République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2241
Proposition de motion de Mmes et MM. Nathalie Fontanet, Pierre Conne, Serge Hiltpold, Jacques Béné, Raymond Wicky, Michel Ducret, Ivan Slatkine, Bernhard Riedweg, Simone de Montmollin, Beatriz de Candolle, Edouard Cuendet, Jean-Marc Guinchard, Antoine Barde, Bertrand Buchs, Murat Julian Alder, Gabriel Barrillier, Vincent Maitre, Bénédicte Montant, Frédéric Hohl, Béatrice Hirsch, Jean-Luc Forni, Thomas Bläsi, Christo Ivanov, Daniel Zaugg : Libre choix de l'hôpital : garantir l'égalité de traitement entre cliniques privées et HUG

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs, nous arrivons aux délais de traitement en commission dépassés et commençons par la M 2241, classée en catégorie II, trente minutes. Pour cet objet, le deuxième délai de traitement est dépassé: nous ne pouvons plus le renvoyer en commission. La parole est à M. le député Pierre Conne.

M. Pierre Conne (PLR). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, je demande d'ajourner cet objet à la prochaine plénière. (Commentaires.)

M. Christian Dandrès (S). Cette motion n'est plus d'actualité: elle avait pour but de peser sur la décision du Conseil d'Etat prise en juin 2015 concernant la liste hospitalière en vigueur dès cette année-là et qui l'est toujours actuellement. Cet objet s'inscrivait dans le contexte des pressions que le lobby des cliniques privées faisait peser sur une partie des députés de manière à élargir l'approche du Conseil d'Etat en matière de financement hospitalier. Vous savez que ce système a changé depuis le 1er janvier 2012 et qu'aujourd'hui, les cantons doivent tenir une planification hospitalière, ce qui est évidemment souhaitable: le canton l'a fait, de manière intelligente, sur la base d'une planification sanitaire plus globale. Ils doivent également prendre en charge des prestations des cliniques privées, ce qui pose d'énormes problèmes, parce que - on en a parlé ce matin à propos des soins dentaires - les coûts des soins augmentent, non parce que les personnes sont plus souvent malades, mais parce que les frais des cliniques privées sont aujourd'hui à charge de l'assurance obligatoire des soins. Les hausses communiquées sur la base de statistiques assez récentes étaient de l'ordre de 25% pour les cantons qui avaient fait preuve des largesses que préconise cette motion, et, pour la Suisse, de 15%. A Genève, une approche beaucoup plus raisonnable, avec des prestations limitées, a permis de limiter ces coûts à 4% à 5% d'augmentation. Il est souhaitable que le Conseil d'Etat continue sur cette lancée, raison pour laquelle le groupe socialiste non seulement refusera l'ajournement mais aussi cette motion. (Quelques applaudissements.)

M. Pierre Nicollier (PLR). Monsieur le président, chers collègues, cette motion a été déposée en 2014 et concerne un changement dans la législation fédérale datant de 2012. Pour rappel, il avait alors été décidé de passer d'un subventionnement aux hôpitaux à un paiement par cas, les DRG. Dans ce cadre, il avait aussi été décidé au niveau fédéral de permettre à des cliniques privées comme aux institutions cantonales de prendre en charge les patients selon cette formule des DRG. On a vu que dans de nombreux cantons, les cliniques privées permettent la prise en charge de ces cas à des coûts moindres que dans les hôpitaux cantonaux. Ce que demande cette motion, c'est de permettre à un patient, à un citoyen de décider dans quel établissement il veut être soigné, sachant que l'on parle ici de prise en charge par l'assurance obligatoire des soins, non de celle par les assurances complémentaires. Cela doit engendrer une baisse des coûts et une concurrence entre les différents établissements. Je comprends qu'on ne veuille pas cette concurrence et qu'on essaie d'en protéger certains; il faut savoir que les hôpitaux publics sont payés séparément pour la formation, pour les infrastructures. On parle ici purement des coûts de la prise en charge.

Un autre élément qu'il est important de savoir, c'est qu'à Zurich par exemple, la planification a été faite de manière complètement différente: les établissements privés qui désirent pouvoir prendre en charge des cas de l'assurance obligatoire de soins, donc pour tous les citoyens, doivent prendre un nombre minimum de cas afin de garantir la qualité de la prise en charge. A Genève, on limite cette prise en charge, ce qui, de facto, empêche les cliniques privées de créer des centres de compétences, de se développer et de proposer une médecine de qualité. Nous demandons par conséquent au moyen de cette motion que la prise en charge à Genève soit effectuée comme elle l'est dans d'autres cantons, en se basant sur des exemples comme celui de Zurich. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est maintenant à Mlle ou Mme Alessandra Oriolo.

Mme Alessandra Oriolo (Ve). Merci, Monsieur le président. Comme l'ont dit mes collègues, actuellement, le patient a le droit de choisir le lieu de son opération, c'est-à-dire qu'il peut choisir entre clinique privée ou hôpital et il est remboursé pour les soins, alors que le coût de l'hôtellerie en clinique privée est pris en charge par l'Etat, qui a bien évidemment mis en place des quotas pour financer cela. Vous comprendrez que cela a pour conséquence des coûts non négligeables pour l'Etat. Cette motion qui vise à maintenir le libre choix du lieu et à supprimer les quotas pose de nombreux problèmes. Ceux qui abondent dans ce sens soutiendront que les cliniques privées sont moins chères: c'est facile, elles ont le libre choix des opérations qu'elles souhaitent faire. Cette motion demande qu'il y ait une égalité de traitement entre cliniques et hôpitaux, là où il y a une inégalité fonctionnelle. Comment pouvons-nous garantir l'égalité de traitement entre cliniques privées et HUG, alors que leurs devoirs ne sont pas similaires ? L'hôpital public doit soigner tout un chacun, sans distinction et sans discrimination, alors que les cliniques peuvent choisir qui soigner et quoi soigner. On ne peut demander une égalité de traitement quand on ne peut pas comparer le rôle d'un hôpital universitaire et celui d'une clinique.

Pour les Verts, cette motion est une revendication des cliniques privées qui aimeraient une régulation entre le public et le privé afin qu'elles puissent perfectionner leurs pôles d'excellence. La planification hospitalière est certes un sujet complexe et la situation à laquelle nous devons faire face n'est pas simple. Mais encourager les cliniques privées pour pallier cette problématique n'est absolument pas la direction que les Verts souhaitent prendre. Les compétences doivent rester dans le public, et c'est justement là qu'il faut investir plus de moyens. Il s'agit de défendre un service public et non pas de défendre les intérêts économiques de cliniques privées. Pour ces raisons, les Verts vous suggèrent de refuser cette motion. Merci. (Quelques applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Madame la députée. La parole est pour sept secondes à M. Pierre Nicollier.

M. Pierre Nicollier (PLR). Monsieur le président, Messieurs et Mesdames les députés, juste pour clarifier, nous ne parlons pas ici d'assurance privée mais d'assurance de base, et il y a une obligation pour les établissements de prendre en charge les patients.

M. Pablo Cruchon (EAG). Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'aimerais juste ajouter à l'excellente intervention de Mme Oriolo un autre élément qui représente une inégalité structurelle entre les hôpitaux universitaires publics et les cliniques privées: il s'agit évidemment de la rémunération... (Remarque.) Pardon ? (Remarque.) Oh, ils vont bien !

Le président. Continuez, Monsieur le député !

M. Pablo Cruchon. Il s'agit évidemment de la rémunération des employés. Le jour où les cliniques privées appliqueront les mêmes salaires et les mêmes conditions de travail que dans le service public, on pourra parler d'une égalité de traitement dans les profits. Ce n'est pas le cas, et c'est bien ainsi que les cliniques privées dégagent du profit pour les actionnaires ou pour les directeurs. Ensemble à Gauche est absolument opposé à cette motion.

Une voix. Ah !

Le président. Je vous remercie. Nous avons une demande d'ajournement, que je mets aux voix.

Mis aux voix, l'ajournement de la proposition de motion 2241 est rejeté par 43 non contre 36 oui.

Mise aux voix, la proposition de motion 2241 est rejetée par 44 non contre 37 oui. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)