République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 2 février 2024 à 14h
3e législature - 1re année - 8e session - 54e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 14h, sous la présidence de Mme Céline Zuber-Roy, présidente.
Assistent à la séance: Mmes Nathalie Fontanet et Anne Hiltpold, conseillères d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Thierry Apothéloz, Carole-Anne Kast, Pierre Maudet et Delphine Bachmann, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Lara Atassi, Dilara Bayrak, Jacques Béné, Vincent Canonica, Jennifer Conti, Patrick Dimier, Marc Falquet, Joëlle Fiss, Geoffray Sirolli, Francisco Taboada et Louise Trottet, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Céline Bartolomucci, Oriana Brücker, Rémy Burri, Philippe Meyer, Daniel Noël et Frédéric Saenger.
Annonces et dépôts
Néant.
Débat
La présidente. Nous reprenons nos travaux avec la M 2643-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. (Remarque.) Je passe exceptionnellement la parole à M. Pistis, qui n'est pas rapporteur, car il souhaite faire une annonce concernant cet objet.
M. Sandro Pistis (MCG). Merci, Madame la présidente. Le groupe MCG désire retirer cette proposition de motion. (Exclamations. Applaudissements.)
La présidente. Je vous remercie. Il en est pris acte.
La proposition de motion 2643 est retirée par ses auteurs.
La présidente. Nous passons à la M 2692, classée en catégorie II, trente minutes. Est-ce que M. Baertschi souhaite s'exprimer en tant que premier signataire ? (Remarque.) Personne ne veut prendre la parole ? (Remarque.) Très bien, nous allons procéder aux votes. Nous avons reçu un amendement, proposé par M. Pierre Eckert, qui supprime l'expression «pour les résidents genevois» à la fin de la première invite:
«Première invite (nouvelle teneur)
- à favoriser au maximum le télétravail;»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 38 non contre 26 oui et 1 abstention.
La présidente. Nous nous prononçons maintenant sur la proposition de motion elle-même.
Mise aux voix, la proposition de motion 2692 est rejetée par 59 non contre 7 oui (vote nominal).
Débat
La présidente. Nous enchaînons avec le traitement de la M 2725-A, dont le débat est classé en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à Mme Véronique Kämpfen, rapporteuse de majorité.
Mme Véronique Kämpfen (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. La M 2725 a été déposée en janvier 2021, en pleine crise du covid-19. Considérant l'état, à l'époque très préoccupant, de la situation sanitaire et l'impact de la pandémie sur différents secteurs économiques ainsi que sur certains contribuables physiques, ce texte invite le Conseil d'Etat «à adopter un arrêté prolongeant, pour l'année 2021, la validité de son arrêté du 23 mars 2020 relatif à la suppression des intérêts en faveur de l'Etat [...]». Concrètement, la motion demande la suspension des intérêts moratoires en faveur de l'Etat pour toute l'année 2021. Aujourd'hui, ce texte est évidemment complètement obsolète, mais puisqu'il n'a pas été retiré par ses auteurs, qui nous proposent au contraire encore un amendement, je vais expliquer les points suivants quant à son fond.
Quand le Conseil d'Etat a suspendu les intérêts en 2020, il s'est fondé sur l'article 113 de la constitution genevoise, qui s'applique en cas de catastrophe ou de situation extraordinaire. Il était alors établi de façon indiscutable que toutes les conditions de cet article étaient remplies. Le Conseil d'Etat avait agi dans l'urgence. Au moment du dépôt de la motion, l'état d'urgence n'était plus le même, raison pour laquelle un changement de loi, et non un arrêté - c'est un point important -, aurait été nécessaire pour prolonger la suspension des intérêts moratoires. Cela signifie des délais législatifs et référendaires incompatibles avec le sentiment d'urgence qui animait les motionnaires.
Cette suspension ne toucherait pas seulement les contribuables qui se trouvent dans une situation difficile financièrement ou économiquement, mais aussi ceux qui paient leurs impôts deux ou trois ans après. Ces derniers se verraient ainsi exonérés d'intérêts en 2021 alors que leur situation ne le nécessitait pas. Il y a également un effet rétroactif qui créerait des difficultés opérationnelles. Il faudrait alors rouvrir tous les comptes soldés depuis le 1er janvier 2021 - ce que propose d'ailleurs aussi l'amendement déposé par M. Florey.
Enfin, il faut rappeler que lorsqu'un contribuable a des difficultés de paiement, il peut prendre contact directement avec l'AFC pour obtenir un arrangement de paiement. Il est possible de modifier ses acomptes ou d'avoir des accords sur le très long terme, qui perdurent tant qu'ils sont respectés. Et si le contribuable est dans une situation vraiment compliquée, il peut aussi demander une remise totale ou partielle des intérêts de retard. Cela se fait notamment avec des personnes qui se trouvent subitement dans des situations inextricables.
Vous l'aurez compris, au moment de son dépôt déjà, la mise en oeuvre de la M 2725 se heurtait à de nombreuses difficultés techniques, sans parler de son coût, de l'ordre de 40 millions de francs. Aujourd'hui, elle est définitivement dépassée.
Je souhaite dire encore un mot sur l'amendement déposé ce jour par l'UDC, visant à rembourser les intérêts perçus pour l'année 2021 à tous les contribuables, en lieu et place de l'invite qui nous était soumise à l'origine.
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Véronique Kämpfen. Merci, Madame la présidente. La difficulté avec une telle disposition, c'est qu'elle nécessiterait de toute façon un changement législatif et non pas juste un arrêté, comme c'était le cas en 2020. Il faudrait donc dans tous les cas un appareil législatif bien plus contraignant que cette simple motion. Par conséquent, si le groupe UDC souhaite travailler sur la question des intérêts moratoires, qui est certainement intéressante et importante, je lui recommande de le faire via un projet de loi ad hoc et non pas par le biais d'une motion qui est aujourd'hui, quoi qu'il en soit, parfaitement dépassée.
Bref, vous l'aurez compris, la majorité de la commission fiscale vous invite à rejeter cette motion ainsi que l'amendement UDC. Je vous remercie, Madame la présidente.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, cette motion demandant de suspendre les intérêts en faveur de l'Etat pour l'année 2021 a effectivement été déposée en janvier 2021. On ne va pas refaire l'historique de tout ce qui s'est passé pendant la pandémie mais, vous vous en souvenez, il y avait notamment les mesures prises par arrêtés par le Conseil d'Etat ainsi que celles supplémentaires prises par le Conseil fédéral, entre autres lors de sa séance du 13 janvier 2021.
Le problème, c'est qu'en février 2021, quasiment toute l'économie s'est arrêtée; je parle des restaurants, des établissements culturels, de tout ce qui relève des sports et des loisirs, tout s'est complètement arrêté. C'était une véritable problématique et une réelle onde de choc - je crois que tout le monde s'en souvient.
L'invite de la motion proposait d'adopter un arrêté prolongeant pour l'année 2021 la validité de l'arrêté du 23 mars 2020 relatif à la suspension des intérêts en faveur de l'Etat. Ma préopinante l'a dit, notre groupe a déposé un amendement, que je vous demande de soutenir, de même que la proposition de motion. Je vous remercie, Madame la présidente.
M. Stéphane Florey (UDC). Les bras m'en tombent quand j'entends ce que vient de raconter la rapporteure de majorité: c'est parfaitement scandaleux ! Ça prouve une seule chose, pour ceux qui nous écoutent aujourd'hui, c'est que le PLR, quand il s'agit de défendre le simple contribuable... Rien à faire ! Lui, ce qui l'intéresse, c'est uniquement les entreprises. On a passé les deux, voire trois ans de covid à rallonger des centaines de millions pour sauver l'économie genevoise, pour pallier les manques des entreprises, pour les aider à ne pas faire faillite; par contre, écraser le simple contribuable sous les intérêts moratoires, ça, ça ne vous dérange absolument pas ! Personnellement, ça me choque, venant d'un parti comme le vôtre, qui est également censé défendre le petit contribuable. (Quelques applaudissements.)
Ce qui était possible en 2020 l'était parfaitement aussi en 2021, et vous le savez très bien. Le remboursement d'un intérêt ne pose absolument pas problème. En effet, si on pense à ce qui a été fait par exemple pour la taxe LRDBHD, qui a été remboursée alors qu'elle avait déjà été perçue, là, il y a eu zéro problème; c'était pour vos petits copains restaurateurs, pour les entreprises, zéro souci ! On peut également prendre l'exemple de la taxe tourisme, qui a elle aussi été remboursée selon les mêmes modalités; ça n'a posé aucun problème ! No souci ! Par contre, quand il s'agit d'aider véritablement le petit contribuable, là, il n'y a plus personne. C'est parfaitement choquant et vous en porterez la responsabilité ! Je vous remercie de soutenir malgré tout la motion et l'amendement.
M. Sébastien Desfayes (LC). Je crois qu'il faut que le député Florey retrouve son calme - vous transmettrez, Madame la présidente. Il ne sert à rien d'éructer ! Il faut simplement regarder la loi, en l'occurrence la loi fiscale, et voir comment cela se passe à Genève. Notre canton applique un système d'imposition postnumerando. Quand le covid a frappé en 2020, le Conseil d'Etat a suspendu le cours des intérêts, sur la base de l'article 113 de la constitution; c'était absolument légitime parce que les contribuables étaient soumis, en 2020, à une imposition calculée sur des revenus perçus en 2019. En 2021, c'était exactement l'inverse: à la suite du dépôt des déclarations d'impôts par la population, notamment par les personnes qui ont souffert du covid, eh bien celles qui ont été particulièrement affectées par la pandémie n'ont pas été imposées en 2021, puisqu'elles n'avaient pas eu de revenus l'année précédente. C'est aussi simple que cela.
Ce que la rapporteure de majorité a également dit à juste titre, c'est qu'il n'y a pas de base légale pour donner suite à cette motion qui, en tout état de cause, n'a aucun sens. Si des contribuables ont souffert en 2020, ils n'ont pas été imposés en 2021, c'est ce que veut le système postnumerando. C'est aussi simple que cela, raison pour laquelle le groupe Le Centre refusera bien entendu cette motion. Merci.
La présidente. Je vous remercie. Nous procédons en premier lieu au vote sur l'amendement déposé par M. Florey consistant à remplacer l'invite par: «à rembourser les intérêts perçus pour l'année 2021 à tous les contribuables.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 10 oui.
La présidente. Nous passons maintenant au vote sur la proposition de motion.
Mise aux voix, la proposition de motion 2725 est rejetée par 68 non contre 11 oui (vote nominal).
Débat
La présidente. Nous passons à la M 2781-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Monsieur Alberto Velasco, vous avez la parole.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Je vous remercie, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite tout d'abord dire que nous sommes face à une motion, non pas un projet de loi. Ce texte relève qu'il y a au sein de l'administration certains responsables de service ou chefs qui ont parfois quelque peu tendance à confondre et à utiliser de manière excessive l'entretien de service, qui peut déboucher sur un renvoi, au lieu de mener une enquête administrative.
L'entretien de service a effectivement une raison d'être, mais il ne doit pas servir en fin de compte à suspendre le fonctionnaire. L'enquête administrative existe ! Ce que souligne cette motion, c'est justement qu'il faut, si besoin, mener une enquête administrative et que le règlement doit être suivi de façon que la personne ne subisse pas un acte qui ne soit pas conforme aux normes de l'administration.
Mesdames et Messieurs, il est intéressant de renvoyer ce texte au Conseil d'Etat afin que ce dernier produise une réponse à ce sujet. Merci, Madame la présidente. (Brouhaha.)
La présidente. Je vous remercie. Comme d'habitude, j'invite les personnes qui parlent à aller poursuivre leurs discussions à l'extérieur. Je donne la parole à M. Jean-Marc Guinchard.
M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, je voudrais rappeler en préambule les dispositions légales qui s'appliquent en la matière, en particulier la LPAC. Celle-ci prévoit deux voies distinctes pouvant aboutir à une fin des rapports de service. La première est celle des sanctions disciplinaires infligées en fonction de la gravité de la violation des devoirs de service - blâme, suspension de l'augmentation de traitement pendant une durée déterminée, réduction de traitement à l'intérieur de la classe, retour au statut d'employé en période de probation pour une durée maximale de trois ans et, finalement, révocation. La deuxième est celle de la résiliation des rapports de service pour motif fondé ou en cas de suppression de poste. Le motif fondé est indépendant de la faute du membre du personnel. Il peut s'agir d'une insuffisance de prestations, de l'inaptitude à remplir les exigences du poste ou de la disparition durable d'un motif d'engagement.
Au niveau des dispositions légales et réglementaires, il existe l'enquête administrative et l'entretien de service, deux outils complètement distincts évoqués par la motion. Il faut savoir que l'article 27 LPAC prévoit, dans le cadre d'une procédure pour sanction disciplinaire, que l'employeur peut en tout temps ordonner l'ouverture d'une enquête administrative. Il doit le faire si la sanction envisagée est le retour au statut d'employé en période probatoire ou la révocation.
Selon Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet, longuement auditionnée en commission, en 2021, sur près de 19 000 fonctionnaires du petit Etat, il y a eu 45 licenciements, soit 0,2%. On ne peut dès lors pas parler de pratiques répétées et systématiques, comme le prétend le rapporteur de majorité. Certes, les syndicats auditionnés ont relevé des différences de pratiques entre départements ou à l'intérieur d'un même département, et ces divergences d'interprétation ne sont bien entendu pas admissibles, mais elles sont manifestement rares. A titre d'exemple, le représentant du syndicat de la police a illustré trois cas, sans en préciser les dates, et l'auteur de la motion n'a quant à lui pu faire état que de trois cas également. Suite à diverses questions de députés lui demandant de produire des dossiers concrets, il s'est contenté de refuser de répondre en invoquant la protection des données.
Nous nous retrouvons dès lors avec un texte peu précis et face à l'invocation de dossiers auxquels nous n'avons pas eu accès. Cela reflète une incohérence majeure dans notre façon de travailler, ce qui n'a pas empêché la majorité de la commission d'accepter cet objet. Sollicité, le Conseil d'Etat ne pourra que confirmer dans quelque temps ce que Mme la conseillère d'Etat a détaillé lors de son audition. Afin de revenir à une logique permettant un travail efficient, nous vous remercions de refuser cette motion.
Mme Masha Alimi (LJS). Personnellement, je vais tenir un discours un peu moins juridique concernant les entretiens de service. Ce qui m'interpelle, c'est déjà qu'aucun chiffre ni aucun fait objectif ne permet de montrer qu'une telle information est avérée; on ne peut dès lors pas prétendre que l'entretien de service est utilisé de manière abusive. L'exposé des motifs fait d'ailleurs état d'un exemple au conditionnel, il ne s'agit donc pas d'un fait, mais d'une supposition.
Retenir la nécessité de l'entretien de service seulement en cas de situation objective et incontestable est une formulation que je ne comprends pas bien. En effet, l'entretien de service n'a pas pour but de licencier un collaborateur: il est davantage utilisé pour le recadrer de manière constructive, pour définir des objectifs réalisables, que ce soit au niveau du comportement ou de la délivrance des prestations. Un entretien de service ne va pas uniquement dans un sens, c'est aussi une discussion qui vise à améliorer le comportement ou les performances du collaborateur. Il a l'avantage d'être formalisé afin que l'employeur suive régulièrement les progrès de la personne et s'assure de la non-récidive d'une faute, s'il y en a eu une, sachant que, par la suite, elle peut faire l'objet d'une sanction.
Je reviens sur la notion de situation objective incontestable: l'entretien de service est justement là pour objectiver une situation qui s'est produite et pour définir un suivi tout aussi objectif. Il est généralement effectué par un supérieur hiérarchique accompagné d'un responsable des ressources humaines. Précisons également que l'entretien de service relève d'un règlement et qu'il ne doit pas être confondu avec l'enquête administrative, qui relève quant à elle d'une loi.
S'agissant de l'abus de l'utilisation de l'entretien de service, là encore, sur quels éléments ou chiffres s'appuyer pour confirmer la véracité de ces propos ? Aucun ! En fait, tout est conjecture, il n'est donc pas possible dans ces conditions que nous votions en faveur de cette motion, et le groupe LJS la refusera. Merci.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, cette motion repose effectivement sur une ou plusieurs rencontres individuelles, qui ne sont malheureusement pas toutes excellemment documentées. Il n'empêche que le fond de la situation qu'elle présente peut inquiéter. Comme l'a très bien dit le rapporteur de minorité, il existe deux voies distinctes dans la LPAC pouvant conduire à la fin des rapports de service du fait de l'Etat employeur: la voie de la résiliation liée à une insuffisance de prestation - l'inaptitude au poste - et celle de la révocation, qui est consécutive à une faute.
Lorsqu'on l'interroge, le département des finances, et plus particulièrement l'office du personnel, nous donne des exemples extrêmement typés de ce que peut être une faute, par exemple un employé qui piquerait dans la caisse - évidemment, c'est intentionnel, c'est une faute et il n'y a pas de doute à avoir quant aux conséquences à tirer face à une faute d'une telle gravité. Idem lorsqu'il s'agit d'une inaptitude: on nous présente des cas de personnes qui, suite à des problèmes de santé, se retrouvent dans l'incapacité de mener à bien leur mission et que l'Etat souhaite effectivement replacer ailleurs si cela est possible.
Cependant, la réalité - et chacun et chacune peut se la représenter - c'est qu'il existe plusieurs situations beaucoup moins typiques, beaucoup moins typées de gens qui, à un moment ou à un autre de leur carrière, ne produisent pas la prestation que l'Etat attend d'eux. Savoir s'il s'agit d'une faute, s'il y a une intentionnalité, une volonté de l'employé de ne pas fournir ce que l'Etat attend de lui ou s'il s'agit d'une inaptitude, cela reste à l'appréciation de l'employeur. Même si le nombre de cas incriminés est extraordinairement faible - sur ce point, nous sommes entièrement d'accord, et nous devons nous en réjouir toutes et tous, car cela démontre que la fonction publique fonctionne très bien: l'immense majorité des fonctionnaires remplissent à entière satisfaction leur mission -, ils méritent d'être documentés, parce que l'Etat doit être absolument exemplaire dans les rapports qu'il entretient avec son personnel, comme tout employeur, et même plus que tout employeur précisément parce qu'il est l'Etat.
Dans ce sens, nous estimons que, peut-être parallèlement aux travaux sur la révision de la LPAC, il est nécessaire de poser une limite plus nette permettant de distinguer de façon plus marquée ces deux situations, raison pour laquelle nous soutiendrons cette motion. Je vous remercie.
M. Yves Nidegger (UDC). Il faut reconnaître aux motionnaires et à mon préopinant une certaine pertinence lorsqu'on constate que le licenciement dans la fonction publique est trop souvent utilisé pour des raisons punitives et pas assez souvent pour des raisons de rationalité des besoins (ou des non-besoins) de la prestation de travail dont il est question. Sur ce point, je serais enclin à une certaine empathie à l'intention des motionnaires, et en particulier de mon préopinant - c'est un domaine que je côtoie, pour des raisons professionnelles, trop fréquemment dans ce sens.
Cela étant, la motion elle-même est un peu brouillonne et répond surtout à une espèce de pulsion pavlovienne hostile au licenciement d'où qu'il vienne, comme si, sous l'inspiration du droit français - qui, jusqu'à preuve du contraire, ne s'applique pas encore en Suisse -, tout licenciement était par définition abusif, parce qu'on n'a pas le droit de licencier quelqu'un ou de lui trouver une inutilité ou une insuffisance de prestation quelconque.
Ce qu'il faudrait, c'est amener l'Etat - et là ce serait le vrai but de la motion - à utiliser un peu moins le licenciement pour des raisons punitives, parce que dans ce cadre on construit des dossiers punitifs qui, parfois, sont un peu bancals. Dans un passé à peine lointain, le moyen de se défaire d'un fonctionnaire était de le mobber jusqu'à ce qu'il soit à l'AI, pour être tout à fait clair. On le placardisait d'une manière ou d'une autre, et on atteignait ainsi le résultat souhaité. Les règles qui rendaient le licenciement du fonctionnaire extrêmement difficile - qui avaient au départ pour but de protéger le fonctionnaire contre le licenciement - se retournaient donc contre celui qu'elles voulaient protéger, un peu comme le droit du bail qui empêche les promoteurs de construire des appartements pour punir le locataire de ne pas en avoir. Il y a parfois des protections qui vont à fins contraires et qui aboutissent à l'exact inverse de ce qu'on souhaitait obtenir.
On constate encore un peu de scories de tout cela et, sur ce point, je pense que les motionnaires n'ont pas tout faux. En revanche, ce qu'ils proposent n'est pas une solution, parce que l'idée même - on en a discuté ici il y a très peu de temps - de pouvoir mettre fin à un rapport de travail lorsque ce dernier ne fait plus de sens doit évidemment prévaloir dans la fonction publique, comme partout ailleurs, ou alors on ne parle plus de rapport de travail mais de rapport d'assistanat - et dans ce cas c'est un autre département qui devrait s'en occuper. Pour toutes ces raisons, nous soutenons le point de vue de la minorité.
M. Arber Jahija (MCG). La réduction du nombre d'étapes dans le cadre des procédures de licenciement, sans que l'on garantisse à la personne visée le droit d'expression, est une atteinte inacceptable à la justice. Chacun doit avoir le droit et l'opportunité de faire valoir son point de vue, c'est un principe ancré dans notre droit constitutionnel. Ignorer cette dimension compromet l'équité et la protection des droits fondamentaux au sein des processus de licenciement. L'entretien de service doit être justifié et ne doit surtout pas être un raccourci en vue du licenciement. Dès lors, je vous invite à soutenir cette motion. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Pierre Conne (PLR). Chers collègues, nous l'avons entendu, ça a été confirmé, il n'y a pas de licenciements abusifs à l'Etat. Et si les droits fondamentaux des fonctionnaires n'étaient pas respectés, comme nous venons de l'entendre, ça se saurait et la législation aurait déjà été modifiée. Le PLR vous invite à refuser cette motion pour la raison suivante: actuellement, la loi est bien faite et bien appliquée. Elle permet à la hiérarchie, dans le cadre de l'évaluation des compétences et des aptitudes professionnelles, de s'assurer que la personne remplit correctement les devoirs de sa charge et, si cette personne présente des insuffisances de prestation, de lui offrir la possibilité de se former, de s'améliorer et, si manifestement l'insuffisance professionnelle ou l'incompétence par rapport à la charge confiée perdure, de procéder à la résiliation des rapports de service.
Maintenir la voie de l'entretien de service - qui permet effectivement d'évaluer un collaborateur, de le sanctionner, éventuellement jusqu'au licenciement - est une responsabilité de la hiérarchie. Nous ne devons surtout pas priver les cadres et la hiérarchie de cette compétence. Autrement, cela signifie que dans l'organisation générale du service public, basée sur une structure et une organisation dans lesquelles la hiérarchie a des droits, des devoirs et des compétences, notamment celle de s'assurer que le travail est correctement effectué par les collaborateurs, ce rouage que représente la hiérarchie serait tout simplement aboli.
S'agissant des enquêtes administratives, elles ne visent pas à se substituer d'une manière ou d'une autre à l'évaluation des compétences professionnelles, mais à analyser de manière objective et externe - raison pour laquelle elles s'appellent «administratives» et non pas «professionnelles» - une faute éventuelle, à la qualifier, cas échéant à en évaluer la portée et à se prononcer sur la nature de la sanction. Effectivement, comme le rapporteur de minorité l'a dit, l'enquête administrative est automatiquement enclenchée à partir du moment où potentiellement la sanction est grave, à savoir s'il s'agit d'une rétrogradation du fonctionnaire, voire d'une fin des rapports de service.
Alors non, Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons pas laisser tout simplement aux collaborateurs la marge de manoeuvre, la liberté de solliciter une enquête administrative dans tous les cas; cela irait complètement à l'encontre de leur évaluation professionnelle et amènerait à un moment donné - en tout cas potentiellement - à ce que l'on considère l'Etat comme étant devenu une médiocratie. Le PLR refusera donc cette motion et vous invite à en faire de même. Je vous remercie de votre attention.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Jean-Marc Guinchard pour trois minutes.
M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. J'ai apprécié l'intervention de notre collègue Vert, qui demandait que l'Etat documente les dossiers qu'il fournit. Cette obligation tout à fait bienvenue s'applique également aux motionnaires dans le cadre des travaux de commission; il aurait été judicieux que l'ensemble des commissaires puissent disposer de dossiers eux aussi documentés - car ces dossiers, nous n'y avons pas eu accès.
Le deuxième élément, relevé par le groupe MCG, est le respect du droit d'être entendu, qui est effectivement un droit constitutionnel de base. J'ai apprécié cette intervention, mais le respect du droit d'être entendu, c'est justement ce que garantit un entretien de service: comme LJS l'a rappelé, ce dernier permet de recadrer le fonctionnaire et de lui donner, le cas échéant, d'autres objectifs, mais il permet surtout un échange, offrant ainsi au fonctionnaire l'opportunité de s'exprimer quant à la situation qu'il rencontre.
Je maintiens donc la position de la minorité consistant à refuser cette motion. Je vous remercie.
La présidente. Merci. La parole est à M. Alberto Velasco pour quatre minutes quinze.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Je vous remercie, Madame la présidente. Dans ce Grand Conseil, on utilise parfois une logique à géométrie variable: hier, vous le savez, on travaillait sur un projet de loi qui traitait de la réintégration d'un fonctionnaire. Un des arguments que la majorité de droite a donné consistait à dire que ces cas ne concernaient que très peu de monde. Aujourd'hui, on nous sert l'argument contraire en disant que ça concerne quand même 45 personnes, etc. Ce que je veux dire par là, c'est que ce n'est pas le nombre qui est important, mais le fait même de l'injustice. On peut avoir une administration de 20 000 personnes au sein de laquelle trois personnes sont injustement traitées, condamnées ou desservies; c'est ça qui compte ! On ne peut pas dire qu'une institution est juste parce qu'il n'y a que quinze personnes qui ont été traitées de façon injuste. Non, une injustice est une injustice ! Si les choses ne se passent pas comme elles sont censées se passer, on doit faire en sorte... Je ne dis pas que les choses se sont déroulées ainsi, Monsieur le rapporteur de majorité - vous transmettrez, Madame la présidente...
Une voix. Rapporteur de minorité - pour le moment !
M. Alberto Velasco. Rapporteur de minorité, excusez-moi, mais peut-être en effet rapporteur de majorité plus tard ! ...puisque vous avez indiqué qu'aucun cas concret ne nous avait été rapporté. C'est vrai, j'en conviens. Mais il faudrait quand même s'intéresser bien plus à cette réalité au sein de l'administration; c'est du reste pour cela que la commission concernée traite actuellement d'un projet de loi relatif à la LPAC, une loi très importante. J'aimerais dès lors, Madame la présidente, que cette motion soit renvoyée en commission dans le cadre de ces travaux sur la LPAC. Merci.
La présidente. Je vous remercie. Le rapporteur de minorité souhaite-t-il s'exprimer sur le renvoi en commission ? (Remarque.) Vous avez la parole.
M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Je crois qu'à la lecture du rapport, auquel tous les députés ont accès, on peut considérer que les travaux se sont déroulés de façon extrêmement correcte, que les auditions nécessaires ont été menées et que chacun a pu se faire un avis sur cette motion. Je vous suggère donc de refuser le renvoi en commission. Je vous remercie.
La présidente. Merci. Nous allons maintenant voter sur le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2781 à la commission sur le personnel de l'Etat est rejeté par 49 non contre 43 oui.
La présidente. Nous terminons donc notre débat avec l'intervention de la conseillère d'Etat, Mme Nathalie Fontanet.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, demander que l'employeur recoure à une enquête administrative dès que les faits sont contestés par le membre de l'administration est complètement démesuré. Une enquête administrative est une procédure qui prend énormément de temps, qui peut durer plusieurs mois, qui fait appel à quelqu'un d'extérieur, justement de façon à entendre le collaborateur ou la collaboratrice qui estime que les faits ne sont pas corrects. L'entretien de service peut tenir ce rôle-là. C'est vrai que de temps en temps, il peut déboucher sur une résiliation des rapports de service, mais il est également exact que ce n'est absolument pas le cas tout le temps, bien au contraire ! C'est l'occasion d'avoir un échange avec le collaborateur ou la collaboratrice, de le rappeler à l'ordre, cas échéant, et de souligner ce qui doit impérativement être amélioré. A ce moment-là, il est possible pour le collaborateur de contester certains faits, certains éléments. C'est un acte managérial, à l'inverse justement de l'enquête administrative, qui ne l'est pas. Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, je vous recommande de refuser cette motion. Je vous remercie.
La présidente. Je vous remercie. Nous allons à présent procéder au vote sur cet objet.
Mise aux voix, la proposition de motion 2781 est rejetée par 48 non contre 42 oui (vote nominal).
Débat
La présidente. Nous passons aux objets liés R 858-A et R 903, que nous traitons en catégorie II, quarante minutes. Le groupe Ensemble à Gauche ne faisant plus partie de ce Grand Conseil, le rapport de minorité de M. Jean Batou sur la R 858 ne sera pas présenté. Quant au rapport de minorité de M. Marc Falquet sur la R 903, il est repris par M. Yves Nidegger. Madame Patricia Bidaux, rapporteuse de majorité, vous avez la parole. (Brouhaha.) Attendez, on va essayer d'obtenir un peu de silence dans la salle ! (Un instant s'écoule.) Allez-y, Madame la rapporteure.
Mme Patricia Bidaux (LC), rapporteuse de majorité. Je vous remercie, Madame la présidente. Effectivement, il vaut la peine que nous soyons à l'écoute, ce sujet étant éminemment d'actualité et très «touchy» dans notre société.
Au début de la précédente législature, la commission des Droits de l'Homme a traité plusieurs textes en lien avec les droits des personnes LGBTIQ+. On se retrouve dans la même configuration qu'hier soir au sujet de la résolution visant à soutenir les actions d'aide humanitaire en mer Méditerranée - c'est exactement à la même période qu'ont été élaborés ces textes.
La R 858, présentée par Mme Jocelyne Haller, a été refusée par la majorité de la commission. Certains commissaires ont tout de même souhaité maintenir ouvert le débat sur cette problématique en proposant une nouvelle résolution, puisque, lors des débats, il a été soulevé plusieurs fois que les personnes trans n'avaient pas droit au libre arbitre, qu'elles devaient entre autres être diagnostiquées comme souffrant d'une maladie psychiatrique telle que la dysphorie de genre.
Bien entendu, ces résolutions datant un peu, les choses ont évolué à Berne. Les deux premières invites de la R 903 pourraient ainsi être amendées, puisqu'il n'est plus demandé d'opérations ni de traitements pour avoir droit au changement de sexe. On pourrait donc effectivement envisager un amendement, d'ailleurs une proposition vous a été transmise par M. de Matteis.
La directive de l'OFEC mentionne ceci: «Sont en particulier prohibées les exigences d'âge et de santé ainsi que les interventions chirurgicales ou d'autres modifications physiques, en particulier la stérilisation et d'autres traitements médicaux, un diagnostic de maladie mentale ou la dissolution de l'union actuelle régie par la loi [...].» Cela corrobore le fait que ces deux premières invites pourraient être modifiées.
Au-delà des personnes transgenres - pour reprendre la troisième invite, qui demande la liberté de ne pas être inscrit en tant qu'homme ou femme -, j'aimerais vous rendre attentifs à toutes les difficultés concernant les enfants intersexes et, pour ma part, ce point m'a particulièrement mobilisée. On en parlait hier, et M. Nidegger disait - vous transmettrez, Madame la présidente - que la génétique ne peut être modifiée; or, dans ces cas-là, effectivement, il y a une trace génétique qui est différente, soit avec un Y et deux X, soit avec des bouts de X qui manquent, ce qui crée une vraie difficulté pour les parents quant à savoir si cet enfant sera une fille ou un garçon. Dans ces cas, laisser la liberté aux parents de choisir au-delà de trois jours - aujourd'hui, c'est bien d'un délai de trois jours qu'il s'agit - pour définir le sexe de leur enfant alors qu'on ne sait pas du tout comment il va se développer au niveau hormonal, je pense que cela ouvre aussi une discussion, dont nous ne devrions pas avoir peur.
Une des minorités ne s'est finalement pas opposée au principe d'introduire un projet pilote à Genève, ce qui revient à dire qu'il faudrait deux bases légales; au niveau fédéral, soit on l'accepte, soit on ne l'accepte pas, mais demander qu'il y ait des popotes cantonales, ça ne me paraît pas très adéquat. J'en ai fini pour ma première intervention. Je vous remercie, Madame la présidente.
M. Yves Nidegger (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Le rapport de minorité que je reprends à la seconde s'intéresse uniquement à la R 903. Il n'y aura pas de discussion sur le rejet de la première résolution, à savoir la R 858, je parlerai donc uniquement de la R 903.
Je souhaite juste rebondir sur la question de la génétique: bien sûr que des cas de lésions chromosomiques existent mais, comme le rappelait Jean Gabin dans une très célèbre répartie: «Les poissons volants existent, mais ce n'est pas la caractéristique du genre.» Cela pour dire qu'il s'agit véritablement de chiffres infinitésimaux autour desquels on ne peut pas créer une loi générale et abstraite, ce qui n'empêche pas, évidemment, d'avoir une immense sensibilité à l'égard de ces parents qui, en rentrant de la maternité, se retrouvent face à des voisins qui leur posent comme première question: «Garçon ou fille ?» Dans certains cas, ces parents sont horriblement mal à l'aise, ne sachant eux-mêmes pas exactement comment y répondre. Mais on ne va sans doute pas régler cela dans une loi générale et abstraite; on devrait traiter cette problématique dans des délais un peu plus médicaux, un peu plus allongés, pour ne pas imposer aux gens la pression de devoir répondre tout de suite à une question lorsqu'elle n'est pas tout à fait évidente. Sachant par ailleurs que l'identité sexuelle - je suis comme mon papa donc je suis un garçon, je suis comme ma maman donc je suis une fille - participe de manière absolument essentielle à la formation de l'identité en général, il est aussi problématique de laisser quelqu'un dans l'incertitude à ce sujet. C'est donc une question extrêmement complexe et délicate, et il faut la laisser non pas aux idéologues, mais peut-être plus à la médecine.
Cela étant, tous ces travaux remontent à un texte qui, au départ, date de 2019, c'est-à-dire une vieillerie. Entre-temps est passée la lumineuse LED-Genre, dont nous avons encore parlé hier, ce qui rend évidemment obsolète toute cette discussion, en particulier s'agissant d'une résolution - vous savez ce que j'en pense pour les avoir subies depuis Berne. On a eu tous ces débats, et ce dont je viens de vous parler a par exemple été longuement discuté lors d'un débat aux Chambres fédérales. Le troisième genre à l'état civil a aussi été débattu. Sur toutes ces questions-là, vous n'allez absolument rien apprendre aux parlementaires fédéraux en leur disant que les Genevois, figurez-vous, y ont pensé - avant tout le monde, sont-ils les seuls à le croire !
Cette résolution est inutile parce que c'est une résolution, et j'annonce que la minorité retire son amendement, celui qui figure à la fin du rapport de minorité. Mais pour voir si, par hypothèse et par totale transparence, il existerait des séquelles de ce que contient cette proposition qui n'auraient pas été déjà envisagées et traitées complètement dans le cadre de la LED-Genre ou d'autres règles fixées entre-temps, je demande le renvoi à la commission des Droits de l'Homme, où cette question pourra être examinée. On pourra alors probablement revenir en plénière avec une majorité différente.
La présidente. Merci. Juste une précision: votre demande de renvoi concerne-t-elle les deux résolutions ou uniquement la R 903 ?
M. Yves Nidegger. Uniquement la R 903.
La présidente. Je vous remercie. Nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi en commission sur la R 903 et je passe la parole à la rapporteure de majorité.
Mme Patricia Bidaux (LC), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. Je pense qu'on peut tout à fait accéder à cette demande qui fait sens et qui permettra aussi de mieux comprendre ce qui se passe au niveau fédéral. Je vous remercie.
La présidente. Je vous remercie. Nous allons donc voter sur le renvoi en commission de la R 903.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 903 à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) est adopté par 79 oui contre 11 non.
La présidente. Nous continuons le débat sur la R 858-A. La parole est à M. Matthieu Jotterand.
M. Matthieu Jotterand (S). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais commencer en reprenant les propos de M. Nidegger - vous lui transmettrez, Madame la présidente. Quand il dit que pour les personnes intersexes, la question devrait être réglée par des délais médicaux, que c'est la médecine qui devrait s'en occuper plutôt que des résolutions ou des textes parlementaires, eh bien je ne peux que recommander à l'UDC de faire exactement la même chose par rapport aux personnes transgenres et de retirer son projet de loi transphobe, qui traîne en commission depuis des années et constitue clairement une ingérence totale dans le domaine médical.
Ensuite, s'agissant de la résolution de commission, nous avons bien entendu soutenu son renvoi en commission, mais pas pour les mêmes raisons que M. Nidegger: il me semble en effet que cette résolution doit être rediscutée pour être améliorée, mais pas dans le but de retirer des droits fondamentaux comme le souhaite l'UDC - nous aurons évidemment l'occasion d'en discuter en commission.
Concernant la résolution 858, la traiter séparément n'aurait pas vraiment de sens puisqu'il s'agissait d'un seul processus au sein de la commission des droits humains lors de la précédente législature. Ce texte demande plusieurs choses. On peut se réjouir que quelques aspects de cette résolution aient depuis lors été mis en oeuvre, ce qui fait que sur certains points, elle est bien entendu caduque. Malgré tout, il reste beaucoup à faire et, n'en déplaise aux anciens collègues de M. Nidegger à Berne, je pense que les cantons ont un réel impact lorsqu'ils amènent des thématiques qui parfois, depuis la tour d'ivoire de la Berne fédérale, ne sont pas forcément prises en compte. Je crois que le canton de Genève peut et doit jouer le rôle de phare dans la diversité, notamment pour ce qui est du respect des droits des personnes LGBT et de la lutte contre les discriminations. Mesdames et Messieurs, c'est en effet l'occasion de rappeler que les personnes LGBT sont actuellement parmi les plus discriminées de notre société. On en a déjà discuté hier, et on voit très bien l'idée de l'UDC derrière ce positionnement. Même si nous n'allons pas voter ce soir sur la résolution de commission - qui aurait évidemment été la plus claire à ce sujet -, nous devons tout de même nous rendre compte que ces textes sont le résultat d'un vent qui tourne. Lors de la législature précédente, la composition de la commission faisait qu'on pouvait discuter de ces questions; maintenant, au sein de la commission, le vent obscurantiste se lève malheureusement, et les droits des personnes transgenres en particulier vont être attaqués. Pourquoi ? Parce que ce sont les personnes les plus précarisées, les plus discriminées. Nous devons les défendre ! Si aujourd'hui ce sont les personnes transgenres, leurs droits et la lutte contre leurs discriminations qui sont attaqués, demain ce sera qui ? C'est évidemment à cela que nous devons rester attentifs et attentives, pour cela que nous devons lutter ! Au vu de ces éléments, je demande également le renvoi en commission de la R 858. (Applaudissements.)
La présidente. Je vous remercie. Nous sommes donc saisis d'une nouvelle demande de renvoi en commission. Monsieur le rapporteur de minorité, vous avez la parole.
M. Yves Nidegger (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Inutile de renvoyer cette résolution en commission, Madame la présidente. Il y avait déjà une majorité pour l'enterrer sous l'ancien régime, celui qui est tombé lors des dernières élections. Je ne sais pas si vous vous en souvenez, il y a eu une élection populaire qui a désigné de nouveaux députés ! Et comme l'a dit mon préopinant, ça s'est aggravé depuis, c'est-à-dire que maintenant il y a plein de conservateurs dans cette commission, c'est épouvantable ! Il ne sert donc à rien d'accentuer la cruauté en renvoyant cette pauvre résolution, qui en souffrira très certainement, aux mains de personnes brutales et totalement obscures - tels sont les termes de mon préopinant. Par conséquent, nous ne voterons pas le renvoi en commission, nous avons perdu suffisamment de temps sur cet objet.
Mme Patricia Bidaux (LC), rapporteuse de majorité. Effectivement, la majorité de la commission de l'époque était opposée à cette résolution. Il suffit donc de continuer à voter tel que c'est mentionné dans le rapport, en l'occurrence celui de la majorité. Mais le refus se base sur d'autres raisons que celles amenées par le rapporteur de minorité, sachant que, comme cela a été dit, pratiquement toutes les demandes formulées dans la résolution sont déjà en cours de réalisation.
La présidente. Je vous remercie. Nous allons donc voter sur la demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de résolution 858 à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) est rejeté par 62 non contre 30 oui.
La présidente. Nous continuons notre débat, et je passe la parole à M. Stéphane Florey.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Madame la présidente. J'aimerais juste intervenir sur l'un des aspects de ce débat qui, très franchement, commence à tourner en rond et à devenir un délire extrême. Vous transmettrez à ceux qui voudront l'entendre et particulièrement à M. Jotterand qu'à un moment, il faut arrêter avec vos discriminations ! Je vous donne un exemple. Avant, dans tous les projets de lois, dans toutes les motions, il était indiqué: «Proposition de M. et Mme». Dans tous les rapports, il était écrit: «Rapport de majorité de Mme X» ou «Rapport de majorité de M. Y», ainsi de suite. Aujourd'hui, il est noté: «Proposition de X, Y, Z», «Rapport de X, Y, Z». Je suis désolé, mais à un moment donné c'est clairement de la discrimination ! Je ne veux pas qu'on puisse m'identifier comme Mme Stéphane, parce que, oui, il y a des femmes qui s'appellent Stéphane. Je suis désolé, Stéphane Florey n'est pas une femme... (Exclamations.) ...et je me sens clairement discriminé quand je mets «M.» sur mon rapport et qu'on trace cette indication. Je suis désolé, c'est déjà discriminatoire.
Même si la loi ou les règlements ont maintenant été modifiés dans ce sens, ça pose clairement problème, d'autant plus avec certains noms de personnes. Lorsque vous recevez un mail de l'administration dont les expéditeurs ont des noms à consonance étrangère, je suis désolé, mais le fait que ces personnes n'indiquent pas «Mme» ou «M.» implique qu'on finit parfois par répondre au pif en disant «Merci, Madame» ou «Merci, Monsieur», alors que c'est le contraire et qu'on a tout faux. Ça, c'est aussi clairement de la discrimination ! (Commentaires.) A un moment, il faudrait juste arrêter, ces textes doivent de toute façon être refusés. Il faut stopper le débat, on tourne en rond et ça ne sert absolument à rien. Je vous remercie.
La présidente. Merci. La parole est à M. Jotterand pour vingt-six secondes.
M. Matthieu Jotterand (S). Merci, Madame la présidente. Ce sera extrêmement rapide, c'est juste pour que vous transmettiez à Mme Florey que nous soutenons sa lutte contre les discriminations ! (Rires. Applaudissements.)
M. Yves de Matteis (Ve). Je vais également demander le renvoi en commission, pour plusieurs raisons. Nous avons aujourd'hui une LED-Genre, en vigueur depuis le 1er juillet, qui règle une partie des aspects au plan cantonal, mais il serait peut-être intéressant de réexaminer certains points de cette résolution à la lumière de cette loi qui n'existait pas à l'époque. J'aimerais tout de même rappeler que le partenariat enregistré a été adopté à Genève en 2001 par ce même parlement, bien avant qu'il ne soit d'actualité au niveau fédéral, ce qui prouve que malgré tout, ce canton peut quelquefois être utile à Berne.
Par ailleurs, la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) est justement en train d'examiner une partie des questions évoquées par la R 858 de manière spécifique - c'est le cas pour la R 903, mais aussi pour la R 858 -, nous pourrions donc mieux décider, de façon plus éclairée, du sort de cette résolution après nos débats de commission.
De plus, en quatre ans, la situation a beaucoup changé et un certain nombre d'amendements pourraient effectivement être proposés, mais cela relève du travail de commission et ne peut pas être fait en plénière.
Enfin, il est vrai que la composition du parlement a changé, et il y a notamment un parti qui n'a pas pu participer aux débats, à savoir Libertés et Justice sociale. Ce dernier pourrait ainsi bénéficier des nouveaux travaux dans la mesure où il n'a pas pu étudier ces objets en commission lors de la législature précédente. Merci, Madame la présidente.
La présidente. Je vous remercie. Comme nous avons déjà entendu l'avis des rapporteurs sur le renvoi en commission, je lance tout de suite la procédure de vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de résolution 858 à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) est rejeté par 61 non contre 29 oui.
La présidente. Nous continuons donc notre débat, et je passe la parole à M. Pierre Conne.
M. Pierre Conne (PLR). Merci, Madame la présidente. Chers collègues, la R 858-A a déjà fait l'objet d'un long débat dans ce parlement. Les rapporteurs de majorité et de minorité sont d'accord pour dire que les invites soit sont déjà mises en oeuvre, soit ne sont plus pertinentes, et je dois avouer que je ne comprends pas pourquoi nous nous éternisons maintenant à poursuivre le débat sur cet objet. Un choix judicieux a été fait sur la R 903 puisqu'il y a effectivement une problématique de fond qui mérite d'être abordée, mais là, je ne comprends vraiment pas ce qui est en train de se passer concernant la R 858-A.
Les invites sont extrêmement nombreuses, diffuses, le texte va plutôt diluer et perturber la discussion au sein de la commission, alors qu'il serait préférable de se concentrer sur les aspects pertinents à l'heure actuelle qui méritent d'être creusés politiquement. Après, évidemment, il y aura des positions qui seront peut-être différentes. J'ai entendu tout à l'heure que certains jugeaient que, dans sa composition actuelle, la commission des Droits de l'Homme était réactionnaire, réfractaire, d'un autre âge, etc. Pour ma part, connaissant les deux commissaires PLR, je ne les reconnais pas du tout dans ces qualificatifs. J'invite celles et ceux qui tiendraient ce genre de propos jugeants à revoir un peu leur position et à prendre du recul afin d'avoir une approche plus sage, surtout s'agissant du contenu des objets que nous traitons dans cette commission. Pour y avoir siégé pendant plus d'une législature, pour l'avoir présidée, je peux dire que c'est justement une commission dans laquelle j'ai toujours trouvé une capacité de s'écouter, de construire ensemble une démarche politique, législative, même si on avait des a priori qui étaient peut-être fondés sur des visions politiques différentes. J'invite mes collègues - et je ne parle pas des collègues PLR, mais de celles et ceux qui ont porté un jugement extrêmement sévère à l'égard de certains membres de cette commission - à adopter une position plus raisonnable et plus respectueuse, je l'ai déjà dit, du fondement, de l'origine et de la finalité de cette commission. Je vous remercie, Madame la présidente.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Nous allons maintenant nous prononcer sur la R 858.
Mise aux voix, la proposition de résolution 858 est rejetée par 62 non contre 29 oui (vote nominal).
Débat
La présidente. Le point suivant est la R 875-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité de Mme Alessandra Oriolo est repris par Mme Emilie Fernandez, à qui je cède le micro.
Mme Emilie Fernandez (Ve), rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. La résolution 875 date un peu, puisqu'elle a été déposée en février 2019, soit il y a cinq ans. La majorité de la commission s'est positionnée en faveur de ce texte, qui demande à l'Assemblée fédérale que les cantons puissent être libres d'instituer un congé parental.
Ce projet a donc été déposé en 2019, à un moment où le congé paternité de deux semaines n'avait pas encore été accepté par le peuple. En traitant ce texte en 2021, la majorité de la commission a estimé nécessaire d'obtenir pour Genève l'autorisation d'instituer un congé parental propre à notre canton.
Entre-temps, Genève a voté, en juin 2023, le mécanisme de financement d'un congé parental de 24 semaines, qui est actuellement à l'étude à Berne. En effet, le cadre juridique doit être clarifié et adapté au niveau fédéral pour la mise en place de congés parentaux cantonaux ou, le cas échéant, pour qu'un congé parental fédéral puisse être instauré, afin d'éviter qu'il y ait 26 congés parentaux différents en Suisse. Une résolution de Mme de Chastonay allant dans ce sens est d'ailleurs actuellement à l'étude à la commission des affaires sociales.
L'objectif visé par le groupe Vert est d'envoyer un message clair à Berne: Genève souhaite qu'un congé parental soit rapidement instauré. Dans cette optique, nous soutiendrons l'amendement déposé par Mme Bidaux et vous encourageons à voter cette résolution amendée.
Présidence de M. Thierry Cerutti, deuxième vice-président
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, cette résolution a effectivement été déposée début 2019, soit avant l'acceptation du congé paternité de deux semaines par le peuple suisse. Ce texte contient deux objectifs principaux: premièrement, l'instauration d'un congé parental dans le droit fédéral - actuellement, la loi fédérale sur les allocations pour perte de gain en cas de service, de maternité et de paternité ne prévoit pas le congé parental -, deuxièmement, l'augmentation des prestations et de la durée pour le congé de maternité et celui de paternité (qui vient d'être accepté pour une durée de deux semaines), ainsi que l'introduction d'un congé parental.
Pour des raisons étonnantes et contradictoires, la commission des affaires sociales a parallèlement, d'une part, gelé deux projets de lois - il s'agit du PL 12595 intitulé «Renforcement des congés maternité et paternité à Genève» et du PL 12467 «Pour le maintien du revenu durant le congé maternité et adoption», dont le coût était estimé à 480 millions par année, ce qui avait été jugé excessif - et, d'autre part, via cette résolution, demandé à la Confédération qu'elle légifère, afin que notre canton puisse instaurer ces prestations.
La minorité de la commission estime que les chances de succès de cette résolution seraient très très faibles. Vu l'importance du congé parental et son bénéfice pour l'éducation des enfants, qui n'est pas contesté, un sujet aussi complexe et impliquant massivement nos entreprises et nos finances publiques devrait être porté et supporté par nos conseillers nationaux et aux Etats.
Pour ces raisons, la minorité de la commission - qui est très large, puisque je précise que ce sont tout de même sept commissaires qui ont voté le refus de ce texte, contre huit qui soutenaient son renvoi à Berne - vous recommande de rejeter cette résolution. Merci de votre attention.
Présidence de Mme Céline Zuber-Roy, présidente
Mme Sophie Demaurex (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, le parti socialiste est résolument attaché à la mise en place d'un congé parental. Par cette résolution et l'amendement proposé, il est demandé à Berne - n'en déplaise au député Yves Nidegger, vous lui transmettrez, Madame la présidente - de produire une base légale permettant la création d'un congé parental fédéral et la mise en oeuvre de l'IN 184 acceptée en votation par les Genevois le 18 juin 2023. Il est à rappeler que cette initiative comporte des instabilités juridiques, raison pour laquelle le parti socialiste avait proposé un contreprojet permettant de corriger certaines lacunes constatées et de placer hors de danger les acquis genevois.
Instaurer un congé parental est aujourd'hui une nécessité, tant pour les parents que pour la société. Après l'introduction à Genève en 2001 d'un congé maternité de seize semaines et la mise en place au niveau fédéral en 2005 d'un socle de quatorze semaines du même congé maternité, après l'entrée en vigueur, en janvier 2021 seulement, d'un congé paternité de deux semaines, il est plus que temps d'entreprendre la réalisation d'un congé parental. Il permettra aux deux parents d'endosser pleinement cette fonction auprès de leurs enfants, et cela, à terme, de manière égalitaire.
Le parti socialiste s'assurera que des garanties soient prises pour éviter que le déploiement du congé parental ne mette en péril la loi instituant une assurance en cas de maternité et d'adoption, la LAMat, voire qu'il s'y substitue. Il s'assurera également de l'intégration des travailleurs et des travailleuses indépendantes dans le champ du congé parental. Il s'assurera encore de la non-mise en question de la durée du congé maternité genevois puisque le texte de l'initiative prévoit que, sur demande commune de deux bénéficiaires de l'assurance, l'Etat garantit la possibilité pour l'un d'entre eux de reporter deux semaines de l'assurance en faveur de l'autre bénéficiaire.
Notre parti relève une fois encore le plus grand défaut du mécanisme, qui est lié au financement obligatoire à parts égales pour les employeurs et les travailleurs et travailleuses. En effet, accorder ledit congé ne sera pas une obligation pour les employeurs; ainsi, les employés et employées se retrouveraient contraints de cotiser pour une prestation dont ils ne seraient pas assurés et dont ils ne bénéficieraient que s'ils remplissent les conditions de ce congé parental.
Pour toutes ces raisons, cette résolution permettrait d'aller de l'avant dans la mise en application d'un congé parental, auquel nous tenons depuis de nombreuses années. En conclusion, nous vous remercions d'accepter ce texte. (Applaudissements.)
Mme Patricia Bidaux (LC). Mesdames et Messieurs les membres du parlement, s'il y a un sujet de société qui nous occupe régulièrement, c'est bien celui du congé parental, et ce depuis 2019 pour ce qui concerne les textes parlementaires ! Il faut le dire, l'invite de cette résolution telle qu'elle est formulée aujourd'hui est obsolète, désuète, puisque depuis le dépôt de cet objet la population genevoise s'est positionnée en juin 2023 en faveur de l'initiative intitulée «Pour un congé parental maintenant !». Mais dans ce texte, il était question du financement du congé parental, non pas du congé parental tout court. Je vous propose donc que nous appelions un chat un chat et que nous n'hésitions pas à demander ce que nous souhaitons, c'est-à-dire un vrai congé parental. La raison pour laquelle j'ai déposé un amendement, c'est que nous ne devons pas tourner autour du pot: demandons maintenant que la législation fédérale soit modifiée afin que ces congés parentaux soient accordés ! Je n'ai rien d'autre à ajouter, je vous remercie.
Mme Véronique Kämpfen (PLR). Cela a été dit, depuis le dépôt de cette résolution en 2019, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts s'agissant du congé parental. Tout d'abord, un congé paternité fédéral de deux semaines a été instauré, mais surtout, l'initiative 184 «Pour un congé parental maintenant !» a été acceptée à Genève en juin de l'année passée. Les travaux de mise en oeuvre de cette initiative vont s'étendre sur plusieurs mois. Le canton de Genève doit notamment obtenir la garantie de la Confédération pour ce nouvel article constitutionnel. Une fois cette garantie fédérale obtenue, il faudra rédiger un projet de loi permettant de mettre en oeuvre l'assurance introduisant un congé parental à Genève. Ce projet de loi devra à son tour être soumis à l'Office fédéral des assurances sociales. Selon les modalités de mise en oeuvre retenues, il conviendra également d'obtenir l'autorisation du Conseil fédéral de confier aux caisses cantonales de compensation la tâche de prélever les cotisations paritaires destinées à financer les allocations parentales et à verser ces prestations. Enfin, il faudra que les caisses de compensation puissent prendre les dispositions organisationnelles et informatiques dictées par l'exécution de ces nouvelles tâches et que les employeurs puissent également effectuer les démarches leur permettant d'assumer leurs obligations, en lien notamment avec le versement des cotisations.
Vous l'aurez compris, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la mise en oeuvre de l'initiative genevoise sur le congé parental prendra encore du temps. Ce qui est par contre évident, c'est que l'Assemblée fédérale est parfaitement au courant qu'elle doit se positionner sur cette question puisqu'elle a reçu de Genève une initiative acceptée par le peuple.
La R 875 demande qu'il soit possible non seulement de mettre en place un congé parental cantonal, mais aussi d'instaurer une allocation pour perte de gain. Ceci est en contradiction avec les modalités prévues par l'initiative 184. Le groupe PLR a donc décidé de refuser la résolution telle qu'initialement rédigée. En revanche, l'amendement du Centre fait sens. Il réaffirme simplement notre volonté de mettre en place un congé parental. C'est ce que nous avons voulu en soutenant l'initiative 184, et c'est la ligne que le PLR continuera de défendre. Si l'amendement du Centre passe, alors nous accepterons volontiers cette résolution. Je vous remercie.
Présidence de M. Alberto Velasco, premier vice-président
M. Yves Nidegger (UDC). Plusieurs préopinants l'ont dit, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis le dépôt de cette résolution et plus encore depuis que celle-ci a été rédigée. Pas seulement sous les ponts qui enjambent le Rhône ou l'Arve, mais également sous ceux qui enjambent l'Aar à Berne, où tous ces sujets ont été débattus et redébattus suite à moult propositions venant généralement de la gauche, qui souhaitait étendre le droit au congé dans ce genre de situations.
On a abordé la question sous un angle unique, ce qui fait apparaître l'oxymore contenu dans cette résolution. L'angle dont on a parlé, ce n'est pas celui du congé, mais celui du financement de l'ersatz de salaire que l'on va verser pendant ce congé. Rien ne l'empêche, on a déjà ce système pour l'assurance-maternité à Genève, on peut tout à fait imaginer des compléments de financement cantonaux dans un domaine où le droit fédéral ne l'interdit pas. Mais le fond de la chose n'est pas là: pour que vous ayez à financer une compensation du salaire perdu à raison d'un long congé parental, encore faut-il que le code des obligations, qui régit les rapports de travail, impose à l'employeur l'obligation d'accepter une telle durée de congé parental. Il s'agit là d'une réforme du code des obligations, donc du droit fédéral - c'est un peu sous-jacent quand on demande que soit adoptée une base légale qui le permette, mais encore faudrait-il l'avoir exprimé de manière explicite.
Sachez qu'aux Chambres fédérales, personne n'aurait aujourd'hui le courage de dire qu'il faut changer le code pour prévoir 43 semaines de vacances obligatoires dans ces cas-là, de sorte à rendre obligatoire le congé et à imposer aux employeurs de tolérer cette très longue absence. De plus, on ne saurait pas si cette absence payée serait utilisée, le paiement étant une question séparée, puisque c'est assurantiel. Il faudrait également régler la question de savoir ce qui se passe s'il n'y a pas d'assurance: est-elle obligatoire ou ne l'est-elle pas ? Mais en tous les cas, les employeurs qui engagent quelqu'un devront prendre le risque d'avoir à remplacer leur collaborateur pendant 43 semaines, sans savoir s'il s'agit d'une absence de 42-43 semaines ou de 3-4 semaines, parce qu'après se posera encore la question de la répartition entre les parents. Cela revient à placer les employeurs dans une position d'insécurité telle que, sachez-le d'avance, à Berne, non seulement les milieux patronaux, mais aussi de nombreux autres - et les indépendants encore plus -, sont crispés face à cette proposition. En conclusion, vous pouvez toujours renvoyer cette résolution à l'Assemblée fédérale si vous le voulez, mais à part agacer une fois de plus au nom du canton de Genève, vous n'aurez pas d'autres résultats.
Présidence de Mme Céline Zuber-Roy, présidente
La présidente. Je vous remercie. Je passe la parole à M. Pfeffer pour dix-sept secondes.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Il a été dit que cette résolution de 2019 était obsolète, qu'elle n'était plus d'actualité. Déposer maintenant un amendement...
La présidente. Il vous faut conclure.
M. André Pfeffer. ...pour faciliter la mise en vigueur de l'initiative 184 ne me semble pas adéquat, parce que... (Le micro de l'orateur est coupé.)
La présidente. Merci, vous avez terminé. La parole est à Mme Emilie Fernandez pour quatre minutes.
Mme Emilie Fernandez (Ve), rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Je n'aurai pas besoin de quatre minutes, je crois que tout a été dit. Je répète simplement que l'objectif visé ici est d'envoyer à Berne un message clair sur cette thématique, qui est une priorité pour les Genevoises et les Genevois. Je vous invite donc une nouvelle fois à soutenir l'amendement ainsi que la résolution.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous recommande à son tour d'accepter l'amendement puis de renvoyer la résolution à l'Assemblée fédérale. Une demande est déjà pendante auprès de la Confédération, le renvoi de ce texte appuiera donc cette requête et renforcera également le signal envoyé par la population lors de l'acceptation de l'initiative sur le congé parental. Je vous remercie.
La présidente. Je vous remercie. Nous nous prononçons tout d'abord sur l'amendement de Mme Patricia Bidaux, qui remplace l'invite à l'Assemblée fédérale de la façon suivante:
«demande à l'Assemblée fédérale
d'instaurer un congé parental,»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 88 oui contre 1 non.
La présidente. Je lance à présent le vote sur la résolution ainsi amendée.
Mise aux voix, la résolution 875 ainsi amendée est adoptée et renvoyée à l'Assemblée fédérale et au Conseil d'Etat par 76 oui contre 11 non et 2 abstentions (vote nominal).
Débat
La présidente. Nous examinons maintenant la R 930-A en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité est de Mme Christina Meissner; celui de minorité était à l'origine de moi-même, mais il a été repris par M. Jean-Pierre Pasquier. Madame Meissner, vous avez la parole.
Mme Christina Meissner (LC), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. Cette résolution datant de 2020 invite le Conseil d'Etat «à condamner les violences, arrestations, disparitions et tortures perpétrées par les autorités biélorusses contre leur peuple; à solliciter le Conseil fédéral afin que la Suisse: condamne les violations massives des droits humains qui y sont commises et contribue à une transition pacifique vers une démocratie et un Etat de droit; appelle à la libération des prisonniers politiques, dont la Suissesse Nathalie Hersche; appelle à l'organisation d'élections anticipées».
En août 2020, la réélection d'Alexandre Loukachenko à la présidence avait déclenché un mouvement de contestation historique, violemment réprimé par les autorités, lesquelles avaient procédé à des arrestations massives, à des liquidations de médias et d'ONG, ce qui avait conduit au dépôt de cette résolution. Le texte a été voté par une majorité de la commission des Droits de l'Homme, mais c'était en septembre 2021. Depuis, que s'est-il passé ? La résolution est-elle encore en adéquation avec l'actualité ?
Certes, la Biélorussie n'est pas devenue un Etat de droit entre-temps, mais les élections de 2020 qui avaient entraîné une vague d'arrestations et de protestations sont bien loin et les prochaines auront lieu en 2025. Réclamer des élections anticipées en février 2024 n'est pas pertinent: d'ici que la résolution soit traitée par notre Conseil d'Etat et que le Conseil fédéral s'en saisisse, cette requête n'aura plus aucun sens.
La demande que la Suisse s'engage pour la libération des prisonniers politiques, dont une Suissesse, est elle aussi un peu dépassée au vu des événements. Il y a toujours des prisonniers politiques, mais depuis novembre 2023, la Suissesse Natallia Hersche est de retour en Suisse, libérée après plus d'un an de détention en Biélorussie. Cette libération est intervenue suite à d'intenses efforts déployés pendant près d'un an et demi au niveau fédéral. Ignazio Cassis s'est impliqué directement auprès du président Loukachenko et, à ses côtés, 83 parlementaires suisses ont également demandé sa libération.
C'est dire si aujourd'hui, cette résolution de 2020 arrive un peu comme la grêle après les vendanges au vu des efforts fournis à l'échelle fédérale. Dès lors, la rapporteure de majorité que je suis se sent bien mal à l'aise pour la soutenir. (Brouhaha.)
La présidente. Merci. J'aimerais que les multiples discussions qui ont lieu dans cette salle cessent ! (Remarque.) Madame Alimi, par exemple !
Une voix. Ça dénonce !
La présidente. Il y a de la délation sur la gauche de la droite ! La parole va à M. Jean-Pierre Pasquier.
M. Jean-Pierre Pasquier (PLR), rapporteur de minorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous pourrions en rester sur les propos de la rapporteure de majorité. Le sujet qu'elle a présenté serait sans doute suffisant, Mesdames et Messieurs, mais comme l'a indiqué Mme la présidente, je reprends son rapport de minorité et j'aimerais dire quelques mots.
L'article 54 de la Constitution fédérale prescrit: «Les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération.» Les cantons - cela inclut Genève même s'il a l'honneur d'accueillir de nombreuses organisations internationales, et nous en sommes fiers - n'ont pas à s'immiscer dans la politique extérieure de la Suisse. Cette répartition des prérogatives est évidemment contraignante pour les cantons, mais également pleine de bon sens.
Les relations avec les autres pays nécessitent de faire usage de diplomatie, de disposer d'une vision globale des enjeux ainsi que d'une stratégie d'action. Il n'y a aucun intérêt à ce que les 26 cantons effectuent ce travail qui, c'est évident, dépasse largement les compétences d'un parlement de milice. Pour ces motifs et indépendamment du fond de la résolution 930, la minorité d'alors vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser cet objet.
M. Grégoire Carasso (S). Je ne reviendrai pas sur les propos de l'ancienne minorité qui sont bien connus de ce parlement. Si ces gens n'ont pas envie de voir l'effort formel réalisé à travers cette résolution - laquelle ne s'adresse pas aux Chambres fédérales, mais au DFAE via notre exécutif -, s'ils et elles ne souhaitent pas admettre que ce texte respecte fidèlement l'ordre constitutionnel qui est le nôtre, tant pis pour eux.
J'aimerais remercier la rapporteure de l'ancienne majorité pour ses propos bienveillants sur le relatif décalage de cet objet - ou du moins de sa lettre - entre le moment où nous l'avons déposé en 2020 et aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle vous avez été saisis, chers collègues, d'une proposition d'amendement. Pourquoi le texte garde-t-il toute son importance aux yeux du groupe socialiste ?
La Biélorussie est, comme on a l'habitude de le dire, l'un des plus vieux régimes, l'une des plus vieilles dictatures d'Europe; plus ou moins la seule qui, depuis la chute du Mur en 1989, n'a pas bougé. Loukachenko est toujours là. C'est le seul pays d'Europe centrale et orientale où les services secrets s'appellent toujours le KGB. C'est le seul pays d'Europe et au-delà de l'Oural - le prochain orateur de l'UDC ne dira pas le contraire - qui n'est pas membre du Conseil de l'Europe, à la différence de la Russie. C'est aussi le dernier pays d'Europe qui pratique encore, et de manière intensive, la peine de mort. Et malheureusement, c'est un pays qui, s'agissant des indicateurs de suicide, d'alcool, de commerce illégal ou de nombre d'officiers de police par habitant, détient un triste record sur l'ensemble de ces points.
Et d'ailleurs, petite pique à nos amis libéraux-radicaux ou de l'UDC: qui ne s'y était pas trompé ? Nos camarades de l'extrême gauche lors de la dernière législature, puisqu'ils étaient farouchement opposés à cette résolution; je constate qu'ils auraient pu gagner ici - et ç'aurait été rare - l'un de leurs combats.
Suite à la répression de 2020, suite aux élections présidentielles, l'invasion de l'Ukraine a dramatiquement changé la situation. En effet, on n'entend plus parler de la Biélorussie. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) La question de politique internationale qui consiste à déterminer si elle est encore souveraine aujourd'hui demeure pleine et entière. Des prisonniers politiques - strictement politiques -, il y en avait 650 lorsque ce texte a été déposé; on en est actuellement à 1450. Les élections, parlons-en: on aura une bonne blague l'année prochaine. Appeler, comme la Suisse le fera sans doute...
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Grégoire Carasso. ...à des élections libres avec la participation d'observateurs internationaux sera la moindre des choses. Enfin, la dernière invite ajoutée à travers l'amendement provient du fait que nous souhaitons des conditions favorables en Suisse pour les réfugiés politiques biélorusses qui seront...
La présidente. Merci, c'est terminé.
M. Grégoire Carasso. ...bientôt privés de leur passeport, faute de... (Le micro de l'orateur est coupé. Applaudissements.)
M. Guy Mettan (UDC). Mesdames et Messieurs, il est évident qu'il faut refuser la résolution sur la base des arguments qui ont été donnés à la fois par la rapporteuse de majorité et le rapporteur de minorité. Il n'y a aucune raison de voter ce texte qui est complètement dépassé aujourd'hui. Sur le fond, on nous dit, en employant des grands mots, avec des trémolos dans la voix: «C'est la dernière dictature d'Europe !» Alors je conviens qu'il ne s'agit pas du tout d'une démocratie, on est tout à fait d'accord là-dessus. Cela étant, j'aimerais tout de même corriger quelques éléments.
Savez-vous par exemple que la Biélorussie est le pays qui a le mieux performé pendant la crise du covid, où il y a eu le moins de morts ? Ce sont les chiffres de l'OMS... (Commentaires.) Ce sont les chiffres officiels de l'OMS, Monsieur - vous transmettrez à mon collègue de Senarclens, Madame la présidente ! Et pourquoi ? (Commentaires.) Pourquoi ? Parce que leur système de santé fonctionne, parce qu'ils ont soigné les malades et n'ont pas enfermé les personnes saines, comme on l'a fait trop souvent chez nous. (Commentaires.) Est-ce que je peux m'exprimer, Madame la présidente ? Voulez-vous bien dire à M. de Senarclens de se taire ? Quand il prend la parole, je ne l'interromps pas !
Une voix. Ou qu'il sorte pour discuter.
M. Guy Mettan. Ou qu'il sorte cas échéant !
Une voix. Je vais sortir, effectivement.
M. Guy Mettan. Bonne idée !
La présidente. En effet, si des personnes souhaitent s'exprimer, je les invite à le faire en appuyant sur le bouton, et si elles ne veulent pas écouter le débat, elles peuvent sortir. Poursuivez, Monsieur Mettan.
M. Guy Mettan. Merci. Par ailleurs, pourquoi les Biélorusses soutiennent-ils en majorité - ce n'est pas moi qui le prétends non plus, ce sont des sondages officiels venant des Etats-Unis - leur président ? Parce que ces gens ont subi des massacres durant toute leur histoire: ils ont été décimés par les Russes au XVIe siècle, par les Polonais au XVIIe siècle, par les Suédois au XVIIIe siècle, par Napoléon, puis deux fois par les Allemands. Chaque fois, ils ont perdu 20% à 25% de leur population. Il se trouve qu'ils sont reconnaissants envers leur président, malgré tous ses défauts, et se disent: «Au moins, avec lui, on a la paix; au moins on n'est pas en guerre, il ne nous a pas précipités dans le naufrage.» Ce sont des choses qu'on n'explique jamais chez nous, mais il faut comprendre pourquoi c'est très important là-bas.
Je suis allé deux fois en Biélorussie l'année passée pour des conférences dans des universités, une fois aussi avec deux de nos ambassadeurs - notre ambassadrice à Minsk et un autre ambassadeur basé ici. Pourquoi se rendre sur place ? Parce qu'il est très important de maintenir le dialogue, parce que, malgré sa mauvaise réputation, malgré ses limites, ce pays sert aussi de pont entre l'Est et l'Ouest. Ce sont des aspects essentiels qu'il faut connaître.
On a évoqué l'exemple de Mme Hersche. Eh bien Mme Hersche, qui était en prison, a été libérée. Quand cette résolution a été déposée, on parlait beaucoup de l'affaire Roman Protassevitch, qui se trouvait dans un avion prétendument détourné et qui aurait dû être condamné à mort. Ce M. Protassevitch a été libéré, il est actuellement libre. Il faut également prendre ces éléments en considération. Je vous invite dès lors à refuser cette résolution.
M. Yves de Matteis (Ve). Une majorité de la commission des Droits de l'Homme a voté en faveur de cette résolution; une seule personne ne l'a pas soutenue. (Commentaires.) Notre groupe adoptera quant à lui ce texte. Bien sûr, certaines choses ont changé, d'où l'amendement déposé par l'auteur de l'objet, M. Carasso, ainsi que par Mme Marti. Ces modifications sont tout à fait pertinentes étant donné que la Suissesse Nathalie Hersche a été relâchée - j'ai une date différente - en février 2022, après que la Suisse a envoyé un ambassadeur en Biélorussie. Cela montre que notre pays peut avoir un certain poids, ce qui légitime encore plus cette résolution.
Comme les élections législatives biélorusses vont avoir lieu dans trois semaines - le 25 février 2024, d'après ce que j'ai pu lire - afin de renouveler les 110 membres de la Chambre des représentants de Biélorussie et que Loukachenko a été réélu, l'invite demandant des élections anticipées doit évidemment être supprimée, comme le propose M. Carasso dans son amendement.
L'Association biélorusse des journalistes, dissoute en août 2021, a reçu en 2022 le prix de l'UNESCO pour la liberté de la presse. A l'époque, 24 journalistes étaient incarcérés en Biélorussie et au moins 300 ont été contraints à l'exil; certains le sont encore. Selon le Corruption Perceptions Index (un indice concernant la transparence et la corruption), en 2023 la Biélorussie figurait encore au 37e rang sur le plan international; malheureusement, les choses ne s'améliorent que très lentement, puisqu'en 2022 elle occupait le 39e rang. La situation reste donc très tendue et il est tout à fait clair pour nous que cette résolution doit être acceptée par la plénière, ce que notre groupe va faire dans un instant. Merci, Madame la présidente.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, même si nous allons voter avec l'UDC contre cette proposition de résolution, il ne faut pas compter sur moi pour faire l'éloge du Bélarus ni de son président. Bien évidemment, il est exclu de tolérer les violations répétées des droits de l'homme qui ont lieu dans ce pays.
En revanche, j'aimerais faire une fois de plus l'éloge du fédéralisme, de la répartition des compétences entre les cantons et la Confédération. Mesdames et Messieurs, adresser à l'Assemblée fédérale des résolutions sur des questions de politique extérieure revient à émettre sur une fréquence radio qui ne nous a pas été assignée. (Commentaires.)
Vous vous trompez lourdement quant à l'écho que peuvent trouver ces textes auprès de la Confédération tout comme au poids de la Suisse sur la scène internationale. Nous sommes un pays de huit millions d'habitants qui n'est pas membre de l'Union européenne, qui n'a pas été membre de l'ONU pendant très longtemps et qui, dans le concert des nations, détient une voix probablement plus modeste que ce que vous imaginez.
Mais surtout, ces objets constituent une injure envers le Département fédéral des affaires étrangères. Les auteurs de ces résolutions répétées n'ont absolument aucune idée de ce qu'est la politique extérieure, de ce qu'est la diplomatie, de ce que sont les relations internationales, de ce que sont les relations bilatérales entre la Suisse et l'ensemble des pays du monde.
Mesdames et Messieurs les députés, il suffit de faire une recherche basique sur internet en tapant «relations Suisse-Bélarus» pour trouver un lien direct vers le site internet du Département fédéral des affaires étrangères et constater qu'il y figure un chapitre complet dédié aux relations bilatérales Suisse-Bélarus. Et que peut-on lire sur cette page ? «Le 15 mai 2019, le Conseil fédéral avait décidé de donner à la représentation suisse à Minsk le statut d'une ambassade dans le but d'intensifier les relations bilatérales. Mais les violations graves et systématiques des droits de l'homme perpétrées dans le sillage de l'élection présidentielle controversée du 9 août 2020 pèsent aujourd'hui sur les relations entre la Suisse et le Bélarus, tout comme la décision du pays de permettre à la Russie d'utiliser son territoire comme base arrière dans le cadre de l'agression contre l'Ukraine, lancée le 24 février 2022.»
Mesdames et Messieurs, la Suisse agit d'ores et déjà, elle fait savoir son opinion, elle condamne fermement les violations des droits de l'homme perpétrées au Bélarus par les autorités de ce pays, elle n'a pas besoin de se faire dicter sa politique étrangère par des diplomates amateurs ou de pacotille. Il faut donc refuser cette résolution. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Nous sommes saisis d'un amendement déposé par M. Grégoire Carasso et Mme Caroline Marti qui annule et remplace la seconde invite comme suit:
«à solliciter le Conseil fédéral afin que la Suisse:
- condamne les violations massives des droits humains qui y sont commises et contribue à une transition pacifique vers une démocratie et un Etat de droit;
- appelle à la libération des prisonniers politiques en Biélorussie;
- appelle à des élections équitables avec la participation d'observateurs internationaux;
- garantisse des conditions favorables aux réfugiés politiques du Bélarus en Suisse.»
La présidente. Je mets cette modification aux voix, puis nous nous prononcerons sur la prise en considération de la résolution.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 27 oui.
Mise aux voix, la proposition de résolution 930 est rejetée par 55 non contre 28 oui (vote nominal).
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons bien travaillé pendant cette séance, nous allons prendre une grande pause bien méritée. Je vous retrouve à 16h pour la suite de nos travaux.
La séance est levée à 15h35.