République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 13 mai 2016 à 18h
1re législature - 3e année - 4e session - 20e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 18h, sous la présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président.
Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, et Serge Dal Busco, conseiller d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Pierre Maudet, Anne Emery-Torracinta, Mauro Poggia, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Frédéric Hohl, Carlos Medeiros, Romain de Sainte Marie, Patrick Saudan, Eric Stauffer, Salika Wenger, Ronald Zacharias, Daniel Zaugg et Yvan Zweifel, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Patrick Dimier, Claire Martenot, Françoise Sapin, Nathalie Schneuwly, Charles Selleger, Alexandre de Senarclens et Marion Sobanek.
Annonces et dépôts
Néant.
Débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous débutons la séance avec la R 691-A, classée en catégorie II, quarante minutes. Le rapporteur de majorité Jacques Jeannerat est remplacé par M. Serge Hiltpold, à qui je passe la parole. (Brouhaha.) Quand vous avez le silence, Monsieur le rapporteur de majorité, vous pouvez y aller.
M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous revenons sur une résolution traitée en 2013 par la commission de l'économie et je reprends le rapport de majorité de mon collègue Jacques Jeannerat.
Une voix. C'est vieux !
M. Serge Hiltpold. Cette résolution a suscité pas mal de débats en commission, notamment en ce qui concerne les divers investissements qui avaient été faits, les projets qui pouvaient être encouragés par ce type de partenariat, les éventuels doutes et les amendements qui seront présentés principalement par les deux rapporteurs de minorité. Les auteurs de cette résolution citent quelques projets assez emblématiques dans le canton de Genève qui illustrent la complémentarité des financements. Nous avons des financements publics, privés et publics-privés; c'est une complémentarité que les auteurs ont voulu soutenir. Parmi les projets assez emblématiques ayant bien fonctionné, on peut penser par exemple au pont Hans Wilsdorf, à la maison de la paix, à la maison des étudiants et, dans d'autres cas, par exemple dans le secteur de l'enseignement, à toutes les écoles privées telles que l'Institut Florimont, l'Ecole Internationale, l'Ecole Moser, qui illustrent cette nécessité de complémentarité. D'autres objets sont évidemment à l'étude, notamment le parking des Clés-de-Rive ou la traversée du lac, ainsi que d'autres projets majeurs.
J'aimerais mettre un élément en lumière, à savoir la problématique et l'inquiétude des rapporteurs de minorité concernant les droits de superficie et les surcoûts que peuvent ou que pourraient engendrer les partenariats avec les acteurs privés. Il est important de noter que, lorsque vous établissez le cahier des charges et que vous définissez les rendements que vous souhaitez obtenir pour le secteur public, vous devez jouer cartes sur table avec les acteurs privés et leur indiquer le rendement que vous attendez en octroyant un droit distinct permanent permettant un retour sur investissement. La responsabilité n'est pas uniquement celle du privé, ou uniquement celle du public: il s'agit simplement de définir les missions et la rentabilité - n'ayons pas peur du mot - qu'en tant qu'acteur public, en octroyant un droit distinct permanent, vous souhaitez obtenir lorsque l'ouvrage vous revient. Une audition particulièrement instructive de notre collègue Francis-Luc Perret de l'EPFL a montré ce qu'on pouvait faire dans le domaine académique à l'EPFL, notamment avec le Rolex Learning Center et les partenariats engagés avec de plus petites structures, des start-up, ou des entreprises plus grandes comme Nestlé sur le campus et les quelque 120 entreprises qui offrent des débouchés aux étudiants et qui donnent un peu l'esprit d'entreprise du secteur académique. Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, je vais m'en tenir à ces propos et je reviendrai ensuite sur les amendements qui vous seront proposés par la minorité.
M. François Lefort (Ve), rapporteur de première minorité. Par cette résolution, on voit ressurgir ce qu'on peut appeler le serpent de mer du partenariat public-privé. Un serpent de mer, que nenni, une hydre à mille têtes ! Une hydre vertueuse qui vient nous prêcher l'efficience du privé contre la non-efficience de l'Etat ! Ce pauvre Etat, incapable, impotent, coupable de mille inefficiences, voilà bien les préjugés habituels et gourmands de l'ultralibéralisme. Cette résolution demande au Conseil d'Etat de favoriser les investissements privés, d'abord par la vente de terrains ou de bâtiments, ce qui est déjà pratiqué pour des objets mineurs - nous l'avons fait hier soir - mais reconnaissez que ce n'est pas souhaitable pour l'ensemble de notre patrimoine. Elle demande de favoriser les investissements privés qui peuvent se matérialiser premièrement par l'octroi de droits de superficie pour la réalisation de bâtiments dans les grands projets d'aménagement - ce qui se fait déjà, et ce qui se fait depuis longtemps, ce n'est donc pas la peine de le redemander par voie de résolution; ensuite, par la mise en location ou la vente de surfaces administratives - alors là encore faudrait-il qu'elles existent, ces surfaces libres dont l'Etat serait propriétaire et dont il n'aurait pas besoin, en fait, c'est plutôt la situation inverse; enfin, par le partenariat public-privé pour le financement d'infrastructures rentables. La plupart de ces invites ne servent donc à rien, étant donné que ce qu'elles demandent est d'ores et déjà possible, pas forcément pratiqué, pas forcément souhaitable pour de bonnes raisons. (Remarque.)
Ces invites ne servent à rien, ou plutôt, si, elles servent d'aimables feuilles de vigne pour habiller cette habituelle incantation au partenariat public-privé. Ah, le partenariat public-privé ! Vaste sujet, qui va du mécénat à la substitution complète du privé à l'Etat, et nous ne sommes pas forcément contre ! (Remarque.) Malgré tout ce que je viens de dire, les Verts ne sont pas forcément contre ! Il existe de belles réalisations, comme la passerelle Hans Wilsdorf que vous avez mentionnée, Monsieur Hiltpold. C'est un PPP qui est même proche du mécénat; c'est presque du mécénat d'ailleurs. Ou alors, encore un autre type de PPP: le don de deux bus électriques aux TPG par la Ville de Genève. En fait, il s'agit là d'un partenariat public-public, le contraire de nombreux exemples de partenariats privé-privé que vous avez mentionnés tout à l'heure. Nous ne sommes donc pas forcément contre les PPP. Mais l'histoire du PPP ces trente dernières années en Europe nous a rendus méfiants et les Etats voisins ont tiré des leçons de ces PPP qui se sont mal passés et ont conçu des lignes directrices pour savoir quand et comment utiliser le PPP. La principale conclusion est que les PPP doivent être encadrés et utilisés seulement quand l'Etat ne peut pas faire le travail tout seul.
C'est la raison pour laquelle nous vous proposons maintenant l'amendement suivant que vous avez trouvé sur vos tables et que je vais expliquer. Cet amendement supprime la première et la troisième puce de la première invite, supprime la deuxième invite et complète la résolution de cinq nouvelles invites, qui demandent: premièrement, l'évaluation préalable des projets de PPP par des audits des partenaires réalisés en collaboration avec les banques impliquées qui vont financer ces PPP; deuxièmement, le recours au PPP pour des besoins publics urgents ou techniquement complexes, exactement ce que l'Etat ne peut pas faire; et, troisièmement, pour tout PPP, la réalisation d'une étude comparative entre un PPP et un appel d'offres sur un marché public, tout simplement pour être sûr que ce PPP ne sera pas plus cher, voire beaucoup plus cher que l'action de l'Etat. Ces trois invites sont issues des conclusions générales des audits des PPP menés en Europe et sont justement propres à éviter les échecs. Enfin, les deux dernières invites proposées dans cet amendement demandent, d'une part, l'interdiction des dons des lauréats des PPP aux partis politiques genevois, c'est-à-dire des dons post-obtention du PPP, pour éviter évidemment les retours d'ascenseur et, d'autre part, la présentation des projets de PPP au Grand Conseil sous forme de projet de loi. Vous le voyez, les Verts ne sont pas contre le PPP, mais ce recours au PPP doit être encadré pour qu'il ne se fasse pas au détriment des habitants de ce canton, qui au final paieraient les échecs de ces PPP. Ce que nous vous proposons, c'est en fait une assurance contre les avanies des PPP, pour se protéger justement des mauvais PPP et bâtir des partenariats harmonieux entre le public et le privé. Qu'est-ce qu'un mauvais PPP ? C'est un PPP qui sera extrêmement coûteux à l'Etat, donc au contribuable, donc aux habitants, et qui rendra un service justement beaucoup plus cher que ce que l'Etat aurait pu faire et c'est ce que nous ne voulons pas. Merci donc d'accueillir favorablement ces amendements. S'ils sont votés, au moins la majorité d'entre eux, évidemment, nous voterons la résolution amendée.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe la parole au rapporteur de deuxième majori... minorité, M. Roger Deneys.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Bientôt, nous aurons des rapports de deuxième majorité, je m'en réjouis, mais pour le moment, ce n'est que la deuxième minorité. Je remercie M. Hiltpold pour sa présentation ainsi que M. Lefort, également pour sa présentation mais aussi pour sa proposition d'amendement. Il est vrai que cette question du partenariat public-privé telle que formulée dans cette proposition de résolution est quand même un peu particulière, parce qu'aujourd'hui, en Suisse, à Genève, Mesdames et Messieurs les députés, on ne peut pas dire que les formes de collaboration entre le secteur privé et le secteur public sont impossibles. Des projets sont régulièrement montés avec des fonds privés et des fonds publics dans de nombreuses institutions; on ne voit donc pas très bien pourquoi il faut une résolution supplémentaire pour signaler qu'il faudrait encore davantage favoriser ces partenariats. Sauf, sauf, Mesdames et Messieurs les députés, à comprendre que le but de ce texte est d'encourager l'Etat à brader ses biens, son patrimoine, à vivre à crédit en faisant payer aujourd'hui par des privés des investissements qu'il devra ensuite rembourser sur de très nombreuses années et à un coût prohibitif par la suite. C'est faire payer aux générations futures ce que nous n'avons pas les moyens de payer aujourd'hui, mais sans le faire entrer dans la dette. On peut donc se poser la question de savoir quelles sont les réelles intentions des auteurs de ce texte, bien que l'on n'ait en réalité pas de doute. D'ailleurs, une des invites demande au Conseil d'Etat de favoriser «la vente de terrains ou de bâtiments ne représentant pas, ou plus, un bien public de première importance». Or qu'avons-nous voté hier soir au Grand Conseil ?! La vente d'une cave en Vieille-Ville et la vente d'un appartement aux Eaux-Vives ! Eh ben voilà, on l'a déjà fait !
Une voix. Oh ! (Commentaires.)
M. Roger Deneys. Et je peux multiplier les exemples ! En réalité, la plupart des propositions de ce texte sont déjà réalisées... (Commentaires.) ...on ne comprend donc pas très bien pourquoi il faudrait voter une résolution supplémentaire pour encourager à faire ce qu'on a déjà fait la veille. Nous avons donc vraiment un malaise avec ce projet qui, pour nous, est clairement le résultat de la politique de la droite, de baisses d'impôts massives... (Exclamation.) ...qui ont ruiné le canton depuis 2009...
Une voix. Oh ! (Remarque.)
M. Roger Deneys. ...et qui font qu'aujourd'hui... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...on se rend bien compte, et la majorité de droite se rend bien compte qu'elle n'a plus les moyens de financer certains investissements qu'elle souhaite, comme la traversée du lac, qui est hors de prix et que vous ne pourrez pas financer s'il n'y a pas un partenaire privé qui vient faire croire aux Genevoises et Genevois que cela ne coûte rien, alors qu'en réalité ça les ruine pour rien ! Donc, Mesdames et Messieurs les députés, au minimum, il faut voter les amendements des Verts...
Une voix. C'est pas si mal !
M. Roger Deneys. ...et évidemment, si possible, dans le meilleur des cas, refuser purement et simplement cette proposition de résolution, dont les intentions annoncées ne correspondent pas à ce qu'elle semble vouloir dire de façon générale, puisqu'on peut déjà établir tous ces partenariats aujourd'hui ! Il n'y a pas besoin de cette résolution.
M. Bernhard Riedweg (UDC). Le Conseil d'Etat se procure des liquidités en vendant à des investisseurs privés des terrains et des bâtiments qu'il n'utilise pas. Ces liquidités pourraient financer les investissements prévus dans le canton, qui s'élevaient en 2015 à 690 millions. Selon le département, une liste actualisée de ces biens-fonds est remise à jour régulièrement. En facilitant les investissements privés, le Conseil d'Etat assure partiellement son autofinancement et peut consacrer une part importante du résultat net d'un exercice à l'amortissement de la dette actuelle de 500 millions par année durant dix ans pour la ramener à 8 milliards, diminuant ainsi son risque d'augmentation des taux d'intérêts. Dans le cadre de partenariats public-privé, les investisseurs privés se substituent à l'Etat en le soulageant de dépenses devenues urgentes, comme par exemple la rénovation de bâtiments tels que le Musée d'art et d'histoire, pour lequel un mécène a été disposé à collaborer d'une manière importante.
L'intérêt d'un mécène est d'acquérir de la notoriété et une certaine reconnaissance de la part de la collectivité. Ce geste de générosité diminue ses impôts sur le revenu et la fortune. Un autre exemple est le financement du Rolex Learning Center dont bénéficie l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne. Le Crédit suisse ainsi que Nestlé ne sont pas en reste sur ce campus, ainsi que 120 autres entreprises. Ce qui attire certains investisseurs privés aisés, c'est la dimension du projet, son prestige, son intérêt pour la collectivité et son rendement. Les investisseurs privés pourraient se recruter parmi les caisses de pension, les fonds d'investissement ou de placement à la recherche d'investissements importants, sans risque, offrant des rendements supérieurs aux obligations; des fondations ou des personnes privées sont aussi intéressées à participer au financement d'infrastructures publiques locales.
Les exemples ne manquent pas: la construction du parking des Clés-de-Rive, le pont Hans Wilsdorf financé par une fondation fort connue ou l'autoroute Genève-Annecy, qui a été entièrement financée par des fonds privés avec une concession et un péage pour couvrir les coûts d'exploitation à la charge de l'entreprise privée. Citons encore le projet concernant l'utilisation du site délaissé par Merck Serono consacré à la recherche et financé partiellement par deux personnalités fort connues disposant d'une fortune importante.
L'octroi du droit de superficie pour un projet privé à la caserne des Vernets, parcelle sur laquelle pourraient être construits 1500 logements pour 750 à 800 millions, est à envisager. De toute manière, pour tout projet d'infrastructure publique d'une certaine dimension, une étude comparative entre un partenariat public-privé et un appel d'offres sur le marché est à faire. Le principal obstacle des investissements privés dans le secteur public, ce sont les blocages au niveau de l'Etat, alors que les disponibilités financières et la détermination des investisseurs sont réelles.
En créant des conditions-cadres favorables pour les investisseurs privés, l'Etat devrait simplifier les procédures des plans localisés de quartier entre autres. Un assouplissement de sa part renforcerait l'attractivité de ces investissements et faciliterait certainement la réalisation d'infrastructures et de logements. Il faut tout de même reconnaître qu'un effort particulier a été fait dans ce domaine ces dernières années. C'est sur l'état d'esprit et la volonté d'entreprendre qu'il faut concentrer les efforts. Nous vous demandons d'approuver cette résolution ainsi qu'elle a été rédigée. Merci, Monsieur le président.
M. Jean Batou (EAG). Vous ne serez pas étonnés d'apprendre que je ne suis pas du tout en accord avec l'intervention précédente. Tout d'abord, j'ai l'impression que, dans l'ensemble des invites où il est question de vendre des terrains d'utilité publique moyenne ou faible, de prévoir des droits de superficie de longue durée, etc., il s'agit réellement d'un hommage à un vieux film italien pour son cinquantième anniversaire: vous vous souvenez tous de «Main basse sur la ville»; j'ai envie de dire qu'on assiste à «Main basse sur le canton».
Des voix. Roh ! (Commentaires.)
M. Jean Batou. «Main basse sur le canton» ! Alors pourquoi ce haro du privé sur le bien public ? Vous allez me répondre: «Parce que l'Etat a besoin d'argent.» (Commentaires.) Je ne répéterai pas ce qu'a dit préalablement Pierre Vanek mais, précisément, on a privé l'Etat de plus d'un milliard de recettes publiques et on s'apprête à le priver à nouveau de 500 millions de recettes publiques au nom de la RIE III. Bien sûr, cet Etat de plus en plus maigre ne peut plus financer les infrastructures indispensables à la population.
Prenons ces infrastructures indispensables à la population: bien évidemment, le logement, mais le logement répondant aux besoins sociaux prépondérants, pas le logement qu'on vend en propriété par étage, pas les villas qu'on construit pour une petite minorité de ceux qui peuvent les acquérir, et vous savez que c'est à peu près 50% des biens immobiliers mis sur le marché ces dernières années; raison de plus pour faire intervenir le public dans l'offre de prestations comme celle du logement, en soutenant l'initiative lancée par l'ensemble de la gauche, soutenue par les syndicats et les associations, qui vise justement à ce que le logement soit en adéquation avec les demandes de la population, favorise le logement social... (Remarque.) ...et garantisse l'adéquation entre l'offre et la demande réellement solvable. Alors, quand on regarde dans d'autres secteurs d'activité, croyez-vous vraiment que les investisseurs privés soient intéressés à réparer les bâtiments des écoles mal entretenus ? Evidemment pas ! Il appartient à l'Etat de maintenir en état les bâtiments des écoles et de réparer ceux qui sont mal entretenus. (Commentaires.) Bien sûr, quand il arrive à reporter ses frais sur l'université au nom de l'autonomisation de l'université, l'argent pour l'entretien des bâtiments universitaires, au nom de cette autonomie, n'est pas transmis à l'université.
Nous nous trouvons donc dans une situation où les vrais besoins en infrastructures ne sont pas pris en charge par le secteur privé. Ce qui intéresse...
Le président. Trente secondes, Monsieur le député. (Remarque.)
M. Jean Batou. ...les investisseurs privés, c'est premièrement du pseudo-mécénat... (Remarque.) ...du type de celui que les électeurs de la Ville de Genève ont heureusement balayé quand il s'est agi de faire un pont en or à M. Gandur. (Commentaires.) Deuxièmement, ce qui intéresse les investisseurs privés, c'est la construction de gigantesques infrastructures comme celles que vous, la majorité de ce parlement...
Le président. C'est terminé...
M. Jean Batou. ...caressez, et... (Commentaires.)
Le président. ...Monsieur le député.
M. Jean Batou. ...qui consistent à... Pardon ? (Commentaires.)
Le président. C'est terminé.
M. Jean Batou. Trois minutes et demie ?
Le président. Je vous ai prévenu à trente secondes, c'est terminé. Vous avez épuisé le temps. (Commentaires.)
M. Jean Batou. Bon...
Le président. Désolé.
M. Jean Batou. Bon !
Le président. Je passe la parole à Mme la députée Caroline Marti. (Un instant s'écoule. Mme Caroline Marti fait signe que son micro ne fonctionne pas. Brouhaha.) La parole est à Mme Caroline Marti.
Une voix. Ça marche pas !
Mme Christina Meissner. Son micro ne marche pas ! (Un instant s'écoule. Brouhaha.)
Une voix. Viens donc voir le PLR !
Mme Christina Meissner. Peut-être celui-ci ? (Mme Caroline Marti teste d'autres micros qui ne fonctionnent pas non plus.)
Le président. Est-ce qu'on peut lui donner un autre micro ? Non ? (Commentaires.) Ah, mais c'est parfait ! (Un instant s'écoule. Commentaires.)
Une voix. Plus fort !
Une autre voix. Il faut rénover la salle ! (Commentaires.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, à défaut de pouvoir rénover la salle dans l'immédiat, je suspends la séance jusqu'à que nous puissions redémarrer le système. (Commentaires.)
La séance est suspendue à 18h23.
La séance est reprise à 18h25.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, les choses semblent s'être remises en place. Je donne donc la parole à Mme la députée Caroline Marti.
Des voix. Ah !
Le président. C'est bon, vous avez la parole !
Mme Caroline Marti (S). Je vous remercie, Monsieur le président. Je remercie également les collaborateurs du secrétariat général du Grand Conseil pour leur travail. Mesdames et Messieurs les députés, avec cette résolution, nous sommes face au programme de démantèlement de l'Etat et du service public que le PLR souhaite imposer à notre canton. (Brouhaha.) Après avoir voté des baisses massives d'impôts en 2009 - qu'on peut chiffrer environ à 400 millions par année, ce qui n'est pas rien - et de ce fait asséché les caisses de l'Etat, le PLR récolte actuellement les fruits de sa politique de sape... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...en proposant la privatisation de pans entiers de prestations publiques. (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Madame la députée. (Un instant s'écoule.) Monsieur Vanek ! (Brouhaha.)
Une voix. Chut !
Le président. Merci. Poursuivez, Madame la députée.
Mme Caroline Marti. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, est-ce que vous pensez vraiment que les investisseurs privés veulent financer les infrastructures publiques par grandeur d'âme ou par sens aigu du service public ? Eh bien, je suis convaincue que non. Leurs motivations sont clairement financières: ils souhaitent financer ces infrastructures parce que cela leur rapporte. Là aussi, nous sommes face à une illustration parfaite du programme du PLR soutenu par l'ensemble de la droite, qui consiste à confier à l'Etat ce qui coûte et à privatiser ce qui rapporte.
Qui en fera les frais ? C'est la population et j'illustrerai cela par un exemple qui a déjà été donné par M. Batou, à savoir celui de la politique du logement. La situation actuelle, personne ne pourra dire le contraire, est très préoccupante; nous connaissons une pénurie depuis de nombreuses années et une explosion des loyers des appartements. (Brouhaha.) Pour permettre à tout un chacun de pouvoir trouver un logement qui est, je le rappelle, un droit fondamental garanti par la constitution, il faut créer des logements à loyers abordables. Cela passe par une politique sociale du logement, qui permette à l'Etat d'avoir une maîtrise foncière par l'achat de terrains et ensuite de mettre ses terrains à disposition de maîtres d'ouvrage d'utilité publique, comme par exemple des fondations communales, des fondations HBM ou des coopératives, pour produire du logement non spéculatif aux loyers accessibles dont les Genevoises et les Genevois ont besoin.
Cette résolution roule exactement dans le sens contraire et favorise la spéculation et le profit immobilier, avec la bénédiction de l'Etat - c'est ce que cherche cette résolution - au détriment des besoins de la population. Je reprendrai un autre exemple cité par le rapporteur de majorité, que je remercie de l'avoir évoqué, à savoir celui des infrastructures universitaires, notamment le cas de l'EPFL. Celui-ci illustre la pente savonneuse sur laquelle cette résolution veut nous lancer, puisque les privés commencent par financer un bâtiment, puis, comme c'est le cas justement à l'EPFL, se mettent à financer des chaires universitaires et finissent par conclure des contrats - l'histoire a été sortie il y a quelques semaines par la RTS - qui lient un institut universitaire, en l'occurrence l'EPFL, et une entreprise privée, en l'occurrence Merck Serono. Dans ce contrat, l'entreprise a le droit de demander des modifications sur les recherches menées par l'université, avant même leur publication. Cela est absolument inacceptable. Nous devons mettre un terme direct à cette politique. C'est pour cette raison que le parti socialiste dit non au démantèlement de l'Etat et du service public pour le bien de l'ensemble de la population et nous refuserons cette résolution. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG). Bon, il s'agit d'une résolution, donc d'une direction que notre parlement veut donner à la conduite de l'Etat. C'est quelque chose qui n'est pas sans conséquence, mais ce n'est pas quelque chose qui a des conséquences très précises. Cela donne une impulsion, qui en l'occurrence consiste à demander que l'Etat fasse un peu d'ordre dans ses affaires, c'est-à-dire qu'il élimine peut-être certains de ses biens, qu'il aille peut-être dans certaines directions de construction pour que l'on construise avec l'argent privé, pour que l'on introduise des investisseurs privés dans des projets qui peuvent être des projets publics. Il y a tout un champ que ne décrit pas la résolution, mais qui est très important et précieux, parce que nous avons déjà un volant d'investissement pour l'Etat qui est considérable, en raison du CEVA et de nombreux projets qui ont été lancés, notamment pour les TPG et pour les HUG. Il est donc vrai que l'Etat doit déjà bien faire son travail avec ces grands chantiers et il ne pourra bien le faire que s'il ne se disperse pas dans une multitude de projets qu'il fera, qu'il ne fera pas, qu'il laissera attendre ou qu'il fera mal. C'est pour cette raison qu'il est important de donner un signal, parce que c'est ce en quoi consiste cette résolution. Il s'agit d'enjoindre l'Etat de faire aussi confiance au privé, de travailler avec celui-ci et d'essayer de trouver des synergies. On en a besoin, on sait où en sont les finances de l'Etat.
Vous savez, Monsieur le magistrat - enfin, je ne sais pas si je peux m'adresser directement à vous, si j'en ai l'autorisation du président - que je suis toujours très réticent à l'augmentation considérable du budget d'investissement de l'Etat, parce que je pense qu'on doit vraiment calculer au plus juste s'agissant du budget de l'Etat; je vous embête assez en commission ou ailleurs sur ce sujet-là. Il est important de demander des intérêts privés en renfort. Il est aussi important d'avoir la bonne méthode. Cela ne figure pas dans la résolution, mais on a connu un certain nombre de mauvaises expériences, notamment avec le Saint-Georges Center, qui est le mauvais exemple, l'exemple de ce qu'il ne faut pas faire, c'est-à-dire de n'avoir pas racheté le bâtiment à l'époque, alors qu'on pouvait l'avoir pour un prix très intéressant, à savoir la somme ridicule de 500 000 F. L'Etat n'a pas racheté ce bâtiment et maintenant on a un loyer gigantesque parce qu'on a été obligés de venir comme locataires dans ce Saint-Georges Center. C'est l'exemple à ne pas suivre ! Mais ce n'est pas parce qu'il y a un mauvais exemple qu'il ne faut pas aller dans cette direction. Je pense que l'Etat peut et doit être performant et c'est peut-être aussi ce qu'il faut signifier. Même si ce n'est pas indiqué dans le cadre de cette résolution, je pense que le message doit passer. Je suis sûr, Monsieur Dal Busco, que vous serez sensible à ce message. Je pense qu'il y a un problème essentiel à ce niveau-là. Demander au privé d'être associé directement à certaines tâches d'intérêt public ou privé et au développement de l'économie, construire des logements et pas uniquement des logements sociaux ou des LUP, mais aussi des logements pour la classe moyenne, est quelque chose d'important. Il est également important d'avoir des zones d'activité ou autre chose; après, on parle en termes de généralités, on ne va pas parler de projets précis, parce que ce n'est pas le but de cette résolution.
Présidence de Mme Christina Meissner, première vice-présidente
La présidente. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. François Baertschi. Mais je crois qu'il est vraiment essentiel de faire confiance au privé, essentiel d'être très professionnel au niveau de l'autorité publique et le MCG croit à une économie forte pour un secteur social efficace, et c'est le message que le groupe MCG veut passer. Nous vous demandons, je pense que vous serez d'accord avec nous, d'aller dans cette direction. Nous acceptons donc cette résolution et vous demandons d'en faire de même.
M. Edouard Cuendet (PLR). Merci, Madame la présidente. Je dois dire que les déclarations de la gauche la plus extrême représentée par le rapporteur de minorité d'Ensemble à Gauche et le parti socialiste font assez froid dans le dos, puisque au fond elles présentent une idée d'un Etat infaillible, qui doit tout diriger, tout mener, tout contrôler et où il ne faut rien laisser aux privés, qui sont par nature pourris et avides. C'est assez terrifiant, parce que c'est une course vers l'endettement sans limites; ce sont des attaques contre les privés, contre les mécènes, contre tout partenariat. Je rappellerai que, dans le passé, les plus grandes institutions du canton ont pu naître grâce à des dons du privé, que l'on pense au Conservatoire de musique, au Grand Théâtre, ou à plusieurs musées. La gauche vomit sur le musée Patek Philippe, qui est un des fleurons de notre vie culturelle à Genève, qui doit son existence à des privés. Cette extrême gauche-là va plus loin, puisque dans ses magnifiques propositions du 14 avril, son catalogue à la Prévert de mesures fiscales confiscatoires pour le privé, elle prévoit de supprimer la déductibilité des dons des mécènes; ainsi, au moins, nous sommes sûrs que ce sera une spoliation complète par l'Etat, dont les services pléthoriques pourront décider de l'usage qu'il faut en faire.
Eh bien, au PLR, nous ne partageons évidemment pas cette vision; heureusement, la majorité de la commission non plus, il faut s'en féliciter. Ce qui m'étonne, c'est que dans leurs grandes théories, les gens de gauche ne se sont pas du tout préoccupés - peut-être un peu Mme Marti, mais en y voyant le diable - des exemples donnés dans le cadre des auditions. Ces auditions font plutôt rêver, à l'inverse de la vision «tout à l'Etat» que nous présente l'extrême gauche, qui va de l'extrême gauche physique à l'extrême gauche PS. Les projets qui nous été proposés font plutôt envie: l'EPFL à Lausanne, un exemple reconnu mondialement pour son dynamisme, pour cette collaboration avec les entreprises et dont la liberté académique... Alors on nous a donné un exemple, qui est d'ailleurs contesté ! Ce Learning Center est un joyau ! On aurait aimé qu'il soit fait à Genève, mais celle-ci était tellement obtuse sur la question que les fonds sont pour finir allés à Lausanne et on peut donner des dizaines d'exemples dans le même esprit. A Zurich, un des auditionnés a montré l'exemple du développement extraordinaire de la région de la gare de Zurich, où tout «boome» et où il y a une activité extraordinaire. C'est le fruit d'un partenariat entre l'Etat, les CFF, la Poste et des privés, cela fonctionne extrêmement bien et on y construit, alors qu'à Genève, la seule chose que propose Mme Marti - vous transmettrez, Madame la présidente - c'est de morceler le golf de Cologny, un projet extrêmement ambitieux et porteur d'avenir !
On voit donc que, d'un côté, on a le dogme et, de l'autre, on a des projets porteurs. Là où je rejoins quand même M. Lefort - bien que nous allons rejeter toutes ses demandes d'amendements - qui est moins obtus que ses collègues d'extrême gauche, et je le salue, c'est sur la question de la grande diversité des PPP. (Commentaires.) Il n'y a pas un PPP: il y a une multitude de PPP, notamment dans le financement. Il n'a cité que les banques, mais il a oublié de citer que cela peut se faire via des fonds d'infrastructure, qui sont des domaines en pleine expansion, pour financer des gros projets à travers des syndicats d'investisseurs institutionnels pour réunir des sommes suffisantes pour mener des projets. Cela peut être des caisses de pension, qui peuvent investir dans ces gros projets d'infrastructure. Il y a donc une multitude de PPP; ce ne sont pas que d'avides promoteurs, comme on les imagine toujours dans le fantasme de la gauche. Ce sont vraiment des consortiums extrêmement créatifs et je pense que...
La présidente. Il vous reste trente secondes.
M. Edouard Cuendet. ...cela fait plus rêver que votre vision totalement technocratique et étatique. C'est pour cela que je vous invite à adopter cette résolution telle qu'elle est sortie des travaux de la commission, sans retenir les amendements de M. Lefort, dont je salue malgré tout l'ouverture.
M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien va accepter cette résolution, parce qu'elle contient un terme qui fait partie de notre ADN, à savoir la «subsidiarité». L'Etat ne peut pas tout faire, et si vous regardez l'histoire, vous remarquez qu'avant, l'Etat ne faisait quasiment rien et que les privés faisaient quasiment tout. Pour ce qui est des hôpitaux et de l'aide aux plus pauvres... (Commentaires.) ...c'étaient les congrégations religieuses ou les privés qui donnaient leur argent et qui prenaient cela en charge. Ensuite, l'Etat a pris de l'importance; c'était peut-être normal et essentiel, mais actuellement l'Etat ne peut plus s'occuper de tout et, quand des grands investissements sont nécessaires - et ils le seront, parce que l'Etat va continuer à investir, il ne peut pas s'arrêter d'investir - il doit faire des choix et demander des aides. A ce moment-là, il ne faut pas mettre en opposition le public et le privé. On retrouve toujours ces clichés, où on oppose le public et le privé, mais le privé n'est pas quelque chose de moche, d'affreux, de scandaleux, qui fait du mal à tout le monde. Le privé peut être à l'origine de projets positifs, et je vous rappelle que, dans le privé, on peut aussi mettre les caisses de retraite du personnel. Les caisses de retraite du personnel ont le droit d'avoir des rendements. Actuellement, celles-ci connaissent de gros problèmes de capitalisation; pourquoi ces caisses de retraite, si leur rendement est assuré sur plusieurs années, ne pourraient-elles pas investir leur argent dans le PAV ou dans la traversée du lac ? Adopter une vision complètement obtuse et fermée sur les investissements empêchera peut-être l'Etat de pouvoir proposer aux citoyens genevois des réalisations qui leur seront utiles, que ce soient des bâtiments ou autre - par exemple le PAV, qui doit vraiment être réalisé, mais qui ne le sera pas sans l'aide des privés. Tous les projets de construction en cours à Genève ne peuvent pas se faire sans les privés. Vous demandez que l'Etat fasse strictement tout, mais l'Etat ne peut pas tout faire ! Il faudra prévoir des cautèles, qu'on en discute, qu'on étudie les propositions, mais, s'il vous plaît, ouvrez un peu votre esprit et acceptez ce genre de financement. Je vous remercie.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Philippe Morel pour deux minutes.
M. Philippe Morel (HP). Merci, Madame la présidente. Il m'est difficile de laisser passer les assomptions qui ont été faites concernant l'EPFL, lorsqu'on sait que cette école figure au classement international des cent meilleures universités du monde et que, si ce développement, notamment de nombreux programmes de recherche entre autres en médecine humaine, a été rendu possible grâce à de l'argent public - c'est évident - il l'a aussi été grâce à une contribution majeure du privé. Il faut savoir que, ces dernières années, les investisseurs privés ont investi en Suisse plus de 12 milliards dans la recherche et le développement et que ces 12 milliards représentent plus de 50 000 postes de travail, dont environ un tiers sont occupés par des femmes. Cet argent privé est venu en complément de l'argent public et je dois dire que dans bien des domaines et notamment celui qui me concerne - la médecine - il est impensable de pouvoir développer ce que l'on fait en Suisse sans une contribution majeure des investisseurs privés, qui sont extrêmement importants, utiles et auxquels nous devons être reconnaissants.
Une voix. Bravo ! (Commentaires. Quelques applaudissements.)
M. François Lefort (Ve), rapporteur de première minorité. Vous transmettrez à M. Cuendet, Madame la présidente de séance, que je le remercie de saluer mon ouverture ! Mais, Monsieur Cuendet, plutôt que de me saluer, votez ces amendements ! Ils sont raisonnables et concis en plus. La grande variété des investisseurs privés que vous mentionnez est conservée dans la première invite ! Ensuite, les invites que les troisième, quatrième et cinquième amendements proposent d'introduire concernent les modalités des PPP; ce sont des critères majeurs de ces partenariats public-privé qui sont maintenant pratiqués en Europe et qui ont été introduits pour éviter les échecs, et il y en a eu, des échecs en trente ans, ce qui nous a rendus très méfiants ! Et vous devriez être méfiants; vous ne devriez pas être aussi confiant dans le PPP, Monsieur Cuendet... (Commentaires.) ...vous transmettrez, Madame la présidente, surtout quand on parle des très très gros PPP possibles. Enfin, les deux derniers amendements sont locaux évidemment: le sixième, à savoir l'interdiction des dons aux partis politiques genevois est un amendement très local, mais le but est d'éviter toute tentation de corruption a posteriori, Monsieur Cuendet. Et le dernier, évidemment, c'est une façon de fonctionner. Il serait quand même étonnant que les projets de partenariat public-privé ne passent pas par le Grand Conseil ! C'est pour cette raison que nous vous demandons, par cet amendement, que le Conseil d'Etat présente des projets de lois qui explicitent les PPP devant le Grand Conseil. Donc, encore une fois, je vous remercie de voter l'ensemble de ces amendements.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais insister sur la pertinence des amendements des Verts, parce que, comme je l'ai déjà souligné tout à l'heure, nous ne vivons pas dans un monde où le partenariat public-privé est impossible et, contrairement à ce que M. Cuendet a affirmé, il n'y a aucun dogmatisme, puisque nous avons vu hier qu'on peut vendre des biens dans certaines circonstances. Cela passe par des projets de lois soumis à notre Grand Conseil, et il est vrai qu'on se pose donc la question de savoir pourquoi, pour d'autres projets, il faudrait tout à coup renvoyer une résolution pour renforcer quelque chose qui existe déjà. Je vais vous donner un autre exemple de projet qui ne fonctionne pas aujourd'hui, à savoir le projet de M. Barthassat...
La présidente. Il vous reste trente secondes.
M. Roger Deneys. ...de vélos en libre service. Le PPP établi avec une entreprise privée qui ne coûte rien pour l'instant ne marche pas mieux que le projet précédent de Mme Künzler... (Remarque.) ...sabordé par le PLR à l'époque. Donc, Mesdames et Messieurs les députés, la pertinence de l'amendement concernant les dons aux partis politiques est tout à fait nécessaire. On ne peut pas exclure qu'à Genève certains veulent profiter de ce système pour détourner de l'argent public. Nous devons...
La présidente. Merci, Monsieur Roger Deneys.
M. Roger Deneys. ...lutter contre cela ! (Remarque.) La Cour des comptes française relève que certains partenariats public-privé...
La présidente. C'est terminé, Monsieur Roger Deneys.
M. Roger Deneys. ...ont coûté plus du double aux collectivités publiques que l'investissement direct. (Commentaires.)
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Serge Hiltpold pour quarante-cinq secondes.
M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Je vais revenir brièvement sur les amendements. Premièrement, s'agissant de la nécessité de voter la vente même de petits objets, on a vu que le PS a refusé hier la vente d'une cave. Deuxièmement, j'aimerais attirer votre attention sur la deuxième puce de la première invite que l'amendement prévoit de supprimer, à savoir, «l'octroi de droits de superficie distincts et permanents de longue durée pour permettre la réalisation de bâtiments, notamment dans le PAV». Le PAV, c'est le prochain quartier du développement de Genève. Donc, de grâce, ne sortons pas cette puce de cette invite ! C'est là où va se jouer l'emploi, les postes de travail, le développement et n'ayons pas peur du terme...
La présidente. Il vous reste dix secondes.
M. Serge Hiltpold. ...il faut du développement ! Je vous invite donc à refuser les amendements, notamment en ce qui concerne les dons aux partis politiques genevois. N'ayons pas de défiance envers le privé en croyant qu'il...
La présidente. Merci.
M. Serge Hiltpold. ...est pourri alors que les AIMP sont exactement...
La présidente. C'est terminé.
M. Serge Hiltpold. ...dans la même situation.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, le Conseil d'Etat adopte une approche pragmatique et réaliste. Cette approche pragmatique et réaliste nous commande de dire que l'Etat n'a pas réponse à tout. L'Etat ne peut pas tout faire, c'est évident. Ses ressources ne sont pas infinies ! C'est une évidence qu'il faut rappeler ! Or il y a des besoins, assurément beaucoup de besoins, dans le domaine du logement et des infrastructures par exemple, cela a été dit. Il y a des éléments que nous pratiquons déjà aujourd'hui, on l'a constaté hier soir, avec des objets presque insignifiants et on voit quelle difficulté nous avons, s'agissant de certains groupes politiques, à faire passer l'idée que l'Etat puisse se dessaisir d'objets dont il n'a pas besoin, qui ne sont pas nécessaires pour l'accomplissement de ses politiques publiques.
L'Etat ne peut pas tout faire, Mesdames et Messieurs. Nous devons imaginer de futurs mécanismes pour répondre aux besoins en infrastructures, en équipement et en logement en particulier. Si on pense notamment à certains de nos établissements autonomes, il y a des transferts d'actifs que nous avons proposés, comme vous le savez, à travers la mesure 53 du plan de mesures de Conseil d'Etat, et que nous essayons de matérialiser; nous l'avons fait avec les Ports Francs par exemple et nous l'avons fait partiellement avec l'université. Si on arrivait à transférer ces actifs, cela permettrait tout simplement aussi à ces entités-là de procéder et d'agir dans le sens d'un appel à des investisseurs privés, ce qui serait tout à fait bénéfique pour leur fonctionnement et pour leur budget.
Mesdames et Messieurs, rassurez-vous: que vous votiez ou non cette résolution - mais si vous la votez, sachez qu'elle sera accueillie avec bienveillance, parce qu'elle va exactement dans le sens de ce qui est pratiqué par le Conseil d'Etat - le Conseil d'Etat n'a aucunement l'intention de démanteler, de brader l'Etat et ses biens ! Absolument pas ! Pour nous, ce qu'il convient de faire, c'est de répondre aux besoins de la population, aux besoins futurs qui seront importants, et d'y répondre de la meilleure des manières, selon le principe de subsidiarité, évoqué par M. Buchs en particulier. (Brouhaha.)
Je voudrais ajouter que, pour ce qui est de ces futurs mécanismes de partenariat public-privé et de tel ou tel mécanisme qui serait proposé pour répondre à de gros besoins d'investissement - on peut penser à certains qui seront soumis à votation populaire très prochainement - bien évidemment, le Conseil d'Etat sera extrêmement vigilant et votre serviteur aussi; il ne se lancera pas dans des entreprises insensées d'un point de vue financier et prévoira toutes les cautèles nécessaires. Cela nécessitera d'ailleurs dans tous les cas, pour une raison ou pour une autre, une approbation de votre parlement. S'il doit y avoir un appel à ces mécanismes-là, c'est qu'il y a globalement un intérêt pour la collectivité et en aucun cas un blanc-seing, ou en tout cas la prise d'une direction qui serait préjudiciable, en particulier pour les finances de l'Etat.
N'ayez donc aucune crainte sur le bien-fondé de notre approche. Elle est pragmatique, sûre, et empreinte de la circonspection qui sied dans l'exploration de pistes originales. Ce que je peux dire, c'est que cette résolution va tout à fait dans le sens de ce que le Conseil d'Etat pratique et, pour une fois que le parlement s'apprête à partager l'avis du Conseil d'Etat, je ne peux que vous inviter à voter cette résolution.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais tout d'abord voter sur les sept amendements déposés par M. Lefort. Le premier amendement consiste à supprimer les trois premières puces de la première invite, qui demande au Conseil d'Etat de «favoriser les investissements privés, qui peuvent se matérialiser sous de nombreuses formes:». Seules les quatrième et cinquième puces seraient donc maintenues. Les trois puces que l'amendement entend supprimer sont les suivantes:
«- la vente de terrains ou de bâtiments ne représentant pas, ou plus, un bien public de première importance;
- l'octroi de droits de superficie distincts et permanents de longue durée pour permettre la réalisation de bâtiments, notamment dans le PAV ou les grands projets immobiliers;
- la mise en location ou la vente de surfaces administratives non indispensables au fonctionnement de l'Etat;»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 29 oui et 5 abstentions.
La présidente. Nous passons au vote du deuxième amendement. Celui-ci consiste en la suppression de la seconde invite, dont la teneur est la suivante: «à informer la Commission des finances, puis le Grand Conseil, tous les six mois, des mesures prises à court, moyen et long terme pour favoriser ces investissements privés.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 28 oui et 6 abstentions.
La présidente. Le troisième amendement de M. Lefort consiste à ajouter l'invite suivante: «à évaluer préalablement les projets de PPP en particulier par des audits des partenaires réalisés en collaboration avec les banques impliquées;»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 26 oui et 8 abstentions.
La présidente. Nous sommes ensuite saisis d'un quatrième amendement qui propose également d'ajouter une nouvelle invite, à savoir: «à réserver le recours au PPP pour des besoins publics urgents ou techniquement complexes;»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 26 oui et 8 abstentions.
La présidente. Je passe maintenant au cinquième amendement, qui propose d'ajouter l'invite suivante: «à effectuer pour tout PPP une étude comparative entre un PPP et un appel d'offres sur le marché public;»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 26 oui et 8 abstentions.
La présidente. Il s'agit maintenant de se prononcer sur le sixième amendement de M. Lefort, à qui je donne la parole pour une minute vingt-six.
M. François Lefort (Ve), rapporteur de première minorité. Merci, Madame la présidente de séance. J'aimerais demander le vote nominal pour ce sixième amendement uniquement.
La présidente. Très bien, Monsieur le député. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous l'êtes. Le vote sur cet amendement se fera donc à l'appel nominal. Je précise que cet amendement consiste à ajouter l'invite suivante: «à interdire les dons des lauréats des PPP aux partis politiques genevois;»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 34 oui (vote nominal).
La présidente. Je vous fais voter sur le septième et dernier amendement, qui propose d'ajouter l'invite suivante: «à présenter les projets de PPP au Grand Conseil sous forme de projet de loi.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 34 oui.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je soumets maintenant à vos voix la proposition de résolution 691, telle qu'issue des travaux de la commission.
Mise aux voix, la résolution 691 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 61 oui contre 34 non.
Débat
La présidente. Nous poursuivons avec la proposition de résolution 766, dont le débat est classé en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à son auteur, M. Gabriel Barrillier.
M. Gabriel Barrillier (PLR). Merci, Madame la présidente de séance. Cet objet a un lien avec le point que nous venons d'examiner puisqu'il a été dit très justement, notamment par notre collègue Buchs, que l'Etat ne peut pas tout faire, il a besoin de forces d'appoint comme les innombrables bénévoles qui s'engagent dans différents domaines et activités. Cette résolution, chers collègues, est née lors de mon année de présidence: j'ai eu l'occasion et le plaisir de participer et d'assister à des assemblées générales, à des démonstrations de samaritains et j'ai pu constater, en écoutant ces personnes, que le recrutement et l'engagement de bénévoles deviennent de plus en plus difficiles dans notre société. Pourtant, l'article 211 de notre constitution reconnaît le bénévolat et souligne la nécessité de le soutenir. Certes, les bénévoles ne travaillent pas pour l'argent, on l'aura bien compris, mais il arrive dans certains cas que des responsables touchent de petites sommes, des indemnités qui, s'additionnant, peuvent provoquer le passage à un taux supérieur d'imposition au moment de la déclaration fiscale, ce qui, vous en conviendrez, n'est pas le meilleur système pour encourager les bénévoles à s'annoncer.
La résolution est claire: pour éviter cette situation, elle propose à l'Assemblée fédérale d'une part de modifier la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct afin de permettre une exonération des indemnités de bénévolat jusqu'à concurrence de 5000 F, comme c'est le cas pour les pompiers, d'autre part une révision de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes - la LHID - qui devrait permettre aux cantons de fixer librement un montant d'exonération pour les activités bénévoles. Depuis lors - il y a deux ans que cette résolution a été déposée - et après réflexion, nous nous sommes dit, c'est-à-dire ceux qui sont à l'origine de cette résolution, qu'avant de la renvoyer à l'Assemblée fédérale, il vaudrait la peine de bien en examiner l'argumentation, de vérifier - nous n'avions pas pu le faire il y a deux ans - l'état actuel du bénévolat dans notre canton ainsi que d'effectuer une comparaison avec d'autres cantons suisses, de façon que...
La présidente. Vous êtes sur le temps de votre groupe.
M. Gabriel Barrillier. Oui, merci. ...de façon que cette résolution soit solide. C'est la raison pour laquelle je vous propose de renvoyer cette résolution à la commission fiscale pour vérification. Je vous remercie.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes bien entendu d'accord en ce qui concerne le bénévolat - je parlerai plutôt de volontariat parce que le bénévolat, par définition, n'est pas rémunéré - et la nécessité de le stimuler, de le soutenir, que ce soit dans des secteurs aussi variés que le sport ou le social. En revanche, un problème se pose en termes fiscaux. Ce n'est pas un sujet nouveau, vous faites même référence dans le texte à son évocation au Conseil des Etats: sauf erreur, il s'agissait de la motion Moret, qui avait été largement refusée par 10 non et 2 abstentions.
Si on se cantonne au domaine fiscal uniquement, alors on parle ici de mesures d'allègement qui répondent quand même à des lois fédérales comme la LHID. A l'époque, il avait été décidé que tous les indicateurs s'agissant du soutien au bénévolat n'étaient pas pertinents et ne répondaient notamment pas au problème soit économique soit social ou sociétal substantiel, ce qui signifie que la mesure qu'on demande, soit une diminution sur la fiscalité, ne permettait pas d'éliminer une partie substantielle du problème et n'était pas plus favorable que d'autres mesures qu'on aurait pu prendre pour soutenir le volontariat. Ce refus de la motion fédérale partait de l'idée que toutes les conditions n'étaient pas réunies pour pouvoir l'accepter, que ça posait de vrais problèmes en termes de progressivité du barème - la diminution aurait été plus effective pour les hauts revenus - et que ça ne résolvait pas...
La présidente. Il vous reste trente secondes.
Mme Lydia Schneider Hausser. ...le problème de la simulation des revenus inférieurs au barème. Voilà, ce texte avait été refusé en raison de toutes ces conditions fiscales. De fait, je vous rejoins - nous, au PS, vous rejoignons: il est indispensable de passer par la commission fiscale afin de ne pas juste refaire un bis repetita de la motion fédérale et peut-être trouver encore des éléments autres que fiscaux. Il faut soutenir l'implication conséquente des gens dans le volontariat.
Présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe des Verts soutiendra le renvoi de cette résolution en commission. En effet, il nous semble qu'il y a passablement de choses à étudier et vérifier avant de la voter. Je voudrais simplement rendre son auteur attentif à ceci: vous courez à nouveau le risque de perdre des contribuables et d'augmenter encore la masse des citoyens qui ne paient pas d'impôts à Genève ! Merci.
Mme Geneviève Arnold (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, cette résolution traite d'un sujet cher aux collectivités publiques et aux personnes qui en bénéficient: le bénévolat. Cette tâche noble consistant à accomplir une activité sans être rémunéré, sans y être obligé, à titre gracieux, est précieuse au sein de nombreuses associations, et je tiens à relever que ce type d'investissement personnel permet justement à de nombreuses personnes et structures de continuer à exister en bénéficiant d'un savoir-faire, de compétences ou tout simplement de temps offert. Le bénévolat permet aux gens d'accéder à des prestations, des loisirs, des apprentissages, des activités multiples, qu'elles soient culturelles, sportives, en faveur d'aînés, à des prix souvent très modiques voire gratuites. Source de satisfaction intense pour les personnes qui le pratiquent, il favorise des moments de rencontre si importants en ces périodes où l'isolement social est très présent et apporte un réel salaire moral. Faut-il rappeler que le salaire du bénévole, c'est le sourire, c'est le bien-être ressenti par celui qui en bénéficie, c'est la satisfaction personnelle suite à un certain don de soi ? Sans bénévoles, les collectivités publiques devraient assurer des tâches qui seraient bien plus coûteuses en engageant du personnel qualifié avec des actions moins personnalisées et certainement moins diversifiées. La richesse du milieu associatif n'est plus à démontrer.
Mais, il est vrai, l'activité volontaire est parfois rémunérée de façon modeste. Ainsi, dans le cas où une rémunération devait venir en appui aux bénévoles, qu'elle soit financière ou en nature - pensons aux samaritains, toujours présents dans les manifestations ou aux entités sportives qui engagent des entraîneurs - il nous apparaît totalement injustifié que celle-ci soit soumise à la fiscalité alors que l'apport personnel, lui, ne se décompte pas. De plus, l'imposition fiscale serait un frein réel pour toute nouvelle personne disponible souhaitant apporter son appui et intégrer une association communale sujette à indemnités personnelles. Le renouvellement des actifs deviendra bien difficile, donc ne décourageons pas ces troupes et ne cassons pas cette belle branche qui sait si bien répondre aux besoins de notre population par générosité et altruisme. Aussi le PDC, convaincu du bien-fondé de cette proposition de résolution, préconise-t-il son renvoi en commission afin de poursuivre son étude.
M. Stéphane Florey (UDC). Sur le fond, nous sommes entièrement d'accord avec cette résolution, et je salue d'ailleurs l'initiative de notre collègue Gabriel Barrillier. Simplement, nous avions un doute - et nous l'avons toujours - s'agissant de la forme. Il me semble qu'il y a une distinction à opérer - et on sent bien, d'après certaines interventions, que ce n'est pas clair pour tout le monde - entre bénévolat et volontariat. En effet, en principe, le bénévole ne touche rien alors que le volontaire, lui, peut percevoir une indemnité. Il est donc intéressant de renvoyer cette résolution en commission déjà rien que pour éclaircir ce point puis pour déterminer s'il n'y a pas quelque chose à modifier ou à moduler dans l'invite. Sur le fond, nous aurions été prêts à la renvoyer directement au Conseil d'Etat puisque nous sommes entièrement d'accord; mais il est vrai qu'il y a peut-être quelque chose à changer sur la forme, et c'est pour cela que nous soutiendrons bien évidemment le renvoi de cette résolution à la commission fiscale. Je vous remercie.
M. Pierre Vanek (EAG). Bien sûr, nous ne nous opposerons pas au renvoi de cette résolution à la commission fiscale afin de discuter plus abondamment et sérieusement de cette question. Cela dit, a priori, le bénévolat est une activité non rétribuée et cette non-rétribution n'est pas soumise à impôts - je m'en félicite, je soutiens cette idée. Mais si on commence à considérer qu'on rémunère des activités, elles cessent, par définition simple, de relever du bénévolat, et donc la référence à l'article constitutionnel qui stipule qu'il faut encourager le bénévolat me semble discutable... Mais nous en parlerons à la commission fiscale.
D'autre part, on a pu entendre deux ou trois choses inquiétantes, notamment de la part de Mme Arnold, je crois, qui disait que les bénévoles étaient éminemment utiles dans un certain nombre de domaines parce que, sans eux, on serait obligé d'engager du personnel qualifié dans le secteur public pour accomplir des tâches. Eh bien il y a pour nous un réel problème quand on commence à vouloir, à l'aide de bénévoles - et de bénévoles qui cessent de l'être puisqu'ils commencent à être rétribués avec une défiscalisation de cette rétribution, ce qui est d'ailleurs demandé ici - remplacer du personnel qualifié dans le secteur public. Il y a toute une série de problèmes avec cette résolution, laquelle n'emporte pas notre enthousiasme mais n'appelle pas non plus notre opposition quant à son renvoi en commission.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Je suis, moi aussi, extrêmement favorable à l'idée de renvoyer cette résolution à la commission sociale...
Une voix. Fiscale !
Mme Marie-Thérèse Engelberts. Fiscale, pardon ! Par contre, je voudrais bien, puisqu'on est en train de définir le rôle et éventuellement le statut des volontaires et des bénévoles, que l'on puisse introduire une réflexion sur la place des proches aidants qui, à un très haut pourcentage de temps, remplacent du personnel qualifié auprès de personnes atteintes dans leur santé, principalement sur le plan cognitif. Serait-il possible de mener également cette réflexion ? Je crois savoir qu'une motion sur les proches aidants a été déposée; à ce moment-là, on pourrait revoir aussi la question de leur rémunération telle qu'évoquée pour les bénévoles. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je prends brièvement la parole... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...ne serait-ce que pour dire la reconnaissance du Conseil d'Etat à l'endroit de toutes celles et tous ceux qui s'engagent quotidiennement sans compter leur temps au bénéfice de leur prochain dans des activités bénévoles, au sein d'un tissu associatif qui est d'une richesse extraordinaire dans notre canton. Le Conseil d'Etat leur exprime ici toute sa gratitude.
Cette proposition mérite une analyse soutenue, et j'ai d'ailleurs demandé à mes services, c'est-à-dire à l'administration fiscale, d'examiner les choses de près parce que cela crée tout de même un certain nombre de problématiques. Vous savez, quand on parle de fiscalité, on pense aussi à l'égalité de traitement, par exemple au fait que des bénévoles qui seraient indemnisés et d'autres qui ne le seraient pas risqueraient de ne pas être traités fiscalement de la même manière, ce qui pose un petit problème. Des réflexions ont été menées au sein de l'administration fiscale cantonale, que nous partagerons volontiers... (Brouhaha.)
Le président. Excusez-moi, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ça ne va pas ! Je vous demande de respecter les interventions des membres du Conseil d'Etat et de faire silence, s'il vous plaît. Poursuivez, Monsieur.
M. Serge Dal Busco. ...en commission, ce d'autant plus que cette résolution, telle qu'elle est conçue, s'adresse au Parlement fédéral. Or, comme vous le savez, le canton de Genève est de loin - de très loin ! - celui qui a adressé le plus grand nombre de résolutions auprès des Chambres, ce avec un succès tout à fait relatif, et, s'il s'agit de renvoyer un texte aux Chambres fédérales, il faudrait donc qu'il soit conçu et rédigé de manière absolument impeccable, faute de quoi le sort qui lui sera réservé risque de nous décevoir. Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat est tout à fait d'accord avec ce renvoi en commission. Merci.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi de cet objet à la commission fiscale, que je mets aux voix.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 766 à la commission fiscale est adopté par 90 oui contre 1 non et 4 abstentions.
Débat
Le président. Pour le point suivant de notre ordre du jour, nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole au rapporteur, M. Cyril Aellen.
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Il s'agit d'un rapport portant sur le plan financier quadriennal, un élément important du fonctionnement de nos institutions et en particulier de notre Grand Conseil, dont on a finalement assez peu parlé. Ce PFQ... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...se fonde sur des chiffres datant de mars 2014; il a été déposé par le Conseil d'Etat en novembre 2014, traité au printemps 2015 par la commission des finances, et n'est abordé qu'au printemps 2016 par ce Grand Conseil. Il a été refusé à une très large majorité, parce que les différents commissaires n'ont pas été convaincus par la ligne demandée par le Conseil d'Etat. A mon sens, ce texte et cette discussion ont été négligés par le Conseil d'Etat, mais par la commission des finances également, ce qui nous a probablement en partie conduits aux difficultés de l'automne dernier. Nos institutions ont besoin de pouvoir fixer une ligne directrice sur quatre ans pour savoir la politique que l'on veut mener, ce sur quoi on est d'accord et ce sur quoi on l'est moins. Personnellement, qu'on n'ait pas pu se mettre d'accord et discuter plus avant de ce PFQ m'inquiète beaucoup.
Encore une remarque, et une question au Conseil d'Etat: il s'agit d'un document qui doit nous être présenté chaque année en même temps que le budget. Je suis inquiet que nous l'ayons traité de façon peut-être peu sérieuse à la commission des finances, mais je suis encore plus inquiet de voir qu'à l'automne dernier, ce document ne nous a pas été communiqué. Pourquoi ?
M. Jean Batou (EAG). Trois questions me paraissent importantes dans ce texte, même si c'est le genre de rapport qu'on ne lit pas, parce qu'il date un peu. Tout d'abord, la nécessité de prévoir l'entrée en vigueur de la RIE III en 2019 était déjà dans les esprits au moment où il a été écrit. Un député PLR disait: «Si le Conseil d'Etat veut garder l'objectif de pouvoir absorber RIE III, il va devoir faire un travail plus important au niveau de la maîtrise des charges.» On était au printemps 2015. A quoi Serge Dal Busco a répondu: «Il est clair que l'objectif, au moment où RIE III sera en vigueur», en 2019, «sera d'avoir la marge de manoeuvre suffisante pour absorber cette réforme.» Un député PLR lui a répondu: «Le PLR attend un signe plus marqué de la part du Conseil d'Etat au niveau de l'évolution» des charges «sur 2016-2018.» Et quelques mois plus tard, le Conseil d'Etat annonçait un plan d'austérité que vous connaissez bien, celui annoncé par le projet de budget 2016-2018, avec l'horaire à 42 heures, 5% de baisse des charges salariales et tout ce qui s'ensuit. On a l'impression qu'au moment où on a préparé ce projet quadriennal financier - et on n'était pas encore alerté par les difficultés financières qui semble-t-il sont arrivées au mois d'août - on avait déjà en tête la mise en place de ce projet. Je trouve intéressant de le souligner.
Ce plan quadriennal contient un autre élément intéressant: la prise en compte des risques liés à une société genevoise toujours plus inégalitaire. Je trouve qu'il y a là un aveu édifiant du département des finances, qui nous dit: «Lorsque l'on regarde la pyramide des revenus, on constate que l'un des plus gros risques de Genève est d'avoir des revenus concentrés sur peu de contribuables», sur un petit nombre de personnes et de sociétés, «tant au niveau des personnes physiques que des personnes morales.» Lorsqu'on n'a pas la chance d'appartenir à ce petit nombre d'ultra-privilégiés dorlotés par le département des finances...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Jean Batou. ...on ne peut que constater que le nombre de contribuables qui ont des revenus très bas n'a cessé d'augmenter de 2006 à 2012, tout comme le nombre de contribuables qui ont des revenus très élevés. Tout cela figure dans cet excellent rapport. Dont acte, donc. Dans cette perspective, il est intéressant de relire ces documents, qui, bien qu'ayant pris la poussière, sont d'une très grande actualité.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme... Je suis désolé, Madame Orsini, il ne vous reste plus de temps de parole. (Remarque.) Je la passe donc à M. le député Eric Leyvraz.
M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. A la commission des finances, l'UDC a également refusé ce rapport, parce que l'exercice proposé est assez vain: l'exercice financier commence en 2014, on nous le présente en 2015; des éléments fondamentaux ont changé, comme l'abandon du soutien au franc suisse par la Banque nationale; mais on garde les mêmes chiffres, ce qui fait que les projections pour les années suivantes ne peuvent être que fausses. Il est clair que quand on produit un PFQ de cette manière, on n'est pas forcément exactement dans la ligne, mais on ne peut pas continuer à nous présenter quelque chose qui d'emblée utilise des chiffres faux et continue avec des chiffres faux - car on voit que la crise arrive, et il est prévu un PIB qui augmente de 2,3% en 2016. C'est clair que les résultats finaux qu'on peut prévoir en 2018 sont - soyons polis - plus qu'aléatoires: ils sont fantaisistes. Quand il y a des changements aussi fondamentaux, il faut que le Conseil d'Etat revienne sur ces chiffres de départ avant de nous les présenter à la fin de l'année 2015; et peut-être que pour rendre un PFQ crédible, il faudrait jouer avec une certaine fourchette, haute et basse, afin d'arriver à des estimations qui tiennent la route. Je ne conteste pas l'utilité d'un PFQ, mais si on le présente de cette manière, son utilité devient nulle. C'est un peu dommage, parce que c'est beaucoup de travail, mais le résultat n'est pas satisfaisant.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, comme la grande majorité de la commission, les Verts avaient refusé ce plan financier quadriennal en janvier 2015. Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis, mais les remarques formulées à l'époque sont toujours d'actualité. Les Verts avaient regretté que les mesures prévues par le Conseil d'Etat portent principalement sur des charges et non sur les recettes, demandant un meilleur équilibre des efforts. Depuis, les rares propositions de nouvelles recettes formulées par le Conseil d'Etat ont été refusées par la majorité de ce Grand Conseil. Nous aimerions maintenant nous tourner vers l'avenir, et nous nous étonnons, comme le rapporteur, que le plan financier quadriennal 2016-2019 ne nous ait pas été transmis avec le projet de budget 2016. En effet, je relisais avec intérêt le commentaire du conseiller d'Etat retranscrit à la page 2 du rapport de M. Aellen. Il disait: «Le PFQ s'arrête en 2018. Le prochain PFQ comprendra l'année 2019; il inclura donc l'effet de la réforme de l'imposition sur les entreprises et suscitera certainement plus d'intérêt que le PFQ actuel.» Eh bien nous nous réjouissons de recevoir bientôt ce PFQ 2016-2019 ainsi que le plan décennal des investissements censé être actualisé chaque année, et dont la dernière version date de septembre 2013 !
M. Alberto Velasco (S). Je m'associe aux paroles du rapporteur: c'est vrai qu'on discute de ce texte deux ans après son dépôt, alors que le plan quadriennal se veut quand même la lanterne destinée à nous guider durant quatre ans. Ça montre déjà la manière dont se traduit cette législature. Je constate d'abord, Monsieur le président - vous transmettrez à M. le conseiller d'Etat - que les prémisses qu'il pose ne s'avèrent jamais justes, ne serait-ce que les conséquences de la baisse du PIB, avec les déficits qui s'y rapportent, alors qu'on n'a pas eu de déficit aux comptes. Ceci pour dire que je vous comprends, parce que dans l'économie dans laquelle on vit aujourd'hui, c'est bien difficile de faire des supputations, aucun pays n'arrive à les faire. Mais ce qui me manque dans ce plan quadriennal, Monsieur, c'est qu'en réalité, on devrait se poser la question: quelle est la société qu'il nous faut d'ici vingt ans ? Quelle société ce canton veut-il d'ici vingt ans ? Cette société aura besoin d'infrastructures, d'un Etat social, d'une économie, d'entreprises. Par conséquent, pour arriver en vingt ans à ce projet que vous voudriez, il faudrait que tous les quatre ans, en effet, on ait un plan quadriennal financier qui nous indique où on doit aller, et avec quelles nécessités, disons. Or, il y a des revenus qui s'imposent à ce propos, c'est vrai. Or, Monsieur le conseiller d'Etat...
Le président. Adressez-vous à la présidence, Monsieur le député !
M. Alberto Velasco. ...on pourrait dire aux citoyens: «Si vous voulez ceci, il nous faut cela !», et donc les interroger sur les ressources nécessaires. Or ça, vous ne le faites jamais, vous dites simplement qu'on n'a pas de ressources. Non, peut-être qu'on en a, il faut peut-être interroger les citoyens en leur disant: «Avec ceci, on vous donne cela.» Ce qui est important, Monsieur le président, c'est ce que l'on reçoit avec ce que l'on donne.
M. Edouard Cuendet (PLR). Je me joins évidemment aux commentaires du rapporteur. On va quand même laisser un mérite au Conseil d'Etat: les enjeux présentés dans ce PFQ sont assez justes et bien délimités. En revanche, l'exercice devient vain quand on sait que l'effet de la suppression du taux plancher le 15 janvier 2015 par la BNS n'est pas inclus. Il ne pouvait pas l'être ? Cela se discute, parce que le texte a été déposé le 18 mai 2015... Non, excusez-moi, le PFQ a été déposé le 5 novembre 2014: à ce moment-là, cela ne pouvait pas être pris en compte, puisque la décision a été prise le 15 janvier 2015. En revanche, le Conseil d'Etat, dans sa grande sagesse, aurait dû tenir compte des enjeux exposés et réactualiser le document, parce qu'au fond, la suppression du taux plancher est tellement importante, a eu un tel impact sur Genève qu'il n'était pas raisonnable de continuer à discuter d'un plan financier quadriennal fondé sur des bases aussi fausses. A titre d'exemple de sa fausseté - évidemment non volontaire - les variations de PIB annuelles évoquées dans la présentation du Conseil d'Etat ne correspondent en rien à la réalité, puisqu'il est indiqué en 2015 un taux de 2,2% de croissance, de 2,3% en 2016 et de 1,7% en 2017: on imagine bien qu'on se trouve totalement en dehors des réalités de ce monde - malheureusement, je dirais. A mon sens, le Conseil d'Etat aurait dû mettre ce texte à jour en fonction de ce changement de paradigme.
Ce qui est intéressant dans ce PFQ, en revanche, ce sont les grandes tendances, qu'il faut rappeler: 34% des augmentations de charges sont liées à des mécanismes salariaux, à des cotisations aux caisses de pension et pour le PLEND. Il s'agit de 177 millions sur le PFQ. On voit qu'on est loin d'améliorer la qualité des prestations à la population, il s'agit uniquement d'éléments salariaux qui coûtent fort cher. La gauche reproche évidemment aux contribuables de ne pas contribuer assez, mais on voit ici qu'ils paieraient davantage uniquement pour financer des mécanismes salariaux en tous genres et nourrir la caisse de pension qui elle aussi est fort coûteuse. Tout cela pour dire que ce PFQ n'a pas grand intérêt, ce qui explique pourquoi le groupe PLR l'a refusé en commission et continuera à le refuser en plénière. Je vous remercie.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, vous allez évidemment être très étonnés, mais le parti démocrate-chrétien a pris acte de ce PFQ et l'a accepté, pour plusieurs raisons: ce rapport du Conseil d'Etat présente des enjeux qui sont toujours réels, il fait état d'ambitions pour stabiliser et réduire la dette, pour calibrer les investissements et planifier ceux qui seront auto-financés, pour contrôler l'évolution de la masse salariale de l'Etat, pour garantir l'équilibre fiscal, ce qui est toujours d'actualité. Bien sûr, il y a d'un autre côté la réalité de la commission des finances, ses travaux, les sensibilités qui s'empoignent, ceux qui veulent réduire drastiquement les charges et annoncent des réformes vigoureuses, ceux qui financent l'équilibre entre les charges et les recettes, ceux qui rêvent aux délices d'augmenter les impôts afin de continuer à dépenser sans compter. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, le plan financier quadriennal 2015-2018 présenté par le Conseil d'Etat est issu des travaux raisonnables de celui-ci, d'évaluations basées sur les études d'experts reconnus pour leurs compétences. Alors oui, on y trouve des prudences annoncées, des transparences pas rigolotes, mais en tout cas, en ce qui concerne notre parti, nous avons un Conseil d'Etat que nous avons appelé de nos voeux; et ce n'est pas pour un magicien, un manoeuvrier ni un maquignon que nous avons voté, mais pour un Conseil d'Etat simplement travailleur et raisonnable face aux enjeux sociétaux. Evidemment, c'est embêtant: on ne peut pas raser gratis, on ne peut pas avoir un plan financier quadriennal qui nous fasse rêver, c'est évident.
Le parti démocrate-chrétien a considéré le plan financier quadriennal du Conseil d'Etat comme un outil de travail qui prend les députés élus pour des personnes raisonnables, responsables, capables d'entendre une réalité qui doit effectivement être adaptée, qui n'est pas forcément joyeuse, mais réaliste. Alors soyons responsables et concernés, Mesdames et Messieurs les députés, et prenons acte de ce plan financier quadriennal. C'est ce que va faire le parti démocrate-chrétien. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG). Je suis tout à fait d'accord avec mes préopinants Eric Leyvraz et Edouard Cuendet: c'est un exercice un peu vain auquel on se trouve confronté. J'ai un peu de nostalgie - pas très positive - pour les «Gosplan» de l'Union soviétique d'une certaine époque, où chaque vis de la moindre usine figurait dans le plan, qui durait cinq ans, comme l'a rappelé Jean Batou, qui semble bien connaître le sujet... (Remarque.) ...et qui n'en est pas nostalgique non plus, apparemment ! Mais bon, c'est une période un peu révolue, on sait que l'idéologie du planisme a eu un certain succès pendant une période, aux XIXe et XXe siècles; même de Gaulle s'en est beaucoup inspiré pour créer un régime un peu hybride.
On se retrouve là avec cette espèce d'OVNI parlementaire, ou plutôt institutionnel - ce serait plus juste - qui nous sort de grandes lapalissades; personne n'a cité la conclusion telle qu'elle figure dans le rapport, présentée à la commission, où l'on nous indique: «rigueur financière nécessaire pour les années à venir». Bravo ! Bravo, il fallait vraiment être capable d'une grande vision ! (L'orateur rit.) On a appris quelque chose, c'est vraiment le scoop du siècle, auquel on ne pouvait pas s'attendre. On lit ensuite: «La situation s'est aggravée depuis la rédaction du plan financier quadriennal», on évoque «la baisse attendue des revenus fiscaux, la crise de confiance de la zone euro, l'impact du franc fort sur la conjoncture». Tous ces éléments ont bien évidemment modifié tout ce qu'on pouvait prévoir. Il y aura peut-être à un moment une réflexion à avoir, de manière plus générale: faut-il garder ce plan ? Peut-être faut-il le garder. Faut-il l'alléger ? Le structurer différemment ? C'est peut-être bien d'avoir une boussole, d'un type ou d'un autre. Quoi qu'il en soit, on peut exprimer aujourd'hui un certain dépit, ce que va faire le groupe MCG en refusant ce rapport.
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur. L'exercice n'est pas vain, mais il doit être porté avec conviction et précision. On nous disait que les éléments qui se trouvent à la base de ce plan financier quadriennal étaient basés sur mars 2014: peut-être, mais ce n'est pas tout à fait vrai. Si vous prenez par exemple la page 23 de mon rapport, dans la présentation du Conseil d'Etat, vous constaterez que les chiffres du projet de budget sont en réalité ceux de 2015, des chiffres qui datent du dépôt du projet de loi; il y a donc eu une adaptation. On aurait pu prendre un certain nombre de mesures, ce d'autant plus qu'on sait qu'entre mars et le dépôt de ce projet de loi en novembre, il y avait certainement déjà possibilité de le réactualiser, sans tenir compte des événements de janvier 2015. Je rappelle ensuite que ce plan financier quadriennal comportait par exemple l'indication que les annuités seraient versées en 2016, 2017, 2018; il aurait pu mentionner que certaines augmentations d'impôts étaient souhaitées par le Conseil d'Etat.
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Cyril Aellen. Pour éviter qu'on nous serine sans arrêt qu'on se trouve dans le cadre de plans d'austérité, il aurait aussi pu nous indiquer les chiffres suivants, qu'il faut prendre et poser raisonnablement: on voit qu'entre 2011 et 2015, la population a augmenté de 5%, mais que l'augmentation de la masse salariale est de 10%, et celle des postes de fonctionnaires du grand Etat de 10% supplémentaires - plus de 500 postes. Ces chiffres-là nous auraient peut-être permis de tenir des débats plus sereins et d'éviter d'entendre à réitérées reprises des faits tout à fait inexacts.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. C'est vrai que débattre d'un document déposé il y a plus d'un an et demi amène à considérer les chiffres avec un autre regard, sous une autre lumière; on est peut-être plus intelligent aujourd'hui, au regard des faits qui se sont déroulés depuis lors. C'est à mon avis ce décalage qui est problématique à ce jour. Monsieur Baertschi, je suis assez d'accord avec vous sur le caractère un peu soviétique de cette planification quadriennale; néanmoins, c'est un exercice nécessaire, et en plus, utile. Il est, de plus, inscrit dans la loi, et c'est pour cela que nous nous y livrons. Chaque fois qu'on le fait - cela me permettra d'ailleurs de répondre à la question du rapporteur - on le fait en lien avec le dépôt du budget; la loi dit qu'il faut le présenter à peu près en même temps, la pratique - c'est ainsi depuis qu'un plan financier quadriennal est préparé - est telle qu'il y a forcément un léger décalage entre le dépôt du budget et le dépôt de ce plan. Pourquoi ? Parce qu'on intègre dans le courant de l'automne les éléments portés à la connaissance du Conseil d'Etat, et ceux qui d'ailleurs font très souvent l'objet d'amendements du Conseil d'Etat au mois de novembre. On intègre ces éléments-là pour que le plan financier quadriennal, qui porte sur une assez longue période, comporte les derniers éléments qui se trouvent à la connaissance du Conseil d'Etat, c'est-à-dire ceux de l'automne qui précède l'année du début du plan. Celui-ci a donc été déposé au début novembre 2014. Il contient des éléments du projet de budget 2015, c'est parfaitement logique, comme l'a relevé le rapporteur. Evidemment, après les événements que vous savez et toute une série d'autres choses, aujourd'hui, une année et demie plus tard, il paraît un peu désuet.
S'agissant de l'opération que nous aurions dû renouveler à la fin 2015 - pour répondre à la question posée par M. Aellen - je rappelle juste les dates: nous avons déposé ce PFQ au début de novembre 2014, c'est la date habituelle. Début novembre 2015, entre le 5 et le 10, si ma mémoire est bonne, la commission des finances a décidé de ne pas entrer en matière sur le budget 2016. Vous vous souvenez de cet épisode. Le Conseil d'Etat est venu ici les 17 et 18 décembre avec un projet de budget sur l'étude duquel la commission des finances n'était pas entrée en matière. Vous n'avez donc pas fait le travail budgétaire habituel. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'était un peu délicat de déposer un PFQ, puisqu'il y a un lien direct entre un budget et un plan financier quadriennal. On peut en faire le constat, c'est vrai, nous ne l'avons pas déposé; mais c'est précisément devant cette situation que le Conseil d'Etat a décidé qu'il renonçait à déposer un plan financier quadriennal, parce que la situation budgétaire était telle que je viens de vous la décrire.
C'est là le passé, Mesdames et Messieurs. Je prends acte du fait que vous vous apprêtez, très probablement, à ne pas prendre acte de ce plan financier quadriennal; mais ce qui nous intéresse, en ce qui nous concerne, c'est la suite: le projet de budget 2017, et par conséquent, le plan financier quadriennal 2017-2020, qui, lui... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...tiendra compte de toute une série d'éléments, en particulier l'entrée en vigueur de RIE III, le 1er janvier 2019. C'est à cela que nous travaillons, nous avons déjà démarré la planification budgétaire. Nous aurons très probablement une méthode un peu différente de celle des années précédentes; il y aura probablement, même très certainement, des consultations avec les partis, qui auront lieu avant la pause estivale, pour essayer d'éviter les écueils que nous avons connus avec le projet de budget 2016.
Mesdames et Messieurs, je vous invite néanmoins à prendre acte de ce plan financier quadriennal, puisqu'il reflète une situation telle qu'elle nous était connue en novembre 2014, et qu'il ne représente rien d'autre que cela.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons procéder au vote, et je vous demande toute votre attention sur la procédure - nous sommes à la fin de la session, je sais que certaines personnes sont un peu fatiguées. Ceux qui refusent de prendre acte de ce rapport et souhaitent son renvoi au Conseil d'Etat votent oui, les autres votent non ou s'abstiennent.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport RD 1062 est adopté par 81 oui contre 11 non.
Le rapport du Conseil d'Etat RD 1062 est donc refusé.
Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission RD 1062-A.
Le président. Mesdames et Messieurs, nous sommes sur le point de clore nos travaux. Je vous souhaite un long et excellent week-end et vous retrouve avec plaisir lors de notre prochaine session !
La séance est levée à 19h40.