République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de M. Antoine Barde, président.

Assistent à la séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

RD 1104
Hommage à Mme Yvette ROSSELET, députée de 1961 à 1965, décédée

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons appris avec tristesse le décès de Mme Yvette Rosselet à l'âge de 88 ans.

Elue au Grand Conseil sur la liste du parti socialiste en 1961, elle siégea jusqu'en 1965, soit durant la première législature qui suivit le vote de 1960 introduisant le suffrage féminin à Genève. Elle fit ainsi partie des huit premières femmes élues députées au parlement genevois.

Pendant son mandat, elle s'exprima à plusieurs reprises lors des débats budgétaires et s'intéressa également aux questions liées à la justice et aux prisons. Elle fut d'ailleurs rapporteuse intermédiaire de la commission des visiteurs officiels des prisons pour l'année 1964.

A la famille de Mme Rosselet nous disons toute notre sympathie en ce moment douloureux. Pour honorer sa mémoire, je vous prie d'observer, Mesdames et Messieurs les députés, un instant de silence. (L'assemblée, debout, observe un moment de silence.)

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Pierre Maudet et Mauro Poggia, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Cyril Aellen, Beatriz de Candolle, Michel Ducret, Vera Figurek, Florian Gander, Sandra Golay, Vincent Maitre, Philippe Morel, Jean-Charles Rielle, Eric Stauffer, Pierre Vanek et Daniel Zaugg, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Geneviève Arnold, Christophe Aumeunier, Maria Casares, Christian Decorvet, Pierre Gauthier, Charles Selleger et Alexandre de Senarclens.

Discussion et approbation de l'ordre du jour

Le président. La commission d'enquête parlementaire, instituée par la motion 2252, nous demande l'ajout et l'urgence du RD 1103, à savoir le rapport intermédiaire de la commission d'enquête parlementaire chargée de faire rapport au Grand Conseil sur les dysfonctionnements ayant conduit à la mort d'Adeline M.

Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du rapport divers 1103 est adopté par 63 oui (unanimité des votants).

Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport divers 1103 est adopté par 65 oui (unanimité des votants).

Le président. Cet objet sera traité cet après-midi à 14h.

Communications de la présidence

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que ce samedi aura lieu la quinzième rencontre avec la communauté internationale. Celles et ceux qui ne se seraient pas inscrits peuvent encore le faire.

Madame Schneider Hausser, je vous prie de m'excuser, je vous ai oubliée ! Je vous passe la parole.

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Ce n'est pas très grave ! Je voulais simplement annoncer que le groupe socialiste désire retirer la proposition de résolution 720 pour des taxes d'études accessibles à tous. Cela concernait le point 4 de l'ordre du jour !

Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Avec mes excuses ! Il est pris note de ce retrait.

Correspondance

Le président. Vous avez trouvé sur vos places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.

Observations complémentaires de l'Union des cadres de l'administration cantonale genevoise et consorts dans son recours déposé contre la loi 11328 modifiant la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers (LTrait) (Suppression du 14e salaire des cadres supérieurs, dans un esprit de partage et de solidarité) du 29 janvier 2015 (Copie transmise à la Commission ad hoc sur le personnel de l'Etat) (voir C 3462, C 3467, C 3470 et C 3475). (C-3485)

Décision, du 23 juillet 2015, de la Chambre administrative rayant la cause du rôle suite au retrait du recours déposé par M. MONTANT Dominique c/ la loi 11152 modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Bardonnex (création d'une zone de développement 4B, située au chemin des Forches à Croix-de-Rozon) (transmis à la Commission d'aménagement) (voir C 3333, C 3353, C 3380 et C 3389). (C-3486)

Lettre du 25 juin 2015 de MM. DROIN Antoine, BARRILLIER Gabriel, LOSIO Pierre, GAUTIER Renaud, METTAN Guy et LEYVRAZ Eric, anciens présidents du Grand Conseil, à propos du PL 11472 ouvrant un crédit d'investissement de 19'356'000F pour la transformation du bâtiment de l'Hôtel de Ville. (C-3487)

Arrêt du 30.07.2015 de la Chambre constitutionnelle rejetant le recours déposé par l'Union des cadres de l'administration cantonale genevoise et consorts contre la loi 11328 modifiant la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers (LTrait) (Suppression du 14e salaire des cadres supérieurs, dans un esprit de partage et de solidarité) du 29.01.2015 (Copie transmise à la Commission ad hoc sur le personnel de l'Etat) (voir C 3462, C 3467, C 3470, C 3475 et C 3485). (C-3488)

Lettre de M. TSCHUDI Pierre-Alain, maire de la Ville de Meyrin, relative à la résolution n°2015-20 demandant l'interdiction de tout trafic aérien commercial entre 23h00 et 6h00 du matin (transmis à la commission de l'économie). (C-3489)

Lettre de Mme PASCHE LORIGNY Marthe au Grand Conseil à propos de la suppression par la poste du versement au domicile des rentes AVS (C-3490)

Arrêt de la Chambre administrative de la Cour de justice du 11 août 2015 rejetant les recours de SOKA GAKKAI SUISSE et M. CHARLET François et consorts contre la loi n° 11030 modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Versoix - Plan n° 29779-541 (transmis à la Commission d'aménagement) (voir C 3378, C 3379, C 3410, C 3411, C 3440 et C 3449). (C-3491)

Invitation au Grand Conseil à se déterminer sur l'effet suspensif et sur le fond dans le recours de MM. GERMANN Christophe et KUNZI Daniel contre l'arrêt de la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice du 15 juin 2015 (A/3687/2014-ABST) (Loi 11301 accordant une aide financière à la Fondation romande pour le cinéma pour les années 2013 à 2016) (Copie transmise à la Commission des finances) (C-3492)

Annonces et dépôts

Le président. Les pétitions suivantes, parvenues à la présidence, sont renvoyées à la commission des pétitions:

Pétition contre la prolongation du tram 15 depuis l'arrêt « Palettes » à Lancy, par le chemin des Palettes, l'avenue Curé-Baud et la route de Base et desservant les Cherpines jusqu'à Perly (P-1948)

Pétition pour l'ouverture du tunnel de Châtelaine au trafic voyageur (P-1949)

Pétition contre les nuisances et le bruit causés par les établissements de la rue de l'Ecole-de-Médecine et ceux de l'angle Ecole-de-Médecine/boulevard Carl-Vogt (P-1950)

Pétition pour une commission d'enquête à l'encontre de l'Office du logement de Genève (P-1951)

Pétition pour le droit à l'information sur le projet de prolongation du tram 15 de Lancy à Saint-Julien durant les phases d'études et avant la demande de concession au département fédéral (P-1952)

Pétition en faveur d'une intégration respectueuse du tram 15 à Plan-les-Ouates (P-1953)

Pétition 1948 Pétition 1949 Pétition 1950 Pétition 1951 Pétition 1952 Pétition 1953

Le président. Monsieur Jacques Béné, vous avez demandé la parole ?

M. Jacques Béné (PLR). Merci, Monsieur le président, c'est pour une annonce: le PLR retire le PL 10872 concernant l'utilisation du produit de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations, puisque le Conseil d'Etat nous a donné satisfaction.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député, il est pris note de ce retrait. Nous passons aux élections... (Remarque.) Monsieur Baertschi, vous avez la parole.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Au nom du MCG, je reprends le PL 10872 qui vient d'être retiré par le PLR.

Le président. Très bien, il est pris note de cette reprise.

E 2274
Election d'un membre (S) à la Commission électorale centrale, en remplacement de M. Emmanuel DEONNA (S), démissionnaire - entrée en fonction immédiate, durée du mandat : jusqu'au 31 mai 2018

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Gabriel Barta (S).

Etant seul candidat, M. Barta est élu tacitement.

R 779
Proposition de résolution de Mmes et MM. Lisa Mazzone, Olivier Cerutti, Jean-Michel Bugnion, Sophie Forster Carbonnier, Boris Calame, Frédérique Perler, Yves de Matteis, Bertrand Buchs, Vincent Maitre, Mathias Buschbeck : Sauvons les barrages et l'énergie hydraulique suisses (Résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonale)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 19 et 20 février 2015.

Débat

Le président. Nous poursuivons le traitement des urgences avec la R 779, qui est classée en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à la première signataire, Mme Lisa Mazzone.

Mme Lisa Mazzone (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous n'êtes pas sans savoir que la commission de l'énergie du Conseil des Etats a voté en mai dernier une résolution visant à prévoir des mesures d'accompagnement pour notre énergie hydraulique suisse. Et si elle a décidé de planifier des mesures d'aide aux barrages suisses, c'est parce que leur santé financière est actuellement en danger, bien qu'ils représentent 60% de la production électrique de notre pays. C'est donc une production indigène qui a un immense potentiel et qui nous apporte énormément d'énergie, mais elle est mise à rude épreuve et à rude concurrence puisque, comme vous le savez... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...plusieurs éléments de la situation européenne, notamment, impliquent un prix de l'électricité au plus bas, ce qui pénalise nos barrages. En conséquence, des énergies plus sales ou qu'on achète ailleurs se taillent la part du lion, tandis que notre énergie hydraulique suisse subsiste difficilement dans ces conditions.

C'est la raison pour laquelle nous vous demandons d'accepter cette proposition de résolution, qui demande que l'on introduise... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...dans le coût de l'électricité ses externalités, à savoir la charge qu'elle produit, en matière environnementale notamment, mais aussi, quand on pense par exemple à l'énergie nucléaire, s'agissant des coûts qui seront nécessaires pour démanteler les centrales à terme. J'aimerais spécifier que cette résolution touche particulièrement le charbon allemand, qui connaît actuellement un regain de production et qui nous inquiète énormément, puisqu'il représente une pollution importante, qu'il ne peut accompagner dignement les énergies renouvelables, comme c'est le cas en Allemagne, et que nous devons, nous en Suisse, valoriser notre énergie hydraulique et non contribuer à la production de charbon allemand extrêmement polluant.

Dès lors, nous vous proposons d'inviter l'Assemblée fédérale à introduire une taxe sur l'électricité non renouvelable qui prenne en compte les externalités dans le coût de l'électricité. Nous vous suggérons également d'opérer des distinctions à l'intérieur de ces énergies non renouvelables, dites sales, en prévoyant par exemple des réductions pour l'électricité produite dans les centrales à gaz, car cette énergie-là ne nous semble pas représenter la même pollution et le même risque pour l'environnement.

Enfin, et je dirais que c'est là le plus important, la troisième invite propose d'allouer le produit de cette taxe aux économies d'énergie et aux énergies renouvelables, en favorisant l'économie locale. C'est sur ce point que je souhaite insister, parce qu'aujourd'hui il y a un potentiel de développement d'une économie locale, qui est d'ailleurs en route, grâce aux énergies renouvelables et aux économies d'énergie. En effet, vous le savez, nous avons énormément de rénovations à faire, notamment, qui vont mobiliser une partie de notre économie locale, et c'est pourquoi nous vous proposons d'introduire cette taxe et de la réinjecter dans l'économie verte et dans les économies d'énergie, afin de favoriser le tissu local et d'arrêter justement de payer chaque année plusieurs milliards de francs à l'étranger pour notre électricité, tout en mettant parallèlement en péril nos barrages suisses, qui sont notre force hydraulique, puisque, je le répète, ils constituent 60% de l'électricité produite aujourd'hui. Pour toutes ces raisons, je vous invite à soutenir cette proposition de résolution. (Quelques applaudissements.)

M. Benoît Genecand (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, on sent que les écologistes ont un peu perdu le nord: il leur suffit aujourd'hui de mettre le terme «renouvelable» après «énergie» pour justifier toute taxe et toute subvention. Pourtant, les mêmes écologistes nous disaient il y a encore vingt ans que les choses allaient se régler d'elles-mêmes, le pétrole se raréfiant tellement qu'il allait devenir hors de prix. On était parti pour payer 200 dollars le baril, or tout ça ne s'est pas produit: le pétrole est à un prix qu'on n'a plus connu depuis une soixantaine d'années. On se gratte donc la tête, et on nous dit que c'est parce que ça n'intègre pas les externalités. Alors celui qui comprend ce que ça signifie peut se lever, parler devant cette assemblée et essayer de nous expliquer, mais moi je ne comprends pas ce que ça veut dire ! La réalité, c'est que le prix du pétrole est très bas.

Une autre réalité, Mesdames et Messieurs, c'est que le prix de l'électricité est extrêmement bas, et c'est là qu'on voit le paradoxe extraordinaire des politiques de gauche écologistes: si ce prix de l'électricité est bas, c'est parce que les Allemands ont décidé de mettre 20 milliards de francs de subventions par année dans leurs énergies renouvelables, tout en continuant à faire turbiner - pardonnez-moi l'expression - leurs centrales à charbon. Les Allemands produisent donc une électricité très peu chère, ils inondent le marché européen, ils le perturbent, et qu'est-ce qu'on dit en Suisse ? «Sauvons nos barrages et subventionnons nous-mêmes notre électricité !» Le parti de la décroissance nous dit donc, face à un phénomène de surproduction, qu'il faut subventionner et produire encore plus, parce que c'est local et bien de chez nous... Mesdames et Messieurs, c'est du grand n'importe quoi !

Quant à l'électricité hydraulique, c'était et c'est toujours notre fierté, c'est une force de la Suisse qui, pendant des années et aujourd'hui encore, a produit une électricité stable, servant de pile à toute l'Europe, et pendant des années, Mesdames et Messieurs, les producteurs d'électricité se sont enrichis de manière extrêmement puissante, ont fait des bénéfices, ont payé des taxes et ont distribué de l'argent aux communautés locales, mais manifestement ils n'ont pas tellement gardé d'argent pour les périodes où l'électricité est plus basse. Et puis pour sauver Alpiq, une entreprise privée, il faudrait que les écologistes viennent nous demander des taxes...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Benoît Genecand. On va donc piquer de l'argent dans la poche des consommateurs pour sauver les grands producteurs qui n'ont pas su être prévoyants ?! Mesdames et Messieurs les députés, c'est un peu n'importe quoi: refusez cette proposition de résolution, laissez l'électricité gérer elle-même sa production et surtout n'entrez pas dans ce manège électoraliste. (Rires. Exclamations.)

M. Bernhard Riedweg (UDC). Cette proposition de résolution part d'un bon sentiment... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...mais elle ne tient pas compte, dans la fixation du prix de l'électricité en Suisse, de la loi de l'offre et de la demande. La forte chute des prix de l'électricité sur le marché européen a pour origine une meilleure gestion de la production et de la distribution de l'électricité en Suisse. Contrer cet état de fait fausse le prix de l'électricité. Mais il est vrai que les grands groupes suisses producteurs d'électricité provenant de l'hydraulique voient leurs marges diminuer drastiquement, phénomène qui les met en danger, étant donné qu'ils atteignent ou vont atteindre la limite de leur rentabilité. Economiquement parlant, la baisse du prix de l'électricité se répercute toutefois sur les coûts de production et de distribution des services et marchandises produits par des entreprises en Suisse, ce qui favorise la consommation et augmente le pouvoir d'achat de la population.

A long terme, il n'est pas concevable pour les producteurs d'électricité étrangers de vendre leur courant à l'exportation au-dessous de leur prix de revient, car cela les mènerait indubitablement dans une impasse.

Il est évident que, la nostalgie aidant, nous aurions tendance à défendre l'électricité produite par les centrales hydrauliques locales grâce à nos barrages. Mais soutenir l'industrie électrique suisse au travers de taxes prélevées sur les particuliers et les sociétés pour assurer une aide publique fédérale aux barrages signifierait qu'elle serait soutenue artificiellement, ce qui provoquerait une distorsion insoutenable de la concurrence si cette politique était appliquée à long terme.

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de refuser cette résolution.

M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, on a tous pu voir il y a trois jours quels étaient les effets boursiers, notamment par rapport au dollar qui, à lui seul, a quand même perdu 1,7 point lundi soir, ce qui signifie qu'un portefeuille qui valait 30 000 francs suisses au début de l'année n'en valait plus que 28 000.

La répercussion du prix du baril de pétrole se faisait souvent en adéquation avec le prix du dollar et notamment du franc suisse. Dans ces circonstances, je vous laisse imaginer quelle sera l'évolution du prix de l'électricité et comment l'industrie hydroélectrique passera ce cap ! Mesdames et Messieurs, comment la Confédération réagira-t-elle au niveau du prix coûtant et, en finalité, quelle sera la dévaluation des actions qui, malgré tout, ont un impact sur le grand Etat du canton de Genève, notamment les Services industriels ?

C'est vrai, la promotion des grandes centrales hydroélectriques pose problème, et ce ne sont pas seulement les signataires - dont je fais partie - de cette proposition de résolution qui le disent: on pouvait également lire dans le dernier courrier du mois d'août de l'usam que nos centrales étaient effectivement en danger. La concurrence des subventions existe bel et bien, et l'Allemagne a fait chuter le prix de l'électricité à un niveau si bas que la puissance hydroélectrique suisse ne peut plus être rentable. Il y a donc un problème !

Mesdames et Messieurs, la population de notre pays est très attachée à ses barrages et en est très fière, elle est dès lors en droit de se poser ce type de questions. Entre imposition et subventions, les Chambres fédérales devront vraisemblablement débattre de ces principes, et elles le feront, je crois, dès cet automne, au travers de la Chambre des Etats. Trop de contradictions sur un marché fragile poseront inévitablement des problèmes économiques et, pour toutes ces raisons, cette proposition de résolution a du sens. Par conséquent, même si l'on n'est pas forcément d'accord avec tout ce qui est écrit, je pense que cette question doit être posée et le parti démocrate-chrétien vous invite donc à voter ce texte. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Mme Danièle Magnin (MCG). En ce qui concerne les énergies renouvelables, nous estimons que le canton et la Suisse ne font pas assez pour éviter que nous ayons à dépendre de l'étranger pour notre approvisionnement en énergie. Je vous rappelle que chaque fois que nous achetons par exemple du pétrole ou du gaz, au lieu de profiter des énergies dont nous disposons ici - qui peuvent être justement l'énergie hydraulique, voire le bois, pour ce qui est du chauffage - chaque fois que nous n'utilisons pas les panneaux solaires, qu'ils soient photovoltaïques ou à eau chaude, eh bien nous contribuons à dépenser de l'argent et à enrichir des pays qui ensuite prennent des positions politiques contre nous, contre l'Europe, contre la Suisse, et qui ont des valeurs différentes. Pour moi c'est un élément très important !

L'autre point très important a trait aux besoins de la population. Nous avons besoin d'une autonomie, et cela fait partie des besoins essentiels du peuple, des besoins situés tout en bas de la pyramide, si je me réfère par exemple à l'échelle de Maslow. Et le peuple, c'est chacun d'entre nous ! Aux yeux du MCG, il est donc absolument déterminant de soutenir l'énergie hydraulique produite en Suisse, même s'il faut l'aider un certain temps, tout en sachant qu'il y a quand même une menace, une épée de Damoclès, à savoir le réchauffement climatique et le fait que nous aurons moins d'eau et moins d'énergie.

Quoi qu'il en soit, il est essentiel que l'énergie soit soutenue et reste principalement aux mains des habitants de ce pays, et non pas d'actionnaires et de sociétés plus ou moins étrangères, dans lesquelles on a, ou pas, des participations. L'énergie ne doit pas être une question de marché: c'est un bien fondamental, comme la santé, l'éducation ou les routes, et c'est pour cela que le MCG votera cette proposition de résolution.

M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes saluent cette proposition de résolution déposée par les Verts et cosignée par le PDC. C'est vrai que la question de la production hydraulique et de l'énergie renouvelable produite en Suisse est extrêmement importante aujourd'hui, mais les socialistes souhaitent quand même rappeler l'une des raisons principales de cette situation, à savoir le fait de considérer l'électricité comme un marché comme les autres, comme si l'on pouvait acheter de l'électricité produite par un petit producteur au coin de la rue, ou alors ailleurs dans une grande surface. En réalité, l'électricité n'est pas un bien comme les autres et ne doit donc pas être considérée comme une marchandise, et un marché ouvert comme celui que nous subissons aujourd'hui entraîne directement les conséquences que nous voyons au niveau des barrages et de l'électricité hydraulique suisses.

Mesdames et Messieurs les députés, je crois que l'un des enjeux principaux de la prochaine législature fédérale sera de garantir la production d'électricité par les barrages suisses ainsi que les énergies renouvelables dans notre pays. Ce n'est pas parce que nous connaissons aujourd'hui un excédent de production d'électricité que cela va durer ! Nous savons très bien que des risques majeurs subsistent quant à de futures pénuries, avec comme effet de potentielles augmentations massives de prix, et il n'est pas normal que les citoyennes et citoyens de ce pays soient soumis à de telles conditions de marché et ballottés d'un instant à l'autre, avec des prix extrêmement différents. Cette proposition de résolution est par conséquent particulièrement adaptée à la problématique actuelle.

La question de la production d'électricité renouvelable en Suisse est aussi extrêmement délicate. On sait que l'industrie solaire suisse a subi quelques déconvenues, notamment à cause de la baisse des prix, et c'est très dangereux en termes de production industrielle à long terme. Le savoir-faire helvétique est nécessaire pour garantir de futurs marchés aux industries suisses et nous devons donc favoriser cette production d'électricité renouvelable.

Par ailleurs, s'agissant des invites aux autorités fédérales, je ne peux m'empêcher d'être surpris par la formulation de la deuxième invite, qui vise à prévoir des réductions pour l'électricité produite dans des centrales à gaz. Quelques années après l'abandon par ce Grand Conseil d'une centrale à gaz...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Roger Deneys. ...ici au Lignon - notamment avec des partis qui ont signé cette proposition de résolution, d'ailleurs - je m'en étonne un peu, et je trouve que la formulation n'est pas suffisamment claire pour dire qu'on souhaite une production provenant de sources propres et écologiques.

Mme Lisa Mazzone (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, et en particulier Monsieur Genecand, je constaterai trois choses. Premièrement, si pour notre part nous n'étions pas en campagne électorale fédérale quand nous avons rédigé ce texte, qui a été déposé en janvier 2015, il y en a d'autres dans ce parlement qui le sont, et pourtant ils ne semblent pas encore être adaptés au Conseil des Etats, puisque je rappelle que par 11 oui contre 1 non et 1 abstention la commission de l'environnement, de l'aménagement et de l'énergie du Conseil des Etats a décidé de mettre en place des mesures pour soutenir les barrages suisses.

Je constate deuxièmement qu'un PLR veut faire subir à notre économie locale une concurrence destructrice en matière d'emplois et de ressources, par le biais d'une distorsion du marché actuel, puisque les externalités ne sont pas prises en compte dans le prix de l'électricité. Or ce qu'on vous propose aujourd'hui, ce n'est pas une taxe à l'aveugle, mais une taxe qui permet de combler cette lacune quant à la prise en compte des externalités dans le prix. Et si nous opérons une distinction entre le gaz et les énergies fossiles de type charbon et autre, c'est parce qu'il nous semble que le gaz, à titre transitoire et sur présentation d'un certificat, doit pouvoir bénéficier de réductions, tout en étant quand même taxé, je le précise.

Et, troisièmement, je constate qu'un PLR ne recherche pas l'autonomie énergétique de notre pays, ce que je trouve pour le moins inquiétant, quand on a de grands enjeux d'approvisionnement énergétique au niveau international.

Le président. Il vous reste vingt secondes.

Mme Lisa Mazzone. C'est pourquoi je me réjouis qu'une majorité se dégage visiblement autour de ce texte et que nous puissions soutenir notre économie locale.

Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Je passe la parole à M. le député Eric Leyvraz pour une minute vingt-deux.

M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. Les barrages sont construits pour fournir de l'énergie pendant une centaine d'années. Dès lors, des variations de prix, ils en ont connu et ils en connaîtront encore, ce n'est pas une raison pour abandonner cette électricité qui est propre et qui permet à notre pays - c'est l'or blanc de la Suisse ! - de remplir son rôle en matière de diminution de production de CO2. En effet, quand on voit l'Allemagne, qui a des centrales non pas au charbon mais au lignite... Le résultat final est catastrophique !

L'UDC désire que les barrages suisses restent en mains suisses, or le danger qu'il y a actuellement, c'est de voir que les actions des grands groupes électriques baissent tellement que certains d'entre eux - par exemple EDF ou des groupes chinois - pourraient être intéressés par l'achat de ces barrages, car le prix va être extrêmement bas sur la bourse. Nous devons donc être particulièrement attentifs à ce sujet, car il faut absolument que notre énergie reste en mains suisses. En conséquence, je soutiendrai, avec une partie de mon groupe, cette proposition de résolution.

M. Rémy Pagani (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, je pensais que le PLR avait encore un point de vue un peu scientifique mais, visiblement, il s'en réfère à la main invisible et à l'autorégulation du marché... Or pour pouvoir préserver certains fondamentaux, notamment l'autonomie énergétique de notre pays, je trouve que s'en remettre à cette main invisible, à l'autorégulation du marché, comme cela a été exprimé ici, c'est faire prendre de gros risques aux générations futures. C'est croire que, parce qu'on laisse le renard dans le poulailler, il va préserver un certain nombre de poules ! Malheureusement, ce n'est pas ainsi que les choses vont se passer.

Il vient d'être dit qu'effectivement certains grands groupes s'intéressent à des barrages et auront l'occasion d'accaparer ce bien national, parce que l'électricité est peu chère actuellement et que les investissements qui ont été faits dans nos barrages sont aujourd'hui échoués. Cela étant, Mesdames et Messieurs, il ne faut pas se leurrer. Il a été calculé - et je me réfère aux scientifiques, qui nous donnent des directions dans cette matière - qu'avec l'éolien plus les cellules photovoltaïques, dans trente ans la planète entière pourrait être satisfaite en termes d'électricité. Mais il subsiste un problème, celui de l'accumulation, de la garantie d'accumuler l'électricité; les barrages peuvent faire l'objet de cette stratégie et pourront peut-être encore exister dans cinquante ans, sauf qu'il y a aussi une inconnue, dans la mesure où sont en train de se mettre en place des piles qui pourraient être introduites dans les caves des villas ou des immeubles, lesquelles remplaceraient avantageusement celles que représentent aujourd'hui les barrages, nos barrages hydroélectriques. Il existe donc le risque de voir nos barrages complètement inutilisés dans trente ou quarante ans en raison de ce système qui sera mis en place dans les immeubles ou les villas des uns et des autres. Alors effectivement, de grands progrès sont réalisés, et ce risque est là, existe, mais toujours est-il qu'aujourd'hui cette solution n'existe pas. Demain, les éoliennes et les cellules photovoltaïques produiront de l'électricité en bande, les barrages pourront servir d'accumulateur, et c'est pourquoi nous soutiendrons de manière ferme et déterminée la proposition de résolution de nos amis écologistes. Merci de votre attention.

Mme Danièle Magnin (MCG). Je voulais simplement ajouter ceci. A l'heure actuelle, lorsqu'on veut de l'électricité verte, on doit payer une taxe supplémentaire, et la résolution qui nous est soumise ici propose qu'il se passe exactement l'inverse, c'est-à-dire qu'on paie plus cher l'énergie sale et moins cher l'énergie propre. C'est aussi l'un des motifs qui semble tout à fait essentiel à un renversement de la manière de voir les choses et c'est pour cette raison que nous voterons cette proposition de résolution.

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat accueille avec bienveillance cette proposition de résolution qui, dans le fond, correspond à sa position, à la position qu'il a tenue auprès des autorités fédérales dans le cadre de la consultation sur l'ouverture du marché de l'électricité. En effet, le Conseil d'Etat est pour une concurrence, mais une concurrence loyale. Or en matière de marché des énergies, nous n'avons pas aujourd'hui en Europe et dans le monde les conditions d'une concurrence loyale. Pourquoi ? Parce que d'une manière générale, les énergies non renouvelables qui émettent du CO2 n'intègrent pas, dans leurs coûts de production, les impacts négatifs sur l'environnement, la société et surtout les générations futures - je reviendrai tout à l'heure sur ces externalités que certains députés ne comprennent pas - de même que la filière nucléaire ne couvre pas dans son coût du kilowatt/heure produit les frais de démantèlement et de traitement des déchets stockés qui, vous le savez, doivent l'être pour certains sur des centaines d'années.

Mesdames et Messieurs, l'externalité est une notion économique clé pour comprendre le débat énergétique qui nous concerne. Si une entreprise de production chimique déversait ses déchets dans la rivière qui alimente une ville comme Genève, ce serait intolérable et on dirait que cette entreprise ne peut pas, pour de simples raisons d'économies internes, déverser ses déchets. C'est une externalité qui, si elle n'était pas régulée, viendrait à être supportée par le contribuable et surtout par la santé des citoyens. De la même manière, quand les entreprises genevoises se plaignent à juste titre de la concurrence déloyale de certaines entreprises étrangères qui sous-paient leurs employés, on est face à une externalité sociale, que les milieux proches du PLR dénoncent d'ailleurs souvent en disant que les entreprises genevoises ont une responsabilité sociale et qu'elles ne peuvent pas être concurrencées. De la même manière encore, Mesdames et Messieurs les députés du PLR, la dette financière de notre canton est une externalité de la génération présente sur la génération future, et vous avez raison de critiquer une dette trop importante, parce que ce n'est qu'une externalité supplémentaire. En somme, les externalités des énergies non renouvelables amènent aujourd'hui une situation de concurrence déloyale, et c'est ce qui fait que les énergies renouvelables, qui sont aussi l'une des grandes forces, l'un des grands potentiels industriels de notre pays, ont de la peine à démarrer.

Contrairement à ce qui a été dit, les investissements dans le renouvelable en Allemagne, même s'il s'agissait de sommes importantes, ont très faiblement déstabilisé le prix du marché européen. En effet, 20 milliards, ce n'est qu'une goutte dans l'océan des marchés énergétiques ! C'est bien évidemment le ralentissement économique continental qui a fait chuter les prix de l'électricité, avec le corollaire du développement du gaz de schiste, notamment aux Etats-Unis, qui lui aussi a provoqué une chute du marché de l'électricité, avec des répercussions également sur le marché de production pétrolière.

Mesdames et Messieurs, la stratégie énergétique 2050 que le Conseil d'Etat soutient fermement est une stratégie économiquement réaliste, qui se base sur un développement endogène de nos entreprises et de ce qui fait la force de la Suisse, soit ses montagnes et donc ses barrages, son soleil, son vent aussi, en partie, et bientôt sa géothermie. Nous avons le devoir, sur une matière aussi particulière et délicate que l'approvisionnement énergétique, d'avoir une notion de souveraineté énergétique et de ne pas dépendre des marchés boursiers, qui certes sont aujourd'hui très bas, mais qui demain pourraient fortement remonter et, par là même, créer un frein à notre économie et à la qualité de vie de notre pays. C'est pourquoi cette proposition de résolution est somme toute assez modeste et assez logique dans le contexte actuel. Il s'agit de soutenir l'un de nos patrimoines que sont ces barrages, et le Conseil d'Etat vous invite par conséquent à voter cet objet pour le renvoyer à Berne, et vous pouvez également compter sur nous pour défendre cette position lors de nos contacts notamment avec Mme Leuthard.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant nous prononcer sur cette proposition de résolution.

Mise aux voix, la résolution 779 est adoptée et renvoyée à l'Assemblée fédérale et au Conseil d'Etat par 56 oui contre 20 non et 2 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Résolution 779

R 786
Proposition de résolution de Mmes et MM. Lydia Schneider Hausser, Roger Deneys, Isabelle Brunier, Salima Moyard, Christian Frey, Jocelyne Haller, Lisa Mazzone, Daniel Zaugg pour garantir le respect de la législation lors de licenciements sur le chantier du CEVA
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26 juin et 27 août 2015.

Débat

Le président. Nous passons à l'urgence suivante. Il s'agit de la R 786, classée en catégorie II - trente minutes - et je passe la parole à son auteur, Mme Lydia Schneider Hausser.

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, lorsque cette proposition de résolution a été déposée en juin, nous apprenions qu'une entreprise travaillant sur le chantier du CEVA était en passe de licencier tous ses employés étant donné que le travail qu'elle avait obtenu allait bientôt se terminer. En effet, malgré les cautèles posées lors des adjudications, le mécanisme induit par le fait de donner à une seule entreprise des grosses parties du travail de ce chantier a eu comme conséquence que ces gros lots ont été attribués... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...à des multinationales de la construction - dans le cas qui nous concerne, à l'entreprise Vinci.

Cette grande entreprise, qui n'avait pas le nombre d'employés nécessaire à Genève, a créé des consortiums de petites et moyennes entreprises, et étant donné qu'elle doit réserver des marges pour ses actionnaires ou ses propres revenus, il est clair que les conditions posées par cette multinationale aux entreprises du consortium ou aux sous-traitants ne permettent pas aux entreprises de la place d'être concurrentielles quant aux offres qu'elles peuvent présenter pour faire partie du consortium, puisque les entreprises locales - comme c'est d'ailleurs demandé dans les appels d'offres - respectent les CCT ainsi que les us et coutumes du travail ici.

Se créent alors des sous-traitants pour l'occasion, comme dans ce cas l'entreprise Eaux Vives Infra SA - qu'on appellera EVI - laquelle engage des employés qui sont principalement, ou en tout cas en grande partie, temporaires ou auxiliaires, voire des travailleurs détachés. Et lorsque le travail est terminé, les employés sont débauchés. En l'occurrence, l'entreprise débauchait en juin par petits lots mensuels - cinq ou six employés - arguant que l'on ne se trouvait pas face à un licenciement collectif, que tout allait bien et qu'elle n'avait pas besoin de négocier avec les employés ou leurs représentants. Nous avions alors déposé cette proposition de résolution, dont le traitement en urgence avait été adopté, mais il est vrai que durant l'été, sous la pression ou avec l'accompagnement du Conseil d'Etat, l'entreprise a accepté d'ouvrir les négociations avec les employés et leur syndicat, et le processus a commencé. Mais toujours est-il que, actuellement, nous en sommes à un résultat du processus de négociations qui n'est pas encore acceptable du tout pour le syndicat et, par ricochet, pour les employés, lesquels ont suivi et suivent ces négociations par l'intermédiaire d'une assemblée générale du personnel. Aujourd'hui, nous sommes dans une situation où les négociations ont été ouvertes et commencent maintenant quasiment à être fermées, mais les résultats obtenus ne satisfont pas la partie la plus importante pour nous, soit les employés, qui se trouvent pris dans un licenciement collectif. Je précise du reste, pour information, que cela concerne pour l'instant 206 employés, dont 70 intérimaires et 48 salariés fixes ont déjà été licenciés, alors qu'une septantaine ont été ou seront reclassés en Europe, puisqu'il s'agissait de personnel fixe détaché.

Cette problématique concerne ici le chantier du CEVA, mais je pense que le problème soulevé par ce mouvement et par cette situation renvoie plus largement à la question des adjudications publiques et de la responsabilité solidaire des entreprises qui acceptent ou reçoivent l'adjudication, c'est-à-dire qui sont choisies pour effectuer des travaux dans le cadre d'investissements de l'Etat. Je pense que c'est ce qu'il nous faut retenir, et c'est bien le problème dont faisait état cette résolution. Nous sommes très contents que le Conseil d'Etat ait déjà initié et permis que des négociations démarrent, mais à mon sens, pour cette situation-là, il est nécessaire que celui-ci puisse suivre la situation afin que nous arrivions à un compromis acceptable pour toutes les parties. Et surtout, il conviendrait que le Conseil d'Etat et nous-mêmes puissions tirer une leçon de cette situation pour les futurs appels d'offres et les futurs choix dans les adjudications, des choix qui ne devraient pas être opérés uniquement sur la base du meilleur prix, mais également, en partie, en fonction des cautèles liées aux conditions de travail dans notre canton.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande donc de soutenir cette proposition de résolution, qui serait un message pour l'entreprise, un message pour l'avenir du travail dans la construction mais aussi dans tous les autres mandats que l'Etat pourrait allouer dans le futur. J'espère dès lors que nous serons suivis, et je vous en remercie par avance. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Madame la députée. J'informe simplement votre groupe que vous avez utilisé une partie de son temps de parole. Je cède maintenant le micro à M. le député Bertrand Buchs.

M. Bertrand Buchs (PDC). Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, le parti démocrate-chrétien votera cette proposition de résolution ainsi que l'amendement qui a été déposé sur nos tables. Je ne reviendrai pas sur les arguments qui ont été exposés jusqu'à maintenant et qui sont les mêmes que ceux que nous défendons, à savoir que, dans le cadre des grands travaux, l'Etat doit être irréprochable et exemplaire. Il est vrai qu'actuellement les AIMP ne permettent pas aux entreprises locales de proposer des solutions, ce qui implique qu'on est obligé de faire venir des grands groupes étrangers qui ne respectent pas complètement nos us et coutumes, ce qui est fort dommage au niveau genevois.

On avait déjà effectué un gros travail sur les AIMP au niveau de ce Grand Conseil et des parlements cantonaux, avec la tenue d'une réunion dirigée par M. Barrillier à Lausanne pour proposer des solutions sur les AIMP, lesquelles consistaient à permettre aux entreprises locales de participer aux appels d'offres, alors qu'actuellement, comme je le disais, elles ne peuvent pas le faire pour les grands travaux.

Quand on regarde les invites de cette proposition de résolution, on s'aperçoit qu'elles découlent du bon sens. En effet, il est question d'appliquer la loi ainsi que les conventions collectives de travail - il est clair que c'est ce que l'on souhaite - et de demander à l'entreprise concernée de continuer à négocier afin d'avoir un plan social qui soit sérieux. En effet, si à Genève on n'applique pas les lois dans le cadre des grands travaux, le problème c'est que cela ouvrira une porte et, à l'occasion des autres grands travaux qui auront lieu dans l'avenir, on doutera des gens qui viennent travailler de l'extérieur et on se posera toujours la question de savoir s'ils prennent le travail des Genevois ou non. On doit donc être extrêmement attentif à ce genre de politique afin d'éviter d'avoir des soucis relationnels avec les personnes venant de l'extérieur. Je vous rappelle également que le canton de Genève connaît actuellement de gros problèmes financiers et qu'il y a des gens qui ont de la peine à trouver du travail à Genève. Il convient dès lors de faire très attention, et c'est maintenant que l'Etat doit montrer qu'il est exemplaire.

M. François Baertschi (MCG). Le groupe MCG soutiendra résolument cette proposition de résolution, si je puis dire, parce qu'elle est importante, mais pour des raisons inverses à celles qui ont été exprimées par les signataires. Il suffit de voir l'exposé des motifs, où l'on fait l'éloge du CEVA, alors que justement ce qui se passe actuellement sur le chantier du CEVA est la preuve qu'il s'agit d'un véritable échec. C'est un échec en termes financiers, puisqu'il y a un dépassement de budget, de même qu'un échec au niveau social. En effet, on nous a promis du travail et donc une baisse du chômage, alors qu'au contraire nous avons du chômage et de la misère sociale, qui sont dus à la loi, aux conditions dans lesquelles le CEVA a été lancé, mais également à la libre circulation telle qu'elle est acceptée et proposée par la droite, et telle qu'elle est acceptée également par la gauche, parce que ce ne sont pas des mesures d'accompagnement ridicules qui peuvent lutter là contre.

Le problème est par ailleurs dû au sale jeu auquel se livrent les promoteurs de ce chantier, c'est-à-dire les CFF et le canton de Genève, qui attribuent des dossiers de manière aveugle à une société bidon, parce que cette société Eaux Vives Infra SA n'est qu'une filiale d'une multinationale française. Ce que l'on fait, c'est de l'esclavagisme moderne, comme diraient Marx ou d'autres penseurs qui avaient un minimum d'intelligence à une certaine époque, alors que maintenant on se retrouve avec des gens qui sont aveuglés par le profit, aveuglés par le conformisme. Non, pitié, ce qu'il faut faire... (Commentaires.) Mais arrêtez, vous lancez des attaques personnelles ridicules ! (Brouhaha.) Quand on voit certaines personnalités de chez vous qui louent des logements - et vous transmettrez, Monsieur le président - à des prix excessifs, à des prix de promoteurs... Je ne veux pas dévier du débat, contrairement à ce que dit M. Deneys, mais...

Le président. Excusez-moi un instant, Monsieur le député. Monsieur Deneys, si l'on pouvait éviter de commencer à 8h du matin avec des attaques personnelles, ce serait bien ! (Commentaires.) Vous pouvez poursuivre, Monsieur.

M. François Baertschi. Voilà une fois de plus des attaques personnelles, alors que vous détruisez le sort des ouvriers, que vous détruisez le sort des entreprises genevoises. En effet, c'est ce que vous faites en mettant en place un système légal, juridique et gouvernemental qui détruit Genève, qui détruit les Genevois. Il faut à tout prix aller contre ce que vous faites ! Nous soutiendrons donc cette proposition de résolution - mais pour des raisons inverses - même si nous ne sommes pas du tout d'accord avec ses considérants, qui sont une apologie béate et mensongère de ce qui est en train de se passer avec le CEVA, car les invites nous conviennent tout à fait. (Applaudissements.)

M. Serge Hiltpold (PLR). Après cette truculente intervention, ça va être compliqué ! Tout d'abord, au niveau du contenu, je pense que cette proposition de résolution part d'une bonne intention, car les conditions de travail constituent un souci partagé par tous les groupes parlementaires. Il est important de revenir sur la responsabilité de l'Etat en tant que co-maître d'ouvrage, mais rappelons que celui-ci ne détient pas la majorité dans cet ouvrage: la répartition est de 60% pour les CFF et 40% pour l'Etat de Genève, l'Etat ne décide donc pas seul, il est minoritaire.

S'agissant des invites, il y a souvent des textes et des objets parlementaires qui demandent au parlement d'intervenir dans la gestion des conflits sociaux, mais ce n'est pas le rôle de ce parlement ! Je vais vous donner une petite explication concernant le procédé et la manière dont se passent les choses: dans le domaine de la construction, en tout cas, et surtout dans ce chantier du CEVA, c'est la compétence des commissions paritaires. La commission paritaire effectue ce contrôle avec les syndicats patronaux et employés, appuyée par l'OCIRT, qui s'attache à mettre en vigueur la LDét, soit la loi sur les travailleurs détachés. A ce titre, une cellule d'accompagnement tripartite des travaux du CEVA a été créée et représente les CFF, l'Etat de Genève, la CGAS et la FMB, c'est-à-dire les quatre partenaires qui s'occupent de gérer ces conflits. Cela fonctionne bien, et l'un des rôles de ce parlement a précisément été d'exercer une pression politique pour créer cette cellule. Ce rôle, qui a été constructif, j'espère que nous l'aurons également dans le dossier de la gare souterraine du CEVA.

Ensuite, pour ce qui est de l'amendement, il pose un véritable problème, car ce n'est pas au parlement de s'immiscer dans la gestion des entreprises. Qu'on aime ou pas l'entreprise, qu'elle soit genevoise, nationale ou internationale, ce n'est pas le rôle de ce parlement, strictement pas ! Le PLR ne pourra donc pas défendre cette position.

La position que nous défendrons est simple, c'est celle de la responsabilité, responsabilité des maîtres de l'ouvrage mais aussi des cahiers des charges. C'est un aspect capital dans tous les dossiers de construction et tous les dossiers techniques. A un moment donné, on a pris en considération le fait qu'il y avait des éléments de prix, mais ces éléments de prix ne sont pas les seuls. Et par ailleurs j'ai entendu des critiques infondées à l'encontre du groupe Vinci: je ne suis pas là pour les défendre, mais ce chantier est une prouesse technique qui n'est pas réalisée uniquement par Vinci. De très nombreux consortiums suisses, genevois, travaillent dessus, et je crois qu'il est insultant pour le milieu de la construction de dire qu'il s'agit d'un chantier catastrophique.

Le président. Il vous reste vingt secondes.

M. Serge Hiltpold. Ceux qui l'ont vu savent que c'est un chantier technique de développement ferroviaire en milieu urbain, avec l'une des plus grosses centrales à béton en milieu urbain. Je pense donc qu'il y a des compétences qu'il faut respecter, et ces éléments doivent être pris en considération. En conclusion, nous refuserons cette proposition de résolution.

Une voix. Très bien !

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Romain de Sainte Marie pour trente et une secondes.

M. Romain de Sainte Marie (S). Merci, Monsieur le président, je serai particulièrement bref. Je suis choqué - bien que malheureusement habitué - par les propos du PLR et la passivité de ce parti, ainsi que du conseiller d'Etat chargé de l'économie de ce même parti. Celui-ci mentionne un plan de l'économie genevoise pour 2030, eh bien ici il s'agit déjà de l'économie genevoise et du rôle de l'Etat et du Conseil d'Etat consistant à intervenir pour instaurer une véritable stabilité de l'économie et faire en sorte que les travailleuses et travailleurs de ce canton puissent bénéficier de cette même stabilité et ne pas connaître...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Romain de Sainte Marie. ...ce que l'on connaît aujourd'hui. Et, en effet, cela passe par plusieurs éléments: d'une part la médiation dans ce conflit et, d'autre part, le fait de revoir l'attribution des marchés publics.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Daniel Sormanni pour vingt-huit secondes.

M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous soutiendrons effectivement cette résolution et l'amendement, mais je crois que la problématique c'est bel et bien ces entreprises bidon, ces entreprises qui décrochent les mandats, notamment sur le chantier du CEVA, et qui ensuite sous-traitent les travaux qui leur ont été attribués. Parfois il y a même deux ou trois sous-traitances ! Je crois que c'est bien ça, la problématique, et je souhaiterais interpeller le Conseil d'Etat, puisque je sais que...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Daniel Sormanni. ...en ce qui concerne le CEVA, un dispositif de responsabilité solidaire est en place. A-t-il été utilisé dans ce cas ? J'aimerais bien que le Conseil d'Etat me réponde. Merci.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas le chantier du CEVA qu'il faut incriminer, mais la manière dont il est suivi. Ce sont aussi les limites des AIMP dont on a largement parlé, soit en commission soit ici, qui finalement permettent effectivement la création de ces entreprises de circonstance, celles qu'on qualifiait de «bidon», mais surtout des entreprises qui n'ont d'autre vocation que de contourner la loi et de permettre de précariser le statut des employés et de ne pas respecter les travailleurs, ce qui est inacceptable.

Alors c'est bien la responsabilité de l'Etat qui est en question ici: on nous avait dit que le chantier du CEVA devrait être un chantier exemplaire, eh bien on voit aujourd'hui que cet objectif n'est pas atteint et qu'on en est bien loin. L'Etat se doit donc d'intervenir pour garantir l'application de la réglementation sur le travail dans notre pays, mais aussi veiller à ce que ce chantier qui traverse les frontières permette également de défendre les droits des travailleurs et d'appliquer les réglementations comme elles doivent l'être. C'est pourquoi nous soutiendrons cette proposition de résolution - à laquelle nous avons par ailleurs adhéré - ainsi que l'amendement présenté par Mme Schneider Hausser, et je vous invite à faire de même. Merci de votre attention.

M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, permettez à l'Union démocratique du centre d'utiliser cette proposition de résolution pour dénoncer une fois de plus le contexte de tromperie dans lequel tous les partis de cet hémicycle sont en train d'enfermer la population suisse. On l'enferme, parce qu'évidemment il faut donner le mot pour les AIMP, il faut la libre circulation, il faut bien entendu laisser le marché libre, bref, la mondialisation libérale.

Mesdames et Messieurs les députés, il y a un deuxième paradoxe dans tout cela: on nous dit que l'Etat - et l'UDC le pense aussi, dans les limites d'un secteur économique comparable - ne doit pas s'occuper des affaires privées. Entièrement d'accord avec cela ! Mais où en est-on aujourd'hui ? Eh bien on castre celui qui paie ! En effet, Mesdames et Messieurs, dans le cadre du CEVA et des marchés publics, ce n'est pas l'Etat qui paie, c'est vous, c'est moi, c'est le simple citoyen. On est donc en train de mettre en place des mesures et de dire que, non, il faut que ça parte à l'étranger, que ce n'est pas de l'argent qui doit rester chez nous... Mesdames et Messieurs les députés, c'est exactement le retour de l'incendiaire ou du pompier arrosé ! Ayons une fois le courage de dire que ça ne joue pas et qu'il faut changer !

C'est clair, quand l'Union démocratique du centre lit cette R 786, elle voit bien sûr que c'est le relais syndical, que c'est vos gens, et c'est très bien ! Alors évidemment nous ne pouvons pas souscrire à ce qui est écrit, à vos considérants, mais sur le fond, une fois de plus, même si nous sommes peut-être des partis opposés quant à la manière générale de voir le pays, eh bien sur ce sujet-là, quand il s'agit pour vous de protéger les travailleurs et pour nous de protéger notre économie et de favoriser l'économie locale de façon que les entreprises locales puissent avoir du travail, on se fait promener et on se voit surtout refuser des marchés au nom de la mondialisation libérale, de l'échange et de la libéralisation. C'est la raison pour laquelle, non pas à contrecoeur, mais pour les motifs que je viens de vous présenter, le groupe UDC soutiendra cette proposition de résolution.

M. Mathias Buschbeck (Ve). Chers collègues, tout d'abord je suis un peu surpris par ce que je viens d'entendre de la part de mon collègue UDC qui fustige le libéralisme, alors qu'à Berne - et ici aussi, d'ailleurs - l'UDC est à droite du parti libéral et normalement à la pointe des idées néolibérales et de dérégulation, notamment sur la question du franc fort, où elle n'est vraiment pas en train de défendre l'économie suisse.

Pour en revenir à cette proposition de résolution, nous voilà dans un nouvel épisode en lien avec les entreprises mandatées sur le chantier du CEVA, un nouvel épisode extrêmement gênant quand on sait qu'on parle quand même ici d'argent public. Toute la problématique est née de l'attribution des lots, et même plutôt de la composition des lots, puisqu'on a créé des lots beaucoup trop grands qui ont empêché les entreprises locales et notamment genevoises de participer à l'attribution et qui ont permis uniquement à des consortiums - cela a été relevé - de remporter des procédures d'adjudication, consortiums qui ont ensuite sous-traité et sous-traité. Alors pourquoi en est-on arrivé à cette situation ? On l'a dit, c'est à cause des accords AIMP: ils ont certes un côté très vertueux puisqu'ils permettent d'éviter le copinage en essayant d'établir des critères d'attribution des marchés publics, mais en même temps on se retrouve dans une logique extrêmement néolibérale dans le mauvais sens du terme, où l'on ne pense qu'à attribuer au mieux-disant, sans compter le coût social que pourraient avoir ces attributions. Or ce coût social, on le paie aujourd'hui.

Cette situation est donc due, on l'a dit, à la composition des lots qui a été mal faite; l'Etat n'a effectivement pas joué son rôle de maître d'ouvrage et a un peu trop laissé les CFF faire comme ils veulent. Du reste, on le voit chaque fois qu'on a affaire aux CFF: ils considèrent qu'ils n'ont aucun compte à nous rendre, que ce soit dans l'achat des trains ou le suivi du chantier, et je pense donc que l'Etat a vraiment un rôle à tenir dans la maîtrise du chantier et de ce que font les CFF sur ce chantier. Les Verts soutiendront donc bien sûr cette proposition de résolution.

M. Luc Barthassat, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, s'agissant des problèmes liés au chantier du CEVA et à ces licenciements, les différents départements sont intervenus immédiatement en début d'été pour rappeler aux entreprises de respecter non seulement les règles, mais aussi les conventions qui avaient été établies il y a deux ans, si mes souvenirs sont bons. Ces négociations ont débuté durant l'été, elles ont été suspendues pendant quelques semaines à cause des congés et des vacances, mais elles ont repris comme prévu cette semaine. Alors oui, il y a quelques mouvements de débrayage, et c'est normal, parce que les syndicats mettent la pression sur cette entreprise qui reprend justement ces négociations.

Après concertation avec mes collègues MM. Poggia et Maudet - puisqu'ils sont concernés par ces problèmes, de même que vous tous ici, on l'a dit et répété, et c'est normal, à savoir que tout le monde respecte les règles sur le chantier - j'ai pris contact avec les principaux intéressés encore hier après-midi, non pas pour leur expliquer ce qu'il fallait faire, mais pour le leur rappeler et prendre des informations. Et la commission tripartite fait un excellent travail sur ce chantier; on peut certes discuter pendant des heures pour savoir si celui-ci est exemplaire ou non, mais lors des portes ouvertes du CEVA vous aurez tout loisir de voir l'ampleur de ce chantier, et je peux vous dire qu'au regard de l'ampleur d'un tel chantier - ça figure aussi dans les rapports - ce dernier est bien tenu. Et même s'il y a eu quelques dépassements, ils ont été remis en ordre le plus vite possible.

Encore une fois, les négociations sont en cours, avec des moyens de pression, en lien aussi avec cette résolution dont nous discutons en ce moment, puisque les principaux intéressés étaient au courant que nous allions traiter cet objet aujourd'hui. Ces négociations se poursuivent donc, je crois qu'il y a quelques débrayages encore aujourd'hui, qui concernent une vingtaine de personnes, comme hier, mais je pense que, comme l'a dit le député Hiltpold, ce sont des choses qui doivent se régler entre les syndicats, les entreprises, les patrons et la commission tripartite, et je vous rappelle qu'ils ont rendez-vous d'ici le 9 septembre pour trouver un accord sur tous ces problèmes.

Concernant les propos de M. Baertschi, on parle bien entendu du CEVA et des déficits - certains journaux s'en sont d'ailleurs un peu régalés ces derniers jours d'été juste avant la rentrée, comme par hasard, et c'est toujours le même... - mais je vous rappelle quand même qu'il y a bientôt une année nous avons mis sur pied un groupe d'experts, suite à la proposition que je vous avais faite. Et puisqu'on le prend toujours comme référence, il faut préciser que depuis l'existence de ce groupe d'experts que j'avais proposé à ce parlement de nommer, eh bien nous avons un rapport non plus annuel mais trimestriel, dans lequel, depuis sa première parution en octobre 2014 - ce sont donc des éléments dont on discutait déjà en juin au sein de ce parlement et en commission - ces fameux 200 millions figurent dans la part de risque. Aujourd'hui, je le répète, ce n'est pas un dépassement de budget mais bien une part de risque, et nous reviendrons sur le sujet au milieu de l'année 2016, quand la moitié des tunnels auront été réalisés, comme cela a toujours été prévu, afin d'avoir un bilan définitif et de savoir si c'est toujours une part de risque ou s'il s'agit d'un dépassement. Mais j'ai demandé d'obtenir quand même certains chiffres bien avant cette date-là, et nous nous voyons aussi courant septembre avec le COPIL du CEVA. Et comme je l'ai toujours dit, en toute transparence, les commissions concernées et vous-mêmes tous ensemble dans cet hémicycle serez au courant. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement remplaçant la deuxième invite, dont voici la teneur: «à faire en sorte qu'Eaux Vives Infra SA accepte de continuer les négociations initiées avec les représentants de ses collaborateurs et dans l'attente d'une résolution du conflit que les licenciements annoncés soient suspendus.»

Nous allons en premier lieu nous prononcer sur cet amendement, puis nous voterons sur la proposition de résolution elle-même.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 42 oui contre 26 non.

Mise aux voix, la résolution 786 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 59 oui contre 20 non.

Résolution 786

M 2282
Proposition de motion de Mmes et MM. Jean Romain, Pierre Conne, Georges Vuillod, Bénédicte Montant, Patrick Saudan, Serge Hiltpold, Simone de Montmollin, Gabriel Barrillier, Lionel Halpérin, Michel Ducret, Nathalie Fontanet, Jacques Béné, Beatriz de Candolle, Raymond Wicky, Stéphane Florey pour que les élèves de l'école obligatoire genevoise étudient jusqu'à la fin de l'année scolaire
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 25, 26 juin et 27 août 2015.

Débat

Le président. Nous passons à notre dernière urgence, soit la M 2282, classée en catégorie II - trente minutes. Je passe la parole à son auteur, M. Jean Romain.

M. Jean Romain (PLR). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, on a presque honte de demander qu'à Genève les élèves étudient jusqu'à la fin de l'année scolaire, mais il y a un règlement, et celui-ci dit que l'enseignement s'étend sur 38,5 semaines; or, lorsqu'on fait le calcul concernant l'école obligatoire, eh bien on s'aperçoit que le compte n'y est pas, et de loin, puisque les fins d'année scolaire - en fonction des ordres d'enseignement, évidemment - se terminent relativement en roue libre. Mais il semble que nous soyons tous d'accord pour dire que si nous voulons sortir l'école de l'ornière dans laquelle elle tombe parfois ou souvent, il faut au minimum travailler jusqu'au bout.

Alors on va nous répondre qu'on ne peut pas faire cela, qu'il y a les évaluations au cycle d'orientation, ainsi que les préparations et tout ce qu'il faut faire - tant avant Noël qu'avant la fin de l'année scolaire - et que finalement, devant l'écrasant travail des profs, il faut leur laisser un peu de temps pour les conseils et autres. Ce qui est vrai ! Mais il n'empêche que, dans les autres cantons, ils y arrivent, et d'ailleurs ces EVACOM, ces évaluations ayant lieu au cycle d'orientation pourraient se faire par exemple en février, de manière à ne pas siffler l'année scolaire déjà au milieu ou à la fin du mois de mai.

Dès lors, que faire de cette motion ? La renvoyer directement au Conseil d'Etat ? En effet, l'année passée j'avais déjà fait une intervention et on m'avait dit que nous avions raison, mais au fond rien ne se fait, et les rapports n'arrivent qu'au compte-gouttes et fort tard, me dit-on, au département de l'instruction publique. Alors si je propose le renvoi au Conseil d'Etat, eh bien on va nous répondre qu'on ne peut pas le faire, ce qui, évidemment, n'est pas exactement ce que nous attendons tous ici. Je demande par conséquent que cette motion soit renvoyée à la commission de l'enseignement, de façon que nous puissions entendre les différents partis et que les directeurs viennent nous expliquer pourquoi à Genève c'est si compliqué. A la suite de quoi nous aurons aussi l'avis du département et, fort de cela, on pourra rédiger un rapport et revenir devant vous. Je demande donc, ainsi que le PLR, le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement.

Une voix. Bravo !

Présidence de M. Jean-Marc Guinchard, premier vice-président

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Salika Wenger.

Mme Salika Wenger. Non, c'est une erreur, Monsieur le président !

Le président. Très bien. Je cède donc le micro à M. Guy Mettan.

M. Guy Mettan (PDC). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, je crois que Jean Romain a bien exprimé à la fois la surprise et le bon sens contenus dans cette motion. Si je parle de surprise, c'est parce que, à sa lecture, on se demande si on est dans la réalité ou non, étant donné que les cours doivent évidemment avoir lieu jusqu'à la fin de l'année scolaire. On constate donc qu'il y a effectivement un problème qui, au fil du temps, est devenu de plus en plus évident, et il nous semble que le renvoi en commission est une mesure judicieuse afin que le DIP vienne nous donner des explications et corrige le cas échéant cette anomalie. Je vous invite par conséquent à renvoyer ce texte à la commission de l'enseignement.

M. Daniel Sormanni (MCG). Chers collègues députés, le MCG soutiendra cette motion. Je crois qu'effectivement il est assez choquant de constater que très souvent il n'y a plus de travail effectué à partir de fin mai et de voir nos jeunes dans la rue se promener. On se demande finalement à quoi ça sert d'avoir l'école jusqu'à fin juin puisque le travail s'arrête avant ! Un certain nombre d'explications ont été données par le député Jean Romain, et je comprends bien que les examens aient lieu avant, mais cela dit je pense qu'on doit quand même pouvoir occuper ce temps de travail, et j'aimerais vous rappeler le débat sur le mercredi matin, lors duquel le ministre de l'époque, M. Charles Beer, nous disait qu'il fallait introduire le mercredi matin car nous n'avions pas assez de temps à l'école pour enseigner les matières. Mais il n'y a pas de problème, on arrête les cours fin mai... Il y a donc un illogisme, ça ne va pas ! Je crois qu'on doit s'occuper des jeunes jusqu'à la fin de l'école, faute de quoi il faut changer les périodes de vacances, et c'est la raison pour laquelle nous aurions même préféré renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat, ça paraissait quand même assez logique et évident. Mais enfin on va vous suivre, Monsieur le député Jean Romain, et on la renverra à la commission de l'enseignement. Il y a effectivement une problématique ici, et peut-être que si les élèves travaillent jusqu'à fin juin, ils n'auront pas besoin du mercredi matin. (Brouhaha.) Je pense qu'il doit être possible d'organiser les épreuves et le travail de façon à utiliser au mieux le temps d'école qui est prévu à l'heure actuelle. C'est un besoin ! Il me semble qu'à l'école primaire ça fonctionne mieux, même s'il y a peut-être aussi quelques problématiques, mais en tout cas au niveau du cycle il n'est pas normal que nos jeunes errent presque dans notre ville, tout simplement parce qu'ils ont terminé leur travail fin mai. Il y a quelque chose qui ne va pas et on espère que la commission pourra trouver des solutions pour que le travail continue jusqu'à fin juin.

Mme Salima Moyard (S). Mesdames et Messieurs les députés, il y a des objets parlementaires qui reviennent chaque année, comme les hirondelles au printemps, et l'organisation scolaire au mois de juin est de ceux-ci. En termes de production d'objets parlementaires, M. Jean Romain nous avait habitués à mieux. En effet, on a ici une proposition de motion très peu développée, très peu argumentée, et dont l'exposé des motifs est un copier-coller - seuls trois mots changent, je crois que je les ai comptés - de sa question écrite urgente 222. Dommage, puisque la problématique a l'air de beaucoup lui tenir à coeur...

Sur le fond, plusieurs problématiques se mélangent dans cette motion, et je vais en citer quelques-unes. Quand est-ce le bon moment, pédagogiquement parlant, pour organiser les épreuves communes ? A la fin ou au début de l'année scolaire ? Je suis sûre que le Grand Conseil a une réponse tout à fait avisée sur cette question. Faut-il laisser du temps aux élèves pour se préparer à ces épreuves spéciales - ces sortes de petits examens - et donc les libérer l'après-midi des cours normaux, ou bien faut-il faire comme si de rien n'était ? Comment organise-t-on quarante conseils de classe qui durent au minimum une heure avec tous les maîtres concernés, en même temps qu'on continue à enseigner normalement ? Et comment faire pour avoir encore des évaluations les tout derniers jours de l'année scolaire et en même temps avoir déjà calculé et rendu les moyennes, avoir déjà préparé les bulletins, avoir déjà tranché les cas individuels, avoir déjà eu les discussions avec les parents et avoir déjà inscrit les élèves au degré d'enseignement suivant ? La problématique est donc assez compliquée, et ces quelques exemples montrent qu'il faut trouver une solution satisfaisante au niveau administratif, certes, mais surtout au niveau pédagogique, et c'est ce qui tient à coeur au parti socialiste. Peut-être le PLR a-t-il réponse à tout cela, on se réjouit de l'entendre en commission, mais à la lecture de la motion ça n'a pas l'air d'être le cas, puisque ce sont plutôt des questions que des réponses qui sont indiquées. On rappellera quand même que ce n'est pas le rôle du Grand Conseil de gérer l'organisation de l'administration, et d'ailleurs la proposition initiale de M. Romain était bien de renvoyer la patate chaude au DIP.

Sur la forme, il y a peut-être bien des problèmes de communication et l'autorité scolaire ne donne peut-être pas toutes les informations aussi clairement qu'elle le pourrait aux parents; le parti socialiste en est déçu et souhaite qu'il y ait des améliorations de ce côté-là. D'autre part, notre groupe s'est également laissé dire que les enseignants eux-mêmes avaient relevé un certain nombre de difficultés il y a plusieurs années et qu'ils n'ont toujours pas pu voir leurs propositions étudiées...

Le président. Il vous reste trente secondes, Madame la députée.

Mme Salima Moyard. Je vais terminer, Monsieur le président ! ...par la direction générale compétente. On espère donc que le focus mis aujourd'hui sur cette question permettra d'y remédier.

En conclusion, qu'on ne s'y trompe pas: le groupe socialiste pense que l'école est responsable des enfants durant les semaines d'école, y compris jusqu'à la dernière, que cela doit être respecté en tout temps, qu'il peut y avoir des modalités organisationnelles particulières à certains moments, mais que la prise en charge doit être de qualité durant toute l'année. Par contre, il faut aussi faire la différence entre les temps de travail...

Le président. Il vous faut conclure !

Mme Salima Moyard. ...d'évaluation et d'orientation. C'est donc complexe, et pour ces raisons le groupe socialiste sera enclin à étudier en commission cette motion, et non pas à la renvoyer au Conseil d'Etat.

Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, ce sujet est effectivement assez récurrent dans notre parlement, et c'est très souvent que nous avons déjà pu aborder cette question, apparemment sans trouver de solution satisfaisante pour tout le monde.

Il est vrai que dans ce parlement nous sommes habitués à entendre que les heures d'enseignement sont précieuses, trop rares, et qu'il faut dès lors utiliser au mieux toutes celles qui sont offertes au cours de l'année. Dans ce sens-là, on peut comprendre les préoccupations exprimées par cette motion, qui relève qu'en fin d'année nous perdons un certain nombre d'heures qui pourraient être utilisées à meilleur escient. C'est un souci souvent exprimé aussi par les parents des adolescents, qui sont préoccupés de savoir que leurs enfants ne sont plus pris en charge de manière correcte par le cycle d'orientation et qui s'inquiètent donc de les voir traîner, alors que les activités d'été n'ont pas encore commencé en ville, puisqu'il est parfois difficile pour ces parents qui travaillent de s'assurer que leurs enfants occupent leur journée de manière plus ou moins correcte.

Toutefois, notre bémol par rapport à cette motion serait le suivant: certes, il faut utiliser au mieux ces heures, mais nous savons également que les conseils de classe doivent se tenir, que les notes doivent être rentrées et qu'on ne peut pas repousser indéfiniment les inscriptions au postobligatoire. Il faut donc trouver comment faire en sorte que ces enfants soient pris en charge sans pour autant retarder les inscriptions au postobligatoire ainsi que la remise des carnets scolaires, parce que dans ces moments-là tout le monde est dans l'attente de savoir ce qu'il en sera de son avenir.

Par ailleurs, quand vous dites que le travail doit continuer, peut-être qu'on pourrait ici apporter une nuance en imaginant d'autres types de travail, tels que des activités sportives ou culturelles. Il y aurait aussi - et c'est un sujet qui revient de manière récurrente dans ce parlement - la nécessité de travailler davantage sur la formation professionnelle pour mieux orienter les enfants, et on pourrait donc imaginer par exemple que pour les degrés 9 et 10 on organise plus de stages en entreprise ou que les entreprises profitent de ces moments pour venir se présenter dans les cycles. Voilà autant d'idées qui permettraient à la fois aux enseignants de faire le devoir qui leur est demandé et aux élèves d'être pris en charge. En conclusion, notre groupe, qui était très partagé sur cette motion, va pourtant la renvoyer en commission pour qu'elle soit étudiée.

M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion est une tartuferie, et il conviendrait de la rejeter. Mais elle va bien sûr être renvoyée à la commission de l'enseignement, où l'on pourra en discuter. Pourquoi est-elle mauvaise ? Parce qu'une fois de plus elle jette l'opprobre sur l'école et sur le corps enseignant. (Brouhaha.) M. Jean Romain, premier signataire de ce texte, continue son travail de sape à l'encontre du DIP et de l'école; il avait dit en son temps qu'il fallait brûler le DIP, je vous le rappelle ! Soyons sérieux: on ne peut pas tout combattre et dire n'importe quoi.

La solution, moi je l'aurais. En effet, ça donne là des interventions un peu mensongères quant au fait que les élèves ne travailleraient plus depuis fin mai, etc., et on sent qu'il est plutôt question du cycle d'orientation, mais l'école obligatoire dont parle cette motion comporte onze degrés - huit au primaire, trois au cycle - et décréter que les élèves ne travailleraient plus dans ces huit degrés que compte l'école primaire, c'est mensonger ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous ai déjà invités à venir dans les écoles, votre carte de député vous le permet, mais qui est allé dans les écoles au mois de juin pour voir les élèves du primaire travailler ? Une personne ! Merci bien ! Vous pouvez donc témoigner, Monsieur, que les profs sont là avec leurs élèves et que ceux-ci travaillent. A moins qu'on ne veuille supprimer les courses d'école et autres ?! Il existe une vie de l'école, un rythme scolaire, il y a des traditions, et on ne peut pas les occulter comme ça.

M. Jean Romain avait combattu, avec la dernière énergie, les cycles d'apprentissage de quatre ans, or leur vertu était justement de rompre avec l'évaluation annuelle, permettant ainsi de mieux travailler jusqu'à fin juin, sans être sanctionné par des examens, des redoublements, etc. On concevait l'apprentissage des élèves sur quatre ans, mais vous l'avez combattu ! Vous ne pouvez donc pas maintenant vous plaindre qu'il y ait des épreuves cantonales. Cette année, elles se terminaient en juin à l'école primaire, et là où je décèle quand même une certaine hypocrisie chez le premier signataire de cette proposition de motion, c'est que comme notre Conseil se réunit traditionnellement les deux derniers jours d'école au mois de juin, eh bien nous avons siégé - nous en sommes toujours à la même session, d'ailleurs - les 25 et 26 juin, et j'ai donc dû, en tant qu'enseignant primaire, faire une demande de congé, avec la nécessité de compenser ces heures.

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Olivier Baud. Or pouvez-vous me dire, Monsieur Jean Romain, quand vous enseigniez au postobligatoire tout en étant député, combien de fois vous avez fait une demande de congé pour les sessions de juin qui tombaient sur les deux derniers jours d'école ? Zéro fois ! Et pourquoi ? Parce qu'il était évident que vous n'étiez plus dans votre collège ces deux derniers jours. Donc voilà, cette proposition de motion est hypocrite et c'est une tartuferie ! On va sûrement la traiter à la commission de l'enseignement, mais il conviendrait mieux de la rejeter.

M. Stéphane Florey (UDC). Certes, je suis entièrement d'accord quand j'entends dire que l'organisation scolaire est compliquée, qu'il est difficile de mettre en place certaines mesures, mais la question ne doit pas être insurmontable, puisqu'il reste malheureusement la réalité du terrain, parfaitement exprimée dans cette motion: au cycle, du moment que les évaluations sont terminées, les élèves ne font que regarder des films en DVD, discuter, traîner dans les couloirs, etc. Beaucoup de promenades sont également organisées, des pseudo-courses d'école, et on a finalement l'impression qu'ils passent les deux ou trois derniers mois de l'année à uniquement participer à des courses scolaires, alors qu'une première solution envisageable serait de simplement décaler d'un bon mois les évaluations, les semaines de courses d'école et autres, ce qui pourrait déjà mieux concorder avec la réalité.

Et il y a peut-être, non pas plus grave, mais plus surprenant, c'est qu'auparavant ce phénomène ne se déroulait qu'au cycle d'orientation, alors que maintenant la tendance gagne également le primaire. En effet, ma fille qui vient de finir l'école primaire - et qui entre donc au cycle cette année - a passé grosso modo les deux dernières semaines à regarder des films en DVD, à participer à de multiples sorties, etc. Ils ne font quasiment plus rien, et c'est la réalité ! Or c'est quand même inquiétant qu'on ne profite pas de ces moments, alors qu'une bonne partie des élèves se retrouvent en R1 et sont donc déjà en difficulté scolaire... Je ne dis pas que jusqu'à la dernière minute de la dernière journée les élèves doivent être à leur bureau en train d'écrire et d'apprendre, mais on pourrait quand même faire un effort et profiter justement des dernières semaines - même si, je suis d'accord, elles sont censées être un peu plus cool - pour se saisir des problèmes et donner des explications aux élèves afin d'essayer de résoudre leurs difficultés, et cela jusqu'à la dernière journée. C'est pour ces raisons que nous soutiendrons cette motion et bien évidemment son renvoi en commission, si tel doit être le cas.

M. Pascal Spuhler (MCG). Je ne pense pas, Monsieur Baud, que la proposition de M. Romain mérite d'être traitée de tartuferie, parce qu'elle soulève quand même plusieurs problèmes, et moi, en tant que parent d'élève en primaire, je me suis aussi posé la question de savoir ce qu'on faisait au mois de juin dans les écoles. Alors je ne dis pas que les professeurs et maîtres d'école...

Le président. Il vous reste vingt secondes, Monsieur le député !

M. Pascal Spuhler. Mais... Bon, très bien ! Je ne dis pas que les maîtres ne travaillent pas, mais je pense qu'ils remplissent surtout des blancs en préparant des courses d'école et des camps d'été plutôt que de dispenser une formation scolaire aux enfants. En effet, promenade au parc, cinéma, théâtre, voilà ce qu'on nous a proposé comme programme ! Or quand je demande un congé lors du pont de l'Ascension ou du Jeûne Genevois, on me le refuse, parce qu'il y aurait, paraît-il, un cours très important ou une épreuve incontournable !

Le président. Il vous faut conclure.

M. Pascal Spuhler. Je pense donc que l'organisation scolaire est un peu légère en juin, et les parents s'étonnent quand même de cette situation, raison pour laquelle on soutiendra évidemment le renvoi en commission.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Jean Romain.

M. Jean Romain (PLR). Pour combien de temps, Monsieur le président ?

Le président. Trois minutes, Monsieur le député.

M. Jean Romain. C'est parfait, je vous remercie, Monsieur le président.

Mais qu'est-ce qu'on entend ?! M. Olivier Baud parle de Tartufe, lui qui n'a vraisemblablement jamais lu Molière ?! (Exclamations. Rires.) Il est question d'hypocrisie, car c'est évidemment une tartuferie que de demander que l'on enseigne à Genève jusqu'au dernier moment ! C'est une tartuferie que de demander que l'on travaille jusqu'au dernier moment ! C'est une tartuferie que de demander que jusqu'au dernier moment on fasse enfin de notre école quelque chose dont nous puissions être fiers !

Il ne s'agit pas du tout de jeter l'opprobre ni sur le département de l'instruction publique, ni sur les profs, mais alors que tous les parents de Genève, que tous les citoyens de Genève et que les députés dans leur grande majorité - et même les fonctionnaires du département - disent la même chose, à savoir que nous ne travaillons pas jusqu'au bout, seul M. Baud, qui n'est pas tartufe, est en train de nous dire: «Cachez ce problème que je ne saurais voir !» (Rires.) Eh bien, Monsieur Baud, il y a autre chose à faire à Genève, et pour ce qui est de l'école que vous voulez, je suis en profond désaccord avec la vision qui est la vôtre, vous le savez, et vous revenez sur l'année 2006 où vous avez perdu l'affaire des notes ainsi que celle des cycles d'apprentissage, justement, vous revenez comme une sorte de chewing-gum collectif que vous mâchonnez depuis une dizaine d'années. (Exclamations.) Je crois qu'il est temps maintenant de refaire une école, une école dont tout Genève puisse être fier. (Exclamations. Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. A défaut de tartufe, je ne sais pas si je vais jouer la candide... (Remarque.) Oui, c'est Voltaire, tout à fait, Monsieur le président ! ...mais j'aimerais vous dire que le Conseil d'Etat comprend les préoccupations des motionnaires, même si, Monsieur le député qui êtes l'auteur de la motion, je ne peux pas vous laisser dire que des semaines entières seraient sacrifiées à l'école obligatoire. N'exagérons pas ! Je défends la qualité de l'enseignement genevois, et le travail de l'école genevoise est bon. Je reconnais néanmoins que l'un des problèmes soulevés par cette motion est un manque de communication claire auprès des parents. En effet, au début de l'année scolaire au cycle d'orientation - parce que c'est bien du cycle qu'il s'agit en réalité dans cette motion - les parents pensent souvent en toute bonne foi que l'année va se prolonger jusqu'à fin juin, comme à l'école primaire, et ils découvrent d'ordinaire assez tardivement que dans les faits il y a des libérations, qui sont liées aux conseils de classe et à l'organisation de la fin de l'année scolaire. Alors c'est vrai que l'absence de communication n'est pas acceptable.

L'année dernière, le député Romain a effectivement posé une question du même ordre au Conseil d'Etat, et celui-ci s'est engagé dans sa réponse à aller de l'avant sur ce dossier. Et c'est bien ce que j'ai fait, puisqu'en automne, à l'occasion d'une rencontre entre la Fédération des enseignants genevois - il y avait donc les enseignants du cycle - la direction générale de l'enseignement obligatoire et moi-même, j'ai remis sur le tapis cette question et demandé qu'un groupe de travail propose des solutions pour que nous puissions aller de l'avant. Ce groupe de travail s'est mis autour d'une table, puis plus rien... Fin mai, on m'a communiqué un pré-rapport oral, fin juin, un pré-rapport écrit, et mi-juillet, un rapport écrit, lequel conclut en gros qu'il est à peu près impossible de changer quoi que ce soit. Vous imaginez bien que le Conseil d'Etat ne peut pas se satisfaire d'une telle réponse, c'est pourquoi je soutiens la proposition de renvoi en commission de cette motion, parce que je crois qu'il est important que nous puissions d'abord, avant d'aller de l'avant sur ce dossier, vous expliquer un certain nombre de choses. En effet, et Mme Moyard l'a très bien dit, il n'y a pas de solution simple, car je pense que s'il y avait une solution simple qui s'imposait, on l'aurait déjà tous trouvée et elle aurait été appliquée.

Changer l'organisation de la fin de l'année scolaire implique de répondre en premier lieu à plusieurs questions. Premièrement, faut-il une fin d'année scolaire qui soit la même pour les élèves de 9e et 10e - c'est-à-dire les deux premiers degrés du cycle - et ceux de 11e ? Si je soulève cette question, c'est parce qu'il est évident que, pour les élèves de 11e, la problématique de la fin de l'année scolaire est liée à leur inscription au secondaire II, qui peut être extrêmement variable. En effet, les choses sont différentes si l'on va au collège de Genève, à l'ECG ou en formation professionnelle, qu'elle soit à plein temps ou duale - sachant que si elle est duale, il faut également signer un contrat d'apprentissage, etc. Il est donc clair que, pour les élèves de 11e, la fin de l'année scolaire doit être liée à l'organisation de la rentrée du secondaire II, or on sait que la date butoir pour les inscriptions se situe généralement autour du mercredi ou jeudi - actuellement c'est le jeudi - de la dernière semaine de juin. Elles ne peuvent pas avoir lieu plus tard, car alors il devient impossible de préparer la rentrée pour le secondaire II, qu'on a déjà du mal à organiser... La première interrogation consiste donc à savoir s'il faut forcément envisager les mêmes solutions pour les élèves de 9e et 10e et ceux de 11e. C'est une question qu'on doit se poser, au lieu de rester dans un processus où l'on part du principe que tout le monde finit à peu près en même temps.

La deuxième problématique, qui a d'ailleurs aussi été soulevée par Mme Moyard et qui pour moi est essentielle, concerne les EVACOM, les fameuses épreuves communes. Là encore, les questions sont importantes: quel doit être le rôle d'une épreuve commune ? S'agit-il simplement de photographier la situation d'un élève à un moment donné ou s'agit-il davantage de permettre une certification avec pour enjeu une promotion en fin d'année ? La question n'est pas véritablement réglée à l'heure actuelle. On doit également s'interroger quant au nombre de ces évaluations: est-il nécessaire d'en avoir autant qu'aujourd'hui ? C'est une vraie question, qui est pédagogique avant d'être organisationnelle, même si, en fonction de la réponse qu'on y donnera, elle aura forcément des implications organisationnelles. Il faut aussi se demander à quel moment elles doivent avoir lieu: à la toute fin de l'année ou beaucoup plus tôt ? Cela dépendra bien sûr du rôle qu'on va donner à ces évaluations. Lorsqu'on me dit par exemple que les EVACOM doivent se dérouler au plus tard fin mai parce que le temps de correction est très long vu que les professeurs continuent à enseigner et doivent en outre préparer les conseils de classe, etc., ce qui implique qu'ils ne vont pas pouvoir le faire en deux jours, je l'entends bien, mais on pourrait aussi se demander qui doit corriger les EVACOM: les enseignants de la classe ou d'autres personnes ? Vous voyez que les interrogations sont en cascade et qu'en fonction du type de question et du type de réponse, on pourra peut-être organiser différemment la fin de l'année scolaire.

Il y a une troisième question essentielle à laquelle il faut répondre: comment oriente-t-on les élèves ? Le secondaire I s'appelle le cycle d'orientation, mais qu'est-ce qu'une bonne orientation ? Qui s'en occupe, comment, avec quels moyens, à quel moment ? A ce propos, la suggestion de Mme Forster Carbonnier est intéressante: pourrait-on aussi profiter de la fin de l'année pour anticiper, en l'occurrence pas pour les 11e, mais pour les 9e et 10e, un processus d'orientation qui interviendra par la suite ?

Vous voyez donc que tous ces éléments sont extrêmement importants, au-delà des questions qui sont peut-être moins pédagogiques, mais qui jouent un rôle dans la fin de l'année, comme les courses d'école, les voyages d'études, le rangement des salles, la reddition du matériel, etc., qui doivent également avoir lieu. Je soutiens par conséquent le renvoi en commission, de façon à pouvoir expliciter avec vous ces questions, vous montrer sur quels obstacles on peut buter, et à partir de là vous dire comment le département compte travailler, parce que je n'entends pas, à titre personnel, qu'on continue dans ces conditions à renvoyer la patate chaude d'une année à l'autre et que chaque année le département doive procéder à un exercice de style devant vous pour dire qu'on vous répondra l'année suivante. Je suis donc favorable au renvoi en commission, et il y aura ces prochaines semaines des explications qui permettront très rapidement, je l'espère, de déboucher sur une solution acceptable pour toutes et tous. Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons nous prononcer sur le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2282 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est adopté par 85 oui et 1 abstention. (Exclamations à l'annonce du résultat.)

PL 10872
Projet de loi de Mme et MM. Alain Meylan, Pierre Weiss, René Desbaillets, Beatriz de Candolle, Jacques Béné, Daniel Zaugg, Ivan Slatkine, Gabriel Barrillier, Francis Walpen, Jacques Jeannerat, Serge Hiltpold sur l'utilisation du produit de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations versé au canton
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes» de la session XII des 13 et 14 octobre 2011.

Le projet de loi 10872 est retiré par ses auteurs.

Ce projet de loi est repris par M. François Baertschi (MCG) sous le numéro PL 10872-2.

PL 10872-2
Projet de loi de M. François Baertschi sur l'utilisation du produit de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations versé au canton

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des finances.

R 720
Proposition de résolution de Mmes et MM. Marion Sobanek, Aurélie Gavillet, Roger Deneys, Marie Salima Moyard, Anne Emery-Torracinta, Irène Buche, Melik Özden, Lydia Schneider Hausser pour des taxes d'études accessibles à tous
Ce texte figure dans le «Recueil des objets déposés et non traités durant la 57e législature».

La proposition de résolution 720 est retirée par ses auteurs.

Le président. J'ai le plaisir de vous informer que je vous octroie une pause jusqu'à 10h ! (Applaudissements.)

La séance est levée à 9h30.