République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2305
Proposition de motion de Mmes et MM. Jean Romain, Nathalie Fontanet, Yvan Zweifel, Jacques Béné, Murat Julian Alder, Bertrand Buchs, Raymond Wicky, Georges Vuillod, Francisco Valentin, Bernhard Riedweg, Jean-Marie Voumard, Sandra Golay, Daniel Sormanni, Danièle Magnin, Pascal Spuhler, Jean-François Girardet, Henry Rappaz, Florian Gander, Gabriel Barrillier, Guy Mettan, Christian Flury, Philippe Morel, Michel Ducret, Stéphane Florey, Christo Ivanov, Daniel Zaugg, Christina Meissner en faveur d'une formation des maîtres crédible à Genève
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 17 et 18 décembre 2015.
Délai de traitement en commission dépassé (cf. article 194 LRGC)

Débat

Le président. Le délai de traitement de cet objet est dépassé. Le débat est classé en catégorie II, trente minutes. Monsieur Romain, vous avez la parole.

M. Jean Romain (PLR). Je vous remercie, Monsieur le président, et je vous remercie d'avoir fait le silence. Chers collègues, nous avons pris acte vendredi de la réponse du DIP à une pétition qui fustigeait la gestion catastrophique de l'Institut universitaire de formation des enseignants secondaires. Le DIP a agi, le DIP a remis de l'ordre et nous avons accepté ses réponses. J'avais considéré ces réponses bonnes mais incomplètes. Toujours vendredi, par la bouche d'un de ses représentants, le parti socialiste disait que c'était au contraire très satisfaisant, alors que le MCG, par la bouche d'un de ses représentants, disait que ce n'était nullement satisfaisant. Eh bien, vous connaissez la défiance du PLR envers les extrêmes. Le PLR pense profondément qu'il y a encore des questions à poser sur ce sujet-là, qu'il y a encore peut-être des choses à faire, et il va demander le renvoi de cette motion en commission. Elle a été déposée, rappelez-vous, suite au très sévère rapport de la Cour des comptes de 2015. Ce rapport montrait les grandes carences de l'IUFE. Ces carences sont en voie de résolution et je demande donc, pour qu'on puisse peut-être avoir le fin mot en ce qui concerne l'IUFE secondaire, de renvoyer cette motion en commission.

Le président. Très bien, nous allons continuer le débat et nous voterons cette demande de renvoi en commission à la fin. Monsieur Bläsi, c'est à vous.

M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Madame la conseillère d'Etat, chers collègues députés, ce sera très bref. Mon collègue Jean Romain a évoqué le rapport catastrophique de la Cour des comptes sur l'IUFE. Ce rapport a pu être établi par la Cour des comptes sur la base d'un certain nombre d'informations qui lui avaient été données par des personnes en interne qui s'alarmaient de l'évolution de leur travail. Comme cela avait été annoncé par les directions, ces personnes qui ont fait un devoir citoyen ont aujourd'hui toutes été licenciées et le règlement de comptes interne a abouti pour elles à la perte de leur emploi. Je signale à cette occasion que l'UDC a déposé un projet de loi avec le parti socialiste, qui est cosignataire, pour attribuer la compétence de protection des donneurs d'alerte à la Cour des comptes. Madame la conseillère d'Etat, est-ce que vous allez intervenir pour que ces personnes qui ont souffert d'avoir donné des informations réelles, informations qui se trouvent à l'origine de ce rapport, puissent être rétablies dans leur fonction, et assurer à l'avenir que les personnes qui participent à l'amélioration du fonctionnement de l'Etat ne soient pas mises en danger par la suite, le groupe de confiance ne présentant en la matière aucun gage de confiance et aucun gage de protection ?

M. François Baertschi (MCG). On a la preuve ici qu'on ne peut pas donner tous les témoignages publiquement, puisqu'il y a des gens qui perdent leur emploi ! C'est scandaleux parce qu'on intimide les personnes et, ensuite, on donne des leçons. On se fait accuser d'agir comme dans les années 30, mais ce sont les procédés utilisés dans votre département qui sont des procédés des années 30, Madame Torracinta ! Ce sont des procédés dont vous n'avez pas à être fière ! Vous devriez avoir honte de ce genre de manières ! (Commentaires.)

Le président. Monsieur Baertschi, vous devez mesurer vos propos. Vous parlez à une conseillère d'Etat, je pense qu'il y a des limites à ne pas dépasser ! Reprenez votre discours, mais soyez un peu plus calme et un peu plus poli, s'il vous plaît ! (Commentaires.)

M. François Baertschi. Je suis d'accord avec vous, mais quand on se fait traiter de fascistes par le PLR, le PDC...

Le président. Vous n'avez pas été traité de fasciste par Mme Emery-Torracinta, s'il vous plaît. Ne recommencez pas, sinon je vous coupe la parole et vous ne l'avez plus ! C'est clair ?

M. François Baertschi. Je vois que la liberté de parole est à géométrie très variable ici. Et je vois qu'il y a certains procédés qu'on retrouve qui ne sont pas acceptables. Licencier quelqu'un ? Non ! On licencie des gens en catimini et on le fait pour intimider les personnes qui témoignent, pour intimider toute personne qui s'oppose à certains abus. Ces gens sont des sonneurs d'alerte, comme on dit maintenant. C'est ce genre de choses qui se fait. Ça vous dérange, vous ne l'avez pas réalisé, Madame la conseillère d'Etat, mais c'est malheureusement une réalité. Bien sûr, vous ne voulez pas l'entendre, je l'ai bien vu, mais il faut l'entendre à l'IUFE comme il faut l'entendre peut-être dans d'autres domaines. Et quand on entend des personnes qui sont des tireurs d'alerte... Des lanceurs d'alerte plutôt ! (Rires.) A ce moment-là, il ne faut pas les mépriser. Or il y a un esprit de mépris chez certains, ici. Je crois qu'il y a certaines réalités qu'il ne faut pas mépriser parce que, du moment qu'on méprise, on est méprisable. Méprisant et méprisable, ça va très bien ensemble ! (Commentaires.) Et c'est ce que certains font malheureusement dans cette enceinte et je le déplore, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur. Vous voyez, quand vous voulez, vous y arrivez très bien ! Madame Marti, c'est à vous.

Mme Caroline Marti (S). Merci, Monsieur le président. Je ne ferai pas de commentaire sur les paroles de mon préopinant. Le groupe socialiste acceptera le renvoi en commission de cette motion pour que le travail puisse être poursuivi et terminé sur cette question importante de l'organisation de la formation des enseignants et de l'IUFE. Le groupe socialiste souhaite quand même rappeler et souligner qu'un rapport de la Cour des comptes a effectivement été rendu il y a quelques mois. La conseillère d'Etat en a pris acte, elle a tenu compte des recommandations, elle a formulé des propositions et on devrait pouvoir apaiser la situation en quelques séances de commission. Parce que ce qui est demandé dans la motion est vraiment extrême: on évoque la possibilité de changer complètement de système, mais ce n'est pas en prenant un bazooka qu'on va tuer une mouche. En quelques séances de commission, on pourra faire aboutir ces travaux et apaiser une situation qui mérite de l'être.

M. Jean-Luc Forni (PDC). Monsieur le président, au vu de la situation, le groupe démocrate-chrétien demande une suspension de séance. Des propos absolument inexcusables ont été tenus tant envers le Conseil d'Etat qu'envers certains membres du parlement attaqués par le groupe MCG. Je demande au Bureau de bien vouloir statuer sur le comportement de certains membres du groupe MCG avant que nous reprenions. (Applaudissements.)

Le président. Vous demandez une motion d'ordre. Il nous faut l'accord des deux tiers de l'assemblée pour une suspension de séance.

Mise aux voix, la motion d'ordre (suspension de séance) est adoptée par 59 oui contre 25 non.

Le président.  Ça nous fait les deux tiers ? (Remarque.) Oui, c'est bon. Nous reprenons nos travaux dans dix minutes.

La séance est suspendue à 15h52.

La séance est reprise à 16h08.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons notre séance après cette interruption qui était certainement bienvenue. Je voudrais que vous m'écoutiez, et je ne veux pas être interrompu.

Monsieur Baertschi, je vous ai averti parce que vous avez parlé de façon très incorrecte à Mme la conseillère d'Etat et vous m'avez traité de fasciste. Or, ce n'est pas moi que vous avez insulté, mais c'est la fonction et c'est inadmissible. Je vous ai donc averti et je ne veux plus entendre ça. Vous n'êtes pas le seul en cause parce que, vous aussi, vous avez été attaqué: on vous a traité de fasciste, il y a des mots qui venaient du PDC ou du PLR qui n'étaient pas corrects vis-à-vis du MCG. Je veux que ces débats reprennent de façon sereine. Je vous avertis qu'au moindre dérapage, je me montrerai très sévère: quelle que soit la personne qui dérape, je la ferai sortir de ce parlement pour cette séance. Maintenant, j'aimerais que tout le monde donne une image digne de ce parlement à ceux qui nous regardent à la télévision et j'espère que nous pourrons poursuivre nos débats dans le calme ! Je vous remercie. (Applaudissements.) Nous reprenons notre débat, la parole est à M. Olivier Baud.

M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, en décembre 2015, on a déjà discuté assez longuement de cette motion. Je pense qu'il y a des raisons au fait qu'elle n'a pas été traitée. Le plus raisonnable aurait été que ses auteurs la retirent, parce que, franchement, cette question de la formation des maîtres à l'IUFE - formation crédible ou pas crédible - est de toute façon traitée dans d'autres projets de lois. Il n'y a plus grand-chose à dire de cet objet. Alors puisque les auteurs ne la retirent pas et qu'on ne va pas la refuser sur le siège maintenant, renvoyons-la en commission et traitons cela en un minimum de séances. A mon avis, une seule séance suffira amplement. Refusons-la en commission et revenons la refuser définitivement en plénière !

Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Par rapport à cette motion, je vais dire que j'ai un peu l'impression que c'est du harcèlement. Cette formation mise en place au sein de l'université agace très certainement des députés ou certaines personnes. Pour ma part, je trouve que c'est un excellent choix - peut-être parce que je l'ai suivie et que, quand même, on y apprend un certain nombre de choses. Finalement, une formation d'adultes se façonne avec les gens qui suivent la formation. Ce qui est intéressant dans ce projet, c'est que la formation des enseignants se déroule au sein de l'université pour en tout cas deux bonnes raisons. La première, c'est que le champ d'activité des enseignants, tout le monde le sait, est en train de s'élargir terriblement et si on veut parler d'école inclusive dans un certain nombre d'années, il faudra bien qu'à la base les enseignants soient formés à travailler avec des personnes en situation de handicap. Et où pouvons-nous apprendre cela ? Ce n'est pas forcément dans une formation continue qu'on apprend un certain nombre de bases sur les personnes en situation de handicap, mais c'est en milieu universitaire ! Deuxièmement, il y a une question de coût: nous avons l'opportunité de ne pas avoir à créer une nouvelle école, elle est déjà installée dans l'université. C'est vrai qu'elle a aussi un pendant professionnalisant, mais ce n'est pas seulement dans cette unité: c'est le cas à la faculté de médecine aussi. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Il y a des périodes de stages et il y a des périodes de formation. Donc, personnellement, je renverrai bien sûr cette motion en commission pour soutenir cette unité de formation et pour qu'on arrête le harcèlement !

M. Jean-Luc Forni (PDC). Le parti démocrate-chrétien va soutenir ce renvoi en commission. Effectivement, beaucoup de choses ont été dites sur cet IUFE. La situation a, semble-t-il, évolué. Il semble aussi qu'il y ait certaines frustrations du côté de ceux qui ont été les lanceurs d'alerte. Eh bien, je pense qu'il faut faire la lumière là-dessus et le traitement en commission sera le meilleur moyen de donner une bonne réponse aux uns et aux autres.

M. François Baertschi (MCG). Juste pour conclure, ce texte doit vraiment être renvoyé en commission parce qu'il y a un gros problème qui mérite d'être examiné avec sérieux. Le problème de l'IUFE n'est malheureusement pas réglé et cela mérite une étude. Le groupe MCG vous demande donc un renvoi en commission.

M. Yves de Matteis (Ve). Le groupe des Verts n'est pas persuadé que le fait de charger d'une étude un organisme étranger au canton va changer quelque chose ou résoudre les problèmes. Nous pensons que le département est probablement le plus à même de faire quelque chose pour que cet organisme fonctionne au mieux. Néanmoins, nous sommes en faveur du renvoi en commission.

M. Thomas Bläsi (UDC). Le groupe UDC soutiendra ce renvoi en commission pour les raisons évoquées dans ma première intervention.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, tout à l'heure, des propos inacceptables ont été tenus et il m'appartient quand même de vous dire quelque chose à ce propos. Je les mets sur le compte de l'émotion du député concerné qui s'est senti attaqué et qui a réagi de manière un peu virulente. Vous avez bien fait de suspendre la séance, Monsieur le président.

Sur le fond, Monsieur le député, permettez-moi de vous dire simplement qu'on peut tout dire en politique, on peut tout penser, mais il faut avoir des faits. Il faut avoir simplement des faits ! Chaque fois qu'un député de ce parlement ou qu'une commission parlementaire m'a posé des questions sur le département, j'ai toujours répondu en toute transparence. On ne peut pas simplement dire qu'il y aurait des témoignages, qu'il y aurait ceci ou cela. Ce ne sont pas des preuves, ce ne sont pas des faits ! Je vais vous donner un exemple très concret que je pense même avoir déjà cité dans ce parlement: un député suppléant de votre parti, je crois, m'a passé un jour un petit mot en marge d'une séance de la commission des finances. Il m'a dit que, dans un cycle d'orientation qu'il a nommé, on aurait engagé une secrétaire frontalière alors qu'il y avait des candidates suisses ou domiciliées dans le canton qui auraient pu convenir. Comme il m'a donné le nom du cycle d'orientation, j'ai immédiatement vérifié et je lui ai répondu: l'information était parfaitement fausse. La personne engagée était suisse et domiciliée à Genève. Donc, quand on me pose une question, je donne la réponse, mais on ne peut pas simplement laisser des rumeurs se répandre. Si vous avez des éléments factuels qui vous inquiètent, Monsieur le député Baertschi, je vous invite à venir m'en parler en dehors de cette enceinte, si vous le souhaitez. Je les traiterai du mieux que je peux, et de façon à vous donner des réponses qui soient correctes.

Revenons maintenant à cette proposition de motion: le Conseil d'Etat ne s'oppose pas à son renvoi en commission, cela vous donnera peut-être l'occasion d'entendre ce que le département a accompli depuis plusieurs années, même si ce texte de 2015 est quand même lui aussi un peu obsolète. Entre-temps, l'IUFE a été réformé, par une réforme qui correspondait à la fois à ce que demandait la CDIP en matière de règles et à ce que demandait le canton de Genève, notamment les associations d'enseignants. On a essayé de faire le meilleur système possible compte tenu de toutes les contraintes. L'institut fonctionne maintenant, mais il faudra peut-être lui donner un peu de temps pour qu'il soit parfaitement sur des rails. Je répondrai toutefois volontiers à vos questions en commission comme je l'ai toujours fait, en toute transparence.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous allons voter sur la demande de renvoi en commission de cette proposition de motion.

Mis aux voix, le renvoi pour six mois de la proposition de motion 2305 à la commission de l'enseignement supérieur est adopté par 78 oui (unanimité des votants).

Un rapport doit être rendu dans les six mois (article 194 LRGC).