République et canton de Genève

Grand Conseil

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Discours du procureur général

(L'huissier du Pouvoir judiciaire accompagne le procureur général au pupitre et se tient à côté de lui pendant le discours.)

M. Olivier Jornot, procureur général. Monsieur le président du Conseil d'Etat,

Monsieur le président du Grand Conseil,

Madame la conseillère d'Etat, Monsieur le conseiller d'Etat,

Mesdames les députées, Messieurs les députés au Grand Conseil,

Mesdames les magistrates, Messieurs les magistrats assesseurs,

Madame la colonelle, commandante de la police,

Messieurs les lieutenants-colonels, chefs d'état-major et des opérations,

Cette cérémonie de prestation de serment des magistrates et magistrats du Pouvoir judiciaire ne ressemble à aucune des précédentes et aucune des suivantes, du moins peut-on l'espérer, ne lui ressemblera. Alors que par le passé, l'évocation d'un virus nous inspirait avant tout des craintes pour la santé de nos ordinateurs, voilà qu'une pandémie s'est abattue sur le monde, sur notre pays et sur notre canton. Le Pouvoir judiciaire, avec ses audiences annulées par centaines, a dû, et devra encore, s'adapter et se réinventer, pour retrouver son rythme puis, le moment venu, rattraper progressivement le retard massif que la pandémie aura provoqué. S'adapter, parce qu'il le faut, parce que dans nos sociétés démocratiques et fondées sur le droit, la justice fait partie des prestations essentielles de l'Etat, des prestations dont la population a, davantage encore parce que nous sommes en crise, impérativement besoin.

Vous venez, Mesdames et Messieurs, de prêter serment. Ce serment, qui est rigoureusement le même que celui des magistrats de carrière, est chargé de valeurs. Un serment qui nous invite à rendre la justice à tous également, aux faibles comme aux puissants. Un serment qui nous enjoint de ne pas fléchir dans l'exercice de nos fonctions, un serment qui nous rappelle qu'au coeur de nos valeurs, il y a notre indépendance. Indépendance vis-à-vis des partis ou groupements qui nous ont désignés, indépendance vis-à-vis des milieux dont nous nous sentons proches, indépendance vis-à-vis de l'opinion publique.

C'est dire que même si vous n'appartenez pas à la magistrature de carrière, vous êtes vous aussi porteurs et garants des valeurs qui sont celles de toute la justice. C'est dire aussi que les obligations et devoirs qui vous incomberont désormais seront les mêmes que ceux de tous les magistrats. Même si votre engagement dans la justice reste accessoire, vous aurez vous aussi à honorer les devoirs de dignité, de rigueur, d'assiduité, de diligence et d'humanité.

La justice, ce sont des valeurs, mais ce sont aussi et surtout des femmes et des hommes: les magistrates et magistrats aujourd'hui assemblés et les collaboratrices et collaborateurs du Pouvoir judiciaire. Aux uns et aux autres, je rends hommage pour leur dévouement et leur fidélité à l'institution judiciaire. Ma reconnaissance s'étend sans réserve aux magistrats non professionnels, dont l'engagement consiste à servir, de façon désintéressée, la justice et les justiciables.

La période judiciaire qui s'ouvre sera notamment marquée par une mutation sans précédent, celle du passage au numérique. Comme toutes ses homologues de Suisse, la justice genevoise a pris du retard, un retard considérable, en matière de numérisation. C'est qu'il aurait été étrange de développer un système de gestion électronique des documents alors que les normes de procédure nous obligent à tenir un dossier à l'ancienne. Les travaux législatifs en cours sur le plan fédéral vont prochainement changer la donne, puisqu'ils obligeront toutes les instances judiciaires civiles et pénales, auxquelles les cantons pourront ajouter les juridictions de droit public, à tenir leurs dossiers sous forme électronique, et tous les partenaires professionnels de la justice, au premier rang desquels les avocats, à n'interagir avec cette dernière que sous forme électronique. Le projet Justitia 4.0, développé sous la double direction de la conférence de la justice conduite par le Tribunal fédéral et de la conférence des chefs de départements de justice et police, vise, au-delà de la base légale, à fournir l'architecture informatique de base permettant l'échange et la consultation des dossiers judiciaires numériques sur une plateforme unique. Nous aurons tous, et vous aussi, un gros effort à fournir pour nous adapter à un univers de travail fondamentalement bouleversé.

A vous, magistrates et magistrats qui avez prêté serment, j'adresse mes plus vives félicitations et mes voeux pour une heureuse et fructueuse activité judiciaire.

Aux membres du Conseil d'Etat, aux membres du Bureau du Grand Conseil, aux chefs de groupe, à M. le sautier du Grand Conseil, qui avez assisté pendant cet après-midi à sept parties de prestations de serment, j'exprime ma vive reconnaissance pour l'attachement stoïque que vous avez ainsi manifesté à la justice de notre canton. J'étends ces remerciements à Mme la présidente du Conseil supérieur de la magistrature et au secrétaire général du Pouvoir judiciaire. Je salue également la commandante de la police et les membres de son état-major qui ont rendu les honneurs à l'ensemble des délégations et qui vous les rendront aussi lors de la sortie, Mesdames et Messieurs. J'adresse également mes vifs remerciements aux membres du secrétariat général du Grand Conseil et aux membres du secrétariat général du Pouvoir judiciaire ainsi qu'à toutes les équipes techniques qui ont rendu possible cette magnifique, quoique singulière, prestation de serment. Enfin, à tout seigneur tout honneur, je vous remercie, Monsieur le président du Grand Conseil, pour le brio avec lequel vous avez conduit ces cérémonies et les propos qui resteront assurément dans nos mémoires.

Vive la justice genevoise ! Vive la République et canton de Genève ! (Applaudissements.)