République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Jean-Luc Forni, président.

Assistent à la séance: MM. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat, et Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco, Nathalie Fontanet et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Delphine Bachmann, Beatriz de Candolle, Grégoire Carasso, Thierry Cerutti, Jennifer Conti, Diego Esteban, Amanda Gavilanes, Jean-Marc Guinchard, Katia Leonelli, Patrick Saudan, Adrienne Sordet, Salika Wenger et François Wolfisberg, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Anne Bonvin Bonfanti, Denis Chiaradonna, Nicolas Clémence, Jean-Charles Lathion, Xavier Magnin, Aude Martenot, Jean-Pierre Pasquier, Helena Rigotti et Gabriela Sonderegger.

Annonces et dépôts

Néant.

P 2121-B
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition contre la décharge de la Place Verte
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 23 et 24 juin 2022.
Rapport de majorité de Mme Christina Meissner (PDC)
Rapport de première minorité de M. Sylvain Thévoz (S)
Rapport de deuxième minorité de M. Alexis Barbey (PLR)

Débat

Le président. Nous continuons notre ordre du jour avec le traitement des pétitions, en commençant par la P 2121-B. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. (Brouhaha.) Quelqu'un peut-il fermer la porte ? Merci, Monsieur Eckert ! Je passe la parole à Mme Christina Meissner, rapporteure de majorité.

Mme Christina Meissner (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Je me demande si on a le quorum, juste là ! (L'oratrice rit. Remarque.)

Pour rappel, nous parlons d'une décharge située en zone agricole à Veyrier. Elle est traversée par un corridor biologique et se trouve en plein milieu d'une zone habitée; il s'agit de la seule décharge du plan directeur cantonal ainsi située.

Le retour en commission a permis de procéder à des auditions complémentaires à celle des habitants pétitionnaires de la commune et du service cantonal de géologie, sols et déchets - GESDEC. Nous avons en effet entendu l'exploitant de la décharge, l'exploitant agricole, l'office cantonal de l'agriculture et de la nature ainsi que les associations Pro Natura et WWF. A l'issue de toutes ces auditions, la majorité de la commission considère toujours qu'il y a un clair manque de dialogue. Les pétitionnaires et associations n'ont jamais été entendus par les services du département du territoire et n'ont jamais reçu de réponse de leur part à leurs questions, observations ou propositions. Lors du premier examen de la pétition, les représentants des plus de 1500 habitants pétitionnaires nous avaient déjà informés qu'aucune concertation n'avait eu lieu. L'audition des associations environnementales a révélé que même Pro Natura, qui est propriétaire d'une grande parcelle adjacente, n'a jamais été consultée, ne serait-ce qu'à ce titre.

Le WWF et Pro Natura nous ont rappelé qu'ils s'opposent à ce projet. Celui-ci ne prévoit en effet aucune compensation écologique, alors que le terrain se trouve sur un corridor biologique transfrontalier faisant partie du contrat corridors signé en 2012 par le canton, qui avait entre autres buts la restauration et la pérennisation de ces liaisons écologiques majeures et l'inscription des mesures prises en leur faveur dans toutes les planifications. Cet engagement est par ailleurs repris dans le plan d'action biodiversité du canton de Genève, qui a été validé par notre Grand Conseil en 2020.

Dès lors, ne croyez pas sur parole le rapporteur de minorité, mon cher collègue Sylvain Thévoz - dont je salue l'arrivée -, qui prend ses espoirs pour des réalités. Il écrit dans son rapport: «L'objectif du projet est de donner une pente à ce sol, ce qui améliorera la qualité d'absorption des pluies. Le développement des zones humides notamment au bois Marquet sera meilleur. Cela permettra le maintien des crapauds sonneurs et autres amphibiens qui y trouveront refuge. Il y aura également des réaménagements paysagers, de la promotion des éléments naturels [...]. Cela préservera l'environnement, la nature ainsi que la qualité de vie des habitants.» Ah, j'aimerais bien qu'il ait raison, mais je n'ai pas entendu ça ! Il n'y a aucune garantie que ces objectifs en lien avec la décharge soient atteints, ni même visés, et encore moins actés. Au contraire, l'OCAN nous a dit que les éventuelles compensations seraient traitées au moment de l'autorisation de construire. Cette déclaration est pour le moins surprenante, car les études ou notices d'impact sont toujours examinées en parallèle ou en amont d'un projet, et non lors de sa finalisation, ne serait-ce que pour identifier les impacts et évaluer la nécessité de mesures environnementales. Des mesures environnementales, l'exploitant agricole en a même prévu, et elles sont de qualité, mais elles n'ont pas été liées au projet de décharge et aucune garantie n'est donnée quant à leur réalisation, ce qui est regrettable.

Dans son rapport de minorité, le député Barbey - que je salue également - conclut qu'il s'agit «d'assumer enfin notre politique de croissance immobilière et de permettre à la rénovation thermique des bâtiments de trouver une destination pour les inévitables déchets qu'elle engendrera». Permettez-moi de questionner cette conclusion sur les déchets liés à la rénovation énergétique. Pourquoi y en aurait-il ? Il est plus qu'urgent - comme l'ont rappelé d'ailleurs le WWF et Pro Natura - de rénover plutôt que de détruire, de réemployer les matériaux dans un cercle vertueux de recyclage et d'utiliser le train plutôt que les camions pour transporter les déchets que l'on ne peut vraiment pas recycler. Renvoyer la pétition au Conseil d'Etat ne signifie en aucun cas être d'accord avec l'exportation des déchets en France voisine par camion, car cette pratique impacte évidemment les milieux ailleurs et le climat. Les alternatives existent !

En conclusion, toutes ces auditions ont révélé l'absence de réponses aux questions pertinentes posées par les associations et l'absence de dialogue, alors que de bonnes propositions sont émises par les habitants, l'exploitant agricole et les associations environnementales. Il est urgent que le dialogue s'instaure, et c'est ce message que la majorité de la commission vous propose de faire passer en renvoyant cette pétition au Conseil d'Etat. Je vous remercie.

M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de première minorité. Les auditions complémentaires n'ont pas foncièrement changé la position du parti socialiste. Nous préconisons toujours le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Pourquoi ? Parce qu'il ne faut pas opposer agriculture et environnement. Or il s'agit là d'un projet qui permet de réhabiliter un terrain agricole et de régler une partie du problème des remblais que - vous le savez - Genève a de la peine à traiter, dans le respect de la nature et de l'environnement. C'est donc un bon projet, et il n'est pas aussi nocif que le prétendent les pétitionnaires. Il y a en effet un certain nombre d'erreurs, notamment la surévaluation de la noria des camions.

Pour répondre à Mme Meissner, ce n'est pas moi qui parlais de l'impact sur l'environnement, mais le directeur de l'office cantonal de l'agriculture et de la nature. Il a du reste rappelé que ce projet est de nature réversible, avec à terme une qualité du site identique. Celui-ci vise même à une amélioration de la situation avec l'ajout d'éléments végétaux permettant de consolider le corridor végétal. Alors, oui, les travaux vont avoir des impacts, mais le directeur de l'OCAN a également rappelé que le déplacement des espèces ne sera pas entravé: le projet se développera par étapes et la faune pourra continuer à se déplacer.

Mesdames et Messieurs, veut-on continuer à exporter nos matériaux de remblai jusqu'à Grenoble, ou au-delà, en faisant parcourir des centaines de kilomètres à des camions ou veut-on identifier un lieu à Genève qui permettra de réhabiliter un terrain agricole aujourd'hui en partie inondé, de réaménager des cheminements dans l'environnement immédiat pour les usagers et, à terme, de développer l'agriculture afin de cultiver à Genève même des aliments de première nécessité ? Pour le parti socialiste, la réponse est claire, et nous sommes en faveur du dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Merci.

M. Alexis Barbey (PLR), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je vous pose la question: qu'y a-t-il de moins attirant au monde qu'une décharge ? Notre société produit cependant des tonnes de déchets, dont ceux liés à la construction et à la transformation immobilières. De nombreux citoyens, pourtant de bonne foi, prônent le principe «tout, mais pas dans mon jardin», et il faut dire qu'à la commission des pétitions on a vu passer des gens qui, avec les meilleures intentions du monde, trouvaient que les décharges étaient une très bonne chose, pourvu qu'elles ne soient pas situées devant leurs fenêtres. Il convient de dépasser cette attitude égocentrée pour évaluer l'intérêt général.

La décharge de la Place Verte est un exemple emblématique d'un recyclage intelligent. Située à un endroit actuellement peu favorable à la culture, elle permettra en cinq ans de réhabiliter le site et de le rendre aux plantations. A ce moment, la déclivité de la pente sera rectifiée pour favoriser le ruissellement des eaux. La couche superficielle permettra à nouveau de labourer le lieu, requalifiant ces surfaces en surfaces d'assolement, si rares et nécessaires à notre canton. Moins de marécages pour plus de pâturages.

Bien sûr, ces travaux entraîneront quelques désagréments pour les riverains. En particulier, un mouvement de camion aura lieu toutes les dix minutes dans les environs. Mais il s'agit de préciser que ce chantier sera traité en quatre tranches distinctes; ce ne seront donc pas toujours les mêmes abords qui seront dérangés. D'autre part, ces camions passeront par des routes où les niveaux sonores dépassent déjà largement ceux desdits camions. Il n'y aura dès lors pas de bruit additionnel pour les riverains. Enfin, pendant les travaux, un corridor faunique sera déplacé de quelques dizaines de mètres. Sans être spécialiste, on peut penser que les animaux sauront s'adapter à ces changements pour emprunter un trajet légèrement différent pendant ces quelques mois. L'office cantonal de l'aménagement et de la nature nous l'a d'ailleurs confirmé.

Les désagréments mis à part, qu'est-ce qui justifie de faire une décharge pour matériaux inertes à cet endroit ? En premier lieu, cette décharge permettra d'éviter l'envoi de camions chargés de graviers à plus de cent kilomètres de Genève. Nous devons en effet à l'heure actuelle exporter nos déchets jusqu'à Grenoble, ce qui entraîne des nuisances et une pollution qui pourraient être évitées. D'autre part, il faut bien admettre que traiter soi-même ses déchets pour les mettre en décharge relève d'un sens de la responsabilité propre à notre fonctionnement démocratique. Ne faisons pas faire aux autres ce que nous ne voulons pas faire nous-mêmes. Idéalement, ce devrait être un motif de fierté pour les citoyens que de traiter ces décharges de manière domestique. D'ailleurs, des mesures de compensation sont prévues pour améliorer encore la parcelle, avec la plantation d'une haie et de six chênes.

En conclusion, on peut dire que si l'on ne profite pas d'un endroit favorable comme la Place Verte pour créer une décharge inerte et temporaire, on ne pourra faire cette décharge nulle part. Et cela ne correspond pas au sens des responsabilités de notre Etat et de nos citoyens. Il s'agit donc de déposer la pétition 2121 sur le bureau du Grand Conseil, d'assumer enfin notre politique de croissance immobilière et de trouver un lieu où entreposer les inévitables déchets engendrés par la rénovation thermique des bâtiments. Je vous remercie.

M. Jean Batou (EAG). J'aimerais commencer par souligner que cette question, qui a occupé la commission des pétitions pendant de nombreuses séances, a révélé tout de même un défaut de consultation de la population concernée. D'autre part, je ne suis pas convaincu de l'absence d'effets sur la faune. A une époque où l'on parle de surfaces pour promouvoir la biodiversité, vous avez vanté les pâturages en dévaluant les marécages. Un tout petit peu de marécages, c'est utile pour les batraciens ! Enfin, il est également question d'une circulation massive de camions dans la région et des probables effets à long terme du chlorure de calcium qui sera déversé pour éviter les poussières. Le bilan du point de vue micro-environnemental et sur le plan politique communal n'est donc pas très bon.

Ensuite, j'aimerais évoquer un aspect qui est plus important pour moi; il n'est pas thématisé dans la discussion, mais il a été révélé par les auditions. Aujourd'hui, nous avons 2,5 millions de mètres cubes de déchets non polluants, qu'il faut, disons, relocaliser. Cela représente 150 000 camions par an. Je crois que si l'on n'en prend pas conscience de manière à agir en amont et à réduire la production des déchets - mais cette question dépasse l'objet de cette pétition -, eh bien on va se mettre à remodeler les sols pour combler des creux, créer des vallonnements, et on va transformer la nature afin de pouvoir stocker les déchets. Si chaque année on produit un volume de déchets équivalent à celui de la pyramide de Khéops - ce qui est à peu près le cas -, imaginez combien de pyramides de Khéops il va falloir relocaliser s'agissant de la reconstitution des paysages et de la nature, avec tous les effets induits, qui sont imprévisibles !

C'est la raison pour laquelle, par prudence, je me suis convaincu au fil de ces auditions qu'il fallait d'une part refuser cette décharge et donc envoyer un message au Conseil d'Etat pour qu'il s'empare de ce dossier, et d'autre part lancer une réflexion sur la réduction impérative de la production de déchets dans notre canton. Merci.

M. David Martin (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, le groupe des Vertes et des Verts est divisé sur la manière d'interpréter cette pétition. D'un côté, nous sommes en effet inquiets quant aux impacts environnementaux de ce projet, notamment sur un important corridor écologique qui se déploie à cet endroit, mais aussi concernant certains aspects évoqués en lien avec le ruissellement des eaux et d'éventuels problèmes d'inondation. Les auditions n'ont malheureusement pas permis d'apaiser les craintes au sujet de la préservation de ce corridor. L'OCAN a effectivement indiqué que les compensations seraient précisées un peu plus tard dans la procédure. Le WWF et Pro Natura n'ont jamais reçu de réponse à un courrier envoyé dans lequel ils demandaient à être entendus. Néanmoins, je souligne qu'ils ont dit n'avoir pas pris position sur la question de faire recours. Il est donc faux de dire qu'à terme ils feront opposition à ce projet. Toujours est-il qu'ils n'ont pas été entendus, et nous regrettons amèrement ce manque de dialogue autour du projet, car cela ouvre la porte à la critique. Ce projet est probablement imparfait, mais tout n'est pas à jeter. Nous voulons qu'il apporte une compensation significative en faveur de la biodiversité et que ces mesures soient détaillées sans attendre. Il faut aussi que le phasage du projet permette, cela a été dit, le maintien du corridor.

D'un autre côté, il nous semble important d'appuyer l'engagement de notre parlement, qui a soutenu à une quasi-unanimité - en 2011 lors du changement de la loi puis en 2017 - ce projet d'intérêt cantonal autour de l'élaboration du plan directeur des décharges de type A. Il s'agit de décharges, il faut le préciser, pour des matériaux non pollués. Ce sont des déblais, et non pas, comme dit précédemment, des déchets de démolition liés à la construction. En gros, c'est de la terre, ce sont des déblais qu'on met sous la terre végétale. Le plan directeur des décharges de type A prévoyait déjà en 2017 l'emplacement de la Place Verte comme site prioritaire, et il est de notre responsabilité - on l'a indiqué - de gérer ces déblais à l'échelle du canton. Il n'est pas simple d'avoir un projet faisant l'objet de peu d'oppositions, or ici nous sommes en présence d'une commune avec un exécutif et un Conseil municipal qui ne sont certes pas complètement emballés, mais qui ne s'opposent pas au projet. Je pense qu'il est important de le relever.

En conclusion, nous avons différents points de vue au sein de notre groupe. Certains soutiendront la pétition afin que ce projet soit revu et amélioré, tandis que d'autres la refuseront pour que ledit projet soit poursuivi, tout en étant amélioré, de sorte qu'on le rende absolument magnifique. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, je vais mettre aux voix les conclusions de la majorité de la commission, c'est-à-dire le renvoi au Conseil d'Etat.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2121 au Conseil d'Etat) sont rejetées par 39 non contre 31 oui et 2 abstentions. (Commentaires pendant la procédure de vote.)

Le président. Je vous invite maintenant à vous prononcer sur les conclusions de la minorité de la commission, soit le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

Mises aux voix, les conclusions de la minorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 2121 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 43 oui contre 23 non et 9 abstentions (vote nominal).

Vote nominal

P 2141-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : Pour la sauvegarde de l'église Saint-Pie X - Mesures urgentes pour sauver l'église Saint-Pie X de la démolition
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 23 et 24 juin 2022.
Rapport de majorité de M. Jean-Marie Voumard (MCG)
Rapport de minorité de M. Stéphane Florey (UDC)

Débat

Le président. Nous passons à notre dernière pétition, la P 2141-A, classée en catégorie II, trente minutes. Monsieur Voumard, vous avez la parole.

M. Jean-Marie Voumard (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition s'oppose à la démolition de l'église Saint-Pie X, nommée en l'honneur du pape Pie. Nous avons entendu la commune de Vernier ainsi que la pétitionnaire, qui nous a indiqué que cette église datant de 1962 ne figurait pas au patrimoine, n'était pas cataloguée et ne devait pas être conservée. Elle va être démolie à des fins sociales. En effet, de nouveaux appartements vont être créés: septante logements sur huit étages, dont 30% de logements sociaux et 70% de logements à loyer libre, ce qui est une bonne chose à mon sens.

M. Moro, le chef du service de l'aménagement de la commune de Vernier, nous a par ailleurs indiqué que les églises se trouvaient dans des zones d'habitat, car il n'y a pas de zones spécifiques réservées aux lieux de culte. Je rappelle cet élément à l'intention du rapporteur de minorité, qui va sûrement attaquer sur ce point. En conclusion, la commission vous recommande le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie.

M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de minorité. La minorité demande le renvoi de cet objet à la commission des pétitions pour deux raisons, que je vais brièvement évoquer. Premièrement, il aurait été intéressant d'entendre la CMNS à propos de la conservation du patrimoine des années 60, y compris le patrimoine cultuel, car un certain nombre de questions à ce sujet sont restées sans réponse. Deuxièmement, l'audition du DT nous aurait permis d'obtenir une explication quant à son approche du territoire et de savoir dans quelle zone devraient être situées ces églises. Est-ce qu'il ne faut pas créer une zone spéciale ? Est-ce qu'elles sont bien à leur place en zone de développement ? Pour la minorité, toutes ces questions sont restées en suspens et les travaux n'ont pas été faits correctement. Je demande par conséquent le renvoi de cet objet à la commission des pétitions. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Monsieur le rapporteur de majorité, voulez-vous vous exprimer sur le renvoi en commission ?

M. Jean-Marie Voumard (MCG), rapporteur de majorité. Oui, merci, Monsieur le président. Nous sommes totalement opposés à ce renvoi. Je rappelle juste que le rapport de minorité mentionne les manèges équestres, qui devraient se trouver en zone sportive. Ça, je peux le comprendre, mais une église, c'est tout à fait autre chose. Je vous remercie, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Le Conseil d'Etat souhaite-t-il prendre la parole sur le renvoi en commission ? (Remarque.) Si ce n'est pas le cas, je mets tout de suite aux voix cette demande de renvoi.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la pétition 2141 à la commission des pétitions est rejeté par 63 non contre 5 oui.

Le président. Nous continuons le débat et je passe la parole à Mme la députée Christina Meissner.

Mme Christina Meissner (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, c'est principalement un attachement de type émotionnel qui a été exprimé par les pétitionnaires. Il faut le comprendre: le projet est complexe, le quartier très dense et les arbres de grande taille précieux. Seul un pin sera sacrifié; il sert de perchoir aux rapaces, et les habitants y sont sensibles. Cependant, c'est le seul grand arbre condamné par le projet de l'Eglise catholique, lequel est nécessaire car, hélas, le bâtiment est une vraie passoire énergétique.

Le choix architectural préserve et améliore l'usage du lieu de culte, en lui apportant une plus-value par l'ajout d'une cour intérieure qui amènera la lumière au coeur de l'église. La grande croix caractéristique du bâtiment perdurera et un maximum de matériaux sera recyclé dans la nouvelle église. Cette transformation permettra d'ajouter quelques logements dans une zone qui y est destinée et de financer les frais des travaux. Ces logements seront situés sur la partie la plus éloignée de la route, et la commune de Vernier a assuré travailler en vue de diminuer les nuisances causées par le trafic. Le projet apportera une plus-value en termes de végétation et les architectes ont garanti qu'ils étaient prêts à augmenter encore cette végétalisation, notamment sur les toitures et les murs. Le PDC veut leur faire confiance et remercie les responsables du projet ainsi que la commune de Vernier de tenir le voisinage informé de son avancement. Dès lors, nous voterons en faveur du dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Nicole Valiquer Grecuccio.

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Merci, Monsieur le président. Je vous informe que je ne prendrai pas part au vote pour des raisons professionnelles. Merci.

M. Jean Batou (EAG). J'aimerais dire brièvement que le projet qui nous a été présenté est presque parfait. Cette grande église est une passoire énergétique et elle n'est plus fréquentée par beaucoup de paroissiens. L'Eglise est en déficit et n'arrive pas à entretenir ce bâtiment; elle veut donc réduire sa surface et créer du logement. Le projet tel que l'architecte nous l'a exposé est bon. Les matériaux seront recyclés, comme l'a fait savoir Christina Meissner avant moi. Franchement, je ne vois aucune raison de refuser ce projet et je pense dès lors qu'il faut déposer la pétition sur le bureau du Grand Conseil. Merci.

M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, sans mauvais jeu de mots, la messe est dite. A part M. Florey qui était le seul à soutenir cette pétition, l'entier de la commission a voté le dépôt pour les raisons avancées précédemment: une église vieillissante et un public qui n'est plus celui des années 60 ou 50. C'est du reste le cas de nombreuses églises en ville de Genève, à l'avenue d'Aïre, à l'avenue Wendt, où plusieurs lieux de culte sont surdimensionnés, n'ont pas été suffisamment entretenus et constituent aujourd'hui des gouffres énergétiques. L'Eglise catholique fait là preuve d'intelligence. Elle désire en effet récupérer ce lieu pour en faire un espace de culte plus petit, créer du logement et avoir une ouverture sur le quartier, avec une salle qui sera bien évidemment offerte aux habitants. Ce projet est donc bon et il n'y a aucune raison de s'y opposer. Pour le parti socialiste, il va même dans le bon sens et nous soutiendrons ainsi le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, nous allons nous prononcer sur les conclusions de la majorité de la commission, à savoir le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 2141 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 73 oui contre 6 non (vote nominal).

Vote nominal

RD 1393-A
Rapport de la commission de contrôle de gestion chargée d'étudier le rapport d'activité du Bureau de médiation administrative pour l'année 2020
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 23 et 24 juin 2022.
Rapport de M. Alexis Barbey (PLR)

Débat

Le président. Nous passons à présent aux urgences, en commençant par le RD 1393-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole au rapporteur, M. Alexis Barbey.

M. Alexis Barbey (PLR), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission de contrôle de gestion a été amenée à statuer sur le rapport d'activité du Bureau de médiation administrative. Le Bureau de médiation administrative est une création relativement récente au sein de notre administration, dont l'objectif est de traiter tous les conflits qui peuvent exister entre des personnes externes à l'administration et l'administration elle-même. C'est un objectif assez ambitieux et assez large. Dans le cadre d'une élection qui a eu lieu au sein de ce Grand Conseil, nous avons élu le médiateur cantonal, à qui a été adjointe une suppléante. Cette dernière est amenée à travailler avec lui, mais surtout sans lui, puisqu'elle n'est appelée que lorsqu'il est en vacances et qu'il n'est pas disponible.

Ce rapport du Bureau de médiation administrative n'a que moyennement conquis ou convaincu, plutôt, la commission de contrôle de gestion. Plusieurs points nous sont effectivement apparus. Premièrement, ce bureau est relativement peu sollicité par rapport aux ambitions qu'il a. Il a en effet été sollicité à 340 reprises environ pendant l'année 2020, soit l'année que nous avons étudiée. Ce qui paraissait beaucoup au médiateur a donc paru relativement faible à la commission, qui s'attendait à davantage de problématiques et de cas dans lesquels ce bureau aurait pu statuer.

Deuxièmement, ce qui nous a semblé étrange, si vous voulez, c'est l'idée que ce Bureau de médiation administrative ne fait pas vraiment de la médiation, mais qu'il aide plutôt les gens en difficulté avec l'administration. Si une personne n'arrive pas à joindre, par exemple, son conseiller fiscal au service de recouvrement, elle peut demander au Bureau de médiation administrative de l'aider à établir le contact, ce que celui-ci fera volontiers. Or il le comptera dans ses interventions, alors que cela nous paraît être une facilitation, mais pas de la médiation en soi. Il y a donc certains doutes quant à la nature même de l'activité du Bureau de médiation administrative.

Un autre élément s'est révélé assez patent lors des auditions: nous avons entendu à la fois le médiateur administratif et sa suppléante, et ils avaient une vision diamétralement opposée de ce que devait faire le Bureau de médiation administrative. Il paraît assez dommageable que, dans un bureau constitué de deux personnes et une assistante, on en arrive à des visions suffisamment opposées pour que l'activité nous semble difficile à maintenir.

C'est pourquoi la commission de contrôle de gestion voudrait marquer son caractère dubitatif à l'égard de ce rapport divers en n'en prenant pas note...

Une voix. En n'en prenant pas acte !

M. Alexis Barbey. ...en n'en prenant pas acte. Merci, Monsieur Florey ! Elle désire en revanche susciter un réexamen de ce que le législatif voudrait vraiment voir un Bureau de médiation administrative accomplir dans ce canton, et peut-être recadrer un peu l'activité de l'actuel bureau. Voici donc l'action que je vous propose: il s'agit de procéder à un réexamen qui, ne pouvant se faire dans le cadre de cette séance, serait effectué soit par la commission de contrôle de gestion, soit par la commission législative. Je vous remercie.

M. Bertrand Buchs (PDC). Les auditions ont clairement montré qu'il y avait un important conflit entre le médiateur et sa suppléante. Je n'userai pas de termes plus forts, parce qu'il n'y a vraiment pas une ambiance de travail sereine au sein de ce bureau, d'autant que la suppléante ne vient que lorsque le médiateur est en vacances, si bien qu'il n'y a aucun contact, aucun dialogue entre ces deux personnes. Du reste, elles n'ont absolument pas la même notion du travail. Le médiateur, lui, fait plutôt un travail d'ombudsman, c'est-à-dire qu'il aide les gens qui ont des problèmes avec l'administration. La suppléante, quant à elle, a une vision de médiatrice, qui consiste à effectuer véritablement des médiations en cas de conflits. Cela s'apparente au travail de la médiatrice de la police au niveau cantonal, qui pratique des médiations en cas de conflits entre la police et un citoyen.

On a essayé de discuter de ce problème avec la chancellerie - puisque le médiateur dépend théoriquement de celle-ci - afin de chercher une solution, et j'ai trouvé que la chancellerie faisait preuve d'une espèce de passivité, en raison de l'indépendance du médiateur. Il faut aussi dire que, bizarrement, les 80 000 francs prévus dans le budget de ce bureau pour les expertises ont été attribués à l'assistante - soit la secrétaire qui travaille avec le médiateur - afin d'augmenter son temps de travail. Du reste, la chancellerie n'a pas vu de problème à ce que cet argent soit dépensé de cette manière. Nous avons également appris que le médiateur était en classe 31 ou 32 à l'Etat - tant mieux pour lui ! - parce qu'on considérait qu'il était au même niveau que le préposé à la surveillance des données.

Bref, tout est flou, rien n'est clair ! On ne sait pas ce qui se fait dans ce bureau, et le médiateur fait ce qu'il veut. Les statistiques ne sont pas très précises et son mandat n'est pas clair du tout. Je pense qu'on est arrivé à un point où, franchement, il faut tout reprendre à zéro; le Grand Conseil a une responsabilité et il a mal fait son travail ! Je vous remercie.

M. Edouard Cuendet (PLR). Je vous l'avais bien dit ! (Rires.) Le ver est dans la pomme. Je ne parle pas des personnes, mais de la structure. Les députés qui, comme moi, sont nés à peu près avec la commission législative... (Exclamations.) ...savent qu'on a traité ce problème pendant un nombre incalculable de séances. On a débattu d'abord du sexe des anges, parce qu'il était problématique d'utiliser le terme «ombudsman». Ce n'était pas possible pour des questions d'égalité des genres, il a donc fallu trouver une autre appellation. On a déjà passé quinze séances à parler de ce sujet, puis on en a passé cinquante à discuter de la manière dont devait s'exercer l'indépendance, du type de structure à mettre en place et de la question de savoir s'il fallait ou pas faire une usine à gaz. Pour finir, on a créé une petite usine à gaz: elle est petite en nombre de personnes, mais chère en postes, puisque la classe 32 est surréaliste pour une personne qui n'a aucune position hiérarchique.

Je vous l'avais bien dit ! Nous avons auditionné notamment l'ombudsman vaudois, le médiateur vaudois, qui rencontrait les mêmes problèmes. C'est devenu un bureau d'aide sociale. Ce n'est rien d'autre ! Et qu'ont-ils fait ? C'est bien pire que ça ! Les associations oeuvrant dans le domaine de la migration - soit le secteur dans lequel ce médiateur est principalement actif - envoyaient les personnes qui les contactaient vers l'ombudsman pour effectuer des recours. Il n'était donc pas du tout médiateur: il incitait à engager des procédures. En conclusion, le ver est dans la pomme et il faut réformer cette structure de fond en comble. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Mesdames et Messieurs les députés, il ne faut peut-être pas réformer toute la structure, mais simplement se rappeler ce qui est écrit dans la loi, à savoir qu'il s'agit de traiter prioritairement de façon extrajudiciaire les différends entre les administrés et l'administration. Pour la commission de contrôle de gestion, cela passe par la médiation et non par une approche psychosociale centrée en priorité sur l'écoute et les conseils. En effet, cette démarche est assumée notamment par les Points info en ville de Genève, ou par d'autres structures issues du canton ou des communes. Il faut donc se recentrer sur le rôle de médiation.

Nous avons été également surpris - il faut le dire - de découvrir que le médiateur actuel ne figure pas dans la liste des médiateurs assermentés par le canton de Genève, ni dans celle de la Fédération suisse des associations de médiation. En outre, il y a une inégalité de traitement crasse avec la médiatrice de la police qui, elle, est en classe 25 et assume un véritable rôle de médiation, au sens tout à fait professionnel du terme, dont on pourrait vraiment s'inspirer. Je ne voudrais évidemment pas dire qu'il existe une inégalité forte entre le salaire d'un homme médiateur et celui d'une femme médiatrice, mais enfin il faut quand même souligner que cela fait six classes de différence.

Je ne reviendrai pas sur l'un des éléments qui a été abondamment relevé, à savoir que l'allocation des ressources a été, au fond, changée. En effet, au lieu de servir à financer des expertises qui accompagnent le bureau, le budget octroyé par le Grand Conseil a fini par être destiné à un poste d'assistante de direction. La personne qui occupe cette fonction répond au téléphone et prodigue des conseils, mais on peut imaginer que sa classe de fonction est évidemment très nettement inférieure.

Le groupe socialiste défend les principes d'égalité, d'indépendance et de confidentialité inhérents à une fonction de médiateur ou médiatrice. Nous demandons donc que le Conseil d'Etat intervienne et revoie ses critères, puisqu'il a voté en 2018 - je le rappelle - ce poste. Je fais partie, comme d'autres, des députés et députées qui font confiance à la commission législative, mais la vérification des diplômes aurait dû être effectuée. Je vous remercie.

M. Pierre Eckert (Ve). Messieurs les députés, Mesdames les députées, les problèmes ont été répertoriés par le rapporteur de la commission de contrôle de gestion et je pense qu'il les a formulés de façon encore relativement diplomatique. Le problème est patent, mais il ne faut pas forcément reporter la faute sur les personnes qui occupent actuellement ces postes. Le défaut réside surtout dans la loi que nous avons rédigée et qui présente un certain nombre de difficultés.

Durant les auditions, nous avons remarqué que les personnes qui s'adressent au Bureau de médiation administrative désirent plutôt être orientées vers les divers services de l'administration cantonale, par exemple vers les services fiscaux pour savoir comment faire une déclaration d'impôts ou autre.

Le député Cuendet est sans doute optimiste lorsqu'il dit que le bureau effectue de la médiation sociale. J'ai l'impression que le travail accompli actuellement dans le cadre de ce poste s'apparente plutôt à celui d'un «helpdesk» - je n'ai pas trouvé le terme français -, c'est-à-dire qu'on essaie d'orienter les personnes vers les bons services de l'administration cantonale.

Manifestement, en tant que parlementaires, nous avons commis une certaine faute en votant cette loi, car elle ne permet pas de réaliser de façon convenable le mandat constitutionnel qui était le nôtre. Ce que nous suggérons, c'est de refuser la prise d'acte du RD 1393, mais de tenir compte des recommandations figurant à la fin du rapport de commission, qui préconisent notamment d'adapter la loi. La commission législative va donc se retrouver avec une proposition du Conseil d'Etat concernant une nouvelle loi sur la médiation administrative. La suggestion que nous avons formulée au sein de la commission de contrôle de gestion est peut-être de faire tout autre chose, comme le souhaiterait probablement le député Cuendet, et de réformer totalement le système de médiation administrative. Je vous remercie.

M. Patrick Dimier (MCG). La médiation est, par nature, le meilleur moyen d'éviter les conflits. Si on sort de ce champ-là, on n'est forcément plus en adéquation avec ce principe. Il faut dès lors bien entendu, comme l'a suggéré M. Barbey en des termes extrêmement diplomatiques, revoir la copie, mais alors de fond en comble ! Et M. Eckert a raison lorsqu'il dit qu'on a failli en acceptant cette loi sur la médiation. Elle découle de l'article 120 de la constitution, donc il ne faut pas se tromper, car nous sommes soumis à une obligation constitutionnelle.

En plus de ça, la médiation est un excellent moyen pour adoucir ou amoindrir les conflits entre les administrés et l'administration, mais c'est un travail très sérieux ! On ne peut pas élire quelqu'un qui n'a pas les qualifications pour le mener à bien. Nous allons donc bien évidemment refuser cette prise d'acte, ce qui est quand même un comble pour la médiation, sachant que, sans l'Acte de médiation, la Suisse n'existerait pas ! Merci.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Barbey, il ne vous reste plus de temps de parole. Je mets à présent aux voix la proposition de la commission, à savoir le refus de la prise d'acte du rapport.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée par 58 oui contre 22 non (vote nominal). (Commentaires pendant la procédure de vote.)

Le rapport divers 1393 est donc rejeté.

Vote nominal

PL 13002-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat accordant une aide financière de 9 036 000 francs à la Fondation romande pour le cinéma - Cinéforom pour les années 2021 à 2024
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 23 et 24 juin 2022.
Rapport de M. Serge Hiltpold (PLR)

Premier débat

Le président. Nous passons à l'urgence suivante, le PL 13002-A. Le débat est classé en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole au rapporteur, M. Serge Hiltpold.

M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission des finances a étudié ce contrat de prestations prévoyant un montant de 9 036 000 francs pour la période 2021-2024. En préambule, j'aimerais faire un petit historique de la genèse de Cinéforom. Une mutualisation a été créée entre les différents cantons romands dans le but de monter des projets avec des effets de levier plus importants entre l'Office fédéral de la culture, la RTS et les différents cantons romands.

La problématique de Cinéforom, c'est qu'on évolue dans un marché avec une double majorité, comme nous l'a expliqué son président. On a déjà une majorité linguistique dans notre pays avec une prédominance alémanique, comme vous le savez. Et puis, en ce qui concerne la partie disons française, le cinéma suisse est en concurrence avec le marché européen. Il était donc nécessaire d'avoir une structure renforcée pour faire face à de plus grandes productions et à des pays qui ont davantage de contributions.

Le contrat de prestations a ensuite fait son chemin, avec un nouveau contrat prévoyant des moyens plus importants demandés à l'ensemble des cantons romands. En l'occurrence, une clé de répartition a été effectuée, avec des versements plus conséquents de la part du canton de Genève et du canton de Vaud; ces montants ne sont pas uniformément répartis sur l'ensemble du contrat de prestations: 150 000 francs supplémentaires seront versés par le canton de Genève en 2022 puis en 2024. Pourquoi le versement est-il différé ? Parce qu'il s'agit vraiment d'un contrat basé sur des projets. On voit donc qu'il y a une augmentation parcimonieuse de ces montants pour répondre à des projets. C'est aussi un investissement important en ce qui concerne le secteur de la formation. On a du reste eu des débats sur la proportionnalité de l'augmentation. Pourquoi Genève et le canton de Vaud donnent-ils plus que les autres cantons ? Simplement parce qu'ils ont des centres de formation des arts visuels et des métiers du cinéma, à savoir la Haute école d'art et de design à Genève et l'ECAL à Lausanne, que vous connaissez bien aussi. C'est le pendant lémanique de ce qui se passe en Suisse allemande avec Zurich et Lucerne. Voilà un peu le socle, les éléments de base.

Par ailleurs, en lisant ce contrat de prestations, on s'est aperçu qu'il y avait une amélioration de la gouvernance. Quelques critiques avaient été formulées à l'égard du contrat de prestations précédent, et cette gouvernance a été améliorée grâce à deux processus: l'aide sélective et l'aide complémentaire. Dans le premier cas, un jury de professionnels de Cinéforom décide ou non de soutenir des projets, sachant que le jury change chaque fois pour éviter tout conflit découlant des liens d'intérêts. Dans le second cas, il s'agit d'une analyse menée par Cinéforom sur les projets déjà sélectionnés par l'Office fédéral de la culture. Ces mesures ont répondu à un certain nombre de critiques vis-à-vis du précédent contrat de prestations.

Tout l'enjeu de l'augmentation prévue dans le contrat, c'est la nouvelle vision que Cinéforom souhaite apporter au cinéma suisse, notamment avec une transition davantage tournée vers le numérique, en raison de tout le marché de plateformes, que vous connaissez bien et dont je tairai les noms pour ne pas faire de publicité. Le cinéma suisse doit donc procéder à une nouvelle adaptation de son offre.

Pour toutes ces bonnes raisons, la majorité de la commission vous recommande de soutenir ce contrat de prestations. L'analyse critique de la fréquentation de certains films a été approfondie et on s'est effectivement aperçu qu'il y avait des spectacles, des projections qui ne fonctionnaient pas, ce qui est malheureusement inhérent à certaines productions. La commission a donc obtenu toutes les réponses qui lui semblaient nécessaires. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, nous sommes en procédure de vote.

Mis aux voix, le projet de loi 13002 est adopté en premier débat par 74 oui et 8 abstentions.

Le projet de loi 13002 est adopté article par article en deuxième débat.

Mise aux voix, la loi 13002 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 72 oui et 8 abstentions (vote nominal).

Loi 13002 Vote nominal

R 997
Proposition de résolution de Mmes et MM. Stéphane Florey, Patrick Lussi, Jacques Blondin, André Pfeffer, Charles Selleger, Marc Falquet, Thomas Bläsi, Jean-Pierre Pasquier, Pierre Conne, Patrick Malek-Asghar, Jean Romain, Jacques Béné, Fabienne Monbaron, Claude Bocquet, Danièle Magnin, Céline Zuber-Roy, Rémy Burri, Christo Ivanov, Patricia Bidaux, Gilbert Catelain : Non au retrait de 3,5% de surfaces agricoles supplémentaires (Résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonale)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 23 et 24 juin 2022.

Débat

Le président. Nous continuons nos urgences avec la R 997, classée en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à l'auteur de ce texte, M. Stéphane Florey.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, que la réduction de 3,5% des terres assolées entre en vigueur en 2023 ou soit repoussée à 2024, comme annoncé par le Conseil fédéral, cela ne change absolument rien à l'affaire. Vu le contexte géopolitique actuel, la mesure proposée ne pouvait pas plus mal tomber et doit absolument être refusée. Nous ne devons en aucun cas réduire notre souveraineté alimentaire: elle n'est aujourd'hui que de 50% pour notre pays et d'environ 10% pour Genève, malgré la volonté affichée par notre Grand Conseil de passer à 20% d'ici à 2050 - nous avions d'ailleurs très largement adopté la motion 2644 qui le demandait. La réduction de 3,5% des terres assolées irait tout bonnement à l'encontre de cet objectif, tout cela au profit de la biodiversité, ce qui est certes louable, mais ne nourrit en rien la population.

En proposant cette réduction, le Conseil fédéral fait tout simplement un caprice de gosse de riches: il croit qu'il suffit de claquer des doigts pour se donner bonne conscience au nom de la biodiversité et d'aller acheter la différence sur les marchés étrangers en augmentant les quotas d'importation. La réduction de 3,5% représente 50 000 tonnes de blé à l'échelle nationale et 2000 tonnes pour Genève. 50 000 tonnes de blé, c'est aussi la consommation annuelle de 1,2 million de personnes.

La guerre en Ukraine a des effets néfastes sur l'approvisionnement international et touche directement de nombreux pays, notamment ceux du continent africain. Le conflit a fortement dégradé la situation alimentaire de ces pays, dont cinq sont officiellement entrés en situation de famine. Ces pays étaient déjà dans une situation fragile à cause de la sécheresse, certaines régions n'ayant pas vu une goutte de pluie ces quatre dernières années. Aller acheter 50 000 tonnes de blé supplémentaires, cela représente 50 000 tonnes de moins pour ces populations qui en ont fortement besoin, car elles sont tout simplement dans l'incapacité de produire elles-mêmes ce qui leur est nécessaire, en particulier pour les raisons climatiques que je viens d'évoquer.

De plus, le prix des matières premières, notamment de première nécessité - et spécialement celui du blé -, a tout simplement explosé. Produire local pourrait justement avoir des effets bénéfiques sur les prix ainsi que sur la réduction de la production de CO2, production tant décriée par certains partis.

Enfin, à titre personnel je tiens à rappeler à ceux qui en douteraient encore que l'UDC dans son ensemble, qu'elle soit vaudoise, fribourgeoise, zurichoise ou genevoise, reste et restera toujours un parti agrarien, bien que Genève soit un canton urbain, et qu'elle continuera à défendre l'agriculture tant que cela sera nécessaire.

En conclusion, à l'heure où tout le monde prône la consommation locale, les marchés de proximité, la réduction des transports de marchandises, etc., il est primordial de refuser la demande du Conseil fédéral et de lui adresser cette résolution ainsi qu'aux Chambres fédérales, tel que proposé dans les invites. Je vous remercie pour votre écoute et vos soutiens.

Des voix. Bravo !

M. Jean Batou (EAG). Je dois dire que je ne comprends pas bien le sens de la résolution déposée par M. Florey. Tout d'abord, la biodiversité est aujourd'hui menacée en Suisse plus que dans d'autres pays voisins: cela concerne la moitié des milieux naturels et le tiers des espèces vivantes, de même que leur diversité génétique.

Ensuite, il nous dit qu'on va réduire de 3,5% les surfaces assolées. C'est faux ! Actuellement, 2,2% à 4% de surfaces assolées en plaine sont des surfaces de promotion de la biodiversité en Suisse. L'exigence du Conseil fédéral est qu'il y en ait 3,5% au moins dans chaque exploitation, ce qui veut dire que ceux qui en ont 2,2% devront passer à 3,5%. C'est un tout petit effort par rapport à la situation actuelle ! (Exclamations.)

Par ailleurs, il faut absolument écarter l'argument selon lequel la guerre en Ukraine aurait quelque chose à voir avec cette décision. Le Conseil fédéral a en effet décidé d'introduire ce quota de 3,5% à partir de 2024, or nous espérons tous quand même qu'en 2024 l'Ukraine ne sera plus en situation de conflit.

Quant à la réduction de la production, les chiffres que vous avez cités sont fantaisistes, comme l'est la relation entre l'introduction de la mesure en 2024 et la guerre en Ukraine. Raison pour laquelle, dans l'intérêt de la défense des milieux naturels, des espèces vivantes menacées et du potentiel génétique disponible dans ces espèces vivantes en Suisse, notre groupe refusera cette résolution. Merci.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR). La Suisse ne couvre que 50% de ses besoins alimentaires. La situation est encore pire à Genève, puisque ce taux peine à atteindre les 15%. Notre pays pourra donc être fortement impacté par la pénurie mondiale qui s'annonce suite à la guerre en Ukraine. Dans ce contexte international, il est dès lors important de prendre des mesures provisoires pour augmenter notre production nationale et d'éviter de retirer encore des terres à l'agriculture pour des mesures de promotion de la biodiversité.

Mais en dehors de ces mesures provisoires, il faut aussi dire que la Suisse serait bien inspirée d'augmenter ses capacités de production; en effet, tout ce qui n'est pas produit en Suisse doit être importé. Les agriculteurs suisses sont soumis à des règles strictes, peut-être même trop strictes, mais qui garantissent un produit de qualité. Ces règles ne s'appliquent pas aux produits importés, pour lesquels il est difficile d'avoir des garanties concernant la qualité ainsi que le respect de l'environnement et des conditions de travail. Pour ces raisons également, nous ne devons pas réduire la production nationale, mais au contraire essayer de l'augmenter, en améliorant par exemple le rendement par mètre carré cultivé, grâce notamment à la recherche et au développement dans le domaine agricole.

Dans le même sens, j'en profite pour relever que l'initiative populaire soumise au peuple le 25 septembre prochain aggraverait encore la situation. En effet, la mal nommée «Initiative contre l'élevage intensif en Suisse» - mal nommée car un tel élevage n'existe pas en Suisse - réduirait encore les productions nationales et augmenterait donc les importations, en particulier en provenance de pays qui, eux, pratiquent réellement l'élevage intensif. Il est dès lors essentiel de s'y opposer en septembre.

Pour conclure, le PLR soutiendra cette résolution et plus largement invite à prendre toutes les mesures possibles, y compris au niveau cantonal - ce n'est pas parce qu'il s'agit d'une résolution adressée à Berne qu'on ne peut pas prendre des mesures sur le plan cantonal -, pour augmenter rapidement notre autosuffisance, au vu du contexte international. Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements.)

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Mesdames et Messieurs les députés, si bien sûr on peut s'inquiéter de la crise qui pourrait s'annoncer en matière de production céréalière, il faut quand même rappeler que les pays les plus touchés ne seront pas les nôtres, mais ceux qui ne peuvent absolument pas s'approvisionner de manière différente. Je pense notamment aux pays africains qui ont déjà exposé tous les problèmes qu'engendre la situation actuelle en Ukraine.

Plutôt que d'anticiper et de mettre en cause cette consultation, on ferait peut-être mieux de relever la politique agricole de la Confédération, qui rappelle l'importance de la biodiversité, de la qualité des produits, des prix bas et des produits régionaux ayant peu d'impact sur l'environnement. Je pense aussi à sa stratégie d'action globale, qui comporte une couverture sociale ainsi que des aides au développement des exploitations et à la réduction de l'empreinte écologique, avec des objectifs chiffrés prenant en compte le bien-être des animaux, sans oublier une formation des professionnels renforcée.

Quand on lit tous ces objectifs, on comprend que la mesure suggérée s'articule avec un ensemble d'autres mesures. Le parti socialiste vous demande donc de ne pas entrer en matière sur cette proposition, mais plutôt de renforcer la politique pour avoir une vision globale, au niveau suisse, de ce que doit être une agriculture de proximité. Merci.

M. Philippe Poget (Ve). Chers collègues, la R 997 a été rédigée en réaction à l'approbation par le Conseil fédéral du rapport sur l'orientation future de la politique agricole. Ce texte demande à l'Assemblée fédérale et au Conseil fédéral de renoncer à l'une des mesures proposées dans le train d'ordonnances intitulé «Pour une eau potable propre et une agriculture plus durable».

Avec la crise actuelle, les risques de perte de production de nos terres assolées ainsi que le besoin en terres pour la transition vers la production biologique, il peut sembler évidemment déraisonnable de renoncer à utiliser un pourcentage supplémentaire de terres permettant une culture céréalière, à plus forte raison si l'on constate que l'agriculture genevoise fait déjà un grand effort en matière de surfaces de promotion de la biodiversité. Elle y consacre 14% des surfaces alors que le minimum exigé est de 7%. De plus, nous ne savons pour l'heure pas si une application différenciée de cette mesure est envisagée de manière à tenir compte des situations cantonales.

Il faut cependant souligner que le projet du Conseil fédéral, comme l'a mentionné Mme Valiquer, est plus global et qu'il réunit un ensemble de mesures visant à garantir sur le long terme le taux d'approvisionnement de 50% dans notre pays par un gain d'efficacité. Il a surtout pour objectif d'aboutir à une agriculture plus durable, qui contribue à la sécurité alimentaire - notamment à travers une réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires - et à la promotion de la biodiversité fonctionnelle dans le domaine déficitaire des grandes cultures.

Alors si les Vertes et les Verts soutiennent bien évidemment cette nouvelle orientation dans sa globalité - puisqu'elle est nécessaire sur le long terme et va dans la direction d'une agriculture durable -, après réflexion, ils appuieront toutefois en majorité cette résolution, principalement pour qu'elle amène le Parlement national à tenir compte de la particularité de l'agriculture genevoise dans la mise en oeuvre de la nouvelle politique agricole. Je vous remercie.

Mme Patricia Bidaux (PDC). Mesdames les députées, Messieurs les députés, il ne s'agit pas de mettre en compétition biodiversité et agriculture. Les personnes qui pensent que les paysans ne sont pas capables d'être conscients de l'indispensable service offert par celle-ci ont oublié ce que signifie que de se pencher sur la terre de notre canton et de prendre en compte les aléas en tout genre ! Les paysannes et les paysans de Genève sont responsables et ils prennent soin des terres qu'ils cultivent, tout comme de leurs animaux, d'ailleurs !

Hier, la Confédération publiait un rapport sur trois postulats déposés suite au refus de la politique agricole 2022+, dont le postulat 20.3931, qui demandait d'étudier en détail la transformation de la politique agricole en une politique globale visant à promouvoir l'alimentation saine et la production durable de denrées alimentaires. Le rapport relève que parmi les importations suisses de denrées alimentaires, ce sont les catégories de produits suivants qui ont les plus grandes répercussions environnementales à l'étranger: le cacao, le chocolat, la viande, le soja, le fromage, l'huile alimentaire, le sucre, les céréales, les pâtes alimentaires, les fruits et les légumes. Tout est clair: diminuer la production locale, c'est mathématiquement augmenter les importations, alors que nous pouvons produire du soja, de la viande, du sucre, des oléagineux et des céréales en assumant chez nous cette production !

Allons-nous continuer à tenir ce double langage ? Le gouvernement vous encourage à produire, mais en même temps il diminue de 3,5% la surface de vos terres sur laquelle il vous autorise à produire. Et contrairement à ce que dit Ensemble à Gauche, aujourd'hui déjà il y a une obligation de fournir non pas 3,5% mais 7%, et si j'additionne 3,5% et 7%, cela donne 10,5% des terres agricoles qui seront dévolues à la biodiversité. Ainsi, le Conseil fédéral vogue seul sur les terres agricoles et décide que produire des biens alimentaires assurant l'alimentation de sa population n'est pas une priorité !

La Suisse ne dépend pas du blé ukrainien, certes, mais elle dépend tout de même de 110 000 tonnes de blé étranger. 3,5% de surfaces qui ne produisent plus de blé, c'est 50 000 tonnes de blé en moins et 1 200 000 habitants suisses sans pain. 2000 tonnes à Genève, cela représente 48 000 habitants qui n'auront pas de pain.

Le timing est complètement aberrant et abracadabrant, Mesdames et Messieurs: comme si grâce à une formule magique le pain sortait du chapeau de la Confédération ! Il n'y a pas d'actes magiques dans nos campagnes, il y a des paysans et des paysannes qui travaillent pour nourrir la population ! Je vous demande donc de soutenir cette résolution de manière aussi enthousiaste que moi en tout cas. (Applaudissements.)

M. Eric Leyvraz (UDC). Tout le monde a l'air de s'étonner de la perte de la biodiversité. Quand j'étais môme, le canton de Genève comptait 200 000 habitants, la campagne commençait à Châtelaine et des vues aériennes depuis l'aéroport montraient des petites villas, des arbres, des jardins.

Aujourd'hui, ce minuscule canton compte plus de 500 000 habitants. On n'a pas arrêté de bétonner et on a déclassé il n'y a pas longtemps les meilleures terres du canton, celles des Cherpines, d'une surface de 50 hectares. On s'étonne que la biodiversité diminue, mais mettons encore 100 000 personnes de plus dans ce canton, et la seule biodiversité qui restera sera celle de la population. (Rires. Applaudissements.)

Mme Virna Conti (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, je vais être brève, parce que j'ai bien compris que les points forts de ce texte ont été résumés. Le but de cet objet - on l'a bien saisi - est précisément aussi de ne pas piquer chez les autres et donc de ne pas dépendre de l'importation, mais de sauvegarder notre souveraineté alimentaire et d'augmenter notre propre production. Mais quand j'entends la gauche... Evidemment, lorsqu'il ne s'agit pas de protéger la pousse de soja, de ce côté-là, il n'y a plus personne ! Il faut pourtant se poser la question: la biodiversité, qu'est-ce que c'est ? C'est la variété des formes de vie sur la terre. Mais alors quoi de mieux pour protéger la terre que de voter un texte pareil ? Merci.

Une voix. Bravo !

M. Patrick Dimier (MCG). Monsieur le président... (Remarque. Rires.) Arrête ! (L'orateur rit.) Excusez-moi !

Le président. Allez-y, Monsieur le député.

M. Patrick Dimier. C'est un sujet très sérieux, et je pense qu'au lieu de se moquer ou de prendre ça à la légère - ce qu'on ne peut pas comprendre -, certains devraient se souvenir que des embargos sont en cours. Et ils ne sont pas pour nous, ils sont contre nous, contre l'exportation du grain. Actuellement, vous ne pouvez pas sortir un gramme de blé d'Ukraine, puisque les Russes ont instauré un blocus. Des problèmes assez sévères se présentent donc devant nous. Je dois ainsi avouer que j'ai un peu de peine avec le fait de prendre ça à la légère.

Le plan Wahlen, avant nous, avait certes pour objectif d'avoir la patate, mais c'est quand même un exemple que nous devons suivre. L'idée de cette résolution est excellente. En tout cas, ne nous laissons pas rouler dans la farine et soutenons-la ! (Rires.)

M. François Baertschi (MCG). Même si le MCG est un parti essentiellement urbain, il est vrai que nous ne pouvons pas être insensibles au fait que nous avons une agriculture sacrifiée en Suisse. Il faut le dire ! Depuis des décennies, l'agriculture suisse est sacrifiée sur l'autel du libre-échange. Or maintenant on voit qu'elle est sacrifiée sur l'autel non pas du libre-échange, mais - et c'est presque pire - de certaines idéologies, qui sont non pas libérales, mais écologistes, extrémistes et gauchistes. Ce genre d'idéologies dangereuses font des victimes, et les victimes, c'est qui ? C'est les agriculteurs, c'est les habitants de ce canton, qui aimeraient avoir une autosuffisance alimentaire. Mais il y a des gens qui, par pur dogmatisme, nous amènent droit dans le mur.

Alors le MCG soutiendra cette résolution, tout en soulignant que nous sommes chaque fois surpris de voir des partis nationaux demander au Grand Conseil de déposer ce genre de textes, au lieu d'intervenir avec davantage de vigueur au niveau national. Nous appuierons cette résolution malgré tout.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Florey, il vous reste cinquante-six secondes.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Ça suffira largement. J'aimerais juste répondre à M. Baertschi - vous lui transmettrez ! - que des textes ont d'ores et déjà été déposés à Berne ainsi que dans plusieurs cantons romands. On voit donc qu'il y a quand même une sorte de soulèvement au niveau national, dont Genève fera partie, bien évidemment. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, nous passons au vote.

Mise aux voix, la résolution 997 est adoptée et renvoyée à l'Assemblée fédérale et au Conseil fédéral par 60 oui contre 20 non et 2 abstentions (vote nominal).

Résolution 997 Vote nominal

R 998
Proposition de résolution de Mmes et MM. Badia Luthi, Sylvain Thévoz, Diego Esteban, Grégoire Carasso, Nicole Valiquer Grecuccio, Jocelyne Haller, Jean-Charles Rielle, Amanda Gavilanes, Emmanuel Deonna, Aude Martenot, Didier Bonny, Yves de Matteis, Marta Julia Macchiavelli, Anne Bonvin Bonfanti, Pierre Eckert, Philippe de Rougemont, Marjorie de Chastonay, Jean Batou, David Martin : Pourquoi une intégration modèle devrait-elle se terminer en vol spécial ?
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 23 et 24 juin 2022.

Débat

Le président. Nous enchaînons avec l'urgence suivante, la R 998, dont nous débattons en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à son auteure, Mme Badia Luthi.

Mme Badia Luthi (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, pour présenter la situation de M. C., je commencerai par relater très brièvement le contexte qui l'a poussé à quitter son pays, puis j'évoquerai la manière dont ce monsieur a réussi son intégration et la raison pour laquelle son dossier mérite un traitement favorable.

M. C. est bangladais et appartient à la minorité religieuse hindoue. Il est journaliste investigateur de métier. Le Bangladesh a connu un retournement de situation depuis l'arrivée des islamistes radicaux au pouvoir. Ces derniers s'appuient sur la charia, la loi islamique, pour se permettre de persécuter les communautés religieuses minoritaires. Dans le contexte de cette guerre religieuse, M. C. a été kidnappé parce qu'il a osé dénoncer les activités d'un groupe islamiste terroriste préparant des bombes pour faire régner la terreur dans le pays à l'encontre des personnes d'une confession autre que l'islam. M. C. a été enlevé en 2011 par des individus de ce groupe et a subi des actes de torture dont les traces indélébiles marqueront son corps à jamais. Il a été libéré grâce au paiement d'une rançon. Harcelé et menacé de mort, il a réussi à quitter son pays et à venir demander l'asile en Suisse. A son arrivée en 2012, il a été pris en charge par les HUG et suivi au sein de la Consultation pour victimes de la torture et de la guerre. Des constats clairs de tortures ont été établis par des spécialistes professionnels du domaine médical et rapportés dans son dossier. Il souffre à ce jour des séquelles de la torture physique et psychique qu'il a subie, plus particulièrement de stress post-traumatique.

En 2015, le Tribunal administratif a basé son refus d'octroyer l'asile à M. C. sur le prétexte principal que le Bangladesh protège suffisamment ses citoyens. Or si on se réfère aux reportages d'Amnesty International, Human Rights Watch et Reporters sans frontières, on se rend aisément compte de la passivité de l'Etat face aux auteurs de ces violences, d'autant plus que la majorité du gouvernement est formée par des islamistes.

Il est très important de savoir que M. C. a commencé à travailler en 2013, juste une année après son arrivée en Suisse, qu'il a réussi en 2014 à rembourser tout son dû à l'aide sociale, soit une somme de 15 000 francs, et qu'il est toujours indépendant financièrement. Ce monsieur a un comportement exemplaire: son casier judiciaire est vierge et il n'a jamais eu de poursuites. Il subvient à ses propres besoins, aux besoins de sa propre famille et à ceux de la famille de son frère décédé qui est restée sans ressources. Son comportement exemplaire est aussi prouvé par les autorités: depuis environ six ans, il s'est présenté chaque semaine à l'OCPM pour pointer et n'a commis aucun manquement.

Il a toujours été clair dans sa position quant à son refus de rentrer au Bangladesh par peur de se faire tuer - je rappelle que ces islamistes cherchent à exécuter M. C. depuis 2011.

Mesdames et Messieurs les députés, ce monsieur représente un modèle d'intégration. Pourquoi le renvoyer par un vol spécial ? Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à soutenir cette résolution. Merci. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

M. André Pfeffer (UDC). Les initiants de cette résolution négligent deux aspects. Premièrement, cette problématique relève de la compétence du droit fédéral et il existe de nombreuses voies de recours pour les requérants déboutés. Deuxièmement, cette résolution concerne un cas individuel et les initiants devraient au moins communiquer les raisons pour lesquelles M. C. a été débouté à plusieurs reprises et ne peut pas bénéficier d'un permis humanitaire.

Il est légitime de se demander si les initiants d'un tel texte remettent en cause, ou même combattent, le droit d'asile. Pour rappel, le droit d'asile protège toute personne persécutée pour des raisons d'opinion, de race, de confession et autres. La Suisse respecte ce droit international et donne à tous les requérants déboutés la possibilité de recourir.

Cette résolution est incomplète, ne comporte pas d'analyse objective et ne peut pas remplacer une voie de recours. Pour ces raisons, le groupe UDC refusera ce texte. Merci de votre attention.

Mme Joëlle Fiss (PLR). Monsieur le président, vous transmettrez à Mme Luthi qu'elle souligne dans sa résolution un sujet brûlant et d'une extrême importance.

Avant de parler de ce texte, je souhaite dire quelques mots sur le Bangladesh. Ce pays est déchiré entre un gouvernement qui se veut laïque et des groupes de militants djihadistes très violents qui jettent le pays dans un chaos total depuis des années. L'Etat est incapable de contrôler ces groupes qui visent à déstabiliser le pays et à prendre le pouvoir. Il n'y a aucun doute sur le fait que les premières victimes de cette lutte sont souvent des minorités opposées à la vision des ultraconservateurs: hindous, chrétiens, athées, intellectuels, dissidents politiques et libres penseurs sont, franchement, tués farouchement. Par ailleurs, on n'oublie pas du tout les événements de 2015 qui ont plongé le Bangladesh dans un chaos et lors desquels une série de blogueurs laïques ont été traqués et assassinés par un groupe formellement associé à Al-Qaïda, mais qui se revendiquait proche de l'Etat islamique. Une liste de 84 Bangladais à abattre avait en effet été publiée, dont ceux-là mêmes qui ont été tués. Et rien ne changera tant que les autorités du Bangladesh resteront impuissantes face à cette violence chronique.

La persécution de M. C., exposée dans cette résolution, rentre certainement dans ce contexte. Vous transmettrez à Mme Luthi, Monsieur le président, qu'elle a raison de souligner que les ONG surveillent de près cette situation. C'est pour cela que je m'étonne que ce texte ne fournisse pas davantage de détails; il nous manque malheureusement des informations concrètes sur la situation de M. C. Tout ce que Mme Luthi vient de dire sur le sort de M. C., que ce soit son kidnapping, la demande de rançon, tous ces détails sont très importants. Mais pourquoi n'a-t-il pas bénéficié d'un avocat pour faire recours ? Pourquoi les ONG que vous mentionnez n'ont-elles pas pris en charge ce cas ? Il s'avère par le hasard des choses que je travaille de près sur ces questions, or voilà l'information typique qu'il faut obtenir pour constituer un dossier et faire campagne. Souvent, si elles sont loin de leur pays d'origine et de persécution, les victimes veulent sensibiliser les gouvernements et donner leur nom complet ainsi qu'un maximum de détails. Il s'avère également par le hasard des choses que mon employeur actuel, le rapporteur spécial de l'ONU qui s'occupe de ces dossiers, sera à Genève la semaine prochaine. Je propose donc qu'on lui transmette ce cas avec tous les détails possibles, si des renseignements peuvent être recueillis. En effet, sans plus d'informations, il me semble très difficile d'agir. C'est pour cette raison que le PLR ne peut pas adopter ce texte, mais il reste à votre disposition pour transmettre l'information au rapporteur spécial. Merci. (Applaudissements.)

Mme Aude Martenot (EAG), députée suppléante. Cette résolution permet de mettre en lumière une situation absurde - une de plus - en ce qui concerne le traitement des personnes requérantes d'asile en Suisse et à Genève.

Sunil C. vit à Genève depuis dix ans, travaille, parle parfaitement français et s'est plié à toutes les exigences administratives imposées aux personnes demandant l'asile. Depuis huit ans, il travaille dans le domaine de la restauration, un secteur qui manque de main-d'oeuvre, en particulier à l'heure actuelle, depuis la pandémie. Pourtant, alors que tout indique que la présence de Sunil à Genève est parfaitement adéquate, notre canton a décidé de procéder à son renvoi vers le Bangladesh où il risque sa vie.

Certes, l'octroi de l'asile est du ressort des autorités fédérales, mais le canton détient une marge de manoeuvre pour refuser un renvoi absurde et accorder un permis de séjour. Il est en effet prévu dans la loi sur l'asile que pour des situations évaluées au cas par cas, des cas de rigueur répondant à des critères très précis, il est possible de recevoir un soutien de la part des autorités cantonales afin d'obtenir un permis B humanitaire.

Sunil remplit chacun des critères exigés par la loi. Sachant qu'il séjourne à Genève depuis dix ans, qu'il paie ses impôts, que son patron est convaincu par la qualité de son travail et que sa vie est réellement menacée en cas de renvoi, comment est-il possible que le canton n'active pas cette clause de rigueur afin de solliciter un permis B humanitaire pour Sunil ? J'ai entendu plusieurs députés se demander pourquoi ils n'avaient pas plus d'informations. Il suffit que le canton fasse l'effort d'envoyer la requête à Berne pour obtenir ces réponses. Or ces derniers temps, nous avons trop souvent constaté le manque de volonté politique pour exploiter cette clause de rigueur, y compris en faveur de personnes qui remplissent à la lettre toutes les exigences légales, même lorsqu'il s'agit de très jeunes gens qui se voient interdire de poursuivre leur formation et obligés de végéter dans le canton, à en perdre leur santé mentale. On peut se demander pourquoi, dans pareil contexte, M. Poggia s'obstine à un tel blocage, alors que la loi elle-même prévoit des cautèles très précises sur lesquelles s'appuyer pour décider de situations de rigueur.

Nous encourageons les députés à voter aujourd'hui cette résolution pour rappeler qu'une loi existe et qu'il est grand temps de l'appliquer lorsque c'est possible, comme c'est le cas avec Sunil. Nous exigeons du canton qu'il s'ouvre à un accueil digne pour toutes les personnes qui verraient leur vie mise en danger si un renvoi devait avoir lieu. Merci. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, nous parlons d'un homme travailleur, intégré depuis des années et ayant vécu dix ans à Genève, qui se retrouve soudainement, comme un délinquant, prisonnier, enfermé au centre de détention de Frambois situé à la route de Satigny. Il est détenu là-bas en vue d'un renvoi forcé par vol spécial. Cet homme s'appelle M. C., il est journaliste et vient du Bangladesh. Je répète tous ces éléments parce qu'ils sont importants, je pense, pour la bonne compréhension de cette résolution. M. C. est issu de la minorité hindoue. Or, depuis le début de cette année, la vulnérabilité des minorités hindoues s'est aggravée au Bangladesh, et les personnalités qui défendent cette minorité dans ce pays sont victimes de vagues de kidnapping, de torture, et parfois même sont assassinées.

M. C. a, quant à lui, déjà vécu le kidnapping et la torture. La prochaine étape qui l'attend, c'est la mort, puisqu'il est bel et bien menacé de mort ! M. C. craint de se faire arrêter dès son arrivée, s'il doit être renvoyé au Bangladesh, car il risque là-bas des conditions de détention contraires aux principes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Suite à un rapport récent du Comité contre la torture, l'ONU a effectivement fait état d'arrestations illégales et de répression contre des personnes, notamment des journalistes ainsi que des défenseurs et défenseuses des droits humains qui osent s'exprimer contre le gouvernement actuel. Et l'impunité des tortionnaires est également connue.

Cette résolution demande donc au Conseil d'Etat d'agir au nom des droits humains, parce que le seul crime de M. C. est d'avoir défendu la liberté d'expression, la liberté de culte, la liberté d'exister. Aujourd'hui je pose la question: est-ce que Genève va vraiment renvoyer une personne intégrée depuis dix ans, n'ayant commis aucun crime, ayant remboursé sa dette auprès de l'Hospice général qui l'a aidée un temps, comme on l'a dit, et ayant trouvé un travail ? Est-ce que Genève va vraiment renvoyer en connaissance de cause un homme menacé de mort ? Au-delà du cadre légal, y a-t-il une once de raison, de cohérence ou d'humanité dans nos décisions ? Je le répète, il est menacé de mort ! Si rien n'est fait, si le Conseil d'Etat ne devait pas bouger dans ce cas de figure, alors ce serait réellement une honte pour Genève.

Pour toutes ces raisons, les Vertes et les Verts demandent au Conseil d'Etat de libérer M. C. immédiatement, de renoncer à son renvoi et de lui octroyer une autorisation de séjour dans le respect de l'article 14, alinéa 2, de la loi fédérale sur l'asile. Merci. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe maintenant la parole à M. Thomas Bläsi pour une minute vingt-cinq.

M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Je parle en remplacement de mon collègue Marc Falquet, président de la commission, qui tenait à s'exprimer mais qui a dû se retirer pour des raisons familiales. Je vous résume donc ce qu'il m'a transmis.

M. Marc Falquet a été sensible au dossier présenté et à ses caractéristiques. Il a également estimé que cette personne avait un profil relativement idéal et qu'il était difficile d'imaginer la renvoyer dans un pays où, selon M. Falquet, il y avait vraiment un risque pour sa santé.

Cet homme, par ses écrits, par ses propos ou autres, a suscité une réaction contre lui. Je n'ai pas de commentaires à faire sur l'origine du problème. En revanche, si l'on a effectivement une certitude qu'il existe un risque pour sa vie, il m'est difficile de ne pas adhérer à ce que m'a transmis mon collègue.

Je souhaiterais donc légèrement modérer la déclaration de mon chef de groupe qui, par ailleurs, était juste. Le groupe était un peu partagé à ce sujet, et une partie aimerait que ce dossier soit renvoyé au conseiller d'Etat, en lequel nous avons toute confiance, afin qu'il prenne en compte le pour et le contre dans cette affaire et qu'il examine ce qui doit être fait.

Le président. Il vous faut terminer, Monsieur le député.

M. Thomas Bläsi. Je ne m'estime pas forcément compétent, mais je n'aimerais pas que ce dossier soit refusé aussi rapidement, alors que visiblement...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Thomas Bläsi. ...le profil de cette personne semble être favorable à Genève. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)

M. Bertrand Buchs (PDC). Mon groupe laissera la liberté de vote sur ce sujet, mais pour ma part je voterai en faveur de la résolution qui a été déposée. Moi je m'étonne de cette situation. C'est tout simplement du pragmatisme ! Cet homme vit ici depuis dix ans, il paie ses impôts et ses charges sociales, il a un emploi et ne fait de mal à personne. Après dix ans, on va lui dire: «Puisque vous ne remplissez pas certains critères fédéraux, vous devez rentrer chez vous» ?!

La situation géopolitique a été extrêmement bien expliquée. Chaque semaine, on peut lire que dans ces pays - Bangladesh, Inde et autres - des églises brûlent et des minorités religieuses sont persécutées. Si cette personne dit avoir été persécutée, il faut la croire ! Pourquoi ne pas la croire ? En quoi ça vous gêne que ce monsieur puisse rester à Genève ? On manque de plongeurs et des restaurants ferment car ils n'ont plus de personnel. Là, on a quelqu'un qui bosse, et vous allez lui dire: «Non, parce que ce n'est pas sûr, peut-être que vous n'avez pas été torturé, peut-être que vous nous mentez, alors rentrez chez vous» ?! Mais c'est n'importe quoi ! C'est franchement n'importe quoi ! (Applaudissements.) Ce monsieur est là, il paie des impôts, il a appris la langue et il s'est intégré. Donc il reste, point ! Merci. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Sylvain Thévoz pour deux minutes dix-sept.

M. Sylvain Thévoz (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais vous rassurer. Nous sommes dans notre rôle, nous ne sommes pas en train de rendre la justice. Nous soutenons une proposition politique à partir d'éléments nombreux - on ne va pas en redonner, même si on pourrait en fournir d'autres. On a du reste été en contact notamment avec l'avocat de M. Sunil C.

Il y a une liste d'éléments très forts. En effet, il risque sa vie aujourd'hui au Bangladesh, en raison de la prise de pouvoir par une des milices islamistes qui l'avait menacé lors de sa fuite en 2011, et il jouit d'une intégration modèle, si bien qu'il peut faire valoir l'article 14, alinéa 2, de la LAsi. Il a donc demandé le réexamen de la décision de l'OCPM.

Nous avons une position politique à prendre - M. Buchs, parmi d'autres, l'a rappelé - au sujet d'un homme dont la vie est en danger et que le renvoi expose à une mort ou à des préjudices sévères. De plus, cette personne jouit d'une intégration modèle, elle a un emploi, elle a remboursé les 15 000 francs reçus après son arrivée ici et elle remplit une série de conditions figurant à l'article 14, alinéa 2.

Voici donc notre rôle: il consiste à renvoyer ce texte au Conseil d'Etat, à attirer son attention sur cette situation et à l'inviter - M. Poggia et les autres membres du Conseil d'Etat le feront très certainement, avec tous les éléments complémentaires dont ils disposent - à juger et à appuyer ou non cette demande de recours pendante devant l'OCPM.

J'imagine néanmoins qu'une question se pose pour la défense de M. Sunil C.: doivent-ils faire recours auprès du Secrétariat d'Etat aux migrations - SEM - ou attendre la décision du Conseil d'Etat et de l'OCPM avant de transmettre cette demande de reconsidération au SEM ? Je vous remercie, Monsieur Poggia, de votre retour. Il ne s'agit pas pour vous, comme j'ai pu le lire, de prendre une décision sous la pression politique. En effet, à mon sens il n'est pas question ici de pression politique, mais d'une part de la volonté d'éviter que des gens correspondant aux critères établis par notre Etat de droit soient expulsés, et d'autre part du souci sincère, humanitaire, de ne pas renvoyer des personnes via des vols spéciaux vers une destinée qui pourrait leur être fatale. Merci beaucoup pour votre écoute. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Murat-Julian Alder pour dix-huit secondes.

M. Murat-Julian Alder (PLR). Merci, Monsieur le président. Ça sera amplement suffisant pour rappeler à ce parlement que nous sommes là pour adopter des actes généraux et abstraits et non pas pour nous déterminer sur des cas individuels et concrets. Nous sommes clairement en train de violer le principe de la séparation des pouvoirs et l'autonomie de l'administration cantonale, raison pour laquelle je vous invite à refuser cette résolution qui est contraire au principe de la séparation des pouvoirs. Merci de votre attention.

M. Jean-Marie Voumard (MCG). J'ai entendu beaucoup de choses de ce côté-là de l'hémicycle ! (L'orateur désigne les bancs de gauche.) Je suis tout de même étonné d'entendre qu'il y a des éléments très forts: une intégration modèle, le paiement des impôts. C'est très bien ! Si c'est le cas, j'en suis ravi ! Mais ce n'est pas le seul cas; des cas particuliers, il en existe beaucoup. Si l'on accepte cette résolution - je vous signale du reste que notre groupe aura la liberté de vote -, je me demande - et j'en ai peur - si la gauche ne va pas revenir tous les mois avec de telles résolutions, sans documents, sans rien du tout, avec seulement des écrits. On ne connaît pas la vérité; on ne sait pas ce que vous avez dit ! Il y a un écrit noir sur blanc, mais on n'a aucune preuve. Pour ces raisons, je voterai non à ce texte. Je vous remercie.

M. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nul doute que beaucoup d'entre vous se coucheront ce soir la conscience tranquille grâce à la démarche qui a été entreprise. Il se trouve néanmoins que plusieurs éléments qui ont été indiqués sont inexacts, mais je suis tenu par le secret de fonction et ne peux pas entrer dans le détail de ce cas particulier. On nous dit que la vie de cette personne est en danger, mais cet élément doit être démontré devant les tribunaux. Or plusieurs procédures ont été engagées et mettent fermement en doute cette version des faits. Cet homme a une épouse et des enfants au Bangladesh qui ne font l'objet d'aucune mesure de quiconque. Les tribunaux ont par conséquent pris des décisions.

Il est vrai que l'on peut se poser la question: une personne qui travaille et qui respecte nos lois n'a-t-elle pas droit à régulariser sa situation ? C'est une question politique, Mesdames et Messieurs. Nous sommes dans un Etat de droit qui a établi une loi sur l'asile et qui a fixé les conditions dans lesquelles une personne demandant l'asile peut l'obtenir et les conditions dans lesquelles cette personne doit quitter notre pays si l'asile ne lui est pas reconnu. Qu'elle se comporte bien n'est pas un plus ! C'est le minimum ! On attend des personnes qui sont chez nous qu'elles respectent nos lois. Si maintenant le fait de respecter nos lois est un élément favorable, une circonstance spéciale qui doit permettre que l'on tienne compte de la situation, je pense qu'on est en train d'inverser les valeurs.

Moi je suis toujours prêt, avec mes services - d'ailleurs une délégation du Conseil d'Etat à la migration a été constituée pour cela -, à examiner les cas particuliers, parce que nous voulons en tenir compte, dans la mesure où Genève n'est sans doute pas un canton comme les autres. Mais il n'y a pas à exercer des pressions politiques - car, j'insiste, il y a vraiment des pressions politiques: cette personne s'est inscrite dans un parti politique en Ville de Genève, et c'est la raison pour laquelle sa cause est ainsi portée. (Exclamations.)

Se pose alors la question, Mesdames et Messieurs: le pauvre quidam qui est ici peut-il obtenir les mêmes droits que quelqu'un soutenu politiquement ? Pour ma part je réponds que oui, car j'étudie tous les dossiers ! Encore récemment j'ai examiné la situation d'une personne qui doit quitter notre pays prochainement et a demandé à me voir. Avec mes services, nous sommes arrivés à la conclusion que cette personne était victime de la machine étatique et qu'elle était véritablement malade. Nous avons également conclu qu'il n'y avait pas de raison, parce qu'elle n'était pas correctement défendue, que l'assurance-invalidité lui refuse des droits et qu'on lui reproche ensuite d'avoir sollicité l'aide sociale pour exiger d'elle qu'elle quitte notre pays. Toutes les situations doivent être étudiées, et j'ai bien compris qu'une majorité de ce parlement va nous demander de réexaminer ce dossier.

Mais rappelons la situation ! J'ai entendu dans cet hémicycle des propos quand même assez incroyables: «Il faut donner à M. C. un permis. Nous demandons au canton de lui octroyer un permis.» Vous devez pourtant savoir que ce n'est pas de la compétence cantonale; ce n'est pas nous qui demandons son renvoi, c'est la Confédération qui l'a exigé ! Si nous lui demandons un permis, nous sollicitons du SEM la délivrance d'un permis pour cas de rigueur. Si nous considérons que cette personne doit pouvoir rester chez nous, nous devons donner un préavis favorable, c'est la démarche cantonale. Cela étant, un préavis favorable n'est pas donné parce que cette personne est gentille et s'est bien comportée, mais parce qu'il y a des éléments concrets.

Je l'ai dit au nom du Conseil d'Etat et je le répète: si des éléments nouveaux - et je crois savoir qu'on nous a transmis aujourd'hui des éléments que nous allons regarder - doivent être pris en considération pour pouvoir soumettre un préavis favorable au SEM, nous le ferons. Mais il s'agit aussi de garder une crédibilité, ne serait-ce que dans l'intérêt d'autres personnes pour lesquelles nous allons intervenir. Si le SEM considère que de toute façon tout ce qui provient de Genève ne mérite pas d'être examiné, comme les résolutions que l'on envoie à tour de bras au Parlement fédéral, alors nous ne serons même plus crédibles lorsque nous devrons l'être. C'est la raison pour laquelle nous devons ici aussi accorder à ce dossier un traitement non pas qui vous fasse plaisir, Mesdames et Messieurs, mais qui puisse garantir des chances de succès suffisantes à la démarche que nous entreprenons auprès de Berne. Nous ferons donc notre travail dans ce dossier avec ou sans le soutien politique de ce parlement, et je ne dis pas cela par défiance pour votre démarche, mais pour garantir une égalité de traitement pour toutes les personnes qui passent par la machine administrative genevoise. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. La parole n'étant plus demandée, je vais vous faire voter, Mesdames et Messieurs, sur cette résolution 998.

Mise aux voix, la résolution 998 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 43 oui contre 41 non et 4 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Résolution 998 Vote nominal

M 2854
Proposition de motion de M. Pablo Cruchon : La crise continue chez Smood
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 23 et 24 juin 2022.

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs, il est 18h40, nous n'avons pas assez de temps pour traiter la dernière urgence. (Protestations. Commentaires.)

Une voix. Il reste vingt minutes pour un débat de trente minutes !

Une autre voix. Mais oui, on a vingt minutes !

Le président. Non, nous n'avons pas le temps de traiter cette urgence pendant les vingt minutes restantes. (Commentaires.)

Une voix. C'est le président qui décide ! Taisez-vous !

Une autre voix. On a été convoqué jusqu'à 19h !

Le président. Madame Marti, vous avez une motion d'ordre à formuler ? (Remarque.) Je vous écoute, vous pouvez l'énoncer.

Mme Caroline Marti (S). Merci, Monsieur le président. Il ne reste plus qu'une urgence dont nous devons débattre et nous aurons traité tous les objets qui avaient été fixés à l'ordre du jour de cette session, c'est-à-dire les comptes, les extraits et l'ensemble des urgences demandées. Il nous reste vingt minutes. Mon groupe peut s'engager à essayer de réduire un peu la durée des débats, car je pense qu'il est absolument essentiel de traiter cette dernière urgence. Je vous remercie. (Brouhaha.)

Le président. Madame la députée, la motion d'ordre permet de demander soit une suspension de séance, soit un vote sans débat. Ce sont les deux seules possibilités offertes par la motion d'ordre.

Mme Caroline Marti. Eh bien je demande un vote sans débat !

Le président. Très bien. Pour que cette requête soit acceptée, elle doit être votée à la majorité des deux tiers des députés présents. Je mets donc aux voix cette proposition... (Commentaires.) Non, on vote les motions d'ordre les unes après les autres !

Mise aux voix, la motion d'ordre (interruption immédiate du débat et passage au vote) est rejetée par 58 oui contre 31 non (majorité des deux tiers non atteinte). (Commentaires pendant la procédure de vote.)

Le président. La majorité des deux tiers n'étant pas atteinte, cette motion d'ordre est rejetée. Monsieur Hiltpold, vous avez aussi une motion d'ordre à formuler ?

M. Serge Hiltpold (PLR). Oui, je propose une motion d'ordre pour un renvoi direct à la commission de l'économie afin d'avoir une analyse objective; Mme la conseillère d'Etat a exposé ses motifs hier après-midi. Merci.

Le président. Ce n'est pas une motion d'ordre, Monsieur le député. C'est une demande de renvoi en commission... (Commentaires. Brouhaha.) ...qui est normalement mise aux voix à la fin du débat.

M. Serge Hiltpold. Alors je demande le passage immédiat au vote pour un renvoi en commission. Sans débat.

Le président. Vous demandez un vote sans débat. Très bien. (Commentaires.) S'il vous plaît ! On ne va pas y arriver, le temps tourne ! M. Hiltpold propose à nouveau le vote sans débat. Je mets aux voix cette requête, en vous rappelant qu'il faut la majorité des deux tiers.

Mise aux voix, la motion d'ordre (interruption immédiate du débat et passage au vote) est adoptée par 83 oui contre 2 non (majorité des deux tiers atteinte).

Le président. Nous allons donc maintenant nous prononcer sur le renvoi de cet objet à la commission de l'économie.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2854 à la commission de l'économie est adopté par 52 oui contre 35 non et 1 abstention. (Commentaires pendant la procédure de vote.)

Le président. Mesdames et Messieurs, nous arrivons au terme de notre session. Je vous souhaite un bel été, reposez-vous bien ! Revenez en pleine forme et emplis de bonne humeur et de respect en septembre. Je vous rappelle par ailleurs que dimanche matin de 9h à 10h30 aura lieu à Perly un tournoi de football lors duquel l'équipe du Grand Conseil rencontrera d'autres équipes de parlements municipaux. Je vous donne donc rendez-vous dimanche à 9h à Perly, et je souhaite un bon été, une bonne soirée et une bonne Fête de la musique à ceux que je ne reverrai pas !

La séance est levée à 18h45.