République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2270-A
Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Lisa Mazzone, Jean-Michel Bugnion, Boris Calame, Yves de Matteis, Sophie Forster Carbonnier, François Lefort, Frédérique Perler, Sarah Klopmann, Christian Dandrès, Thomas Wenger, Lydia Schneider Hausser, Cyril Mizrahi, Christian Frey pour un fonctionnement efficace des installations solaires thermiques
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VIII des 2 et 3 novembre 2017.
Délai de traitement en commission dépassé (cf. article 194 LRGC)
Rapport de majorité de M. Cyril Aellen (PLR)
Rapport de minorité de M. Boris Calame (Ve)

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous abordons maintenant les objets dont le délai de traitement en commission a été dépassé. Le premier d'entre eux est la M 2270-A, classée en catégorie II, trente minutes. Monsieur Cyril Aellen, rapporteur de majorité, vous avez la parole.

M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je ne prends pas la parole pour l'instant; je me réserve la possibilité d'intervenir plus tard. Merci.

Le président. Merci à vous. Monsieur Boris Calame, rapporteur de minorité, c'est à vous.

M. Boris Calame (Ve), rapporteur de minorité. Monsieur le président, chères et chers collègues, depuis avril 2015... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur le rapporteur. (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Vous pouvez poursuivre.

M. Boris Calame. Je vous remercie. Depuis avril 2015 - date du dépôt de cette motion - et octobre 2017 - date du rapport -, les témoignages des professionnels de l'énergie thermique solaire, mais aussi des SIG, sont en très forte augmentation. Le plan directeur de l'énergie parle de sobriété, d'efficacité et d'optimisation, mais aucunement de suivi des installations alors qu'elles sont souvent subventionnées. Les installations peuvent fonctionner tout à fait correctement, mais l'énergie n'est parfois pas récupérée pour l'utilisation du bâtiment. (Brouhaha.) Au regard des enjeux climatiques auxquels nous sommes confrontés - nous le serons de plus en plus - et de l'objectif de réduction des émissions de CO2 de 60% d'ici 2030, il est urgent d'agir et il suffit parfois de très peu de choses. (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur le rapporteur de minorité. (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Je n'ai rien contre les petites discussions de traverse, mais je vous remercie d'apprendre les vertus du chuchotement. Monsieur le rapporteur de minorité, vous pouvez poursuivre.

M. Boris Calame. Merci, Monsieur le président. Il faut rappeler enfin que la commission de l'énergie a bâclé son travail en refusant toute audition. Pour les Verts, six années ont été perdues; il serait grand temps que la commission se penche sérieusement sur cette motion. Nous demandons donc le renvoi de celle-ci à la commission de l'énergie. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission; Monsieur le rapporteur de majorité Cyril Aellen, vous avez la parole sur le renvoi.

M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Monsieur le président, la majorité s'oppose au renvoi de ce texte en commission - le travail qui méritait d'être fait l'a été - et persiste, pour le surplus, dans la position prise.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Est-ce que le Conseil d'Etat souhaite s'exprimer sur la demande de renvoi ? (Remarque.) Monsieur le conseiller d'Etat Mauro Poggia, c'est à vous.

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je ne vous cacherai pas que le Conseil d'Etat est perplexe, dans le sens où les conclusions du rapport de minorité ont les faveurs de l'office cantonal de l'énergie. Contrairement à ce que l'on pense, les installations qui sont aujourd'hui en fonction ne sont pas aussi efficaces qu'il le faudrait: une étude portant sur 1150 installations dans treize cantons, faite en 2016 par l'Office fédéral de l'énergie, a montré de sérieux dysfonctionnements. Je pense donc que c'est un peu court de venir simplement affirmer que les propriétaires font le nécessaire et qu'il n'y a finalement pas besoin de regarder de plus près.

Par contre, il est évident que cela pose des problèmes juridiques. S'il y a effectivement une base légale pour exiger des contrôles réguliers de la part de celles et ceux qui ont installé ce genre d'équipement grâce à un incitatif de l'Etat - soit en lien avec une autorisation de construire soit par le biais de subventionnements -, elle manque actuellement pour celles et ceux qui l'ont fait sur une base volontaire. On peut de fait se poser la question de la proportionnalité, s'agissant d'une démarche volontaire. La motion, sur le fond, n'a toutefois pas entièrement tort en demandant que l'on soit attentif à ce que l'efficacité de ces installations soit contrôlée - leurs défaillances sont souvent inconnues des propriétaires eux-mêmes. D'une certaine manière, on rend aussi service aux propriétaires en attirant leur attention sur les dysfonctionnements des équipements installés sur leur bâtiment.

Voilà la position du Conseil d'Etat; elle penche plutôt du côté de la minorité, sachant que les démarches actuellement en cours vont dans ce sens - le but est effectivement que nous ayons des installations qui fonctionnent comme elles doivent fonctionner. Il en va également de la protection des consommateurs, puisque les entreprises qui livrent et installent ces dispositifs doivent garantir leur bon fonctionnement. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.

Mis aux voix, le renvoi pour six mois (article 194 LRGC) du rapport sur la proposition de motion 2270 à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève est rejeté par 42 non contre 34 oui et 1 abstention.

Le président. Nous poursuivons le débat. Monsieur Pierre Eckert, vous avez la parole.

M. Pierre Eckert (Ve). Merci, Monsieur le président. Cette motion a déjà été renvoyée à la commission de l'énergie il y a un peu plus d'une année, mais voilà: elle y était gelée dans l'attente d'une révision de la loi sur l'énergie. Si vous aviez accepté le retour en commission, nous aurions traité ça le plus rapidement possible. Puisque le renvoi a été refusé, je pense qu'il faut maintenant que nous présentions nos arguments, et nous allons le faire. Je laisserai donc le rapporteur de minorité poursuivre son argumentation pour qu'on puisse voter cette motion dans les meilleurs délais.

M. Jean Burgermeister (EAG). C'est un cas extrêmement intéressant que nous traitons là. Vous savez, nous avons l'habitude d'entendre la droite nous expliquer, dans ce parlement, que l'argent public est mal dépensé - qu'on dépense trop, qu'on ne contrôle pas suffisamment, que ça occasionne des gaspillages, etc. Mais là, alors que la motion demande finalement de s'assurer que l'argent public dépensé dans l'aide aux propriétaires soit utilisé à bon escient et permette d'obtenir les effets escomptés par le biais de ces subventions, eh bien la droite refuse catégoriquement le moindre... Elle refuse même que l'Etat informe les propriétaires sur ce qu'ils pourraient faire pour améliorer la situation - cela, non !

Voyez-vous, Mesdames et Messieurs, cela démontre bien que le PLR se fiche complètement de l'endettement et des dépenses publiques. Il protège des intérêts privés, ceux d'une minorité de la population, et il ne voit, derrière «subventions aux panneaux solaires», que «subventions aux propriétaires privés» ! Voilà ce à quoi nous assistons aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, et cela entraînera en définitive un gaspillage - certes en faveur des propriétaires, mais au détriment de la grande majorité de la population et de l'environnement.

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, la motion part d'une bonne intention, mais la réalité des choses, c'est qu'il revient finalement au propriétaire qui a installé ou fait installer un certain nombre d'équipements solaires ou autres de s'assurer, à travers un contrat d'entretien, que ça fonctionne. Je vois mal les Services industriels monter une équipe professionnelle pour aller faire des contrôles chez les privés ! Ça me paraît absolument disproportionné, et certains demandent justement pourquoi les SIG ont le monopole sur telle et telle chose - pourquoi font-ils cela, pourquoi sont-ils propriétaires d'entreprises de chauffage et de ventilation notamment ? Chacun son boulot et les Services industriels ont le leur, à savoir distribuer l'électricité, l'eau et le gaz, et mettre en place, conformément aux missions que leur donne le Conseil d'Etat à travers un contrat de prestations, des dispositifs de chauffage à distance et autres; il y a également la géothermie, dont on discute actuellement. Voilà les missions de base des SIG.

C'est par contre le propriétaire, à travers son contrat, à travers éventuellement aussi éco21, qui a extrêmement bien marché, qui doit s'assurer de la maintenance de ses équipements de chauffage - mais ce n'est pas aux Services industriels de faire le travail, c'est aux entreprises. C'est à elles de faire le boulot ! Ce sont donc les propriétaires qui doivent mandater leur chauffagiste et autres, ce qu'ils font. Est-ce qu'ils lui demandent de vérifier l'efficacité de leur système ? Peut-être pas, mais c'est à eux de le faire: ce n'est pas à l'Etat, à travers les Services industriels ou tout autre organisme, d'engager du monde pour aller faire des contrôles chez les gens. C'est pourquoi nous refuserons cette motion.

M. Boris Calame (Ve), rapporteur de minorité. Il n'est nulle part question, dans ce texte, que ce soient les SIG qui fassent quoi que ce soit; c'est donc une lecture un peu curieuse de la motion. Nous pensons que l'Etat, du moment qu'il collecte un certain nombre d'informations et notamment les IDC, aurait tout intérêt à permettre aux propriétaires - et directement derrière, le cas échéant, aux locataires - de faire des économies et d'utiliser la force énergétique proposée en toiture, mais avec une installation qui fonctionne.

L'objet parle du rôle de l'Etat d'informer; eh bien oui, c'est évident que l'Etat doit informer ! Informer, ça permet aussi une prise de conscience aux uns et aux autres - je ne vais pas encore vous rappeler le plan climat cantonal présenté il y a trois jours par le gouvernement. Quant à transmettre un contrat type, le contrat type dit justement bien ce qu'il est: une proposition de contrat qui pourrait être conclu avec une entreprise privée ou avec les SIG, pour autant qu'ils fournissent ce type de prestation. Mais là, ce n'est pas tellement le problème: une motion comporte des invites et vous savez très bien qu'on peut adapter les invites en commission. L'intention, c'est de s'assurer qu'on n'a pas des installations sur les toitures qui fonctionnent, qui produisent de la chaleur sans que celle-ci puisse être exploitée par les bâtiments. Il est donc indispensable d'avoir un suivi. Je vous remercie.

M. Alexis Barbey (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, lorsque nous avons étudié cette motion en commission, il y a déjà cinq ans, nous nous sommes demandé s'il était nécessaire de créer des armées de fonctionnaires pour vérifier que les panneaux solaires fonctionnent convenablement. On nous a expliqué que oui: un panneau solaire recouvert à raison de 30% de feuilles mortes ou de neige ne donne plus son plein potentiel de rendement, et il faut par conséquent s'assurer que tous les propriétaires entretiennent convenablement leur installation. Mesdames et Messieurs, la commission a jugé qu'il n'était pas nécessaire de mettre en place une telle autorité de contrôle - et ensuite les amendes qui iraient naturellement avec - pour une problématique comme celle-là et que la responsabilité individuelle des propriétaires pouvait suffire à garantir un rendement satisfaisant des panneaux solaires.

Au-delà des questions purement énergétiques, je crois qu'il s'agit vraiment d'une vision de la société. Veut-on avoir une armée de contrôleurs derrière chaque événement que l'on crée, derrière chaque décision d'investissement qu'un propriétaire pourrait prendre ? Ce n'était pas l'idée de la commission; c'est pourquoi nous avons proposé de refuser cette motion, ce que je vous invite également à faire. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole revient maintenant à M. le député Pierre Eckert pour deux minutes vingt-trois.

M. Pierre Eckert (Ve). Merci, Monsieur le président. Je vois qu'on fantasme pas mal sur des armées de fonctionnaires qui seraient amenées à contrôler les installations photovoltaïques ! Ce que je comprends quant à moi, c'est que la pratique de l'office cantonal de l'énergie a changé depuis le dépôt de cette motion et même depuis son deuxième traitement à la commission de l'énergie. Je vous rappelle que le texte a en effet déjà été renvoyé dans cette commission il y a un peu plus d'une année; malheureusement, il y est resté en suspens. Je pense que ça vaudrait la peine d'auditionner l'OCEN, de voir quelles sont les évolutions qui ont été accomplies, et je vous propose une deuxième fois - je vous le demande formellement - le retour de cette proposition de motion à la commission de l'énergie afin d'auditionner l'office cantonal de l'énergie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous avons entendu votre demande; est-ce que le rapporteur de minorité souhaite s'exprimer à ce propos ? (Remarque.) Non. Le rapporteur de majorité ? (Remarque.) Non plus. Le Conseil d'Etat ? (Remarque.) Itou. Mesdames et Messieurs, nous passons donc au vote.

Mis aux voix, le renvoi pour six mois (article 194 LRGC) du rapport sur la proposition de motion 2270 à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève est rejeté par 47 non contre 34 oui.

Le président. Nous poursuivons le débat. Monsieur le député Jacques Blondin, à vous la parole.

M. Jacques Blondin (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes dans une démocratie libérale et nous aurions préféré une motion plus incitative à l'égard des propriétaires pour les pousser à améliorer les prestations dont l'exécution est mise en doute dans les considérants. Certes, notre Conseil d'Etat nous a dit que l'OCEN, depuis, a révisé son opinion vis-à-vis de ce qui figure dans le rapport - et ce qui figure dans le rapport, ce n'est pas si vieux que ça: la majorité des installations de chauffage du canton font l'objet d'un contrat de surveillance, d'entretien et de maintenance; quand les choses sont bien faites, il n'y a pas de raison de douter que tout se passe bien. Cela concerne aussi le chauffage, y compris les installations solaires. Ce qui est proposé ici, c'est quand même une dérive réglementaire supplémentaire, avec des coûts, de l'administration et peut-être un désintérêt de certains producteurs pour la chose.

Le rapporteur de minorité l'a dit: 2017-2021. Il s'est passé beaucoup de choses et ce qui se fait depuis va de toute façon dans le sens souhaité. Ce n'est donc pas qu'on ne veuille pas entrer en matière sur toute la problématique environnementale, mais ce texte est contraignant. L'administration a par ailleurs admis qu'il lui faudrait une armée de fonctionnaires pour contrôler cela et qu'elle n'était pas en mesure de le faire en l'état actuel des choses. Nous sommes par conséquent d'avis de faire confiance aux propriétaires, qui n'ont aucun intérêt à augmenter les charges de leurs locataires; raison pour laquelle nous refuserons cette motion. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur le député Alexis Barbey, c'est à vous pour une minute vingt-neuf.

M. Alexis Barbey (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je me permets de reprendre très brièvement la parole pour dire que ça fait cinq ans que cet objet traîne en commission, qu'on l'a vu partir, revenir, et qu'on n'arrive rien à en faire ! Je ne crois pas qu'on pourra en faire quelque chose de mieux ce soir ni à l'occasion d'un renvoi à la commission de l'énergie; j'incite donc les motionnaires à écrire une nouvelle proposition de motion plus en prise avec notre temps et moins contraignante sur le plan de la réglementation. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, la parole n'étant plus demandée, nous passons au vote.

Mise aux voix, la proposition de motion 2270 est rejetée par 49 non contre 35 oui.