République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 3 novembre 2016 à 20h35
1re législature - 3e année - 9e session - 49e séance
PL 11661-A
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au PL 11661-A en catégorie II, soixante minutes. Le rapport de majorité est de M. François Baertschi, celui de minorité de Mme Nathalie Fontanet, remplacée par M. Murat Julian Alder. Monsieur Baertschi, vous avez la parole.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Actuellement... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Une voix. Chut !
Le président. Un instant, Monsieur le rapporteur. Je demande à l'assemblée de faire silence ! (Un instant s'écoule.) Poursuivez.
M. François Baertschi. Merci. ...la situation est inquiétante. Le dernier audit de la Cour des comptes s'agissant de l'office cantonal de la détention fait état de graves problèmes, particulièrement dans la gestion des ressources humaines. C'est pourquoi il faut mettre fin aux erreurs de gestion du département de M. Pierre Maudet et ne pas en commettre de nouvelles.
La majorité de la commission estime qu'il ne faut pas privatiser les tâches régaliennes. En effet, une privatisation génère des emplois sous-payés, sans formation crédible du personnel. Sur ce sujet, une partie de la majorité, c'est-à-dire le groupe MCG, s'inquiète de ce dumping salarial consistant à embaucher massivement des travailleurs frontaliers au détriment des travailleurs locaux. Quant au coût supplémentaire pour la suppression de la privatisation estimé à 7 millions par le département, il est tout à fait contestable, et il y a de fortes probabilités pour que ce montant soit gonflé voire faux. Il faut prendre en compte le fait que l'on pourrait engager à ces postes des personnes sans emploi de manière tout à fait convenable, faisant ainsi en sorte que, compte tenu des dépenses sociales occasionnées par les problèmes d'emploi et sociaux, il n'y aurait au final pas de surcoût.
Autre point d'accrochage: cette loi sortie de commission prévoit que les gardiens de prison soient affiliés à la caisse de pension de la police - la CP - dont les bases financières sont solides, et non pas à la CPEG, qui connaît de très grandes difficultés actuellement - difficultés qui devront d'ailleurs être réglées par le Grand Conseil et les autres autorités. L'avenir de la CPEG est incertain, et il faudrait être inconscient pour lui attribuer une nouvelle institution quand il s'agirait plutôt de déterminer son futur avant tout. Quelles que soient les solutions choisies, le rapporteur de majorité et son groupe s'opposeront à tout chantage, à tout marchandage: le MCG soutiendra uniquement le projet de loi sorti de commission.
Il est regrettable que M. Maudet ait fait croire à la population ainsi qu'à certains députés qu'il n'y aurait pas de privatisation massive lors du vote de la nouvelle loi sur la police, acceptée à une majorité minuscule de 50 électeurs. Le temps nous a donné raison. Aujourd'hui, il convient de mettre fin à ces combinaisons, à cette politique du mensonge permanent en votant la LOPP telle que sortie de commission, sans aucun changement. Je reviendrai sur ce projet de loi au cours du débat.
M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je vous prie tout d'abord d'excuser Mme la députée Nathalie Fontanet qui a rédigé cet excellent rapport de minorité que je vais m'efforcer de défendre devant vous ce soir. Avant toute chose, j'aimerais préciser que la minorité va voter en faveur de l'entrée en matière de ce projet de loi puisque nous considérons que son principal atout n'est autre que d'unifier le statut du personnel pénitentiaire de ce canton, ce dont nous avons profondément besoin; il reste néanmoins des points litigieux sur lesquels je reviendrai au cours du débat.
Rappelons pour commencer qu'à la demande de la commission, le département a négocié un accord global avec l'UPCP qui a été traité de fond en comble; or une majorité de la commission s'est permis de remettre cet accord en question. Nous déplorons cette manière de procéder qui est contraire à la volonté de la commission elle-même, qui était que le Conseil d'Etat et l'UPCP trouvent un accord qu'elle pourrait en quelque sorte ratifier ensuite en faisant la paix des braves.
Le rapporteur de majorité, qui semble davantage défendre la position de son groupe que celle de la majorité de la commission, a évoqué la problématique des tâches régaliennes; mais, Mesdames et Messieurs, nous sommes en république, nous n'avons pas de roi, il ne peut donc pas y avoir de tâches régaliennes. (Exclamations.) Eh oui ! Ensuite, je n'ai pas l'impression que ces tâches dites régaliennes soient clairement définies quelque part, elles ne sont absolument pas listées dans la constitution, et j'estime qu'on devrait pouvoir intellectuellement et librement débattre de tout sans qu'on y oppose des tabous de ce type.
Maintenant, pour ce qui est du fond, la principale raison pour laquelle le PLR, avec d'autres formations, a adopté une posture minoritaire est la suivante: il ne s'agit pas de privatiser une activité quelconque de l'Etat, il s'agit d'opérer une externalisation. Je suis navré pour celles et ceux qui ne comprennent pas la nuance mais ce n'est pas du tout la même chose. A l'heure actuelle, il existe déjà un certain nombre d'externalisations qui ne posent strictement aucun problème, et ce qu'on nous demande, c'est de sacrifier sur l'autel du dogmatisme la solution qui avait été trouvée déjà en 2012, à savoir d'externaliser des tâches pour autant qu'elles ne figurent pas au coeur même de l'action de l'Etat, qui est de garantir la sécurité des citoyens.
Je souhaite souligner un chiffre, celui de 7,1 millions: il ne s'agit de rien d'autre que du coût annuel supplémentaire que va engendrer ce projet de loi s'il est accepté en l'état par la majorité aujourd'hui - je vous invite d'ailleurs à prendre connaissance de l'ensemble des calculs minutieusement effectués par l'auteure du rapport en page 346. Je ne suis pas sûr que l'Etat puisse, à l'heure actuelle, se permettre une dépense de 7,1 millions de francs supplémentaires au budget chaque année pour des raisons purement dogmatiques, parce qu'on a décrété, au nom de ces tâches régaliennes, que le transport devait nécessairement être effectué par du personnel assermenté. Cela dit, nous avons bon espoir qu'une majorité puisse être trouvée au sein de cette plénière pour revenir à quelque chose de plus pragmatique, c'est-à-dire consacrer le statu quo.
Ainsi, le PLR a pris la posture suivante: si son amendement à l'article 7, alinéa 3, est accepté, il se contentera du compromis trouvé entre le Conseil d'Etat et l'UPCP, jouera le jeu, en respectera les règles et acceptera le projet de loi avec cette modification; si, au contraire, la majorité persiste et signe, à ce moment-là il déposera un amendement à l'article 32 qui demandera que l'ensemble du personnel pénitentiaire ne soit plus affilié à la caisse de pension de la police mais à celle de l'Etat de Genève. Cela avait fait l'objet d'un amendement du groupe des Verts et nous estimons que les derniers développements en cours à propos de la CPEG et les nouvelles catastrophiques que nous avons apprises la semaine dernière justifient parfaitement cette mesure.
A cet égard, j'aimerais encore souligner le chiffre de 11 millions, qui représente le montant total des avoirs de prévoyance qu'il faudra sortir de la CPEG pour l'injecter à la CP si le projet de loi est adopté en l'état. On creuse un trou supplémentaire dans les fonds de la CPEG et, à cela, on ajoute encore un manque à gagner puisque l'ensemble du personnel pénitentiaire serait désormais affilié à la CP. Pour l'ensemble de ces raisons, bien que nous nous apprêtions à accepter l'entrée en matière de ce projet de loi, nous vous invitons d'ores et déjà à voter nos amendements. Je vous remercie de votre attention.
M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président, chers collègues, le groupe Ensemble à Gauche tient tout d'abord à remercier le Conseil d'Etat d'avoir présenté ce projet de loi car il était temps d'adapter les conditions des agents de détention à la réalité existante en donnant un statut uniforme à l'ensemble du personnel. Nous relevons toutefois qu'il n'était pas possible de ne laisser qu'une grosse semaine à l'UPCP pour examiner ce projet qui modifie en grande partie le statut des agents de détention tant sur le plan de leurs missions que sur celui de leur caisse de retraite, tout au moins pour une partie d'entre eux. Nous avons fait savoir que ce manque de concertation n'était pas admissible et donc appuyé le renvoi de ce projet au Conseil d'Etat afin que toutes les parties concernées puissent se réunir autour d'une table et tenter de trouver un accord.
Cette mission accomplie, mon groupe a découvert avec stupéfaction que l'Etat et l'UPCP avaient de concert décidé de privatiser ou d'externaliser une grande partie des missions affectées au personnel. La pierre d'achoppement majeure réside dans un amendement proposé à l'article 7 par l'UPCP et le département de la sécurité et de l'économie qui énonce, dans un alinéa 3, que le département peut déléguer à une entité privée tout ou partie des missions dont il contrôle l'exécution, notamment la conduite de détenus, les visites médicales, la surveillance externe du périmètre des établissements pénitentiaires et même la surveillance interne dans les prisons auxquelles aucun agent de détention n'est affecté. Nous nous trouvons face à une externalisation massive des tâches du personnel qui assure une suprématie à la société anonyme Securitas, à qui l'Etat attribue un véritable monopole en matière carcérale. Belle antinomie !
Cet amendement est bien évidemment totalement en contradiction avec le projet de loi 11662 sur le convoyage et le transport des détenus. En commission, j'ai pu faire part de mon opposition totale à cette mesure pour des raisons de fond car il n'est pas question pour Ensemble à Gauche de privatiser ou plus précisément d'externaliser des tâches qui sont dévolues en grande partie - sauf en matière de convoyage, il est vrai - à des agents de la fonction publique, des tâches qui, pour mon groupe, sont régaliennes - on l'a déjà dit - et ne supportent pas d'être confiées à des agents privés qui bénéficient de quelques heures de formation à peine - et ce n'est d'ailleurs pas toujours le cas. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
J'ajoute que cet amendement pose de sérieux problèmes de gouvernance car enfin, comment confier des tâches de sécurité tant à l'extérieur qu'à l'intérieur des établissements à des gardes Securitas disposant d'une formation au rabais ? Ceux-ci devraient exécuter les mêmes tâches ou presque que des agents de détention qui, eux, effectuent une formation pratique et théorique de 12 mois dans différents établissements pénitentiaires genevois puis une formation théorique de 24 mois à Fribourg entrecoupée de stages pratiques dans le milieu carcéral. Mais surtout, comment vivre ensemble et supporter que des employés à l'intérieur d'une même prison puissent ne pas recevoir un salaire identique pour une tâche équivalente ?
Le groupe Ensemble à Gauche est donc pleinement satisfait de l'article 7 tel qu'il a été voté par la majorité de la commission et qui énonce que toutes les tâches qui sont effectuées par l'office cantonal de la détention sont réalisées par des membres du personnel de l'Etat subordonnés à la direction générale dudit office. Il est également d'accord, dans un souci de cohérence, d'affilier progressivement tout le personnel pénitentiaire à la caisse de prévoyance des fonctionnaires de police. Aussi, nous accepterons le projet de loi tel qu'il ressort des travaux de commission - et donc le rapport de majorité de M. François Baertschi - et nous vous invitons, chers collègues, à en faire de même. (Quelques applaudissements.)
M. Alberto Velasco (S). Mesdames et Messieurs les députés, ce que contient ce projet de loi est assez extraordinaire. Je ne comprends pas comment le Conseil d'Etat, qui est tout de même responsable de la caisse de pension publique, c'est-à-dire la CPEG, et le syndicat ont pu trouver cet accord commun consistant à dire: «Je te donne la privatisation, tu me files la caisse.» Je m'excuse mais ça a pris certains partis comme le nôtre - et peut-être Ensemble à Gauche aussi - en tenaille. Si vous voulez éviter la privatisation de ce secteur, dont les travailleurs ne correspondent déjà pas à ce que le syndicat a négocié... Ils ont négocié la privatisation d'autres entités sans tenir compte du fait de leur représentation ! C'est incroyable, je ne comprends pas comment le Conseil d'Etat a pu se prêter à cette manoeuvre. Monsieur le conseiller d'Etat, je ne sais pas si vous avez des éléments très importants à discuter mais il s'agit de vous, là, d'accord ? (Remarque.) Il s'agit de vous, du Conseil d'Etat ! Cette pratique consiste, Monsieur le conseiller d'Etat, à privatiser un secteur en disant: «Si vous êtes d'accord de privatiser, je vous permets de vous affilier à la caisse de la police.»
Ce n'est pas responsable, et M. Béguet a indiqué que si tout ce personnel, qui représente environ 80 personnes, quittait aujourd'hui la CPEG, ça mettrait à mal la caisse, c'est mentionné dans le rapport. Il le dit, Monsieur le conseiller d'Etat ! (Remarque.) Non, mais vous, le Conseil d'Etat, avez justement annoncé cette semaine que la caisse de prévoyance était en difficulté, qu'il fallait l'aider et prendre des mesures. Comment avez-vous pu négocier cet accord, comment avez-vous pu permettre à ce corps de passer à la caisse de la police en prétendant qu'il n'y aurait pas de problème ? Il y aura un problème à la CPEG, il y aura un problème, Monsieur le conseiller d'Etat, et vous n'auriez pas dû vous prêter à ce marchandage consistant à placer des syndicats dans la position d'accepter une privatisation. Ce n'est pas normal ! Pour ma part, j'ai une autre position.
Je reviens à la privatisation: Mesdames et Messieurs, il s'agit là d'un premier stade, et n'allez pas croire que les gardiens vont échapper à l'externalisation, attendez, vous rigolez ! M. le rapporteur de minorité l'a laissé entendre bien clairement, il a dit que ce sont des tâches qui échappent à la fonction centrale de l'Etat. On peut très bien imaginer que les gardiens de prison échappent aussi à la fonction centrale de l'Etat, vous êtes d'accord qu'on peut ma foi considérer que le travail de gardien de prison ne constitue pas une tâche centrale de l'Etat, pas comme celle de juge, Monsieur le rapporteur de minorité. Je comprends donc, dans votre proposition, que plus tard on pourrait procéder à cette externalisation. Maintenant, ce sont les convoyeurs, demain ce seront les gardiens et après-demain, ce sera autre chose, et c'est ce qui est en jeu ici, Mesdames et Messieurs.
Je regrette que les syndicats se soient prêtés à ce jeu-là parce qu'ils ont remis en cause une partie de leur profession en négociant cet accord, avec une vue à court terme. En réalité, ils se sont protégés à court terme en achetant la possibilité de rejoindre la caisse de pension de la police qui, un jour peut-être, sera aussi mise à mal. En effet, si tout le monde s'affilie à la caisse de la police, elle ne restera pas en aussi bonne santé qu'elle l'est aujourd'hui.
Voilà, Mesdames et Messieurs, je pense qu'on doit refuser la proposition faite par le PLR d'aller dans le sens de la privatisation. J'ai cru comprendre que si votre amendement était rejeté, Monsieur Alder, vous alliez prendre une mesure de rétorsion en déposant un amendement pour punir le syndicat de s'être prêté à cette manoeuvre - je ne sais pas si c'est cela - et pour que les agents ne puissent plus rejoindre la caisse de la police. Cette manoeuvre est inadmissible ! Il faut donc, Mesdames et Messieurs, refuser l'amendement qui nous est présenté par le PLR.
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, l'Union démocratique du centre va essayer de vous exposer sa position sans dogmatisme. Le rapporteur de minorité a qualifié de royalistes les tâches régaliennes; pour nous, ce ne sont pas des tâches royalistes, ce sont simplement des missions qui doivent rester entre les mains de l'Etat et ne pas être privatisées - toute référence à l'Ancien Régime... L'Union démocratique du centre a activement participé aux travaux - puisque, malgré moi, j'étais le président de la commission - et lorsqu'ils ont été repris après interruption, nous avons intégralement accepté les amendements présentés par le département et l'UPCP en ce qui concerne le statut du personnel pénitentiaire. En effet, ne nous trompons pas de débat: ce projet de loi a pour objet le statut du personnel pénitentiaire et, par rapport à cela, l'UDC est complètement d'accord avec le président du département qui énonce que le fait d'avoir deux statuts différents - c'est la situation qui prévalait jusqu'à présent - est une hérésie et qu'il faut régler tout cela quitte à rejoindre une caisse de retraite saine et renoncer à celle, titanique, qu'on appelle actuellement la CPEG.
Mesdames et Messieurs les députés, ce qui est difficile pour l'UDC, c'est d'opérer la rationalisation entre ce que nous prônons à longueur de journée, c'est-à-dire une efficience budgétaire, une efficience s'agissant des dépenses pour que l'Etat cesse de dépenser plus qu'il ne gagne, et nos valeurs qui concernent tout ce qui a trait à la sécurité - dans la sécurité, nous englobons bien entendu la police, les gardiens de prison, tout ce qui relève de cet environnement. A ce sujet, je dois dire que nous ne sommes toujours pas convaincus des débats en l'état, et c'est la raison pour laquelle je vous informe que l'UDC s'abstiendra. Nous sommes souvent intervenus dans les débats, nous avons interrogé directement M. le conseiller d'Etat en disant qu'à l'UDC, nous ne comprenions pas comment il était possible de sectoriser le transport des détenus en disant: «Tiens, il y a une petite plage entre w et y - peu importent les noms - où on peut aller dans le privé, mais tout le reste doit rester chez nous.» L'UDC n'a pas honte de le dire - M. Alberto Velasco l'a certainement dit tout à l'heure: face à un veto syndical qui, en ce sens, n'est pas... Il est impossible - c'est ce que nous a indiqué le président du département - d'engager, toujours dans le cadre de l'Etat, des gens dans ce secteur où on sait que le dumping salarial - je l'appelle comme ça puisque quand on part dans le privé, on a la même prestation pour moins cher - permet un gain d'efficience.
Nous avons fait quelques recherches, et M. le président du département infirmera ou contestera - il ne dénigrera pas parce qu'il ne se le permet pas - et nous aimerions quand même rappeler qu'il y a déjà eu par le passé des tarifs différents. J'en veux pour exemple ceux qu'on appelait à l'époque les castors, qui avaient pratiquement le même rôle que la CECAL, qui étaient dans la centrale et étaient payés en catégorie 10. Les premiers convoyeurs étaient en classe de fonction 10, donc il était déjà possible par le passé d'avoir dans ce petit secteur... C'est là une des raisons majeures qui amène l'UDC à vous dire que nous nous abstiendrons pour le moment sur l'entrée en matière parce que nous sommes persuadés, comme M. le président du département, que payer le prix fort seulement pour ce secteur n'est pas juste; mais nous ne sommes pas encore d'accord de le donner au privé. C'est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons sur l'entrée en matière. Je vous remercie.
M. Bernhard Riedweg (UDC). Au sein de la commission judiciaire et de la police, l'une des pierres d'achoppement a été de maintenir l'externalisation d'une série de tâches régaliennes voulue par le département, qui de fait contrôle mais délègue à des agents de sécurité de sociétés privées l'exécution de tâches de moindre valeur ajoutée. Lors du convoyage et du transport de détenus non dangereux, il n'y a pas d'usage de la force, il n'y a aucun contact entre les agents et les détenus, lesquels sont transportés dans des véhicules équipés de cellules individuelles, il n'y a pas de gestion de détenu, pas de manipulation ni de contrainte. Aussi, il n'y a aucune nécessité que le véhicule soit conduit par un fonctionnaire.
Une voix. Il faut demander à Uber ! (Applaudissements.)
M. Bernhard Riedweg. Le fait de renoncer à confier la mission de convoyage et de transport à une société privée conduirait à devoir engager... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...une soixantaine de nouveaux fonctionnaires. Le différentiel salarial entre un agent de sécurité public et un agent de sécurité d'une société privée représente un coût supplémentaire de 7,2 millions qu'il faudra trouver dans le budget 2017...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Bernhard Riedweg. ...si ce projet de loi est accepté. Il faut savoir que la caisse de prévoyance de la police se trouve en meilleure santé que celle de l'Etat tant sur le plan des prestations, de l'âge pivot, de la durée de cotisation, du rappel de cotisations, du type de capitalisation que du taux de couverture, qui est de 106% contre un faible 60% pour la CPEG au 31 décembre 2015. L'objectif de la CPEG est de faire fonctionner...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Bernhard Riedweg. Je renonce. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Cyril Mizrahi pour une minute vingt.
M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'aimerais simplement vous dire au nom du groupe socialiste que, pour notre part, nous voterons ce projet de loi tel quel et refuserons l'amendement qui va apparemment être présenté par le PLR ou les Verts - je n'ai pas très bien compris - sur le rattachement à la CPEG. Il ne faut pas se payer de mots: on ne peut pas dire qu'on va résoudre d'un coup le problème de la CPEG, laquelle - je le précise - a été créée par la majorité de droite du Parlement fédéral qui a soudain décrété qu'il fallait absolument passer à un système de capitalisation - quand on connaît les résultats sur les marchés aujourd'hui, on se rend compte que c'est une décision...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Cyril Mizrahi. ...totalement calamiteuse ! Ce n'est donc pas en changeant... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Ce n'est pas uniquement avec les employés du secteur pénitentiaire que nous allons sauver cette caisse de pension, mais c'est tout simplement en changeant les règles au niveau fédéral par exemple.
Quelques mots maintenant sur la question du convoyage, qui est pour nous un point tout à fait fondamental en termes de sécurité. En effet, il ne faut pas se payer de mots non plus...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Cyril Mizrahi. Merci, Monsieur le président.
Le président. Je suis désolé ! La parole va à Mme la députée Emilie Flamand-Lew.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'objectif principal de ce projet de loi est l'harmonisation des différents statuts des agents de détention et, finalement, nous en parlons assez peu ce soir. Il est vrai que c'est un objectif très important, comme l'a rappelé le rapporteur de majorité, et qui fait partie des recommandations de la Cour des comptes s'agissant de la gestion de l'office cantonal de la détention, mais cette harmonisation en tant que telle n'est pas débattue ici et ne l'a pas été au sein de la commission. On l'a compris, il y a deux points d'accroche dans ce projet de loi: d'une part la sous-traitance de la conduite et de la surveillance des détenus à des privés, d'autre part la question de la caisse de pension.
Concernant la sous-traitance, les Verts sont très satisfaits du résultat sorti de la commission judiciaire. En effet, la sous-traitance revient à confier des tâches de l'Etat à du personnel non seulement moins bien formé mais également moins bien payé. Certes, l'argument de la minorité est de dire que cela coûte moins cher à l'Etat, mais en réalité - on a eu l'occasion d'entendre des syndicats défendant les agents de sécurité privés - les conditions de travail et de salaire sont extrêmement contestables, et les Verts estiment que ce n'est pas le rôle de l'Etat que d'encourager ce type de conditions. La conduite et la surveillance des détenus, c'est une tâche régalienne, n'en déplaise à M. Alder, c'est une tâche difficile, sensible, qu'on ne peut pas confier à des gens avec une très faible formation. On parle tout de même de conduire des détenus, de surveiller les abords de la prison dans les rizières de Puplinge ! Mais enfin, ce débat nous aura tout de même donné l'occasion de voir le PLR défendre un accord signé avec les syndicats, c'était quelque chose d'assez amusant !
Sur la question de la caisse de pension maintenant, les Verts étaient au début bien seuls lorsqu'ils ont déposé cet amendement. Pourtant, il y a longtemps, lorsque le conseiller d'Etat Maudet avait amené cette réforme de la LOPP, il avait parlé de réunir l'ensemble des agents de détention au sein de la CPEG; puis, quelques négociations plus tard, le sens s'était soudain inversé. Aujourd'hui, tout le monde hurle au loup s'agissant de la CPEG, tout le monde dit que la caisse est en train de couler, qu'il faut prendre des mesures absolument urgentes, tout le monde alerte l'opinion publique; or chaque fois qu'on a l'occasion d'aider la CPEG ou même, en l'occurrence, de ne simplement pas lui mettre de bâtons dans les roues, on ne le fait pas. Là, typiquement, il est question de transférer les futurs gardiens de prison - puisqu'on parle de l'avenir - et il est évident que les personnes déjà affiliées à l'une ou l'autre des caisses ne seront pas forcées d'en changer, quelle que soit la décision prise ce soir.
On parle de l'avenir, et la CPEG a besoin de nouveaux actifs car son ratio entre nombre d'actifs et nombre de rentiers est de plus en plus bas et de plus en plus problématique pour sa santé financière. Si on décide que tous les agents de détention seront affiliés à la CP à l'avenir, on prive la CPEG d'un important réservoir de futurs affiliés puisque, on l'a bien compris lors des derniers budgets, la détention est malheureusement l'un des seuls domaines, peut-être avec la formation, où l'Etat va pouvoir engager de manière importante dans les années à venir. Pour nous, il est donc irresponsable de priver la CPEG de futurs actifs, il s'agit plutôt de ramener progressivement les agents de détention au sein de la CPEG en sachant qu'avec les dispositions transitoires prévues dans l'amendement PLR que nous soutiendrons, qui est d'ailleurs une reprise de l'amendement Vert en commission, les personnes actuellement affiliées à la CP n'auront évidemment pas à changer de caisse. Je vous remercie ainsi de refuser les amendements liés à la sous-traitance, de conserver en cela les résultats des travaux de la commission judiciaire et, par contre, de soutenir les deux amendements PLR concernant la caisse de prévoyance. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Au nom du parti démocrate-chrétien, je tiens à vous dire mon indignation devant un sabotage pareil de ce projet de loi par la gauche et le MCG ! En effet, des accords ont été négociés entre le Conseil d'Etat et les syndicats qui avaient harmonieusement et à satisfaction du personnel pénitentiaire apporté des éléments sur lesquels nous pouvions travailler de manière sereine, et c'est vraiment scandaleux de les remettre en question à cause de postures politiques. Le refus de l'externalisation du transport des détenus engendrerait en outre un surcoût entre 7 et 8 millions, externalisation qui ne pose pas tellement problème, Monsieur le président, malgré tout ce qui a été dit.
Les formations sont suffisantes mais peuvent encore évoluer, cela a été dit. Je suis extrêmement rigoureuse et exigeante en matière de formation et je peux me permettre de m'exprimer, Monsieur le président, parce que c'est moi qui, il y a dix ans, dans le cadre d'accords intercantonaux, ai exigé que les professionnels de la sécurité privée aient accès à des formations. Ce n'était pas une évidence, ce n'était pas reconnu par beaucoup d'autres cantons et c'est Genève qui a exigé que cela puisse se faire. Je suis donc très au courant des formations et je ne peux pas laisser ces quelques heures être balayées, banalisées ainsi.
Maintenant, il est vraiment très dommage de bloquer ce travail, d'autant que les policiers seraient bien plus utiles ailleurs, notamment dans la rue pour rassurer notre population - c'est le cas dans les autres cantons et ça se passe très bien - plutôt que de servir à des tâches qui ne leur sont pas forcément dévolues. Pour une simple raison de posture politique, la gauche et le MCG balayent des négociations réussies - je trouve ça aberrant - et proposent des dépenses supplémentaires alors que ce sont les mêmes qui prétendent vouloir développer des fonds pour l'aide sociale - cet argent-là serait bien plus utile ailleurs. Pour le PDC, c'est donc non, non, non et non ! Nous soutiendrons les amendements du PLR et, s'ils sont acceptés, nous pourrons à ce moment-là revoir notre position. Je vous remercie.
Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)
M. Raymond Wicky (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, en ce qui concerne le groupe PLR, nous aimerions également saluer le travail du Conseil d'Etat qui nous a proposé ce projet de loi et plus particulièrement le travail de fourmi exécuté par le chef du département, comme vient de le souligner ma collègue PDC, qui a permis d'arriver à un consensus avec le syndicat. C'est pour ça que nous l'avons soutenu, parce que notre magistrat avait trouvé une solution de consensus - sous pression de la commission, il est vrai, mais cela nous paraissait être une bonne chose.
S'agissant de l'ensemble du projet de loi, le groupe PLR est favorable à cette LOPP sous réserve de certaines exceptions exposées dans le cadre du rapport de minorité et précisées il y a quelques instants encore par notre rapporteur. Nous vous présenterons donc un certain nombre d'amendements, comme vous l'avez compris lorsque mes différents collègues se sont exprimés. Cette loi nous paraît bien de par le fait qu'elle vise à harmoniser des statuts différents de personnel dans le domaine pénitentiaire et, de ce point de vue là, c'est une agréable réussite. Pour toutes ces raisons, notre groupe soutiendra l'entrée en matière sur ce projet de loi. Merci de votre attention.
M. Vincent Maitre (PDC). Je ne peux m'empêcher de réagir aux propos du rapporteur de majorité qui, comme à son habitude, s'est contenté d'affirmer des vérités sans évoquer ne serait-ce que le début d'une explication ou même d'une argumentation et a de surcroît remis en doute l'augmentation des charges de l'Etat de 7,1 millions en qualifiant ce montant d'artificiellement gonflé voire, pis, de mensonger. Il sera, vous vous en rendrez compte dans quelques instants, absolument incapable de justifier ses propos.
Pour ce qui est du reste, je ne peux non plus m'empêcher de réagir face à cette espèce de démonstration de corporatisme avéré à laquelle on assiste ce soir parce que ceux qui sont en train de vous dire qu'il ne faut surtout pas externaliser certaines tâches, que ce sont des tâches régaliennes qui doivent rester dans le giron de l'Etat et être exercées par des employés de l'Etat, de la maison de police au sens large, sont les mêmes qui, dans à peu près un mois, lors du vote du budget, vous diront qu'il est indispensable d'opérer des coupes budgétaires, que l'Etat est trop gras et trop gros; en réalité, c'est une véritable rente de situation politique à laquelle ils aspirent ce soir, c'est-à-dire que non seulement ils alimentent mais ils se complaisent dans cette pénurie de personnel, parce qu'ils sont évidemment les premiers concernés.
Pour ces raisons notamment, le PDC, comme cela a été dit par Mme von Arx-Vernon, refusera ce projet de loi de façon appuyée et vous encourage à faire de même.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député, et donne la parole au rapporteur de minorité, M. Murat Alder.
M. Murat Julian Alder. Merci mais j'y renonce, Monsieur le président.
Le président. Très bien, alors elle revient à M. François Baertschi, rapporteur de majorité, pour deux minutes trente-neuf.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Nous avons malheureusement peu de temps pour répondre aux propos du préopinant, qui lance des attaques tous azimuts dans le but qu'on ne puisse pas y répondre. Je vais quand même répondre à la plus importante, c'est-à-dire l'accusation de corporatisme. C'est vraiment l'hôpital qui se fout de la charité venant d'un avocat...
Une voix. Commis d'office !
M. François Baertschi. Commis d'office ou je ne sais quoi ! Je ne veux pas faire d'attaques personnelles mais j'ai été conduit par mon préopinant à émettre quelques réponses parce qu'il faut arrêter de se moquer du monde, ce qu'il a l'habitude de faire quand on pense par exemple au manque de sérieux de certains de ses textes parlementaires. Mais je vais me taire, je vais arrêter de donner des leçons aux autres - surtout qu'il ne le mérite pas - j'arrête là, Monsieur le président.
Je dispose encore d'un élément important qui ne devrait pas être dit... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) On demande une privatisation, d'accord, mais que va-t-on faire ? Externaliser ces tâches à une société qui a fait quoi ? Qui a engagé à la mosquée une personne fichée S - c'est paru dans les médias tout récemment ! Eh oui, c'est à ce genre de société qu'on va demander de conduire des détenus, ce n'est pas sérieux ! Cette privatisation - ou externalisation, pour faire plaisir au rapporteur de minorité - est une fumisterie monumentale, et il faut à tout prix rester ferme sur cet élément-là. Je vous engage donc à entrer en matière sur ce projet de loi.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Sur ce débat d'entrée en matière, je commencerai par une très brève réponse au préopinant rapporteur de majorité: j'imagine que les membres de son parti qui eux-mêmes sont des acteurs de la sécurité privée auront moyennement goûté son dernier commentaire.
Mesdames et Messieurs, ce que j'ai entendu ce soir me ravit: l'ensemble ou la quasi-totalité des groupes entrent en matière sur un projet de loi dont le propos principal - Mme Flamand-Lew l'a rappelé tout à l'heure - n'est pas la privatisation rampante ni l'externalisation mais - le Conseil d'Etat l'avait annoncé en 2012 déjà - l'unification des statuts. Pourquoi ? Parce que comme certains de mes prédécesseurs, lorsque j'ai pris mes fonctions il y a quatre ans, j'ai découvert dans le domaine pénitentiaire des gens de grande qualité, très investis dans leur travail, mais dont certains, pour la même activité ou la même fonction, avaient parfois un statut public différent, avec un salaire différent, des indemnités différentes, une caisse de pension différente, un âge de la retraite différent, cela alors même qu'ils accomplissent les mêmes tâches que leurs collègues voire que des employés sous seing privé, dont les activités s'entrecroisent parfois, à telle enseigne qu'il y a quelques mois encore, des agents publics et privés assumaient conjointement le convoyage de détenus, créant ainsi des situations totalement ubuesques dans les lignes hiérarchiques, les distinctions de traitement, les congés, tout ce qui doit malheureusement faire l'objet d'un règlement quotidien s'agissant du management élémentaire d'une activité extrêmement difficile - chacune et chacun s'en sera rendu compte - qui est celle, très noble par ailleurs, de gérer la question de la détention.
La situation dont j'ai hérité a été générée à certains égards par des magistrats qui ont dû faire comme ils pouvaient, quelle que soit leur couleur politique; je pense ici à un prédécesseur socialiste, qui a lui-même intégré dans les prisons des gardiens privés via des mandats octroyés à des sociétés, je pense à d'autres prédécesseurs qui ont dû, parce que le phénomène de surpopulation carcérale les y amenait, trouver des solutions, parfois avec des privés, parfois avec des publics. Ce soir, l'enjeu de ce projet de loi est de clarifier tout cela, d'apporter de la lisibilité et de permettre à cet office, comme l'a confirmé la Cour des comptes - je m'étonne à ce propos de la lecture très partiale du rapporteur de majorité - de travailler dans la sérénité nécessaire, ce que la Cour des comptes a elle-même reconnu s'agissant de la gestion globale de l'office. L'enjeu, Mesdames et Messieurs, est de permettre à cet office de fonctionner avec sérénité, de ramener de la justice, de l'équité, et de faire en sorte qu'on traite sur un pied d'égalité celles et ceux qui assument ces fonctions exigeantes.
Mais, Mesdames et Messieurs, vous le savez: la sécurité, si elle n'a pas de prix, a un coût, et dans la discussion globale qu'a amenée le Conseil d'Etat et qui a été confirmée par la commission ensuite, on a dit qu'il ne serait pas possible d'avoir fromage et dessert, que c'était sans doute souhaitable de pouvoir mettre tout le monde sur un pied d'égalité mais que pour un certain nombre de fonctions, dont nous pensons - vous êtes évidemment libres de penser le contraire, et c'est ce qui a fait le sel du débat en commission - qu'elles ne sont pas régaliennes, par exemple strictement le transport et pas la surveillance de détenus, nous pouvions tout à fait faire comme la plupart des autres cantons suisses et notamment des autres cantons romands. Je fais une petite parenthèse ici pour saluer l'action de ma collègue Béatrice Métraux, magistrate écologiste vaudoise, qui a décidé de renforcer la sécurité des établissements pénitentiaires, notamment de la plaine de l'Orbe, par l'augmentation des mandats à des sociétés privées pour la surveillance de l'environnement des bâtiments; je salue également le travail de l'un de mes collègues prédécesseurs dans le canton de Neuchâtel, Jean Studer, socialiste... (Remarque.) ...qui est toujours socialiste à ma connaissance, actuel président du conseil de banque de la BNS, et qui, lui aussi, avait à l'époque décidé d'octroyer des mandats à du personnel privé. Pourquoi ? Mme von Arx l'a dit tout à l'heure: pour libérer des agents publics et les remettre sur le terrain ! Il faut savoir qu'aujourd'hui déjà, en raison de ce projet de loi qui a tardé parce que nous avons pris des mesures conservatoires, nous distrayons des policiers qui devraient normalement s'occuper de la rue et leur assignons des surveillances d'hôpitaux, ce qui n'est naturellement pas souhaitable à long terme. Voilà l'enjeu de ce soir, Mesdames et Messieurs, c'est celui de la cohérence et de l'équité.
Il est vrai - Mme Flamand-Lew l'a mentionné tout à l'heure - qu'un point a quelque peu pollué le débat, mais il est important qu'on le tranche ce soir - je suivrai bien sûr la position du parlement quelle qu'elle soit - c'est la question non pas de la privatisation - comme si on avait décidé de privatiser depuis un an seulement ! - mais de l'externalisation, du fait de confier à l'extérieur des tâches qui, pour une fois, sont bien définies. Permettez-moi, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, de citer un grand socialiste qui a dit... (Commentaires. Le président agite la cloche.) ...un jour: «On ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment.»
M. Alberto Velasco. Qui a dit ça ?
M. Pierre Maudet. François Mitterrand. (Exclamations.) Vous auriez pu le deviner, Monsieur Velasco, vous connaissez François Mitterrand par coeur ! Bon, il revendiquait beaucoup cette phrase mais il se trouve qu'il l'avait empruntée à un grand homme du XVIIe siècle - je vous laisserai découvrir de qui il s'agit. «On ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment», donc, et mon activité dans le département dont j'ai hérité consiste, depuis quatre ans, à sortir de toute une série d'ambiguïtés et d'intrications impossibles sur des questions de police et de prison qui ont rendu la gestion de ces corps éminemment importants pour l'Etat extraordinairement compliquée. Ce que je vous demande principalement ce soir - mais j'entends qu'il y a une majorité voire une unanimité pour cela - c'est d'appuyer le Conseil d'Etat dans sa volonté de clarification et d'unification. Je souligne au passage, contrairement à ce que disait le rapporteur de majorité tout à l'heure, que le projet de loi n'a quasiment pas été touché en commission, à l'exception de deux articles qui ont fait l'objet de débats, soit l'article 7 sur les externalisations et l'article 36 sur les caisses de pension; pour le reste, je salue le fait que la commission a acté - et bien acté - l'ensemble de la loi.
Un mot enfin, parce qu'on m'en a fait un procès, sur le partenariat social. Le partenariat social, ce n'est pas quelque chose qui se décrète, c'est quelque chose qui se construit, qui se construit patiemment. On en a donné cette semaine encore l'exemple avec les partenaires sociaux privés: nous avons, sous la houlette du département, consacré un accord sur le gros oeuvre avec Unia d'une part et la SSP d'autre part, et je crois pouvoir dire que j'ai fait la démonstration ces deux dernières années, depuis que je suis en charge de l'économie, d'une capacité à rassembler les acteurs et à trouver des accords. Ici en l'occurrence - et c'est suffisamment rare pour que ce soit souligné - il s'agit d'un accord trouvé sous l'impulsion de la commission avec l'acteur principal dans ce domaine d'activité, l'UPCP. Et c'est bien là le comble: une fois que le dialogue avec les syndicats a été accompli, il est bien mal récompensé par une majorité du parlement puisque visiblement, cet accord n'a pas d'importance et que vous le faites passer par-dessus bord. Permettez-moi de vous dire que ce n'est guère une incitation pour le Conseil d'Etat à poursuivre dans cette voie ! Surtout s'il s'agit précisément de poursuivre dans la voie de la clarification. (Remarque.) Ce n'est nulle menace, c'est un simple constat que lorsque l'on se donne la peine, sur injonction d'une commission, de trouver un accord et qu'ensuite celui-ci est remis en cause, eh bien c'est un petit peu désespérant, pour tous les partenaires d'ailleurs.
En résumé et en conclusion, Mesdames et Messieurs, je vous remercie par avance d'entrer en matière sur ce projet de loi, de faire bon accueil aux propositions qui ont été discutées en commission mais, de grâce, de préserver une logique d'unicité. Il est extrêmement important pour faire fonctionner cet office d'avoir de la clarté, de la lisibilité, de l'unicité et surtout une certaine équité; merci de réserver un bon accueil à ces principes. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de bien vouloir voter sur l'entrée en matière de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 11661 est adopté en premier débat par 85 oui et 10 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 1 à 6.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement de M. Lussi visant à créer un article 6A nouveau, dont voici la teneur:
«Art. 6A (nouveau)
Les tâches de conduite et de surveillance de détenus sont effectuées par du personnel de nationalité suisse.»
Monsieur Lussi, souhaitez-vous commenter votre amendement ? (Remarque.) Vous avez la parole.
M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. L'Union démocratique du centre, alors qu'elle en a déjà débattu en commission, revient encore sur cette question. Pourquoi cela ? Eh bien simplement parce que lorsqu'on joue dans un club, quel qu'il soit - qu'il s'agisse de rugby, de football, de tennis ou autre - on doit être membre de ce club. De la même façon, l'Union démocratique du centre considère que lorsqu'on est dans un pays et qu'on participe - quelle que soit la tâche - à un système sécuritaire, eh bien on doit faire partie du club, c'est-à-dire du club de la Suisse. C'est la raison pour laquelle nous demandons que les gens, vu les efforts qui ont été faits et les facilités qu'il y a maintenant, aient au moins la pudeur d'avoir la nationalité suisse pour venir imposer leurs lois aux autres citoyens. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole au rapporteur de majorité, sur l'amendement.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Oui, uniquement sur l'amendement. Ce n'est pas en tant que rapporteur de majorité, mais au nom du groupe MCG que je m'exprime, pour indiquer que le MCG avait déposé un amendement semblable sur ce sujet-là, mais un peu plus large. Nous soutiendrons donc cet amendement.
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, nous allons maintenant nous prononcer sur cet amendement de M. Lussi consistant à créer un nouvel article 6A, qui vous a été lu tout à l'heure.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 65 non contre 28 oui.
Le président. A l'article 7, nous sommes saisis d'un amendement déposé par Mme Fontanet, dont nous avons déjà parlé. Il figure à la page 347 du rapport et s'énonce comme suit:
«Art. 7, al. 3 (nouveau)
3 En dérogation aux alinéas 1 et 2, le département peut déléguer à une entité privée tout ou partie des missions suivantes, dont il contrôle l'exécution:
a) conduites de détenus;
b) conduites médicales et surveillance hospitalière;
c) surveillance externe au périmètre des établissements pénitentiaires;
d) surveillance interne ponctuelle dans les établissements pénitentiaires, auxquels aucun agent de détention n'est affecté;
e) gestion des ateliers de travail externe des détenus.»
Je passe la parole à ceux qui souhaitent s'exprimer sur cet amendement, en commençant par M. Christian Grobet. (Remarque.) C'est une erreur, très bien. Dans ce cas, je cède le micro à M. Patrick Lussi.
M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. Je voudrais juste vous dire que nous avons nous-mêmes déposé un amendement consistant à créer un nouvel alinéa 4 à l'article 7 et qu'en définitive, comme il est probablement le plus éloigné, c'est peut-être sur celui-ci qu'on devrait se prononcer en premier, puisqu'il a trait à l'ensemble de l'amendement présenté par le PLR.
Le président. Nous traitons les amendements dans l'ordre, Monsieur le député ! La parole est à M. Cyril Mizrahi.
M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Je dirai simplement deux mots sur cet amendement. A un moment donné, je crois qu'il ne faut pas se payer de mots: soit on dit qu'il y a des détenus qui ne sont pas dangereux et, comme cela a été suggéré par un collègue dans la salle tout à l'heure, on peut confier leur conduite à une entreprise privée comme Uber ou même à des chauffeurs de taxi... On peut aussi donner un billet de bus aux détenus non dangereux pour qu'ils se déplacent tout seuls ! Pourquoi dépense-t-on tant d'argent, à ce moment-là ?! (Commentaires.) Je crois qu'il faut être sérieux. Si on considère qu'il est justifié d'avoir un transport qui réponde à un certain nombre de conditions en termes de sécurité et de chaîne de commandement, eh bien cela doit se faire au sein de l'Etat. Et ce n'est pas forcément un policier, comme je l'ai entendu ici, qui doit se charger de cette tâche: cela peut être un autre agent assermenté tel qu'un ASP, mais il faut que ce soit un agent bien formé et bien rémunéré, ce qui n'est pas du tout le cas des agents des sociétés privées. Voilà pourquoi je vous invite à refuser clairement cet amendement qui nous est proposé. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Alder, vous avez la parole sur cet amendement de Mme Fontanet.
M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de minorité ad interim. Je vous remercie, Monsieur le président. Je pensais que j'aurais pu d'abord présenter l'amendement et ensuite laisser le soin à M. Mizrahi de dire tout le mal qu'il en pense, mais il n'y a pas de problème. J'aimerais simplement souligner ici le fait que l'amendement que nous proposons n'est rien d'autre que la version initiale du projet de loi tel qu'il est issu des négociations entre le département et l'UPCP. Le PLR l'a dit et répété, il est attaché à ce compromis, et par cohérence il entend soutenir cette possibilité de maintenir les externalisations. Je voudrais également relever que l'amendement comporte les termes «dont il contrôle l'exécution»: l'Etat doit contrôler l'exécution de ces tâches qu'il externalise, il ne s'en désintéresse pas, et par conséquent ce n'est bel et bien pas une privatisation. Je vous remercie donc d'avance du bon accueil que vous réserverez à cet amendement.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Je dois d'abord rectifier ce que vient de dire à tort le rapporteur de minorité: il s'agit bien évidemment d'un amendement du PLR. Les propositions qui ont été formulées par le DSE et l'UPCP étaient des documents de travail, qui n'avaient pas force de loi en tant que tels. C'étaient uniquement des propositions ! L'UPCP est venue pour changer un ensemble d'éléments qui étaient très négatifs en vue d'améliorer la loi, et le département a demandé d'intervenir dans un certain périmètre et pas dans un autre. Mais là il s'agit d'un amendement qui est purement politique, et il faut arrêter de se cacher derrière des organisations ou d'autres choses. C'est un élément trompeur, un de plus dans ce débat !
M. Pierre Conne (PLR). Je voudrais également défendre cet amendement, avec peut-être un petit peu de nuance, et rappeler ce qu'a dit le rapporteur de minorité, à savoir que l'Etat reste entièrement responsable et le garant de ces missions spécifiques qui pourraient être confiées à des sociétés privées. Ça figure explicitement dans l'amendement par le biais des termes «dont il contrôle l'exécution». L'Etat reste donc effectivement le garant. En plus de cela, ces missions se limitent à certains convoyages et certaines surveillances, elles viennent compléter le travail des agents de détention et ne se substituent pas à ces derniers.
Un autre élément sur lequel j'aimerais revenir - on l'a évoqué - c'est la formation. Cela a été rappelé dans le rapport de minorité, les agents des sociétés privées qui se verraient confier ces tâches spécifiques bénéficient de formations qui portent sur l'éthique, les droits et devoirs, les secrets de fonction, l'usage des moyens de contrainte, ainsi que les comportements à l'égard des détenus. On n'a donc pas affaire simplement à des personnes de passage à qui on confie des activités non qualifiées et non payées, mais à de véritables agents de sécurité privés. Je voudrais également rappeler que la société qui se verrait confier ce mandat, Securitas, dispose à l'heure actuelle d'un mandat au niveau fédéral pour le convoyage des détenus, et que tous les cantons romands, à l'exception du Jura, confient actuellement des activités à des sociétés privées pour ce type de tâches spécifiques.
Et puis effectivement - on l'a dit, et il ne faut pas s'en cacher - le but est aussi de pouvoir gérer au mieux la qualité des prestations au meilleur coût. Or, grâce à ce projet d'externalisation de certaines tâches, on a la possibilité d'éviter une dépense supplémentaire de 7 millions - 7,1 millions, comme cela a été calculé - par année. Je vous invite donc à faire preuve d'un peu de pragmatisme et de sens des responsabilités, s'agissant à la fois de la sécurité et des deniers publics, et à accepter cet amendement. Je vous remercie.
M. Vincent Maitre (PDC). C'est exactement la démonstration de corporatisme dont je parlais tout à l'heure, car finalement on souhaite voir, derrière le volant de fourgons cellulaires qui amènent des détenus soit au tribunal, soit au ministère public ou ailleurs, des gens qui doivent absolument revêtir l'uniforme de la «maison police», que ce soient des ASP ou des gendarmes. Eh bien ceux qui désirent ça aujourd'hui sont les mêmes qui se plaignent quotidiennement du manque d'effectifs dans la police, du manque d'ASP, du manque d'agents sur le terrain. (Brouhaha.) Et pourtant ils voudraient ce soir mobiliser ces forces-là pour une «simple» - entre guillemets, et sans aucun jugement péjoratif de ma part - conduite de détenus, avec lesquels elles n'interagissent absolument pas, puisque la prise en charge des détenus reste quant à elle en main d'agents de détention, d'agents de la force publique qui, eux, sont évidemment formés à cela. Pour ma part, je ne suis pas du tout certain que, pour conduire un camion, il faille absolument avoir accompli l'école de police, être titulaire du brevet fédéral de police... (Remarque. Le président agite la cloche.) ...ou encore avoir suivi toutes les formations pour être ASP. (Commentaires.)
M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président, chers collègues, ici il ne s'agit pas seulement de conduire un camion, il ne s'agit pas seulement d'une tâche spécifique à l'intérieur ou à l'extérieur d'une prison, mais bien d'un ensemble de tâches que l'on confie à des privés, et en l'occurrence à la société Securitas, qui à l'heure actuelle détient un véritable monopole au niveau national. Vous vous rendez compte ! Et selon l'amendement qui est proposé, des gardes Securitas travailleraient en compagnie d'agents de détention à l'intérieur même des prisons... Franchement, ce n'est pas possible ! Ce n'est d'autant plus possible que M. Maudet lui-même disait que ce qui l'avait conduit à déposer ce projet de loi, c'était précisément l'enchevêtrement des différents statuts - privés, etc. - qui existaient préalablement. Eh bien cet amendement rétablit très exactement cet imbroglio, il faut donc le refuser ! (Applaudissements.)
Une voix. Très bien.
Une autre voix. Bravo !
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, si l'UDC est attachée aux tâches régaliennes, elle n'entend cependant pas être plus royaliste que le roi.
Une voix. Bravo !
M. Patrick Lussi. Nous avons compris malgré tout - mais il y a un peu une hésitation de notre part - le message du président du département lorsqu'il est venu en commission avec l'UPCP après l'interruption de séance. Il est vrai que ce qui est proposé, que même ces tâches proposées à des privés ont l'accord du syndicat, et c'est ce qui nous met pour notre part dans une position un peu délicate, entre le fait de préserver les deniers de l'Etat et celui de vouloir absolument garder ces missions chez nous. Mais je vais peut-être quand même contredire mon préopinant Pierre Conne, parce que M. le président du Conseil d'Etat a eu au moins l'honnêteté de dire et d'expliquer qu'il ne s'agit pas d'une économie. Il s'agit en réalité - et c'est tout à son honneur - de dire qu'on fait une petite économie sur ce secteur du convoyage en le confiant à des privés, mais que celle-ci sera un peu grignotée par les avantages qui seront accordés au reste du personnel pénitentiaire. C'est la raison pour laquelle l'Union démocratique du centre, qui reste attachée à ces négociations avec les syndicats - lesquels sont quand même partie prenante, même si souvent nous les décrions - acceptera cet amendement proposé par le PLR.
M. Pierre Vanek (EAG). Monsieur le président, Christian Zaugg a tout dit à ce sujet et je voudrais simplement demander le vote nominal sur cet amendement important.
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Manifestement oui, nous tiendrons donc compte de votre demande. Je passe la parole à Mme Emilie Flamand-Lew.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai déjà eu l'occasion de dire dans ma précédente intervention tout le mal que nous pensions de cette délégation à des privés. J'ajouterai peut-être encore deux éléments: dans son rapport, la Cour des comptes émet de sérieux doutes quant à la formation des agents privés à qui cette tâche est actuellement déléguée et, d'autre part, je rappelle également la prise de position de quelqu'un qui n'est pas exactement connu pour être un Bisounours, à savoir le procureur général, M. Olivier Jornot, qui, lorsque M. Maudet avait fait part de sa décision de déléguer les tâches de conduite et de surveillance des détenus, avait proprement et simplement refusé que la surveillance des audiences au ministère public soit effectuée par des agents privés. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le conseiller d'Etat avait obtempéré et renoncé à faire surveiller les audiences du ministère public par des privés. On peut donc peut-être se fier à M. Jornot, qui a une certaine expérience des questions de sécurité, pour vous dire que ce n'est pas une bonne idée et vous inviter une fois de plus à refuser cet amendement.
Une voix. Bravo !
M. Jean-Marie Voumard (MCG). On prive les gens de liberté: c'est une tâche régalienne dévolue à l'Etat, qui doit assumer cette fonction. Ce n'est pas à des entreprises privées de le faire, je pense qu'il faut quand même remettre l'église au milieu du village de ce côté-là. Maintenant quand j'entends l'un de mes préopinants, avocat de surcroît, mélanger les fonctions de policier et d'agent de détention... Un agent de détention suit une école à Fribourg et effectue des stages, tandis qu'un policier passe un brevet et bénéficie d'une année de formation ainsi que de stages. Monsieur le président, vous transmettrez à M. Maitre qu'il faudrait peut-être qu'il se renseigne avant de prendre la parole. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. François Baertschi, toujours sur l'amendement.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Oui, toujours sur l'amendement. Je suis quand même très surpris par la position du groupe UDC, qui tient tout un discours sur la préférence nationale. C'est du flan, ce n'est rien du tout... (Commentaires.) Dans la réalité, ils soutiennent les frontaliers de Securitas... (Protestations. Le président agite la cloche.) Ils soutiennent les frontaliers de Securitas, ils soutiennent le travail des étrangers, c'est les autres avant les nôtres ! Voilà ce que vous faites ! (Commentaires.) C'est la seule chose que vous faites, et vous ne suivez pas le rapport que vous avez cosigné. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Vous êtes en contradiction totale et vous mentez à la population. Soyez un peu honnêtes, une fois dans votre vie ! (Rire. Commentaires.)
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. J'observe que les discours contradictoires ne sont pas l'apanage d'un seul parti ce soir. Concrètement, ne pas voter cet amendement, c'est potentiellement mettre au chômage quelques dizaines de personnes... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...précisément en raison de l'argument que vous évoquiez tout à l'heure... (Chahut.)
Le président. Un instant, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, lorsque le Conseil d'Etat s'exprime, je vous prie de garder le silence.
M. Pierre Maudet. On ne peut pas d'un côté... (Commentaires de M. Roger Deneys.)
Le président. Monsieur Deneys, vous n'avez pas la parole !
M. Roger Deneys. Je ne l'ai pas demandée ! (Rires.)
M. Pierre Maudet. Mesdames et Messieurs les députés, on ne peut pas d'un côté déplorer un niveau de formation soi-disant insuffisant et de l'autre imaginer - par hypothèse, parce que c'est un peu la vue d'esprit qu'on a si l'on refuse cet amendement - que les gens qui aujourd'hui sont actifs sous seing privé vont être engagés demain sous seing public. Ce n'est pas très sérieux.
Je voudrais vous dire ici, au nom du Conseil d'Etat, que notre approche a été la suivante. Il ne s'agissait pas d'une approche dogmatique, d'abord parce que vous avez devant vous le Conseil d'Etat qui, durant ces dernières années, a le plus internalisé de fonctions jusque-là privées, et en particulier dans mon département. C'est si vrai que les médias y faisaient référence cette semaine encore. Dans le domaine de la DGSI, la direction générale des systèmes d'information, pour un gain financier avéré, nous avons eu plus d'une centaine - 111, pour être exact - d'internalisations. Il n'y a donc pas de position dogmatique. Ce qui fonde la position du Conseil d'Etat, c'est notamment la question du coût, évidemment, et je maintiens ici - c'est étayé, cela figure dans le rapport, Monsieur le rapporteur de majorité - le chiffre d'environ 7 millions, en fonction des fluctuations de détenus, que représentent essentiellement le convoyage, subsidiairement la surveillance hospitalière des détenus: concrètement, si cet amendement n'est pas voté, ce sont 7 millions de plus à la charge de l'Etat. On peut l'entendre, et il est évident que si vous nous donnez l'ordre de le faire, eh bien nous vous restituerons ici, dans les années à venir, sous forme d'amendements budgétaires, le soin de le ratifier ensuite, mais il faut être clair là-dessus: on ne peut pas d'un côté vouloir des économies et de l'autre ne pas se demander quel est leur coût.
J'ajouterai encore deux mots, parce que toujours dans l'idée que nous ne sommes pas dogmatiques, je dois ici défendre l'activité de ces personnes qui font leur travail au plus proche de leur conscience. Nous avons, dans le cadre de la convention collective de travail, des agents qui sont sur le haut du panier et qui sont les mieux rémunérés. Pourquoi ? Parce que nous pratiquons des contrôles réguliers et que nous avons des exigences qui nous lient par appel d'offres. Nous l'avons dit également lors des séances de commission, et nous pouvons le démontrer ici. Ces appels d'offres, je le précise également, sont faits à intervalle régulier, il n'y a donc pas qu'une société qui peut potentiellement répondre à ces appels. Et il n'y a pas de monopole, car il en existe en tout cas deux en Suisse qui ont la surface pour le faire.
Surtout, Mesdames et Messieurs, je rappelle quand même ici par quelles circonstances nous sommes passés ces dernières années, s'agissant d'une politique pour laquelle une majorité ici m'a soutenu, une politique relativement musclée en matière de sécurité. Or lorsque le nombre de détenus augmente singulièrement dans les prisons, et donc par définition le nombre de convois aussi, eh bien il faut être capable de suivre. Et ça, seul le privé le peut. Pourquoi ? Non pas parce qu'il est privé, mais parce qu'il a la capacité d'injecter rapidement, et non pas avec la lourdeur de la machine administrative qui doit engager et qui ensuite, une fois qu'on diminue la voilure, ne sait plus que faire de ces agents. Le privé a précisément la capacité d'absorber les pics ou les fluctuations saisonnières. C'est la raison pour laquelle, sur ces deux aspects en particulier du convoyage et des surveillances hospitalières - un projet qui avait été piloté et porté sur les fonts baptismaux par votre ancien collègue M. Sanchez, député MCG, lequel avait ardemment milité dans ses fonctions précédentes pour cette privatisation, cette externalisation des surveillances d'hôpital... (Commentaires. Le président agite la cloche.) - je vous recommande, au nom du Conseil d'Etat, de soutenir cet amendement.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter sur cet amendement à l'article 7, qui prévoit un alinéa 3 nouveau. Je vous en relis le contenu:
«Art. 7, al. 3 (nouveau)
3 En dérogation aux alinéas 1 et 2, le département peut déléguer à une entité privée tout ou partie des missions suivantes, dont il contrôle l'exécution:
a) conduites de détenus;
b) conduites médicales et surveillance hospitalière;
c) surveillance externe au périmètre des établissements pénitentiaires;
d) surveillance interne ponctuelle dans les établissements pénitentiaires, auxquels aucun agent de détention n'est affecté;
e) gestion des ateliers de travail externe des détenus.»
Je mets maintenant cet amendement aux voix, en vous rappelant que nous sommes en procédure de vote nominal.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 45 oui (vote nominal).
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, dans la mesure où cet amendement de Mme Fontanet a été refusé, l'amendement de M. Lussi introduisant un alinéa 4 nouveau à l'article 7 devient sans effet. Je vous en énonce quand même la teneur:
«Art. 7, al. 4 (nouveau)
4 L'entité délégataire privée doit notamment répondre aux exigences suivantes:
a) faire appel à des agents de nationalité suisse ou résidant dans le canton de Genève, au bénéfice d'une formation spécifique reconnue pour le transport et la garde de détenus;
b) développer, en partenariat avec la police cantonale, une formation continue pour les agents;
c) collaborer avec l'office cantonal de l'emploi dans le cadre du label «1+ pour tous»;
d) collaborer avec l'Hospice général dans le cadre de sa politique de réintégration à l'emploi par des stages en entreprise.»
Je poursuis la lecture des articles en deuxième débat.
Mis aux voix, l'art. 7 est adopté, de même que les art. 8 à 31.
Le président. A l'article 32, nous sommes saisis d'un amendement de Mme Fontanet, que voici:
«Art. 32 Caisse de prévoyance (nouvelle teneur)
Le personnel pénitentiaire est affilié à la Caisse de prévoyance de l'Etat de Genève (CPEG).»
Monsieur Alder, souhaitez-vous vous exprimer sur cet amendement ?
M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de minorité ad interim. Très volontiers, Monsieur le président, je vous remercie. La minorité ne s'estime plus liée par le consensus qui a été trouvé entre le Conseil d'Etat et l'UPCP et est très sensible aux inquiétudes soulevées par la Caisse de prévoyance de l'Etat de Genève, dont vous trouvez en copie un courrier aux pages 336 à 338 du rapport. Dans ce courrier, la CPEG a relevé, avant même les mauvaises nouvelles de la semaine dernière, que «si seul le personnel engagé depuis le 1er janvier 2014 est concerné, l'impact se limitera à l'évolution des effectifs CPEG et le ratio actifs/pensionnés». En d'autres termes, il s'agit là d'un manque à gagner. «En revanche, si l'ensemble des gardiens de prison actuellement affiliés à la CPEG (91 personnes) devaient quitter notre caisse, nous nous trouverions en situation de liquidation partielle, qui générerait un coût de sortie pour l'employeur d'environ CHF 11 Mios.» Cet amendement a donc pour objectif d'éviter une perte de 11 millions pour la caisse de pension de l'Etat de Genève. Pour le reste, je me réfère très volontiers aux excellents arguments qui ont été développés tout à l'heure par la députée Emilie Flamand-Lew.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. François Baertschi, sur l'amendement.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Oui, sur l'amendement uniquement. Merci, Monsieur le président. On assiste à une opération de politique politicienne, de «combinazione», dans une certaine tradition, que je trouve plutôt mesquine, pour ne pas dire minable. (Exclamations.) C'est la position d'un certain groupe politique de vouloir jouer avec la retraite d'employés de l'Etat, et je trouve que cette façon d'agir, de faire du chantage... (Protestations. Le président agite la cloche.) ...de prendre en otage des employés et de ne pas avoir une vision du bien commun n'est pas très jolie. Je ne sais pas si c'est du poker, de la belote, ou quel autre jeu de hasard on pourrait imaginer. Je ne sais pas quelle image donner ! En fait je suis très déçu par cette vision sordide de la politique... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...qui nous est présentée aujourd'hui, et je vous conseille avec la plus grande vigueur de vous opposer à cet amendement. Du reste je demande le vote nominal, pour que les actifs et les futurs retraités de la caisse puissent se rendre compte de qui se moque d'eux. (Brouhaha.)
Je citerai encore un autre élément. Quand on parle des 91 personnes, il faut aussi savoir qu'il y a des mécanismes qui sont quand même relativement complexes dans ces caisses de pension: les gens n'ont pas nécessairement la possibilité ou alors ils n'ont pas intérêt à changer de caisse, ils peuvent tout à fait rester dans l'ancienne caisse, quelle qu'elle soit. Je propose donc, puisqu'il est vrai que l'affaire est très peu claire sur cet élément-là, et que le deuxième pilier est très complexe, un retour en commission. (Commentaires. Protestations.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Je passe la parole au rapporteur de minorité, puis au conseiller d'Etat, s'il le souhaite.
M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de minorité ad interim. Je vous remercie, Monsieur le président. S'agissant du renvoi en commission, j'estime qu'il est parfaitement inutile. Le débat a déjà eu lieu au sein de la commission et le PLR a parfaitement annoncé la couleur dans son rapport de minorité. L'amendement visant à créer un alinéa 3 à l'article 7 n'a pas trouvé de majorité ici, nous le regrettons, nous avons annoncé notre intention, et je pense que ce renvoi en commission n'apporterait strictement rien, à part un retard dans le processus. Je vous invite donc à le refuser.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le rapporteur de majorité, sur le renvoi en commission.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Monsieur le président, je retire cette demande de renvoi en commission, pour abréger les débats. (Exclamations.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Cyril Mizrahi.
M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'ai déjà eu l'occasion de vous indiquer que le groupe socialiste allait refuser cet amendement et, si vous le permettez, j'aimerais ajouter deux éléments très rapidement. D'abord, M. Murat Julian Alder nous dit que le coût s'élèvera à 11 millions si on doit transférer à la caisse de pension de la police toutes les personnes qui sont actuellement affiliées à la CPEG. Le problème, mon cher collègue Murat Julian Alder, c'est que justement la loi sortie de commission ne prévoit pas ça. La loi qui est sortie de commission prévoit que ce sont les nouveaux employés qui seront affiliés à la CP et que les anciens - cela figure dans les dispositions transitoires, que je vous invite à lire, au besoin - auront le libre choix soit de rester à la CPEG pour ceux qui y sont affiliés, soit de passer à la caisse de pension de la police, en rachetant eux-mêmes les années de cotisation, et donc pas aux frais de la CPEG. Quant au deuxième élément que je voulais vous indiquer...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Cyril Mizrahi. Eh bien alors je conclus par là, Monsieur le président. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Bertrand Buchs, sur l'amendement.
M. Bertrand Buchs (PDC). Oui sur l'amendement, Monsieur le président, bien sûr. Je crois qu'on arrive à un point du débat qui est extrêmement important, puisqu'on parle de la caisse de retraite, de la caisse de retraite de l'Etat. Je pense qu'il faut maintenant qu'il y ait une certaine solidarité au niveau de l'Etat et qu'on sauve cette caisse de retraite de l'Etat. Or, pour y parvenir, il faut faire entrer dans cette caisse de nouveaux adhérents, qui apporteront de l'argent. Voilà ce qui va sauver la caisse, du moins c'est l'une des possibilités pour la sauver. On demande donc des efforts pour les nouveaux employés - pas pour ceux qui sont déjà en place - en les faisant entrer dans la caisse de retraite de l'Etat. C'est important, parce qu'on a tous envie de sauver cette caisse. Mais si maintenant certains partis politiques ne veulent pas sauver la caisse de l'Etat, qu'ils le disent ! Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
M. Patrick Lussi (UDC). L'Union démocratique du centre sera très claire à ce sujet et entend poursuivre et maintenir la discussion qu'a eue le magistrat avec les syndicats de police. En l'occurrence, ce qu'il recherche, c'est une unité de statut, or l'unité de statut inclut la caisse de retraite. Et l'Union démocratique du centre se refuse pour le moment à entrer dans ces discussions où l'on dit qu'il faut sauver la CPEG en y faisant entrer des gens... Non, ce n'est pas le débat, on reste sur le statut du personnel pénitentiaire, raison pour laquelle l'UDC refusera cet amendement.
M. Cyril Aellen (PLR). J'aimerais juste dire deux mots sur la CPEG. Au moment de sa fusion, il a été décidé de la recapitaliser jusqu'à concurrence de 80%, tel que nous le demande l'Assemblée fédérale, et non pas de changer de système - comme l'a dit faussement notre collègue Cyril Mizrahi: il s'agissait déjà d'un système de capitalisation qui, au demeurant, pour la CIA, était déjà déficitaire, dans le sens que son taux était au-dessous des 50% demandés par l'ancienne loi. Pour ce faire, le peuple genevois a accepté une décision de fusion, qui avait pour objectif l'assainissement par une augmentation du nombre de cotisants, ce qui est un aspect positif, puisque environ trois points de cotisation servent à renflouer la caisse, ainsi que par une augmentation progressive des cotisations jusqu'à un cumul de 27%, deux tiers étant à la charge de l'employeur - c'est-à-dire de l'Etat - et un tiers à la charge de l'employé. Il y avait donc une contribution de l'Etat et de l'employé. Enfin, un effort était demandé à la fonction publique d'alors, notamment dans la modification de l'octroi des prestations qui lui étaient fournies, en particulier avec le changement de l'âge-cadre. Aujourd'hui, plus il y a de cotisants au sein de la CPEG, plus la situation de cette caisse sera bonne. Dès lors, si on empêche l'Etat d'affilier ses propres fonctionnaires à la CPEG, on fait supporter une plus grande charge financière sur tous les autres fonctionnaires de la fonction publique. Ainsi, refuser d'affilier les agents de détention à la CPEG, c'est demander aux infirmières, aux enseignants et à l'ensemble de la fonction publique de cotiser plus pour sauver la situation. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Gilbert Catelain pour une minute.
M. Gilbert Catelain (UDC), député suppléant. Merci, Monsieur le président. Je rappelle que si nous sommes là ce soir, c'est parce que nous avons une nouvelle procédure pénale, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2011. Et nous apprenons qu'en Valais, elle a généré 60% de conduite de détenus en plus. Le problème, c'est que le canton du Valais compte 327 000 habitants, que 80% des convoyages sont assurés par une entreprise privée et que ça ne coûte que 317 000 F.
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Gilbert Catelain. Malheureusement, nous sommes à Genève, un canton de 450 000 habitants, et ça coûte des millions.
Le président. Monsieur le député, vous devez vous exprimer sur l'amendement !
M. Gilbert Catelain. Effectivement, j'y viens, Monsieur le président ! Concernant l'amendement, nous avons voté il y a quelques années la recapitalisation de la CPEG et, dans ce cadre, nous avons également voté le rythme de croissance...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Gilbert Catelain. Je conclus ! Nous devons être cohérents: nous avons suivi le Conseil d'Etat à l'époque pour la recapitalisation de la CPEG, nous avons suivi le Conseil d'Etat lorsqu'il nous a demandé d'augmenter le nombre de membres de la CPEG, et ce qu'on nous propose de faire aujourd'hui serait donc contraire à ce principe.
Le président. C'est terminé, merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Jean Batou pour quarante-cinq secondes.
M. Jean Batou (EAG). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, je trouve indécent que, durant une discussion qui porte sur les agents de détention, on invoque la crise de la CPEG, sur laquelle nous n'avons actuellement aucune information, sauf par la «Tribune de Genève». (Commentaires. Le président agite la cloche.) La commission des finances n'a reçu aucune information ! (Commentaires.) Je pense qu'il faut donc avoir une discussion sérieuse sur la CPEG, mais qu'on ne peut pas mélanger la question des agents de détention et de leur caisse de retraite avec la problématique générale de la CPEG, raison pour laquelle je réaffirme notre refus de cet amendement. (Quelques applaudissements.)
M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de minorité ad interim. Je voudrais juste brièvement répondre à M. Mizrahi qui m'a interpellé tout à l'heure. Il a raison, un autre amendement sera effectivement déposé dans quelques instants par le PLR à l'article 36, alinéa 2, lequel permettra au personnel pénitentiaire actuellement affilié à la Caisse de prévoyance des fonctionnaires de police et des établissements pénitentiaires de choisir librement entre le fait de rester à la CP ou de passer à la CPEG. En réalité, le mécanisme introduit par l'article 32 vise les futurs employés du secteur pénitentiaire, et à ce propos je n'ai encore entendu aucun argument en faveur d'une affiliation de ce futur personnel à la caisse de pension de la police. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Emilie Flamand-Lew pour une minute.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, certains ce soir ont l'air outrés qu'on puisse imaginer affilier les agents de détention à la CPEG. La CPEG est la caisse de pension de tous les autres fonctionnaires de l'Etat, à l'exception des policiers, et je pense que pour les fonctionnaires qui suivent peut-être nos débats ce soir, il est un peu inquiétant que l'on dise: «Attention, il ne faut surtout pas les affilier à la CPEG: c'est comme si vous les mettiez sur un bateau qui est en train de couler, c'est absolument terrible !» Donc d'une part je trouve ce discours assez peu rassurant et assez peu responsable, et d'autre part j'aimerais rappeler que ce n'est pas comme si actuellement tous les agents de détention étaient à la CP et qu'on proposait de tous les transférer à la CPEG. En effet, on se trouve aujourd'hui dans un système mixte: une partie - certes majoritaire pour le moment - est affiliée à la caisse de police, à savoir les personnes qui travaillent à Champ-Dollon, qui ont le statut d'agent de détention, tandis que tous les autres agents de détention - qui jusqu'à présent relèvent de la loi B 5 05 sur le personnel de l'administration - sont actuellement affiliés à la CPEG. On a donc en ce moment deux voies parallèles, et le projet de loi doit rabattre une voie sur l'autre - pour prendre une métaphore routière qui, je l'espère, vous plaira. Le projet de loi du département propose de rabattre ceux qui cotisent à la CPEG vers la CP; nous suggérons simplement de procéder à la déviation inverse, à savoir, pour l'avenir, que ces deux voies convergent vers la CPEG plutôt que vers la CP. Voilà ce que nous vous proposons ce soir, et nous soutiendrons cet amendement ainsi que la disposition transitoire qui lui est liée. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Mesdames et Messieurs, la parole n'étant plus demandée, je vais mettre aux voix - toujours au vote nominal - cet amendement à l'article 32, dont je vous rappelle la teneur:
«Art. 32 Caisse de prévoyance (nouvelle teneur)
Le personnel pénitentiaire est affilié à la Caisse de prévoyance de l'Etat de Genève (CPEG).»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 50 oui contre 44 non et 1 abstention (vote nominal).
Mis aux voix, l'art. 32 ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'art. 33 est adopté, de même que les art. 34 et 35.
Le président. A l'article 36, nous sommes saisis d'un amendement concernant les alinéas 1 et 2, que voici:
«Art. 36, al. 1 et 2 (nouvelle teneur)
1 La présente loi est applicable dès son entrée en vigueur au personnel pénitentiaire jusqu'alors soumis à la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux, du 4 décembre 1997.
2 Le personnel pénitentiaire affilié à la Caisse de prévoyance des fonctionnaires de police et des établissements pénitentiaires (CP) au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi a le libre choix de rester affilié à cette caisse ou de s'affilier à la Caisse de prévoyance de l'Etat de Genève (CPEG), tout frais de rachat ou de rattrapage étant à la charge du membre du personnel concerné. Le Conseil d'Etat prévoit par voie réglementaire le délai dans lequel l'intéressé doit faire valoir son choix.»
Les groupes n'ont plus de temps de parole, mais je laisse les deux rapporteurs s'exprimer, uniquement sur l'amendement. Monsieur Alder, je vous cède le micro.
M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de minorité ad interim. Je vous remercie, Monsieur le président. Comme je le disais tout à l'heure, cette disposition transitoire a pour objectif de prévoir le libre choix pour les personnes qui sont actuellement affiliées à la CP, de telle manière qu'elles puissent opter entre les deux caisses. Par ailleurs, j'aimerais juste relever ici une erreur de plume à la page 350 du rapport. A la fin de la deuxième ligne de l'article 36, alinéa 2, il est écrit: «l'Etat de Genève (CPEG)». Cette partie-là du texte de l'amendement n'est pas à prendre en considération, car il s'agit bien d'une erreur de plume. Je vous remercie de votre compréhension.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. C'est vrai qu'il y a un ensemble d'éléments qui ne sont pas très clairs à ce niveau. D'après ce que nous dit le rapporteur de minorité, on laisserait le choix aux personnes qui sont en fonction, mais j'ai quand même quelques doutes en termes d'inégalité de traitement. C'est pour cette raison que je demande un retour en commission... (Protestations.) ...parce qu'il y a de nouveaux éléments qui ne sont pas très clairs. Je réitère donc ma demande. (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Murat Julian Alder, sur le renvoi en commission.
M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de minorité ad interim. Je vous remercie, Monsieur le président. Encore une fois, comme je l'ai dit tout à l'heure au sujet de l'article 32, cet amendement avait été déposé par le groupe des Verts en commission et il a fait l'objet de discussions. Je n'ai encore entendu aucun argument ce soir expliquant pourquoi il faudrait que les futurs employés du secteur pénitentiaire soient affiliés à la CP et non pas à la CPEG, j'estime donc que cette demande de renvoi en commission est une manoeuvre dilatoire, et je vous invite à la refuser.
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, nous allons nous prononcer sur cette demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11661 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 67 non contre 25 oui.
Le président. Nous en sommes toujours à l'article 36. La parole n'étant plus demandée, je vais vous faire voter sur l'amendement que je vous ai lu tout à l'heure concernant les alinéas 1 et 2.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 84 oui contre 7 non et 3 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 36 ainsi amendé est adopté.
Le président. Nous allons passer au troisième débat et voter sur ce projet de loi tel qu'amendé... (Remarque.) Monsieur Aellen ?
M. Cyril Aellen (PLR). On nous avait informés du dépôt d'amendements au troisième débat. Est-ce une erreur, Monsieur le président ?
Le président. Il ne me semble pas que nous soyons saisis d'amendements pour ce troisième débat. (Commentaires.)
M. Cyril Aellen. Merci !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons donc... (Commentaires. Un instant s'écoule. Brouhaha.) S'il vous plaît, un peu de calme ! Excusez-moi, j'ai fait une erreur. Nous en sommes toujours au deuxième débat, plus précisément à l'article 37 souligné.
Mis aux voix, l'art. 37 (souligné) est adopté.
Troisième débat
Le président. Nous abordons donc maintenant le troisième débat, qui a été demandé.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 1 à 6.
Le président. A l'article 7, M. Lussi redépose le même amendement visant à créer un alinéa 4 qu'il avait présenté au deuxième débat. Cependant, dans la mesure où l'amendement PLR consistant à ajouter un alinéa 3 à cet article n'a pas été accepté... (Remarque.) Monsieur Aellen ?
M. Cyril Aellen (PLR). Monsieur le président, nous redéposons en troisième débat notre amendement introduisant un alinéa 3 à l'article 7, tel qu'il figure dans le rapport de minorité à la page 347.
Le président. Très bien. Nous allons donc d'abord nous prononcer sur votre amendement.
Une voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, c'est le cas. Mesdames et Messieurs, je soumets une nouvelle fois à votre approbation cet amendement visant à ajouter un alinéa 3 à l'article 7. Je vous rappelle qu'il s'énonce comme suit:
«Art. 7, al. 3 (nouveau)
3 En dérogation aux alinéas 1 et 2, le département peut déléguer à une entité privée tout ou partie des missions suivantes, dont il contrôle l'exécution:
a) conduites de détenus;
b) conduites médicales et surveillance hospitalière;
c) surveillance externe au périmètre des établissements pénitentiaires;
d) surveillance interne ponctuelle dans les établissements pénitentiaires, auxquels aucun agent de détention n'est affecté;
e) gestion des ateliers de travail externe des détenus.»
Mesdames et Messieurs les députés... (Commentaires.) Monsieur le conseiller d'Etat ?
Des voix. On est en procédure de vote ! (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, Messieurs !
Une voix. Mais on est en procédure de vote !
M. Pierre Maudet (hors micro). Oui, mais j'ai demandé la parole il y a quelque temps déjà ! (Exclamations. Commentaires.)
Le président. Le Conseil d'Etat peut toujours s'exprimer, et il n'est pas limité dans le temps. Monsieur le conseiller d'Etat, vous avez la parole.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je serai très bref. Je me suis effectivement inscrit pour prendre la parole il y a quelques instants, et à ce stade j'aimerais vous dire ceci. Nous en sommes toujours à ces deux articles, soit les articles 7 et 32, et le Conseil d'Etat ne peut que vous inviter à en revenir à la proposition qu'il a faite en commission, à savoir accepter l'amendement à l'article 7 et rejeter par contre tout à l'heure l'article 32 amendé.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous allons nous prononcer - toujours au vote nominal - sur cet amendement consistant à créer un alinéa 3 à l'article 7.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 45 oui (vote nominal).
Le président. Cet amendement ayant été refusé, l'amendement de M. Lussi introduisant un alinéa 4 nouveau à l'article 7 devient sans effet. Je vous rappelle qu'il s'agit du même amendement que celui qu'il avait présenté en deuxième débat.
Mis aux voix, l'art. 7 est adopté, de même que les art. 8 à 31.
Le président. A l'article 32, nous sommes saisis de l'amendement suivant:
«Art. 32 Caisse de prévoyance
Le personnel pénitentiaire est affilié à la Caisse de prévoyance des fonctionnaires de police et des établissements pénitentiaires.»
Je précise qu'il s'agit de revenir au texte initial, soit à la mouture qui prévalait avant que l'on vote l'amendement à l'article 32 en deuxième débat. (Remarque.) Nous sommes en procédure de vote, Monsieur le député !
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 46 oui et 1 abstention. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
Mis aux voix, l'art. 32 est adopté, de même que les art. 33 à 36.
Mis aux voix, l'art. 37 (souligné) est adopté.
Mise aux voix, la loi 11661 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 62 oui contre 22 non et 9 abstentions.