République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 17 décembre 2015 à 14h
1re législature - 2e année - 12e session - 73e séance
PL 11685-A
Premier débat
Le président. Nous passons au projet de loi 11685. Nous sommes toujours en catégorie II, trente minutes. La parole revient au rapporteur de majorité, M. Zweifel.
M. Yvan Zweifel (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce PL 11685 poursuit, vous l'aurez compris, deux objectifs principaux. Le premier, louable, est d'adapter la législation genevoise au droit fédéral harmonisé, suite à la votation du 9 février 2014: à cette date-là, en effet, on n'a pas parlé que d'immigration, mais aussi d'infrastructures ferroviaires et de fiscalité - c'est le fameux projet FAIF, qui a introduit pour l'IFD un plafond de 3000 F pour la déductibilité des frais de transport. Il s'agit donc ici d'adapter la législation genevoise, puisque cela est maintenant autorisé suite à cette votation. Le deuxième objectif poursuivi, moins louable - en tout cas selon une certaine majorité - concerne le budget 2016: il s'agit de trouver de nouvelles recettes, fiscales en l'occurrence. Dans la réalité, Mesdames et Messieurs, chers collègues, il s'agit tout simplement d'une hausse des impôts ! Car à partir du moment où vous diminuez la déductibilité des frais de transport sur la déclaration fiscale, par définition, vous augmentez les impôts. Cela semble totalement inadmissible à une majorité de la commission fiscale - tout du moins jusque récemment - pour trois raisons.
D'abord, vous le savez, nous vivons dans un canton où les impôts sont déjà les plus élevés de Suisse. Vous pouvez le voir à la page 13 du rapport de majorité, où figure une statistique provenant de l'Administration fédérale des finances qui fait état de l'exploitation du potentiel fiscal par canton pour 2015: sans aucune surprise, le canton qui exploite le plus son potentiel fiscal, c'est évidemment le nôtre, c'est Genève ! C'est aussi inadmissible parce que nous vivons dans un canton où, vous le savez, 91 000 contribuables, soit 34% d'entre eux - vous le verrez à la page 18 du rapport - ne paient tout simplement pas d'impôts, et où, si le projet initial du Conseil d'Etat - avec un plafond à 500 F - venait à être accepté, 47 503 contribuables, qui eux, forcément, paient des impôts puisqu'ils peuvent déduire des frais de transport, verraient leurs impôts augmenter. Inadmissible, enfin, dans un canton qui, comme vous le savez, connaît une crise de ses dépenses et non pas une crise de ses recettes. Je vois en face M. de Sainte Marie qui sourit; il pourra toujours dire que c'est le contraire, la réalité est la suivante: ceux qui disent qu'il s'agit d'une crise des dépenses, c'est-à-dire la majorité raisonnable de ce Grand Conseil, peuvent l'étayer avec des chiffres, via par exemple les comptes de l'Etat; les autres n'ont que des chiffres imagés, étayés par rien du tout.
Mesdames et Messieurs, on peut souligner ici, et j'aimerais le faire en tant que rapporteur de la majorité, le pragmatisme de la commission fiscale. Je dis pragmatisme, car d'abord, cette commission, à l'unanimité, a été d'accord d'entrer en matière sur ce projet.
Le président. Vous prenez sur le temps de votre groupe.
M. Yvan Zweifel. Très bien, Monsieur le président ! Ce qui induit de facto une hausse d'impôts, quel que soit le plafond que nous allons décider aujourd'hui; en effet, aujourd'hui, il n'y a pas de plafond. Une majorité, et même l'unanimité de la commission est donc d'accord pour discuter d'une hausse d'impôts; mais d'une hausse évidemment modérée, et non pas avec un plafond à 500 F comme le proposait le Conseil d'Etat, ce qui est parfaitement ridicule reporté à la distance. Certains feront un lien avec les transports publics, et ils auront raison: pour l'ICC, si vous voulez déduire des frais parce que vous avez un déplacement entre votre lieu de domicile et votre lieu de travail inférieur à deux heures, vous pouvez déduire l'abonnement des TPG. On parle ici des gens qui ont une durée de déplacement supérieure à deux heures entre leur lieu de domicile et leur lieu de travail; nous faisons une analogie avec l'abonnement général CFF de deuxième classe, c'est pourquoi la majorité de la commission vous propose un plafond à 3655 F.
Je terminerai en disant qu'un plafond à 500 F serait une véritable «Genferei», une absurdité fiscale: vous verrez à la page 7 du rapport de majorité que tous les cantons, tous les cantons qui ont décidé d'appliquer un plafond le font à au moins 3000 F, voire bien au-delà. Genève, canton où les impôts sont déjà les plus élevés, aurait donc le plafond le plus bas; ceci nous paraît totalement inadmissible, et c'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, je vous propose de voter ce PL 11685 avec un plafond à 3655 F, car c'est une solution pragmatique et raisonnable. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, comme l'a très justement expliqué mon collègue rapporteur de majorité, ce projet de loi résulte de l'acceptation par le peuple du FAIF, financement fédéral de l'aménagement des infrastructures ferroviaires, qui implique une déductibilité réduite, pour les cantons, des frais de transport. C'est là la volonté de ce projet de loi, la volonté même du Conseil d'Etat. Je m'arrêterai dans un premier temps sur le sujet de ce projet de loi, puis sur son contexte fiscal.
Cet objet vise à apporter une égalité de traitement à Genève entre usagers des transports publics et usagers des transports privés. Il vise aussi à encourager l'utilisation des transports publics dans un canton urbain dont on connaît à la fois la qualité des transports et les bouchons, dus notamment à l'exiguïté du territoire et au fort nombre de pendulaires. Il faut également préciser certains chiffres: seulement 15% des contribuables genevois seraient touchés par la limitation de la déduction des frais de transport prévue par le projet de loi initial, soit 500 F. Mais comme l'a très justement dit mon collègue rapporteur de majorité, et comme il est expliqué dans l'exposé des motifs, nous attaquons là directement les débats budgétaires. Ce projet de loi tel qu'initialement voulu par le Conseil d'Etat permettrait un gain de 28 millions de francs en recettes supplémentaires, dans un équilibre budgétaire que le Conseil d'Etat qualifie lui-même d'extrêmement difficile, précaire; il est certain qu'en s'attaquant à ce projet de loi et en portant par amendement le montant maximal de déduction à 3655 F, la majorité de la commission s'attaque à l'équilibre budgétaire. En effet, la majorité fait alors l'impasse sur 14 millions de francs; et quand on voit l'équilibre prévu par le Conseil d'Etat, il est certain que se priver de 14 millions de francs signifie faire l'impasse sur le vote d'un budget, ou signifie voter un budget déficitaire.
Mais surtout, comme l'a rappelé mon collègue rapporteur de majorité, il est vrai que le canton de Genève souffre véritablement d'une crise des recettes, et il le sait bien: on s'en aperçoit à la lecture des rapports de gestion, des différentes questions posées et des affirmations du Conseil d'Etat, depuis quinze ans, le canton de Genève...
Le président. Vous prenez sur le temps de votre groupe.
M. Romain de Sainte Marie. Merci, Monsieur le président. ...a subi baisses d'imposition sur baisses d'imposition, et ce pour un montant de plus d'un milliard de francs de pertes fiscales cumulées, et, de plus, à quelques années de la troisième réforme de l'imposition des entreprises, pour laquelle le Conseil d'Etat souhaite un taux unique à 13% qui causerait un demi-milliard de pertes fiscales. La minorité a tendance à penser que la droite souffre d'une certaine schizophrénie, et le rapporteur de majorité ne pourra pas contredire cela: le Conseil d'Etat fait des propositions de recettes supplémentaires; les groupes parlementaires des partis composant ce même Conseil d'Etat refusent ces recettes supplémentaires, amendent les projets de lois concernés ou les refusent directement. Même schizophrénie dans les propos du rapporteur de majorité qui mentionne le fait que c'est la gauche qui a causé cette dette, la gauche qui a amené une prétendue crise des charges, alors qu'en réalité, c'est bien la droite qui gouverne et a la majorité dans ce canton depuis un certain temps. Aujourd'hui, cette même droite peut revendiquer le bilan d'une dette qui atteint 13 milliards de francs et de la crise des recettes que nous connaissons. La minorité vous invite donc à accepter l'amendement du Conseil d'Etat visant à rétablir la situation initiale et à engranger les 28 millions de recettes voulues pour atteindre l'équilibre budgétaire.
M. Sandro Pistis (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il faut se recentrer sur une certaine réalité: aujourd'hui, qui bénéficie de la déduction pour frais de déplacement ? En tout cas pas les Genevois ! Je vois rarement un Genevois qui peut déduire 60 km par jour de frais de déplacement. Concrètement... (Remarque.) ...c'est un juste retour à la problématique des frontaliers qui, eux, peuvent déduire jusqu'à 10 800 F de frais de déplacement. Les 28 millions que le canton va pouvoir récupérer, ils le seront du côté de la France, des frontaliers, pas du côté des Genevois. C'est pour cette raison que le groupe MCG soutiendra le projet de loi tel que présenté par le Conseil d'Etat. Je vous ferai remarquer qu'un calcul a été fait à la commission fiscale: un frontalier peut déduire jusqu'à 10 800 F de frais de déplacement, pour autant qu'il parcoure 60 km. Je vous laisse imaginer celui qui vient de Grenoble... (Remarque.) ...ou de Paris: l'Etat devrait quasiment lui rembourser les frais de déplacement, je pense ! La pratique actuelle est donc scandaleuse. Ce projet de loi est tout à fait correct, il permettra de faire entrer 28 millions dans les caisses de l'Etat; nous le soutiendrons donc tel que présenté par le Conseil d'Etat. (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Eric Stauffer pour une minute trente.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. En complément à ce que vient de dire mon collègue, évidemment, nous soutiendrons l'amendement des socialistes pour réduire à 500 F le plafond de la déduction fiscale. Pour répondre au rapporteur de majorité qui nous dit que tous les cantons de Suisse, notamment Vaud, ont au moins prévu 3000 F, il faudrait peut-être aussi rappeler que la superficie du canton de Vaud n'a rien à voir avec celle du canton de Genève; et qu'évidemment, si on adapte à la superficie du territoire, 500 F sont largement assez pour les Genevois. Par contre, comme l'a dit mon collègue, les frontaliers vont passer à la caisse. Eh oui, Mesdames et Messieurs, on y arrive ! J'aimerais aussi en profiter pour rappeler l'initiative sur les 300 millions que nous donnons à la France.
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Eric Stauffer. Je conclus ! Sachez que pour la Berne fédérale, ces 300 millions sont calculés, dans les comptes de l'Etat de Genève auprès de Berne, comme une subvention, une aide, au même titre que la coopération internationale pour les pays en voie de développement. Voilà où on en est à Genève !
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe des Verts soutiendra le projet de loi tel que déposé par le Conseil d'Etat... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et cela pour plusieurs raisons. D'abord, comme nous l'avons souvent indiqué, nous estimons que dans le cadre du budget, il est important qu'il y ait une certaine symétrie des efforts, à savoir que si l'on doit rechercher des économies, on doit également rechercher certaines nouvelles recettes, et en ce sens, nous saluons l'effort du Conseil d'Etat pour faire un premier pas dans notre direction. Ce projet de loi vise en effet à limiter les déductions liées aux frais de déplacement, et nous trouvons en plus que cela constitue un excellent signal écologique: car lorsqu'on voit l'impact environnemental des déplacements professionnels, par le transport routier en particulier, il faut inciter les gens à vivre près de leur lieu de travail. (Remarque.) Avec ce nouveau plafond, nous allons clairement inciter les gens non seulement à venir vivre près de leur travail, mais en plus, à utiliser davantage les transports publics, ce qui nous semble hautement souhaitable à l'heure actuelle. De trop nombreux pendulaires occupent nos routes, bloquent l'agglomération: ici, nous avons l'occasion de les inciter un peu plus à utiliser les transports publics. Enfin, j'aimerais souligner un détail - ce n'est pas un détail, mais un fait assez piquant: les partis qui aujourd'hui s'opposent à ce projet de loi sont les mêmes qui à longueur d'année se plaignent qu'il n'y ait pas assez de contribuables qui paient des impôts à Genève. Lorsque vous avez enfin l'opportunité, Mesdames et Messieurs du PLR, de faire payer davantage d'impôts à la population en limitant les déductions fiscales, vous refusez de faire ce geste-là, et donc, vous vous contredisez très clairement: on ne peut pas d'un côté se plaindre qu'une partie de la classe moyenne qui devrait payer des impôts n'en paie pas, et de l'autre, continuer allégrement à prévoir toutes sortes de déductions plus abracadabrantes les unes que les autres. Pour un peu de logique dans le débat, je vous incite donc à revoir votre position: avec ce PL, davantage de contribuables paieront des impôts, et cela semble être votre objectif. Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC). Une fois de plus, incapable de mener ses réformes structurelles à bien, le Conseil d'Etat revient avec une hausse d'impôts. Oui, Mesdames et Messieurs, ce projet de loi n'est rien d'autre qu'une hausse d'impôts qui va fortement pénaliser les résidents de ce canton. Ce qui est plutôt surprenant, c'est que le MCG, qui crie à qui veut bien l'entendre qu'il défend les résidents genevois, s'apprête dans ce cas à les pénaliser, avec un montant de 500 F de déduction. Je suis désolé: vous dites vouloir rétablir une équité fiscale, mais c'est totalement faux ! Une bonne partie des travailleurs de ce canton, aujourd'hui, ne peuvent tout simplement pas prendre les transports publics pour se déplacer vers leur travail. Si l'on est travailleur de nuit, il n'y a plus de bus; suivant ses horaires ou son lieu de travail, un ouvrier ne peut tout simplement pas prendre le bus et est obligé d'avoir un véhicule privé. Ce sont ces gens-là que vous allez pénaliser, avec un montant plus que misérable de 500 F de déduction. C'est pour cela que le groupe UDC a déposé un amendement portant la somme à 6000 F afin de ne toucher aucun résident du canton. De plus, quelque chose n'a pas encore été dit ce soir: finalement, ce texte vise qui, en premier lieu ? Il vise le frontalier. Le Conseil d'Etat ne l'a dit qu'à demi-mot en commission; mais c'est parce qu'il a un problème avec le statut de quasi-résident, qui permet aux frontaliers de déduire la totalité de leurs frais de déplacement, dont le montant peut représenter jusqu'à vingt ou trente mille francs. Ce sont ces personnes-là que le Conseil d'Etat vise. Simplement, sur un faux prétexte prétendument écologiste, il propose de ramener le tout à 500 F et de pénaliser ainsi également le résident, par une augmentation d'impôts, comme je l'ai dit. C'est pour cette raison que nous vous proposerons tout à l'heure un amendement portant la déduction maximale à 6000 F. Quant à la position du groupe, elle dépendra bien évidemment des votes sur les amendements. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
Mme Béatrice Hirsch (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien entrera en matière sur ce projet de loi et acceptera l'amendement présenté pour réduire la déduction à 500 F, ainsi que le Conseil d'Etat l'a proposé à la base. Certes - on l'a déjà dit - ce projet de loi est d'abord lié au budget, avec un certain nombre d'autres recettes supplémentaires et d'économies; il s'agit d'assurer un revenu de 28 millions. Mais avant cela, il faut savoir si cette mesure est juste par rapport à ce qui existe aujourd'hui. Le canton de Genève, on l'a dit, est exigu, ce qui n'implique pas autant de trajets pour ses habitants: malgré les propos de M. Florey, ce ne sont certainement pas les habitants de ce canton qui vont être pénalisés par ce projet de loi. A l'intérieur de ce canton, les trajets et le temps qu'on leur consacre ne sont pas immenses. Seront donc, ou seraient pénalisés principalement les habitants du canton qui vont travailler à l'extérieur. (Remarque.) Bien sûr, il y en a, qui vont peut-être dans le canton de Vaud ou en France voisine, mais ce n'est pas une majorité. (Remarque.) Il s'agit donc de faire payer plus des gens qui habitent loin. On a parlé à juste titre des frontaliers. En l'occurrence, notre position - accepter de faire payer davantage les personnes habitant la France voisine - n'est pas simplement en lien avec la distance: simplement, de l'autre côté de la frontière, plus on s'éloigne, moins la vie est chère; et les personnes qui habitent là-bas peuvent, en plus de cela, déduire un montant conséquent s'agissant de leurs impôts payés à Genève.
Par ailleurs - Mme Forster Carbonnier l'a relevé - le rapporteur de majorité rappelle qu'un tiers des habitants de ce canton ne paie pas d'impôts. Mais voter ce projet de loi avec le plafonnement à 500 F fera revenir un certain nombre d'habitants dans les rangs des contribuables. C'est logique: plus il y a de déductions, plus vite on arrive à ce taux zéro d'impôts payés dans le canton.
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Béatrice Hirsch. Merci beaucoup, Monsieur le président. J'aimerais enfin revenir sur un point abordé par le rapporteur de majorité: il disait que Genève est le canton où l'on paie le plus d'impôts. En l'occurrence, malheureusement, on peut s'inscrire en faux: un certain nombre de contribuables - et c'est bien - ont été touchés par la baisse d'impôts que nous avons votée en 2010. Aujourd'hui, avec les réformes fiscales que nous avons faites à l'époque, on ne peut plus dire que Genève est le canton où l'on paie le plus d'impôts. C'est le cas pour bon nombre de différentes catégories; certaines paient plus d'impôts, mais d'autres en paient infiniment moins que les habitants du canton de Vaud.
Pour toutes ces raisons, le PDC vous encourage à voter ce projet de loi tel que proposé par le Conseil d'Etat, avec l'amendement pour le plafonnement à 500 F. Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Madame la députée. La parole est à M. le député Lionel Halpérin pour une minute trente.
M. Lionel Halpérin (PLR). Merci, Monsieur le président. Une fois encore, une partie de ce parlement veut s'attaquer à l'impôt, à la classe moyenne, c'est-à-dire aux personnes concernées par ce projet. Il n'est pas surprenant que la gauche soutienne ce projet: c'est désolant, mais récurrent de la part de ses rangs. En revanche, entendre le MCG, qui nous a expliqué à longueur de séance qu'il n'y aurait pas de nouvelle hausse d'impôts, qu'il n'y a pas de crise des recettes mais des dépenses - ce sur quoi on peut être entièrement d'accord avec eux - entendre le MCG nous dire maintenant qu'il va soutenir ce projet, pour des motifs qui s'avèrent de faux motifs, excusez-moi, mais je m'inscris en faux là contre, et j'aimerais expliquer en deux mots pourquoi. (Brouhaha.) Si l'on m'écoute, on aura peut-être envie de réfléchir un peu différemment dans ce groupe. Si ce projet de loi est voté avec le montant à 500 F, il touche 38 536 personnes domiciliées à Genève...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Lionel Halpérin. ...et seulement 8967 personnes domiciliées hors canton. 82% des personnes touchées par ce projet de loi, si on le vote avec la somme de 500 F, sont donc des résidents genevois. Cela, il faut le dire. En revanche, si on vote le projet tel que ressorti du rapport de majorité, 6481 personnes domiciliées à Genève seraient touchées contre 7744 domiciliées hors du canton; et là, effectivement, on touche les frontaliers principalement et non les résidents genevois. Ce que vous proposez de voter maintenant...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Lionel Halpérin. ...se fera au détriment des résidents genevois et non des frontaliers. J'ajouterai une dernière chose: on a parlé de la superficie; c'est juste, mais Bâle-Ville, dont la superficie est plus restreinte que celle de Genève, a placé le plafond à 3800 F, et ça, il faut le savoir aussi. (Quelques applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la députée Lydia Schneider Hausser pour une minute trente.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Au parti socialiste, nous nous sommes toujours engagés à travailler sur les niches fiscales, pour trouver un dénominateur commun et si possible des revenus supplémentaires; ça, personne ne l'ignore. Ici, le dénominateur commun proposé par le Conseil d'Etat, qui nous semble pertinent, est de 500 F, soit, en gros, l'abonnement TPG. Fiscalement, c'est juste: pour qu'une déduction soit juste, il faut qu'il y ait un plafond applicable à tout le monde. Or, dans ce cas, autant les personnes qui habitent au centre-ville que celles qui habitent dans le canton ou que d'autres personnes encore pourront déduire un montant maximum identique. Si nous portons le montant à 6000 F, certains ne pourront déduire que 500 F, d'autres 6000 F, d'où une injustice. Et l'injustice se répercute, Mesdames et Messieurs, comme on l'a dit, sur le positionnement sur l'échelle des traitements fiscaux.
Pour répondre à M. Pistis, quand il dit que le MCG votera cette loi parce qu'elle touche principalement des frontaliers...
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Lydia Schneider Hausser. ...je m'inscris en faux: il y a des frontaliers, mais aussi beaucoup de Genevois pendulaires, soit vers Lausanne, soit vers d'autres lieux en Suisse, soit vers l'Europe. Effectivement, ceux-là auront aussi un très grand effort à faire, et cela représente un certain nombre de personnes.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, oui, ce projet de loi veille à ordonnancer, à insérer dans notre législation cantonale une mise en conformité avec le droit fédéral; oui, c'est nécessaire de le faire dans les délais prévus; mais ce projet de loi a aussi, évidemment - nous ne le cachons pas - un lien direct avec le projet de budget 2016. Dans le cadre de la tentative du Conseil d'Etat - tentative réussie à son sens - de trouver un équilibre judicieux dans les efforts demandés au niveau des prestations sur le moyen et le long terme, mais également dans le cadre du budget 2016, pour lequel il est nécessaire de parvenir autant que faire se peut à un équilibre, le Conseil d'Etat a proposé l'élimination de ce qu'il considère comme des niches fiscales. Sont concernés ce projet de loi et celui que nous allons traiter dans un petit moment. A notre sens, d'un point de vue fiscal, on introduit une équité, notamment en unifiant la limite pour les utilisateurs des transports individuels et ceux des transports publics. Nous estimons qu'avec un tel projet, nous sommes en phase avec la politique cantonale qui vise à l'utilisation des transports publics, utilisation qui au demeurant aurait des effets très positifs également sur les embouteillages sur nos routes. Nous estimons par ailleurs que l'effort demandé reste mesuré: l'impact sur les habitants de Genève est de 15%; il nous paraît raisonnable et juste. Il a été dit à plusieurs reprises, et c'est un fait, qu'il y a des effets de seuil dans notre législation fiscale; c'est un fait que les déductions de ce type contribuent à accroître et à renforcer cet effet de seuil. Une certaine partie de nos contribuables, celle qui paie peu ou pas d'impôts, bénéficie directement de ce genre de mesure. Du point de vue de l'équité fiscale et aussi de l'élargissement du cercle des personnes qui paient des impôts à Genève, cette mesure est juste.
Le Conseil d'Etat dépose un amendement pour revenir au projet de loi initial, avec la limitation à 500 F. Nous vous prions de bien vouloir réserver un bon accueil à cette limite à 500 F, et plus globalement à ce projet de loi.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous pouvons passer au vote sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 11685 est adopté en premier débat par 67 oui contre 26 non et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. A l'article 29, alinéa 1, lettre a, nous sommes saisis de deux amendements. Le premier est déposé par le Conseil d'Etat. En voici le libellé:
«Art. 29, al. 1, let. a (nouvelle teneur)
a) les frais de déplacement nécessaires entre le domicile et le lieu de travail jusqu'à concurrence de 500 F;»
Je vais vous faire voter sur cet amendement...
M. Christo Ivanov. J'avais demandé la parole !
Le président. C'est demandé si gentiment que je vous la passe, Monsieur Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC). Merci, Monsieur le président. Vous êtes toujours très pressé, mais je pense que les députés ont le droit d'avoir un minimum de temps pour réagir sur les amendements. Il y a un règlement, il serait bon de l'appliquer, merci !
Le président. Vous avez vingt secondes.
M. Christo Ivanov. J'aimerais quand même rappeler une chose: cet amendement est inique, car 82% des Genevois sont touchés par cette loi, dont des ouvriers, dont des travailleurs actifs dans les zones industrielles et qui n'ont pas le choix de leur lieu de travail. Je m'étonne que le MCG soutienne cet amendement catastrophique. L'UDC se réserve la possibilité de lancer un référendum contre cette loi. (Exclamations. Applaudissements. Commentaires.)
Une voix. Oui !
Le président. Je vous remercie. Monsieur Pistis, vous avez douze secondes.
M. Sandro Pistis (MCG). Merci, Monsieur le président. J'invite les commissaires à relire le projet de loi: un frontalier peut déduire jusqu'à 8000 F de frais de déplacement. C'est clairement indiqué dans le texte. Je ne connais aucun Genevois qui peut déduire 8000 F de frais de déplacement.
Le président. Merci, Monsieur le député. J'invite les députés à voter sur l'amendement du Conseil d'Etat.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 58 oui contre 33 non.
Mis aux voix, l'art. 29, al. 1, lettre a (nouvelle teneur), ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'art. 67, al. 2 (nouvelle teneur), est adopté, de même que l'art. 72, al. 11 (nouveau).
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Troisième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés. (Commentaires.)
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement présenté par MM. Florey et Ivanov, à nouveau à l'article 29, alinéa 1, lettre a. Il consiste à remplacer la somme de 500 F - qui vient d'être rétablie par l'amendement du Conseil d'Etat que vous avez voté - par celle de 6000 F. (Exclamations. Remarque.) Vous n'avez plus de temps de parole. J'invite l'hémicycle à se prononcer.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 32 oui.
Mis aux voix, l'art. 29, al. 1, lettre a (nouvelle teneur), est adopté, de même que les art. 67, al. 2 (nouvelle teneur), et 72, al. 11 (nouveau).
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Mise aux voix, la loi 11685 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 59 oui contre 33 non.