République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 1 novembre 2019 à 16h15
2e législature - 2e année - 6e session - 30e séance
PL 12425-A
Premier débat
Le président. Nous commençons nos urgences avec le PL 12425-A, que nous traitons en catégorie II, quarante minutes. Je passe tout de suite la parole à M. Sylvain Thévoz, rapporteur de majorité.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, la majorité vous enjoint d'accepter ce projet de loi, qui a été étudié durant cinq séances de commission. Il a pour objectif de contenir les coûts de la santé et d'introduire une clause du besoin afin de limiter l'achat d'équipements médico-techniques lourds. Je rappelle que la plupart des cantons romands disposent déjà d'une loi similaire. On attendait de voir si le secteur allait pouvoir en quelque sorte s'autoréguler, mais il se trouve que ce n'est pas le cas à Genève: on constate plutôt un crescendo constant dans l'acquisition d'équipements lourds, que ce soit dans le secteur public ou privé. Il est donc important d'agir, car il n'est plus acceptable que les coûts de la santé continuent d'augmenter et qu'une forme de course aux équipements médicaux, comme le disait le magistrat Mauro Poggia, se poursuive.
Ce projet de loi propose d'ajouter une compétence au Conseil d'Etat qui lui permettra de limiter les équipements lourds, le but étant une meilleure maîtrise des coûts et surtout une prise en charge de qualité. Le texte prévoit une disposition transitoire - c'est important - qui stipule, après évaluation, qu'au 31 décembre 2018 les besoins de la population genevoise en matière d'équipements lourds sont suffisamment couverts. Tout matériel acheté entre le 1er janvier 2019 et l'entrée en vigueur de la loi sera ainsi du surnuméraire présumé au regard de la couverture des besoins, et son renouvellement automatique ne sera pas autorisé. Il faut savoir qu'une jurisprudence au niveau fédéral a validé la possibilité de limiter les outils diagnostiques entraînant des coûts importants. Il y a donc d'une certaine manière une proportionnalité d'objectifs des dispositions cantonales par rapport à la liberté qui serait celle d'acquérir quantité de matériel.
Ce projet de loi est certes succinct, mais il permet de limiter l'achat de ces équipements médico-techniques lourds. Une minorité a souhaité introduire dans le texte une série de précisions qui n'étaient pas nécessaires aux yeux de la majorité, laquelle suggérait, comme l'avait fait le Conseil d'Etat, qu'elles soient fixées par voie réglementaire. Au final, une seule proposition a été votée, celle de créer une commission de consultation. Avec ce consensus, le projet a été adapté dans la direction de ce que voulait la minorité.
Mesdames et Messieurs, il s'agit là aussi de protéger la population des risques de surexposition à des rayons ionisants en raison d'un trop grand usage de ce matériel. Il ne s'agit aucunement de limiter la liberté d'entreprendre, mais clairement de pouvoir mieux contrôler l'utilisation et l'implantation à Genève d'outils qui ne sont pas nécessaires, sachant que notre canton est l'un des mieux dotés en équipements lourds. Pour toutes ces raisons, la majorité vous recommande de voter ce projet de loi. Merci.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de minorité. Chers collègues, il est possible de travailler à la fois vite et bien, mais dans le cas présent la commission a confondu vitesse et précipitation. Cette précipitation l'a ainsi amenée à bâcler le travail sur le fond - j'y reviendrai plus tard - mais aussi et surtout sur la forme. En effet, le rapporteur de majorité ne l'a pas précisé, mais le rapport qui vous est présenté contient toute une partie - celle qui a trait aux deuxième et troisième débats, soit à partir de la page 15 - fondée sur des procès-verbaux qui n'ont toujours pas été validés à ce jour, la commission ayant jugé qu'il était urgent d'aller trop vite pour des raisons qui sont les siennes... Nous avons donc eu quatre jours pour rédiger notre rapport, sur la base de procès-verbaux provisoires.
Mesdames et Messieurs, ce projet de loi, qui a fait l'objet de plus de quinze amendements en deuxième débat, propose de restreindre la liberté économique et d'instaurer une limitation à l'accès aux soins pour soi-disant maîtriser les coûts. Cependant, alors qu'on aurait pu le traiter sur le fond de façon beaucoup plus complète, en s'intéressant non pas aux questions d'investissement, mais à ce que représentent vraiment les coûts de la santé - c'est-à-dire comment les prestations médicales sont générées, comment les diagnostics sont posés, comment les traitements sont induits - eh bien la commission a estimé qu'il n'était pas pertinent de procéder à ce type d'analyse. Pour cette raison, Mesdames et Messieurs, je demande que ce texte soit renvoyé en commission, en particulier pour que le rapport final se base sur des procès-verbaux de commission qui ont été approuvés. A ce jour, ces derniers ont donné lieu à plus d'une douzaine de propositions de modifications, lesquelles devront être validées. Même si l'objet législatif et la loi en elle-même ne changent pas, il est essentiel pour la sécurité du droit et de notre procédure législative que cette loi soit fondée sur un rapport de commission valide ! Monsieur le président, je vous demande donc de procéder au vote sur le renvoi en commission. Je vous remercie de votre attention, Mesdames et Messieurs.
Le président. Merci, Monsieur le député, j'ai pris note de votre requête. La parole est à M. Thévoz sur le renvoi en commission.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, la majorité vous enjoint de ne pas renvoyer cet objet en commission. Pendant toute la durée des auditions, on a eu le sentiment que la minorité cherchait à gagner du temps. Pourquoi ? Parce que l'un des éléments cruciaux - je l'ai dit - est l'entrée en vigueur de cette loi qui, d'une manière rétroactive, soumettra les entités qui souhaitent s'équiper à certaines contraintes. Tout au long de l'étude de ce texte - et c'est peut-être ce qui a un peu crispé les débats - différentes démarches ont donc visé à ralentir les travaux, à reformuler des demandes d'auditions qui n'avaient pas été acceptées ou à attendre le projet de planification sanitaire. On a eu le sentiment d'une course contre la montre totalement contreproductive ! Aujourd'hui, il ne faut pas rejouer ce jeu-là: allons de l'avant, pour la santé des Genevois et des Genevoises. Merci.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais juste dire un mot. Il ne faut pas être dupe: cette demande de renvoi en commission est une manoeuvre dilatoire. Vous le savez, Genève est le dernier canton romand à adopter - du moins j'espère qu'il le fera ce soir - une loi de ce type, or dans tous les autres cantons, on l'a vu, on a essayé de jouer la montre. On a même acquis en surnombre des équipements lourds entre le moment où le Conseil d'Etat a déposé le projet de loi et celui où le Grand Conseil l'a accepté ! Ne vous leurrez pas, il en est déjà de même à Genève. Ne cédez donc pas à cette demande, car c'est ce soir qu'une décision doit être prise, dans l'intérêt de notre population. On ne peut pas déposer chaque automne des motions visant à maîtriser les coûts de la santé et, lorsqu'on vient avec des propositions concrètes, essayer de retarder leur mise en oeuvre puis les rejeter. Je vous remercie.
Le président. Merci. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à voter sur cette demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12425 à la commission de la santé est rejeté par 50 non contre 44 oui.
Le président. Nous continuons le débat et je passe la parole à M. Bertrand Buchs.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci beaucoup, Monsieur le président. Personne dans cette salle n'est contre le fait de maîtriser les coûts de la santé - ou de la maladie - et chacun se demande ce qu'on peut faire pour les diminuer. On remarque quand même qu'en 2018 les coûts n'ont pas augmenté, il semble donc que les mesures qui ont été prises commencent toutes à porter leurs fruits. On ne possède pas encore les chiffres pour 2019, mais il se trouve que les primes d'assurance-maladie n'ont quasiment pas connu de hausse cette année - en raison peut-être des élections fédérales. En tous les cas, il y a clairement eu une diminution ou une stagnation des coûts, et c'est dans ce contexte qu'on vient nous dire qu'il faut prendre des mesures d'urgence car la situation est catastrophique à Genève. Je veux bien l'entendre, mais on aurait pu adopter une mesure d'urgence très simple - un projet de loi n'était même pas nécessaire, parce que la législation le permet déjà - à savoir interdire l'installation de radiologues supplémentaires sur le territoire du canton de Genève. En effet, si vous achetez un appareil mais qu'il n'y a pas de radiologue, celui-ci ne coûtera rien à l'assurance-maladie et ne servira strictement à rien. Il ne fonctionnera que si on envoie des patients faire des examens et que des personnes doivent en interpréter les résultats. Il fallait donc simplement utiliser ce qui existe déjà, ce que la loi fédérale permet déjà, c'est-à-dire limiter l'installation des radiologues dans le canton de Genève, et la situation était réglée. Pourquoi ne l'a-t-on pas fait ? Je me pose la question. S'il y avait urgence, c'était ce qu'il fallait faire, or on ne l'a pas fait.
Si vous regardez la littérature mondiale et que vous consultez le catalogue de la bibliothèque du Congrès américain - ce que font tous les médecins - vous verrez que la relation entre le nombre d'appareils et les coûts de la santé n'est démontrée par aucune étude. En revanche, il existe clairement un lien entre le nombre de médecins et la hausse des coûts de la santé. Par ailleurs, l'augmentation du nombre d'appareils médicaux et d'équipements lourds a une action sur l'amélioration de la prise en charge ainsi que de la façon de traiter et de poser des diagnostics. Au cours de l'examen extrêmement rapide de ce projet de loi, comme l'a très bien dit M. Conne, on n'a jamais pu nous donner de preuves, et aucun chiffre, aucune statistique, aucune étude n'a montré qu'il y avait une corrélation par rapport à la demande contenue dans le projet.
On va donc voter ce texte, c'est très bien, mais il ne servira strictement à rien ! La commission que l'on aura instituée va se réunir, mais là encore ça ne servira strictement à rien ! De toute façon, certaines personnes vont faire recours, et ces recours seront acceptés par les tribunaux. En effet, on ne peut pas dire aux gens: «Lorsque vous avez acheté votre appareil en 2019, vous ne saviez pas qu'un projet de loi était à l'étude, mais depuis lors il a été voté. Quoi qu'il en soit, l'appareil que vous avez acquis en 2019 est surnuméraire, de sorte que si vous voulez un jour le remplacer, vous ne pourrez pas...» J'ai l'impression que si quelqu'un recourt devant un tribunal à ce sujet, il va très rapidement gagner, parce qu'on ne peut pas demander aux gens de décider de leur avenir sans qu'ils aient toutes les informations et décréter après coup que la loi est rétroactive. Ce n'est pas normal !
Lorsque ce projet de loi a été déposé, nous avons simplement demandé qu'il soit gelé en attendant l'établissement des planifications hospitalière et sanitaire pour le canton de Genève. Le parti démocrate-chrétien croit réellement que si l'on veut trouver des remèdes au problème des coûts de la santé, il faut chercher des solutions globales, et le seul moyen consiste à mettre les acteurs concernés autour d'une même table et à mutualiser les équipements médicaux. Ce n'est pas en prévoyant des interdictions que vous allez obtenir ce genre d'accord ! Il faut mutualiser, donner des responsabilités, et le Tribunal fédéral a très bien démontré que le canton de Genève avait tort s'agissant de sa planification hospitalière et qu'il convenait de changer les choses. C'est donc dans le cadre de la nouvelle planification sanitaire qu'on pourra discuter du nombre d'équipements dont a besoin le canton de Genève. En conclusion, ce projet de loi ne sert strictement à rien et il faut le refuser. Je vous remercie.
Mme Alessandra Oriolo (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, ce projet de loi vise à limiter l'acquisition d'équipements médicaux lourds afin que l'utilisation du matériel médical soit plus rationnelle dans le canton de Genève. Je le répète, il vise simplement à limiter, non pas à interdire ! Il s'agit d'un mécanisme de régulation permettant une meilleure gestion des coûts de la santé. Je vous invite donc, comme la majorité de la commission de la santé, à accepter ce texte.
Quels sont les constats ? Je vais vous donner quelques chiffres précis. Genève est le canton suisse qui comporte le plus d'équipements lourds par habitant. C'est également le canton où l'on trouve le plus grand nombre de robots chirurgicaux par kilomètre. La densité de radiologues y est en outre extrêmement élevée: on compte à Genève 16,1 radiologues pour 100 000 habitants, contre 8,7 à Zurich. Je rappelle par ailleurs que la plupart des cantons romands disposent déjà d'une loi similaire où l'Etat coordonne l'achat des équipements lourds. De telles mesures ont été introduites en 1998 à Neuchâtel, en 2001 au Tessin et en 2015 dans le canton de Vaud. Le modèle de Neuchâtel, en vigueur depuis vingt ans, a prouvé que le dispositif fonctionne; il a eu un effet préventif en permettant de maîtriser le nombre d'instituts ouverts.
Pourquoi convient-il de voter ce projet de loi ? Il faut savoir que dans un domaine tel que celui de la santé, l'offre crée la demande, raison pour laquelle il est important de pouvoir réguler cette offre. D'un point de vue économique, il est logique que chaque praticien cherche à amortir l'appareil qu'il achète. Ainsi, plus il existe d'équipements lourds, plus on prescrit d'examens, et plus les coûts sont élevés. On estime que les coûts supplémentaires entraînés par ces surthérapies se situent aujourd'hui entre 10% et 40%. Nous savons pertinemment que la Suisse connaît une surmédicalisation et que certains examens - pour ne pas dire la plupart - sont inutiles.
Il s'agit par ailleurs de s'aligner sur un modèle de contrôle qui existe déjà aux HUG à l'heure actuelle. Accepter que l'Etat régule les achats d'équipements sur le plan cantonal, c'est s'assurer que la pratique des acteurs privés de la santé est alignée sur le même modèle que les Hôpitaux universitaires de Genève, lequel a montré son efficacité puisqu'il n'a pas posé de problème depuis son introduction dans la loi.
Enfin, il faut savoir que ce mécanisme de régulation est une invitation à plus de synergies et de mutualisation entre les différentes actrices grâce à la mise en commun de certains équipements médicaux.
En aucun cas cette loi, qui vise une meilleure régulation des équipements lourds dans le canton, ne viendra péjorer la qualité des soins. Je ne crois pas à cet argument, qui est simplement mensonger à mon sens. Elle nous permettra également de nous aligner sur la majorité des cantons romands, tout en protégeant les payeuses de primes de l'augmentation des coûts due aux investissements superflus et à la surmédicalisation.
Je suis d'accord avec vous, Monsieur Buchs, cette loi ne résoudra pas complètement la question des coûts de la santé; il y a certainement un gros effort à faire pour diminuer le volume d'examens prescrits et le nombre de radiologues qui s'installent à Genève, car c'est bien là le coeur du problème. Elle permettra cependant une meilleure répartition sur le territoire cantonal des équipements lourds, qui coûtent quand même très cher.
Mesdames les députées, Messieurs les députés, les Vertes vous demandent de voter rapidement ce projet de loi afin de stopper le plus vite possible la course au suréquipement qui a déjà commencé et qui se déroule depuis le début des discussions en 2018. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais tout d'abord m'inscrire en faux contre les propos de M. Conne selon lesquels cette loi viserait à limiter l'accès aux soins. Il n'en a jamais été question ! Il s'agit d'une limitation, d'une régulation des équipements médicaux lourds, et de rien d'autre. Par ailleurs, il est quand même particulièrement indélicat de parler de précipitation alors que nous avons consacré un temps certain à ce projet de loi, qui a en tout cas fait l'objet d'un examen minutieux. Nous n'avons simplement pas voulu entrer en matière sur les manoeuvres dilatoires entreprises par la minorité. Enfin, opposer la planification sanitaire et l'acceptation de ce texte revient à dire que c'est ou tout ou rien ! C'est considérer que l'on ne pourra pas progresser sur un aspect problématique qui nécessite des mesures de régulation tant que l'on n'aura pas fait tout le travail de planification sanitaire. Ça n'a pas de sens, et il s'agit encore une fois d'une manoeuvre pour essayer d'écarter ce projet de loi à laquelle nous ne pouvons souscrire.
Jusqu'ici, pour en revenir au texte, la question était de savoir si le secteur allait mettre en place une autorégulation à l'égard des acteurs concernés, mais on constate plutôt un crescendo constant dans l'acquisition d'équipements lourds, que ce soit dans le secteur public ou privé. Il est donc important d'agir pour freiner cette croissance. Genève est le canton où la densité d'équipements par habitant est la plus élevée et où certains examens sont les plus nombreux, or il existe un rapport direct entre la hausse des coûts et le nombre d'appareils disponibles, comme l'a également démontré le Surveillant des prix, M. Meierhans. De plus, on constate que les patients sont tout aussi bien soignés dans les cantons qui comptent moins de gros équipements et où les primes sont bien plus basses qu'à Genève.
Les manoeuvres de la minorité - soit pour ajourner autant que possible l'entrée en vigueur de la loi, soit pour imposer la mise en place d'une commission consultative, largement composée d'acteurs des milieux privés et des assurances - ont passablement entravé les travaux de la commission, et on vient maintenant nous parler de précipitation ! La majorité s'est opposée à la vague d'amendements proposée par la minorité, car elle estime que le contrôle et la régulation sont des tâches régaliennes. En l'occurrence, lorsque l'autodiscipline des secteurs concernés fait défaut, il faut alors que l'Etat assume sa fonction de contrôle afin d'agir sur les coûts de la santé, dans l'intérêt de la collectivité, mais aussi dans celui, non négligeable, des finances publiques - la minorité en question y est particulièrement sensible en général. C'est pour tous ces motifs que le groupe Ensemble à Gauche vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce projet de loi tel qu'il est ressorti de la commission de la santé. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
M. Pierre Nicollier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais commencer par clarifier certains des points mentionnés précédemment. Je parlerai d'abord de l'exemple de Neuchâtel qui a été évoqué. Tout le monde n'a peut-être pas lu en détail le rapport, mais en tous les cas les conclusions que j'en tire sont un peu différentes de celles de mes préopinantes. Je constate notamment que les patients doivent attendre plus longtemps pour avoir accès à de l'imagerie, avec comme conséquence que ceux-ci vont dans le canton de Berne. Je ne suis pas sûr que ce soit vraiment la vision que nous souhaitions pour le canton de Genève ! Autre élément intéressant, le rapport ne montre pas de corrélation entre une potentielle baisse des coûts et cette loi, or ça fait vingt ans qu'elle est en vigueur à Neuchâtel. Je voulais juste préciser ces éléments !
Par ailleurs, les radiologues ne peuvent pas prescrire d'examens d'imagerie - il me semblait également important de clarifier ce point. Ça signifie que pour qu'un radiologue puisse effectuer une imagerie, il faut qu'un autre médecin l'ait prescrite. Il existe souvent une espèce de confusion là autour: certains pensent que les praticiens peuvent décider eux-mêmes de l'image qu'ils vont faire et se mettre directement de l'argent dans la poche. Ça ne fonctionne pas comme ça.
Je tenais ensuite à souligner encore une fois que cette loi ne garantit pas la qualité des prestations auprès de la population, et je vais vous expliquer pourquoi. Cette loi ne garantit pas que le canton pourra adopter rapidement de nouvelles technologies plus performantes et plus efficientes pour la population. En bloquant le nombre d'équipements lourds, elle encourage aussi les prestataires à se doter d'appareils bon marché et à garder leurs machines plus longtemps. Les prix sont fixés, le parc est statique et le renouvellement peut être refusé; les entités n'ont donc pas d'intérêt à s'équiper de nouvelles technologies ou à acquérir de nouveaux appareils. En outre, cette loi ne permet pas de créer des ponts entre les différents acteurs de la santé pour mutualiser les ressources. Tous ces éléments, que l'on retrouve dans les législations de plusieurs cantons romands, ont été proposés, mais la majorité - soit le MCG, Ensemble à Gauche, le PS et les Verts - a décidé de les mettre de côté. Nous avons donc une loi simpliste, qui entre dans un schéma de réduction des prestations auprès de la population pour faire des économies sans y ajouter aucune cautèle, aucune vision pour notre système de santé.
En guise de conclusion, je me permets de mentionner le titre du dernier Bulletin des médecins suisses: «Oui à la maîtrise des coûts, non à un rationnement caché». Mesdames et Messieurs, je vous encourage à refuser ce projet de loi. Merci. (Applaudissements.)
Mme Jennifer Conti (S). Mesdames et Messieurs les députés, alors que la tendance est à la recherche de solutions pour maîtriser les coûts de la santé qui impactent le montant des primes, on apprend que les assureurs dilapident 102 millions de francs de nos primes pour financer quoi ? La pub et le courtage. La Suisse est le pays le plus inégalitaire d'Europe pour ce qui est de la répartition des dépenses de santé. Nous payons 66% de la facture. Seul un tiers prend en compte le revenu !
Pour répondre aux inquiétudes de la minorité de la commission, j'aimerais ajouter que, selon l'Office fédéral de la santé publique, notre système de santé peut améliorer son efficience de 20% sans que la qualité des soins en soit affectée. En tant que patientes et assurées que nous sommes toutes ici, nous ne pouvons donc que soutenir ce projet de loi, car il vise à maîtriser les coûts de la santé tout en maintenant des soins de qualité.
On l'a relevé, une surmédicalisation engendre une surconsommation médicale, avec à la clé une augmentation des coûts et forcément un impact sur nos primes. Genève fait partie des cantons les plus équipés de Suisse, et fin 2018 les besoins en la matière ont été considérés comme couverts, certains l'ont rappelé.
Pour conclure, en cette période particulière où il ne reste plus qu'un mois pour comparer les primes maladie, choisir la moins pire et cas échéant changer d'assurance, voter une telle loi constitue un signal politique fort, qui montre à la population genevoise que nous répondons à ses attentes en adoptant un texte qui vise à maîtriser les coûts de la santé. Le parti socialiste vous invite donc à soutenir les assurés et les patients en acceptant ce projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Sandro Pistis (MCG). Je tenais tout d'abord à remercier le rapporteur de majorité pour la qualité de son rapport, qu'il a su déposer dans les délais. Cela nous permettra de voter ce soir ce projet de loi en toute sérénité, dans l'intérêt - vous l'aurez compris - des Genevoises et des Genevois.
On l'a dit et répété, Genève est le canton où la densité d'équipements médico-techniques lourds par habitant est la plus importante, or cela a un impact sur les coûts de la santé de notre canton. L'année prochaine, certaines et certains vont du reste voir leurs primes d'assurance-maladie augmenter. Ce projet de loi est donc empreint de bon sens et il faut absolument le soutenir.
Je voudrais également revenir sur certains des propos qui ont été tenus, notamment par le rapporteur de minorité. Non, la commission a travaillé de façon claire et s'est mise d'accord pour voter le P.V. ainsi que le projet de loi.
J'aimerais enfin rappeler un élément important: ce projet n'est pas bloquant, car il permettra un renouvellement des équipements au cas par cas, lorsque c'est nécessaire. Le groupe MCG vous invite dès lors à soutenir ce texte tel que sorti de commission. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci. Je passe la parole à M. Philippe Morel pour une minute quatorze.
M. Philippe Morel (PLR). Merci, Monsieur le président. Nous voulons tous limiter les coûts de la santé, mais nous savons tous que ce projet de loi n'est qu'un symbole pour se donner bonne conscience. Nous attaquons le problème en utilisant des fléchettes ! En effet, les équipements lourds ne constituent qu'une infime partie des artifices médicaux et des modes de diagnostic dont nous nous servons. De nombreuses autres solutions existent et mettre ensemble les différents partenaires autour de la table permettra enfin d'appréhender le problème de manière non pas fragmentaire et inégale, mais globale.
Les équipements lourds, c'est quoi ? C'est par exemple la radiothérapie. Eh bien nous ferons attendre les patients ! C'est également l'IRM et les scanners qui, mon préopinant l'a dit, sont prescrits par des médecins. Là aussi, les patients attendront ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Et pour ce qui est de la robotique, les chirurgiens sont là, et il a été démontré que ce type de pratique permettait de diminuer les complications opératoires.
Oui, la médecine se développe, elle se développe avec des équipements lourds. Oui, la médecine en a besoin, tout comme les patients, si bien que cette loi - qui n'est qu'un symbole pour nous - ne sera certainement pas profitable à notre population. Elle ne vous sera pas reconnaissante de l'avoir votée ! Nous attendons par ailleurs que la planification cantonale donne une vérité et un background plus solides à ce qui se passe à Genève et à la manière dont le canton dépense les deniers publics - je pense aux primes et aux cotisations des assurés. Merci. (Applaudissements.)
M. Patrick Dimier (MCG). Mesdames et Messieurs, ce sont en fait deux écoles qui s'affrontent ici: d'une part ceux qui estiment que les primes d'assurance permettent à certains de faire de l'argent avec notre santé, et d'autre part ceux qui pensent que les primes payées par les assurés servent à faire de la santé avec notre argent. Nous appartenons à la deuxième classe et vous invitons donc à approuver ce projet de loi, comme l'a fait notre chef de groupe précédemment.
Le président. Merci. La parole est à Mme Jocelyne Haller pour une minute et six secondes.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Merci, Monsieur le député... Heu, pardon, Monsieur le président ! Mesdames et Messieurs, j'aimerais réagir aux propos du député... J'ai oublié son nom, excusez-moi ! (Rires.) ...aux propos de l'un de nos camarades et collègues... (Brouhaha.) ...qui mentionnait la possibilité qu'il s'agisse finalement d'un symbole pour se donner bonne conscience en matière de coûts de la santé. Je voudrais juste préciser que ce qui a été évoqué, c'est une atteinte à la liberté de commerce, pas une histoire de mauvaise conscience ! C'est bien de cela qu'il a été question !
Par ailleurs, on nous dit aujourd'hui - alors qu'il n'en a pas été fait mention pendant les travaux de la commission - que si on votait ce projet de loi, il y aurait des délais d'attente pour les examens médicaux. C'est faux ! La dotation actuelle dont nous disposons à Genève ne nous met pas dans cette situation, et ce dont il est question, ce n'est pas de cela. C'est un argument fallacieux, qui vise simplement à influencer le public sur ce sujet. Je réitère donc mon invitation à soutenir ce projet de loi, mais aussi à ne pas prendre en considération des arguments qui sont plus que discutables. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). On voit dans ce débat tout le poids des lobbies de la santé. Qui sont-ils ? Ce sont les cabinets de radiologie, qui font des profits gigantesques, ce sont les cliniques privées, qui sont intégrées dans des groupes nationaux, voire internationaux - on connaît la clinique Hirslanden et d'autres. C'est une question - tout à fait scandaleuse - de pognon, d'argent, qui ruine les budgets des habitants de Genève et qui a aussi un effet négatif sur la qualité des soins dans notre canton. C'est tout cela qui est en jeu, tout cela qu'une certaine droite, molle et irresponsable, qui défend des intérêts particuliers, des intérêts privés... Ce sont ces milieux-là qui causent hélas du tort à notre République et canton, ces milieux qui défendent des intérêts particuliers, qui défendent des lobbies, qui défendent tout ce contre quoi le MCG se bat depuis des années. Et nous continuerons à nous battre, car nous ne pouvons pas accepter que les intérêts de la collectivité soient complètement détournés au profit d'intérêts particuliers, de fortunes personnelles, de gens qui gagnent des mille et des cents, des millions, des dizaines de millions, des centaines de millions...
Des voix. Des milliards !
M. François Baertschi. ...et tout cela payé par Monsieur et Madame Tout-le-Monde. On crée de la misère dans l'intérêt d'une ou deux personnes ! En conclusion, je vous enjoins véritablement de voter avec célérité ce projet de loi rempli de bon sens. Merci.
Le président. Je vous remercie. La parole est à Mme Alessandra Oriolo pour cinquante-neuf secondes.
Mme Alessandra Oriolo (Ve). Merci, Monsieur le président. Je voulais simplement réagir aux propos de mes collègues de droite, en l'occurrence sur le cas de Neuchâtel. C'est vrai, le dispositif mis en place là-bas n'a pas forcément permis une maîtrise des coûts, en raison notamment d'une fuite des patients au-delà des frontières cantonales, d'où la nécessité d'avoir de plus en plus de cantons qui adhèrent à ce type de mesure, qui adhèrent au principe d'une régulation de l'Etat, et ce non pas pour limiter la qualité des soins... Je ne pense vraiment pas que la Suisse connaîtra des problèmes en matière de qualité des soins, sachant qu'elle possède les équipements lourds les plus performants au monde.
La disposition proposée dans ce projet est déjà en vigueur au sein des HUG, la pratique a déjà cours dans cet établissement, et il n'y a pas eu de problèmes de qualité. On est confronté ici à des lobbies, à des privés qui craignent que le marché de la santé soit réduit en ce qui les concerne, alors qu'on veut simplement mieux réguler les choses, mieux répartir la part du gâteau entre les différents acteurs de la santé. Il s'agit d'avoir une vision globale et de travailler mieux tous ensemble. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci. La parole va à M. Pierre Conne pour une minute quarante.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je voudrais apporter quelques petites précisions. Les amendements que nous avons déposés étaient tous issus de la législation des cantons qui ont introduit le moratoire et auxquels le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui fait référence. Nous avons ainsi présenté ces amendements pour améliorer l'efficacité de la loi en partant de l'idée que l'expérience des autres cantons pouvait nous être utile. Il ne s'agissait donc pas d'une manoeuvre dilatoire.
Par ailleurs, j'aimerais relever que ce texte propose simplement de faire une règle de trois: tant de scanners par habitant, tant d'IRM par habitant. Il faut alors se poser la question: combien pour la pédiatrie ? Combien pour la radiologie de la femme ? Combien pour la chirurgie pilotée par radiologie ? Cette analyse des besoins est prévue dans un projet de loi dont nous allons débattre très bientôt - c'est l'un des prochains points à l'ordre du jour - à savoir le PL 12124-A sur la planification sanitaire. Je vais vous lire un extrait de l'article 30: «1 La planification des soins comprend l'estimation des besoins en soins et de leur évolution, ainsi que l'élaboration de stratégies de réponse à ces besoins. 2 La planification des soins a pour but de maintenir ou d'améliorer l'accès de la population à des soins les plus efficients possible. A cet effet, elle établit les bases d'une collaboration et d'une coordination des prestations de soins publics et privés.» Nous avons dès lors proposé de lier le texte sur les équipements lourds à ce projet de loi sur la planification des soins, ce que vous avez refusé.
Nous allons donc accepter une loi bête et stupide qui, si elle avait constitué une bonne solution, aurait été appliquée depuis longtemps en Suisse. Or, à ce jour, elle n'a jamais montré son efficacité. Pour toutes ces raisons, je vous invite à rejeter ce projet de loi en l'état. Merci. (Applaudissements.)
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de majorité. Pour répondre à M. Buchs - vous transmettrez, Monsieur le président - il est faux de dire qu'il n'y a ni chiffres ni études. Lorsque nous avons auditionné le responsable neuchâtelois, ce dernier nous a indiqué qu'une étude de l'Institut universitaire de médecine sociale et préventive avait montré que la loi votée il y a vingt ans à Neuchâtel avait permis, de manière préventive, de plafonner le nombre d'ouvertures d'instituts de radiologie. La mesure a donc un effet et, comme l'a relevé la députée Alessandra Oriolo, plus nombreux seront les cantons à se rallier à ce type de loi, moins grande sera la possibilité d'aller s'installer à cent mètres dans un autre canton. Il se trouve que le canton de Vaud a adopté une législation similaire, si bien que le problème ne se pose pas à Genève. En tous les cas, on ne peut qu'inviter le magistrat Mauro Poggia à entreprendre des discussions avec les conseillers d'Etat, notamment bernois, et les députations cantonales pour que l'on puisse petit à petit changer la donne au niveau fédéral. C'est un peu le même enjeu que pour les primes d'assurance-maladie: si on attend toujours qu'une solution vienne de Berne, on ne pourra pas forcément l'obtenir.
S'agissant de la question de la santé et de la qualité des soins évoquée par un député PLR, nous avons appris avec effarement en commission que certains appareils de radiologie dataient des années 80 et étaient potentiellement dangereux pour la santé. Ce n'est donc en tout cas pas ce projet de loi qui va péjorer la situation, dans la mesure où elle semble déjà fortement dégradée sur certains points, et ce du fait non pas d'une clause du besoin, mais de la cupidité de certains et de la course au profit. D'aucuns ne s'équipent pas ou emploient des appareils désuets, tandis que d'autres font la course à la technologie pour pouvoir vendre les machines les plus performantes. On voit aussi que ces appareils ne tournent pas tous de manière optimale: une partie d'entre eux est parfois à l'arrêt, simplement parce qu'il y a des jours où personne ne s'en sert. Les équipements existent donc déjà, et ce n'est évidemment pas en en rachetant encore davantage qu'on pourra optimiser leur utilisation.
En conclusion, il est nécessaire et important de voter ce projet de loi et de se rallier à une position qui permet de maîtriser en partie les coûts de la santé. Ce n'est pas la panacée, on l'a dit, mais il s'agit d'un petit pas dans la bonne direction. Merci.
Le président. Merci. Je passe la parole à M. Olivier Cerutti pour vingt secondes.
M. Olivier Cerutti (PDC). Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste relever que nous ne sommes pas tous égaux devant la maladie, qui constitue une préoccupation importante, et que les équipements lourds sont nécessaires. On ne dépiste pas un cancer sans équipement lourd ! Je vous demande donc, Mesdames et Messieurs, de reconsidérer votre vision des choses. La planification sanitaire qu'on attend de la part du Conseil d'Etat et de l'ensemble du parlement est un élément essentiel, sur lequel j'invite les députés à se mettre d'accord. Je vous remercie.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je ne vous cache pas mon inquiétude face au constat qu'une partie de celles et ceux qui fustigent notre Parlement fédéral en l'accusant d'être devenu le théâtre du jeu des lobbies économiques transforment progressivement notre Grand Conseil dans le même sens.
Certains d'entre vous l'ont dit et répété, Genève et Bâle-Ville sont les cantons dans lesquels la densité d'appareils d'imagerie médicale est la plus forte, les cantons dans lesquels la densité de radiologues est la plus importante, les cantons dans lesquels les coûts de la médecine ambulatoire sont les plus élevés par habitant et enfin les cantons dans lesquels les primes sont les plus hautes. Que vous faut-il d'autre, Mesdames et Messieurs, pour comprendre que la médecine n'est pas un marché comme les autres et que c'est l'offre qui génère la demande ?
Je suis pour le débat, il est même sain - je n'ai du reste jamais rien appris d'une personne qui était de mon avis - mais encore faut-il qu'il soit honnête, et les arguments également. Ainsi, je ne peux pas entendre de la part d'un député de ce parlement qu'il serait plus simple de lutter contre l'installation de radiologues que contre l'acquisition d'appareils lourds. Et cela d'autant moins qu'il s'agit d'un député issu d'un parti politique qui, à Berne, s'oppose systématiquement lorsqu'il est question de donner aux cantons la possibilité de réguler l'installation de nouveaux cabinets médicaux. Il nous propose donc de faire ce que l'on sait pertinemment que l'on ne peut pas faire, et dans le même temps on s'obstine à nous empêcher d'agir à ce sujet. Ce n'est pas ce que j'appelle un débat de bonne foi, Mesdames et Messieurs.
Je ne peux pas entendre non plus que l'on devrait d'abord s'occuper de la planification sanitaire pour savoir quels sont les besoins de la population. En effet, on sait parfaitement que dans le cadre de cette dernière le canton ne régule pas l'installation de cabinets médicaux - en l'occurrence de cabinets de radiologie - puisque, comme je viens de le dire, cela lui est précisément interdit par le droit fédéral, sauf lorsque les médecins ont accompli moins de trois ans de formation postgrade en Suisse, ce qui ne représente qu'une petite partie des médecins qui demandent à s'installer chez nous.
Enfin, je ne peux pas entendre de la part d'un député de ce Grand Conseil que ce que l'on propose ici ne sert à rien et que si l'on regarde l'exemple de Neuchâtel, on constate que les patients neuchâtelois s'en vont dans le canton de Berne, puisque chez eux le secteur est régulé. C'est précisément la preuve, Mesdames et Messieurs, que parce que Neuchâtel a mis en place une régulation et que certains sont allés installer leur cabinet de radiologie de l'autre côté de la frontière cantonale, dans le canton de Berne, pour attirer la patientèle...
D'autre part, vous avez raison, ce ne sont pas les radiologues eux-mêmes qui prescrivent les examens; c'est toujours un médecin qui le fait. Or quand on lit dans la presse, et même la FMH le reconnaît, que 20% des prescriptions d'actes médicaux - diagnostiques ou thérapeutiques - sont inutiles, il s'agit évidemment de savoir pourquoi ces actes sont prescrits. Que faites-vous, Mesdames et Messieurs les médecins qui siégez dans ce parlement, pour procéder à une autocritique et à une autorégulation ? Pas grand-chose. Chaque fois que l'on attrape un médecin en train de faire quelque chose qu'il ne devrait pas, les langues se délient et on nous dit que cela fait longtemps que ce dernier est inscrit sur la liste noire. Mais quelle liste noire, Mesdames et Messieurs ? Pas celle qui se trouve sur mon bureau, en tout cas.
Alors soyons honnêtes et regardons les choses en face. Le canton a peu de moyens pour essayer de maîtriser les coûts de la santé. Il ne s'agit pas d'un rationnement, comme je l'ai entendu ici; nous sommes juste en train d'éviter l'indigestion, Mesdames et Messieurs. Et la qualité n'en sera en aucun cas affectée, je rassure les Genevoises et les Genevois ! Cela nous permettra simplement de prévenir la multiplication des cabinets de radiologie qui fleurissent dans notre canton et qui offrent leurs services aux cabinets des médecins environnants - avec pour conséquence une augmentation des coûts de la santé - tel qu'on le voit aujourd'hui.
Pour le surplus, je vous rassure, il ne s'agit pas d'un acte dictatorial de l'Etat; ce ne sera pas le fait du prince ! Nous n'allons pas décider que certains ont le droit d'acheter des équipements et d'autres non. Il y aura une commission quadripartite, laquelle se prononcera sur la base d'éléments objectifs. Cette commission comprendra bien sûr un représentant de la direction générale de la santé, mais aussi des Hôpitaux universitaires de Genève, des cliniques privées et de l'Association des médecins du canton de Genève, qui désignera certainement des radiologues, car si nous connaissons un jour une pénurie d'équipements lourds - dans un avenir très très lointain, sans doute serons-nous au XXIIe siècle - ce seront les plus à même de le voir.
Je remercie d'avance les députées et députés qui soutiendront ce projet de loi. Ce sera l'expression d'une volonté concrète - et non pas seulement orale et répétée dans ce parlement - de prendre des mesures pour maîtriser les coûts de la santé dans ce canton. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci. Nous allons maintenant nous prononcer sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 12425 est adopté en premier débat par 52 oui contre 41 non et 3 abstentions.
Le projet de loi 12425 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12425 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 52 oui contre 41 non et 2 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)