République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 25 juin 2020 à 17h05
2e législature - 3e année - 3e session - 11e séance
PL 12334-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. Nous abordons les PL 12334-A et PL 12540-A en catégorie II, quarante minutes. La parole est à la rapporteure de majorité, Mme Jocelyne Haller.
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, approuver un rapport de gestion, est-ce une question ouverte ou une simple formalité ? Là est la question car, sans être taxés d'ennemis de l'Hospice général et de son personnel, les députés - à qui il incombe, en vertu de l'article 94 de la constitution genevoise, d'exercer une haute surveillance sur les établissements publics autonomes - devraient rester maîtres de la possibilité de refuser ou d'accepter ce rapport, à moins de considérer que l'approbation d'un tel document n'est qu'un passage obligé sur lequel il ne convient pas de s'appesantir et auquel il est impératif de consentir, ce à quoi la majorité de la commission n'a pas voulu souscrire.
Notez encore que ce rapport de gestion n'en est pas réellement un: il s'agit de fait d'un rapport annuel dont la vocation n'est pas de mesurer la réussite des objectifs fixés. Ce document devrait présenter un exposé rigoureux de la gestion de l'institution, en mentionnant tous les aspects de l'activité de celle-ci, ses qualités autant que ses lacunes, les difficultés auxquelles elle est confrontée dans l'exercice de ses fonctions et les moyens mis en oeuvre pour améliorer sa situation. Or, un rapport d'activité est un document tous publics qui n'est pas destiné à remplir cet office.
En cas de refus du projet de loi 12334, à qui s'adresse le message ? A l'Hospice général ? Certainement pas ! Car à aucun moment la commission n'a mis en cause l'institution et ses collaborateurs. Si on a évoqué une détérioration des prestations de l'Hospice général et des conditions de travail de son personnel, c'est en faisant le constat que l'Hospice général ne dispose plus - et de longue date - des moyens nécessaires pour assurer pleinement sa vocation; ses principes de référence en matière d'intervention sociale en ont été ébranlés et l'institution a bien dû s'adapter et faire avec les moyens du bord. Le message s'adresse au Conseil d'Etat, indubitablement, en tant qu'instance exécutive, et au département chargé de l'action sociale, incidemment, en tant qu'autorité de tutelle; au Grand Conseil, assurément, en tant qu'instance allouant les ressources, qui devrait veiller à assurer le meilleur fonctionnement des institutions de droit public, toujours en vertu de l'article 94 de la constitution genevoise. De fait, à l'exception de l'Hospice général, tous les auditionnés témoignent que l'Hospice général ne parvient plus à assumer certaines des missions que lui confère la loi; de nombreux observateurs corroborent ce fait. L'Hospice général a été confronté à une augmentation du nombre de dossiers financiers de 115% sur dix ans, sans pour autant que ses ressources augmentent; il a dû affronter à cru une inflation démesurée de sa charge de travail, situation qui s'aggravera et se détériorera plus encore dans un proche avenir avec la crise induite par le coronavirus, nous le savons maintenant.
Ce sont principalement les missions d'information, de prévention et d'accompagnement social qui sont affectées. Les auditionnés rapportent que les professionnels n'ont plus la disponibilité nécessaire pour assurer l'accompagnement indispensable; trop souvent, les usagers restent confrontés à leurs difficultés, à leur détresse ou sont renvoyés vers des services sociaux privés ou communaux, pour du conseil ou de l'accompagnement, alors que ces services finissent eux-mêmes par être surchargés. Il faut donc relever des inégalités de traitement d'un centre d'action sociale à l'autre. L'information est inégalement assurée, l'accompagnement social se limite à des rendez-vous trimestriels, soit un suivi à raison de quatre fois l'an; l'accueil est sommaire et désincarné, avec une prévalence des exigences et procédures administratives, etc. Autant de lacunes qui ne garantissent plus le déploiement de la mission de l'Hospice général ! Le parlement doit prendre la mesure des incidences de ses décisions sur la mise en oeuvre des politiques publiques dans notre canton; il ne peut plus feindre d'ignorer les dommages que sa politique impose en l'occurrence aux personnes en difficulté qui sollicitent l'intervention de l'Hospice général et aux professionnels qui font de leur mieux pour combler autant que faire se peut le déficit de moyens qui leur est imposé.
Enfin, à propos du signal qui serait perçu négativement par les collaborateurs en cas de refus du PL 12334, la majorité n'a pas ressenti la même inquiétude chez l'autre majorité de la commission des affaires sociales du Grand Conseil sur la manière dont a été ressenti le rejet cinglant de la pétition du personnel demandant les 88 postes qui lui manquaient à l'époque pour faire son travail adéquatement ! Elle pense qu'il conviendrait d'être sensible aux réactions des collaborateurs constamment et non de manière opportuniste. En outre, la majorité relève qu'au moment de l'expression des craintes sur la façon dont pourrait être perçu le refus du rapport, elle n'a rien entendu sur la manière dont les usagers - eux qui font les frais des restrictions budgétaires imposées à l'Hospice général - pourraient ressentir la caution apportée à la détérioration des prestations à laquelle ils sont confrontés par une validation sans réserve de ce rapport de gestion.
Mesdames et Messieurs les députés, c'est pour tous ces motifs que la majorité de la commission vous invite à refuser le rapport de gestion de l'Hospice général pour l'année 2017.
Le constat est globalement identique pour le rapport concernant l'exercice 2018, hormis peut-être que la majorité de la commission a entendu cette fois-ci dans la bouche des représentants de l'Hospice général une réelle volonté de transformer cette institution.
Pour ce qui relève des effectifs, l'Hospice général affirme qu'il a recruté en fin d'année 2019 tout le personnel accordé par la subvention supplémentaire dans le budget 2019; ce n'est qu'après quelques mois, vers septembre, que les effectifs nécessaires sont entrés en fonction. Il espère que ces recrutements permettent un allégement de la charge de travail, mais c'était sans compter avec la crise du covid-19 et ses incidences dramatiques pour toutes les personnes en situation de fragilité ou celles qui le seront à brève échéance, sachant qu'aujourd'hui déjà les chiffres de l'aide sociale explosent.
Ainsi, contrairement à ce que d'aucuns voudraient peut-être faire croire, ce refus n'est pas un réquisitoire contre l'Hospice général, mais l'expression du souhait de voir les moyens enfin donnés à ce dernier pour qu'il rattrape le déficit de sens et d'expertise dont il a été amputé ces dernières années. Considérant que cette institution n'a pas toujours disposé en 2018 des moyens dont elle avait besoin pour accomplir la mission qui lui a été confiée, la majorité de la commission vous appelle encore une fois, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser ce rapport de gestion 2018.
Mme Véronique Kämpfen (PLR), rapporteuse de minorité. Monsieur le président, le fait qu'on propose de rejeter les rapports de gestion de l'Hospice général demande qu'on s'intéresse à ce qu'est un tel document. Un rapport de gestion vise à présenter les informations délivrées par l'équipe de direction ainsi que leurs commentaires et points de vue sur les résultats de l'entreprise pour une période donnée - la plupart du temps une année. Il peut aussi apporter un éclairage sur les enjeux à venir.
Les présents rapports de gestion de l'Hospice général répondent à ces exigences: d'un point de vue formel, on ne peut donc que les accepter. Les refuser parce que les informations qu'ils contiennent ne font pas plaisir à certains n'est pas pertinent; les refuser pour exprimer sa grogne sur un manque supposé de moyens ne l'est pas non plus. Refuser ces rapports d'activité équivaut à dire aux équipes de l'Hospice général qu'elles ont mal travaillé, qu'elles n'ont pas su gérer avec intelligence, efficacité et efficience les budgets alloués et qu'elles ont failli à leur mission !
Tout au long des auditions sur ces rapports de gestion, il est apparu que les personnes chargées des prestations de l'Hospice général sont très impliquées dans leur travail; elles font preuve de créativité et de souplesse pour apporter l'aide la plus adéquate possible aux 24 000 bénéficiaires dont elles ont la charge. Les directeurs des centres d'action sociale - les CAS - ont notamment fait ressortir leur capacité à être à l'écoute des demandes. La priorité est que les besoins fondamentaux soient couverts rapidement. Une fois ce socle urgent établi, les travailleurs des CAS agissent en fonction du profil des personnes suivies. Certaines personnes ont besoin d'être vues toutes les deux semaines, d'autres plus souvent, d'autres moins souvent. Des permanences pour prendre en compte rapidement les questions simples mais qui peuvent s'avérer bloquantes pour les bénéficiaires ont été mises en place. La modularité des prestations est au coeur d'un système social de qualité.
Le manque d'heures à accorder à chaque bénéficiaire, mis en lumière par les syndicats d'employés, n'est pas la seule variable à prendre en considération pour juger de la qualité des prestations. Les directeurs des CAS cherchent au contraire à se libérer d'un carcan trop rigide et à insuffler de la souplesse dans leur pratique. C'est grâce à cette flexibilité que les CAS ont pu faire face à l'accroissement du nombre de bénéficiaires de 4% en 2017. Les chiffres positifs des sorties de l'aide sociale - en augmentation de 9% en 2017 toujours, soit 22% des dossiers - confortent l'Hospice général dans ses choix stratégiques.
La mission de la commission des affaires sociales face au rapport de gestion de l'Hospice général était de savoir si l'institution a correctement accompli la charge qui lui a été confiée en 2017 et en 2018. Compte tenu des moyens alloués et de l'augmentation du nombre de demandeurs de prestations, c'est le cas ! Accepter ces rapports ne signifie pas que des efforts ne devront pas continuer à être faits pour améliorer l'accompagnement social et l'insertion professionnelle. Les auditions des personnes concernées ont permis de lever le doute de la commission sur ces points. Tous les auditionnés ont fait état de leur volonté d'améliorer continuellement les prestations et de gagner en efficience et en modernité.
Concernant le rapport 2018 spécifiquement, j'aimerais souligner la mise en place d'un nouveau conseil d'administration et la nomination d'une nouvelle présidente, Mme Anne Héritier Lachat. Le fait de placer à ce poste clé une femme qui a été à la tête du conseil d'administration de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers - la fameuse FINMA - est un signe fort et clair de la part de l'Hospice général de sa volonté de réformer ses structures et processus internes. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Refuser ces rapports laisse entendre que le personnel et la direction n'ont pas accompli la tâche demandée. Ce serait un désaveu profond envers l'Hospice général et ses collaborateurs et cela créerait une défiance qui n'a pas lieu d'être.
Refuser un rapport de gestion pour exiger davantage de moyens n'est pas la bonne manière de procéder: il vaut mieux l'accepter et reconnaître ainsi le travail accompli par l'institution puis se tourner vers d'autres voies législatives et budgétaires pour obtenir des moyens. En l'état, la minorité de la commission des affaires sociales estime que les moyens alloués à l'Hospice général en 2017 et en 2018 ont été bien gérés et la mission de celui-ci correctement accomplie. La minorité vous demande donc d'accepter ces deux projets de lois.
M. Bertrand Buchs (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le PDC refuse ces deux rapports. On a entendu la question de savoir s'il faut discuter ou pas d'un rapport de gestion. Je pense que c'est le seul moment de l'année où on peut avoir un débat de fond: notre discussion sérieuse et nos critiques sur ces deux rapports ont permis à l'Hospice général de venir avec des propositions. Cela a permis d'ouvrir le dialogue et d'avancer très nettement dans le nouveau fonctionnement de l'Hospice général - grâce aussi à la nouvelle présidente du conseil d'administration. Ça a donc été un travail vraiment positif, et non pas négatif ! Même en refusant un rapport de gestion, je ne pense pas que nous fassions un travail négatif et qu'on soit contre cette institution ! Mais on s'est rendu compte qu'il y avait des problèmes de fonctionnement; il fallait le dire et il fallait en discuter avec les gens qui dirigent l'Hospice général. On a constaté l'aridité des questionnaires et on a vu qu'il était très difficile pour les gens qui venaient déposer des demandes de comprendre ce qu'on exigeait d'eux; on a vu la difficulté d'accès aux prestations. Tout ça nous a été remonté par les associations comme Caritas et le Centre social protestant qui devaient pallier les manques dans le fonctionnement de l'Hospice général.
On nous a rapporté le besoin de moyens - que nous avons été d'accord d'octroyer puisque nous avons voté 5 millions de francs pour augmenter la dotation de l'Hospice général. A partir de là, nous avons été contents des réponses que nous donnait cette institution, surtout dans les dernières réunions. Il est vrai qu'avec la covid, maintenant, nous nous faisons beaucoup de souci sur son fonctionnement, mais nous remarquons qu'il a moins de souplesse que l'Hôpital cantonal. C'est toujours difficile d'absorber une augmentation des demandes et nous voulons que la procédure de dépôt soit revue, afin que l'aide de l'Hospice général puisse être obtenue d'une façon beaucoup plus souple qu'actuellement.
Nous divergeons avec la gauche sur un point: ce n'est pas en augmentant les moyens qu'on améliore le fonctionnement d'un office, quel qu'il soit. Il faut d'abord discuter sur ce qui ne fonctionne pas avant de décider si on veut augmenter les moyens en personnel ou pas. La discussion que nous avons eue avec l'Hospice général sur ces deux rapports a permis d'améliorer nettement la situation, ce qui fait que nous voterons le rapport de gestion 2019, mais refuserons ceux pour 2017 et 2018.
Un point qui n'a pas été abordé portait sur les gros problèmes que nous avions avec les mineurs non accompagnés et le travail de l'Hospice général pour cette catégorie de personnes. Le parlement a voté des textes pour essayer d'améliorer leur prise en charge parce que c'était un gros point noir dans le fonctionnement de cette institution.
Le parti démocrate-chrétien refusera donc ces deux rapports.
Mme Ana Roch (MCG). Monsieur le président, tout n'est pas parfait, l'Hospice général s'en est rendu compte et il a mis en oeuvre ce qu'il pouvait avec les moyens qu'il avait pour améliorer certaines choses. Refuser ces rapports, ça veut dire mettre en cause ces professionnels qui font ce qu'ils peuvent avec les moyens du bord, ce que le rapporteur de majorité a relevé. Pour le MCG, il est important que le nouveau conseil d'administration soit soutenu dans ses démarches. Pour ces raisons, notre groupe acceptera ces rapports.
Le président. Merci, Madame la députée. Je repasse la parole à la rapporteure de majorité, Mme Jocelyne Haller, qui s'exprime sur le temps de son groupe pour une minute trente.
Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Je veux seulement dire qu'il ne s'agit pas de faire plaisir ou d'exprimer une grogne; il s'agit simplement de savoir ce qu'on fait et ce qu'on admet quand on accepte un rapport de gestion. Mme Kämpfen a dit tout à l'heure que le personnel a fait face à l'augmentation du nombre de dossiers: oui, mais à quel prix ? Au prix de ce dont ont témoigné toutes les personnes auditionnées à l'exception de l'Hospice général lui-même qui n'était pas en mesure de le faire: en sacrifiant l'accompagnement social, en renvoyant les gens à d'autres services ! Voilà comment les collaborateurs de l'Hospice général, indépendamment de la dégradation de leurs conditions de travail, ont pu assurer le strict minimum malgré l'augmentation du nombre de dossiers !
Enfin, pour corriger les propos de Mme Roch, la rapporteuse de majorité n'a pas dit que le refus de ce rapport mettrait en question le personnel. Au contraire, j'ai dit que refuser ces rapports n'impliquait et n'incriminait pas le personnel, mais mettait simplement en évidence l'absence de moyens. La validation des rapports par ce Grand Conseil fournirait une caution un peu rapide au refus de donner à une institution les moyens suffisants pour qu'elle fasse son travail. Ensuite, quand ça l'arrange, le parlement passe comme chat sur braise sur ce que cette institution ne peut pas faire et, à d'autres moments, quand ça l'arrange, il la condamne pour ce qu'elle n'a pas fait ! C'est donc ça qui est remis en question et c'est pour ça que je vous appelle à refuser ces deux rapports, en précisant quand même que, pour le rapport 2018, les responsables de l'Hospice général ont fait état d'une prise de conscience de la situation difficile dans laquelle ils se trouvaient...
Le président. Merci, il vous faut terminer !
Mme Jocelyne Haller. ...notamment que le personnel ne pouvait pas faire son travail comme il le devait ! (Applaudissements.)
Mme Léna Strasser (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, nous souscrivons pleinement aux propos de la rapporteure de majorité au sujet de ces deux rapports de gestion. Les auditions nous ont montré que durant l'année 2017, le suivi et l'accompagnement social des usagers ont été difficiles, notamment à l'aide sociale, mais aussi à l'aide aux migrants. La surcharge de travail a grandement nui à cet accompagnement.
Je ne répéterai pas plus les propos de ma préopinante rapporteure de majorité, mais il est pour nous extrêmement important de regarder vers l'avenir: après la période extrêmement difficile que nous venons de vivre, l'Hospice général devra soutenir de nombreuses personnes en plus. Il est urgent que nous prenions conscience de cela et soutenions l'Hospice général dans ses nouvelles orientations pour répondre mieux aux demandes, en lui donnant surtout les moyens de répondre aux besoins des personnes les plus précaires dont le nombre grandit dans notre canton. (Applaudissements.)
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, accepter ce rapport de gestion tel que présenté dans le projet de loi reviendrait à approuver les conditions imposées à l'Hospice général et leurs conséquences sur les prestations aux usagers et à dissimuler ainsi la réalité du terrain. Le Grand Conseil et le Conseil d'Etat doivent donner à l'Hospice les moyens d'assumer la mission qui lui a été confiée. Accepter ce rapport de gestion revient à cautionner la situation actuelle, ce qui n'est pas possible.
Le refus de ce rapport vise aussi à contester son apparence positive, notamment à l'égard des conditions de travail du personnel. Il faudrait au moins avoir le courage de voir la vérité en face et prendre en considération les départs et les burn-outs dans l'institution ! La teinte des indicateurs n'est pas en adéquation avec les moyens financiers mis à disposition. L'exercice 2018 a été fortement marqué par la situation délétère des requérants mineurs non accompagnés - les RMNA - constatée au centre de l'Etoile.
Globalement, toutefois, un effort visible vers une nouvelle orientation a été relevé. Le groupe des Verts a perçu la volonté de réforme et d'amélioration de l'Hospice général. Il est aussi conscient que l'Hospice général doit faire face à d'énormes défis qui vont encore aller en s'accentuant avec la situation de confinement que nous avons connue récemment et la crise économique qui s'ensuivra très probablement. Les Verts resteront donc très vigilants lors de l'examen du rapport de gestion 2019 afin, espérons-le, de constater les diverses améliorations promises. En attendant, nous refuserons les rapports de gestion 2017 et 2018. (Applaudissements.)
M. Patrick Hulliger (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en 2020 et nous traitons des rapports des années 2017 et 2018. Tout n'est pas parfait, mais consacrons plutôt nos énergies aux besoins urgents ! Le groupe UDC acceptera ces deux rapports de gestion. Merci de votre écoute.
M. Emmanuel Deonna (S). Monsieur le président, à en croire ma préopinante du PLR, seuls la direction ou les hauts cadres de l'Hospice général auraient le droit de s'exprimer sur le rapport de gestion de cette institution. Or, approuver un tel document ne revient pas seulement à s'interroger sur une situation à un moment donné, mais c'est aussi s'engager pour l'avenir, Mme Strasser l'a rappelé. Priver une institution des moyens de réaliser sa mission et s'interdire ensuite d'examiner les limites de son action, voilà une stratégie typiquement néolibérale ! Comme l'a relevé Mme Haller, on a pu observer une détérioration des conditions de travail du personnel de l'Hospice général et une incapacité réelle de cette institution à bien mener sa mission d'intervention sociale. Malgré le recrutement d'effectifs supplémentaires, des problèmes majeurs de fonctionnement ont été identifiés: des problèmes administratifs, des problèmes d'accès aux prestations ou un accueil des bénéficiaires souvent sommaire et inadéquat.
Ce refus du rapport 2018 n'est donc nullement un réquisitoire contre l'Hospice général, mais un appel à améliorer l'action et les conditions de travail au sein de celui-ci pour qu'il puisse pleinement accomplir sa mission. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Marc Falquet pour trois minutes quarante-deux.
M. Marc Falquet (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, entendre les pleureurs et les pleureuses se plaindre de l'absence de moyens est une honte ! Ce sont des propos d'enfants gâtés. Nous sommes vraiment à côté de la plaque: vous parlez d'absence de moyens alors qu'il s'agit du plus gros budget. Des centaines de millions de francs sont distribués. L'argent des contribuables participe donc au bien-être de la population et je crois que je n'ai jamais vu couper les prestations de personnes à l'aide sociale. Parler d'absence de moyens est une honte. Certaines personnes n'ont jamais voyagé dans le monde, nous sommes de véritables enfants gâtés ! Je suis vraiment scandalisé d'entendre parler ainsi quand des centaines de millions de francs sont dépensés chaque année pour aider les gens dans le besoin.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Bertrand Buchs pour une minute.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Je vais être court. Pour le PDC, il n'y a pas une absence de moyens, il y a une absence de vision. L'Hospice général doit être à la disposition des gens qui font une demande et on a tout de même remarqué que l'accès aux prestations est très difficile pour la plupart des personnes qui ont besoin d'une aide de l'Hospice. C'est compliqué pour des gens qui ne parlent pas forcément le français ! Souvent, ils ne parviennent pas à obtenir cette aide et sont obligés de se faire aider par d'autres associations pour constituer leur dossier. L'Hospice général devrait donc vraiment être à disposition de la population; or, actuellement, ce n'est pas le cas si on considère tout ce qu'il faut déposer pour une demande. Souvent, on vous renvoie votre dossier parce qu'il n'a pas été rempli correctement, mais ce n'est pas possible pour la plupart des demandeurs. Il faut vraiment faire évoluer cette vision des choses. Donc, changeons notre optique sur les demandes sociales ! (Applaudissements.)
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames les députées, Messieurs les députés, évidemment, faire le procès de l'Hospice général par ses rapports d'activité 2017 et 2018 est un exercice un peu artificiel, surtout en 2020, tant il est vrai que la situation au sein de cette institution a particulièrement évolué depuis ces deux rapports. Vous l'avez signalé, d'une part parce que son conseil d'administration a changé: vous y avez désormais toutes et tous un représentant ou une représentante de vos partis. Cela vous permettra de voir depuis l'intérieur comment on opère.
Dans une institution aussi grande que l'Hospice général, il existe toujours une bonne raison de s'opposer au rapport de gestion, un peu par facilité parfois. Or, le signe que certaines et certains aimeraient donner ce soir - en faisant en sorte que le refus de ces deux rapports soit compris comme une désapprobation de l'activité du Grand Conseil et du Conseil d'Etat - n'est pas compris comme ça par les collaboratrices et les collaborateurs de l'Hospice général.
Cette institution a traversé une situation hautement difficile ces dernières années, avec 115% d'augmentation du nombre de dossiers sans que les moyens suivent - hormis pour les prestations, car votre Conseil a toujours fait en sorte que celles-ci soient assurées. Mais l'Hospice général dispose d'un deuxième budget, pour le fonctionnement. Et pour le fonctionnement, en effet, des manquements ont été constatés, grandement réparés par un amendement que votre Conseil a soutenu, visant à donner au projet de budget les ressources humaines nécessaires. C'est la clé de la réussite de l'insertion professionnelle, car le coeur de la mission de l'Hospice général est la qualité de l'accompagnement social, pour faire en sorte que celles et ceux qui ont des difficultés - passagères ou plus longues - puissent trouver en face des professionnels qui leur apportent tout leur savoir-faire et leurs compétences. J'aimerais à ce stade les remercier d'être ainsi au front et de fournir un soutien extrêmement bienvenu et nécessaire à toutes celles et à tous ceux qui traversent des passes difficiles, pour différentes raisons. Notre société nous apprend tous les jours la difficulté qu'il y a à faire face à certains accidents dans la vie. Il y a quelques années, on pouvait encore envisager de garder une situation professionnelle stable. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas, on alterne travail et chômage par périodes. Nous avons même dû réviser la loi sur le chômage par un vote fédéral pour que l'Hospice général puisse reprendre le flambeau avec des mesures particulièrement innovantes et compliquées à mettre en place, mais absolument nécessaires pour celles et ceux qui en ont besoin.
Vous avez repéré les enjeux, Mesdames et Messieurs. Je vais me permettre de les compléter. Augmenter l'accompagnement social, c'est aussi faire en sorte que les bénéficiaires soient accompagnés en amont grâce à un portail social de proximité pour lequel nous souhaiterions mobiliser les communes genevoises. M. le député Buchs a évoqué les éléments administratifs nécessaires pour l'inscription auprès d'un organisme tel que l'Hospice général: cela peut être assumé par l'instance de proximité que représentent les communes.
Le deuxième enjeu est de faire en sorte que les prestations financières soient à la hauteur des normes de la Conférence suisse des institutions d'action sociale. Ce n'est pas le cas à Genève, nous sommes désormais lanterne rouge en Suisse s'agissant de ces normes; nous sommes en retard de deux réformes et nous devons permettre à celles et à ceux qui en ont besoin de recevoir des prestations conformes aux normes décidées par les autorités suisses.
Je vous remercie d'avoir relevé le troisième enjeu car vous avez ainsi placé l'Hospice général au coeur des solutions que nous avons à apporter à la crise que certaines et certains vivent actuellement, parfois durement - on en parlera tout à l'heure avec le PL 12723. Faire face à la crise, c'est non seulement faire face à la hausse du nombre de personnes qui sollicitent l'Hospice général, mais c'est aussi mettre en place des mesures permettant une insertion sociale et professionnelle la plus rapide possible.
Le quatrième chantier sur lequel nous travaillons est celui de la durée de la prise en charge, aussi en augmentation. Le nombre de personnes inscrites à l'aide sociale est évidemment un indicateur de la situation sociale à Genève, mais un autre indicateur est la durée de la prise en charge et les montants que nous donnons à celles et à ceux qui en ont besoin. Or, il y a accroissement, d'année en année. Les nécessités sont à notre porte; j'ai toute confiance en la capacité, l'agilité et le sérieux des travailleuses et travailleurs sociaux de l'Hospice général. Ceux-ci doivent être encouragés pour gérer de la manière la plus efficace et la plus efficiente possible la crise à notre porte. Je vous remercie donc pour votre soutien à ces deux rapports 2017 et 2018.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote sur le PL 12334-A.
Mis aux voix, le projet de loi 12334 est adopté en premier débat par 48 oui contre 33 non et 1 abstention.
L'article unique du projet de loi 12334 est adopté en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12334 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 43 oui contre 41 non et 2 abstentions.
Le président. Nous votons maintenant sur le PL 12540-A.
Mis aux voix, le projet de loi 12540 est adopté en premier débat par 51 oui contre 32 non et 3 abstentions.
L'article unique du projet de loi 12540 est adopté en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12540 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 45 oui contre 41 non.