République et canton de Genève

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IN 178-B
Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier l'initiative populaire 178 « Pour la réduction de l'impôt sur les véhicules »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 1er et 2 septembre 2022.
Rapport de majorité de M. Grégoire Carasso (S)
Rapport de première minorité de M. Christo Ivanov (UDC)
Rapport de deuxième minorité de M. Sandro Pistis (MCG)

Débat

Le président. Nous poursuivons avec l'IN 178-B, classée en catégorie II, cent minutes. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Grégoire Carasso.

M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. La salle étant à présent bien chauffée... (Rires.) ...je vous propose, sans transition, d'aborder cette initiative 178 ainsi que la position du Conseil d'Etat à son égard.

Dans le cadre de ses travaux, la commission fiscale a entendu les initiants, l'office cantonal des véhicules, le Groupement transports et économie, la Coordination transports et déplacements, le chef du département des infrastructures - le conseiller d'Etat Serge Dal Busco - et le Touring club suisse, section Genève. Il est question de la réduction de l'impôt sur les véhicules. Le texte a le mérite de la clarté. Ainsi que l'a expliqué notre bien-aimé collègue Stéphane Florey au nom des initiants à la commission fiscale: «L'environnement, on s'en fout !» (Rires.) Eh oui, ce n'est pas la préoccupation des initiants. Leur préoccupation est la suivante: diminuer de moitié l'impôt sur les véhicules. Que vous rouliez dans un petit véhicule propre ou avec un tank de trois tonnes au centre-ville, peu importe: l'UDC veut baisser l'impôt sur les véhicules, tous types confondus.

Deux raisons sont avancées par les initiants. La première est statistique. Selon eux et selon leurs statistiques, Genève serait l'un des cantons les plus chers en la matière. Pour arriver à cette démonstration évidente, ils ont pris, je cite, «au hasard certains véhicules pour comparer leur taxation dans différents cantons, ce qui est la seule comparaison possible si on veut être objectif». C'est ainsi que les initiants sont arrivés à un résultat qui leur semblait convaincant: à Genève, on paie trop d'impôts sur les véhicules. Par ailleurs, l'Association des services des automobiles, qui n'est pas exactement issue des milieux militants anti-bagnoles, publie une statistique régulière, et le canton de Genève se situe très exactement dans la moyenne - 100 sur l'indice. Genève n'est pas un enfer fiscal, à tout le moins sur le volet de l'impôt sur les véhicules, mais, selon les initiants, c'est toujours trop cher.

La deuxième raison avancée par les initiants, c'est l'espace public. L'espace public dédié aux voitures ayant à leurs yeux fortement diminué, il faudrait par conséquent diminuer aussi l'impôt sur les véhicules. Je suggère aux initiants de ne pas trop pousser cet argument, parce qu'il pourrait être tentant, dans certains milieux, de supprimer l'impôt sur les véhicules, et par là même, de supprimer les transports individuels motorisés en ville et dans le canton ! (Commentaires.)

Une voix. Anticonstitutionnel !

M. Grégoire Carasso. C'est un argument assez spécieux qui consiste à dire: on a moins de place, on veut payer moins d'impôts !

En tous les cas, ces deux arguments ont eu quelques difficultés à convaincre au-delà des rangs de l'UDC et du MCG, puisque j'ai le plaisir de représenter - ce qui nous distingue un petit peu de la configuration précédente - une majorité qui vous invite à refuser cette initiative et à lui opposer un contreprojet, une majorité qui va d'Ensemble à Gauche jusqu'au PLR. Soyez heureuses, soyez heureux !

Le contreprojet qu'il resterait - qu'il restera, le cas échéant - à établir selon les paramètres qui se sont dégagés au cours des travaux de la commission fiscale devrait, aux yeux de cette majorité, s'articuler autour de la santé publique, de l'évolution technologique, de l'environnement et des objectifs du plan climat. Autrement dit, favoriser les véhicules qui ont le moins d'externalités négatives et, enfin, viser une forme de neutralité fiscale, exercice par ailleurs assez périlleux, puisque cette réalité est dynamique et que cet impôt vise précisément à modifier le parc des véhicules.

Pour toutes ces raisons, cette large majorité vous invite à refuser cette initiative et à lui opposer un contreprojet dans les douze mois qui suivent. Merci de votre attention.

Une voix. Bravo !

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. L'initiative 178 est intitulée «Pour la réduction de l'impôt sur les véhicules». J'aimerais rappeler que notre constitution cantonale, en son article 190, alinéa 3, garantit la liberté individuelle en matière de choix du mode de transport. Tous les modes de transport sont indispensables. Nous n'avons pas l'intention, au travers de cette initiative 178, de déroger à cette obligation constitutionnelle.

Malgré cela, l'Etat supprime régulièrement les infrastructures dévolues aux transports individuels motorisés, tout le monde l'aura remarqué, avec certaines autoroutes à vélos. On peut prendre l'exemple de Chantepoulet: c'est impressionnant de voir comment on a diminué la part du trafic automobile et comment on restreint de plus en plus ce trafic automobile tant individuel que pour les entreprises. Et en tant que petit entrepreneur, je peux dire que nous sommes excessivement pénalisés par ces réductions de voies de trafic.

L'initiative propose, comme l'a indiqué le rapporteur de majorité Grégoire Carasso, de manière extrêmement simple, de réduire de moitié l'impôt sur les véhicules. Il ne vous a pas échappé que, récemment, il y a eu une votation dans le canton du Jura, qui n'est pas un canton spécialement à droite, où la population a voté à 82,7% - quasiment 83% - pour la diminution de cet impôt. A Genève, il y a de grandes disparités dans l'imposition des véhicules: si des efforts sont faits pour les nouveaux véhicules, avec un certain nombre d'avantages fiscaux, pour ce qui est des plus anciens, cela pose problème. Nous sommes malheureusement dans le haut du panier fédéral s'agissant de cet impôt, c'est juste, Monsieur Wenger - vous transmettrez, Monsieur le président. (Remarque.)

Il convient de rappeler que le montant de la taxe sur les véhicules à moteur est effectivement trop élevé à Genève et que beaucoup se domicilient dans d'autres cantons. On peut prendre l'exemple des loueurs de voitures qui vont dans le canton d'Appenzell Rhodes-Intérieures, etc., etc. Toutes ces immatriculations manquent à la substance fiscale de notre canton. Je reviendrai tout à l'heure, Monsieur le président, pour la suite du débat. Je vous remercie.

M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de deuxième minorité. L'initiative 178, déposée conjointement par le MCG et l'UDC, a reçu un accueil extrêmement favorable de la part de la population au moment de la récolte des signatures - plus ou moins 6000 signatures. Hélas, le Grand Conseil, à contre-courant des préoccupations de nos concitoyennes et concitoyens, a majoritairement choisi de s'opposer à cette initiative... (Commentaires.) ...qui vise, pour rappel, à diminuer la taxation excessive des véhicules à moteur dans le canton de Genève. En effet, il faut déplorer le fait qu'aujourd'hui, les automobilistes genevois paient deux voire trois fois plus cher que ceux du Valais, la faute à une fiscalité punitive et très agressive à Genève dès qu'il est question d'automobile.

Malgré le refus majoritaire du Grand Conseil d'apporter son soutien à l'initiative 178, nous constatons une dégradation de la situation, qui va frapper une grande partie de la population avec la hausse du prix des carburants, sans compter les aménagements routiers favorables aux usagers qui ne paient jamais, mais qui profitent toujours de la situation. Par conséquent, nous soutiendrons cette initiative et vous invitons à en faire de même.

Le rapporteur de majorité veut nous opposer un contreprojet qui permettrait soi-disant de diminuer le taux de pollution. Mais quand vous avez plus de 100 000 véhicules frontaliers qui rentrent tous les jours sur notre territoire, matin et soir, et que ces véhicules-là sont pour la plupart non contrôlés du point de vue des gaz d'échappement, qu'ils ne paient pas d'impôts, comment voulez-vous faire baisser le taux de pollution, si on ne trouve pas de solution ? Actuellement, le problème, c'est que les Genevois passent à la caisse, doivent payer encore plus d'impôts; en contrepartie, l'Etat de Genève ne fait rien pour taxer les frontaliers, qui, chaque jour, du lundi au vendredi, voire du lundi au samedi, empruntent les routes avec leur véhicule. A ce niveau-là, personne ne fait rien ! Par contre, on est prêts à taxer, à marteler le Genevois qui, lui, subit cette problématique et ne peut même plus utiliser son véhicule, parce qu'aujourd'hui à Genève, on vit l'immobilité. Ça, c'est une réalité ! Mais bien sûr, le rapporteur de majorité se cache, s'exprime en mettant des oeillères, ce qui est regrettable, et incite à une taxation plus élevée. Malheureusement, ce n'est pas en taxant plus qu'on va pouvoir combattre cette problématique de circulation, bien au contraire. Je pense qu'il faut revenir à une certaine réalité. Il faut revenir à des impôts raisonnables. Et aujourd'hui, oui, Genève est le canton où l'on paie le plus d'impôts, et oui, Genève est également le canton qui est le plus taxé entre autres s'agissant de l'automobile.

Une voix. C'est faux !

M. Sandro Pistis. Que vous rouliez en voiture électrique ou en voiture à combustion interne, vous êtes taxés au maximum. Mesdames et Messieurs, cette initiative est une bonne initiative et le groupe MCG vous encourage à la soutenir. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de seconde minorité. Avant de donner la parole aux autres intervenants, je salue la présence à la tribune de notre ancien collègue et ancien conseiller d'Etat Luc Barthassat. (Applaudissements.) Je passe maintenant la parole à...

Une voix. Stop ! (Commentaires. Un instant s'écoule.)

Le président. L'une de nos collègues a fait un malaise, je suspends la séance quelques minutes.

La séance est suspendue à 21h21.

La séance est reprise à 21h27.

Le président. Je vous invite à regagner vos places. Nous allons reprendre la séance. Nous formons nos meilleurs voeux de rétablissement à notre collègue. Si M. Batou veut bien regagner sa place, je lui donnerai la parole. (Brouhaha. Un instant s'écoule.)

Une voix. Il y a aussi M. Burgermeister qui est au milieu des rangs PLR, ça va pas se calmer ! (Un instant s'écoule.)

Le président. Monsieur Burgermeister, Mesdames et Messieurs, veuillez regagner vos places ! (Un instant s'écoule.) Veuillez regagner vos places, s'il vous plaît ! Monsieur Burgermeister, votre place est à gauche ! (Rires.)

Une voix. Oui, il faudrait pas qu'il s'égare ! (Un instant s'écoule.)

Le président. Allez-y, Monsieur Batou.

M. Jean Batou (EAG). Merci, Monsieur le président. Cette initiative est assez curieuse, puisque nous sortons de l'été le plus catastrophique par ses incendies, inondations, sécheresse, et que le MCG et l'UDC nous proposent - c'est un symbole, un message à la population - de réduire de moitié l'impôt sur les véhicules automobiles, c'est-à-dire sur ce qui constitue un des facteurs d'émissions de gaz à effet de serre les plus importants: «Allez, continuez, roulez en automobile, c'est la solution pour l'avenir !»

En réalité, le Conseil d'Etat avait fait une proposition assez raisonnable - et, venant de moi, quand je dis que le Conseil d'Etat avait une proposition assez raisonnable, vous pouvez me croire ! Elle allait dans le sens de maintenir l'assiette fiscale de l'impôt actuel et de favoriser un peu la transition vers les véhicules électriques. Cette initiative a été lancée pour torpiller le projet du Conseil d'Etat et aller vers un contreprojet au rabais, qui vise surtout à réduire la fiscalité sur les véhicules les plus polluants, les plus chers, sur les véhicules de luxe.

Bien entendu, il y a un rapport entre les véhicules de luxe, les plus puissants et les plus polluants, qui sont détenus par la partie la plus fortunée de la population, et les émissions massives de gaz à effet de serre. A l'échelle mondiale, 17% des émissions de gaz à effet de serre sont dus au 1% des plus fortunés de la population mondiale - 17% d'émissions pour 1% ! En revanche, les 50% des plus pauvres sont responsables de 12% des émissions. C'est la même chose à Genève: une petite partie de la population possède des véhicules très chers et très polluants, qui, il est vrai, sont imposés davantage que dans le reste de la Suisse, et une majorité de gens raisonnables essaie d'avoir des véhicules le moins polluants possible et qui ne sont pas plus imposés, souvent moins que dans d'autres cantons. Cette grille d'imposition est socialement et écologiquement moins contreproductive que ce qui nous est proposé ici, à savoir de baisser de moitié l'ensemble des impôts auto.

Il faut dire clairement ici qu'en moyenne, l'impôt auto genevois se situe dans la moyenne helvétique. Il est totalement faux d'affirmer, à moins qu'on fantasme sur un véhicule de luxe ou sur un véhicule très puissant, que l'impôt auto à Genève est supérieur à la moyenne suisse. Il faut donc travailler à un impôt auto qui soit socialement juste, écologiquement incitatif pour une transition rapide vers des véhicules moins polluants - qui ne sont pas la solution à long terme, parce que les véhicules électriques, dans leur fabrication, sont aussi responsables d'importantes émissions de gaz à effet de serre. Il faudra donc se passer de véhicules automobiles individuels en ville ! C'est une évidence ! Et comparer, comme le font les rapporteurs de minorité, Genève au canton du Jura est une absurdité ! Genève est un petit canton ville où il est possible de circuler avec des moyens de transport alternatifs non polluants ou en transports publics. Evidemment, le Jura, où l'impôt auto est beaucoup élevé qu'à Genève et qui est un canton étendu, dont le système de transports publics est sous-développé, ne peut pas être comparé à Genève.

Le groupe Ensemble à Gauche aurait été favorable à un refus sec de cette initiative, sans contreprojet. Nous avons accepté l'idée du contreprojet - essayons d'en faire un qui soit raisonnable ! Je crains que, malheureusement, le contreprojet soit une version au rabais de ce qu'on a aujourd'hui, qui n'est déjà pas très satisfaisant, et surtout, qu'on se détourne des quelques propositions timides, mais qui allaient dans le bon sens, qui avaient été émises par le Conseil d'Etat. Le groupe Ensemble à Gauche vous appelle évidemment à rejeter cette initiative, qui est une Genferei parfaitement absurde, et à concevoir un contreprojet qui au moins favorise une imposition de l'automobile qui incite à la transition environnementale et soit socialement juste. Merci.

M. Stéphane Florey (UDC). En préambule, vous transmettrez à M. le conseiller d'Etat Apothéloz que le meilleur moyen de rendre du pouvoir d'achat à nos concitoyens, c'est justement des baisses d'impôts et non pas de surtaxer les grosses fortunes, comme il l'a dit tout à l'heure. Cela a déjà été relevé, c'est le meilleur moyen de tuer notre économie et de réduire fortement les rentrées fiscales de notre canton.

Ensuite, effectivement - le rapporteur s'est fait un plaisir de le mentionner -, l'écologie, sur ce coup-là, oui, on s'en fout ! Pourquoi ? Premièrement, parce que ce n'est pas le propos de cette initiative, ensuite, parce que, pour ce qui est de la taxation auto, l'écologie n'est qu'un prétexte utilisé bassement par le Conseil d'Etat... (Exclamation.) ...pour surtaxer les véhicules, pour continuer à escroquer les automobilistes et tous les autres véhicules à moteur: dans ce qu'il appelle faussement un contreprojet, il entend rapporter 70 millions supplémentaires dans les caisses de l'Etat, ce qui est purement scandaleux, puisque lui-même ne remplit pas l'objectif de base qui partait d'une motion, motion votée à l'unanimité par ce Grand Conseil, à mon grand désarroi, et qui demandait de proposer une nouvelle imposition des véhicules, mais en aucun cas d'augmenter cette taxation.

Sur ce point, le Conseil d'Etat loupe complètement son objectif. Par ailleurs, non seulement il prévoit des recettes supplémentaires, mais il prévoit aussi la suite sur le long terme - et c'est là qu'on peut faire le lien avec l'écologie -, à savoir qu'il entend commencer à taxer fortement les véhicules électriques, en introduisant une pondération sur le poids du véhicule. Et pourquoi fait-il cela ? C'est uniquement parce qu'il est parfaitement conscient qu'un véhicule électrique pèse beaucoup plus lourd qu'un véhicule thermique ! La bonne affaire ! «Eh ben, taxons les véhicules électriques assez fortement pour être sûrs qu'ils continueront à être taxés, et davantage qu'un véhicule thermique !» Il faut avoir parfaitement conscience que le but du Conseil d'Etat, c'est malgré tout de rapporter des recettes supplémentaires dans son escarcelle et de continuer à taxer grassement tous les véhicules.

Pour nous - quand je dis «nous», c'est l'UDC et le comité d'initiative, dont je fais partie -, il faut bien comprendre que sur le long terme, à un moment ou à un autre, que ce soit dans dix, vingt ou trente ans, tous les véhicules seront à peu près propres - 0% de pollution, on n'y arrivera pas, il ne faut pas se leurrer ! Un véhicule électrique pollue quasiment autant à sa construction et à sa déconstruction qu'un véhicule thermique. Il faut aussi avoir conscience de cela. Finalement, avec la réduction progressive de l'impôt auto, le but pour nous sur le long terme, c'est qu'aucun véhicule ne soit taxé. On devrait aller progressivement vers l'abolition pure et simple de l'impôt auto, de l'impôt sur les véhicules à moteur pour être précis, comme l'ont fait nos voisins il y a bientôt vingt ans, qui ne taxent plus les véhicules à moteur, parce que cela leur coûtait presque plus cher que cela ne leur rapportait et parce que cet impôt ne sert finalement pas à grand-chose à part taxer. Je reviendrai plus tard sur ce que je voulais dire pour la suite. Je vous remercie.

M. Pierre Eckert (Ve). Merci, Monsieur le président, de m'accorder dix minutes de temps de parole, que je vais essayer d'utiliser pour développer quelques arguments. Je tâcherai de ne pas en abuser !

Mesdames les députées, Messieurs les députés, j'aimerais commencer mon intervention en me plaçant du point de vue des initiants. Leur principal argument consiste à dire que les propriétaires de véhicules à moteur, avec les 120 millions de francs qu'ils paient, n'en ont pas pour leur argent. Il faudrait probablement que des routes et des autoroutes à six pistes traversent l'ensemble du canton pour que cela soit le cas. (Commentaires.)

Alors on peut bien regarder les choses sous cet angle-là et tenter de voir ce que l'on peut obtenir pour cette somme de 120 millions - mais pas du point de vue de l'individu, plutôt de celui de l'économie, comme pour l'aéroport ou Palexpo: on pourrait tenter de calculer les retombées du réseau routier sur l'économie du canton. L'exercice est bien entendu compliqué parce que les routes ne servent pas seulement aux camionnettes des PME, et c'est bien là le problème.

Mais bon, admettons que cela soit possible. Il faudrait alors mettre en balance cette recette fictive que l'économie pourrait obtenir avec les coûts engendrés par le trafic motorisé: bruit, pollution, santé en général, occupation de l'espace public, danger pour les enfants et l'ensemble des piétons qui se trouvent sur la voie publique... (Commentaires.) ...coûtent extrêmement cher - des millions - à l'Etat. De ce point de vue, il faudrait plutôt multiplier l'impôt par trois ou quatre pour que l'Etat retrouve ses billes. Et ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit: je n'ai pas dit qu'il fallait globalement augmenter l'impôt ! J'y reviendrai un peu plus tard.

L'initiative fait également croire que l'on doit payer un impôt en fonction de l'usage que l'on a des services de l'Etat. C'est comme si on demandait une réduction d'impôt parce qu'on n'a plus d'enfants à l'école ou que l'on ne met jamais les pieds dans une bibliothèque publique. C'est parfaitement incongru et contraire à tous les principes de l'imposition. On parle ici effectivement d'un impôt, non affecté, et pas d'un péage pour l'utilisation de la route.

L'initiative fustige également les quelques kilomètres - disons moins de dix - de pistes cyclables qui ont été peintes un soir sur le bitume en lieu et place d'une voie de circulation. A ce propos, je dirai qu'une bonne partie, par exemple sur le quai Wilson, a été rendue à son usage antérieur. Par ailleurs, je dirai aussi que la capacité du réseau routier, plus précisément le nombre de voitures pouvant se rendre d'un point A à un point B, ne dépend en aucune façon du nombre de voies de circulation, mais bien de la capacité d'absorption des carrefours. Celles et ceux qui jardinent savent bien que la quantité d'eau qui arrive à leurs salades ne dépend pas de la grosseur du tuyau, mais bien de l'ouverture du robinet.

Une voix. Ah, c'est pas mal, ça !

M. Pierre Eckert. C'est bien, hein ? (Rires.) Il est donc faux et trompeur de dire que ce sont les pistes cyclables qui créent les bouchons. C'est bien le nombre excessif de voitures circulant en même temps qui crée les bouchons.

Je passe rapidement sur le fait que, globalement, l'imposition des autos à Genève se trouve dans la moyenne suisse, cela a déjà été dit, et sur le fait qu'on vient de dépenser près d'un demi-milliard de francs pour construire la route des Nations avec son échangeur autoroutier, et cela au seul profit du trafic motorisé.

Enfin, et comme on le verra lors des prochains exercices budgétaires, la perte de 60 millions de francs de recettes créera de grosses difficultés pour le fonctionnement de l'Etat, notamment pour les plus gros postes que sont la formation, le soutien social et la santé. Nous avons besoin de ces 60 millions.

Cette initiative est illogique et met en danger le fonctionnement de l'Etat. Il faut donc fermement la refuser. Les Vertes et les Verts sont par contre ouverts à l'élaboration d'un contreprojet, qui pourrait être basé sur le projet de loi 12873 du Conseil d'Etat. Nous pourrions y intégrer la neutralité fiscale - pour rassurer tout le monde -, une incitation à l'utilisation de véhicules moins gourmands en carburant, moins polluants, moins lourds, utilisant moins d'espace public.

Une voix. Des calèches !

M. Pierre Eckert. Une promotion modérée de l'électromobilité est aussi possible. Je répète que les Vertes et les Verts ne sont pas pour une promotion démesurée de l'électromobilité; nous sommes bien conscients du fait que celle-ci pose également des problèmes du point de vue des ressources. C'est quelque chose que l'on pourrait intégrer de façon modérée dans le contreprojet. Nous resterons également attentifs à l'imposition des véhicules utilitaires de façon à ne pas péjorer les PME.

Bref, nous soutiendrons un contreprojet qui donnera des orientations claires pour un renouvellement du parc automobile compatible avec le plan climat. L'initiative 178, qui demande une réduction linéaire de tous les tarifs selon le barème actuel, ne répond clairement pas à cet objectif. En résumé, les Vertes et les Verts refuseront l'initiative et vous recommandent de soutenir le principe d'un contreprojet.

M. François Baertschi (MCG). En décembre 2022, de nombreux Genevois souffrent. (Commentaires.)

Une voix. T'avances un peu !

Une autre voix. Mais il est toujours en avance ! (Commentaires. Rires.)

Une voix.  «Souffriront», alors !

M. François Baertschi. Les Genevois souffrent. Le pouvoir d'achat est écorné par des hausses d'assurance-maladie catastrophiques, par le prix de l'électricité qui va atteindre des sommets, comme on nous l'a annoncé tout récemment, par le prix du carburant, qui prend l'ascenseur sans fin, et, bien évidemment, bien évidemment, par l'impôt automobile, qui est une véritable calamité. Et c'est contre cette calamité que cette initiative tente de s'élever, en essayant de faire une proposition pour réduire une fiscalité qui fait de l'automobiliste une vache à lait - parce que l'automobiliste est une vache à lait ! Rappelons quand même que nous sommes taxés sur le carburant une première fois par la taxe sur le carburant et une deuxième fois par la TVA, qui est une taxe sur la taxe; plus de la moitié du prix du litre d'essence est de la taxe.

Nous sommes donc dans un délire, de la même façon que nous sommes dans un délire à Genève parce que nous ne pouvons pas circuler, parce qu'on a réduit la voirie et que, dans le même temps, nous avons des impôts auto parmi les plus élevés de Suisse. Pourrons-nous accepter ce genre de choses ? Alors j'ai bien entendu certains ayatollahs dans cette salle, des ayatollahs de l'écologie et du misérabilisme, qui cherchent désespérément à créer la misère dans notre république, qui s'opposent, bien entendu, à cette initiative. Pourquoi s'y opposent-ils ? Parce qu'ils sont dans la logique de l'écologie punitive ! Cette écologie qui cherche à punir les individus sur cette planète, en pensant qu'ils ont fauté, en pensant que leur grande erreur est d'exister. Et ces ayatollahs, que font-ils ? Ils ne font rien contre certaines sources de pollution. Parlons par exemple des frontaliers !

Des voix. Aaah !

Une voix.  Ça faisait longtemps !

Une autre voix. Ouf ! François, tu m'as fait peur ! (Rires. Commentaires.)

M. François Baertschi. Les frontaliers, eh oui ! Nous voyons des hordes de véhicules s'élancer sur les routes, obstruer la circulation pour les Genevois. Nous voyons un favoritisme pour la circulation frontalière, alors que, dans le même temps, nous voulons punir les bons petits Genevois...

Une voix. Qui paient des impôts !

M. François Baertschi. ...qui paient des impôts et qui doivent en payer de plus en plus ! Alors que, de l'autre côté de la frontière, on a des rabais sur l'essence et sur beaucoup de choses. Et nous, nous devons encore leur verser des montants considérables au travers de l'accord de 1973 !

Face à cela, peut-on se permettre de ne pas voter cette initiative ? Bien entendu, non. C'est la raison pour laquelle le MCG la soutiendra avec conviction. Nous vous demandons d'en faire de même - enfin, nous ne nous faisons pas beaucoup d'illusions, étant donné la composition de ce Grand Conseil. Néanmoins, la parole reviendra au peuple et je pense qu'il sera intelligent et sensé, beaucoup plus que certains ayatollahs qui s'expriment au sein de cette assemblée. Merci.

Une voix. Bravo !

Une autre voix. Bravo, François !

M. Yvan Zweifel (PLR). Après un débat à haute incandescence, nous retombons un petit peu, ça fait du bien ! Le PLR partage la plupart des constats qui ont été formulés tant par l'UDC que par le MCG: d'abord, que la taxation à Genève est vraisemblablement trop élevée. C'est d'autant plus vrai que nous assistons aujourd'hui - les contribuables et les habitants, tout simplement - à une baisse du pouvoir d'achat, déjà en cours et encore à venir; à ce titre-là, utiliser la taxation pour améliorer le pouvoir d'achat semble être une bonne idée. Nous partageons aussi le constat qu'un certain nombre de véhicules, qui roulent plutôt à Genève, sont immatriculés ailleurs, dans d'autres cantons. On peut bien sûr s'en plaindre, comme on aime bien le faire à gauche, et vociférer contre ces personnes qui a priori tricheraient. On peut aussi se dire qu'il y a peut-être un problème chez nous, en particulier dans la tarification de cet impôt automobile, et décider de régler ce problème pour faire en sorte que les propriétaires de ces véhicules n'aillent tout simplement pas les immatriculer ailleurs. Enfin, le dernier constat que nous partageons, c'est celui d'un système aujourd'hui trop compliqué, évidemment, obsolète, qui ne tient tout simplement pas compte - et ça, c'est pour faire plaisir aux Verts - de la situation climatique actuelle et qui est peu compréhensible pour le contribuable. Or l'impôt doit être compréhensible pour celui-ci.

Maintenant se pose la question: est-ce que l'initiative résout ce problème ? Est-ce que diviser par deux, pour simplifier, la tarification des véhicules à Genève est la bonne solution ? C'est peut-être simple, c'est certainement simpliste. C'est pourquoi le PLR souhaitera effectivement aller plutôt dans la direction d'un contreprojet. Pour cela, on a des pistes. On l'a déjà évoqué, il y a le projet du Conseil d'Etat, le PL 12873. Or plusieurs acteurs ont exprimé en commission qu'il était assez punitif - il suffit de le lire pour le comprendre -, notamment parce qu'il a un effet rétroactif pour les véhicules allant jusqu'à l'an 2000. Cet effet punitif pousse les gens à se débarrasser le plus vite possible de leur véhicule. Mais est-ce que se débarrasser de son véhicule est écologique ? Je ne crois pas. Est-ce que c'est économique ? Vraisemblablement pas, puisque si le véhicule ne coûtait pas grand-chose et qu'il continuait à rouler, pourquoi acheter quelque chose de beaucoup plus cher ? Et est-ce que c'est social ? La réponse est bien évidemment non, parce que celui qui en a les moyens peut changer de véhicule tous les deux ans si ça lui chante, ce qui n'est bien sûr pas le cas de Monsieur et Madame Tout-le-Monde et en particulier pas de la classe moyenne. Or si un projet n'est ni économique, ni écologique, ni social, alors est-ce qu'il est durable ? Là aussi, la réponse est bien entendu non. Le PL 12873 du Conseil d'Etat est de toute évidence alambiqué. Quand je disais avant que le système d'aujourd'hui est peu compréhensible pour le contribuable, alors je lui souhaite bonne chance pour comprendre le suivant !

Pour ce qui est du critère de la puissance, qui est principalement utilisé dans ce projet de loi, est-il toujours d'actualité ? Les experts sont venus en commission nous dire qu'aujourd'hui, deux voitures peuvent être de même puissance et n'avoir pourtant pas du tout la même efficacité technologique. Ce critère-là n'est donc plus un critère ou en tout cas pas le critère principal qui doit être pris en compte. Par ailleurs, dans ce projet de loi du Conseil d'Etat, aucune différenciation n'est faite entre les véhicules de manière générale et les véhicules d'entreprises, les véhicules des artisans, ceux qui doivent fournir des prestations à la population. Ceux-ci ne doivent pas être entravés; or ils n'ont aucun avantage, pire encore, ils voient en fait leur situation péjorée avec le projet de loi du Conseil d'Etat. C'est évidemment le contraire qui doit être fait.

Aujourd'hui, il y a une solution plus simple, c'est celle de prendre un seul et unique critère - qui est d'ailleurs la demande principale de ceux qui se disent écologistes dans cette salle -, celui du CO2, puisqu'il comprend à la fois les critères de puissance et de poids. C'est un critère simple et compréhensible par tout le monde: un véhicule qui émet plus de CO2 au sens large doit être taxé plus qu'un véhicule qui en émet moins. Une norme existe pour cela, c'est la norme WLTP - je vous passe l'anglicisme qui va avec -, qui est reprise dans le PL 12888, l'ancienne initiative du TCS, qui nous semble, à ce titre-là, a priori, constituer un meilleur contreprojet à cette initiative.

Le projet du Conseil d'Etat prévoit aussi un fonds pour l'électromobilité. Là, je rejoins ce qu'a dit mon collègue Eckert tout à l'heure: on peut quand même se poser des questions sur cette électromobilité. Aujourd'hui, plusieurs experts le disent, même s'ils ne sont pas toujours d'accord sur le kilométrage exact: en moyenne, un véhicule électrique doit parcourir 50 000 kilomètres - 50 000 kilomètres ! - avant que son empreinte carbone soit enfin meilleure que son équivalent thermique ! 50 000 kilomètres, c'est 1,25 fois la circonférence de la terre ! Un véhicule électrique est-il donc à la base forcément écologique ? La réponse est clairement non. Et si, en plus, on veut inciter les gens à s'en débarrasser le plus vite possible, alors la réponse est encore moins oui, c'est-à-dire encore plus non. (Rires.) Vous l'aurez compris, évidemment.

Par ailleurs, il y a le problème des bornes de recharge. Ceux qui dans cette salle possèdent peut-être déjà aujourd'hui un vél... Un vélo ! Qu'est-ce que j'allais dire ! ...un véhicule électrique et qui sont allés en vacances par exemple dans le sud de la France en ont fait l'expérience: s'ils ont voulu s'arrêter - parce qu'il est impossible pour un véhicule électrique de faire tout le trajet jusqu'au sud de la France sans s'arrêter - pour recharger leur véhicule à une borne électrique, ils se sont rendu compte, d'abord, qu'il n'y en avait pas beaucoup, ensuite, lorsqu'ils se sont arrêtés devant, qu'il y avait une file d'attente assez gigantesque, et que, quand enfin c'était leur tour, il leur fallait quatre heures pour recharger leur véhicule. Par conséquent, le trajet de Genève à Marseille qui, avec un véhicule thermique, prend quatre heures prend, avec un véhicule électrique, trois fois plus de temps: quatre heures de trajet, quatre heures de file d'attente et quatre heures pour le recharger. Est-ce que c'est ça qui va inciter les gens à opter pour un véhicule électrique ? Certainement pas. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas inciter à le faire, mais cela veut dire qu'il faut d'abord trouver des solutions pour que non seulement les gens achètent un véhicule électrique, mais aussi pour qu'ils aient les moyens de le recharger.

Ce problème est d'autant plus important dans un canton comme Genève, qui - ce n'est pas moi qui vous l'apprends - est composé à 83% de locataires. Or si, là où vous habitez, vous n'avez pas l'autorisation du propriétaire pour installer des bornes électriques ou que vous le faites de manière sauvage - ce qui fait exploser la facture électrique -, on peut se poser quand même des questions, et, là aussi, il y a quelque chose à faire. Il y a un travail important à faire avec les propriétaires de ce canton. Je ne vois pas encore le Conseil d'Etat aller dans cette direction-là. Et puis, évidemment, de manière caustique, je pourrais vous dire que, alors que nous approchons d'un hiver où on nous dit qu'il faut économiser au maximum l'électricité, expliquer aux gens qu'ils doivent prendre un crédit pour acheter un véhicule électrique, cela paraît quand même un petit peu saugrenu ou au moins décalé.

Au PLR, nous avons donc vraiment un problème avec cette question de l'électromobilité. Nous ne sommes pas contre les véhicules électriques, mais attention: si c'est le tout aux véhicules électriques, ce n'est certainement pas la solution, en tout cas pas celle à moyen et à long terme. Il y a d'autres technologies qui existent. On en connaît une, on en a déjà parlé ici, c'est l'hydrogène. Aujourd'hui, un camion à hydrogène, c'est 100 000 francs. Bien sûr, tout le monde ne peut pas se le permettre, mais au lieu de faire un fonds pour l'électromobilité... (Remarque.) Même plus cher encore, me dit-on ! Si on veut aller dans ce sens-là, ce n'est peut-être pas le véhicule électrique qui est la bonne solution, mais les moteurs du futur, c'est-à-dire par exemple ceux à hydrogène. Et c'est à cela qu'on voudrait voir des fonds attribués et non pas à l'électromobilité, qui nous semble désuète.

Mesdames et Messieurs, vous l'aurez compris avec mes propos, le PLR veut être pragmatique. Nous avons la possibilité, pour une fois - cela arrive rarement -, de trouver un éventuel contreprojet avec une alliance large de tous les partis. C'est pourquoi nous refuserons l'initiative, non pas parce que nous ne sommes pas d'accord avec les constats qui sont faits, mais parce que nous espérons trouver un contreprojet qui sera meilleur, d'actualité et qui respectera les critères économiques, sociaux et écologiques, c'est-à-dire un projet qui sera tout simplement durable. C'est pourquoi je vous appelle à voter non à l'initiative, oui à un contreprojet, et faisons confiance à nos commissaires de la commission fiscale ! Merci.

M. Jacques Blondin (PDC). L'équation de cette initiative 178 est simple: restriction de circulation égale réduction de moitié de l'impôt sur les véhicules, c'est clairement mentionné dans le texte. Les auteurs de l'initiative l'ont déposée lors de la période où il y a eu des réactions, j'allais dire courroucées, mais cela allait au-delà, par rapport à des mesures prises à Genève consécutivement au covid, que ce soit l'aménagement de pistes cyclables ou toute autre restriction de circulation. On peut le comprendre, à l'époque, cela a fait beaucoup de bruit, et on peut parler longtemps de ce qui a été fait, bien fait, bien ou mal communiqué, mais une des réactions, et c'est clairement libellé dans le texte, c'est celle-ci.

La conséquence, bien évidemment, c'est la perte de la taxe auto pour un montant arrondi à 60 millions de francs par an. Alors aujourd'hui, bien sûr, avec le contexte économique actuel, quand on voit ce qu'il se passe avec les revenus des ménages, etc., et quand on voit les demandes qui sont faites - qui sont aussi celles de notre groupe -, à savoir de diminuer la pression fiscale, on pourrait admettre que ces 60 millions seraient bienvenus dans les caisses des contribuables.

Bien entendu, cette initiative ne correspond pas à notre réflexion, et, cela a été dit tout à l'heure par M. Florey, elle ne prend pas en compte les autres considérations: que ce soit l'écologie ou autre, ce n'était pas le but. Le but était, effectivement, de réagir à cette limitation de l'usage de la voiture, au coût que cela représente et à la modification des pratiques du canton de Genève.

Un deuxième élément a été déterminant dans la réaction des initiants: le dépôt, le 10 février 2021, du PL 12873 du Conseil d'Etat, qui tentait de répondre aux invites de la motion 2539, dont nous n'avons pas encore parlé ce soir, votée par le parlement le 10 avril 2019. Ce projet de loi a été considéré comme un contreprojet que nous pourrions opposer à l'initiative. Evidemment, cette hypothèse a encore raffermi les idées des initiants de combattre cette pratique. Le premier projet du Conseil d'Etat, cela a été dit par d'autres personnes, est compliqué - le terme «alambiqué» a été utilisé -, étant donné qu'il se basait sur la motion 2539. Il faut quand même savoir qu'à ce jour, à la commission fiscale, ce projet de loi du Conseil d'Etat n'est qu'un des éléments pris en compte pour un contreprojet que nous allons vous proposer. Mais la motion 2539, il faut s'en souvenir, a été votée ici. Elle demandait une réforme de l'imposition des véhicules à moteur tendant à être neutre fiscalement - ce qui n'est pas le projet du Conseil d'Etat - en se basant sur des éléments tels que l'évolution technologique de ces vingt dernières années concernant la motorisation des véhicules à moteur; l'arrivée sur le marché de nouveaux types de moteur - électriques, hybrides, hydrogènes, gaz, etc.; le développement de nouvelles pratiques de mobilité, en particulier l'autopartage; l'impératif de lutter contre la pollution de l'air notamment par les particules fines et les dégagements de CO2; la réactualisation du système bonus-malus - qui est pratiqué chez nous - tenant compte de ces éléments, afin de renforcer le caractère incitatif du système de taxation des véhicules; la prise en compte du cas particulier des véhicules de collection, ce que tout le monde comprend.

A la lecture du PL 12873, on constate que le Conseil d'Etat ne répond que partiellement aux invites de la motion, qui sous-entendait qu'il fallait taxer les émissions de CO2 et se préoccuper de la taxation des véhicules les plus polluants. Aujourd'hui, on reste à un système basé sur la puissance, qui est éventuellement une imposition de la richesse, mais qui n'est en aucun cas une imposition de la pollution. Enfin, la neutralité fiscale n'est pas atteinte, puisque l'Etat, avec sa proposition, engrange 50 millions de plus qu'en l'état actuel. Evidemment, on est très loin de la neutralité.

Le parti démocrate-chrétien vous propose de rejeter cette initiative et d'accepter le principe d'un contreprojet qui tiendrait compte des invites de la motion 2539, mais qui serait simplifié, permettant une meilleure compréhension pour les contribuables et les usagers, en se limitant aux principaux éléments de taxation qui ont déjà été évoqués: les émissions de CO2 pour les véhicules thermiques, le poids pour les véhicules électriques, un principe de bonus-malus selon le type de véhicules, mais uniquement pour les nouvelles immatriculations, de manière à ne pas pénaliser ceux et celles qui ont des véhicules un peu âgés, mais qui n'ont pas les moyens de les changer. Il s'agirait également de ne pas renchérir la taxation actuelle pour les véhicules lourds - les entreprises ont assez de soucis, ce n'est pas le moment d'en rajouter -, ainsi que de respecter la neutralité fiscale. La commission fiscale a donc du pain sur la planche pour rédiger un contreprojet conforme aux desiderata du Grand Conseil selon cette motion qui date du 10 avril 2019, je vous le rappelle. Nous vous invitons donc à rejeter l'initiative 178 et à accepter le principe d'un contreprojet. Merci.

M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, ce débat est pour moi complètement surréaliste: j'ai l'impression d'être dans le film «Retour vers le futur», dans un Grand Conseil en 1970 ou 1980... (Remarque.) ...avec des députés qui ne se rendent absolument pas compte que la liberté, ce n'est plus de prendre son 4x4, d'aller au centre-ville et de polluer en fumant sa clope au volant, fenêtres ouvertes, en klaxonnant les nanas qui passent ! Si on n'a pas été cryogénisé pendant quarante ans, on se rend compte qu'on est en 2022 et qu'aujourd'hui, on a juste quelques problèmes de pollution, des problèmes de nuisances sonores, une urgence climatique, une urgence énergétique, et que peut-être qu'en tant que politiques, il faudrait commencer à répondre à ces différentes problématiques !

Cette initiative va totalement dans le sens inverse ! Les voitures polluent, et aujourd'hui, on doit diminuer les trajets en véhicule motorisé, parce qu'il faut protéger la planète, l'environnement, la santé de nos concitoyennes et concitoyens; mais vous, vous proposez de réduire de 50% l'imposition sur les véhicules à moteur pour favoriser ceux-ci. Alors autant déposer une initiative pour réduire de 50% le prix du paquet de cigarettes, parce que, quand même, la cigarette, c'est cool et ça ne fait pas trop de mal à la santé ! C'est quand même chouette, on ne va pas emmerder les Genevois ! C'est quand même bien s'ils peuvent fumer ! (Commentaires.) Et, même chose, on pourrait réduire de 50% le coût de l'énergie issue du charbon allemand qu'on importerait, parce que, quand même, ce n'est pas grave si on brûle du charbon juste pour notre énergie, même s'il y a plein d'énergies renouvelables !

Non mais à un moment donné - je parle à l'UDC et au MCG, Monsieur le président -, il faut juste se réveiller un peu ! Il faut juste se rendre compte des problématiques auxquelles on fait face aujourd'hui ! Et pas parce que nous, la gauche, on adore l'environnement et qu'on est super, mais parce que les gens à l'heure actuelle croulent sous les problèmes de santé, de pollution et de nuisances sonores... (Remarque.) ...et parce que les bagnoles prennent une place incroyable dans les centres urbains par rapport à l'humain, par rapport aux enfants, par rapport aux seniors, et il faudrait peut-être se réveiller politiquement sur ce point !

315 000, Mesdames et Messieurs ! 315 000, c'est le nombre de véhicules immatriculés à Genève. 315 000 pour environ 500 000 habitants. Vous imaginez qu'on peut enlever les moins de 18 ans - à moins que des jeunes de 10-12 ans s'amusent à conduire des 4x4  - ainsi que les seniors qui ne conduisent pas et tous les ménages qui n'ont plus de voiture aujourd'hui, parce qu'il existe des alternatives - j'y reviendrai -, ces derniers représentant plus de 40% de la population en ville de Genève. (Commentaires.) Vous comprenez donc bien que, quand il y a 315 000 véhicules immatriculés, cela veut dire que les personnes ont une, deux, voire trois voitures. Dans notre entourage, dans les quartiers, on voit... (L'orateur est interpellé.) ...des familles, des ménages, qui ont plusieurs voitures selon les utilisations.

Il y a 120 000 habitants - on en a parlé souvent dans ce Grand Conseil - qui souffrent du bruit à Genève, qui souffrent objectivement de nuisances sonores trop élevées, et on ne respecte pas la loi; or il y a des normes objectives fédérales dans l'ordonnance sur la protection contre le bruit. M. Dal Busco, ses services et, à la base, une majorité de ce Grand Conseil - mais qui aujourd'hui est devenue une minorité - essaient justement de combattre cette nuisance sonore et cette pollution pour une meilleure qualité de vie pour nos habitantes et nos habitants. Les centres urbains croulent sous les voitures. Allez dans les centres urbains - vous y allez tous les jours, vous, moi et les personnes qui nous écoutent: au lieu d'avoir de la place aujourd'hui pour les humains, pour les seniors, pour les enfants, pour les familles, pour les piétons, pour les cyclistes, on a des voitures partout, on a des voitures stationnées partout, on n'a plus de place pour les parcs, pour les arbres, on n'a plus de place pour les terrasses de café, pour les places de jeux, pour les enfants, pour nos aînés !

On a aujourd'hui, je l'ai dit, une urgence climatique, une urgence énergétique. On a un plan climat cantonal qui nous demande d'ici 2030 - 2030, c'est dans huit ans ! - de réduire de 60% les émissions de gaz à effet de serre et, d'ici 2050, une neutralité carbone. Vous pensez vraiment qu'en réduisant de moitié l'imposition sur les véhicules à moteur et en favorisant leur utilisation, on va arriver à atteindre ces objectifs ? A nouveau, ces objectifs ne sont pas là pour nous faire plaisir ! Ils sont là pour préserver la population et sa santé. Alors UDC et MCG, en gros, vous dites - vous transmettrez, Monsieur le président, à M. Ivanov, rapporteur de minorité - que l'impôt sur les véhicules à moteur à Genève est le plus cher ou un des plus chers de Suisse, or c'est faux, c'est archifaux !

Une voix. Ouais ouais !

M. Thomas Wenger. C'est objectivement faux ! (Commentaires.) Je vous lis, pour ceux qui ne siègent pas à la commission fiscale ou qui n'ont pas écouté, le passage du rapport où le directeur de l'office cantonal des véhicules nous donne des chiffres, des statistiques suisses objectives, et où il dit, je cite: «L'impôt genevois est [...] au niveau de la moyenne nationale sur l'ensemble des 315 000 du parc.» «Moyenne», cela ne veut pas dire «le plus cher de Suisse» ! «Moyenne», cela veut dire qu'il y a beaucoup de cantons qui sont plus chers que Genève. Il y a un principe de pollueur-payeur, donc de bonus-malus, que vous connaissez bien - c'est assez logique, je pense que tout le monde comprend: il faut que la personne qui pollue moins paie moins d'impôts. Le directeur général de l'office cantonal des véhicules finit son rapport en disant ceci: «La vérité est que les véhicules très puissants sont très taxés à Genève.» (Commentaires.) Eh oui, Monsieur Sormanni ! Les véhicules les plus polluants, les SUV, les 4x4, c'est ça que vous défendez ! (Commentaires.) C'est exactement comme le débat précédent sur les grandes fortunes ! (Commentaires.) Vous défendez les grosses cylindrées de personnes qui habitent à Cologny, à Vandoeuvres, à Anières, qui viennent en 4x4 dans les centres urbains... (Exclamations. Commentaires.) ...avec leurs grosses bagnoles et qui ne veulent pas payer de taxe pour l'imposition de leur véhicule à moteur, alors que c'est une taxe qui comprend le CO2, la puissance, etc. ! C'est totalement normal que les gens qui achètent ce genre de voitures paient un peu plus que les gens qui ont de petites voitures ou des voitures électriques.

La question qui se pose aujourd'hui dans notre Grand Conseil est la suivante: est-ce qu'on veut un canton pour les voitures ou est-ce qu'on veut un canton pour les humains ? Nous, au parti socialiste, on répond: pour les humains. On veut privilégier les humains et on ne veut pas privilégier les voitures. Alors pour ça, qu'est-ce qu'il faut ? Il faut diminuer le trafic motorisé, diminuer la pollution de l'air, diminuer les nuisances sonores. Pour ça, il faut donner des alternatives à nos concitoyennes et concitoyens, aux habitantes et aux habitants et y compris aux frontalières et aux frontaliers... (Commentaires.) ...en développant la mobilité douce, une mobilité plus durable et les transports publics.

En conclusion, le parti socialiste dira non et archi non à cette initiative qui est populiste, démagogique, passéiste et rétrograde ! Nous travaillerons sur un contreprojet, mais c'est sûr que si celui-ci va dans le sens de favoriser les trajets en véhicule motorisé, nous nous y opposerons. Si on peut par contre effectuer un travail constructif avec notamment le PDC et le PLR pour trouver une bonne solution en faveur d'une mobilité plus durable, de la protection de l'environnement et de la protection de la santé des Genevoises et des Genevois, nous travaillerons à ce contreprojet. Merci, Monsieur le président.

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole à M. Stéphane Florey pour cinq minutes.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Vous transmettrez à M. Wenger - parce qu'il me semble qu'il n'a pas bien compris - qu'un véhicule électrique, finalement, c'est aussi un véhicule à moteur. Vous parliez du bruit. L'avantage d'un véhicule électrique, c'est qu'il ne fait pas de bruit, au point que, dans certains contextes, des véhicules ont maintenant l'obligation d'actionner un avertissement sonore pour prévenir de leur présence. Un exemple tout bête: le bus TOSA, qui est électrique, doit activer un avertisseur sonore quand il roule sur le domaine de l'aéroport, justement parce qu'un véhicule électrique est dangereux pour les piétons qui ne l'entendent pas venir. Ça, il faudrait peut-être que vous commenciez à l'assimiler, Monsieur Wenger ! C'est aussi ce que je disais: finalement, les véhicules qui n'émettent certes pas de CO2, mais qui sont quand même polluants, vu le prix que ça coûte, vu les enjeux, pour nous, il est clair que sur le long terme, ce sont des véhicules qui ne devraient plus être taxés, d'où mon intervention de tout à l'heure où je disais que, sur le long terme, on devrait aller tranquillement vers une abolition de cet impôt.

Un des buts de l'initiative, comme je l'ai dit précédemment, est de rendre du pouvoir d'achat à la population qui en a bien besoin. En plus, ça tombe bien, on parle d'électricité: les SIG viennent d'annoncer une augmentation du prix de l'électricité de 22%. Ça aussi, il faudrait peut-être en tenir compte ! A ce titre, l'IN 178 est bienvenue, puisqu'elle rendra justement un peu de pouvoir d'achat, malgré toutes les hausses qui nous attendent - on parle également de plus de 10% sur l'assurance-maladie, enfin bon, les hausses qu'on connaît habituellement.

Un des buts de l'initiative, c'est également de ramener un certain nombre de voitures immatriculées dans d'autres cantons, mais qui roulent malgré tout à Genève, et ça, M. Wenger ne l'a visiblement pas inclus dans son calcul, puisqu'il parle de 300 000 immatriculations. Mais combien de véhicules immatriculés dans les autres cantons roulent malgré tout à Genève ? Ça, vous n'en parlez pas. C'est justement aussi un des buts de cette initiative: finalement, si la personne qui roule à Genève mais dont le véhicule est immatriculé dans le canton d'Argovie ou d'Appenzell payait le même prix à Genève, ce serait peut-être plus intéressant pour elle de réimmatriculer son véhicule dans notre canton plutôt que de devoir se taper des trajets ne serait-ce que pour la visite de son véhicule. Il y aurait également un peu moins de tracasseries administratives de ce côté-là.

Ce sont effectivement, comme l'a rappelé M. Blondin, les restrictions de circulation qui ont été l'effet déclencheur du lancement de cette initiative, mais pas seulement. Pas seulement ! On a parlé des hausses prévues par le projet du Conseil d'Etat, et j'aimerais justement rajouter un élément sur ce point: au fond, la population, ça lui est bien égal de savoir comment elle va être taxée. Elle, ce qui l'intéresse, c'est la facture finale. Si on taxe 1 kilo de ferraille, 1 kilo de CO2 ou 1 kilowatt de manière équivalente, et qu'au final, il n'y a aucune différence sur sa facture, la population peut adhérer à tout mode de taxation. Mais du moment où vous lui proposez une hausse telle que celle contenue dans le projet du Conseil d'Etat, pour nous, il est évident, et on est tranquilles avec ça... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Si on suit la population du Jura, comme l'a dit mon collègue, qui a accepté une initiative baissant les impôts, ce n'est pas pour être les moins chers de Suisse, c'est juste pour ramener la taxation dans la moyenne nationale. Mais il y a aussi Berne, qui a refusé ce que vous appelez le contreprojet...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Stéphane Florey. ...à savoir un changement de taxation. Pour ces raisons, ayez le courage d'accepter cette initiative...

Le président. Merci, Monsieur le député.

M. Stéphane Florey. ...et de traiter le projet du Conseil d'Etat dans un second temps. Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci. Je passe la parole à M. Cyril Aellen pour deux minutes treize.

M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. Rapidement, puisque le temps m'est compté, j'aimerais attirer l'attention notamment du parti socialiste et des Verts sur le fait que Genève n'est pas un cas à part, et que, si on ne trouve pas un contreprojet intelligent, constructif, c'est l'initiative qui va passer. Nous avons vu ce qu'il s'est passé dans des cantons qui ne sont pas tout à fait voisins, mais qui ne sont pas très loin de nous; avec l'augmentation du prix de l'essence et du prix de l'électricité, avec la diminution globale du pouvoir d'achat, de manière massive, les gens seront extrêmement favorables à la baisse d'un impôt qui n'est en réalité pas un impôt mais une taxe, pour laquelle ils n'ont pas toujours le choix.

J'aimerais insister sur le rôle également social de la voiture. C'est facile, quand on a 50 ans, qu'on n'a plus besoin de véhiculer ses enfants, qu'on n'a pas encore de parent à charge, ou qu'on n'a pas de personne en situation de handicap autour de soi, de dire qu'on peut se passer de son véhicule, surtout si en plus on habite à côté d'une ligne de tram, qu'on travaille en ville et qu'on n'a rien besoin de transporter. Mais ce n'est pas le cas de tout le monde ! C'est aussi facile de dire que, fondamentalement, on peut augmenter le prix de la taxe sur le véhicule quand on a les moyens d'en payer deux ou trois fois le prix. Mais c'est plus complexe pour beaucoup de personnes qui, elles, n'ont pas toujours le choix d'avoir ou non un véhicule.

D'ailleurs, en réalité, et c'est là-dessus que je veux insister, le montant de la taxe n'a pas d'impact sur le nombre de véhicules, sinon, vous intégreriez dans votre raisonnement le fait que baisser la taxe de moitié augmenterait le nombre de véhicules. Sinon, le fait d'augmenter la taxe ne permettrait pas de dégager des revenus, parce que précisément le nombre de véhicules diminueraient drastiquement. J'aimerais insister là-dessus. Nous devons nous mettre autour de la table pour trouver un projet de loi qui tiendra compte de tout cela.

Il y a encore un point que j'aimerais aborder, avant que vous me coupiez le micro, Monsieur le président. J'aimerais dire: faisons attention ! Il faut aussi taxer sans encourager le changement de véhicule tout le temps. La meilleure solution, finalement, c'est qu'on roule peu et qu'on garde son véhicule longtemps. Il faudrait encourager cette façon de faire: entretenir son véhicule, rouler peu et le garder longtemps. Merci.

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Patrick Saudan pour cinq minutes.

M. Patrick Saudan (HP). Merci, Monsieur le président. C'est bien trop. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, au risque de passer pour un horrible ayatollah aux yeux de M. Baertschi - vous transmettrez -, je vais me permettre une réflexion personnelle sur cette initiative 178.

On cite toujours cet article constitutionnel qui garantit la liberté individuelle du choix du mode de transport; le début de l'exposé des motifs de l'initiative y fait référence et M. Ivanov l'a également rappelé au début de son intervention. C'est un peu un totem qu'on brandit dans toutes les discussions portant sur la mobilité à Genève.

Vu les bouleversements climatiques, vu la participation importante du trafic individuel motorisé aux émissions de gaz à effet de serre, je me pose la question de la pertinence de cet article constitutionnel. Je me pose vraiment la question de la pertinence de cet article ! Si j'ai une suggestion à soumettre à mes collègues de gauche, c'est la suivante: plutôt que de lancer des initiatives très malheureuses sur la fiscalité, faites un projet de loi constitutionnelle pour supprimer cet article ! Et je m'y associerai volontiers. Je vous remercie. (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. David Martin pour quatre minutes quarante.

M. David Martin (Ve). Merci, Monsieur le président. Pour compléter les propos de mon collègue Vert, j'aimerais revenir sur un point et peut-être rebondir aussi sur les propos de M. Aellen, qui soulevait le fait que certains ne peuvent pas se passer de leur véhicule. Admettons que ce soit le cas, et je veux bien le reconnaître. Il me semble qu'un point a été un petit peu laissé de côté dans le débat de ce soir. La logique voudrait que celle ou celui qui a un véhicule petit, léger et à faible émission paie moins cher. Je ne suis pas un spécialiste de la réforme proposée par le Conseil d'Etat, mais il me semble que l'évolution s'agissant de l'imposition pour les petits véhicules est faible; l'imposition serait peut-être même moins élevée pour ce type de véhicule.

Qu'est-ce que je veux dire par là ? On a parlé d'électrique, d'hydrogène, etc. Ce qui est sûr dans tout ça, c'est que les véhicules grands et lourds sont peu efficients. Qu'ils soient à essence, à hydrogène ou à électricité, ce sont des véhicules qui consomment énormément de ressources. Par conséquent, pour réduire les émissions et la pollution, tout le monde l'a relevé ce soir, il faut, dans la mesure du possible, et même certainement, moins de voitures. Mais, s'il y a des voitures, il faut qu'elles soient plus efficientes.

A ce sujet, j'aimerais vous rappeler que le phénomène qu'on observe aujourd'hui, c'est un nombre croissant de SUV et de 4x4. D'après l'Agence internationale de l'énergie, ces véhicules sont la deuxième cause d'augmentation de gaz à effet de serre dans le monde. Il me semble que le but premier de ces réformes de la fiscalité des véhicules est de dire: si vous voulez un véhicule trois fois plus lourd que ce qui est nécessaire, il faut payer un petit peu plus cher ! Par contre, si vous voulez un véhicule efficient, petit, adapté à vos besoins, pour les déplacements nécessaires, prenez une voiture plus légère et moins émissive.

L'Office fédéral de l'énergie écrivait également: «En Suisse, les modèles équipés de puissants moteurs à combustion sont les plus achetés. La part de véhicules à quatre roues motrices a augmenté sans cesse depuis des années pour atteindre un nouveau sommet en 2017 avec plus de 47%; elle pourra même atteindre ou dépasser la barre des 50% pour l'année en cours.» J'imagine que c'était l'année 2020. «Les modèles SUV sont très demandés. Il en résulte une stagnation des émissions de CO2 à environ 135 grammes par kilomètre en moyenne, un niveau qui compte encore parmi les plus élevés d'Europe.» C'est donc de ça qu'on parle ! Bon, on a la chance d'avoir un pouvoir d'achat extrêmement élevé en Suisse et à Genève, donc on s'achète des véhicules qui sont des mastodontes, et c'est en train de plomber tous les efforts positifs qu'on fait pour l'efficience des véhicules. C'est de ça qu'on parle, il me semble, avec cette réforme de l'imposition de véhicules.

Voilà, c'est sur ce point que je voulais insister, pour compléter les propos de mon collègue tout à l'heure. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Patrick Dimier. Il vous reste six minutes quatre secondes.

M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président. D'abord, je trouve que le débat est intéressant, parce qu'il est extrêmement large, et on aborde toute une série de problématiques concernant la mobilité. Vous me permettrez de rappeler quelque chose qui est une lapalissade: le véhicule qui pollue le moins, c'est celui qui bouge le moins. On est tous d'accord là-dessus. Mais étonnamment, la fiscalité ne prend pas du tout en compte ce facteur. Or s'il y a une pondération à faire sur l'imposition des véhicules, c'est évidemment en fonction du nombre de kilomètres parcourus. Vous êtes d'accord, parce que c'est au moins objectif. Ensuite, ce qui fait consommer un véhicule, c'est son poids, quelle que soit l'énergie qui le fait avancer. Les véhicules électriques, de ce point de vue là, sont sans nul doute absolument catastrophiques quant au rendement énergétique. C'est juste le plus mauvais !

En matière de pollution, on parle beaucoup de CO2. Vous avez vu qu'à Sion, on a trouvé un moyen de chauffer des bâtiments avec du CO2. Il y a donc peut-être une piste à aller chercher pour savoir comment capter ce CO2. Mais ce n'est pas ça qui est important ici. C'est que le véhicule électrique est une illusion totale ! Parce que, s'agissant de pollution, tous ceux qui se prétendent humanistes et sauveurs des peuples opprimés devraient peut-être se souvenir que pour fabriquer un véhicule électrique, il faut des terres rares, et que pour obtenir ces terres rares, on doit faire travailler, dans des conditions tout à fait épouvantables, notamment des enfants - pour ceux qui aiment bien mentionner les enfants dans leurs interventions. Le véhicule électrique n'est donc certainement pas la bonne solution.

Pour ce qui est du trafic pendulaire, à Genève, c'est bien entendu lui le principal responsable des pics de pollution sur notre territoire. Or ces véhicules rentrent chez nous sans payer d'impôts, sans payer de participation aux efforts routiers; vous le savez, le chiffre est connu, il y a 100 000 personnes, sans compter ceux qui viennent de notre propre pays: 87% de ces 100 000 personnes viennent en voiture et 92% de ces voitures sont occupées par une seule personne. Si on y ajoute les kilomètres parcourus pour arriver sur notre territoire, je pense que ceux qui parlent du plan climatique, qui se battent la bouche de plein de mots - très utiles pour leur campagne électorale -, feraient bien d'intégrer ce paramètre dans leurs discussions, parce que de manière objective, ce trafic-là est un des très très gros polluants.

J'aimerais terminer mon intervention en revenant sur les propos de M. Saudan. Vous transmettrez, Monsieur le président, je trouve qu'il faut être hors d'un parti pour avoir le courage de dire ce qu'il a dit: aucun parti ne vous laissera dire cela, puisque vous vous attaquez à une liberté garantie par la constitution. Je pense que tous ces partis que nous avons entendus ce soir, s'ils ont un gramme non pas de pollution, mais de courage, devraient suivre l'idée de M. Saudan et lancer une initiative pour faire sauter cette disposition de la constitution.

Une voix. Bonne chance !

M. Patrick Dimier. Et vous verrez ce que vous dira le peuple !

Une voix. Merde !

M. Patrick Dimier. Comme il fera en répondant à l'initiative du MCG et de l'UDC: il va vous envoyer sur les roses, parce qu'il va accepter la nôtre et refuser celle qui viserait à le priver d'une liberté garantie par notre constitution. Certes, il faut être de solide constitution, mais cela ne veut pas dire qu'on peut faire n'importe quoi avec elle. On ne peut pas la malaxer comme on en a envie, l'utiliser au gré de ses folies, de ses besoins ou de ses délires. La constitution, c'est ce que le peuple veut, et ce que le peuple veut, ce n'est en tout pas ce que vous semblez vouloir dire. Très sincèrement, je pense que notre initiative est excellente, qu'elle ira devant le peuple et que le peuple nous dira oui. Merci.

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va à M. François Baertschi pour une minute quatre.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. J'aimerais également m'adresser au député Saudan - je vous demande de lui transmettre mon message, Monsieur le président. J'ai pris acte de ses dires: le combat de ce qu'il est - c'est-à-dire un député écologiste de droite, si j'ai bien compris - s'oppose à la liberté individuelle. Cela signifie que l'écologie, qu'elle soit de gauche ou de droite, est l'ennemie de la liberté individuelle. C'est le même problème que l'on a au travers de cette initiative. La liberté de circuler est un élément important. Ce sera bientôt la liberté d'exister qui sera mise en cause par le mouvement écologiste ! C'est pour cela que nous devons voter cette initiative. Merci.

M. Jean Batou (EAG). Je voulais réagir à une ou deux choses que j'ai entendues ce soir. Je vais commencer par M. Aellen - vous transmettrez, Monsieur le président. Je comprends très bien que la baisse de moitié de l'impôt auto ne va pas avoir d'influence sur le nombre de véhicules qui vont circuler à Genève, pour une raison: dans les dépenses des ménages, l'impôt auto joue un rôle relativement secondaire.

Maintenant, c'est un message politique qui est envoyé. C'est évidemment cela qu'il faut entendre. Ce n'est pas l'effet économique d'une baisse de moitié de l'impôt auto qui va stimuler la circulation automobile à Genève. Mais c'est un message déconcertant qui est envoyé par les initiants, à savoir: l'automobile ne joue aucun rôle négatif dans l'ensemble des paramètres liés à l'environnement que nous subissons à Genève. C'est ce message politique qu'il faut refuser. Bien entendu, ce n'est pas l'effet économique induit par une baisse de moitié de l'impôt auto.

Deuxièmement, je souhaiterais réagir aux propos de M. Dimier - vous transmettrez. Il dit: le fait qu'on circule beaucoup ou peu n'est pas pris en compte par l'impôt. Mais c'est totalement faux ! Tout d'abord, parce que l'impôt principal payé par l'automobiliste, c'est l'impôt qu'il paie sur le carburant. Par conséquent, si vous utilisez peu de carburant, cela vous coûtera beaucoup moins cher en impôts que si vous en utilisez beaucoup. Cela fait donc aussi une différence. Quand on affirme des choses comme ça, il faut réfléchir, pour ne pas dire des incongruités. Et là, très franchement il y a une différence fondamentale entre celui qui utilise et celui qui n'utilise pas son véhicule. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole au rapporteur de première minorité, M. Christo Ivanov. Il vous reste cinq minutes trente-cinq.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Il y a effectivement beaucoup de matière et donc beaucoup de réponses à donner. J'aimerais d'abord faire une petite remarque à mes amis socialistes: s'ils pouvaient demander à leur conseiller fédéral, M. Berset, de ne pas voler avec son avion, ce serait mieux pour la planète ! (Commentaires.) Ça, c'est la première observation.

J'aimerais ensuite répondre à M. Wenger - vous transmettrez, Monsieur le président - qu'en effet, en ville de Genève, 40% à 50% des gens n'ont pas de véhicule, mais il s'agit de personnes qui vivent seules ou de couples sans enfants. Donc...

Une voix. Maaais non !

M. Christo Ivanov. Si ! C'est la réalité, ce sont les chiffres... (Commentaires.) ...qui ont été donnés par le Touring club suisse.

Des voix. Aaah ! (Commentaires.)

M. Christo Ivanov. Donc, c'est la réalité ! C'est la réalité ! Vous ne voulez pas accepter la vérité, mais c'est la réalité. (Remarque.) Ouais, enfin...

Une voix. Continue !

M. Christo Ivanov. Je ne fais pas la lutte des classes, Monsieur Dimier ! Ne me perturbez pas, cher collègue ! (Remarque. Rire.) Aujourd'hui, ceux qui ont des véhicules, ce sont majoritairement des familles ou des gens qui habitent dans la ceinture suburbaine ou des gens qui viennent de la campagne travailler en ville. Si je prends l'exemple de mon collègue Stéphane Florey, comment ferait-il pour aller au dépôt du Bachet-de-Pesay pour contrôler son tram et partir à 4h du matin s'il n'avait pas de véhicule ? Expliquez-moi ! Il devrait prendre un taxi ou... (Commentaires.) Vous m'avez compris ! (Commentaires.) Oui, il y a des gens qui se lèvent tôt et qui travaillent et, à l'UDC, on a l'habitude de se lever tôt et de travailler.

En ce qui concerne le contreprojet, cela a été évoqué, le projet de loi 12873 du Conseil d'Etat veut augmenter les impôts, est punitif, avec un effet rétroactif. Et je suis membre de la... (Remarque.) Ce projet de loi a un effet rétroactif. (Remarque.) Oui, Monsieur le conseiller d'Etat ! Par conséquent, je pense que si la commission veut plancher sur un contreprojet, il faudrait vraisemblablement partir sur une autre piste et sur le projet de loi du Touring club suisse, porté par le MCG.

Maintenant, cela a été dit, s'agissant du pouvoir d'achat, je crois que nul n'est prophète en son pays. En Suisse, on a la chance de maîtriser à peu près l'inflation autour de 3%-3,5%, ce qui n'est pas le cas d'autres pays, quand on voit ce qu'il se passe en France et en Angleterre. Mais en France, ils ont au moins la chance d'avoir un soutien pour les carburants, ce qui n'est pas le cas en Suisse, puisque les initiatives de l'UDC pour obtenir des rabais pour les carburants ont malheureusement été balayées par le Conseil national.

Aujourd'hui, comme l'a dit M. Aellen, il y a un véritable problème de pouvoir d'achat, et la population est à l'aube d'un hiver rigoureux et difficile, avec certainement des coupures de courant, que je connais lorsque je suis Afrique, mais que nous allons connaître cet hiver à Genève. Certains vont peut-être comprendre de quoi je parle. Il va falloir se serrer la ceinture quoi qu'il arrive. Je suis donc très optimiste avec cette initiative 178 qui demande de diviser l'impôt auto par deux. C'est un vote qui sera un vote psychologique, et je n'ai aucun doute sur le fait que le peuple genevois votera de la même façon que le peuple du Jura. Pour toutes ces raisons, la minorité de la commission vous recommande d'accepter l'initiative 178. Je vous remercie, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole va à M. Grégoire Carasso, rapporteur de majorité, pour cinq minutes trente-cinq.

M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je serai bref et je tâcherai de rester sur le sujet. Au nom de la majorité, je rappellerai peut-être deux éléments discutés dans le cadre des travaux de la commission, avec des sensibilités différentes - le chemin me paraît soudainement assez long entre ce soir et un contreprojet probable, improbable, d'ici douze mois. Je mentionnerai premièrement les chiffres suivants: Berne a été cité comme exemple, le Jura aussi. Je ne reviens pas sur la proximité géographique, topographique et socioéconomique entre le Jura et Genève, mais avec Berne, il existe des parallèles. Et en plus, s'agissant de Berne, vous avez raison, pour celles et ceux qui ont donné cette référence, on peut établir une comparaison avec un projet de loi qui visait effectivement à modifier l'imposition sur les véhicules, avec une augmentation pour les véhicules les plus polluants, en tout cas - pour faire simple - ceux qui comportent le plus d'externalités négatives. Quels sont les résultats de ce scrutin à Berne ? Mesdames et Messieurs, les villes bernoises ont approuvé ce projet.

Une voix.  Ça a été refusé !

M. Grégoire Carasso. Les villes bernoises ont approuvé ce projet. (Remarque.) Ces villes que l'UDC qualifie volontiers de parasites - ce sont des propos qui ont occupé une partie de nos travaux en commission. A Genève, c'est 80% de réalité urbaine. A Genève, il y a encore plus de ménages sans voiture qu'à Berne. Et je vous rappelle la tendance: entre 2000 et 2015 - je me réjouis d'avoir les chiffres de 2025, et vous savez les raisons pour lesquelles ceux de 2020 n'existent pas -, le nombre de ménages sans voiture est passé de 30% à 42%... (Commentaires.) ...et c'est exactement la même tendance dans les communes suburbaines de la première couronne - vous transmettrez à M. Sormanni, qui est manifestement passionné par ce débat, mais privé de parole, semble-t-il - ainsi que dans le secteur périurbain. (Commentaires.)

Une voix. Chut !

M. Grégoire Carasso. Nous avons donc à Genève, en ville et à l'échelle du canton, entre 2000 et 2015, une proportion de ménages sans voiture qui augmente sans cesse. Avec cette réalité-là et un environnement autrement plus urbain que celui du canton de Berne - car nous n'avons pas la profondeur de ses campagnes et de ses montagnes -, cette initiative, je n'en doute pas, d'ici dix-huit mois, lorsqu'elle sera soumise au peuple, avec un contreprojet un tant soit peu crédible sur le volet social et environnemental, appartiendra vite au passé, et à titre personnel, je m'en réjouis. Merci.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Merci, Mesdames les députées, merci, Messieurs les députés, pour ce débat très intéressant, qui reprend les codes habituels des débats sur la mobilité, mais quand même, avec un peu plus de profondeur cette fois-ci. C'est assez étonnant d'ailleurs que le débat ait pu avoir une certaine profondeur quand on voit que finalement l'objet lui-même ne fait pas du tout dans la dentelle, c'est le moins qu'on puisse dire - cela a été relevé par la majorité d'entre vous.

Je ne voudrais pas m'attarder sur cette initiative elle-même, car ses défauts ont été largement relevés, mais simplement revenir sur les deux éléments fondateurs de ce texte, sur lesquels s'appuient les initiants: premièrement, le fait de prétendre qu'à Genève, on est beaucoup plus chers que partout ailleurs en Suisse, et deuxièmement, le fait de considérer que ce qui justifie une baisse de cet impôt, au-delà de son coût prétendument excessif, c'est qu'on a de moins en moins de place pour circuler.

S'agissant du coût, cela a été dit à plusieurs reprises, je le confirme ici, le directeur général de l'office cantonal des véhicules l'a indiqué, nous sommes exactement dans la moyenne, avec la moyenne de l'imposition de tous les véhicules qui se trouvent à Genève. S'il est absolument clair que pour certains types de véhicules, les plus puissants, les plus gourmands, nous sommes plus chers - ce qui pousse d'ailleurs un certain nombre d'habitants de ce canton à immatriculer leur véhicule dans d'autres cantons, de manière illégale -, il est vrai également que la tarification est plutôt avantageuse pour la très grande majorité des véhicules utilisés par nos concitoyens: si nous sommes dans la moyenne, avec des véhicules puissants qui tirent cette moyenne vers le haut, cela signifie que nous sommes tout à fait avantageux pour les véhicules standards. Par conséquent, s'agissant du premier élément, qui consiste à faire croire à la population qu'elle paie beaucoup plus cher qu'ailleurs, pour certains, c'est le cas, pour la grande majorité, non.

Pour ce qui est du deuxième élément, à savoir la question du «moins de place» et la réflexion qui consiste à dire «moins de place, donc moins d'impôts» en s'appuyant sur ces fameuses décisions - dont on a abondamment parlé dans cette enceinte -, c'est faux ! C'est faux également ! Ce qui empêche aujourd'hui les automobilistes de rouler - et celui qui vous parle est quelqu'un qui aime bien les voitures, il les aime même beaucoup, en tout cas certaines -, ou si on peut moins bien rouler, ce n'est pas à cause des pistes cyclables ! C'est à cause du trafic insensé que l'on connaît dans cette ville ! (Remarque.) C'est parce qu'il y a un nombre exagéré, très exagéré même, de véhicules sur notre réseau. Cela a justement pour conséquence - je m'adresse aux motards de cette assemblée - d'entraver de manière parfois insupportable l'activité économique, puisque les transporteurs professionnels sont les premiers à souffrir de cet engorgement. Par conséquent, lorsqu'on essaie de trouver des alternatives - comme la pratique du vélo ou les transports publics -, de les étendre, de les sécuriser et de les rendre plus confortables, c'est pour diminuer le trafic et, précisément, pour corriger les tares que vous trouvez aujourd'hui au trafic dans ce canton.

Voilà pour cette initiative. Le Conseil d'Etat, vous le savez, vous recommande de la rejeter, comme apparemment la majorité de ce parlement - on s'en réjouit vivement -, et de lui opposer un contreprojet. Pourquoi lui opposer un contreprojet ? Parce que, nous le reconnaissons, cela a été relevé par plusieurs d'entre vous, cette initiative, du fait de sa simplicité - je n'utiliserai pas les termes qui ont été prononcés ici, comme «populiste», «démagogique», etc. -, risque effectivement de séduire une partie de la population, en particulier les personnes qui se posent aujourd'hui légitimement la question de ce qu'il advient de leur pouvoir d'achat en raison de la situation actuelle de l'inflation. C'est quelque chose à prendre très au sérieux. Le contreprojet que le Conseil d'Etat appelle de ses voeux est donc très important et il faudra effectivement trouver un large consensus pour qu'il soit attractif, équilibré et constitue une réponse simple à cette initiative.

Le Conseil d'Etat, dans son rapport, vous propose de considérer le projet de loi qu'il a déposé comme pouvant constituer un contreprojet. Il est vrai que ce texte, qui a été gelé à une certaine époque par la commission fiscale, n'est pas des plus simples. Mais s'il n'est pas des plus simples, c'est parce qu'il s'est agi de trouver des équilibres subtils en respectant les injonctions de la motion votée par le Grand Conseil à une très très large majorité, motion qui demande pratiquement de résoudre la quadrature du cercle. Nous pensons en tout cas que les ingrédients de ce projet de loi sont subtils et équilibrés, même si certainement perfectibles.

J'ajouterai peut-être une précision concernant la promotion de l'électromobilité - je ne sais plus, je crois que c'est le député Zweifel qui a évoqué ce sujet. Il est absolument certain que l'électromobilité et les voitures propulsées par des moteurs électriques alimentés par des batteries, ce n'est pas la panacée, et ce qui a été dit sur leur bilan global CO2 est parfaitement exact: il faut rouler beaucoup de kilomètres avant que ce type de véhicule devienne plus avantageux sous cet angle-là que ceux à moteur thermique. Mais le fonds visant à promouvoir l'électromobilité concerne les propulsions électrique ou à pile à combustible, c'est-à-dire également à hydrogène, si la technologie arrive à maturité. Ce n'est donc pas du tout exclu, c'est même tout à fait encouragé - c'est le cas de le dire - d'utiliser le fonds en question, que nous avons envisagé également pour les moteurs à hydrogène.

Voilà ce que je voulais vous dire. Certes, le contreprojet - ou le projet de loi déposé le Conseil d'Etat - est complexe. Il peut être retravaillé. Nous sommes tout à fait prêts, avec mes équipes, à travailler avec la commission pour élaborer quelque chose de plus simple et de plus intéressant. C'est dans cette perspective que nous nous réjouissons d'oeuvrer. Je vous invite donc, Mesdames les députées, Messieurs les députés, à refuser cette initiative et à adopter le principe d'un contreprojet. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le premier vote porte sur la prise en considération de cette initiative et le deuxième sur le principe d'un contreprojet.

Une voix. Que le peuple tranche !

Une autre voix. C'est ce qu'a dit Louis XVI ! (Rires.)

Une autre voix. Et le peuple a tranché !

Mise aux voix, l'initiative 178 est refusée par 77 non contre 17 oui (vote nominal).

Vote nominal

Mis aux voix, le principe d'un contreprojet est accepté par 68 oui contre 23 non et 6 abstentions (vote nominal).

Vote nominal

Le rapport IN 178-B est renvoyé à la commission fiscale.