République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 11067-A
Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et M. Roger Deneys, Irène Buche, Marie Salima Moyard, Prunella Carrard, Marion Sobanek, Anne Emery-Torracinta, Aurélie Gavillet modifiant la loi générale sur les contributions publiques (LCP) (D 3 05) (Pour une fiscalité plus écologique et plus sociale (3) : taxation accrue des puissants deux-roues motorisés et des quads)
Ce texte figure dans le «Recueil des objets déposés et non traités durant la 57e législature».
Rapport de majorité de M. Christo Ivanov (UDC)
Rapport de minorité de Mme Lydia Schneider Hausser (S)

Premier débat

Le président. Nous passons au PL 11067-A... (Brouhaha. Commentaires. Un instant s'écoule. Le brouhaha diminue.) Voilà qui est mieux, merci ! Cet objet est classé en catégorie II - quarante minutes. (Brouhaha. Un instant s'écoule.) Pourrait-on avoir un peu de silence, s'il vous plaît ?

Des voix. Chut !

Le président. Merci. Je passe la parole au rapporteur de majorité Christo Ivanov, puis à la rapporteure de minorité Lydia Schneider Hausser.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, une majorité de la commission fiscale a refusé l'entrée en matière sur le PL 11067 visant à taxer plus lourdement les deux-roues motorisés dits puissants et les quads. Les normes définies sont des normes fédérales, qui elles-mêmes reprennent des normes techniques définies par l'Union européenne. Le roulement des pneus sur le goudron fait plus de bruit que les moteurs, et les problèmes proviennent de motos qui ont été modifiées ou trafiquées. Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission vous demande de refuser l'entrée en matière de ce projet de loi.

Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je ne vais pas faire tout un laïus sur les difficultés que connaissent nos finances et le besoin de rechercher des ressources, car ce projet de loi 11067 représente aussi autre chose, et cela nous a été dit lors des auditions. En effet, s'agissant des quads, il y en a très peu et c'est insignifiant, mais cependant ceux qui roulent en ville et qui ne sont pas professionnels sont polluants et constituent un danger, car ils sont difficilement maîtrisables. Une taxation plus élevée pour ce type de véhicule poursuit donc un but de prévention des accidents et du bruit.

En ce qui concerne les deux-roues, en particulier les scooters de plus de 500 cm3, ces véhicules ont fait l'objet de beaucoup de recherches de la part des constructeurs en tout cas en Europe, voire aussi en Suisse, pour qu'ils soient performants, mais très peu de choses ont été faites en termes de pollution et de bruit. Non seulement ces scooters polluent proportionnellement beaucoup plus par rapport à leur poids que les voitures, mais de plus, à Genève, vu les difficultés liées au trafic, le nombre de ces véhicules augmente. Il est donc important d'encourager les utilisateurs de ces deux-roues à acquérir des véhicules écologiques et plus performants aussi en termes de CO2. La fiscalité peut nous aider à trouver un système incitatif pour ces deux-roues, tel que le bonus-malus, comme il existe pour les voitures, mais qui serait là pour les deux-roues peut-être plus accentué, afin d'accompagner un changement vers des véhicules à deux roues moins polluants, voire électriques. Passer d'une taxation sur la puissance à une taxation par rapport au CO2 que ces véhicules produisent a aussi un effet incitatif en termes de pollution à Genève. On parlait tout à l'heure des particules fines, du bruit, du CO2, il y a donc là toute une réflexion que malheureusement nous n'avons pas pu mener en commission fiscale, parce qu'on y a abordé uniquement le côté fiscal et la question de savoir ce que ça peut nous rapporter au niveau financier.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, il nous semble opportun que des discussions plus approfondies puissent avoir lieu aussi en termes écologiques, en plus bien évidemment de la dimension fiscale. Je vous demande par conséquent d'accepter le renvoi de ce projet de loi à la commission fiscale pour qu'il puisse être étudié sereinement. (Commentaires.)

Le président. Merci, Madame la rapporteuse de minorité. Est-ce que le rapporteur de majorité veut s'exprimer sur le renvoi ?

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. J'aimerais juste dire que la majorité refusera le renvoi en commission, Monsieur le président. (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Le Conseil d'Etat souhaite-t-il s'exprimer ? Si tel n'est pas le cas, je soumets à l'assemblée cette demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11067 à la commission fiscale est rejeté par 47 non contre 40 oui et 2 abstentions.

Le président. Nous poursuivons notre débat et je passe la parole à M. Michel Ducommun.

M. Michel Ducommun (EAG). Merci, Monsieur le président. Je serai très bref, parce qu'en réalité ce que j'ai dit sur le projet de loi précédent concerne à mon avis aussi celui-ci. (Brouhaha.) On reste sur une recherche de recettes, on reste sur une volonté d'améliorer la situation au niveau écologique. Ensemble à Gauche soutiendra donc également ce projet de loi.

M. Stéphane Florey (UDC). Je dirai tout d'abord une chose: globalement le Conseil d'Etat n'a nullement besoin de nouvelles recettes... (Commentaires.) ...il aurait plutôt besoin de prendre des cours de gestion, puisque je vous rappelle que le canton de Genève a le budget le plus élevé par tête d'habitant, ce qui prouve bien ce que je viens de dire.

Maintenant, s'agissant du projet de loi, les deux-roues motorisés ne doivent pas devenir les nouvelles vaches à lait de ce canton, et je fais référence à un article paru le mercredi 12 novembre: le bonus écologique n'a rien d'incitatif. Ce que je veux dire par là, c'est que ce projet de loi est un trompe-l'oeil; pour de bas motifs écologiques on veut taxer plus, comme on l'a déjà vu avec la voiture il y a plusieurs années. Cependant le système qui avait été instauré à l'époque n'a absolument rien d'incitatif: ça n'a fait qu'augmenter les recettes de l'Etat, puisque la taxation automobile augmente d'année en année, mais il n'y a pas moins de pollution, donc ce qui est proposé ne sert absolument à rien. C'est pour ces raisons que le groupe UDC vous recommande de rejeter ce projet de loi et de refuser bien évidemment toute demande de renvoi en commission.

M. Carlos Medeiros (MCG). Chers collègues, il faut encore une fois saluer l'esprit d'inventivité des bancs d'en face, parce que quand ce n'est pas contre les piscines, c'est contre les bateaux, et quand ce n'est pas contre les bateaux, c'est contre les deux-roues ! Cela dit, et il faut quand même le saluer, ils noient bien le poisson, parce qu'il s'agit ici d'une mesure écologique... Alors finalement moi je me dis que c'est le contraire qu'il fallait faire ! En effet, à cause de ces politiques qui sont menées depuis un certain temps, notamment par Mme Künzler à l'époque, on a créé un tel chaos dans cette ville qu'heureusement qu'il y a beaucoup de deux-roues, parce qu'autrement, même à vélo - puisque vous aimez bien cela - vous ne pourriez pas rouler à Genève. D'ailleurs moi je dis que, à cause de la dangerosité des vélos notamment, il faudrait peut-être envisager aussi un impôt spécial contre les vélos, parce qu'effectivement s'il y a vraiment une classe d'usagers de la route qui nous crée des problèmes, c'est bien celle-là. Il suffit du reste de voir les lettres de lecteurs de la «Tribune de Genève» de cette semaine: il y avait au moins trois personnes qui se plaignaient justement du caractère dangereux des gens qui roulent à vélo. Je considère donc que pour une question de salut public - et je pense que le magistrat chargé de la santé sera d'accord avec moi - pour éviter justement la casse et les blessés graves, il faudrait peut-être envisager un impôt spécial.

Blague à part, Mesdames et Messieurs, on en a marre des arguments tels que ceux que l'on a entendus tout à l'heure pour les bateaux et qui consistent à dire que ça ne va pas coûter trop cher et que c'est un petit impôt de rien du tout. Stop ! Sortez du dogme ! On en a marre de payer des impôts, c'est aussi simple que ça ! Les gens ne veulent pas, mais quand on vous dit non par la porte, vous voulez rentrer par la fenêtre ! Ce n'est pas possible ! On en a marre ! La classe moyenne vous dit clairement qu'elle ne veut plus payer autant d'impôts ! On en a marre de ces gens-là comme vous qui, pour des raisons écologiques, pour des raisons de sécurité ou ceci et cela, êtes toujours dans une logique d'augmentation d'impôts. Et vous savez pourquoi ? Parce que vous-mêmes vous ne les payez pas ! (Exclamations. Applaudissements.)

Mme Béatrice Hirsch (PDC). Je trouve un peu dommage, quand on réfléchit à la belle unanimité qu'il y avait hier concernant le plan sur les particules fines et au fait que tout ce parlement était d'accord de dire qu'il fallait prendre des mesures, que dès qu'on essaie de se pencher sur quelques mesures concrètes, cette belle unanimité vole en éclats, même pour simplement étudier le principe. Et si ce n'est pas autant qui est voulu, il est possible de trouver un consensus ! Je pense donc que c'est extrêmement dommage.

Ce projet de loi concerne effectivement les deux-roues, et M. Medeiros découvre qu'en l'occurrence un certain nombre de projets de lois qui séparent les différents types de véhicules ont été déposés, alors je vous le dis déjà: il y en a encore un ! Préparez-vous, comme ça vous le savez ! (Rires.) Et puis s'il y en a qui en ont marre d'avoir plus d'impôts, il serait peut-être bien de faire la différence entre impôt et taxe, parce que pour celui qui ne veut pas payer d'impôt sur son quad, il lui suffit en réalité de ne pas en acheter un ! Je vous remercie, Monsieur le président. (Rires. Applaudissements.)

Une voix. Excellent !

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Thierry Cerutti, à qui il reste une minute quarante-trois.

M. Thierry Cerutti (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi me fait étrangement penser à celui qu'on a voté il y a quelques années concernant l'augmentation des impôts sur l'immatriculation des véhicules automobiles. Rappelez-vous, on est passé d'un montant X à 7 fois plus que le canton du Valais, notamment, pour les mêmes raisons que la gauche et le PDC évoquent aujourd'hui pour lutter contre la pollution. Moi j'entends bien qu'on veut lutter contre la pollution, et c'est un bon combat, un combat noble, cependant je vous rappelle qu'aujourd'hui à Genève 110 000 à 120 000 pendulaires viennent polluer le canton, et ils ne paient pas les mêmes impôts que les Genevois. Une fois de plus, c'est donc les Genevois, les contribuables genevois qui passent à la caisse, et c'est toujours les mêmes qui se font tondre comme des moutons et plumer comme des poulets, c'est les contribuables genevois... (Commentaires.) ...et c'est toujours la même classe, cette classe moyenne, qui a de plus en plus de difficultés à boucler ses fins de mois, parce que vous, la gauche, avec la complicité du PDC, vous n'arrêtez pas de les tondre, de leur ponctionner de l'argent, de les taxer, de leur trouver des impôts...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Thierry Cerutti. ...des taxes et autres. C'est scandaleux, et le MCG refusera toute augmentation d'impôts que ce soit, pour les bateaux, les motos, les tricycles, les motocycles, les tracteurs, les tondeuses... (Exclamations.) On refusera !

Des voix. Bravo ! (Commentaires.)

Une voix. Et les hélicoptères !

Le président. Chut ! Je passe la parole à M. Pierre Weiss.

M. Pierre Weiss (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le PL 11081, intitulé «Un cycliste, un vélo et une plaque !», nous donnera la possibilité, quand nous y serons, de voter pour des augmentations d'impôts, Monsieur Cerutti. Je pense que ce qui sera perdu d'un côté peut être gagné de l'autre, et je disais tout à l'heure à M. Romain de Sainte Marie que ce qu'ils veulent nous faire perdre maintenant en impôts d'un côté, ils devront bien le repayer à ce moment-là. On mettra en particulier les 160 millions des forfaitaires dans les plaques de vélo et on y ajoutera aussi ce qu'il entend nous concocter pour les impôts précédents. Les cyclistes pourront alors choisir de ne plus acheter de vélo... Voilà le moment où les choses pourront aller de l'avant ! Je pense que M. Romain de Sainte Marie pratique une politique des transports visionnaire, je le félicite d'ores et déjà, et c'est pour cette raison que je lui ai dit tout à l'heure que ses impôts allaient augmenter et qu'il allait enfin commencer à en payer sérieusement. La classe moyenne, Monsieur Romain de Sainte Marie, vous allez voir ce que ça veut dire, car la classe moyenne bobo à laquelle vous appartenez va enfin payer des impôts. (Applaudissements. Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je salue à la tribune notre ancienne collègue Mme Gossauer-Zurcher. (Applaudissements.) La parole est maintenant à M. Pierre Conne.

M. Pierre Conne (PLR). Merci, Monsieur le président. Revenons peut-être à notre projet de loi pour dire que, déjà du point de vue environnemental, il ne contient aucun incitatif visant d'une part à réduire les gaz à effet de serre ou d'autre part à effectuer un report modal. Il ne vise donc effectivement qu'à augmenter les recettes fiscales, ce à quoi le PLR reste opposé.

J'aimerais maintenant faire une petite réflexion sur la structure de l'augmentation des recettes fiscales proposée ici, qui est pour le moins curieuse. En effet, il s'agit de taxer la puissance d'un côté, ainsi que le genre de véhicule - une roue, deux roues, trois roues, quatre roues. Bref, on ne voit finalement pas très bien ici quelle est la logique qui se trouve là derrière, cela d'autant moins que, comme cela a été dit, les quads sont en nombre relativement restreint. De plus, il y a différents exemples dans l'actualité récente qui montrent que les personnes qui pourront toujours continuer à acquérir des quads et à payer des taxes - si tant est qu'elles doivent augmenter - ne sont probablement pas celles qui maîtrisent le mieux leur véhicule, et je dis cela pour répondre à une préopinante qui voulait nous faire croire que ce projet de loi pourrait aussi améliorer la sécurité routière. Il n'y a donc pas d'amélioration de la sécurité routière, pas de report modal, pas de baisse des gaz à effet de serre, et par conséquent on ne voit vraiment pas l'intérêt une fois de plus de vouloir taxer ceux qui sont déjà le plus fortement taxés en Suisse, soit les utilisateurs de véhicules à moteur. Pour toutes ces raisons, le PLR refusera ce projet de loi.

Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts soutiendront bien évidemment ce projet de loi. Le trafic motorisé est source d'une importante pollution atmosphérique à Genève, la qualité de l'air est devenue fort inquiétante et l'impact sur la santé des habitants est réel. Certes, les normes sur les carburants, les catalyseurs et les filtres à particules tendent à améliorer un tant soit peu la situation, mais la forte hausse de la mobilité individuelle à Genève annihile tous ces effets. Vouloir ainsi orienter les acheteurs vers des véhicules moins polluants est donc une nécessité, d'autant plus que la Suisse détient le triste record européen du parc de voitures neuves le plus polluant d'Europe. En outre, il est important de mieux informer la population genevoise, qui croit souvent à tort qu'un deux-roues pollue moins qu'une voiture. Or ce n'est pas le cas, et les auditions en commission fiscale l'ont bien démontré, les deux-roues sont à l'origine d'une pollution fort conséquente à Genève. Certes, Monsieur Conne, la mesure proposée ne suffira pas à améliorer drastiquement la qualité de l'air mais, comme vous le savez, en matière de protection de l'environnement chaque pas compte, chaque pas est important. Et d'ailleurs je rejoins les propos de Mme Hirsch, qui regrettait que le bel enthousiasme et la belle unanimité de notre Grand Conseil hier à vouloir lutter contre la pollution atmosphérique et les particules fines se trouvent déjà mis à mal aujourd'hui dès le premier projet de loi qui peut concrètement toucher à ce problème. D'autre part, j'entends des gens dire: «Oui, mais vous augmentez les impôts.» Mais est-ce que vous avez fait le calcul des coûts de la santé ? Aujourd'hui, les maladies pulmonaires à Genève sont en forte augmentation, et je suis surprise qu'un médecin ne soit pas plus sensible à ces questions et ne soutienne pas davantage des mesures qui vont dans le bon sens. Pour toutes ces raisons, Monsieur le président, et puisque M. Conne semblait dire que ce projet était mal ficelé et qu'il fallait le revoir, je demande le renvoi à la commission fiscale.

Le président. Merci, Madame la députée. Les rapporteurs souhaitent-ils s'exprimer sur le renvoi en commission ? Madame Lydia Schneider Hausser ?

Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. Oui, merci, Monsieur le président, je voudrais m'exprimer pendant quelques instants. Lors des auditions, le responsable de l'office des véhicules a dit que ce projet de loi était intéressant si on le regardait du point de vue de la pollution, justement. Actuellement en Suisse les deux-roues, en particulier les scooters, n'ont pas de fiche de mesure du CO2 produit, contrairement aux voitures, et le fait de pouvoir peut-être travailler sur ce phénomène et de taxer ces véhicules par rapport au CO2 émis et pas seulement par rapport à la puissance n'a pas pu être étudié en commission, parce qu'on a vu cet objet uniquement comme un projet fiscal. C'est pour cette raison que nous vous demandons le renvoi en commission.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de majorité. La majorité de la commission refusera bien évidemment le retour en commission, car aucune incidence sur l'environnement et sur l'effet de serre n'est prévue dans cette loi. Il s'agit uniquement d'un projet qui vise à taxer une fois de plus la grande majorité de ce canton qui est la classe moyenne, et nous refuserons donc le renvoi en commission.

Le président. Merci, Monsieur le député. Est-ce que le conseiller d'Etat souhaite s'exprimer sur ce renvoi ? Si ce n'est pas le cas, je vais mettre aux voix cette demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11067 à la commission fiscale est rejeté par 52 non contre 42 oui.

Le président. Nous poursuivons notre débat et je passe la parole à M. Patrick Lussi.

M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. Je ne vais pas m'engager dans le détail, parce qu'en définitive le problème est bien plus grave que cela. Mesdames et Messieurs les députés, souvenez-vous d'une belle époque, car parfois il faut se rappeler l'histoire. Lénine disait: si vous ne pouvez pas accéder à la politique, passez par les syndicats. La gauche nous dit maintenant: si vous ne pouvez pas augmenter les impôts, passez par les taxes et émoluments. A ce sujet j'adresse un clin d'oeil sympathique à notre collègue Pierre Weiss, qui avait posé une question au Conseil d'Etat il y a deux ans, lors de la dernière législature, pour savoir quels sont toutes les taxes et tous les émoluments que l'Etat ou l'administration a contre les contribuables. Vous avez donc là un condensé, la bible de la façon d'essorer davantage le contribuable moyen. Mesdames et Messieurs, on est exactement sur ce chemin. On est en train de nous dire que nous sommes malades à cause de la pollution, etc. Faut-il rappeler à ces messieurs-dames d'en face que, s'ils sont évidemment contre la voiture, ce qui pollue le plus, à dire vrai, ce sont les chauffages ? Donc à partir d'aujourd'hui je propose qu'on coupe les chauffages; on mettra deux ou trois pulls de plus, ce n'est pas bien grave, une température comprise entre 6 et 8 degrés dans nos appartements devrait être largement suffisante, non ? (Commentaires.) Deuxièmement, il y a aussi toutes les industries, alors stoppons également un peu les industries ! Stoppons l'électricité ! Il est vrai que maintenant, puisqu'on ne veut pas le nucléaire, on va mettre des centrales à gaz et on va polluer ! Mesdames et Messieurs, redevenons sérieux. Non, il ne faut pas se laisser leurrer, il ne faut pas se laisser avoir. Il y a une attribution qu'on donne à l'UDC, à l'Union démocratique du centre, c'est que nous aimons faire peur. Eh bien avec tout ce que j'entends jusqu'à présent, Mesdames et Messieurs de la gauche et des Verts, quel bel exercice de frayeur communicative et générale vous essayez de donner !

Le président. Il vous reste quinze secondes.

M. Patrick Lussi. Soyons sérieux ! Le problème est là. Nous ne voulons pas d'impôts supplémentaires, pas de détournement, et il ne faut pas accepter ce projet de loi, ni les autres d'ailleurs. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Riedweg, votre groupe a épuisé son temps de parole. Je passe le micro à M. Daniel Sormanni, à qui il reste vingt et une secondes.

M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, moi je trouve que ces trois projets de lois, qui vont dans la même direction, puisque tout à l'heure on va parler des voitures, n'ont pas de sens. Ce que vous visez, c'est uniquement une augmentation des taxes; vous ne réduirez pas la pollution avec ça ! Ce n'est pas parce que les gens vont payer un petit peu plus...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Daniel Sormanni. ...qu'ils ne vont plus circuler. Voyez-vous, grâce aux mesures que vous prenez - et je conclus tout de suite, Monsieur le président...

Le président. C'est terminé !

M. Daniel Sormanni. ...vous empêchez les automobilistes de circuler en ville, alors ils prennent des scooters et polluent davantage... (Le micro de l'orateur est coupé. Celui-ci continue à s'exprimer hors micro.)

Le président. C'est fini, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Romain de Sainte Marie.

M. Romain de Sainte Marie (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit en effet d'une taxe environnementale... (Exclamations. Commentaires.) Il faut appeler un chat un chat ! Les deux-roues polluent effectivement particulièrement beaucoup: la plupart d'entre eux consomment de 5 à 7 litres aux 100 kilomètres, soit quasiment l'équivalent d'une voiture en milieu urbain, sauf qu'une voiture peut transporter quatre à cinq passagers... (Commentaires.) ...alors qu'un scooter seulement une personne, voire deux. Et si on compare cela à ce que peut transporter un bus ou un tram, la différence est encore beaucoup plus grande. Cette taxe a effectivement une volonté incitative de freiner l'usage et l'achat des deux-roues car, d'un point de vue environnemental - on l'a mentionné hier et aujourd'hui, et je l'ai répété précédemment - le canton de Genève connaît au centre et dans la périphérie une pollution de l'air gravissime.

D'autre part, j'ai entendu des arguments concernant la santé et la dangerosité de circuler à vélo. Alors je crois vraisemblablement rêver, car dire qu'il est préférable pour la santé de prendre sa voiture... Je crois qu'on ne vit pas dans le même monde ou que nous n'avons pas la même vision de la santé ou la même hygiène de vie !

Maintenant ce qui est encore plus grave, c'est ce monopole de la classe moyenne qu'essaient d'avoir les partis de droite. Mesdames et Messieurs, vous n'avez pas le monopole de la classe moyenne ! (Commentaires.) Aujourd'hui la classe moyenne en a marre d'une chose, c'est de voir ses prestations publiques diminuer chaque année. (Chahut. Le président agite la cloche.) Elle en a marre de voir les bâtiments scolaires en ruine. La classe moyenne veut voir des moyens donnés dans l'éducation, dans le social, dans la santé et également dans la sécurité. Aujourd'hui, la classe moyenne... (Commentaires.) ...veut une qualité de vie à Genève, et elle en a marre de voir ses prestations publiques diminuer d'année en année par les budgets que vous votez, qui sont des budgets d'austérité ! La classe moyenne en a marre de cette politique d'austérité, la classe moyenne en a marre de se serrer la ceinture chaque année... (Chahut. Le président agite la cloche.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Romain de Sainte Marie. La classe moyenne ne veut plus être la seule à payer, car aujourd'hui trop de très grandes fortunes ne paient pas ce qu'elles devraient... (Exclamations.) C'est le cas des forfaitaires fiscaux... (Sifflements.) ...et la classe moyenne votera donc la suppression des forfaits fiscaux ! (Applaudissements. Commentaires. Le président agite la cloche.)

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, on pourrait se croire dans la quatrième dimension. Parfois j'ai un peu de peine à comprendre ce qui se passe ! D'un côté on nous dit qu'il n'y a plus d'argent dans les caisses, et d'un autre d'aucuns déclarent avec une certaine superbe que le Conseil d'Etat n'a pas besoin de recettes supplémentaires. Eh bien tant mieux ! S'il n'a pas besoin de recettes supplémentaires, c'est qu'il a assez d'argent, et s'il a assez d'argent, on ne comprend pas la raison des coupes auxquelles nous prépare le budget 2015. Pourquoi une diminution des prestations pour les plus modestes de ce canton ? (Commentaires.) Pourquoi autant d'attaques contre la fonction publique ? Cela étant, il s'agit d'un véritable réquisitoire contre l'impôt. Finalement, ce n'est rien d'autre que cela. Ce n'est pas tellement de véhicules à moteur qu'il est question, ce que vous n'acceptez pas, c'est de payer des impôts ! Certains l'ont dit, ils en ont marre de payer des impôts ! (Commentaires. Chahut.)

Des voix. C'est faux !

Mme Jocelyne Haller. Quels que soient les réponses et les motifs que certains évoquent, qu'il s'agisse de questions de sécurité ou d'écologie, eh bien on peut faire sauter la planète et dégrader la qualité de vie, ce n'est pas grave: du moment que tout ça pourrait être préservé par l'impôt, vous n'en voulez pas ! Seulement quand c'est vous qui êtes en question et que c'est votre confort à vous, là, ça vous dérange.

Aujourd'hui il faut être honnête: soit il y a effectivement un problème de couverture des besoins de l'Etat pour ce qui est des prestations qui sont dues à la population, et là ayez le courage d'aller jusqu'au bout de votre raisonnement: il n'est pas uniquement question de la classe moyenne ! M. Weiss est parti, mais j'aimerais le rassurer: la classe moyenne paie déjà des impôts, il ne s'agit donc pas simplement de dire qu'il y en a qui y échappent et d'autres pas. Ceux qui y échappent véritablement, ce sont les bénéficiaires des forfaits fiscaux, pas la classe moyenne. Et admettez ou ayez au moins l'honnêteté de dire que le fait de payer un impôt est un acte citoyen, et donc ce à quoi vous vous refusez aujourd'hui, c'est bien à cette responsabilité citoyenne de devoir à la fois régler vos impôts mais aussi accepter que les impôts soient déterminés en conséquence, pour pouvoir couvrir les besoins de l'Etat. A cela, vous opposez un refus. Et le drame, dans tout cela, c'est que vous choisissez les bénéficiaires de l'impôt que vous voulez favoriser. Et dans vos choix politiques, vous acceptez qu'on vilipende la fonction publique et qu'on s'attaque aux plus modestes de ce canton, mais vous voulez préserver les intérêts de ceux que vous représentez. C'est malhonnête, ce n'est pas acceptable et ce n'est pas citoyen, Mesdames et Messieurs. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

M. Bertrand Buchs (PDC). Moi qui suis un représentant de la classe moyenne, je paie mes impôts, je n'ai pas de moto, je n'ai pas de bateau, je n'ai pas de maison, mais je suis content de payer mes impôts ! Je suis content de payer mes impôts, parce qu'ils doivent servir au financement des prestations publiques et aux gens qui n'ont pas la chance que j'ai de travailler et d'avoir un revenu qui me permet de vivre convenablement. (Remarque.) Oui, Messieurs !

La discussion que l'on a ici consiste à se demander comment faire pour permettre à ceux qui n'ont pas ces moyens de percevoir aussi des aides. Alors notre débat d'aujourd'hui, c'est en réalité la discussion sur le budget ! On est déjà en train de discuter du budget et de chercher à savoir comment on va faire avec le budget. Et il est faux de dire que l'Etat a assez d'argent, puisqu'on a de la peine à avoir un budget ! Donc si on arrive à obtenir des taxes supplémentaires - des taxes et pas des impôts - eh bien il faut le faire. Pourquoi ? Parce que ce à quoi moi je suis opposé, c'est à ce qui se passe actuellement, à savoir que les gens qui travaillent paient beaucoup trop sur le revenu de leur travail. Beaucoup trop ! Donc il ne faut pas taxer le travail, mais on peut en revanche taxer les loisirs et l'achat de certains biens qui ne sont pas d'une utilité première. Car un quad, entre nous, ce n'est pas d'une grande utilité première ! Un bateau sur le lac n'est pas d'une grande utilité première ! La personne qui a la possibilité d'avoir ces biens doit admettre qu'elle a de la chance de les posséder et accepter de payer une taxe supplémentaire. Et probablement que l'avenir des impôts, c'est de payer l'usage, de payer une taxe à l'usage, et de diminuer les impôts sur le travail, parce que le problème qu'on a actuellement, c'est que les gens qui bossent paient trop d'impôts sur leur travail et qu'on ne reconnaît plus la valeur du travail. C'est ça qui pose problème aujourd'hui.

Maintenant on demande une taxe sur les quads. Mais, punaise, il y a combien de quads à Genève ? On nous demande une taxe sur les bateaux qui polluent... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et qui consomment beaucoup en naviguant sur le lac. Où est le problème éthique là-dedans ? Il n'y en a pas ! En revanche, Messieurs du PLR, du MCG et de l'UDC, peut-être qu'avec le produit de ces taxes qui va rentrer on pourra redonner aux personnes à qui on a coupé l'aide sociale ce qui leur manque. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Pierre Conne, à qui il reste une minute.

M. Pierre Conne (PLR). Merci, Monsieur le président. J'aimerais brièvement apporter deux réponses. Je dirai d'abord que, avec 8 milliards de dépenses publiques pour 480 000 résidents, on est dans une austérité que probablement tous les pays du monde nous envient. Voilà la première chose.

Deuxièmement, pour revenir à ce projet de loi, la gauche voudrait lui donner une certaine respectabilité environnementale pour le faire passer. Mais vous vous moquez du monde ! Relisez le rapport ! Dans la présentation du projet de loi par son initiant, il est dit que l'objectif est de générer des recettes supplémentaires ! Cela a été répété à plusieurs reprises. Par ailleurs, on m'a reproché de ne pas défendre la santé en ne soutenant pas ce projet de loi, mais celui-ci ne va pas inciter les scootéristes à prendre le vélo !

Le président. Il vous reste vingt secondes.

M. Pierre Conne. Ce projet de loi ne va absolument pas réduire la consommation de carburant émettant des gaz à effet de serre. Donc soyons honnêtes intellectuellement et ne mélangeons pas tout...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Pierre Conne. L'environnement est une chose, le transfert modal en est une autre, et on est là face à un projet qui a pour but d'augmenter encore plus les recettes de l'Etat...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Pierre Conne. ...alors qu'elles sont déjà... (Le micro de l'orateur est coupé. Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Luc Barthassat. (Un instant s'écoule.) Monsieur Barthassat, vous avez la parole. (Exclamations.)

M. Luc Barthassat, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. (Commentaires. Rires.) A force d'entendre toujours parler de la même chose, c'est vrai qu'on a tendance un peu à s'assoupir ! (Exclamations. Rires.) Excusez-moi, j'étais déjà là il y a vingt ans !

Hausse d'impôts, hausse des taxes... Ça me rappelle une chanson des Inconnus, que je ne vais pas vous chanter ici, mais... (Exclamations.)

Des voix. Oui ! Oui !

M. Luc Barthassat. Par contre, celle-là, je l'ai un peu oubliée !

On a beaucoup parlé de la classe moyenne, mais où se situe-t-elle ? C'est le docteur Buchs ? C'est le magasinier ? Je ne sais même pas s'il y en a dans cette enceinte... On peut parler de plaisirs et de loisirs, on peut parler des quads, comme dans ce projet de loi, mais je vous rappelle qu'il y en a beaucoup qui sont utilisés dans l'agriculture, or les agriculteurs qui se servent de ces engins comme d'un outil de travail ne font pas forcément partie de la classe moyenne aisée !

Je vous rappelle aussi que, pendant des années, on a essayé de faire en sorte que les gens ne viennent plus au centre-ville en voiture mais plutôt en deux-roues - parfois à vélo, parfois en deux-roues motorisé - et aujourd'hui quand on voit que cette démarche s'est amorcée dans le bon sens, venir taxer ces gens d'une manière quand même un peu forte, je dirais, puisqu'il s'agit d'une hausse de 100 ou 200% pour certains véhicules... On parlait avant des bateaux, c'est la même chose ! Et puis taxer les loisirs, c'est bien joli, mais la plupart des gens ne sont pas forcément fortunés, alors pourquoi ne pas laisser aussi l'accès aux loisirs à ceux qui ne gagnent pas nécessairement beaucoup d'argent ?

Et on peut aussi citer l'exemple tout bête de toutes ces Porsche genevoises qui sont parties se faire immatriculer en Valais. Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, on fera la même chose avec les grosses motos ! (Exclamations.) Les gens iront apporter leur Harley-Davidson en Valais, pour autant qu'ils aient des résidences secondaires... (Commentaires.)

En tout cas, moi je m'oppose à toute taxe. Je pense que le Conseil d'Etat fait de gros efforts pour un peu mieux travailler au niveau de la gestion des comptes de l'Etat, et avant de taxer les gens - ce qui, je trouve, est un peu trop facile - je crois qu'il faut qu'on se demande de quelle manière on gère nos budgets. Le Conseil d'Etat vous en donnera bientôt l'exemple, et c'est à ce moment-là qu'il faudra le soutenir. En attendant, j'espère que vous allez refuser ce projet de loi. (Exclamations. Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons tout de suite au vote d'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 11067 est rejeté en premier débat par 53 non contre 39 oui et 1 abstention.