République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 1 octobre 2020 à 20h30
2e législature - 3e année - 5e session - 24e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. François Lefort, président.
Assistent à la séance: MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Mauro Poggia et Pierre Maudet, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Vous pouvez vous asseoir. (Remarque.) Oui, Monsieur Romain, je vois que vous êtes un connaisseur: il faudra effectivement se lever à nouveau pour la prestation de serment.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco, Nathalie Fontanet et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Jacques Apothéloz, Antoine Barde, Pablo Cruchon, Amanda Gavilanes, Caroline Marti, Alessandra Oriolo, Paloma Tschudi, Salika Wenger, Raymond Wicky et François Wolfisberg, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Glenna Baillon-Lopez, Pierre Bayenet, Didier Bonny, Joëlle Fiss, Badia Luthi, Patrick Malek-Asghar, Françoise Nyffeler, Jean-Pierre Pasquier et Helena Rigotti.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Le président. La parole est demandée par M. le député Murat-Julian Alder.
M. Murat-Julian Alder. C'était une erreur, Monsieur le président.
Le président. Ça commence bien ! (Remarque. Rires.)
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de magistrats du Pouvoir judiciaire. Je prie le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Les magistrats entrent dans la salle et se tiennent debout, face à l'estrade.)
Mesdames et Monsieur, vous êtes appelés à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;
- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Ont prêté serment:
Mme Sandra Burkhardt, Mme Mirella de Fusco Fehlmann, M. Alexandre Molinari et Mme Irina Rampoldi Stastny.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Premier débat
Le président. Notre première urgence est classée en catégorie II, trente minutes. La parole est demandée par l'auteur de la proposition de motion, M. Youniss Mussa.
M. Youniss Mussa (S). Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, le 2 septembre dernier, les actrices et acteurs de la vie nocturne ont publié une lettre ouverte décrivant les grandes difficultés financières immédiates auxquelles se retrouvent confrontés les divers établissements concernés. «A bout de souffle», ce sont les mots des entrepreneurs et professionnels de la nuit: barmen et barmaids, agents et agentes d'accueil, nettoyeurs et nettoyeuses, cuisiniers et cuisinières, techniciens et techniciennes, artistes, graphistes, comptables, imprimeurs et imprimeuses, pour n'en citer que quelques-uns. Le monde de la nuit est aujourd'hui en train de mourir sans qu'aucun plan d'indemnisation ne soit mis en place; un véritable plan de sauvetage doit débuter immédiatement car, une fois les établissements en faillite et leurs centaines d'employés licenciés, il sera malheureusement trop tard !
L'aide exceptionnelle prévue dans ce projet de loi pour ce secteur particulier est justifiée, sachant que les perspectives de relance demeurent encore très incertaines à long terme. Les actrices et acteurs de la vie nocturne offrent un véritable service public à la collectivité en garantissant notamment la sécurité de notre jeunesse. Celle-ci peut se retrouver dans des espaces sécurisés et surveillés permettant de danser et de se divertir. Le rôle important du monde de la nuit est d'autant plus clair alors que nous observons aujourd'hui une recrudescence des délits mineurs dans l'espace public et une mauvaise utilisation de celui-ci, notamment les soirs de week-end.
Nous ne pouvons pas nous passer des lieux culturels nocturnes. Je n'ai malheureusement pas le temps de citer individuellement ces associations et établissements qui le mériteraient largement. Je sais qu'ils ont parfois le sentiment d'être abandonnés voire, pour certains, d'être les boucs émissaires de cette crise. Ce soir, nous avons la possibilité de leur dire: l'Etat ne vous laissera pas tomber; l'Etat reconnaît votre importance et sait ce que vous représentez pour les divertissements et la culture, pour la sécurité et pour les emplois. Ce projet de loi, négocié avec les établissements concernés, prévoit notamment à l'article 8, alinéa 5, que les bénéficiaires de l'aide exceptionnelle s'engagent à ne pas licencier des employés en raison de la crise sanitaire. Ce sont des garanties claires en faveur de l'emploi et contre la précarité.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste soutiendra avec force ce projet de loi, qui répond directement aux attentes des établissements nocturnes, ainsi que la proposition de motion 2676 que nous avons déposée à ce sujet. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole échoit à M. le député Boris Calame. (Un instant s'écoule.) Quand c'est vert, c'est bon ! (Rires.)
Une voix. C'est un jeu de mots ?
M. Boris Calame (Ve). Je vous remercie, Monsieur le président. Chères et chers collègues, nous traitons d'une loi de soutien à une quarantaine d'établissements nocturnes: ne devrions-nous pas plutôt parler d'institutions de la nuit au sujet de ces lieux sociaux, de vie, de loisirs et de culture que sont par exemple le Chat noir, le Village du soir, l'Usine, le Moulin rouge ou encore Motel Campo ?
Une voix. Pas de pub !
M. Boris Calame. Il faut souligner ici que la culture n'est pas unique, mais bien multiple. Nous votons ce soir sur la survie ou la disparition de ces institutions - ces mêmes institutions qui ne peuvent disparaître car un jour prochain, post-covid, nous aurons toutes et tous besoin de nous retrouver dans des lieux qui nous rassemblent, des lieux qui nous ressemblent. Le groupe des Verts plébiscitera ce projet de loi pour que la nuit de demain soit meilleure que celle d'hier. (Applaudissements.)
Mme Françoise Sapin (MCG). Monsieur le président, pour le MCG, il est important de soutenir les acteurs du monde de la nuit. En effet, la crise sanitaire les met vraiment à mal et il s'agit d'un cas de force majeure puisque les restrictions ont été ordonnées par les autorités et non décidées par eux-mêmes. Il s'agit encore d'un geste de solidarité comme on en a fait dans d'autres cadres. Le MCG soutiendra également la proposition de motion présentée par le Conseil d'Etat ce soir dans les urgences. Nous voterons donc le PL 12783 et la M 2676.
M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, nous avons reçu à la commission des finances une délégation du monde de la nuit. Je ne suis pas un oiseau de nuit, mais je vais défendre avec conviction le dispositif mis en place. J'aimerais simplement rappeler ici à l'ensemble de la population de notre canton que ce dispositif prévoit une participation financière de l'Etat à certaines charges vraiment incompressibles des établissements nocturnes touchés par la fermeture ordonnée par les autorités. Vous voyez qu'on n'est pas là pour contribuer au chiffre d'affaires de ce monde de la nuit, on est juste là pour le soulager dans ses charges ! Quand on parle de charges incompressibles, on entend par là les loyers, le personnel de maintenance et les stocks périssables qui sont restés. Cet effort est tout à fait logique et nécessaire, quand une décision unilatérale est prise par nos institutions. Le parti démocrate-chrétien soutiendra donc ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. Murat-Julian Alder (PLR). Monsieur le président, le groupe PLR se réjouit de l'accord conclu entre le Conseil d'Etat et la Société des cafetiers, restaurateurs et hôteliers de Genève, le Grand Conseil de la nuit, le syndicat Culture nocturne. Il salue ce projet de loi, tant dans son contenu que dans la forme. Depuis deux mois et pour encore un mois et demi, c'est tout un secteur économique de notre canton qui se trouve à l'arrêt alors qu'il n'a pas été démontré qu'il portait une responsabilité prépondérante dans la diffusion du covid-19. Ce projet de loi propose donc une application du principe de responsabilité de l'Etat. Le PLR s'en réjouit d'autant plus que ce texte a été adopté suite à une concertation rudement menée. Ce projet permettra de sauver un millier d'emplois, tout en prenant en charge des frais incompressibles de manière effective et non pas de manière forfaitaire.
Mesdames et Messieurs, nous avons appris aujourd'hui que pour la première fois depuis de très, très nombreuses années, les festivités de l'Escalade ne pourront pas avoir lieu. Nous savons aussi qu'aujourd'hui sont entrées en vigueur les nouvelles mesures fédérales autorisant la tenue de grandes manifestations. Permettez-moi cette réflexion: nous ne pourrons pas indéfiniment tenir dans cette situation-là ! Le monde de la nuit non plus: il ne pourra pas éternellement rester sous perfusion étatique ! C'est donc aussi une sortie de crise que nous attendons de la part de nos autorités en veillant à ce que soit aussi appliqué le principe de responsabilité. Les établissements nocturnes qui peuvent garantir les conditions sanitaires - port du masque et traçage - doivent pouvoir rouvrir à partir du 16 novembre, si la situation sanitaire l'autorise.
Enfin, Monsieur le président, permettez-moi encore un mot sur la proposition de motion du parti socialiste. Le parti libéral-radical considère que le projet de loi du Conseil d'Etat constitue la réponse directe à ce texte socialiste, de sorte que ladite proposition de motion devient sans objet. Le PLR la votera, si le parti socialiste n'a pas l'élégance de la retirer dans l'intervalle.
M. Eric Leyvraz (UDC). Monsieur le président, nous avons reçu à la commission des finances le président de la Société des cafetiers, restaurateurs et hôteliers ainsi que deux exploitants de boîtes de nuit et dancings. Ils nous ont expliqué avec beaucoup de calme, beaucoup de dignité et beaucoup de professionnalisme combien ils étaient désorientés par le fait que l'Etat les force à fermer leur entreprise du jour au lendemain, sans préavis, deux heures avant que la fermeture devienne obligatoire. Ils ont expliqué combien il était difficile pour eux de survivre après plusieurs mois sans activité. Quand vous êtes entrepreneur, vous vous donnez toute la peine du monde pour mener votre société et la développer; c'est ce qu'ont fait ces gens et, tout d'un coup, à cause d'une décision d'Etat, il n'y a plus rien qui tombe dans les caisses ! Des centaines d'emplois sont menacés si nous ne les aidons pas de façon définitive. Or, nous avons clairement aidé d'autres secteurs.
L'UDC va soutenir ce projet de loi. Espérons que très prochainement, nous retrouverons une situation normale ! Parce que si ce soutien ne dure que jusqu'au mois de décembre, il ne sera certainement pas suffisant, au cas où la situation ne s'améliorerait pas. J'espère donc pour vous tous, tous les entrepreneurs qui sont ici, qu'on aura des mesures un peu moins contraignantes pour pouvoir relancer notre économie. J'espère que les dancings pourront prospérer encore longtemps; ce sont eux qui font que nos jeunes qui ont besoin de sortir peuvent le faire dans des conditions décentes et sécurisées ! C'est pour ça que l'UDC soutiendra ce projet de loi.
M. Jean Burgermeister (EAG). Monsieur le président, Ensemble à Gauche soutiendra aussi ce projet de loi. Evidemment, c'est un secteur complètement sinistré par la crise. Sans entrer dans le débat de savoir si les mesures imposées étaient justes ou pas, ce qui est une certitude, c'est qu'en l'état, le milieu de la nuit ne peut pas fonctionner, et on ne sait pas encore combien de temps durera la situation. Par conséquent, il est absolument nécessaire et urgent... (Brouhaha.) Monsieur le président, je ne m'entends plus très bien parler... Il est absolument nécessaire et urgent d'amener des aides à ce secteur !
Cependant, le but de la loi est aussi de soutenir l'emploi dans le canton, puisqu'un certain nombre d'emplois sont concernés dans le secteur. Or, Ensemble à Gauche a trouvé que le texte qui nous est soumis proposait un dispositif assez faible ou en tout cas pas satisfaisant en la matière puisqu'il n'est pas contraignant. Les personnes signataires de l'accord s'engageant sur l'honneur à ne pas licencier au motif de la crise économique et sanitaire actuelle, je pense qu'il est utile d'introduire dans ce texte une réglementation stricte concernant les licenciements. C'est la raison pour laquelle le groupe Ensemble à Gauche a déposé un amendement qui vise à interdire aux établissements qui bénéficient de cette aide de procéder à des licenciements durant toute la période de l'aide, bien sûr, mais aussi pendant les six mois suivants. N'exagérons rien, mais il est facile de promettre sur l'honneur qu'on ne procédera pas à de tels licenciements et de trouver ensuite d'autres raisons pour le faire ! Quoi qu'il en soit, on sait que le secteur va continuer à souffrir, et je pense que pour soutenir l'emploi, il est urgent et utile de mettre des garde-fous un peu plus stricts !
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Monsieur le président, le groupe socialiste a entendu la demande du PLR concernant la proposition de motion socialiste, mais il propose de garder ce texte et de le voter sur le siège, simplement pour montrer notre préoccupation à toutes et tous ici. La question de la vie nocturne correspond à une politique publique voulue dans le plan directeur cantonal: je vous le rappelle, nous avons voté une fiche - la fiche A21 - qui donne les compétences au canton d'appuyer avec force une politique de la vie nocturne, des lieux de vie culturels et festifs.
Par conséquent, nous pensons que, si le Conseil d'Etat pourra avec légitimité dire qu'il a déjà répondu à cette proposition de motion, il est bon d'acter notre prise en compte anticipée des besoins des acteurs culturels. C'est un soutien que nous leur devons et je pense que nous pouvons voter ce texte sur le siège tout en acceptant le projet de loi du Conseil d'Etat, que nous remercions d'ailleurs d'avoir mené ces négociations avec l'ensemble des acteurs culturels, tous milieux confondus. (Applaudissements.)
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, merci pour le bon accueil réservé à ce texte. Vous voyez que le Conseil d'Etat se met en quatre pour vous proposer des projets de lois répondant à des propositions de motions avant que celles-ci ne soient même votées ! Plus sérieusement, vous l'avez bien compris, notre responsabilité - le terme a été prononcé par le député Alder tout à l'heure - est de répondre à une situation tout à fait exceptionnelle: celle qui a vu le Conseil d'Etat prendre une décision le 31 juillet dans l'après-midi, décision immédiatement exécutoire qui a eu un impact fort pour ce qu'il faut ici considérer avant tout comme des entités économiques, même si elles ont une forte dimension culturelle. C'est de ce point de vue que nous avons négocié.
Je souligne l'importance de la concertation entre les trois entités mentionnées, à savoir la Société des cafetiers, restaurateurs et hôteliers de Genève, le syndicat Culture nocturne et le Grand Conseil de la nuit - l'autre, serais-je tenté de dire ! Nous avons négocié dans ce contexte quelques cautèles que je me plais à souligner parce qu'elles sont strictes - elles engagent sur l'honneur - et je peux vous dire ici que les signataires de l'accord tiendront et respecteront cet accord parce qu'il était urgent de pouvoir le signer. Ces cautèles sont d'abord celles de s'en tenir aux charges fixes incompressibles, vous l'avez bien compris: il ne s'agit pas d'indemniser pour un manque à gagner ou la perte de gain. Ce soir, avec le vote de ce projet de loi, vous donnez un signe clair d'entrée en matière, sans aller trop loin non plus.
Ensuite, il s'agit d'un engagement extrêmement fort sur l'emploi, et c'est peut-être le point le plus important - le signal le plus important - que vous donnez ce soir, Mesdames et Messieurs les députés, pour réussir à sanctuariser les emplois d'un domaine d'activité économique précis à un temps T. On a recensé ces emplois très précisément; il s'agit des emplois directs. Je m'adresse en particulier au groupe Ensemble à Gauche: l'amendement de ce groupe est intéressant, mais je pense qu'on aura de la peine à l'appliquer et sa portée juridique me semble très relative. Le problème de cet amendement est qu'il ne tient pas compte du deuxième cercle des emplois qu'il s'agit de protéger. Mesdames et Messieurs les députés, en votant cet objet ce soir, vous soutenez les quelque mille emplois - un peu moins, mais environ mille - directement concernés dans ce secteur et vous soutenez aussi les centaines d'emplois indirectement concernés. Je pense ici à des producteurs de boissons, par exemple. Je pense ici aux taxis: Dieu merci, un certain nombre de clients utilisent les taxis plutôt que leur propre voiture pour rentrer ! Je pense à tout un système existant autour des boîtes de nuit qui va également profiter des effets bénéfiques de ce projet de loi lorsque l'activité pourra reprendre.
Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous remercie par avance du soutien à ce texte; il fera évidemment bon accueil à la proposition de motion, mais si vous nous la renvoyez, la réponse sera dans le projet de loi et le Conseil d'Etat vous avertit quand même que ce n'est sans doute pas le dernier texte de cette nature - nature propre à un plan de sauvetage, pas à un plan de relance. Il s'agit de sauver un secteur et ce n'est pas le dernier texte de cet acabit que nous vous présenterons ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote d'entrée en matière sur le projet de loi 12783.
Mis aux voix, le projet de loi 12783 est adopté en premier débat par 84 oui et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 1 à 7.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement de M. Jean Burgermeister à l'article 8, alinéa 5. Il s'agit de la nouvelle teneur suivante: «Les établissements bénéficiaires de l'aide ne peuvent pas licencier leur personnel durant la durée de l'aide et les six mois suivants, sauf en cas de faute grave et avérée.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 74 non contre 9 oui.
Mis aux voix, l'art. 8 est adopté, de même que les art. 9 à 11.
Le président. Nous nous prononçons à présent sur l'article 12 «Clause d'urgence». Je rappelle que selon l'article 142 de la LRGC, pour être adoptée, la clause d'urgence doit être votée par le Grand Conseil à la majorité des deux tiers des voix exprimées, les abstentions n'étant pas prises en considération, mais au moins à la majorité de ses membres.
Mis aux voix, l'art. 12 est adopté par 87 oui et 1 abstention (majorité des deux tiers atteinte).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12783 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 84 oui et 2 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Nous passons au vote de prise en considération de la proposition de motion 2676.
Mise aux voix, la motion 2676 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 65 oui contre 15 non et 3 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Premier débat
Le président. Nous abordons la prochaine urgence, classée en catégorie II, trente minutes: le PL 12551-A. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Serge Hiltpold.
M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, comme pour les autres projets d'agglomération, la commission des travaux a examiné ces crédits d'étude et d'investissement d'un montant global de 245 060 000 francs, ce qui correspond à l'addition des deux sommes indiquées dans l'exposé des motifs; ils concernent spécifiquement le PA3. Il n'est pas inutile de rappeler que ces projets d'agglomération touchent les cantons de Genève et de Vaud ainsi que les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie. Ils sont par ailleurs massivement soutenus par la Confédération.
Le rapporteur de minorité a utilisé, dans son rapport, des termes que je trouve parfaitement excessifs. Il en donnera très certainement lecture, mais il y a un passage que je ne peux pas admettre: «c'est un coup d'Etat technocratique qui force la main du pouvoir politique». Sur ce point, je crois qu'il faut être clair: les projets d'agglomération ont été exposés de manière très circonstanciée à la commission des travaux. Je vous fais grâce de la lecture; vous vous référerez au rapport, qui est extrêmement complet. Il comporte tous les détails de chaque mesure, de chaque financement et des différentes interventions. Tous les commissaires ont eu la possibilité de poser des questions; nous ne pouvons certes pas modifier ces projets en soi, mais nous sommes en tout cas bien informés et rien n'empêche les commissaires - ou les députés de manière générale - de faire d'autres propositions par le biais de textes distincts. A cet égard, l'administration a fait son travail correctement: toutes nos questions ont reçu des réponses et les demandes complémentaires ont été chiffrées et étayées. Je pense donc que cet argument n'est absolument pas valable.
Ces projets d'agglomération sont toujours sujets à débat quant au rôle de la région, au rôle de Genève, à la prédominance, à la rivalité avec le canton voisin ou la France voisine. J'aimerais toutefois vous rappeler une chose: s'ils sont soutenus par la Confédération, c'est qu'on doit avoir une vision régionale, voire nationale. Ces projets d'agglomération ont surtout un effet multiplicateur: les montants cités sont relativement importants, mais il faut savoir que cette vision a un impact sur le territoire, les entreprises et de nombreux collaborateurs pour pratiquement dix ans ! On travaille déjà maintenant sur le projet d'agglomération de quatrième génération alors que des lots des PA1 et 2 sont encore en cours de construction. C'est donc fondamental: c'est une politique importante avec des montants importants. Je crois que la commission des travaux n'a pas été dupe, elle a été quasi unanime là-dessus, et je vous invite, au nom de la majorité, à soutenir ce projet de loi avec enthousiasme. Merci.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. J'aimerais tout d'abord répondre au rapporteur de majorité par un propos liminaire. Il estime que mon discours est excessif; c'est son droit. Je trouve en revanche plus contestable, disons, qu'il n'admette pas que j'exprime de manière vive une opinion différente de la sienne. Mais il y a quelque part une différence de fond ! On a un homme politique honorable qui se place dans une logique technocratique: c'est le pouvoir technocratique qui donne des ordres au politique. Il lui dit: c'est comme ci ou comme ça, obéissez ! Je pense que nous sommes dans une pyramide inversée, et nous devons adopter une logique tout à fait différente: c'est le politique qui doit décider ! Nous devons décider, sur mandat de l'électeur ! C'est l'électeur, le citoyen, qui doit avoir le pouvoir - le pouvoir final - et non la technocratie qui donne des ordres au politique et aux citoyens ! Nous avons deux philosophies différentes de la vie publique et de la vie politique, exprimées de manière très claire; nous avons une divergence. Que je le dise avec vigueur est à mon sens un élément positif parce qu'il faut donner du sens à notre vie politique et non rester dans quelque chose de tiédasse !
Ma grande critique, c'est que le projet d'agglomération relève d'un grave déficit démocratique. C'est un véritable fourre-tout, avec un mélange d'objets que l'on doit accepter ou refuser en bloc, et c'est pourquoi j'ai parlé de coup d'Etat institutionnel. Je maintiens qu'il s'agit d'un coup d'Etat institutionnel et je suis contre cette manière de faire ! Je m'y oppose, comme mon mouvement, le MCG - le Mouvement Citoyens Genevois - qui de longue date déjà s'oppose au principe du projet d'agglomération et à l'utopie transfrontalière. C'est vrai qu'il y a là derrière une utopie transfrontalière: ce ne sont plus les citoyens qui décident mais la technostructure, la technocratie, qui dirige. Nous avons à ce propos, au MCG, une divergence de fond avec la presque totalité - je devrais peut-être dire avec la totalité - du parlement qui a, lui, une vision sacralisée de la technocratie.
On verra aussi le résultat de cette politique - quel est-il ? C'est un bétonnage systématique de nombreux espaces. Il suffit d'aller devant la gare des Eaux-Vives pour s'apercevoir que la politique de «saint Béton», l'écologie du bétonnage...
Le président. Vous parlez sur le temps de votre groupe, Monsieur le rapporteur.
M. François Baertschi. Je vais bien sûr me taire pour éventuellement reprendre la parole sur le temps du groupe. Merci, Monsieur le président.
M. Stéphane Florey (UDC). Il n'est pas question ici d'être dupe, comme le dit le rapporteur de majorité, mais tout simplement réaliste. La réalité, c'est qu'on nous présente en commission des packages tout ficelés pour ces projets d'agglomération, avec un certain nombre de mesures qui s'imbriquent les unes dans les autres, ce qui ne laisse pas le choix à la commission de ne voter que l'une ou l'autre d'entre elles. Car si vous en refusez une, vous êtes finalement obligé de toutes les refuser puisqu'on vous explique que le fait de toucher à telle mesure aura forcément des implications sur les autres. Et c'est pour ça que nous sommes, à l'UDC, insatisfaits de ce type d'objets bien qu'un certain nombre de projets soient malgré tout utiles pour notre canton et notre collectivité - nous le reconnaissons et l'acceptons.
On nous dit en plus qu'il ne faut surtout pas refuser ce texte, sans quoi on va perdre les subventions fédérales. Peut-être, mais il faudra bien avoir un jour le courage de dire non et arrêter de se faire marcher sur les pieds, à la fois par la Confédération, l'Etat français et les autres cantons concernés par ces projets d'agglomération ! Parce que finalement, c'est ça la réalité: nous ne sommes plus véritablement maîtres de notre aménagement, nous subissons la volonté de nos pseudo-partenaires. Je rejoins là parfaitement les propos de M. Baertschi, rapporteur de minorité: il a raison, nous subissons en réalité les desiderata des technocrates ! On s'aperçoit également que le Conseil d'Etat n'a aucune vision dans cette affaire et que lui-même subit la pression de Berne. On lui dit simplement: si vous ne faites pas, eh bien il n'y a pas de sous ! Voilà la réalité aujourd'hui; on verra ce que voteront mes collègues, entre abstention et refus, mais je refuserai pour ma part ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Vous l'aurez compris, le groupe socialiste est par contre en faveur d'une vision foncièrement régionale et concertée de l'aménagement du territoire. Il se félicite au contraire de ces projets d'agglomération: ils permettent de construire la région ensemble, de manière coordonnée, pour favoriser la qualité des espaces, résoudre les problèmes de mobilité et offrir finalement des lieux de vie de qualité. Nous profitons de ce moment pour remercier M. Baradel, chef de projet d'agglomération, et son équipe: comme l'a dit M. Hiltpold, nous avons pu bénéficier de présentations extrêmement détaillées.
J'aimerais reprendre quelques éléments entendus tout à l'heure. Non, ce n'est pas un projet technocratique, à moins que l'on décide, comme l'UDC, que le projet devient technocratique dès que l'on parle de Berne, du gouvernement fédéral et des subventions - le cofinancement se monte à pas moins de 500 millions. Est-ce qu'il est technocratique - et je reprends les propos du MCG - du moment qu'on intègre la région frontalière et la France ? Non: résoudre les problèmes de mobilité, proposer des projets d'aménagement urbain et des aménagements de qualité n'est pas technocratique. C'est au contraire construire une région où on accompagne les projets d'urbanisation et de logement.
J'entends dire que ce projet d'agglomération permet de bétonner et on cite les Eaux-Vives. Je dirai à M. Baertschi que je me félicite quant à moi des projets de logements de qualité quand je vais dans le quartier des Eaux-Vives. Je suis contente de voir la gare du CEVA et la Comédie de Genève. Je ne vois donc pas du béton mais des activités culturelles, la résolution des problèmes de mobilité et des logements qui répondent au besoin prépondérant de la population.
Pour toutes ces raisons, je pense que nous avons le devoir de réaliser ces projets d'agglomération. Je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi l'UDC et le MCG les refusent et méprisent finalement les subventions fédérales qui pourraient nous être accordées. Je relève que pérorer sur ces projets est un bien grand luxe; on devrait au contraire s'en réjouir, car ils améliorent au quotidien la qualité de vie de l'ensemble des citoyennes et des citoyens de ce canton et de la région. Je vous remercie.
M. David Martin (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, notre agglomération est celle qui se trouve la plus démunie de Suisse en infrastructures de transport. Pour s'en rendre compte, il suffit de prendre une carte et d'observer le réseau ferré qui nous entoure. On cite souvent Zurich, qui a un réseau ferré extrêmement développé - mais on dira qu'à Zurich, c'est différent puisque ce n'est pas un canton transfrontalier. On peut faire l'exercice avec Bâle, agglomération transfrontalière et même trinationale: on voit du premier coup d'oeil que Bâle a un réseau ferré extrêmement bien développé. Ce projet d'agglomération est donc une fabuleuse aubaine pour Genève: les subventions fédérales lui permettront de rattraper un retard historique.
Jusqu'à maintenant, cela a été dit, les PA1, 2 et 3 ont permis d'attirer 500 millions de financement fédéral. C'est quand même le comble de s'opposer à ces financements fédéraux qui font du bien à notre agglomération ! Le retard est historique mais a aussi des causes récentes: nous avons perdu plus ou moins l'intégralité de la législature précédente à cause justement des tergiversations du MCG et de l'UDC, qui viennent de dire qu'on leur marche sur les pieds. En ce qui me concerne, j'ai plutôt envie de dire que ce sont le MCG et l'UDC qui nous marchent sur les pieds puisqu'une majorité soutient maintenant ce projet d'agglomération, ce dont on peut à mon sens se réjouir. On peut également se réjouir des efforts déployés par le Conseil d'Etat pour rehausser de 35% à 40% la part du financement fédéral, qui était récemment menacé.
Le projet d'agglomération, c'est bien connu, inclut des financements pour les infrastructures de transports publics - pour le CEVA et ses futures extensions, que nous appelons de nos voeux. Ce que l'on sait moins, c'est que ce paquet ficelé critiqué par certains - on se demande bien pourquoi - comprend aussi plein d'autres mesures très intéressantes en faveur de la mobilité douce. On peut citer la passerelle destinée aux vélos et aux piétons, prévue dans le lot du PA3, qui va permettre de franchir l'autoroute le long de la route de Meyrin pour relier Genève à Meyrin. Est-ce que c'est une chose foncièrement mauvaise ? Je ne crois pas. Par ailleurs, toute une série de mesures paysagères et de soutien à la biodiversité reçoivent des financements dans le cadre de ce paquet, par exemple le réaménagement du parc des Franchises ou encore le contrat corridors du Mandement.
Pour toutes ces raisons, les Verts soutiennent avec détermination ce projet de loi ainsi que tous les efforts qui permettront d'améliorer notre cohabitation à l'échelle de la région transfrontalière. Je vous remercie.
M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs, ce troisième projet d'agglomération a effectivement toute son importance dans l'édifice régional. Il structure de manière très forte un pack d'investissements avec la région Rhône-Alpes notamment, et je m'arrêterai trente secondes là-dessus: vous savez, quand vous demandez à un Savoyard de mettre deux francs de côté, c'est quelque chose qui a toute son importance. Je crois donc qu'on est obligé d'en tenir compte dans ce pack d'investissements. Celui-ci va plus loin parce qu'il prend en compte les fonds que vont verser la Confédération, les cantons de Genève et Vaud, qui participent aussi, et l'ensemble de nos communes - tous sont amenés à participer à cet axe structurant d'investissements.
Mesdames et Messieurs, on a compris ! Nous pouvons remercier le MCG parce qu'un vrai débat s'instaure aujourd'hui en plénière, et je pense qu'il était nécessaire de pouvoir dire quelques mots au vu de l'importance du projet. On peut inviter le MCG, et peut-être l'UDC avec lui, à nous présenter un projet de loi pour éventuellement réaliser un mur comme au Mexique ou en Israël ! Nous avons appris que les Romains ont mis les premières défenses sur le bastion de Saint-Laurent pour se protéger de l'extérieur. On a continué au XIIIe siècle, on en a refait au XVIe siècle pour les démolir au XVIIe. Vous m'excuserez, Mesdames et Messieurs, je suis démocrate-chrétien, et les démocrates-chrétiens n'aiment pas beaucoup les frontières... (Remarque.) ...mais ce qu'il est important de rappeler aujourd'hui, c'est qu'on peut faire la région ensemble. C'est à mon sens le point fort de ce troisième projet d'agglomération.
Nous avons loupé le deuxième projet d'agglomération ! Il a fallu aller rechercher des sous parce qu'on n'a pas réussi à se comprendre et à se mettre d'accord ! Le tram de Saint-Julien était programmé dans le deuxième pack d'agglomération déjà, Mesdames et Messieurs; il ne s'est pas réalisé. On ne reviendra pas là-dessus, mais on a perdu du temps - ce temps-là, qu'on le veuille ou pas, représente des francs supplémentaires d'investissement. Et je ne suis pas sûr qu'on ait toujours la capacité de faire les investissements qu'on est en train de réaliser à ce stade.
Oui, Mesdames et Messieurs, ce projet d'agglomération a toute son importance. On a beaucoup cité les projets qu'il permettra de réaliser; j'en ai pour ma part retenu un: celui de Cornavin. Quand on voit la place de Cornavin et le nombre de piétons qui la traversent chaque jour, je pense effectivement que si on arrive à la restructurer au travers de ce projet d'agglomération, eh bien on aura réussi ! Le parti démocrate-chrétien soutiendra ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Rémy Pagani (EAG). J'ai participé treize ans au projet d'agglomération - j'ai vu passer les plans 1, 2, 3 et maintenant le plan 4 - et je m'étonne d'entendre les inepties de ceux qui n'y ont pas participé. Dire que ce sont des bureaucrates qui auraient monté ces projets n'est absolument pas conforme à la réalité. La réalité, c'est que ces projets structurants ont été imaginés il y a bien des années - bien trop d'années - et mis en place à travers le projet d'agglomération. L'ensemble des magistrats de la région, dans une parfaite bonne entente, se sont accordés pour faire en sorte que cette région puisse résoudre un de ses problèmes: la mobilité.
Alors quand j'entends certains... (Remarque.) Je trouve aussi qu'un certain nombre de députés devraient au moins avoir l'objectivité, disons, de reconnaître que les députés ont été tenus à l'écart, puisque en fait deux représentants de notre parlement prennent part à des séances une fois par année, et en plus ça change toutes les années ! Il y a donc là un véritable problème; il faudrait que ces deux ou trois députés soient attachés à ces projets d'agglomération pour en avoir une réelle connaissance plutôt que de lancer des idées en l'air - surtout quand leur objectif est de dénigrer une fois de plus la collaboration transfrontalière, internationale, qui s'est établie dans le cadre de ces projets.
Malheureusement, un certain nombre de magistrats sont aussi responsables d'avoir freiné ces investissements, notamment, on l'a dit, pour le tram de Saint-Julien: certains magistrats, tout comme la majorité du Grand Conseil d'une époque, n'ont pas voulu investir dans l'infrastructure et nous faisons maintenant les frais de ce retard. Je souhaite donc que le tram aille jusqu'à Ferney et pas seulement jusqu'à l'aéroport, qu'il aille également jusqu'à Bernex - enfin, il y va déjà, mais qu'il aille encore plus loin - qu'il aille à Saint-Julien. Tout cela est nécessaire pour faire fonctionner notre région: plus de 100 000 personnes viennent tous les matins et repartent tous les soirs - on parle de 600 000 passages aux douanes. Si on veut lutter contre la dégradation du climat, la moindre des choses est à mon sens de soutenir ce projet d'agglomération ! Je vous remercie de votre attention.
M. Patrick Dimier (MCG). Puisque notre collègue, qui vient de nous faire un brillant exposé, a participé aux plans 1, 2, 3, 4 et 5, je me demande si à la fin il aura une «rente en plans» ! (Rires. Applaudissements. Commentaires.) Plus sérieusement, Monsieur le président, vous me permettrez de dire qu'on parle de déficit démocratique, parce que c'est un système qui fonctionne à l'européenne ! Il est «top down» et non «bottom up» comme on a l'habitude de faire chez nous ! C'est clair qu'il y a des représentations parlementaires, mais ce n'est pas le souverain qui dicte et ordonne les choses, alors que chez nous, c'est lui. Quand on a des projets aussi importants - que j'apprécie pour bonne partie, je ne suis pas du tout dans la négation - j'estime que c'est au souverain de nous dire s'il est d'accord ou pas. Merci.
M. Jacques Béné (PLR). Vu la complexité des mesures qui nous ont été proposées, je vois mal le souverain se prononcer sur l'ensemble d'entre elles. Dans certaines communes, les mesures concernent de petites routes afin d'y installer là une piste cyclable, là une voie de bus pour quelques centaines de milliers de francs ou quelques millions; je vois mal le souverain se prononcer là-dessus. C'est notre travail à nous, parlementaires, de suivre ces mesures comme nous l'avons fait à la commission des travaux ! Lors de ces séances, nous avons largement pu poser toutes nos questions.
Ce que j'attends des groupes opposés aux mesures du projet d'agglomération 3, c'est de venir avec des propositions différentes de celles qui nous ont été faites en commission. Celles-ci ont été validées par la Berne fédérale auprès de laquelle, on le sait, le Conseil d'Etat doit se battre régulièrement pour obtenir des financements. Je crois que c'est là-dessus qu'il faut insister, et on peut féliciter l'exécutif d'aller se battre à Berne pour obtenir des financements - entre parenthèses, le PLR aimerait bien qu'il le fasse aussi pour la traversée du lac. (Rires.) Si le mécanisme des projets d'agglomération, dont le coût s'élève à 1,3 milliard pour les PA1, 2 et 3, permet à la Confédération d'en financer 509 millions, ce n'est pas rien ! C'est en faveur du Grand Genève, oui: c'est un projet d'agglomération. On doit faire avec nos voisins et c'est tant mieux si la Confédération nous y aide.
Pratiquement toutes les mesures qui nous ont été présentées prévoient des pistes cyclables. Au niveau de la mobilité douce, je crois par conséquent qu'un effort considérable a été fait; s'agissant des mesures paysagères aussi. Le point qu'il faut à mon sens souligner, c'est que certaines mesures des projets d'agglomération 1 et 2 pourraient ne pas être financées par Berne si elles ne sont pas mises en oeuvre rapidement. On peut donc insister auprès de l'administration - et c'est notre rôle - pour que ces délais soient respectés.
Mesdames et Messieurs, ces investissements amélioreront la qualité de vie des Genevois, beaucoup plus que d'autres projets politiques également importants, mais qui n'amélioreront en rien leur qualité de vie. Je pense par exemple au projet de loi sur les Dardelles dont on parlera certainement ce soir ou demain, pour lequel nous devrons investir 258 millions de francs: ce n'est politiquement pas intéressant. Il ne va pas améliorer la qualité de vie des Genevois, contrairement à ce projet d'agglomération 3; bienvenue au PA3, et on se réjouit d'ores et déjà du projet d'agglomération 4 que nous proposera le Conseil d'Etat. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Hiltpold, je suis désolé, il n'y a plus de temps de parole ni pour le rapporteur de majorité ni pour le PLR. La parole est maintenant à M. le député Daniel Sormanni.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire qu'on est dans une sorte de délire: le Grand Genève, quoi que vous en pensiez, ça reste dans vos rêves ! Nous sommes dans deux systèmes politiques et juridiques complètement différents et ce sont des choses difficiles à combiner. On s'est quand même aperçu, avec ces projets d'agglomération 1 et 2, que Berne nous a menacés - M. Béné vient d'ailleurs de le dire: «On ne va plus soutenir vos projets d'agglomération, parce qu'on les vote, mais vous ne les réalisez pas !» Le taux de réalisation des PA1 et 2 est absolument famélique. Je ne suis pas dans la commission - je ne sais pas si le sujet a été évoqué ni où on en est - mais il reste probablement encore, à ce stade, énormément de choses à réaliser. On en est pourtant au troisième - voire au quatrième - projet d'agglomération, c'est par conséquent bien joli de tirer des plans sur la comète, comme ça, pour les réaliser.
Il y a effectivement un déficit démocratique. C'est facile de dire: «Vous n'avez qu'à présenter des propositions alternatives !» Je crois qu'avec tout ce qui a été dit et proposé aujourd'hui, notamment par M. Pagani - vous transmettrez, Monsieur le président - avec tous ces projets, on n'a réussi qu'une seule chose: bloquer totalement la ville et faire fuir les entreprises. Voilà à quoi on va aboutir au bout du compte, parce que les projets d'aménagement de Cornavin vont juste être complètement catastrophiques ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) C'est un petit peu facile de critiquer comme ça. Non, ce n'est pas une bonne idée ! Ce n'est pas une bonne manière de faire. Est-ce que nos collègues français vont réaliser les parkings qu'ils avaient promis pour le CEVA ? Nada ! Rien du tout n'a été réalisé !
Le président. Merci, Monsieur le député, c'est terminé !
M. Daniel Sormanni. On est donc loin d'être vraiment efficaces dans ces projets d'agglomération et c'est pourquoi nous dirons non. Nous ne nous faisons pas d'illusions: la majorité va dire oui...
Le président. C'est terminé.
M. Daniel Sormanni. ...mais vous ne pourrez pas non plus espérer de la gauche qu'elle... (Le micro de l'orateur est coupé.)
Le président. La parole est à Mme la députée Christina Meissner.
Mme Christina Meissner (PDC). Merci, Monsieur le président. On a testé la frontière qui nous sépare; il est temps de revenir à la frontière qui nous rassemble en votant ce projet d'agglomération.
Le président. Parfait, vous l'avez fait en dix secondes - bravo, Madame la députée ! La parole va à M. le député Rémy Pagani pour quinze secondes. Il va falloir être aussi bref que Mme Meissner !
M. Rémy Pagani (EAG). Je suis rapporteur de minorité, Monsieur le président. Je voudrais juste dire que je trouve un peu contradictoire de prétendre que ce parlement n'a rien eu à faire puisque tous les projets d'agglomération passent par lui ! Et c'est parce qu'il a refusé de voter le tram ONU-Ferney, sous prétexte qu'il fallait...
Le président. Voilà...
M. Rémy Pagani. ...construire le tunnel...
Le président. ...c'est terminé.
M. Rémy Pagani. ...que nous avons pris du retard et que Berne nous a supprimé ses subventions.
Le président. C'est terminé, et je vous rappelle que vous n'êtes pas le rapporteur de minorité puisque c'est M. Baertschi !
M. Rémy Pagani. Je suis rapporteur... Ah, non, excusez-moi ! (Rires. Commentaires.)
Le président. Ce n'est pas grave ! La parole est enfin à M. le député Stéphane Florey pour quinze secondes.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Je veux juste dire que si on avait pris les mesures séparément, avec un réalisme certain, eh bien je ne suis pas sûr qu'elles auraient toutes été acceptées. Et c'est dans ce sens-là que ce type de projet est mauvais: on nous oblige à voter un paquet ficelé.
Une voix. Bien dit !
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Hiltpold, je suis désolé: il n'y a plus de temps de parole pour le PLR ou pour le rapporteur de majorité. La parole n'étant plus demandée, je cède maintenant le micro à M. le conseiller d'Etat Antonio Hodgers.
M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Merci, Monsieur le président. L'essentiel ayant été dit, Mesdames et Messieurs les députés, j'interviendrai brièvement. J'aimerais répondre aux détracteurs de ce crédit d'investissement, qui ont finalement peu critiqué les mesures contenues dans le projet de loi. On peut aborder le fond, puisqu'il s'agit effectivement d'un objet qui regroupe toute une série de mesures urbaines, de mesures relatives aux transports, à l'environnement, à la nature.
Les arguments qu'on nous oppose sont les suivants: «Il n'y a pas de mandat politique, c'est un paquet ficelé, l'agglomération est une utopie ! Les gens ne l'ont pas voté; le Grand Genève est un rêve !» Ceux qui rêvent, Mesdames et Messieurs, ce sont ceux qui pensent que Genève est une île ! Ce sont ceux qui pensent que Genève fonctionne en autarcie dans ses frontières cantonales ! Ceux-là rêvent et nient que 650 000 passages ont lieu chaque jour aux frontières cantonales - 650 000 passages par jour à nos frontières !
Le Grand Genève est une réalité - une réalité historique, comme l'a encore récemment rappelé l'historien Bernard Lescaze. Cette réalité a plusieurs siècles puisque Genève s'est toujours construit avec son environnement, autrefois savoyard et aujourd'hui français, mais il est dans le fond «grand genevois» - c'est l'appellation que nous avons choisie ensemble.
Pourquoi ce texte comporte-t-il toute une série de mesures ? Parce que c'est ce que nous demande la Confédération, Mesdames et Messieurs ! La Confédération fait des appels à projets aux agglomérations et leur demande, en échange de son aide - ce sont 100 millions de francs qui sont ici en jeu - de lui proposer un paquet de mesures. Genève pourrait s'en passer ! C'est vrai que nous n'avons pas de problèmes budgétaires, n'est-ce pas ! Nous pourrions tout à fait rejeter cette proposition de Berne ! Non, Mesdames et Messieurs: Berne pose ses conditions et requiert de nous une liste de mesures conjointes.
Et le canton de Genève se taille la part du lion ! Regardez les mesures proposées - on les a évoquées, mais écoutez-les: réaménagement de la place de Carantec au Grand-Saconnex, aménagement multimodal au P+R P47-P49 vers l'aéroport, aménagement pour piétons à la route de Veyrier, réaménagement de la route de Colovrex, pôle d'échange à Châtelaine, etc. Ce sont des mesures purement genevoises en faveur de la mobilité dont vous parliez ! Il y a par ailleurs le contrat corridors pour la nature qui, elle, traverse les frontières sans passeport - et c'est heureux - et les restaurations du milieu naturel. Tout cela est inclus dans ce projet.
Récemment, Mesdames et Messieurs, le peuple s'est prononcé indirectement sur cette question du Grand Genève. Il a dit oui à 69% à la libre circulation des personnes ! Qu'ont voulu dire par là les Genevoises et les Genevois ? Qu'ils veulent, bien sûr, que notre pays garde des relations stables avec ses voisins, mais aussi que la réalité transfrontalière de notre agglomération soit reconnue. C'est à un score très large que cette vision-là a été reconnue ! Vous dites que ce n'est pas démocratique, Mesdames et Messieurs de l'UDC et du MCG: je me réjouis que vous lanciez un référendum contre ces mesures d'amélioration de la qualité de vie dans tout le canton, dans tous les secteurs. Il vous faudra expliquer aux Genevois que vous crachez sur les 100 millions venus de Berne, destinés à des projets locaux sur le territoire.
Voilà la force de notre canton: notre canton s'est toujours enrichi de ses rapports avec l'extérieur. Il s'est toujours alimenté de ses rapports avec son voisin direct, qu'on appelle la France voisine. Si ce projet d'agglomération est reconnu à Berne dans sa première, deuxième et, là, troisième génération, c'est bien parce qu'il a une histoire bien plus ancienne que celle de notre débat. C'est l'histoire de Genève, qui a toujours travaillé avec son arrière-pays. Merci de faire bon accueil à ce crédit. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 12551 est adopté en premier débat par 74 oui contre 16 non et 3 abstentions.
Le projet de loi 12551 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12551 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 74 oui contre 16 non et 3 abstentions.
Premier débat
Le président. Nous passons à l'urgence suivante, à savoir le PL 12486-A, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. La parole va à Mme la rapporteure de majorité, Nicole Valiquer Grecuccio.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la très grande majorité de la commission vous recommande de voter cette modification de zone. Ce secteur est en effet inscrit dans le grand projet Bernex et correspond tout à fait aux objectifs du plan directeur cantonal. Je vous rappelle que le plan directeur de quartier Bernex-Est a lui aussi été adopté.
Il s'agit, à travers ce texte, de permettre la construction d'un cycle d'orientation pour 900 élèves et celle d'un centre de formation pour les professionnels de la santé et du social - les locaux actuels, souvent désuets, sont disséminés sur l'ensemble du territoire. Ce projet répond par ailleurs à la volonté du Conseil administratif de la commune de Bernex qui peut ainsi, grâce à lui, développer des équipements communaux, notamment une école de musique et un équipement socioculturel. Il sera également possible de profiter des salles de gym qui seront mises à disposition au cycle d'orientation. Vous l'aurez compris, ces équipements viennent compléter les projets de logements prévus dans le secteur de Bernex et permettent une meilleure qualité de vie. En effet, il ne s'agit pas seulement de s'y loger mais aussi de pouvoir y étudier et d'y trouver des lieux de vie culturels ou sportifs, ce que rend possible ce projet.
Le travail de la commission n'a pas été de contester, je dirais, ces objectifs, mais de comprendre les oppositions affichées par les voisins et de voir comment les accompagner pour parvenir à une meilleure adhésion au projet. Nous avons donc mis un certain temps pour traiter cet objet: nous l'avons gelé puisque pas moins de neuf parcelles sont occupées par des propriétaires privés. La commission a dans un premier temps regretté qu'il n'y ait pas eu une concertation beaucoup plus soutenue avec ces mêmes propriétaires et leurs mandataires, mais le dialogue s'est renoué avec le département suite à l'intervention de la commission. Nous avons eu l'occasion d'entendre M. Vinh Dao, directeur de la direction de la planification et des opérations foncières de l'office cantonal du logement et de la planification foncière. Celui-ci a très bien expliqué que la problématique est assez complexe et que des solutions doivent être trouvées selon le type de propriétaires, puisque tous n'ont évidemment pas les mêmes intérêts. Dans ce secteur, il y a en effet des propriétaires agricoles, des exploitants, des propriétaires de surfaces agricoles mais qui n'exploitent plus et, enfin, des promoteurs.
Le président. On passe sur le temps de votre groupe.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio. Oui, Monsieur le président, c'est prévu ainsi. Bien que tout le monde n'ait évidemment pas tout à fait les mêmes intérêts, la commission a compris que le mécanisme de déclassement pouvait résoudre la situation. Si la modification de zone est acceptée, l'OCLPF pourra en effet entamer les négociations puisqu'il connaîtra dès lors le type de projet et bien sûr les valeurs à appliquer pour le déclassement. C'est donc convaincue de la nécessité de ces équipements publics que la majorité de la commission vous recommande d'accepter ces modifications de zones qui, je le répète, s'inscrivent dans le plan directeur Bernex-Est et dans l'ensemble des projets tels que définis par le plan directeur cantonal. Merci beaucoup.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de minorité. Le projet de loi dont il est question ici démontre le manque total de vision du Conseil d'Etat en matière d'aménagement. Le gouvernement nous demande aujourd'hui de déclasser près de 45 000 mètres carrés de zone agricole alors que pas loin d'un demi-million de mètres carrés de zone agricole - dont plus de la moitié en surface d'assolement - ont déjà été déclassés dans la région ces dix dernières années. Pourquoi n'a-t-il pas été capable d'inclure les infrastructures nécessaires à la commune et aux collectivités publiques dans les périmètres déjà déclassés ? C'est ce manque de vision que ce rapport de minorité a voulu mettre en évidence.
Si l'exécutif avait été honnête dès le début, il l'aurait dit ! Il aurait dû prévoir qu'en déclassant pas loin d'un demi-million de mètres carrés de surfaces agricoles pour y construire principalement du logement, nous aurions besoin à court terme de créer ces infrastructures publiques, à savoir un cycle d'orientation, des équipements communaux et un P+R. Mais il a tout bonnement été incapable de le prévoir dans les plans d'aménagement de la commune de Bernex, ce que déplore aujourd'hui la minorité. Finalement, la solution à cela existe déjà - on l'a déjà mise en avant. Un refus de ces 45 000 mètres carrés supplémentaires obligerait à une révision du PLQ de Saint-Mathieu et à inclure ces infrastructures publiques dans les futurs PLQ de Vailly; c'est une possibilité réaliste pour préserver encore un peu plus notre zone agricole.
Ce qui se passe aujourd'hui, comme hier au Pré-du-Stand, démontre également l'incohérence de certains partis dans cette affaire. Dans le rapport de minorité relatif au Pré-du-Stand, on lit qu'il faut absolument préserver la zone agricole puisque, le rapporteur de l'époque le rappelait, 60% à 64% de la population a accepté...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe, Monsieur le député.
M. Stéphane Florey. Oui. ...les initiatives pour la souveraineté alimentaire. Et il prétend aujourd'hui tout le contraire ! Il dit ici qu'il n'est plus nécessaire de préserver notre terre agricole car nous avons d'autres besoins ! Eh bien, Mesdames et Messieurs de la gauche et des Verts, il faudrait savoir ce que vous voulez, et, de grâce, dites-le franchement ! Vous êtes contre la zone agricole, vous êtes pour le bétonnage de notre canton et pour le surdéveloppement; voilà la réalité aujourd'hui. C'est pourquoi la minorité vous enjoint de refuser ce projet de loi de déclassement et d'obliger le Conseil d'Etat à venir présenter devant ce Grand Conseil des modifications au PLQ de Saint-Mathieu, déjà en force, et à prévoir dans les futurs PLQ de Vailly les infrastructures dont nous aurions éventuellement besoin. Je vous remercie.
Des voix. Bravo !
Mme Claude Bocquet (PDC). Je vous informe qu'en vertu de l'article 24 de la LRGC, je ne participerai pas à ce vote. Merci.
M. Rémy Pagani (EAG). A Ensemble à Gauche, Monsieur le président, nous sommes bien sûr en faveur du maintien des terres agricoles, et des bonnes terres agricoles - cela va de soi. Nous l'avons toujours défendu et nous continuerons à le défendre; il est évident que la crise sanitaire que nous avons traversée nous oblige d'autant plus à préserver ces zones agricoles. Ici, il s'agit de déclasser 45 000 mètres carrés, soit 4,5 hectares, alors qu'il était question, au Pré-du-Stand, de consacrer 12 hectares à des bureaux vides et à des terrains de sport à côté de l'aéroport - je vous rappelle qu'on voulait faire courir nos jeunes dans des zones polluées. La problématique est totalement différente, bien qu'on essaie de faire un amalgame. Je suis toutefois d'accord avec un argument: le Conseil d'Etat n'a effectivement pas prévu ces infrastructures lors de l'extension de Bernex. Toujours est-il qu'elles sont aujourd'hui nécessaires, et je rappelle aussi qu'il existe des bâtiments sur ce terrain.
Je tiens à souligner que nous avons reçu une smala de propriétaires, venus en forte délégation avec des avocats de haut niveau - de haute voltige, si j'ose dire. Ces derniers nous ont expliqué à quel point leurs mandants allaient succomber à ce déclassement, et puis ils nous ont fait une proposition; c'est là où je voulais en venir. J'étais assez stupéfait de cette proposition, à savoir de ne pas déclasser et de louer leurs terrains à l'Etat en droit de superficie pour une école. Ce serait la première fois dans ce canton que le terrain sur lequel on construit une école devrait être loué. Il n'est pas question, pour Ensemble à Gauche, de laisser accroire que les écoles devraient subir ad vitam aeternam des loyers ! Il s'agit pour nous d'être en pleine propriété - c'est une évidence. Ensemble à Gauche soutiendra donc ce déclassement, tout en relevant que le Conseil d'Etat aurait dû prévoir toutes ces infrastructures, qu'il met en route au dernier moment faute de les avoir anticipées.
M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais tout d'abord relever l'excellent rapport de majorité qui nous a été présenté; les points qui devaient être mentionnés l'ont été et je vais donc éviter de les répéter. Je reviens juste sur l'un d'entre eux: c'est vrai que la modification de zone dont il est question fait partie du plan de développement Bernex-Est. S'il y a trois ans d'écart entre les premiers déclassements et celui dont on parle aujourd'hui, on nous a expliqué que c'était pour des raisons de consolidation et que ça se faisait de la sorte. Il est évident que le problème vient de là parce que toutes les parcelles limitrophes de cette Goutte de Saint-Mathieu sont déjà déclassées en zone de développement alors que la Goutte est quant à elle en zone ordinaire affectée à de l'équipement public. De cette procédure résulte une inégalité de traitement dans l'ensemble du secteur, et c'est de là que sont venues les difficultés que nous avons rencontrées en commission. Cela nous a effectivement obligés à geler les travaux pendant une année, mais ça fait partie d'un tout ! On peut le déplorer, mais c'est vrai - la commune nous l'a dit.
La commune et son Conseil administratif sont bien sûr à 100% derrière le projet: ils en ont besoin. Je souligne ici qu'AgriGenève n'a pas du tout fait opposition à la Goutte de Saint-Mathieu parce que l'ensemble des négociations relatives à la zone agricole ont eu lieu - je vous rappelle d'ailleurs qu'il y a là-bas une ferme urbaine. Le point qu'il faut relever, c'est effectivement celui de l'indemnisation des propriétaires. La rapporteure de majorité l'a dit: à partir du moment où cette zone sera déclassée - ce que le PDC vous recommande de faire - nous attendons des services de l'Etat qu'ils mènent de vraies négociations avec les propriétaires, et ils se sont engagés à le faire. La loi est ce qu'elle est, mais des négociations sont possibles et elles doivent être entreprises.
Je ne veux pas vous faire l'historique, mais ces propriétaires ont cru, à un moment ou à un autre, qu'il y aurait une université et quelques bâtiments sur ces terrains. Il n'en est rien: c'est finalement de l'équipement public et les règles sont différentes. On peut comprendre que les propriétaires soient un petit peu fâchés; cela dit, ils ne sont pas du tout opposés au projet en tant que tel - c'est simplement le traitement qui leur est réservé qui pose un problème. Malgré cette restriction et en nous référant bien évidemment aux services de l'Etat, nous vous recommandons d'accepter ce déclassement pour que la globalité du projet Bernex-Est puisse voir le jour. Merci.
M. David Martin (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, contrairement à ce que certains affirment ce soir, ce déclassement ne tombe pas de nulle part: il est prévu dans ce qui s'appelle le grand projet Bernex. Celui-ci est planifié depuis plus d'une décennie et prévoit la construction de 1600 logements. Il fait partie de ces grands projets pour lesquels Genève a fait le choix, de façon démocratique, dans un contexte de grave pénurie, de déclasser des portions importantes de zone agricole pour construire du logement. Le grand projet Bernex, les Communaux d'Ambilly ou encore les Cherpines appartiennent à cette génération de projets qui, il est vrai, ont un impact sur la zone agricole. Ces choix ont toutefois été faits moyennant une pesée d'intérêts.
Le secteur de la Goutte de Saint-Mathieu fait partie du plan directeur de quartier de Bernex. On trouve la carte sur internet: ce secteur est identifié depuis 2014 et il est donc parfaitement faux d'affirmer que le déclassement n'a pas été prévu de longue date. Il est par ailleurs tout à fait logique de prévoir un pôle d'équipements publics à côté d'un arrêt de tram, c'est-à-dire bien situé, à côté d'un futur parc agro-urbain qui donnera l'occasion à tous les étudiants de ce futur cycle d'orientation et du futur pôle de santé de profiter d'un endroit agréable. Le projet est par conséquent d'une grande cohérence, et c'est vraiment dommage que ça ne saute pas aux yeux de la minorité. On l'a aussi dit, il est soutenu tant par le Conseil administratif de la commune de Bernex que par son Conseil municipal, ce qui est tout de même, me semble-t-il, un excellent signal pour aller de l'avant sur une proposition de ce type.
J'aimerais enfin rappeler que nous avons accepté, il y a quelques mois, un crédit d'étude en vue de la construction de ces bâtiments et équipements par 86 voix contre 9. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) A l'époque, l'UDC nous disait: non, on ne va pas voter le crédit d'étude avant de voter le déclassement, etc. On voit qu'il y a toujours matière à redire, et je me réjouis qu'on vote - je l'espère - cette modification de zone ce soir. Les Verts en tout cas la voteront ! Je vous remercie.
M. Christian Flury (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, les communes de Confignon, Bernex et Plan-les-Ouates sont actuellement en plein développement. La Goutte de Saint-Mathieu est un endroit extraordinairement bien situé, au carrefour de l'autoroute et de la route de Chancy sur laquelle passe le tram. C'est un endroit rêvé pour construire un pôle de formation: un centre de formation des professions de la santé, un cycle d'orientation et des locaux de musique pour la commune de Bernex. Comme expliqué, le Grand Conseil a voté le crédit d'étude pour ces réalisations et il faut désormais donner à ce projet l'opportunité d'avancer. Il est temps de soutenir ce développement pour que les projets se concrétisent. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va maintenant à M. le député André Pfeffer pour une minute cinquante-sept.
M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. Contrairement à ce que certains écolo-bétonneurs prétendent, il y a eu beaucoup de modifications et de changements dans ce périmètre - on peut même dire qu'il y a une véritable politique du petit tâtonnement. Avec les déclassements déjà effectués, on prévoit de doubler le nombre d'habitants de la commune de Bernex.
Il est maintenant question de déclasser encore ces 50 000 mètres carrés environ pour un cycle, une école professionnelle, divers bâtiments administratifs et un parking P+R. Demain - prochainement - il y aura un nouveau déclassement, cette fois pour le service des automobiles que l'Etat impose à la commune de Bernex. On procède à tous ces déclassements et à tous ces tâtonnements de déclassements alors que, pour l'instant, il y a toujours un stand de tir dans ce périmètre... (Remarque.) ...dans ce secteur, et tant que la problématique de ce stand de tir ne sera pas réglée... (Remarque. Rire.) ...le développement sera bloqué. Merci.
M. Adrien Genecand (PLR). Beaucoup a déjà été dit et on ne reviendra pas sur la question de la mauvaise planification de l'Etat, qui se rend compte après coup que quand on déclasse les Cherpines, des infrastructures publiques deviennent soudain nécessaires. On se retrouve finalement à devoir les développer un peu péniblement, avec toutes les conséquences que ça implique en termes de foncier et de gestion des propriétaires - de combien doit-on les dédommager ? On aurait probablement évité beaucoup de problèmes si on avait conçu le quartier dans sa globalité.
Je profite surtout de l'occasion pour rappeler au département qu'on est notamment en train de construire là un parking de plus de cent places pour les fonctionnaires du DIP. A une époque où l'Etat a mis à peu près tout en place afin d'empêcher la circulation automobile pour les entreprises et les autres usagers au centre-ville, on crée plus de cent places pour que les enseignants puissent se parquer dans un établissement ou dans un autre - ce sont apparemment des voltigeurs, selon le terme consacré. On est pourtant là dans la quintessence de ce que l'Etat a développé en matière d'infrastructures de mobilité douce et publiques, c'est-à-dire le terminus d'un tram. Au-delà du fait que le PLR soutiendra ce projet de loi, je me demande donc s'il n'est pas temps pour l'Etat de faire son propre travail au sein de sa fonction publique et parmi ses collaborateurs et de faire preuve d'exemplarité alors qu'il demande au secteur privé de travailler et de se déplacer différemment. On est en droit d'attendre de l'Etat - et de ses fonctionnaires - qu'il applique exactement ce qu'il impose aux autres ! Je vous remercie. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Stéphane Florey pour trente-huit secondes.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de minorité. Monsieur le président, je voudrais juste compléter les propos de M. Blondin et surtout dire ce qu'il n'a pas dit: les principales oppositions portent sur le prix ! La réalité, c'est aussi qu'on a fait miroiter aux propriétaires 400 francs le mètre carré; or ils se retrouvent aujourd'hui avec un prix quatre fois moins élevé ! D'où leur opposition ! Ça non plus, ça ne va pas.
S'agissant de la position des Verts, qui se permettent ici de revenir sur les Cherpines, il faut quand même rappeler aux personnes qui ont parlé ce soir que les Verts étaient opposés à ce projet: ils faisaient partie du comité référendaire. Alors c'est bien ce que je disais: ils ne défendent plus la zone agricole. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur le député Thierry Cerutti, vous avez la parole pour deux minutes et dix-sept secondes.
M. Thierry Cerutti (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG n'était pas entré en matière sur ce projet de loi. Il l'avait même refusé, rejoignant ainsi le camp de la minorité. Bien que beaucoup de choses aient été dites, notamment sur les incohérences des Verts, je voudrais rappeler ce qu'ils prônent pour certaines parties de notre territoire. Lorsqu'on a voulu construire au Grand-Saconnex un stade de football, une école technique et des emplacements pour la Genève excellente, on a vu les Verts s'offusquer et refuser parce qu'ils sont contre le sport; ils n'aiment pas le sport - ils n'aiment pas les activités physiques et détestent le football. D'un autre côté, ils ne sont pas d'accord avec les Cherpines: ils sont contre la construction, contre le bétonnage. Puis, soudain, miracle ! Un Vert devient patron de l'aménagement du territoire et on assiste subitement à un revirement de situation, à un retournement de veste: tout est bon et acceptable dans la construction lorsqu'un Vert prend les décisions et opte pour cette voie-là.
Le MCG a refusé ce texte pour une raison simple, Mesdames et Messieurs les députés. C'est bien joli d'entendre nos amis du PDC, qui veulent retirer le «c» de «chrétien» de leur appellation politique, dire qu'ils comptent sur le Conseil d'Etat pour négocier honnêtement et chrétiennement avec les propriétaires ! Vous savez toutes et tous ici présents qu'une fois le projet de loi voté, le gouvernement va s'asseoir sur les revendications des propriétaires; il n'en a cure. A moins qu'il ne nous affirme - et le verbalise de manière très claire - qu'il sera extrêmement honnête, extrêmement correct, extrêmement juste avec les propriétaires, de façon qu'ils ne soient pas prétérités et n'aient pas à subir les conséquences du déclassement que nous allons voter ce soir. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole échoit à M. le député Jacques Blondin pour quarante-quatre secondes.
M. Jacques Blondin (PDC). Merci, Monsieur le président. Je voudrais faire un petit ajout à l'intention de ceux qui viennent de m'apostropher, bien que je croie avoir été clair. J'ai mentionné la zone de développement et la zone affectée à de l'équipement public; il y a bien évidemment un écart et il est de l'ordre de 350 francs. Il s'agit donc de beaucoup d'argent, et si on s'en réfère aux services de l'Etat - on l'a évoqué - c'est bien sûr pour résoudre cette question. S'il y a des limites, il y a aussi des possibilités et nous comptons sur l'Etat pour qu'une solution soit trouvée dans l'intérêt des propriétaires de la Goutte de Saint-Mathieu. Merci. (Commentaires. Protestations.)
M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Quelques mots pour vous dire que ce projet - comme d'autres à Bernex, comme celui des Cherpines - s'inscrit effectivement dans des espaces classés en zone agricole. Je n'ai pour ma part jamais caché que je m'étais opposé à ces déclassements: j'estime que la zone agricole doit être protégée. Je considère aussi que la ville doit être construite en ville et qu'il est faux de recréer des cités en périphérie, parce qu'on se retrouve alors, surtout si on le fait mal, avec la mobilité induite et tous les effets néfastes que l'on connaît. Ma foi, le peuple - le parlement et le peuple - a tranché sur ces projets et, comme je suis au département, il m'appartient de les mettre en oeuvre, car je respecte la volonté populaire même si je ne suis pas toujours d'accord avec elle.
Mais dans la mesure où l'on construit un quartier, on doit bien le faire ! Et dans la mesure où on y loge des habitants, il nous incombe de prévoir les infrastructures publiques, les équipements scolaires, les équipements de vie de proximité pour éviter également de trop grands déplacements de ces populations dans d'autres secteurs. Ce projet est donc juste: il est pertinent au regard du développement d'un nouveau quartier et est par ailleurs demandé par la commune.
La question de l'indemnisation des propriétaires, je le sais, a donné lieu à beaucoup de débats en commission. J'aimerais dire une chose de manière très claire, et M. Cerutti sera peut-être intéressé de l'entendre puisqu'il m'a interpellé à ce propos: l'article 26 de la Constitution fédérale garantit la propriété privée. Il dit notamment à son alinéa 2 que si l'Etat, pour de justes motifs d'intérêt public, peut procéder à une expropriation, le propriétaire reçoit alors «une pleine indemnité». Je n'entends pas violer la Constitution fédérale: c'est illégal et, quand bien même on s'y emploierait, les propriétaires feraient recours et obtiendraient gain de cause.
Au-delà de ça, il est hors de question que des gens... Vous voyez, l'aménagement du territoire est un peu une loterie: on peut se retrouver avec une parcelle fortement densifiée et les gains sont là plus importants, tandis que si par hasard on détient une parcelle destinée à de l'équipement public, les gains peuvent alors être moindres. Ces phénomènes sont complexes, on doit procéder à des péréquations entre les quartiers, mais la protection de la propriété, de sa valeur de base, est une garantie constitutionnelle. Je ne dis pas que ces personnes vont faire les plus-values que peut-être elles attendent, mais la valeur de base leur est en tout cas assurée. J'entends la voir respectée; l'aménagement doit se faire, mais pas sur le dos des propriétaires, et des petits propriétaires notamment.
Je conclurai en répondant à M. Genecand que je me réjouis de l'évolution fracassante du PLR en faveur de la mobilité douce ! Quant aux fonctionnaires, ma foi, les fonctionnaires doivent être des citoyens comme les autres ! J'imagine donc que c'est un premier pas pour un «aggiornamento politico» du PLR en matière de transports ! Je transmettrai votre opinion sur la question de la mobilité des fonctionnaires à ma collègue Nathalie Fontanet, chargée du personnel de l'Etat: de ce fait, elle met en place toutes ces politiques, en négociation évidemment avec le Cartel qui, vous le savez, est très engagé sur les questions environnementales. Vu la configuration, je pense qu'on pourra très vite aller vers une diminution de l'usage de la voiture dans la fonction publique. Merci encore de votre incitation.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons procéder au vote sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 12486 est adopté en premier débat par 76 oui contre 9 non et 2 abstentions.
Le projet de loi 12486 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12486 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 77 oui contre 9 non et 3 abstentions.
Premier débat
Le président. Notre urgence suivante est le PL 12566-A, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. le député Cyril Aellen.
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, jusqu'au début des années 2010, la zone villas ne pouvait être densifiée qu'à concurrence d'un taux de 0,2 ou 0,25 selon les conditions énergétiques des constructions. Le 15 novembre 2011, les partis libéral et radical genevois ont déposé un projet de loi en vue de permettre une densité plus importante, notamment au sein des parcelles de plus grande étendue. L'objectif était de densifier, mais pas partout et pas n'importe comment.
Pour éviter le «pas n'importe comment», il avait été imaginé un préavis de la commission d'architecture, et pour éviter le «pas partout», un préavis de la commune concernée. Dans les faits, le préavis de la commission d'architecture a été largement suivi alors que celui des communes ne l'a pas été - il faut admettre que les municipalités n'ont pas toujours justifié de façon très approfondie les préavis négatifs qu'elles étaient amenées à rendre. Il en a malgré tout résulté un développement anarchique de la zone villas.
Aussi, l'UDC d'abord et le PLR ensuite, quasiment dans le même temps, ont déposé chacun un projet de loi dont l'objectif était de rendre contraignant le préavis communal. Ces deux textes ont été accueillis très favorablement par l'Association des communes genevoises. Le département a également considéré que le développement de la zone villas était problématique et a donc prononcé un moratoire des constructions de grande densité en zone villas. Parallèlement, la commission a commencé son travail et une collaboration s'est progressivement développée entre le représentant du gouvernement, M. le président Antonio Hodgers, et une majorité du Grand Conseil. Il y a aussi eu des discussions avec l'Association des communes genevoises, que le Conseil d'Etat a sollicitée à juste titre, et je l'en remercie.
Le «pas n'importe comment» est laissé à la commission d'architecture, mais le département s'est engagé à produire et à édicter des directives dans un avenir proche; il conviendra de suivre cet engagement. Le «pas n'importe où» a été modifié par rapport à l'idée initiale: ce n'est plus au moment de l'autorisation de construire que la commune devra se prononcer, mais lors de l'élaboration de son plan directeur. Elle pourra ainsi indiquer dans quel périmètre de son territoire elle voit d'un bon oeil une densification de la zone villas. Il s'agira pour...
Le président. Vous parlez désormais sur le temps de votre groupe.
M. Cyril Aellen. ...la commune de jouer le jeu et d'établir des périmètres où une densification sera possible et des périmètres où elle ne le sera pas. L'Etat devra quant à lui faire en sorte de bien collaborer avec les communes.
Au surplus, il y a d'autres spécificités dans ce texte, qui fait l'objet d'un large consensus au sein de ce Grand Conseil. La notion de pleine terre y figure, tout comme l'extension de la perception et de la redistribution de la taxe d'équipement.
Vous l'aurez compris: cet objet a suscité de grandes discussions, mais elles se sont achevées par un accord large de l'exécutif, des communes et de l'essentiel des partis - enfin, d'une grande majorité des partis du parlement. Je vous invite donc à voter ce projet de loi tel que sorti de la commission d'aménagement. Je vous remercie.
M. Rémy Pagani (EAG), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, c'est une défaite en rase campagne que nous avons subie lors de la tentative de déclassement de la zone villas qui se trouve le long de l'avenue Louis-Casaï en zone de développement. Deux ou trois semaines avant, le gouvernement - M. Hodgers - a décidé de geler la densification de la zone villas parce que, sur la base de toute une série de photographies, des projets se sont révélés complètement catastrophiques.
Et on vient maintenant nous dire qu'il faut reprendre la densification de la zone villas, mais à certaines conditions, notamment avoir un plan directeur communal. Celui-ci devra être élaboré dans les deux ans par les municipalités, avec le concours, bien évidemment, du Conseil d'Etat - Conseil d'Etat qui autorisera la densification sans toutefois en fixer les limites. Nous n'avons d'ailleurs jamais compris, sur le fond, comment on peut dire qu'on densifie la zone villas alors qu'on passe de 0,4 à 0,8. Je vous rappelle que si l'indice d'utilisation du sol est de 0,4, ça correspond à 400 mètres carrés qui peuvent être construits sur 1000 mètres carrés; ce n'est pas l'ensemble de la surface, mais la part à bâtir - puisque c'est de la zone à bâtir, enfin, de la SBP. S'il est de 0,8, ce sont donc 800 mètres carrés sur 1000.
Ça paraît dérisoire dans un canton aussi exigu, confronté aujourd'hui à la nécessité de garantir une zone agricole avec des terres agricoles de bonne qualité. Ça veut dire qu'on doit se donner tous les moyens - tous les moyens, je pèse mes mots - pour faire en sorte de ne pas construire la ville sur la ville, pratique qu'on a déjà eue par le passé. Alors là, on n'hésite pas: on densifie des quartiers à 3,5 ! On y va même largement: sur la parcelle des Vernets, on est par exemple à 3,8 et il n'y a pas de problème. Mais quand il s'agit de densifier un peu la zone villas tout en gardant de la pleine terre, on s'en garde bien et on fixe des conditions qui rendent cela quasiment irréalisable aujourd'hui. Je le dis très clairement et j'en prends acte: elles rendent irréalisable la densification de la zone villas.
Dans la situation actuelle, on est donc de toute manière pat en ce qui concerne la zone villas. J'attends par conséquent de voir - j'ai proposé un amendement; j'attends de voir les résultats. L'histoire et le temps me donneront peut-être raison ! Je vous remercie de votre attention.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Il faut quand même avouer que le projet de loi initial et celui qu'a mentionné tout à l'heure le rapporteur de majorité n'ont vraiment plus rien à voir avec ce qui a finalement été voté en commission. Les textes initiaux voulaient donner un véritable pouvoir aux communes, notamment en demandant qu'elles préavisent la densification de la zone villas. Leurs décisions auraient ainsi pu mener à un possible référendum pour qu'il y ait une véritable décision populaire.
Le projet sorti de commission est tout autre: il a abordé la problématique différemment, par exemple en donnant plus de poids aux plans directeurs communaux. Nous aurions finalement pu vivre avec ça - nous nous serions abstenus sur le texte final - même si nous aurions regretté que les communes n'aient pas plus de pouvoir délibératif concernant les densifications. Si la minorité n'est plus d'accord, c'est que deux choses sont venues s'insérer dans le débat alors qu'elles n'ont à notre avis rien à y faire. Elles ont été acceptées juste dans l'espoir de faire passer le projet de loi et de lever le moratoire qui touche la zone villas.
Il faut quand même rappeler ici, contrairement à ce que dit le rapporteur de première minorité, que le moratoire n'a pas été décrété avant la claque cinglante qu'il a prise lors du vote sur les déclassements de Cointrin-Est et Cointrin-Ouest, mais bel et bien après ! Voyant l'ampleur de la claque et du désastre au niveau de ses désirs, le Conseil d'Etat, par pur esprit de vengeance, a décidé d'un moratoire pour bloquer toute construction en zone villas ! C'est face à cet esprit-là que le texte dont il est question et celui de mon collègue André Pfeffer - ils ont été discutés en parallèle - voulaient apporter une solution pour justement lever ce fameux moratoire et permettre une densification de la zone villas.
Le président. Vous parlez maintenant sur le temps de votre groupe.
M. Stéphane Florey. L'une des deux choses qui déplaisent à la minorité, c'est l'introduction d'une taxe d'équipement obligatoire: alors qu'elle ne peut actuellement être prélevée que dans certaines conditions, elle deviendrait là systématique. L'autre chose, c'est le fait qu'on introduit une notion de pleine terre: elle va poser problème parce qu'on va permettre aux propriétaires de la zone villas de densifier leur parcelle, mais à des conditions nettement moins intéressantes. Ils devront en effet prévoir des surfaces de pleine terre, ce qui veut dire qu'on coupe là une partie de leurs prérogatives. Le propriétaire perd ainsi partiellement la maîtrise de son terrain pour justement réserver une surface en pleine terre alors qu'on a été incapable d'évaluer l'ampleur de cette mesure en commission - on ne la connaît pas: personne ne nous a vraiment exposé les conséquences directes de cet amendement. C'est pourquoi mon rapport de minorité propose de biffer les deux alinéas relatifs à ces sujets et d'en rester à la teneur de la loi actuelle, ce qui permettrait à la minorité de s'abstenir sur ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Francine de Planta (PLR). Il est à rappeler que la politique d'aménagement du territoire est, à Genève, une prérogative cantonale. Dans le processus des autorisations de construire, les communes sont appelées à émettre des préavis consultatifs, par conséquent sans aucun caractère liant, ce qui les rend bien souvent inutiles. Nous devons saisir aujourd'hui l'opportunité de corriger deux choses en acceptant ce projet de loi. La première, c'est l'application par le département de l'article 59, alinéa 4, de la LCI dont le caractère dérogatoire est - hélas - devenu normatif. Le deuxième changement à apporter consiste à conférer aux communes des prérogatives en matière d'aménagement de leurs zones 5, soit les zones villas, en définissant dans leurs plans directeurs des secteurs à densification différenciés.
Il est important de rappeler que l'élaboration d'un plan directeur communal est un travail de longue haleine - il s'effectue sur plusieurs années, avec des bureaux d'urbanisme - et que cet outil de planification est établi par celles et ceux qui connaissent le mieux leur territoire puisqu'ils y vivent. Alors il est temps de responsabiliser les communes, Mesdames les députées, Messieurs les députés, et de travailler en confiance avec elles. Je vous invite à accepter ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. Sébastien Desfayes (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le PDC soutiendra avec enthousiasme ce projet de loi issu à nouveau d'un consensus obtenu en commission, dans la joie et la bonne humeur, par les partis gouvernementaux - joie et bonne humeur qui font suite à une certaine morosité occasionnée par le moratoire brutal imposé par l'exécutif. Ce moratoire a surpris non seulement les communes mais aussi les députés du Grand Conseil.
S'il est vrai que la densification en zone villas, depuis 2013, n'a pas été parfaite, elle a quand même eu des résultats positifs. Elle a permis la création de logements, l'accession à la propriété pour la classe moyenne et la venue de nouveaux contribuables. Elle a par ailleurs permis à des successions de diviser des parcelles et de construire sur ces parcelles de nouveaux logements; elle a permis la préservation de zones agricoles. Le changement législatif a aussi permis la densification sans passer par les vicissitudes de l'article 4A LGZD. Sans parler d'anarchie, il est vrai qu'il y a eu certains écueils: le mitage du territoire par exemple, une certaine atteinte à l'harmonie des paysages et à la biodiversité, mais aussi la bunkérisation de certains quartiers en raison de projets architecturaux invraisemblables.
Il convient donc aujourd'hui de remédier à cette situation, et cela tombe bien: ce texte répond à toutes ces difficultés. Je crois que le point le plus fondamental de ce projet de loi, c'est cette nouvelle compétence donnée aux communes de choisir les périmètres qui feront l'objet d'une densification accrue dans leurs zones villas - c'est un élément fondamental. Dès lors que les municipalités peuvent choisir les périmètres de densification, il est clair à nos yeux que leur préavis peut uniquement porter sur la conformité du projet à leur plan directeur. Cette précision permet de résoudre la question de la divergence, cas échéant, entre les préavis de la commission d'architecture et ceux de la commune concernée.
Ce qu'il faut aussi reconnaître en matière de préservation de la biodiversité, c'est la garantie de surfaces en pleine terre. Nous comprenons par ailleurs qu'il n'y a pas, pour répondre à l'interrogation de l'UDC, de surfaces en pleine terre minimales ou maximales imposées.
Le président. Merci.
M. Sébastien Desfayes. Et puis un autre point important, c'est que le canton garde une certaine marge de manoeuvre...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Sébastien Desfayes. ...dans l'approbation des plans. Alors...
Le président. Merci, c'est vraiment terminé.
M. Sébastien Desfayes. Merci, Monsieur le président.
Mme Badia Luthi (S), députée suppléante. Mesdames et Messieurs les députés, la pénurie de logements a toujours été une grande source de préoccupation pour le parti socialiste, et la problématique qui en découle continue à nous préoccuper à ce jour. En matière d'aménagement du territoire, le canton fait des efforts pour trouver des solutions présentant des avantages socio-économiques et facilitant l'accès au logement. (Brouhaha.) La densification de la zone 5 est une solution intelligente: d'une part, elle répond à une réelle demande des Genevoises et des Genevois en matière de logement, et elle permet d'autre part de préserver un maximum d'espaces naturels et agricoles. (Brouhaha.)
Une voix. Chut !
Mme Badia Luthi. Toutefois, cette densification doit être bien organisée pour éviter toutes les conséquences fâcheuses qu'une urbanisation mal pensée et mal adaptée aux besoins de la population... (Brouhaha.)
Le président. Excusez-moi, Madame la députée. (Le président agite la cloche.) Un peu de silence, Mesdames et Messieurs les députés ! Vous pouvez continuer, Madame Luthi.
Mme Badia Luthi. Merci, Monsieur le président. Elle doit donc être menée en intégrant une réflexion qui prend en considération la qualité de vie des habitants, et c'est justement parce qu'il va dans ce sens que le parti socialiste trouve que cet objet a tout son intérêt. Cela concrétise la volonté du canton de travailler avec les communes en leur donnant la possibilité d'exprimer leurs souhaits quant aux périmètres qu'elles désirent densifier. (Brouhaha.) Le projet de loi ouvre en effet une plateforme de discussion via le plan directeur communal. (Brouhaha.) Cet outil de planification permet d'identifier les zones à densifier avec ou sans dérogation pour accueillir plus de constructions et permet au canton d'avoir une idée de l'aménagement désiré par la commune. (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs les députés... (Un instant s'écoule.) Est-ce qu'on peut continuer dans le calme ?
Le président. Madame la députée, j'étais justement en train de m'en occuper. Vous pouvez continuer.
Mme Badia Luthi. Merci, Monsieur le président. Nous soutenons ce projet de loi car il propose de travailler dans un esprit de collaboration et de complémentarité entre canton et communes. Ce qu'il ne faut pas perdre de vue, ce sont les enjeux très importants qui en découlent: dresser le plan directeur communal permet d'ouvrir la porte à une négociation entre canton et commune pour trouver un terrain d'entente qui respecte les attentes de l'un et de l'autre. Il permet au canton d'assurer une coordination optimale, avec une vision globale et une logique d'ensemble, pour réussir une harmonisation qui assure une bonne qualité de vie aux Genevoises et aux Genevois. Ce projet de loi tient donc compte des désirs et de la volonté des communes et le parti socialiste ne peut qu'encourager cette démarche en le soutenant. Merci. (Applaudissements.)
M. David Martin (Ve). Mesdames et Messieurs, si ce soir nous parlons de ce sujet, c'est suite à la modification de la loi sur les constructions, cela a été mentionné, issue d'un texte déposé en 2011 par le PLR - à l'époque les partis libéral et radical - qui s'appelait: «Préserver la zone de villas». Il a permis des densifications exceptionnelles allant alors de 20% jusqu'à 40% à 60% de la parcelle. Ce projet a apporté certains bénéfices, on l'a dit, notamment la production d'environ 5000 logements, ce qui est quand même très conséquent, et a contribué à lutter contre la crise du logement dans notre canton. Ceux-ci ont aussi été bâtis dans la zone villas pour qu'elle apporte également sa contribution en matière de construction de logements.
Cette modification légale a eu pour résultat des projets de différentes qualités, certains bons - et c'est bien de le rappeler ici: il y a de bons projets de densification en zone villas, car quand on veut faire de la qualité, on peut - mais elle a aussi donné lieu à une longue série de catastrophes, à la fois sur le plan architectural et environnemental. Les Verts se sont donc impliqués dans les négociations qui ont permis d'aboutir à ce projet de loi, fruit d'un accord, dont nous souhaitons relever les qualités suivantes.
Premièrement, une approche plus cohérente qui est ancrée dans le plan directeur communal et permet deux choses. Elle permet d'abord un processus démocratique puisque les plans directeurs communaux sont approuvés, et même plus que ça: ils sont souvent élaborés avec le Conseil municipal. La deuxième chose que ces plans permettent, c'est de déterminer les secteurs dans lesquels des densifications semblent appropriées, typiquement lorsque les transports publics permettent une desserte suffisante.
L'autre qualité du texte, à laquelle nous avons contribué à travers un amendement, est l'introduction dans la loi sur les constructions d'une définition de la notion de pleine terre. Celle-ci y est définie de la façon suivante... (Remarque. Le président agite la cloche.) «Une surface de pleine terre, à savoir dénuée de toute construction en surface ou en sous-sol et non revêtue» doit être maintenue. En effet, la pleine terre était une notion de langage courant mais n'était pas définie dans la loi. C'est maintenant chose faite et cette base légale permettra au département de formuler des exigences au cas par cas lors de l'évaluation des autorisations de construire - pas seulement en cas de dérogation et de densification...
Le président. Il vous faut terminer !
M. David Martin. ...mais pour toutes les constructions en zone villas. (Un instant s'écoule.)
Le président. Je vous remercie. La parole est maintenant au rapporteur de première minorité, M. le député Rémy Pagani, sur le temps de son groupe, pour trois minutes.
M. Rémy Pagani (EAG), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais revenir au fond du problème: 50% des zones à bâtir se trouvent en zone villas, où habite seulement 10% de la population. Croyez-vous qu'on va pouvoir continuer comme ça ? C'est impossible ! Nous allons droit dans le mur ! Nous devons préserver la zone agricole et elle ne sera donc plus déclassée, ou très peu: il nous en reste 20 hectares, nous dit-on, et encore, il faut avoir des calculs précis. Et on vient maintenant nous dire qu'il faut donner l'occasion aux municipalités, alors qu'il existe un droit de référendum, d'élaborer des plans directeurs communaux sur lesquels on va se mettre d'accord avec les conseillers municipaux ! Regardez la réalité: certaines communes ne voudront pas densifier ! Elles batailleront, y compris par référendum communal. Je répète donc une nouvelle fois que ce compromis n'en est pas un: c'est simplement figer le processus et le mettre quasiment dans l'impossibilité de se réaliser.
Cela étant, venons-en aux 40% de pleine terre que je propose dans mon amendement. Les PLQ de la Ville de Genève - je ne sais pas si vous les connaissez - prévoient 40% de pleine terre; je ne comprends pas comment c'est possible de soutenir qu'on veut de la pleine terre mais sans indiquer de pourcentage ! Un député de la commission a fait un calcul en prenant 2000 mètres carrés de terrain constructible en zone villas, dont 1040 mètres carrés non bâtis, et nous a dit - c'est quand même assez humoristique - qu'avec un parking, une terrasse, une piscine et un cabanon, on tomberait à 30% de pleine terre. Est-ce qu'on va, face à l'urgence climatique, donner l'occasion à tout un chacun d'avoir une piscine, un cabanon, un parking avec deux ou trois places ? Ce n'est plus possible !
Nous demandons donc, d'une part, la densification de la zone villas ou le déclassement de zones villas en zones de développement, parce que nous ne pourrons pas continuer comme ça. D'autre part, nous demandons de soutenir les 40% de surface en pleine terre. Je vous rappelle que nos amis français taxent par l'impôt celles et ceux qui ne font pas l'effort de prévoir quasiment 70% de pleine terre dans les zones villas et constructibles.
M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, ce débat date: le rapporteur de majorité a fait un historique auquel je ne peux que souscrire. L'article 59, alinéa 4, de la LCI a permis cette densification dite douce. J'aimerais par là tout de suite corriger les propos tenus par M. Pagani: on ne parle pas ici des déclassements de la zone villas. Ils sont quant à eux prévus dans le plan directeur cantonal, qui établit que 11% de l'ensemble de la zone villas doit devenir de la ville. Cela implique effectivement une modification de zone, des votes populaires, des PLQ - il y a toute une série de dispositifs qui s'appliquent et permettent des densifications de type citadin. Ici, on parle toutefois de la zone villas appelée à rester de la zone villas !
C'est important de le dire, parce que je pense que selon certains, le canton, qui doit construire du logement, doit commencer à s'étaler partout pour permettre des densités moins fortes au centre-ville, typiquement aux Vernets dont l'IUS est de 2,9 et non de 3,5 - soit la densité de la Jonction ou de Plainpalais. Eh non, c'est faux ! C'est faux ! La loi sur l'aménagement du territoire dit clairement qu'on doit avoir des centres urbains avec des transports publics, avec vraiment des services de ville, et des zones plus périphériques - la zone villas - qui ont leurs qualités paysagères, leur qualité de vie. Mais cette zone n'est pas accessible pour le plus grand nombre, il faut le dire aussi, puisque le prix du foncier, étant en zone ordinaire, y est relativement élevé.
S'agissant de l'article 59, alinéa 4, nous en avons assez tôt constaté la dérive. En 2017, le département a produit un guide qui fixait les règles du jeu pour une densification de qualité de la zone villas, à l'instar de ce que nous avions pu faire en ville de Genève, d'ailleurs avec M. Pagani, sur les questions de surélévation. Or le constat, c'est que la situation ne s'est pas améliorée. C'est ce qui a provoqué ma décision - on gèle - qui à vrai dire n'émanait pas du Conseil d'Etat: la décision était départementale, politique. Et je dois vous avouer que cette décision a été prise tant en raison de la piètre qualité de ce qui se produisait que de la frustration de certaines communes face à cette densification non maîtrisée, ou encore de l'insatisfaction que j'éprouvais à l'égard des processus au sein de ma propre administration. Je trouve que le département n'arrivait pas à faire conjuguer qualité et densification en zone villas. Cela a provoqué ma décision politique - assumons-le, on en prend quand même parfois - qui nous a donné le temps de la réflexion, du temps pour en débattre.
Et débat il y a eu, comme l'a décrit Cyril Aellen, ce qui nous a permis d'aboutir à un consensus, et je m'en félicite. Je veux par là souligner la qualité des débats qui ont été menés avec le parlement et sa commission, avec notamment le premier signataire, M. Aellen, mais également avec l'Association des communes genevoises par la suite.
Sur quoi porte l'équilibre trouvé ? Il porte sur le fait que le département s'était engagé dans une logique qui consistait à faire de la dérogation la règle; Francine de Planta l'a dit et on ne peut pas le nier. Mais en matière de droit foncier, c'est délicat, et c'est aussi ce qui limite un peu l'autonomie des communes: si vous dites oui à un voisin, il est difficile de dire non à un autre qui se trouve dans la même situation. L'équité de traitement est tout de même la base du fonctionnement et des décisions de l'administration; on s'est retrouvé, bon an mal an, avec un certain nombre de préavis communaux sans toujours pouvoir tenir compte de ces décisions. Celles-ci étaient parfois peu justifiées, il faut le dire, et indiquaient simplement un refus. Toutefois, devant les juges, des préavis qui relèvent un peu du politique ou de l'appréciation ne tiennent pas face au droit du propriétaire à obtenir une valorisation équivalente à celle de ses voisins. C'est par conséquent cette tension-là que nous devons résoudre.
Comment la résout-on ? En introduisant, pour chaque commune concernée, une réflexion sur la zone villas dans le cadre des plans directeurs communaux. Chaque commune doit donc déterminer dans quels périmètres elle est d'accord de densifier et dans lesquels elle ne le veut pas - mais il faut pouvoir justifier les deux cas, et ce n'est pas une appréciation purement politique, à la tête du client, si je puis dire, qui doit prévaloir dans ces choix. Je le précise parce que j'ai récemment conféré avec l'Association des communes genevoises et je dois avouer que les déclarations de certains magistrats communaux m'ont un peu hérissé, lorsqu'ils m'ont annoncé: «On aura des discussions politiques pour déterminer les secteurs.» Non, je pense qu'il faut commencer par s'adresser à un bureau d'urbanisme et essayer d'objectiver pourquoi certains secteurs sont autorisés à la construction et d'autres pas.
Sur cette base, nous allons travailler pour mettre à jour d'ici la fin de l'année une grille des critères de qualité qui permettra de valoriser la question de la pleine terre - elle doit tendre vers les 40%, mais il y a toujours des cas qui requièrent des dérogations. C'est pourquoi il me semblerait faux d'introduire des règles urbanistiques au niveau législatif: elles relèvent de la commission d'architecture, mais aussi des professionnels et des discussions avec les communes. Ce guide qualité exposera donc une démarche que les propriétaires et promoteurs devront suivre et défendre face à la commission d'architecture, qui sera la gardienne du temple de cette notion de qualité.
Voilà, Mesdames et Messieurs, le processus que nous mettons en place collectivement ce soir. Le moratoire sera levé lorsque cette grille des critères de qualité sera aboutie, au plus tard à la fin de l'année. C'est le délai que j'ai donné à mon administration, parce qu'on ne peut pas éternellement maintenir un moratoire. Une des conditions pour sa levée était le vote de la loi - j'espère, et je pense, qu'il y aura une majorité ce soir - une autre, c'est vraiment l'adoption de ce guide. La dernière condition est bien évidemment que les communes aient un plan directeur en force, et donc validé par le Conseil d'Etat. Cette validation est déjà une manière pour le gouvernement de dire qu'il approuve la vision que telle commune a de la zone 5 à tel endroit.
La conjonction politique va donc se faire à travers ces plans: s'il suit son plan directeur, le préavis de la municipalité devrait a priori être aussi celui de l'exécutif puisque celui-ci s'appuiera sur le même document, qu'il aura par ailleurs validé. J'espère de cette manière obtenir un apaisement des communes, encore que le mot final reviendra tout de même à l'Etat de Genève. Vous avez peut-être suivi l'actualité en Valais, où les autorisations de construire et les planifications relèvent de compétences communales. On voit à quel point il est difficile de résister, dans des communes - dans de petites communes - à des requêtes particulières. Il faut pouvoir avoir un regard plus large qui permet en outre une égalité de traitement à l'échelle du territoire, et je crois que nous trouverons ainsi un bon compromis.
Pour ma part, il s'agit de respecter au plus près la volonté communale, mais cette volonté communale se doit aussi d'être cohérente avec les plans d'aménagement du territoire voulus par les lois cantonales. Merci - merci encore à tous les députés acteurs de ce compromis. Je crois que nous avons là fait acte de politique intelligente. Merci encore. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, je vous fais voter sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12566 est adopté en premier débat par 84 oui contre 9 non et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Nous sommes saisis de deux amendements à l'article 59, alinéa 3bis nouveau. Je passe la parole à M. le député Stéphane Florey, qui a une minute vingt-sept à disposition.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. J'en profiterai pour parler globalement des trois amendements proposés dans mon rapport. Comme je le disais précédemment, nous aurions pu vivre avec le projet tel que sorti de commission, mais sans les deux dispositions qui à nos yeux posent problème, à savoir l'introduction d'une taxe d'équipement obligatoire et la notion de pleine terre. Même l'auteur de l'amendement relatif à cette notion, je le redis ici, n'a pas été capable de nous expliquer ses incidences réelles. Cette notion va quoi qu'il arrive amener une contrainte supplémentaire pour les propriétaires et revient finalement à un contrôle étatique. En effet, un propriétaire verra son projet diminuer, puisqu'on lui dira: non, non, vous ne pouvez pas densifier autant, parce que vous devez garder un minimum de surface en pleine terre. C'est donc bien une restriction du droit du propriétaire à densifier sa parcelle comme aurait pu, et aurait dû, le lui permettre à la base ce projet de loi. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes donc saisis à l'article 59, alinéa 3bis nouveau, de deux amendements. Le premier, de M. Florey, consiste à biffer cet alinéa 3bis nouveau.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 79 non contre 16 oui.
Le président. Nous passons à la proposition d'amendement de M. Pagani, que je vous lis:
«Art. 59, al. 3bis (nouvelle teneur)
3bis Une surface en pleine terre doit être préservée, à savoir dénuée de toute construction en surface ou en sous-sol et non revêtue, correspondant au minimum à 40% de la surface de la parcelle ou du groupe de parcelles considérées par la demande d'autorisation de construire de la parcelle.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 76 non contre 10 oui et 9 abstentions.
Le président. L'alinéa 3bis reste donc inchangé. Nous sommes ensuite saisis d'un amendement de M. Florey à l'alinéa 5 nouvelle teneur de ce même article 59, visant à biffer l'alinéa.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 78 non contre 15 oui. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
Mis aux voix, l'art. 59, al. 1 (nouvelle teneur), al. 3bis (nouveau), al. 4 (nouvelle teneur), al. 4bis (nouveau, l'al. 4bis ancien devenant l'al. 4ter) et al. 5 (nouvelle teneur), est adopté, de même que l'art. 156, al. 5 (nouveau).
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté.
Le président. A l'article 2 souligné, alinéa 2, nous sommes saisis d'un amendement de M. Stéphane Florey qui vise à biffer l'article 2, alinéa 1, lettre b nouvelle teneur de la LGZD. Il demande la parole mais n'a plus de temps à disposition ! Par conséquent, cet amendement...
Des voix. Il le retire !
Le président. Ah ! Alors c'est tout à fait différent ! (Rires.) Monsieur le député Stéphane Florey, une fois n'est pas coutume, je vous donne la parole !
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, je vous remercie. Je veux juste dire que cet amendement tombe puisqu'il était lié au premier, qui a été refusé; il n'est dès lors plus nécessaire de le soumettre au vote. J'en profite pour vous signaler que nous refuserons finalement ce projet de loi puisque nos amendements ont été refusés. Je vous remercie.
Le président. Merci. Cet amendement étant refusé...
Des voix. Retiré !
Le président. Cet amendement étant retiré, nous poursuivons.
Mis aux voix, l'art. 2 (souligné) est adopté, de même que l'art. 3 (souligné).
Le président. Le troisième débat est-il demandé ? (Le président se tourne vers le Conseil d'Etat.) Il l'est peut-être... (Rires. Commentaires.) Le troisième débat est demandé et nous passons au vote.
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12566 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 77 oui contre 15 non. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Mesdames et Messieurs, je lève la séance et vous dis à demain, à 14h, dans cette salle.
La séance est levée à 22h50.