République et canton de Genève

Grand Conseil

Chargement en cours ...

La séance est ouverte à 16h10, sous la présidence de M. Jean-Marie Voumard, président.

Assistent à la séance: Mme et MM. Serge Dal Busco, Pierre Maudet, Mauro Poggia et Nathalie Fontanet, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Anne Emery-Torracinta et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Beatriz de Candolle, Pablo Cruchon, Diego Esteban, Amanda Gavilanes, Serge Hiltpold, Véronique Kämpfen, Alessandra Oriolo, Philippe Poget et Patrick Saudan, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Dilara Bayrak, Natacha Buffet-Desfayes, Boris Calame, Nicolas Clémence, Joëlle Fiss, Badia Luthi, Patrick Malek-Asghar et Jean-Pierre Pasquier.

Annonces et dépôts

Néant.

Questions écrites urgentes

Le président. Les questions écrites urgentes suivantes vous ont été transmises:

Question écrite urgente de M. Pierre Bayenet : Pourquoi l'efficacité du service du contrôle de l'administration fiscale cantonale est-elle en baisse ? (QUE-1209)

Question écrite urgente de M. Pierre Bayenet : Projet pilote de distribution contrôlée de cannabis - où en est-on ? (QUE-1210)

Question écrite urgente de M. Patrick Dimier : Procédures judiciaires : les Genevois n'ont pas à payer les frais d'avocat des élus ! (QUE-1211)

Question écrite urgente de Mme Patricia Bidaux : Une agriculture, des agricultures, mais que promeut le DIP ? (QUE-1212)

Question écrite urgente de M. Pierre Bayenet : Est-il exact que le député Simon Brandt a préparé, en sa qualité d'adjoint scientifique à la direction stratégique de la police, la réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente d'un député suppléant ? (QUE-1213)

Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : A quand une nouvelle patinoire ? (QUE-1214)

Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : Embauche massive de frontaliers par les CFF : quel rôle joue l'OCE ? (QUE-1215)

Question écrite urgente de M. Boris Calame : Antennes 5G : déjà 120 de trop à Genève ?! (QUE-1216)

Question écrite urgente de Mme Natacha Buffet-Desfayes : Faire toute la lumière dans les sous-sols des HUG ! (QUE-1217)

Question écrite urgente de M. François Lefort : L'expulsion de M. G. D. a-t-elle été régulière et légale ? (QUE-1218)

Question écrite urgente de Mme Ana Roch : Abonnements et frais téléphoniques ? (QUE-1219)

Question écrite urgente de Mme Ana Roch : Quels montants pour les frais et dépenses du Conseil d'Etat ? (QUE-1220)

Question écrite urgente de M. Pierre Bayenet : Quelles démarches le canton de Genève entreprend-il pour négocier une collecte de la taxe de séjour avec la plateforme web Airbnb ? Comment les données liées à cette collecte pourraient-elles être utilisées ? (QUE-1221)

Question écrite urgente de M. Pierre Bayenet : Comment l'ouverture au public des parkings de la gare des Eaux-Vives et de l'Hôpital-Cluse a-t-elle été compensée par des suppressions de places de stationnement en surface ? (QUE-1222)

Question écrite urgente de M. Pierre Bayenet : Quelles sont les prestations dont bénéficient les mineurs non accompagnés à Genève ? (QUE-1223)

Question écrite urgente de M. Olivier Baud : Fête des promotions : un livre par an et par élève, serait-ce trop ? (QUE-1224)

Question écrite urgente de Mme Nicole Valiquer Grecuccio : Absentéisme et heures supplémentaires dans les établissements pénitentiaires : comment expliquer cette situation critique et très préoccupante ? (QUE-1225)

Question écrite urgente de M. Yves de Matteis : Prévention de l'homophobie, de la biphobie et de la transphobie en contexte scolaire (QUE-1226)

Question écrite urgente de M. Alexandre de Senarclens : Assainissement du parc immobilier de l'Etat : état du parc, planification et coûts, où en sommes-nous ? (QUE-1227)

Question écrite urgente de Mme Marjorie de Chastonay : Prévention de stéréotypes, discriminations et violences basés sur le handicap en contexte scolaire (QUE-1228)

Question écrite urgente de Mme Helena Verissimo de Freitas : Situation des établissements pénitentiaires genevois au 31 décembre 2019 (QUE-1229)

Question écrite urgente de Mme Frédérique Perler : Prévention du sexisme, du harcèlement (notamment sexuel) et promotion de l'égalité femmes-hommes en contexte scolaire (QUE-1230)

Question écrite urgente de Mme Anne Marie von Arx-Vernon : 5G : le président du Conseil d'Etat a-t-il trompé les Genevois ? (QUE-1231)

Question écrite urgente de Mme Paloma Tschudi : Prévention de stéréotypes, discriminations et violences basés sur l'appartenance ethnique, culturelle et religieuse (QUE-1232)

Question écrite urgente de M. Pierre Vanek : Autoroute du Chablais : que fait le Conseil d'Etat ? (QUE-1233)

QUE 1209 QUE 1210 QUE 1211 QUE 1212 QUE 1213 QUE 1214 QUE 1215 QUE 1216 QUE 1217 QUE 1218 QUE 1219 QUE 1220 QUE 1221 QUE 1222 QUE 1223 QUE 1224 QUE 1225 QUE 1226 QUE 1227 QUE 1228 QUE 1229 QUE 1230 QUE 1231 QUE 1232 QUE 1233

Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.

Questions écrites

Le président. Les questions écrites suivantes vous ont également été transmises:

Question écrite de M. Boris Calame : Quel bilan du développement des « dépanneurs », notamment aux Pâquis, et du suivi de la licéité de leurs activités ? (Q-3831)

Question écrite de M. Boris Calame : Quelle est la confidentialité du vote par dépôt directement au SVE - service des votations et élections ? (Q-3832)

Question écrite de Mme Léna Strasser : Nouvelle loi fédérale sur les étrangers et l'intégration : quel impact sur les conditions de vie des étrangers résidant à Genève et sur la fluidité du traitement des dossiers à l'office cantonal de la population et des migrations ? (Q-3833)

Question écrite de M. Rolin Wavre : Quels seraient l'effet et la faisabilité d'une imposition des véhicules qui prendrait mieux en compte leur emprise sur l'espace public ? (Q-3834)

Question écrite de M. David Martin : Vers une imposition dissuasive pour les SUV ? (Q-3835)

Q 3831 Q 3832 Q 3833 Q 3834 Q 3835

Le président. Ces questions écrites sont renvoyées au Conseil d'Etat.

QUE 1196-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Marc Fuhrmann : Capacité d'investissement des HUG : renforcée ou diminuée ?

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1196-A

QUE 1197-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Clarification sur les départs de hauts fonctionnaires

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1197-A

QUE 1198-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Rolin Wavre : Aménagement routier entre Versoix et Bellevue : pourquoi n'a-t-on pas saisi l'occasion de la réfection en cours pour améliorer la qualité urbanistique, paysagère et environnementale de ce tronçon routier ?

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1198-A

QUE 1199-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Murat Julian Alder : Les intolérances alimentaires justifient-elles le versement d'une allocation de régime commandée par une affection médicale ?

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1199-A

QUE 1200-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Mme Marjorie de Chastonay : Que fait le Conseil d'Etat pour limiter la précarité à l'aéroport de Genève ?

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1200-A

QUE 1201-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Yves de Matteis : Mutilations des personnes intersexes aux HUG : plus de transparence

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1201-A

QUE 1202-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Christo Ivanov : Combien de requêtes en autorisation de construire pour des antennes 5G sont pendantes auprès du département du territoire ?

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1202-A

QUE 1203-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Pierre Nicollier : Un audit sur les subventions accordées à l'ASSUAS

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1203-A

QUE 1204-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Stéphane Florey : Bannir les voyages en avion, mais à quel prix ?

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1204-A

QUE 1205-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Charles Selleger : Construction d'un chalet illicite à Versoix : affaire toujours non résolue ?

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1205-A

QUE 1206-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Stéphane Florey : Immeuble(s) à faiblesse(s) structurelle(s) : l'Etat propriétaire ou locataire a-t-il fait les expertises nécessaires ?

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1206-A

QUE 1207-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Sylvain Thévoz : « Dysphorie de genre » : quand le Conseil d'Etat va-t-il s'engager ?

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1207-A

QUE 1208-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Christo Ivanov : Politique d'embauche des TPG : pourquoi les chômeurs genevois sont-ils écartés ?

Annonce: Séance du vendredi 13 décembre 2019 à 14h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 1208-A

Q 3828-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Mme Céline Zuber-Roy : Genève subit-elle une pénurie de logopédistes ?
M 2381-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Boris Calame, Emilie Flamand-Lew, Yves de Matteis, François Lefort, Sophie Forster Carbonnier, Sarah Klopmann, Jean-Michel Bugnion, Delphine Klopfenstein Broggini, Frédérique Perler, Mathias Buschbeck, Jean Batou, Patrick Dimier, Pierre Vanek, Christina Meissner, Jean Rossiaud pour préserver la Caisse de prévoyance de l'Etat de Genève (CPEG) des risques boursiers considérables liés aux investissements dans les énergies fossiles
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IV des 12 et 13 septembre 2019.
Rapport de majorité de M. Cyril Aellen (PLR)
Rapport de première minorité de M. Mathias Buschbeck (Ve)
Rapport de deuxième minorité de M. Alberto Velasco (S)

Débat

Le président. L'ordre du jour appelle la M 2381-A, que nous traiterons en catégorie II, quarante minutes. Le rapport de majorité est de M. Cyril Aellen, à qui je passe la parole.

M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Il s'agit d'une motion visant à demander au Conseil d'Etat de lui-même demander à ses représentants au sein du comité de la CPEG de tout entreprendre pour que la caisse de prévoyance désinvestisse rapidement des énergies fossiles. Cette motion pose donc deux questions: est-ce possible, et est-ce nécessaire ? A la première question - est-ce possible ? - la réponse est non, parce que le comité de la caisse est seul habilité à prendre ce type de décision. Le Conseil d'Etat ne pourrait pas lui donner des instructions pour des raisons d'indépendance: en tant qu'employeur, il désigne des représentants, qui doivent agir en toute indépendance et prendre des décisions en engageant leur propre responsabilité.

Laissons ça de côté et admettons que ce soit possible - ça ne l'est pas, mais admettons que ce soit possible. Est-ce nécessaire ? Ma réponse sera, là, plus complète. D'abord - ce sont les pages 21 et suivantes du rapport qui le disent - la loi fixe déjà un cadre qui impose à la caisse d'investir dans le développement durable, ou en tout cas le lui suggère, en faisant des investissements responsables. Fort de cette loi, le comité a pris un certain nombre de mesures, avec en décembre 2017 une politique générale de placement qui tient compte de la problématique du développement durable par le biais d'investissements responsables, et des directives revues en juin 2018. Il a également pris différentes autres mesures lui permettant de faire des investissements qui sont dans l'intérêt à la fois de la caisse et de ses assurés, et cela en tenant compte de la problématique du développement durable. Des investissements responsables sont donc effectués, avec une approche globale qui tient compte des critères tant environnementaux que sociaux et de bonne gouvernance.

A la deuxième question - est-ce que c'est nécessaire ? - la réponse est par conséquent non. Le comité de la caisse fait déjà ce qu'on voudrait demander au Conseil d'Etat de lui-même demander au comité de la caisse d'entreprendre, bien que ça ne nous soit par ailleurs pas possible ! C'est la raison pour laquelle la majorité de la commission a considéré que s'il n'est pas possible de donner suite à cette motion, ce n'est pas très grave parce que le comité de la caisse remplit déjà les objectifs que les motionnaires voudraient lui assigner.

M. Mathias Buschbeck (Ve), rapporteur de première minorité. Chères et chers collègues, les deux questions que pose le rapporteur de majorité sont effectivement celles qu'il faut se poser: est-ce possible et est-ce souhaitable ? Est-ce que le comité de la caisse est le seul responsable, devant la loi, des investissements qu'il fait et peut même être poursuivi pénalement ? C'est bien le cas: la réponse est oui. Le comité de la CPEG est l'unique responsable des investissements qu'il choisit de faire dans l'intérêt de la caisse. Deuxième question: est-ce que la caisse fait aujourd'hui des efforts en vue d'une décarbonisation de son portefeuille ? Certains efforts sont entrepris, elle avance et a renoncé au charbon - ce n'est pas la pire des caisses dans ce domaine.

Vous allez me dire: pourquoi alors maintenir cette motion ? Pour plusieurs raisons. La première, c'est qu'il faut bien être conscient que les émissions de gaz à effet de serre de la place financière suisse sont plus de vingt fois supérieures à celles que l'ensemble de la Suisse émet en tant que pays, simplement du fait des investissements réalisés par les compagnies d'assurance et les caisses de pension. Les investissements des caisses de pension constituent donc un élément fondamental de la politique climatique de la Suisse. C'est pourquoi la principale campagne de l'Alliance climatique suisse, qui regroupe plus de septante ONG actives dans la lutte contre le réchauffement climatique, se concentre depuis deux ans sur les investissements de la place financière suisse, avec deux axes: les investissements de la Banque nationale, qui croule sous les bénéfices en ayant très peu de conscience écologique, et les caisses de pension. S'agissant de celles-ci, l'Alliance climatique a décidé d'établir un rating, comme on dit, en les notant sur la base de leurs performances climatiques. Est-ce que la CPEG est exemplaire ? La question mérite d'être posée.

La CPEG est quand même la quatorzième caisse de pension de Suisse, toutes caisses confondues; ce ne serait donc pas un détail si elle ne remplissait pas ses obligations climatiques. Les caisses sont classées par couleur - vert, orange ou rouge - et, malgré les efforts qu'elle fait, la CPEG n'est pas dans le vert. Ses efforts sont aujourd'hui insuffisants puisqu'elle est classée parmi les caisses oranges. Si elle ne fait pas partie des pires, et on le savait, elle n'est pas non plus parmi les meilleures. Il est par conséquent de notre responsabilité politique, en tant que parlement, d'alerter le comité de la caisse, qui reste libre. Nous avons la responsabilité politique, en tant que parlement, de lutter contre le réchauffement climatique et de sensibiliser un acteur important de cette lutte au niveau genevois pour qu'il fasse des efforts en la matière. Le rapport de l'Alliance climatique le dit d'ailleurs: pour la CPEG, une décarbonisation stratégique du portefeuille fait toujours défaut, l'inscription d'une stratégie climatique dans sa politique générale de développement durable serait nécessaire pour mettre en oeuvre une décarbonisation pratique par désinvestissement/investissement, associée à un objectif mesurable de moins 50% d'ici 2025. C'est tout ce que nous voulons rappeler à la caisse par ce texte, raison pour laquelle les Verts ont modifié l'invite initiale, qui demandait au Conseil d'Etat d'exiger de la caisse ces changements, pour aujourd'hui simplement l'inviter à les faire - à y réfléchir. Nous prenons nos responsabilités et nous espérons que ce Grand Conseil prendra également les siennes. Je vous remercie de l'accueil que vous réserverez à cette motion et à son amendement. Je vous remercie.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. En premier lieu, j'aimerais dire que cette motion est un texte d'actualité. Quand on voit ce qui se passe aujourd'hui sur certains continents ou dans certains pays, comme en Australie, on se dit que les questions qu'elle soulève sont effectivement pertinentes. Le deuxième élément que je voudrais relever, c'est qu'il s'agit d'une motion, Mesdames et Messieurs les députés, pas d'un projet de loi: il est ici question d'affirmer une position politique ! Il est question d'affirmer une position politique à l'intention du Conseil d'Etat; ensuite, sa possible mise en oeuvre est moins notre problème ! Nous devons ici affirmer une position politique, ainsi que l'a fait à l'époque M. Rockefeller - d'une manière différente, c'est vrai - quand il a décidé que le pétrole devrait s'imposer comme l'énergie du futur pour les moyens de transport. Il a obligé les collectivités publiques à renoncer aux transports publics qui, notamment dans la ville de San Francisco, fonctionnaient avec l'énergie électrique. On a laissé tomber certaines recherches: on a par exemple mis de côté celles sur la pile à hydrogène, au profit justement de cette énergie du futur. On a vraiment insisté sur le pétrole parce que le marché pétrolier devenait hyper intéressant, et la société a complètement suivi le mouvement.

Aujourd'hui, nous sommes face à un changement de société ! C'est dans ce cadre-là que s'inscrit cette motion, Mesdames et Messieurs ! Elle vise à dire au Conseil d'Etat de faire entendre à la caisse qu'il est éminemment important de changer de mode de vie et de fonctionnement, notamment s'agissant des énergies utilisées. Les caisses ont effectivement des moyens financiers très conséquents. Il apparaît dans le rapport que «la caisse de pension de la Ville de Berlin a récemment décidé de désinvestir complètement des énergies fossiles, suivant ainsi l'exemple des caisses de pension d'Oslo, de Copenhague, de Stockholm, de Paris, d'Oxford, de Bristol, de Melbourne, de Seattle, de San Francisco» et autres. Si d'autres l'ont fait, c'est donc possible de le faire !

Le rapporteur de majorité a insisté sur les difficultés qu'aurait l'exécutif à imposer ce changement à la caisse. Eh bien il faut trouver le moyen ! Il y a peut-être un moyen et il faut le trouver. C'est pourquoi nous demandons que la motion, comme proposé, «invite le Conseil d'Etat à inviter le comité de la CPEG» - à inviter le comité de la CPEG ! - «à élaborer un plan de désinvestissement des énergies fossiles». Il est invité à élaborer un plan de désinvestissement, Mesdames et Messieurs ! Ce ne serait même pas du jour au lendemain: on lui donne du temps pour essayer de prendre le virage. Mesdames et Messieurs les députés, je tiens à insister sur le fait que cette motion est d'actualité et qu'il nous faudrait la voter. Merci.

M. Eric Leyvraz (UDC). Interdire à la CPEG les investissements dans des entreprises s'occupant d'énergies fossiles enfreindrait la LPP car c'est la Confédération qui, seule, dispose de la compétence en matière de réglementation de la prévoyance professionnelle. La LCPEG attribue au comité la compétence inaliénable et intransmissible en matière de placements. Le Conseil d'Etat et le Grand Conseil ne sont donc pas compétents en la matière et ne peuvent rien imposer, ou suggérer, aux administrateurs de la caisse. Cela devrait déjà suffire pour refuser cette motion.

Rappelons aussi que la CPEG est citée comme modèle pour le bon rendement de ses placements. L'organe suprême de la caisse n'est d'ailleurs pas resté les bras croisés face au problème de la durabilité des placements et a présenté une directive sur l'investissement responsable en 2014 déjà. Il a donc fort bien anticipé les attentes légitimes des citoyens, préoccupés par les problèmes climatiques. Son exposition aux énergies fossiles est très faible - elle n'a d'ailleurs jamais été aussi basse. En conclusion, laissons la caisse travailler avec efficacité: elle démontre qu'elle le fait très bien et avec beaucoup d'éthique. Et si on arrêtait de perdre du temps avec des motions contraires au droit supérieur, ce serait encore mieux ! L'UDC refusera cette motion et vous demande de faire de même.

Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, vous connaissez toutes et tous le vieil adage qui dit que l'argent est le nerf de la guerre. Il s'applique en l'occurrence plutôt bien à la question qui se pose aujourd'hui et à l'objet de cette motion, à savoir la stratégie d'investissement de la CPEG. Les investissements dans les énergies fossiles de la CPEG sont en effet déjà à l'heure actuelle - et on s'en réjouit - relativement restreints proportionnellement: 1,5%. Mais ça représente quand même 200 millions d'investissements, ce qui n'est absolument pas un montant négligeable. Or il n'échappera à personne que lorsqu'on investit dans les énergies fossiles, eh bien on les encourage ! Ce qui est totalement contraire non seulement à une lutte efficace face à l'urgence climatique, mais également au plan climat cantonal et à l'article 158 de notre constitution, qui prévoit que «l'Etat met en oeuvre des politiques propres à réduire les gaz à effet de serre». C'est certainement une lapalissade, Mesdames et Messieurs les députés, que de dire que les énergies fossiles ne sont pas des énergies durables, quoiqu'une partie de ce Grand Conseil - et même une majorité - semble remettre cela en cause.

Ce ne sont pourtant pas des énergies durables d'un point de vue environnemental, climatique ou de la qualité de notre air, et ce n'est pas non plus un investissement durable financièrement. Face au risque d'éclatement de la bulle carbone ces prochaines années, l'investissement dans les énergies fossiles s'avère en effet de plus en plus risqué pour la CPEG. Nous nous trouvons donc aujourd'hui dans une situation où les intérêts de la caisse de pension, de ses assurés et de l'Etat rejoignent l'intérêt public, à savoir la préservation de notre environnement. C'est pourquoi les socialistes vous recommandent d'accepter cette motion. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG). Cette motion a un grand intérêt parce qu'elle nous a permis de mieux comprendre, à la commission des finances, quel était le travail actuellement effectué - qui est et va être effectué - par la CPEG. Et c'est un travail, je dois dire, relativement considérable. Pour s'en rendre compte, il suffit de lire attentivement le rapport et ses annexes: on voit très clairement qu'un travail très précis est fait, travail qui correspond d'ailleurs aux attentes des motionnaires, auxquelles on a répondu avant même qu'elles soient formulées.

Le seul avantage de cette motion, c'est que nous avons maintenant des informations; je vais juste donner deux exemples. On nous a en particulier dit qu'il y avait une participation au plan CDP, dont l'objectif est d'obtenir des entreprises de répondre à un questionnaire climatique et de divulguer les émissions de GES - gaz à effet de serre - sur une base homogène. Avec ce plan, on va pouvoir interpeller les entreprises par le biais des placements financiers afin qu'elles aillent dans la bonne direction. Autre élément à relever, l'exclusion de certains placements, par exemple dans le nucléaire, dans le charbon ou dans d'autres domaines comme l'armement. Il y a des exclusions: la CPEG se refuse à investir dans ces domaines-là, ce qui est tout à fait positif. Ce serait faux de croire qu'on ne fait rien, au contraire.

Maintenant se pose une question fondamentale: est-ce au Grand Conseil de dire au Conseil d'Etat de dire au comité de la CPEG ce qu'il doit faire, même s'il a de bonnes idées ? A notre sens, nous nous engageons véritablement là sur un terrain un peu délicat. Si rien n'était fait, je répondrais oui: la motion aurait tout son sens. Mais étant donné le travail effectué, nous nous retrouverions un peu dans la position du donneur de leçons maladroit. Nous ne voulons pas être un donneur de leçons maladroit, qui, de plus, comprend tout de travers, et c'est plus ou moins le rôle que nous aurions si nous votions cette motion. C'est pour ça que, tout en soutenant le but de ce texte, nous refuserons celui-ci: le travail est en train de se faire et nous nous en félicitons.

Le président. Merci, je passe la parole à M. le député Patrick Dimier pour une minute vingt.

M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président. Je n'aurai pas besoin d'autant de temps. Je voudrais juste dire que j'appartiens, au sein de l'assemblée générale de la BNS, à un tout petit groupe de personnes qui demande depuis des années à l'institution de cesser ce genre d'investissements. Vous savez, c'est cette assemblée générale où chaque canton doit siéger mais où on ne voit jamais notre Conseil d'Etat parce qu'il est bien mieux occupé ailleurs. Cela pour dire que nous n'avons pas, nous, parlement, à nous occuper de ce qui n'est même pas de la compétence du gouvernement ! Notre collègue Leyvraz l'a pertinemment rappelé tout à l'heure: nous n'avons pas de levier ! Cela ne veut pas dire que notre voix ne doit pas être entendue par le Conseil d'Etat, pour autant qu'il ait quelques oreilles à nous prêter et entende ce que nous lui disons. Nous ne devons pas soutenir des investissements contraires à ce que nous voulons majoritairement ! Un petit point n'a pas été mentionné dans cette motion...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Patrick Dimier. Je finis !

Le président. Je vous remercie.

M. Patrick Dimier. ...c'est l'énergie nucléaire...

Le président. Je vous remercie, Monsieur Dimier.

M. Patrick Dimier. Merci, Monsieur le président.

M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, cette motion a été traitée par la commission au printemps dernier. Que s'est-il passé depuis le printemps dernier ? Ce parlement a voté l'urgence climatique - on l'a rappelé tout à l'heure - et le Conseil d'Etat l'a pris en compte. Que s'est-il passé d'autre ? Il y a eu un petit match de tennis dans une banque et le jugement qui a été rendu récemment reconnaît la légitimité de mettre en avant la lutte contre le réchauffement climatique.

Les bancs d'en face disent relativement souvent, aux niveaux cantonal et fédéral, que la Suisse est un petit pays mais que nous devons agir de façon globale. Et comme on l'a justement signalé tout à l'heure, les investissements que la Suisse fait à travers ses banques, ses caisses de pension et ses assurances sont responsables d'émissions de CO2 vingt-deux fois plus élevées que celles que nous émettons dans le pays ! Vous avez donc la possibilité, à travers cette motion, d'agir de façon globale et non seulement locale.

Nous respectons bien entendu la liberté de placement de la CPEG, qui lui est conférée par la loi sur la prévoyance professionnelle, mais nous tenons néanmoins à ce que cette caisse, qui est quand même la caisse de prévoyance de l'ensemble de la fonction publique, ait un certain devoir d'exemplarité. C'est dans ce sens-là que nous espérons pouvoir influer sur son fonctionnement, non seulement pour abaisser le bilan CO2 et le rendre compatible avec l'urgence climatique, mais aussi parce que nous considérons que les placements décarbonés présentent nettement moins de risques à moyen terme - et cela au bénéfice des affiliés de la caisse, comme on l'a rappelé tout à l'heure.

Les auditions de la CPEG ont montré - et on l'a également mentionné - que cette caisse s'efforce de décarboner son portefeuille ainsi que d'influer sur les sociétés dans lesquelles elle détient des participations. Nous pensons toutefois que davantage peut être fait, et c'est pourquoi nous maintenons notre motion et l'amendons dans la forme qui a été indiquée par le rapporteur de première minorité. Cette incitation ne doit pas être vue comme un corset à la politique de placement de la CPEG mais bien plutôt comme un encouragement à poursuivre et à intensifier les actions entreprises par cette caisse. Je vous remercie.

M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs, il faut rappeler que cette caisse est autonome. A ce stade, au travers de la constitution, on lui a déjà passablement amputé la gestion de ses investissements immobiliers: vous savez que la CPEG ne peut pas vendre un immeuble. Cela est dans la constitution et fait partie de son carcan, qu'on le veuille ou non. Ce carcan, on souhaite aujourd'hui le resserrer. Cette caisse autonome a un règlement de placement qui a certainement été discuté de manière très démocratique tant au sein des assurés que de l'ensemble des collaborateurs de la CPEG. Responsables, Mesdames et Messieurs, ils le sont ! Quand le parti des Verts a souhaité les entendre sur l'ensemble de ces placements, ils les ont reçus ! Ils ont pu discuter et se rendre compte des difficultés auxquelles la caisse est confrontée.

Nous avons pu poser plusieurs questions à l'ensemble des gens qui ont lancé ces motions, notamment la dernière d'entre elles - la motion carbone. Une des questions formulées a été: qu'est-ce qu'il serait nécessaire d'entreprendre, et d'entreprendre tout de suite, pour faire des efforts allant dans la direction d'une responsabilité en matière de climat ? Je n'ai pas obtenu de réponse en commission, Mesdames et Messieurs ! Non, je n'ai pas eu de réponse ! La caisse a dit quant à elle: «Ecoutez, cette motion ne nous dérange pas - elle peut nous aider.» Mesdames et Messieurs des Verts, sur quelle base peut-on l'aider ? La responsabilité de la caisse est de payer des rentes, d'être au service des personnes à la retraite - elle est de faire du bénéfice ! N'optons pas pour des carcans impossibles ! Demain, nous allons nous attaquer à l'or ! Est-ce que ça profite aux entreprises d'avoir des tas d'or dans des coffres-forts ? Non, ça ne profite pas au monde de l'entreprise ! Ce n'est pas ce qui permet à une entreprise d'engager des investissements. Bien que l'idée soit bonne, Mesdames et Messieurs, je crois que nous faisons fausse route. Mais l'important, c'est que les gens ont été entendus; les gens se sont rendu compte que le travail se fait et que la CPEG est effectivement responsable. C'est pourquoi le parti démocrate-chrétien ne votera pas cette motion.

Une voix. Très bien !

M. Jean Burgermeister (EAG). Nous avons pu entendre que la CPEG fait mieux que d'autres caisses de pension. Il faut dire que ce n'est pas difficile: une grande partie d'entre elles investit massivement dans les secteurs fossiles, avec des conséquences globales très importantes - elles ont été rappelées tout à l'heure. Il y a là une piste réelle pour lutter, en Suisse, contre le réchauffement climatique: réduire drastiquement les investissements dans les secteurs fossiles, non seulement des caisses de pension mais aussi de l'ensemble de la place financière, qui pèse très très lourdement, au niveau mondial, dans ce domaine.

Il s'agit là d'une motion non contraignante pour la CPEG qui, même si elle fait mieux que beaucoup d'autres, investit néanmoins 200 millions dans le secteur fossile. Alors ça représente seulement 1,5% de son portefeuille ? Eh bien tant mieux ! Ça prouve que la CPEG n'a pas besoin d'investir dans le fossile pour fonctionner puisque, pour l'essentiel, elle s'en passe ! Pour 98,5% de son portefeuille, elle fait sans ! Il ne lui reste qu'un tout petit bout de chemin à parcourir afin de s'extraire complètement de ce secteur, désastreux sur un plan environnemental. Il faut évidemment voter cette motion non contraignante comme symbole politique, à l'heure où même la justice donne raison aux jeunes qui occupent le Credit Suisse pour dénoncer les investissements de la banque.

Il faut voter ce texte comme signal politique et il faudra bien sûr aller beaucoup plus loin ! Nous avons entendu tout à l'heure, lors de certaines interventions, qu'il ne s'agit pas d'un corset mais d'une indication; il faut absolument que nous travaillions à mettre des corsets aux investissements des caisses de pension, en tout cas pour ce qui est des caisses publiques. Celles-ci doivent avoir l'interdiction d'investir dans les secteurs fossiles; plus largement, il faut durcir drastiquement les possibilités d'investissement des caisses de pension, y compris privées, et de la finance. Cette motion représente un tout petit premier pas, Mesdames et Messieurs les députés, et Ensemble à Gauche vous invite à voter oui.

M. Jacques Béné (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, le problème est simple: tout secteur économique génère des émissions carbone. Il utilise en partie des énergies fossiles. C'est de plus, on l'a dit, une loi fédérale qui gère la question des placements des caisses de pension; j'invite Mme Pasquier et M. Dandrès, les nouveaux élus de gauche au Conseil national, à déposer le même genre de texte pour modifier la LPP et on verra bien ce qu'il en sera fait.

Mais dans la mesure où tout est effectivement émission de carbone, Mesdames et Messieurs, que faut-il que nous fassions ? Que nous n'investissions plus que dans les obligations de la Confédération ? Je sais que, pour la gauche, ce ne serait pas très grave: quoique les assurés soient péjorés, il y a la garantie de l'Etat et ce serait de toute façon le contribuable qui paierait. Non, Mesdames et Messieurs.

Si la question des émissions de carbone est problématique - et d'autres objets sont encore pendants devant les commissions du Grand Conseil - c'est que cette réduction jusqu'au-boutiste est voulue par certains groupes politiques pour une question, comme l'a dit M. Burgermeister, de symbolique politique ! Il n'y a pas que la symbolique: les objectifs doivent être atteignables et on sait très bien que tous ne le sont pas ! La réduction drastique déjà opérée par la CPEG est une bonne chose - nous sommes conscients qu'elle peut aller plus loin et elle l'est aussi.

Pour en revenir aux émissions de CO2, Mesdames et Messieurs, j'aimerais savoir ce que pense la gauche de celles dont sont responsables les entreprises qui construisent des bus, des trams. Est-ce qu'il faut également arrêter d'investir dans ces technologies-là, ce qui ne permettra plus de faire de nouvelles avancées technologiques ? Est-ce qu'il faut arrêter d'investir dans l'immobilier, puisque qui dit immobilier dit locataires et que ceux-ci sont de gros consommateurs d'énergie ? J'avais une fois proposé à M. Velasco de déposer ensemble un projet de loi ou une motion qui demanderait par exemple à l'ASLOCA d'arrêter de défendre les locataires se plaignant parce que la température dans leur logement est inférieure à 23 degrés - c'est en gros ce qu'on admet avoir besoin dans un appartement. Une température plus basse d'un degré dans un appartement représente en effet une diminution de la consommation d'énergie de 7% à 10%. Alors est-ce qu'il faut aussi arrêter d'investir dans l'immobilier ?

J'aimerais savoir dans quoi la CPEG va pouvoir investir si le zéro carbone est le seul critère pour ses placements, ou pour ceux des caisses de pension. Il faut bien évidemment refuser d'entrer en matière sur cette motion, tout en continuant à encourager la CPEG à faire le maximum pour diminuer son empreinte carbone et ses placements dans les énergies fossiles. Je vous remercie.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, permettez-moi de dire à M. Béné qu'on peut construire des immeubles et fabriquer toutes sortes de produits industriels avec des énergies renouvelables. C'est possible, Monsieur ! C'est possible avec l'énergie solaire, hydraulique et j'en passe. Oui, c'est possible !

Ensuite, si vous me le permettez, Monsieur le président, je voudrais dire à M. Cerutti qu'il se peut, à l'allure où vont les choses, avec les désastres climatiques qu'on vit, qu'un jour on ne puisse même pas payer les rentes ! Le problème posé ici est un problème politique. Cette motion est là pour dire qu'on doit prendre ce virage ! On ne peut plus, disons, rester comme on est: il faut prendre ce virage. Et on demande à la caisse de le prendre !

C'est un acte politique qu'on demande ici et, entre parenthèses, je suis convaincu qu'il y a aussi un marché, du business à faire, dans la production d'énergies renouvelables et de biens, tout en respectant le climat. J'en suis convaincu: la caisse peut investir sans aucun problème dans ces secteurs-là afin de continuer à payer des rentes dans le futur. Je vous invite à voter cette motion. Merci.

Le président. Avant de passer la parole à M. le député Mathias Buschbeck, je vous rappelle que l'écran ne marche pas, mais le temps est bien chronométré; nous voyons ici, sur notre tableau, le décompte. Ne vous fiez donc pas trop à l'écran. Monsieur Buschbeck, la parole est à vous.

M. Mathias Buschbeck (Ve), rapporteur de première minorité. Je vous remercie, Monsieur le président, ça me trouble. Je suis un peu déçu par ce que j'ai entendu de la droite de ce parlement, qui se cache un petit peu derrière des arguties juridiques en se demandant si c'est vraiment à nous de dire à la CPEG ce qu'elle doit faire ! On sait qu'il est d'une importance cruciale pour le climat que la CPEG agisse efficacement en matière de placements. Malheureusement, l'économie pense souvent à court terme - parfois à moyen terme mais jamais à long terme; à mon sens, c'est notre rôle de le faire. Personne n'ira reprocher en 2030 ou en 2040 les placements qu'on aura faits en 2020 ! Les gens diront simplement: ils ne pouvaient pas savoir. C'est à nous de le leur dire; c'est à nous de le leur rappeler. C'est pourquoi je vous appelle vraiment à voter la motion avec l'amendement proposé.

M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Je voudrais faire trois remarques. La première est à l'intention de M. Burgermeister: on ne peut pas voter des textes en disant que ce n'est pas grave s'ils sont contraires au droit puisqu'ils ne sont pas contraignants. Voter des choses auxquelles on ne croit pas rend notre travail totalement futile ! Dans ce cas particulier, on ne peut pas donner des instructions au comité de la caisse et, par voie de conséquence, il ne faut pas en donner. Autrement, si on considère que ce n'est de toute façon pas grave puisque ce n'est pas contraignant, aucune des motions que nous votons n'a d'importance, parce qu'on en fait ce qu'on en veut ! Voilà pour la première remarque.

La deuxième remarque, c'est à M. Velasco et à Mme Marti que j'aimerais l'adresser. Ils font la démonstration d'exactement ce pourquoi la loi fédérale précise qu'il n'appartient pas à l'employeur, au parlement en tant que représentant de l'Etat, de prendre des mesures. Les deux préopinants indiquent qu'il faut donner ces instructions à la caisse pour des raisons financières également; le seul problème, c'est que c'est justement parce que les investissements ont des incidences financières notables que la responsabilité des représentants et de ceux qui siègent au comité est engagée. Je ne sais pas si la population les leur reprochera ou non, mais ce sont eux qui devront en répondre devant les juges civils - et le cas échéant pénaux - s'ils font des investissements qui s'avèrent calamiteux. Ce n'est pas à nous de donner des instructions précisément parce que ce ne sera pas à nous d'en assumer la responsabilité. C'est pour ça qu'on désigne des représentants, qui doivent agir en leur âme et conscience.

Enfin, Monsieur le président, je conclus en disant que les deux amendements sont encore pires que le texte initial, parce qu'ils donnent des instructions non pas - même pas - aux représentants de l'Etat au sein du comité mais au comité lui-même, ce qui est encore plus difficile à comprendre dans le cas d'une motion.

Le président. Je vous remercie. Nous allons commencer par voter sur l'amendement des Verts. Il s'agit de remplacer l'invite initiale par celle-ci: «à inviter le comité de la CPEG à élaborer un plan de désinvestissement des énergies fossiles».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 55 non contre 36 oui.

Mise aux voix, la proposition de motion 2381 est rejetée par 56 non contre 39 oui.

M 2387-A
Rapport de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. François Baertschi, Daniel Sormanni, Pascal Spuhler, Sandro Pistis, Patrick Dimier, Jean-Marie Voumard, Florian Gander, Françoise Sapin, Jean-François Girardet, Thierry Cerutti, André Python, Christian Decorvet, Ronald Zacharias, Danièle Magnin, Christian Flury, Sandra Golay, Henry Rappaz : Secret fiscal en danger : n'employons que des résidents genevois dans les fonctions sensibles !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 13 et 14 décembre 2018.
Rapport de majorité de M. Jean-Marc Guinchard (PDC)
Rapport de première minorité de M. Christian Dandrès (S)
Rapport de deuxième minorité de M. Daniel Sormanni (MCG)

Débat

Le président. Nous passons à la M 2387-A; nous la traiterons en catégorie II, quarante minutes. Le rapporteur de première minorité, M. Christian Dandrès, est remplacé par Mme Xhevrie Osmani. (Un instant s'écoule.) La parole est au rapporteur de majorité, M. Jean-Marc Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, de l'aveu même du premier signataire, cette proposition de motion trouve sa seule raison d'être dans la nomination d'une personne domiciliée de l'autre côté de la frontière en tant que directrice adjointe de l'administration fiscale cantonale. Nous pouvons faire nôtre l'appréciation d'un député membre de la commission: il a estimé que le groupe auquel appartiennent l'auteur et les signataires de ce texte tente une fois de plus d'attiser les braises d'un sentiment anti-frontaliers permanent.

Au fil des débats et sous le feu roulant des questions des commissaires, l'auditionné n'a pas pu démontrer la logique de sa proposition à l'aune des vrais problèmes qui peuvent se poser dans le cadre du traitement de données sensibles. Je pense par exemple au rôle des informaticiens, qui ont eux aussi accès à toutes les données confidentielles de notre Etat, à celui des lanceurs d'alerte éventuels, ou encore à celui des cadres et cadres supérieurs de notre administration.

Force a été de constater que plusieurs décisions du Tribunal fédéral ont clairement privilégié la liberté du choix du domicile par rapport à une obligation de domiciliation, sauf en de rares cas permettant de conclure au fait qu'un intérêt public prépondérant était en jeu. C'est d'ailleurs ce qu'a rappelé hier Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet lors du traitement d'un projet de loi.

Certes, comme l'a rappelé un autre député, la domiciliation de fonctionnaires de l'Etat en France voisine ou dans le canton de Vaud a pour conséquence des pertes fiscales avoisinant 4 millions de francs. Je précise à cet égard que les frontaliers sont soumis à l'impôt à la source, ce qui n'est pas le cas des résidents vaudois. Il sied également de préciser que de nombreuses personnes sont suisses et qu'elles n'arrivent pas à se loger à Genève compte tenu de la rareté et du prix des logements, mais aussi du fait que nous avons exporté notre construction en France voisine. Il faut toutefois constater que la motion ne pourra pas résoudre ce problème et qu'elle ne vise qu'une fonctionnaire de l'administration fiscale cantonale.

Si la majorité des commissaires a refusé d'auditionner d'autres personnes que le premier signataire, c'est qu'il est vite apparu que la motion est inutile, déplacée et de surcroît inapplicable. Au vu de ces explications, la majorité de la commission vous recommande de suivre son avis et de refuser ce texte. Je vous remercie.

Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de première minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, nous avons saisi l'opportunité de ce rapport de minorité pour souligner une question qui n'a que très peu été soulevée lors des débats sur cette motion. Le texte ne s'appuie pas sur un problème mais a été construit sur un fait divers qui s'insère dans une problématique beaucoup plus vaste.

Les auteurs de la proposition de motion pensent mettre le doigt sur une menace qui n'en est pas une. Si la confidentialité des données importantes de l'Etat, notamment fiscales, est une préoccupation pour tous, dire que l'ancienne directrice de l'administration fiscale cantonale menace les intérêts de l'Etat parce qu'elle est frontalière est un leurre. Aucun argument plausible n'a jusqu'alors permis de montrer que le lieu de résidence d'un collaborateur ou d'une collaboratrice compromettrait les intérêts de l'Etat, en l'occurrence son secret fiscal.

Ce qui pour le parti socialiste constitue vraiment un problème dans cette affaire, c'est la pratique du pantouflage, qui s'est progressivement instaurée en Suisse ces dernières années. Qu'une ancienne cadre de l'Etat, qui avait pour mission de prélever l'impôt, rejoigne par la suite le département fiscal d'une étude d'avocats de la place peut raisonnablement représenter une menace. Le fait qu'elle quitte avec armes et bagages l'AFC - je parle là de ses connaissances sur le fonctionnement de l'administration fiscale cantonale et de sa capacité à détecter certaines pratiques de contribuables - pour un cabinet d'avocats chargé de conseiller celles et ceux qui chercheraient à se prémunir contre l'application de la loi est en effet le vrai problème.

Mesdames et Messieurs les députés, ces pratiques professionnelles peuvent porter un préjudice considérable à la société - pratiques qui, je tiens à le souligner, sont poursuivies par le ministère public partout ailleurs en Europe occidentale mais qui à Genève et en Suisse ne suscitent pas plus de réactions que cela. C'est pourquoi nous appelons de nos voeux, à travers ce rapport de minorité, l'instauration d'un délai de carence pour éviter de tels pantouflages. On trouve d'ailleurs un délai de carence dans certains contrats du secteur privé et il figurait également dans une disposition de la loi sur la police annulée par la Cour de justice en 2016. Il est toutefois très vraisemblable - nous en sommes convaincus - que l'intérêt public visé par une loi qui toucherait un collaborateur ou une collaboratrice ayant exercé une fonction de haute direction dans un service aussi sensible que l'administration fiscale cantonale serait suffisamment important pour justifier une modeste limitation à la liberté économique des quelques hauts fonctionnaires concernés.

Au vu de ce qui vient d'être dit, je vous invite à refuser cette proposition de motion. Merci.

M. Daniel Sormanni (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion est pleine de bon sens ! Elle est pleine de bon sens tout simplement parce qu'il est quand même assez curieux de voir comment se passent les choses à Genève. On est très chatouilleux sur le secret fiscal, qui est assez absolu: les députés n'ont évidemment pas accès aux données fiscales. Même les magistrats communaux n'y avaient pas accès jusqu'à ce qu'une modification de la LPFisc, proposée par moi-même, le leur accorde. Il s'agit d'un accès relativement restreint - mais d'un accès néanmoins - pour permettre aux exécutifs communaux d'élaborer leur budget sur des bases solides. Et dans le même temps, on permet à un certain nombre de hauts cadres de l'administration, qui ne sont pas suisses ni domiciliés en Suisse - il ne s'agit pas du personnel «ordinaire», je dirais, et je mets cela entre guillemets - d'avoir accès à des données fiscales essentielles, puisqu'il est en plus question, dans le présent cas, de la directrice générale adjointe de l'administration fiscale. Tout cela, sans aucun contrôle, rend finalement possibles d'éventuelles fuites de données fiscales.

Cette motion ne demande pas grand-chose: simplement que les hauts cadres et tous ceux qui ont accès aux données fiscales - parce qu'ils travaillent dans ce domaine-là et sont au coeur de cette problématique fiscale - résident à Genève de façon à protéger, à maintenir ce secret fiscal absolu que le législateur genevois défend avec une jalousie et une précaution absolues ! Nous avons besoin de protéger les données fiscales alors qu'on fait preuve là d'un certain laxisme.

On a bien vu comment, dans l'économie privée, les données de certaines banques ont pu subitement leur échapper et se retrouver dans l'espace médiatique - même mondial - ce qui a mis en difficulté ces entreprises privées. Je crois donc qu'il est important, au niveau cantonal, de s'assurer, pour chaque personne qui travaille à l'AFC et a accès à ces données, qu'il n'y a pas un risque de fuite quelconque de ces données fiscales, particulièrement à l'étranger. C'est pourquoi nous vous demandons d'accepter cette proposition de motion, évidemment pas dans la version qui a été complètement dénaturée en commission, mais avec l'amendement général proposé à la dernière page du rapport, pour revenir aux invites d'origine que voici:

«- à suspendre immédiatement de son poste stratégique la nouvelle directrice générale adjointe de l'administration fiscale cantonale;

- à rendre obligatoire, dans les meilleurs délais, la domiciliation dans le canton de Genève pour les cadres de l'administration fiscale cantonale et toute personne ayant accès à des données fiscales confidentielles.»

Je vous en remercie.

Le président. Merci. Je passe la parole à M. le député Christo Ivanov. (Un instant s'écoule.) Monsieur Ivanov ?

M. Christo Ivanov (UDC). Merci, Monsieur le président. Cette motion pose un vrai problème, celui de données fort sensibles pour notre république, qui concerne quelque part chacun et chacune d'entre nous. Si le groupe UDC s'est abstenu en commission, il est pour nous évident que les hauts cadres, que ce soient ceux de l'AFC ou d'ailleurs, mais également les collaborateurs des services informatiques, doivent être domiciliés dans notre canton et non hors du canton, pour des raisons bien évidentes de confidentialité et de sécurité.

Nous ne sommes pas à l'abri de fuites des données fiscales - il y en a déjà eu dans le secteur privé et l'Etat n'est pas à l'abri. Il y a aussi les problématiques liées aux donneurs d'alerte: dans certains cas, des données sensibles sont prélevées par disquette et transmises soit à des Etats soit à des tiers. Pour toutes ces raisons, le groupe UDC vous demande d'accepter cette motion. Merci, Monsieur le président.

M. François Baertschi (MCG). Le secret fiscal devrait être sacré ! C'est quand même une chose tout à fait intime, une chose importante. Je pense qu'il y a une dérive de notre société, de manière générale, puisque des gens venant de tous les milieux, venant d'une certaine droite dévoyée, apparemment pris par un esprit de décadence et de facilité - à gauche et à droite également - ne veulent plus du tout défendre cette protection du contribuable, cette protection du secret fiscal. Elle est pourtant importante et fait aussi partie des droits humains, des droits du citoyen. Ces données sensibles doivent impérativement être protégées; c'est le but de cette motion.

Je suis très surpris de voir que mes propos ont été complètement déformés dans le rapport de majorité. C'est de bonne guerre: on interprète, on reprend les choses en disant blanc alors qu'on avait indiqué noir. Ce n'est pas très sérieux, mais ça peut se faire - admettons, c'est le jeu politique. Il n'en reste pas moins qu'il y a une question fondamentale: comment faisons-nous pour protéger le contribuable ? Et on n'y a pas répondu, ou on y a répondu en ne faisant aucune audition, en choisissant la facilité. Je trouve le procédé détestable, à l'image d'une certaine manière de faire de la politique ! Excusez-moi, je ne participe pas à cela !

M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, pour Ensemble à Gauche, cette proposition de motion doit être rejetée sans aucune hésitation. Pour Ensemble à Gauche, il est assez clair que le MCG a fait du discours anti-frontaliers son fonds de commerce - il en donne encore un exemple ici - et ça devient un peu lassant. Je crois que le rapporteur de majorité a eu raison de l'évoquer et de souligner le fait qu'il n'y avait pas de raisons d'auditionner d'autres personnes.

Ce cirque habituel du MCG - au lieu de cirque, je devrais plutôt parler de cinéma - ce discours totalement gratuit est fatigant. C'est peut-être ce qui a incité M. Jean-Marc Guinchard à écrire que M. Bertrand Tavernier a assisté à l'audition, mais c'est bien M. Grégoire Tavernier qui était présent et non Bertrand, encore que ça l'aurait peut-être amusé - c'est une anecdote, pour en rire un peu. Bref, le texte pose quand même un sérieux problème... (Remarque.) C'est juste pour montrer que j'ai lu le rapport et qu'il est très bien fait; merci à M. Guinchard.

Une voix. Bravo !

M. Olivier Baud. S'attaquer... rédiger une motion pour essayer de virer une personne - une seule personne - est franchement déloyal ! C'est inacceptable ! Nous ne devrions pas entrer en matière, qui que soit cette personne ! Une fonctionnaire désignée dans une motion, dans laquelle on demande de la suspendre de son poste, mais on n'a jamais vu ça ! Nous ne devrions pas du tout entrer en matière !

Le MCG a beau jeu de dire que c'est pour protéger, etc., mais qu'est-ce qu'il fait ? Il attaque les fonctionnaires ! Ou alors, je ne sais pas, on demande que cette personne parte parce qu'on la soupçonne a priori d'être déloyale et de livrer des informations à l'étranger ? Je ne sais pas; ou on soupçonne notre pays voisin, la France, d'être capable de kidnapper cette personne et de la soumettre à la torture pour lui soutirer des informations ? Tout ça n'est vraiment pas très sérieux, Mesdames et Messieurs les députés, il convient donc de refuser résolument cet objet. Merci.

M. Adrien Genecand (PLR). Mon préopinant vient de l'évoquer: le problème initial de cette motion, c'est qu'on ne peut pas faire d'un texte parlementaire un instrument qui vise personnellement quelqu'un. Malgré cela, au-delà de la capacité de ce Grand Conseil à légiférer là-dessus, je pense qu'on peut légitimement se poser la question suivante: est-ce qu'on envisage Bercy, à Paris, dirigé par quelqu'un qui habiterait Genève ? La réalité, c'est que, dans l'immense majorité des pays, l'administration fiscale n'est pas dirigée par une personne domiciliée dans un autre pays. C'est aussi simple que ça.

Sans faire référence à un cas particulier - ça n'a rien à voir avec les compétences des personnes concernées - il se trouve que l'administration fiscale cantonale gère les données les plus sensibles et les plus protégées. Et je n'apprendrai à personne que parmi les grandes menaces suivies par l'administration fédérale de notre pays figurent évidemment les cyberattaques et les menaces dans le domaine informatique. Le fait de passer la frontière rend la chose encore plus sensible, mais en dehors des cas personnels, parce qu'on ne peut pas légiférer sur cet aspect-là.

La rapporteure de minorité socialiste a fait référence au pantouflage, en France, et au départ des fonctionnaires français vers le privé. Il faut se rendre compte que, dans l'immense majorité, les Français qui occupent les hauts postes de l'administration y arrivent après avoir fait l'Ecole nationale d'administration. Ils ont en général un poste de fonctionnaire à vie et peuvent être nommés à des hauts postes un peu partout dans le pays; quand ils partent à l'étranger, c'est en principe pour des postes liés aux Affaires étrangères. Les règles sont donc complètement différentes, puisque nous sommes ici dans un système de milice qui permet évidemment aux gens qui travaillent dans l'administration d'en partir pour le privé. C'est l'essence même de l'économie de ce pays, qui n'est pas tournée vers l'administration - heureusement pour nous ! A l'inverse, les gens qui décideraient de quitter le privé pour travailler à l'Etat apportent leurs compétences, et c'est tant mieux !

Les commissaires PLR ont amendé le texte, d'abord pour supprimer la mention de la personne qui était visée et d'autre part - ça nous semble couler de source - pour dire plus généralement que la question relève de la gestion au quotidien, qui incombe à l'exécutif. Les salaires de notre administration sont parmi les plus élevés du pays, probablement d'Europe et encore plus vraisemblablement de la planète, pour une bonne raison: le coût de la vie est élevé. C'est parce que le coût de la vie est élevé que les salaires sont plus élevés; dans ce cas - quand des salaires plus élevés sont versés - on ne peut pas, et a fortiori lorsqu'on est fonctionnaire de l'Etat, arbitrer son propre Etat, qui paie des salaires plus élevés, tout en bénéficiant de conditions économiques plus favorables dans un environnement où le loyer et le reste sont plus bas ! C'est du bon sens tout simple. C'est pourquoi nous étions très empruntés, au sein du groupe PLR, quant à cette proposition de motion: nous estimons que ce n'est pas à nous de légiférer. Il s'agit d'une question de management pur et dur, que le gouvernement aurait dû régler depuis bien longtemps.

Quand on engage des hauts cadres, on engage évidemment des compétences. On peut toutefois légitimement attendre de l'exécutif, quand il recrute des hauts cadres, qu'il fasse comprendre aux gens qu'on serait certes très heureux de les accueillir pour leurs compétences, mais qu'il y a une contrepartie: si le salaire est plus élevé que celui qu'ils pourraient percevoir dans un autre canton, à compétences et à poste égaux, la domiciliation à Genève est nécessaire. C'est une forme de logique assez évidente que de payer les impôts à l'Etat qui nous paie un peu plus cher parce que le coût de la vie est plus élevé sur son territoire. Je vous remercie.

M. Alberto Velasco (S). J'aimerais juste rappeler à M. Genecand que M. Necker a été ministre des finances sous Louis XVI, et il était genevois ! Et donc... (Commentaires.) Je poursuis, je poursuis. Monsieur le président, cette motion pose effectivement un certain nombre de problèmes et, pour nous, l'un d'entre eux est... (Commentaires.)

Des voix. Chut !

M. Alberto Velasco. Je n'aurais pas dû parler de Necker, Monsieur le président: j'ai lancé un débat d'enfer ! Un des problèmes que soulève cet objet, c'est que la haute cadre était justement la cheffe du service fiscal. Est-ce qu'il ne faudrait pas un délai de carence pour les hauts fonctionnaires qui vont travailler dans le privé alors qu'ils ont eu connaissance de dossiers extrêmement sensibles au sein de l'administration ? C'est là qu'il y a un problème !

La question de la domiciliation pourrait se poser - pas pour des raisons financières; peut-être parce qu'un haut cadre doit être près des citoyens auxquels il est amené à offrir des prestations et doit comprendre le milieu où il se trouve. Nous insistons quant à nous sur l'opportunité éventuelle de prévoir dans leur contrat un délai de carence, par exemple de deux ans, quand les cadres quittent l'administration alors qu'ils ont rempli des fonctions liées à des dossiers extrêmement sensibles, notamment en matière fiscale. Pour le reste, nous nous rallierons à la position de notre représentante à la table des rapporteurs et nous refuserons cette motion. Merci.

Mme Frédérique Perler (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, il ressort des travaux de commission que cette proposition de motion pose différents problèmes; la rapporteuse de première minorité l'a bien souligné. On voulait demander à une haute cadre de l'administration de s'en aller pour des raisons de connaissance de données sensibles et on est passé à un autre objectif, de nature fiscale: cette motion propose d'exiger que, pour être engagés, les cadres soient domiciliés à Genève.

Je ne vais pas m'étaler, au nom du groupe des Verts, sur la question, mais simplement rappeler qu'il y a effectivement un accès direct, clair et évident à ces données sensibles quand on est à la direction de l'administration fiscale. Mais on pourrait également rappeler qu'il y a des nettoyeurs qui viennent dans les locaux de l'administration, qu'on peut imaginer que les agents de sécurité puissent aussi pirater des données informatiques - on peut aller très loin sur cette question.

Le rapporteur de majorité et les interventions de la première minorité ont bien rappelé qu'à travers cet objet se dessine vraiment un sentiment anti-frontaliers permanent. A l'arrivée des courses, si je puis m'exprimer ainsi, il s'agit d'exiger une chose qui n'est pas exigible et la conseillère d'Etat, Mme Fontanet, nous l'a encore rappelé hier: il existe une liberté de circulation des personnes et d'être engagé, et l'administration choisit en fonction de cela. Nous vous invitons donc, comme la rapporteuse de minorité socialiste, à rejeter fermement cette motion. Je vous remercie.

M. Patrick Dimier (MCG). Je veux remercier le député Genecand - vous transmettrez, Monsieur le président: je crois qu'il a parfaitement résumé l'essence de cette motion. Nous devons réexaminer cet objet à la lumière de ses remarques - il mérite véritablement d'être revu à l'aune des remarques du député Genecand.

Avant de demander le renvoi en commission de la proposition de motion, je pose une question: quelle est la pertinence de garder des hautes écoles à Genève puisqu'on n'est pas capable de former des gens qui peuvent servir notre administration et qu'on est obligé d'aller chercher du personnel compétent à l'extérieur ? Soit on forme des gens compétents, on en est content, on en est fier et on les engage, soit on ferme les écoles et on engage de l'autre côté de la frontière cantonale !

Une voix. Bravo !

M. Daniel Sormanni (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Je voudrais faire deux ou trois remarques. Pour répondre à M. Velasco, je constate que ça n'a pas tellement rendu service à Louis XVI - il en a d'ailleurs perdu la tête. Je pense par conséquent qu'il aurait été mieux avisé de faire autrement.

C'est vrai que la problématique évoquée par M. Genecand est assez juste, dans le sens où il faudrait qu'on engage à Genève, que ces personnes y soient pour le moins domiciliées. Il serait effectivement assez logique qu'elles paient des impôts dans le canton puisqu'elles sont rémunérées par le canton.

Il est vrai que nous n'étions pas d'accord avec l'un des amendements votés en commission. Cela dit, si le texte y avait finalement été accepté avec l'amendement pour que les hauts cadres soient domiciliés dans le canton, notre groupe aurait pu se demander aujourd'hui s'il allait accepter cette motion ainsi modifiée. Or elle a malheureusement été dénaturée en commission et puis, malgré tout, refusée ! C'est pourquoi nous vous invitons tout de même à voter la motion originelle: elle garde tout son sens, notamment par rapport à la question du secret fiscal.

Le président. Je vous remercie. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission ad hoc, mais avant le vote, je passe la parole aux autres rapporteurs s'ils veulent se prononcer là-dessus. Monsieur Guinchard ?

M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président, je m'exprimerai uniquement sur le renvoi en commission. Je pense que le travail au sein de la commission a été fait: nous avons auditionné le principal auteur. Ce qui dérangeait les commissaires, c'est que cette motion instituait une sanction rétroactive, ce qui n'est pas conforme à l'Etat de droit. Si M. Genecand a certainement raison sur plusieurs aspects de son raisonnement, il revient alors au gouvernement de prendre un certain nombre de dispositions et d'émettre des règles, qui seront applicables à l'avenir mais non pas de façon rétroactive. C'est pourquoi je vous recommande de rejeter la demande de renvoi en commission.

Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de première minorité ad interim. Je ne vais pas faire long: je rejoins les propos du rapporteur de majorité et invite les groupes à refuser le renvoi en commission. Merci.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Je ne vais évidemment me prononcer que sur le renvoi. C'est un texte qui vise directement une collaboratrice de l'Etat, sur qui j'aurai des éléments à vous communiquer. Il est contraire au droit supérieur. Je vous invite à refuser le renvoi afin que nous puissions voter maintenant et refuser cette proposition de motion. Merci.

Le président. Merci. Nous passons au vote sur le renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2387 à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat est rejeté par 76 non contre 9 oui.

Le président. Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet souhaitant s'exprimer, je lui repasse la parole.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous trouvons face à une proposition de motion qui figure à l'ordre du jour depuis plusieurs années et dont les invites sont à la limite de l'acceptable: elles visent directement une collaboratrice de l'Etat. Cela surprend et est difficile à vivre pour la collaboratrice en question, d'autant plus qu'elle est identifiable ! Cette motion a aussi entraîné des débats qui visaient d'autres directeurs ou ex-directeurs, une ex-directrice générale adjointe de l'Etat; cela non plus, Mesdames et Messieurs, ce n'est pas acceptable.

J'aimerais revenir sur deux éléments. Tout d'abord, l'ensemble des collaboratrices et collaborateurs occupés à l'administration fiscale sont soumis au secret fiscal. Ils prêtent également serment ! Ils prêtent le serment relatif au secret fiscal devant le Conseil d'Etat ! Si seule la domiciliation était susceptible d'empêcher qu'un collaborateur - ou qu'une collaboratrice - peu scrupuleux viole à un moment donné le secret fiscal, l'ensemble des pays et des cantons aurait effectivement choisi ce type de mesure. Il est par ailleurs important que je vous précise que la directrice générale adjointe de l'administration fiscale est domiciliée dans notre canton depuis un peu plus d'une année et que cette motion est de fait totalement dépassée.

S'agissant du départ d'une ex-haute fonctionnaire pour le privé, Mesdames et Messieurs, j'ai déjà eu l'occasion de vous dire au moment du débat sur les comptes que le Conseil d'Etat regrette évidemment de perdre des compétences. Il se réjouit néanmoins que ces compétences et le travail accompli au sein de l'administration fiscale soient reconnus - que l'éthique, la rigueur et l'égalité de traitement soient des valeurs transmises ensuite dans le privé ! Nous nous réjouissons de savoir qu'une étude qui a certainement des clients fiscaux importants compte maintenant en son sein une ancienne collaboratrice à l'éthique irréprochable !

Mesdames et Messieurs, je crois que nous avons mieux à faire que de viser directement des collaborateurs de l'Etat, respectivement des ex-collaborateurs de l'Etat, dans le cadre des travaux parlementaires. Je vous invite donc à refuser ce texte, qui est par ailleurs, et je l'ai déjà indiqué hier, totalement contraire au droit supérieur. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Le président. Merci. Mesdames et Messieurs, je vous invite à vous exprimer sur cette proposition de motion.

Mise aux voix, la proposition de motion 2387 est rejetée par 79 non contre 17 oui.

M 2403-A
Rapport de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Alexandre de Senarclens, Cyril Aellen, Patrick Saudan, Nathalie Fontanet, Yvan Zweifel, Céline Zuber-Roy, Jacques Béné, Murat Julian Alder, Beatriz de Candolle, Simone de Montmollin, Pierre Conne, Charles Selleger, Bénédicte Montant, Raymond Wicky : Rénovons l'administration ! (Vol. 1 - Une gestion des ressources humaines basée sur la confiance)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 28 février et 1er mars 2019.
Rapport de majorité de M. Christian Dandrès (S)
Rapport de première minorité de M. Christo Ivanov (UDC)
Rapport de deuxième minorité de M. Serge Hiltpold (PLR)

Débat

Le président. L'ordre du jour appelle la M 2403-A: nous la traiterons en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité est de M. Christian Dandrès, remplacé par Mme Xhevrie Osmani, le rapport de première minorité de M. Christo Ivanov et le rapport de deuxième minorité de M. Serge Hiltpold, remplacé par M. Alexandre de Senarclens. (Un instant s'écoule. Remarque.) M. Dandrès sera en fait remplacé par M. Alberto Velasco, à qui je passerai la parole dès qu'il la demandera.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Tout d'abord, je veux dire que cette motion est tombée dans une ambiance assez électrique à la commission ad hoc: peut-être les travaux ne se sont-ils pas déroulés dans la tranquillité nécessaire, disons. Le texte soulève par contre des questions intéressantes, à savoir si toute une série de procédures administratives se justifient, etc.

Voyez-vous, chers collègues, j'ai été très intéressé, lors des auditions - et même plus qu'intéressé: j'ai été influencé positivement - par l'exposé du directeur RH sur la politique des ressources humaines dans l'administration cantonale. C'était exemplaire ! Le document était exemplaire ! La réaction que j'ai eue, puisque à l'époque je présidais la commission, a été de dire: Monsieur le directeur général - M. Tavernier, pour ne pas le citer - pourquoi tout ce qui est dit et écrit n'est pas appliqué ? Parce que si tout ce qui est dit et écrit s'appliquait, on aurait des RH exemplaires ! Indiscutablement ! Et je crois que l'une des choses fondamentales à se demander, c'est pourquoi l'administration possède un projet RH exemplaire mais ne le met pas en application pour résoudre les problèmes. C'est une question que je me pose et c'est ce qui a jeté un certain doute.

Pour le reste, Mesdames et Messieurs, il faut aussi comprendre qu'il y a des procédures administratives nécessaires, qui obligent à une certaine transparence et à un certain fonctionnement, et peut-être d'autres qui ne le sont pas, mais qu'on ne peut pas faire table rase, disons, de ce mode de fonctionnement. Surtout, je pense qu'on ne peut pas comparer l'administration publique et ses procédures au privé, qui pour certaines raisons - son intérêt est de produire un capital, de faire du bénéfice, etc. - est soumis à d'autres contraintes. Les contraintes ne sont pas les mêmes et il n'est par conséquent pas possible d'établir une comparaison.

Il faut faire très attention: il peut parfois y avoir des dérapages parce qu'il n'y a justement pas de procédure et que le fonctionnement est opaque. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons, à l'époque, refusé cet objet, non sans être convaincus que le débat était pertinent et intéressant. Voilà, Mesdames et Messieurs, la position du parti socialiste et de son rapporteur de majorité.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. Les invites de cette proposition de motion visent à demander au Conseil d'Etat d'élaborer une véritable politique de ressources humaines basée sur la confiance et la responsabilité, avec des objectifs et des résultats. Il est regrettable de constater que c'est toujours la même rengaine lorsqu'un groupe dépose un texte sur la fonction publique. D'un côté, il y a une nouvelle remise en question de la fonction publique, que ce soit au niveau de son organisation, des conditions de travail du personnel mais aussi des prestations. De l'autre, moins de bureaucratie est souhaitable pour une administration plus efficace, au service des citoyennes et des citoyens de notre canton - il y a une explosion des directives et davantage de complexifications ces dernières années. C'est pour ces raisons que la minorité de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat vous demande d'accepter cette motion.

M. Alexandre de Senarclens (PLR), rapporteur de deuxième minorité ad interim. Ce texte est une proposition de motion, pas un projet de loi: il ne vise pas à modifier la LPAC, la loi générale relative au personnel de l'Etat. Nous ne remettons pas en cause le statut du fonctionnaire - nous ne touchons à aucun acquis et à aucune prestation auxquels le fonctionnaire a droit. L'objectif est de donner un signal fort à l'exécutif, une impulsion politique, de lui apporter l'appui du Grand Conseil afin d'améliorer les ressources humaines, pour le bien du fonctionnaire - pour valoriser celui-ci.

La démarche procède du constat qu'il y a trop de directives au sein de l'Etat - certainement aussi dans le privé, mais il est ici question de l'Etat - et qu'il faut réduire le poids des tâches administratives. Le fonctionnaire se trouve bien souvent asphyxié par un système qui n'exploite pas complètement son potentiel et ne reconnaît pas la valeur du travail accompli, ce qui, au bout du compte, fait baisser sa motivation. L'objectif de la motion est donc de sortir de ce cercle vicieux et d'obtenir de l'Etat qu'il élabore une véritable politique de gestion des ressources humaines basée sur la confiance et la responsabilité, avec des objectifs assignés et des résultats.

Tous les auditionnés ont été favorables à cette motion. Nous avons en particulier entendu quelqu'un que je ne qualifierais pas de zélateur infatigable du néolibéralisme ou de démanteleur de l'Etat social: M. Christian Brunier, ancien président du parti socialiste et actuel directeur général des SIG, qui était favorable à cet objet. Nous avons également entendu deux anciens juges de la Cour des comptes, un socialiste et un Vert, qui nous ont dit tout le bien qu'ils pensaient du texte. C'est pourquoi je vous invite à soutenir cette motion. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Cyril Aellen (PLR). Que demande cette proposition de motion ? Elle demande d'abord, dans sa première invite, une véritable politique de gestion des ressources humaines. Elle demande que celle-ci soit basée sur le principe de la confiance envers les collaborateurs et la responsabilité ainsi que sur les objectifs et les résultats. La deuxième invite demande que cette politique-là soit mise en oeuvre et que ce soit une priorité.

La troisième invite demande de prendre des mesures - lesquelles ? Elle demande, dans l'optique de répondre aux invites précédentes, de «réduire le poids des tâches administratives dans le temps de travail des fonctionnaires, à tous les niveaux, par la suppression des rapports, formulaires et autres procès-verbaux à vocation strictement interne et sans impact sur les prestations à la population». Et puis elle invite aussi à charger le collège des secrétaires généraux d'établir, d'ici la fin de la législature - mais ça peut être pour la suivante puisqu'on l'a déjà dépassée; il a fallu deux ans à M. Dandrès pour déposer son rapport ! - un «plan d'action visant à la suppression de toutes les directives non indispensables à l'accomplissement des missions essentielles de l'Etat», des directives qui ne sont pas dans l'intérêt de la population.

Mesdames et Messieurs, soyons simples ! Si vous voulez une véritable politique des ressources humaines, il faut voter cette motion. Si vous voulez qu'elle soit fondée sur la confiance envers les collaborateurs, il faut voter cette motion. Si vous ne pensez pas qu'il faut faire confiance aux collaborateurs, il ne faut pas la voter. Si vous pensez que ceux-ci sont responsables dans l'exécution de leur travail, il faut voter la motion. Si vous pensez que le principe de responsabilité n'est pas un principe important, il ne faut pas la voter.

Si vous pensez qu'une politique des ressources humaines doit être mise en oeuvre, il faut voter la motion. Si vous pensez que ce n'est pas nécessaire, il ne faut pas la voter. Si vous pensez que les tâches administratives inutiles doivent continuer, il ne faut pas voter cette motion. Si vous pensez au contraire qu'on doit les diminuer, il faut la voter. Si vous pensez que les formulaires et autres procès-verbaux internes qui ne servent à rien doivent être maintenus, il ne faut pas voter cette motion. En revanche, si ceux-ci peuvent être supprimés, il faut la voter. Si vous pensez que le collège des secrétaires généraux est habilité à mettre en oeuvre cette politique de ressources humaines, il faut voter la motion. Si vous pensez qu'ils en sont incapables, il ne faut pas la voter. Et si les directives non indispensables à l'accomplissement des missions essentielles de l'Etat doivent être maintenues, il ne faut pas voter cette motion. Mais si vous pensez au contraire que ces directives inutiles doivent être supprimées, il faut voter cette motion. Merci, Mesdames et Messieurs.

Mme Frédérique Perler (Ve). Le rapporteur de majorité l'a rappelé, l'étude de ce texte s'est faite dans une ambiance plus qu'électrique - pour ne pas dire délétère - et dans un climat de méfiance mutuelle. Elle s'est aussi faite au cours de l'ancienne législature; nous sommes aujourd'hui dans une nouvelle législature et les projets du Conseil d'Etat actuel sont sans doute différents de ceux du précédent gouvernement.

Le rapporteur de majorité l'a souligné, cette motion soulève des questions intéressantes. Sur le fond, sur les constats, on ne peut qu'être d'accord ! Personne ne prétend que l'administration publique fonctionne au mieux et qu'il n'y a surtout rien à changer ! Mais c'est sur la manière d'agir que les groupes politiques n'ont pas réussi à se mettre d'accord. Celles et ceux qui ont lu le rapport ont très clairement pu voir, à différents endroits, le reflet des échanges qu'il y a eu en commission.

Mais si on souhaite maintenant avoir un débat constructif, il faut savoir ce que le Conseil d'Etat veut mettre en oeuvre - ou a déjà commencé à mettre en oeuvre - concernant les ressources humaines; ça vaut pour le texte suivant également. Le groupe des Verts demande donc un retour en commission afin d'entendre la magistrate sur ces projets. J'espère que vous accepterez le renvoi à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat pour que nous puissions travailler dans une ambiance un petit peu plus constructive. Je vous remercie.

Le président. Merci. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission; je passe la parole aux rapporteurs. Monsieur Velasco ? Mais uniquement sur le renvoi !

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité ad interim. Oui, oui, mais je peux quand même parler quelques secondes, Monsieur le président ! Quand même ! Je voudrais dire que l'intervention de M. Cyril Aellen sur la question était un peu manichéenne: oui, non, oui, non - les choses ne se limitent pas à oui ou non ! Deuxièmement, je voudrais dire que le groupe PLR n'a à aucun moment présenté les directives et les tâches inutiles. Nous n'avons jamais eu, Monsieur Cyril Aellen...

Le président. Monsieur Velasco, je vous rappelle que vous ne vous exprimez que sur la demande de renvoi en commission ! Je vous prie de parler de ça !

M. Alberto Velasco. J'y viens, Monsieur le président ! J'y viens ! Vous allez être heureux, vous verrez ! Pour avoir ce catalogue des éléments inutiles-utiles, nous serions d'accord, les socialistes, d'accepter le renvoi.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. Vu ce qui a été dit par mes préopinantes et préopinants, il convient effectivement de renvoyer cette proposition de motion à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat.

M. Alexandre de Senarclens (PLR), rapporteur de deuxième minorité ad interim. Je comprends qu'il y a, en particulier au sein du groupe des Verts, la volonté de sortir d'une certaine posture politique, d'un certain conservatisme. Je suis satisfait de l'entendre et voterai donc pour le renvoi en commission.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Comme l'a relevé la députée Verte, je n'ai pas eu l'occasion d'être entendue sur cet objet, qui date d'avant mon élection. J'apprécierais beaucoup de l'être, ce d'autant plus que la politique des ressources humaines fait partie des priorités du programme de législature du Conseil d'Etat et que les collaboratrices et collaborateurs sont également demandeurs à cet égard. Je serais donc très heureuse d'être entendue par la commission sur le programme de l'exécutif et sur sa réaction quant à cette proposition de motion. Je vous encourage par conséquent à accepter le renvoi. Merci.

Le président. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote sur la demande de renvoi à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2403 à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat est adopté par 75 oui contre 18 non.

M 2445-A
Rapport de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat chargée d'étudier la proposition de motion de Mme et MM. Alexandre de Senarclens, Cyril Aellen, Patrick Saudan, Pierre Conne, Edouard Cuendet, Murat Julian Alder, Céline Zuber-Roy, Yvan Zweifel, Michel Ducret, Gabriel Barrillier, Raymond Wicky, Alexis Barbey, Pascal Uehlinger : Rénovons l'administration ! (Vol. II - Une mobilité interne efficiente au sein de l'Etat et de ses institutions)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VIII des 24, 25 et 31 janvier 2019.
Rapport de majorité de M. Christo Ivanov (UDC)
Rapport de minorité de M. Christian Dandrès (S)

Débat

Le président. Nous abordons maintenant la M 2445-A, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité est de M. Christo Ivanov et le rapport de minorité de M. Christian Dandrès, remplacé par Mme Xhevrie Osmani. Je passe la parole à M. Christo Ivanov.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Cette proposition de motion demande une meilleure efficience au sein de l'Etat et de ses services, avec une plus grande transversalité. Il conviendrait en effet de diminuer autant que possible le travail en silos pour travailler de manière plus transversale. Dans les considérants sont mentionnées la diversité des postes, des métiers et des compétences au sein de l'Etat; l'évolution constante des métiers, qui demande une grande flexibilité et une adaptation des formations et des postes de l'administration; ou encore l'inquiétude de certains employés, qui se sentent dépossédés de leur métier en raison de ses évolutions. Le Conseil d'Etat est donc invité notamment:

«- à favoriser les aspirations des collaborateurs de l'Etat en leur proposant de réelles perspectives d'évolution au sein de l'administration;

- à préparer, en lien avec l'office du personnel de l'Etat, une transversalité en matière de ressources humaines de manière à favoriser effectivement la mobilité interne; [...]»

Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat vous demande d'accepter cette motion.

Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de minorité ad interim. Durant les travaux de commission, la minorité qui s'est dégagée a tenté tant bien que mal de trouver des solutions pour se rallier à cette motion en l'amendant. Pourquoi ? Parce que la mobilité interne du personnel de l'Etat est un réel problème, et qui date. Il y a une grande diversité de métiers au sein de l'administration, ce qui fait que les fonctionnaires seront très enclins à vouloir changer de poste au cours de leur carrière.

Cela fait aussi un bon moment que l'absence de plans de mobilité et de formation crée des difficultés pour les fonctionnaires dans leur pratique professionnelle. Leur motivation et leur épanouissement professionnels peuvent se trouver fortement influencés par les possibilités d'évolution et de changement de fonction. Or, on constate malheureusement depuis des années des difficultés à impulser de réels changements dans les pratiques de gestion des ressources humaines, couplées en outre à des mesures d'austérité répétées. Je ne vous apprends rien: le dernier budget en témoigne.

Nous nous sommes aussi vite rendus à l'évidence: les voeux pieux formulés par cette proposition de motion se heurtent à des problèmes d'organisation et de ressources. La mobilité est en effet plus facile pour les salariés dont les services souhaitent se débarrasser tandis qu'ils refusent de voir s'en aller leurs meilleurs éléments. C'est une première barrière témoignant de la difficulté à favoriser la mobilité d'un fonctionnaire efficace, dont le départ amputerait le service d'une ressource essentielle à son bon fonctionnement.

Le problème des ressources n'est jamais très loin: le système de comptabilité budgétaire représente un deuxième obstacle. Nous savons très bien que perdre un salarié, c'est perdre le poste qui va avec. Pour reprendre les mots du rapport, à l'Etat de Genève, le budget suit le fonctionnaire comme la fortune suit l'assuré en matière de prévoyance professionnelle.

En plus de ces obstacles, certaines craintes demeurent, auxquelles nous avons tenté de répondre en déposant des amendements - amendements qui ont été refusés. L'impulsion que souhaite donner cette proposition de motion semble assez unilatérale: elle ne repose pas sur une démarche volontaire. La mobilité demande pourtant l'adhésion des collaborateurs et collaboratrices pour qu'on soit sûr qu'elle soit consentie par les deux parties et non ressentie comme une sorte de flexibilité imposée, ce qui paraît fortement être le but de cette motion. C'est pour toutes ces raisons que je vous invite à refuser l'objet.

Mme Frédérique Perler (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, nous abordons là le volume II du texte «Rénovons l'administration !», dont nous avons à l'instant traité et renvoyé en commission la première partie. La thématique du volume I - la gestion des ressources humaines basée sur la confiance - et celle du présent objet, c'est-à-dire une mobilité efficiente au sein de l'Etat, se rejoignent.

En commission, nous n'avons effectivement pas pu... Nous nous sommes rejoints sur les constats - tous les groupes. Mais, politiquement, nous avons raté l'opportunité d'amorcer une réforme pourtant nécessaire: nous n'avons visiblement pas réussi à communiquer sur cette thématique et à travailler en bonne intelligence, notamment s'agissant des amendements proposés par les Verts et maintenant par la minorité.

J'ajoute à cela que c'était l'ancienne législature, que nous avons aujourd'hui un nouvel exécutif; comme vous l'a dit à l'instant Mme Fontanet, conseillère d'Etat, c'est elle qui est désormais responsable des ressources humaines. Peut-être souhaiterait-elle également être entendue sur ce volet-là. Aussi, Monsieur le président, je demande le renvoi de cet objet à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat. Je vous remercie.

Le président. Merci bien. Je passe donc la parole aux rapporteurs sur cette demande de renvoi. Monsieur Christo Ivanov, c'est à vous.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. La commission a siégé huit à neuf fois entre 2017 et 2018: tout a été abordé. La minorité a déposé un certain nombre d'amendements et tous ont été refusés. Par conséquent, on ne va pas refaire une énième fois le débat en commission; il convient de refuser le renvoi.

Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de minorité ad interim. Nous accepterons, à défaut, de renvoyer le texte en commission et nous maintiendrons les amendements que nous avons déposés.

Le président. Merci. Nous passons au vote sur cette demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2445 à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat est adopté par 64 oui contre 12 non et 2 abstentions.

Le président. Je vous propose que nous nous retrouvions à 18h05; je lève la séance pour une petite pause. Merci !

La séance est levée à 17h45.