République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 12973-A
Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Adrien Genecand, Alexis Barbey, Murat-Julian Alder, Fabienne Monbaron, Yvan Zweifel, Pierre Nicollier, Jacques Béné, Céline Zuber-Roy, Serge Hiltpold, Beatriz de Candolle, Raymond Wicky, Jacques Apothéloz, Alexandre de Senarclens, Jean-Marc Guinchard, Jean-Charles Lathion, Jacques Blondin, Christina Meissner modifiant la loi sur l'énergie (LEn) (L 2 30) (Favorisons les récupérations de chaleur pour arriver à la société à 2000 watts)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 19, 20 mai, 2 et 3 juin 2022.
Rapport de majorité de M. Rémy Pagani (EAG)
Rapport de minorité de M. Pierre Eckert (Ve)
M 2759-A
Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Adrien Genecand, Alexis Barbey, Murat-Julian Alder, Fabienne Monbaron, Yvan Zweifel, Pierre Nicollier, Jacques Béné, Céline Zuber-Roy, Serge Hiltpold, Beatriz de Candolle, Raymond Wicky, Jacques Apothéloz, Alexandre de Senarclens, Jean-Marc Guinchard, Jean-Charles Lathion, Jacques Blondin, Christina Meissner : Un cadre réglementaire assaini pour favoriser les récupérations de chaleur pour arriver à la société à 2000 watts
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 19, 20 mai, 2 et 3 juin 2022.
Rapport de M. Rémy Pagani (EAG)

Premier débat

Le président. Nous abordons notre dernière urgence, les points liés PL 12973-A et M 2759-A. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Je passe la parole à M. Rémy Pagani, rapporteur de majorité sur le PL 12973-A et rapporteur sur la M 2759-A.

M. Rémy Pagani (EAG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vais parler du projet de loi, parce que la motion... Voilà.

Pour une fois, je suis rapporteur de majorité. (Commentaires.) Je tiens à le signaler - c'est historique ! (Rires.) Je vais en profiter pour inscrire ce projet dans la réalité heureuse de la transition énergétique et pour vous mentionner l'exemple significatif de ce qui se passe à Meyrin, où les Services industriels de Genève ont mis en place un système, une boucle vertueuse: on puise l'eau dans la nappe phréatique - on peut discuter sur l'origine, nappe phréatique, Rhône ou un affluent du Rhône, mais peu importe - pour la faire monter vers la zone industrielle, prendre la chaleur émise par une grande multinationale du nom de HPE - certains traduiront -, la donner à l'hôpital de la Tour et ainsi chauffer les chambres, puis la faire aller vers le nouveau quartier des Vergers et chauffer l'entièreté, Mesdames et Messieurs, l'entièreté des logements, et enfin la déverser dans le lac des Vernes avant qu'elle retourne au Rhône, avec une économie d'énergie extrêmement importante.

Ce projet de loi s'inscrit donc... Et je remercie son auteur - j'en profite pour dire qu'enfin le PLR se lance dans la transition énergétique, et j'en suis très content, nous en sommes très contents... (Commentaires.) ...et M. Zweifel nous répondra plus tard, j'imagine. Ce projet vise à récupérer la chaleur émise dans toutes les zones industrielles. Il y a eu des expériences moins heureuses que celle menée par les autorités communales de Meyrin avec les Services industriels, le canton et les associations d'habitants, des expériences qui ont échoué, si j'ose dire - à Plan-les-Ouates par exemple, la Fondation pour les terrains industriels s'active aussi. Par ailleurs, nous sommes allés visiter l'entreprise Infomaniak - je le signale parce que j'y suis depuis des années: nous sommes très contents d'avoir cette entreprise, dont le directeur est un homme assez remarquable. (Remarque.) Nous avons été assez stupéfaits de voir à quel point cette entreprise développait ses data centers, qui produisent de la chaleur qui s'évapore et s'en va chauffer l'espace, chauffer l'atmosphère, participant malheureusement à l'effet de serre.

Présidence de Mme Céline Zuber-Roy, première vice-présidente

Ainsi, ce projet de loi vise à faciliter la récupération de chaleur. Il y a eu une petite divergence entre M. Pierre Eckert, enfin, les Verts, et la majorité - et je tiens tout de suite à le dire pour le Mémorial, la petite divergence consiste à déterminer s'il faut inscrire dans la loi le fait de ne pas subventionner les entreprises qui utiliseraient de l'électricité produite par du charbon et la revendraient, la remettraient à disposition pour faire quelque chose d'autre. La boucle ne serait plus vertueuse, elle serait vraiment catastrophique. Sur ce point, nous nous sommes tous entendus, mais j'ai accepté de prendre ce rapport de majorité dans la mesure où j'ai proposé...

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Rémy Pagani. Oui, merci beaucoup, Madame la présidente de séance. ...un compromis, en relevant - je tiens à le dire pour le Mémorial - que la commission, dans sa majorité, laisse au département la liberté de répartir le coefficient applicable à la subvention selon l'origine de l'électricité; la commission laisse le soin au Conseil d'Etat de voter le règlement idoine, afin de garantir que l'on consomme localement, sans l'inscrire dans la loi. Comme ça, les choses sont très claires. Nous n'avons pas voulu inscrire cette obligation dans la loi, mais la majorité soutient cette manière de faire. Ensuite, on verra si une majorité se dégage pour soutenir la proposition des Verts - je trouverais aussi tout à fait normal de l'inscrire, pourquoi pas, ça ne me dérange pas; mais disons que ça permettait de conclure sur une bonne entente dans la commission, c'est pour ça que j'ai proposé cet accord à l'amiable. Merci de votre attention.

M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de minorité. Je tiens tout de suite à préciser que je suis rapporteur de minorité uniquement sur le projet de loi et pas du tout sur la motion, que nous soutiendrons. Nous pensons effectivement, en tant que Verts, que récupérer la chaleur issue des activités informatiques, industrielles et artisanales, ce qui est l'objet de ce projet de loi, est une intention louable, que nous soutenons volontiers sur le principe. Cependant, le projet de loi prétend arriver à la société à 2000 watts grâce à cela, ce qui nous paraît une ambition bien prétentieuse.

Si j'ai pris ce rapport de minorité, c'est pour mettre en avant un élément qui est important pour les Vertes et les Verts, que nous considérons comme identitaire: celui de considérer les systèmes dans leur globalité et pas seulement sur la fin de chaîne, avec la récupération. La récupération de chaleur doit être considérée de la même façon que le recyclage des déchets. Comme le prévoit la loi sur les déchets, il est essentiel non seulement de minimiser la quantité de déchets produits, mais aussi d'en assurer la qualité, à l'aide par exemple d'un tri efficace en amont. Nous insistons sur le fait que la récupération de l'énergie en bout de chaîne ne suffira de loin pas à la tâche, mais qu'il faudra également mettre l'accent sur son utilisation intelligente et sur la sobriété, la meilleure énergie restant celle qu'on ne consomme pas.

Il nous semble qu'avant de recycler la chaleur excédentaire provenant d'une activité, on doit se demander si l'énergie primaire - souvent l'électricité - est utilisée à bon escient. Rappelons que l'électricité est une énergie de grande valeur permettant des rendements élevés. Dans le cas d'un data center, il nous semble important de mettre en oeuvre des technologies qui dégagent aussi peu de chaleur que possible avant de se lancer dans la récupération de chaleur. Et surtout, que la production de l'électricité soit propre.

En fin de compte, ce rapport de minorité propose un amendement, que j'ai déjà présenté en commission, mais qui a été refusé par la majorité - paradoxalement, le rapporteur de majorité a accepté mon amendement, on verra donc ce qu'il vote en fin de compte. Cet amendement propose simplement que les méthodes de production de l'énergie primaire, utilisée par exemple par un data center, soient propres et locales - ce qui devrait parler au MCG, puisqu'on demande que ces énergies soient locales comme condition pour obtenir un subventionnement. Nous demandons en conséquence d'introduire dans le projet de loi l'amendement que j'avais déjà proposé en deuxième débat, et qui est légèrement reformulé ici. Je vous lis cet amendement:

«Art. 17A, al. 2 (nouveau, les al. 2 et 3 anciens devenant les al. 3 et 4)

2 L'obtention de subvention ou de dégrèvement pour des activités utilisant l'électricité comme source tient compte de son origine et de son type.»

Bien entendu, c'est quelque chose de relativement souple. Il n'y a pas d'obligation du tout. Ce qu'on dit simplement, c'est qu'il faut «tenir compte». Vous pouvez rétorquer que cela peut se faire de façon réglementaire. Pour nous, les Verts, comme je vous l'ai dit, c'est un élément important et nous préférons l'inscrire dans la loi. L'amendement n'interdit en rien de récupérer la chaleur d'une activité qui utiliserait une source sale, mais ce que nous demandons, c'est qu'on soit réticent dans son subventionnement. Le groupe des Vertes et des Verts trouverait totalement excessif le fait que les entreprises qui se fournissent sur le marché international - puisque c'est possible, à partir du moment où vous dépassez un certain seuil de consommation -, dont la production... (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Je continuerai sur le temps du groupe ! ...peut être d'origine fossile ou nucléaire... (Brouhaha.)

La présidente. Monsieur le rapporteur, un instant - excusez-moi, vu que je vous ai déjà interrompu ! Est-ce qu'il serait possible que les discussions se fassent à l'extérieur de la salle ? Monsieur Pistis, je sais que vous ne m'écoutez pas, mais ce serait gentil ! Merci ! Pareil chez les socialistes, si c'était possible, Monsieur Thévoz ! (Commentaires.) N'hésitez pas à sortir si vous voulez continuer à discuter ! C'est à cela que je vous invitais, en fait. (Remarque. Rire.) Merci ! Allez-y, Monsieur le rapporteur.

M. Pierre Eckert. Merci beaucoup de faire régner la discipline, Madame la présidente de séance ! Je disais donc que le groupe des Vertes et des Verts trouverait excessif le fait que des entreprises qui se fournissent sur le marché international - dont la production peut être d'origine fossile ou nucléaire - bénéficient d'un triple avantage: premièrement, en se fournissant sur un marché de ce type, ce qui donnerait accès à des tarifs nettement plus avantageux, les énergies sales étant souvent meilleur marché que les énergies propres; le deuxième avantage, bien entendu, c'est celui de pouvoir vendre la chaleur, puisque cette chaleur, qui est mise à la disposition, par exemple, des réseaux de chaleur de SIG, peut être valorisée et vendue; le troisième avantage, à savoir un subventionnement, serait introduit par ce projet de loi. Nous trouvons que ce triple avantage serait excessif.

La protection du climat et la sécurité de la population exigent d'agir de façon globale et de ne pas considérer seulement la fin du processus énergétique. Les énergies initiales doivent être propres, sinon le procédé de récupération de chaleur qu'on essaie de mettre en place ici pourrait être assimilé à de l'écoblanchiment - ce que les Anglais appellent du «greenwashing». Nous vous recommandons en conséquence d'accepter l'amendement que je vous ai lu tout à l'heure avant d'accepter la loi dans son ensemble. Je vous remercie.

M. Alberto Velasco (S). Tout d'abord, je tiens à féliciter ce chef d'entreprise, parce qu'il aurait très bien pu continuer à diffuser la chaleur pendant deux, trois ou quatre ans, et rien ne l'obligeait à faire ça. C'est un chef d'entreprise qui a été sensibilisé à cette question et qui s'est dit qu'il aimerait bien récupérer cette chaleur. Il est logique que l'Etat tienne compte de cela. D'autres ne le font pas, lui le fait.

Là, le problème - je n'ai pas très bien compris... Là, on n'est pas en aval, on est en amont. (Remarque.) Ou plutôt, on est en aval, effectivement. En amont, il y a l'énergie. Mais si vous utilisez l'énergie du charbon ou du nucléaire pour alimenter les serveurs, à la fin, vous avez une chaleur qui est dégagée. Alors M. Eckert nous dit que ce n'est pas bien de l'aider, parce qu'il utilise cette énergie qui n'est pas propre et que, par conséquent, il ne faut pas le subventionner, il faut le pénaliser. Donc moi, si je suis chef d'entreprise, je dirai: «Si vous me pénalisez, je ne récupère pas la chaleur !» Et qui aura gagné ? Personne ! Je crois qu'il faut séparer les deux choses.

Il faut à mon avis voter ce projet de loi. Il faut récupérer toutes les énergies qui, transformées, dégagent de la chaleur, pour le climat et parce qu'il faut justement récupérer l'énergie qui peut servir au chauffage notamment, et puis, ma foi, ensuite, il y a toute une autre politique mise en place notamment par les SIG pour inviter ces entrepreneurs à essayer d'utiliser de l'énergie, entre guillemets, «bleue» ou «verte»; mais lier les deux, cela revient à pénaliser des initiatives qui sont franchement, disons-le, louables.

Alors évidemment que nous, les socialistes, nous voterons ce projet de loi, parce que cela encourage et cela devrait encourager d'autres entrepreneurs - car, pour ces personnes, c'est un investissement à faire. Elles peuvent choisir: «Si on ne m'aide pas, je préfère mettre mon argent ailleurs !» Et cette attitude consistant à récupérer de la chaleur ne sera donc pas récompensée. Par conséquent, je considère qu'il faut subventionner ces entrepreneurs, les aider à aller de l'avant, car ils peuvent utiliser le moins dépensé pour investir ailleurs. C'est positif économiquement parlant. Monsieur Eckert - vous transmettrez, Madame la présidente -, je suis d'accord avec vous, mais enfin, encourager ces personnes à utiliser d'autres énergies fait partie d'une autre politique.

Il y a aussi une chose que j'ai comprise: d'après les Services industriels, mais je me trompe peut-être, pratiquement la totalité de ce canton se fournit en énergie verte... (Remarque.) Ou renouvelable. Le problème ne se pose donc pas, parce qu'à terme, il n'y aura que de l'énergie renouvelable. Par conséquent, votre amendement est superfétatoire. Le parti socialiste votera donc ce projet de loi et, pour ce qui est de l'amendement, je proposerai - je ne sais pas pour mes collègues - en tout cas l'abstention. Merci.

M. André Pfeffer (UDC). Ces deux textes proposent d'encourager les actions liées à la récupération de chaleur provenant de serveurs informatiques, des activités industrielles et des activités arsenal... (Rires. Commentaires.) ...artisanales. Ces deux textes proposent surtout la possibilité de chauffer des milliers de logements grâce à cette récupération de chaleur.

Le PL 12973 souhaite encourager ces actions via des programmes de subventions pour la rénovation ou par un dégrèvement fiscal. De plus, la M 2759 propose de réduire les obstacles réglementaires et de développer un cadre incitatif.

L'impact de ces deux textes est très important. Je cite l'un des considérants de la motion: «[...] la société Infomaniak [...] va optimiser son parc de serveurs informatiques de sorte à pouvoir en récupérer la chaleur et ainsi chauffer tout un quartier [...]» L'Union démocratique du centre votera ces deux textes. Merci de votre attention.

M. Adrien Genecand (PLR). Beaucoup de choses doivent être rappelées, mais effectivement, je crois que le plus ironique dans ce débat, c'est qu'on assiste, aujourd'hui, au parlement, au fait que le groupe des Verts, dans une position complètement absurde, veut empêcher de réaliser ce que sa magistrate nous explique sur l'économie circulaire à longueur de temps depuis son élection. Donc, l'économie circulaire, c'est bien, quand c'est décrété par le département de Mme Fischer; quand il y a une volonté de la pratiquer en matière artisanale et industrielle par l'ensemble des acteurs, là, ça ne le serait plus, sous prétexte que - et là, on va devoir ouvrir un chapitre qui peut être douloureux pour ceux qui se prétendent des scientifiques - ce qui aurait à l'origine généré la chaleur pourrait être du fossile et que, de facto, on serait dans une logique de greenwashing.

Alors peut-être faut-il commencer par rappeler à M. Eckert et consorts que, dans ce canton, on achète 60% de notre énergie; on en produit 40%. 60% est acheté, à la France et à l'Allemagne, si on en croit les statistiques suisses, et je vous encourage vivement... «Le Temps» a développé une superbe application qui vous permettra de voir qu'au quotidien, on achète beaucoup. On vit de l'énergie nucléaire et on achète en parallèle beaucoup, à l'Allemagne et à la France. Et, Mesdames et Messieurs, quand on achète à l'Allemagne et à la France, eh bien vous préférez acheter à la France; cela peut paraître surprenant pour le MCG. Il se trouve que l'Allemagne, c'est d'abord du charbon et des énergies fossiles, redéveloppées à grands frais après l'arrêt des centrales nucléaires; la France, cela reste pour une bonne partie de l'énergie nucléaire.

Il se trouve que le greenwashing, Monsieur Eckert, c'est vous-même et vos semblables qui le pratiquez dans ce canton depuis que vous existez, en labellisant l'énergie comme étant propre, selon des critères que vous ne définissez jamais, parce qu'en fait, quand on achète de l'énergie à la France, on achète du nucléaire, alors qu'a priori, la constitution interdit la construction de centrales dans ce canton. Ceux qui «greenwashent» depuis quarante ans sur cette question pour se faire élire, Monsieur Eckert, c'est vous !

Je m'arrêterai là, pour vous dire que ce projet de loi ne traite pas de ça, parce que sinon, ça va être trop douloureux. Ce projet de loi traite juste de l'incapacité de l'Etat à faire ce qu'il doit faire, c'est-à-dire, quand les acteurs produisent de l'énergie, notamment dans le domaine industriel... Infomaniak a été cité par Alberto Velasco et je l'en remercie; ce projet de loi vient en fait d'Infomaniak: cette entreprise, subissant un surcoût qu'elle voulait payer, parce qu'elle ne comprenait pas qu'elle allait devoir, d'une certaine manière, rejeter de la chaleur pour rien, s'est dit: «Ce n'est pas possible, il faut qu'on fasse quelque chose !» Cela leur a coûté des millions de plus. Ils l'ont fait par conviction personnelle. L'Etat ne les a pas soutenus, à aucun moment. Ce projet de loi vise simplement à vous rappeler qu'on peut faire des choses simples, avec les acteurs qui, au quotidien, font l'économie de ce canton, et que notre rôle est de les encourager. Pas de faire des théories, pas de faire du greenwashing. Merci.

Mme Claude Bocquet (PDC). Je crois que tout a été dit sur ce projet de loi, qui est très bénéfique pour notre atmosphère, puisque, pour l'instant, la majorité de ces calories sont dispersées dans l'air, alors qu'elles pourraient chauffer des quartiers entiers et les bâtiments avoisinants. Par ailleurs, je pense que c'est un peu stupide de proposer un amendement qui risquerait de signifier aux entreprises qu'on ne les encourage pas parce que leur énergie primaire n'est pas la bonne et qu'on préfère du gaspillage. Je ne comprends pas ce point de vue et je vous encourage vivement, tout comme le PDC, à accepter ce projet de loi et à refuser l'amendement. Merci.

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, effectivement, on a frisé la perfection ! Il a fallu un non pour briser cela. Après le brillant exercice de tout à l'heure sur les panneaux solaires, voilà un projet de loi de bon sens, et on ne doit pas lier, comme l'a dit tout à l'heure M. Velasco - vous transmettrez, Madame la présidente de séance... L'amendement des Verts est complètement superfétatoire ! Il ne sert à rien dans ce cadre-là. D'autant plus que, pour la plupart, les entreprises prennent leur énergie aux Services industriels de Genève, et vous savez comment ils nous garantissent la qualité renouvelable de l'électricité qu'ils fournissent. Et effectivement, mieux vaut récupérer et utiliser toute cette chaleur produite par le fait de l'activité - on a parlé d'Infomaniak, mais il y a probablement d'autres exemples - plutôt que de la gaspiller en la rejetant dans l'atmosphère ! On n'a donc pas besoin de rajouter encore des cautèles ou des exigences qui vont finalement rendre l'opération complètement inefficace. Une fois de plus, le mieux est l'ennemi du bien ! Le mieux est l'ennemi du bien ! Je vous invite donc bien évidemment à voter ce projet de loi et à rejeter tous les amendements.

M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de minorité. J'aimerais juste préciser que l'amendement que nous proposons n'interdit en rien de récupérer une chaleur issue d'énergies qui ne seraient pas propres. Simplement, ce que nous souhaitons, c'est qu'on ait une certaine retenue dans le subventionnement. Une fois de plus, l'amendement n'interdit pas le subventionnement, mais dit simplement d'en tenir compte. Je ne vois pas... Ce n'est pas extrêmement restrictif non plus.

Vous dites, Monsieur Sormanni - vous lui transmettrez, Madame la présidente -, que la plupart des entreprises se fournissent chez SIG... Tant mieux ! Si vous vous fournissez chez SIG, vous aurez la subvention sans aucun problème !

Maintenant, je ne sais pas très bien ce que je dois dire sur l'affirmation de M. Genecand, selon qui les énergies vendues par SIG, que ce soit la bleue, la verte ou la jaune, ce serait du greenwashing. Je n'en sais rien, je ne suis pas le porte-parole publicité de SIG, mais je suppose qu'ils ont quand même un certain nombre de critères - je pense que c'est dans leurs prospectus - selon lesquels l'énergie verte contient une certaine proportion d'énergie locale et produite de façon verte. Mais, une fois de plus, je ne suis pas le porte-parole de SIG.

Simplement, ce qu'il faut voir, c'est aussi que quand vous êtes au-dessus d'un certain seuil de consommation, vous avez la possibilité de ne pas passer par SIG; vous avez la possibilité de vous approvisionner de n'importe quelle façon sur le marché international, et à travers cet amendement, c'est simplement une cautèle que je souhaitais ajouter. Il s'agit de dire que vous pouvez vous approvisionner à bon compte sur le marché international, très loin de chez nous, mais qu'il faudra alors être quand même plus restrictif sur les subventions. C'est le seul sens de cet amendement.

J'aimerais aussi rappeler à mon collègue socialiste que l'amendement, que j'ai proposé à la commission de l'énergie, a été accepté par 1 Ensemble à Gauche, 3 socialistes et 2 Verts. Si vous avez retourné votre veste depuis, ce n'est pas mon problème !

Une voix. Ouh là là ! (Commentaires.)

La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur. Je donne la parole à M. Adrien Genecand pour quarante-cinq secondes.

M. Adrien Genecand (PLR). Merci, Madame la présidente. Le rapporteur de minorité fait semblant de ne pas être responsable de quoi que ce soit et de ne rien comprendre. Il est membre de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève. Partant de ça, est-ce qu'il faut constater que c'est le niveau intellectuel nécessaire pour surveiller une entité publique qui réalise plus d'un milliard de chiffre d'affaires ? Le pas ne sera pas franchi pour ma part, mais il est un peu désolant de constater qu'on est là face à quelqu'un qui ne voit pas que ce n'est pas parce qu'on vous met un certificat et qu'on vous fait payer un prix que - vous le savez bien, j'espère, puisque vous êtes a priori scientifique... L'électricité et ce qui arrive dans votre ampoule, vous ne pouvez pas le déterminer. Je vous remercie.

La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole va au rapporteur de minorité pour cinquante-trois secondes.

M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de minorité. Merci, Madame la présidente. Cela suffira largement. Je n'ai pas envie de faire un grand débat sur la question. Bien entendu, on ne pourra pas savoir pour chaque électron - je ne veux pas entrer dans un débat scientifique - s'il vient du barrage de Verbois, ce qui serait considéré comme vert, ou d'ailleurs. Simplement, pour être crédible - et c'est ce que nous vérifions également - SIG ne doit pas vendre plus d'énergie verte qu'il n'en achète ou qu'il n'en produit. C'est la seule chose que nous devons vérifier. Je ne dis pas que c'est facile, mais je fais confiance à SIG.

La présidente. Merci. Pour conclure, avant le Conseil d'Etat, je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Rémy Pagani.

M. Rémy Pagani (EAG), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je pense que ce dossier en particulier est extrêmement délicat. Je prends deux exemples. La personne qui s'est exprimée au nom de l'UDC dit que les logements sont chauffés par les rejets de chaleur. C'est faux. Les logements des Vergers sont chauffés par une pompe à chaleur, alimentée par des cellules photovoltaïques qui se trouvent sur le toit. Et c'est seulement parce que l'eau est chauffée, en l'occurrence par HPE, par la zone industrielle, avec ses rejets, que la pompe à chaleur peut fonctionner d'autant mieux. 80% des logements sont chauffés par la pompe à chaleur, comme d'ailleurs 100% des Minoteries, soit 250 logements.

Je prends l'autre exemple de M. Genecand, qui nous affirme qu'on fait du greenwashing. La totalité des électrons vendus par les Services industriels sont certifiés. Et pourquoi le canton - parce que «Le Temps» fait des remarques... M. Eckert vient de le dire: c'est que d'autres vont se servir sur le marché libre et achètent des électrons d'origine nucléaire ou qui viennent d'Allemagne, produits par du charbon - pour certains, jusqu'en 2027. (Remarque.)

Il faut donc connaître les choses, et pour résoudre ces problèmes, il faut avoir une démarche industrielle, qui vise à rationaliser, à comprendre les problématiques et à éviter un certain nombre d'erreurs, parce que, par exemple, la Fondation pour les terrains industriels a fait des erreurs en soutenant une boucle à Plan-les-Ouates - je le sais, parce que je fais partie de ceux qui ont soutenu cette proposition -, mais c'est tellement cher de mettre en place des tuyaux pour aller chercher la chaleur dans des industries... Parce que je vous rappelle que produire de la chaleur, enfin, de l'électricité, cela représente 5% ou 6% du chiffre d'affaires: c'est minime. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Par conséquent, on ne va pas, avec 5% ou 6%, investir dans des tuyaux qui coûtent le lard du chat. Cela veut donc dire que c'est l'entreprise publique qui doit mettre en place ces réseaux, et le canton l'a bien compris, puisqu'il a confié aux Services industriels la mise en place de réseaux structurants...

La présidente. Il vous faut conclure, s'il vous plaît.

M. Rémy Pagani. ...et vous avez voté tous ces réseaux. Par conséquent, je vous invite à être prudents quand vous affirmez que M. Pierre Eckert...

La présidente. Merci.

M. Rémy Pagani. ...et les Verts font du greenwashing.

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, le Conseil d'Etat accepte parfaitement ce projet de loi, avec les précisions importantes qui ont été apportées en votre nom, au nom de la commission, par le rapporteur de majorité, sur la possibilité réglementaire du Conseil d'Etat de bien clarifier l'origine de cette énergie et d'avoir par conséquent une cohérence entre ces mesures de rachat de chaleur, qui sont pertinentes, et la stratégie de la transition énergétique qui requiert une production d'énergie durable. Avec ces précisions-là, ce projet de loi est donc extrêmement bienvenu.

Maintenant, j'aimerais profiter de ce débat pour rebondir sur la question de l'origine, qui a été soulevée par le député Genecand et qui est pertinente: en effet, durant cette crise énergétique, qui est une crise non pas écologique, mais vraiment d'approvisionnement - liée à la guerre, à la production de nos voisins français ainsi qu'à la météo - on voit à quel point la question du volume énergétique concerné est fondamentale et à quel point nous dépendons de nos voisins, notamment européens.

Alors comment concilier cela avec le fait que SIG, effectivement, depuis des années, communique sur ce point - nous avons atteint le 100% d'énergie renouvelable en 2017, cela a été progressif - et dise: «Nous distribuons une énergie 100% renouvelable» ? Pour cette raison, il faut peut-être ne pas parler d'électrons, c'est-à-dire que la référence à un approvisionnement, à une origine contrôlée, un peu comme le label GRTA... Quand nous avons, que sais-je, un poulet GRTA, on sait où il a été produit, et c'est bien matériellement ce poulet-là qui se retrouve dans notre assiette, et pas un autre poulet qui vient d'ailleurs. Cette traçabilité, qui est possible avec un produit agricole, ne l'est pas avec l'électricité. En cela, M. Genecand a raison. Ce n'est physiquement pas possible, c'est-à-dire que nous consommons par exemple en ce moment même des électrons produits physiquement dans un environnement relativement proche - qui peuvent provenir du barrage de Verbois - ou, dans certains cas, en fonction de l'heure et de la météo de la journée, effectivement, chez nos voisins français. Par conséquent, si on arrivait à prendre un électron qui est arrivé dans cette ampoule ici et à regarder le tampon qu'il a sur sa tête, on le situerait peut-être un peu plus loin. Mais ce n'est pas ainsi que fonctionnent les certificats, et, dans ce sens-là, il est abusif de dire que la stratégie de SIG relève du greenwashing.

Pourquoi ? Il faut considérer que les kilowatts-heures ainsi distribués sont comme de l'argent - et je pense qu'un député PLR sait que l'argent n'a pas d'odeur ! (Rires.) Par exemple: si M. Genecand, pour prendre un exemple entre nous... (Rire.) ...sort de son porte-monnaie un billet de 10 francs...

Une voix. C'est pas assez !

M. Antonio Hodgers. ...et qu'on l'analyse, on trouverait peut-être sur ce billet des traces... (Remarque.) ...que sais-je, de drogue... (Exclamation.) ...parce que ce billet-là serait passé par un dealer, qui aurait acheté un sandwich...

Une voix. Eh ben voilà !

M. Antonio Hodgers. ...juste avant M. Genecand dans un magasin et aurait payé avec ce billet, que M. Genecand aurait reçu en retour de monnaie. Est-ce que M. Genecand serait dans l'illégalité ? Bien sûr que non ! (Remarque. Rires.) Parce que ce qui compte, ce n'est pas le support, mais bien le certificat attestant que le revenu de M. Genecand est parfaitement légal - ce qui est tout à fait le cas, bien évidemment ! (Commentaires. Rires.) A partir de là, il faut donc considérer que les certificats d'origine de SIG correspondent au volume de gigawatts-heures distribués par l'entreprise, comme un ménage a son budget, dont l'utilisation au quotidien correspond à ce que le ménage gagne. Ce n'est pas le support lui-même - ici, le billet de banque - qui pourrait incriminer son titulaire, mais bien l'origine des fonds.

Par conséquent, si on comprend ce phénomène-là - que l'on comprend tous en parlant d'argent -, on doit aussi pouvoir le saisir s'agissant de kilowatts-heures. Je n'utiliserais donc pas l'expression d'électrons, parce que cela fait penser à GRTA, aux produits agricoles qui, eux, sont traçables. L'électron ne l'est pas, mais cela ne veut pas dire pour autant que l'énergie produite et distribuée par SIG ne soit pas 100% renouvelable - elle l'est. Pour le dire autrement, si l'ensemble des électriciens de Suisse et d'Europe étaient comme SIG, le marché serait 100% renouvelable. Et c'est bien cela, le problème: c'est qu'il existe d'autres stratégies, basées sur le fossile et sur le nucléaire, ce qui fait que les électrons se mélangent. Ne crachons donc pas sur notre succès industriel avec SIG ! Nous sommes un des cantons exemplaires quant à cette stratégie-là. Elle n'est pas parfaite, elle ne nous rend pas indépendants du point de vue de l'électricité, mais c'est un système qu'il vaut la peine de défendre. En l'état, je vous remercie d'adopter ce projet de loi tel que défendu par le rapporteur de majorité.

La présidente. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote d'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 12973 est adopté en premier débat par 89 oui (unanimité des votants).

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement de M. Pierre Eckert à l'article 17A:

«Art. 17A, al. 2 (nouveau, les al. 2 et 3 anciens devenant les al. 3 et 4)

2 L'obtention de subvention ou de dégrèvement pour des activités utilisant l'électricité comme source tient compte de son origine et de son type.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 49 non contre 25 oui et 11 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 17A (nouveau) est adopté.

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 12973 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 81 oui contre 2 non et 6 abstentions (vote nominal).

Loi 12973 Vote nominal

La présidente. J'ouvre maintenant le scrutin sur la M 2759.

Mise aux voix, la motion 2759 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 88 oui (unanimité des votants) (vote nominal).

Motion 2759 Vote nominal