République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 12394-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2019 (LBu-2019) (D 3 70)

Premier débat

Le président. Nous abordons l'examen du budget 2019. Ce débat est classé en catégorie II. Je répète les règles du jeu que vous avez reçues, concernant le premier débat: cinq minutes pour chaque rapporteur, la même chose pour chaque groupe, la même chose pour le Conseil d'Etat. Je passe la parole à M. le député Cyril Aellen pour cinq minutes.

M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Normalement, il conviendrait que je parle en dernier, puisque le rapporteur de majorité que je suis est devenu - probablement - un rapporteur de minorité. Nous avons reçu toute une série d'amendements, notamment ceux du Conseil d'Etat. C'est quand même important qu'on puisse, le cas échéant, nous indiquer ce qu'il en est, puisqu'il s'agit d'amendements qui n'ont pas été discutés en commission.

En préambule, je rappelle la situation dans laquelle nous sommes: le canton de Genève a le redoutable privilège de connaître une forte croissance des revenus dans le cadre de son budget. Dans un premier temps, celle-ci avait été estimée à 3,5%: c'était sans compter avec les nouvelles estimations de l'automne qui ont permis d'anticiper des revenus supplémentaires de 235 millions de francs pour l'année 2019. Pour faire court, il s'agit pour moitié de revenus récurrents et pour moitié de revenus exceptionnels ou non récurrents.

Les charges, elles, sont également en forte croissance, et cela exclusivement pour des éléments récurrents. Elles sont en forte croissance parce qu'un grand nombre d'entre elles dépendent de lois et de règlements cantonaux que ni le parlement ni le Conseil d'Etat n'ont le courage de modifier pour arriver à une maîtrise des charges dans le budget. S'ajoute à cela une volonté de faire croître la fonction publique de façon peu différenciée: tous les départements se retrouvent avec des augmentations de postes. On ne peut pas dire qu'on a fait des choix en faveur de la santé ou pour régler les problèmes liés à la vieillesse ou au handicap. Non, il y en a partout: qu'il s'agisse de l'énergie, de l'agriculture, de la sécurité, ou enfin des finances. Partout, on a l'impression que chacun des départements a été faire ses achats et est revenu avec des ETP supplémentaires: ils sont au nombre de 338 - dans le petit Etat bien sûr. Il faut savoir que ce chiffre-là doit être multiplié par trois en moyenne pour tenir compte des engagements dans le grand Etat, puisque le petit Etat correspond à peu près, bon an mal an, à un tiers des emplois de la fonction publique. Il s'agit donc, selon nos estimations, d'un projet comptant à peu près mille postes supplémentaires pour l'année 2019.

Pour nous déterminer sur l'entrée en matière, j'interpelle donc le Conseil d'Etat afin d'avoir des explications quant à ce revirement, de savoir si les nouveaux amendements déposés sont des propositions ou s'ils seront maintenus coûte que coûte, s'ils font l'objet d'un accord formel avec divers partenaires, et si oui, lesquels. Nous voudrions aussi savoir s'il est opportun pour le groupe PLR de présenter Marc Simeth au Conseil d'Etat pour la prochaine élection complémentaire de manière à éviter qu'il ait trop de pouvoir. Ce sont les questions à propos desquelles je souhaiterais obtenir quelques renseignements.

M. Christian Dandrès (S), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, le traitement du budget est l'acte le plus important du travail parlementaire, et ce, de manière historique. C'est ainsi que notre députation doit rendre des comptes à la population sur sa manière de traiter les différents besoins. Depuis quelques années, on constate que ces besoins sont en augmentation, et pas uniquement en raison de la croissance démographique: la situation économique d'une bonne partie des personnes vivant dans ce canton est très difficile. Le marché du travail, vous le savez, a subi d'importants changements. Le secteur industriel a subi des pertes d'emploi assez massives et donc une baisse des offres de travail pour les personnes peu qualifiées. Cela a entraîné un développement du chômage de longue durée et une précarisation du travail: c'est l'essor des working poors. Des enquêtes au niveau fédéral montrent que ce phénomène existant à Genève existe également au niveau national: selon l'Office fédéral de la statistique, 530 000 personnes font partie des ménages pauvres en Suisse. 15% en plus risquent de tomber dans la pauvreté: ainsi, environ un cinquième de notre population vit dans une situation pécuniaire plus que problématique.

Parallèlement, on a constaté une forte augmentation de la richesse des quelques ménages qui ont été protégés par le PLR et l'Entente de manière générale, notamment avec les boucliers fiscaux. En Europe, 10% de la population possède 52% des richesses: c'est éminemment problématique dans des Etats démocratiques. La question de l'égalité n'est pas une question de pure forme, c'est une nécessité que chacun puisse vivre dignement, sans décalages trop importants entre les revenus, pour créer un tissu démocratique sur lequel une société peut se construire.

Dans ce contexte, le rôle du service public est absolument essentiel: d'abord, le service public augmente le revenu par des prestations que les personnes n'ont pas à payer, hormis par l'impôt, perçu en fonction des revenus. Le service public permet aussi de répondre à des facteurs de précarisation comme le passage de la scolarité à l'insertion professionnelle, la naissance d'enfants et la fin de la carrière professionnelle. A Genève, beaucoup de personnes perdent leur emploi avant l'âge de la retraite, et les retraites ne sont pas suffisantes pour continuer à vivre dignement une fois arrivé l'âge de l'AVS. Il faut voir en toile de fond que sans service public, le bien-être de la population s'écroule: on en a quelques exemples, notamment aux Etats-Unis et en Angleterre. Des études montrent que jusqu'en 2010, l'espérance de vie au Royaume-Uni a augmenté à la même vitesse que dans les autres pays européens. A partir du développement des politiques néolibérales et de la destruction du service public, il y a eu un décrochage, et aujourd'hui, l'espérance de vie au Royaume-Uni diminue, alors que ce pays est l'un des plus riches de la planète. C'est un chemin à ne pas suivre. Dans le cadre du budget, on doit rappeler avec force que la défense du service public et son adaptation aux besoins de la population doivent absolument être prioritaires.

De ce point de vue, je m'inscris en faux par rapport au rapporteur de majorité, qui nous indiquait qu'il y avait une croissance des fonctionnaires. Ce n'est pas une croissance des fonctionnaires, les fonctionnaires en tant que tels ne sont pas une catégorie à part, ce sont des personnes qui oeuvrent pour le service public. Si effectivement il y a un accroissement de ces personnes dans le cadre du budget que nous avons à traiter aujourd'hui, c'est précisément qu'il faut adapter le service public aux besoins de la population. Aujourd'hui, même si le service public est de très bonne qualité, on est encore assez loin des besoins de la majorité de nos concitoyens.

C'est avec cette boussole-là que le groupe socialiste a travaillé sur le budget et c'est avec cette boussole-là qu'il l'a aussi accepté, et qu'il acceptera d'autant plus facilement les amendements du Conseil d'Etat, pour éviter évidemment que les quelques centaines de millions de francs mis sur la table par le Conseil d'Etat, refusés par une majorité, servent au remboursement de la dette ou - pire - à une nouvelle baisse d'impôts pour les personnes les plus riches ! Il faut que ces millions servent aux besoins de la population !

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, nous nous trouvons dans une situation très curieuse. Le projet de budget qui nous est présenté par le Conseil d'Etat prévoit un large bénéfice, comme nous n'en avons jamais eu depuis bien longtemps: 60 millions de francs, vous avez bien entendu ! Pourtant, la majorité de la commission des finances l'a refusé ! La droite PDC-PLR nous conduisant dans une impasse en faisant des propositions peu ou plutôt pas crédibles, nous sommes contraints de nous tourner vers Ensemble à Gauche, qui est prêt à voter ce budget avec quelques amendements.

Dès lors, pour le MCG, il n'y a pas à hésiter: dans la période actuelle de crise politique créée par les mêmes partis qui refusent le budget, le MCG est déterminé à voter ce budget. Oui, il faudrait être fou pour ne pas le faire ! Il faudrait être fou pour ne pas voter un budget qui laisse un bénéfice de 60 millions de francs. Il faudrait être fou pour ne pas voter un budget qui laisse un bénéfice de 35 millions de francs avec les amendements généreux, très généreux, d'Ensemble à Gauche. On les connaît, on ne les verrait pas voter le budget sans cette générosité qui fait partie de leur ADN et que nous sommes obligés de partager cette fois. (Rires.) C'est davantage une contrainte, mais nous sommes aussi contents d'avoir cette contrainte.

Il faudrait être fou pour laisser un esprit de méfiance se propager au milieu des scandales. Il faudrait être fou pour suivre les pompiers pyromanes qui ont mis le feu aux poudres cet automne avec ces scandales que chacun déplore. Il faudrait être fou pour jouer à ce petit jeu de massacre qui fait tant de mal à Genève. Il faudrait être fou pour ne pas voter un budget qui prend en compte des baisses d'impôts pour les familles votées récemment. Il faudrait être fou pour ne pas voter un budget qui respecte les engagements envers les salariés et les usagers des services publics tout en dégageant un solide bénéfice. Il faudrait être fou pour s'entêter dans un combat politicien contre ce budget.

Le Mouvement Citoyens Genevois n'est pas fou ! Pour le MCG, c'est de l'inconscience, c'est de la folie que de ne pas voter ce budget ! Parce qu'il n'est pas fou, le MCG votera ce budget inespéré qui convient à 99% de la population genevoise.

M. Mathias Buschbeck (Ve), rapporteur de troisième minorité. Monsieur le président, comme cela a été dit, l'approbation d'un budget, doter notre république d'un budget, constitue l'acte majeur de notre parlement. Les Verts oeuvrent à trouver une majorité pour ce budget depuis son dépôt par le Conseil d'Etat, puisque autant les choix initiaux présentés en septembre que les amendements qu'il nous a apportés au courant du mois de novembre nous semblent être les bons. Si on ajoute à cela la bonne surprise fiscale qui nous est arrivée - peu d'autres endroits sur terre peuvent se réjouir d'avoir subitement 230 millions de francs en plus - je crois qu'aujourd'hui, il n'y a pas à faire la fine bouche !

Au niveau du fonctionnement, pour la cohésion sociale: +37 millions. Pour la formation: +36 millions. Pour la santé: +23 millions - c'était avant les amendements déposés ce matin encore par le Conseil d'Etat. En évolution relative, le constat est également réjouissant ! Pour l'environnement et l'énergie: +7%. Pour la mobilité: +3,8%. Au niveau des investissements, la mobilité se voit dotée de 320 millions de francs, la formation de 155 millions. Malgré les amendements du Conseil d'Etat, cela a été dit, nous restons avec un budget bénéficiaire de 35 millions de francs: que demander de plus ?

Je pense qu'il est responsable de doter notre canton d'un budget pour l'année prochaine. Comment pourrait-on le refuser et partir avec le régime des douzièmes provisoires alors que les besoins sociaux sont criants, alors que nous avons 338 nouveaux postes de travail dans la fonction publique dont 177 au DIP ? Bien évidemment, tout le monde pourra trouver des défauts à ce budget, puisque ce n'est le budget d'aucun parti en particulier, mais celui du compromis.

C'est aussi l'occasion pour les Verts de dire leur inquiétude: nous voyons venir des crises environnementales, climatiques et énergétiques qui nous conduiront à une crise économique sans précédent. Or, nous ne voyons pas venir parallèlement les réformes nécessaires. Nous constatons aujourd'hui beaucoup de lourdeurs et de travail en silos, problèmes auxquels il faudra s'attaquer pour relever les défis de demain. Mais en attendant, nous vous appelons à approuver ce budget.

M. Alberto Velasco (S). Monsieur le président, il y a longtemps qu'on n'a pas vu un budget excédentaire dans ce parlement. Moi qui y siège depuis un certain nombre d'années, c'est la première fois que j'ai la chance d'assister à cela, à ce cadeau de Noël ! Mais j'ai quand même un sujet d'étonnement dans le cadre de ce budget excédentaire: lors de tous les autres exercices auxquels nous avons eu affaire, la droite a toujours demandé l'équilibre budgétaire, même si ce n'est pas une règle très économique - elle est énoncée comme une espèce de catéchisme qu'on s'est donné, même si, économiquement parlant, c'est une hérésie. Enfin, la droite s'est donné cette règle d'équilibre budgétaire ici, à Genève, mais alors, appliquons-la ! Je ne comprends pas pourquoi, dans le cas de ce budget, la droite ne l'a pas appliquée.

Le Conseil d'Etat l'a appliquée: pour s'approcher de l'équilibre budgétaire, il a déposé des amendements qui visent à éliminer la détérioration des conditions salariales des fonctionnaires, avec les engagements dans deux classes inférieures et le blocage des annuités. Effectivement, le Conseil d'Etat est revenu en arrière, il a déposé ses amendements et il s'est approché de l'équilibre budgétaire. Mais voilà que la droite a refusé cette manière d'agir: c'est quand même extraordinaire et c'est incompréhensible ! Parce que quand on a un excédent budgétaire, Mesdames et Messieurs les députés, comme les Etats ne doivent pas faire des bénéfices, logiquement, il doit être employé et redistribué aux citoyens. Normalement, on le redistribue sous la forme de prestations. Or, à la lecture de ce budget et suite aux auditions menées, il est évident qu'il ne pourvoit pas à certaines nécessités, tant à l'hôpital qu'à l'IMAD et à l'Hospice général, et même à la police. Le PDC voulait, lui, encore couper dans les charges, donc augmenter l'excédent: une coupe dans les charges augmente l'excédent, ce qui va à l'encontre de leur théorie ! Ensemble à Gauche, voulant s'approcher de l'équilibre budgétaire, a ramené 20 ou 25 millions pour améliorer les conditions de vie de nos concitoyens et les prestations.

Je trouve quand même bizarre que la droite n'ait pas adhéré à cela. Le rapporteur de majorité a dit quelque chose d'important: il a dit que la question portait sur des réformes structurelles. Je comprends très bien, cela me semble beaucoup plus compréhensible que l'équilibre budgétaire. Effectivement, 95% de nos prestations sont liées à des lois, et si vous voulez diminuer ces prestations, il faut s'attaquer aux lois. Monsieur le président, vous permettrez que je m'adresse à lui: Monsieur le rapporteur de majorité, vous dites que ni le parlement ni le Conseil d'Etat n'ont le courage de présenter ces lois ! Peut-être qu'en effet le Conseil d'Etat n'a pas ce courage, mais enfin, le PLR pourrait l'avoir et présenter des lois qui s'attaquent à ces réformes structurelles, notamment sur l'hôpital, sur l'IMAD ou d'autres institutions, je n'en sais rien. A ce moment-là, contrairement à la France, nous pourrons soumettre cela au peuple et le peuple décidera. Si ces prestations sont revues à la baisse, c'est le peuple qui aura fait ce choix. Il faut en effet du courage et rien n'empêche le parti libéral de proposer ces réformes structurelles afin que le peuple choisisse une fois pour toutes quelles prestations il veut.

Mais j'ai pu comprendre que les libéraux ne veulent pas le faire; ils veulent que le Conseil d'Etat fasse le travail à leur place ! C'est ça, le problème, Mesdames et Messieurs: le Conseil d'Etat devrait faire ce sale travail de diminuer les prestations à la population pour arriver à une baisse des charges. A qui profitent ces baisses de charge, Mesdames et Messieurs ? A ceux qui paient le plus d'impôts ! Parce que ceux qui paient le moins d'impôts ont tout avantage à avoir de bonnes prestations. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Ce sont les pauvres qui ont besoin de bonnes prestations ! Ce sont les pauvres qui ont besoin de l'hôpital ! Ce sont les pauvres qui ont besoin d'une police bien payée et non corrompue ! Ce sont bien eux qui profitent d'un impôt proportionnel. Or, la tendance actuelle est de contourner l'impôt proportionnel et de passer par les taxes. Par exemple, la TVA: les pauvres et les riches paient la même chose ! C'est ça le problème...

Le président. C'est fini, Monsieur le député ! Je vous remercie. La parole est à M. le député Eric Leyvraz.

M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. L'UDC est déçue à la lecture de ce projet de loi. Tout d'abord, les amendements du Conseil d'Etat: en tant que membre de la commission des finances, je trouve absolument anormal que nous n'ayons pas pu en discuter ! Ils arrivent bien entendu au dernier moment pour faire passer le budget, pour faire des cadeaux à la gauche et se mettre celle-ci de son côté ! Ce n'est pas de cette manière qu'il faut procéder, ce n'est pas correct ! Quand on nous annonce 235 millions dans le noir, évidemment, nous sommes satisfaits, mais à peine voit-on qu'il y a plus d'argent qu'on se dépêche de le dépenser, de donner des gages, principalement à la gauche, et de tout faire pour que la fonction publique soit satisfaite à 100% et ne descende pas dans la rue. On arrive à un budget qui reste dans les chiffres noirs, mais vraiment dans l'épaisseur du trait, à 35 millions. Ce n'est pas acceptable alors que les perspectives d'avenir ne sont pas brillantes ! Si la RFFA passe, nous savons très bien qu'il y aura un trou de 300 à 400 millions de francs dans les rentrées d'impôts et il aurait été extrêmement sage d'avoir un petit matelas de réserve pour la population, justement pour diminuer l'augmentation de cette dette qui s'annonce encore plus terrible ces prochaines années alors qu'elle est déjà extrêmement élevée maintenant !

On n'est pas capable de transformer cet Etat: depuis des années, chaque nouveau conseiller d'Etat qui s'occupe des finances nous promet qu'on va voir ce qu'on va voir, que les choses vont changer et qu'on va retrouver l'équilibre. Là, on revient à l'équilibre, on est bien d'accord, mais c'est une fuite en avant continuelle, avec une augmentation continuelle du nombre de fonctionnaires. Le nombre d'employés de l'Etat ne correspond pas du tout à l'augmentation de la population. D'ailleurs, pour quelle raison faudrait-il que ce soit toujours lié ? Du budget 2012 au budget 2019, nous avons 1700 fonctionnaires de plus à l'Etat, c'est-à-dire 9% de plus, alors que la population n'a augmenté que de 6%. Si on compare avec Zurich... Je sais que Genève est incomparable, n'est-ce pas: qui peut se comparer avec Genève ? Personne ! Mais si on compare les dépenses par habitant du canton de Zurich et de ses communes avec l'équivalent à Genève, on trouve un tiers de plus ici qu'à Zurich !

Il y a quand même un problème fondamental, et le Conseil d'Etat est incapable de se pencher dessus: il est incapable de ramener cet Etat à une structure que je souhaiterais svelte et efficace, beaucoup plus efficace qu'elle ne l'est maintenant. On compte 338 ETP de plus entre le budget 2018 et le budget 2019 - et ceci est encore un mensonge parce que, de façon très dissimulée - alors que l'administration le savait - le DIP nous a présenté 50 employés de plus, exactement 49,7 ETP, qui avaient été perdus dans la masse et qu'on ressort comme ça, de façon extrêmement gênée, évidemment. Comment, dans une entreprise, ne sait-on pas qu'on a 49 ou 50 employés qui ne figurent nulle part ? C'est un véritable scandale ! Et le scandale est d'autant plus grand qu'on aurait normalement dû ajouter ces 50 ETP aux 338 annoncés en plus pour 2019. Qu'est-ce qu'on a fait ? On les a cachés sous le tapis ! On a modifié les chiffres de 2018 que personne n'ira regarder et on a rajouté ces 50 ETP en 2018. C'est un véritable scandale, on se moque de nous ! Le département vient nous dire qu'il a mis trois professeurs de plus ici, deux là, comme si on travaillait de manière chirurgicale pour ressortir cinquante personnes de plus. C'est totalement inacceptable !

Mesdames et Messieurs, nous ne nous préparons pas de beaux jours ! Dans deux jours, nous allons discuter de la caisse de pension; nous allons mettre plus de 4 milliards de francs dans cette caisse de pension, et que fait l'Etat ? Il a de l'argent et il le dépense immédiatement pour satisfaire toutes les demandes, qui viennent principalement de la gauche ! Mesdames et Messieurs, il est bien clair que, dans des circonstances pareilles, l'UDC refusera d'entrer en matière sur ce budget.

M. Jean Burgermeister (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, d'abord une précision. J'étais en commission dans la majorité qui a refusé ce projet de budget, mais je me suis senti assez mal représenté par le rapport et le rapporteur de majorité ! Passons !

Ensemble à Gauche n'a pas l'habitude de voter les budgets. Si normalement nous ne le faisons pas, ce n'est pas par posture politique, c'est simplement à cause de ce constat: les budgets que nous voyons défiler année après année ne répondent pas aux besoins prépondérants de la population ! En effet, alors que les besoins de cette population augmentent d'année en année, le dogme qui règne dans ce canton est celui de la compression budgétaire. Il faut bien comprendre que ces années de compression budgétaire successives ont un effet cumulatif. Nous arrivons maintenant à un point de rupture, parce que, dans tous les services, il y a un sous-effectif structurel; parce que l'ensemble des institutions subventionnées ont dû pallier et compenser la stagnation des subventions et l'augmentation des besoins. Elles ont dû compenser l'écart qui s'est creusé en puisant dans leurs propres ressources, et tous ces fonds arrivent à terme. En 2019, il ne restera plus rien dans les caisses de ces institutions, avec, à la clé, des conditions dramatiques, pour les salariés, mais aussi pour une grande majorité de la population qui souffre aujourd'hui de ce que des prestations élémentaires ne sont pas assurées par l'Etat. Ces compressions budgétaires ont un impact sur la majorité de la population, mais aussi et surtout sur les plus fragiles parmi elle.

C'était le sens de nos propositions d'améliorations du budget sur lesquelles le Conseil d'Etat est entré en matière. Nous avons proposé - modestement - quelques millions pour ce qui nous apparaissait comme les plus grandes priorités: les soins aux plus précaires, les soins aux personnes âgées, les soins aux enfants. Modestement, nous avons demandé une petite hausse du budget alors même que les finances permettaient bien plus. Si le Conseil d'Etat est entré en matière sur nos amendements, pour répondre au rapporteur de majorité ou aux autres qui ont parlé, c'est surtout grâce à la droite: un peu tétanisée par la crise, elle s'est recroquevillée comme un bernard-l'ermite dans sa zone de confort, elle s'est arc-boutée sur ses réflexes politiques que l'on pourrait résumer en quelques mots: des coupes, des coupes, encore davantage de coupes ! Coupez où vous voulez ! Coupez n'importe comment mais coupez ! Dans le social, dans la santé, c'est égal, il faut que ce soit moins cher ! Au point que, Mesdames et Messieurs les députés, lorsque à la commission des finances on a appris la nouvelle des 200 millions de francs de rentrées fiscales supplémentaires, les mines étaient déçues à droite: déçues d'apprendre que les finances de l'Etat allaient bien, déçues de voir que la droite avait perdu un argument supplémentaire pour réclamer de sabrer dans le social, la santé et l'éducation. Alors même que les plus fragiles subissent de plein fouet ces politiques d'austérité, alors même que ce qu'il reste de l'Etat social se fissure de toute part, ce parlement passe son temps à se lamenter sur le sort des plus riches de ce canton. (Commentaires.) On vote à la chaîne et sans problème des déductions fiscales alors que les 200 millions de francs supplémentaires de rentrées fiscales miraculeuses devraient tordre le cou une bonne fois pour toutes au mythe de l'enfer fiscal genevois.

Mesdames et Messieurs les députés, une fois n'est pas coutume, Ensemble à Gauche votera le budget du Conseil d'Etat si l'ensemble des derniers amendements - que M. Baertschi appelle les amendements d'Ensemble à Gauche mais qui sont évidemment ceux du Conseil d'Etat - sont acceptés. Vous vous en doutez, ce n'est évidemment pas un vote d'adhésion à la politique du Conseil d'Etat. Simplement, nous avons pu arracher des améliorations substantielles dans les services publics et pour une grande partie de la population. Une fois encore, que la droite en soit remerciée ! (Applaudissements.)

Mme Frédérique Perler (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts avaient accueilli plutôt favorablement ce projet de budget, partant du constat que le Conseil d'Etat avait finalement fait quelques efforts par le biais d'un certain nombre de mesures dans des domaines qui sont importants pour nous et qui en ont besoin. Essentiellement, ces augmentations portent sur l'éducation, le social, la santé et la mobilité: voilà pour les aspects positifs.

Il y a des aspects beaucoup plus rédhibitoires. Les Verts ont critiqué les mesures proposées par le Conseil d'Etat, lequel s'en prend de manière constante, d'année en année, aux conditions de travail de la fonction publique et utilise celle-ci comme variable d'ajustement pour réduire le déficit budgétaire et, au mieux, ramener celui-ci à l'équilibre, ce qui n'était pas le cas pour cette année. A nos yeux, ce type de manoeuvre est inacceptable. Heureusement, comme cela a été dit, il y a eu une bonne surprise durant les travaux en commission. A la faveur de l'annonce d'une amélioration budgétaire, avec des recettes fiscales supplémentaires de plus de 230 millions de francs, le Conseil d'Etat a proposé - avec raison, vu que c'est tout de même prévu par la loi - de rétablir les mécanismes salariaux, c'est-à-dire, pour l'essentiel, de réintroduire l'annuité et de supprimer la mesure visant à engager les employés avec un traitement inférieur de deux classes durant la période probatoire.

Ces recettes ont donc permis d'améliorer sensiblement ce budget, dans un sens qui convient aux Verts, même si, encore une fois, ce n'est pas notre budget idéal. Ce budget dote de moyens supplémentaires des domaines où les besoins sont extrêmement importants, comme la formation, la santé, la cohésion sociale et la mobilité - avec l'entrée en fonction du CEVA - ainsi que l'environnement. C'est surtout un budget amendé par le Conseil d'Etat qui présente désormais un résultat largement bénéficiaire, et les Verts - et d'autres groupes avec eux - n'ont pas bien compris qu'il se soit trouvé une majorité de circonstance pour le refuser en commission alors qu'il est bénéficiaire et présente des avancées notables par rapport aux années précédentes où, je vous le rappelle, nous devions plutôt annuler des coupes drastiques faites par le Conseil d'Etat.

Pour les dépenses, certains en voulaient plus, d'autres en voulaient moins. La conséquence de ce refus, vous la connaissez, c'est la reconduction du budget 2018 par les douzièmes provisoires et la perte au passage des quelques avancées relevées dans ce projet ainsi que d'un certain nombre de créations de postes. Pour les Verts, résolument, nous prendrons nos responsabilités et nous voterons ce budget car ce qui nous guide, c'est la nécessité de répondre aux besoins de la population et d'avoir un service public de qualité. C'est aussi la responsabilité de ce parlement d'offrir un budget à notre population - un budget qui donne des perspectives à cette même population et à certaines institutions qui en ont bien besoin, en matière de dotation de personnel; l'exemple de l'IMAD a été cité. Ces institutions doivent délivrer des prestations et, à ce propos, j'en profite pour rétablir une certaine vérité concernant une affirmation du rapporteur de majorité, M. Cyril Aellen, qui a indiqué que tous les départements bénéficieraient d'augmentations de postes. Oui, c'est vrai, mais c'est aussi le résultat d'une politique des Conseils d'Etat précédents qui ont délaissé ces secteurs pendant de nombreuses années. A force de tirer sur la corde, ma foi, vous savez ce qui se passe: elle finit par casser !

Il s'agit donc à la fois de maintenir un service public de qualité et de répondre aux besoins les plus criants de la population dont une partie, cela a été dit, vit dans des conditions extrêmement précaires. Cela, on ne peut plus l'ignorer, Mesdames et Messieurs les dépités - les députés ! (Rires.) C'est vrai qu'on pouvait être un peu dépité à ce moment-là !

Enfin - je terminerai par là, Monsieur le président - nous voterons les amendements présentés par le Conseil d'Etat, cela a été dit; certains d'entre eux amélioreront encore un peu plus la situation de l'Hospice général et des autres institutions, et ils permettront surtout de trouver une majorité pour se doter d'un budget en 2019 ! En cela, les Verts sont reconnaissants envers le Conseil d'Etat pour cet effort supplémentaire !

M. Jean-Luc Forni (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien s'est toujours battu pour une gestion rigoureuse de l'Etat afin de lui permettre de délivrer des prestations de qualité en faveur des citoyennes et citoyens. Ces deux dernières années, notre parti s'est pourtant employé à doter l'Etat de budgets déficitaires pour le bien de nos institutions et dans l'attente de réformes structurelles promises mais jamais réalisées.

A l'annonce du budget qui va nous occuper durant cette session, le parti démocrate-chrétien a tout de suite affiché une grande perplexité, en raison de la croissance des charges: dépassant un demi-milliard de francs ces deux dernières années, elle nous est apparue disproportionnée par rapport à la croissance de la population. Le projet de budget initial prévoyait un déficit de près de 90 millions de francs avec une croissance des charges de 1,8% et une augmentation des postes de 338 unités pour des mesures d'efficience modestes de quelque 8 millions de francs et des mesures structurelles encore plus modestes concernant principalement une refonte de l'aide sociale, bizarrement. Les estimations fiscales à fin septembre, plus favorables que prévu, ont convaincu le Conseil d'Etat de cajoler davantage son administration en réintroduisant le versement de l'annuité et en renonçant à l'engagement des collaborateurs deux classes en dessous de la classe de fonction prévue.

Malgré la décision du Grand Conseil de réduire à treize vingtièmes la hausse de la valeur fiscale des immeubles prévue initialement dans les revenus fiscaux du budget 2019, nous sommes encore bien loin de la symétrie des efforts entre ces deux catégories de population que représentent, d'une part, la fonction publique et, d'autre part, la classe moyenne et les petits propriétaires. Force est de constater que le Conseil d'Etat semble n'avoir aucune réelle volonté d'économiser ou d'entreprendre des réformes à moins d'y être contraint. On pourrait espérer que l'argent du contribuable soit dépensé avec une plus grande rigueur vu les défis majeurs auxquels l'Etat va être confronté, tels le refinancement de la CPEG, la RFFA ou encore la situation financière précaire de notre canton.

Pire encore, nous apprenons sans grande surprise que, pour rallier une extrême gauche habituellement réfractaire à tout vote de budget, un accroissement des charges va être demandé et voté par cette majorité de fortune avec la complicité affligeante d'une majorité du Conseil d'Etat. Le parti démocrate-chrétien s'insurge contre cette manoeuvre électoraliste qui témoigne d'une parfaite ignorance de la gestion des biens publics; c'est une manoeuvre électoraliste qui va jusqu'à trahir notre propre engagement vis-à-vis de la population genevoise. Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas en augmentant un budget que l'on augmente la qualité des prestations servies à la population ! Le peuple nous a élus députés pour que nous fassions en son nom les propositions et les choix les plus favorables pour Genève. A ce titre, le débat budgétaire, plus que tout autre débat parlementaire, nous appelle à construire ensemble une vision politique cohérente et durable pour notre canton et ses habitants. En préférant l'arrosage budgétaire à tout va, notre Grand Conseil s'épargne de faire ce pour quoi il a été élu, c'est-à-dire des arbitrages budgétaires. En effet, la technique de l'arrosoir se résume à une politique à court terme qui peut séduire et se voir plébiscitée dans un premier temps, mais elle ne résiste pas à la comparaison avec une vision globale d'efficience et de gestion durable du bien commun. Ce Grand Conseil, derrière ses louables déclarations, va aujourd'hui faire la même chose: décider de ne rien décider pour ne pas se salir les mains et n'offenser personne !

Dans ce jeu politique, la grande gagnante ne sera pas la population, mais bel et bien notre dette qui continue de s'accroître, une dette que nous préférons lâchement léguer à la génération suivante. Nous ne réglerons jamais les problèmes de notre canton sans nous poser de questions quant à l'efficacité et quant à l'adéquation ou à l'efficience des moyens à engager. Autant de questions que l'on se refuse à aborder par confort politique ou par paresse hivernale !

Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien se refuse à voter un budget facile en faveur d'un Etat gargantuesque que le contribuable nourrit de plus en plus sans le comprendre pour autant. Il refusera un budget qui confond augmentation des charges et amélioration du service public. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Il refusera un budget à court terme, pensé en silos et non en politiques publiques. Dans un souci évident de gestion du bien commun, le parti démocrate-chrétien privilégiera toujours l'efficience à l'abondance. Nos concitoyennes et concitoyens n'attendent pas de nous que nous les aidions à devenir des assistés: bien au contraire, pour les plus précarisés d'entre eux, ils souhaitent devenir et être des citoyens à part entière, parfaitement intégrés ou réintégrés dans la société. Nos concitoyennes et concitoyens attendent de nos institutions qu'elles fonctionnent sans être pléthoriques...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Jean-Luc Forni. ...et nous refuserons d'entrer en matière sur ce budget !

Mme Françoise Sapin (MCG). Par les temps qui courent, notre République et canton de Genève est très malmenée. Le moins que l'on puisse dire est qu'une méfiance certaine s'est installée: méfiance des politiques envers les élus des exécutifs et, surtout, méfiance de la population envers les élus et le monde politique en général. Or, le MCG est pour le rétablissement d'une certaine confiance. Il n'est en tout cas pas pour déstabiliser encore plus les institutions et la population.

Le budget que le Conseil d'Etat nous a présenté, dûment amendé, présente des chiffres noirs et a même rétabli les mécanismes salariaux. Dans la période charnière que nous vivons, avec de très grands projets qui se trouvent à bout touchant - concernant la CPEG et surtout la réforme des entreprises RFFA, essentielle pour l'économie de notre canton - le refus de ce budget serait un mauvais signal et déstabiliserait encore plus les institutions et la population. En plus, cela détériorerait grandement l'image de Genève et sa capacité à se gérer. Cela pourrait même se traduire par une détérioration de la notation du canton par Standard & Poor's. Ce n'est pas grave, me direz-vous ! Mais quand vous saurez, pour ceux qui ne le savent pas, que cela ne permettrait plus à l'Etat d'emprunter facilement et qu'il devrait emprunter à des taux nettement plus élevés, peut-être changerez-vous d'avis. A notre avis, refuser ce budget, c'est se tirer une balle dans le pied. Confiance, disons-nous: nous faisons confiance au Conseil d'Etat et nous espérons vraiment l'adoption de ce budget qui est déjà le fruit d'un compromis, seule manière de fonctionner dans un Etat démocratique comme le nôtre. Le MCG s'engage pour Genève, pour les réformes actuelles, et nous voterons ainsi l'entrée en matière.

M. Serge Hiltpold (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la première chose que le groupe PLR voudrait faire, c'est remercier les collaborateurs du département des finances qui nous ont accompagnés tout au long de nos travaux en commission. Ce sont des collaborateurs sérieux qui ont produit des documents bien préparés, des documents extrêmement concis. Je pense qu'il faut relever la qualité de ce travail qui nous a permis de faire le nôtre.

J'ai entendu pas mal de choses et je ne vais pas refaire le rapport de majorité. On entend dire que le PLR devrait être content parce que le budget est positif, parce qu'on est dans le noir. C'est un élément sur lequel on peut éventuellement tomber d'accord, mais là où il y a une divergence majeure, c'est que nous avons des produits et des rentrées non récurrents: ça veut dire que ces rentrées ne surviennent pas chaque année, elles ne reviennent pas avec la même stabilité. C'est le premier constat.

On a par ailleurs 2,7% de croissance des charges, qui correspondaient en commission à 338 postes. Ce matin, on découvre avec les amendements du Conseil d'Etat 170 postes supplémentaires, ce qui fait un total de 508 postes dans le grand Etat ! Vous conviendrez, s'agissant de la maîtrise du personnel, qu'il faut avoir un regard critique et savoir se remettre en question; ce n'est pas faire de la discrimination envers les fonctionnaires. Quand vous êtes dans le secteur privé ou parapublic, même dans les entités subventionnées, vous faites ce travail; c'est le rôle d'un employeur. Le rôle de l'employeur, c'est de sortir de sa zone de confort. Vous ne pouvez pas ronronner, vous devez essayer de trouver des solutions pour l'avenir. Cela ne veut pas dire qu'il faut couper les têtes de tout le monde, mais qu'il faut se remettre en question.

Cette remise en question est efficace sur certains points. Par exemple, on numérise les autorisations de construire: c'est très bien, ça a passé à l'unanimité à la commission des travaux. Mais du côté des postes, rien ne se passe: le citoyen et utilisateur est content de ce logiciel; il va faire le travail lui-même, mais les postes, eux, restent ! On ne se dit pas que ces quatre, cinq, six ou dix postes pourraient être transférés dans un autre secteur. C'est la vraie problématique ! Le relever n'est pas anti-fonctionnaire, c'est de la véritable gestion de ressources humaines. Dans ressources humaines, il y a le mot «humain», et je pense que les parlementaires et le Conseil d'Etat doivent véritablement se poser la question de la réforme numérique qui touche l'économie, qui touche les citoyens, mais ne semble pas du tout toucher l'Etat ! On ne se pose aucune question sur la manière dont on va réformer l'Etat avec la numérisation, avec les nouveaux protocoles. Je trouve que c'est particulièrement déplacé ! Le regard du PLR est donc critique: ces 2,7% de charges supplémentaires, ce sont 508 postes ! Avec 508 nouveaux postes cette année, on nous dit que l'Etat se fissure, que les prestations diminuent... Je crois qu'il faut revenir à la réalité, la réalité de l'économie réelle !

Le Conseil d'Etat s'est ensuite tourné vers Ensemble à Gauche, c'est son droit le plus strict. C'est très bien, le Cartel représente la majorité de ce parlement ! Ce même Cartel dicte sa vision sur la CPEG; il dicte sa vision sur SCORE; il dicte sa vision sur la RFFA. Parce que qui va lancer un référendum ? Ce n'est pas le PLR ou les autres partis gouvernementaux, ce seront ces mêmes entités ! Il faut avoir un regard véritablement critique; je demande le renvoi du budget en commission pour faire le travail correctement et que le Conseil d'Etat nous explique sereinement les amendements déposés aujourd'hui, pour avoir des explications claires, mais pas en séance plénière ! Parce que cela fait la deuxième session de suite qu'on prend des amendements dans les dents, le jour même d'une séance, et je trouve que ce n'est pas normal ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Les rapporteurs peuvent s'exprimer sur cette demande de renvoi en commission. Je passe la parole à qui la veut: Monsieur François Baertschi ?

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. C'est une très mauvaise idée ! C'est vouloir saborder le budget de l'Etat de Genève, c'est un mauvais coup porté à Genève. Je crois qu'il faut un débat parlementaire qui soit clair et positif, que l'on soit pour ou contre. Ce doit être l'élément de base. Là, on utilise des méthodes parlementaires parmi les pires: c'est de la guérilla parlementaire. Genève mérite mieux que ça !

Le président. Je vous remercie. La parole est-elle demandée par un autre rapporteur ? Monsieur Cyril Aellen ?

M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Afin que je puisse prendre position sur cette demande de renvoi, j'aimerais que le Conseil d'Etat nous informe sur la question posée tout à l'heure, question qui justifie le renvoi: à savoir ce qu'il en est de ces nouveaux amendements dont nous n'avons pas discuté en commission.

Le président. Je vous remercie. Madame Nathalie Fontanet, vous avez quelque chose à dire, puisque vous figurez sur la liste des demandes de parole ?

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, les amendements seront traités directement par chaque conseiller d'Etat en regard des politiques publiques concernées. Dès lors que c'est à ce moment-là qu'ils seront abordés, je ferai mon discours sur ce débat d'entrée en matière lorsque le moment sera venu.

Le président. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat, et lance le vote.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12394 à la commission des finances est rejeté par 51 non contre 46 oui.

Le président. Nous continuons notre débat. Monsieur Patrick Saudan, vous avez dix secondes, pas une de plus !

M. Patrick Saudan. Vu le temps qui m'est imparti, je renonce, Monsieur le président.

Le président. Je remercie votre sagesse de s'être exprimée là. Monsieur le député Patrick Dimier, c'est à vous.

M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président. En complément de ce qu'a dit ma collègue Françoise Sapin tout à l'heure, il me semble nécessaire de rappeler ici que, dès l'article premier de notre constitution, il est dit que la République de Genève est fondée sur la solidarité. Cette solidarité n'est pas pour les uns ou pour les autres: la solidarité est globale, elle est solidaire ou elle n'est pas solidaire. Et il est vrai qu'au moment où il faut devenir solidaire, c'est vers ceux qui en ont le plus besoin que nous devons nous tourner. Dans les ajouts faits, qui seront discutés tout à l'heure, si j'ai bien compris Mme Fontanet, il faut quand même préciser que ceux qui vont bénéficier d'une partie de ce boni, c'est l'IMAD, ce sont les HUG, ce sont les EMS, c'est l'Hospice général, c'est le SPAD, le SPMi, la jeunesse... (Commentaires.) Et Police-secours - mais Police-secours relève d'un autre sujet. Les organismes que je viens de citer doivent être les premiers à bénéficier de la solidarité dans cette république si l'on veut respecter notre constitution. Comme vient de me le souffler mon chef de groupe, Police-secours relève d'un autre sujet, c'est une autre problématique: assurer la sécurité de notre population, de nos concitoyens. Bien sûr, tous ces ajouts sont justifiés, ce d'autant que nous restons avec un budget positif. Je suis médusé par la déclaration du PDC, parce que j'ai un peu l'impression qu'il cherche à faire couler le radeau !

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat a adopté son projet de budget au mois de septembre puis l'a présenté à la commission des finances. Ce projet prévoyait un déficit important de 89 millions de francs, ainsi qu'une augmentation des charges de 1,8%. Par souci de coller à la réalité et de ne toucher ni la population ni la fonction publique si ce n'était pas nécessaire, le Conseil d'Etat a fait état des rentrées fiscales supplémentaires dont le canton bénéficiait. C'est dans ce contexte qu'il a revu son projet de budget pour présenter le 7 novembre une nouvelle version, amendée, avec le retour de l'annuité de la fonction publique, avec la prise en compte de certains mécanismes salariaux, d'un déficit de l'IMAD et de nombreuses autres charges supplémentaires pour le canton. C'est ainsi que le projet de budget a été amendé pour arriver à un bénéfice de 63,2 millions, puis, à la sortie de la commission des finances, de 53,3 millions. A ce moment, contre toute attente, malgré un bénéfice, ce budget n'a pas trouvé de majorité. C'est dans ce contexte que les partis ont manifestement joué leur rôle et que le Conseil d'Etat, par sa majorité, a fait siens les amendements qui retraçaient l'accord survenu dans le parlement, convaincu de la nécessité d'avoir un budget pour différentes raisons que je vais vous exposer.

Pourquoi est-ce que le Conseil d'Etat a besoin d'un budget cette année, Mesdames et Messieurs ? D'abord, parce que des réformes très importantes sont prévues, soutenues par l'ensemble du Conseil d'Etat. Ces réformes sont favorables à la population. La première d'entre elles, c'est évidemment la réforme de la fiscalité des entreprises. La deuxième est celle de la caisse de pension de l'Etat de Genève, pour ne pas l'abandonner dans l'état dans lequel elle se trouve. Nous aurons l'occasion d'en reparler plus avant durant le débat qui nous attend les trois prochains jours. La troisième raison, c'est l'entrée en fonction du Léman Express. C'est une attente de notre population. On peut y ajouter des dépenses liées à la mobilité dans notre canton qui sont essentielles. Le quatrième motif est le vieillissement de la population et les besoins qu'il va occasionner pour la prise en charge de nos personnes âgées. Ces motifs découlent évidemment aussi du fait que nous sommes regardés, que nous avons besoin de nous donner les moyens des politiques publiques que nous voulons mener pour notre population. Nous avons besoin de moyens pour accueillir les élèves supplémentaires dans notre canton, nous avons besoin de moyens pour développer la formation après 18 ans. C'est pour toutes ces raisons que le Conseil d'Etat a besoin d'un budget, Mesdames et Messieurs les députés.

C'est pour les mêmes raisons que la majorité du Conseil d'Etat a adopté les amendements qui permettent au canton de se doter d'un budget pour cette première année de la législature. Ce budget n'est pas dans le rouge; il nous permet d'aboutir à un boni de 27,8 millions de francs, mais il nous engage aussi pour l'avenir, parce qu'il crée des postes en supplément de ceux qui sont déjà créés et aura des conséquences pour les années futures. Nous devons en être conscients, et nous devons être conscients également que cela impliquera pour notre canton d'être plus attentif. Aujourd'hui, ce budget est bénéficiaire, mais nous en porterons le poids durant les années à venir.

Mesdames et Messieurs les députés, au nom du Conseil d'Etat, je vous encourage aujourd'hui à accepter l'entrée en matière sur ce budget. Nous examinerons ensuite, politique publique par politique publique, les divers amendements, qui seront défendus par chacun de mes collègues.

Le président. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Je fais voter ce Grand Conseil sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 12394 est adopté en premier débat par 51 oui contre 46 non.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 1 à 6.

Budget de fonctionnement (tome 1)

Le président. Nous arrivons à l'article 7 sur le budget de fonctionnement. Nous sommes d'abord saisis d'une liste d'amendements techniques du Conseil d'Etat.

Amendements techniques du Conseil d'Etat

Le président. Ainsi que prévu dans la procédure, je vous propose un vote en bloc des amendements techniques, qui sont sans incidence budgétaire.

Mis aux voix, ces amendements techniques sont adoptés par 92 oui contre 1 non et 2 abstentions.

Le président. Nous passons aux amendements transversaux linéaires. Je vais vous les faire voter un à un. Le premier émane du Conseil d'Etat. Il est ainsi libellé:

«Tous les programmes, natures 30, 36 et 42

Annuité 2019

Charges: +40 873 291 F

Revenus: +17 768 F»

Mis aux voix, cet amendement transversal linéaire est adopté par 52 oui contre 44 non.

Le président. Le deuxième est aussi déposé par le Conseil d'Etat. Le voici:

«Tous les programmes, natures 30, 36 et 42

Abandon de la mesure consistant à engager les nouveaux collaborateurs 2 classes en dessous de la classe de la fonction

Charges: +18 032 124 F

Revenus: +5809 F»

Mis aux voix, cet amendement transversal linéaire est adopté par 52 oui contre 46 non.

Le président. Le troisième émane du PDC. Il est ainsi conçu:

«Tous les programmes, nature 3 (charges)

Progression de 1,5% au lieu de 1,9% par rapport au budget 2018

-33 472 323 F»

Mis aux voix, cet amendement transversal linéaire est rejeté par 52 non contre 45 oui.

Le président. Le quatrième vient du PLR. Sa teneur est la suivante:

«Tous les programmes, nature 30 (charges de personnel)

-45 000 000 F»

Mis aux voix, cet amendement transversal linéaire est rejeté par 52 non contre 47 oui.

Le président. Le cinquième a été déposé par le PDC. Je vous le lis:

«Tous les programmes, nature 30 (charges de personnel)

Progression de 1% au lieu de 1,6% par rapport au budget 2018

-14 950 975 F»

Mis aux voix, cet amendement transversal linéaire est rejeté par 52 non contre 46 oui.

Le président. Le sixième émane du Conseil d'Etat. Le voici:

«Programmes A05 + C01 + C03 + F03 + F04 + K01, nature 30

Complément de subvention au titre du financement des mécanismes salariaux 2019 (annuité, effet noria et hausse de taux CPEG) selon les rapports des groupes de travail validés par le Conseil d'Etat.

2 990 019 F

Dans le détail, ce montant se décompose en:

800 397 F pour les entités de l'INSOS-Genève et de l'AGOEER (programmes A05, C01, C03, C05, F03, F04);

1 461 397 F pour les EMS (programme K01);

563 816 F pour l'IMAD (programme K01);

164 409 F pour l'Hospice général - asile (programme C05).»

Mis aux voix, cet amendement transversal linéaire est adopté par 94 oui contre 3 non.

Le président. Le septième est présenté par le PLR. Il est ainsi libellé:

«Tous les programmes, nature 31 (Charges de biens et services et autres charges d'exploitation)

-8 624 949 F»

Mis aux voix, cet amendement transversal linéaire est rejeté par 52 non contre 47 oui.

Le président. Le huitième vient aussi du PLR. Sa teneur est la suivante:

«Tous les programmes, nature 31 (3132: Honoraires conseillers externes, experts, spécialistes, etc.)

Retour aux montants du budget 2018

-5 629 160 F»

Mis aux voix, cet amendement transversal linéaire est rejeté par 52 non contre 47 oui.

Le président. Le neuvième a été déposé par le PDC. Il est libellé comme suit:

«Tous les programmes, nature 31 (Charges de biens et services et autres charges d'exploitation)

Augmentation des charges de 1,5% au lieu de 2,5% sur le budget 2018 par rapport au budget 2019

-4 791 438 F»

Mis aux voix, cet amendement transversal linéaire est rejeté par 52 non contre 47 oui.

Le président. Le dixième, enfin, émane du PLR. Le voici:

«Tous les programmes, nature 36 (Charges de transfert)

-86 386 240 F»

Mis aux voix, cet amendement transversal linéaire est rejeté par 52 non contre 47 oui.

I - IMPOTS ET FINANCES

Le président. Nous commençons avec la politique publique I. Le Conseil d'Etat présente un amendement au programme I01 «Impôts, taxes et droits», nature 40 «Revenus fiscaux»: +192 500 000 F (revenus). Je passe la parole à M. le député Jean Rossiaud.

M. Jean Rossiaud. Je renonce. Je pensais que nous débattions déjà de cette politique publique.

Le président. Très bien. Nous votons donc sur l'amendement du Conseil d'Etat.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 53 oui contre 45 non.

Le président. Nous avons un autre amendement du Conseil d'Etat au même programme, nature 46 «Revenus de transferts»: +22 100 000 F (revenus).

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 52 oui contre 46 non.

Le président. Je vais mettre cette politique publique aux voix... (Remarque.) Je m'excuse, M. de Sainte Marie a demandé la parole.

M. Romain de Sainte Marie (S). Merci, Monsieur le président. Je suis un peu étonné, je crois que M. Rossiaud voulait aussi s'exprimer sur cette politique publique. Libre à lui de prendre ensuite la parole ! Je vais dire quelques mots sur ce projet de budget et aussi sur l'évolution des éléments votés lors du précédent budget, notamment sur l'embauche de taxateurs supplémentaires. Après ces engagements, le projet de budget 2019 prévoit d'embaucher trois ETP de plus, et on ne peut que saluer le fait que le Conseil d'Etat aille de l'avant. On se rappelle que c'est une résolution déposée par les partis de gauche et le MCG durant la précédente législature qui avait demandé que des taxateurs supplémentaires soient engagés. On en a vu les effets positifs, le Conseil d'Etat les a compris: il estime que cela a rapporté environ 33 millions de francs.

On peut naturellement saluer la réévaluation de la fiscalité immobilière, mais là, ma foi, le Conseil d'Etat n'a rien fait de particulier, puisqu'il faut appliquer une norme fédérale; on ne fait finalement qu'appliquer le droit fédéral. Ça a pris du temps, il y a eu beaucoup de débats, mais les premiers effets positifs de cette réévaluation devraient se faire sentir en 2019 avec 28 millions de francs de recettes fiscales supplémentaires. Le plan financier quadriennal l'estime par contre à 100 millions environ, avec 72 millions supplémentaires, je crois, en 2021; on pourra, là, s'inquiéter, mais ça concerne un prochain budget, qui nous sera soumis dans plusieurs années, un prochain projet de budget sur lequel il faudra être attentif puisque cette réévaluation pourrait en réalité rapporter bien plus - et le groupe socialiste fera attention, dans le futur, à ce qu'il n'y ait pas une baisse de l'imposition sur la fortune.

Un élément, ou peut-être une parenthèse, sur les taxateurs supplémentaires: puisque nous l'avons abordée à la commission fiscale, je voudrais juste évoquer la question de l'imposition des véhicules motorisés. Nous regrettons qu'il n'y ait encore rien de fait, à Genève, concernant le contrôle des immatriculations; il faut donc agir. Le groupe socialiste déposera prochainement un objet dans ce but afin de contrôler davantage l'évasion fiscale liée aux véhicules motorisés, principalement des grosses cylindrées, estimées à environ 3000 - soit un manque à gagner pour l'Etat de Genève d'environ 3 millions de francs par année.

Enfin, je dirai un mot sur la réforme de la fiscalité des entreprises, qui est certainement la réforme de cette décennie. Pour rassurer les bancs UDC, après les propos tenus par notre collègue M. Leyvraz, et suite aux amendements PLR et PDC qui viennent heureusement d'être refusés, il faut peut-être préciser une chose: il ne s'agit pas de diminuer de façon transversale les charges, dans ce projet de budget 2019, pour anticiper la réforme de la fiscalité des entreprises et justifier ainsi un budget d'austérité qui viserait à réaliser des économies sur les prestations publiques. Non ! L'accord trouvé à la commission fiscale permet une réforme viable. Il a également permis de diviser quasiment par deux, notamment pour les communes, les pertes fiscales qu'engendrerait cette baisse de la fiscalité, et d'accompagner naturellement cette baisse d'un volet social, essentiel pour les Genevoises et les Genevois. Je vous remercie donc, Mesdames et Messieurs, d'accepter cette politique publique.

M. Jean Rossiaud (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, le budget concernant la politique publique I «Impôts et finances» n'a pas fait l'objet de grandes controverses. Maintenir un Etat de droit irréprochable, maintenir un Etat social efficace et efficient demande de pouvoir compter sur des ressources pérennes pour assurer les politiques publiques que le peuple et ses représentants que nous sommes ont choisies. Si l'argent est le nerf de la guerre, le budget est le nerf de la paix sociale car il est le centre névralgique du contrat social. L'administration fiscale cantonale et le département des finances doivent être capables d'assumer au mieux leur mandat de garants de la levée de l'impôt et de la gestion exemplaire des deniers publics. C'est pour cela que les Verts accordent une importance particulière à cette politique dite «Impôts et finances». Les Verts la voteront donc, et ils tiennent d'ores et déjà à remercier tous les collaborateurs de l'administration fiscale, qui font leur travail avec une grande rigueur et beaucoup d'engagement. Ce sont les vigiles du contrat social. Merci !

Cependant, il faudrait davantage de postes de taxateurs - on l'a dit, vous en avez accordé quelques-uns, mais on peut faire encore mieux - pour aller chercher l'impôt là où il se dissimule. Mais il faut également des postes de prospective pour repenser la politique fiscale et alimenter notre réflexion de députés et celle des conseillers d'Etat. Car le budget 2019, et nous le regrettons, n'est pas très différent du budget des années précédentes. Comme Mathias Buschbeck l'a dit, les Verts pensent que ce budget ne prend pas la mesure des risques que Genève et la Suisse courent actuellement, qui s'avéreront toujours plus importants dans les années à venir.

Je parlerai ici de deux risques planétaires qui ont un impact direct sur la vie quotidienne des résidents et des entreprises, ici, à Genève, et auxquels nous devrions nous attaquer avec les armes de la fiscalité. Le premier est le risque climatique et son corollaire, celui de l'augmentation de la pollution, qui touchent très fortement la santé de la population: plus de 300 morts supplémentaires par an à Genève et probablement 15 à 20 fois plus de malades. Ce risque à lui seul mériterait qu'on refonde pratiquement toutes les politiques publiques que nous étudions aujourd'hui pour faire de chacune d'entre elles des promotrices de la santé et d'une vie saine, dans un environnement sain et maîtrisé. Le risque est planétaire, certes, mais si nous faisons notre part, nous n'en vivrons que mieux au quotidien et nous économiserons énormément d'argent en mesures réparatrices d'un système délétère que nous entretenons avec constance et obstination. Faire entrer nos politiques publiques dans un paradigme de durabilité, c'est, à court et moyen termes, moins d'impôts à lever, car moins de dépenses sanitaires et sociales à couvrir. Maîtriser la croissance, c'est retrouver notre souveraineté sur notre territoire et arrêter la fuite en avant. Orienter la fiscalité en taxant l'impact négatif sur l'environnement et la société chaque fois que c'est possible - peut-être en taxant moins le travail - serait bénéfique à la fois pour les individus et pour les entreprises.

Le second risque systémique est celui d'une nouvelle crise financière, qui aurait sans aucun doute des implications directes sur les entreprises locales, notamment sur celles qui se retrouveraient brutalement sans liquidités et seraient amenées à brève échéance à faire faillite, avec les drames sociaux que cela implique. Il est primordial de réorienter l'économie genevoise vers un tissu dense de très petites, de petites et de moyennes entreprises, un tissu solide, aux mailles bien serrées, qui constituerait un filet économique avant le filet social; une économie qui développerait ses activités dans des circuits courts, proposant des biens et des services sains et durables au bénéfice direct de la population locale. Moins d'attractivité économique, c'est à la fois plus de souveraineté, plus de prospérité maîtrisée et plus de durabilité.

Le système actuel est tout sauf résilient, et la politique fiscale peut - et doit - être l'outil d'une réorientation vers davantage de résilience face aux crises et davantage de prospérité collective et partagée. La nouvelle réforme des entreprises ne tient par exemple compte que de l'équilibre budgétaire. Son objectif clair est de favoriser le maintien et l'implantation de multinationales. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Or le secteur des multinationales représente 40% du PIB de Genève, et il n'est pas raisonnable d'être collectivement aussi dépendant d'un petit nombre d'entreprises - dont certaines se comportent de manière non responsable, voire criminelle, dans les pays de production - entreprises qui nous mettent le couteau sous la gorge à la moindre réforme, menaçant: «N'augmentez pas nos impôts ou nous partons !» Nous ne devons pas céder à ce chantage, Mesdames et Messieurs les députés. Il en va de notre dignité, il en va de notre prospérité ! (Remarque.) Pardon ? Oui, je conclus ! Notre intérêt bien compris est évidemment de continuer à accueillir les entreprises multinationales, mais pas en si grand nombre. Et nous devons mettre en place des boîtes à outils fiscaux pour conserver et attirer à Genève les entreprises transnationales qui développent mondialement une politique responsable en matière environnementale et sociale. Pour conclure, une image à laquelle la droite de ce parlement aime bien faire appel à la commission fiscale...

Le président. Le temps imparti est de cinq minutes, Monsieur le député.

M. Jean Rossiaud. ...c'est que l'économie - je termine là-dessus - est comme un avion: si l'on ne maintient pas une vitesse de croisière, c'est-à-dire une croissance soutenue par l'attractivité auprès des entreprises multinationales, l'avion tombe et Genève tombe dans la misère. Les Verts proposent un atterrissage en douceur avant que notre avion n'explose de toute manière dans le mur de la réalité écologique et sociale. Pour éviter cette conflagration, nous demandons de faire une halte sur le tarmac...

Le président. S'il vous plaît !

M. Jean Rossiaud. ...et de prendre consciemment une autre direction, vers un autre but. Peut-être n'aurons-nous d'ailleurs pas besoin de prendre l'avion pour nous y rendre. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

Le président. Merci. Mesdames et Messieurs, je signale que chaque groupe a soixante minutes, mais que les interventions devraient se borner à cinq minutes. Je ne tiens pas à une précision absolue... (Remarque.) C'est égal: il prend sur le temps du groupe. La parole est à M. Jean Batou.

M. Jean Batou (EAG). Merci, Monsieur le président. L'occasion m'est donnée de rappeler que quand on discute d'un budget, on discute des recettes et des dépenses - des recettes et des charges. Là, tous les regards sont braqués sur les charges et on ne parle guère des recettes alors que nous avons eu la bonne surprise de les voir augmenter de 230 millions ! C'est toujours un peu le cas: quand on discute du budget, on commence en étant très alarmiste pour découvrir au fil du temps des ressources inespérées. Et au moment des comptes - je fais un pronostic: ceux-ci seront largement excédentaires - on s'aperçoit que tous les cris d'alarme lancés pendant les débats sur le budget étaient destinés à mettre en place des politiques d'austérité injustifiées. Ensemble à Gauche a réussi à obtenir un petit correctif qui va dans le bon sens, et il votera le budget. Mais j'aimerais rappeler que nous avons un champ inexploré, inexploité, au niveau des recettes: le champ de l'évasion fiscale est toujours à notre disposition. Je répéterai à l'envi que plusieurs centaines de millions de francs échappent au fisc faute de moyens pour éviter l'évasion fiscale, qui concerne une couche restreinte de privilégiés.

Enfin, comme le fait la droite pour les charges, j'aimerais sonner l'alarme pour l'avenir des recettes. J'aimerais sonner l'alarme parce que si la RFFA version genevoise est adoptée - c'est-à-dire si on baisse massivement l'imposition des grandes entreprises - eh bien, selon le compromis actuel conclu entre la droite et le parti socialiste, il y aura 241 millions en moins pour les collectivités publiques en 2020, 327 millions en 2021, 365 millions en 2022, 387 millions en 2023 et enfin 407 millions en moins en 2024 ! Pour faire passer la pilule, on l'a enrobée d'une petite couche de sucre rose qui porte à 186 millions les dépenses pour les subsides d'assurance-maladie. Mais il y a un problème, Mesdames et Messieurs les députés: il n'y a aucun financement pour ces 186 millions ! Ce qu'on a obtenu - enfin, le parti socialiste, pas nous - c'est un assouplissement des règles du frein au déficit: on va financer des dépenses aussi fondamentales que les subsides d'assurance-maladie grâce à l'endettement ! Et après ? Comment fera-t-on quand la limite du frein à l'endettement sera atteinte ? Un jour ou l'autre, je vous le dis, il faudra ouvrir sérieusement le dossier des recettes et faire contribuer de manière plus conséquente aux besoins de la population les privilégiés, les entreprises qui font de gros bénéfices, les plus hauts revenus, les plus grosses fortunes. (Applaudissements.)

M. Patrick Dimier (MCG). Monsieur le président, juste un mot sur l'engagement de nouveaux taxateurs, ou de nouveaux fonctionnaires. Nous comptons sur l'administration pour veiller à ce que ceux-ci soient bien résidents genevois et non pas venus d'ailleurs. Parce que si vous engagez des gens qui viennent d'ailleurs, vous n'engagez pas des Genevois ou des résidents genevois et il y a donc un risque accru de recours à l'aide sociale.

M. Marc Fuhrmann (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, je suis sidéré par certains propos que j'entends ici, notamment que Genève ne serait pas l'enfer fiscal du pays. Je pense que notre cher député ne connaît personne qui paie des impôts et donc évidemment personne qui a quitté ce canton pour aller chercher ailleurs un peu de protection, si j'ose dire. Je suis aussi sidéré par les discussions relatives au rôle de l'Etat et à ses tâches. Si nous sommes tous d'accord qu'il doit les accomplir, certaines sont évidemment beaucoup plus importantes que d'autres ! En voulant trop en faire, on charge le chariot bien trop lourdement et tout le monde va finalement en souffrir. L'Etat devrait garder ses fonctions de base qui sont l'éducation, les infrastructures, la santé en partie aussi, évidemment, mais certainement pas d'autres éléments qui devraient être revus !

D'autre part - je crois qu'on l'a entendu plusieurs fois, mais je suis sidéré - le monde entier se restructure au niveau économique et cherche de nouvelles façons de fonctionner, tandis qu'ici, à l'Etat de Genève, il ne se passe quasi rien par rapport à une certaine modernisation. On n'en parle quasiment pas alors qu'il y a tant à faire ! Vous évoquiez, notamment à gauche, beaucoup de précarité; eh bien les plus précaires ne se trouvent pas, aujourd'hui, au niveau de l'Etat, mais évidemment du côté de la population. Il n'y a pas eu non plus de recadrage de cet appareil d'Etat pendant les bonnes années, et tout le monde a ses exemples pour montrer que les années à venir ne vont pas être faciles. Si les revenus sont un peu plus élevés qu'espéré, je pense que ça ne va pas durer et ce n'est certainement pas là-dessus qu'il faut faire reposer des dépenses publiques d'avenir. Voilà, c'était pour recadrer ce point.

Des voix. Bravo !

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de deuxième minorité. C'est vrai qu'on a beaucoup de chance, à Genève, d'avoir des rentrées fiscales considérables, d'avoir de bonnes surprises, d'avoir des millions qui tombent comme ça, comme par miracle. Nous avons cette chance, mais ça ne doit pas cacher la situation délicate dans laquelle nous sommes par rapport à la péréquation financière: nous nous faisons arnaquer, nous nous faisons duper par les autres cantons. Le MCG va se battre pour faire en sorte que les Vaudois, les Valaisans ne profitent pas de notre naïveté ou de notre gentillesse. Comme l'a dit le député Dimier, nous allons aussi nous battre pour que nous n'ayons pas du personnel frontalier au sein de l'administration fiscale, comme malheureusement ça se fait. C'est un problème fondamental s'agissant de la sécurité des données fiscales des citoyens et des résidents genevois, et nous devons nous battre pour cela. Nous devons nous battre pour avoir cette garantie, et le MCG continuera à le faire. Nous encourageons le Conseil d'Etat à aller dans cette direction.

M. Christian Dandrès (S), rapporteur de première minorité. Permettez-moi deux remarques complémentaires aux propos de mon collègue Romain de Sainte Marie. Tout d'abord, il n'est plus question de 230 millions de francs mais de 214,6 millions, et pour cause: le Grand Conseil a refusé la LEFI, ou l'a en tout cas passablement ratiboisée, et nous perdons 17 millions au passage. Cela me permet de rappeler brièvement à M. Hiltpold une maxime assez claire: charité bien ordonnée commence par soi-même ! Il nous a dit tout à l'heure que le parti socialiste serait à la botte du Cartel; son choix - ou celui de son parti - concernant la LEFI est probablement dicté par d'autres considérations.

L'autre remarque concerne les taxateurs: le Conseil d'Etat a décidé l'engagement de taxateurs pour obtenir des moyens supplémentaires, et je crois que c'est une bonne chose. Ça met en lumière le fait que la capacité logistique à percevoir l'impôt est un point fondamental. Mais un élément suscite une très grande inquiétude: ce n'est pas tant l'engagement de taxateurs frontaliers qui ferait courir un risque, une menace sur les rentrées fiscales, mais plutôt le pantouflage auquel on assiste depuis un certain nombre d'années. Des personnes qui, au sein de l'administration fiscale, ont des rôles déterminants, stratégiques, des rôles de direction, la quittent du jour au lendemain et vont travailler dans le département fiscal de l'étude de Me Lüscher, pour ne pas le citer - il n'est pas seul dans cette étude ! C'est un phénomène éminemment problématique qui, très honnêtement, relève de l'infraction pénale dans la plupart des Etats, notamment en France. A Genève, ça ne pose absolument aucun problème, et il faudra à mon avis y remédier dans les prochaines années, car je crois qu'il y a là une vraie menace.

Si on trace un parallèle avec la loi sur la police, il était prévu qu'une personne travaillant à la police ne pouvait pas ensuite, pendant une certaine période, travailler dans des sociétés de sécurité privées - cette disposition a été contestée par les syndicats de la police et cassée par le Tribunal fédéral. Le Conseil d'Etat avait expliqué que c'était un enjeu absolument essentiel, notamment en matière de conflit d'intérêts. En revanche, s'agissant de hauts cadres de l'administration qui vont travailler dans le même domaine que celui pour lequel ils étaient engagés à l'Etat, il n'y a absolument rien. C'est même pire que ça: le Conseil d'Etat saluait ces démarches en expliquant que c'était bien la preuve de la compétence des collaborateurs qu'il engageait. Je ne mets évidemment pas en cause la compétence des personnes qui sont passées dans ces études, notamment dans les départements fiscaux. Je suis néanmoins intimement convaincu que ce n'est pas prioritairement pour ce motif-là qu'elles ont été engagées, mais bien parce qu'elles connaissent les rouages de l'administration. De ce fait, elles sont à même de conseiller les clients de ces études pour qu'ils évitent l'imposition maximale dans les limites permises par la loi ! Je vous remercie.

M. Serge Hiltpold (PLR). Mon intervention sera très brève. On se félicite des rentrées fiscales; oui, il y a effectivement des éléments non récurrents. Mais j'entends aussi qu'il y a des revenus qui arrivent par miracle. Ce n'est pas un miracle ! Le revenu que génèrent les entreprises est simplement le fruit du travail. C'est le fruit du travail ! Les rentrées fiscales ne sont absolument pas miraculeuses, c'est simplement un travail qui est taxé. On peut rendre à César - c'est-à-dire à l'économie - ce qui est à César: les entreprises paient des impôts grâce au fruit d'un travail et non grâce à des subventions et à l'assistanat. (Commentaires. Applaudissements.)

M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Ça nous a pris du temps, mais le débat est lancé ! (Rires.) J'aimerais juste apporter quelques corrections, parce que, même si on n'en a pas l'impression, on travaille parfois un peu, à la commission des finances ! J'aimerais donc répondre aux propos erronés de M. Dimier par rapport à l'engagement de frontaliers. La problématique des frontaliers au sein de l'administration n'est pas liée à l'engagement de personnes domiciliées en France. Ça n'a rien à voir: nous avons demandé les statistiques. En réalité, ce sont des gens qui habitent en Suisse au moment de leur engagement et qui s'installent par la suite en France ! Le problème rencontré aujourd'hui - si tant est que ce soit un problème, et on peut encore en discuter parce que je ne suis pas sûr que ce soit le cas - c'est que Genève est incapable de donner un logement à ces gens-là, et ils vont s'établir soit dans le canton de Vaud soit en France voisine. C'est ainsi que les choses se passent, parce que les employés de l'Etat ont un fort pouvoir d'achat et recherchent des logements que le canton n'est pas capable de leur fournir. Ils sont donc une majorité à le quitter. Les statistiques concernant l'administration le démontrent: la plupart des gens domiciliés en dehors de Genève ont été engagés alors qu'ils vivaient dans le canton... (Protestations.) ...et il faudra en tenir compte ! (Remarque.) Ce sont les statistiques ! Il suffit de relire le rapport sur les comptes de l'année 2017, sauf erreur, et vous pourrez constater, Monsieur Sormanni, que ces statistiques nous ont été fournies dans le cadre de nos travaux !

La deuxième chose, c'est que je dois approuver les investissements réalisés ces dernières années: ils ont permis de rattraper ce qui n'a pas été fait par les autorités, le Grand Conseil et le Conseil d'Etat. Contrairement à ce que j'ai entendu de la bouche de M. Baertschi, on n'a pas de la chance d'avoir des rentrées fiscales importantes. Ça n'a rien à voir avec la chance ! C'est parce qu'on a eu, en leur temps, des autorités suffisamment responsables pour investir et pour fixer des conditions-cadres satisfaisantes attirant des sociétés et permettant une économie florissante. Voilà ce qui aujourd'hui est mis à mal. Dans un délai relativement long - parce que les cycles sont longs - ce qui faisait considérer ce canton comme un eldorado quant aux conditions-cadres, aux facilités de travail et à la possibilité d'avoir des employés bien logés, qui travaillent bien, qui soient honnêtement rémunérés, avec un pouvoir d'achat tout à fait compétitif, eh bien tout cela disparaîtra de plus en plus. C'est ça, l'enjeu ! Bien sûr, nous rattrapons notre retard dans les infrastructures, comme avec le CEVA, et c'est bienvenu: c'est ce qui nous permettra de ne pas vivre simplement dans la Genève intra-muros mais dans une Genève un peu plus vaste - c'est comme ça qu'on doit pouvoir vivre à Genève  !

S'agissant maintenant des fonctionnaires qui rejoignent le privé, j'ai écouté avec attention ce qui a été dit et les attaques ad hominem de l'un des rapporteurs de minorité. Quant à moi, je suis rassuré, finalement, que certains agents publics rejoignent le privé pour expliquer comment faire pour respecter la loi... (Exclamations.) ...comment faire pour que les choses se passent bien... (Commentaires.) ...sauf à supposer que les fonctionnaires soient formés à frauder la loi, si c'est ce que vous voulez dire. Non ? (Commentaires.) En passant dans le privé, ils font profiter le plus grand nombre des pratiques en usage au sein de l'administration. De la sorte, chaque citoyen, chaque entreprise de ce canton sont conseillés au mieux pour que la loi soit respectée, la loi, toute la loi, rien que la loi ! Je crois que ces choses doivent être dites.

Je conclurai en répétant que la prospérité de notre canton, les rentrées fiscales ne sont strictement en rien dues au hasard: elles sont le résultat de conditions-cadres faites à nos entreprises, conditions-cadres qu'on malmène année après année et qu'on essaie de rendre moins compétitives. Vous verrez que le réveil sera douloureux ! (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie. La parole est au député Daniel Sormanni, à qui je rappelle qu'il s'adresse à moi et non à M. Aellen. (Rires.)

M. Daniel Sormanni (MCG). Excusez-moi, Monsieur le président ! Vous pourrez transmettre à M. Aellen que je ne partage pas son point de vue lorsqu'il dit qu'on dégrade les conditions de fonctionnement de notre économie et des entreprises ! On est en train de réduire massivement les impôts des entreprises, je pense donc qu'on améliore grandement, à ce niveau-là, le cadre législatif pour l'épanouissement et le développement de l'économie genevoise. Il faut quand même un petit peu remettre l'église au milieu du village. Je suis pour ! Je suis favorable à ce qu'on le fasse, mais ne venez pas dire qu'on dégrade les conditions de l'emploi et de l'épanouissement des entreprises à Genève: c'est parfaitement faux.

En ce qui concerne les frontaliers, un certain nombre habitaient effectivement à Genève quand ils ont été engagés, mais il y en a aussi un certain nombre qui habitaient déjà de l'autre côté de la frontière. Notre république continue à les engager, prétextant qu'elle ne trouve pas les compétences à Genève, ce qui là aussi est parfaitement erroné !

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Je voudrais apporter quelques réponses aux propos tenus. D'abord, à ceux qui s'inquiètent de la politique fiscale menée par notre canton, j'aimerais rappeler que 82% des revenus de l'Etat sont issus des revenus fiscaux. C'est dire l'importance qu'ils ont pour le financement des prestations à la population. Je relèverai aussi que Genève est le canton qui exploite le plus son potentiel fiscal. Ce n'est pas rien: dans notre canton, on taxe plus !

Parlons maintenant de la pyramide des impôts, Mesdames et Messieurs, qui, plutôt que de reposer sur son côté large, repose sur sa pointe, et qui fait courir un danger à notre canton. 66% des contribuables paient des impôts sur le revenu, ce qui signifie que 34% n'en paient pas. Et 1% des contribuables paient 32% de l'impôt sur le revenu, Mesdames et Messieurs ! S'agissant de l'impôt sur la fortune, ils sont 27% des contribuables à y être astreints, et 1% de ces contribuables en paient le 67%. Au lieu de dire que nous devons taxer encore et encore ces contribuables qui assument la majeure partie de l'impôt, une fois n'est pas coutume, disons-leur plutôt merci.

S'agissant de la péréquation financière, Mesdames et Messieurs, j'ai là de bonnes nouvelles liées à l'étude du rapport d'efficacité. Alors que nous versons aujourd'hui 398 millions pour la péréquation des ressources et que nous recevons 103 millions pour la compensation des charges, nous devrions, d'ici 2021, payer quelque 50 millions de moins au titre de la péréquation des ressources et recevoir entre 30 et 40 millions de plus pour la compensation des charges. Ce sera voté le printemps prochain au Conseil national.

Je voudrais revenir quelques instants sur les accusations formulées à l'encontre des collaborateurs de l'AFC qui quittent cette institution pour rejoindre le privé.

Une voix. C'est scandaleux ! Scandaleux !

Mme Nathalie Fontanet. Mesdames et Messieurs, ce sont des accusations inacceptables, et ce pour plusieurs raisons. D'abord parce que l'AFC travaille de façon exemplaire, cela a été reconnu - et je remercie les députés qui l'ont reconnu ! Elle applique la loi: tous les citoyens sont et doivent rester égaux devant l'impôt. Des collaborateurs qui ont travaillé pendant des années au sein de l'administration fiscale cantonale, des collaborateurs qui connaissent les règles, des collaborateurs qui font respecter cette égalité devant l'impôt, eh bien cela me navre que ces collaborateurs-là rejoignent des études privées, parce que c'étaient des collaborateurs efficaces ! Mais cela me réjouit aussi, car cela contribue à faire en sorte que les règles de notre canton, qui sont appliquées par notre administration, le soient dans le privé, dans les études d'avocat. Cela est important parce que l'égalité devant l'impôt doit s'appliquer à tous, Mesdames et Messieurs.

Pour le surplus, je me réjouis que la réforme de la fiscalité des entreprises ait fait l'objet d'un consensus à la commission fiscale. Il s'agit, aux yeux du Conseil d'Etat, de «la» réforme de la législature en matière fiscale, et l'ensemble du Conseil d'Etat se réjouit de cette première étape. Merci, Mesdames et Messieurs. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je mets maintenant aux voix la politique publique I «Impôts et finances» ainsi amendée - vous avez en effet accepté deux amendements.

Mise aux voix, la politique publique I «Impôts et finances» ainsi amendée est adoptée par 53 oui contre 6 non et 39 abstentions.

Deuxième partie des débats sur le budget 2019 (suite du 2e débat): Séance du jeudi 13 décembre 2018 à 17h