République et canton de Genève

Grand Conseil

M 840
6. Proposition de motion de MM. Albert Maréchal, Claude Blanc et Jean-Paul Terrier pour la promotion des carburants «verts». ( )M840

Débat

M. Max Schneider (Ve). Comme personne ne présente cette motion, je vais le faire! (Rires.) Tout d'abord, je voudrais signaler une petite erreur dans l'exposé des motifs. En fait, les terres mises en jachère satisfont les écologistes. En effet, nous pensons qu'une terre qui a été exploitée...

  La présidente. Monsieur Schneider, attendez une seconde, je ne suis pas sûre que votre micro fonctionne!

 M. Max Schneider. J'sais pas!

  La présidente. Ah, je crois que ça va mieux maintenant. Allez-y!

 M. Max Schneider. La première erreur de l'exposé des motifs consiste à dire que les mises en jachère des terres déplaisent aux écologistes. C'est peut-être une mesure qu'il faut prendre aujourd'hui, après vingt ans d'une surexploitation des zones agricoles, et c'est un bien pour nous, en Suisse, comme d'ailleurs pour toute la Communauté européenne dans le projet actuel de l'APAC.

 La deuxième correction que j'aimerais apporter à l'exposé des motifs concerne la phrase de la page 2 qui dit: «...d'offrir à l'agriculture la possibilité de recouvrer son indépendance énergétique...». Il y a là évidemment une grave erreur que je voudrais expliquer en quatre points. Le

bilan énergétique, présenté par le Bureau européen de l'environnement qui a traité ces biocarburants, a rendu compte que le rendement énergétique variait entre 0,85 et 1,25 de tonne équivalent pétrole pour produire une tonne équivalente d'éthanol.

 Cette phrase est donc totalement fausse, et j'aimerais apporter une correction. Pour obtenir un rendement énergétique de 1 à 1, c'est-à-dire si l'on veut investir dans les pesticides et les engrais chimiques qui sont eux aussi nécessaires, il va falloir consommer de l'énergie, et pour produire un bilan pratiquement nul, un bilan zéro égal à un pour le bilan énergétique final. Voilà ce que dit le très sérieux Bureau européen de l'environnement. Sans une utilisation systématique des coproduits, l'intérêt énergétique d'une telle filière est nul. Or cette utilisation n'est pas toujours réalisable. Par exemple, il est hors de question d'exploiter systématiquement la paille de blé, compte tenu du transport nécessaire et du manque de fourneaux appropriés.

 Ceci est une réalité européenne et c'est pourquoi la commission de l'énergie du Parlement européen a refusé ce que proposait la commission pour exonérer cette production de biocarburants au niveau de l'Europe. Sur le plan économique, il est vrai que le rendement actuel de ces biocarburants est pratiquement égal à la production du super ou du diesel, mais ceci sans écotaxes. C'est donc ce que nous vous présentons aujourd'hui: une motion anti-écotaxes. Cette motion doit être financée par quelqu'un, mais par qui? Au niveau de l'Europe, il y a une grande bagarre entre les Allemands et les Français. Les socialistes français sont bloqués à cause de leurs problèmes avec leurs agriculteurs, et ce sont les producteurs pétroliers qui encouragent aujourd'hui le gouvernement français à produire ces biocarburants, parce que pour produire plus de diesel -- il y a une pénurie, une saturation de la production de diesel en France -- il faudrait encourager les écocarburants, ou alors investir massivement sur le plan financier.

 Voilà pourquoi les producteurs pétroliers encouragent cette solution. Les investissements ne seraient plus faits par le secteur privé, mais par l'Etat, puisque celui-ci perdrait ces écotaxes pour financer sa politique actuelle. Voilà donc le biais que les socialistes en France ont trouvé pour s'opposer actuellement au vote de la recommandation faite par la commission de l'énergie du Parlement européen pour refuser cette exonération des écotaxes, laquelle constitue la première invite de la motion.

 Le deuxième point concerne les émissions polluantes. Je vous rappelle que le rapport de l'Office fédéral de l'environnement, qui a été dévoilé au début du mois de juin par l'hebdomadaire «Der Spiegel», dit ce qui suit:

«Stimuler par les engrais azotés dégage environ de 6 à 9 kilos par hectare de protoxyde d'azote, un gaz qui réchaufferait l'atmosphère trois cents fois plus que le gaz carbonique».

 S'il est vrai que le biocarburant permet de diminuer le CO2, par une production intensive sur ces terrains agricoles, on augmenterait donc cette production de protoxyde d'azote. Je ne vais pas faire le détail plus exhaustif des émissions polluantes et du bilan économique, parce que l'on pourrait en parler pendant des heures.

 Même si au point de vue environnemental la réforme de l'APAC n'est pas satisfaisante dans le plan agricole commun, le gel des terres en vue de réduire les stocks a le mérite de laisser les sols se reposer après plus de vingt ans de production de plus en plus intense. Or un encouragement à la production d'énergies renouvelables revient à stimuler les cultures. Cela annule totalement les effets potentiels de la réforme. Certes, nous devons étudier cette motion, mais il faut être très prudent. Aujourd'hui, le Parlement européen est très divisé sur cette question et le fait de vouloir prendre position tout de suite serait une politique antieuropéenne.

 Attendons peut-être les résultats de ces commissions, de ces études que nous n'avons pas les moyens de financer. Les députés qui ont présenté cette motion feraient bien de la retirer et de la représenter lorsque l'Europe aura pris une décision.

 L'intensification des cultures est à nouveau présente avec toutes ses nuisances. Si l'on supprime la jachère pour produire ces biocarburants, il y aura des effets néfastes sur l'environnement, comme la dégradation de la structure des sols, le compactage suite à des passages répétés de machines, l'accroissement de la fatigue des sols déjà surexploités et la disparition accrue des écosystèmes, et cela pour produire toujours plus, toujours plus vite. D'autre part, la production des biocarburants va certainement amener une agriculture différente de celle que l'on connaît actuellement et, malheureusement, plus nuisible que l'agriculture traditionnelle.

 Actuellement, on consomme déjà trop d'engrais, trop de pesticides et le jour où l'on devra produire sans contrôle toutes les mesures seront dépassées. Un exemple: les doses limites d'utilisation des pesticides et herbicides divers imposées n'existeront plus et ces produits risqueront donc d'être utilisés en quantités beaucoup plus grandes. L'eau n'est pas épargnée et les risques de pollution seront plus que jamais accrus. Par exemple, je cite les recommandations faites par la CIPEL qui dit qu'il faut limiter cet usage d'engrais et de pesticides si l'on veut éviter une plus grande pollution du Rhône. (M. Joye siffle M. Schneider.)

  La présidente. Monsieur Joye, s'il vous plaît! Les sifflets, tout de même!

 M. Max Schneider. Enfin, la faune et la flore sauvages seront une fois de plus touchés par des pratiques culturales. Les différentes modifications génétiques apportées au colza pour accroître son rendement en huile posent des problèmes alimentaires aux petits animaux sauvages qui s'en nourrissent. Bref, la liste est encore bien longue. Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, cette motion est économiquement non rentable pour les paysans. Si on exonérait de cette taxe, ils vendraient leur blé trois fois moins cher qu'ils ne le vendent aujourd'hui s'ils le vendaient sans subvention.

 Je sais que vous n'allez pas retirer cette motion car vous êtes quelque part «branchés», et c'est assez grave parce que vous devenez antieuropéens. Je ne défends pas cette politique-là; je soutiens toute politique permettant aux agriculteurs de vivre mieux. Nous aurons besoin de quelques années pour supprimer cette jachère et aurons également besoin de surfaces beaucoup plus extensibles pour la culture biologique qui va naître bientôt et qui sera la seule à pouvoir défendre notre production par rapport aux productions que l'on va importer de l'Est ou du tiers-monde.

 Voilà pourquoi, face à tous ces problèmes, je tiens à me rallier à la commission de l'énergie du Parlement européen qui cite en ces termes: «La commission de l'énergie, de la recherche et de la technologie recommande à la commission économique monétaire et de la politique industrielle de rejeter cette production de directives». Vous avez fait cette motion en copiant une idée de la directive européenne. Voilà pourquoi je vous prie soit de la retirer pour la représenter dans quelques mois, quand des décisions auront été prises parce que ces gens ont les moyens de faire des études, soit

de la renvoyer en commission pour que l'on en parle de manière scientifique, économique et en étudiant son impact sur l'environnement.

 Mesdames et Messieurs, je vous propose non pas de renvoyer cette motion à la commission de l'agriculture, mais à la commission de l'énergie pour que les techniciens et les ingénieurs de ce canton puissent en démontrer le non-sens.

M. Roger Beer (R). Je suis content de voir que les membres du groupe démocrate-chrétien sont plus nombreux sur les bancs que tout à l'heure. Au début, j'ai eu peur qu'il n'y ait personne pour défendre leurs idées, pensant qu'ils étaient plus présents pour attaquer les idées radicales que pour défendre les leurs. (Rires.)

 Mesdames et Messieurs les motionnaires, je salue votre idée. Je serai bien moins technique que mon collègue Schneider. Je pense effectivement que cette idée de carburant vert est excellente. Cela me fait d'autant plus plaisir que ce sont des agriculteurs ou des personnes proches du milieu agricole qui défendent cette idée et qui la proposent. Je pense que, tout comme moi, ils doivent avoir des sources voisines, et l'on sait aujourd'hui qu'à Dijon, par exemple, la municipalité utilise une vingtaine de bus dans les transports publics avec ce carburant et que ça marche très bien. Je ne dis pas que c'est la solution miracle, mais je pense que, par rapport aux problèmes de l'agriculture, proposer quelque chose comme cela démontre que vous vous rendez compte que chez vous il y a un problème de rentabilité et un problème d'utilisation de l'énergie et de la surface. Je crois que, même si ce n'est pas la solution miracle pour l'agriculture, cela vaut la peine en commission d'en discuter, ne serait-ce qu'à Genève, aux niveaux suisse et européen.

M. Albert Maréchal (PDC). Messieurs les Anglais, tirez les premiers! C'est ce qui s'est passé un peu à mon insu, j'ai été distrait deux secondes ne voyant pas arriver mes collègues, et, pendant ce temps, M. Schneider avait levé la main. On peut dire qu'il n'a pas vu rouge, mais vert! Entendre de la part d'un écologiste ce qu'il vient de dire, c'est désespérant!

 J'avais préparé un exposé pour présenter cette motion qui n'a évidemment plus de sens. Elle est issue d'un constat. L'agriculture va très

mal en Suisse, mais pas pour les raisons que vous évoquiez, Monsieur Schneider. Elle va très mal parce qu'elle connaît une crise de surproduction qui, d'ailleurs, est un problème mondial. La Suisse ne subit que la surproduction des autres. Nous générons très peu de surproduction nous-mêmes, si ce n'est pour le lait. Dans tous les autres domaines, nous couvrons grosso modo 60% des besoins alimentaires de notre pays. On ne peut donc pas qualifier cela de surproduction.

 D'énormes et de puissants intérêts divergents se sont manifestés, et le GATT a cristallisé tout cela. Le Conseil fédéral évidemment et tous les milieux industriels de Suisse se sont activés à provoquer un changement de politique en Suisse. Il faut rappeler, à ce niveau, que la politique agricole n'a pas été voulue par les milieux agricoles, mais plutôt par la population et les Chambres fédérales qui l'ont dirigée dans une orientation donnée et cela nous a conduits à une impasse. Pourquoi? Parce qu'aujourd'hui nous produisons cher, l'agriculture n'a pas pu évoluer normalement, on l'a limitée, enfermée dans un carcan, tant et si bien qu'aujourd'hui ça devient invivable pour chacun.

 Pour les uns, nous produisons trop cher, pour les autres, on ne peut pas produire, travailler rationnellement, nous avons des terrains beaucoup trop chers, un endettement maximum, il faut absolument trouver des solutions. Lorsque l'on écoute M. Schneider, on comprend que le 6 décembre la Suisse ait refusé l'EEE. (Protestations.) C'est vous qui l'avez refusé, ce n'est pas nous! A vous entendre, vous nous avez fait la démonstration que ce n'est ni moi, ni l'agriculture genevoise qui l'avons refusé. Toutefois, il faut voir la réalité en face et Genève, à travers les négociations du GATT, est très menacée dans sa production céréalière.

 En dehors de cela, les autres créneaux porteurs jusqu'ici s'effondrent les uns après les autres. Voyez la production viticole: l'effondrement des prix a fait même vaciller sur ses bases notre cave coopérative préférée. Tout le monde se trouve dans les chiffres rouges, on ne peut pas rester dans une telle situation. Si vous voulez tuer le 1,7% d'agriculteurs restant à Genève, continuez comme cela et écoutez M. Schneider, vous verrez où l'on arrivera. Je ne suis pas le père de cette idée, elle n'émane pas non plus de l'Europe, elle a été utilisée à Zurich.

 Monsieur Schneider, vous ne lisez peut-être pas la presse, mais cinq ou six bus zurichois ont tourné pendant six mois avec du diester, carburant issu d'huile de colza. Il y a également d'autres procédés. En formule 1, un

grand prix a été gagné avec des adjonctions d'ETBE, qui remplace le plomb et qui est donc parfaitement écologique. Quand vous avez dit, Monsieur Schneider, que les écologistes ne sont pas contre la jachère, vous vous trompez. La jachère, contrairement à ce que vous affirmez, produit du CO2. Elle demande une mise en place, un entretien et produit encore du CO2 avec la décomposition des produits. (Interruption de M. Rouiller.) Une petite seconde, Monsieur Rouiller, ça vient! Par contre, si l'on fait des carburants verts, le CO2, absorbé par les plantes pour produire la matière qui sera transformée en carburant, est entièrement compensé, donc le bilan est neutre, c'est-à-dire que, par rapport à l'environnement, il n'y a aucune production de CO2. (Contestations.) Mais oui, Monsieur! Vous savez ce qu'est la photosynthèse?

 L'assemblée. Non!

 Mme Martine Roset. Laisse tomber, laisse tomber!

 M. Albert Maréchal. On ne fait que tirer le carbone du gaz carbonique pour produire une marchandise qui est la graine de colza, ou pour produire d'autres marchandises comme les betteraves ou les céréales. On ne fait rien d'autre, on n'augmente pas les nuisances, on les diminue! Par contre, lorsque l'on consomme ces carburants, on retrouve exactement la même quantité de carbone. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme! Je ne vous apprends rien, on est d'accord.

 Le but est d'arrêter cette jachère qui est une stupidité, un non-sens. Les Européens l'ont compris. En France, on s'apprête aujourd'hui à cultiver des végétaux sur un million d'hectares pour produire des carburants verts. La défiscalisation a été votée en France jusqu'en 1996, et le Premier ministre s'est engagé à la prolonger au-delà. Monsieur Schneider, vous avez dit que l'Europe refusait cela? La motion SCRIVENER s'inscrit dans la même direction. Au niveau de la CEE, ce n'est pas encore voté, je vous le concède, mais c'est imminent.

 Les affirmations que vous avez faites sont absolument fausses. Quand vous dites que nous sommes antieuropéens, je ne vois vraiment pas en quoi! En admettant que l'on taxe des impôts sur le CO2, ce sera profitable à cette production puisque l'on a un bilan zéro-zéro pour le CO2, donc on a tous les éléments pour nous encourager à aller dans cette direction. Le but

est d'essayer de rendre service aux agriculteurs qui n'arriveront plus à vivre. Si vous voulez tuer les agriculteurs et fabriquer des chômeurs, faites-le!

 Il y a une école allemande qui conteste cela en disant que le colza génère du protoxyde d'azote, c'est vrai, je l'ai lu. Geler des terres? Savez-vous ce qui va en advenir en France? Vous allez voir cette horreur! L'autonomie et l'autarcie? Peut-être ai-je été imprudent, dans l'exposé des motifs, en disant que l'agriculture serait en autarcie relative, économiquement, c'est difficile.

 Il n'en demeure pas moins que ce carburant non polluant est à utiliser par les transports publics urbains. Encore une thèse que vous combattez, alors qu'elle va exactement dans le sens de ce que vous souhaitez: diminuer la pollution en ville. Je suis ébahi de vous entendre, Monsieur Schneider. Les Zurichois ont contrôlé le bien-fondé de cette thèse et vous savez qu'une station fédérale de recherche agronomique travaille sur ce sujet depuis trois ans, qu'elle a produit un rapport actuellement étudié au niveau du Conseil fédéral.

 Le but de cette motion est d'arriver à ce que notre gouvernement prenne conscience des nécessités pour l'agriculture genevoise et défende cette production de carburants verts à Berne pour qu'elle soit mise sur pied dans les meilleurs délais, avant que les gens ne se découragent et s'en aillent. Voilà ce que j'avais à vous dire et je vous invite à soutenir cette motion. J'avais proposé de la renvoyer au Conseil d'Etat, renvoyez-la en commission, cela ne me dérange absolument pas et cela permettra d'en discuter. Ce n'est pas un problème d'énergie, mais plutôt un problème d'agriculture et d'environnement. (Bravos et applaudissements.)

M. Charles Bosson (R). Ayant été enjoint par la présidente tout à l'heure de prendre la parole... (Rire de la présidente.) ...je me dois de...

  La présidente. Vous interprétez en votre faveur!

 M. Charles Bosson. ...la prendre. J'aimerais tout d'abord dire à M. Schneider que, lorsque j'ai écouté son exposé tout à l'heure, cela m'a rappelé très curieusement une remarque de mon épouse. (Eclats de rires de l'assemblée.) En effet, j'essayais de lui donner un conseil en cuisine et elle m'a dit: «T'es aussi nul en cuisine que les écolos en agriculture!» (Eclats de rires.) Je dois dire qu'elle avait raison!

 M. David Revaclier. Joli, ça!

 M. Charles Bosson. Monsieur Schneider, pour ce qui est de vos affirmations, je partage entièrement l'avis de M. Maréchal. Cette motion sera utile et indispensable pour l'agriculture qui devient le bouc émissaire des dépenses au niveau fédéral, alors qu'en définitive ce sont les cartels agro-alimentaires qui, aujourd'hui, saignent cette agriculture et exploitent également les consommateurs. Nous avons, durant de nombreuses années, mis en pratique ce que le Conseil fédéral nous demandait, ce que M. Schaffner nous disait, à savoir: «Produisez, vous devez alimenter le pays, le Conseil fédéral et l'administration se chargeront de la mise en valeur de vos produits».

 Aujourd'hui, pour avoir bien servi le peuple, l'agriculture se trouve pénalisée. Que trouve-t-on comme solution, comme proposition? Celles des paiements directs ou des prestations de type écologique votées l'automne dernier par les Chambres fédérales et qui n'apporteront aucune solution aux problèmes des régions céréalières comme Genève et la Suisse romande. La possibilité qui nous est offerte de cultiver pour produire du carburant vise aussi à soulager l'agriculture, et à diminuer les efforts consentis par les pouvoirs publics.

 En effet, pourquoi verser des indemnités aux agriculteurs pour cultiver et ne rien récolter? Pourquoi verser ces montants alors qu'en cultivant des plantes pour des carburants dits écologiques nous pourrions trouver des économies au niveau de la Confédération...

 M. Alain Rouiller. Des économies! (Ton ironique de l'orateur.)

 M. Charles Bosson. Tout à fait, Monsieur Rouiller, ne nous parlez pas de choses que vous ne connaissez pas!

 Le maintien de l'agriculture genevoise passera peut-être par ce type de culture. Le maintien de la fertilité des sols, dont parlait M. Schneider, passe aussi par leur culture.

 Lors de notre dernière séance, nous avions parlé des surfaces d'assolement demandées par le Conseil fédéral et par le Conseil d'Etat. Si nous voulons maintenir ces surfaces en état de production, il faudra les cultiver. Mais le problème, Messieurs Schneider et Rouiller, c'est qu'actuellement le Conseil fédéral et les autorités veulent prendre une assurance «anti-disette», mais personne, dans ce pays, ne veut payer la prime d'assurance.

 Une partie des projets contenus dans cette motion répond à cette orientation et c'est pour cela que nous vous invitons à la soutenir et à la renvoyer au Conseil d'Etat, à moins que la majorité de ce parlement ne décide de la renvoyer en commission de l'environnement et de l'agriculture, auquel cas nous nous rallierons pour en discuter.

M. Bernard Annen (L). La réaction de M. Schneider me laisse perplexe, car si je pouvais être d'accord avec lui c'était sur la question du rendement. Or, Monsieur Schneider, je ne peux partager cette seule analyse. En fait, vous avez raison, le rendement risque d'être relativement modeste. Mais alors, que dire de toutes les propositions que vous nous faites, notamment en matière d'énergie solaire où vous n'avez aucun rendement. Est-ce à dire, Monsieur Schneider, que lorsque vous êtes producteurs, vous êtes convaincus, et lorsque ce sont les autres, vous l'êtes beaucoup moins? Permettez-moi de me poser la question.

 Je suis perplexe, car, en définitive, l'un des seuls arguments, Monsieur Schneider, que partagent en général le gouvernement et le parlement, c'est que l'on arrive avec ces énergies renouvelables à dégager une certaine indépendance. Or ce que nos collègues démocrates-chrétiens nous proposent aujourd'hui va exactement dans ce sens et vous levez les bras au ciel, sans donner la moindre chance à la motion d'être étudiée en commission. Cela, je ne peux pas le concevoir. Raison pour laquelle, et en souscrivant à ce qu'ont dit notamment MM. Bosson et Maréchal, nous vous suggérons non pas d'envoyer cette motion à la commission de l'énergie, mais à la commission de l'environnement car, à mon avis, c'est bien plus une question d'environnement que d'énergie pure. Je crois, Monsieur Schneider, que vous ne vous y opposerez pas, car l'environnement, que je sache, est important pour vous.

Mme Martine Wenker Coskun (S). Nous sommes tout à fait conscients de la gravité de la crise que traverse actuellement l'agriculture et sommes persuadés que des solutions doivent être trouvées dans les plus brefs délais. Comme les motionnaires, nous sommes également préoccupés par la crise énergétique qui se traduit par l'épuisement progressif des matières premières non renouvelables, et nous sommes inquiets de la forte concentration des émissions polluantes en milieux urbains.

 Que nous proposent les auteurs de cette motion? Une potion magique, d'après eux, intitulée carburants «verts». Nous aimerions savoir si

ce label écologique se justifie et, pour se faire, nous désirerions connaître le coût énergétique engendré par une telle production au niveau des «inputs». Cette information pourrait nous être fournie sous la forme d'un bilan énergétique. Un autre point qui nous paraît délicat avec ce genre de solution proposée, c'est la promotion de la monoculture avec tous les risques qui peuvent en découler pour l'exploitant agricole, ainsi qu'au niveau de la biodiversité.

 Après lecture du travail qui a été effectué par le Bureau de l'environnement de Bruxelles en 1992, sous le titre «Biocarburants, ont-ils de réels avantages?», nous sommes plus que dubitatifs quant aux effets positifs d'une telle solution. Je me permets de vous lire un extrait de leur conclusion:

«Les biocarburants sont manifestement tout juste compétitifs sur le plan économique et énergétique. Pour ce qui est de l'environnement, ils ne constituent pas une solution, mais plutôt un nouveau problème. Doit-on, par conséquent, s'entêter à favoriser une filière dont on sait pertinemment qu'elle n'est satisfaisante dans aucun domaine. Avant d'envisager de nouvelles filières énergétiques, il serait peut-être préférable d'améliorer dans un premier temps les structures déjà existantes, par exemple l'agriculture ou la question des ressources naturelles».

 Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons accepter cette motion sous sa forme actuelle et vous invitons, par conséquent, à la renvoyer en commission de l'environnement où elle pourra être étudiée d'une manière plus approfondie.

M. Max Schneider (Ve). J'entends critiquer les déclarations que j'ai faites tout à l'heure et notamment les corrections que j'ai apportées à la motion. J'aimerais citer les références sur lesquelles nous nous sommes basés pour retoucher cette motion, ce qui d'ailleurs nous a coûté très cher car nous avons dû rechercher les renseignements auprès de ceux qui avaient déjà fait des études à ce sujet. Ce que vous proposez a été étudié à Bruxelles, parce que les Européens s'en sont préoccupés. Les renseignements que vous avez donnés dans votre motion ne sont pas des renseignements scientifiques. J'aimerais vous proposer trois sources de recherches, (Brouhaha.) dont le rapport de la commission de l'énergie, de la recherche et de la technologie qui a été publié le 7 octobre 1992.

 Comme notre chère Martine l'a souligné tout à l'heure, les biocarburants ont-ils de réels avantages? Il a fallu demander ces renseignements pour pouvoir intervenir ce soir, car vous nous proposez quelque chose qui n'est ni rentable sur le plan économique, ni sur le plan écologique, et qui, de plus, crée des nuisances comme cela est rapporté dans ces diverses études. Si l'on renvoie cette motion en commission, il faudra prendre ces éléments en considération, car il est inutile d'aller en commission pour faire du «bla-bla». Si je parle de «bla-bla», c'est parce que, Monsieur Maréchal, je n'ai pas voulu tirer à votre insu.

 Quand cette motion a été annoncée en plénière, je vous ai regardé, je ne sais pas où vous étiez, mais enfin... (Eclats de rires de l'assemblée.) vous étiez là! J'ai beaucoup de respect pour vous et c'est une chose que je ne voulais en tout cas pas faire. Monsieur Bosson, je ne voulais pas entrer dans votre intimité, (Rires.) mais puisque vous parlez de votre femme je parlerai de mon grand-père et de ma mère (Eclats de rires.) qui, tous deux, sont des producteurs agricoles du Jura, je suis aussi de mère jurassienne...

 Une voix. Ça se voit!

 M. Max Schneider. Ah, peut-être! Je ne sais pas. En tout cas, je suis fier de l'être! Pendant des siècles, l'agriculture a fonctionné et bien fonctionné avec des règles écologiques auxquelles aujourd'hui nous devrions peut-être revenir. Cette surexploitation de la terre par des produits chimiques et des engrais fera peut-être qu'un jour, que je souhaite le plus proche possible, nous nous tournerons à nouveau vers une agriculture biologique beaucoup plus saine. Le coût de la santé diminuera et nous fournira une réponse par rapport à certains qui produisent uniquement pour le rendement économique. Sur ce point, j'aimerais vous donner la position des «verts» par rapport au GATT. Les «verts» ont été les initiateurs de la motion de censure...

  La présidente. S'il vous plaît, laissez parler M. Schneider! (Brouhaha.) Monsieur Schneider, on attend!

 M. Max Schneider. Oui, oui. Vous savez, quand on m'interrompt, j'attends!

  La présidente. On ne vous entend plus, attendez un instant!

 M. Max Schneider. On ne peut pas faire boire un âne qui n'a pas soif! Je disais donc que les «verts» étaient à l'origine de la motion de censure, parce que l'on parle maintenant de l'Europe dans cette motion... (Exclamations, brouhaha.) Les «verts» ont été à la tête pour une motion de censure au Parlement européen contre les accords du GATT. Ce sont eux qui ont défendu les agriculteurs français et qui ont été suivis par toute la clique politicienne qui voulait avoir les voix des agriculteurs.

 C'est pour cela qu'il vous faut revenir sur les accusations que vous portez actuellement contre les écologistes, notamment pour le 6 décembre, alors que le parti écologiste genevois a voté massivement pour le oui à l'Europe. (Brouhaha.) Ce sont des mensonges et les erreurs que vous dites ici, en plénière, vous les avez commises dans cette motion. Prenons les choses par le bon bout! (Eclats de rires.) Si vous parlez d'énergie, alors renvoyons cette motion en commission de l'énergie. Si après les agriculteurs veulent se défendre en commission de l'environnement, nous la reneverrons à cette commission. Faisons un travail sérieux et arrêtons de parler par slogans! (Rires.)

M. Denis Menoud (Ve). J'aimerais adresser un vibrant salut à tous les nuls de cette assemblée que la presse ne nomme pas, car, d'après la «Tribune de Genève» et le «Journal de Genève», il n'y a que quelques députés de la commission des finances qui sont importants, et évidemment, en tant que membre du menu fretin comme vous l'êtes tous, j'aimerais apporter quelques éléments dans ce débat!

 Il est évident que les propos véhéments de MM. Bosson et Maréchal laissent entendre que nous ne connaissons rien à l'agriculture. Mais une chose est certaine, c'est que, question subventions, ils s'y connaissent. Ce ne sont pas des connaisseurs, mais des experts ès subventions!

 Lorsque abusivement on parle de carburants verts, il faut savoir que, si on les impose dans certains pays de jachère, c'est pour des revenus. Comment rentabiliser une jachère, si je puis dire, et comment en tirer un profit? En produisant du colza ou de la betterave, parce que la proposition de motion en parle abondamment. Il s'agit de raisonner en termes de coénergie, et je pense que c'est le message que voulaient faire passer les précédents orateurs qui ont pris la parole ce soir. Il est vrai que, lorsque l'on tient compte du coût du mazout subventionné, de la paysannerie...

 M. Charles Bosson. C'est pas vrai! Tu sais bien que t'es un menteur quand tu dis ça!

  La présidente. Monsieur Bosson, s'il vous plaît! (Ton agacé.)

 M. Denis Menoud. L'expert ès mensonges ou finances... mais écoutez, Monsieur Bosson, on m'a toujours dit, quand j'étais petit, qu'il y avait du mazout de couleur verte et rose que les paysans n'avaient pas le droit de mélanger, un mazout pour leur Mercedes, un autre pour leur tracteur, mais enfin bon! (Eclats de rires de l'assemblée.) Mais je ne vais pas entrer dans le détail des couleurs, parce que vert et rose, ça nous connaît, mais ce n'est pas l'objet du débat.

 Cela dit, il est clair que la production des produits phytosanitaires demande une énergie considérable, de même que la production des engrais et aussi, évidemment, en amont, la production du matériel agricole. Ceci, dans votre raisonnement, ne rentre absolument pas en ligne de compte et c'est regrettable. Je vous pose donc la question, Messieurs Bosson et Maréchal, pour une calorie végétale produite avec votre soi-disant carburant vert, combien faut-il de calories minérales? Le jour où vous répondrez honnêtement à cette question, je crois que l'on pourra vous faire confiance. Le sentiment que j'ai ce soir est que, tout d'un coup et comme par hasard, le lobby paysan se redécouvre des vertus pseudo-écologiques. Dans le fond, pourquoi pas? Il reviendrait à ses propres sources qui ont fait sa force durant des millénaires, mais j'ai l'impression que je vous connais comme des paysans madrés et que vous défendez surtout vos subventions.

M. Alain Rouiller (S). J'aimerais tout d'abord rassurer M. Bosson. Chez moi, il n'y a pas de problème, car c'est moi qui fais la cuisine! (Eclats de rires.) et c'est moi qui enseigne à ma fille comment elle devra la faire plus tard, cher collègue!

 J'aimerais faire deux citations afin de poursuivre les interventions de nos collègues Maréchal et Bosson qui nous disent que tout cela sera une économie. J'aimerais tout d'abord citer, puisque M. Maréchal fait référence à Zurich la ville-phare, M. André Brechbühl, directeur technique des transports publics zurichois, qui a dit:

«En août prochain, nous mettrons un terme à cette expérience. A vrai dire, je ne crois guère à l'avenir de l'huile de colza, à moins que le coût ne diminue considérablement. Aujourd'hui, s'il était produit en Suisse, le litre reviendrait à 5,50 F».

 M. Charles Bosson. Mais c'est un calcul au prix d'un professeur d'université! (Rires.)

 M. Alain Rouiller. Non, non, c'est l'expérience de Zurich, Monsieur Bosson, qu'on nous cite en référence. A M. Bosson, je dirai qu'il nous donne l'exemple de la France, des socialistes français. Je dirai que nos chers camarades, eux, ont trouvé un bon moyen de subventionner l'agriculture française et que, pour un litre qui coûte 1,10 F, ils le subventionnent à 85 centimes. Alors, dire que l'on fait une économie, je veux bien... mais cette économie vient de quelque part et ce quelque part c'est la poche des contribuables, les impôts, l'Etat, bref, c'est nous.

M. Albert Maréchal (PDC). Je n'ai pas du tout envie de polémiquer ce soir, on perd notre temps. Simplement, j'ai été très surpris de cette attaque en règle de gens que j'aurais supposés, au départ, désireux de nous appuyer. Nous discuterons de tous ces problèmes en commission.

 Je n'ai jamais parlé d'économies! Il y a des problèmes, et ce qu'il faut faire, c'est un bilan global, mettre d'un côté tous les inconvénients que l'on aura si l'on continue dans la voie dans laquelle nous nous trouvons et, de l'autre côté, les gains que l'on pourrait faire. Vous occultez toute une partie intéressante et je trouve cela déplorable de votre part. J'invite ce parlement à soutenir cette motion, à la renvoyer à la commission de l'environnement comme cela a été proposé.

M. Thierry Du Pasquier (L). Nous avons tous été extrêmement intéressés par le débat qui a duré trois quarts d'heure sur cette motion! Nous avons parlé de problèmes qui seront, de toute manière, débattus en commission et je trouve cela un peu regrettable. Il me semble tout de même qu'il y a une chose qui ressort et qui devra être vue soit en commission, soit peut-être préalablement par le département de M. Maitre, c'est le problème d'ordre de grandeur qu'il faut absolument examiner en

priorité. Qu'on le fasse avec les documents que M. Schneider mettra à disposition ou autrement, cela m'est égal, mais il me semble qu'avant de perdre des années de travail sur ce sujet il serait important de savoir si le bilan énergétique est raisonnable ou pas.

 Je suggère que l'on renvoie cette motion en commission et que l'on pose la question au service de M. Genoud, ou que l'on demande directement à M. Genoud de faire ces calculs, afin de régler ce problème d'ordre de grandeur.

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Je dois dire que je suis aussi surpris par la tournure de ce débat, car le sujet abordé ce soir est un sujet sérieux. Que vous ayez des avis divergents, que vous évoquiez quelques réserves quant aux perspectives de développement des biocarburants, je le comprends bien, dans la mesure où vous avez accédé à une certaine littérature dans ce domaine. Visiblement, les uns et les autres vous n'êtes pas tout à fait au même niveau chronologique d'information et, depuis, de nouvelles communications sont sorties, ont été publiées.

 M. Schneider a dit ce soir que cette motion avait déjà coûté cher, lui avait coûté cher à lui ou au groupe, que sais-je? Vous auriez pu, Monsieur Schneider, réaliser une économie, parce que, voyez-vous, j'ai demandé à l'office de l'environnement, au début de l'année dernière, d'ouvrir un dossier sur les biocarburants, de réunir toute la documentation, notamment de la communauté et des différentes instances concernées; vous auriez pu, simplement en vous adressant à nous, accéder à l'information et réaliser les économies que vous cherchez à obtenir.

 Quid de la suite? Quel regret d'arriver à un conflit -- mais j'espère qu'il ne durera que le temps du débat de ce soir -- entre l'agriculture et l'environnement, alors que nous avons là de la matière à étudier! Lorsque vous prenez connaissance des différents travaux qui ont été faits dans ce domaine, vous vous rendez compte que l'on assiste à des progrès extraordinairement rapides. Tout de même! Ne rejetez pas le génie créatif que l'homme détient. Nous sommes capables d'améliorer quelque chose et, en s'engageant sur cet axe des biocarburants, nous sommes indiscutablement sur une piste intéressante qui mérite d'être étudiée.

 Vous ne sauriez banaliser la situation de l'agriculture et ironiser sur le thème des subventions, comme cela a été fait à un certain moment du

débat de ce soir. Vous savez, et vous l'avez dit à certaines occasions, à quel point nous avons besoin d'elle. Le jour où nous n'aurons plus d'agriculteurs, vous réaliserez alors le coût de l'entretien de ce territoire dès lors que nous n'aurions plus d'agriculteurs pour s'en occuper.

 Il y a des avis divergents. M. Maréchal, qui est l'un des motionnaires, pensait interpeller le Conseil d'Etat et lui demander de répondre à cette motion. Si vous aviez persisté dans cette intention, Monsieur Maréchal, le Conseil d'Etat aurait accepté la motion. D'autres, pendant les débats, ont dit qu'il serait bien de pouvoir en discuter en commission. Vous faites ce que vous voulez. Sincèrement, avec l'occupation du temps qui est la vôtre, quand on entend le débat qui a eu lieu ce soir, on se demande au-devant de quoi nous irons en ommission. Des experts, vous allez pouvoir en entendre des quantités; je suis sûr que cela va vous occuper à peu près pendant une année. Si vous voulez le faire, je me tiens à votre disposition, pas de problème! On mobilisera encore quelques collaborateurs, très bien!

 On aurait pu imaginer une autre approche et j'en reviens à la première proposition du motionnaire, M. Maréchal, qui était de renvoyer la motion au Conseil d'Etat. Nous aurions pu vous présenter un premier rapport qui vous aurait donné une idée, aurait réuni un certain nombre d'informations qui vous auraient permis ensuite d'aller en commission avec un document de base évidemment plus étoffé que la motion. Vous auriez alors travaillé, me semble-t-il, dans des conditions plus favorables. Si vous partez en commission, dans les conditions que l'on connaît ce soir, il est évident que vous vous exposerez à des difficultés.

 Encore une fois, c'est à vous d'en décider. Le sujet qui vous est soumis par les députés motionnaires est un sujet sérieux, qui mérite votre attention. A vous d'en juger, le Conseil d'Etat l'accepte.

M. Bernard Annen (L). Je crois que cette proposition du Conseil d'Etat est importante. Elle n'empêchera pas un renvoi ultérieur en commission si la réponse du Conseil d'Etat est mauvaise. Effectivement, une documentation a été rassemblée par le Conseil d'Etat et d'en avoir une synthèse serait d'ores et déjà disposer d'un bon outil de travail. Notre groupe soutiendra cette proposition et vous demande, par conséquent, de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

M. Alain Rouiller (S). La proposition de M. Haegi ne correspond pas aux invites de la motion. Si M. Haegi lit bien ces invites, elles lui seront claires. La motion demande d'intervenir à Berne, de soutenir l'agriculture, d'inciter les transports publics et les industries chimiques à le faire. Si c'est cela que l'on va voter, je m'y oppose carrément et je vais continuer le débat ici, parce que nous ne le ferons pas en commission.

 Si l'on demande un vote direct sur cette motion, je demande des éclaircissements, je demande que M. Haegi nous présente les dossiers dont il nous a parlé car j'aimerais les voir. Je ne suis pas d'accord de demander à Berne d'intervenir pour subventionner cette affaire. Si l'on sait que ça coûte 5,50 F le litre, il ne faudrait pas que les gens qui viennent nous... (Léger temps de réflexion de l'orateur.) «baratiner» avec des questions d'économies nous disent ce soir: «Ah, on peut dépenser 5,50 F le litre pour l'agriculture, ça ne fait rien». Je ne suis pas d'accord, Monsieur Haegi.

 M. Bernard Annen. Combien tu paies le kilowattheure?

 M. Alain Rouiller. Changeons d'avis, demandons un rapport...

 M. Bernard Annen. Avec tes éoliennes, tu paies combien le kilowattheure?

 M. Alain Rouiller. Il est exclu, Monsieur Annen, de voter cette motion.

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Simplement une précision pour ceux qui n'auraient pas compris ma proposition. Je vous ai fait une proposition technique, je ne vous ai pas dit que nous allions exécuter les différents points de la motion, je vous ai dit que j'allais vous donner, dans l'hypothèse où vous l'accepteriez, un rapport technique qui vous permettrait à ce moment-là d'aller en commission, non pas, Monsieur Annen, parce que le rapport serait forcément mauvais, mais parce qu'il vous permettrait une discussion dans des conditions meilleures que celles que vous connaissez maintenant. C'est dans cet esprit que je vous ai fait cette proposition.

M. Philippe Joye (PDC). J'ai un peu l'impression que nous nous trouvons au même point que lorsque nous avions discuté d'énergie solaire. Je crois qu'il faut faire confiance au Conseil d'Etat. Vous êtes libres d'interpréter cette motion et de nous donner des éléments complémentaires, mais en tenant compte de ce qui a été dit aujourd'hui et qui était fort intéressant. Je persiste à proposer le renvoi en bonne et due forme au Conseil d'Etat.

M. Pierre Meyll (T). Vu le sérieux de cette motion et de l'information qui a été faite tant d'un côté que de l'autre, je me demande si la proposition présentée par M. Schneider, c'est-à-dire d'attendre ou de retirer cette proposition pour que l'on obtienne des renseignements permettant de discuter sur des bases plus sérieuses, ne serait pas mieux.

 Il faudrait que le Conseil d'Etat s'engage à ne pas répondre à cette motion, mais à nous fournir un rapport. Ceci ne me paraît pas très clair. Accepter cette motion dans sa forme actuelle, c'est prendre un engagement que nous ne pouvons pas honorer. Monsieur Maréchal, si vous retiriez cette motion -- nous en avons déjà parlé -- les choses m'apparaîtraient plus claires. Redéposez-la dans un mois; d'ici là, nous aurons obtenu des renseignements complémentaires. Vous avez reconnu le sérieux des renseignements de M. Schneider. Pourquoi arriver à une impasse? Prenons le temps de discuter sereinement sur la base des renseignements objectifs qui nous manquent actuellement.

M. Max Schneider (Ve). Je suis désolé, Monsieur Haegi, nous sommes ici dans un parlement. Si nous sommes mal informés, ce n'est pas de votre faute, je le sais. Si vous avez réuni une documentation, c'est formidable, mais les cent députés présents auraient aimé l'avoir avant le débat. C'est un droit qui leur revient et j'espère que ceux qui nous succéderont lors de la prochaine législature accéderont à cette documentation qui nous manque et qui coûte si cher quand on la recherche.

 J'aimerais souligner que la position des écologistes, ce soir, n'est pas d'être contre les agriculteurs, contre les carburants verts; c'est une question de temps...

  La présidente. Monsieur Schneider, nous parlons maintenant de la demande de renvoi en commission. Essayez de vous limiter à cela!

 M. Max Schneider. Pour ce qui est du renvoi en commission, je le trouve inutile. Il y a déjà eu un exemple dans le canton de Vaud, celui de l'Association pour le développement des énergies renouvelables, constituée d'agriculteurs, et qui a malheureusement échoué dans la production et l'utilisation des carburants verts.

 Je souhaite que les motionnaires retirent leur motion et demandent ensuite un postulat au Conseil d'Etat pour leur fournir plus d'informations à ce sujet.

M. Alain Rouiller (S). Madame la présidente, vous avez reçu une proposition d'amendement à cette motion. Si je résume la situation, nous devons soit refuser cette motion si elle est présentée telle quelle, soit la renvoyer en commission, soit la renvoyer au Conseil d'Etat en demandant un rapport sur le biocarburant. Si tel était le cas, nous pourrions nous rallier à un renvoi au Conseil d'Etat (Protestations.) c'est-à-dire avec une décision qui serait suivie d'un rapport et non d'une intervention à Berne.

  La présidente. Il nous est parvenu une demande d'amendement qui viserait, si j'ai bien compris M. Rouiller, à remplacer le texte actuel de l'invite par une autre invite qui dirait:

«...invite le Conseil d'Etat à faire un rapport sur les biocarburants en rapport avec l'agriculture genevoise».

M. Charles Bosson (R). Je crois d'ores et déjà que le rapport du Conseil d'Etat sera contesté par un certain nombre de personnes qui ne reconnaîtront pas la validité des sources citées. Pour gagner du temps, il est préférable de renvoyer cette motion en commission. Ainsi, le Conseil d'Etat pourra nous donner toutes les informations voulues. Elles seront discutées en commission et nous ferons un rapport complet.

M. Albert Maréchal (PDC). Je vous propose le renvoi en commission pour que nous puissions, au terme de la première séance, la renvoyer immédiatement au Conseil d'Etat. Ne trafiquons pas cette motion ce soir. J'ai été surpris de vos positions, Monsieur Schneider, ce n'est pas de la politique.

M. Max Schneider (Ve). Il faut être clair. J'ai cité des sources scientifiques qui traitent du rendement énergétique de la solution proposée. (Protestations de M. Bosson.)

  La présidente. Laissez-le s'exprimer!

 M. Max Schneider. Monsieur Bosson, calmez-vous!

  La présidente. Monsieur Schneider, vous demandez le renvoi à quelle commission?

 M. Max Schneider. Je propose que l'on dépassionne le débat et que l'on parle sérieusement sans exclure cette solution. Pour ne pas l'exclure, pour l'analyser de manière objective, il faut la faire passer par la commission de l'énergie.

 Mise aux voix, la proposition de renvoi à la commission de l'énergie est rejetée.

 Mise aux voix, la proposition de renvoi à la commission de l'environnement est adoptée.