République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 26 février 2016 à 18h10
1re législature - 3e année - 1re session - 5e séance
PL 11834 et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au PL 11834 qui, je le rappelle, est lié au PL 11428-A. Nous sommes en catégorie II, avec un temps de parole de soixante minutes en tout et pour tout. Monsieur François Baertschi, rapporteur de majorité, je vous cède le micro.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il y a un principe de base de l'Etat de Genève, il y a un principe de base de la loi sur le traitement du personnel, c'est l'augmentation régulière du salaire. Des tableaux figurent dans la loi, et c'est la règle. Est-ce que l'on veut procéder à des modifications - parce qu'il est tout à fait possible de modifier une loi, c'est même l'ordre logique ? Il est bien évidemment possible de changer cette loi, mais logiquement cela devrait passer par SCORE, par la réforme des salaires des fonctionnaires; c'est à ce niveau-là véritablement qu'il faut placer le curseur, de sorte qu'on puisse le faire de manière réfléchie, approfondie, harmonieuse et équilibrée.
Soyons clairs: ce n'est ni le Grand Conseil ni le Conseil d'Etat qui décide de la distribution de l'annuité, c'est la loi, et c'est le principe de cette loi. On peut cependant exceptionnellement supprimer cette annuité pendant une année, au travers d'une loi d'exception; c'est ce qui a été fait habituellement, et même de manière relativement régulière, au point que l'on imagine que c'est la règle.
Lors de la discussion sur le budget 2016, on a créé une sorte d'OVNI parlementaire, qui s'est formé un peu dans la fougue durant certaines séances un peu tardives - qui n'auront désormais plus lieu le vendredi soir, puisque l'horaire a été modifié, ce qui selon moi va probablement avoir un effet positif. On se retrouve donc avec une loi qui supprime les annuités ad aeternam, la B 5 16, qui a été votée, et une autre qui permet une attribution en fonction du bon vouloir du Conseil d'Etat. Eh bien ce sont des éléments que nous vous proposons de modifier grâce au PL 11834, et nous demandons donc d'abroger ce galimatias, pour reprendre vos propos, Monsieur le président. Nous vous demandons également de refuser le PL 11428, qui est bien sûr plus raisonnable, mais qui va malgré tout dans un sens contraire au principe même de la loi actuelle sur le traitement du personnel. A ce moment-là, je pense qu'il faut avoir le courage de se dire qu'une véritable réflexion de fond doit être menée sur le traitement des fonctionnaires dans le cadre du projet SCORE, où l'on met tout sur la table et où l'on ne fait pas - excusez-moi du terme - une sorte de bricolage. Pour toutes ces raisons, je vous demande d'accepter le premier projet de loi qui vous sera soumis et de refuser le second.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur de majorité. Monsieur Cyril Aellen, rapporteur de minorité, vous avez la parole.
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de minorité. Je vous remercie, Monsieur le président, de me laisser le temps de m'exprimer sur un projet de loi qui a été déposé par l'amicale des anciens fonctionnaires, puisque c'est le cas d'à peu près huit des onze signataires.
Je viens d'entendre le rapporteur de majorité nous expliquer qu'il faut changer la loi, parce qu'on ne peut pas changer la loi autrement que par le biais du projet SCORE. On nous a aussi expliqué, concernant le PL 11836, comment le MCG était droit dans ses bottes en changeant une seule fois d'avis. Alors là, c'est encore mieux: c'est comment le MCG est droit dans ses bottes en changeant deux fois d'avis, sur le PL 11428, puis en plénière, et maintenant avec le PL 11834. Par ailleurs, nous avons entendu en début de journée M. Alberto Velasco expliquer qu'il fallait donner du pouvoir de gestion au Conseil d'Etat, eh bien je me réjouis qu'il nous expose maintenant le contraire. Pour le surplus, je me réserve la possibilité de reprendre la parole un peu plus tard.
M. Jean Batou (EAG). Chers collègues, la question dont on discute ce soir est d'une très grande importance, puisqu'il s'agit du respect du point 13 du protocole d'accord avec la fonction publique que le Conseil d'Etat a signé le 17 décembre dernier et dans lequel il s'engageait, je cite, à chercher «avec les groupes politiques composant le Grand Conseil une solution permettant d'aboutir à l'adoption d'un budget qui tienne compte de cette proposition», à savoir de supprimer les mesures 69, 70, 71, 72, 75 et 76, qui visent à la réduction linéaire, arbitraire, des postes et des subventions, en échange de la renonciation par les organisations représentatives à leurs revendications concernant l'application des annuités 2016.
Le Grand Conseil est saisi aujourd'hui d'une proposition qui vise à permettre au Conseil d'Etat de réparer une erreur, puisqu'il n'a pas respecté l'accord qu'il avait lui-même signé avec la fonction publique, violant ainsi le principe de la bonne foi, qui devrait être au centre de toute négociation sociale, en particulier lorsqu'elle s'adresse à des milliers de salariés en colère, qui n'ont pas hésité à descendre massivement dans la rue et à faire sept jours de grève, et en particulier aussi lorsqu'elle concerne les intérêts essentiels de l'ensemble des usagers du canton. Il a dès lors donné un très mauvais exemple en tant que premier employeur de ce canton.
Le budget 2016 peut supporter cette charge de 40 millions, notamment quand on sait l'importance prise par la sous-déclaration et la fraude fiscale dans le canton de Genève, qui se montait à 500 millions en 2005, selon M. David Hiler, ancien chef du département des finances. Du reste, elle a sans doute augmenté au prorata de l'assiette fiscale, et peut-être se situe-t-elle aujourd'hui, dix ans plus tard, à 600 ou 650 millions; allez savoir ! Faut-il donc - et c'est la question qui nous est posée - équilibrer le budget sur le dos des mécanismes salariaux, s'agissant desquels nous sommes engagés par la loi, mécanismes salariaux qui concernent les infirmières et les infirmiers, les aides à domicile, les assistants sociaux, les enseignants, les instituteurs, les enseignants du secondaire, les policiers ? (Brouhaha.) Est-ce que ce sont ces mécanismes salariaux là qui doivent être sacrifiés, ou doit-on se battre raisonnablement pour l'équité fiscale, contre la fraude fiscale, pour qu'enfin ceux qui remplissent correctement leur déclaration d'impôts ne doivent pas payer pour ceux qui ne s'acquittent pas de leurs impôts et qui ne sont pas contrôlés, faute de moyens ?
Poser la question, vous en conviendrez, c'est y répondre ! C'est la raison pour laquelle le groupe Ensemble à Gauche appelle sans réserve à voter oui au PL 11834 qui rétablit les mécanismes salariaux, ce qui ne nous empêchera pas de poursuivre la lutte aux côtés de la fonction publique et des usagers, pour la défense des postes, des services publics et des prestations dont la population a besoin. Monsieur Aellen, quand vous vous moquez de l'amicale des fonctionnaires, vous vous moquez de ceux qui tous les jours se mettent en quatre au service de la population pour remplir des obligations du service public, que nous avons toujours défendu et que nous défendrons à l'avenir avec la plus grande énergie.
Puisqu'il me reste un peu de temps pour finir mon intervention... (Exclamations.) ...et que je suis plus rapide que d'autres quand je m'exprime, j'aimerais revenir sur un point qui me paraît essentiel...
Le président. Il vous reste une minute.
M. Jean Batou. ...à savoir la question de la bonne foi. La question de la bonne foi est un élément essentiel quand on négocie. (Brouhaha.) Or quand vous vous êtes engagés à présenter les résultats de cet accord aux partis du Grand Conseil, je ne vous ai pas vus - ayant participé aux discussions avec le Conseil d'Etat - proposer la suppression de ces mesures 69...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Jean Batou. ...70, 71, 72, 75 et 76. Je vous invite donc, parce que vous avez l'occasion de vous rattraper, à le faire le plus rapidement possible. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Madame Magali Orsini, il vous reste douze secondes. (Commentaires. Mme Magali Orsini descend de son siège à la tribune pour s'exprimer depuis sa place de députée.)
Mme Magali Orsini (EAG). J'ai sous-estimé la générosité de M. Batou, veuillez m'excuser, Monsieur le président ! (L'oratrice s'assied.)
Des voix. Reste debout !
Mme Magali Orsini. Ah pardon, excusez-moi ! (Rires. Commentaires.)
Une voix. C'est terminé !
Mme Magali Orsini. Alors effectivement, effectivement, effectivement...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée. (Rires. Applaudissements.)
Mme Magali Orsini. ...je crois que je vais passer directement à la conclusion ! (Rires.)
Le président. C'est terminé, Madame la députée, je suis désolé. Madame Haller, il ne vous reste malheureusement plus de temps de parole. Je passe donc le micro à M. Bertrand Buchs.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. La question de ce soir n'est pas de savoir si les fonctionnaires travaillent bien ou mal, mais de déterminer à qui doit incomber la décision d'accorder ou non les annuités. La loi dit explicitement qu'il y a des annuités, mais pour nous c'est clairement au Conseil d'Etat que cette décision revient et, comme M. Longchamp, président du gouvernement, l'a bien dit lors de la dernière discussion sur le «personal stop», il faut que le Conseil d'Etat ait la gestion de son personnel. C'est une logique absolue, et c'est donc le Conseil d'Etat qui doit proposer de verser ou non les annuités, en fonction du budget qu'il construit. Chaque année on a le même problème, on demande au parlement s'il va accorder ou non les annuités, et il y a déjà, avant les discussions sur le budget, des négociations avec tous les partis pour savoir si on les maintient ou non en fonction de la politique. Eh bien non ! On a décidé à la fin de l'année passée que l'on donnait cette prérogative au Conseil d'Etat, et pour notre part nous ne voulons pas changer cela. Et c'est beaucoup plus sain que le Conseil d'Etat décide des annuités et monte son budget en fonction de la décision qu'il a prise et des négociations qu'il mène avec la fonction publique.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'à un moment donné on doit aussi savoir ce que l'on veut, et en tout cas pour notre part nous pensons qu'il faut quand même faire preuve d'un certain respect à l'égard des employés de la fonction publique. Ils signent un contrat dans lequel il est prévu un plan de carrière, ainsi que des annuités qui sont inscrites dans la loi, et il n'y a donc pas de raison que ce soient les fonctionnaires qui fassent régulièrement - car cela a été régulièrement le cas depuis une vingtaine d'années - les frais de l'ajustement et des difficultés budgétaires de ce canton. C'est la raison pour laquelle nous soutenons les fonctionnaires, comme nous soutenons également les travailleurs du privé, les travailleurs de Genève, vous le savez, et nous vous invitons donc à voter ce PL 11834 et à refuser le PL 11428. Je pense que c'est une juste mesure de justice !
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Les socialistes soutiendront bien évidemment le projet de loi visant à abroger la loi sur la suppression des annuités, tout simplement parce que les annuités font partie intégrante du statut du personnel et qu'elles font partie des mécanismes salariaux. Nous invoquons ici assez souvent le partenariat social, eh bien, il est bon de mettre en oeuvre les accords qui sont signés par le Conseil d'Etat et par les organisations syndicales représentatives du personnel, de même qu'il est bon que ce que l'on prône pour les conventions collectives de travail trouve sa logique également dans les accords avec le personnel de la fonction publique. Si nous voulons ramener un peu de calme et de dialogue - et donc de la sérénité - avec la fonction publique, il faut calmement reposer sur la table le projet SCORE et le négocier avec les organisations syndicales. De la même façon, renouer un climat de dialogue avec la fonction publique permet quand même de reconnaître qu'être agent de la fonction publique, qu'avoir une fonction publique relève d'une mission noble, dans l'intérêt du bien commun, dans l'intérêt collectif, et selon nous il faut donc pour cela accepter ce projet de loi. Nous irons également dans le sens du rapport de majorité de M. Baertschi concernant le PL 11428, dont nous acceptons les conclusions, c'est-à-dire le refus de ce projet de loi. A nouveau, nous vous demandons donc de ne pas jouer à cent les employeurs de la fonction publique, mais bien de ramener chaque fois le rôle de chacun là où il doit être, dans le respect du partenariat social. En ce sens, nous demandons au Conseil d'Etat de clairement renouer le dialogue avec la fonction publique, dans l'intérêt des citoyennes et des citoyens de ce canton.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, lors du débat sur ce même sujet en décembre dernier, qui était particulièrement houleux, refusant de se laisser manipuler par le MCG et d'ouvrir la porte à un budget de la droite élargie, avec toutes les coupes que cela pouvait laisser supposer, les Verts s'étaient abstenus, ce qui avait entraîné la modification de la loi et le transfert au Conseil d'Etat de la compétence de verser ou non l'annuité. Si nous sommes prêts - tout comme la fonction publique, d'ailleurs - à négocier ponctuellement la suspension de l'annuité en fonction de la conjoncture, nous sommes opposés au transfert de cette compétence, qui est en réalité une suppression de l'automaticité du versement de l'annuité. En effet, jusqu'en décembre 2015, l'annuité était ancrée comme un mécanisme salarial dans la loi; le Grand Conseil pouvait voter une suspension exceptionnelle, mais il ne s'agissait en principe pas de voter chaque année oui ou non à l'annuité.
Supprimer l'annuité, ou en tout cas remettre en cause son automaticité, c'est une marque de défiance à l'égard de tous les jeunes collaborateurs de l'Etat ou des collaborateurs récemment engagés. En effet, les personnes qui travaillent depuis très longtemps à l'Etat ont déjà atteint le maximum de leurs annuités et ne seront pas touchées par cette mesure; en revanche, les nouvelles recrues, elles, voient leur progression salariale remise en question, ce qui est extrêmement démotivant. L'annuité en tant que telle n'est pas pour nous une vache sacrée, mais la notion de progression salariale et d'encouragement des jeunes collaborateurs nous semble très importante. C'est un mécanisme qui pourrait être revu, mais qui doit l'être dans le cadre d'un débat beaucoup plus global, par exemple à l'occasion de la réforme SCORE, dont nous ne désespérons pas qu'elle aboutisse un jour. Les Verts vous invitent donc à accepter le PL 11834 et à refuser le PL 11428, comme la commission ad hoc l'a déjà fait. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Je passe la parole à M. Alberto Velasco.
M. Alberto Velasco (S). Pour combien de temps, Monsieur le président ?
Le président. Trois minutes quarante-neuf !
M. Alberto Velasco. Oh ! (Commentaires.)
Une voix. C'est Byzance !
Le président. Trois minutes quarante-sept ! (Rires.)
M. Alberto Velasco. Merci, Monsieur le président. J'ai été interpellé par M. Aellen au sujet de ma précédente intervention, dans laquelle je mettais en relief le fait que ce Grand Conseil ne doit pas se substituer dans la gestion des affaires de l'Etat, et il a indiqué que, s'agissant de cette loi-là, il attendait ma réponse. Mais je vais la donner, ma réponse ! Eh bien aujourd'hui il y a une loi, enfin jusqu'ici, jusqu'à ce fameux amendement, ce fameux soir, il y avait une loi qui accordait des annuités aux fonctionnaires, lesquelles faisaient partie intégrante de leur salaire. Le Conseil d'Etat négociait donc année après année, en fonction de la situation financière - comme l'a dit tout à l'heure le représentant d'Ensemble à Gauche - et il discutait, quand il y avait justement des problèmes liés au manque de revenus, de la possibilité de suspendre ces annuités ou, cas échéant, comme il y a deux ans, de les verser uniquement à une minorité de fonctionnaires, à savoir les classes les plus défavorisées.
Là, Monsieur Aellen, vous inversez la logique, c'est-à-dire que vous vous mettez dans une optique de marché; vous n'êtes plus dans une logique de fonction publique, vous êtes dans une logique de marché. En effet, s'agissant de la fonction publique, si je prends l'exemple des instituteurs, on ne peut pas dire qu'ils aient vingt-cinq possibilités de travailler dans ce canton: il y a la fonction publique, et ensuite peut-être une ou deux écoles privées, et encore... En conséquence, si par exemple un juge ou un instituteur se dédie à la fonction publique, on doit pouvoir lui garantir que, au bout de x années, son salaire aura évolué. A moins qu'on ne considère que d'entrée une fonction vaut par exemple 10 000 F. On pourrait en effet très bien dire que la profession d'instituteur vaut 10 000 F, d'un coup, et que celui qui l'exerce n'évoluera qu'en fonction de l'indice du coût de la vie. Mais ce n'est pas possible, parce qu'au début l'instituteur est engagé avec l'expérience qui est la sienne et que l'on tient compte de cette expérience, comme on tient compte du fait qu'il va rester à l'Etat pendant un certain nombre d'années. A l'époque, on a donc voulu justement garantir que ces personnes restent à l'Etat et de ce fait prévoir, année après année, une augmentation. C'est le mécanisme de la fonction publique. Si vous voulez remettre cela en question, ce qui est d'ailleurs votre droit, Monsieur Aellen, ainsi que le PLR - c'est votre droit, effectivement ! - il faut alors trouver un mécanisme qui ne prétérite pas la fonction publique. En effet, le mécanisme que vous proposez la prétérite, parce que ça veut dire que chaque année le Conseil d'Etat, dans sa toute-puissance, va estimer qu'il peut ou non donner x aux fonctionnaires. Là, ce qui est en question, c'est que vous enlevez un droit, et ce n'est pas possible. Si vous voulez le faire, il faut à ce moment-là revoir tous les mécanismes salariaux ainsi que la manière. SCORE est un projet de réforme, Mesdames et Messieurs, mais il n'élimine pas les annuités, si je ne me trompe pas. SCORE n'élimine pas les annuités; ce qu'il fait, c'est qu'il évalue une fonction, et ensuite cette fonction-là verra ses annuités, année après année...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Alberto Velasco. Je vous remercie, Monsieur le président. Trente secondes de démocratie et de liberté ! (Exclamations.) Permettez-moi donc, Monsieur le président, de dire à M. Cyril Aellen que je maintiens ma position, à savoir qu'effectivement le Conseil d'Etat a tout le loisir, à partir du droit des fonctionnaires, de négocier en fonction des conditions économiques et financières du canton, de peut-être revoir ces annuités à la baisse ou, cas échéant, comme il l'a fait d'autres années, de proposer une loi pour les supprimer. Voilà, Mesdames et Messieurs, la raison pour laquelle je maintiens ma position, à savoir qu'il faut laisser le Conseil d'Etat négocier avec la fonction publique et faire son travail.
M. Jacques Béné (PLR). On a bien compris que certains ici aimeraient carrément voir le Cartel intersyndical siéger dans ce parlement... (Commentaires.) Mais je pense que ce n'est même pas utile ! (Commentaires.) Ce n'est même pas utile ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il y a suffisamment de défenseurs du Cartel pour attiser les mouvements de grève dans ce parlement, pour être même en tête des mouvements de grève dans ce parlement, et quand je dis «grève», ce sont des grèves préventives; on en est aux grèves préventives, Mesdames et Messieurs.
Si la compétence de l'annuité a été transférée au Conseil d'Etat, si ce débat a eu lieu, c'est bien parce qu'il avait une raison d'être. En effet, il est difficile pour ce parlement de pouvoir négocier une annuité alors que nous ne sommes pas à la table des négociations. Nous ne pouvons pas l'être, et c'est bien pour ça qu'il y avait un intérêt à transmettre cette compétence au Conseil d'Etat.
Mesdames et Messieurs, que la fonction publique veuille défendre ses acquis, je trouve cela normal. Je trouve cela vraiment normal. Mais il y a des acquis qui commencent à devenir difficilement défendables auprès de la population, quand on sait que le salaire médian de la fonction publique est pratiquement de 2000 F plus élevé que dans le privé. Ça commence à devenir très très difficile. (Commentaires.) Ce n'est pas de cela qu'il s'agit, je suis d'accord, Monsieur Deneys, mais cela, nous ne le remettons pas en question. Nous, l'Entente, avec l'UDC, sommes les seuls à ne pas remettre en cause les salaires de la fonction publique, à ne pas remettre en cause le fait qu'il y ait des licenciements dans la fonction publique. Nous sommes les seuls à vouloir discuter du budget, dont vous n'avez pas accepté de débattre en commission... (Commentaires.) Nous sommes les seuls à vouloir diminuer la dette, nous sommes les seuls à vouloir des réformes structurelles. Mesdames et Messieurs, le Cartel n'a rien proposé, rien de rien ! (Protestations.) Toutes les propositions concernent des augmentations fiscales... (Commentaires. Le président agite la cloche.) ...des augmentations des charges, il n'y a strictement aucune proposition de réformes structurelles. (Brouhaha.)
Ce soir, je pense que le PLR, avec l'UDC et le PDC, nous avons bien compris qu'on était entré dans une période d'opposition, qui sera certainement difficile, on l'a vu encore dernièrement en commission. Je ne veux pas trahir de secret de commission, mais quand certains partis qui n'ont pas l'habitude de voter des amendements proposés par la CGAS se mettent à le faire, on commence à avoir un gros problème de partenariat social, le même partenariat social que nous souhaitons que le Conseil d'Etat puisse avoir avec la fonction publique.
Dès lors, Mesdames et Messieurs, étant donné qu'il y a des discussions entre le Conseil d'Etat et la fonction publique, que ces discussions ne sont pas terminées et que le Cartel ne faisait pas de fixation sur la problématique de l'annuité pour le budget 2016, je vous propose, par gain de paix, de renvoyer le PL 11834 à la commission des finances, ainsi que le PL 11428-A, afin d'en discuter de manière sereine. Le cas échéant, si cette proposition n'est pas acceptée, je vous invite à voter le PL 11428 et à refuser le PL 11834. (Commentaires.)
Une voix. Très bien !
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi en commission, sur laquelle peuvent s'exprimer uniquement les rapporteurs et le Conseil d'Etat. Monsieur Cyril Aellen, rapporteur de minorité, je vous passe la parole.
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de minorité. Je ne l'ai pas demandée !
Le président. Non, mais je vous la donne ! (Exclamations.) Sur le renvoi en commission, Monsieur le député !
M. Cyril Aellen. Je ne souhaite pas m'exprimer sur le renvoi en commission.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Monsieur le rapporteur de majorité, sur le renvoi en commission ?
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Oui, sur le renvoi en commission ! Quand on voit la qualité des attaques personnelles de bas niveau, pour ne pas dire de caniveau, je pense qu'il ne vaut pas la peine de renvoyer ces objets en commission, si c'est pour en rester à ce niveau-là.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Monsieur le conseiller d'Etat Serge Dal Busco, vous avez la parole.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Monsieur le président, je ne souhaite pas non plus me prononcer sur le renvoi en commission. J'avais demandé la parole pour m'exprimer sur le fond.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons voter séparément sur le renvoi de ces deux objets à la commission des finances.
Des voix. Il faut sonner !
D'autres voix. Ça sonne ! Ça sonne !
Le président. On a déjà sonné, ça suffit, s'il vous plaît ! (Exclamations.) Nous nous prononçons d'abord sur le renvoi en commission du PL 11834.
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 11834 à la commission des finances est rejeté par 52 non contre 42 oui.
Le président. Je mets maintenant aux voix le renvoi du rapport sur le PL 11428.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11428 à la commission des finances est rejeté par 52 non contre 45 oui.
Le président. Nous continuons donc notre débat et je passe la parole à M. Olivier Cerutti.
M. Olivier Cerutti (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, je ne fais pas partie de la fonction publique et je m'exprime plutôt en tant que privé, en tant qu'employeur. Quand on parle d'inflation et de déflation, dans le secteur privé, les choses sont vite réglées: inflation égale augmentation de salaire, déflation égale diminution de salaire. On se trouve dans la plupart des cas face à des conventions collectives de travail où l'on négocie et où l'on essaie de trouver des solutions. Dans tous les cas de figure, le patronat rencontre ses employés afin de parler de conjoncture et de mettre en place un processus qui permette à tout le monde de vivre et de dégager les marges nécessaires à la prospérité de nos entreprises.
Oui, Mesdames et Messieurs, je le sais bien, l'Etat n'est pas une entreprise privée, mais aujourd'hui nous devons laisser les mains libres au Conseil d'Etat, à qui nous avons confié cette négociation. C'est à lui de mettre en place ce processus et de retrouver la confiance qui doit exister entre l'employeur et l'employé. Oui, Mesdames et Messieurs, je crois qu'il est absolument nécessaire de retrouver cette ligne de conduite. Je ne vais pas vous faire une leçon d'économie - d'abord, je ne suis pas économiste - mais j'aimerais simplement rappeler aussi, en vertu du bon sens, que quand nous disons ici, par le biais des projets de lois connexes, que nous souhaitons ou ne souhaitons pas renoncer à l'annuité, nous arrivons dans le clientélisme. Oui, Mesdames et Messieurs du MCG ! Oui, Mesdames et Messieurs les fonctionnaires qui êtes dans ce parlement ! Nous sommes dans le clientélisme... (Commentaires.) ...et cela s'appelle le fait du prince. (Applaudissements. Commentaires.)
Une voix. Bravo !
M. Serge Hiltpold (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, on voit typiquement dans ce débat qu'il existe une confrontation entre deux mondes. Il y a d'une part le monde du secteur privé, avec des attentes des employeurs et des employés, ainsi que des questions qui sont les mêmes pour les employeurs comme pour les employés: vais-je garder mon poste l'année prochaine ? Vais-je être augmenté ? Vais-je avoir une gratification ? Mon métier va-t-il évoluer ? Vais-je devoir suivre une formation continue ? L'entreprise sera-t-elle toujours là ? Voilà la réalité de la majeure partie de la population genevoise. Et puis il y a un autre monde, celui de la fonction publique, que je ne critique pas, mais qui n'a pas les mêmes règles. Vous savez, quand vous y entrez, que votre emploi est garanti. C'est un sacré acquis, que l'emploi soit garanti ! Vous avez de plus une progression qui est définie.
Le PL 11428 va typiquement dans le sens de la responsabilisation de l'employeur. J'ai bien aimé votre éloge du partenariat social, que vous malmenez en commission de l'économie en mettant des conventions collectives et des usages qui sont complètement illégaux, et dans ce cadre vous voulez faire du partenariat social en ne donnant pas à l'employeur les compétences d'assumer ses responsabilités. Mais lorsque vous allez à une table des négociations, vous devez pouvoir offrir des solutions aux partenaires...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Serge Hiltpold. ...si vous êtes responsables. Donnez donc cette compétence au Conseil d'Etat, qui formulera peut-être des propositions pour les salariés autres que celles que vous faites en baissant le salaire des cadres de 8,33%, ce que jamais, en tant qu'employeur, je n'aurais osé proposer à des syndicats. (Applaudissements.)
Le président. C'est terminé, Monsieur le député, je vous remercie. Monsieur Lionel Halpérin, vous n'avez plus de temps de parole, je suis désolé. Je cède donc le micro à M. Christo Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je m'exprimerai surtout sur le PL 11428. En réalité, il ne s'agit pas de précariser l'annuité ou de savoir si l'on va augmenter ou couper cette prestation pour le personnel, mais de se demander si l'on peut laisser cet élément dans le jeu parlementaire. Il faut savoir si l'on est d'accord de continuer à pérorer au Grand Conseil et à s'envoyer des invectives sur les fonctionnaires, alors que le vrai problème est de dire que le Conseil d'Etat a besoin de rédiger un projet de loi complémentaire lorsqu'il veut supprimer l'annuité. En effet, il s'agit plus d'un projet contre les députés que contre les fonctionnaires. Je rappelle que le but de la suppression de l'annuité n'était pas au départ de réaliser des économies, mais de permettre l'engagement de 300 personnes supplémentaires. L'UDC pense que la discussion avec les syndicats par rapport à leur patron - à savoir le Conseil d'Etat - n'a pas été franche, puisqu'il manquait des éléments. De plus, ce qui déplaît au groupe UDC, c'est que pour faire passer un budget, il faut un pré-débat, afin de pouvoir ensuite discuter du budget. Enfin, il est regrettable que rien ne puisse être décidé en matière de fiscalité dans ce parlement tant que le projet SCORE ne sera pas voté. Le groupe UDC vous demande donc d'accepter le PL 11428, qui va dans la bonne direction.
M. Bernhard Riedweg (UDC). L'augmentation annuelle du salaire des fonctionnaires est automatique au travers de l'annuité, et elle ne tient compte ni de leur efficacité et de la qualité de leurs prestations, ni de la situation budgétaire du canton. Les salaires des 16 910 employés de la fonction publique du petit Etat s'élèvent à 2,343 milliards au budget 2016 non encore voté, ce qui représente 30% des charges de l'Etat, sans compter les effets sur les salaires compris dans le poste «subventions».
L'augmentation du montant du poste «salaires» au budget est en grande partie supportée par les personnes privées et morales, qui doivent renoncer à certaines prérogatives, ce qui entraîne une diminution de leur pouvoir d'achat tout en maintenant celui des fonctionnaires. Faut-il rappeler que dans le secteur privé, l'augmentation automatique des salaires n'est pas un acquis, les hausses du chiffre d'affaires et du bénéfice n'étant pas assurées ?
Nous le savons, la situation financière du canton de Genève est difficile, elle devient compliquée, et les perspectives économiques ne sont pas positives. Le Grand Conseil porte une grande part de responsabilité dans l'attribution de l'annuité bénéficiant aux collaborateurs de l'Etat, car elle est garantie dans la loi, qui ne tient compte ni de l'inflation, ni de la déflation qui sévit actuellement. Un seul parti représenté au parlement peut, pour de multiples raisons - même électorales - faire pencher la balance en faveur ou en défaveur de l'attribution de l'annuité, sans pour autant que le Conseil d'Etat puisse maîtriser cette action. Aujourd'hui, le Conseil d'Etat ne peut pas être un vrai patron avec son personnel, et il ne peut pas négocier en rencontrant ses représentants et en leur disant qu'il a tant de revenus à disposition et qu'il ne peut pas à la fois augmenter le nombre de postes et payer davantage le personnel.
Ce projet de loi ne prévoit pas la suppression de l'annuité, mais a pour objectif de doter le Conseil d'Etat de compétences en matière de fixation partielle ou complète de la hausse des salaires de la fonction publique en tenant compte de la situation financière prévue l'année suivante, qui se reflète dans le budget.
Au vu de la situation actuelle de la dette de l'Etat et des recettes fiscales prévues lors de ces deux, voire trois prochaines années, et si le Grand Conseil n'attribue pas de compétences au Conseil d'Etat pour agir sur les annuités, il y aura deux variantes qui se présenteront: soit diminuer les prestations à la population par une réduction des postes de travail dans le petit Etat, soit privatiser certaines tâches de l'Etat pour bénéficier d'une baisse du coût des prestations fournies à la population.
En conclusion, l'Union démocratique du centre vous demande d'entrer en matière sur le PL 11428, qui supprime le principe de l'automaticité de l'augmentation des salaires et confère au Conseil d'Etat la possibilité d'accorder ou non l'augmentation prévue dans la loi pour l'année suivante, et de refuser le PL 11834. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Daniel Sormanni pour quatre minutes cinquante-huit.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, quand j'entends certains députés - vous transmettrez, Monsieur le président, à M. Béné et à d'autres du PLR - j'ai envie de dire que finalement, si c'est si mirobolant de travailler dans la fonction publique, pourquoi il n'y a pas plus de PLR ? (Commentaires.) On ne devient pas riche, voyez-vous, dans la fonction publique ! On y gagne peut-être bien sa vie, mais on n'y devient pas riche. Mais investissez la fonction publique, puisque ce sont vraiment des salaires mirobolants ! (Commentaires.)
S'agissant des salaires de la fonction publique, j'aimerais quand même rappeler ici que souvent, depuis une bonne vingtaine d'années, soit il n'y a pas eu d'annuité, soit elle a été suspendue, soit elle a été rabotée. Et le pouvoir d'achat, il faut quand même le reconnaître, quoi que vous puissiez en dire, a été sérieusement raboté durant toutes ces années ! (Commentaires.) Aujourd'hui, peut-être que ce sont encore des salaires corrects mais, vous savez, les petites classes, elles, ne rigolent pas non plus, bien qu'elles soient davantage payées que dans le secteur privé. Il n'empêche que c'est difficile, et il faut donc aussi tenir compte de cela. Or nous, justement - et c'est sur ce point que je voulais répondre à M. Béné - nous ne voulons plus devoir constamment jouer les arbitres ici, dans ce Grand Conseil; nous voulons que la loi soit telle qu'elle était précédemment, à savoir que c'est fixé dans la loi, et qu'un fonctionnaire qui s'engage sait quel est son salaire et quel est son plan de carrière. Ça fait partie de la base. Et ensuite, ce ne devrait plus être le problème de ce Grand Conseil ! Ce n'est pas au Grand Conseil de négocier les conditions, pied à pied, lorsque l'Etat rencontre des difficultés. Est-ce que l'on va augmenter davantage les salaires de la fonction publique si par exemple l'Etat réalise de grands bénéfices ? C'est arrivé ! C'est arrivé ! Eh bien non, les salaires vont rester les mêmes. Il n'y a donc pas de raison que les salaires diminuent parce qu'il y a des difficultés aujourd'hui. A un moment donné, on doit stabiliser les choses et arrêter ces discussions ici dans ce parlement; ce n'est pas à nous de mener cette discussion... (Protestations. Commentaires. Le président agite la cloche.) C'est fixé dans la loi et ça doit l'être une fois pour toutes ! Les fonctionnaires n'ont pas à être - je l'ai déjà dit tout à l'heure - la variante d'ajustement parce qu'il y a un déficit dans le budget de fonctionnement. Il existe d'autres possibilités pour trouver des économies, pour trouver quelques recettes... (Commentaires.) ...mais vous ne voulez rien entendre. C'est donc la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à voter ce PL 11834 et à refuser le PL 11428. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole au rapporteur de minorité Cyril Aellen pour trois minutes trente-trois.
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. On constatera que ceux qui sont pour l'annuité automatique dans la loi évoluent dans deux mondes différents: il y a ceux qui sont représentés par M. Sormanni entre autres, qui dit que l'on n'y touchera jamais, parce que c'est un droit acquis pour l'entier de la carrière, et il y a ceux qui en partie se trouvent derrière moi, du côté des Verts notamment, et qui disent que cela doit se faire dans le cadre du partenariat social. Allez comprendre !
Il existe deux mondes différents: il y a ceux qui défendent le partenariat social et qui pensent que la rémunération notamment peut être discutée et décidée dans le cadre du partenariat social, c'est-à-dire entre le patron - le Conseil d'Etat - et le représentant des employés, à savoir la fonction publique, et puis il y a les autres, un deuxième monde - ils sont majoritaires aujourd'hui - qui chaque année, chaque année veulent faire des fonctionnaires l'enjeu budgétaire, la bataille budgétaire, pour des raisons de clientélisme. Et c'est ce que vous allez faire ! En effet, en donnant cette compétence au Grand Conseil - parce que celui-ci a le pouvoir, en tout temps, on l'a souvent vu aujourd'hui, de modifier une loi, que c'est même l'une de ses seules compétences et que l'on ne va donc quand même pas lui dénier cette compétence de pouvoir modifier des lois - eh bien vous faites chaque année des fonctionnaires un enjeu dans le cadre budgétaire. C'est le service que vous leur rendez ! J'aimerais donc bien savoir qui est aux côtés des fonctionnaires et qui souhaite les préserver.
Enfin, Monsieur Batou - vous transmettrez, Monsieur le président - vous dites toujours que vous êtes aux côtés des usagers. Ce n'est pas vrai ! Vous ne me représentez pas. Les usagers, c'est nous tous, et moi en aucun cas je ne me sens représenté par vous. (Applaudissements. Commentaires.)
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Quand j'entends certaines formes de débat, je me rends compte que Genève est géré à la petite semaine... (Exclamations.) ...par des gens qui ne ressentent que de la haine, qui ne formulent que des reproches et qui n'ont aucune vision du bien public; des gens qui critiquent les fonctionnaires et qui défendent eux-mêmes des clientélismes, à savoir le clientélisme du bâtiment, qui est une vache sacrée à Genève, le clientélisme de la médecine, qui est très fort dans l'un des groupes parlementaires, ainsi que d'autres types de clientélisme, où l'on défend des intérêts. Tout récemment encore, s'agissant de l'avocat de la première heure, on a vu une hausse de ces tarifs-là, pour ce genre de choses. Alors bon, je n'ai rien contre cette hausse, mais il faut arrêter de toujours pointer du doigt les mêmes personnes, alors qu'il y en a beaucoup qui se servent dans les caisses de l'Etat. (Exclamations.) Il y en a beaucoup dans cette salle qui se servent dans les caisses de l'Etat, directement ou indirectement, et je ne citerai personne... (Rires.) ...parce que je crois que le débat doit se situer à un autre niveau et ne pas descendre à ce niveau-là. (Commentaires.) Il ne doit pas descendre aussi bas, à un niveau tel que l'on pointe du doigt untel ou untel, parce que chacun doit vivre, chacun a un salaire, chacun a une profession respectable et qu'il faut un équilibre, une harmonie au sein des services de l'Etat. C'est ce que défend le MCG, c'est ce que défend la majorité qui nous suit dans la défense de l'annuité.
La défense de l'annuité, ce n'est pas une défense financière avant tout. De quoi s'agit-il ? C'est une défense de la correction de l'Etat: l'Etat doit être correct dans ses relations avec ses employés, comme il doit être correct avec les contribuables, avec les fournisseurs, avec les usagers. C'est le message que nous donnons, et c'est pour cela que nous ne voulons pas de ce bricolage idéologique qui, de manière rapide - j'oserais même dire de manière sournoise - déforme entièrement une loi sur le traitement du personnel, une loi qui existe depuis bien longtemps et que certains veulent peut-être réformer. Eh bien réformons-la, mais pas de cette façon, pas à la petite semaine; faisons de vraies réformes, attaquons-nous aux vrais problèmes !
Comme je représente la majorité, je ne vais pas parler pour mon groupe, mais bien de manière plus large. J'aimerais cependant dire qu'il y a quand même un certain nombre de réformes qui ont été adoptées par de nombreux groupes, ici au sein de ce parlement. Il y a des efforts d'économies qui ont été acceptés, ainsi que d'autres éléments de ce genre. Alors on peut aller encore plus loin, il y a ensuite les choix de chaque parti politique d'aller dans un sens ou un autre, mais par pitié ne faisons pas ce type de combines à deux balles... (Commentaires.) ...qui détruisent vraiment l'Etat de Genève. Ce n'est pas comme ça qu'on équilibrera les finances de notre canton ! Si c'est pour enlever un franc à quelqu'un et en dilapider dix pour des choses inutiles, moi je ne suis pas d'accord et je ne joue pas. C'est pour toutes ces raisons que je vous demande de soutenir le PL 11834 et de rejeter le PL 11428. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo, François, bravo !
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il y a assurément quelques analogies entre le débat de tout à l'heure sur la volonté ou l'absence de volonté de contraindre davantage le Conseil d'Etat dans sa politique budgétaire, sa politique du personnel, et le sujet qui est en discussion maintenant. L'analogie ne réside pas dans le fait que le parlement a pris une position il y a quelques semaines et qu'il s'apprête à en prendre une différente aujourd'hui, en abrogeant une loi qui n'a d'ailleurs même pas été promulguée; non, l'analogie concerne le Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat vous a indiqué tout à l'heure les raisons pour lesquelles il ne souhaitait pas - et ne souhaite toujours pas - que l'on contraigne, par des règles trop sévères, trop brutales et inapplicables, sa capacité de gestion, sa capacité d'agir, telle que la constitution la lui confère, en particulier pour organiser l'administration et pour entretenir des relations de partenariat social avec ses collaboratrices et ses collaborateurs, et c'est exactement la même logique qui me fait défendre la position du Conseil d'Etat à ce sujet, à savoir de pouvoir bénéficier de ce que ce parlement a décidé de faire, dans le cadre de la votation budgétaire - ou plus précisément en préparation de la votation budgétaire, qui n'a d'ailleurs pas eu lieu - et qui consiste précisément à disposer de la faculté d'octroyer des augmentations annuelles à ses collaboratrices et à ses collaborateurs.
Je pense d'ailleurs que cette nécessité de revaloriser les salaires, lorsque cela est possible, lorsque la situation le justifie, lorsque les moyens budgétaires sont à disposition, est tout à fait normale; je ne peux pas imaginer, dans une administration comme la nôtre, que des collaborateurs comme les nôtres - surtout si l'on pense aux personnes qui sont au service de l'Etat depuis peu de temps, en particulier les jeunes - voient leur progression salariale constamment bloquée. Ce n'est pas du tout la volonté du Conseil d'Etat. La volonté du Conseil d'Etat est de disposer des outils qui lui permettent véritablement de nourrir et de construire le partenariat social avec ses collaboratrices et ses collaborateurs, comme avec les organisations qui les représentent. C'est exactement ce que nous sommes en train de faire, ou en tout cas en train d'essayer de faire, puisque nous en sommes à la quinzième séance de discussions avec nos partenaires sociaux, et justement, Monsieur Batou, la faculté de disposer de cette possibilité de négocier l'octroi d'une annuité fait précisément partie des possibilités qui sont les nôtres, notamment celles qui sont conférées dans l'accord que l'on a signé avec la fonction publique.
En conclusion, Mesdames et Messieurs, j'exprime ici l'avis très fort, la conviction très forte du Conseil d'Etat que tant dans l'organisation, tant dans la question liée à l'augmentation des charges et à la possibilité d'engager du personnel, que dans la possibilité qui doit nous être conférée de négocier et de discuter avec celui-ci, il faut que le Conseil d'Etat ait une marge de manoeuvre suffisante. On ne peut pas prôner, défendre et porter aux nues le partenariat social en fixant des règles de la rigidité de celles que vous vous apprêtez à rétablir. C'est la raison pour laquelle je vous invite au nom du Conseil d'Etat, Mesdames et Messieurs, lors des deux votes auxquels vous allez procéder dans quelques instants, à bien vouloir permettre au Conseil d'Etat de garder la marge de manoeuvre que vous lui avez conférée il y a quelques semaines. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons tout d'abord voter sur l'entrée en matière du PL 11834.
Une voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Largement ! Nous passons donc au vote nominal. (Brouhaha.) Je vous demande un instant de silence !
Mis aux voix, le projet de loi 11834 est adopté en premier débat par 51 oui contre 43 non (vote nominal).
La loi 11834 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11834 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 50 oui contre 44 non.
Le président. Nous nous prononçons à présent sur le PL 11428.
Mis aux voix, le projet de loi 11428 est rejeté en premier débat par 51 non contre 43 oui.