République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 14h, sous la présidence de M. Antoine Barde, président.

Assistent à la séance: MM. Pierre Maudet, Mauro Poggia et Luc Barthassat, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Anne Marie von Arx-Vernon, Beatriz de Candolle, Pierre Conne, Jean-Louis Fazio, Vera Figurek, Emilie Flamand-Lew, Lionel Halpérin, Bénédicte Montant, Pierre Ronget, Francisco Valentin, Pierre Weiss, Ronald Zacharias et Daniel Zaugg, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Geneviève Arnold, Christophe Aumeunier, Alexis Barbey, Christian Decorvet, Delphine Klopfenstein Broggini, Françoise Sapin, Charles Selleger, Alexandre de Senarclens et Marion Sobanek.

Discussion et approbation de l'ordre du jour

Le président. Monsieur Buchs, vous avez demandé la parole ?

M. Bertrand Buchs (PDC). Oui, merci, Monsieur le président. Je demande l'ajout et l'urgence pour la R 784 que vous venez de trouver sur vos places et qui est intitulée: «Le taux de particules fines doit baisser dans les plus brefs délais: prenons des mesures urgentes pour la santé de la population.» Ce texte a été écrit en urgence ce matin suite à l'incendie de cette nuit à la Praille... (Exclamations. Le président agite la cloche.) ...qui a fait grimper le taux de particules fines, et je pense qu'il est important que ce parlement en discute. (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur le député, on n'entend rien du tout ! Est-ce que je peux avoir un peu de silence ? (Commentaires.)

Une voix. Fermez les fenêtres !

Le président. Puis-je avoir un peu de silence, s'il vous plaît ? Merci. Vous pouvez poursuivre, Monsieur Buchs.

M. Bertrand Buchs. Bien, je reprends. Je demande donc l'ajout et l'urgence pour la R 784 que vous avez trouvée sur vos tables. C'est une proposition de résolution qui a été rédigée ce matin suite à l'incendie de cette nuit à la Praille qui a fait grimper le taux de particules fines. Nous demandons que l'Etat intervienne rapidement !

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous allons commencer par voter sur l'ajout de cet objet, et je rappelle qu'il faut la majorité des deux tiers pour que cette demande soit acceptée.

Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour de la proposition de résolution 784 est rejeté par 35 non contre 32 oui.

Annonces et dépôts

Néant.

PL 11282-1-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur la restauration, le débit de boissons, l'hébergement et le divertissement (LRDBHD) (I 2 22) (projet de loi scindé en deux)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XIV des 4 et 5 décembre 2014.
Rapport de majorité de M. Jacques Béné (PLR)
Rapport de minorité de Mme Sarah Klopmann (Ve)
PL 11282-2-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur la restauration, le débit de boissons, l'hébergement et le divertissement (LRDBHD) (I 2 22) (projet de loi scindé en deux)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XIV des 4 et 5 décembre 2014.
Rapport de majorité de M. Jacques Béné (PLR)
Rapport de minorité de Mme Sarah Klopmann (Ve)

Premier débat

Le président. Nous passons aux PL 11282-1-A et 11282-2-A, qui sont classés en catégorie I, ce qui signifie qu'il s'agit d'un débat libre. Comme convenu, le courrier 3421 figurera au Mémorial.

Courrier 3421

Le président. Je passe la parole au rapporteur de majorité Jacques Béné.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. En préambule, j'aimerais adresser mes remerciements à M. Maudet, qui a repris ce dossier de M. Unger. Ce n'était pas un dossier facile, et nous avons bien cru en commission que l'on n'y arriverait pas ! On y est tout de même parvenu, et je tiens donc à le remercier d'avoir repris ce dossier à bout de bras et d'avoir proposé un amendement général considérable à cette loi. Je souhaite également remercier Mme Ma Faure, du département, laquelle m'a considérablement aidé dans la rédaction de ce rapport qui était assez compliquée au vu du nombre d'amendements déposés en commission.

Mesdames et Messieurs, cela fait de nombreuses années que tant les cafetiers-restaurateurs que la population se plaignent de l'application de la loi sur le débit de boissons. On entend parler de nuisances, de manque de dynamisme et de vie nocturne, ainsi que du fait qu'il n'y a pas assez de prévention de l'alcoolisme. On parle aussi de concurrence déloyale ou encore du fait qu'il existe trop peu de sanctions dissuasives en cas d'infraction. Comment pouvons-nous résoudre ces problèmes, alors que notre société devient de plus en plus intolérante face aux nuisances des autres ? La seule solution, Mesdames et Messieurs, c'est de responsabiliser toutes les parties, et c'est ce que ce projet de loi tente de faire.

En premier lieu les exploitants, en leur donnant plus de liberté et en cadrant mieux leur activité, tout en sanctionnant vraiment et rapidement la petite minorité d'entre eux qui ne respecte pas les règles. Tous seront traités de manière équitable, notamment quant aux exigences de formation professionnelle ou de respect des conditions de travail, gage d'une concurrence loyale entre acteurs responsables. Ce n'est pas parce qu'on a une vision alternative, participative ou associative - n'est-ce pas, Madame Klopmann ! - de la société qu'on peut appliquer des règles qu'on définit soi-même, sous couvert de pseudo-arguments culturels ou artistiques. Toute organisation devra nommer une personne physique comme responsable, ce qui forcera les associations de circonstance à respecter leurs obligations si des difficultés se présentent, par exemple en cas d'accident, de plainte ou même d'amende. Pour obtenir une autorisation d'exploiter, le propriétaire de l'établissement devra également montrer patte blanche en matière de sécurité sociale, de droit du travail et de police des étrangers, et bien sûr il ne devra pas non plus avoir été impliqué dans des faillites frauduleuses, ce qui est une avancée considérable par rapport à la situation actuelle qui a vu nombre d'établissements fermer et rouvrir sous d'autres dénominations, en laissant des ardoises très importantes auprès de leurs fournisseurs et de l'Etat.

En deuxième lieu, il y a les clients. Ceux-ci doivent également être responsables et comprendre qu'il existe un équilibre entre le droit de s'amuser et le respect de l'autre dans un tissu urbain aussi dense que celui de notre canton. La cohabitation, ça s'apprend et ça se cultive. Le projet de loi prévoit des heures d'ouverture élargies par rapport à la situation actuelle. Certains en voudraient davantage, ceux-là mêmes d'ailleurs qui ne veulent pas élargir les heures d'ouverture des magasins et qui souhaitent les empêcher d'ouvrir le dimanche. N'est-ce pas, Monsieur Vanek ! (Remarque de M. Pierre Vanek.) Il est difficile de comprendre le raisonnement qui voudrait que la nuit on puisse sortir et se divertir dans des bars et restaurants, mais que l'on ne puisse pas faire du shopping le soir et le dimanche, pour se consacrer à des activités familiales. Cela dit, on sait que certains n'en sont pas à un paradoxe près...

En troisième lieu, les communes doivent elles aussi être responsables, ce qui implique de leur donner des bases précises et claires pour une utilisation facilitée de leurs prérogatives, notamment en matière d'exploitation de terrasses ou, nouvellement, d'autorisation de fêtes publiques qui se dérouleront sur le territoire communal.

Mesdames et Messieurs, ce projet de loi répond à bon nombre de doléances exprimées lors des auditions en commission. Certes, il ne répond pas à tout, mais c'est un subtil équilibre entre la volonté de légiférer dans un domaine complexe et le droit de s'amuser dans le respect des règles du bien vivre ensemble dans notre canton. J'espère donc que vous ferez bon accueil à ce projet de loi.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Je ne partage évidemment pas l'enthousiasme de M. Béné. Pour notre part, nous avons plutôt l'impression de nous être fait complètement avoir avec cette refonte et cette fusion de la LRDBH - la loi sur la restauration, le débit de boissons et l'hébergement - et de la LSD - la loi sur les spectacles et les divertissements. Nous devions avoir une loi simplifiée et plus en accord avec la réalité, mais au lieu de cela on se retrouve avec une loi qui présente surtout la restauration et le divertissement comme des domaines négatifs et néfastes, soit une loi hypercalviniste. L'amendement général du DSE nous a certes simplifié la loi, et c'est une bonne chose, mais il l'a encore plus éloignée des réalités actuelles, en déplaçant très clairement le curseur sur la rigueur et la tranquillité publique, au détriment de l'animation dans notre canton.

D'autre part, ce projet de loi favorise l'arbitraire. Plusieurs éléments importants seront laissés à la libre appréciation du département ou du Conseil d'Etat, ou - pire encore - parfois même d'un commissaire de police qui pourra, tout seul, procéder à la fermeture immédiate d'un lieu avec scellés s'il juge que l'ordre public est perturbé, notamment en matière de moralité publique. C'est donc une mesure disproportionnée pour un concept qui est pourtant très vague et subjectif.

Autre durcissement de cette loi, il sera impossible de servir quoi que ce soit sans diplôme, sans le certificat de capacité de cafetier, restaurateur et hôtelier. Voilà donc comment cette loi évince l'animation associative, culturelle et bénévole. La professionnalisation et des normes toujours plus strictes tuent les initiatives spontanées. L'hygiène, toujours l'hygiène ! Par contre, il y a quand même une exception: si l'on organise un très grand événement, comme les Fêtes de Genève, et que le canton a décidé de nous protéger, alors là il n'y a pas de problème, on peut servir un plat du jour en plein cagnard sur les quais sans diplôme... Mais en revanche, il est impossible de servir un jus de pomme dans un marché ! L'argent empêcherait-il l'empoisonnement ?!

L'augmentation des tracasseries administratives pour décourager et s'assurer d'avoir des rues toujours bien propres en ordre, voilà la politique menée depuis bien longtemps par le magistrat, et il s'y employait déjà quand il était conseiller administratif en charge du domaine public en Ville de Genève... (Protestations.)

Des voix. Ouh !

Mme Sarah Klopmann. ...et ça continue avec les terrasses, qui ne doivent pas déborder. Les établissements ne pourront plus servir de boissons alcooliques si celles-ci ne sont pas consommées à l'intérieur ou dans le strict périmètre de la terrasse. Là encore, strict et bien rangé, comme toujours ! Pourtant... (Commentaires.) Je vais attendre le silence, Monsieur le président ! (Un instant s'écoule.) Pourtant, cette disposition est inutile: les communes sont déjà compétentes pour l'octroi des autorisations en matière de terrasses et peuvent déjà conditionner l'utilisation des terrasses à n'importe quelle règle s'il y a un problème. L'ennui, c'est qu'en inscrivant cette obligation dans la loi, on empêche quelqu'un de prendre son verre de vin lorsqu'il va fumer dehors s'il ne peut pas s'asseoir, de même qu'on empêche quelqu'un de prendre sa bière dans les gradins du stade de foot où il souhaite voir son enfant jouer.

Alors oui, il est légitime de vouloir préserver le sommeil des dormeurs, mais pour avoir une politique de la nuit cohérente, il faudrait surtout favoriser la concertation et particulièrement anticiper les potentielles difficultés, au lieu de les déplacer ou de les aggraver avec une politique restrictive et insensée. Cette loi demande aux cafetiers de gérer l'espace public et de garantir la tranquillité, mais elle ne leur en donne pas les moyens. Pourtant, le bruit dans la rue est la conséquence de la carence des lieux pour la fête et pour les jeunes, de leur manque de diversité et des prix souvent trop élevés.

Heureusement, il y a quand même un point positif dans cette loi: l'extension des horaires. Avec l'ouverture des dancings jusqu'à 8h du matin, on réglera un peu ces problèmes de bruit car le public sera dilué, ce qui résoudra ainsi une partie des conflits entre dormeurs et noctambules. Pour les cafés, bars et buvettes, la commission a heureusement fait un excellent travail et opté pour des horaires beaucoup plus étendus que ce que souhaitait le magistrat, ce qui est une bonne chose.

Subsiste quand même le problème des buvettes accessoires. Elles seront également limitées par les horaires des cafés, bars et restaurants, même si elles sont liées à une activité qui a d'autres horaires. C'est complètement ridicule ! La finalité de tout cela, évidemment, c'est d'éliminer ce qui sort des cases. Donc pas d'activités pluridisciplinaires possibles ! Fini les cafés-concerts, les cafés littéraires, les thés dansants, etc. Espérons que les cafetiers auront encore le courage d'en organiser, car seule une partie restreinte de l'établissement pourra être dévolue à l'événement, et en plus le lieu devra être insonorisé s'il y a une animation musicale. Pourtant, le mélange des genres est de plus en plus sollicité par le public, or il me semblait que la loi devait se rapprocher des réalités d'aujourd'hui... Cela a dû être jugé administrativement trop compliqué !

La loi cloisonne les espaces et fige les catégories. Tout comme il ne faut pas sortir des cases, il ne faut pas non plus frôler de trop près les normes. Il est bien de veiller au respect des normes, mais avec l'obligation d'installer des limiteurs-enregistreurs qui borneront le volume sonore que la loi veut introduire, on va se priver de la venue de certains artistes à Genève, et même Sami Kanaan, en charge de la culture en Ville de Genève, a expliqué à quel point cela sera problématique pour tous les lieux culturels genevois.

Cette loi, qui impose des normes sous prétexte de protéger les gens, est pourtant très frileuse en matière de protection des employés. Pour le troisième secteur économique du canton, c'est inadmissible ! Et surtout, l'amendement général introduit, l'air de rien, un nouveau principe dévastateur pour l'animation genevoise, celui de la responsabilité portée par une personne physique uniquement. Le magistrat introduit là l'un des principes de la contestée loi anti-manifestations, mais pour l'organisation de tout événement public. Pour les exploitants soumis à la LRDBH, cela empêche toute gestion associative, ce qui, là encore, est loin des réalités, parce qu'actuellement nous pratiquons plus souvent des gestions partagées ou participatives. Mais pour les organisateurs d'événements, c'est pire encore: aucune personne ne souhaitera prendre le risque d'organiser un événement public, puisqu'elle devra toute seule endosser la responsabilité du bon déroulement de tout l'événement. Cela vaut aussi pour les fêtes de quartier, les fêtes des vendanges, la Fête de la musique, etc. Cela pénalise donc même les communes qui sont elles-mêmes organisatrices d'événements, alors que cette loi leur donne par ailleurs, contre leur gré, des charges supplémentaires avec les autorisations en matière d'organisation d'événements qui ne seront pas d'importance cantonale. C'est là le coup de bâton final pour décourager définitivement la population de s'engager pour animer Genève. Ce projet de loi nie la part associative et culturelle du divertissement, car il résulte de cette fusion que le divertissement a été totalement assimilé et englobé dans un aspect uniquement commercial. Cette loi risque d'enlever à Genève sa part d'attractivité: elle devait définir le cadre des possibles, mais ne consiste finalement qu'en une grande liste d'interdictions. Nous vous invitons donc, si elle reste en l'état, à la refuser, mais nous vous proposerons bien évidemment plusieurs amendements au deuxième débat, en souhaitant que vous leur fassiez bon accueil. (Applaudissements.)

M. Bernhard Riedweg (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, la nouvelle loi est passée d'une idée de vérification des compétences à une idée plus approfondie de formation des exploitants. Avec cette nouvelle loi, on donne davantage de liberté aux exploitants, mais en cadrant mieux leur activité, tout en sanctionnant rapidement ceux qui ne respectent pas les règles des conditions de travail, gage d'une concurrence loyale entre acteurs responsables.

Avec cette loi, on se situe dans le difficile équilibre qu'il convient de trouver entre le désir légitime de tranquillité et celui, tout aussi compréhensible, de divertissements et d'activités économiques. Cette refonte de la loi a pour objectif de modifier et de réadapter les horaires d'exploitation ainsi que de lutter contre les nuisances sonores dans tout le voisinage, afin d'harmoniser les besoins en matière de restauration et de divertissement, mais aussi de prévenir l'alcoolisme et de protéger les jeunes.

Le secteur d'activité des cafés, restaurants, bars et dancings se trouve dans un état de relative survie, avec de nombreuses fermetures. Si les prix des consommations peuvent paraître élevés, ils sont le reflet de charges toujours en augmentation. Certains employés sont mal protégés par une convention collective relativement faible, qui dissimule des salaires assez bas et des conditions de travail difficiles, notamment en raison du non-respect des horaires - dont les horaires de nuit - et du paiement des assurances sociales et des impôts. Il y a lieu de protéger ces travailleurs, d'autant qu'il faut savoir que le salaire médian dans cette branche se monte à 4287 F par mois.

L'équilibre entre la liberté du commerce, les possibilités de sorties nocturnes et le respect de la tranquillité des riverains est très subtil, et il faut qu'il soit tranché. Dans un centre urbain dense, il doit y avoir du respect entre la clientèle, qui a le droit de s'amuser, et les autres. La réadaptation des horaires permet des dérogations mieux définies et surtout - c'est la grande nouveauté - une fermeture des dancings et cabarets à 8h du matin toute la semaine, afin que les derniers fêtards ne dérangent pas la population et puissent utiliser les transports en commun pour rentrer chez eux. Ces établissements récoltent en effet tous les consommateurs qui n'ont pas été rassasiés d'émotions fortes. (Exclamations.)

Il convient aussi de remettre de l'ordre dans les conditions d'exploitation commerciale et la concurrence loyale entre les exploitants. Remettre de l'ordre signifie également revoir les mesures à prendre en cas d'abus, surtout d'alcool, et prévoir des sanctions à l'égard des contrevenants, en particulier ceux qui consomment des boissons alcoolisées hors de l'établissement ou hors des terrasses.

Ce qu'il fallait en outre redéfinir, c'était la délicate question de la répartition des tâches entre le canton, qui donne les autorisations pour la restauration, les débits de boissons et l'hébergement, et les communes, lesquelles sont chargées des autorisations pour les divertissements publics et les terrasses. Les communes ont donc des prérogatives, notamment en matière d'exploitation de terrasses ou d'autorisation de fêtes publiques.

Par ailleurs, la clarification des rapports entre le propriétaire et l'exploitant est indispensable, et elle a fait l'objet d'une attention particulière. En cas de délégation de l'exploitation de l'entreprise à un exploitant, celui-ci - et non le propriétaire - est responsable du comportement des personnes participant à l'exploitation ou à l'animation. La nouvelle mouture de la loi est fortement axée sur l'ordre public, la rigueur et la tranquillité, ce qui est normal, car bien des tenanciers ne sont pas au courant de la discipline dont il faut faire preuve vis-à-vis d'autrui, étant donné - pour certains - le manque de professionnalisme, qui est dû au manque d'une formation sanctionnée par le certificat de capacité de cafetier, restaurateur et hôtelier. Une exception est cependant faite pour l'exploitation d'une buvette d'événements exploitée durant un événement d'importance cantonale. Monsieur le président, il est très agréable de travailler dans le silence ! (Exclamations.)

Enfin, la nouvelle loi défend les tenanciers contre eux-mêmes. En effet, certains s'improvisent restaurateurs en devenant indépendants et en utilisant le capital de leur caisse de pension pour démarrer une affaire qui, pour la grande majorité, finit par une faillite, avec comme conséquence la perte des fonds propres des entrepreneurs. La responsabilité économique de l'exploitation d'un établissement est supportée par une personne physique uniquement, afin que celle-ci puisse être poursuivie, notamment dans le cadre d'un dumping salarial et du contrôle du versement des cotisations sociales. Ainsi, il ne peut pas y avoir une société écran ou une association qui pourrait simplement se dissoudre au moment de devoir répondre de tel ou tel incident.

Il faut relever que cette loi ne constitue pas une sorte de punition à l'égard des acteurs du divertissement et des habitants. Certaines parties prenantes ne sont pas des professionnels responsables et, de ce fait, il y a lieu d'installer des garde-fous relativement sévères afin d'éviter des dérapages et de canaliser certains enthousiasmes à pratiquer de la restauration. Il s'agit d'un métier difficile, en raison tant des horaires et des heures de présence que des prescriptions sanitaires et de la qualité du service.

Suite à l'amendement général, plusieurs entités - notamment celles qui ont été auditionnées - ont salué la clarté du texte et l'abandon de distinctions entre entreprises stables et éphémères. En conclusion, l'UDC acceptera ces deux projets de lois, mais discutera toutefois des amendements qui seront proposés. (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Effectivement, il est beaucoup plus agréable de travailler à l'heure de la sieste... (Rires.) Je passe la parole à M. le député Romain de Sainte Marie.

M. Romain de Sainte Marie (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette loi n'est pas parfaite... (Exclamations.) ...mais elle est déjà bien meilleure que le projet de loi initial déposé par M. Unger, ancien conseiller d'Etat. Cela dit, il ne faut quand même pas non plus jeter la pierre à M. Unger ! Il a eu le souhait et la volonté de refondre ces deux lois - soit la LRDBH et la LSD - en une seule, deux lois vieillissantes et qui nécessitaient effectivement une véritable adaptation, sur plusieurs critères que je vais mentionner. Mais je crois qu'il faut relever - et M. le rapporteur de majorité l'a fait - l'excellent travail fourni au sein de la commission de l'économie. En effet, ce projet de loi a nécessité quand même six à neuf mois de travail en commission ! Six à neuf mois d'auditions ! Et tout était très mal parti, puisque nous avions ces deux pôles qu'on qualifiera d'antithétiques, à savoir la Genève calviniste, comme on peut l'entendre, avec beaucoup d'associations - représentant parfois des quartiers - qui, si on les écoutait, fermeraient les bars dès 23h, et puis d'autres, à l'antithèse, soit les milieux plutôt associatifs en matière culturelle, qui souhaitaient pour leur part un élargissement et une bien plus grande animation.

M. Gabriel Barrillier. Et la synthèse ?!

M. Romain de Sainte Marie. J'arrive à la synthèse, Monsieur Barrillier, mais je laisse un peu de suspense, car la synthèse, vous la connaissez, j'espère, puisque vous avez lu cet excellent projet de loi et que vous avez participé aux différents travaux.

La synthèse, c'est donc ce projet de loi, qui fait suite à l'amendement général déposé par le conseiller d'Etat Pierre Maudet. Ce projet n'est pas parfait, comme je l'ai mentionné, mais il arrive - il faut le dire - à établir un certain compromis entre ces deux pôles. On a pu entendre qu'il s'agissait d'un projet de loi calviniste, mais j'ai un peu de mal à être totalement d'accord quand je vois que dans ce projet nous avons les happy hours ainsi qu'une extension des horaires d'ouverture des cafés-restaurants et des bars jusqu'à 2h du matin pour les jours disons festifs, à savoir les soirées du jeudi, vendredi, samedi et les veilles de jours fériés. C'était une proposition qui faisait partie des revendications du Collectif nocturne ici présent à la tribune et qui figure dans le projet de loi.

Il faut aussi remarquer - et c'est vrai que ça nous a déplu par moments, au sein du groupe socialiste - certaines mesures, en l'occurrence de respect du voisinage, qui sont nécessaires pour établir ce compromis et satisfaire l'ensemble des parties prenantes autour de cette thématique. Et c'est vrai que ce n'était pas partie gagnée ! En effet, après des mois d'auditions sur la première mouture, Mesdames et Messieurs les députés, je crois bien qu'aucune des peut-être vingt-cinq à trente auditions n'a été positive concernant ce projet de loi initial. La commission a donc eu un long travail à fournir pour essayer de satisfaire ces deux côtés, ces deux pôles, et ce projet de loi y tend. Encore une fois, il n'est pas parfait, mais il y tend.

J'ai mentionné là l'aspect de l'animation, mais il y aura également - et il faut l'admettre - des modifications à faire s'agissant du respect du voisinage. On peut penser aux terrasses, mais aussi aux mesures de sanctions relatives à des problématiques d'incivilités.

Il y a en outre un aspect extrêmement important dans ce projet de loi, c'est celui du contrôle des conditions de travail. En effet, le secteur de l'hôtellerie-restauration souffre à ce niveau-là. On le voit, il y a une commission paritaire qui n'est pas un exemple en la matière, il existe un taux de risque de sous-enchère salariale particulièrement élevé et on recense nombre de cas de salaires indécents et de violation des conditions de travail ainsi que de la CCT. C'est un secteur qui par conséquent souffre, et ce projet de loi intervient aujourd'hui comme remède à ces difficultés et à ces problématiques.

En résumé, comme je vous l'ai dit, ce projet de loi n'est pas parfait, mais il tend à un compromis, il tend à améliorer ces différents aspects de l'animation nocturne, de respect du voisinage, et il apporte également des mesures réelles et concrètes pour accroître les contrôles sur les conditions de travail. Au nom du groupe socialiste, je vous invite donc, Mesdames et Messieurs, à accepter l'entrée en matière de ces deux projets de lois et par la suite à discuter des amendements qui seront proposés. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est au premier vice-président, M. Jean-Marc Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, nous nous trouvons face à un excellent rapport - pour lequel je remercie d'ailleurs le rapporteur de majorité - sur un sujet qui a été difficile, encombré et rendu plus touffu par un premier projet de loi complexe, pas toujours clair ni simple, qui est arrivé devant notre commission quasiment en état de mort clinique. C'est la raison pour laquelle vingt et une séances et de nombreuses auditions ont été nécessaires.

Il y avait plusieurs difficultés pour le département et pour les commissaires. La première consistait à concilier la volonté légitime des habitants de pouvoir bénéficier de calme et de repos la nuit, et celle - tout aussi légitime et défendable - de permettre à nos concitoyens de sortir et de boire des verres. La deuxième difficulté résidait dans le fait de ne pas péjorer des activités associatives - sporadiques ou régulières - qui permettent à des groupements, en particulier dans le domaine de la culture et du sport, d'assurer quelques rentrées financières bienvenues. Il y avait enfin la difficulté de concilier les intérêts économiques des exploitants et les droits fondamentaux des travailleurs de la branche, dans un secteur difficile et peu contrôlé, comme cela a été dit tout à l'heure.

Grâce à l'amendement général déposé le 12 mai et complété le 16 juin, après une large consultation de tous les milieux concernés, le département a réussi à concilier ces difficultés et à gommer un nombre assez important d'aspérités du projet de loi. Ce dernier n'est certes pas parfait - j'en conviens bien volontiers - mais il pourra être corrigé par certains amendements. En tous les cas, il contient plusieurs points positifs, en particulier la mise en exergue de la responsabilité individuelle d'organisateur ou de responsable d'association, plus de clarté et de cohérence dans l'ensemble du système proposé par cette législation et le maintien des possibilités de gestion associative. Deux bémols, toutefois: le premier concerne ce fameux phantasme du concept des happy hours, qui plaît tellement, semble-t-il, aux Verts en particulier, alors qu'il constitue pour nous, même s'il ne concernera que la bière, une technique d'appel destinée à des populations plus vulnérables, comme les jeunes, ce qui est fort dommage. Le deuxième regret est celui de ne pas avoir trouvé de solution parfaite pour des jeunes de 16 à 18 ans qui risquent de se retrouver à la rue, sans pouvoir aller dans des établissements qui leur sont destinés. Pour conclure, je vous recommande bien entendu de voter l'entrée en matière.

Mme Salika Wenger (EAG). Je suis toujours un peu amusée quand on discute de ce genre de problèmes. Notamment parce que je constate que, soudainement, tout le monde se réveille et paraît découvrir qu'en ville il y a du bruit et des nuisances. Alors je me dis chaque fois que ces personnes ne savent peut-être pas ce qu'est le milieu urbain !

J'ai l'impression que la loi qui nous a été présentée est presque une loi de censure. Lorsque je l'ai lue la première fois, je dois dire que je n'aurais pas eu besoin que le magistrat vienne la présenter: je la reconnaissais par son écriture, parce qu'elle était exclusivement dans une perspective de contrôle. Or nous savons tous que ce n'est pas ce qui peut se faire de mieux.

Après avoir reçu la pochette surprise de M. Unger, dont nous ne savions pas quoi faire, nous avons commencé à travailler sur ce projet de loi, et je dois avouer qu'il y a un point qui m'a beaucoup gênée, c'est que nous l'avons fait de manière extrêmement confidentielle, dans la mesure où, pendant des semaines, nous avons examiné un projet de loi qui n'avait pas été transmis aux personnes des milieux dont nous étions en train de parler, et il a fallu insister lourdement pour rappeler qu'il aurait peut-être quand même été utile de leur transmettre ce projet afin qu'elles puissent intervenir et nous fournir quelques renseignements. Ça c'est une chose qui a été un peu difficile à comprendre pour moi.

D'autre part, ce projet de loi est un peu rétrograde, j'ai envie de dire, et il me semble que ceux qui l'ont conçu ne connaissent pas la nuit, ne sortent pas la nuit, et dès lors ne se sont pas rendu compte que la nuit, c'est une autre ville, et que ce qui était valable sous Calvin a beaucoup changé depuis. On le voit dans divers articles, et vous recevrez d'ailleurs des amendements qui tentent d'y remédier.

Il y a aussi un point qui m'a beaucoup étonnée, c'est que l'on nous a présenté la population de Genève comme étant double: il y aurait une population du jour et une population de la nuit, une population de travailleurs et une population de ceux qui exagèrent en matière de plaisirs, comme nous l'a dit M. Riedweg. Sauf que ce n'est pas vrai ! Il s'agit de la même population ! C'est la même population qui, quand elle entend du bruit, est navrée du bruit qu'elle entend, et qui, quand elle sort, n'est pas du tout gênée du bruit qu'elle génère. J'ai donc été un peu surprise de voir que l'on nous proposait des lois comme s'il y avait deux populations. Cependant, les syndicats ont été très clairs à cet égard: ils nous ont bien fait entendre que non seulement il n'y avait qu'une seule population, mais aussi que les lois et le respect des lois du travail étaient les mêmes que l'on travaille de jour ou de nuit. Et à ce propos je dois dire que nous avons mené d'excellentes auditions qui nous ont un peu ouvert les yeux sur les conditions de travail et de dumping que vous connaissez tous et dont tous les spécialistes vous ont parlé jusqu'à maintenant.

Genève est une ville peu attrayante la nuit, soyons clairs ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Si nous prenons à la lettre le projet de loi qui nous a été présenté, nous allons transformer cette ville en un mouroir ! (Exclamations.) Il y a effectivement quelques espaces... (Commentaires.) Voilà ! Il y a effectivement des espaces de divertissement, etc., sauf que les prix pratiqués ne sont pas à la portée de tous, et surtout pas des jeunes, plus précisément des 18-20 ans ou 18-25 ans, j'ai envie de dire. Dans cette perspective-là, il n'existe aucun espace pour cette population, alors on peut imaginer que certaines des nuisances dont chacun se plaint sont peut-être la conséquence du fait que cette population n'est jamais prise en compte par personne. Et même si effectivement les boîtes ont l'autorisation d'ouvrir leurs portes aux jeunes de plus de 16 ans, cela ne résout pas le problème, parce qu'il faudrait des espaces qui leur soient totalement dédiés et dans lesquels ils puissent socialiser de manière normale, sans être obligés d'aller se bourrer la gueule dans les parcs. En gros, c'est ça ! (Exclamations. Commentaires.)

Ce projet de loi ne résout donc rien de tout cela. Il y a des contrôles qui sont effectués, mais je le trouve un peu hygiéniste et extrêmement autoritaire. D'ailleurs, quand il nous est parvenu, j'ai eu l'impression que c'était un document du Politburo ! (Rires.) En effet, c'était un document qui prenait en compte principalement la sécurité et pas beaucoup le plaisir... Or, ne vous en déplaise, Monsieur Béné, nous prenons en compte le plaisir d'exister et nous ne sommes pas obligés de le faire uniquement le jour ! Le plaisir ce n'est pas obligatoirement d'aller faire du shopping le dimanche, vous êtes bien d'accord ! (Commentaires. Le président agite la cloche.)

Mesdames et Messieurs, je vous invite donc à voter les amendements qui vous seront présentés et, si ces amendements devaient être refusés, en ce qui nous concerne nous ne voterions pas cette loi. (Exclamations.)

M. Frédéric Hohl (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, personnellement j'ai eu beaucoup de plaisir à écouter Mme Wenger. Je partage d'ailleurs son avis sur plusieurs points mentionnés dans son intervention, notamment s'agissant du bruit: on est dans une ville et il n'est pas nécessaire de se promener avec une GoPro à Genève et de faire des analyses de bruit pour s'en apercevoir. Une ville, c'est une ville, là vous avez parfaitement raison ! Vous avez également tout à fait raison quand vous évoquez le début extrêmement chaotique de l'étude de ce projet de loi: nous avons effectivement perdu en tout cas deux ou trois mois, durant lesquels on se demandait chaque lundi soir ce que l'on faisait là. Heureusement, M. Maudet est venu avec un amendement général, et je le remercie beaucoup d'avoir rendu la loi un peu plus accessible, on va dire.

Nous avons mené énormément d'auditions, et la plupart des personnes liées à ce genre de projet - que ce soient les cafetiers-restaurateurs, les hôteliers, les associations et autres - ont entendu parler de ce projet. Il y a eu beaucoup de travail préparatoire, notamment avec le premier projet de loi de M. Unger, mais également avec le deuxième, je crois donc que tout le monde a été vraiment bien informé.

Oui, ce projet de loi, nous le trouvons moderne, et il répond parfaitement à la demande des cafetiers-restaurateurs et hôteliers, pour un travail moderne et contemporain. (Brouhaha.)

Le président. Messieurs Hiltpold et Deneys, s'il vous plaît !

M. Frédéric Hohl. Je crois qu'ils étaient en train de faire des deals concernant le projet de loi... (Rires.)

Le président. Poursuivez, Monsieur Hohl !

M. Frédéric Hohl. Oui, l'hygiène est très importante, oui, nous voulons des garde-fous, oui, nous voulons des contrôles et, oui, nous voulons que les gens soient formés: qu'il s'agisse d'une association, d'un grand ou d'un petit restaurateur, tous méritent de recevoir une formation. Nous estimons que ce n'est pas une grande affaire que de suivre les cours de cafetier; personnellement, je l'ai fait il y a vingt-cinq ans, et c'était un peu plus compliqué, mais je connais passablement de personnes qui l'ont fait ces derniers mois et ces dernières années et, franchement, c'est pratiquement une formalité ! C'est donc vraiment un détail que de suivre ces cours pour connaître la base, le b.a.-ba de l'hygiène et de l'accueil.

Au niveau des grandes manifestations, ce projet de loi convient parfaitement aux organisateurs. Mme Klopmann disait tout à l'heure que lors de certaines grandes manifestations on aurait pu exiger par exemple que les cours de cafetier aient été suivis, et franchement on pourrait le faire, parce que la plupart des exploitants présents dans les grandes manifestations sont plutôt des cafetiers-restaurateurs. Toutefois, en commission de l'économie nous n'avons pas insisté pour mettre cette indication dans la loi justement pour ne pas embêter les exploitants des plus petites manifestations.

J'en viens ensuite à la lecture de Mme Klopmann sur ce projet de loi: selon elle, c'est une abomination totale, c'est la mort de Genève, c'est la fermeture de tous les bars et de tous les restaurants. Mais je rappelle que ce projet de loi épargne parfaitement les petits clubs ! En effet, qu'un petit club de football dispose d'une petite buvette ne pose aucun problème, pas plus qu'une petite association qui va organiser une fête de quartier. Rappelez-vous qu'il y a des bars associatifs, par exemple l'Usine, qui est l'un des plus grands débits de bières de Genève ! Alors oui, pour moi, dans un bar comme l'Usine, il doit y avoir un responsable, c'est la moindre des choses ! Ce qu'on demande également, c'est qu'il y ait une personne physique, un responsable. On veut un responsable, peu importe la manifestation et la grandeur de celle-ci; on veut savoir que c'est Monsieur X ou Madame Y qui est le ou la responsable de la manifestation, c'est la moindre des choses.

L'objectif, ne l'oublions pas, c'est d'avoir une ville animée. Alors certes, on doit faire attention aux nuisances sonores, mais nous voulons une ville animée, or avec ce projet de loi il est possible de fermer en semaine à 1h du matin, et les jeudis, vendredis et samedis à 2h du matin. Il y a la possibilité, sur dérogation, de prolonger l'ouverture jusqu'à 2h du matin du dimanche au mercredi, et il est même possible, pour certains, d'aller jusqu'à 4h du matin. Mais je dois dire que, comme exploitant, je n'aimerais pas avoir l'autorisation d'ouvrir jusqu'à 4h du matin les lundis, mardis et mercredis, parce qu'il n'y a simplement pas de clients ! Par conséquent, si l'on arrive à être ouvert jusqu'à 1h ou 2h toute la semaine, eh bien c'est déjà formidable !

Oui, nous devons être accueillants pour les jeunes et les moins jeunes, soit pour tout le monde, et je vous incite donc, Mesdames et Messieurs, à bien évidemment entrer en matière et à suivre l'excellent rapporteur de majorité, que je remercie. Oui, nous sommes pour une ville ouverte, oui, nous sommes pour une ville où il y a de l'ambiance mais, oui, nous voulons également des règlements et laisser travailler les professionnels. (Applaudissements.)

M. Edouard Cuendet (PLR). Je me joins au concert de louanges adressé à notre conseiller d'Etat Pierre Maudet, lequel a récupéré une situation qui pouvait être considérée comme désespérée à l'issue des premiers travaux. Nous avons auditionné la terre entière, dans le cadre de la concertation qui est chère à beaucoup, pour savoir ce que la terre entière précisément pensait, et nous sommes parvenus à un résultat qui paraît assez satisfaisant. C'est pour cette raison que je suis un peu stupéfait de l'agressivité, voire de la virulence de la rapporteure de minorité, qui critique le respect des normes, qui critique la responsabilité personnelle des exploitants, qui critique même les exigences en matière d'hygiène et de bruit, et qui voit là une négation de la liberté associative. C'est quand même assez frappant, je dois le dire, parce qu'habituellement son groupe - et l'Alternative en général - est plutôt pour imposer des règles moralisatrices à côté desquelles Calvin, dont on parle beaucoup ici, fait figure de joyeux luron. (Exclamations.) Il faut faire payer le pollueur bruyant, surtout s'il est automobiliste, il faut presque bientôt obliger les gens à manger des produits bio et sans graisse... (Rires.) ...on nous explique ce qui est bon en matière d'énergie et de transport, on nous dicte toutes nos règles de vie, or ici on se trouve dans une constellation totalement différente pour la rapporteure de minorité: aucune liberté n'est trop belle pour le merveilleux monde associatif culturel et autogéré, qui ne doit être exposé à aucun carcan néo-bourgeois ! Un exemple au hasard: l'Usine. Pourquoi l'Usine devrait-elle être soumise aux règles en matière de conventions de travail ? C'est bourgeois ! Pourquoi devrait-elle être soumise aux règles en matière de protection des travailleurs ? On a eu des exemples assez frappants... Pourquoi la protection contre le bruit devrait-elle aussi être prise en compte à l'Usine ? Sans parler des questions d'heures d'ouverture des magas... (Exclamations.) ...des cafés-restaurants.

Soyons sérieux et revenons à une réalité qui est ressortie de nos travaux de commission, dont je salue la qualité. Ce projet est un bon compromis, il instaure un équilibre entre la liberté et la responsabilité personnelle, qui sont des valeurs hautement PLR, et je vous invite donc à l'adopter ! (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le MCG entrera bien entendu en matière sur ce projet de loi et adoptera également un certain nombre d'amendements qui ont été déposés. Un gros travail a été effectué par cette commission, et on peut le saluer, comme on peut saluer M. Unger, qui a été l'initiateur de ce projet de loi, ainsi que M. Maudet, qui a mis sa patte à ce texte. Il s'agit d'un gros travail, d'un gros projet de loi qui concerne plusieurs milliers d'établissements à Genève et qui va sûrement faire évoluer un peu la vie nocturne genevoise.

Mesdames et Messieurs, nous avons traité ces dernières années plusieurs pétitions concernant le bruit, les établissements publics et j'en passe, et j'espère qu'avec ce projet de loi nous pourrons un peu réglementer, réguler la vie nocturne, et non plus faire tout et n'importe quoi, avec des petits arrangements ressemblant à du bricolage.

J'ai entendu la rapporteuse de minorité rouspéter quelque peu à propos des problèmes associatifs et du fait qu'on ne pourra plus faire ce qu'on veut. Effectivement, vous ne pourrez plus faire un peu ce que vous voulez ! D'ailleurs, elle qui est une fervente habituée de l'Usine, je l'engage justement à s'y rendre ! Je pense que ça fait un moment qu'elle n'y est pas allée ou alors elle a dû apprécier... En effet - et je me réfère à la motion ou la résolution qui a été déposée tout à l'heure sur nos places concernant les particules fines - je vous conseille de porter un masque à gaz à l'Usine si vous n'avez pas envie de respirer les odeurs de fumée âcre d'herbes de Provence, on va dire ça comme ça... (Exclamations.) ...qui règnent en maître dans cet endroit. Mais ce doit être une zone de non-droit, justement !

Mesdames et Messieurs, j'aimerais relever notamment deux points qui figurent dans le rapport de minorité de Mme Klopmann. Celle-ci prenait comme exemple les Fêtes de Genève, qui pourraient, paraît-il, selon elle, exploiter des stands sans autorisation. Oui, cela se pourrait, parce que la loi le permettrait, mais en l'occurrence ce n'est pas un très bon exemple, Madame, puisque les organisateurs des Fêtes de Genève se font un point d'honneur d'essayer de choisir un maximum d'exploitants réels, et non pas des farfelus qui viennent comme ça. En revanche, vous auriez pu prendre comme exemple la Fête de la musique, parce qu'il y a là un certain nombre de gens qui exploitent des stands sans autorisation réelle tout au long de l'année. Vous citez également la fête populaire de «La rue est à vous» aux Pâquis, en disant que, selon vous, sous la patte de M. Maudet, alors conseiller administratif, la fête avait disparu. Oui, c'est vrai qu'il y a eu un petit souci d'organisation, puisque la Ville voulait englober toutes les fêtes de «La rue est à vous», mais les Pâquis se sont battus, ils ont pu créer leur fête, et celle-ci ne se déroule pas seulement dans un préau d'école, mais dans tout un quartier. Cette fête est donc bien vivante, et je vous invite à vous y rendre en septembre.

En conclusion, Mesdames et Messieurs, en un mot comme en cent, je vous recommande de suivre les deux projets de lois qui vous sont proposés, ainsi qu'un certain nombre d'amendements dont on aura tout loisir de discuter un peu plus tard. Je vous remercie de votre attention.

Mme Marion Sobanek (S), députée suppléante. Je ne vais pas répéter ce que les uns et les autres ont dit au sujet des réglementations qui sont introduites, mais je vais revenir sur deux aspects. Le premier a trait à la formation: on parle bien d'une formation plus allégée pour les gens qui tiennent des buvettes ou les associations, donc d'un diplôme partiel. Mais ce qui va être dispensé dans ce genre de diplôme partiel, c'est grosso modo ce qu'on doit déjà faire actuellement, c'est-à-dire des rappels concernant le respect de la chaîne du froid, de l'hygiène élémentaire, etc. Et toute la population y gagne si nous sommes assurés que, même lors d'une manifestation sportive où des bénévoles préparent à manger pour se faire un peu d'argent, on respecte les règles de manière que les gens soient en bonne santé en repartant.

Le deuxième aspect concerne les lieux spécialement adaptés aux jeunes, auxquels Mme Wenger a déjà fait allusion. Moi qui suis mère et qui enseigne à des adolescents, je sais très bien que ces lieux manquent, et il est très important qu'on en mette en place et qu'on veille à ce qu'il y ait toujours assez de boissons non alcooliques à disposition, et cela à un prix véritablement adapté. En effet, quand les prix s'élèvent, comme c'est le cas actuellement, à 25 F pour une boisson ou 15 F pour un rafraîchissement non alcoolique, ce n'est tout simplement pas possible ! Ce sont des pratiques qui incitent les jeunes à boire dans les toilettes ou avant de se rendre dans un lieu de loisirs. Je ne peux donc que vous inviter à voter l'entrée en matière de ce projet de loi et à accepter les amendements qui vont vous être présentés.

M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai que ce projet de loi scindé en deux est extrêmement important, cela a été dit. Mais j'aimerais quand même rappeler que le point de départ pour l'entrée en matière est la question de savoir si l'on est aujourd'hui satisfait ou non de la loi actuelle. Et donc à partir du moment où l'on pense qu'il y a un certain nombre de problèmes avec la loi actuelle - peut-être justement pour certains publics et certaines activités - eh bien on peut se dire que le Grand Conseil a de bonnes raisons de vouloir légiférer pour essayer d'améliorer la situation.

Plusieurs problématiques ont été évoquées, que ce soit concernant les horaires d'ouverture, les terrasses ou les conditions de travail, et dès lors ce projet de loi était en quelque sorte bienvenu, même s'il est vrai que certaines auditions ont permis de constater qu'il soulevait également des questions. En effet, les intérêts sont en réalité antinomiques, et ce projet de loi est un cocktail qu'il est manifestement difficile de réaliser avec les ingrédients à disposition: quand on veut étendre les horaires d'ouverture pour satisfaire une clientèle qui aime bien les longues nuits, on est évidemment confronté au problème des voisins qui peut-être dorment et travaillent tôt le lendemain matin. Il y a donc toute une dynamique délicate qui a été le moteur de la commission de l'économie lors de ses travaux.

Je pense qu'aujourd'hui le résultat est équilibré, même s'il y a évidemment des insatisfactions au niveau de tel ou tel public ou tel ou tel secteur et qu'on pourrait dire qu'il serait possible d'aller un peu plus loin, d'étendre différemment les horaires, de contrôler davantage, etc. Mais ce que j'aimerais souligner dans ce débat d'entrée en matière, c'est que si des amendements sont de nature à modifier fortement ce projet de loi, on prend le risque de susciter des oppositions encore plus fortes de divers milieux - d'ailleurs pas forcément de façon convergente, mais chacun pour eux-mêmes. Il faut donc aussi essayer de rester dans un certain équilibre entre des volontés délibérées de la part de tel ou tel secteur d'activité qui mériterait un soutien peut-être plus large et le souhait de garantir une sorte d'intérêt général à défendre. En l'occurrence, des burettes... des buvettes sportives, pardon ! (Rires. Commentaires.) ...aux établissements nocturnes, on ne pourra évidemment pas toujours atteindre un équilibre permettant de satisfaire tout le monde dans le détail. Du reste, entre une fête de quartier ou une vogue et les Fêtes de Genève, il y a une telle différence de manifestation, de taille et de contraintes que les problématiques ne sont pas toujours simples à distinguer dans une seule loi. Il se peut donc que des corrections doivent être apportées par la suite, c'est ce que je pense aujourd'hui. On a ici une loi-cadre qui s'applique bien à la nécessité globale de réforme de la LRDBH, mais il y a des secteurs pour lesquels on ne donne pas de bonne réponse. Je citerai la question des lieux tels que l'Usine, typiquement, pour lesquels on ne donne pas de réponse spécifique s'agissant des dynamiques associatives ou des dynamiques de jeunes qui souhaitent monter des projets avec des règles particulières - peut-être aussi au niveau salarial, d'ailleurs. Ces lieux méritent une reconnaissance que Genève est aujourd'hui incapable d'offrir. Ce n'est pas dans ce projet de loi qu'on y répond, et je pense donc qu'il faudra le reprendre par la suite, après cette première avancée.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Tout le monde ici félicite M. Maudet pour son excellent projet de loi et explique que, grâce à celui-ci, nous n'avons plus de doléances. J'aimerais donc préciser que, oui, ce projet de loi est bien meilleur sur la forme et bien plus clair, c'est indéniable, mais je pense néanmoins qu'il est un peu présomptueux de dire qu'il y a moins de doléances avec ce projet. Premièrement parce que dans le cadre de ce projet de loi on n'a pas consulté toutes les instances concernées, deuxièmement parce que la commission n'a pas repris d'auditions par la suite, et troisièmement parce qu'il a fallu se battre pour que les personnes que nous avions auditionnées dans un premier temps puissent avoir connaissance du nouveau texte. Or nous voyons là tout à coup que, non, tout le monde n'est pas enchanté par ce nouveau projet de loi.

Je voudrais maintenant répondre aux critiques de M. Cuendet, qui me met en cause en trouvant que je suis agressive. Pour ma part je ne pense pas avoir agressé M. Maudet ni avoir été agressive, mais il est simplement légitime de dire que cette loi ne convient pas à tous ici. En outre, je regrette que M. Cuendet soit, lui, un peu plus agressif, et surtout qu'il transforme mes propos. En effet, il dit que je critique les règles ainsi que le respect des lois, mais je vais vous citer deux phrases de ma précédente intervention: «Il est légitime de vouloir préserver le sommeil des dormeurs» et «Il est bien de veiller au respect des normes». (Commentaires.) Je n'ai donc pas critiqué ces normes ! Et, toujours concernant M. Cuendet - vous transmettrez, Monsieur le président - je regrette qu'il critique autant ce monde autogéré qu'il me soupçonne de soutenir plus qu'un autre, car l'autogestion me semble pourtant être un principe habituellement assez libéral. A mon sens, le principe selon lequel chacun se gère est donc bien censé être partagé par nous ici.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Je voudrais juste apporter une précision avant de voter l'entrée en matière. Ce projet de loi a été scindé en deux pour une simple raison, c'est que la partie concernant les taxes doit pouvoir être soumise au référendum facilité, qui requiert uniquement la signature de 500 citoyens. Nous sommes donc face à deux projets de lois: le projet de loi initial, qui ne touche pas à cette problématique des taxes, et le projet de loi 11282-2, qui vise quant à lui à modifier des taxes d'exploitation.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, brièvement, puisque nous en sommes à la question de l'entrée en matière, j'aimerais vous dire que j'ai apprécié tout à l'heure le propos du député Deneys, qui a bien résumé ce que doit être un débat d'entrée en matière. Il s'agit finalement de se poser la question de la pertinence de discuter du sujet et de se demander en quelque sorte si c'est le moment et le lieu de parler de notre façon d'organiser nos estaminets à Genève. L'histoire nous enseigne depuis Calvin que les autorités publiques à Genève en charge de ces estaminets se sont régulièrement cassé les dents, parce que - et Mme Wenger l'a dit à juste titre - lorsqu'on rédige une loi, on veut satisfaire la population. Or en matière d'estaminets il n'y a pas une population, mais des populations: le pluriel est de rigueur ! Les intérêts ne convergent donc pas toujours, parfois - même souvent, dans ce cas d'espèce - ils divergent, et l'on a pu vérifier dans le cadre du travail de la commission à quel point il est difficile de concilier des opinions qui sont parfois fort différentes et qui partent de points de vue très dissemblables de part et d'autre.

Nous avons un impératif de tranquillité publique, c'est aujourd'hui établi, et c'est peut-être l'air du temps qui fait que c'est cet élément qui revient le plus souvent en tête des préoccupations. Nous avons également une préoccupation de santé publique, et à l'époque de Calvin c'était précisément celle-là qui présidait. Nous avons ensuite une préoccupation d'ordre fiscal, comme l'a rappelé il y a un instant le rapporteur de majorité; elle est certes marginale, mais elle existe quand même, et elle explique d'ailleurs la division du projet en deux. Enfin, nous avons évidemment une préoccupation de sécurité publique, ainsi que bien d'autres qui viennent s'y ajouter. Par conséquent - et je veux saluer ici le travail de la commission - tout l'enjeu consistait à faire en sorte que le projet qui allait ressortir de la commission ne réside pas dans le plus petit commun dénominateur, mais aboutisse à quelque chose qui ait un peu de souffle et qui permette de combiner de la façon la plus harmonieuse possible ces positions à la base divergentes.

Dans ce débat d'entrée en matière, j'aimerais rappeler quelques principes qui sont chers au Conseil d'Etat, parce que si d'aventure un certain nombre d'amendements devaient être votés, il faudrait dans l'idéal que ceux-ci respectent les principes qui ont guidé le travail de la commission. Le premier, c'est celui de la concertation. Je répète ici que le travail qui a été effectué en commission au préalable et par la suite se caractérise par un effort de concertation, sans pouvoir satisfaire tout le monde, mais en écoutant quand même celles et ceux qui vont devoir ensuite subir cette loi.

Le deuxième principe - qui est très important, Mesdames et Messieurs les députés, et du reste nous reviendrons le cas échéant avec des demandes, si les amendements vont dans un sens ou dans l'autre - c'est le principe de praticabilité. Il faut que cette loi puisse être appliquée, et c'est bien le défaut que l'on reprochait à la loi précédente: si l'on ordonne des contrôles, si l'on veut vérifier que les dispositions légales sont appliquées, il faut naturellement se donner les moyens de le faire. Nous avons guidé les travaux de commission avec une logique d'économie des moyens et une logique proche de ma philosophie politique qui consiste à faire confiance et à intervenir le cas échéant, si l'on constate que ça ne va pas. Si d'aventure on partait dans une logique de surcontrôle, alors il faudrait le moment venu attribuer au service du commerce les moyens nécessaires afin de précisément vérifier la praticabilité de la loi.

Il y a également le principe de modernité et de lisibilité, et je remercie ici celles et ceux, y compris Mme Klopmann, qui ont reconnu qu'il y avait de la clarté dans ce texte, qu'on le comprenait aisément et qu'un exploitant ordinaire n'avait pas besoin d'avoir fait l'EPFL pour saisir comment s'articulent les normes. A cet égard, il s'agit plus d'une boîte à outils que d'une loi qui nous complique la vie.

Il y a enfin un principe de généralité, et c'est sur ce dernier que je veux insister, Mesdames et Messieurs, parce que nous connaissons tous nos tendances naturelles: le gouvernement aime bien gouverner, gouverner très largement, et le parlement aime bien de temps en temps aussi gouverner et a naturellement la tentation de rendre les normes toujours un peu plus spécifiques. Je vous mets donc ici en garde: il s'agit d'une loi et pas d'un règlement, et la marge de manoeuvre que vous allez octroyer au gouvernement, selon des principes clairement fixés dans la loi, est éminemment importante. Si d'aventure on devait discuter par trop de l'épaisseur du trait, on rendrait de facto cette loi difficile à appliquer. L'idée de manoeuvre qui a présidé au travail de la commission consiste précisément à fixer quelques grands principes, à admettre avec modestie qu'on ne peut pas satisfaire toutes les populations, mais qu'il faut essayer de les satisfaire à des intervalles de temps différents, et par conséquent à ne pas aboutir à une loi qui serait du bouillon pour les morts, impossible à appliquer, et de surcroît sclérosante. Comme le dit l'adage, il ne faut pas confondre ici une cuvette à bouillon et... Je vous laisse faire la contrepèterie ! (Rires.)

Utiliser la burette d'huile, comme dirait M. Deneys - et c'est important - ne pas en mettre trop, parce qu'il faut quand même de la solidité, et ne pas non plus aller trop dans le détail, c'est ce que je nous souhaite à la faveur de ce débat, qui devrait nous permettre, au terme de celui-ci - et je conclurai par là, Mesdames et Messieurs - d'aboutir en fin d'après-midi à l'une des réformes importantes sinon fondamentales de cette législature, qui inaugure un cycle de plusieurs lois économiques que nous allons revoir. La prochaine au calendrier est la LHOM, la loi sur les heures d'ouverture des magasins, sur laquelle nous travaillons en concertation avec les partenaires sociaux, et la suivante est naturellement, vous l'avez compris - alors même que celle que vous avez votée il y a un an n'a pas été appliquée - la loi sur les taxis, loi économique importante qui, à la faveur de changements récents, va nécessiter un nouveau passage ici. J'aimerais donc pouvoir croire avec vous que le vote sur la LRDBHD de cet après-midi augure d'une façon de travailler grâce à laquelle, en n'étant ni trop général ni trop spécifique, en posant des grands principes, en se laissant une latitude et en ayant le souci de la praticabilité, on va d'une certaine façon restaurer l'autorité de l'Etat, pour le bien de tous. Je vous remercie et me réjouis de ce débat.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous allons procéder de la manière suivante: je vais vous faire voter sur l'entrée en matière du PL 11282-1, puis nous l'examinerons en deuxième et en troisième débat, et seulement ensuite nous traiterons le PL 11282-2. Je mets donc aux voix l'entrée en matière du PL 11282-1.

Mis aux voix, le projet de loi 11282-1 est adopté en premier débat par 85 oui et 1 abstention.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. A l'article 1, alinéa 3, nous sommes saisis d'un amendement de Mme de Montmollin. En voici la teneur:

«Art. 1, al. 3 (nouvelle teneur)

3 La présente loi a également pour but d'offrir aux propriétaires et exploitants d'établissements des conditions commerciales loyales, une sensibilisation aux produits du terroir genevois et à leurs modes d'approvisionnement et d'assurer une protection optimale des consommateurs et des travailleurs, notamment par la formation des exploitants.»

Madame de Montmollin, vous avez la parole.

Mme Simone de Montmollin (PLR). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, le PLR vous propose cet amendement, que je vais vous présenter ici en son nom. Cette loi est une loi de police qui règle les conditions d'exploitation des différents lieux voués à la restauration et au débit de boissons, et il nous semblait important que la qualité reste aussi une préoccupation présente dans ces dispositions, c'est pourquoi nous souhaitons préciser dans les buts de cette loi le principe d'une sensibilisation aux produits du terroir genevois et à leurs modes d'approvisionnement.

En effet, les professionnels de la restauration sont des acteurs économiques importants qui participent au rayonnement de Genève, et cela bien au-delà de ses frontières. Or, depuis un certain nombre d'années, il y a une demande toujours plus grande de la part des consommateurs pour des produits locaux, et cette demande ne cesse d'augmenter. La traçabilité, la fraîcheur, la protection de l'environnement, la qualité et l'authenticité sont autant d'éléments que les consommateurs et consommatrices sont désormais désireux de pouvoir respecter, et c'est une tendance générale observée partout, particulièrement dans les régions urbaines. Le consommateur veut savoir ce qu'il y a derrière un produit, comment il a été fabriqué et d'où il vient. A Genève, cette demande s'est accompagnée d'un développement réjouissant de l'offre en produits agricoles locaux, frais ou transformés, dont la diversité et l'originalité sont à saluer. Ce sont des produits concurrentiels par rapport au reste de l'approvisionnement et souvent de meilleure qualité. Parallèlement, du côté de la restauration on observe souvent une méconnaissance de ces produits locaux. L'une des raisons provient du fait que sur l'ensemble des acteurs de la restauration, le turnover annuel à Genève est très élevé: on parle de 30%, c'est-à-dire autant de nouveaux gérants en provenance d'horizons divers et dont la majorité ne connaît ni les traditions, ni les produits locaux, ni les possibilités de les obtenir. Ces gérants sont pourtant susceptibles de devenir des prescripteurs et des ambassadeurs importants des productions et traditions locales. Il nous paraît donc judicieux de permettre à tous les acteurs - et particulièrement aux restauratrices et restaurateurs, qui sont au contact des consommateurs - de profiter de cette tendance en leur apportant une connaissance actualisée des produits et de leurs possibilités d'approvisionnement.

Alors pourquoi à l'article 1 ? Cet ajout, bien que modeste, concrétise par sa portée générale et symbolique plusieurs dispositions existantes, à commencer par des dispositions figurant dans la constitution. En effet, il est stipulé en son article 185 que «l'Etat crée un environnement favorable à une économie libre, responsable, diversifiée et solidaire» et, en son article 187, qu'il «promeut les produits agricoles du canton». La loi sur la promotion de l'agriculture complète ces dispositions et énonce en son article 13 que «la consommation de produits agricoles genevois dans la restauration est encouragée». Or, dix ans après l'introduction de cette disposition, nous constatons qu'encore aujourd'hui elle est essentiellement fondée sur le volontarisme.

Cet amendement, Mesdames et Messieurs les députés, concrétise des dispositions constitutionnelles tout en laissant une certaine flexibilité sur le plan de la mise en oeuvre. En renforçant la connaissance de la production agricole genevoise et de ses filières auprès des acteurs de la restauration, on s'assure que l'offre qualitative et originale des produits locaux et de toutes les filières qui en dépendent soit la plus large possible pour le consommateur. Tout le monde a à y gagner: en misant sur l'alimentation de proximité, c'est un service pour le consommateur, donc un plus pour le restaurateur; c'est également un plus pour l'image de Genève et, surtout, c'est un moyen de donner des perspectives et une reconnaissance aux familles paysannes ainsi qu'aux entreprises de ces filières qui fournissent des emplois et participent significativement au maintien d'une économie libre, diversifiée, responsable et solidaire. A la lumière de ces éléments, je vous demande de faire bon accueil à cet amendement et vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

Une voix. Très bien !

Une autre voix. Bravo !

M. Romain de Sainte Marie (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous accueillons favorablement cet amendement, bien qu'il soit formulé d'une façon un peu approximative. En effet, mentionner dans les buts de la loi la «sensibilisation aux produits du terroir genevois et à leurs modes d'approvisionnement»... On n'imaginerait pas nécessairement faire figurer cette phrase à cet article, mais il est vrai que cet amendement est l'expression de l'entier de la loi, puisque plusieurs articles vont dans le même sens, qui est celui de promouvoir et de favoriser une production mais surtout une consommation locales d'excellents produits du terroir genevois. D'ailleurs, comme on a pu le voir, le label Genève Région - Terre Avenir, soit GRTA, est un exemple même de réussite, dans la mesure où bon nombre de Genevoises et de Genevois le connaissent aujourd'hui et consomment ce type de produits. Et c'est un label de qualité.

En outre, comme l'a souligné Mme de Montmollin, ces mesures-là font effet à trois niveaux. Le premier concerne l'environnement, puisque consommer des produits issus de l'agriculture genevoise engendre des coûts environnementaux de transport extrêmement faibles. Le deuxième effet est l'impact important sur l'économie locale, car on sait aujourd'hui que la concurrence avec les produits européens issus de l'agriculture souffre terriblement du franc fort, c'est donc un amendement positif dans ce sens-là. Enfin, comme je le disais, cet amendement est l'expression même de cette loi. Du reste, j'espère que ce n'est pas un amendement de substitution à d'autres articles figurant dans cette loi, notamment s'agissant de l'obligation pour les établissements du canton de proposer des vins genevois. En effet, cet article qui provient d'amendements déposés au sein de la commission fait également partie du domaine de la promotion, comme c'est le cas par exemple dans le canton de Vaud, qui possède le même article obligeant les établissements du canton à proposer au moins un vin vaudois sur leur carte. Pour rappel, la majorité de la commission a voté cet amendement, car elle a estimé qu'il allait dans le sens de la promotion des produits du terroir en faisant connaître la qualité des vins genevois - puisqu'on peut véritablement parler aujourd'hui de qualité des vins genevois - et plus largement de l'ensemble des produits du terroir.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera cet amendement et espère bien qu'il ne s'agit pas d'un amendement de substitution ou de bonne conscience de la part du groupe PLR.

Une voix. Bravo !

M. François Lefort (Ve). Les Verts sont reconnaissants au PLR de proposer cet amendement parce que, oui, il faut sensibiliser la population et les exploitants des restaurants aux produits locaux. Consommer local, c'est plus écologique: manger de la féra sauvage du lac est plus écologique que de manger du pangasius élevé dans le Mékong comme plat du jour - plat du jour qui a évidemment tendance à se répandre à Genève. Alors oui, les Verts sont favorables à cet amendement, car il exprime ce que disent les Verts en tout temps concernant la consommation et la promotion de produits locaux. Cet amendement fera donc des exploitants des promoteurs actifs des produits du terroir, et les Verts le voteront bien sûr avec plaisir.

M. Jean-François Girardet (MCG). Nous voici face à un amendement qui a été signé par la plupart d'entre nous, notamment les membres de la commission de l'économie. C'est un amendement qui donne une orientation à cette loi, puisqu'il modifie l'alinéa 3 du premier article en mettant l'accent sur la production locale et la promotion de la consommation de produits locaux. Cet amendement pourrait et devrait être un encouragement à la production et à la consommation de produits du label GRTA entre autres. Effectivement, comme l'a souligné le député socialiste, il est actuellement vraiment notable que les consommations locales sont largement en concurrence, notamment en raison du franc fort et de la concurrence avec les produits vendus en France, puisque certains de nos citoyens pratiquent le tourisme d'achat et vont s'approvisionner en France à meilleur prix pour les mêmes produits.

Par conséquent, nous orientons clairement notre volonté vers la consommation locale et les produits locaux. Et nous en rediscuterons à propos de l'amendement qui a été suggéré par la commission et qui vise à privilégier la consommation de vins genevois en rendant obligatoire l'inscription d'un vin genevois sur les cartes des restaurants et établissements genevois. Nous aurons donc l'occasion de revenir sur cet amendement ainsi que sur celui qui vise à encourager la consommation locale de produits viticoles et de vins genevois. Je pense que ce serait aussi faire honneur à l'effort fourni par nos viticulteurs que de mettre également l'accent, comme cela se fait dans le canton de Vaud, sur la consommation locale dans les restaurants de notre canton.

M. Patrick Lussi (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe UDC soutiendra cet amendement. Contrairement à ce que vient de dire mon préopinant, il s'agit d'une sensibilisation aux produits du terroir genevois. Nous reviendrons au moment opportun sur la production vinicole, mais il faut rappeler que les produits du terroir genevois, ce sont aussi nos maraîchers, les fruits et légumes, un peu de boucherie et quelques porcheries, sans oublier la fameuse longeole genevoise. Bref, c'est tout un panel de produits qui le méritent. Cela dit, sensibiliser ne veut pas dire obliger, mais puisqu'on est dans une phase de formation, sensibiliser est hautement nécessaire. Et la seule chose qu'on pourrait encore ajouter, c'est que cet article parle bien sûr de la protection des travailleurs dans le secteur, notamment par le biais de la formation des exploitants, mais grâce à cette sensibilisation nous offrons aussi des emplois et des conditions à tout un personnel travaillant à la fabrication de nos produits dans les zones agricoles genevoises, et je parle non seulement des produits provenant de la terre mais aussi de ceux qui sont issus d'une transformation.

J'aimais bien quand, à l'époque, on se moquait de nous en disant que les gendarmes étaient formés dans l'ex-usine de cornichons Chirat... Pourtant, Dieu sait s'il est agréable de manger des cornichons avec la raclette ! En conclusion, le groupe UDC vous enjoint d'accepter cet amendement.

Mme Salika Wenger (EAG). Chers collègues, nous accepterons cet amendement, car nous pensons qu'il est suffisamment large pour être adopté. Néanmoins, quand j'entends le discours de ceux qui voudraient privilégier dans la loi la production genevoise, j'ai l'impression que c'est faire injure aux producteurs ! En effet, le seul critère devrait être la qualité du produit et pas simplement l'inscription dans la loi de l'obligation de le consommer. Ne faites donc pas en sorte que la population puisse penser que cette production est tellement médiocre que nous devons obliger nos concitoyens à la consommer ! C'est dommage !

Par ailleurs, j'ai bien entendu le problème du franc fort, mais il n'empêche que nous savons tous que les produits genevois sont très chers et que le vin genevois, même s'il est bon... (Commentaires.) ...même quand il est bon... Bien ! (Rire de l'oratrice.) ...est toujours trop cher, ce qui constitue à mon avis la difficulté principale de cette consommation. Mais il n'est pas nécessaire d'inscrire véritablement dans la loi le fait que nous pensions qu'il faudrait faire un effort: je crois qu'il est largement suffisant de le dire de manière aussi générale que le fait cet amendement. Et pour ce qui est de l'obligation d'avoir sur sa carte et de proposer des vins genevois, j'espère qu'il y aura également, pour tous les bistrots qui font de la cuisine, l'obligation de servir des cardons et de la longeole ! (Commentaires.) Cela me paraît être une absurdité totale... Restons-en à cet amendement général qui est convenable, du moins qui convient parfaitement au groupe Ensemble à Gauche, mais nous ne voterons en aucun cas l'obligation d'avoir sur sa carte des vins genevois.

M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, comme mon collègue Romain de Sainte Marie l'a déjà dit, le groupe socialiste votera cet amendement. Au sujet de cette sensibilisation aux produits du terroir, il y a trois aspects qui pour moi sont très importants. Deux d'entre eux ont déjà été cités, à savoir le soutien à notre agriculture et à notre viticulture régionales, ainsi que - M. Lefort l'a évoqué - la protection de l'environnement: je veux parler des produits qui ne proviennent pas d'autres continents et qui n'ont pas parcouru des dizaines de milliers de kilomètres en bateau, en camion, voire en avion pour certains.

Quant au troisième aspect - qui n'a pas été cité, raison pour laquelle je prends la parole - c'est celui des conditions de travail... (Exclamations.) ...des personnes qui récoltent les fruits, les légumes, etc. dans ces pays, notamment dans le sud de l'Europe, le Maghreb ou encore plus loin. Aujourd'hui, quand vous allez faire vos courses, Monsieur le président, que trouvez-vous ? Eh bien des myrtilles, par exemple ! D'ailleurs mes enfants adorent les myrtilles, alors quand ils sont avec moi ils me disent: «Oh, des myrtilles, papa ! On aimerait des myrtilles !» Or quand on regarde leur provenance, on s'aperçoit qu'elles viennent du Costa Rica. Je crois que maintenant elles viennent du sud de l'Espagne, mais le mois dernier elles provenaient d'un pays comme le Costa Rica. Et Mme Marti me parlait des haricots qui viennent du Kenya, etc. Mais dans quel monde vit-on ? Alors oui, c'est la globalisation, mais je vais vous dire à quoi ressemble aujourd'hui la globalisation des produits qu'on consomme: ce sont des produits qui viennent de tous les continents, du sud de l'Europe, je l'ai dit, du Maghreb, etc., et pour ce qui est des conditions de travail des personnes qui font les récoltes, eh bien celles-ci touchent cinq euros au mieux et dorment dans des dortoirs. Elles sont quasiment en situation d'esclavagisme moderne... (Commentaires.) ...tout ça pour que nous, nous puissions aller à la Coop, à la Migros ou ailleurs et consommer ce genre de produits. Il en va de même pour les cafés et les restaurants, et c'est pour cette raison que nous accepterons cet amendement, car il est important de sensibiliser nos restaurateurs, nos cafetiers, etc., ainsi que les gens qui fréquentent nos cafés-restaurants, à la consommation de produits locaux. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Pascal Spuhler. (Commentaires. Un instant s'écoule.) C'est quand vous le souhaitez !

M. Pascal Spuhler (MCG). Excusez-moi, Monsieur le président, votre groupe me perturbait, comme vous avez pu le voir ! Non, je plaisante, nous discutions d'un amendement que nous allons traiter plus tard.

Concernant cet article 1 modifié, nous pensons que la sensibilisation aux produits du terroir est clairement très importante, mais une obligation serait totalement ridicule: on tomberait évidemment dans l'excès et dans la consommation de produits de basse catégorie juste pour dire que l'on a des produits du terroir. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Une obligation relative au vin, par exemple, serait ridicule ! En effet, obliger notamment un restaurant spécialisé dans une cuisine exotique à servir absolument un vin genevois serait un peu absurde. Nous sommes donc totalement pour une sensibilisation à l'utilisation des produits du terroir, mais pas pour une obligation à ce niveau-là.

M. Gabriel Barrillier (PLR). Mesdames et Messieurs, je n'avais pas l'intention d'intervenir, mais je le fais suite aux propos de M. Wenger, dont la remarque sur les conditions sociales va dans le bon sens et qui parle du fait que les vins genevois et suisses sont trop chers. Chers collègues, vous ne devez pas oublier que, comme dans d'autres secteurs - par exemple la construction, que je connais un peu mieux - il y a des conditions de travail, des contrats types dont les conditions sont fixées tous les deux ans, sauf erreur, par le Conseil d'Etat et la commission... Son nom m'échappe ! (Remarque.) La CRCT, voilà ! Or, chers collègues, chez Denner, pour prendre un exemple, vous avez des vins du Chili - je sais que ça ne va peut-être pas faire plaisir au rapporteur de majorité - des vins qui ont parcouru 12 000 kilomètres, mais les ouvriers, combien sont-ils payés là-bas ? (Commentaires.) 200 dollars ? Par année ? (Remarque.) Ah, par mois, quand même ! Ce sont peut-être de bons vins, mais vous devez être conscients du fait que les conditions sociales dans le secteur de la production de vins, pour prendre cet exemple, ne sont pas comparables, sans parler des 12 000 kilomètres de déplacement. Cela, il faut le dire aux gens ! Il faut le dire aux consommateurs ! Il n'y a pas d'obligation d'aller acheter ce type de produits. Mais lorsque vous voyez des publicités pour douze bouteilles de vin à 12,50 F provenant de je ne sais plus où - ah oui, d'Afrique du Sud - vous devez vraiment réaliser que les conditions sociales sont absolument en dessous de tout ! Je le dis haut et fort - j'ai encouragé mon collègue Georges à intervenir, il apprend son métier... - parce que, dans la construction, nous faisons en sorte depuis trente ans de faire comprendre que, si l'on veut avoir des gens qui travaillent chez nous et qui exercent des métiers respectés, il faut les payer et leur offrir des conditions correctes. Et c'est notre boulot d'aller convaincre le consommateur ! (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Eric Stauffer (MCG). Mais comment ? Le MCG vient d'entendre que vous êtes pour la préférence cantonale en matière de nourriture ? (Rires.) J'en suis encore tout retourné, chers collègues ! (Commentaires.) Non, il ne faut pas me faire des choses comme ça un jeudi après-midi, je suis quand même sensible ! Quoi qu'il en soit, c'est la démonstration que l'hypocrisie règne en maître dans cet hémicycle. En effet, quand il s'agit de satisfaire vos estomacs, la préférence cantonale est de mise - il faut acheter local et consommer les produits du terroir - mais quant à donner la préférence cantonale aux gens qui résident dans le canton, alors là, vive l'Europe, vive la mondialisation, tout le monde dans le même bateau ! Non mais c'est extraordinaire ! Extraordinaire, chers collègues ! Bien entendu, le MCG est très sensible à la fibre de l'agriculture, à ces agriculteurs qui cultivent notre terre et qui produisent d'excellents breuvages, nectars, et d'autres choses encore. A ce propos, j'aimerais vous rappeler que, dans la mise en application de la politique MCG, une commune que je connais bien parmi les quarante-cinq et qui s'appelle Onex a créé un marché dominical ! Avec la promotion des produits du terroir, notamment le label GRTA, soit Genève Région - Terre Avenir. Eh bien oui, vous voyez que la politique MCG fonctionne: vous vous apprêtez à voter unanimement la préférence cantonale en matière d'aliments, alors il ne vous reste qu'un tout petit pas à faire encore pour la préférence cantonale en matière d'emplois... (Commentaires.) ...et nous vous offrons la cotisation au MCG pour une année ! C'est promis, je m'y engage personnellement ! (Applaudissements.)

M. Alberto Velasco (S). J'aimerais juste intervenir suite aux propos de M. Barrillier concernant les conditions de travail dans ces pays lointains. Mon collègue Christian Dandrès, avec qui j'ai parlé tout à l'heure, a eu vent que ces conditions de travail existent également dans notre canton. En effet, il y a des gens qui vivent dans des conditions indécentes, avec des salaires indécents, chez certains maraîchers, semblerait-il, qu'on ne méconnaît du reste pas, puisque certains syndicalistes les connaissent. Ce que je veux dire par là, c'est qu'il faut balayer devant votre porte avant de commencer à parler de ce qui se passe ailleurs ! Ici aussi il y a des conditions de travail qui sont difficiles et qu'on ne respecte pas. Combien de sans-papiers travaillent chez nous ? Ils sont surexploités, et on les connaît ! Ces conditions sociales existent donc partout, à cause du système économique que nous avons établi sur place, c'est cela la vérité.

Et puis, Mesdames et Messieurs, la libre circulation des produits, c'est vous qui l'avez instaurée ! Je pense aussi à l'OMC et autres libéralisations... De même que la libre circulation des travailleurs ! C'est tout un concept de société qui se met en place, alors soyez cohérents ! On ne peut pas refuser quelque chose pour les uns et l'accepter pour les autres. C'est un schéma global que vous avez mis en place et qui a sa cohérence. On est tous dans le bac à sable et on essaie d'arranger les choses ! Voilà ce que j'avais à dire. (Quelques applaudissements.)

M. Eric Leyvraz (UDC). Je ne peux pas laisser M. Velasco dire ce que nous venons d'entendre - vous transmettrez, Monsieur le président. On peut toujours faire mieux, mais les ouvriers agricoles à Genève sont les mieux payés de Suisse, avec qui plus est les horaires les plus avantageux. En effet, il y a encore des cantons suisses où l'on travaille soixante-six heures par semaine dans l'agriculture. Nous en sommes bien loin, et heureusement ! Alors, Monsieur Valesco... Alberto...

Une voix. Velasco !

M. Eric Leyvraz. ...vous pouvez simplement dire qu'on peut toujours faire mieux, mais que les conditions offertes ici sont excellentes. Et je vous rappelle qu'il n'y a pas besoin d'aller très loin de Genève pour voir des conditions lamentables, avec des vins qui nous font une concurrence terrible ! Ce sont les vins qui proviennent d'Allemagne - d'excellents chasselas, d'ailleurs - où l'on paie des ouvriers agricoles venus de Bulgarie 500 euros par mois, nourris et logés. Voilà un exemple ! (Applaudissements.)

M. Georges Vuillod (PLR). Monsieur le président, vous transmettrez à M. Velasco que les conditions de travail dans l'agriculture genevoise sont très contrôlées et très bien contrôlées. La CRCT réactualise très régulièrement les conditions et elle le fait tellement bien que, à titre d'exemple, nous vivons actuellement dans l'économie agricole genevoise avec un écart de 25% en coût horaire par rapport au canton de Zurich.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Nous allons à présent nous prononcer sur cet amendement à l'article 1, alinéa 3, dont je vous rappelle la teneur:

«Art. 1, al. 3 (nouvelle teneur)

3 La présente loi a également pour but d'offrir aux propriétaires et exploitants d'établissements des conditions commerciales loyales, une sensibilisation aux produits du terroir genevois et à leurs modes d'approvisionnement et d'assurer une protection optimale des consommateurs et des travailleurs, notamment par la formation des exploitants.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 84 oui et 2 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 1 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 2 est adopté.

Le président. A l'article 3, nous sommes saisis de plusieurs amendements. Le premier émane de Mme Klopmann et concerne la lettre d). Le voici:

«Art. 3, lettre d (nouvelle teneur)

d) événements de divertissement public: les manifestations ponctuelles ou récurrentes vouées à la récréation de la population, organisées en salle ou en plein air, tels les festivals, les concerts, les animations, les projections, les expositions, les spectacles, les opéras, les bals, les soirées dansantes ou les fêtes populaires;»

Madame Klopmann, vous avez la parole.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. J'ai déjà indirectement annoncé cet amendement lors de mon intervention au premier débat. Il s'agit d'un amendement vraiment simple et logique - pas polémique du tout, pour une fois - qui demande d'étendre un peu la définition d'un «événement de divertissement public». Comme je l'ai dit tout à l'heure, cette fusion de la LRDBH avec la LSD a quand même passablement restreint le domaine du divertissement, et actuellement la loi n'admet, parmi les événements de divertissement public, que quelques manifestations telles que les fêtes populaires, les soirées dansantes, les opéras, les bals, etc. Toutes ces animations sont très agréables, mais elles ne me semblent pas forcément représenter l'ensemble du divertissement genevois, raison pour laquelle l'Alternative vous suggère d'ajouter à cette liste d'événements «les animations, les projections, les expositions, les spectacles», afin d'avoir un panel du divertissement culturel un peu plus représentatif de la réalité.

Le président. Merci, Madame la rapporteure. La parole est à M. le député Christo Ivanov.

M. Christo Ivanov. C'est une erreur, Monsieur le président !

Le président. Très bien, je passe donc le micro à M. Thomas Wenger.

M. Thomas Wenger (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je ne vais pas être long ! J'aimerais juste dire qu'on soutient totalement cet amendement ainsi que l'argumentation de Mme Klopmann. Effectivement, on voit qu'on a pensé aux opéras, aux bals, aux soirées dansantes - j'ai d'ailleurs été assez étonné que les thés dansants ne soient pas mentionnés ! - par contre on pense un peu moins aux expositions, aux projections et à certaines animations. Par conséquent, afin qu'il y ait une culture un peu plus représentative de ce qui se passe à Genève aujourd'hui, je pense qu'il est bien d'accepter cet amendement.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, nous allons voter sur cet amendement à l'article 3, lettre d).

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 47 non contre 31 oui et 1 abstention.

Le président. Nous sommes maintenant saisis d'un amendement de Mme Klopmann à la lettre n) de cet article 3. En voici la teneur:

«Art. 3, lettre n (nouvelle teneur)

n) exploitant: la ou les personnes physiques responsables de l'entreprise, qui exercent effectivement et à titre personnel toutes les tâches relevant de la gestion de celle-ci;»

Je passe la parole à Mme Klopmann, si elle le souhaite.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Oui, volontiers. Merci, Monsieur le président ! En préambule, j'aimerais signaler que cet amendement n'est pas uniquement le mien, puisqu'il émane de toute l'Alternative, et nous avons mis passablement d'eau dans notre vin avec cet amendement et les deux suivants... (Exclamations. Commentaires.) De l'eau du robinet dans du vin genevois, évidemment ! De l'eau gratuite ! (Commentaires.)

Le projet de loi tel qu'il se présente actuellement définit qu'un exploitant ne doit être qu'une personne physique responsable. Nous comprenons bien le principe consistant à mettre la responsabilité sur une seule personne afin d'éviter les faillites frauduleuses avec l'éventualité d'une personne morale qui pourrait être l'exploitant d'un établissement, mais cela est néanmoins très restrictif et empêche toute gestion associative et même une gestion partagée. En effet, il se peut qu'un établissement soit actuellement géré par deux personnes qui ont des compétences et des prérogatives égales en matière de gestion, lesquelles se trouveraient tout d'un coup obligées de définir une seule d'entre elles comme exploitant officiel. Cela implique que la responsabilité n'est portée que par une seule personne, qui de fait prendrait l'ascendant sur l'autre, ce qui impose un lien de hiérarchie. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Nous pensons donc qu'une petite ouverture - sans toutefois risquer des faillites frauduleuses - nous permettrait de maintenir à Genève la gestion associative ou simplement, pour ceux qui n'aiment pas forcément la gestion associative, le fait que deux personnes gèrent ensemble un établissement. Je suis désolée, c'était un peu confus !

Le président. Merci, Madame la rapporteure. Monsieur le rapporteur, vous voulez prendre la parole tout de suite ou à la fin ? (Remarque.) A la fin, très bien. Je passe donc le micro à M. Romain de Sainte Marie.

M. Romain de Sainte Marie (S). Merci, Monsieur le président. Cet amendement, qu'on peut qualifier d'édulcoré par rapport aux différents travaux en commission, tend effectivement à respecter l'activité des milieux associatifs en ce qui concerne les établissements. Du reste, je pense qu'on peut traiter ensemble les différents amendements qui touchent les lettres n), p) et q) de l'article 3 et qui ont trait à la responsabilité. En effet, il est certain que dans le monde associatif, que ce soit en matière de gestion des risques ou de gestion financière, il n'est généralement pas courant de n'avoir qu'une seule signature, qu'une seule responsabilité. Celle-ci est habituellement partagée par en tout cas deux personnes, voire plus, et c'est pourquoi cet amendement vous propose de préciser que la responsabilité porte sur une ou plusieurs personnes physiques, ce qui permettrait de prendre en compte l'organisation des différentes associations selon leurs statuts, avec par conséquent la possibilité que la responsabilité soit prise par les membres d'un comité selon les statuts de l'association. En conclusion, nous vous invitons à réserver un accueil favorable à ces trois amendements. (Applaudissements.)

M. Frédéric Hohl (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, on a longuement parlé de cette problématique, mais elle n'a rien à voir avec le monde associatif ! Dans le monde commercial également il peut y avoir plusieurs personnes, parmi lesquelles on en choisit une. C'est aussi simple que ça ! On demande une personne responsable. Que ce soit dans le monde associatif ou commercial, on demande une personne. C'est aussi simple que ça ! Il est donc bien évident que nous allons refuser cet amendement. (Exclamations.)

M. Pascal Spuhler (MCG). Effectivement, on peut se demander s'il ne faut pas hiérarchiser les associés, mais par principe il n'y a pas de hiérarchie - et leur nom l'indique - entre les associés, surtout s'ils le sont à 50/50, et tous deux sont coresponsables. On peut donc également imaginer cette situation ici ! Evidemment, ça devient tout de suite un peu plus compliqué lorsqu'on parle d'une association ou d'un comité d'organisation, parce que là automatiquement il doit y avoir un responsable - un président, un directeur du bureau du comité, etc. Mais c'est à l'interne même que ça va se hiérarchiser, ce n'est pas dans la loi qu'on doit établir une hiérarchie. Car dans le cas d'une gestion assurée par deux associés, un couple qui exploiterait un café, par exemple, pourquoi madame serait-elle plus responsable que monsieur ? Toute la question est là ! La loi voudrait désigner un coupable, mais les coupables ce sont les deux exploitants à 50/50, Mesdames et Messieurs, point barre ! Les termes «la ou les» sont donc justifiés.

Lorsqu'il s'agit d'une association, c'est autre chose, on parle d'un groupement qui se réunit et qui est géré en général non pas par dix associés, mais par un comité comprenant un président de l'association, un directeur, etc., qui par principe sera le répondant vis-à-vis de la loi. Donc c'est l'association elle-même qui définit le responsable, le répondant vis-à-vis de la loi. Là on parle bien de la problématique - et l'amendement de Mme Klopmann tombe à point nommé - de deux associés ou d'un couple, qui à mon sens constitue un parfait cas de figure, car quand on prend l'exemple d'un couple, on voit qu'il n'y a pas de raison que madame soit plus responsable que monsieur - ou monsieur plus que madame, évidemment !

M. Patrick Lussi (UDC). On rentre là vraiment dans la dialectique concernant les responsabilités. Mais d'abord l'Union démocratique du centre aimerait quand même faire remarquer qu'entre la lettre m) et la lettre n) sur laquelle porte l'amendement dont on est en train de discuter, il y a cette petite phrase en italique: «Personnes visées par la loi». On n'est donc plus dans l'exploitation, et il s'agit simplement de savoir, par rapport à toutes les dispositions qui sont citées, qui doit être le responsable. Doit-on avoir une association ? Doit-on avoir plusieurs personnes ? Ou bien les associations doivent-elles désigner quelqu'un pour la loi ? L'Union démocratique du centre estime que la lettre n) telle qu'elle est libellée actuellement mérite qu'une seule personne soit définie. Pourquoi aller plus loin ? Bien sûr, je comprends les velléités du monde associatif mais, si j'ose dire, c'est justement avec le monde associatif souvent qu'on se retrouve avec des problèmes. En conséquence, l'Union démocratique du centre refusera cet amendement. (Exclamations.)

M. Serge Hiltpold (PLR). C'est vrai qu'en commission on a passablement parlé de ce problème de responsabilité, et on a pu constater lors des débats qu'on demandait forcément, lorsqu'il y avait une société anonyme, que l'administrateur assume cette responsabilité. L'amendement à la lettre n) dont nous parlons va donc dans le bon sens, puisqu'il vise à désigner une personne physique, et nous le soutiendrons, de même que l'amendement suivant à la lettre p). Et s'agissant du doute qui pouvait exister quant à la question d'avoir plusieurs responsables, à mon avis ça ne pose aucun problème, en tout cas pour notre groupe, parce qu'on peut désigner plusieurs personnes. Ce qui est important, c'est d'avoir des responsables, et le fait d'en avoir plusieurs ne pose pas problème. Nous soutiendrons donc ces deux amendements concernant les lettres n) et p).

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole au premier vice-président, M. Jean-Marc Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, même si en principe nous ne sommes pas très favorables à la dilution de la responsabilité, l'amendement tel qu'il est proposé peut être acceptable pour le groupe démocrate-chrétien. Nous vous encourageons donc à le soutenir, dans un souci de compromis lui aussi responsable.

M. Thomas Wenger (S). Chères et chers collègues, pour répondre à M. Hohl, je crois qu'il y a une différence entre le... (Remarque.) Oui ! ...monde commercial et le monde bénévole et associatif. Le monde associatif est à but non lucratif, cela a été dit, et le bénévolat, que ce soit dans le sport, la culture ou les loisirs, a tendance à vivre une certaine érosion, parce qu'il y a toujours plus de contraintes au niveau de la gestion administrative, de la gestion financière, etc. Il est de plus en plus difficile de trouver des bénévoles, des personnes qui sont d'accord de venir tenir une petite buvette quatre ou cinq heures dans la journée ou le soir pendant une fête. La vie professionnelle est de plus en plus contraignante et on a de moins en moins de temps aujourd'hui pour le bénévolat, qui en outre empiète en partie sur la vie privée. Je crois donc qu'il est vraiment important - mais, de nouveau, il me semble qu'on se rejoint sur ce point - de ne pas ajouter de contraintes supplémentaires et de faire en sorte que la responsabilité puisse être assumée non pas seulement par une personne, mais également par plusieurs.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Comme l'a dit M. Guinchard, c'est un peu un compromis. Mais pour nous, ce qui comptait en commission, c'était que les responsables en tant qu'exploitants soient des personnes physiques et non pas des associations opportunistes; je pense par exemple à l'association pour la fête du 14 juillet à Onex, laquelle se retrouverait à la tête d'une buvette de circonstance... (Brouhaha.) ...et dont on ne pourrait pas rechercher les responsables en cas de problème, qu'il s'agisse d'une amende ou d'un accident. Voilà le genre de considérations que nous avons évoquées. Dès lors, concernant la possibilité qu'il y ait une ou plusieurs personnes responsables, je dirai même qu'il sera encore plus facile - pour l'Etat, notamment - de rechercher les fautifs s'il y a plusieurs responsables et que certains d'entre eux sont partis à l'étranger, par exemple, ou ne sont plus solvables, dans le cas où il s'agirait d'aller récupérer des montants dus à l'administration. Par conséquent, nous vous invitons à accepter les trois amendements modifiant les lettres n), p) et q).

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. J'aimerais ici remercier Mme Klopmann, dont l'amendement est frappé au coin du bon sens. Si j'étais taquin, je dirais à la rapporteure de minorité qu'elle n'a pas mis de l'eau dans son vin, mais qu'elle a pris de la bouteille ! (Rires.) En effet, avec le temps, Mesdames et Messieurs, de façon constante dans ce parlement vous attribuez des responsabilités aux personnes physiques; je ne veux pas absolument faire référence ici à la loi sur les manifestations, mais ce sont notamment des exemples qui montrent que l'on doit effectivement avoir comme répondants des personnes physiques et non pas des personnes morales. Ici c'est intelligent parce que, quelle que soit la configuration - je ne suis pas sûr que la fête du 14 juillet dans la commune d'Onex soit d'une probabilité absolument certaine... (Exclamations.) ...mais admettons qu'elle puisse exister ! - nous devons dans ce cas de figure comme dans d'autres avoir véritablement des personnes physiques. Je vous enjoins donc de suivre cet amendement, qui renforcera encore la volonté qui était la mienne dans l'amendement général d'avoir comme répondants des personnes physiques.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant nous prononcer sur l'amendement modifiant la lettre n) de l'article 3, que je vous relis:

«Art. 3, lettre n (nouvelle teneur)

n) exploitant: la ou les personnes physiques responsables de l'entreprise, qui exercent effectivement et à titre personnel toutes les tâches relevant de la gestion de celle-ci;»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 82 oui et 2 abstentions.

Le président. Nous sommes également saisis d'un amendement à la lettre p) de l'article 3, que voici:

«Art. 3, lettre p (nouvelle teneur)

p) organisateur: la ou les personnes physiques, ou un comité d'organisation, responsables de la mise sur pied et du déroulement de l'événement de divertissement public; sauf disposition contraire de la présente loi, l'organisateur est seul responsable du respect de celle-ci; il peut déléguer la gestion effective de l'événement à des tiers, sous sa responsabilité;»

Madame Klopmann, je vous passe la parole.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. Toujours dans le compromis, je m'exprime sur cet amendement qui a l'air totalement similaire au précédent, mais qui ne l'est pas tout à fait, parce qu'on ne parle plus d'un établissement qui dépendait auparavant de la LRDBH, mais bien de l'organisation d'événements publics, qui dépendait donc précédemment de la LSD.

Si on nomme une seule et unique personne responsable de tout un événement public, plus personne n'osera jamais organiser un événement, car ce serait trop risqué ! Si la personne doit s'assurer du bon déroulement de l'entier de l'événement, ça implique aussi que si tout d'un coup une agression ou un acte de vandalisme se produit pendant l'événement, cette personne se retrouvera seule et unique responsable. Alors en commission on m'a rétorqué qu'il y avait les assurances de responsabilité civile pour cela. Sauf que la responsabilité, pour moi, ce n'est pas qu'une question d'argent ! Et, surtout, une personne seule, en son nom propre, ne pourra jamais contracter une assurance RC pour un événement de divertissement public. Actuellement, les associations peuvent le faire et le font, mais là justement elles ne le pourront pas. Par conséquent, si au moins nous permettons à plusieurs personnes physiques d'organiser un événement, nous pourrons peut-être un peu plus nourrir l'espoir que les gens aient encore envie d'animer notre ville.

S'agissant du principe sous-jacent - je l'ai dit tout à l'heure - nous avions bien compris que la volonté de la contestée loi anti-manifestations était de diminuer les manifestations; nous espérons donc que ce Grand Conseil n'a pas également la volonté de réduire toute l'animation publique à Genève et nous réjouissons que cet amendement soit accepté comme le précédent. C'était magnifique !

Le président. Je vous remercie, Madame la rapporteure. La parole n'étant plus demandée, je vais mettre aux voix cet amendement à l'article 3, lettre p).

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 77 oui contre 2 non et 4 abstentions.

Le président. Nous sommes enfin saisis d'un amendement à la lettre q) de l'article 3, qui s'énonce comme suit:

«Art. 3, lettre q (nouvelle teneur)

q) tenancier de buvette d'événements: la ou les personnes physiques responsables de la buvette d'événements, qui peuvent être l'organisateur lui-même ou être désignées par ce dernier;»

Madame Klopmann, je vous passe la parole.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste préciser qu'il en va de cet amendement exactement comme des deux précédents, mais que cela concerne également les buvettes de petits clubs sportifs, de stades de foot, etc. Il est essentiel de permettre là une gestion associative, parce que c'est ce qui se pratique dans les faits et que si nous ne permettons plus à plusieurs personnes de gérer une buvette associative, les clubs de foot ou de n'importe quel autre sport vont en être privés, or ils ne peuvent pas se passer de leur buvette - ni la professionnaliser, car ils n'en ont pas les moyens - étant donné qu'ils en ont besoin pour générer un petit revenu accessoire, mais aussi et surtout pour créer un lien social autour du club de sport. Nous vous invitons donc à accepter également cet amendement.

Le président. Merci, Madame la rapporteure. La parole n'étant plus demandée, nous allons nous prononcer sur cet amendement modifiant la lettre q) de l'article 3.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 76 oui et 2 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 3 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 4 est adopté.

Le président. A l'article 5, nous sommes saisis d'un amendement visant à créer un alinéa 3, dont voici la teneur:

«Art. 5, al. 3 (nouveau)

3 L'exploitation simultanée de plusieurs catégories par une même entreprise est autorisée:

a) lorsque la proximité et l'unicité des surfaces d'exploitation des établissements permettent une simplicité de gestion;

b) lorsque les conditions relatives à l'entreprise, les obligations de l'exploitant et les dispositions des autorisations sont remplies.»

Madame la rapporteure de minorité Sarah Klopmann, vous avez la parole.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. Là encore, il s'agit d'un amendement déposé par toute l'Alternative. L'un des problèmes de cette loi est justement qu'elle fige les catégories; alors oui, la simplification implique qu'il y ait moins de catégories, et nous le comprenons, mais pourquoi figer autant ces catégories ? En effet, cela empêche de créer des espaces pluridisciplinaires, et c'est dommage. Si un café veut organiser un concert live, il n'a déjà qu'un tout petit périmètre qui peut être dévolu à cette animation, mais si un établissement désire proposer un bal et de la restauration, ou si une exploitation qui programme des spectacles veut proposer une petite restauration à côté, ce n'est actuellement pas possible, car les catégories ne peuvent pas être cumulées.

Cela dit, cet amendement n'introduit pas une révolution totale; il est d'ailleurs repris du règlement d'application d'une autre loi cantonale, et il propose simplement que l'on puisse - avec une autorisation, évidemment - cumuler les catégories. Cela veut dire qu'un espace pourrait, s'il le souhaite, avoir l'autorisation d'exploiter un café-restaurant ainsi que l'autorisation d'exploiter une boîte de nuit, s'il est correctement insonorisé, bien sûr, et qu'il respecte toutes les autres règles prévues par cette loi. Je vous remercie donc de faire bon accueil à cet amendement.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Je comprends bien l'intention exprimée dans cet amendement mais, malheureusement, ce n'est simplement pas possible dans la réalité. En effet, si l'on souhaite par exemple faire un café-restaurant et un dancing en même temps, que fera-t-on au niveau des catégories d'âge qui peuvent accéder à cet établissement ? On aura un vrai problème ! Je ne vois donc pas l'utilité... Le meilleur exemple à Genève de ce genre d'exploitation, c'est le Trois Huit, où il y a effectivement un café-restaurant, un dancing, une boîte de nuit, mais chaque espace a fait l'objet d'une autorisation séparée, et ce sont des établissements dont les heures d'ouverture et de fermeture ne sont pas les mêmes. Ça fonctionne en réalité assez bien, et je vous invite donc à ne pas voter cet amendement.

M. Pascal Spuhler (MCG). Le rapporteur de majorité vient de donner effectivement un excellent exemple: le Trois Huit contient, si on veut, trois entités en une, et donc trois responsables. En effet, si nous acceptons qu'il n'y ait qu'un exploitant pour ces trois entités, exploitant devant être représentatif dans les trois établissements, qui ont chacun des horaires différents - en l'occurrence, le Trois Huit fonctionne 24h/24 - vous pouvez imaginer l'état du responsable au bout de quelques mois: ce ne serait plus qu'une lavette !

On peut également prendre l'exemple de l'Usine, qui comprend plusieurs établissements, et je crois d'ailleurs que la rapporteuse de minorité avait un peu tendance à penser précisément à l'Usine, où effectivement ça simplifierait les choses pour le groupe alternatif qui en assume la gestion. Cela dit, Mesdames et Messieurs, il faut juste comprendre une chose: on ne peut pas gérer deux types d'établissements distincts, car une discothèque, par exemple, c'est totalement différent d'un café, d'un tea-room ou d'un restaurant. Il faut quand même qu'il y ait une présence, une responsabilité, l'exploitant doit gérer l'établissement comme il faut et être là en permanence. S'il est partout et nulle part à la fois, ça ne peut pas fonctionner ! Mais si des entités veulent exploiter plusieurs établissements de catégories différentes, eh bien elles peuvent simplement engager des exploitants qui ont suivi le cours de cafetier et leur donner la responsabilité de gérer l'établissement dont elles voudraient être le patron. Cette possibilité existe, rien n'empêche d'exploiter plusieurs établissements de catégories différentes, mais il faut simplement avoir les employés compétents.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. J'adore ce débat où je n'ai pas encore mentionné une seule fois le mot «Usine» mais où tout le monde me prête l'intention de ne vouloir parler que de l'Usine. C'est la preuve que j'ai fait jusque-là un gros travail ! En tous les cas nous parlons là d'une loi beaucoup plus globale et générale, et je pense qu'il faut aussi la considérer comme telle et ne pas toujours voir le diable qui se cacherait éventuellement - mais qui ne se cache pas ! - derrière la muraille.

Je voulais aussi préciser que, comme l'a dit M. Béné, les établissements pluridisciplinaires fonctionnent bien aujourd'hui, mais donc avec la loi actuelle ! Or à l'avenir nous aurons la loi que nous sommes en train d'examiner, cette loi qui fige beaucoup plus les espaces et qui prévoit qu'une autorisation peut être octroyée seulement dans un espace circonscrit. C'est donc bien pour cela que nous vous proposons d'ajouter la possibilité de cumuler les catégories ! En effet, il se pourrait qu'un café-restaurant souhaite aussi avoir une buvette permanente, par exemple, et il faut absolument que cela soit possible. (Commentaires.) Je vous rappelle aussi que cela n'ouvre pas la porte aux dérives soupçonnées par certains, car chacune de ces autorisations sera soumise au département, et celui-ci pourra l'accepter ou la refuser. Mais on se donne simplement la possibilité de ne pas détruire toute une vie pluridisciplinaire à Genève et de ne pas figer les différentes catégories d'établissements.

Le président. Merci, Madame la rapporteure. Comme il n'y a plus de demande de parole, je vais mettre aux voix cet amendement relatif à l'article 5, alinéa 3.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 47 non contre 28 oui.

Mis aux voix, l'art. 5 est adopté.

Le président. A l'article 6, nous sommes saisis d'un amendement à la lettre c) de l'alinéa 1, et je passe la parole à Mme Klopmann, si elle souhaite intervenir. (Commentaires.) L'autre amendement a été retiré ! Il n'y a plus qu'un amendement à l'article 6, qui vise la lettre c) de l'alinéa 1. En voici la teneur:

«Art. 6, al. 1, lettre c (nouvelle teneur)

c) les buvettes permanentes, les buvettes permanentes de service restreint et les buvettes associatives sont soumises à un horaire fixé de cas en cas par le département en fonction de l'horaire d'exploitation des installations, établissements ou activités auxquelles elles sont accessoires. En cas d'emploi de personnel, ce dernier doit donner son accord pour travailler au-delà de 23h.»

Madame Klopmann, vous avez la parole. (Commentaires.) Non, l'autre amendement a été retiré !

Une voix. On n'a rien compris !

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Ce n'est pas grave ! (Commentaires.) Cet amendement ne demande finalement pas grand-chose: il vise simplement à ce qu'une buvette accessoire à n'importe quelle autre activité puisse bénéficier des mêmes horaires que ceux de ladite activité. En effet, il est dit actuellement dans cette loi qu'une buvette accessoire est liée à l'activité à laquelle elle est accessoire, mais - on ne sait pas pourquoi - qu'elle ne peut pas dépasser les horaires qui sont prévus pour les cafés, bars et restaurants. C'est assez compréhensible pour ce qui est de la volonté de limiter les horaires, mais en revanche c'est assez peu intelligent dans le cas d'une buvette liée à un événement: s'il y a une activité - par exemple au MAMCO, où des activités culturelles nocturnes sont parfois organisées - et qu'une buvette y est installée, il serait totalement incompréhensible que cette buvette ferme avant l'activité elle-même ! On se retrouverait effectivement à nouveau avec le problème du bruit, parce que tout le monde partirait au moment de la fermeture de la buvette, et d'autre part ces buvettes permettent de créer un lien social, une cohésion, et font donc partie intégrante d'une activité, par exemple culturelle, mais qui pourrait être d'une autre nature. Là encore, de toute façon, toutes ces demandes passent par le département et sont soumises à autorisation; il n'y a donc pas de risque de dérives !

Le deuxième aspect de cet amendement devrait sembler logique mais, comme les droits syndicaux ne sont pas toujours très bien explicités dans cette loi, nous souhaitons l'ajouter ici: il s'agit de préciser que lorsque le personnel doit travailler au-delà de 23h, il doit donner son accord. Cela me semble vraiment difficilement refusable, et nous vous invitons donc à accepter cet amendement qui comporte deux aspects différents.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, on a essayé de diminuer le nombre de catégories, justement, et on y est parvenu. On a également tenté de restreindre la concurrence déloyale qui pouvait exister entre les différentes catégories, en fonction de ce que les exploitants arrivaient à faire pour s'infiltrer dans une catégorie ou l'autre, il n'y a donc pas selon moi d'argument valable pouvant justifier qu'une buvette permanente ou associative - parce que c'est quand même aussi des buvettes permanentes qu'on parle - puisse avoir des horaires d'ouverture plus étendus que les exploitants ayant une activité liée à l'une des autres catégories. Les arguments de Mme Klopmann ne m'ont pas convaincu: il y a des autorisations qui sont données ponctuellement par le département - je pense par exemple à la Nuit des Bains, lors de laquelle le département autorise l'ouverture des établissements plus tard que d'habitude - je ne vois donc vraiment pas quels sont les arguments militant en faveur de l'adoption de cet amendement, que je vous invite dès lors à refuser.

Mme Salika Wenger (EAG). Chers collègues, avec la Nuit des Bains, M. Béné vient de nous donner exactement l'exemple de ce que nous sommes en train de défendre. A la Nuit des Bains, il y a des buvettes dans les galeries, on boit donc également dans ces galeries, et je n'ai pas entendu de plaintes de la part des commerçants qui sont autour - et Dieu sait s'il y en a, car ils sont nombreux ! Et imaginer que la même population - on parle de la Nuit des Bains, mais on peut aussi citer le MAMCO ou d'autres lieux encore - qui va à la buvette aille, si celle-ci est fermée, dans les bistrots alentour, lesquels gagneraient ainsi plus de clients, c'est à mon avis un petit peu une utopie ! En effet, ceux qui quittent la galerie, le MAMCO ou le lieu où s'est produit un événement culturel quelconque vont souvent rentrer chez eux ou se rendre à d'autres endroits... (Commentaires.) ...qui seront ceux que nous sommes en train de défendre bec et ongles. Je crois donc que cet amendement est indispensable ! Il est indispensable parce qu'il permet la plénitude de l'événement.

On nous disait tout à l'heure qu'il n'existait pas ou peu d'exemples d'espaces qui avaient plusieurs fonctions, mais je me souviens qu'il y a eu une période où des bars faisaient aussi restaurant et organisaient des bals. A l'époque, ça s'appelait une guinguette ! Je sais qu'il existe encore d'autres lieux de cet ordre et j'en ai vu dans le monde entier, je ne comprends donc pas pourquoi à Genève il faudrait absolument séparer les fonctions les unes des autres. Je vous invite par conséquent à voter l'amendement que l'on vous a présenté.

M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, l'amendement qui vous est proposé ici par la rapporteuse de minorité est permissif à l'excès. J'entends par là qu'il essaie de supprimer toute dérogation exceptionnelle que le département peut accorder, puisqu'il est indiqué clairement à l'article 7, alinéa 3, que sur demande, de cas en cas, exceptionnellement, le département peut autoriser une ouverture spécifique avec des horaires spécifiques en dehors des normes réglementaires.

Vous avez donné l'exemple, Madame Wenger - vous transmettrez, Monsieur le président - de la Nuit des Bains, mais on peut aussi citer le cas de la Nuit des musées, où l'on pourrait imaginer qu'une buvette ouvre exceptionnellement toute la nuit pour cet événement. La loi qui nous est soumise aujourd'hui l'autorise ! Il suffit d'en faire la demande en bonne et due forme. Il n'est donc pas nécessaire que les buvettes permanentes puissent - comme le nom l'indique - dépasser en permanence les horaires réglementés pour tout le monde. Pourquoi une buvette permanente bénéficierait-elle d'une exception constante ? Car c'est ce que demande l'amendement que vous nous proposez ! Je pense que ce n'est pas nécessaire: les cafetiers-restaurateurs ont déjà de la peine à survivre aujourd'hui, cette loi - espérons-le - va leur donner un nouveau souffle, mais si vous demandez encore des exceptions pour d'autres établissements que les cafetiers-restaurateurs, ils ne vont pas s'en sortir, et c'est tout à fait contraire au bon sens de cette loi.

M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai qu'à la lecture de l'amendement présenté par Mme Klopmann, on a quelques difficultés de compréhension, notamment parce que votre amendement, Madame, trace justement toutes les conditions qui permettent à l'article 7 de modifier les horaires d'exploitation. Et est-ce que cet article n'est modifié que par la phrase: «En cas d'emploi de personnel, ce dernier doit donner son accord pour travailler au-delà de 23h» ? Vous parlez bien de buvettes et d'événements exceptionnels, dont vous faites d'ailleurs vous-même une excellente promotion ! Il me semble donc que, si on accepte cet amendement, on restreint les possibilités. Et en aucun cas on ne péjore la situation du personnel ! Très sincèrement, quand je vois que l'article 7 - et vous le savez, on en a parlé en commission - permet l'ouverture des restaurants dès 4h du matin, pour ceux qui veulent finir leur nuit en allant manger quelque chose à l'aube, je trouve personnellement que c'est très bien, et cette mesure est passée ! Ne supprimons donc pas tout ce qui figure dans cet article 7 qui concerne justement les dérogations. En conséquence, Madame, il me semble que nous ne devrions pas voter votre amendement.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Il y a effectivement deux aspects différents dans cet amendement et j'ai l'impression que cela crée une petite confusion, mais puisqu'il ne semble pas prendre le chemin de l'acceptation, je ne vais pas me fatiguer à le scinder en deux...

J'aurais juste voulu préciser que cela ne créerait en aucun cas de la concurrence déloyale; on n'est pas en train de parler de la même chose ! Même si je consomme à la buvette qui est accessoire à un autre événement ou une autre activité, c'est bien pour l'autre activité que je me suis déplacée, je ne serais donc pas allée dans le bar d'à côté pour aller dans le bar d'à côté ! Si je suis là, c'est parce qu'il y a une activité qui m'a amenée à cet endroit et donc, évidemment, je consomme à la buvette qui est accessoire à cette activité, ça me semble normal.

D'autre part, la concurrence déloyale n'existe pas non plus quand on crée différents styles de lieux et de divertissements: on permet simplement à chaque établissement de trouver son public, à chaque public de trouver le style d'événement et de divertissement auquel il a envie de participer, et cela me paraît être de la diversité et non pas de la concurrence déloyale, au contraire.

Enfin, cet amendement n'est pas permissif à l'excès, car je rappelle que les autorisations devront être demandées au département. On est simplement en train de dire qu'il ne faut pas d'ores et déjà s'empêcher - au cas où on le souhaiterait par la suite - d'avoir des horaires plus étendus pour une buvette accessoire si elle est liée à une activité. On est donc juste en train de ne pas s'empêcher de faire quelque chose, on n'est pas en train d'être permissif à l'excès !

Quant au fait de protéger le personnel, cela ne me paraît pas non plus totalement déraisonnable et fou, comme semblait le penser M. Lussi... Je ne sais pas, il n'a pas l'air d'accord avec moi, mais pourtant c'est ce qu'il a dit ! Je vous réinvite donc à accepter cet amendement, fort intelligent, d'ailleurs ! (Rires.)

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Avec cet amendement, il est clair que tout le monde va vouloir ouvrir des buvettes permanentes, avec une petite activité qui se déroulera toute la nuit ! En effet, on pourra dire ceci: «Puisqu'il y a une activité pendant toute la nuit, vous devez me donner l'autorisation d'ouvrir la buvette jusqu'à point d'heure.» Mais il y a déjà une dérogation jusqu'à 4h du matin pour les soirées des vendredis et samedis, ce qui est une chose. De plus, l'alinéa 2 de l'article 6 - pour rester sur cet article 6 - prévoit ce qui suit: «A l'occasion de manifestations ou de jours fériés, le département peut prévoir, d'office ou sur demande, des dérogations aux horaires prévus à l'alinéa 1.» Alinéa 1 dont nous sommes précisément en train de parler ! Je vois donc mal quelles sont les exceptions qui feraient qu'on aille au-delà... On parlait de la Nuit des Bains, eh bien oui, c'est une manifestation comme une autre, et c'est le département qui a accepté de déroger aux horaires de fermeture des établissements publics durant cette nuit. Il en va de même pour les établissements publics qui sont ouverts à tout le monde à l'occasion de l'Escalade ou des festivités du 31 décembre: ce sont des dérogations qui sont officielles et autorisées, sans qu'il y ait même besoin d'une demande au département.

Enfin, pour ce qui est de la dernière phrase de cet amendement, qui viserait à contraindre encore plus le tenancier de cette buvette permanente à des démarches administratives avec son personnel, je rappelle la teneur de l'article 6, alinéa 3: «Dans tous les cas, les obligations des employeurs relevant de la législation sur le travail sont réservées.» Je crois que c'est largement suffisant et que cet amendement n'a rien à faire dans la loi. (Exclamations.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur. Nous sommes en procédure de vote concernant cet amendement à l'article 6, alinéa 1, lettre c).

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 53 non contre 27 oui.

Mis aux voix, l'art. 6 est adopté, de même que les art. 7 et 8.

Le président. A l'article 9... (Commentaires.) Oui, un amendement avait été déposé à l'article 7, mais il a été retiré entre-temps ! Nous en sommes donc à l'article 9, pour lequel nous sommes saisis d'un amendement à la lettre d). Je vous passe la parole, Madame Klopmann.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais d'abord faire une annonce tout à fait formelle au sujet de cet amendement. On m'a signalé que, pour qu'il soit grammaticalement correct, il fallait aussi transformer, à la dernière ligne de la lettre d) de l'article 9, le mot «faire» en «fait». En effet, dans la mesure où l'amendement transforme l'expression «peut demander» en «demande», il convient également que le terme «faire» soit corrigé par «fait». On m'a demandé de le signaler ici afin que ça puisse figurer au Mémorial et être correct au niveau du français. L'amendement est donc le suivant:

«Art. 9, lettre d (nouvelle teneur)

d) offre, par ses antécédents et son comportement, toute garantie que l'entreprise est exploitée conformément aux dispositions de la présente loi et aux prescriptions en matière de police des étrangers, de sécurité sociale et de droit du travail, ainsi qu'aux dispositions pénales prohibant les crimes ou délits dans la faillite et la poursuite pour dettes et, s'il a la qualité d'employeur, qu'il démontre au moyen d'une attestation officielle ne pas avoir de retard dans le paiement des cotisations sociales. Lorsque le département est en possession d'indices factuels permettant de présumer le non-respect des conditions de travail en usage, le département demande à l'employeur de signer auprès de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après: l'office) l'engagement de respecter les conditions de travail en usage à Genève et fait dépendre sa décision de la signature dudit engagement;»

Maintenant sur le fond - nous l'avons déjà un peu évoqué précédemment - cette loi pourrait permettre au département, et notamment à l'OCIRT, d'aller contrôler lui-même dans les entreprises que les lois en matière de travail sont bien respectées. Actuellement, l'Etat n'a pas le pouvoir de le faire: il y a une commission de contrôle au niveau national qui s'occupe du respect de la convention collective, mais c'est malheureusement assez faible et cela n'a pas l'air de fonctionner de manière très efficace. C'est pour cette raison que dans ce secteur, qui est le troisième secteur économique de Genève - je l'ai déjà dit, mais je le répète car c'est vraiment important - il faut que nous puissions donner la force au département d'agir.

Ensuite, le but de cet amendement est clairement d'insister sur le fait qu'on doit pouvoir demander que ces accords soient signés. Nous ne souhaitons pas, comme c'était précédemment indiqué dans cet article, que de temps à autre uniquement le département demande la signature de ces accords, mais nous désirons au contraire être sûrs que, le plus souvent possible, en tout cas lorsqu'on sait déjà que les exploitants ont eu quelques légèretés dans l'application de la loi sur le travail, ces derniers soient obligés de signer l'engagement de respecter les lois en vigueur et que l'Etat puisse ainsi aller contrôler cela.

M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, on traite là d'un amendement qui est vraiment fondamental pour l'Alternative et pour le groupe socialiste. Ma collègue l'a déjà un peu évoqué, il y a eu beaucoup de discussions en commission sur cet article et sur l'article 10, et on arrive là au coeur de la protection des travailleuses et des travailleurs, dans un secteur - comme cela a été dit - qui est le troisième secteur économique de notre canton. Ce sont des milliers d'emplois dans le domaine de l'hôtellerie, de la restauration et des cafés, lesquels concernent bien entendu des personnes qui travaillent dans ces cafés et restaurants et qui sont soumises à des horaires difficiles, à des conditions de travail en général qui sont difficiles, mais aussi parfois à des clients difficiles. Or - cela a été également mentionné par notre collègue - dans le secteur, le salaire médian se monte à un peu plus de 4000 F, ce qui signifie que la moitié des gens qui travaillent dans ce secteur gagne moins que cette somme, donc en gros moins de 4000 F. Il est par conséquent très important de pouvoir mieux contrôler ce secteur de l'hôtellerie-restauration, et c'est pour cette raison qu'on a eu des discussions au sujet de cet article 9. Je le répète, on parle des conditions relatives à l'exploitant, qui doit offrir toute garantie - permettez-moi de lire - «que l'entreprise est exploitée conformément aux dispositions de la présente loi et aux prescriptions en matière de police des étrangers, de sécurité sociale et de droit du travail [...]»

Dans le projet de loi sorti de commission, il est dit plus loin dans cette lettre d) que «le département peut demander à l'employeur de signer auprès de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après: l'office) l'engagement de respecter les conditions de travail en usage à Genève [...]» Nous avons d'abord voulu déposer un amendement afin de transformer «peut demander» en «demande», c'est-à-dire que le département demanderait à l'ensemble des entreprises oeuvrant dans le secteur de l'hôtellerie, de la restauration et des cafés de signer cet engagement, mais en commission on nous a répondu ceci - permettez-moi de lire à nouveau: «Une formulation affirmative aurait pour conséquence directe d'obliger le département à s'assurer du respect de telles conditions auprès de l'ensemble des quelque 3000 établissements du canton.» Or la directrice de l'OCIRT nous a indiqué que ce dernier n'était pas en mesure d'assumer une telle charge, d'où la solution d'une demande au cas par cas. Nous avons alors travaillé sur un amendement de compromis, pour que ce ne soit ni au cas par cas, ni pour tous les établissements - qui sont environ 3000 - et proposons la formulation suivante: «Lorsque le département est en possession d'indices factuels permettant de présumer le non-respect des conditions de travail en usage, le département demande à l'employeur de signer [...]», ce qui offre quand même une meilleure protection et un meilleur contrôle de ce secteur.

Mme Salika Wenger (EAG). Je suis d'accord avec presque tout ce qui a été dit. (Exclamations.) A une nuance près, à savoir cette phrase qui a été introduite dans l'amendement: «Lorsque le département est en possession d'indices factuels permettant de présumer le non-respect des conditions de travail en usage [...]» Il est bien évident que pour notre groupe c'est inimaginable ! C'est complètement flou, on ne sait pas sur quelle base on s'appuie, on ne sait rien du tout. Il est donc inenvisageable de penser que nous puissions nous appuyer sur ce genre d'indices, et en l'occurrence j'ai envie de dire qu'il s'agit de dénonciations et d'actes de ce type qui sont complètement... Cet élément-là ne peut pas entrer dans la loi ! En revanche, il me paraît absolument juste que l'on demande de manière formelle aux employeurs de signer auprès de l'OCIRT l'engagement de respecter les conditions de travail en usage à Genève. Quant au fait que cela créerait plus de travail pour l'administration, eh bien je dirais qu'elle est là pour ça ! Et s'il n'y a pas assez de personnel, Mesdames et Messieurs, il faudra en engager. Cela me paraît être une nécessité, mais pour ce qui est des «indices factuels permettant de présumer le non-respect des conditions de travail», jamais nous ne voterons cette disposition.

M. Serge Hiltpold (PLR). Je crois que cette problématique des contrôles n'est pas le souci uniquement de l'Alternative. Ce qui est important dans l'article 9, lettre d), c'est l'élément souligné dans l'amendement déposé, à savoir: «Lorsque le département est en possession d'indices factuels permettant de présumer le non-respect des conditions de travail en usage [...]» Cela signifie simplement que ce sont des mesures et des contrôles ciblés, donc c'est finalement déjà ce qui se fait aujourd'hui. Il s'agit tout bonnement de mettre dans un cadre législatif la bonne pratique et le pragmatisme dont fait preuve le département. Par conséquent, oui, nous pouvons soutenir cet amendement, et je crois que la question de faire respecter les conditions de travail n'est pas une préoccupation du seul bloc de l'Alternative. Dès lors, nous appuierons cet amendement.

M. Pascal Spuhler (MCG). Je dois dire que, là, Mme Wenger a un peu raison: la phrase mentionnant des «indices factuels permettant de présumer le non-respect des conditions de travail en usage» est un peu limite, Mesdames et Messieurs. Pourquoi ? Parce qu'il va falloir donner au département les moyens de disposer de ces indices factuels, moyens qui se traduisent par du personnel au sein de l'OCIRT, des contrôleurs et des inspecteurs qui vont, en faisant leurs tournées, constater des manquements ou des problématiques, et à qui ces indices factuels permettront d'agir. Mais de quel type d'indices factuels pourrait-il s'agir ? On pourrait très bien imaginer des cas de concurrence déloyale, une personne qui serait dénoncée par un voisin jaloux, etc. Pour notre part, ça ne nous pose pas de problème de donner des moyens au département pour faire respecter la loi, parce que nous aimerions que tout le monde soit traité de la même manière et que le respect des conditions de travail et des travailleurs soit assuré. Mais nous ne voudrions pas tomber dans le côté pervers, ce qui serait le cas par exemple si un inspecteur, par paresse, se basait sur une dénonciation calomnieuse, sur un coup de téléphone scabreux, et j'en passe... Donc l'expression «indices factuels» est un peu délicate à appliquer ainsi au pied de la lettre. Et je voudrais juste préciser, parce que pour nous c'est assez important, qu'il faut que nous puissions, si on veut se donner des outils, avoir le personnel pour les utiliser. En effet, il ne sert à rien d'avoir une belle machine s'il n'y a personne pour la conduire !

M. Romain de Sainte Marie (S). C'est vrai qu'aujourd'hui, comme je l'ai indiqué dans mon intervention préliminaire, nous devons faire certains compromis pour arriver au terme de l'examen de cette loi qui tendrait à rapprocher les différents intérêts des parties prenantes autour de cette thématique.

L'amendement initial formulé en commission prévoyait de supprimer la possibilité - c'est-à-dire le verbe conjugué «peut» - pour le département, de sorte que celui-ci demande obligatoirement la signature des usages. En l'occurrence, nous devons aujourd'hui adopter une position de compromis, mais qui représente réellement une plus-value en matière de contrôle des conditions de travail. En effet, avec l'amendement qui vous est proposé là, on ne laisse pas simplement en fermant les yeux la possibilité au département de demander la signature des usages: non, on demande au département d'avoir une réelle responsabilité, une attitude proactive, et donc d'aller demander de force obligatoire à certains exploitants qui seraient soupçonnés de non-respect des conditions de travail de signer les usages. Je crois que cet amendement est mieux que rien, et je suis par conséquent un peu déçu - vous transmettrez à Mme Wenger, Monsieur le président - de cette politique du pire qui viserait à ne rien avoir plutôt qu'à disposer de cet élément-là qui permettrait d'avoir un travail actif de la part du département. Du reste, il serait vu d'un très bon oeil de la part de l'OCIRT, alors que si on devait obliger l'entier des exploitants à signer les usages, ce serait totalement inapplicable - l'OCIRT nous l'a très clairement fait savoir en commission - parce que ça demanderait malheureusement des moyens bien trop élevés. Nous vous invitons donc à accepter cet amendement.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. J'aurais voulu répondre à Mme Wenger et surtout être entendue du groupe Ensemble à Gauche. Bien sûr, cet amendement est un compromis, encore un compromis ! Bien sûr, il n'est pas totalement satisfaisant, et ce n'est pas moi qui vais dire le contraire ! Par deux fois en commission j'ai déposé un amendement pour rendre la signature de ces engagements obligatoire pour tous les exploitants, mais la réalité d'aujourd'hui est la suivante: soit on ne fait passer aucune nouvelle mesure, soit on renforce quand même un petit peu avec ce compromis - qui est certes peut-être faible, mais qui n'en reste pas moins un compromis - la signature de ces engagements, et donc la protection des travailleurs. Je pense que même si on n'est pas satisfait de cette mesure, il est vraiment préférable d'accepter cet amendement qui renforce quelque peu l'article actuel, plutôt que de se retrouver simplement avec l'article tel qu'il est aujourd'hui, qui nous convainc encore moins. En conséquence, je vous demande vraiment d'accepter s'il vous plaît ce compromis avec nous, parce que le choix auquel nous sommes confrontés maintenant peut se résumer ainsi: c'est soit ça, soit rien ! J'aimerais donc mieux qu'on ait ça ! (Quelques applaudissements.)

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Alors moi je vous propose d'avoir ça, dans ce cas ! (Rires. Commentaires.) Mais franchement, cet après-midi, depuis le début de ce débat, je ne comprends absolument rien de ce que vous voulez, vous les membres d'Ensemble à Gauche ! En effet, Madame Wenger, vous signez des amendements que vous nous invitez après à refuser... Cette loi n'est déjà pas simple, mais alors si on en arrive à ce point-là, je pense que ça va être très compliqué, et je ne suis pas sûr qu'on parvienne à son terme !

Bref, cet amendement ne fait en réalité que confirmer la pratique actuelle, puisque si on met «peut demander», le département doit juger s'il y a effectivement des raisons de demander la signature de ces engagements à respecter les conditions de travail en usage à Genève. Et s'il n'y a pas de raisons de le demander, eh bien il ne le fait pas ! C'est pour cette raison que nous préférons la formulation «peut demander», afin de laisser au département la responsabilité d'appliquer tout cela. Mais il est clair que le département doit le faire s'il dispose d'indices factuels et présume effectivement qu'il y a un problème. Sinon il ne le fait pas ! Nous pouvons donc nous rallier à cette façon de le dire - plutôt que tel que cela figure dans le projet sorti de commission - si ça fait plaisir à ceux qui avaient envisagé de ne pas voter cette loi. (Commentaires.)

Mme Salika Wenger (EAG). Je crois qu'on ne s'entend pas très bien sur le problème. D'abord, nous avons travaillé sur les amendements à plusieurs, et il y a eu des amendements aux amendements, si je puis dire. Mais, typiquement, je trouve cette phrase-là trop floue, car la formulation «en possession d'indices factuels permettant de présumer le non-respect des conditions de travail en usage» est carrément de la science-fiction ! (Commentaires.) Alors soit on demande à toutes les entreprises de signer ces engagements, soit on dispose de faits qui permettraient de le demander, mais on ne peut pas avoir des indices permettant de présumer de quelque chose. C'est impossible ! En effet, sur quoi va-t-on s'appuyer légalement ? Parce que, pour l'instant, j'ai l'impression qu'on est en train de légiférer pour les dénonciateurs, pour ainsi dire ! (Commentaires.) Est-ce que j'ai envie de faire une telle chose ? Est-ce que vous avez envie de faire quelque chose comme ça ? Pour nous, évidemment, l'important c'est qu'il soit demandé aux employeurs de «signer auprès de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail [...] l'engagement de respecter les conditions de travail en usage à Genève». Ça, c'est une demande formelle, alors quand j'entends M. Béné dire que d'une part il accepterait cet amendement avec la phrase dont je viens de vous parler et qui nous paraît problématique, et que d'autre part il garderait la formulation «peut demander» plutôt que «demande», eh bien non, non et non ! Nous pouvons faire un pas dans le sens de l'adoption de cet amendement, mais pour autant que M. Béné, son groupe et d'autres fassent le pas d'accepter que nous demandions de manière formelle que l'employeur signe ces engagements ! A ce moment-là, nous sommes d'accord ! Mais si ce n'est pas le cas, eh bien nous ne voterons pas cet amendement.

M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, encore une fois je suis assez d'accord avec les propos de Mme Wenger, parce que ça laisse une certaine permissivité en matière de dénonciation calomnieuse, et ça me dérange profondément. Mais ce qui me rassure, Madame Wenger - et j'espère vous rassurer aussi - parce que nous, MCG, allons quand même soutenir cet amendement, c'est qu'il donne la possibilité au département d'effectuer des contrôles et que, pour faire ces contrôles et appliquer la loi, il faut des personnes. Il y a un règlement d'application pour chaque loi et ce règlement devra simplement expliquer - j'attends que M. le conseiller d'Etat nous réponde à ce sujet - que c'est bien les contrôleurs de l'OCIRT qui pourront apporter l'élément factuel en question, et non pas justement ces communications téléphoniques et autres dénonciations anonymes qui pourraient être calomnieuses. J'espère donc que c'est dans le règlement qu'on trouvera cette espèce de sécurité contre la dénonciation calomnieuse de la part d'un exploitant jaloux d'un autre.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Monsieur le président, le député Spuhler me permet de faire la transition, et j'aimerais répondre à Mme Wenger en la rassurant sur le fait qu'on ne veut pas susciter l'apparition de «whistleblowers», lanceurs d'alerte et autres dénonciateurs spontanés. On fait ici référence par exemple - et le règlement pourra le préciser - aux rapports des commissions paritaires. Voilà des indices factuels... (Remarque.) Oui, mais quand même ! Cela me permet de rappeler qu'on se réfère de manière générale à une autre loi, la LIRT - la loi sur l'inspection et les relations du travail - et en particulier à l'article 25 et son pendant, l'article 45, lesquels consacrent cette pratique et donc ces dispositions légales sur les usages, à savoir notamment la signature et le respect de ces usages. Dès lors, nous ne sommes pas dans une jungle ou a contrario dans une absence totale de dispositions.

Mais plus fondamentalement, Mesdames et Messieurs - et là j'aimerais rendre attentifs Mme Wenger et son groupe au vieux principe selon lequel tant va la cruche à l'eau qu'à la fin elle se brise - je voudrais dire ceci: à force de rajouter des éléments qu'on ne sera pas forcément en mesure de contrôler, mais aussi de partir de la présomption qu'on a face à nous des entrepreneurs qui vont tricher, frauder et ne pas respecter les règles - c'est en quelque sorte ce que l'on dit si l'on a une dimension obligatoire - eh bien on quitte avec cette logique-là l'esprit de la loi, qui consiste à faire confiance en partant du principe que les gens vont jouer le jeu et observer les règles et, en cas de dénonciation, selon le modus operandi que je viens de décrire, à faire intervenir l'OCIRT à ce moment-là. Je pense donc que cet amendement est intelligent - eh oui, c'est une qualité de votre amendement, Madame Klopmann, il ne faut pas le renier, et le fait que vous y alliez à reculons est peut-être même encore un label de qualité pour cet amendement... (Exclamations.) - parce qu'il permet de dire très exactement que la philosophie de la loi est de faire confiance, d'intervenir en cas de problème et de se donner les moyens d'intervenir, par le dispositif décrit ici. De ce point de vue là, Mesdames et Messieurs, je ne peux que vous inciter à soutenir cet amendement et à attendre avec intérêt les dispositions réglementaires qui le compléteront.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes en procédure de vote sur cet amendement modifiant la lettre d) de l'article 9, dont je vous rappelle la teneur:

«Art. 9, lettre d (nouvelle teneur)

d) offre, par ses antécédents et son comportement, toute garantie que l'entreprise est exploitée conformément aux dispositions de la présente loi et aux prescriptions en matière de police des étrangers, de sécurité sociale et de droit du travail, ainsi qu'aux dispositions pénales prohibant les crimes ou délits dans la faillite et la poursuite pour dettes et, s'il a la qualité d'employeur, qu'il démontre au moyen d'une attestation officielle ne pas avoir de retard dans le paiement des cotisations sociales. Lorsque le département est en possession d'indices factuels permettant de présumer le non-respect des conditions de travail en usage, le département demande à l'employeur de signer auprès de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après: l'office) l'engagement de respecter les conditions de travail en usage à Genève et fait dépendre sa décision de la signature dudit engagement;»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 83 oui contre 1 non et 2 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 9 ainsi amendé est adopté.

Le président. A l'article 10, nous sommes saisis d'un amendement, et je passe la parole à Mme Klopmann.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. Il s'agit exactement de la même problématique que dans l'amendement précédent, je vous propose donc de ne pas refaire le débat. Si je prends la parole, c'est simplement parce que, à nouveau, pour des questions de forme, je suis obligée de vous indiquer qu'à la dernière ligne le verbe «faire» doit être transformé en «fait», pour les mêmes raisons que celles que j'ai mentionnées précédemment. (Commentaires.) Je ne souhaite pas réexpliquer le tout ! L'amendement est donc le suivant:

«Art. 10 Conditions relatives au propriétaire (nouvelle teneur)

L'autorisation d'exploiter l'entreprise est délivrée à condition que son propriétaire offre, par ses antécédents et son comportement, toute garantie que l'entreprise est exploitée conformément aux dispositions de la présente loi et aux prescriptions en matière de police des étrangers, de sécurité sociale et de droit du travail, ainsi qu'aux dispositions pénales prohibant les crimes ou délits dans la faillite et la poursuite pour dettes. S'il est l'employeur des personnes qui travaillent au sein de l'entreprise, le propriétaire doit en outre démontrer au moyen d'une attestation officielle ne pas avoir de retard dans le paiement des cotisations sociales. Lorsque le département est en possession d'indices factuels permettant de présumer le non-respect des conditions de travail en usage, le département demande au propriétaire employeur de signer auprès de l'office l'engagement de respecter les conditions de travail en usage à Genève et fait dépendre sa décision de la signature dudit engagement.»

Le président. Merci, Madame la députée. La parole n'étant pas demandée, je vais mettre aux voix cet amendement à l'article 10.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 78 oui contre 1 non et 2 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 10 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 11 est adopté, de même que les art. 12 et 13.

Le président. A l'article 14, nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat, dont je vous énonce la teneur:

«Art. 14 Révocation (nouvelle teneur)

L'autorisation d'exploiter est révoquée par le département lorsque les conditions de sa délivrance ne sont plus remplies.»

Si personne ne souhaite s'exprimer, nous nous prononçons tout de suite sur cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 81 oui (unanimité des votants).

Mis aux voix, l'art. 14 ainsi amendé est adopté.

Le président. Nous passons à l'article 15, pour lequel nous sommes saisis de l'amendement suivant:

«Art. 15, al. 2 (nouvelle teneur) et al. 3 (nouveau)

2 Les terrasses doivent être accessibles aux personnes avec handicap ou à mobilité réduite.

3 Pour des motifs d'ordre public et/ou en cas de violation des conditions d'exploitation visées aux alinéas 1 et 2, les communes sont habilitées à prendre, pour ce qui touche à l'exploitation de la terrasse concernée, les mesures et sanctions prévues par la présente loi, lesquelles sont applicables par analogie.»

Je passe la parole à son auteur, M. Cyril Mizrahi.

M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, j'aimerais, si vous le permettez, intervenir brièvement pour présenter cet amendement et donner quelques éléments de contexte sur un aspect qui n'est peut-être pas central dans ce projet de loi, mais qui est important pour les personnes concernées, je peux vous l'assurer. Cet aspect est celui de l'accessibilité de manière générale dans cette loi, accessibilité qui, pour les personnes touchées, rime avec liberté de se rendre par exemple à un spectacle avec des amis ou bien d'aller au restaurant ou boire un verre durant leur temps libre. Ça paraît banal, mais je peux vous assurer que quand vous êtes en fauteuil roulant, eh bien il y a des problèmes conséquents qui se posent, ainsi que des limitations. Du coup, accessibilité est aussi synonyme d'inclusion sociale, et il s'agit ici de la mise en oeuvre de l'article 16, alinéa 1, de la constitution genevoise, lequel prévoit qu'un accès aux bâtiments et aux prestations destinées au public est garanti pour les personnes handicapées.

Bien sûr, cette mesure est directement applicable, mais elle mérite aussi des dispositions d'application. Concernant les nouveaux bâtiments et les rénovations, on citera l'article 109 LCI, qui est en train d'être revu par le département chargé de l'aménagement et du logement, mais il y a aussi la problématique des bâtiments existants, et notamment des établissements publics, dont il est question dans cette loi. Lors de la consultation sur l'avant-projet, le parti socialiste avait demandé que cette disposition constitutionnelle soit mise en oeuvre et que l'accès aux établissements publics soit effectivement garanti pour les personnes handicapées. Eh bien nous avons été entendus dans le cadre du projet de loi finalement déposé, et c'est une disposition qui a été reprise dans l'amendement général, avec l'ancrage - à l'article 35, je crois - de mesures raisonnables permettant l'accès des personnes handicapées aux bâtiments.

Il y a donc le problème des bâtiments, mais aussi des terrasses ! C'est une question qui est de saison, et j'ai été interpellé ces derniers jours en voyant un certain nombre de terrasses qui se montent - car en réalité on ne peut même pas parler de constructions. Il s'agit d'installations saisonnières très légères qui, année après année, comportent toujours une ou deux marches empêchant certaines personnes d'accéder à ces terrasses. Or, si l'on peut comprendre que dans des bâtiments historiques il y ait des considérations qui compliquent les choses, il est assez incompréhensible que sur les terrasses des obstacles persistent chaque année pour les personnes avec handicap. C'est la raison pour laquelle je vous propose un amendement qui vise à insérer, à l'article 15 consacré aux terrasses, un alinéa supplémentaire dont la teneur est la suivante: «Les terrasses doivent être accessibles aux personnes avec handicap ou à mobilité réduite.» L'alinéa 2 devient donc l'alinéa 3 et est adapté pour inclure ces éléments. Je vous remercie dès lors de soutenir cet amendement, que j'ai présenté avec un certain nombre de collègues de mon groupe et d'autres groupes. (Applaudissements.)

M. Serge Hiltpold (PLR). Je vais donner un avis un peu contraire à celui de mon excellent collègue Mizrahi. Le premier élément que j'aimerais mentionner concerne les marches que l'on trouve sur les terrasses: en général, une terrasse doit être plate, et il faut donc parfois compenser une certaine pente selon le type de chaussée, l'idée étant évidemment que, quand vous êtes à table et que vous consommez un plat de restauration, les verres restent à niveau et droits. Par conséquent, si vous supprimez les marches, vous n'avez plus de calage ! C'est la raison pour laquelle il y a des marches. Voilà pour cet élément extrêmement pragmatique.

Quant au deuxième point, il est très clair: si vous mettez cette disposition en vigueur, c'est 30% des terrasses des établissements que vous fermez et que vous mettez en difficulté. Je vous invite donc à rejeter cet amendement avec beaucoup de circonspection. (Exclamations.)

M. Cyril Mizrahi (S). J'ai un petit peu de peine à comprendre les explications de mon estimé collègue - vous transmettrez, Monsieur le président. Il est bien évident que parfois il faut compenser une pente, mais ça n'empêche pas que le plancher de bois de la terrasse soit simplement de plain-pied à un endroit de la pente. Ça ne présente pas de difficulté particulière ! Souvent, les terrasses sont situées à côté d'un trottoir, il n'y a donc aucun problème à ce que la terrasse soit de plain-pied au moins à un endroit. Je pense qu'il ne faut pas voir des problèmes là où il n'y en a pas !

Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Je crois qu'il appartient à ceux qui aménagent des terrasses - cafetiers ou autres - d'adapter les conditions pour que les personnes avec un handicap puissent y avoir accès. C'est un article constitutionnel, et au sein de la Constituante on s'est véritablement engagé à faire en sorte que, dans les trois ou quatre ans suivants, les articles soient mis en vigueur. Et je crois que c'est aussi l'occasion de rappeler l'aspect ludique, festif et tellement positif du monde des terrasses, puisqu'on a déjà beaucoup parlé des aspects économiques, de surveillance, de contrôle, etc. Regardez, ces jours il y a comme une éclosion ! Tout le monde est dehors, les gens se sentent beaucoup mieux, sont beaucoup plus aimables, et je ne vois pas pourquoi une partie de la population n'en profiterait pas. Certes, ça me fait peur d'entendre que 30% des terrasses devront fermer, mais alors que les établissements les mettent aux normes ! On a voté la constitution il y a près de trois ans, cela fera bientôt deux ans qu'elle est entrée en vigueur, alors maintenant allons-y ! (Applaudissements.)

M. Frédéric Hohl (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, on a consacré vingt-deux séances - vingt-deux séances ! - à cet objet, et aujourd'hui on parle de cette question... Mais pourquoi ? Si on parle de cela, eh bien il y a deux solutions: soit vous retirez cet amendement et vous déposez ensuite une motion de sorte qu'on auditionne les gens... Parce que moi je vous le dis, et je parle au nom des cafetiers-restaurateurs: si on applique cette mesure, on ferme 30% des terrasses à Genève. (Commentaires.) Si c'est ce que vous voulez, on va dans ce sens ! Donc si vous conservez cet amendement, Mesdames et Messieurs les députés, on sera obligé de procéder à des auditions, raison pour laquelle je demande le renvoi en commission de ce projet. (Exclamations.)

Le président. C'est une demande formelle, Monsieur le député ? (M. Frédéric Hohl acquiesce.) Très bien. Les rapporteurs et le Conseil d'Etat peuvent s'exprimer sur ce renvoi en commission, s'ils le souhaitent. (Commentaires.) Je passe la parole à la rapporteure de minorité Sarah Klopmann.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. Il est évident qu'il ne faut pas renvoyer ce projet en commission. Comme M. Hohl l'a bien rappelé, nous avons déjà consacré une multitude de séances à cet objet, il est inutile d'en rajouter ! (Commentaires.) Je ne vais pas moi-même retirer un amendement qui a été déposé par mon collègue, mais j'aimerais quand même relever que, parfois, quand on est cent dans une salle, il peut arriver que des idées qui n'ont pas traversé le cerveau de quinze personnes surgissent ! (Brouhaha.) Il est donc normal qu'un nouvel amendement puisse être proposé, et on peut en discuter sans s'écharper. Mais, surtout, ne renvoyons pas ce projet, s'il vous plaît ! (Brouhaha.)

Le président. Merci, Madame la rapporteuse. La parole est à M. le rapporteur de majorité... qui ne la souhaite pas. Je passe donc le micro à M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, il serait dommage, à ce stade, de trébucher sur cet amendement, et pour répondre à la demande de renvoi en commission, je voudrais quand même rappeler qu'il y a eu des prises de position sur cette question-là au cours de l'étude du projet de loi.

Je rappelle également, dans la mesure où les terrasses constituent d'abord de la matière d'apanage communal, que les deux principales communes concernées que sont la Ville de Genève et Carouge ont sinon pris des engagements, du moins déjà introduit, pour une partie d'entre elles, ces paramètres dans leurs directives communales, et je suis bien placé pour le savoir, puisque j'en avais la charge en Ville de Genève. (Exclamations.) Alors je ne sais pas d'où vient ce chiffre de 30% mais, normalement, s'agissant notamment de la Ville de Genève - mais peut-être sommes-nous encore dans la phase d'adaptation - ces dispositions sont prévues. Et il est normal que ce soient les communes qui les fixent, puisqu'elles sont en charge de l'aménagement - le député Rémy Pagani n'est pas là à l'instant, mais il aurait pu le dire mieux que moi - et ces communes doivent ensuite veiller aux dispositions d'application, sachant que les terrasses, encore une fois, sont des compétences essentiellement communales, c'est d'ailleurs ce que consacre la loi. Ainsi, que vous mettiez ou pas cet alinéa dans la loi, je pense que les choses se feront en direction de ce que souhaite la constitution, et je vous invite donc à poursuivre le débat sur des articles qui ont été plus discutés en commission.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons donc voter sur cette demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11282-1 à la commission de l'économie est rejeté par 74 non contre 10 oui et 3 abstentions.

Le président. Nous poursuivons le débat, et je passe la parole à M. Roger Deneys.

M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, dire que, comme cet amendement n'a pas été présenté en commission, on ne peut pas en parler maintenant, franchement... L'amendement de Mme de Montmollin n'avait pas non plus été présenté en commission ! (Commentaires.) Ça ne pose pas de problème.

En l'occurrence, demander que les terrasses soient accessibles aux personnes avec handicap ou à mobilité réduite, ça signifie en gros qu'aux endroits où les escaliers menant à la terrasse sont très étroits, il faudra peut-être les élargir un peu et installer des rampes. Ce type de dispositif ne me semble pas disproportionné, et je doute que ce soit de nature à faire fermer 30% des terrasses.

Et, honnêtement, si cet amendement est refusé parce qu'il a été déposé au dernier moment, eh bien en réalité c'est un prétexte ! Il est clair que cette question pourrait faire l'objet d'un autre projet de loi, mais je pense que ça ne mérite certainement pas un renvoi en commission. Il ne faut pas non plus exagérer, cette disposition n'est pas excessive et, comme pour toute disposition légale, il y aura un délai d'adaptation. Ce ne sera peut-être pas pour cette année, ce qui veut dire que les prochains plans devront être réalisés en conséquence mais, franchement, ça ne me semble pas excessif ! En outre, on l'a dit, c'est prévu dans la nouvelle constitution, donc mettre cette disposition dans la loi relève simplement du bon sens.

M. Michel Amaudruz (UDC). Je comprends parfaitement bien la position de M. Mizrahi, et je l'approuve, mais il y a quand même une question de proportionnalité. Si, par hypothèse de raisonnement, la volonté d'assurer l'accès aux personnes handicapées débouche sur la non-édification d'une terrasse, c'est aussi regrettable, parce que la période pendant laquelle on peut aller sur une terrasse dure le temps de l'été ou des belles journées, et ces terrasses sont très appréciées du public. Du reste, elles ne sont pas si nombreuses, ou du moins il faut en maintenir le plus possible. Il y a donc quand même une question de proportionnalité, et il ne faudrait pas que cette disposition débouche sur l'impossibilité d'ouvrir des terrasses, lesquelles sont très prisées.

M. Pascal Spuhler (MCG). Je pense qu'il y a un peu d'exagération dans les propos des députés PLR quand ils nous signalent que 30% des terrasses vont fermer. Je dois dire que je m'étonne que M. Hiltpold souligne ce fait, lui qui est charpentier-ébéniste, sauf erreur ! (Remarque.) Je pense que vous pourriez précisément utiliser vos qualités pour aider ceux qui auraient des problèmes à adapter leurs terrasses, puisqu'elles sont justement en bois, en général... (Commentaires.) Dès lors, dans la mesure où ces terrasses saisonnières sont faites en bois, je pense que vous avez tout à fait les compétences pour adapter ce genre d'endroits aux personnes handicapées.

Effectivement, la plupart des terrasses saisonnières sont installées à fleur de trottoir, ce qui fait qu'en principe, si le trottoir a été mis aux normes, on peut accéder aux terrasses directement depuis le trottoir. Quant à celles qui se trouvent uniquement sur le trottoir, elles sont la plupart du temps accessibles, et ma foi les quelques autres s'adapteront, parce que ça fait partie de la constitution, comme on l'a dit ! Les personnes handicapées ou à mobilité réduite ont aussi le droit d'aller boire un verre, elles ne sont pas obligées de rester à l'extérieur de la terrasse alors que leurs copains y sont assis. Je trouve un peu lamentable qu'on ne pense pas à ce genre de détails et, à mon avis, les restaurateurs qui veulent être accueillants font le nécessaire pour tout le monde. (Applaudissements.)

M. Patrick Lussi (UDC). Nous sommes vraiment dans un débat sensible, je dirais, voire tombant dans la sensiblerie. En effet, vu la manière dont M. Mizrahi présente les choses, qui oserait dire qu'on ne doit plus rien faire pour les personnes handicapées, d'autant que cela figure dans le texte constitutionnel ?

Je pense que mon collègue Me Amaudruz a bien parlé du principe de proportionnalité. Pour l'UDC, il s'agit bien entendu de favoriser tout ce qui peut être réalisé, mais je demande quand même à M. Mizrahi - lui qui est un éminent juriste et qui ne cesse de nous déplacer les virgules et les termes - si, quand on parle des terrasses, lesquelles sont des installations éphémères qui ne durent que le temps de l'été, le terme «doivent» doit vraiment être inscrit. Il me semble que, dans la mesure du possible, on devrait un peu nuancer, parce qu'il est certain que si ce verbe «doivent» figure dans la loi et qu'on ne peut pas installer une rampe pour les personnes handicapées, la terrasse risque d'être simplement supprimée ou de ne pas obtenir d'autorisation. Est-ce le but final que vous-même recherchez ? Je ne le pense pas, c'est pourquoi le groupe UDC est très emprunté et estime que le terme impératif «doivent» qui se trouve dans votre amendement est un peu exagéré s'agissant de constructions éphémères. (Commentaires.)

M. Michel Ducret (PLR). Mesdames et Messieurs, autant cette proposition part d'une bonne intention, autant il faut cesser ce désordre ! Cette disposition sur les problèmes d'exploitation des établissements publics n'a rien à voir avec le sujet ! Ce sont des notions liées à la loi sur les constructions et installations diverses, à l'accessibilité des lieux publics, mais c'est une généralité qui ne touche pas particulièrement les établissements publics, pas plus d'ailleurs les établissements que leurs terrasses ! On n'a pas à préciser ici par exemple la hauteur nécessaire dans un établissement public. Est-ce que cette disposition, qui est ailleurs une obligation pour les lieux publics, est précisée dans ce projet de loi ? Absolument pas ! C'est un immense désordre que l'on nous propose ici, et ce type de mesure n'a rien à faire dans ce projet de loi. Mettons les choses là où elles doivent être: l'accessibilité aux personnes handicapées est prévue effectivement sur le plan constitutionnel, mais on n'est pas en train de traiter de problèmes de construction ! On parle là de problèmes d'exploitation, qui n'ont rien à voir avec l'accessibilité ! Mettons donc les choses là où elles doivent être ! Cette proposition doit être retirée et n'a pas sa place dans ce projet de loi, sinon on va inscrire des dispositions sur l'aération des cuisines, sur le niveau lumineux dans les bars... En effet, certaines personnes ne voient pas très clair, et moi je trouve qu'il y a des bars qui sont trop obscurs et dans lesquels je ne peux pas faire mes sudokus ou mes mots croisés, ce qui m'embête terriblement ! (Exclamations.) Je me sens un peu handicapé, alors est-ce normal ou pas ?! Non mais je crois qu'il faut arrêter... Mesdames et Messieurs, remettons les choses en ordre et là où elles doivent être, parlons de ce dont nous devons parler aujourd'hui et laissons ce problème-là - qui est un vrai problème - ailleurs, là où il doit être ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Le Bureau a décidé de clore la liste. S'exprimeront encore: M. Serge Hiltpold, Mme Marion Sobanek, Mme Salika Wenger et M. Sandro Pistis, ainsi que les rapporteurs.

M. Serge Hiltpold (PLR). J'aimerais simplement appeler le parlement à faire preuve d'un certain bon sens. Si une personne handicapée souhaite aller sur une terrasse, les clients vont l'aider à accéder à sa place avec son fauteuil, alors pourquoi légiférer en inscrivant cette disposition dans la loi ?

D'autre part, ce n'est pas une intention, mais une obligation, puisqu'il est écrit: «Les terrasses doivent être accessibles aux personnes avec handicap ou à mobilité réduite.» C'est donc une mesure impérative, mais dans quel délai ? Cette année ? L'année prochaine ? Dans deux ans ? C'est vague ! En conséquence, je vous demande par correction de retirer cet amendement et d'appliquer l'article constitutionnel.

Mme Marion Sobanek (S), députée suppléante. On le sait tous, cette question relève tout simplement de la constitution: il faudrait que tous les bâtiments soient accessibles aux personnes handicapées. (Brouhaha.) Par conséquent, évoquer l'argument de la proportionnalité me semble vraiment bizarre. En effet, qu'est-ce qui est proportionnel ? Eh bien qu'on traite les gens par rapport à ce qu'ils sont ! On fait attention aux petits, aux personnes âgées, et il est évident que nos citoyens handicapés méritent doublement notre attention. De plus, je vous rends sensibles au fait que la population est en train de vieillir et que de plus en plus de personnes auront besoin de moyens de locomotion. Et pourquoi n'auraient-elles pas le droit d'aller boire un thé au soleil ? Je veux bien que vous mettiez les réfugiés dans des abris dépourvus de soleil, mais s'il vous plaît ne privez pas les personnes handicapées du soleil d'une terrasse ! (Commentaires.)

Pour revenir à l'argument du député Michel Ducret - vous le lui direz bien, Monsieur le président - si un établissement a déjà garanti un accès pour les personnes handicapées, il sera facile de garantir également l'accès aux terrasses.

Et pour finir j'aimerais tout simplement répéter ce que j'ai déjà dit une fois... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...à savoir que la valeur d'une société se mesure à la manière dont elle traite ses citoyens les plus faibles. En ce sens, je vous demande d'accepter cet amendement. (Quelques applaudissements.)

Mme Salika Wenger (EAG). On a parlé pendant des heures de l'accessibilité à tous les lieux publics pour les jeunes de 16 à 20 ans, etc. Et maintenant, tout d'un coup, on a l'air d'avoir un peu peur de donner des droits aux personnes qui vivent avec un handicap ou qui ont des problèmes de mobilité. Je vais donc juste vous donner un chiffre: dans le canton de Genève, 24% des gens sont à la retraite. Oui, 24% ! Alors on peut imaginer que cette population... (Brouhaha.) ...rencontre parfois quelques difficultés. (Remarque.) Oui, c'est mon cas aussi, en effet ! D'ailleurs pour la plupart d'entre vous également ! (Rire de l'oratrice.) On comprend donc qu'il y ait des problèmes de mobilité et qu'il puisse y en avoir d'importants à l'avenir, alors pense-t-on que les personnes qui vivent avec un handicap ne sont pas suffisamment importantes, n'ont pas un pouvoir d'achat suffisamment fort pour représenter notre société, et que nous n'avons aucun effort à fournir ? Parce que ce qu'on est en train de nous dire, c'est la chose suivante: «Oui, on veut bien le faire, mais pour autant que ça ne coûte rien à personne et qu'il n'y ait aucun inconvénient.» Eh bien ce n'est pas comme ça, la vie ! Nous sommes en train de parler de personnes qui ont justement un inconvénient majeur, et donc le minimum que nous puissions faire serait de leur simplifier la vie - et peut-être la nôtre dans le futur ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) En conclusion, nous voterons cet amendement.

M. Sandro Pistis (MCG). Cet amendement est une marque de soutien vis-à-vis des personnes qui n'ont pas la vie facile tous les jours, et je pense qu'on doit pouvoir donner, sans différence de traitement et sans discrimination, la possibilité à tout un chacun d'accéder à ces terrasses. Et, pour mémoire, je voudrais quand même vous relire l'article 209 de notre constitution, laquelle a été acceptée par une large majorité de ce canton: «1 L'Etat favorise l'intégration économique et sociale des personnes handicapées. 2 Lors de constructions nouvelles, les logements et les places de travail sont rendus accessibles et adaptables aux besoins des personnes handicapées. Lors de rénovations, les besoins de celles-ci sont pris en considération de manière appropriée.» (Commentaires.) Chers collègues, je pense donc que lorsqu'on vote une nouvelle loi, il faut également penser aux plus faibles, à celles et ceux qui ont des difficultés, parce que vivre avec un handicap est un combat quotidien. Je trouve par conséquent assez scandaleux de la part du groupe PLR de s'opposer à la mise en place de systèmes visant à favoriser l'accès pour les personnes démunies physiquement. (Commentaires.) Le groupe MCG soutiendra donc cet amendement pour que tout un chacun puisse avoir accès aux terrasses. Et arrêtez de faire des petits privilégiés ! Je vous remercie ! (Exclamations. Applaudissements.)

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. L'accessibilité des lieux publics aux personnes handicapées doit être garantie et les terrasses sont des lieux publics, nous devons donc accepter cet amendement. J'aurais quand même voulu préciser qu'il est évident que les terrasses qui doivent être accessibles aux personnes avec handicap sont déjà dans des lieux accessibles, alors nous dire qu'il y a des lieux qui ne sont pas accessibles et que nous ne pouvons donc pas voter l'amendement n'est pas un bon argument. En effet, si un lieu est inaccessible aux personnes à mobilité réduite pour des raisons inhérentes à ce qu'il est - par exemple un bateau - ou parce qu'il est situé dans un espace du domaine public en tant que tel qui le rend inaccessible... (Remarque.) Eh bien oui, je suis en face de vous, désolée ! (Rire de l'oratrice.) ...eh bien il est évident qu'on ne va pas fermer la terrasse qui est en haut ! Il s'agit simplement, lorsqu'on construit une terrasse - qui est un élément qu'on construit chaque année - de faire en sorte que celle-ci soit accessible. Du reste, c'est déjà le cas la majorité du temps, et cela figure dans les directives communales, comme l'a rappelé M. Maudet. En outre, soit ces terrasses sont situées sur des trottoirs qui sont plats, soit elles se trouvent sur des routes, lesquelles doivent déjà obligatoirement être nivelées par rapport au trottoir. (Commentaires.) Ça ne pose donc pas de problème ! Et s'il y a une différence de nivellement à rétablir, on peut parfois le faire grâce à des marches, mais j'aimerais juste rappeler ici que fabriquer des marches en bois est beaucoup plus compliqué que d'installer une rampe ! Ça ne va donc pas être trop embêtant ! (Brouhaha.) Je vous remercie par conséquent d'accepter cet amendement. (Quelques applaudissements.)

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. A l'impossible nul n'est tenu, vous me direz ! Mais c'est quand même un peu dommage... Pour reprendre ce qui a été dit tout à l'heure, c'est vrai qu'il s'agit d'un élément nouveau. En effet, tous les amendements dont nous sommes saisis cet après-midi concernent des points qui ont déjà été traités en commission, or là on introduit une nouvelle notion, et on voit bien le débat passionné que cela provoque.

Nous sommes tous pleins de bonnes intentions, personnellement je suis totalement favorable à l'idée que les terrasses doivent être accessibles aux personnes avec handicap, bien sûr, mais il y a des situations où ce n'est pas possible. Les communes le savent bien, puisqu'elles autorisent des terrasses sur la base de plans dans lesquels il faut expliquer ce qu'on va installer et comment, mais elles donnent aussi la possibilité aux exploitants d'avoir des modules pour leurs terrasses, et des modules standards. Si je prends l'exemple de Carouge, il s'agit de modules standards qui sont aménagés sur les places de parc au bord des trottoirs, or ces derniers n'ont pas toujours la même épaisseur, il y a effectivement des problèmes de niveau, et on ne parvient pas toujours à mettre exactement à fleur certaines terrasses.

D'autre part, il y a des établissements publics qui disposent de salles au sous-sol qui ne sont accessibles que par escalier, et on ne peut pas leur demander d'installer un ascenseur uniquement pour que les personnes handicapées puissent accéder au sous-sol. De plus, comme on l'a dit à plusieurs reprises, c'est une notion qui a déjà été traitée et qui continue de l'être dans le cadre de la LCI, et c'est un problème de construction. Tous les établissements doivent effectivement avoir des accès pour les personnes handicapées, on a toujours voté toutes les modifications de lois qui visaient à favoriser l'accès aux bâtiments publics ou autres pour les personnes handicapées, je vous invite donc soit à retirer cet amendement, soit à le refuser, soit encore à accepter le sous-amendement qui va être déposé. En effet, il atténue un peu la portée de cet amendement dont la conséquence serait que, sous prétexte qu'une terrasse n'est pas accessible aux personnes handicapées, personne n'irait sur cette terrasse, puisqu'elle ne serait pas autorisée, ce qui serait quand même un comble.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur. Nous sommes donc saisis d'un sous-amendement qui modifie l'alinéa 2 de l'article 15. Je vous le lis: «Les terrasses doivent, dans la mesure du possible, être accessibles aux personnes avec handicap ou à mobilité réduite.» (Commentaires.) Monsieur Mizrahi, s'il vous plaît ! (Brouhaha.) Je vais mettre aux voix ce sous-amendement... (Commentaires.) S'il vous plaît, je vous prie de bien vouloir écouter ! Nous allons voter sur ce sous-amendement.

Une voix. On n'a pas l'amendement, Monsieur ! (Commentaires.)

Une autre voix. Mais il l'a lu !

Mis aux voix, ce sous-amendement est adopté par 46 oui contre 39 non. (Commentaires pendant la procédure de vote.)

Le président. Nous nous prononçons maintenant... (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît ! ...sur l'amendement de M. Mizrahi tel que modifié par le sous-amendement. En voici la teneur:

«Art. 15, al. 2 (nouvelle teneur) et al. 3 (nouveau)

2 Les terrasses doivent, dans la mesure du possible, être accessibles aux personnes avec handicap ou à mobilité réduite.

3 Pour des motifs d'ordre public et/ou en cas de violation des conditions d'exploitation visées aux alinéas 1 et 2, les communes sont habilitées à prendre, pour ce qui touche à l'exploitation de la terrasse concernée, les mesures et sanctions prévues par la présente loi, lesquelles sont applicables par analogie.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 59 oui contre 6 non et 20 abstentions.

Mis aux voix, l'art. 15 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 16 est adopté, de même que les art. 17 à 28.

Le président. A l'article 29, nous sommes saisis d'un amendement de Mme Klopmann, que voici:

«Art. 29, al. 3 (nouveau)

3 L'exploitant est obligé de servir de l'eau gratuitement à toute personne le désirant et commandant un mets ou une boisson.»

Madame Klopmann, vous avez la parole.

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. Je n'ai pas la maternité, si je puis dire, de cet amendement, je vais donc laisser son véritable auteur - en l'occurrence M. Wenger - le présenter, puis M. de Matteis le défendra au nom des Verts.

Le président. Merci, Madame la députée. Dans ce cas je passe la parole à son auteur, soit M. de Matteis... C'est exact ? (Commentaires.) Je n'ai pas entendu ! (Remarque.) Très bien, la parole est à M. Romain de Sainte Marie.

M. Romain de Sainte Marie (S). Merci, Monsieur le président. Cet amendement fait suite à un débat qui dure depuis plusieurs années, et je pense que chacun d'entre vous a déjà vécu la situation suivante: après avoir commandé une pizza ainsi qu'une bouteille de vin dans un café-restaurant, vous demandez une carafe d'eau, que le serveur vous apporte, et à la fin vous découvrez que la carafe d'eau coûtait trois, quatre ou même cinq francs. C'est le cas aussi dans de nombreux fast-foods: quand vous demandez si, en consommant un plat, vous pouvez recevoir un verre d'eau gratuit, on vous répond que, non, le verre d'eau est facturé un franc, mais qu'en revanche les boissons sucrées en PET sont extrêmement bon marché. On vous encourage donc à boire une boisson sucrée, peu chère, plutôt qu'un verre d'eau du robinet.

Or cela entraîne aujourd'hui des effets malheureux en matière d'environnement, puisqu'on encourage finalement la consommation de boissons qui sont importées et dont le transport engendre par conséquent des coûts environnementaux. De plus, elles doivent être recyclées, car elles sont bien souvent conditionnées dans des bouteilles en PET ou en verre, qui demandent ensuite tout un processus de recyclage. Et il y a également un impact en matière de santé publique, puisque avec ce type de mesure on encourage finalement les gens à consommer une boisson sucrée, voire peut-être même alcoolisée... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...plutôt qu'un verre d'eau.

Alors il est vrai que, ici au parlement, on connaît particulièrement bien les façons d'utiliser les verres d'eau, de manière peut-être gratuite par moments, mais aujourd'hui le Grand Conseil peut mettre un point final à ce débat et obliger les établissements, les cafés-restaurants, à mettre gratuitement à disposition des clients un verre d'eau ou une carafe d'eau, s'ils le demandent d'une part, et à la condition qu'ils commandent un plat d'autre part. Et il est évident que cette mesure n'entraîne aucun coût pour le cafetier ou le restaurateur - Monsieur Leyvraz, je vous vois refuser cet argument... - puisque c'est sous condition de consommation. Par conséquent, si vous consommez une pizza et que vous prenez une bouteille de vin en plus, eh bien le fait d'apporter un verre d'eau ou une carafe d'eau n'aura aucun coût.

Il s'agit donc aujourd'hui de prendre cette mesure pour diminuer les impacts en matière d'environnement et de santé publique, mais avant tout pour favoriser un aspect de la consommation, à savoir le consommateur, car cet amendement vise principalement le confort de celui-ci dans les cafés et restaurants, en le faisant bénéficier gratuitement de ce verre d'eau en cas de consommation. Je vous invite dès lors à réserver un accueil favorable à cet amendement.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, je vous informe que nous ferons une pause après cet amendement. (Exclamations.) Je passe la parole à M. Yves de Matteis.

M. Yves de Matteis (Ve). Merci, Monsieur le président. En réalité, je n'ai quasiment plus rien à dire après l'intervention de mon préopinant, puisque j'avais à peu près les mêmes arguments à faire valoir. J'ajouterai quand même peut-être deux éléments. Pour reprendre ce que disait M. Guinchard, qui était très préoccupé par les questions de santé publique, et notamment la prévention de l'alcoolisme, il est clair qu'à partir du moment où l'on servira des verres d'eau gratuits, cela pourra avoir une certaine incidence sur cette thématique.

J'aimerais aussi souligner le fait qu'il ne s'agira pas d'une genevoiserie, puisqu'il existe d'autres cantons ou pays où il est inscrit dans la loi que les restaurants sont obligés de servir un verre d'eau ou une carafe d'eau avec des verres. Il n'y a pas besoin d'aller très loin: au Tessin, par exemple, l'article 110 du règlement de la loi sur les lieux publics - que je vais vous traduire librement de l'italien - préconise que quand des plats principaux sont servis, le gérant doit fournir gratuitement de l'eau potable. Il n'est donc pas nécessaire d'aller chercher des exemples très loin, et ce ne sera pas une genevoiserie. C'est une excellente pratique... (Commentaires. Brouhaha.) ...qui devrait d'ailleurs être généralisée - la personne qui vient de passer à côté de moi opine du chef à ce propos - et je vous encourage donc bien sûr à soutenir cet amendement, car ce sera une très bonne chose.

Mme Salika Wenger (EAG). Chers collègues, une fois de plus je suis complètement ahurie de voir qu'on est obligé de légiférer sur le fait de donner ou pas un verre d'eau aux clients. En effet, dans tous les pays du monde, quand vous vous asseyez au restaurant, on vous sert un verre d'eau, et même parfois avec de la glace et des petites choses à manger. (Commentaires.) Alors je dois avouer qu'être forcé de légiférer sur ce point me paraît déjà une absurdité totale ! Quant à l'amendement qui est présenté, j'ai envie de dire que c'est le minimum syndical ! En effet, il est dit qu'on doit servir un verre d'eau aux personnes qui consomment, mais l'eau est un droit humain, et je ne conçois pas que l'on puisse refuser à qui que ce soit au monde un verre d'eau. De grâce ! (Commentaires. Chahut.)

Le président. S'il vous plaît !

Mme Salika Wenger. A moins que ce ne soit de l'eau-de-vie, et dans ces conditions on peut recommencer la discussion ! Mais dans le cas particulier, cet amendement est extrêmement modéré, et je n'imagine pas qu'on puisse le refuser. Mesdames et Messieurs, je vous remercie donc de l'accepter. (Commentaires.)

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. le député Frédéric Hohl, en priant l'assemblée de faire un peu de silence. Merci !

M. Frédéric Hohl (PLR). Moi aussi ? (Exclamations.)

Le président. Non, vous pouvez y aller, bien entendu !

M. Frédéric Hohl. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste aime bien inscrire le verbe «obliger»: il faut obliger les patrons, obliger les restaurateurs... A une époque, il y avait la légende urbaine de la carafe d'eau et de la «Feuille d'avis officielle». Heureusement, on y a échappé ! Alors certes, on pourrait obliger les exploitants à servir un verre d'eau, mais on pourrait également obliger les gens à sourire, ou encore ajouter des exigences concernant la température de l'eau ! En effet, on pourrait aussi servir un verre d'eau chaude ! Vous n'avez pas indiqué que ce devait être de l'eau fraîche ! (Commentaires.)

Je me réjouis d'aller samedi prochain à l'Usine - pour prendre un exemple qu'on n'a pas encore utilisé ce soir. Je vais acheter un sandwich et demander un verre d'eau. Si je l'ai, je serai vraiment ravi ! Je vous donne un autre exemple: je suis allé pas plus tard que la semaine passée dans un restaurant, j'ai commandé un café après le repas et demandé un verre d'eau, mais on m'a répondu: «Désolé, on ne vous le donne pas !» Eh bien je ne vais pas y retourner ! C'est le marché ! La grande majorité des restaurants vous apportent une carafe ou un verre d'eau.

Moi je vous propose ceci, Mesdames et Messieurs, puisque la pause va bientôt arriver: on va tous chez Glôzu tout à l'heure et vous demandez tous un verre d'eau ! (Rires.) On verra dans la réalité comment ça va marcher ! (Commentaires.) Non, s'il vous plaît, arrêtez avec vos obligations ! Nous n'allons donc pas voter cet amendement. (Applaudissements.)

Le président. On pourrait obliger les membres de ce parlement à faire des interventions beaucoup plus courtes, aussi ! (Rires.) Je passe la parole à M. le député Pascal Spuhler.

M. Pascal Spuhler (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, M. Romain de Sainte Marie aimerait maintenant donner la leçon aux exploitants et leur dire comment être de bons commerçants, comment recevoir les clients, c'est-à-dire en leur offrant un verre d'eau, etc. Et pourquoi ne pas leur demander de dire bonjour, au revoir et merci, de parler trois langues et de mettre la fourchette à tel ou tel endroit ?! (Commentaires.) Bref, ce n'est pas vous, Monsieur le député, ni nous, d'ailleurs, qui allons gérer le savoir-faire de nos commerçants. Qu'on leur donne des règles et qu'on fasse des lois, soit, mais de là à les obliger à servir tel ou tel produit... On en a déjà parlé tout à l'heure, pour ce qui est des produits du terroir genevois, on ne peut que les y sensibiliser, mais pour ce qui est d'une obligation, c'est simplement ridicule ! Alors maintenant obliger les exploitants à servir un verre d'eau... (Commentaires.) Où va-t-on ! En effet, si un commerçant, un cafetier ou un restaurateur est intelligent, il apportera avec grand plaisir et avec le sourire un verre d'eau quand on le lui demande gentiment. Et vous, comme vous aurez été satisfaits, vous inviterez vos amis à revenir chez ce restaurateur ! Il aura donc fait son travail correctement, et tout le monde sera content. Mais si on commence à l'obliger à le faire, eh bien il va nous jeter les verres d'eau à la figure, et c'est tout ce qu'on aura gagné ! (Commentaires.)

M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, on parle d'obligation, et je vais vous dire pourquoi je suis gêné. Cet amendement émane de la gauche, parce qu'il est bien sûr question de gratuité pour la personne qui demande un verre d'eau, mais c'est un manque à gagner pour l'exploitant, dans la mesure où il ne facture rien. (Commentaires.) De grâce, Madame, vous savez très bien que toute consommation servie fait l'objet d'un ticket et que donc le personnel qui apporte ce verre d'eau gratuit ne touchera pas le pourcentage qui est dû au service sur chaque ticket. Voilà l'un des premiers éléments.

Ensuite, vous avez raison, Madame, c'est dommage, on ne peut plus boire de l'eau sans consommer et donc sans débourser de l'argent. Mais je vous en veux, à vous tous en face, car c'est votre faute ! En effet, pour des raisons écologiques et d'économies d'eau, il n'y a plus une seule fontaine publique à Genève où l'on peut s'arrêter pour se désaltérer. (Commentaires. Exclamations. Applaudissements.) Leur nombre a diminué comme des... (Chahut.)

Le président. S'il vous plaît ! (Brouhaha.) Monsieur Spuhler !

M. Patrick Lussi. De grâce, nous avons affaire à des commerçants et la situation est difficile, alors demander que toutes leurs places soient occupées par des buveurs d'eau, même si c'est noble et que cela concerne aussi un problème de santé publique... Je bois de l'eau chez moi, mais je n'oblige personne à m'en servir dans un bistrot ou sur une terrasse ! Refusons donc cet amendement, s'il vous plaît. (Commentaires. Brouhaha.)

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, M. de Matteis a cité tout à l'heure mon intervention concernant la prévention de l'alcoolisme: je lui serais reconnaissant de me laisser, à titre personnel, l'interprétation de mes propres propos, qui ne vont pas tout à fait dans la direction de l'amendement qui vous est soumis. Dans ce domaine, il convient de savoir qu'il faut laisser jouer les règles de la concurrence et de la qualité du service. En effet, si un restaurateur refuse de servir à un client une carafe ou un verre d'eau, que ce soit avec un repas ou un café, eh bien celui-ci n'ira plus chez lui, et l'exploitant sera bien obligé de s'adapter aux souhaits de sa clientèle. (Commentaires.) Voilà le système le plus simple ! J'imagine donc, contrairement à notre collègue Salika Wenger, que l'on peut parfaitement refuser cet amendement.

Mme Danièle Magnin (MCG). Je voulais simplement faire une petite remarque concernant la santé publique et nos jeunes. Comme vous le savez, les boissons les moins chères sont généralement les bières, alors si ceux-ci ont encore soif après une bière, il serait quand même adéquat qu'on puisse leur servir un verre d'eau plutôt qu'ils n'en boivent une deuxième. Pour le reste, je laisse chacun voter selon sa conscience.

M. Michel Amaudruz (UDC). Je voudrais juste dire que, à mon sens, offrir un verre d'eau est une question de courtoisie. Cela étant, je suis certain que M. de Sainte Marie, qui est un brillant économiste... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...comprendra que, par exemple, la marge est très courte sur les plats du jour et que, comme on le dit dans le jargon des bistroquets, c'est sur la limonade qu'on réalise son gain ! Il y a donc quand même un aspect économique qu'il faut prendre en compte, tout en espérant que le principe de courtoisie prédominera lorsqu'on consomme quelque chose.

M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, je ne sais pas si une majorité de ce parlement a bien compris que, avec cet amendement, je ne cherchais pas à obliger les consommateurs à boire de l'eau dans tous les établissements, pas plus que l'article 31 n'oblige tous les consommateurs à boire du vin, qui plus est du vin genevois ! (Exclamations.) Mais c'est vrai que cet amendement rejoint quand même le premier amendement relatif à la promotion des produits du terroir que nous avons voté aujourd'hui. (Commentaires.) Après tout, il faut l'avouer, nous avons la chance d'avoir à Genève une eau excellente, alors pourquoi s'en priver ?! (Brouhaha.) Cet amendement se rapproche donc de celui qui a été proposé par le PLR concernant la promotion des produits du terroir, car il s'agit effectivement de valorisation et de promotion, c'est-à-dire qu'au lieu d'entendre aujourd'hui des arguments tels que: «Mais nos boissons sucrées et nos sodas ne sont pas chers ! Commandez-les plutôt que de prendre un verre d'eau à un franc !», eh bien on pose un cadre en indiquant qu'on n'en veut plus, mais qu'on souhaite au contraire, pour la santé publique, pour la santé de nos concitoyens, faire en sorte que les gens boivent davantage d'eau - et, s'ils le désirent, de vin genevois, bien entendu ! Enfin, j'entendais Mme Wenger s'inquiéter tout à l'heure... (Commentaires.) Imaginez le pastis de Mme Wenger, si l'eau lui est facturée en plus ! (Rires.)

M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, certains d'entre vous parlent de courtoisie, de l'attitude commerçante dont on fait preuve en offrant un verre d'eau - quand le client commande une boisson ou un mets, bien entendu - et je rejoins tout à fait notre collègue Salika Wenger lorsqu'elle dit qu'il est vraiment dommage de devoir avoir cette discussion-là, parce qu'il paraît totalement logique que, dans un café ou un restaurant, on nous serve un verre d'eau.

Pour répondre au député Frédéric Hohl, je dirai que ce n'est pas qu'on aime obliger... (Commentaires. Chahut. Protestations.) ...mais à un moment donné, lorsqu'on constate qu'il y a de plus en plus de cafetiers qui n'offrent plus l'eau et qu'il faut donc payer pour une carafe ou un verre d'eau, que va-t-on faire lors de la discussion sur une telle loi ? Eh bien on va malheureusement vouloir inscrire une disposition dans la loi, parce qu'il ne s'agit pas seulement de la gratuité de l'eau, Mesdames et Messieurs: c'est une porte ouverte à d'autres mesures, et quelle sera la prochaine ? On va bientôt nous faire payer le pain avec la salade, les grissinis qu'on nous offre quand on arrive... (Brouhaha.) ...et lorsqu'on demandera une chaise pour les petits enfants parce qu'on les aura pris avec soi au restaurant, on va nous faire payer la chaise ! Et puis pourquoi ne pas nous faire payer un jour le sourire... Alors à un moment donné, on décide que cela commence par l'eau: l'eau doit être gratuite, et cela doit figurer dans cette loi. Nous espérons donc vraiment, Mesdames et Messieurs les députés, que ce ne sera pas un coup d'épée dans l'eau. (Rires. Applaudissements.)

M. Eric Leyvraz (UDC). Je serai très bref, Monsieur le président. Je trouve que cette discussion commence à devenir surréaliste, et il y a une question que l'on n'a pas encore abordée: comment fait-on pour ceux qui sont allergiques à l'eau ? (Rires. Applaudissements.)

M. Pascal Spuhler (MCG). Je voudrais juste rebondir sur la remarque de mon collègue Lussi, qui a relevé un point tout à fait intéressant tout à l'heure. La gauche voudrait que les commerçants servent de l'eau gratuitement aux clients; soit, l'intention est bonne. Mais alors j'ai un peu de peine à comprendre - et c'est là que je reviens sur ce qu'il a dit - que cette même gauche, que ces mêmes représentants de partis en Ville de Genève aient supprimé les fontaines à eau potable pour les transformer en fontaines à eau recyclée... C'est juste magnifique ! (Protestations. Chahut.) Ne dites pas non, vous avez encore voté en choeur il y a quelque temps en Ville de Genève. (Applaudissements. Claquements de pupitres.) Vous êtes contradictoires, Mesdames et Messieurs...

Le président. Monsieur Spuhler !

M. Pascal Spuhler. Je termine ! (Remarque.) Mais oui, je parle peut-être un peu plus fort... Vous êtes contradictoires: vous interdisez aux services publics d'offrir de l'eau aux gens, mais vous obligez les commerçants à offrir la gratuité. C'est magnifique ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Le Bureau a décidé de clore la liste. Sont encore inscrits M. Frédéric Hohl et les rapporteurs.

M. Frédéric Hohl (PLR). Merci, Monsieur le président. Vivement la pause ! Monsieur de Sainte Marie, j'ai adoré votre intervention: elle était digne de la Revue des députés, mais pas du parlement. C'était plutôt une boutade, alors ne faites pas ce genre de chose pendant qu'on traite de ce projet de loi, parce que là c'est sérieux !

Madame Magnin, vous avez parlé tout à l'heure de la bière, j'aimerais donc juste vous donner une information: la loi stipule que les établissements ont l'obligation d'offrir trois boissons à un prix inférieur à celui de la boisson alcoolisée la moins chère de la carte, à savoir de l'eau minérale, du Rivella et un verre de lait, par exemple. Cela figure donc déjà dans la loi. Alors peut-être que les restaurateurs l'inscrivent en petits caractères et que vous pourriez déposer un projet de loi pour les obliger à l'écrire en plus gros, mais en tout cas ça existe.

En outre, Mesdames et Messieurs, à force d'obliger les restaurateurs à offrir la gratuité, la gratuité et la gratuité, à un moment donné il faudra bien peut-être baisser les salaires, ne l'oubliez pas ! (Commentaires.)

Mme Sarah Klopmann (Ve), rapporteuse de minorité. J'étais très heureuse de ne pas m'exprimer sur un amendement, mais malheureusement je suis obligée de répondre, et en plus je vais parler des fontaines de la ville de Genève, parce que ce qui vient d'être dit est faux. (Protestations.) Les Verts de la Ville n'ont pas demandé qu'on coupe les fontaines... (Chahut.)

Le président. S'il vous plaît ! (Brouhaha.) Monsieur Spuhler !

Mme Sarah Klopmann. Les Verts ont plusieurs fois essayé de demander qu'il y ait des boutons-poussoirs ou des robinets, mais cela nous a toujours été refusé.

Concernant la gratuité, il est évident que l'eau doit être fournie gratuitement dans les cafés-restaurants. Si actuellement un restaurateur... (Brouhaha.)

Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! (Un instant s'écoule.) S'il vous plaît ! Poursuivez, Madame.

Mme Sarah Klopmann. Merci, Monsieur le président. Si actuellement un restaurateur a tant de peine à donner gratuitement un verre d'eau, c'est parce qu'il y a là derrière un service qui le justifie, mais puisque cet amendement est très strict et stipule que, pour avoir droit à un verre d'eau gratuit, la personne doit consommer, eh bien celle-ci est déjà servie.

D'autre part, si un commerçant a tant de peine à offrir un verre d'eau gratuit, c'est aussi parce qu'il compte se faire de l'argent sur les boissons, dans la mesure où il est obligé de vendre les plats le moins cher possible. Et là peut-être qu'il y a une vraie réflexion à mener: pourquoi vend-on toujours la nourriture avec très peu de marge et se fait-on du bénéfice sur les boissons, au point de ne plus vouloir distribuer de l'eau gratuitement ? (Commentaires.) Offrir de l'eau aux clients ne signifie pas qu'ils ne boivent rien d'autre: ça veut simplement dire qu'on peut vouloir s'hydrater lorsqu'on consomme une boisson alcoolisée ou qui déshydrate. En effet, un café, par exemple, déshydrate l'organisme en lui faisant perdre l'équivalent d'un verre d'eau: faire la promotion du verre d'eau est donc une question de santé publique ! Il faut que les gens puissent s'hydrater, d'autant que la plupart sont déshydratés sans même le savoir... (Commentaires.) ...parce qu'on y arrive très facilement. Ainsi, inscrire cette disposition dans la loi permet de dire que, oui, l'eau doit être offerte et qu'il faut encourager bien plus les gens à boire de l'eau plutôt que des produits en bouteille - qui ont été emballés et transportés - et des boissons sucrées ou alcoolisées. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Le PDC accusait tout à l'heure les Verts de faire sans arrêt la promotion de l'alcool, eh bien là nous souhaitons au contraire promouvoir l'eau, je pense donc qu'il faut soutenir cet amendement.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Moi j'ai l'impression que c'est ce débat qui prend l'eau pour le moment. J'ai de la peine à comprendre tous ces arguments: pourquoi ne laisse-t-on pas faire le marché ? (Commentaires.) Mais oui ! On est tous d'accord ici pour dire que si on nous facture l'eau dans un restaurant alors que l'on a consommé, on n'y retournera pas. Eh bien c'est ça, le marché ! C'est logique ! En Italie, du reste, le couvert est facturé dans la plupart des restaurants. (Commentaires.) Alors M. Wenger nous dit que, pour finir, on va nous facturer le pain ou la chaise pour enfants. Mais dans ce cas faites-nous la liste de ce qu'on ne doit pas facturer, puisque vous ne voulez pas que le verre d'eau soit payant, de sorte qu'on intègre éventuellement cette liste dans une loi !

Non, soyons réalistes. J'aimerais reprendre l'exemple de l'Usine qui a déjà été cité par M. Hohl: si chaque fois que vous commandez une bière à l'Usine - qui est l'établissement où l'on consomme le plus de bières à Genève - vous avez droit à un verre d'eau... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...je ne suis pas sûr qu'elle continuera à pratiquer les mêmes tarifs ! Je ne suis pas convaincu non plus que tous les dancings restants à Genève - car il y en a de moins en moins - puissent maintenir leur activité si chaque fois que vous prenez un coca ou un mojito, on est obligé de vous servir un verre d'eau en même temps. Non, soyons sérieux, il y a un manque à gagner, et c'est pour cela que je parlais de marché tout à l'heure. Si tout le monde demande un verre d'eau gratuit avec un mets ou une boisson, l'exploitant va devoir inévitablement répercuter ce manque à gagner sur d'autres prestations. Alors vous qui voulez une augmentation des salaires du personnel, je crois que ce n'est vraiment pas la bonne manière d'y parvenir !

Le dernier élément que je voulais évoquer, c'est que si vous souhaitez absolument que les gens arrêtent de consommer des boissons sucrées, eh bien déposez un projet de loi visant à ce que l'on n'ait plus le droit d'importer des boissons sucrées, et puis on en discutera ! Mais ce n'est pas en favorisant uniquement la consommation d'eau parce qu'elle serait gratuite dans les restaurants qu'on va améliorer la qualité de l'environnement à Genève, il faut quand même rester réaliste. Je vous invite donc bien évidemment à refuser cet amendement.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Nous allons maintenant nous prononcer sur cet amendement à l'article 29, dont je vous rappelle la teneur:

«Art. 29, al. 3 (nouveau)

3 L'exploitant est obligé de servir de l'eau gratuitement à toute personne le désirant et commandant un mets ou une boisson.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 57 non contre 32 oui.

Mis aux voix, l'art. 29 est adopté, de même que l'art. 30.

Fin du débat: Séance du jeudi 19 mars 2015 à 17h35

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons faire une pause. Nous reprendrons nos travaux dans un quart d'heure, soit à 17h35.

La séance est levée à 17h20.