République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 29 février 2024 à 20h30
3e législature - 1re année - 9e session - 58e séance
PL 13396-A
Premier débat
La présidente. Nous continuons avec l'urgence suivante, à savoir le PL 13396-A, qui est classé en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à M. Esteban, rapporteur de majorité.
M. Diego Esteban (S), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Comme vous l'aurez peut-être constaté à la lecture du rapport, ce projet de loi n'est que le dernier d'une longue liste d'éléments qui jalonnent le parcours du premier exercice de ce bureau de médiation administrative (BMA), dont les membres ont été nommés pour la première fois au début de la dernière législature et dont le renouvellement a été retardé afin de traiter les éléments qui nous parvenaient non seulement de la commission législative mais également de la commission de contrôle de gestion... (Brouhaha. L'orateur s'interrompt.)
La présidente. Attendez, excusez-moi. Je sais, c'est compliqué: comme d'habitude, on procède à un vote et après il faut passer au point suivant - c'est compliqué. Ceux qui veulent en discuter peuvent sans autre sortir, et ça vaut aussi pour le dernier rang ! Je sais qu'on ne se sent pas concerné quand on est au dernier rang, mais si ! Monsieur Nicolet-dit-Félix, vous êtes concerné. Monsieur Genecand ! Je continue la liste ? (Rires. Commentaires.) OK ! Nous allons traiter ce point et quand nous l'aurons fini, nous rentrerons chez nous ! (Exclamation de joie.) Ça peut prendre plus ou moins de temps; ce qui est sûr, c'est que nous allons le traiter. (Brouhaha. Un instant s'écoule.)
M. Diego Esteban. Merci, Madame la présidente.
La présidente. Non, je ne vous ai pas encore redonné la parole. (Rires.)
M. Diego Esteban. Pardon.
La présidente. Excusez-moi, mais il n'y a de loin pas le silence ! Je ne sais pas où il y a un malentendu, mais il n'y a pas le silence ! Monsieur Curaçao !
Des voix. Carasso ! (Rires.)
La présidente. Carasso, excusez-moi ! (Commentaires. Rires.) OK ! On va y arriver.
M. Sylvain Thévoz. C'est Carasso !
La présidente. Carasso, effectivement. Eh bien, Monsieur Thévoz, ça tombe bien: vous n'êtes pas à la bonne place ! Vous vous êtes perdu, là. (Rires. Commentaires.)
Une voix. Il a changé de parti !
La présidente. Je disais à M. Thévoz qu'il n'est pas à la bonne place !
M. Sylvain Thévoz. Moi, je ne parle pas !
La présidente. Si vous ne parlez pas, c'est très bien, mais quand on se déplace vers un autre groupe, ce n'est en général pas pour y être silencieux ! (Exclamations.) Est-ce qu'on peut poursuivre le débat ?! Très bien, Monsieur Esteban, vous avez la parole.
M. Diego Esteban. Merci, Madame la présidente - et merci à mes collègues de parti de me laisser continuer à parler ! Je disais donc que le renouvellement a été retardé afin de traiter les éléments qui nous parvenaient non seulement de la commission législative mais également de la commission de contrôle de gestion, ainsi que les conclusions de la Cour des comptes, qui a rendu un rapport attendu sur le sujet au début de l'été dernier. En parallèle, la commission législative avait refusé l'entrée en matière sur un projet de loi déposé par le Conseil d'Etat (le PL 13097), faisant courir le risque d'un nouveau processus de désignation se déroulant selon les mêmes règles que cinq ans auparavant, ce qui, pour une partie des membres de la commission législative, était une perspective guère réjouissante. D'où le dépôt d'un projet de loi dont j'étais le premier signataire (le PL 13198), qui proposait justement de mettre sur la table des mesures urgentes afin que le renouvellement se déroule dans une plus grande quiétude que cinq ans plus tôt - un processus relativement chaotique, dans lequel la commission législative, un organe politique, a tenu un rôle de RH en examinant à neuf l'entier des dossiers de candidature pour les postes de titulaire et de suppléant du bureau de médiation administrative; cela ne s'est guère révélé idéal pour un certain nombre de raisons qui sont bien sûr détaillées dans le rapport.
Le PL 13396, que nous examinons, a été déposé par le Conseil d'Etat, se nourrissant des discussions abondantes devant la commission. Il permet a minima de répondre aux craintes de la commission législative sur le mécanisme de désignation et applique en partie - je dis bien en partie - les recommandations de la commission de contrôle de gestion et celles de la Cour des comptes, tout en ne fermant bien sûr pas la porte à un travail subséquent qui, s'il est évidemment nécessaire, est moins urgent que la désignation, déjà plusieurs fois reportée.
La pierre d'achoppement de ce débat, c'est bien entendu la question du remplacement du titulaire et s'il doit se faire à travers une suppléance, comme aujourd'hui, une délégation de tâches au personnel ou - c'est la troisième voie - un poste d'adjoint. Un vote indicatif devant la commission a donné un résultat relativement peu concluant, avec trois voix favorables, une voix défavorable et cinq abstentions. Au final, la majorité que je représente préfère opter pour la sécurité, à savoir un projet de loi qui se cantonne aux éléments les plus directement pertinents pour le processus de renouvellement, en ne fermant bien entendu pas la porte à un débat ultérieur sur le poste d'adjoint. Pour toutes ces raisons, je vous invite à accepter l'entrée en matière ainsi que le projet de loi tel que sorti de commission.
Mme Laura Mach (Ve), rapporteuse de première minorité. Mesdames et Messieurs, chers collègues, je vais refaire un tout petit peu l'historique, parce que tout le monde ne se représente peut-être pas correctement ce sujet. Pour revenir donc en arrière: l'article 115 de la constitution a mené à la loi sur la médiation administrative (LMéd-GE) adoptée en avril 2015. S'agissant de la genèse de cette loi - on l'apprend en lisant les différents rapports sur ce sujet, je m'y suis longuement plongée -, la première proposition faite par le Conseil d'Etat prévoyait que le bureau de médiation soit constitué d'un médiateur, d'un adjoint et d'un juriste pour un budget total de 760 000 francs.
Le budget ayant cependant été jugé trop élevé, le Conseil d'Etat a déposé un second projet de loi pour que la fonction de médiateur soit assumée par les préposés à la protection des données - je le rappelle, ils fonctionnent en binôme, avec un préposé titulaire et un adjoint -, pour un coût de 270 000 francs.
Cette proposition a elle aussi été refusée par la commission de l'époque, qui a décidé alors que le bureau de médiation ne comporterait pas d'adjoint mais un suppléant payé à l'heure, n'intervenant qu'en cas d'empêchement du médiateur titulaire. Dans ma compréhension des choses, l'empêchement est ici entendu comme une situation dans laquelle le médiateur ne pourrait pas se montrer totalement impartial et qui devrait par conséquent être traitée par quelqu'un d'autre ayant les mêmes compétences que lui. On a donc voté en 2015 une loi qui considère que travailler seul ou travailler avec un adjoint revient finalement au même, tout en faisant des économies.
Eh bien, le temps nous a montré combien on s'est trompé ! Le rapport du BMA a en effet été refusé, car le travail effectué ne correspondait pas à ce qui est demandé dans la loi, notamment à l'article 10, alinéa 6, qui précise qu'en plus du travail de médiation habituel, on attend du médiateur ou de la médiatrice «des recommandations à l'attention de l'administration». C'est d'ailleurs cette particularité qui semble justifier sa classe salariale, proche de celle du préposé à la protection des données, qui cependant travaille avec un adjoint.
Afin de comprendre pourquoi il s'est avéré impossible, pour le bureau, de fournir le travail demandé, celui-ci a fait l'objet de multiples travaux: il y a eu la commission législative, puis la commission de contrôle de gestion, puis un rapport de la Cour des comptes, pour enfin revenir à la commission législative. A travers ce périple riche en production de divers rapports, on apprend que le médiateur n'a en effet émis aucune recommandation mais a surtout écouté, informé et aiguillé nos concitoyens dans leurs demandes, sans grande interaction avec l'administration.
Le médiateur explique à la commission de contrôle de gestion que le problème est dû au fait que le poste de suppléant n'est pas une ressource fixe, alors que cette fonction, au vu des besoins, devrait être celle d'une médiatrice adjointe à mi-temps. Il précise que ce système de suppléance est le seul à exister sous cette forme et que les structures comparables, notamment chez nos voisins vaudois...
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Laura Mach. ...ont plutôt tendance à avoir un adjoint ou une adjointe. A la commission législative, le médiateur explique encore que pour émettre des recommandations, il a besoin de confronter ses idées, d'enrichir son point de vue. Or, le poste de suppléant ne permet pas ce travail d'échange puisque le suppléant n'intervient qu'en cas d'empêchement sur un dossier. Lors d'une de ses auditions, la médiatrice suppléante a elle-même proposé de travailler de façon fixe à 20% ou 30% afin de permettre cette continuité dans les échanges, mais la définition du poste ne le permettait pas.
Je vais aller un petit peu plus vite. Il était donc important de supprimer le poste de suppléant tel qu'il a été conçu dans cette loi datant de 2015. Cela a été fait par la commission législative - c'est important. Ensuite, eh bien rien: on s'est arrêté là ! En effet, voyant l'échéance de la nouvelle nomination arriver, la commission législative s'est un peu précipitée dans son travail et a omis de répondre à la demande principale: permettre au bureau de médiation de produire un rapport acceptable l'année suivante, en faisant que ses activités correspondent à ce qui est stipulé dans la loi et justifient la classe salariale accordée au médiateur. Or, je le répète - et cela ressort de l'audition du médiateur mais aussi des rapports de la Cour des comptes et de la commission de contrôle de gestion -, ce travail nécessite une collégialité interne, un échange de responsabilités comme on peut les retrouver dans la collaboration entre notre préposé à la protection des données et son adjoint.
Bon, je crois que j'ai... Je ne vais pas prendre trop trop de temps. On a avancé qu'il n'est pas possible d'introduire un adjoint parce que ça ferait exploser le budget. Alors là, je vous réponds que c'est faisable parce qu'il faut prendre en considération le fait que les cadres d'aujourd'hui sont friands de temps partiel, surtout quand leur salaire est confortable, et le médiateur a lui-même proposé de baisser son temps de travail à 80% voire à 70%. Le deuxième argument de la commission était qu'il y aurait risque de conflit entre deux personnes; on ne peut que citer en exemple le bon fonctionnement de l'équipe du préposé à la protection des données, qui donne entière satisfaction à ce sujet.
Ainsi, Mesdames et Messieurs, nous vous proposons de prendre le temps, dans cette assemblée, de terminer le travail autour de ce projet de loi afin de ne pas nous retrouver avec un nouveau dysfonctionnement lors du prochain mandat. Nous vous proposons donc d'accepter les amendements: ils permettront d'engager un médiateur ou une médiatrice et son adjoint ou son adjointe tous deux à temps partiel afin de garantir un budget constant. Le Conseil d'Etat déciderait s'il est question que l'un travaille par exemple à 80% et l'autre à 20%, tout en gardant la possibilité de compléter son salaire par une activité annexe. Ce système permettra au BMA d'émettre des recommandations à notre administration, de fonctionner collégialement comme le recommandent la Cour des comptes et la commission de contrôle de gestion, d'assurer un remplacement mutuel entre les deux médiateurs et de façon immédiatement opérationnelle, et de respecter le budget imparti. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo.
M. Vincent Canonica (LJS), rapporteur de deuxième minorité. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je pense que la seconde minorité rejoint en grande partie les propos tenus par la rapporteuse de première minorité et je me contenterai de résumer dans les grandes lignes les raisons qui nous poussent à refuser le rapport de majorité.
Ce projet de loi vise essentiellement à modifier le mode de désignation du médiateur ou de la médiatrice, en réaction effectivement au processus de nomination en vigueur lors de la précédente législature. Cette modification est certes nécessaire, mais elle n'est pas suffisante. Le fonctionnement du BMA a été mis en cause par la commission de contrôle de gestion et la Cour des comptes. Il faut donc absolument traiter de l'organisation du bureau avant d'en définir le mode de nomination: il ne faut pas faire les choses à l'envers.
Le projet de loi qui vous est soumis règle certes ce processus de désignation, mais il prévoit également que des fonctionnaires puissent mener l'entier des médiations, sous la supervision d'un médiateur ou d'une médiatrice. Or il s'agit d'une question fondamentale qui touche au fonctionnement de ce bureau, mais n'a pas été traitée et discutée de façon suffisamment approfondie en commission. Il faudrait donc substituer le poste de suppléant ou de suppléante par celui d'adjoint ou d'adjointe, à l'instar de ce qui est en vigueur - ma préopinante rapporteuse de première minorité l'a dit - dans le cas du préposé à la protection des données.
Il a effectivement été relevé, lors des auditions, qu'il est nécessaire qu'un adjoint ou un collaborateur soit présent de manière fixe et pas uniquement en cas d'empêchement du titulaire. La moindre organisation a besoin de plus d'une personne pour fonctionner. Il est nécessaire, pour la médiation administrative, d'opérer de manière collégiale et pluridisciplinaire. La célérité ne doit pas s'imposer au mépris de la qualité. Pour ces motifs, le projet de loi ne doit pas être adopté tel quel, car le fonctionnement du BMA, mis en cause, n'est pas rendu plus optimal - au contraire.
Je vous invite donc à soutenir les amendements que nous avons déposés: ils visent à corriger le dysfonctionnement constaté. Le premier prévoit la désignation d'une adjointe ou d'un adjoint, ce qui permettra non seulement de régler la question de l'absence du médiateur, mais également de renforcer l'efficience et l'efficacité du bureau grâce à un fonctionnement collégial et pluridisciplinaire.
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Vincent Canonica. Merci. En deuxième lieu, la possibilité d'une activité à temps partiel offre aux titulaires de ces fonctions l'avantage de couvrir plus de domaines d'expertise, ce qui est un gage de compétence, sans coûts supplémentaires.
En troisième lieu, nous proposons un amendement qui prévoit, dans les dispositions transitoires, une clause stipulant que le budget alloué pour l'année 2024 ne peut pas être dépassé, afin de contenir les coûts de fonctionnement de ce bureau. Le but du bureau de médiation est quand même de réduire le nombre de conflits judiciarisés et, partant, les coûts des procédures judiciaires devront baisser. Il serait donc possible de ne pas pénaliser le budget de fonctionnement en prévoyant une réallocation des ressources - l'aspect relatif au budget 2024 pourrait être revu dans un deuxième temps, mais il était important pour les commissaires de ne pas toucher au budget de fonctionnement.
Avec cet équilibre et un fonctionnement tel que celui qui est proposé, j'espère que l'on pourra répondre au souci de gestion des coûts, tout en permettant un fonctionnement optimal du bureau de médiation, ce qui n'est pas le cas avec le projet de loi actuel. Je vous remercie, Madame la présidente.
La présidente. Je vous remercie. Il n'y a plus de temps de parole pour les Verts. La parole est à M. Murat-Julian Alder.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Je vous remercie, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut simplement se référer à la page 11 du projet de loi déposé par le Conseil d'Etat pour bien comprendre l'enjeu du texte dont nous sommes saisis. Tout d'abord, il s'agit de clarifier la posture du BMA par rapport à la médiation en général. Il est aussi question de l'organisation du bureau, avec la suppression de la suppléance et l'instauration d'un système de délégation à du personnel, en ayant pour objectif de rester dans le cadre de la même enveloppe budgétaire; de la modification du processus de recrutement des candidats au poste de médiateur; et de l'exigence que la formation certifiée en médiation généraliste soit reconnue par la Fédération suisse médiation (FSM). C'est de cela que nous parlons.
Le débat ne porte pas sur la problématique d'un hypothétique adjoint, dont le Grand Conseil ne voulait pas lors de la législature 2013-2018, lorsque nous avons été chargés de mettre en oeuvre notre nouvelle charte fondamentale. Et il ne s'agit toujours pas aujourd'hui, avec ce projet de loi - qui a été déposé, faut-il le rappeler, par le Conseil d'Etat - de créer un poste d'adjoint, mais de supprimer le poste de suppléant, qui n'a pas donné satisfaction lors de la législature 2018-2023 qui s'est achevée il y a bientôt une année.
Dans ces circonstances, indépendamment du fait de savoir si on est pour ou contre un adjoint, ce qui vous est demandé aujourd'hui, ce n'est pas si vous voulez fromage et dessert - parce qu'on ne peut pas avoir les deux. La question qui vous est posée, c'est: est-ce que vous voulez le fromage ou le dessert ? Et rien ne vous empêchera, si vous prenez le fromage, de solliciter le dessert dans une phase ultérieure.
Plutôt que d'aller dans le sens des deux rapports de minorité, respectivement des amendements déposés - que je n'entends pas combattre ici sur le fond -, je pense qu'il faut mesurer l'urgence d'une modification de la structure actuelle pour ensuite, dans une phase ultérieure, aborder la question d'un éventuel poste d'adjoint. Et je rappelle que cette question a été à peine évoquée: elle a été simplement survolée dans le cadre des travaux; ce n'était pas l'objet principal de nos travaux. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
C'est aussi pour éviter un renvoi inutile en commission que je demande au Grand Conseil, au nom du PLR, de bien vouloir approuver le projet de loi tel qu'il est sorti des travaux de commission, tel qu'il a été défendu par le rapporteur de majorité, qui a lui-même retiré un projet de loi sur cette même question. C'est finalement la paix des braves...
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Murat-Julian Alder. ...qui vous est proposée aujourd'hui. Ce serait dommage de rouvrir un front inutilement, de perdre du temps et de retarder les réformes indispensables que cette instance de médiation administrative doit mettre en oeuvre au plus vite. Merci beaucoup de votre attention.
Mme Alia Chaker Mangeat (LC). Merci à M. Alder d'avoir si bien résumé les enjeux liés à ce projet de loi. Vous l'avez compris, la plupart des points relatifs aux enjeux principaux ont été adoptés quasi à l'unanimité en commission. La pierre d'achoppement qui perdure, c'est la question du médiateur adjoint, la minorité considérant que la loi actuelle ne permettrait pas au bureau de fonctionner. Ce qui est complètement faux, parce que la loi actuelle - et le projet de loi également - permet au médiateur d'engager le personnel du bureau, le personnel nécessaire. Il y a donc déjà une disposition dans la loi qui permet ces engagements. Il y a en outre une disposition relative à la délégation des tâches: le médiateur ou la médiatrice peut déléguer des tâches à plusieurs membres de son personnel - et le projet de loi le permet aussi. Ce n'est donc pas que le titulaire est isolé: simplement, la minorité veut que l'adjoint soit nommé par le Grand Conseil et ait une fonction équivalente.
Je vous rappelle que le médiateur titulaire est aujourd'hui en classe 31 de l'échelle des traitements. Ça équivaut au minimum à 177 000 francs par an, au maximum à 240 000 francs. Et on nous dit maintenant qu'on veut se référer au système vaudois; eh bien dans le système vaudois, Mesdames et Messieurs, il y a un médiateur titulaire et c'est lui qui engage, s'il en a besoin, des adjoints. S'agissant des adjoints, c'est amusant, il y a justement une annonce en ce moment dans le canton de Vaud: l'adjoint y est en classe 13. Et la classe 13, c'est minimum 107 000 francs et maximum 155 000 francs. Vous voyez que la différence est de près de 100 000 francs ! Je veux bien que le niveau de vie soit bien plus bas au-delà de la Versoix, mais, franchement, je ne pensais pas à ce point ! Je suis donc assez étonnée.
Pour ces motifs, nous pensons aussi... La question n'est pas uniquement budgétaire. Bien sûr, la question budgétaire doit être prise en considération, mais nous pensons que le bureau ne peut fonctionner qu'avec une équipe constituée et engagée par le médiateur lui-même, si on part du principe qu'on va lui allouer un budget plus important. Mais ça, ça doit venir dans un second temps. Pour l'instant, nous vous invitons donc à adopter ce projet de loi tel qu'il est sorti de commission, car il répond, franchement, aux principales critiques s'agissant du fonctionnement formulées par la Cour des comptes et à celles émises lors de la dernière législature. Je vous remercie.
M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs, chers collègues, je voudrais tout d'abord dire, au nom du groupe socialiste, que nous avons toujours soutenu ce bureau de médiation administrative. Nous l'avons non seulement soutenu dans son principe, mais nous l'avons également soutenu dans son travail concret, qui a fait l'objet d'attaques selon nous injustifiées. La réforme qui vous est soumise aujourd'hui porte sur deux choses essentielles: d'une part la suppression de la suppléance, qui n'a pas donné satisfaction au niveau institutionnel - cette suppléance n'a tout simplement pas fonctionné, pour des raisons qui ont été bien expliquées et sur lesquelles je ne reviens pas. Le deuxième élément, c'est la réforme du système d'élection; il y a donc urgence à voter cela aujourd'hui. Pour le groupe socialiste, c'est l'enjeu essentiel.
Quant aux amendements, qui concernent le médiateur adjoint ou la médiatrice adjointe, nous pouvons nous y rallier moyennant des amendements mineurs qui vous seront distribués. Mais nous voterons le projet de loi, que ces amendements soient acceptés ou non. Nous préférerions effectivement un poste d'adjoint, mais nous pensons qu'il pourrait également être introduit dans un deuxième temps.
S'agissant de ce qu'a dit Mme Chaker Mangeat sur la rémunération, celle-ci n'est de toute façon pas fixée dans la loi: c'est de la compétence du Conseil d'Etat, et il y a un consensus large - au niveau politique mais aussi, je crois, du point de vue du médiateur - pour dire que la rémunération en classe 27 serait également satisfaisante. Il ne faut donc pas prendre prétexte de cela pour dire qu'on ne pourrait pas introduire de médiateur ou médiatrice adjoint. Ces amendements nous semblent jouables moyennant quelques adaptations mineures, mais l'essentiel est de voter le projet de loi - avec ou sans les amendements. Je vous remercie.
M. Amar Madani (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi déposé par le Conseil d'Etat et qui vise à modifier la loi sur la médiation administrative, en lien avec le mode de nomination et les prérogatives de la médiatrice ou du médiateur, part d'un constat - constat qui a été bien expliqué par mes préopinants, M. Alder et Mme Chaker Mangeat. Cette modification concerne la suppression de la suppléance et l'amélioration du mode d'élection; cela va conduire à plus d'efficacité dans le fonctionnement du bureau de médiation administrative, ce qui ressort des auditions. La commission a estimé dans son ensemble que la suppléance n'est pas pertinente d'un point de vue purement légal, mais aussi en matière de fonctionnement. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, le MCG soutiendra le projet de loi tel que sorti de commission et vous invite à faire de même. Quant aux amendements, il incombe au médiateur titulaire de choisir son adjoint et d'organiser le bureau pour parvenir à un bon fonctionnement. Merci pour votre attention.
La présidente. Je vous remercie. Je passe maintenant la parole aux rapporteurs. Monsieur Canonica, il vous reste une minute vingt.
M. Vincent Canonica (LJS), rapporteur de deuxième minorité. Je serai très bref, Madame la présidente. Il est fort dommage que le rapport de la Cour des comptes n'ait pas été complètement lu par l'ensemble de la salle, parce que, réellement, le fonctionnement était mis en cause. Il relevait que le fonctionnement du bureau de médiation n'était pas du tout optimal. Ne régler aujourd'hui que la question de l'élection est donc un mauvais choix et conduira à un dysfonctionnement du BMA; voter cette loi, c'est voter en faveur d'un dysfonctionnement du bureau de médiation, ce que je ne peux évidemment pas recommander.
La présidente. Je vous remercie. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole pour quarante secondes.
M. Diego Esteban (S), rapporteur de majorité. Merci. Une petite divergence avec le rapporteur de seconde minorité: la dynamique aujourd'hui dysfonctionnelle entre le titulaire et la suppléance disparaîtrait avec le vote de ce soir. Cela constitue donc déjà un pas en avant par rapport à ce que relève la Cour des comptes. Il faut rappeler que la Cour des comptes s'adressait davantage au législateur qu'au bureau de médiation administrative, dont elle disait qu'il «coordonne de manière satisfaisante ses activités et gère de manière rigoureuse le suivi de ses dossiers». Concernant les amendements, la majorité ne les suivra pas pour les diverses raisons énoncées ce soir, qu'il s'agisse...
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Diego Esteban. ...du coût que ça représente ou du fait que ça risque de mettre en péril l'essentiel de ce projet de loi, qui concerne les règles de désignation.
M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, merci à la commission pour ses travaux. Je crois que même si on achoppe sur un point, l'essentiel est posé et le Conseil d'Etat se rallie pleinement au rapport de majorité. Maintenant, il reste la question - elle relève peu de l'opérationnel, il faut le dire - du poste d'adjoint, qu'on inscrirait dans la loi. Le modèle qui nous est proposé par les amendements, il convient de le souligner, Mesdames et Messieurs les députés, n'est pas un modèle usuel pour un adjoint, parce qu'en lui donnant la légitimité de la prestation de serment devant le Grand Conseil, on va plutôt créer un tandem ! Et c'est bien cette notion de tandem qui, en partie, a provoqué les dysfonctionnements passés. Je crois qu'il faut souligner que, d'une manière générale, c'est pareil dans l'administration: on nomme des chefs de service et des chefs d'office qui parfois, selon la taille du service, nomment eux-mêmes des adjoints ou délèguent certaines tâches à des personnes qu'ils ont eux-mêmes recrutées. Et cet équilibre ne serait pas atteint par le biais d'un amendement qui ne prévoit pas un simple adjoint mais un adjoint qui prête serment devant le Grand Conseil, ce qui lui donne une légitimité identique à celle du titulaire.
Si là-dessus on rajoute le critère du temps partiel pour maîtriser le budget, défendu par les rapports de minorité, on aurait deux personnes à 60% ! Qui ne se verraient dès lors, par définition, qu'une fois par semaine ! En matière de management et de cohésion de l'action de ces deux personnes, on peut donc s'interroger. Enfin, et la députée Chaker Mangeat l'a dit, le texte qui vous est proposé n'empêche pas le médiateur ou la médiatrice de déléguer des tâches à ses collaborateurs ou collaboratrices - à part évidemment les recommandations, qui doivent être validées: cela correspond à la délégation usuelle d'un certain nombre d'activités au sein d'une équipe, d'une petite équipe.
Le Conseil d'Etat s'en tient donc à la solution trouvée par la majorité; cela ne ferme pas le débat, s'agissant des enjeux qui ont été soulevés. Nous aurons l'occasion d'y revenir, mais nous avons besoin que cette loi soit votée ce soir pour aller de l'avant. Nous vous remercions de suivre le rapport de majorité.
La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 13396 est adopté en premier débat par 88 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
La présidente. Nous passons au deuxième débat. De nombreux amendements ont été déposés, je vous prie donc d'être attentifs.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
La présidente. A l'article 4, nous avons un amendement dans le rapport de première minorité et un autre que vous avez reçu dans vos messageries. Nous commençons par l'amendement de la première minorité, qui figure dans le rapport de Mme Mach: s'il est accepté, il fait tomber l'autre amendement; s'il est refusé, nous voterons sur l'amendement suivant. (Remarque.) Je n'ai pas entendu. (Remarque.) Vous voulez que je lise l'amendement ? Il figure dans le rapport, mais le voici:
«Art. 4 (nouvelle teneur)
Le bureau se compose d'une médiatrice administrative titulaire ou d'un médiateur administratif titulaire (ci-après: médiatrice ou médiateur), d'une médiatrice administrative adjointe ou d'un médiateur administratif adjoint (ci-après: adjointe ou adjoint), ainsi que du personnel nécessaire à son fonctionnement.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 47 non contre 37 oui et 1 abstention. (Commentaires pendant la procédure de vote. Rires.)
La présidente. Nous allons donc voter sur l'amendement de la seconde minorité, déposé par M. Canonica, qui dit ceci:
«Art. 4 (nouvelle teneur)
Le bureau se compose d'une médiatrice administrative ou d'un médiateur administratif titulaire (ci-après: médiatrice ou médiateur), d'une médiatrice adjointe ou d'un médiateur adjoint (ci-après: adjointe ou adjoint), ainsi que du personnel nécessaire à son fonctionnement.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 38 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'art. 4 (nouvelle teneur) est adopté.
La présidente. J'ai maintenant une question pour les rapporteurs de minorité: vu que le principe de l'adjoint a été refusé, est-ce que vous voulez maintenir vos autres amendements ? Madame Mach ?
Mme Laura Mach (Ve), rapporteuse de première minorité. Non, puisque...
La présidente. Vous retirez vos amendements ?
Mme Laura Mach. Je les retire puisque le principe de l'adjoint a été refusé.
La présidente. Merci. Monsieur Canonica ? (Remarque.) Très bien, je vous remercie, les autres amendements ne seront donc pas traités.
Mis aux voix, l'art. 5, al. 1 et 3 (nouvelle teneur), al. 5 (nouveau), est adopté, de même que les art. 6, lettre d (nouvelle teneur), à 21, al. 2 à 4 (nouveaux).
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que les art. 2 et 3 (soulignés).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 13396 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 75 oui contre 3 non et 10 abstentions (vote nominal).