux concernés.
(Approuvé à l'unanimité)
G 2: L'énergie dans les programmes d'enseignement: l'instruction des élèves des différents ordres d'enseignement doit faire l'objet d'une information ou d'un programme approprié concernant le domaine de l'énergie. Cette information ou ce programme doit être élaboré par le département de l'instruction publique en collaboration avec l'office cantonal de l'énergie. Les écoles membres de l'AGEP seront associées à cette démarche.
(Approuvé à l'unanimité)
G 3: La formation professionnelle doit, dans la mesure du possible, prendre en compte la problématique de l'énergie, la coordination relevant des compétences du conseil central interprofessionnel.
(Accepté par 8 oui, 1 abstention - peg.)
G 4: Les questions énergétiques doivent être intégrées dans les programmes de formation continue des professionnels.
(Approuvé à l'unanimité)
G 5: La problématique de l'énergie doit faire l'objet d'une information sur les lieux de travail.
(Approuvé à l'unanimité)
G 6: Constituer un organe de coordination, présidé par le délégué à l'énergie, pour assurer la meilleure efficacité de tous les services de l'Etat concernés par les questions relatives à la gestion de l'énergie.
(Approuvé à l'unanimité)
G 7: Dans les limites budgétaires, doter l'office cantonal de l'énergie des moyens suffisants:
pour assurer la mise en place et l'exécution de la présente conception;
en vérifier l'impact.
Actions relatives au domaine des combustibles
C 1: Favoriser la concertation des parties en cause sur le problème de la concurrence entre agents énergétiques, en particulier entre les énergies de réseau et les combustibles liquides et solides.
(Approuvé à l'unanimité)
C 2: Procéder systématiquement à une étude de l'usage des énergies renouvelables pour les bâtiments des collectivités publiques, établissements de droit public et subventionnés.
(Approuvé à l'unanimité)
C 3: Allouer une subvention lors de la réalisation d'une installation solaire de production d'énergie thermique, l'énergie solaire se substituant à une énergie fossile. Le montant est calculé de telle sorte que le prix de l'énergie thermique solaire approche celui de l'énergie thermique fournie par une source conventionnelle, compte tenu de la durée d'amortissement de l'installation.
(Accepté par 8 oui, 1 abstention - peg.)
C 4: Permettre à des projets expérimentaux comportant un risque d'échec de bénéficier, cas échéant, d'une garantie financière appropriée.
(Approuvé à l'unanimité)
C 5: Utiliser rationnellement la chaleur des Cheneviers pour le chauffage à distance.
(Accepté par 8 oui, 1 abstention - peg.)
C 6: Mettre au point un préavis énergétique dans la procédure d'autorisation de construire.
(Accepté par 8 oui, 1 abstention - peg.)
C 7: Appliquer le décompte individuel des frais de chauffage et d'eau chaude sanitaire (selon les modalités de la loi).
(Approuvé à l'unanimité)
C 8: Elaborer, en concertation avec les organisations professionnelles concernées et les Services industriels de Genève, un cahier des charges relatif au réglage et à la surveillance des installations de production et de distribution de chaleur.
(Approuvé à l'unanimité)
C 9: Utiliser, dans la mesure du possible, les incitations financières et fiscales destinées à favoriser les économies d'énergie dans le secteur bâti.
(Approuvé à l'unanimité)
Actions relatives à l'électricité
E 1: Etablir un plan d'exploitation des ressources indigènes susceptibles d'être distribuées en réseau.
(Approuvé à l'unanimité)
E 2: Après étude des nouveautés en système d'éclairage, élaborer, avec le concours des milieux professionnels concernés, et diffuser des recommandations destinées au public qui incitent à une utilisation optimale de l'éclairage naturel et des sources de lumière artificielle, en tenant compte des conséquences sur le bilan énergétique global, des autres besoins en énergie, de l'état de la technologie et de la santé.
(Approuvé à l'unanimité)
E 3: Favoriser la mise en application de la section 2 de l'ordonnance fédérale visant une utilisation économique et rationnelle de l'énergie, du 22 janvier 1992. Cette action incombe au Conseil d'Etat.
(Approuvé à l'unanimité)
E 4: Contribuer à la mise en place de modes d'étiquetage des appareils qui soient compréhensibles pour la population.
(Approuvé à l'unanimité)
E 5: Concevoir un mode de détermination d'un indice de dépense électrique dans le secteur immobilier. Cette action doit être entreprise sous la direction de l'OCEN par un groupe réunissant les spécialistes concernés.
(Accepté par 8 oui, 1 abstention - peg.)
E 6: Elaborer une méthode d'évaluation de la consommation de l'électricité pour les projets de construction, permettant des choix qui, en matière d'équipements, conduisent à une utilisation rationnelle de l'énergie.
(Approuvé à l'unanimité)
E 7: Equiper de panneaux photovoltaïques les bâtiments publics là où leur orientation et l'intérêt énergétique le justifient. Cette action incombe aux collectivités publiques concernées, en collaboration avec les SIG.
(Accepté par 8 oui, 1 abstention - peg.)
E 8: Favoriser le développement des installations photovoltaïques par des mesures tarifaires et par des subventions, dans les limites des allocations budgétaires, en tenant compte de l'évolution de la technique, des conditions d'exploitation, du caractère de substitution et de l'intégration à l'architecture.
(Accepté par 8 oui, 1 abstention - peg.)
E 9: Etudier et mettre en oeuvre des méthodes de tarification qui, sans pénaliser l'économie, ont pour objectif de réduire la consommation d'énergie et de diminuer les appels de puissance.
(Approuvé à l'unanimité)
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 10 de la loi sur l'énergie,
Décrète
La conception cantonale de l'énergie, du 10 février 1993, est adoptée.
Débat
M. Jean-Claude Genecand (PDC), rapporteur. Je désire d'abord apporter deux petites corrections. L'une, page 3, paragraphe 3, à la place de Jean-Pascal Genecand, il conviendrait de mettre Jean-Pascal Genoud. L'autre correction concerne une passe d'armes entre des députés et M. Maitre. En effet, on a oublié : «des députés et...».
Je propose un ajout à la résolution 253, dans laquelle j'ai omis d'inscrire la phrase suivante relative à la conception cantonale de l'énergie du 10 février 1993, à la page 9 : «...à teneur des quatre postulats de base et du catalogue des vingt-cinq actions est adoptée». M. Maitre avait proposé cette formulation lors de notre séance en commission.
Madame la présidente, j'ai déposé cet amendement sur votre bureau.
M. Max Schneider (Ve). Je désire expliquer que ce projet contient plusieurs abstentions du PEG. En effet, j'étais présent dans cette commission et, s'il y a des abstentions du PEG, je tiens à signifier qu'elles viennent de ma part. Comme je travaillais dans le domaine de l'énergie solaire, je me suis abstenu sur les points 6, 7 et 8.
Toutefois, au point C 5 à la page 6, concernant les actions à accomplir - utiliser rationnellement la chaleur des Cheneviers pour le chauffage à distance - je me suis là aussi abstenu. Au sujet de ce point C 5, il me semble que nous devrions avoir en main une étude comparative sur les autres sources d'énergie pour l'utilisation de ce chauffage à distance, notamment pour la commune d'Onex et cette région.
Pour le reste, c'est un bon projet. Pour nous, c'est une possibilité intéressante. Bien que cette commission consultative et l'Office cantonal de l'énergie aient fait un très bon travail et que la collaboration soit tout à fait satisfaisante, j'ai quelques doutes car je ne vois pas de chiffres. Cela n'est qu'une constatation.
Il existe aujourd'hui une mafia du nucléaire présente ici en Suisse... (Rumeurs.)... et certainement influente dans notre canton. Je tiens à préciser que, lorsque je parle de cette mafia du nucléaire, il ne s'agit pas de directeurs ou de hauts fonctionnaires bien connus. Je n'accuse personne, mais des pressions existent.
Le postulat numéro deux de ce texte est si fort que je souhaite simplement le voir appliqué. Je désire que le vote de ce soir de notre Grand Conseil soit appliqué à tous les niveaux de l'administration et aussi par les Services industriels. Si c'est le cas, alors c'est vraiment un postulat merveilleux. Le PEG votera oui.
M. Chaïm Nissim (Ve). Je voudrais apporter un petit complément à l'excellent rapport de notre collègue Genecand. Voici deux ans, dans une commission consultative extra-parlementaire, nous étions partis sur l'idée de faire une véritable conception complète comprenant des objectifs et des moyens.
Voici un bon exemple d'objectif : celui de la Ville de Genève. Elle prévoit de réduire de 20% sa consommation d'électricité dans les dix ans à venir. Bien qu'ambitieux, cet objectif est raisonnable.
Malheureusement, après deux ans de travail en commission consultative, nous n'avons pas réussi à nous mettre d'accord sur les objectifs à atteindre. La raison en est que certains hauts fonctionnaires du département voulaient absolument avoir des objectifs qui commencent par croître avant de décroître et qui seraient revenus, en l'an 2025, à une consommation semblable à celle que nous avions en 1990. Cela nous semblait extrêmement défaitiste. Nous avons donc renoncé puisque nous n'étions pas d'accord sur le choix des objectifs. Par contre, nous nous sommes accordés sur les moyens, une liste de postulats et d'actions. Notre travail de deux ans n'a donc pas été inutile. C'est pourtant regrettable de n'avoir pas pu définir d'objectifs.
Je vois «Mme Martine» qui hausse la tête ! C'est pour moi cela ? C'est compliqué ? (Rires et commentaires.)
La présidente. Monsieur Nissim, continuez!
M. Chaïm Nissim. Je désire profiter de la récente arrivée de M. Maitre pour l'interroger au sujet du débat qui a eu lieu dans les cinq dernières minutes de la précédente séance. Lors de ce débat, nous avons parlé de ce contrat d'approvisionnement signé entre EOS et EDF et par les SI portant sur 300 mégawatts.
En commission, M. Ducor nous a annoncé qu'il avait demandé un avis de droit pour savoir s'il pouvait signer un contrat d'achat de courant, notamment nucléaire, en France, étant donné la constitution cantonale. Il nous a dit que, si vous le délivriez de son secret de fonction, il serait prêt à nous publier cet avis de droit. Nous aimerions le lire, car nous avons quelques doutes sur la légalité de ce qu'il a fait.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Je regrette tout d'abord de ne pas avoir pu participer à votre précédent débat. J'étais excusé et, appa-
remment, il semble que j'ai manqué un hymne à la joie tout particulier, une ode à la nuance, dont je regrette beaucoup de ne pas avoir pu saisir le contenu.
En ce qui concerne la conception, une discussion a lieu et, apparemment, elle a été renouvelée très brièvement ici sur la question des objectifs, plus particulièrement sur la concrétisation de certains objectifs en tendance chiffrée.
Nous devons une fois encore mettre les choses tout à fait au net. Les objectifs de la politique énergétique sont fixés dans la constitution. Ils sont clairs, nets et résultent de l'initiative : «L'énergie, notre affaire». Ce sont des objectifs politiques qui lient toutes les autorités, le gouvernement, votre parlement et les entités qui ont pour mission de s'approvisionner et de distribuer l'énergie, en l'occurrence les Services industriels.
La controverse a été nourrie sur ce que je serais tenté d'appeler un faux problème. Lorsque les objectifs comprenant certaines tendances chiffrées ont été annoncés dans le projet de conception cantonale, c'était sur la base de données qui, de toute évidence, ne sont plus actuelles. Elles ont été fixées sur la base de données appartenant à la haute conjoncture. En ce temps-là, la croissance des activités trouvait son écho dans la croissance de l'énergie consommée. Aujourd'hui, force est d'admettre que ces données n'ont plus cours.
Je l'ai dit et le répète publiquement : ces données de référence sont aujourd'hui caduques. Plutôt que de nous disputer sur des chiffres qui, en définitive, ne sont que des extrapolations, mettons-nous d'accord sur une méthode de travail, un concept concret, des actions possibles, compte tenu du fait que les axes politiques ont été définis par le souverain puisqu'ils se trouvent dans la constitution.
A cet égard, la plupart des mesures concrètes que vous avez votées et qui font que cette conception cantonale a été admise à l'unanimité de la commission - cela me réjouit - sont, pour la plupart d'entre elles, mises en action. Ce fait est très important. Il est également très important que la commission parlementaire de l'énergie et des Services industriels ait pu trouver un accord sur la réalisation d'actions concrètes. En effet, nous avons enfin admis la stérilité de disputes dans l'abstrait et l'intérêt réel de se réunir dans le concret. Je suis très heureux que, toutes tendances confondues, ce parlement soit réuni dans le domaine concret. C'est un bon signe ainsi qu'un encouragement considérable pour nous permettre d'avancer à la rencontre des objectifs politiques inscrits dans la constitution.
M. Schneider a parlé tout à l'heure de l'utilisation de la chaleur de l'usine d'incinération des Cheneviers. Ce projet, appelé CADIOM, est pour nous extrêmement intéressant. Comme vous le savez, cette usine produit de l'électricité et de la chaleur. Il est donc question d'utiliser cette production, en tant que telle, dans le cadre d'un réseau de chauffage à distance.
Ce projet est extrêmement ambitieux. Toutefois, nous avons la volonté tenace de le réaliser, bien que la conjoncture et les finances publiques ne soient pas un bon indicateur en ce moment. Ce projet représente plusieurs milliers de tonnes équivalent pétrole. Il a un double objectif. Il est intéressant du point de vue énergétique et de celui de l'assainissement de l'air. Ce double objectif mérite de retenir votre attention.
L'objectif de la Ville de Genève a été évoqué. C'est celui de sa réduction de consommation en électricité. Je me réjouis que l'on parle de la Ville de Genève qui mène une action engagée. Toutefois, je regrette quelque peu qu'on oublie les objectifs de la politique cantonale s'agissant de l'administration cantonale et qui, je vous le rappelle - cela a été annoncé - s'inscrivent exactement dans la même cible. Nous pouvons dire que dans le domaine du concret nous avons un tout petit peu d'avance. Ce n'est pas pour jouer la Ville de Genève contre l'Etat, ce serait stérile, mais pour vous permettre d'être régulièrement informés de ce qui se fait.
Lors du débat précédent, vous avez posé une question, Monsieur Nissim, et vous la renouvelez ici. J'aimerais vous dire, et nous nous sommes clairement expliqués en commission de l'énergie, que la mission des Services industriels est double. L'objectif des SI est double. A teneur de la constitution, les SI ont l'obligation d'assurer l'approvisionnement en énergie de ce canton. C'est un objectif capital et la conjoncture dans laquelle nous vivons aujourd'hui ne nous permet pas de lésiner sur cet objectif.
Les SI, également, ont l'obligation de respecter les objectifs de l'article 160 c de la constitution avec ses données prioritaires, à savoir, la valorisation des énergies indigènes et renouvelables, les économies d'énergie et l'utilisation rationnelle de l'énergie qui sont des objectifs prioritaires.
La constitution, s'agissant du dossier nucléaire qui éveille votre sensibilité, s'agissant de l'objectif antinucléaire, est claire et nette : elle interdit aux autorités genevoises d'accepter une installation nucléaire sur le territoire du canton ou au voisinage de celui-ci et pose également une disposition analogue en ce qui concerne le traitement des déchets.
Les SI sont liés par l'un et l'autre de ces deux objectifs : art. 158 et 160 c. La contradiction que vous devez tirer est la suivante : nous ne pouvons pas interdire aux SI de s'approvisionner en énergie, dès lors qu'ils ont l'obligation d'assurer l'approvisionnement de ce canton conformément à l'article 158 de la constitution. Cet objectif est fondamental et nous ne pouvons pas «faire joujou» avec la sécurité de l'approvisionnement en énergie électrique de notre canton.
Il est clair que les SI ont l'obligation de veiller à l'application de l'article 160 c de la constitution, par conséquent de continuer à travailler pour la valorisation des énergies renouvelables et des programmes d'économie d'énergie, de maîtrise de l'énergie et, en particulier, de l'énergie électrique.
Je pense avoir répondu à votre question le plus loyalement possible, en admettant qu'une ambiguïté existe puisqu'il y a deux objectifs qui, pour partie, peuvent s'avérer contradictoires.
M. Chaïm Nissim (Ve). Notre président Maitre nous parle de ces deux mandats des SI qui, pour partie, peuvent s'avérer contradictoires... (M. Annen fait une objection.)
En effet, Monsieur Annen, on ne l'a pas eu en plénière. Mais c'est important que nous l'ayons en plénière. Quant à moi, je prétends qu'il n'y a aucune...
La présidente. Monsieur Annen, vous demanderez la parole!
M. Chaïm Nissim. ...contradiction entre ces deux objectifs. Si vous voulez satisfaire à l'article 158, à savoir que les gens soient approvisionnés convenablement, si vous voulez satisfaire à ce besoin pendant quelques années encore, il vous faut absolument satisfaire aussi à l'article 160 c qui propose de faire des économies.
Vous ne pouvez pas approvisionner les gens convenablement à long terme si vous ne faites pas en même temps des économies. En effet, si vous construisez continuellement des nouveaux tuyaux avec des robinets ouverts au bout, il est clair que vous n'aurez plus assez d'eau pour approvisionner toute la population. Il faut donc, lorsque vous construisez de nouveaux tuyaux, apprendre aux gens à fermer le robinet ou, alors, fabriquer des robinets à meilleur rendement. A mon avis, ces deux mandats des SI vont parfaitement bien ensemble.
Pour en terminer avec l'investissement des SI, c'est une chose extrêmement importante. Les SI ont choisi d'investir dans le nucléaire en France, enfin, dans le parc français, et c'est une somme considérable. Ce sont plus de 250 millions qui ont été investis. Si cette même somme avait été investie dans les économies d'énergie, on aurait une meilleure maîtrise de l'approvisionnement et l'on aurait donc satisfait aux deux articles 160 c et 158 en même temps.
Maintenant, Monsieur Maitre, je vous réitère ma question et vous la réitérerai encore lors d'une interpellation que j'ai l'intention de faire.
M. Armand Lombard. Pas ce soir !
M. Chaïm Nissim. Non, pas ce soir, rassurez-vous Monsieur Lombard ! J'aimerais que ce parlement ait connaissance de cet avis de droit qui a permis à M. Ducor d'investir tous ces millions dans le nucléaire français. J'estime que nous avons ce droit.
Mis aux voix, l'amendement de M. Genecand est adopté.
Mise aux voix, la résolution, ainsi amendée, est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
RÉSOLUTION
approuvant le projet de la conception cantonale de l'énergie
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 10 de la loi sur l'énergie,
Décrète
La conception cantonale de l'énergie, du 10 février 1993, à teneur des 4 postulats de base et du catalogue des 25 actions, est adoptée.
LE GRAND CONSEIL,
considérant:
que le chômage s'aggrave;
que les perspectives de reprise de l'emploi en cas de reprise de l'activité économique ne sont pas évidentes;
que de nombreuses mesures sont entreprises pour améliorer les prestations de chômage, introduire un revenu minimum d'insertion et d'existence, prévenir le chômage en donnant une formation aux chômeurs;
que si ces mesures sont indispensables, l'expérience de pays européens voisins avec le chômage de longue durée montre qu'elles n'ont pas d'effet palliatif en ce qui concerne la diminution d'emplois;
qu'il existe de nombreux besoins non satisfaits, notamment pour ce qui a trait aux emplois dans les services;
que ces emplois peuvent être créés sans investissements majeurs;
que cela implique, en sus de l'assistance accordée aux chômeurs, la prise de responsabilité de tous les acteurs de la vie sociale économique pour inciter à la création de tels emplois;
que l'une des voies ouvertes à cette prise de responsabilité est l'octroi de prêts aux personnes exclues du marché du travail afin de développer de nouveaux emplois;
que cela présuppose la création d'institutions de crédits capables d'exercer une activité en faveur des personnes exclues et au chômage, afin de leur permettre de prendre des responsabilités dans la création d'emplois pour eux-mêmes et pour d'autres,
invite le Conseil d'Etat
à procéder à une étude de faisabilité sur la création de systèmes de crédits destinés aux entrepreneurs qui sont au chômage et aux groupes d'entraide qui souhaitent créer des entreprises, et qui ne peuvent accéder aux crédits usuels des banques et des organismes de cautionnement mutuels, destinés à la création d'emplois dans les services locaux, par des micro-entreprises à faible capitalisation;
à établir, sur cette base, un rapport contenant des propositions concrètes ouvrant des perspectives de création d'emplois aux acteurs de la vie économique et sociale.
EXPOSÉ DES MOTIFS
A. L'impasse du chômage de longue durée
1. Le chômage ne va pas disparaître sitôt.
2. Face à la pauvreté et à l'exclusion suscitées par ce phénomène, le sentiment de justice implique les mesures suivantes:
développement de l'assurance chômage, des programmes d'occupation temporaire et de la retraite anticipée;
développement des possibilités de formation et de recyclage;
développement des mesures préventives du chômage, notamment en favorisant la capacité des personnes au chômage de créer des entreprises;
fourniture d'un revenu minimum d'insertion et d'existence aux personnes qui se trouvent exclues des filets existants de la protection sociale.
Ces mesures indispensables ont toutes été prises, sous une forme ou sous une autre, par nombre de pays industrialisés et à Genève. Toutefois, aussi nécessaires soient-ils, ces dispositifs ne répondent pas à la question lancinante de savoir où les nouveaux emplois vont être crès pour fournir une activité digne aux personnes qui se trouvent exclues du marché du travail. La sécurité sociale et les mesures d'assistance permettent d'éviter la pauvreté, mais non pas de créer des emplois, car telle n'est pas leur fonction. Par ailleurs, la logique de la protection sociale ne peut être répétée à l'infini, car elle tend à renchérir le facteur travail qui suscite, à son tour, des mesures de rationalisation et d'augmentation de la productivité, visant à réduire le travail humain.
3. Devant ce dilemme angoissant, le débat politique tend à se polariser. En effet, les néo-libéraux les plus catégoriques pensaient avoir trouvé la pierre philosophale dans une déréglementation massive, notamment par une baisse substantielle des salaires et de la protection sociale et/ou des normes protectrices de l'environnement. L'espoir est que les salaires suisses puissent, par exemple, faire concurrence aux salaires thaïlandais ou indiens. Outre le fait que cette approche témoigne d'une brutalité sociale économique certaine («capitalisme sauvage»), rien ne dit, ni ne prouve, qu'une telle issue à la crise du chômage soit réaliste. Les exemples récents de nombreux pays industrialisés qui ont connu un processus de déréglementation important ne sont pas concluants en raison des phénomènes de dislocation sociale grave qu'ils commencent à connaître. C'est l'une des raisons d'ailleurs qui pousse certains à proposer la constitution de grands blocs économiques (CE, NAFTA et Sud-Est asiatique), qui règleront sur une base plus stable leurs échanges commerciaux, dans le cadre du marché mondial, notamment par des clauses sociales et écologiques.
4. Il est dès lors urgent de réfléchir à de nouvelles pistes de lutte contre le chômage. A côté des efforts classiques et nécessaires de la relance et de la promotion économique régionale, trois pistes nouvelles apparaissent fréquemment dans les débats et les discussions actuelles, notamment grâce à l'action des écologistes:
le partage du travail;
la recherche de nouvelles sources de financement des systèmes de protection sociale par des taxes incitatives en matière d'environnement dont le but est d'éviter que les prélèvements sur le facteur travail augmentent, au détriment de la création d'emplois, tout en favorisant un rèquilibrage fondamental des rapports entre l'homme et la nature;
l'amélioration du niveau général et spécifique de la formation de chaque personne afin de favoriser le développement du savoir productif .
5. Une quatrième piste plus locale mérite d'être explorée et qui n'est pas exclusive des autres. Il s'agit de combiner la logique d'assistance et de protection de la sécurité sociale avec une logique de responsabilité de chacun pour la création d'emplois. A ce titre, la constitution d'organismes de crédits spécifiques destinés aux victimes du chômage de longue durée et de l'exclusion mérite réflexion. Car, selon les termes d'Anne-Sophie Boisgallais et d'Anne Le Bissonnais, les «...pratiques alternatives de crédits forment l'une des rares idées que l'on ait pour lutter durablement contre l'exclusion et le chômage, et pas seulement dans les pays du Sud» .
B. Quand le Sud peut inspirer le Nord
6. De nouvelles formes de crédits se développent dans plusieurs pays du Sud de notre globe. Leur objectif est de libérer les petits producteurs et aider les plus démunis à s'en sortir, coincés qu'ils sont entre le crédit inaccessible des banques officielles et le crédit inacceptable des usuriers. Et ça marche!
7. Comme le soulignent Anne-Sophie Boisgallais et Anne Le Bissonnais, après 30 ans d'échec des politiques Nord-Sud de développement, une interrogation est née sur la capacité des systèmes de crédits des pays du Sud de répondre aux exigences d'un vrai développement. Les systèmes bancaires officiels, bien souvent en grande difficulté, se révèlent incapables de répondre aux besoins de financements des communautés locales. Dans ces conditions, les usuriers traditionnels restent le seul recours, mais leurs taux exorbitants empêchent toute accumulation de richesse. Pris en tenaille entre un crédit inaccessible et un crédit inacceptable, les producteurs, et plus généralement tous les plus démunis, se trouvent condamnés au sous-développement. Proposer une alternative à cette situation et libérer les producteurs, tel est l'enjeu des nouvelles formes de crédits qui se développent aujourd'hui. Du Ghana au Bangladesh, de nouveaux réseaux se mettent en place et d'anciennes pratiques empiriques retrouvent droit de cité. Ces nouveaux outils d'épargne sont fondés sur le crédit et sur une épargne locale que l'on rembourse quoi qu'il arrive pour des raisons de pression sociale. Mais ce petit «argent chaud» peut-il se substituer et faire le poids face au gros «argent froid» que mobilise les institutions financières officielles? A considérer la masse des prêts engagés et les résultats flatteurs obtenus dans plusieurs pays, il y a tout lieu de penser que ces initiatives sont prometteuses.
8. De telles initiatives ont quelques caractéristiques communes:
a) Le prêt est accordé à des taux d'intérêts réels, et non pas subventionnés ou abaissés artificiellement.
b) Le crédit finance la production ou la création d'emplois, les crédits à la consommation ou au logement n'étant accordés que lorsque les emprunteurs ont fait leurs preuves avec le crédit productif.
c) Les femmes jouent un rôle majeur et déterminant dans ces institutions, notamment en raison du fait qu'elles remboursent beaucoup mieux que les hommes (!).
d) La plupart de ces institutions refusent une quelconque bonification ou subvention qui s'apparenterait à de l'assistance car le taux d'intérêts doit être rémunérateur.
9. Ces systèmes alternatifs ne fonctionnent pas totalement en dehors des systèmes de financement officiels. Dans les pays où ces systèmes marchent particulièrement bien, il y a reconnaissance et concertation organique entre les institutions qui, par leurs clientèles différentes, peuvent se compléter sans se concurrencer.
10. Un ancien directeur d'une telle institution alternative au Chili relève que ces efforts ne ressortent pas de l'économie informelle. Il vaut mieux parler d'économie populaire, qui fonctionne autrement que l'économie moderne. Les familles avec lesquelles l'institution qu'il dirigeait travaillait, avaient eu pour objectif d'optimiser leurs propres capacités de travail, et non pas d'augmenter leur capital. Les gens créaient des emplois pour la famille et s'arrêtaient là. Cette institution permettait de créer un emploi avec 500 dollars, montant moyen des prêts, tandis que dans les mines chiliennes, il fallait un million de dollars pour créer un emploi. Avec un minimum d'argent, on a eu un effet maximum sur l'emploi.
11. Bien entendu, il est aisé de retorquer que le Sud n'est pas le Nord et que, par conséquent, ces expériences n'ont aucune valeur pour nos problèmes de chômage. Une telle approche est inadéquate.
C. Les leçons du Sud appliquées à la création d'emplois locauxet à faible capitalisation au Nord
12. Jean-Louis Laville souligne que de nombreuses politiques de création d'emplois ont été développées dans les services aux personnes et les services collectifs, seuls domaines où apparaissent aujourd'hui de réelles opportunités. Aide à domicile, entretien de l'environnement, accueil des jeunes enfants, loisirs et culture, tels sont les principaux gisements d'emplois. Or, les mesures destinées à concrétiser ces gisements entraînent des effets pervers souvent occultés:
Le traitement social du chômeur, lorsqu'il devient massif, a des effets pervers. De plus en plus de collectivités territoriales se transforment progressivement en organisatrices d'ateliers de travail. Or, ces occupations temporaires se succèdent sans cohérence dans le temps et sans aboutir à une véritable reconnaissance sociale. Ces efforts tendent plus à promouvoir le droit au revenu que le droit au travail.
D'autres programmes, comme celui des emplois, jouent sur l'abaissement des coûts salariaux, soit par la baisse du salaire net, soit par des exonérations fiscales. Ces efforts favorisent l'établissement de rapports de gré à gré entre l'employeur et le salarié, sans possibilité de médiation ou de contrôle, d'où le risque de constituer une catégorie de «nouveaux serviteurs», pour reprendre la formule d'André Gorz.
Ces rares opportunités en matière d'emplois ont, pour contrepartie, d'accentuer la fragmentation sociale en diversifiant les statuts de l'emploi à l'extrême. L'obsession de la création d'emplois, couplée aux contraintes budgétaires, finit par sacrifier la cohésion sociale.
13. Pour sortir de ce cercle vicieux, il conviendrait, selon Laville, d'opérer un véritable renversement de perspectives: plutôt que de viser l'emploi à tout prix, il s'agirait de donner la priorité à la création d'activités conçues en fonction du vécu de ceux auxquels elles s'adressent. A ce titre, il existe une voie différente pour la création de services de proximité, soit la constitution d'entreprises d'un nouveau type, des entreprises solidaires basées sur la prise en compte du quotidien des usagers. C'est à partir de cet ancrage fondamental que ces entreprises solidaires peuvent ensuite fonctionner avec de «vrais emplois» grâce à des combinaisons entre vente de services, financements sociaux et mobilisation du bénévolat. Ces entreprises concernent déjà des centaines de milliers d'usagers en Europe: développement communautaire au Royaume-Uni, projets d'auto-assistance en Allemagne et coopératives de solidarité sociale en Italie. Toutes ces initiatives mettent en évidence les dynamiques locales engendrées. Bien loin des petits boulots, ces démarches contribuent à la fois à la cohésion sociale et à la création d'emplois.
14. C'est à ce titre qu'une Association pour le droit à l'initiative économique a été créée en France. Cette association est une «banque» qui a un statut d'association, mais qui ne fait pas de charité. Elle prête au taux de 10% et demande 2% de cotisations aux fonds de garantie. A petites entreprises, petits prêts: les crédits ne dépassent pas 30'000 FF. Grâce à cette association, des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion (RMI) ont créé en France des entreprises artisanales. Et ils s'en sortent, Corinne, coiffeuse, se déplace chez ses clients, Amid tient à Paris une librairie spécialisée dans les livres d'art, Pierre vend des frites dans la rue, Céline a ouvert un salon de toilettage pour animaux.
Au total, ils sont 350 RMistes à s'être arrachés à la spirale de la pauvreté, aidés par le seul organisme bancaire en France qui prête avec l'autorisation expresse de la Banque de France de l'argent aux RMistes.
L'association assure le suivi des «micro-entrepreneurs locaux». Tous ne réussissent pas. Mais l'association doit rendre compte à ses différents pourvoyeurs de fonds et veille au grain.
L'association relève également qu'il faut débroussailler le maquis juridique et administratif qui entoure la création de micro-entreprises. En effet, l'environnement légal complexe, les charges sociales, la conception souvent mal adaptée des aides à la création d'entreprises sont autantd'obstacles pour les chômeurs pourtant souvent prêts à se mettre à leur compte.
L'ADIE a trouvé son inspiration auprès de ces organismes de crédits des pays du Sud, notamment la Grammeen Bank (Banque rurale), imaginée par un professeur d'économie Bangladeshi, convaincu lui aussi que l'on peut «grignoter» le chômage en tentant de créer autant de micro-entreprises qu'il y a de chômeurs.
D. Pourquoi une étude de faisabilité?
15. Il n'y a pas de baguette magique pour résoudre la crise de l'emploi. Tous les efforts sont nécessaires. La responsabilisation de l'Etat, de la société civile, des entreprises et des individus est indispensable. L'Etat local peut, pour sa part, favoriser la création de micro-entreprises à faible capitalisation dans les nouveaux secteurs potentiels d'emplois, en débroussaillant le terrain par des études exploratoires confiées par exemple à l'université et qui permettent de déboucher sur des premières conclusions pratiques. Celles-ci serviront de levier et d'incitation à tous ceux et à toutes celles qui commencent à réfléchir à leur responsabilité dans ce domaine (observatoire de l'emploi).
Nous vous remercions de l'attention que vous porterez à la présente.
Débat
M. Jacques-André Schneider (Ve). Cette motion peut susciter deux types de réactions. A droite, on nous dira que nous ne sommes pas compétents pour nous occuper de problèmes de crédits. A gauche, on dira que prêter à des chômeurs est finalement indécent puisque faire crédit peut aussi entraîner le chômeur ou la chômeuse sur une pente savonneuse.
Cette motion est venue à partir d'une réflexion qui, au fond, est assez simple. D'une part, face au chômage, des efforts «classiques» liés à la protection sociale, à la formation professionnelle et, d'autre part, à la relance, à la protection économique et régionale sont nécessaires. Il ne faut pas les remettre en cause.
D'autre part, face au chômage, plusieurs pistes nouvelles de réflexion existent, notamment celles considérant qu'il faut déréglementer, baisser les salaires pour sauver l'emploi face à la concurrence internationale. Il existe également le partage du travail, puis les écotaxes et aussi une réflexion nouvelle dans le domaine de la formation et de l'utilisation du savoir dans une société qui sera de plus en plus fondée sur l'utilisation de «la matière grise».
Au fond, notre motion est très modeste. Elle suggère une piste de réflexion essayant d'associer une philosophie d'entraide et de responsabilité pour la création d'emplois au niveau local.
Cette idée est fondée sur l'idée suivante...
La présidente. On n'entend pas M. Jacques-André Schneider. S'il vous plaît ! (Protestations dans la salle.) Vous pouvez tenir vos conversations à la buvette.
M. Jacques-André Schneider. Cela ne m'importe guère car les petites idées trouvent finalement leur chemin sans que les parlements les écoutent ! (Rire de la présidente.) Nous proposons de faire tout d'abord une étude de faisabilité car nous ne sommes pas absolument certains de la justesse de ces idées. Nous aimerions donc qu'elles soient étudiées.
En second lieu, nous pensons qu'un potentiel existe pour la création d'emplois pouvant permettre de «grignoter le chômage». Ce potentiel réside dans les services de proximité dont l'idée, entre autres, a été développée dans cette motion. Je ne les reprendrai pas ici. Ce sont des services de proximité dans des entreprises à faible capitalisation qui ne nécessitent pas une mise de capital très importante.
Je signale à ceux et à celles qui seraient tentés de critiquer cette idée qu'elle est reprise et figure dans l'un des chapitres importants du projet de loi sur l'assurance-chômage, actuellement soumis à la consultation.
En plus de favoriser six indemnités journalières, nous proposons une autre idée, liée à cette notion de crédits pour que des chômeurs se responsabilisent et se lancent dans la création d'entreprises, donc d'emplois, c'est celle de créer des organismes d'entraide bancaire.
Si l'on parle de tels organismes, la première objection consiste à dire : «Vous voulez donner de l'argent gratuitement». Si vous avez lu attentivement la motion, vous constaterez que telle n'est pas la proposition. Nous prenons exemple sur des organismes existant dans les pays du Sud. Ils commencent aussi à exister dans certains pays du Nord. Ce sont des organismes de crédits particuliers, mais qui facturent des taux d'intérêt normaux.
Nous proposons l'idée suivante, toujours liée à cette notion d'entraide. Les grands organismes bancaires ne sont en effet pas en mesure de favoriser l'octroi de tels crédits, cela pour des raisons fort compréhensibles, par exemple l'étude des dossiers. Si vous accordez un crédit de 30 000 F, les frais d'études pour un grand organisme bancaire s'élèvent peut-être à la somme de 3 000 à 4 000 F. On se demande si cela vaut la peine de dépenser cet argent pour un crédit qui, somme toute, est très faible.
Nous prenons exemple sur ces organismes et vous disons que jusqu'à présent la Suisse n'a pas connu un chômage structurel de longue durée, mais nous entrons dans une phase où nous connaîtrons ce type de chômage. Les pays qui l'ont connu ont commencé à réfléchir à des dispositifs nouveaux particuliers qui ne sont pas des recettes miracles, mais qui contribuent à «grignoter le chômage», notamment cette idée des organismes de crédits.
A ceux et celles qui, sur les bancs de l'Entente, seront tentés de me «laver la figure» avec cette proposition qu'ils qualifieront probablement d'ingénue, je signale, en conclusion, que M. Alain Madelin qui avait, en 1968, une orientation politique tout à fait différente de la mienne, puisqu'il était à l'extrême-droite, a défendu cette idée qui d'ailleurs figure sur les plans de l'emploi de M. Balladur qui est un centre droit conséquent.
Cette idée d'une étude de faisabilité pour créer des organismes d'entraide en matière de crédits destinés à favoriser la création de petites entreprises à faible capitalisation n'est pas une grande idée. C'est une petite idée, mais nous souhaitons la voir sérieusement étudiée.
M. Michel Jörimann (S). Je tiens à rassurer tout de suite M. Jacques-André Schneider qui a prêté à la gauche des procès d'intention abominables concernant sa motion.
Mon cher collègue, le groupe socialiste a pris connaissance avec intérêt de votre proposition, et quand j'utilise le terme «intérêt», ce n'est pas une simple clause de style.
Certes, ce n'est pas la motion du siècle, mais elle a le mérite de faire réfléchir.
Et puis, son exposé des motifs, contrairement à tant d'autres, techniques, confus, parfois flous, a le mérite de la clarté, voire de l'originalité. J'en veux pour preuve la lettre B, page 4, «Quand le Sud peut inspirer le Nord» et son corollaire à la lettre C.
Cette motion nous propose donc un certain nombre de pistes, de réflexions, de perspectives. D'où son intérêt. Notre groupe soutient donc cette motion et, comme ses auteurs vous le demandent, votera son renvoi au Conseil d'Etat.
M. Armand Lombard (L). Comme cela se passe souvent lorsque la pensée des écologistes nous livre un texte, le titre interpelle l'esprit, le plaisir est bon à la lecture, le sujet est original, mais attention aux chutes en dévers, aux conclusions biaisées, aux associations d'idées fallacieuses.
Les trois idées qui interpellent sont les suivantes. Tout d'abord, la déréglementation massive proposée par l'intégrisme néo-libéral. Ensuite, le B.A-Ba de l'épargne capitaliste inventée par les femmes du Ghana. Troisièmement, la réinsertion des chômeurs compétents dans une économie locale simplifiée et financée par des moyens locaux.
Permettez-moi de revenir très brièvement sur ces trois idées qui ébouriffent. Je ne m'attarderai pas trop sur le néo-libéralisme dépeint par les écologistes. L'idée est tellement embryonnaire et caricaturale qu'on ne saurait lui accorder le moindre crédit.
M. Schneider, tout d'abord, donne comme objectif de ce prétendu libéralisme d'abattre les salaires suisses des ouvriers pour faire concurrence aux salaires, je cite, thaïlandais ou indiens. Voyons, Monsieur Schneider, un peu de jugeote !
Le deuxième objectif de ce libéralisme, qu'il a tellement bien compris, est qu'il va procéder à une dislocation grave de l'édifice social. Prenez, je vous en prie, la peine de lire le projet de budget cantonal 1994 et vous verrez vraiment l'insondable légèreté de votre affirmation. (Rires).
La troisième idée que j'aimerais relever de la part de M. Schneider est celle de l'épargne, inventée dans le tiers-monde et retirée, je cite : «des usuriers traditionnels, calvinistes - Merci au nom de la banque privée, Monsieur Schneider ! - à des taux qui ne sont pas subventionnés ou abaissés artificiellement». Mais voyez l'imagination !
Cette épargne, continue le document, des femmes du Ghana est bien utilisée parce que, dit M. Schneider, «Les femmes remboursent beaucoup mieux que les hommes». Nos écologistes, en quelques lignes magistrales, réinventent le système de la caisse mutuelle - je vous rappelle qu'il y en a près de quatre mille en Suisse - et redécouvrent le système Raiffeisen, énoncé en 1837 par l'économiste allemand.
Retournez à vos livres d'économie et à vos carnets d'épargne avant de nous assiéger si vainement, Monsieur Schneider!
Troisième étape de ce calvaire financier : (Rire de la présidente.) Jean-Louis Laville. Là, à l'évidence, vous êtes mieux «tombés», Mesdames et Messieurs les motionnaires. Une économie qui se porte mal ou se remplit de chômeurs redémarre sur de petites unités, c'est vrai. La Hongrie est un exemple frappant de renouveau économique partant de projets extrêmement précis et limités avec un entrepreneur créateur et quelques aides. En effet, ces projets grandissent d'expériences en production et de ventes en nouveaux marchés. La machine redémarre et, petit à petit, les chômeurs deviennent eux aussi des entrepreneurs. La banque et ses prêts, à ce stade, sont nécessaires pour accompagner le développement, pour l'accompagner et non pour l'initier, et c'est du petit crédit local, sur la vieille image des paysans d'une vallée assemblant leurs économies pour permettre, moyennant rémunération, la réalisation du projet d'un des leurs, qui va se faire également dans l'industrie. Ghana ou Raiffeisen, Monsieur Schneider, cela n'a guère d'importance, ce sont des postes de travail qui se créent.
Je conclurai en vous demandant pourquoi vous voulez l'Etat dans ce projet ? Au Ghana, si vous avez bien étudié, l'Etat ne crée pas la banque mutuelle, en Suisse non plus d'ailleurs; c'est l'économie de marché.
Alors, proposez votre étude de faisabilité à la Chambre de commerce, à une grande banque, mais pas à l'Etat. Votre idée, appliquez-la et lancez-la vous-mêmes, intéressez-y vos proches, animez-la vous-mêmes; cela ne sert à rien de toujours relancer sur les autres nos bonnes idées. L'Etat n'a rien à faire là au milieu. Il n'est pas dans son cahier des charges de créer des entreprises, des banques et des solidarités financières.
Le chômage touche tout le monde. Par conséquent, ce sujet doit être discuté, même sur une base aussi faible. Toute solution envisageable doit être entourée des meilleurs soins. Bien entendu, mon groupe sera d'accord de renvoyer cette motion à la commission de l'économie.
M. Philippe Joye (PDC). Le groupe démocrate-chrétien accueille cette motion avec intérêt. Il est d'accord de la renvoyer en commission. Cependant, quelques remarques importantes sont à faire.
Voici la première. Tout ce que l'on fait en faveur des chômeurs est positif. Par conséquent, votre idée de base est louable. Il nous semble nécessaire que votre projet de motion soit mieux coordonné avec le projet de loi sur les assurances fédérales en cours actuellement. Il doit être intégré dans les nombreuses mesures que le département de l'économie publique prend dans toutes sortes de domaines pour traiter des questions analogues.
La création d'emplois, c'est bien. Mais la reprise de la demande est probablement notre grand problème. Evidemment, l'idée des micro-entreprises à faible capitalisation mériterait d'être mieux définie. On devrait étudier comment l'insérer dans cette question de la demande dont on ne parle pas, malgré son importance cruciale.
Dans votre texte, j'ai relevé trois points : le premier se trouve à la page 4 et concerne la quatrième piste. Vous dites qu'il s'agit de combiner la logique d'assistance et de protection de la sécurité sociale avec une logique de responsabilité de chacun pour la création d'emplois. J'approuve l'idée, mais je ne vois pas très bien comment l'appliquer. Vous parlez en page 5, au point 8, du prêt accordé à des taux d'intérêt réels; Calvin disait que le taux d'intérêt moral était de 5%; est-ce à cela que vous faites allusion ?
Le dernier point qui me préoccupe se trouve à la page 6, au chapitre : «Les leçons du Sud». Je cite : «Aide à domicile, entretien de l'environnement, accueil de jeunes enfants, loisirs et culture». Ce sont les principaux gisements d'emplois. Or, les mesures destinées à concrétiser ces gisements entraînent des effets pervers souvent occultés. Malheureusement, ce sont des emplois parallèles qui ne contribueront pas à la remise en marche du système économique.
Enfin, une petite phrase au bas de la page 6 nous étonne. D'autres programmes comme celui des emplois jouent sur l'abaissement des coûts salariaux, soit par la baisse du salaire net, soit par des exonérations fiscales. Vous dites que ces efforts favorisent l'établissement de rapports de gré à gré entre l'employeur et le salarié sans possibilité de médiation et de contrôle, d'où le risque de constituer une catégorie de nouveaux serviteurs pour reprendre la formule d'André Gorz. Heureusement, je crois que nous n'en sommes pas encore là dans ce pays où il est encore possible d'avoir des rapports de gré à gré entre employeurs et salariés sans avoir forcément besoin de médiation et de contrôle. Cependant, je salue l'effort que vous avez fait, et je réitère notre accord de renvoyer cette motion à la commission de l'économie.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Les difficultés liées à la situation que nous connaissons sur le front de l'emploi font que toute idée mérite d'être accueillie sans a priori dogmatique, avec la simple volonté de progresser.
L'idée qui nous est proposée par le groupe écologiste consiste, si l'on veut être tout à fait transparent et prendre les mécanismes pour ce qu'ils sont, à faire prendre les charges par l'Etat, voire indirectement par ce dernier au travers d'un organisme ou d'une institution, à créer des crédits qui, en définitive, n'auraient été acceptés par aucun organisme financier.
De deux choses l'une, soit un projet est viable et nous avons des chances de le voir accepté par un organisme financier; à cet égard, j'aimerais vous rendre attentifs au rôle que ce parlement a voulu jouer, à juste titre, à la Banque cantonale; soit ce projet n'est pas viable et les crédits, quel que soit l'organisme financier auquel ses promoteurs se sont adressés, ne pourront vraisemblablement pas être libérés. C'est une question difficile de savoir s'il convient à l'Etat, dans ce contexte, de se substituer à un organisme financier, ce qui revient à une forme de subventionnement.
La question peut être posée, mais économiquement elle n'est pas susceptible d'être résolue sur la base des mécanismes que l'on connaît. Peut-être y a-t-il à l'origine de votre démarche une méconnaissance ou un manque d'information sur certains instruments existants qui pourraient fonctionner de manière plus large encore s'ils étaient mieux connus.
Je constate, pour avoir lu l'exposé des motifs accompagnant votre motion, que vous pensez surtout, par le système dont vous préconisez l'avènement, à de petits projets. C'est la micro-entreprise à laquelle vous avez fait allusion.
Dans ce contexte, il existe à Genève une institution qui pourrait jouer un rôle un peu plus important en répondant à une partie de ce type de problèmes concernant Genève; il s'agit de l'Office genevois de cautionnement mutuel. Ce dernier peut avoir cette fonction en servant d'interface à des petits projets dont le financement est difficile et à propos desquels il faut un coup de pouce financier. Je crois que c'est bien l'une des missions de l'Office genevois de cautionnement mutuel.
Dans ce contexte, vous savez qu'une réflexion approfondie est engagée. Tout d'abord sur la base d'un certain nombre d'initiatives genevoises face à des chômeurs qui, plutôt que de recevoir, dans une situation inactive, des indemnités de chômage, ont l'idée de monter un projet.
Nous avons créé à Genève, de manière un peu paralégale mais avec le consentement tacite de l'OFIAMT, un système permettant à certains égards de capitaliser des indemnités de chômage pour permettre l'éclosion d'un projet par un financement ainsi apporté. Vous aurez observé que cette idée est reprise dans le cadre de la révision de la loi fédérale sur l'assurance-chômage. Effectivement, c'est une des idées mises en consultation.
Nous pouvons donc approcher ce type de problèmes par des institutions telles que l'Office genevois de cautionnement mutuel qui pourrait être renforcé ou par les perspectives qui pourraient être offertes par la révision de la loi fédérale sur le chômage.
En revanche, je pense que ce serait une erreur ou une illusion d'imaginer qu'une sorte de banque spécialisée dans ce type d'opérations pourrait avoir l'ambition de la durée, sauf à admettre d'emblée qu'elle serait régulièrement recapitalisée par l'Etat. Ce n'est pas là le rôle de l'Etat. Vous en conviendrez tous.
Il est intéressant que cette motion soit renvoyée à la commission de l'économie afin de pouvoir engager un débat approfondi en écoutant également les gens de l'Office genevois de cautionnement mutuel nous expliquer à quels types de problèmes ils sont confrontés afin que vous soyez informés d'un certain nombre de lacunes et d'insuffisances du système actuel.
Mise aux voix, la proposition de renvoi de cette motion à la commission de l'économie est adoptée.
LE GRAND CONSEIL,
considérant que:
les chômeurs de conditions modestes ou en fin de droit doivent pouvoir se déplacer facilement et sans trop de frais pour leur quête d'emploi;
les chômeurs et ceux en fin de droit, mariés avec charges d'enfants en âge de scolarité nécessitant abonnements TPG pour se rendre à l'école et à leur domicile,
invite le Conseil d'Etat
à considérer ce problème avec urgence afin que ces personnes puissent obtenir à brève échéance des abonnements mensuels, pour eux-mêmes et leurs enfants, à très bas prix, comme par exemple pour les abonnements de l'OAPA.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Il n'est point nécessaire d'évoquer ou de souligner maintes raisons pour lesquelles la collectivité genevoise se doit de venir en aide à cette couche de notre population que l'on appelle: chômeurs. Ces gens se voient frappés par un sort auquel personne ne s'attend, hélas; ils sont près de 15'000 dans notre canton.
Je vous demande donc de recevoir cette proposition avec bienveillance afin de donner au Conseil d'Etat le pouvoir d'alléger quelque peu leur situation financière difficile et vous en remercie par avance.
Débat
Mme Françoise Saudan (R). Je vous propose de renvoyer directement cette résolution à la commission des transports, compte tenu du décès de M. Paul Passer, afin qu'elle puisse être étudiée au sein de cette commission.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer cette résolution à la commission des transports est adoptée.
L'activité de la Fondation des terrains industriels Praille et Acacias (FIPA) au cours de l'exercice 1992 est décrite dans le rapport de gestion ci-joint, approuvé par le Conseil d'Etat le 28 juillet 1993.
La situation financière de la fondation demeure bonne.
Le résultat d'exploitation, avant les attributions statutaires aux fonds d'amortissement, de renouvellement et de réserve générale, s'élève à 7'793'892,85 F (7'788'144,28 F en 1991).
Le solde du résultat d'exploitation, après les attributions statutaires, en 5'000'000 F, constitue la rétribution de la dotation de l'Etat de Genève (4'700'000 F en 1991).
La fondation a poursuivi en 1992 l'exécution des mandats qui lui ont été confiés:
par l'Etat de Genève,
en vue de l'équipement, de la mise en valeur et de la gestion des zones industrielles de Meyrin-Satigny (parties reliées au rail et non reliées au rail), de Plan-les-Ouates et de Vernier/Mouille-Galand, et, en vue de fournir au Conseil d'Etat des préavis circonstanciés lors de l'application éventuelle du droit de préemption de l'Etat de Genève, dans les zones précitées, en cas d'aliénations d'immeubles (L 1 19);
par la Ville de Genève,
en vue de la gestion des terrains industriels qu'elle possède à Vernier, entre la cité du Lignon et l'ancienne usine à gaz.
Le Conseil d'Etat vous recommande d'approuver le rapport de gestion de la FIPA pour l'exercice 1992.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
EXPOSÉ DES MOTIFS
1. Appréciation générale
1.
La constitution genevoise l'exprime clairement: le pouvoir exécutif appartient au Conseil d'Etat (art. 101) à qui il revient de régler les attributions de chaque département (art. 119) et d'en assurer la surveillance (art. 122).
Il découle de ces exigences constitutionnelles que les attributions des autorités administratives inférieures ne sont exercées que par délégation du Conseil d'Etat.
2.
Or, le développement de la législation a entraîné au cours de ces dernières années de sérieuses distorsions au principe constitutionnel précité. Au lieu de se limiter à une délégation de compétence en faveur du Conseil d'Etat, de très nombreuses lois confèrent en effet des attributions directement à des départements, offices ou services déterminés. Il en résulte que ces autorités administratives se trouvent investies d'une tâche d'exécution par la loi elle-même, et donc par le législateur, alors qu'elles ne devraient l'être que par le Conseil d'Etat.
3.
De telles distorsions concernent en pratique tous les départements. Elles nuisent à la cohésion gouvernementale et conduisent à «compartimenter» toujours davantage l'activité du gouvernement, qui se trouve ainsi confronté au risque de perdre la vue d'ensemble. Cette situation contrevient à l'objectif d'efficacité que doit atteindre une administration moderne, et qui passe notamment par une décentralisation bien maîtrisée: cela implique de larges délégations de compétence avec le pouvoir effectif de contrôler ce qui a été délégué.
La multiplication des lois conférant directement à un département, un office ou un service une tâche d'exécution déterminée, peut par ailleurs conduire les instances en question à sous-estimer le fait qu'elles répondent de leur action devant le Conseil d'Etat et qu'elles ne peuvent donc exercer leur tâche indifféremment des directives données par le gouvernement lui-même.
4.
La modification systématique de toutes les lois concernées est peu opportune et prendrait, quoi qu'il en soit, trop de temps, indépendamment des «politisations» sectorielles qu'elle ne manquerait pas d'entraîner.
C'est pourquoi l'adoption d'une seule loi-cadre se justifie pour donner au Conseil d'Etat, conformément à la constitution, la plénitude et la prèminence d'un pouvoir de décision sur les compétences d'exécution des départements, offices ou services.
2. Commentaires de détail
Alinéa 1
Il s'agit ici de rappeler que le pouvoir exécutif appartient au Conseil d'Etat, comme le prescrit la constitution.
Alinéa 2
Conformément à la constitution, c'est au Conseil d'Etat qu'il appartient de régler les attributions des départements et de veiller à leur organisation. Il s'agit ici de préciser que le gouvernement a la responsabilité de créer des offices ou des services dont la réunion constitue les départements, dirigés chacun par un chef de département responsable.
Alinéa 3
Comme de nombreuses lois confèrent directement à des départements, des offices ou des services des tâches d'exécution déterminées, il y a lieu de préciser que toutes ces attributions sont exercées sous l'autorité du Conseil d'Etat. En pratique, cela revient à dire que chaque fois que la délégation de compétence légale est réalisée en faveur d'un département, d'un service ou d'un office, cette délégation de compétence émane du Conseil d'Etat, conformément à ce que prescrit la constitution cantonale.
Alinéa 4
Selon la constitution, les autorités administratives bénéficiant de compétences déléguées exercent leurs attributions sous la surveillance du Conseil d'Etat. Il en découle que le Conseil d'Etat peut en tout temps se saisir d'un dossier d'un département. A cet égard, les précisions suivantes sont nécesaires:
Le texte précise que le Conseil d'Etat peut «se» saisir d'un dossier. En d'autres termes, le droit d'évocation n'appartient qu'aux membres du Conseil d'Etat, soit au titulaire du département concerné, soit à l'un de ses collègues. C'est dire que ce droit d'évocation n'est pas conféré à des tiers, soit d'autres instances de l'administration ou des administrés.
Seuls les dossiers d'une réelle importance peuvent justifier l'exercice du droit d'évocation d'un membre du Conseil d'Etat. Il ne s'agit en effet en aucune manière d'alourdir l'ordre du jour déjà particulièrement chargé de ses séances. Dans cette perspective, l'évocation suffisamment précoce d'un dossier important devant le Conseil d'Etat est de nature à fixer un cadre clair permettant par la suite une action plus rapide et une concertation renforcée entre les départements le cas échéant concernés.
L'évocation d'un dossier par un membre du Conseil d'Etat n'aboutira pas nécessairement à une décision du collège. En effet, comme c'est la pratique déjà aujourd'hui, un dossier peut être porté à la connaissance du gouvernement par l'un de ses membres dans le seul but de connaître l'avis de ses collègues ou de solliciter leurs conseils, et sans que cela aboutisse à une décision formelle.
Enfin, l'évocation d'un dossier pour décision doit être clairement exclue lorsqu'il s'agit d'une matière où le Conseil d'Etat est autorité de recours. Il importe en effet d'éviter que, par les mécanismes de récusations, le Conseil d'Etat soit en fait placé devant la situation de ne plus pouvoir exercer son rôle d'autorité juridictionnelle administrative.
** *
Tels sont les motifs pour lesquels nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter le présent projet de loi.
Préconsultation
M. David Lachat (S). Si j'étais MM. Segond ou Ramseyer, voire M. Joye : «J'aurais les jetons !» (Eclats de rire.) Voici l'Entente, gonflée à l'hélium, voulant placer ses sept candidats au Conseil d'Etat. Simultanément, les libéraux et le cryptolibéral Maitre nous proposent un projet de loi qui n'est qu'une muselière pour les conseillers d'Etat pris individuellement.
Par conséquent, lorsque la liste des sept aura triomphé, il faudra bien que M. Segond marche droit et que MM. Joye et Ramseyer étouffent leurs élans d'originalité et d'humanité pour obéir à la majorité libérale du Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
Messieurs Ramseyer, Joye et Segond, si j'étais à votre place, je ne soutiendrais pas simultanément la liste à sept et ce projet de loi sur l'exercice des compétences du Conseil d'Etat. (Commentaires.)
Du reste, nous avons eu un magnifique exemple, ainsi qu'un non moins magnifique lapsus de la part de M. Lombard. Tout à l'heure, il nous a parlé du projet de budget du Conseil d'Etat comme d'un projet néo-libéral. Les autres composantes du Conseil d'Etat sont ainsi totalement ignorées. (Rire de la présidente.)
Cela précisé, je vous avoue que je n'aime pas du tout ce projet de loi, cela pour quatre raisons.
La première est une raison de forme. Ce projet de loi a été présenté à la population de façon cavalière, en grossière violation de la collégialité, en une manoeuvre d'exclusion de deux conseillers d'Etat. Cet état de fait augure mal de l'avenir.
Deuxièmement, ce projet de loi est inconsistant. Il n'amène aucune nouveauté. Le droit d'évocation du Conseil d'Etat existe déjà dans les textes. Par conséquent, ce projet de loi est une sorte de baudruche pré-électorale du style «bonus-loyer».
Il peut aussi gripper le fonctionnement du Conseil d'Etat et créer des disputes sans fin entre les sept membres (six messieurs et une dame selon votre optique) qui composeront le prochain Conseil d'Etat.
Lorsqu'il faudra savoir si le Conseil d'Etat a le droit de «piquer» - si vous me permettez l'expression - un dossier de l'un des départements, il faudra au préalable trancher la question prévue par l'alinéa 4 de la loi pour savoir si c'est une question d'importance justifiant la saisine du Conseil d'Etat. Quels critères seront utilisés ? Qui dira si un projet est d'importance ou non ? En tous cas, ce n'est pas clair dans l'exposé des motifs ni dans le texte de loi.
Ensuite, il faudra s'assurer s'il ne s'agit pas d'une matière où le Conseil d'Etat est une autorité de recours. On peut recourir au Conseil d'Etat en invoquant toute une série de lois. A chaque occasion, lorsque le Conseil d'Etat voudra s'emparer d'un dossier, il devra supputer toutes les possibilités éventuelles de recours pour s'assurer qu'en définitive il ne court pas le risque de se retrouver plus tard autorité de recours, donc dans une impasse.
Enfin, ce projet est rétrograde. C'est une régression dans la pratique politique. Une autorité politique comme le Conseil d'Etat ne doit pas s'emparer des tâches de l'administration. Elle doit faire de la politique et non se préoccuper de détails des exécutions de décisions d'ordre politique. Ces tâches incombent aux départements et, mieux, aux hauts fonctionnaires de chacun des départements. Si vous voulez qu'un Conseil d'Etat fonctionne et soit efficace, il faut que ce Conseil d'Etat fasse de la politique et non de l'administration de détail. En ce sens, je le répète, ce projet est rétrograde.
Cela précisé, nous l'examinerons avec attention et nous combattrons avec énergie ce projet en commission. (Rires.)
La présidente. La parole n'étant plus demandée... Oui, Monsieur Fontanet ? Ah ! mais il faut lever les mains !
M. Bénédict Fontanet (PDC). Les mains, pour les lever, on les lève ! Peut-être sont-elles trop courtes ! Mais c'est un autre problème. (Rires.)
Plus sérieusement, le groupe démocrate-chrétien accueille avec enthousiasme ce projet de loi. (Manifestations de joie dans la salle.) Pour en avoir discuté avec Philippe Joye, je tiens à vous dire que ce dernier n'a pas l'air d'être brimé. D'ailleurs, regardez comme il a l'air heureux devant son pupitre. Il le sera encore plus lorsqu'il sera conseiller d'Etat. Ce n'est là qu'un prélude. (Une voix ronchonne, s'adressant à l'orateur.)
Cher Monsieur, les démocrates-chrétiens ne se soumettent pas aussi facilement que vous l'imaginez. L'histoire de ce canton en est l'illustre démonstration. On vous donnera un petit cours d'histoire politique plus tard ! (Rires.)
Ce projet est un excellent projet de loi. (Les députés de la gauche s'écroulent de rire.) Par le fait d'une dérive législative, notre Grand Conseil tend de plus en plus souvent à donner directement des compétences dans la loi à des départements. Cette dérive législative est relativement récente puisqu'il y a de cela quelques années. La plupart du temps, les lois votées par ce parlement prévoyaient que le Conseil d'Etat en était l'organe d'exécution et que ce Conseil d'Etat désignait en son sein le département devant traiter d'une matière ou d'une autre.
Le fait est qu'un certain nombre de lois demandent des compétences déterminées à certains départements. Les seuls considérés ne sont pas que des départements socialistes, Monsieur Lachat. Il n'y a pas lieu de jouer les persécutés à cet égard. Cela permet à des conseillers d'Etat de prendre certaines décisions dans le cadre d'objets politiques pouvant être déterminants pour la vie du canton, et de prendre également des décisions contre la volonté du collège gouvernemental. A notre sens, ce n'est pas admissible.
Le collège gouvernemental doit fonctionner comme un tout. Il est indispensable que les décisions politiques importantes puissent être prises par le Conseil d'Etat et qu'un conseiller d'Etat déterminé ne puisse pas faire obstruction par sa volonté propre à la volonté de tout le Conseil d'Etat ou de sa majorité qui, lui, en adhérant à notre constitution dirige la politique du canton et l'exécutif du canton.
Il n'y a là aucune volonté d'exclusion de qui que ce soit, mais la volonté d'avoir un Conseil d'Etat à même de gouverner efficacement. Dans cette période de crise et de difficultés, Genève a besoin plus que jamais d'un Conseil d'Etat qui gouverne fort et bien.
Alors, Monsieur Lachat, si certains y voient une volonté d'exclusion, c'est qu'ils ont envie de s'exclure d'eux-mêmes. Si ce projet est aussi vide de sens que vous voulez bien le dire, on ne voit pas pourquoi il suscite une réaction aussi courroucée et ripée de votre part.
Nous accueillons ce projet de loi avec beaucoup d'intérêt et sommes heureux qu'il arrive maintenant, même si nous l'aurions souhaité auparavant.
M. Jacques-André Schneider (Ve). Les «écolos» sont pour le travail d'équipe. Le jacobinisme départemental, tel qu'il est pratiqué à Genève, les «cocardises» existant dans notre Conseil d'Etat, les conflits de personnes autour de ces postes ne sont pas notre «tasse de thé». Nous pensons que l'idée de l'équipe est bonne. Mais ceux et celles qui ont rédigé ce projet sont allés très vite en besogne, probablement en raison de l'échéance électorale proche.
Une voix. Mais non...
M. Jacques-André Schneider. Deux vrais questions sont à poser. Premièrement, vous dites vouloir gouverner, Monsieur Fontanet. Je vous souhaite bien du plaisir, surtout avec l'accumulation des détails qui viendront des départements, chaque détail étant transformé en enjeu politique majeur. On peut se demander si ce mécanisme permettra au Conseil d'Etat de travailler ou s'il ne va pas tout simplement craquer dans ses coutures.
La deuxième objection ou interrogation que nous pourrions émettre est la suivante : Monsieur Fontanet, vous savez sans doute que le fait d'avoir délégué des compétences au département s'explique en partie parce que, dès les années septante, le Tribunal administratif s'est vu reconnaître toute une série de compétences en matière de contrôle des décisions de l'exécutif.
Dorénavant, Monsieur Fontanet, il faudra bien admettre que le Conseil d'Etat in corpore soit soumis à un contrôle judiciaire strict. Vouliez-vous aller jusque-là ? Y aviez-vous pensé dans votre désir peut-être estimable de renforcer l'autorité d'un exécutif ? En définitive, l'autorité ne nous intéresse pas tellement en tant qu'écologistes. C'est plutôt le travail d'équipe «sympa», ce qui est, je le conçois, difficile dans un monde politique fractionné (Rires).
M. Philippe Joye (PDC). Je vous remercie, Monsieur le député Lachat, de vos soucis très paternels à vouloir protéger les petits derniers de la liste à sept. Mais mon ami Ramseyer fait certainement plus de cent kilos, et moi-même juste un peu moins. (Rires, quolibets. Sourire de l'orateur.) Enfin, c'est très touchant, et je vous remercie de votre très grande sollicitude à mon égard.
Toutefois, je puis vous rassurer sur plusieurs points. Je pense que vous êtes conscient du fait que je suis encore capable de donner mon point de vue en toute circonstance, quelles que soient les personnes présentes. Si vous me prêtez une fibre caritative et altruiste assez développée, je pense que mon rôle sera de pousser les idées que j'ai l'intention de défendre.
D'autre part, je n'ai constaté à aucun moment que mes futurs éventuels collègues sont des monstres épouvantables de dureté, quelle que soit l'origine de leur parti. Enfin, il y a des exemples criants qui ont récemment montré les dysfonctionnements du Conseil d'Etat. Je suis tout à fait d'accord que le fait de prendre des décisions au Conseil d'Etat c'est prendre des décisions politiques. Mais cela peut aussi vouloir dire : aider sept individus aux personnalités fort marquées, quelle que soit l'origine de leur parti, à percevoir de façon plus nette que cela n'a été leur appartenance à un groupe. Sans groupe, il n'y a pas de consensus. Sans consensus, il n'y a pas de gouvernement de style helvétique.
M. Nicolas Brunschwig (L). Qui redoute quoi ? Il est vrai qu'il n'existe pour nous que deux possibilités dans le fonctionnement du Conseil d'Etat. La première, et la plus optimiste, est celle des chefs de département informant le Conseil d'Etat et tenant compte des avis ou des votes de ce dernier sur les sujets d'une certaine importance. Ainsi, le Conseil d'Etat fonctionnera comme nous le souhaitons, et ce projet de loi ne gênera aucunement l'action gouvernementale.
L'autre possibilité est moins gaie. On pourrait suspecter que parfois certains magistrats tiennent à informer le Conseil d'Etat à certains stades de la procédure sans tenir compte de son avis ou des votes de ce dernier. Dans ce cas nous trouverons cela absolument anormal.
Ce projet de loi a pour but d'empêcher de telles obstructions dans une période où, et ceci tout le monde le concède, il faut avoir une vision forte du gouvernement.
M. Jean Spielmann (T). A plusieurs reprises, nous avons eu l'occasion de discuter de la cohésion du gouvernement et du problème posé ce soir par ce projet de loi.
Je voudrais rappeler à ce Grand Conseil qu'il existe des moyens pour permettre au Conseil d'Etat d'être plus collégial, plus responsable de ses interventions, et également plus présent aux séances du parlement.
Le premier pas consiste simplement à respecter le règlement du Grand Conseil, Madame la présidente, en présentant, comme la loi l'exige, les projets dans l'ordre de leur dépôt et de leur importance, en respectant la hiérarchie des points présentés dans la procédure - les initiatives, projets de lois, motions, résolutions, interpellations, etc. - sans faire un ordre du jour à la carte pour le Conseil d'Etat qui lui permette de remplir des petites cases annonçant sa présence ou son absence à l'avance. Enfin, de faire de ce dernier une simple addition de sept chefs de département, sept hauts fonctionnaires, plutôt que de vrais responsables collégiaux d'un gouvernement responsable de la gestion de la République.
Faites déjà ce premier pas ! Pourquoi le refusez-vous à chaque séance ? Pourquoi et en quel nom le Bureau du Grand Conseil ne respecte-t-il pas le règlement ? Est-ce dans le simple but de rendre service au Conseil d'Etat et de lui permettre de faire de la politique à la carte, alors que nous autres, parlement de milice, sommes obligés de manger le menu à chaque séance ?
M. Robert Cramer. Bravo !
M. Jean Spielmann. Ma première observation est la suivante. Au lieu de faire simplement des projets de lois, respectez déjà les lois existantes ! Cela vous permettra de partir dans la bonne direction.
L'autre observation a un caractère plus politique et polémique. Depuis des années, j'entends qu'on reproche au Conseil d'Etat d'être dominé par des personnalités plus fortes que les autres...
Mme Claire Torracinta-Pache. Des noms !
M. Jean Spielmann. Il faut vous poser la question des élections du futur Conseil d'Etat qui vont bientôt commencer. Je le rappelle pour la presse qui peut aussi être intéressée. On ne peut être candidat au Conseil d'Etat qu'après l'élection du Grand Conseil.
Pour l'instant, il n'y a pas de candidats au Conseil d'Etat. Au moment de ce choix, posez-vous cette question essentielle au lieu de vous en prendre à une personne ou à une forte tête qui, justement, tient tête aux six autres. Vous ne pouvez pas vous poser la question fondamentale de désigner des gens compétents qui, à cinq, pourront tenir tête à un seul. Ce serait déjà une première réponse. (Applaudissements sur les bancs des socialistes et du parti du Travail.)
La présidente. Monsieur Spielmann, votre interprétation du règlement du Grand Conseil n'est pas tout à fait exacte. Il est dit à l'article 95, alinéa 2, sous la lettre c de l'alinéa 1, soit les objets «initiatifs» : les projets de lois, motions, résolutions, pétitions, etc., les objets concernant un même département sont réunis à l'intérieur des rubriques 1 à 7. Je suis désolée, la possibilité a été exploitée par les bureaux et chefs de groupe successifs depuis à peu près deux ou trois ans.
M. Michel Balestra (L). Je suis désolé de vous dire, Monsieur Lachat, que la traversée de la rade, le triangle de Villereuse, le Palais Wilson et Sécheron ne sont pas des détails. Pendant que ces dossiers sont bloqués, 16 000 chômeurs désespèrent à Genève (Vives protestations sur les bancs d'en face.) et 65% de la population genevoise déclarent dans les sondages que le chômage est sa préoccupation majeure.
Les Genevois ne comprendraient pas que le Conseil d'Etat perdure dans ses blocages et ses atermoiements. Le projet de loi dont nous parlons ce soir permettra de responsabiliser le gouvernement autour d'objectifs clairs. Je suis partisan d'une possibilité d'arrêtés cantonaux urgents et la discussion immédiate sur ce projet de loi pourrait se substituer avantageusement à un arrêté cantonal urgent. C'est pourquoi je la demande formellement.
M. Jean Spielmann. Alors ça, c'est un diktat !
Mme Vesca Olsommer (Ve). J'ai envie d'avoir un langage beaucoup plus simple que celui tenu jusque-là. Je dirais que ce projet de loi se revêt, sans doute, d'habits intelligents, mais il est plein de restrictions mentales et parfaitement hypocrites.
Votre volonté est celle d'exclure les conseillers d'Etat représentant une certaine minorité. Mais je ne vois pas du tout comment cette idée peut représenter le bien commun.
Quant au chômage, je vous pose trois questions à propos des 15 000 chômeurs se trouvant à Genève.
De quelle croissance sont-ils victimes ? Avons-nous voulu la spéculation immobilière ? Ou encore, pourquoi la croissance des emplois peu qualifiés à Genève ? Non, nous n'en sommes pas responsables ! Alors, je vous en prie, ne venez pas nous reprocher ce chômage ni nous dire que vous proposez ce projet de loi pour le bien commun. Cela n'est pas du tout exact. (Applaudissements.)
M. Philippe Fontaine (R). Ne voyant pas poindre la demande de discussion immédiate, j'ai levé la main au même instant où notre ami Balestra demandait la parole. Donc, je la prends pour dire que notre groupe soutiendra cette demande de discussion immédiate.
En effet, le peuple de Genève veut des décisions plus rapides, plus claires. On vient de le dire, trop de projets restent en attente. Les gens en ont assez. Aujourd'hui, nous avons un moyen pour décider. Nous devons prendre nos responsabilités et le faire ce soir. Nous voterons donc cette discussion immédiate.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. En saisissant votre parlement de ce projet, le Conseil d'Etat poursuit un double objectif d'efficacité et de cohésion.
Tout d'abord, parlons de l'objectif d'efficacité. Pour la première fois dans un texte se trouvent expressément le principe de la décentralisation de l'administration et celui de son décloisonnement. Que faut-il entendre par là?
Dans ce texte se trouve la volonté claire et nette du Conseil d'Etat de déléguer les compétences nécessaires à l'exécution de sa tâche à des offices ou à des services. C'est le principe de la décentralisation.
Dans ce texte, un second principe est nouveau. C'est le fait que les offices ou les services constituent, par leur réunion, des départements. Cela permet le décloisonnement de l'administration car les offices et les services sont créés en fonction de leurs compétences spécifiques pour une tâche spécifique qui leur est attribuée. C'est leur réunion qui constitue un département. Cette réunion n'est pas immuable. Ces deux principes sont fondamentaux dans une administration moderne. D'une part, c'est la décentralisation et, d'autre part, le décloisonnement.
Le second principe est celui de la cohésion du gouvernement. Nous ne pouvons pas sous-estimer - et M. Schneider a eu raison de le rappeler - le fait historique qu'est la création du Tribunal administratif et les modifications législatives qui ont suivi. Nous avons procédé à une étude complète et pouvons vous dire que tous les départements sont concernés. De nombreuses lois confèrent des tâches directes à des départements, des offices ou des services.
En d'autres termes, ces départements, offices et services se trouvent investis d'attributions et de compétences par le parlement lui-même, alors que, dans la séparation des pouvoirs, ils ne devraient l'être que par le gouvernement. C'est ce que nous voulons corriger en ramenant très clairement le principe selon lequel les départements exercent leur tâche sous l'autorité du Conseil d'Etat et sous son autorité seule. Je crois que ce principe est extrêmement important.
Je suis très frappé par le fait que dès qu'un problème politique important apparaît on le considère sous l'angle juridique. Au-delà des appréciations juridiques, le vrai problème qui est posé ce soir est simplement celui-ci : Voulez-vous donner au Conseil d'Etat les moyens de gouverner en tant que collège, oui ou non ?
Le Conseil d'Etat vous réclame ces moyens, car il est convaincu que le double principe de la décentralisation et du décloisonnement de l'administration d'une part, et, d'autre part, de la cohésion et de l'autorité du Conseil d'Etat, c'est-à-dire de la prééminence du pouvoir de décision du Conseil d'Etat sur les compétences d'exécution des départements, est capital.
Il ne s'agit pas d'imaginer que le Conseil d'Etat va rapatrier à lui toute une série de compétences d'exécution appartenant naturellement aux départements qui sont outillés pour cela. Il s'agit d'être plus efficaces et plus cohérents dans le processus de décision politique et non pas d'exécution administrative.
Lorsque nous sommes en mesure de prendre une décision politique-cadre suffisamment tôt, cela facilite le travail d'exécution décentralisé des différents départements qui, le cas échéant, peuvent être concernés. En effet, cela crée un cadre sous l'autorité du Conseil d'Etat avec une décision de ce dernier. Dans ce contexte, il est important que vous puissiez vous prononcer clairement sur ce projet de loi.
Le Conseil d'Etat vous demande de lui donner les moyens de mener la politique de décentralisation et celle de cohésion. Il nous semble que de tels principes devraient aller de soi. On a parlé d'arrière-pensées. Si certains ont émis des avis extrêmement «carrés», «courroucés», comme cela a été dit, c'est vraisemblablement que ce projet est plus nécessaire que jamais.
M. Robert Cramer (Ve). On vient de nous parler de discussion immédiate. Je ne sais pas si cette discussion immédiate sera votée tout à l'heure, mais vu les rapports de force existant dans ce Grand Conseil, il n'y a pas lieu de se faire trop d'illusions à ce sujet.
Je vous poserai donc la question suivante, - je la poserai également en commission si ce projet de loi y était renvoyé - au nom de qui les décisions seront-elles rendues ? C'est la grande ambiguïté de ce projet. C'est celle-là même qu'a abordée tout à l'heure Jacques-André Schneider lorsqu'il rappelait que, si l'on a été amené à donner tant de compétences aux départements, c'est en raison du contrôle juridictionnel exercé par le Tribunal administratif sur l'activité de l'Etat.
Je vous recommande de lire à cet égard, au-delà de ce que nous pouvons penser les uns et les autres de la collégialité nécessaire à Genève, ce court projet qui vous est proposé, et plus particulièrement l'alinéa 3.
Dans cet alinéa il est dit : «...lorsque des attributions leur ont été conférées directement par la loi, les départements, les offices ou les services les exercent sous l'autorité du Conseil d'Etat.» L'alinéa 1 précise que le Conseil d'Etat exerce le pouvoir exécutif.
En fin de compte, le projet de loi prévoit donc que toutes les décisions prises le seront par le Conseil d'Etat ou par la délégation de ce dernier. Si l'on suit ce projet de loi et l'intention des auteurs, cela signifie que dorénavant toutes les décisions qui seront prises à Genève en matière administrative le seront par le Conseil d'Etat, soit directement, soit en son nom par un département.
En d'autres termes, cette question sérieuse de la censure du Tribunal administratif, actuellement exercée sur l'essentiel des décisions prises par l'Etat, sera une censure du Conseil d'Etat. Je pourrais ironiser à ce sujet et vous dire, comme le disait tout à l'heure Jacques-André Schneider, que cette humilité du Conseil d'Etat est remarquable, puisqu'il désire dorénavant soumettre toutes ses décisions au contrôle d'un pouvoir juridictionnel. Mais nous ne sommes pas à l'heure de l'ironie alors que vous désirez un vote immédiat. Je vous dirai plus simplement que ce projet de loi pose quelques problèmes sérieux qui doivent d'être examinés sereinement en commission.
M. Jacques-André Schneider (Ve). Je désire intervenir sur la discussion immédiate... (Rouspétances.) C'est une motion d'ordre, donc j'ai le droit d'intervenir sur la...
La présidente. Allez-y, sur la discussion immédiate !
M. Jacques-André Schneider. Lorsque nous avons vu ce projet de loi, nous avons pensé pouvoir travailler en équipe. Mais voici que le tank, que dis-je, la batelière de l'Entente...
Une voix. La canonnière!
M. Jacques-André Schneider. ...la canonnière, peut-être... (des députés chantent.) ...mais le tank de l'Entente, conduit par son fidèle chauffeur, est prêt à presser sur le champignon. Je parle, bien entendu, de votre estimé M. Balestra. Ce tank de la majorité va de l'avant en écrasant tout sur son passage. Il dit : «Foin de discussions, les commissions on n'en veut plus ! On n'est pas prêts à examiner quoi que ce soit. Nous voulons une décision immédiate».
C'est un changement important sur une question institutionnelle. En tant qu'écologistes, votre attitude nous fait doucement rigoler. On chasse le jacobinisme et voici qu'il revient par la grande porte. C'est le jacobinisme de l'Entente. Bien entendu, nous ne pouvons pas accepter «ces façons de hussards» pour prendre des décisions. Ce n'est en tout cas pas un esprit de collégialité. Vous n'êtes pas sympas !
Mme Vesca Olsommer (Ve). Mon intervention a peut-être été un peu violente tout à l'heure, mais j'aimerais entendre l'avis du président du Conseil d'Etat. (Des voix. Ah, ah, aaahhh!)
M. Jean Spielmann (T). J'interviens sur la proposition d'avoir une discussion immédiate et aux propositions faites sur la forme plutôt que sur le fond, car, à ce niveau, rien n'est tellement nouveau. En effet, présenter une telle discussion, intervenir comme vous le faites, à un mois des élections du Grand Conseil, après avoir démontré vos compétences au niveau du pouvoir pendant 50 ans... (Rires.)
M. Michel Balestra. Eh, eh, 1917 !
M. Jean Spielmann. ...après toutes les démonstrations de vos cinq conseillers d'Etat, incapables de tenir tête à un seul, vous mettez en cause tout le principe politique de ce canton qui repose sur une politique de concordance, dans laquelle, à tous les niveaux, on pratique le débat critique, on prend des décisions en fonction d'une proportion de majorité dans la population, et chacun décide en fonction de ses propres responsabilités et de sa propre audience.
Vous proposez aujourd'hui un gouvernement qui décide, majoritaire...
Une voix. A d'autres !
M. Jean Spielmann. ...et alors, je vous annonce, Messieurs d'en face, une série de désillusions en cascade, du genre de celles que vous avez déjà pu essuyer à quelques reprises.
Rappelez-vous, Messieurs, les décisions que vous prenez ici avec toute votre arrogance dans le domaine du logement, de la fiscalité, de l'aménagement et dans l'ensemble des domaines où vous avez été sanctionnés par la population.
Vous aurez encore l'occasion d'en prendre conscience très prochainement. Le choix que vous faites est tout de même extraordinairement important. Vous allez entamer un débat politique dans lequel vous excluez quasiment 40% de la population. Cela pourrait changer bientôt et c'est peut-être pour cela que vous êtes pressés. Vous essayez d'exclure ce 40% d'une politique de concordance. C'est tout de même un problème fondamental.
Qu'a-t-on entendu dire tout à l'heure ? On nous a dit : «On ne veut pas débattre de la discussion immédiate en commission». C'est tout de même très important. Vous êtes un peu fébriles et audacieux de vous lancer dans une tentation totalitaire... (Toute l'assemblée s'écroule de rire. Applaudissements de toutes parts.)... qui vous conduira d'échec en échec.
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Nonobstant l'invitation de Mme Olsommer, je pensais prendre la parole au cours de ce débat, n'en déplaise à mes collègues ! (Rumeurs). Je n'aborderai pas le fond, mais la question de la discussion immédiate, bien qu'il n'appartient pas au Conseil d'Etat de s'ingérer dans les affaires du Grand Conseil.
Néanmoins, je désire rappeler qu'une pratique constante et sage existe dans votre Conseil, celle de réserver la discussion immédiate soit pour des projets qui ont une urgence véritable - je ne savais pas que le Conseil d'Etat fonctionnait si mal, (Clameurs.) je suis étonné de ces critiques et ne sais pas comment mes collègues les prennent - soit pour des projets de lois qui ne posent pas de problèmes en raison de leur simplicité.
Lorsque l'on veut modifier la législation, et plus particulièrement les lois touchant au fonctionnement de nos institutions, la règle veut que non seulement on les examine en commission pour apprécier la portée exacte du texte, mais aussi pour s'accorder un délai de réflexion qui paraît normal pour des questions de cette importance.
Je m'exprime en tant que juriste et j'ai dit au niveau du Conseil d'Etat que, même si on peut poursuivre certains objectifs politiques, notamment la veille des élections, le projet en question pose des problèmes juridiques réels.
Il est possible que d'autres juristes considèrent ces problèmes comme inexistants, mais je crois que M. Cramer à eu raison de mettre le doigt sur des problèmes fondamentaux qui, finalement, touchent les droits des citoyens. Que vous le vouliez ou non !
Pour prendre une décision, le Conseil d'Etat ne peut pas si facilement se substituer à un département. Votre Grand Conseil, à juste titre, a voulu conférer cette compétence a un département pour, précisément, ouvrir des voies de recours auprès des tribunaux contre des décisions administratives. Indiscutablement, la création du Tribunal administratif, voulue à l'unanimité par ce Grand Conseil, visait à donner des droits légitimes aux citoyens face à un pouvoir trop fort de l'administration.
Les voies de recours étaient extrêmement limitées. Beaucoup de décisions du Conseil d'Etat ne pouvaient faire l'objet que d'un recours de droit public auprès du Tribunal fédéral. Mon prédécesseur, Jaques Vernet, avait préconisé qu'un certain nombre de décisions importantes portant sur des dérogations en matière d'autorisation de construire fussent conférées à l'autorité subordonnée, donc à l'autorité départementale, plutôt qu'au Conseil d'Etat pour ouvrir une voie de recours sur le plan cantonal.
Bien entendu, on peut dire que le Conseil d'Etat prend une décision et le département l'exécute. La voie de recours existe toujours. Ce n'est pas si simple car, si le Conseil d'Etat prend une décision qui lie le département, je pense qu'elle n'est plus prise par l'autorité subordonnée.
En matière de droit constitutionnel, j'ai une certaine expérience, mais je ne prétends pas être infaillible. Toutefois, cette question mériterait - me semble-t-il - l'avis de juristes et d'être examinée avec une certaine rigueur. Pour ma part, je suis convaincu que cette loi ne permettra pas au Conseil d'Etat de débattre des grands problèmes dont il ne débattrait pas aujourd'hui. Je suis le plus ancien au Conseil d'Etat, non pas en âge mais en fonction. Je constate que tous les problèmes importants sont abordés au Conseil d'Etat... (M. Armand Lombard éclate de rire et fait des signes de dénégation.)
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. ...mais bien sûr, Monsieur Lombard, vous pouvez rire ! Tous les problèmes importants sont évoqués, dont celui qui vous préoccupe ce soir, celui des rues de connexion. On voit très bien que vous avez cela derrière l'esprit. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion de dire à mes collègues qu'il aurait peut-être été plus clair que le Conseil d'Etat prenne position sur cette question au mois de juin (Brouhaha.) d'une façon informelle. Il pouvait parfaitement le faire sans que ce soit une décision au sens strict du terme.
Les problèmes importants sont effectivement débattus au Conseil d'Etat. Par contre, la tentation sera évidente de faire monter des dossiers mineurs au Conseil d'Etat. Je pense que cela entraînera des perturbations dans le fonctionnement de nos institutions.
Je ne suis pas ici pour vous convaincre, mais ce problème est important. S'il ne l'était pas, il n'aurait pas eu une telle portée et on n'y aurait pas attaché une telle importance. Je pense que la sagesse voudrait qu'il soit examiné en commission. Au Conseil d'Etat, nous n'avons pas débattu de la demande de la discussion immédiate car je présumais qu'il allait partir en commission.
M. David Lachat (S). En effet, il convient de nous calmer, comme nous y a implicitement invité M. Grobet. (Ronchonnement.) Les législations de circonstance prises à l'occasion d'un événement précis, je suppose que dans le cas d'espèce c'est Circulation 2000...
Une voix. Non !
M. David Lachat. ...qui sont votées à la hussarde à 10 h du soir, ne sont pas des législations sereines et, très souvent, on les regrette. Vous ne pouvez peut-être pas répondre - je l'admets - à des interventions un peu «carrées ou courroucées» par la politique du rouleau compresseur. Ce n'est ni sage, ni opportun, ni politiquement habile.
En définitive, si ce projet est si bon, si les arguments dont vous disposez ont le poids que l'on nous a indiqué tout à l'heure, alors, prenez le temps, prenez la peine d'essayer de nous convaincre. Vous n'avez pas intérêt à voter ce projet de loi contre une petite moitié du Grand Conseil.
A part les arguments juridiques, un autre argument existe. Ce projet de loi a été écrit - je suppose - quelque peu à la hâte sur le coin d'une table, et je souhaiterais bien avoir l'avis des constitutionnalistes qui se seraient penchés sur cette question. J'ai les doutes les plus sérieux quant à la compatibilité de ce projet de loi avec la constitution cantonale. Lisez l'article 118, notamment, qui définit la compétence des départements, et réfléchissez quelques instants sur la question de savoir s'il n'aurait pas fallu ériger ce projet de loi au niveau constitutionnel. Il y a là un casse-tête qu'il n'est pas facile de résoudre à cette heure-ci, et qui, de surcroît, risquerait de compliquer énormément les choses si d'aventure un citoyen envisageait de déposer un recours de droit public.
M. Thierry Du Pasquier (L). Je pense que vous avez tous remarqué le côté surréaliste de ce débat. En réalité, un des reproches fait à ce projet de loi par la gauche est justifié. Ce projet de loi n'aurait jamais dû être écrit parce qu'il enfonce une porte ouverte.
Qui, dans ce parlement ou dans cette République, conteste la collégialité du gouvernement ? Ce projet de loi ne fait rien d'autre que réaffirmer un principe qui nous est cher à tous, ancré dans la constitution, dans les usages de notre parlement et de notre gouvernement. Ce projet de loi ne fait rien d'autre que de répéter quelque chose dont on n'aurait jamais dû s'écarter.
M. Fontanet a dit tout à l'heure qu'il répondait à une dérive législative. Je pense que c'est juste. Je dirais même qu'il répond à une dérive de l'usage. Un certain usage s'est effectivement instauré, celui de violer ce fonctionnement normal de notre gouvernement. C'est précisément parce que cet usage s'est instauré qu'il y a lieu, par une décision du parlement, de revenir au fonctionnement normal des institutions, et rien d'autre. Cette décision est urgente car un certain nombre de choses doivent être décidées rapidement. Le fait même que ce débat se soit instauré comme il l'a été démontre très clairement que certains ne souhaitent pas que les institutions fonctionnent de manière collégiale comme elles doivent le faire.
Ce fait même implique la nécessité immédiate de cette décision, car il n'y a aucune raison de temporiser, pour réaffirmer un principe avec lequel nous sommes tous d'accord.
M. Bénédict Fontanet (PDC). Quand on ne veut pas d'un projet ou qu'il gêne, on dit qu'il pose des problèmes juridiques et qu'il a été mal rédigé. Le Conseil d'Etat comporte tout de même un certain nombre d'anciens avocats et juristes... (M. Fontanet est chahuté par M. J.-A. Schneider.) ...je propose que notre ami Schneider aille boire un verre d'eau (Rires.) qu'il prenne un petit Ceresta ou qu'il fasse un tour dehors. Cela lui rafraîchira l'esprit !
La constitution genevoise montre clairement qu'il incombe au Conseil d'Etat de gouverner ce canton. A cet égard, la relecture des articles de la constitution est claire. Alors, venir nous dire que ce serait au département de le faire, selon l'interprétation qu'en fait M. Lachat, c'est un tout petit peu curieux.
Quant au problème des attributions et des recours, il peut être parfaitement réglé, en ce sens que le Conseil d'Etat n'a qu'à dire à tel ou tel département qu'il doit prendre telle ou telle décision. Ensuite, le recours se fait contre cette décision. Je ne vois pas la difficulté que pose cette question juridique à ce stade.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Les questions posées par Mme Olsommer et M. Schneider sont sérieuses et nous les avons étudiées. Je vous indique dans quel sens nous les avons résolues.
Tout d'abord, les premières idées débattues à propos de ce projet remontent à mars 1993. Elles ne sont donc pas liées au projet Circulation 2000; encore que je rends hommage à M. Grobet d'avoir mis en évidence que Circulation 2000 pouvait être un des cas d'application des dysfonctionnements d'un gouvernement collégial en tant que tel.
A cet égard, je ne me prononcerai pas sur le problème de la discussion immédiate. Notre président s'est prononcé, et je n'entends rien ajouter à ce qu'il a dit.
Sur le plan des problèmes de principe que vous avez évoqués, il ne s'agit pas de dire que telle compétence qui, dans la loi, se trouve conférée à tel département, ferait l'objet de décisions formelles rendues désormais non pas par le département en question mais par le Conseil d'Etat.
Il s'agit bien de permettre aux départements d'exercer les compétences d'exécution et les attributions qui leur sont dévolues par la loi, mais également, et tout aussi fondamentalement, de dire que tel département dans le cadre des attributions qui lui sont conférées doit suivre les directives adoptées par le Conseil d'Etat. C'est un mécanisme simple et fondamental qui ne pose pas de problèmes juridiques. Nous l'avons discuté à réitérées reprises, mais aujourd'hui il y a divergence d'appréciation politique.
M. Claude Blanc (PDC). Je demande l'appel nominal sur la discussion immédiate. (Appuyé.)
La présidente. L'appel nominal a été demandé, nous allons y procéder.
M. Alain Rouiller (S). Je prends la parole pour demander l'appel nominal (Rires et applaudissements.) que je vais brièvement motiver.
Pour bien comprendre une discussion, il est parfois utile de prendre des exemples. Notre collègue M. Balestra a donné une liste d'exemples. Je continue sur sa lancée et prends un projet au hasard qui a fait l'objet d'une concertation générale, qu'un département a mis au point, qui a été adopté par le Conseil d'Etat en mars 1991.
Le Conseil d'Etat a reçu une carte en couleur montrant tous les détails du plan qui allait être réalisé. Il a reçu tous les détails des objets qui allaient être touchés. Cela signifie vraiment tous les détails. Ce n'est pas qu'un détail, chers collègues !
Mais que se passe-t-il dans ce Conseil d'Etat ? Etonnamment, nous trouvons trois conseillers d'Etat qui se déjugent. En effet, après avoir accepté et voté un projet, ils prennent contact avec des associations, leur demandent d'intervenir, de faire des recours, les encouragent à s'opposer à la volonté qu'ils avaient pourtant clairement exprimée.
Que faut-il faire? Devrions-nous punir ces trois conseillers d'Etat qui ce soir nous présentent un projet sur la collégialité ? A ce point, permettez-moi, Madame la présidente, de sourire en regardant ces conseillers d'Etat qui se fichent du monde. Ceux-là mêmes qui nous disent ce soir qu'il faut faire un projet de loi pour être plus collégial.
Que font ces conseillers d'Etat ? Ce sont les premiers à ne pas respecter la collégialité. Je trouve vraiment qu'on se fiche du monde !
Et M. Maitre, présentateur de ce projet, est le premier à qui l'on devrait dire: «Monsieur Maitre, vous vous fichez du monde» ! Vous osez dire qu'il faut être collégial et vous êtes le premier à remettre en cause un projet que vous avez accepté. Je dis et maintiens que le projet que vous avez accepté en mars 1991 contenait toutes les mesures... (Brouhaha.)
M. Balestra lui coupe la parole.
M. Alain Rouiller. ...Mais j'explique, cher collègue, pourquoi il faut refuser la discussion immédiate. Il faut la refuser puisque les conseillers d'Etat qui nous présentent ce projet sont eux-mêmes victimes de cela. Or, pour les en préserver et permettre à M. Maitre, s'il est réélu une prochaine fois, de faire acte de dissidence, il ne faut pas accepter la discussion immédiate et aller, comme nous le faisons habituellement, en commission voir si ce projet est constitutionnel ou non; il faut donc refuser la discussion immédiate, ce que nous pouvons faire par appel nominal.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Les allégations de M. Rouiller constituent une mise en cause qui implique les informations suivantes.
Vous avez évoqué le projet Circulation 2000. En mars 1991, le Conseil d'Etat unanime a adopté le plan de mesures OPair. En matière de circulation, le plan de mesures OPair prévoit le principe de mesures restrictives de circulation au centre-ville et les axes sont effectivement mentionnés.
En mars 1991, aucun projet concret n'existait à propos des mesures de Circulation 2000. A fortiori, nous n'avons pas pu l'adopter puisque les études lancées par le département de justice et police n'avaient, de loin, pas abouti. Ce projet a été présenté par le chef du département de justice et police au mois de juin 1993, après une consultation publique sur le résultat de laquelle nous avons été informés en même temps que la presse.
M. Alain Rouiller. Mais non, ce n'est pas vrai!
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Non seulement nous n'avons pas été en mesure d'approuver ce projet - le plan de mesures C 93 - mais encore nous n'en avions pas été informés. C'est exactement ce que M. Grobet, président du Conseil d'Etat, a confirmé tout à l'heure. Nous aurions dû, au préalable, avoir une discussion sur le plan concret.
Nous n'avons pas pour habitude au Conseil d'Etat de nous donner, les uns et les autres, des chèques en blanc. Le principe du plan de mesures OPair - je le confirme - a été approuvé à l'unanimité du Conseil d'Etat. Le plan concret de mesures C 93 non seulement n'a jamais été approuvé, mais il ne lui a jamais été soumis. Je persiste et je signe. (Applaudissements sur les bancs de la droite.)
M. Alain Rouiller (S). (Brouhaha.) Je ne suis pas impressionné par la déclaration de M. Jean-Philippe Maitre. Je sais regarder. Je sais lire (Brouhaha.) et, apparemment, ce n'est pas le cas de tout le monde. Je sais lire...
Une voix. Non!
M. Alain Rouiller. ...et je peux voir des couleurs. Lorsque je reçois un plan en couleur et que, sur ce dernier, il est indiqué très clairement - Monsieur Maitre, si nous prenons le cas du quai des Bergues indiqué sur ce plan en couleur - que la rue sera fermée et à priorité piétonne, je dis que le Conseil d'Etat savait ce qu'il a voté. Or, si ce soir vous dites le contraire, Monsieur Maitre, je dois dire, malheureusement, que vous ne dites pas la vérité car le plan est très clair. Les axes sont mentionnés. On indique les mesures à prendre. On nous présente un plan avec toutes les mesures indiquées. C'est vrai que chaque département ne montre pas le détail, par exemple où sera posé le panneau qui indique à quel endroit on doit tourner. Mais le détail était indiqué sur le plan de mesures - je le maintiens - et M. Maitre ne dit pas la vérité lorsqu'il prétend n'avoir pas su ce qu'il votait. Dans ce cas, s'il ne sait pas ce qu'il vote, que se passe-t-il ?
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Vous me permettrez de constater que, comme on pouvait le craindre, ce débat est en train de déraper d'une manière regrettable. Je pense, d'après ce que viennent de me dire mes collègues, que nous n'allons pas demander le troisième débat ce soir, donc, dans la mesure où le troisième débat n'est pas demandé, je me demande s'il ne serait peut-être pas plus sage que vous profitiez du temps pour en discuter sereinement en commission. (Applaudissements.)
La présidente. Nous allons procéder à l'appel nominal sur la discussion immédiate.
Celles et ceux qui acceptent la discussion immédiate répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non.
La discussion immédiate est adoptée par 47 oui contre 38 non et 1 abstention.
Ont voté oui (47) :
Jacques Andrié (HP)
Bernard Annen (L)
Raoul Baehler (MPG)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Roger Beer (R)
Claude Blanc (DC)
Jeanine Bobillier (MPG)
Hélène Braun-Roth (DC)
Nicolas Brunschwig (L)
Martine Brunschwig Graf (L)
Hervé Burdet (L)
Georges Cardinaux (L)
Anne Chevalley (L)
René Chuard (MPG)
Andrée Dayer (DC)
Hervé Dessimoz (R)
Thierry Du Pasquier (L)
Daniel Ducommun (R)
Jean-Luc Ducret (DC)
Henri Duvillard (DC)
Bernard Erbeia (L)
Catherine Fatio (L)
Philippe Fontaine (R)
Bénédict Fontanet (DC)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Maurice Giromini (R)
Henri Gougler (L)
Yvonne Humbert (L)
Michel Jacquet (L)
Jacqueline Jacquiard (MPG)
Philippe Joye (DC)
René Koechlin (L)
Claude Lacour (L)
Armand Lombard (L)
Béatrice Luscher (L)
Raymond Martin (MPG)
Michèle Mascherpa (L)
Jean Montessuit (DC)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Jean Opériol (DC)
Françoise Saudan (R)
Jacques Torrent (R)
Monique Vali (DC)
Florian Vetsch (R)
André Vial (MPG)
Nicolas Von der Weid (L)
Ont voté non (38) :
Robert Baud (S)
Jacques Boesch (T)
Liselotte Born (S)
Fabienne Bugnon (E)
Pierre-Alain Champod (S)
Robert Cramer (E)
Jeannik Dami (S)
Jacqueline Damien (S)
Erica Deuber-Pauli (T)
Marlène Dupraz (T)
René Ecuyer (T)
Alberto Genini (T)
Liliane Johner (T)
Michel Jörimann (S)
David Lachat (S)
Sylvia Leuenberger (E)
Christiane Magnenat Schellack (S)
François-Régis Mahrer (E)
Gabrielle Maulini-Dreyfus (E)
Pierre Meyll (T)
Chaïm Nissim (E)
Arthur Nobs (E)
Vesca Olsommer (E)
Catherine Rapp-Jotterand (E)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Jean-Luc Richardet (S)
Maria Roth-Bernasconi (S)
Alain Rouiller (S)
Andreas Saurer (E)
Alain Sauvin (S)
Irène Savoy (S)
Jacques-André Schneider (E)
Max Schneider (E)
Jean Spielmann (T)
Erika Sutter-Pleines (S)
Claire Torracinta-Pache (S)
Michel Urben (S)
Martine Wenker Coskun (S)
S'est abstenu (1) :
Jean-Claude Genecand (DC)
Etaient excusés à la séance (11) :
Charles Bosson (R)
Hermann Jenni (MPG)
Georges Jost (MPG)
Albert Maréchal (DC)
Gérard Ramseyer (R)
David Revaclier (R)
Martine Roset (DC)
Michel Rossetti (R)
Christine Sayegh (S)
Philippe Schaller (DC)
Alain Vaissade (E)
Etaient absents au moment du vote (2) :
Bernard Lusti (R)
Jean-Pierre Rigotti (T)
Présidence : Mme Micheline Calmy-Rey, présidente.
Premier débat
M. Jean Spielmann (T). Lorsque vous ouvrez la discussion, Madame la présidente, laissez au moins la possibilité aux gens de s'exprimer puisqu'elle est demandée ! (Désapprobation dans la salle.)
Je désire parler du moment politique que nous vivons. A ce sujet, je vous ai parlé des problèmes que vous rencontrerez. Il est certain que, dans cette République, nous aurons à débattre, les uns et les autres, de problèmes pour lesquels nous devrons faire montre d'un maximum de sens des responsabilités.
Il est certain, et vous le savez aussi bien que nous, qu'il n'est pas possible de trouver des solutions seuls et de les imposer aux autres sans leur laisser la possibilité de s'exprimer. Le Conseil d'Etat, jusqu'à ce jour, et cela pendant des années, a été composé d'une majorité de cinq personnes de vos rangs contre deux des autres rangs.
C'est par votre volonté politique que vous avez transformé le Conseil d'Etat de Conseil collégial qu'il était en un Conseil de spécialistes en conférences de presse, spécialisés dans leur département plutôt que de vrais responsables d'Etat. Vous l'avez vous-mêmes modifié. Cela a été confirmé par la présence au Grand Conseil, par des règlements permettant au Conseil d'Etat d'assister aux séances à la carte, aux débats du Grand Conseil, et de laisser le chef du département des finances seul par rapport aux questions financières alors qu'elles concernent l'ensemble du gouvernement.
Vous avez systématiquement fait de vos personnalités, depuis des années, des spécialistes dans un seul domaine. Aujourd'hui, vous proposez artificiellement une loi qui corrige cette majorité écrasante de cinq contre deux en prévoyant la possibilité de faire taire les deux autres et ainsi d'avoir le monopole complet du pouvoir.
C'est le début de la bataille électorale de la liste à sept et de ce dont je parlais tout à l'heure face à la situation économique et politique de ce canton, face aux décisions que vous aurez à prendre et que vous auriez déjà dû prendre depuis quelque temps concernant les problèmes qui agitent notre République depuis quelques années, ceux que vous avez le plus souvent à la bouche, en vous rappelant que vous sortez de cinquante ans de pouvoir absolu au Conseil d'Etat et au Grand Conseil.
Vous faites les lois que vous voulez. Vous avez la majorité absolue. Par conséquent, vous portez la responsabilité seule et entière de ce qui ne s'est pas fait ou mal fait. Or, en ayant cette majorité aujourd'hui, cette responsabilité, vous évacuez les problèmes sur ceux qui sont minoritaires.
Je prends pour exemple la traversée de la rade qui vous tient tellement à coeur. Pendant ces cinquante dernières années, qu'est-ce qui vous a empêché de voter dans le parlement et au Conseil d'Etat un projet de réalisation de la traversée de la rade ?
La minorité ? (Il pose cette question à l'assemblée.) Mais vous venez de faire la démonstration de votre arrogance ! Lorsque vous voulez imposer votre point de vue, d'abord, c'est la discussion immédiate et le vote juste après. Au Conseil d'Etat, vous êtes majoritaires à cinq contre deux, et vous reprochez à ceux qui sont dans la minorité de ne pas réaliser ce que vous avez été incapables de mettre en oeuvre. C'est la situation d'aujourd'hui. Quelle sera-t-elle demain ?
Vous voulez plus de pouvoir, plus de responsabilités et faire taire l'opposition. Vous faites deux erreurs : la première est que demain nous serons encore là. Nous aurons encore la possibilité d'intervenir et celle de faire sanctionner votre politique quand le peuple la jugera mauvaise.
Je vous rappelle tout de même qu'à plusieurs reprises, avec toute votre arrogance, tout votre pouvoir et toute votre majorité, vous avez dû ramasser claque sur claque dans les domaines du logement social, de la fiscalité, de l'école et de toute une série de domaines d'aménagement...
Une voix. Et de l'énergie!
M. Jean Spielmann. ...Et de l'énergie. Quels seront les problèmes de demain ? On vient d'entendre qu'on propose un nouveau projet de loi fiscal. On veut faire payer plus aux pauvres et épargner les riches. J'ai oublié de dire tout à l'heure que les 60 millions qu'on prélèvera de plus en impôt, non seulement ne seront prélevés que sur les pauvres, mais ils paieront encore en plus les cadeaux que vous ferez aux plus riches. Et vous croyez que vous tout seuls, ici dans ce parlement, allez voter les lois ? Mais votez-les en discussion immédiate, et moi je vous fais le pari que vous perdrez chaque fois devant le peuple.
Si vous discutez tranquillement des problèmes et que vous les analysez en fonction d'un certain nombre de critères, vous laissez la place à la critique jusque dans le gouvernement, mais je vous rappelle d'une manière assez solennelle que vous prenez ce soir un virage extrêmement important. Oui, Messieurs, et surtout vous les libéraux et les autres (Chahut, contestation.) qui sont leurs porteurs d'eau, vous paierez aussi parce qu'à force de vous mettre à plat ventre, et on l'a vu tout à l'heure dans le cadre de l'élection judiciaire avec les socialistes, lorsque toutes les commissions interpartis se mettent ensemble, vous faites chaque fois un pas de plus vers eux et eux avancent d'un pas. Enfin, vous serez à leur solde et à leurs basques. A ce moment, vous serez plus loin des réalités quotidiennes de la population et cela nous permettra à nous, opposition, de venir concrètement dénoncer votre politique, dénoncer votre arrogance. Ainsi vous prendrez claque sur claque sur des problèmes précis ! Voilà une première réponse.
Aujourd'hui, vous avez encore la possibilité de faire prévaloir votre arrogance parce qu'il y a bien sûr les perspectives électorales et votre support électoral. Vous avez le pouvoir de l'argent et la presse à vos basques qui vous cire les bottes à journée faite. Tout cela vous permet d'être arrogants. Mais nous gardons une certaine sérénité parce que, malgré tout ce pouvoir, tout ce que vous votez, on pourra vous donner quelques claques qui vous ramèneront aux réalités quotidiennes des gens de ce canton. (Applaudissements sur les bancs de la gauche).
Le projet est mis aux voix.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
Le projet est adopté en premier débat par 47 oui contre 38 non.
M. Dominique Föllmi, conseiller d'Etat. Je vous demande l'autorisation d'une suspension de séance de quelques minutes afin que le Conseil d'Etat puisse discuter de ce troisième débat. Je vous en remercie.
La présidente. La séance est suspendue pendant cinq minutes. (Brouhaha.)
Mme Claire Torracinta-Pache (S). Je désire relever trois points qui m'ont choquée. Le dernier vient d'être évoqué.
Ils concernent la collégialité. Lorsque la conférence de presse concernant ce projet de loi a eu lieu, le président du Conseil d'Etat et son collègue socialiste n'ont même pas été avertis ni invités. Voici la première discourtoisie et absence de collégialité.
Deuxièmement, nous avons abordé les problèmes de TC 2000 d'une manière assez agressive en l'absence du principal intéressé, M. Bernard Ziegler.
M. Dominique Föllmi, conseiller d'Etat. Je regrette, car nous pouvions encore discuter, mais dans ces conditions nous demandons le troisième débat. (Applaudissements.)
Le projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
sur l'exercice des compétences du Conseil d'Etatet l'organisation de l'administration
(B 1 2,5)
LE GRAND CONSEIL,
vu les articles 101, 119 et 122 de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847,
Décrète ce qui suit:
Article unique
Principe
1 Le Conseil d'Etat exerce le pouvoir exécutif. Il prend les décisions de sa compétence.
Compétences déléguées
2 Il règle les attributions des départements, en constituant des offices ou des services et en leur déléguant les compétences nécessaires.
3 Lorsque des attributions leur ont été conférées directement par la loi, les départements, les offices ou les services les exercent sous l'autorité du Conseil d'Etat.
Droit d'évocation
4 Le Conseil d'Etat peut en tout temps se saisir, le cas échéant pour décision, d'un dossier dont la compétence a été déléguée:
a) lorsque l'importance de l'affaire le justifie;
b) et pour autant qu'il ne s'agisse pas d'une matière où il est autorité de recours.
M. Jean Spielmann (T). Comme je l'ai dit en introduction, il s'agit d'un problème extrêmement urgent. En effet, je trouve que la manière dont procède l'entreprise Swissair est inacceptable. Cela pour trois raisons.
La première est le problème lié au personnel de cette entreprise qui, informé l'après-midi, est convoqué à une séance le soir et apprend qu'il est vendu avec le matériel à une entreprise extérieure au canton, sans lui donner possibilité de discuter. L'organisation syndicale a appris cet état de fait une demi-heure avant la décision.
La situation actuelle de ces cent soixante-trois personnes, dont plus d'une dizaine sont depuis vingt ans les fidèles serviteurs de Swissair avec des travaux extrêmement difficiles et peu rémunérés, est dramatique. Certains ont plus de trente ans de service et ne sont informés que par un seul coup de téléphone qu'ils sont vendus et qu'ils n'auront plus droit ni aux prestations ni aux salaires de Swissair et qu'il ne sera établi aucune convention de travail pour cette nouvelle entreprise - si on peut parler de convention de travail avec cette dernière car elle est à l'extérieur du canton.
L'entreprise Swissair devrait avoir une autre attitude vis-à-vis de son personnel par rapport à l'emploi et à la situation économique que de le mettre devant le fait accompli. Ces cent soixante-trois personnes sont les plus vulnérables au sein du personnel de cette entreprise. Elles exécutent depuis des années les tâches les plus humbles et les plus difficiles avec des conditions salariales déplorables.
Je demande au Conseil d'Etat d'entreprendre toutes les démarches afin qu'une convention collective respectant le minimum de droits des personnes concernées soit signée avec la future entreprise, afin d'avoir des garanties et que l'entreprise Swissair exerce au moins son pouvoir pour qu'on maintienne un minimum de discussion avec le personnel et qu'on n'agisse pas par diktat.
Je sais bien que cela tombe un peu mal après ce qui vient de se passer, mais de toute façon cette situation n'est pas acceptable. Je demande au Conseil d'Etat de prendre ce dossier en main et d'examiner toutes les possibilités pour trouver une issue favorable pour ces cent soixante-trois personnes concernées.
M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Je regrette que cette interpellation ait été développée juste à l'instant. J'aurais préféré qu'elle le soit demain car M. Spielmann me l'a annoncée et l'a annoncée à votre Conseil.
La présidente. La réponse du Conseil d'Etat à cette interpellation figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan no 28 539A-543, dressé par le département des travaux publics, le 24 mars 1993, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Lancy (création d'une zone sportive), est approuvé.
2 Aucune construction n'est autorisée à l'exception des mâts d'éclairage, de la clôture autour des terrains de football et des accès aux vestiaires tels que prévus par le projet de plan localisé no 28 471-543.
3 Les plans des zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
Un exemplaire du plan no 28 539A-543 susvisé, certifié conforme par la présidente du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
La ville de Lancy s'est rendue acquéreur en 1972 des parcelles 1106 (10 515 m2), 2753 (7 845 m2), 2207 (8 080 m2), feuille no 31 de la commune de Lancy, situées le long du chemin des Verjus et du chemin des Fraisiers au Grand-Lancy, soit une superficie totale de 26 440 m2 de terrain.
Ce périmètre affecté à des activités sportives est actuellement situé en zone de verdure.
En 1976, la commune y réalisa deux terrains de football, l'un engazonné et l'autre aménagé en terre battue. En 1980, elle déposa une requête en autorisation d'implanter des mâts d'éclairage. Celle-ci fut refusée par le département des travaux publics. Après recours de la commune, ce refus a été confirmé par la commission de recours LCI ainsi que par le Tribunal administratif.
En 1985, après l'établissement par les autorités communales d'un plan directeur de la commune, le Grand Conseil, favorable à l'affectation des terrains en cause à des activités sportives, acceptait de déclasser en zone de verdure avec mention sportive les parcelles 1106, 2753 et 2207, situées alors en zone 5 (villas). Il statuait également sur les oppositions formées contre ce déclassement par les habitants du quartier, en les rejetant.
La commission d'aménagement du canton, chargée d'examiner le projet de loi, avait demandé que les installations et notamment l'éclairage restent raisonnables et suscitent le moins d'inconvénients possible pour les riverains. Par ailleurs, l'aménagement des terrains ne devrait pas permettre d'attirer un trop large public.
Pour répondre aux demandes réitérées du Grand-Lancy FC, qui comprend environ 350 joueurs réunis dans 18 à 20 équipes, la commune a repris le dossier et décidé d'améliorer les installations existantes.
En 1985, elle a demandé et obtenu de créer un second terrain de football, ainsi que l'illumination de la totalité de la surface d'entraînement. Ces autorisations ont fait l'objet d'un recours de la part de voisins qui ont eu gain de cause auprès de la commission de recours LCI. La commune a alors recouru auprès du Tribunal fédéral où elle a été déboutée.
Le Tribunal fédéral avait toutefois admis, dans ses considérants, que la commune de Lancy ne perdait pas la faculté de présenter un nouveau projet conforme aux exigences légales.
Afin de satisfaire aux besoins du Grand-Lancy FC, et en accord avec les normes de l'Ecole fédérale de gymnastique et de sport de Macollin, qui recommande de disposer d'un terrain pour 4 à 5 équipes, les autorités municipales ont déposé, en 1991, une nouvelle requête en autorisation de construire qui prévoit des aménagements simplifiés, ainsi qu'un vestiaire et un parking.
Afin que ce nouveau projet soit conforme aux exigences légales et dans le but de régler de façon claire et durable l'affectation de ces terrains, il est proposé de créer une zone sportive au sens de l'article 24, alinéa 4, de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire sur les parcelles 1106, 2753 et 2207, d'une surface totale de 26 440 m2.
Aucune construction n'est autorisée sur ce périmètre, à l'exception des mâts d'éclairage, de la clôture autour des terrains de football et des accès aux vestiaires tels que prévus par le projet de plan localisé de quartier n° 28 471-543.
Le plan localisé de quartier no 28 541-543, mis simultanément à l'enquête publique, définit plus précisément l'aménagement retenu pour ce périmètre et permettra ainsi de rassurer le voisinage quant à d'éventuels développements futurs des équipements sportifs.
L'enquête publique ouverte du 16 décembre 1992 au 1er février 1993 a provoqué quelques observations qui seront transmises à la commission chargée de l'examen du projet de loi. Celui-ci a été approuvé favorablement par le Conseil municipal de la commune de Lancy, en date du 27 mai 1993.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre le présent projet de loi à votre bienveillante attention.
blanche
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'aménagement.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit:
Art. 8 A (nouveau)
Inventaire des surfaces d'assolement
1 Afin de satisfaire les exigences posées par l'ordonnance d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 2 octobre 1989 (ci-après: ordonnance), un inventaire des terrains considérés comme surfaces d'assolement au sens de l'ordonnance est inclus dans le plan directeur.
2 La procédure d'adoption de l'inventaire des surfaces d'assolement est celle prévue pour l'adoption du plan directeur (art. 3 à 8).
3 Le plan n'ayant qu'une valeur indicative, cet inventaire n'est pas opposable aux particuliers.
4 Seuls des terrains sis en zone agricole et cultivés peuvent être intégrés dans l'inventaire. Toutefois, l'inventaire peut comprendre des terrains sis en zone de verdure ou sportive, qui peuvent rapidement être cultivés en cas de nécessité.
EXPOSÉ DES MOTIFS
L'ordonnance d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 2 octobre 1989 (ci-après: OAT) a introduit pour la première fois la notion de «surfaces d'assolement» (ci-après: SDA). L'OAT ne définit pas précisément la notion de SDA.
Cependant, l'article 16, alinéa 3, OAT indique que:
«...Une surface totale minimale d'assolement est indispensable pour assurer au pays une base d'approvisionnement suffisante comme l'exige le plan alimentaire, dans l'hypothèse où le ravitaillement serait perturbé.»
Les SDA peuvent dont être définies comme les surfaces agricoles cultivées nécessaires pour garantir un ravitaillement normal en cas de crise. L'idée est très proche du «plan Wahlen» établi pendant la Seconde Guerre mondiale.
L'OAT impose aux cantons de circonscrire les SDA et de les fixer commune par commune (art. 18, al. 1, OAT). Les cantons doivent veiller à ce que les SDA soient classées en zone agricole (art. 20, al. 1, OAT).
Sur le plan genevois, le Conseil d'Etat a édicté le 1er juillet 1992 un règlement d'application de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (ci-après: Règlement), paru dans la Feuille d'Avis officielle (ci-après: FAO) du 8 juillet 1992.
Ce règlement institue une procédure particulière pour le projet de plan fixant le relevé des SDA. Par ce biais, le Conseil d'Etat a en réalité institué un nouveau plan d'affectation au sens de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (ci-après: LAT), sans base légale ou délégation législative.
En date du 9 septembre 1992, un avis du département des travaux publics est paru dans la FAO, informant que les plans des SDA pouvaient être consultés jusqu'au 9 octobre 1992 et que des observations pouvaient être émises durant ce même délai. Il était aussi rappelé qu'il était possible de faire opposition auprès du Conseil d'Etat jusqu'à la date précitée.
La parution de cet avis a soulevé une vague d'observations et d'oppositions, provenant aussi bien des communes que des particuliers.
Les raisons succinctement exposées sont les suivantes: les communes n'ont souvent pas été entendues pour la fixation de leurs SDA, certaines parcelles sises en zone à bâtir ont été inexplicablement incluses dans le plan des SDA. Enfin, celui-là donne l'impression de paralyser définitivement la zone agricole, telle qu'elle existe actuellement, alors qu'il est de notoriété publique que certaines parcelles situées en zone agricole n'ont plus d'agricole que le nom.
A la suite de ces événements, une motion, la M 829, a été déposée par-devant le secrétariat du Grand Conseil, demandant l'annulation du Règlement. Il est intéressant de constater qu'elle a été signée par des députés ayant tous des responsabilités sur le plan communal (maire, conseiller(ère) administratif(ve), etc.). Cela démontrait bien l'inquiétude des communes devant le projet tel que présenté.
Afin de clarifier une situation qui demeure peu claire, nous proposons de modifier la LALAT, afin de donner d'une part la base légale nécessaire pour toute procédure relative aux SDA et, d'autre part, permettre d'intégrer avec toute la souplesse nécessaire les SDA dans le plan directeur actuel.
Nous entendons d'abord rappeler cette règle élémentaire dans une démocratie parlementaire: l'Exécutif doit toujours disposer d'une base légale claire pour pouvoir édicter un règlement. Si celui-ci contient des normes primaires, c'est-à-dire des règles de droit ne se trouvant pas dans une loi au sens formel, il faut qu'une délégation législative claire à l'exécutif se trouve dans la loi.
Or, nous sommes dubitatifs quant à la réalisation, dans le cas d'espèce, de l'une ou l'autre des conditions citées plus haut. C'est pourquoi nous proposons d'intégrer ces règles dans une loi au sens formel, la LALAT.
Ensuite, nous soulignons que les SDA doivent être considérées comme un critère dont il faut tenir compte dans l'élaboration du plan directeur, c'est-à-dire dans l'aménagement global du canton. Elles ne doivent en aucun cas devenir un instrument de planification en soi.
Le Conseil fédéral lui-même va dans ce sens puisqu'il déclare, dans un extrait du document «Genèse et résultats» qu'il a publié le 8 avril 1992 et concernant la garantie des SDA, que:
«...Il incombe aux cantons et aux communes de garantir le respect des SDA dans leurs plans d'affectation. L'article 20, alinéa 1, OAT, précise que les surfaces d'assolement doivent être garanties par leur classement en zone agricole normale. La création de zones agricoles spéciales n'est donc pas nécessaire (c'est nous qui soulignons). L'ordonnance ne confère pas non plus à l'ensemble des SDA une protection juridique inconditionnelle, comme c'est, entre autres, le cas de la forêt. La pesée quasi exhaustive des intérêts en présence, telle que l'exige la LAT pour les activités ayant des effets sur l'organisation du territoire, n'est pas mise entre parenthèses. Au contraire, il faut dorénavant que les SDA revêtent une plus grande importance que jusqu'ici lors de la pesée des intérêts en présence. Le quota minimal de surfaces par canton doit en tous les cas être respecté.» (cf. chap. 10.2).
Il appert ainsi que les SDA doivent représenter un critère indispensable dans le cadre de l'aménagement du canton, mais non pas devenir une zone agricole spéciale.
Il est d'ailleurs intéressant de relever que certains des autres cantons romands ont mis sur pied des procédures similaires à celle que nous proposons. Par exemple, le canton du Jura a inscrit les SDA dans son plan directeur. Il s'agit d'un paramètre dont il faut tenir compte dans l'examen de chaque cas d'espèce. Dans le canton de Fribourg, l'inventaire des SDA a aussi été intégré dans le plan directeur. Les SDA représentent également un élément dont il faut tenir compte.
C'est donc dans le but de concilier les divers intérêts (économiques, écologiques, etc.) en présence que nous soumettons le présent projet à votre sagacité et vous remercions d'ores et déjà, Mesdames et Messieurs les députés, de la bienveillante attention avec laquelle vous l'examinerez.
Préconsultation
Mme Catherine Rapp-Jotterand (Ve). Le problème des surfaces d'assolement est étroitement lié à celui des zones agricoles et plus particulièrement à la protection de celles-ci. Nous adhérons à l'analyse faite par les auteurs de ce projet de loi indiquant que les surfaces d'assolement ne doivent pas forcément constituer des zones agricoles spéciales ou des zones en tant que telles, mais à certaines conditions seulement, qui sont loin d'être remplies pour l'instant.
Il faudrait commencer par redéfinir la zone agricole en établissant une surface minimum de terres, un certain nombre d'hectares à conserver absolument (L'oratrice insiste sur ce mot.) dans cette zone.
Au-delà de ce minimum garanti, il serait alors envisageable, moyennant compensation, de déclasser des terres situées en zone agricole, en fonction de critères d'aménagement tels que la situation de fait - par exemple, la mise en conformité de zones de certains terrains et bâtiments existants dont l'affectation n'a rien d'agricole - ainsi que des critères de développement écologiques et économiques. Il est évident que certains hameaux, certains bâtiments voués à l'artisanat ou à la petite industrie n'ont aucune raison de se trouver, comme c'est parfois le cas actuellement, en zone agricole.
Tant que l'on n'aura pas défini cette zone agricole strictement protégée, nous continuerons à nous opposer à tout déclassement, à moins, évidemment, qu'une compensation ne soit prévue, c'est-à-dire à moins que l'on ne restitue à la zone agricole une superficie équivalente dans un autre endroit de la commune ou du canton.
En effet, on déclasse au coup par coup, on grignote sans vergogne. Or, si les subventions fédérales encouragent la mise au repos de certaines terres, cela ne signifie pas que nos besoins en terres agricoles diminuent. Car à moyen terme, la seule manière de survivre pour une agriculture comme la nôtre - et pour l'agriculture européenne en général - c'est de se tourner vers une agriculture moins intensive.
Les espaces sont chez nous limités, la terre est coûteuse, les ressources du sous-sol quasi inexistantes. A techniques et organisation égales, les coûts de production sont supérieurs à ceux qui peuvent être obtenus dans de vastes plaines et sous d'autres climats. Notre agriculture n'est pas compétitive sur le marché mondial des denrées alimentaires. Faut-il continuer à tenter de la faire survivre artificiellement, à coups de subventions ?
Edgar Pisani, ancien ministre français de l'agriculture, écrivait en mai 1992 dans «Le Monde» : «Accepter que joue la seule loi du marché c'est, pour l'Europe, accepter la diminution de plus de moitié du nombre de ses exploitations agricoles; c'est accepter qu'un tiers supplémentaire de son territoire devienne un quasi-désert, c'est s'engager à faire face aux problèmes que lui poseront le manque d'eau, la consommation d'énergie, mais aussi la pollution, car plus elle est intensive, plus la production est polluante».
De nombreux agriculteurs se convertissent à une agriculture plus extensive, qui demande donc davantage de surfaces à exploiter, et se tournent vers l'agriculture biologique.
Pour des raisons touchant autant à l'économie qu'à l'écologie, nous avons besoin de maintenir une importante zone agricole dans notre canton. Tant que ce maintien ne nous sera pas garanti, nous nous opposerons donc à des projets de lois tels que celui qui nous est proposé ici. Et pour les mêmes raisons, nous ne pourrons accepter le projet de loi sur les hameaux proposé au point 63, à moins qu'une compensation ne soit envisagée. Il est urgent de mettre au point une politique d'aménagement du territoire qui offre à la zone agricole davantage de garanties.
La présidente. Ce point de l'ordre du jour sera donc repris à la séance de demain.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan n° 28 347, dressé par le département des travaux publics le 6 août 1992, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Choulex (création d'une zone de développement 4 B protégée destinée à des activités artisanales), est approuvé.
2 Les plans des zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre du plan visé à l'article 1.
Art. 3
Un exemplaire du plan n° 28 347 susvisé, certifié conforme par le président du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le hameau de Bonvard, situé sur la commune de Choulex, figure déjà sur les cadastres de 1726 et 1812 par la présence continue de deux groupes de constructions. Ces mas, isolés à l'origine, se sont peu à peu réunis, notamment par l'implantation, il y a quelque 50 ans, d'une entreprise de menuiserie et, plus récemment encore, par la construction de quelques villas.
Le département des travaux publics a été saisi de plusieurs requêtes en autorisation de construire concernant l'agrandissement de l'entreprise de menuiserie, située au centre du hameau. Ces requêtes n'ont, jusqu'à aujourd'hui, pu être autorisées au vu des contraintes liées au statut de la zone agricole, ce qui a amené le département des travaux publics à envisager, d'entente avec les autorités communales de Choulex, la création d'une zone à bâtir.
Le périmètre concerné comprend les parcelles nos 2056, 2280, 2057, 2085, 2118 et en partie les parcelles nos 2249, 2319 et 2120, feuille 28 de la commune de Choulex, et s'étend sur une surface totale de 4 300 m2.
Dans une étude d'aménagement du hameau de Bonvard réalisée en 1989, les autorités communales, soucieuses de maintenir des activités diversifiées et comprenant la nécessité, pour un artisan, d'adapter des structures de travail anciennes aux exigences d'une exploitation moderne, se sont montrées favorables à cette modeste modification du régime des zones répondant strictement aux besoins de l'entreprise de menuiserie.
Cette volonté de favoriser une certaine mixité des activités sur le territoire communal devrait s'accompagner toutefois de mesures propres à en contrôler l'extension, compte tenu du caractère résidentiel et agricole du lieu.
Le présent projet de modification du régime des zones répond donc aux voeux de la commune de Choulex. Il prévoit la création d'une zone de développement 4 B protégée, d'une superficie de 4 020 m2, permettant une extension limitée de l'entreprise de menuiserie.
La commission des monuments, de la nature et des sites, ainsi que la commission d'urbanisme ont préavisé favorablement ce projet.
Par ailleurs, la réalisation de ce projet devrait également être l'occasion d'améliorer la sécurité des piétons, le long du chemin de Bonvard, par l'aménagement d'un cheminement séparé de la chaussée. Une arborisation de qualité rendra plus attractif le centre du hameau, tout en masquant dans une certaine mesure les dépôts de bois et le stationnement des véhicules.
Le plan localisé de quartier no 28 409, mis simultanément à l'enquête publique, définit plus précisément l'aménagement de ce périmètre.
L'enquête publique ouverte du 12 février au 15 mars 1993 a provoqué quelques observations qui seront transmises à la commission chargée de l'examen du projet de loi. Celui-ci a été approuvé favorablement, 6 voix pour et 5 voix contre, par le Conseil municipal de la commune de Choulex, en date du 7 juin 1993.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre le présent projet de loi à votre bienveillante attention.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'aménagement.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan no 28 542-505, dressé par le département des travaux publics le 1er février 1993, modifiant le régime des zones de constructions sur le territoire de la commune de Bardonnex (création d'une zone de développement 4 B protégée, au hameau de Charrot), est approuvé.
2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone créée par le plan visé à l'article 1.
Art. 3
Un exemplaire du plan no 28 542-505 susvisé, certifié conforme par le président du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le présent projet de loi vise à créer une zone à bâtir pour le hameau de Charrot. La modification de cette zone porte sur la totalité du hameau de Charrot, feuilles 8n et 17 du cadastre de la commune de Bardonnex, situé à l'est du village de Bardonnex et au sud de l'ancienne commanderie de Compesières.
Le hameau de Charrot est actuellement situé en zone agricole. A vocation maraîchère et viticole, Charrot constitue l'un des cinq sites bâtis ou villages qui composent l'entité communale. Depuis plusieurs années, la commune souhaite que ce hameau, vu sa grandeur, soit mis dans une zone à bâtir afin que son régime ne soit plus régi par les normes de la zone agricole.
Les dispositions de l'article 22 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LALAT), adoptées le 5 octobre 1989, prévoient, au second alinéa, lorsqu'une partie importante des hameaux constitués et situés en zone agricole n'est manifestement plus affectée à l'agriculture, la possibilité de proposer un déclassement en 4e zone rurale. A signaler à ce propos que Charrot correspond en tous points aux critères retenus par le plan directeur cantonal qui établit une liste d'ensembles bâtis correspondant à la définition de «hameaux».
Après de longs travaux préparatoires, auxquels ont collaboré les autorités communales d'une part, et le département des travaux publics, en liaison avec la commission consultative des monuments, de la nature et des sites et celle d'urbanisme, d'autre part, le périmètre d'une nouvelle zone de construction a pu être mis au point en accord avec la commune.
La définition de cette nouvelle zone prend en compte la qualité du hameau et de son environnement, vu la proximité du site de la commanderie de Compesières reconnu d'intérêt national. Ainsi, l'emprise nouvelle de la zone à bâtir envisagée se doit de respecter les exigences propres à la zone agricole environnante, raison pour laquelle elle a été restreinte au site même du hameau. La possibilité d'établir de nouvelles constructions en second front a fait l'objet d'un examen circonstancié et a finalement été limitée à quelques cas. La présente proposition traduit également le souci d'éviter la création de nouvelles dévestitures susceptibles de porter atteinte au caractère du lieu.
Il est donc proposé la création d'une zone de développement 4 B protégée d'une superficie d'environ 24 500 m2. Les futurs plans localisés de quartier définiront plus précisément l'aménagement de ce périmètre et veilleront à l'harmonisation des nouvelles constructions avec l'environnement et le bâti existant.
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre du plan concerné par le présent projet de loi.
L'enquête publique ouverte du 10 mars au 9 avril 1993 a provoqué quelques observations qui seront transmises à la commission chargée de l'examen du projet de loi. Celui-ci a été préavisé favorablement par le conseil municipal de la commune de Bardonnex, en date du 15 juin 1993, en demandant toutefois que le déclassement se fasse en zone 4 B protégée et non en zone de développement 4 B protégée.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre le présent projet de loi à votre bienveillante attention.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'aménagement.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan no 28536-506, dressé par le département des travaux publics le 13 octobre 1992, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Bellevue (création d'une zone de développement industriel et artisanal destinée à des entrepôts à la route de Valavran), est approuvé.
2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité IV aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone créée par le plan visé à l'article 1.
Art. 3
Un exemplaire du plan no 28536-506 susvisé, certifié conforme par le président du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le présent projet de modification du régime des zones concerne la parcelle no 2873, feuille no 17, sur le territoire de la commune de Bellevue et fait suite au projet de loi no 6788 et au plan no 28378-506 l'accompagnant auxquels nous vous prions de bien vouloir vous référer pour les considérations générales.
En effet, lors de sa séance du 2 septembre 1992, la commission d'aménagement du canton chargée de l'examen du projet de loi précité a constaté que celui-ci portait sur la création d'une zone dont la limite partageait en deux et de manière inappropriée la parcelle no 2873. Cette situation résulte du fait que le projet de modification du régime des zones précité avait calqué les limites de la nouvelle zone à bâtir sur celles des zones de bruit fixées en vertu de la loi fédérale sur la navigation aérienne.
La commission ayant entendu, à sa demande, l'exploitant de l'entreprise de menuiserie-charpente située sur cette parcelle et s'étant rendue sur place, une partie de celle-ci a invité - sous la forme d'une motion - le Conseil d'Etat à élaborer un projet de loi modifiant la limite de la zone crèe par l'adoption du projet de loi no 6788 susmentionné, afin de la faire coïncider avec la limite de la parcelle no 2873 évoquée plus haut.
Cette adaptation des limites de la zone de construction permettrait de régulariser une situation équivoque et de parvenir ainsi à une modification du régime des zones plus cohérente. Elle implique le déclassement d'une modeste surface d'environ 700 m2, actuellement située en zone agricole et comprise dans le projet de plan de surfaces d'assolement, et son rattachement à la zone de développement industriel et artisanal destinée à des entrepôts, avec un indice d'utilisation maximum de 0,20 proposé par le projet de loi no 6788. Ce modeste déclassement paraît acceptable.
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, le degré de sensibilité IV est attribué aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone concernée par le présent projet de loi.
L'enquête publique ouverte du 24 mars au 23 avril 1993 n'a suscité aucune observation et le présent projet de loi a fait l'objet d'un préavis favorable, à l'unanimité, du Conseil municipal de la commune de Bellevue, en date du 8 juin 1993.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre le présent projet de loi à votre bienveillante attention.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'aménagement.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
Le plan no 21795-136, dressé par le département des travaux publics le 3 février 1947 et adopté par le Grand Conseil comme plan d'extension le 12 janvier 1952, est abrogé dans sa partie formée par le sous-périmètre délimité par l'avenue Krieg, la rue Michel-Chauvet, les bâtiments bordant la rue Henry-Spiess et la route de Malagnou et qui fait l'objet du projet de plan localisé de quartier no 28477-136 portant sur les parcelles no 1746 et 1780. Il est maintenu pour le surplus.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le présent projet de loi tend à l'abrogation partielle du plan d'extension no 21795-136 du quartier de Contamines adopté par le Grand Conseil le 12 janvier 1952.
Les parcelles concernées par le présent projet de loi appartiennent à deux sociétés immobilières et sont actuellement occupées par un bâtiment de cinq étages plus attique sur un rez-de-chaussée et un rez inférieur, lequel a été construit en application dudit plan. Ces parcelles sont situées à l'angle nord formé par la rue Michel-Chauvet et l'avenue Krieg.
La densité résultant des bâtiments existants n'étant que de 0,7, les propriétaires ont souhaité réaliser des surfaces de plancher supplémentaires, permettant d'atteindre un indice d'utilisation du sol supérieur correspondant approximativement aux densités habituellement rencontrées dans le quartier.
Après plusieurs esquisses, la solution finalement retenue qui a fait l'objet du projet de plan localisé de quartier no 28477-136 consiste à:
rallonger le bâtiment existant, sur sa partie nord-ouest, par l'adjonction d'un bâtiment affecté au logement, de même largeur et de même gabarit, et d'une longueur d'environ 18 m;
édifier, au droit de l'avenue Krieg, un bâtiment indépendant de forme carrée et d'un gabarit de cinq étages plus attique sur rez-de-chaussée, qui serait destiné à des bureaux;
réaliser, sur l'arrière, un petit bâtiment d'un étage plus attique sur rez-de-chaussée, destiné aux besoins d'une communauté religieuse, étant précisé que, dans l'hypothèse où cette communauté devrait quitter ces locaux, le projet de plan localisé de quartier prévoit une destination limitée à des activités d'intérêt public, permettant ainsi à un éventuel équipement public d'occuper l'espace disponible;
réaliser un garage souterrain de deux niveaux, sa capacité étant limitée à 90 places au maximum et son usage étant réservé aux habitants de l'îlot, à raison de 1,2 place par logement, ainsi qu'aux employés des surfaces administratives créées, à raison d'une place pour 200 m2 d'activités.
La densité totale dans le périmètre sera ainsi portée à 1,34 et il en résultera la construction d'environ trente-quatre logements, dont une part apréciable sera de type HLM. Quant au parking souterrain, il complétera le garage existant, dont la capacité n'est que de dix-sept places, de sorte qu'il en résultera donc un total disponible de cent places environ.
Le projet de plan localisé de quartier a été mis au point notamment avec le service d'urbanisme de la Ville de Genève et le service des forêts, de la faune et de la protection de la nature, de manière à ce que les nouvelles constructions, y compris le parking souterrain, respectent les principaux arbres existants dans le périmètre. Il a également été soumis pour préavis aux divers services et instances concernés et a reçu l'agrément de la commission cantonale d'urbanisme.
Le projet de plan localisé de quartier a fait l'objet de la procédure habituelle en vue de son adoption, soit procédure de préconsultation, préavis (favorable) du Conseil municipal de la Ville de Genève et procédure d'opposition sans que cette procédure ne suscite la moindre remarque ou opposition.
Avant de procéder à l'approbation de ce plan, il convient donc d'abroger le plan d'extension précité pour la partie concernée par le projet de plan localisé de quartier, étant précisé que ledit plan d'extension est pour le reste maintenu.
Tels sont les motifs, Mesdames et Messieurs les députés, qui nous conduisent à vous inviter à approuver le présent projet de loi.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'aménagement.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan n° 28 545-166, dressé par le département des travaux publics le 19 mars 1993, modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la Ville de Genève, section Petit-Saconnex (portant sur une zone industrielle et la création d'une zone de développement 3 destinée à des organisations internationales à l'avenue Blanc, à Sécheron), est approuvé, de même que l'échange foncier qui en résulte et qui porte sur la cession par l'Etat de la parcelle n° 4125 index 1 à Noga Invest SA en contrepartie d'une surface de terrain de 10'000 m2 destinée aux organisations internationales.
2 La zone de développement 3 destinée à des organisations internationales constitue une zone de développement affectée à de l'équipement public au sens de l'article 30 A de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 janvier 1987; la construction de bâtiments à cette fin dans le périmètre de cette zone est subordonnée à la cession préalable des terrains à l'Etat de Genève.
3 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité IV aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone industrielle et le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone de développement 3 créée par le plan visé à l'article 1.
Art. 3
Un exemplaire du plan n° 28 545-166 susvisé, certifié conforme par la présidente du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
A la suite de la vente par la Société ABB SA à la Société Noga Invest SA des terrains dont elle était propriétaire dans le périmètre de la zone industrielle et de chemin de fer de Sécheron compris entre l'avenue de France, l'avenue Blanc, l'avenue de la Paix et les voies CFF, le Conseil d'Etat avait envisagé de soumettre à l'approbation du Grand Conseil un projet de modification de zone visant à créer une zone de développement 3 et une zone de développement industriel pour ce périmètre destiné à permettre la réalisation d'un important projet immobilier.
A cette fin, une étude d'aménagement fut engagée avec la Ville de Genève, qui n'a pas reçu l'agrément des propriétaires des terrains. Par la suite, la Ville de Genève a préconisé le maintien des terrains concernés en zone industrielle. Simultanément, le Conseil d'Etat, pour ne pas retarder le projet de construction de la Société Sécheron SA sur la parcelle 4125 propriété de l'Etat, a décidé d'engager une procédure en modification de zone portant, d'une part, sur cette parcelle, afin de l'intégrer entièrement à la zone industrielle existante et, d'autre part, sur la parcelle 4126, également propriété de l'Etat, afin de l'affecter à une zone de développement 3 destinée aux organisations internationales permettant d'y construire le siège futur de l'Organisation météorologique mondiale (OMM).
A l'occasion de l'examen de ces deux projets de modification de zones par le Conseil municipal de la Ville de Genève appelé à préaviser les deux plans de zones y relatifs, ce dernier a voté une résolution (5006) confirmant la recommandation du Conseil administratif de la Ville de Genève portant sur le maintien du solde du périmètre de Sécheron en zone industrielle, tout en demandant qu'une partie de ce périmètre soit affecté aux organisations internationales.
Cette prise de position a amené le Conseil d'Etat et la Société Noga Invest SA à entamer de nouveaux pourparlers portant, d'une part, sur l'avenir du périmètre de Sécheron et, d'autre part, sur l'échange foncier résultant de la localisation du projet de Sécheron SA sur la parcelle no 4125 propriété de l'Etat. L'analyse de la situation a fait apparaître que la réalisation du projet immobilier à l'origine du projet de déclassement de la zone industrielle de Sécheron était très aléatoire, vu l'importante charge foncière dont les terrains concernés sont grevés. Dès lors, il a semblé plus réaliste de maintenir les terrains concernés en zone industrielle et d'utiliser à des fins industrielles les bâtiments existants (qui ont une valeur patrimoniale indiscutable) plutôt que de les démolir, tout en prévoyant un développement modulé de la zone industrielle permettant de la reconstruire par étapes au fur et à mesure des besoins des entreprises.
Cette solution a le mérite de répondre au voeu exprimé par la Ville de Genève, tout en favorisant grâce à un échange foncier avec l'Etat une extension de la zone préexistante destinée aux organisations internationales, qui répond à un besoin évident pour l'avenir de Genève si notre canton veut être en mesure de garantir les besoins d'extension de ces organisations. Le fait de disposer de terrains de réserve à cette fin est primordial, lorsque l'on songe tant à l'importance de ces organisations qu'à la nécessité de pouvoir répondre immédiatement à leurs besoins, si l'on veut éviter que certaines d'entre elles ne quittent Genève, tant la lutte est actuellement vive entre Etats pour attirer ces organisations.
Les dimensions de la zone destinée aux organisations internationales à Sécheron sont, certes, modestes, mais il s'agit d'un endroit extrêmement bien situé par rapport aux sièges de ces organisations, avec le grand avantage que les terrains sont ou deviendront propriété de l'Etat, ce qui est primordial pour les besoins auxquels ils seront affectés, cela d'autant plus que les terrains de réserve de l'Etat pour les organisations internationales sont très modestes.
Le présent projet de loi vise donc à maintenir la zone industrielle existante, sous réserve de l'extension de la zone destinée aux organisations internationales qui sera concrétisée grâce à l'échange de la parcelle 4125, laquelle restera en zone industrielle, avec une surface de 10'000 m2 de terrain devant revenir à l'Etat et être déclassée en zone de développement 3 à destination des organisations internationales. Afin de localiser ce secteur, le département des travaux publics a procédé avec Noga Invest SA à une analyse commune du périmètre de Sécheron dans le but de déterminer quels étaient les terrains dont le maintien en zone industrielle paraissait le plus approprié.
Cette analyse et la volonté exprimée par Noga Invest SA d'avoir pignon sur rue, ce qui implique de réserver à l'industrie les terrains en bordure de l'avenue de France, ont amené à situer le secteur destiné aux besoins des organisations internationales sur des terrains proches de la zone de développement existante déjà affectée à cet effet, telle que le Grand Conseil l'a créée le 18 septembre 1992. Ces terrains sont de ce fait et de part leur proximité avec le Centre William Rappard, également placés de manière favorable pour des bâtiments destinés aux organisations internationales. Cette proposition a fait l'objet d'un accord de principe avec Noga Invest SA quant à l'échange foncier qui conditionne la matérialisation du périmètre destiné aux organisations internationales. Le solde du périmètre comprenant les bâtiments les plus intéressants sur le plan constructif restera en zone industrielle, ce qui permettra de continuer à affecter ces bâtiments à des activités industrielles en attendant une valorisation progressive des terrains sur lesquels ils sont situés.
Le projet de plan de zone établi sur cette base est complété d'un projet de plan localisé de quartier élaboré en collaboration avec la Ville de Genève, qui vise à matérialiser les options retenues et à structurer l'ensemble du périmètre, notamment en ce qui concerne ses dessertes internes. C'est la raison pour laquelle le projet de plan localisé de quartier porte sur l'ensemble du périmètre de Sécheron englobant à la fois les bâtiments existants, les terrains affectés à l'industrie et ceux destinés aux organisations internationales, afin d'avoir une vision cohérente de l'ensemble du périmètre formé par l'avenue de France, l'avenue Blanc, l'avenue de la Paix et les voies CFF. Il mentionne également les deux plans localisés de quartier adoptés par le Conseil d'Etat portant sur les parcelles nos 4125 index 1 et 4129. Etant donné que les terrains compris dans le périmètre du projet de plan de zone n'ont pas fait l'objet de projets concrets de construction, le projet de plan localisé de quartier se borne à fixer pour ceux-ci les périmètres d'implantation, le gabarit et l'affectation des bâtiments, ainsi que la surface maximale de plancher constructible pour les terrains affectés aux organisations internationales. Seuls les axes principaux de circulation sont fixés, l'emplacement des voies secondaires à créer dépendant des projets concrets qui seront réalisé. Cette formule correspond, du reste, à celle des plans directeurs usuellement adoptés pour les zones de développement industriel, afin de laisser un maximum de souplesse pour les constructions dont la conception et, par voie de conséquence, la surface de plancher utile, peut varier considérablement en fonction des besoins effectifs des entreprises.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre le présent projet de loi à votre bienveillante attention.
Préconsultation
M. Philippe Joye (PDC). Notre groupe est favorable au renvoi de ce projet de loi en commission. Toutefois, il voit cinq raisons qui justifient une certaine réserve par rapport à ce dernier.
Premièrement, il semble que le texte soumis au Grand Conseil n'est pas le même que celui sur lequel le Conseil municipal de la ville de Genève s'est appuyé pour voter le principe de cette loi. Nous risquons donc de traiter d'un projet qui sera contesté par la Ville. Ainsi, nous reviendrons très vite à la case départ, c'est-à-dire à l'harmonisation préalable des deux textes.
Deuxièmement, il nous semble difficile de régler une seconde fois la question des terrains de Sécheron au coup par coup. Pour le cas précédent, cela se justifiait car il fallait agir vite pour permettre la construction de l'usine de Sécheron, mais nous devrions procéder de façon plus synthétique.
Troisièmement, l'état des négociations sur les différents terrains, les affectations et conceptions face à la ventilation du plan d'utilisation des sols est à revoir. Faut-il vraiment ajouter un pourcentage important de logements sur les terrains prévus pour la Maison de l'Europe ?
En effet, les relations Ville-Etat ne semblent pas toutes progresser de la même manière. Dès lors, est-il juste de les figer par un projet de loi partiel, non pas quant à sa territorialité, mais quant aux autres éléments vitaux de l'aménagement du territoire. Ainsi, on court le risque de faire capoter les discussions en plaçant les autres partenaires devant un fait accompli, que ce soient les usagers futurs, la Ville de Genève ou les propriétaires.
Quatrièmement, une phrase-clé de ce projet de loi nous interpelle à l'article 1, alinéa 2 de la loi. Il est effectivement écrit que : «La zone de développement 3 destinée à des organisations internationales constitue une zone de développement affectée à de l'équipement public...». La construction de bâtiments à cette fin dans le périmètre de cette zone est subordonnée à la cession préalable des terrains à l'Etat de Genève. Qu'adviendrait-il si, par hypothèse, une fois les terrains cédés préalablement à l'Etat, les constructions des bâtiments n'étaient plus possibles pour des raisons que nous ne pouvons pas prévoir à l'avance.
Cinquièmement, le cas de la Maison de l'Europe n'est pas réglé.
Je trouve tout simplement inadmissible qu'un élément aussi vital de la politique onusienne genevoise ne soit pas traité avant l'arrivée d'un projet de loi sur Sécheron sans inclure la parcelle du foyer qui est - et c'est connu - la parcelle la plus délicate ainsi que le point sensible des discussions entre la Ville et l'Etat.
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Les propos de M. Joye m'amènent à formuler quelques observations. D'abord, le plan qui vous est soumis à l'appui de ce projet de loi est, bien entendu, celui qui a été soumis à l'appréciation du Conseil municipal.
Je m'étonne que vous puissiez en douter. Le texte du projet de loi a été précisé comme annoncé devant la commission d'aménagement du Conseil municipal pour donner certaines garanties quant à l'échange de terrains entre «Noga Invest» et l'Etat de Genève. Pour être franc, je ne crois pas du tout à cet échange de terrains. Il est clair que dans cette affaire nous avons tout perdu sur le plan foncier.
En ce qui concerne la Maison de l'Europe, qui fait l'objet d'un périmètre distinct de la zone industrielle, savoir si on modifie la zone ou non devrait bien entendu faire l'objet, à ce moment-là, d'un projet totalement distinct.
Je désire souligner, en ce qui concerne la Maison de l'Europe, qui est précisément un de ces projets que certains se sont plu à gonfler pour en faire une sorte de machine de guerre, que c'est une baudruche et j'ai le regret de l'annoncer ici. On s'est fait mener en bateau d'une façon invraisemblable. C'est très triste, et je regrette, pour un certain nombre de causes valables, que des personnes aient voulu porter ce débat sur la place publique alors qu'il eût fallu l'aborder avec sérénité. Mais il faut savoir qu'aujourd'hui il n'y a aucune mission diplomatique des pays du Marché commun qui n'est intéressée à ce projet.
Le Conseil d'Etat a eu la prudence d'adresser une lettre à l'ensemble des missions diplomatiques des pays du Marché commun. Nous étions au courant de leur décision. La seule commission exécutive du Marché commun - elle ne représente qu'une petite part de cette Maison de l'Europe - est encore intéressée, nous dit-elle, à réaliser une construction sur cet emplacement. Nous n'avons eu que des réponses négatives à l'ensemble des lettres envoyées aux missions diplomatiques et certaines n'ont pas répondu.
Toutefois, nous savons qu'aujourd'hui, concrètement, le projet dit «communautaire» n'existe plus. Cela nous a été clairement indiqué par les représentants des missions diplomatiques. Il ne s'agit plus que d'un projet de la commission exécutive du Marché commun car les principaux partenaires n'en sont pas partie prenante.
Cela pose un problème extrêmement délicat dans la mesure où le Conseil d'Etat s'engagerait dans un projet important sur la parcelle du foyer. Il faudrait d'ailleurs que ce dernier puisse accorder une dérogation, car sur cette question il est nécessaire d'avoir l'accord de la Ville de Genève. Il est très délicat de s'engager sur un projet qui implique des dérogations importantes au profit d'un certain nombre de pays du Marché commun sans avoir aucune garantie. Je tenais à le dire car malheureusement ce dossier, comme quelques autres - cela me fait singulièrement penser à feu le dossier Palais Wilson - a été médiatisé. Pour ma part, il vaudrait mieux avoir un tout petit peu de retenue sur les dossiers de ce type.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
Un crédit de 1'800'000 F est ouvert au Conseil d'Etat dès 1994 pour financer l'aménagement des pavillons de saisonniers du Lignon en centre sportif et d'hébergement cantonal.
Art. 2
Les travaux prévus à l'article 1 sont déclarés d'utilité publique.
Art. 3
Ce crédit est soumis aux dispositions de la loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique, du 11 janvier 1964.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Les pavillons de saisonniers du Lignon n'étant plus occupés qu'à 50 %, suite aux difficultés économiques rencontrées dans le bâtiment, il y a lieu de regrouper les saisonniers dans le centre des Tattes à Vernier.
Les pavillons du Lignon ayant été récemment restaurés, pour un montant de plus de quatre millions, payés par le Fonds pour logements temporaires, il est souhaitable de trouver une autre affectation à ce complexe, afin de ne pas perdre l'investissement réalisé. Il faudra, toutefois, procéder à une modification préalable du régime des zones applicables à ces terrains, actuellement situés en zone agricole, ce d'autant plus que les pavillons en question ont été construits à titre provisoire et devraient normalement être démolis.
C'est ainsi qu'est née l'idée de créer un centre sportif polyvalent en s'inspirant de celui d'Ovronnaz (Valais), ce qui permettrait de pallier un manque d'installations d'accueil pour les sportifs, principalement en matière d'organisation de cours de formation. Ce centre pourra également accueillir des participants à de grandes manifestations romandes ou fédérales, même non sportives.
Le projet a été présenté lors de l'Assemblée générale de l'Association genevoise des sports qui a approuvé, à l'unanimité des 51 disciplines représentées, le principe de cette réalisation, vu le manque d'équipement dans ce domaine.
Les installations actuelles doivent être adaptées et des aménagements sportifs réalisés afin d'offrir un complexe répondant à leur nouvelle destination.
L'Association genevoise des sports a établi un projet qui définit en détail les travaux envisagés.
Sur le plan financier, l'estimation du projet prévoit un investissement de 1'791'000 F que nous avons arrondi à 1'800'000 F dans le projet de loi.
Les travaux qui débuteront en 1994 se termineront en 1995, année de la mise en exploitation du centre.
Tels sont, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous vous recommandons de réserver un accueil favorable à ce projet de loi.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission des travaux.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit:
Art. 19 A (nouveau)
Zone hameaux
1 La zone hameaux comprend des hameaux et des bourgs formés de groupes d'habitations anciennement à vocation rurale et de leurs dépendances sis en limite de la zone agricole.
2 La rénovation, la reconstruction et la transformation partielle de bâtiments et d'installations existantes pour y construire des logements, ou des bâtiments destinés à des activités rurales et villageoises, sont autorisées lorsque le volume et l'aspect extérieur sont conservés pour l'essentiel.
3 Sont considérées des transformations partielles notamment les transformations dans le volume existant et le changement d'affectation de bâtiments ou de partie de bâtiments, l'agrandissement modéré de bâtiments et d'installations permettant de les adapter au besoin de l'habitat.
4 De nouvelles constructions peuvent être autorisées dans la mesure où elles respectent la typologie des hameaux dans leur élément naturel et construit et qu'aucun intérêt prépondérant de l'aménagement du territoire n'est lésé.
5 La délivrance des autorisations de construire en zone hameaux est subordonnée à l'adoption d'un règlement par le conseil municipal de la commune concernée, approuvé par le Conseil d'Etat, qui définit le degré d'occupation des terrains, les dimensions, le caractère architectural, le genre et la destination des constructions afin de conserver ou d'en assurer le caractère et l'harmonie.
6 L'élaboration du règlement suit la procédure fixée aux articles 15 D, 15 E, alinéa 2, et 15 F de la loi sur l'extension des voies de communication et l'amélioration des quartiers et localités, du 9 mars 1929.
7 Le projet de règlement est soumis au préavis de la commission des monuments, de la nature et des sites avant d'être approuvé par le conseil municipal.
Art. 22 (abrogé)
Art. 2
Modificationà une autre loi
(B 6 1)
La loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984, est modifiée comme suit:
Art. 30, al. 1, lettre s (nouvelle,les lettres s à y anciennes devenant les lettres t à z)
s) le règlement relatif à l'utilisation du sol dans un hameau;
Art. 70, al. 1, lettre i (nouvelle,les lettres i à m anciennes devenant les lettres j à n)
i) le règlement relatif à l'utilisation du sol dans un hameau;
EXPOSÉ DES MOTIFS
Dès l'adoption de la loi d'application de la loi sur l'aménagement du territoire, le 4 juillet 1987 (ci-après LALAT), il s'est avéré que son article 22 qui traite des hameaux en zone agricole rencontrait des difficultés d'application.
En 1989 déjà, un projet de loi (PL 6276) visant à compléter cet article par deux alinéas nouveaux a été déposé. Il s'agissait de donner une base légale au Conseil d'Etat pour que des autorisations de construire soient délivrées pour rénover des maisons existantes dans leurs présents gabarits afin de faciliter le maintien du patrimoine bâti de ces hameaux.
Ces nouvelles dispositions ont permis des décisions ponctuelles de rénovation mais n'ont pas résolu la question dans son ensemble des rénovations voire des transformations de bâtiments situés dans les hameaux en zone agricole.
Le problème qui se pose est celui de la dualité existante entre le statut juridique des bâtiments situés en zone agricole et leur affectation réelle d'autre part. De plus, le fait que les hameaux sont situés en zone agricole a comme conséquence, conformément aux principes généraux de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (ci-après LAT), que les autorisations permettant aux propriétaires d'un bâtiment de le rénover ou de le transformer ne peuvent être gérées uniquement par le biais de dérogations.
Cette application est la résultante de deux procédures différentes, d'une part par l'octroi d'une dérogation accordée par le département des travaux publics dans les circonstances limitatives; d'autre part, par décision de déclassement prise par le Grand Conseil ayant pour conséquence de sortir de la zone agricole les hameaux considérés et de les intégrer dans la quatrième zone rurale.
En effet, en l'état de notre législation, une autorisation de construire dans un hameau intervient par l'application des règles d'aménagement et de construction en vigueur pour la quatrième zone rurale au sens de l'article 19, alinéa 2, lettre b de la LALAT.
Conséquences de ces procédures
Ces décisions étant ponctuelles et prises par voie dérogatoire, l'autorité cantonale pratique une politique du coup par coup. Or, si la LAT oblige les cantons à distinguer la zone à bâtir de la zone agricole, elle ne limite cependant pas les possibilités des cantons, bien au contraire: l'article 18 de la LAT réserve explicitement au canton la compétence de créer des zones de troisième type qui ne sont pas forcément assimilables aux zones à bâtir ordinaires.
Dès 1991, la Chambre genevoise d'agriculture, la Chambre genevoise immobilière de même que l'Association des communes genevoises se sont réunies pour trouver au problème des hameaux dans notre canton une solution juridique conforme aux dispositions sur l'aménagement du territoire.
Parvenus à la conclusion que le dépôt d'un projet de loi permettrait de réexaminer la question dans son ensemble, les représentants de ces organisations ont décidé de demander la collaboration du département de l'intérieur, de l'agriculture et des affaires régionales, département qui est chargé des relations avec les communes genevoises, et d'élaborer un projet de loi en commun.
Le texte auquel ils sont parvenus n'ayant pas été déposé par le Conseil d'Etat, les députés signataires, dans le but d'engager un débat sur le problème que posent les hameaux dans le cadre de l'aménagement du territoire et qui est soulevé depuis de nombreuses années par les autorités communales, ont décidé de reprendre ce projet à leur compte et de permettre ainsi un large échange de vues.
En conclusion, la solution qui vous est proposée consiste à intégrer l'ensemble des hameaux existants dans une zone nouvelle intitulée «zone hameaux». Celle-ci se distingue de la zone à bâtir ordinaire par le fait que l'article introduit dans la LALAT autorise dans cette zone la rénovation, la reconstruction ou la transformation partielle de bâtiments ou d'installations existantes pour réaliser des logements si le volume et l'aspect extérieurs sont conservés pour l'essentiel.
Les buts d'une telle proposition sont multiples. Il s'agit en priorité de préserver le patrimoine architectural et, dans cette optique, de donner la possibilité à leurs propriétaires de le restaurer et, par voie de conséquence, de le rentabiliser. La structure actuelle des hameaux doit être conservée, cette nouvelle zone crèe ne devant pas être considérée comme des terrains vierges constituant un potentiel constructif. De plus, ces agglomérations ne doivent pas s'étendre, en revanche leur affectation doit pouvoir subir des mutations.
C'est la raison pour laquelle cet article prévoit que de nouvelles constructions peuvent être autorisées, dans la mesure où elles respectent la typologie des hameaux dans leur élément naturel et construit, et qu'aucun intérêt prépondérant de l'aménagement du territoire n'est lésé.
Ainsi, la délivrance des autorisations de construire en zone hameaux est subordonnée à l'adoption d'un règlement par le conseil municipal de la commune, autorité qui est la mieux à même de connaître la véritable configuration du hameau, règlement qui doit fixer le degré d'occupation des terrains, les dimensions, le caractère architectural, le genre et la destination des constructions afin de conserver ou d'en assurer les caractères et l'harmonie et être approuvé par le Conseil d'Etat.
Un alinéa supplémentaire prévoit que ce projet de règlement est soumis au préavis de la commission des monuments, de la nature et des sites avant d'être soumis au Conseil d'Etat.
Par cette nouvelle disposition, les paramètres autorisant des restaurations, voire des nouvelles constructions dans les hameaux actuellement situés en zone agricole, seront différents de ceux qui sont stipulés pour la quatrième zone rurale. De plus, elle devrait permettre d'éviter la procédure actuelle du déclassement hameau par hameau prévu par l'article 22, alinéa 2 de la LALAT et à ce titre, il serait judicieux que les plans des périmètres de ces hameaux soient approuvés par le Grand Conseil en même temps que ce nouvel article de loi.
Rappelons à ce propos qu'une définition du hameau de même qu'une liste des hameaux recensés ont été soumises au Grand Conseil lors de sa séance du 5 octobre 1989 (Mémorial 1989, page 6029). Cet inventaire non exhaustif pourrait valablement servir de base de travail pour établir les périmètres de cette nouvelle zone. La commission chargée d'examiner ce projet de loi, en collaboration avec les communes, établira une liste définitive. Ce travail devrait également faciliter la mise en application du nouveau droit foncier rural qui est destiné à s'appliquer uniquement aux immeubles situés en zone agricole et qui sont appropriés à l'agriculture et à l'horticulture. Or, tel n'est actuellement pas le cas pour les immeubles situés dans les hameaux.
Ce sont là, Mesdames et Messieurs les députés, les considérations qui tendent à éclairer et motiver le présent projet de loi et dont nous espérons, de votre part, un accueil favorable.
Préconsultation
Mme Geneviève Mottet-Durand (L). Bien que la législation actuelle prévoie soit une dérogation accordée par le département des travaux publics pour la transformation d'un bâtiment dans un hameau, soit une modification de la zone proposée par le Grand Conseil pour sortir le hameau de la zone agricole et l'intégrer dans la quatrième zone rurale, cette situation n'est pas idéale pour traiter le problème des hameaux en général.
Aujourd'hui, la situation de ceux-ci a changé, non seulement du fait de l'accroissement de la fonction résidentielle, mais également à cause de la modification des besoins de l'agriculture.
M. Philippe Fontaine (R). Nous approuvons ce projet, bien entendu, puisque mon collègue Charles Bosson en est le cosignataire. Nous espérons qu'ainsi les changements d'affectation de nos maisons agricoles seront facilitées. En effet, vous connaissez les mutations actuelles dans l'agriculture et leur influence sur nos habitations. Je parle de nos habitations puisqu'à titre personnel j'ai la chance d'habiter à la campagne, mais je parle également du devoir de maintenir un patrimoine souvent difficile à conserver dans les conditions d'aujourd'hui.
Nous espérons que par une amélioration de la loi nous parviendrons à préserver ce qui en vaut vraiment la peine.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit:
Art. 19, al. 6 (nouveau)
Zone ferroviaire
6 La zone ferroviaire est destinée aux installations de chemins de fer, gares et activités liées à l'exploitation ferroviaire.
Art. 24, al. 4 (nouvelle teneur)
Zones sportives
4 Les zones sportives sont destinées à des terrains de sports et aux installations liées à la pratique du sport. La construction de bâtiments d'une certaine importance, tels que tribunes, halles couvertes, salles de gymnastique, aménagement de parkings, est subordonnée à l'adoption préalable d'un plan localisé de quartier au sens de l'article 3 de la loi sur l'extension des voies de communication et l'aménagement des quartiers ou localités, du 9 mars 1929.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Lors de l'adoption de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987 (L 1 17, ci-après LALAT), le Grand Conseil avait instauré la notion de zones sportives, destinées à des terrains de sports et aux installations liées à la pratique du sport. C'est ainsi que les zones sportives figurent dans la liste des zones énumérées par cette loi (voir art. 24, al. 4, LALAT).
Les installations sportives étaient jusqu'alors autorisées dans les zones de verdure, en principe avec mention sportive. Le Grand Conseil a cependant considéré qu'il était préférable de créer une zone ad hoc pour les installations sportives, tenant compte du fait que celles-ci ont souvent un caractère différent et distinct de ce que l'on attend d'une zone de verdure.
A l'époque de l'adoption de cette disposition légale, certains députés s'étaient inquiétés de l'ampleur des aménagements qui pourraient être réalisés dans de telles zones sportives, d'où la décision, à défaut d'une meilleure solution, de subordonner la réalisation d'installations d'une certaine importance à une décision particulière du Conseil d'Etat.
En pratique, il s'avère que cette solution n'offre pas les meilleures garanties de prévenir la construction d'installations sportives de grande envergure pouvant être de nature à péjorer le site ou provoquer d'importantes nuisances. En particulier, les habitants du lieu n'ont pas la possibilité de participer au processus d'aménagement des zones sportives. C'est ainsi qu'il a été envisagé, lors de débats devant la commission d'aménagement du canton du Grand Conseil, que l'adoption d'un plan localisé de quartier soit prévue pour des installations sportives d'une certaine importance. La procédure d'adoption d'un tel plan permet, en effet, aux habitants du secteur concerné de participer à l'aménagement d'une telle zone, ce qui a amené la commission d'aménagement à souhaiter que l'article 24, alinéa 4, LALAT soit modifié en ce sens. Le présent projet de loi répond donc à cet objectif et ceci à la demande expresse du Grand Conseil.
Cette adaptation de l'article 24, LALAT donne l'occasion de compléter la LALAT par un nouvel article 19, alinéa 6, concernant les zones ferroviaires. La notion de zone de «chemin de fer» existe déjà et figure notamment sur le plan des zones de construction du centre urbain de Genève, annexé à la LALAT (voir art. 32 de cette loi), ainsi que sur divers autres plans de zone. Toutefois, la LALAT, qui énumère les diverses zones à bâtir, ne comporte formellement aucune disposition traitant des zones ferroviaires. Il convient donc de réparer cette omission, relevée par certains, et de compléter l'article 19 LALAT en visant cette zone spéciale dont l'existence remonte au 27 avril 1940, date d'adoption de l'ancienne loi sur les constructions et les installations diverses et du plan des zones de construction du centre urbain de l'époque; la légende de ce plan comportait, en effet, déjà des zones dites de «chemin de fer», zones qui ont toujours été prises et complétées dans les plans successifs jusqu'à l'adoption de la LALAT, le 4 juin 1987. Le nouvel article 19, alinéa 6, proposé par le présent projet de loi vise à réparer cette omission, relevée par certains et constitue un pur «toilettage» de la LALAT.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention le présent projet de loi.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement.
Nous vous rappelons qu'en date du 26 juin 1990, votre Grand Conseil a libéré un crédit de 5'450'000 F destiné à l'installation et l'amélioration de la sécurité en cas d'incendie dans les bâtiments propriété de l'Etat de Genève dans le secteur de la Vieille-Ville. Il s'agissait de mettre en place un système efficace de prévention contre l'incendie tenant compte de la valeur inestimable des bâtiments historiques en question en raison de leur caractère irremplaçable. Certains incendies de bâtiments historiques avaient mis en évidence cette nécessité qui a encore été rappelée lors du tragique incendie de pont couvert à Lucerne.
La commission des travaux du Grand Conseil avait demandé que seule une première tranche de travaux portant sur certains des dix-huit bâtiments retenus pour la mise en place d'installations de sécurité soit réalisée et qu'un rapport soit présenté sur ces travaux au Grand Conseil avant qu'une seconde tranche de travaux ne soit engagée. Tel est le but du présent rapport.
Pour déférer au voeu exprimé par le Grand Conseil, le département des travaux publics a retenu une première tranche de sept immeubles représentant ainsi le tiers des bâtiments évoqués dans le cadre du crédit précité.
Les travaux n'ont pu être effectivement engagés qu'à partir de 1991 pour quatre immeubles et pour le solde qu'à partir du printemps 1992. Vu la complexité des travaux ainsi que les contraintes résultant de la nature des lieux et du fait que les locaux sont utilisés, seuls quatre immeubles ont pu être mis en service durant la deuxième moitié de 1992 (à savoir les immeubles 1, 2 et 6, rue de l'Hôtel-de-Ville et 2, rue Daniel-Colladon), les travaux étant en voie d'achèvement dans les trois autres immeubles (à savoir les bâtiments 11 et 14, rue de l'Hôtel-de-Ville et 2, rue Henri-Fazy).
Les comptes venant d'être bouclés pour les quatre premiers immeubles, il est possible de les présenter ci-après avec une estimation du coût des travaux dans les trois autres immeubles.
Débat
M. Armand Lombard (L). Vous aurez remarqué, je l'espère, que ce présent rapport a deux étages. Il est de facture très dissemblable. Le premier étage nous explique et donne le détail très complet de la dépense de 1,7 million environ pour améliorer la sécurité incendie de quatre immeubles de notre patrimoine et le second, très différent, demande une poursuite des travaux de ce projet, à savoir une dépense de l'ordre de 3 à 4 millions nouveaux.
Pour le premier étage, j'applaudis mollement.
Pour le second, voyons la chose en commission, et je dis même sursoyons pour quelques années, car nous faisons du luxe. J'entends bien sûr M. le chef du département invoquer la sécurité, cet argument qui rassasie le Suisse assis sur son bien-être. Je vous entends, Monsieur, évoquer les risques épouvantables des incendies destructeurs. Nous allons avoir dans quelques instants sous les yeux l'incendie de 1634 du grand Londres et sa cohorte de sans-abri démunis et hagards. Nous allons avoir la Tour infernale et l'héroïque Schwarzenegger, et le clou de votre argument, je pense que ce sera le pont de Lucerne.
Pourtant, que l'on ne s'y trompe pas. Il y a des pompiers en grand nombre et super-équipés dans la cité. Des alarmes automatiques sont déjà mises en place. Référez-vous au précédent rapport pour vous en convaincre. Il y a des mesures préventives publiques et privées dans tous les immeubles de la ville.
Le système qui nous est proposé n'apporte un plus que pour avertir un peu plus rapidement les pompiers d'un désastre qui se prépare, mais c'est l'affaire de quelques secondes gagnées.
Puisque ce Grand Conseil a demandé un rapport intermédiaire au Conseil d'Etat, je pense qu'il sera bon de revoir et d'étudier ce rapport en commission. Je suis d'avis que cette dépense peut être remise à des jours meilleurs où les finances de la République permettront à nouveau ce genre de luxe prohibitif. Je propose donc le renvoi en commission.
M. Christian Grobet, président du Conseil d'Etat. Il est évident que ce rapport devait être renvoyé en commission puisque, selon la loi votée en son temps, il appartient au Grand Conseil de décider si l'on engage une deuxième étape. A mon avis, il faut analyser ce que nous avons entrepris comme travaux, car tel était le but du rapport. Ensuite, sur la base de cette analyse, examiner la nécessité d'engager une nouvelle étape.
Monsieur Lombard, vous avez fait allusion à des mesures préventives permettant d'alerter la centrale d'interventions du service du feu. Nous souhaitons précisément les installer dans des bâtiments qui ne sont pas équipés d'une telle installation.
Il est bien entendu que nous mettons systématiquement ces installations dans les bâtiments récents construits par l'Etat de Genève. L'analyse concerne uniquement les bâtiments anciens qui ont été construits voilà quelques centaines d'années. La technologie de l'époque ne permettait pas ce genre d'installations. Une appréciation délicate d'opportunité est à faire quant au fait de savoir quels bâtiments doivent être équipés de ce genre de technique et quelle doit être l'ampleur de ces mesures.
On peut évoquer des cas d'incendie, et je ne parlerai pas du plus récent que vous avez signalé, mais je me permets simplement de relever que la presse a indiqué tout récemment, en ce qui concerne l'incendie du garage d'un magasin à succursales multiples dans le quartier des Eaux-Vives, que si on avait installé des «sprinkler» dans ce parking, comme cela se fait depuis lors dans d'autres parkings, on aurait évité des dégâts considérables. Il est vrai que ces installations peuvent être extrêmement efficaces. On pourra en discuter calmement en commission.
Je désire que vous compreniez la préoccupation du département qui porte sur des bâtiments qui, à mon avis, ne peuvent pas être estimés en argent car ils ont une valeur inestimable. On peut toujours dire, bien sûr, qu'un bâtiment vaut tant de millions, mais nous avons porté nos propositions sur des bâtiments historiques sur lesquels un incendie important aurait des conséquences particulièrement préjudiciables.
Hélas, nous devons constater que depuis certaines années, les actes de malveillance se sont considérablement développés à Genève, comme ailleurs. Du reste, nous avons - que vous le sachiez ! - sensiblement renforcé les équipes de surveillance qui sont efficaces. J'en ai eu la preuve cet été pour Genève-Plage par exemple, où, à la suite de la mise en place d'un surveillant et de la mise sous lumière de Genève-Plage, nous avons évité toutes les déprédations apparues depuis deux ou trois ans.
Auparavant, nous ne connaissions pas ces faits. Il y a là un véritable phénomène de société. L'été dernier, par exemple, une série d'incendies ont été provoqués - il faut hélas le dire - par des incendiaires, des malades ou des gens ayant un esprit criminel. Nous sommes donc obligés d'apprécier cette situation. Il me semble erroné de qualifier ces précautions de luxe. Toutefois il nous faudra examiner cette situation avec attention.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce rapport à la commission des travaux est adoptée.
La séance est levée à 23 h.