République et canton de Genève

Grand Conseil

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P 2013-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour que la limitation de vitesse soit plus restrictive et qu'un radar fixe soit installé sur la route de Verbois
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 23 et 24 novembre 2017.
Rapport de majorité de M. Norbert Maendly (UDC)
Rapport de minorité de M. Olivier Baud (EAG)

Débat

Le président. Nous passons à la P 2013-A. Cet objet est classé en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. Maendly.

M. Norbert Maendly (UDC), rapporteur de majorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la route en montée conduisant du barrage de Verbois au village de Russin comporte deux virages à 90° et deux virages à 180°, et elle enjambe la voie de chemin de fer. La configuration de cette route moyennement large incite quelques pilotes de motocyclette et de voiture à se transformer en compétiteurs téméraires: ils augmentent la vitesse de leur véhicule pour devenir un court instant des sportifs avérés dans une course de côte. Cela a un effet sur leur adrénaline. (Commentaires.) Certes ! Ce comportement entraîne des nuisances sonores fort désagréables pour certains riverains qui n'apprécient pas du tout ces attitudes égoïstes; cela les a incités à signer cette pétition. Récemment, un revêtement phonoabsorbant a été installé sur cette route, mais le bruit provoqué par les sportifs en herbe est dû aux brusques accélérations, au maintien des freins serrés tout en agissant sur la manette des gaz d'une part, et aux modifications apportées aux pots d'échappement d'autre part. Depuis de nombreuses années, la police connaît le problème de ces courses non officielles, et les conducteurs en mal de sensations, bien organisés entre eux grâce à des veilleurs postés à des endroits stratégiques, semblent se réjouir de tenir les forces de l'ordre en échec en levant le pied aussitôt qu'une surveillance est mise en place.

La vitesse sur ce tronçon est limitée à 80 km/h, mais il est difficile de dépasser cette vitesse vu les rayons relativement serrés des virages. Sur le barrage, la vitesse est limitée à 40 km/h étant donné l'étroitesse de la route. La pétition demande une réduction de la vitesse à 60 km/h, la pose d'un radar fixe, l'utilisation de pistolets radars, que la police elle-même estime inutile, car ces instruments sont vite repérés sur cette courte distance. En outre, la police ne dispose que de peu de moyens efficaces pour lutter contre ce genre de nuisances. Des écriteaux recommandant la prudence ont été installés, mais cela ne sert à rien et n'a aucun impact sur les pilotes qui s'estiment chevronnés et continuent à avoir des comportements inadéquats. (Commentaires.) Les statistiques de la police démontrent que cette zone n'est pas particulièrement accidentogène, bien que, parfois, des voitures doivent être dégagées par leurs utilisateurs car elles se retrouvent dans le fossé, sans être comptabilisées parmi les accidents. Etant donné que la police ne peut pas rester en permanence à surveiller ce tronçon, il est proposé d'installer des chicanes ou des gendarmes couchés. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Toutefois, cela s'avère difficile car ces précautions doivent répondre à différentes normes permettant aussi aux bus de passer. Dans le cas qui nous préoccupe, il faut se rendre à l'évidence qu'il n'est pas possible d'interdire aux motards et aux automobilistes d'utiliser ce parcours public, car on ne peut stigmatiser un mode de mobilité par rapport à d'autres.

Le président. Il faut terminer, Monsieur le député.

M. Norbert Maendly. Je termine, Monsieur le président. La majorité de la commission a voté le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil, étant donné que la plupart des véhicules utilisant cette route respectent les normes de circulation.

M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de minorité. Monsieur le président de séance, Mesdames et Messieurs les députés, la pollution sonore ou la pollution de l'air sont des problèmes très souvent traités par notre parlement et concernent beaucoup des objets qui arrivent ici. Malheureusement, les débats aboutissent rarement à une prise en compte sérieuse. On l'a encore vu hier lors du débat sur l'aéroport, qu'on ne va pas refaire ici. Or, que demande cette pétition ? C'est assez simple, elle demande que la vitesse maximale autorisée soit revue à la baisse sur ce tronçon de route: 60 km/h au lieu de 80 km/h, par exemple. (Brouhaha. L'orateur s'interrompt un instant.) J'aimerais bien un peu de silence, merci !

Le président. Continuez, Monsieur le député !

M. Olivier Baud. C'est dans le thème - c'est pénible de parler avec beaucoup de bruit. (Commentaires. L'orateur s'interrompt un instant.) Je sens aux commentaires goguenards qu'on ne prend jamais ça au sérieux.

Vous avez probablement vu que cette pétition relève quelque chose d'assez rocambolesque sur ces trois tronçons: la voiture arrive à 50 km/h, peut ensuite aller à 80, doit revenir à 40 pour repartir à 80. Or, le rapporteur de majorité l'a dit, ce serait impossible d'aller à 80 km/h. Si c'est impossible d'aller à 80 km/h, prenons en compte la demande des pétitionnaires et limitons cette vitesse à 60 km/h !

Ce sont surtout les motos qui sont en question dans cette pétition, parce qu'elles sont très bruyantes. Il faut savoir que, selon une étude de l'Office fédéral des routes, certaines motos font jusqu'à vingt-quatre fois plus de bruit que la norme autorisée; c'est quelque chose d'assez fréquent. Un moteur qui tourne à 4000 tours-minute fait autant de bruit que 32 moteurs à 2000 tours-minute. Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai qu'une simple question: quand allons-nous prendre au sérieux cette pollution sonore, véritablement et non pas avec des commentaires goguenards ? Elle est traitée tous les jours dans les médias, vous pouvez le voir en ouvrant vos journaux, de même que la pollution de l'air qui cause des morts tous les jours et contre laquelle pourtant on ne prend jamais aucune mesure. Bien sûr, ce n'est là qu'une pétition, mais la renvoyer au Conseil d'Etat pour qu'il prenne une mesure telle que réduire la vitesse à 60 km/h me semble un minimum.

M. Christian Frey (S). Cette pétition demande une chose qui est l'évidence même: il faut au minimum réduire à 60 km/h la vitesse sur les deux tronçons actuellement à 80 km/h. Des accidents graves surviennent, les personnes auditionnées en ont témoigné; il y a eu des morts et ils ont ramassé des gens dans les fossés au bord de ces routes. Il y a urgence à intervenir ! Il est difficile de comprendre le fatalisme de certains députés qui pensent que ces mesures ne serviront à rien, qu'elles ne seront de toute manière pas respectées, etc. Serait-ce parce qu'ils sont eux-mêmes motards et que la liberté de foncer est sacrée pour eux ? La liberté de foncer à 80 km/h sur un tronçon dont certains disent qu'il est impossible à traverser à cette vitesse, n'est-ce pas une invitation, un encouragement à essayer quand même et, ainsi, à se mettre en danger ? Il faut mettre en place sur les deux tronçons concernés la limitation à 60 km/h au lieu des 80 km/h actuels, ainsi que d'autres mesures, radars fixes ou autres, c'est à déterminer. Mesdames et Messieurs, il est urgent de ne pas se dire que ce n'est pas un problème et que, de toute manière, personne ne respecte rien, etc. Nous sommes dans un Etat de droit, il faut faire respecter un certain nombre de choses et en imposer d'autres pour réduire à la fois le bruit et le risque d'accident. Mesdames et Messieurs les députés, il faut renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, je vous remercie.

Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, la préoccupation des habitantes et habitants de Russin confrontés au bruit et au danger liés à la circulation sur la route de Verbois retient toute l'attention des Verts. Cette pétition met non seulement en exergue la problématique de la vitesse motorisée, mais également celle du bruit. Les habitants le disent, je les cite ici: «Les nuisances sont devenues inacceptables et augmentent d'année en année.» Le bruit, une pollution souvent sous-estimée, atteint pourtant frontalement la santé. Si le bruit semble moins inquiéter que d'autres problèmes environnementaux comme la pollution de l'air ou de l'eau, cette nuisance est pourtant très présente dans le quotidien de chacune et de chacun. Le bruit, en particulier le bruit routier, peut affecter l'individu et entraîner des troubles comme la perturbation du sommeil, un désordre cardiovasculaire, des problèmes digestifs, l'aggravation des états anxio-dépressifs. Ces effets ont aussi un coût non négligeable pour l'individu et pour la société. Aujourd'hui, les effets des nuisances sonores sur les personnes sont totalement sous-évalués. Preuve en est le débat d'hier sur l'aéroport: l'économie absolument débridée a primé sur la santé des habitantes et habitants de la région.

La vitesse motorisée est aussi un facteur de stress et un danger pour les usagers les plus vulnérables de la voie publique, c'est-à-dire les piétons, soit les habitants de la commune qui se déplacent dans leur propre commune, mais également les cyclistes qui sont nombreux sur ces routes. On peut rappeler que, sur la route de Verbois et à proximité immédiate, il y a les Teppes du Biolay, il y a aussi la réserve naturelle du Moulin-de-Vert. Outre les habitants, les promeneurs - des familles, des enfants - passent bien sûr à proximité immédiate de cette route. Pour toutes ces raisons et en soutien aux habitants, les Verts vous recommandent de soutenir cette pétition et de la renvoyer au Conseil d'Etat.

M. Florian Gander (MCG). Juste quelques mots, en tant que motard - tout le monde sait que je le suis. Cette route est en effet régulièrement empruntée par des motards, mais rarement par des fous furieux. S'il y en a malheureusement une minorité, on ne peut pas mettre tout le monde dans le même sac. C'est vrai qu'il y a du bruit lié aux échappements modifiés, mais c'est le travail de la police et du service des automobiles de faire les contrôles, ce n'est pas aux habitants de contrôler les échappements au bord de la route. Ce n'est pas de notre ressort ! Quant à limiter la vitesse à 60 km/h, honnêtement, pour pratiquer cette route de temps en temps - parce que je me balade dans la très belle campagne genevoise - d'abord il n'y a pas de gêne pour les piétons, et ensuite, il y a douze habitations. Si on veut vraiment faire quelque chose, on met un mur antibruit et le problème est réglé, parce que les habitations sont seulement d'un côté ! En haut, il y a une station essence dont je ne sais plus si elle est toujours en fonction, ainsi qu'une ferme; ce sont les seules habitations dans cette montée. Je trouve donc un peu excessif de réduire la vitesse de 20 km/h pour une douzaine de logements. Les murs antibruit existent, mettons-en !

Par contre, pour la pollution, je suis un peu étonné qu'on parle toujours des motards en disant qu'ils polluent et je voudrais juste faire un petit parallèle. Je siège dans ce Grand Conseil depuis neuf ans et je suis pollué par les nombreuses personnes qui fument à l'entrée et à la sortie de ce bâtiment ! Je vous parle de la fumée des cigarettes. Mais dix fois plus qu'avec un pot d'échappement ! Alors avant de dire aux autres d'arrêter de polluer, commencez peut-être par vous-mêmes et pensez à ceux qui ne fument pas ici !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Girardet pour une minute huit.

M. Jean-François Girardet (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons étudié cette pétition. Nous avons vu que la commune de Russin était très sensible à cette situation: elle a aussi transmis ses doléances en vue de la diminution des nuisances provenant du bruit mais aussi des gaz d'échappement de ces motos. En même temps, la commune de Russin avoue son impuissance face à ceux qui transgressent les lois. De toute manière, cette route est actuellement limitée à 80 km/h, comme le sont toutes les routes cantonales. La demande de cette pétition serait d'installer un radar, mais je crois que ce radar n'est pas une solution. En commission, on avait proposé l'instauration de chicanes: ça a déjà été essayé sur la côte qui monte à Saint-Cergue, et même ça, c'est absolument inadéquat pour réduire la vitesse. Pour toutes ces raisons, nous demandons aussi le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

M. Raymond Wicky (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, en ce qui le concerne, notre groupe est parfaitement conscient qu'il y a un problème de nuisance par le bruit dans cette région. Nous en sommes d'autant plus conscients que votre serviteur ainsi que le rapporteur de majorité habitent à quelques centaines de mètres du lieu en question.

Une voix. Mais c'est toi qui fais du bruit !

M. Raymond Wicky. Certainement aussi un peu ! Par contre, j'aimerais quand même vous rappeler une chose: nous avons été remis à l'ordre en commission par une de nos éminentes collègues, députée des Verts, qui nous a dit que nous devions non seulement analyser les éléments qui sont à l'origine de cette pétition, mais aussi voir s'il était possible de mettre en oeuvre les propositions et si elles auraient l'impact recherché. Or, en ce qui concerne ces différentes propositions - réduction de vitesse et radar fixe - lors de l'audition de la police cantonale, l'appréciation a clairement été émise que, malheureusement, ces deux éléments ne régleraient absolument pas ce problème, de par le fait que, comme l'a dit le rapporteur de majorité ou de minorité, il y a des observateurs qui regardent si le radar est dans la boîte. Rien n'est plus facile ! La police cantonale nous a aussi démontré qu'elle mène des contrôles particulièrement réguliers dans ce secteur puisque le problème est bien entendu connu d'elle. Malheureusement, chaque fois que des contrôles ont été faits jusqu'à présent, à part peut-être des infractions totalement mineures, il n'y a pas eu d'infractions constatées et poursuivies liées au problème abordé par cette pétition. Fort de ces considérations, et, encore une fois, sans sous-estimer le problème de voisinage que cela peut occasionner, notre groupe ne peut que recommander le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

M. Stéphane Florey (UDC). L'étude de cette pétition a démontré que ce lieu n'est pas plus accidentogène que n'importe quel autre lieu du canton. De plus, installer un radar fixe à cet endroit n'arrangerait rien par rapport à la vitesse: on sait qu'une fois un radar fixe installé, les gens ralentissent en arrivant et accélèrent à nouveau après le radar. Cela ne change rien, la police nous l'a démontré. Ils font beaucoup plus de constatations d'infractions quand ils placent un radar mobile, chose qu'ils font souvent, cela nous a été dit. C'est là qu'on voit si vraiment les gens respectent ou pas les limitations de vitesse. Un autre point, par rapport à la limitation à 80 km/h: la police nous a très justement affirmé qu'il faut être un conducteur chevronné pour passer toutes les courbes à 80 km/h, vu la configuration de la route. (Commentaires.) C'est une chose qui n'est pas donnée à tout le monde. Quant au bruit, aucune norme n'a été dépassée ! Toutes les plaintes concernant le bruit n'ont mené à rien du tout, après contrôle, puisque le bruit est relatif: oui, quand on accélère, ça fait du bruit, mais ce n'est pas pour autant que l'on dépasse les normes. C'est pour toutes ces raisons que le groupe UDC votera le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je suis assez stupéfait d'entendre qu'il n'y a pas d'infractions en lien avec le problème ! Je ne sais pas comment on a pu arriver à cette conclusion. Est-ce à dire que, même si 82,89% des automobilistes contrôlés sont en infraction, du moment qu'ils ne causent pas d'accident, ils peuvent faire comme ils veulent ? C'est ça, la conclusion ? Je suis assez étonné d'entendre ça de la part d'un député PLR qui, par ailleurs, serait assez vindicatif à l'égard d'un pauvre cycliste qui grillerait un feu rouge. Il y a là vraiment deux poids deux mesures. Encore une fois, la pétition porte sur la limitation de la vitesse. N'allez pas chercher ailleurs: limiter la vitesse, personne ne le niera, ça diminue le bruit, ça diminue la pollution sonore. C'est tout ce que demande la pétition ! On ne parle pas spécialement d'accidents. La police nous a détaillé les accidents, et tant mieux s'il n'y en a pas énormément, bien sûr ! Mais le problème, c'est le bruit ! J'entends dire qu'il faut mettre un mur antibruit. Ben voyons ! Peut-être que, dans cinquante ans, on aura voté le crédit pour un mur antibruit ! C'est une plaisanterie. Ici, il s'agit justement d'une mesure qui ne coûte rien: il suffit de changer le panneau sur ce tronçon et de prévoir 60 km/h au lieu de 80. Ce sera beaucoup plus logique. Ça donnera satisfaction ou pas - on pourra l'évaluer par la suite - mais c'est une première mesure qui ne coûte rien et qui donne le signe que la souffrance des gens provenant de cette pollution sonore est prise en compte ! Je vous remercie donc de bien réfléchir et de quand même renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur le député Gander, il ne vous reste plus de temps. Il reste une minute à M. le député Wicky.

M. Raymond Wicky (PLR). Merci, Monsieur le président. Je dois dire que je ne comprends pas tout à fait la remarque de mon collègue rapporteur de minorité: il m'expliquera sans doute ça tout à l'heure en aparté. Une chose est certaine, Monsieur le rapporteur de minorité: la police cantonale l'a clairement dit, la limitation de vitesse ne pourrait être respectée que s'il y avait un agent de police quasi en permanence dans ce secteur. Donc, la mesure demandée est incontrôlable et ne permettra pas de régler ce problème. Forts de ces considérations, nous ne changerons pas d'avis: nous sommes pour le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Le président. Merci, Monsieur. Mesdames et Messieurs, je vous fais voter sur les conclusions de la majorité de la commission, à savoir le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 2013 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 46 oui contre 29 non.