République et canton de Genève

Grand Conseil

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R 935
Proposition de résolution de Mmes et MM. Patrick Dimier, Christian Flury, Florian Gander, Ana Roch, Thierry Cerutti, François Baertschi, Jean-Marie Voumard, André Python, Françoise Sapin, Daniel Sormanni, Sandro Pistis pour la création d'une commission ad hoc chargée d'une gestion regroupée et performante de l'ensemble des objets parlementaires traitant de sujets liés à la pandémie de COVID-19 en collaboration avec le Conseil d'Etat
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26, 27 novembre, 3 et 4 décembre 2020.
M 2719
Proposition de motion de Mmes et MM. Cyril Mizrahi, Danièle Magnin, Jean-Marc Guinchard, Céline Zuber-Roy, Diego Esteban, Pierre Vanek chargeant la commission législative d'examiner les arrêtés du Conseil d'Etat adoptés en lien avec la COVID-19, également en période de situation particulière
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26, 27 novembre, 3 et 4 décembre 2020.

Débat

Le président. Les deux urgences suivantes sont classées en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole au premier signataire de la R 935, M. le député Patrick Dimier.

M. Patrick Dimier (MCG). Monsieur le président, comme j'ai eu l'occasion de le dire sur le sujet précédent, il ne faut pas confondre les deux textes de ce point: il s'agit ici de proposer de rassembler toute une série d'objets liés à la crise covid. J'entends ici et là qu'il y a des sujets très précis et qu'il ne faudrait pas se priver de l'expertise des commissaires qui siègent dans les commissions spécifiques. Soit, pourquoi pas ? Mais nous recherchons ici l'efficacité ! Autant je pense qu'il fallait tout à l'heure voter la résolution sur les points liés à l'article constitutionnel, autant je pense que c'est maintenant à nous, avec nos textes parlementaires, de donner et d'offrir au Conseil d'Etat un lieu où il peut venir dialoguer sur l'ensemble des objets qui touchent la gestion de la crise covid. C'est l'inverse de la proposition précédente. Je précise que je suis d'accord sur le fait que certains sujets sont à ce point spécifiques qu'il est peut-être plus sain, pour une meilleure gestion, tout simplement, de les laisser aux commissions dans lesquelles ils se trouvent aujourd'hui.

Nous devons essayer de maintenir l'ordre dans la maison, d'autant qu'on sait depuis le 3 novembre qu'il ne suffit pas de boire de l'eau de Javel pour garder la Maison Blanche. (Rires.)

Présidence de M. Diego Esteban, premier vice-président

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Cyril Mizrahi, auteur du deuxième objet, la M 2719.

M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, le projet que je vous présente est issu des travaux de la commission législative. Qu'est-ce qui est proposé ? Simplement d'étendre le mécanisme qui a fonctionné pendant les deux périodes de situation extraordinaire qu'on a connues, la première de mars à mai, la deuxième étant celle dans laquelle on se trouve toujours. On a constaté que le mécanisme de contrôle par la commission législative portant uniquement sur les arrêtés du Conseil d'Etat a permis un dialogue, mais aussi un contrôle dynamique et en temps réel de l'activité législative du gouvernement. Et puis, ça a permis de faire des correctifs rapides. Il y a eu tout un débat ce printemps sur la question de l'interdiction des Conseils municipaux et le Conseil d'Etat avait fini par se ranger aux arguments de la commission législative, notamment.

Ce débat a aussi eu lieu en automne, à propos de la suspension des délais de récolte de signatures pour les référendums et les initiatives et de la fermeture des commerces. On a constaté que quand ce mécanisme n'était pas opérant, quand on n'était pas en situation d'urgence mais simplement en situation particulière, eh bien, ce dialogue était rompu. La possibilité pour le parlement de faire ce travail de contrôle et de faire des propositions n'existait plus et il y avait une incompréhension par rapport à ça. Avec cette proposition de motion qui réunit passablement de représentants de partis au sein de la commission législative, le but est de garder ce mécanisme en continu afin de pouvoir réagir de manière continue à l'action du gouvernement.

Pour conclure, je dirai deux mots sur l'autre objet, la R 935. Je change ma casquette de premier signataire pour prendre la casquette de membre du groupe socialiste et dire que nous ne sommes pas convaincus par l'idée d'une commission ad hoc. Si nous en créons une tout en maintenant la nôtre, la répartition des objets me semble devenir peu claire.

L'optique de regrouper tous les objets dans une seule et même commission nous semble aussi peu opportune parce qu'il y a effectivement des spécialités; cette crise nous frappe de manière tellement générale, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il faut que chaque commission spécialisée ait son mot à dire, sinon toute la gestion de la crise sera monopolisée par une seule commission. Cela ne semble pas tout à fait adéquat aux socialistes. Nous vous recommandons donc carrément de rejeter ce texte dont on ne comprend pas très bien comment l'articuler avec la proposition de motion de la commission législative. Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Pierre Vanek.

M. Pierre Vanek (EAG). Oui, merci... Je me bats avec mon masque ! Merci, Monsieur le président. Ce n'est pas souvent, mais j'aimerais tout d'abord dire que Mauro Poggia avait raison face aux quatorze députés présents l'autre jour à la séance d'information avec la médecin cantonale, le directeur de la santé et le directeur de l'hôpital. C'était un moment d'information et de sensibilisation sur le covid extrêmement important, par rapport aux risques et aux dangers d'une troisième vague. On a raison de se doter d'instruments législatifs sérieux pour suivre cette situation ! Je soutiens la proposition de motion de la commission législative, c'est une évidence: on ne doit pas arrêter tout d'un coup - comme ça a été le cas au printemps et pendant l'été - les interactions de la commission législative avec le Conseil d'Etat sous le prétexte qu'on n'est plus sous l'empire de l'article 113. Ça ne doit pas être le cas !

La proposition du MCG est à nos yeux tout à fait intéressante, mais elle pose en effet un certain nombre de problèmes. D'abord, cette commission ne doit pas forcément prendre tous les objets qui ont un contenu spécifique concernant le logement, concernant la santé, concernant d'autres commissions thématiques. Donc, s'il faut renvoyer tous les objets en lien avec le covid à une seule commission, on se prive d'un certain nombre de compétences, Cyril Mizrahi a raison. Il y a un autre problème, c'est qu'il ne faut pas remplacer la commission législative qui a fait du bon boulot sur ces questions - mais elle le fait «post hoc» en examinant des arrêtés. Ce qu'il faudrait, le plus important, c'est la possibilité d'avoir un dialogue avec le Conseil d'Etat, pas seulement sur ce qu'il a fait et sur des arrêtés en vigueur, mais sur ce qu'il va faire et ce qu'il entend entreprendre. De ce point de vue, la commission législative a malheureusement toujours un train de retard: on le constate avec l'invite de notre résolution qui approuve l'arrêté du 1er novembre et qui est décalée par rapport à ce que fait le Conseil d'Etat aujourd'hui. Il nous faut donc une commission plus souple, proactive, mais qui ne doit pas forcément remplacer la commission de contrôle de gestion et ses fonctions; elle ne doit pas non plus supplanter la commission d'enquête parlementaire sur toute cette affaire, que nous appelons de nos voeux et qui interviendra ultérieurement. Nous soutenons sur le fond cette proposition de résolution malgré nos nombreuses réserves sur ses aspects problématiques, que l'on peut toutefois résoudre. Et, pour régler ces problèmes, je vous propose le renvoi de cette proposition de résolution à la commission législative.

M. Patrick Saudan (HP). Je profite du peu de temps qui m'est imparti pour préciser un point important pour ce plénum. Certains députés parmi nous se sont demandé pourquoi cette deuxième vague est si importante à Genève et je souhaite compléter les explications de notre conseiller d'Etat. Pour une pandémie, il faut tenir compte de la densité d'habitants au kilomètre carré: elle est à Genève de 12 500 habitants par kilomètre carré. Et, pour reprendre l'exemple qu'avait donné mon collègue de l'UDC, la densité n'est que de 5000 habitants par kilomètre carré à Bâle-Ville. Cela n'explique pas tout, mais ça explique partiellement pourquoi la pandémie a été particulièrement violente à Genève, tant ce printemps que cet automne.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Monsieur le président de séance, à propos de la résolution déposée par notre collègue Patrick Dimier sur la création d'une nouvelle commission, j'aimerais rappeler que notre canton compte le plus de commissions parlementaires par rapport aux autres cantons suisses, ce qui n'aboutit d'ailleurs pas forcément à plus d'efficacité ni à plus de rapidité. A l'heure actuelle, les objets covid sont traités par la commission législative, cela a été rappelé; ils l'ont été aussi par la commission de la santé, ces deux commissions agissant en fonction de leurs compétences et de leurs spécificités.

La commission législative, je tiens à le rappeler, a examiné plus de cinquante arrêtés du Conseil d'Etat et elle a acquis en ce domaine une certaine compétence. Elle a même proposé - elle travaille sur le sujet - de rédiger un projet de loi d'application de l'article 113 de la constitution. La commission de contrôle de gestion va peut-être aussi se saisir de ce problème. Qui sait, la commission de l'environnement pourrait s'intéresser à l'élimination des masques ? Je ne pense donc pas que la multiplication des commissions et la superposition de toutes ces commissions supplémentaires soient un gage d'efficacité. Au contraire, ça va peut-être provoquer une lenteur supplémentaire tout à fait inopportune.

En ce qui concerne la M 2719 de M. Mizrahi, largement acceptée à la commission législative, j'estime - et le groupe démocrate-chrétien avec moi - qu'elle est frappée au coin du bon sens. C'est une question de cohérence: il n'y a pas lieu de faire une distinction entre les arrêtés du Conseil d'Etat pris en situation extraordinaire et ceux pris en situation particulière. Si vous l'acceptez, cette motion permettrait une vue d'ensemble logique et bien articulée; elle permettrait de garder un dialogue permanent avec le Conseil d'Etat. Le groupe démocrate-chrétien va donc refuser la R 935 et accepter la M 2719.

M. Christo Ivanov (UDC). Monsieur le président de séance, sur la proposition de résolution déposée par le MCG, j'aimerais d'abord rappeler que le groupe UDC avait souhaité la tenue d'une session supplémentaire, d'abord refusée par tout le monde, mais qui aura finalement lieu, Dieu merci ! Cela nous permettra d'avancer grandement et de voter ce qui est nécessaire pour que nos commerçants, nos artisans, tous ceux qui souffrent, tous ceux qui sont aux RHT, tous ceux qui n'ont pas de salaire ou qui n'ont même pas droit à l'Hospice général aient un minimum pour pouvoir vivre dans ce canton prétendument riche !

Deuxièmement, le groupe UDC avait proposé une commission d'enquête parlementaire, je vous le rappelle, chers collègues. Cette proposition avait subi un refus d'entrée en matière. Vous l'aviez toutes et tous refusée, mais aujourd'hui, tout le monde a l'air de dire que ce serait bien d'avoir une telle commission. Je sais que nous vivons avec le syndrome de la CEP liée à l'affaire Adeline; ça refroidit beaucoup de monde, mais ça aurait peut-être été une solution ! L'UDC préférerait que cela soit géré, entre autres, par la commission de contrôle de gestion et par les commissions idoines. Pour ces raisons, le groupe UDC refusera la R 935 de nos collègues du MCG.

A propos de la M 2719 déposée par M. Mizrahi et ses cosignataires, le groupe UDC estime que ce n'est pas le rôle de la commission législative de se substituer aux arrêtés du Conseil d'Etat. Pour toutes ces raisons, le groupe UDC refusera les deux objets.

M. Pierre Eckert (Ve). Monsieur le président de séance, Mesdames les députées, Messieurs les députés, créer une commission ad hoc pour cette crise: pourquoi pas ? Malheureusement, je trouve que la proposition de résolution est plutôt mal formulée. Tout d'abord, on nous parle d'une commission qui se réunirait jusqu'à la fin de la pandémie. Cette commission se saisira de quasi tous les objets qui concernent la pandémie jusqu'à la fin de celle-ci. Nous allons traiter un certain nombre de ces objets au cours de cette séance, vous voyez l'ampleur du travail dévolu à cette commission: économie, santé, social, finances, fiscalité, formation en matière de reconversion... Après, tout à coup, quand la fin de la pandémie sera déclarée, la commission cessera d'exister. Je ne saurais vous dire quand ça sera, mais peut-être que M. le conseiller d'Etat pourra nous dire à quel moment nous déclarerons la pandémie finie ? On entend que le virus va rester avec nous pendant des années: décidera-t-on que la pandémie est terminée fin décembre ? Ou quand on aura un vaccin ? Tous les objets retourneront alors dans les commissions ordinaires même si, évidemment, les conséquences de la pandémie seront toujours présentes, qu'elles soient économiques, sociales ou même sur la santé. Il nous paraît donc difficile d'opérer une dichotomie et je ne vois pas très bien la rupture qu'il y aura suite à une déclaration plus ou moins unilatérale concernant la fin de la pandémie.

On nous dit ensuite que cette commission devra traiter tous les textes et qu'il faudra contrôler le Conseil d'Etat, faire des bilans et évaluer la prise de risque. Vous vous rendez compte ? Evaluer la prise de risque est par excellence le rôle de l'exécutif ! Je ne vois pas comment divers parlementaires - un groupe de quinze d'entre eux - pourront évaluer la prise de risque ! C'est vraiment une question à régler par le Conseil d'Etat, avec les spécialistes des questions sanitaires qui devront se pencher sur la question. Bonne chance pour faire ça !

C'est un travail monstrueux de se pencher sur tous les textes; en tant que membre de la commission de l'économie, j'en sais quelque chose puisqu'on a déjà eu des séances «open end», parfois jusqu'à 23h, pour examiner certains de ces objets. Ajoutez à ça l'ensemble des autres textes et ça devient extrêmement difficile à faire ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)

Comme je l'ai dit, cette commission s'attribuerait aussi des prérogatives de l'exécutif: elle devrait veiller au respect des règles démocratiques, mais avec quoi ? Faudrait-il aussi lui faire surveiller le processus des initiatives ou des référendums ? Ça me paraît assez compliqué ! En cette période troublée, je pense que les décisions sanitaires doivent être rapides et prises par le Conseil d'Etat, par arrêté, la plupart du temps !

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Pierre Eckert. Les commissions existantes suffiront à la tâche. Nous soutiendrons aussi la proposition de motion de la commission législative. Je m'arrêterai ici, Monsieur le président.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR). Monsieur le président de séance, pour sa part, le groupe PLR refusera la proposition de résolution demandant la création d'une commission ad hoc, mais il soutiendra la proposition de motion émanant de la commission législative dont M. Cyril Mizrahi est le premier signataire.

Sans reprendre les arguments développés à juste titre par MM. Guinchard, Mizrahi et Eckert, nous aimerions rapporter quelques éléments. Le système prévu par la constitution à l'article 113 exprime clairement la volonté que le gouvernement soit en première ligne, ce qui est logique. Les mesures doivent être prises rapidement et il n'est pas envisageable de prévoir qu'une commission soit là en plus du parlement pour se positionner avant la prise de décisions. Le système envisageable et qui fonctionne - on vient de le voir avec la résolution adoptée précédemment - est une analyse a posteriori mais rapide des arrêtés; la commission législative l'a bien fait. Du reste, son communiqué de presse a permis d'interagir directement avec le gouvernement. Nous n'estimons donc pas utile de créer une autre commission qui viendrait se superposer aux nombreuses commissions que nous connaissons déjà.

La M 2719 propose de mandater la commission législative pour étudier les mesures prises par le Conseil d'Etat en lien avec le covid, y compris celles en dehors de l'article 113, en attendant la législation d'application. La commission législative est en train de mettre celle-ci en place mais n'a pas eu le temps d'aboutir entre les deux vagues. On a regretté en septembre d'avoir perdu le dialogue avec le Conseil d'Etat vu qu'on ne pouvait plus étudier ses arrêtés, qui ne nous étaient pas formellement transmis selon l'article 113. Cette proposition de motion a vraiment pour but de faire la transition en attendant la législation d'application qui comblera ce vide, nous la soutiendrons donc.

Le président. Merci, Madame la députée. Je cède la parole à M. Bertrand Buchs pour quarante secondes.

M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le premier vice-président. Je serai très bref, je prends la parole en tant que président de la commission de contrôle de gestion pour dire que nous sommes déjà saisis du contrôle de la gestion de cette pandémie par l'Etat, ayant déjà eu deux dialogues fructueux avec M. le conseiller d'Etat Poggia et Mme la médecin cantonale. Nous allons continuer ce dialogue. Les institutions fonctionnent donc. Je vous remercie.

Le président. Merci pour cette brièveté, Monsieur le député. Je cède désormais la parole à M. le conseiller d'Etat Mauro Poggia.

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président de séance. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat ne se prononcera pas sur la R 935: il s'agit d'une question d'organisation du Grand Conseil et vous avez pu vous exprimer sur ce point.

Par contre, la M 2719 aborde un thème plus important et je dirais qu'elle mérite un peu plus d'attention. Je vous rappelle que le Conseil d'Etat peut intervenir en état de nécessité sur la base de l'article 113 de notre constitution; cette disposition prévoit la durée des décisions prises par le Conseil d'Etat sur cette base. Si elles ne sont pas revues par le Grand Conseil dans le délai fixé par cette disposition constitutionnelle, les décisions deviennent caduques d'elles-mêmes. La situation est différente pour les décisions prises par le Conseil d'Etat sur la base de l'article 40 de la loi fédérale sur les épidémies. Loi fédérale, donc droit supérieur; je vois mal comment le droit cantonal pourrait instaurer des voies de contrôle qui ne sont pas prévues par le droit fédéral. L'article 40 de la loi fédérale sur les épidémies prévoit que l'autorité cantonale compétente peut prendre les décisions nécessaires en situation particulière d'épidémie. Lorsque la situation est extraordinaire, comme ce printemps, c'est la Confédération qui prend bien sûr les décisions, il n'y a pas de marge de manoeuvre pour les cantons. Par contre, lorsque nous sommes en situation particulière comme c'est le cas aujourd'hui, les cantons interviennent par l'intermédiaire de l'autorité compétente, c'est-à-dire, selon notre loi cantonale sur la santé, le service du médecin cantonal. Si les arrêtés sont pris par le Conseil d'Etat ici, c'est par le droit d'évocation.

Compte tenu de l'importance des décisions dans ce domaine, tout le monde comprend, je pense, que le Conseil d'Etat ait voulu attraire - comme on dit - à lui la compétence de prendre ces décisions, qui auraient sinon pu être prises par le service du médecin cantonal. Pour autant, est-ce que le parlement peut intervenir ? Il peut bien sûr intervenir quand il le souhaite avec les objets parlementaires qui sont les siens pour demander au Conseil d'Etat des explications, il peut lui demander de revoir ses décisions, mais de là à fixer un contrôle véritablement parlementaire des décisions prises par le Conseil d'Etat, il me semble qu'il y aurait une dérogation à notre droit fédéral qui ne serait pas admissible.

Ne voyez pas dans mes propos une quelconque volonté du Conseil d'Etat d'échapper à un contrôle. D'ailleurs, je crois qu'aucun membre du Conseil d'Etat n'a jamais refusé de se présenter - et cela souvent dans des délais extrêmement brefs - à toute invitation d'une commission pour donner des explications sur les décisions prises.

En revanche, si je lis les invites de cette proposition de motion, je vois mal de quelle manière nous pourrions y répondre favorablement si vous nous la renvoyiez. Vous demandez à la commission législative d'examiner tous les arrêtés adoptés par le Conseil d'Etat en lien avec l'épidémie de coronavirus. A ce stade-là, cela relève de l'organisation interne du parlement: si vous le souhaitez, la commission législative peut faire un rapport à l'assemblée plénière pour lui dire ce qu'elle pense des décisions prises par le Conseil d'Etat. Bien sûr, là, nous ne faisons pas objection et nous n'avons d'ailleurs aucune objection à avoir.

Par contre, lorsqu'il s'agit d'émettre des préavis sur les arrêtés sous forme de propositions de résolutions, cela veut dire que vous entendez enjoindre au Conseil d'Etat de modifier des décisions prises selon le droit fédéral sur la base d'un examen de la commission législative. Là, à mon avis, il y aurait un problème clair avec le droit fédéral. Non pas que le Conseil d'Etat veuille être tout-puissant et prendre les décisions qu'il souhaite, mais imaginez la problématique qu'il peut y avoir. Nous avons tout à l'heure entendu un rapporteur de minorité dire que certaines décisions étaient inopportunes, excessives ou disproportionnées. Imaginez maintenant que le Conseil d'Etat prenne des décisions et qu'elles soient fondées. Imaginons ! Et imaginons ensuite qu'une majorité de votre Grand Conseil, sous la pression légitime des milieux économiques, se dise une semaine après qu'il faut tout rouvrir, alors qu'il y aurait à ce moment-là une flambée de l'épidémie. Qui gère finalement cette situation exceptionnelle liée à une épidémie ? Le Conseil d'Etat ou le Grand Conseil ? En situation de crise, il faut un capitaine à la barre ! Ce capitaine n'est pas tout-puissant; il doit rendre des comptes, mais à un moment donné, quelqu'un doit décider si l'on va à bâbord ou à tribord.

En l'occurrence, le droit fédéral veut que ce soit le Conseil d'Etat qui prenne ces décisions et qu'il en assume l'ensemble des responsabilités. Avoir un Grand Conseil qui vienne immédiatement après avec le pouvoir de faire modifier les décisions prises me semble extrêmement dangereux pour la population ! C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat vous demande de refuser cette proposition de motion.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. (Remarque.) Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que l'usage veut que l'on ne prenne pas la parole après le Conseil d'Etat. (Commentaires.) Je vais vous faire voter sur la R 935. (Commentaires.) Je vous prie de m'excuser, il y a tout d'abord une demande de renvoi à la commission législative.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 935 à la commission législative est rejeté par 64 non contre 21 oui et 1 abstention.

Mise aux voix, la résolution 935 est adoptée par 46 oui contre 43 non.

Résolution 935

Le président. Je vous fais maintenant voter sur la M 2719.

Mise aux voix, la motion 2719 est adoptée par 54 oui contre 25 non et 3 abstentions.

Le mandat est transmis à la commission législative.

Motion 2719