République et canton de Genève

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PL 11988-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier le projet de loi de MM. Florian Gander, Henry Rappaz, Pascal Spuhler, Thierry Cerutti, Daniel Sormanni, Jean-François Girardet, Christian Flury, Francisco Valentin modifiant la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière (LaLCR) (H 1 05) (Voies de bus)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IV des 27 et 28 août 2020.
Rapport de majorité de M. Thomas Wenger (S)
Rapport de minorité de M. Christo Ivanov (UDC)

Premier débat

Le président. Nous passons au PL 11988-A, dont le débat est classé en catégorie II, trente minutes. La parole revient à M. Thomas Wenger.

M. Thomas Wenger (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés... (Brouhaha.)

Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît !

M. Thomas Wenger. Mesdames les députées, Messieurs les députés, l'objectif de ce projet de loi est de permettre aux deux-roues motorisés d'emprunter les voies de bus portant la mention «taxi». C'est un texte qui date de quelques années et qui a été largement refusé à la commission des transports. Pourquoi ? Parce qu'un essai a été mené, plusieurs essais, même, sous la houlette du précédent magistrat, par rapport à l'utilisation des voies de bus par les motos et scooters, qui ont démontré de manière objective qu'il s'agissait d'une mauvaise idée pour de nombreuses raisons.

Aux yeux de la majorité, c'est une mauvaise idée du point de vue de la mobilité - j'y reviendrai -, que nous devrions précisément nous attacher à rendre plus durable, tandis que les tests effectués ont mis en avant un certain nombre de problèmes, notamment le ralentissement des transports publics et des taxis - ce n'est pas toujours le cas, je l'avoue, mais lorsqu'une horde de deux-roues motorisés s'arrêtent devant les feux de la voie de bus, vous avez derrière les bus et les taxis qui attendent. Enfin, on relève encore des problèmes liés aux dépassements de vitesse, à l'accidentologie, etc.

De manière générale, la mobilité aujourd'hui, et on le répète souvent tant dans ce parlement qu'à la commission des transports... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur Wenger. S'il vous plaît, Messieurs de gauche comme de droite, veuillez écouter le rapporteur de majorité. Si vous souhaitez discuter, il y a des salles disponibles à l'extérieur. Reprenez, Monsieur.

M. Thomas Wenger. Merci beaucoup, Monsieur le président. Je disais donc que la mobilité aujourd'hui à Genève - on en parle beaucoup dans ce parlement de même qu'à la commission des transports - doit bien entendu être plus durable. Qui dit mobilité plus durable dit développement des transports publics, du Léman Express, extension des lignes de tram et de bus, incitation aux modes de déplacement doux, c'est-à-dire les vélos, les vélos électriques, les trottinettes - dont on observe l'avènement actuellement - et la marche.

Favoriser la circulation des deux-roues motorisés, soit un mode de transport polluant, source de nuisances, notamment sonores - demandez aux gens qui habitent dans les quartiers urbanisés, que ce soit en ville de Genève ou dans les autres communes urbaines de notre canton, ils n'en peuvent plus de cette pollution sonore qui est généralement plus due aux motos qu'aux voitures -, leur offrir un «avantage», entre guillemets, du point de vue de la mobilité en leur permettant de circuler sur les voies de bus est vraiment une mauvaise idée, et c'est le message que souhaite faire passer la majorité de la commission des transports ce soir. Aussi, nous vous enjoignons de refuser catégoriquement cet objet. Merci beaucoup.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi date en effet de 2016 et nous le traitons quasiment six ans après son dépôt. Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts, un certain nombre d'informations ont été données par mon préopinant rapporteur de majorité. Néanmoins, vous ne pouvez pas nier qu'il y a une forte augmentation de la population dans notre canton et donc des besoins en déplacements, sans oublier que notre constitution prévoit le libre choix du mode de transport. En 2016, on dénombrait 55 000 immatriculations de deux-roues motorisés; aujourd'hui, nous sommes à plus de 61 000. Pourquoi ? Parce que de nombreuses personnes passent de la voiture à la moto.

Le mérite de ce projet de loi est de chercher à trouver une solution pour désengorger le trafic en permettant aux deux-roues motorisés d'emprunter les voies de bus. J'aimerais bien savoir où vous avez trouvé des chiffres indiquant que cela ralentit les TPG et que les bus attendent derrière les motos, Monsieur Wenger; pour ma part, honnêtement, je n'ai jamais rien entendu de pareil. Deux phases de test avaient été autorisées à la Praille et à la route de Ferney, mais elles ont malheureusement été abandonnées au bout de cinq ou six mois.

On voit par ailleurs dans d'autres zones de Suisse - en Argovie, à Zurich, à Bâle -, mais également dans d'autres pays qu'un tel système fonctionne très bien. Prenons un exemple, celui de Londres: suite à l'autorisation octroyée aux deux-roues motorisés de circuler sur les voies de bus, on a constaté une baisse des accidents de 42%. La fluidité du trafic a ainsi été améliorée, et Londres, me semble-t-il, est une ville dont la circulation est spécialement engorgée. Pour toutes ces raisons, la minorité de la commission des transports vous demande d'entrer en matière sur ce texte et de l'accepter.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Vertes et les Verts vous recommandent bien évidemment de refuser cet objet qui vise à modifier la loi en faveur des deux-roues motorisés en les autorisant à utiliser les voies de bus portant la mention «taxi». Le prétexte: améliorer la fluidité du trafic et la sécurité.

Après plusieurs gels en raison d'un recours de la Ville de Genève concernant les tests effectués sur certains tronçons et suite à un changement de législature et de ministre de la mobilité, la commission des transports a rejeté l'entrée en matière sur ce projet de loi. Naturellement, les Vertes et les Verts soutiennent cette position. En effet, la population genevoise a voté la LMCE, la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée, qui prévoit de favoriser la mobilité douce et les transports publics au sein des zones 1 et 2. Il y a donc une opposition entre le texte adopté par le peuple et les mesures en faveur des deux-roues motorisés préconisées notamment par les associations de motards auditionnées en commission.

Les deux-roues motorisés n'ont rien à faire sur les voies de bus, lesquelles doivent être prioritairement dédiées aux transports publics afin qu'ils puissent maintenir leur vitesse commerciale, essentielle pour leur attractivité. A l'heure de l'urgence climatique, les motos et scooters, qui polluent et émettent de fortes nuisances sonores, devraient au contraire être remplacés par des vélos et des vélos électriques, surtout dans un petit canton comme Genève, surtout quand le plan climat cantonal renforcé de seconde génération préconise une diminution de 40% du trafic individuel motorisé. Pour toutes ces raisons, nous refuserons l'entrée en matière. Merci. (Applaudissements.)

M. François Baertschi (MCG). On arguera sans doute que ce projet de loi ne correspond pas au droit supérieur, comme on l'a fait s'agissant du texte précédent. Je me permets d'émettre quelques doutes à ce sujet, sachant que cela provient d'un Conseil d'Etat qui vient d'être désavoué dans l'affaire de Mme Moinat, dont la connaissance du droit est donc parfois aléatoire ou du moins contestée par les tribunaux. Alors je veux bien qu'on remette en question notre capacité à nous, simples députés, d'apprécier des éléments juridiques, mais quand on voit le gouvernement nous ramasser du haut de sa superbe en nous disant que nous n'y comprenons rien, j'ai les plus grands doutes dans ce domaine comme dans d'autres. Merci.

M. Alexandre de Senarclens (PLR). Cela a été indiqué, le présent projet de loi vise à autoriser les deux-roues motorisés à utiliser les voies réservées aux bus munies du marquage «taxi». Le PLR considère que ce texte est excessif et va trop loin. Cependant, les essais évoqués n'ont pas été menés jusqu'au bout, leur durée était à notre sens trop courte - quatre et six mois à la Praille et sur la route de Ferney. C'est la raison pour laquelle nous estimons qu'il convient de refaire des tests, de les conduire de façon sérieuse et d'aller au bout du processus. Partant, nous serons favorables à la M 2504 dont nous discuterons certainement en août ou en septembre.

Il est important de réaliser des essais de façon exhaustive, de s'assurer que s'il devait y avoir des deux-roues sur les voies de bus, la fluidité des TPG ne serait pas atteinte, leur cadence ne serait pas ralentie, cette circulation ne se ferait pas au détriment de leur vitesse commerciale ni de la sécurité. C'est pour ce motif que le PLR, ne souhaitant pas rejeter cet objet, a décidé de s'abstenir afin de donner un signal en faveur de la M 2504, qui sera bientôt à l'ordre du jour, l'idée étant d'aller jusqu'au bout des tests qui n'ont pas été effectués correctement. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Pablo Cruchon (EAG). Mesdames les députées, Messieurs les députés, je suis désolé pour mes collègues qui ont déposé ce projet de loi, mais celui-ci va complètement à l'encontre du bon sens, à contre-courant de ce que nous devons mettre en place actuellement dans notre canton. Il y a deux principales raisons pour lesquelles nous devrions rejeter ce texte et, au contraire, mener une politique proactive dans l'autre direction.

D'abord, il nous faut freiner drastiquement le transport individuel motorisé. C'est une urgence vitale pour la planète. Nous assistons à une destruction massive de la vie sur Terre dont nous sommes responsables, des centaines et des milliers d'espèces disparaissent au quotidien. Nous portons cette responsabilité, nous devons agir très rapidement. Dès lors, il n'est pas question d'étendre encore la circulation motorisée, mais à l'inverse de la restreindre de manière stricte. Le plan climat cantonal, qui n'a pas été élaboré par de dangereux gauchistes, prévoit une diminution du trafic de 40%; on sait que c'est insuffisant, il faudrait probablement viser une réduction de 60%. De ce point de vue là, cet objet va dans le mauvais sens.

Le deuxième argument de fond a trait à l'occupation de l'espace public. Mesdames et Messieurs, 66% de la voirie est investie par le transport individuel motorisé. Or ce mode de transport ne concerne que 27% des déplacements dans notre canton. Seulement 27% des déplacements ! C'est-à-dire que la part dédiée aux motos, scooters et voitures est complètement disproportionnée par rapport au nombre de personnes transportées ! Les piétons, les transports publics et les cyclistes représentent 73% de la mobilité dans notre canton, il y a donc un immense déséquilibre. De fait, il faut aller exactement dans la direction inverse, il faut diminuer drastiquement la largeur de la chaussée, limiter l'accès aux routes, réduire de moitié au moins la disponibilité de la voie publique pour le transport individuel motorisé.

C'est sur la base de ces deux principaux motifs que le groupe Ensemble à Gauche vous appelle à refuser le présent texte. D'autres arguments ont déjà été mentionnés, par exemple la vitesse commerciale des TPG, l'aberration que cela représente de mélanger les bus et les motos. Le groupe Ensemble à Gauche vous demande de rejeter ce projet de loi et de vous engager pour une ville et un canton sans voitures. Merci. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie. La parole va à M. Patrick Dimier pour deux minutes.

M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président. Pour reprendre ce qui a été indiqué tout à l'heure par le groupe PLR, je pense également que de manière un tantinet déloyale et peu réfléchie, on a interrompu les essais en cours alors qu'il n'a pas été démontré de ralentissements des transports publics lorsque les deux-roues motorisés étaient autorisés à accéder aux voies de bus.

Je viens d'entendre les propos de mon collègue Bakounine et je le remercie pour son excellent exposé. Il ne faudrait surtout pas qu'il oublie que le principal facteur de pollution, c'est la démographie et la densité - sauf que personne, à travers la planète, ne veut s'occuper de ces deux aspects -, mais certainement pas les éléments qu'il a évoqués.

Par ailleurs, si cette faction politique veut changer les choses et pour autant qu'elle aime et respecte la constitution, eh bien il faut attaquer celle-ci, il faut déposer une initiative pour supprimer la garantie du libre choix du mode de transport. Tant et aussi longtemps que vous ne le ferez pas et que vous n'aurez pas la réponse du peuple, chers amis, c'est la constitution telle qu'elle est qui s'applique. Et aujourd'hui, on a le libre choix du mode de transport.

Une voix. Absolument !

M. Patrick Dimier. En plus de tripler l'espace réservé aux vélos, puisqu'on a non seulement doublé les lignes, mais encore ajouté des pistes à côté - je pense qu'on avait trop de peinture à utiliser -, quand l'Etat perd devant les tribunaux, il se paie le luxe de recourir contre leurs décisions. Voilà la vérité, et c'est une honte. Merci. (Applaudissements.)

Une voix. Très bien !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je ne sais pas si nous avions trop de peinture, mais vous avez en tout cas épuisé le temps du groupe, ce qui fait que M. Thierry Cerutti n'a plus de temps de parole. Monsieur Jean Romain, c'est à vous.

M. Jean Romain (PLR). Pour combien de temps, Monsieur le président ?

Le président. Il vous reste une minute seize, Monsieur le député.

M. Jean Romain. Oh, ça va aller ! Je vous remercie, Monsieur le président. J'ai entendu beaucoup de choses qui sont de nature à relancer une guerre des transports, cette guerre des transports que nous avions, à juste titre, réussi à apaiser. Nous devons dès lors trouver une solution. Restreindre à tout prix le trafic motorisé, c'est une sorte de mantra que l'on répète, un chewing-gum collectif que certains partis mâchent sans relâche. Cette idéologie, le PLR ne l'approuve pas, mais il ne souhaite pas rouvrir un combat totalement inutile.

Les essais doivent être poursuivis, notamment en ce qui concerne la vitesse commerciale des TPG, parce que comme M. Dimier l'a expliqué, il n'a pas été démontré qu'ils ralentissaient la cadence des bus. Mais surtout, il faut quand même comprendre quelque chose: si vous donnez à un deux-roues motorisé une piste en site propre, il va se croire seul au monde, il va changer de mentalité et se dire: «Je suis ici chez moi, je fais ce que je veux, je roule à la vitesse qui me plaît dès lors que j'ai ma voie.» Voilà ce qui est dommageable et qui risque de poser des problèmes. Nous avons besoin de mener des tests, non seulement pour nous assurer de ne pas modifier la vitesse commerciale des transports publics, mais aussi pour leur permettre de déployer leurs effets dans le temps, pour qu'ils s'inscrivent dans une autre vision de la mobilité au sein de notre ville. Je vous remercie.

M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, si vous permettez, je reviens au projet de loi qui ne demande qu'une seule chose: «Les véhicules deux-roues motorisés sont autorisés à utiliser les voies réservées aux bus munies du marquage TAXI.» Les problématiques du bruit ou des véhicules électriques sont complémentaires au sujet.

Si, de notre côté, nous allons refuser ce texte, c'est parce que la priorité dans cette affaire n'est pas de polémiquer sur les tests qui ont été menés, de les interpréter d'une manière ou d'une autre, mais simplement d'admettre qu'il est important d'avoir des sites propres pour les différents types de véhicules circulant en ville, indépendamment de leur volume: les bus doivent avoir une voie afin de maintenir leurs cadences, les vélos, cela a été souligné, doivent bénéficier de pistes cyclables dans la mesure du possible et les véhicules privés de leurs propres routes, qu'il s'agisse de motos ou de voitures, électriques ou non. A ce propos, je me permets de soulever la question des trottinettes, qui commencent gentiment à polluer le secteur des véhicules individuels et qui posent un réel problème. Il est évident que c'est l'excessivité de ce texte qui est problématique.

Enfin, que ceux qui ne siègent pas à la commission des transports se rassurent: il y a huit ou dix objets en suspens qui traitent de cette thématique. Ici, c'est un cas particulier. Pour notre part, nous estimons qu'il n'est pas nécessaire de revenir sur l'utilisation des voies de bus par les véhicules deux-roues motorisés, puisque nous sommes saisis d'au moins dix projets - je ne suis même pas extrêmement précis, il y en a peut-être plus - sur ce sujet, donc nous aurons tous l'occasion d'en reparler, autant ceux qui veulent rallumer la guerre des transports que les autres qui souhaitent l'apaiser. Merci de rejeter ce projet de loi.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Pablo Cruchon pour seize secondes.

M. Pablo Cruchon (EAG). Merci, Monsieur le président, je serai rapide. Pour répondre au député Romain, il ne s'agit pas d'un mantra, le transport individuel motorisé constitue une réelle aberration énergétique. Déplacer une tonne et demie pour transporter une personne de 80 kilos, c'est complètement absurde !

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Pablo Cruchon. Il s'agit également d'une aberration en matière de santé publique, ça pollue et ça fait du bruit...

Le président. Merci...

M. Pablo Cruchon. ...et c'est un non-sens - je finis là-dessus, Monsieur le président - pour la vie collective et la convivialité dans nos quartiers. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. C'est le tour de M. Charles Selleger pour une minute trente.

M. Charles Selleger (HP). Merci pour votre générosité, Monsieur le président. Je dirais, puisque je suis vieux maintenant, qu'il y a les jeunes cons et les vieux cons, comme le chantait Brassens. Tout en étant vieux, j'utilise à la fois - enfin, pas en même temps, mais successivement - le vélo, le scooter et la voiture. Circuler en scooter m'évite de prendre la voiture, surtout s'il fait beau temps, et je consomme beaucoup moins d'essence. Maintenant, personne ne se préoccupe des cyclistes qui roulent sur les trottoirs et mettent les piétons en danger - bientôt, il faudra réserver les trottoirs aux seuls marcheurs.

La mauvaise foi dans cet hémicycle, quand on regarde du côté de la gauche, est vraiment sidérante: les essais réalisés à la route de Ferney ont démontré que la circulation était fluide lorsque les motos empruntaient ces couloirs. En revanche, les vélos qui remontent cette même route de Ferney sur la voie de bus, je vous le dis, cela ralentit beaucoup les TPG. J'habite dans le coin et je connais le problème. Il faut voter - et je voterai - ce projet de loi.

Une voix. Bravo !

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Beaucoup de choses ont déjà été dites, on ne va pas épiloguer et passer trop de temps sur cette thématique. On ne peut pas nier que nous roulerons demain à l'électrique, aux véhicules hybrides et à l'hydrogène. Des véhicules, il y en aura toujours, car la population augmente. Regardez combien d'habitants supplémentaires on dénombre chaque année dans le canton de Genève, Mesdames et Messieurs ! Il y a un véritable problème de démographie, c'est une évidence, ce qui génère une densification de nos quartiers. Par conséquent, quand on en crée de nouveaux comme à Bernex, il faut des routes, cela coule de source.

Je souscris tout à fait à ce qui a été indiqué par mes préopinants PLR, MM. de Senarclens et Jean Romain: en effet, il s'agit, et j'espère que le département ira dans ce sens, Monsieur le magistrat, de reconduire des tests pour valider des possibilités d'améliorations en faveur des deux-roues dont le nombre augmente énormément d'année en année - nous avons largement dépassé le seuil des 60 000 motos aujourd'hui. A ce propos, de nombreuses personnes circulent maintenant en moto électrique.

Alors bon, on ne va pas s'éterniser sur la problématique des cycles et des vélos, mais on peut encore mentionner les trottinettes qui roulent sur les trottoirs, ce n'est pas mal non plus. La minorité de la commission des transports vous demande de bien vouloir accepter l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.

Le président. Merci. A présent, je donne la parole à Mme Caroline Marti, qui remplace M. Thomas Wenger en tant que rapporteure de majorité.

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de majorité ad interim. Merci beaucoup, Monsieur le président. J'aimerais revenir sur un certain nombre de points évoqués dans le cadre de ce débat. D'abord, les essais visant à autoriser les deux-roues motorisés à emprunter les voies de bus, cela a été souligné par plusieurs d'entre nous, ont très clairement démontré que cela prétéritait la vitesse commerciale des TPG...

Des voix. Faux, faux !

Mme Caroline Marti. Si, les études sont limpides... (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît, laissez l'oratrice s'exprimer !

Une voix. Non !

Mme Caroline Marti. Probablement que le conseiller d'Etat chargé de cette politique publique corroborera mes propos et citera ces mêmes études. Or quand on constate, à travers un test, que permettre l'usage des voies de bus par les motos et scooters réduit la mission première de ces couloirs en site propre, c'est-à-dire... (Remarque.)

Le président. Monsieur Sormanni, vous n'avez pas la parole, taisez-vous, je vous prie !

Une voix. Détends-toi, Daniel !

Le président. Poursuivez, Madame.

Mme Caroline Marti. Lorsqu'une telle mesure entrave l'objectif premier des voies de bus, à savoir assurer une bonne vitesse commerciale des transports publics... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...eh bien il est logique, il est cohérent d'interrompre cet essai si on observe que les conséquences sont nuisibles. D'ailleurs, cela ne fait pas tellement de mystère: il paraissait si évident qu'autoriser les plus de...

Le président. Il vous faut conclure, Madame.

Mme Caroline Marti. Je prends sur le temps de mon groupe.

Le président. Il est déjà épuisé.

Mme Caroline Marti. Mais personne n'est intervenu dans mon parti !

Des voix. M. Wenger a pris la parole !

Le président. M. Wenger a dû utiliser tout le temps.

Mme Caroline Marti. Je me permets d'insister, car personne... (Protestations. Commentaires.)

Une voix. C'est fini !

Une autre voix. C'est rouge !

Une autre voix. Non, non, c'est faux !

Une autre voix. C'est terminé !

Une autre voix. Encore un mensonge !

Une autre voix. Arrête !

Le président. Combien de temps vous faut-il encore, Madame la rapporteure ? (Commentaires.)

Mme Caroline Marti. Eh bien je vais prendre sur le temps des Verts, du coup. Je remercie ma collègue Mme de Chastonay pour sa bienveillance.

Le président. D'accord, alors allez-y. Il y a eu une erreur de chronométrage, il faut le reconnaître. (Remarque.) Il faut le reconnaître ! Continuez, Madame Marti.

Mme Caroline Marti. Je vous remercie, Monsieur le président. Naturellement, il n'était pas tellement étonnant de constater que permettre aux motos et scooters de circuler sur les voies de bus allait prétériter la vitesse commerciale des TPG, surtout quand on sait qu'on recense plus de 50 000 deux-roues motorisés dans l'ensemble de notre canton.

Je signale encore, cela a déjà été fait au cours de la discussion, que les deux-roues motorisés constituent un moyen de transport engendrant énormément de nuisances, ne serait-ce qu'en matière de pollution atmosphérique, mais aussi de pollution sonore. Aujourd'hui, de très nombreux quartiers sont soumis à des niveaux de bruit excessifs, ce qui a un impact sur la qualité de vie des riverains ainsi que sur leur santé. Bien entendu, il ne s'agit pas d'une mobilité d'avenir, ce n'est pas un mode de déplacement responsable ni respectueux de l'entier de la population.

Enfin, Monsieur le président, je répondrai à M. Dimier qui, année après année, débat après débat, invoque le libre choix du mode de transport quand il est question de mobilité. Mais le principe du libre choix du mode de transport - vous transmettrez à M. Dimier, Monsieur le président -, qui est effectivement inscrit dans la constitution, ne garantit pas à tout un chacun de réaliser l'ensemble de ses déplacements avec n'importe quel moyen de transport.

Une voix. Libre choix du mode de transport !

D'autres voix. Chut !

Mme Caroline Marti. Personne ne peut se rendre au milieu... (Remarque.)

Le président. Monsieur le député, n'interrompez pas la rapporteure de majorité ! Reprenez, Madame.

Mme Caroline Marti. Merci beaucoup. Le libre choix du mode de transport ne permet pas à un automobiliste de se rendre en voiture au milieu du parc Bertrand ! De même...

Une voix. Ni à vélo sur l'autoroute !

Le président. S'il vous plaît, Messieurs du MCG, un peu de calme ! Monsieur Florey, s'il vous plaît ! Monsieur Florey, vous qui êtes membre du Bureau, taisez-vous ! Maintenant, on fait silence dans la salle et on laisse la rapporteure de majorité terminer son intervention. Allez-y, Madame.

Mme Caroline Marti. Merci, Monsieur le président. Le libre choix du mode de transport ne permet pas aux deux-roues motorisés d'utiliser l'ensemble des voies de circulation, y compris les pistes de bus. Aux yeux de la majorité de la commission, ce projet de loi confine à l'obstination idéologique, voire clientéliste, raison pour laquelle nous vous invitons à le refuser. (Applaudissements. Huées.)

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, il s'agit assurément d'un sujet idéal pour clore une session: tout le monde est parfaitement calme et serein ! Je dirai quelques mots. D'abord, une forme de légende urbaine court en ce qui concerne ces fameux essais. Juste pour que les choses soient claires, ils ont pris fin avant même le début de la présente législature. Pourquoi ? Parce que ces tests étaient liés à des arrêtés, lesquels se sont terminés avant le 1er juin 2018, date à laquelle votre serviteur a eu le privilège - c'est en effet un privilège ! - de reprendre la politique publique de la mobilité. Voilà, on aurait pu, lors de la législature précédente, prolonger ces expériences, mais il n'en a pas été décidé ainsi.

Lorsque je suis arrivé, on m'a demandé: «Que fait-on maintenant ?» J'ai dit: «Qu'était-il prévu avec ces essais ?» Eh bien il était prévu de les évaluer à la lumière d'un certain nombre de critères, chose qui a été faite, et les résultats vous ont d'ailleurs été présentés en commission. Les trois conditions établies lors de l'élaboration des phases de test, c'est-à-dire durant la précédente législature, à savoir la fluidité, la sécurité et la vitesse commerciale, ont été analysées de manière scientifique, et il a été démontré qu'il y avait une altération. C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat a choisi de ne pas poursuivre l'expérimentation, de ne pas conduire d'autres essais. J'ai compris qu'une proposition de motion visant à relancer des tests avait été déposée, eh bien nous vous répéterons ces éléments s'il le faut. Voilà pour ce sujet.

La question qu'il faut se poser et que je me suis d'ailleurs posée est la suivante: pourquoi avons-nous à Genève un taux de deux-roues motorisés davantage comparable à celui de certaines villes de l'Extrême-Orient plutôt que de l'Occident ? Il est vraiment saisissant de faire ce constat. Observez le paysage urbain: il y a des motos et des scooters partout. C'est quelqu'un qui a roulé en scooter pendant treize ans qui vous parle. Pourquoi ai-je circulé en scooter pendant treize ans ? Parce que c'était infiniment plus rapide et plus confortable, mais, il faut le reconnaître, si on prend la peine d'examiner ce qui figure dans la loi sur la circulation routière, si on respecte la législation, il n'y a pratiquement aucun avantage à opter pour un deux-roues motorisé.

Tout cela est dû probablement à une certaine - comment dirais-je ? - légèreté ou du moins à une forme de tolérance. Je crois même qu'elle s'est appliquée à un moment donné au parcage sur les trottoirs. A ce propos, vous avez vu que très récemment, fort heureusement, la problématique a été empoignée du côté de Berne, car on y a la tête sur les épaules et on ne fait pas n'importe quoi. En effet, il était extrêmement facile de se garer partout, je suis même persuadé que si d'aucuns pouvaient aller chercher leur pain en entrant avec leur moto ou leur scooter dans le magasin, ils le feraient. C'est la raison pour laquelle Genève affiche aujourd'hui un nombre de deux-roues motorisés très élevés. C'est un constat objectif, je ne vois pas ce qu'il y aurait d'autre de particulier qui ferait que nous avons autant de deux-roues motorisés alors que ce n'est pas du tout le cas ailleurs.

Ce que propose le présent projet de loi, fondamentalement, c'est, partant du principe que notre canton compte de nombreux deux-roues motorisés, de faciliter leur circulation en favorisant l'utilisation de ce mode de transport qui, au demeurant, est parfaitement honorable; nous n'avons rien contre, mais en tant qu'autorités, nous devons nous demander si c'est une bonne chose que de l'encourager. Or ce n'est pas le cas pour plusieurs raisons, notamment des questions de santé publique, d'accidentalité: il est prouvé que l'accidentalité de ces engins est nettement supérieure, qu'ils ont des effets sur la santé des personnes, sur les primes d'assurance et ce genre de choses.

L'Etat doit-il favoriser l'utilisation des deux-roues motorisés au regard de la santé publique ? La réponse est non. Doit-il privilégier leur usage alors que nous sommes confrontés à de graves problèmes, notamment en matière de bruit routier ? Les ordonnances ne sont pas respectées dans plusieurs villes de Suisse, c'est vrai, mais surtout pas à Genève, et un nombre considérable de nos concitoyens souffrent du bruit. Or force est de constater, en particulier durant la belle saison - ce serait faire preuve de mauvaise foi que de ne pas l'admettre -, que les motos et scooters, du moins certains d'entre eux, génèrent un bruit insupportable, sont capables de réveiller des quartiers entiers. Cela a été clairement établi, j'ai eu l'occasion de l'indiquer à plusieurs reprises. Les oreilles ne sont ni de gauche ni de droite, il serait malhonnête de ne pas le reconnaître.

Enfin, dernier élément, c'est l'engagement que nous avons pris - que votre parlement a pris aussi - dans le cadre du plan climat. Il ne s'agit pas d'une lubie du Conseil d'Etat ou de celui qui vous parle, nous nous sommes vraiment engagés, tous autant que nous sommes, à atteindre les objectifs qui sont d'ailleurs ceux de la plupart des pays développés, de la Suisse en particulier... (Remarque.) Non, on ne peut pas le contester ! On ne peut pas le contester ! Nous devons, pour atteindre une diminution des émissions de gaz à effet de serre de 60%, en ce qui concerne la mobilité - chacun doit apporter sa contribution -, non seulement convertir une part notable du parc de véhicules motorisés dotés de moteurs à explosion, c'est-à-dire la très grande majorité d'entre eux - cela vaut également pour les motos -, au moins 40% d'ici 2030, mais surtout, si on souhaite tendre vers cet objectif de moins 60%, nous devons réduire globalement le trafic motorisé de 40% supplémentaires. C'est une évidence. On peut ne pas être d'accord, mais c'est ce à quoi nous nous sommes engagés, ce à quoi vous vous êtes engagés également.

Une voix. Non !

M. Serge Dal Busco. Pour ces raisons et pour plein d'autres encore - mais je crois qu'il est temps maintenant de mettre un terme à ce débat et à cette session -, le Conseil d'Etat vous incite à ne pas entrer en matière sur ce projet de loi. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous procédons au vote d'entrée en matière sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 11988 est rejeté en premier débat par 46 non contre 20 oui et 18 abstentions. (Commentaires pendant la procédure de vote.)