République et canton de Genève

Grand Conseil

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IN 163
Initiative populaire "Pour un pilotage démocratique de l'aéroport de Genève - Reprenons en main notre aéroport"
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 21 et 22 septembre 2017.
IN 163-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative populaire 163 "Pour un pilotage démocratique de l'aéroport de Genève - Reprenons en main notre aéroport"
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 21 et 22 septembre 2017.

Débat

Le président. Nous abordons maintenant en catégorie II, trente minutes, l'initiative 163 et le rapport du Conseil d'Etat sur sa prise en considération. A la fin des discussions, il faudra décider si nous renvoyons ces objets à la commission de l'économie ou à la commission législative. S'il n'y a pas de demande de parole... Monsieur Calame, je vous cède la parole.

M. Boris Calame (Ve). Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, le trafic aérien à l'aéroport de Genève a doublé en dix ans. Avec la progression actuelle, il aura triplé d'ici 2030 pour atteindre près de 25 millions de passagers. Les conditions de vie à proximité de l'aéroport se sont véritablement dégradées en vingt-cinq ans. Elle est bien finie, l'époque où bon nombre allaient regarder les avions décoller depuis la terrasse de l'aéroport; même là, les conditions sont devenues insupportables ! L'initiative citoyenne que nous abordons ce jour est un cri des tripes issu des populations riveraines. Ce ne sont plus quelques personnes ou communes qui sont touchées par les nuisances de l'aéroport de Genève: de Dardagny à Versoix, ainsi qu'en France voisine, la colère monte. La collecte de signatures auprès du peuple a été portée par des individus et des associations, notamment de quartier. L'accueil réservé à cette initiative dans la région aéroportuaire a été excellent. Au vu du ras-le-bol constaté sur la rive droite du canton et avec ces 14 400 signatures récoltées, soit près de 5000 signatures de plus que le nombre requis, on peut affirmer qu'elle était attendue. C'est à nous maintenant, chères et chers collègues, de donner la suite la meilleure et la plus rapide possible à la demande populaire. Nous devrions même voter aujourd'hui, sur le siège, son acceptation ou son refus.

N'oublions pas que le droit au repos doit être respecté pour tout un chacun. Les nuisances de l'aéroport, en progression constante, ne sont pas une problématique de gauche ou de droite. Elles engendrent une souffrance bien réelle pour les populations riveraines: du stress, des espaces extérieurs impraticables, des problèmes de concentration et d'apprentissage, des réveils et perturbations du rythme du sommeil, des pertes de valeur immobilière; en fait, une qualité de vie de plus en plus altérée. Avec le développement effréné de l'aéroport, nous ne sommes pas face à une fatalité mais bien face à un choix politique: il s'agit de savoir si nous voulons protéger un tant soit peu notre population ou alors la laisser de plus en plus exposée à des nuisances qui à Genève portent atteinte à la santé et au bien-vivre. Sachant que le vote sur le siège n'aurait aucune chance devant notre parlement, nous demandons le renvoi de cette initiative à la commission législative qui sera la plus à même de la traiter sous l'angle du développement durable. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)

Mme Magali Orsini (EAG). Je veux juste indiquer que je m'abstiendrai de participer à ce vote en ma qualité d'administratrice de Genève Aéroport.

M. Bernhard Riedweg (UDC). L'Aéroport international de Genève est géré en conformité avec la concession fédérale d'exploitation délivrée par la Confédération. Le plan sectoriel de l'infrastructure aéronautique - dit aussi PSIA - est l'instrument de planification et de coordination de la Confédération pour l'aviation civile et fixe de manière contraignante pour les autorités les objectifs et exigences relatifs à l'infrastructure de l'aviation civile. Sur cette base, l'AIG applique un cadre légal qui régit les domaines aéronautique et environnemental, les conditions générales de l'exploitation, le périmètre de l'aérodrome, l'exposition au bruit et la protection de la nature et du paysage. De nombreuses ordonnances d'application sur l'aviation, sur l'infrastructure aéronautique et sur les redevances aéroportuaires régissent l'aéroport genevois, auxquelles il faut encore ajouter les ordonnances sur la protection contre le bruit, sur la protection de l'air et contre les accidents majeurs. Le rôle des cantons aéroportuaires est assez précisément décrit par la législation fédérale, tant au niveau de la Constitution qu'au sein du corpus légal.

Les cantons aéroportuaires et les régions environnantes retirent des bénéfices de la présence d'un aéroport national sur leur territoire, ce qui implique qu'ils doivent aussi en supporter les inconvénients que sont entre autres les nuisances sonores. L'Etat tient compte du caractère urbain de l'aéroport et recherche ainsi un équilibre entre son importance pour la vie économique, sociale et culturelle et la limitation des nuisances pour la population et l'environnement. La population a augmenté autour de l'aéroport alors que l'on savait, avant l'implantation des nouveaux immeubles, que l'aéroport existait. Les habitants étaient conscients, avant leur emménagement, qu'il y aurait du bruit et une détérioration de la qualité de l'air. Contrairement à ce que prétendent les initiants, il n'y a pas de développement débridé de l'aéroport. Selon nos sources, l'AIG rend régulièrement compte au Conseil d'Etat de la façon dont les objectifs pour limiter les nuisances du trafic aérien sont planifiés puis mis en oeuvre. L'Union démocratique du centre vous demande de rejeter l'initiative 163, car elle estime que des dispositions supplémentaires ne sont pas nécessaires. Le plan directeur cantonal prévoit déjà différentes mesures pour gérer l'évolution de l'urbanisation dans les communes concernées par le bruit des avions, tenant compte de la protection de la santé des habitants. En outre, si le nombre de passagers est appelé à augmenter d'ici 2030, il n'est pas directement corrélé aux nuisances émises par l'aéroport, ceci grâce à des améliorations technologiques dont l'augmentation de la capacité des avions. Merci, Monsieur le président.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). L'aéroport de Cointrin est à dix minutes en train de la gare de Cornavin et à vingt-cinq minutes en bus de Rive. C'est un aéroport urbain, peu de capitales en Europe peuvent se vanter d'avoir un aéroport si proche du centre-ville. Il constitue en outre un atout important pour la Genève internationale, pour la Genève des congrès - la ville la plus importante de Suisse en la matière - et celle du tourisme, avec les retombées qui en découlent. La pétition 1996 sur les gaz à effet de serre ainsi que le projet de loi 12099 sur le rapport d'activité de l'aéroport de l'an passé ont permis à la commission de l'économie de recevoir le nouveau directeur de l'infrastructure. Celui-ci a démontré une sensibilité beaucoup plus grande par rapport aux nuisances engendrées par l'aéroport et nous a fait le catalogue chiffré de toutes les mesures prises, que ce soit sur le tarmac ou vis-à-vis des compagnies, afin de diminuer d'une part la pollution atmosphérique et d'autre part les nuisances dues au bruit. Plus de 90 millions de francs doivent être investis ces prochaines années, notamment pour la protection des riverains et l'aménagement des immeubles afin de les protéger contre les nuisances sonores.

Ce que demande l'initiative n'est pas si simple, ses demandes vont à l'encontre d'un certain nombre de normes internationales et fédérales, et le fait que l'aéroport soit autonome lui permet notamment de réagir rapidement lorsque les normes internationales sont modifiées et lui imposent un changement de comportement. L'initiative a toutefois été signée par le nombre d'électeurs requis; elle doit être traitée, d'abord en commission et ensuite en plénière, puisqu'elle est l'expression d'une parfaite démocratie. Sur cette base, le groupe démocrate-chrétien recommande le renvoi non pas à la commission législative mais à la commission de l'économie, puisque c'est toujours cette dernière qui a traité de l'aéroport - à plusieurs occasions et pratiquement chaque année, en tout cas depuis quatre ans. Je vous remercie de voter dans ce sens. (Quelques applaudissements.)

M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, cette initiative - qu'Ensemble à Gauche a soutenue - est relativement modeste et comporte différents enjeux relatifs à la santé, à l'environnement et à l'économie; certains l'ont déjà dit et je le redis. Elle est somme toute assez modeste et il conviendrait de la soutenir. En effet, la croissance de l'aéroport a engendré pour la population une explosion des nuisances - en particulier liées au bruit, notamment nocturne, et bien évidemment à la pollution de l'air. Ces nuisances ont un réel impact sur la santé provoquant le développement de maladies physiques et psychiques. Le lien entre les nuisances sonores causées par le transport aérien et la tension artérielle est par exemple démontré. De même, les élèves qui sont fortement exposés au bruit aéroportuaire ont davantage de difficultés d'apprentissage, or, Mesdames et Messieurs les députés, un quart des écoles de notre canton est situé dans le périmètre de l'aéroport ! Ces retombées ont un coût. Une étude évalue - actuellement - à 52 millions de francs les coûts liés à la santé qu'engendre l'activité de l'aéroport. Le développement projeté de l'aéroport ne peut donc qu'empirer la situation et augmenter ces coûts liés à la santé. En consentant à cette croissance démesurée, l'Etat déroge en outre à l'un de ses rôles primordiaux: la protection de ses concitoyens face aux nuisances et à la pollution.

Certes, l'aéroport de Genève - et nous avons encore pu le vérifier quand nous avons auditionné M. le directeur à la commission des pétitions - fait tout pour redorer son blason en se dotant de véhicules électriques, etc. Mais la consommation énergétique et les émissions de CO2 polluent l'air que l'on respire et sont également responsables, Mesdames et Messieurs, du réchauffement climatique. Il est facile de s'offusquer des cyclones et autres dérèglements climatiques que l'on constate ici et là mais, localement, que peut-on concrètement faire ? Eh bien, par exemple, soutenir cette initiative. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Rien qu'entre 2002 et 2012, la consommation de kérosène de l'aéroport de Genève a augmenté de 75% et ses émissions de gaz à effet de serre de 63%, tandis que le nombre de passagers a doublé en dix ans, etc.

Si j'en crois la cloche de Monsieur le président, il ne me reste que quelques secondes; Mesdames et Messieurs, Ensemble à Gauche vous encourage à soutenir cette initiative et à la renvoyer à la commission législative. Je vous remercie.

M. Jean-François Girardet (MCG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, cette initiative a été largement soutenue par les riverains de l'aéroport - plus de 15 000 personnes l'ont signée - et a été étudiée; un rapport du Conseil d'Etat nous montre le sérieux avec lequel il l'a fait. C'est pour cette raison que le MCG soutiendra le renvoi de cette initiative à la commission de l'économie afin de lui opposer éventuellement un contreprojet. Nous pensons effectivement que l'aéroport est un poumon économique pour notre canton; tous ses effets sont favorables à ce niveau-là et je crois qu'il n'est plus nécessaire de démontrer que cet aéroport est important pour l'économie genevoise. Mais il est aussi grave que nos poumons et nos tympans supportent quotidiennement, et parfois même la nuit, des nuisances. Pour toutes ces raisons, également énumérées par les intervenants précédents, nous souhaitons qu'une étude sérieuse soit faite par les membres de la commission de l'économie afin qu'ensemble nous puissions ensuite trouver un consensus qui pourrait éventuellement donner au conseil d'administration de l'aéroport des indications claires sur la manière de gérer l'infrastructure, afin d'éviter que l'aéroport ne soit ressenti par ses riverains comme une source de nuisances portant atteinte à leur santé. Je vous remercie.

M. Edouard Cuendet (PLR). On sent bien transparaître, dans l'intervention des Verts, cette stratégie voulant transformer l'aéroport de Cointrin en celui de Limoges, avec un vol pour Paris une fois par jour, mais ça s'inscrit aussi... Je me souviens des interventions de la conseillère nationale Lisa Mazzone qui est favorable à la réintroduction des trains de nuit en lieu et place des avions. En ce qui me concerne, je ne sais pas si on va en train de nuit à Dubaï, Riyad, au Koweït ou à Mascate, à Oman, qui sont des marchés essentiels pour notre industrie d'exportation ! Et c'est ce que les Verts notamment oublient - M. Calame n'a pas dit un mot là-dessus: l'aéroport est une infrastructure indispensable pour notre économie, viscéralement tournée vers l'exportation ! Les secteurs de l'horlogerie ou du trading des matières premières et la place financière ont un besoin essentiel de cette infrastructure, et je rappellerai ici que ces trois secteurs économiques génèrent 70% de l'impôt sur les personnes morales ! Je dis bien 70% de l'impôt sur les personnes morales ! Impôt que nos amis les Verts n'ont aucun complexe à dépenser pour la fonction publique et pour les différents sujets qui leur tiennent à coeur. Les trains de nuit ne sont donc pas la solution; c'est très important d'en être conscient pour l'exportation, mais aussi pour la Genève internationale qui est également une de nos cartes de visite. Et puis, ce qui n'est jamais mis en avant - certains de mes préopinants l'ont quand même relevé - c'est que le nouveau directeur de l'aéroport est beaucoup plus sensible à ces questions-là et communique beaucoup mieux avec les riverains. Il faut saluer cette démarche, son prédécesseur était peut-être moins subtil en la matière. Il y a aussi une prise de conscience au département de l'économie, et je salue notamment les démarches effectuées par M. Maudet qui a pris la peine d'aller dans toutes les communes riveraines et a participé à des séances d'information avec un public nombreux. Ce dialogue est essentiel mais ne signifie pas, contrairement à ce que souhaitent les Verts, la fermeture de cette infrastructure particulièrement vitale pour notre prospérité.

Un point m'a vraiment frappé dans l'intervention de M. Calame - vous transmettrez, Monsieur le président: il souhaite renvoyer cette initiative à la commission législative ! Eh bien, ça démontre que les Verts n'ont aucune conscience du rôle économique de l'aéroport ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Parce qu'il est évident que l'objet doit être transmis à la commission de l'économie, puisque le sujet est directement lié aux activités économiques du canton ! Le transférer à la commission législative n'a tout simplement aucun sens; c'est pourquoi je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, à renvoyer cette initiative à la commission de l'économie - c'est là qu'elle doit être traitée - et à lui opposer éventuellement un contreprojet. Le groupe PLR est évidemment opposé à l'initiative elle-même mais réfléchira volontiers à un contreprojet. Je vous remercie.

M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, on a depuis quelque temps beaucoup de débats sur notre aéroport et sur son développement. D'habitude, je prends la parole en premier et c'est M. Cuendet qui répond après, avec exactement les arguments inverses, alors ce soir on aura au moins un petit peu...

Une voix. De variété !

M. Thomas Wenger. Voilà, exactement ! La différence ici, c'est que cette initiative pose une vraie question. La vraie question, c'est: quel développement veut-on pour notre aéroport de Genève ? Certes, Monsieur Cuendet, l'aéroport de Genève est important en matière d'emploi; il est important pour notre économie, il est important pour le tourisme, il est important pour la Genève internationale - on sait qu'énormément de mouvements du trafic aérien sont dus à la Genève internationale - et puis il est important aussi pour les Genevois qui aiment pouvoir prendre un avion, voyager. On n'a pas le temps de débattre du low cost, mais les Genevois prennent effectivement de plus en plus l'avion, depuis cinq à dix ans, pour aller passer le week-end à Barcelone, à Paris ou dans d'autres villes européennes. Mais l'aéroport, à un moment donné... Certes, c'est l'un des poumons de notre économie, mais le problème, Monsieur Cuendet, c'est que ce poumon est en train de tousser. Il est vraiment en train de tousser et, autre problème, il fait tousser énormément de riverains. De plus en plus de riverains ! Que ce soit dû à la pollution de l'air ou que ce soit dû au bruit; j'y reviendrai tout à l'heure. Et quand un poumon est en train de tousser, il faut peut-être se demander quel développement on veut pour lui et jusqu'où notre poumon va pouvoir composer avec toutes ces nuisances avant d'avoir beaucoup plus de problèmes ! Et c'est la question que pose cette initiative. On l'a souvent dit dans ce parlement, le nombre de passagers a explosé en une dizaine d'années: 9,4 millions en 2005, 16,5 en 2016, encore plus cette année et une prévision - qui n'est pour l'instant qu'une prévision - avance ce fameux chiffre de 25 millions de passagers en 2030. 25 millions de passagers en 2030; si on prend l'ensemble des vols, l'ensemble des passagers, ça correspond à un décollage ou un atterrissage toutes les nonante secondes ! Imaginez les dizaines de milliers de riverains habitant dans le périmètre du trafic aérien qui toutes les nonante secondes, Mesdames et Messieurs, vont entendre sur leur balcon, à travers les fenêtres ouvertes, sur leur terrasse s'ils ont la chance d'en avoir une - toutes les nonante secondes: brrrrrr ! (L'orateur imite le bruit d'un réacteur d'avion. Commentaires. Rires. Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

M. Thomas Wenger. Merci. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Le bruit, la pollution de l'air, des nuisances importantes au niveau atmosphérique - plus de 25% des émissions de CO2 sont dues au trafic aérien; je crois qu'on doit vraiment se poser la question: mais qu'est-ce qu'on veut comme développement pour notre aéroport ? On veut pour lui, tout comme les gens qui ont signé cette initiative, un développement, mais un développement équilibré. Ce n'est pas une initiative contre l'aéroport, c'est une initiative qui demande que les députés et la population, qui sera amenée à voter, puissent réfléchir au développement équilibré que nous voulons pour notre aéroport. (Quelques applaudissements.)

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat prend évidemment très au sérieux cette initiative et, de façon plus générale, la question de l'aéroport. Vous l'avez dit, l'aéroport est à plus d'un titre notre poumon économique. Je préfère employer le terme d'épine dorsale: c'est en effet à travers l'aéroport que l'économie genevoise entretient des rapports avec les pays proches et surtout moins proches. C'est à travers l'aéroport que notre canton - orienté sur les exportations pour 70% de son économie, je vous le rappelle - vit également de ces retombées économiques, raison pour laquelle des questions peuvent légitimement se poser. Je crois en revanche, et le Conseil d'Etat avec moi, que les questions énoncées à travers cette initiative ne sont pas exactement celles qui devraient se poser. La première question exprimée dans l'initiative est celle de la gouvernance, et s'il est un aéroport au monde où le politique est particulièrement investi, c'est bien l'Aéroport international de Genève, propriété de l'Etat, je vous le rappelle, à 100%, et dans le conseil d'administration duquel, Mesdames et Messieurs les représentants des partis politiques, vous siégez avec un membre par parti dès le début de chaque législature. C'est ainsi que la constitution et les lois le prévoient, et vous êtes formellement représentés dans ce conseil d'administration, vous êtes parties prenantes à l'élaboration de la stratégie, dans les limites de ce que postule le droit fédéral - et c'est le deuxième problème de gouvernance que pose cette initiative. Je rappelle ici que c'est la Confédération qui octroie une concession aux cantons pour l'exploitation d'un aéroport et que nous n'avons pas une marge de manoeuvre illimitée. Dans ce contexte, le Conseil d'Etat souhaite attirer votre attention sur le fait que cette initiative rigidifie, durcit, complique la situation plus qu'elle ne la facilite, à un moment où nous sommes en train de négocier avec la Confédération notamment les courbes de bruit - parce que nous sommes conscients de la problématique évoquée par les riverains. Et de ce point de vue là, il nous semble important de tenir compte du fait que la gouvernance de l'aéroport, qui a d'ailleurs évolué ces dernières années, sera péjorée par ce que postule cette initiative.

Quant aux questions de fond, celles relatives au bruit et aux émissions de CO2, j'aime à souligner ici que, s'agissant du développement durable, l'aéroport produit depuis quelques années un rapport qui n'est pas contesté, qui est reconnu. Vous avez à juste titre, Monsieur le député Wenger, souligné l'augmentation du nombre de passagers; on devrait à cet égard montrer qu'il n'y a plus de corrélation entre l'augmentation du nombre de passagers et l'augmentation du nombre de mouvements ! L'augmentation du nombre de mouvements s'est ralentie - elle est quand même en progression mais elle s'est nettement ralentie - et, à la faveur également des progrès techniques que fait le domaine de l'aéronautique, nous espérons pouvoir limiter à l'horizon 2030, voire peut-être réduire, un certain nombre de nuisances telles que le bruit ou les émissions. C'est la raison pour laquelle nous pensons aussi que cette initiative rigidifie par trop la situation, et nous aurons l'occasion de développer l'argumentaire opposé en commission. Nous pensons, cela dit, que cette initiative mérite d'être étudiée, si possible à la commission de l'économie; nous nous réjouissons de pouvoir y répondre ! Je vous remercie de votre attention. (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous allons voter en une fois sur les deux demandes de renvoi: celles et ceux qui veulent que cette initiative soit renvoyée à la commission législative votent oui, celles et ceux qui veulent qu'elle soit renvoyée à la commission de l'économie votent non. Est-ce que c'est clair ? Vous êtes d'accord ? (Commentaires.) Merci, alors allons-y; le vote est lancé.

Mis aux voix, le renvoi de l'initiative 163 et du rapport du Conseil d'Etat IN 163-A à la commission législative est rejeté par 70 non contre 15 oui et 1 abstention.

L'initiative 163 et le rapport du Conseil d'Etat IN 163-A sont donc renvoyés à la commission de l'économie.