République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 13 mars 2014 à 20h30
1re législature - 1re année - 6e session - 29e séance
PL 11150-A
Premier débat
Le président. Nous allons aborder notre première urgence, le PL 11150-A. Nous sommes en catégorie I, c'est-à-dire en débat libre. Je passe la parole à M. Ivan Slatkine.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes amenés ce soir à voter le PL 11150. Ce projet de loi propose une réforme de fond du dispositif de surveillance de l'Etat et intègre les nouveautés introduites par la constitution cantonale que le peuple a acceptée l'année passée. L'objectif de la réforme qui vous est proposée est d'améliorer l'efficacité et la cohérence du dispositif de surveillance de l'Etat. Tout cela fait suite à une motion qui avait été votée en 2010 à la quasi-unanimité de notre Grand Conseil - 65 oui contre 1 non - et à des travaux qu'avait demandés le conseiller d'Etat David Hiler à la société Deloitte en décembre 2010.
La rédaction du projet de loi a suivi un processus de travail conjoint de près d'une année entre le Conseil d'Etat et le Grand Conseil. Un groupe de travail a été constitué à cet effet, groupe formé de membres des commissions des finances et de contrôle de gestion, ainsi que d'experts du département des finances. Au surplus, la loi a fait l'objet de nombreuses propositions tant de l'ICF que de la Cour des comptes ou du pouvoir judiciaire afin de tenir compte de l'avis de tous les acteurs du contrôle au sein de l'Etat.
La loi qui vous est proposée ce soir définit trois axes de surveillance de l'Etat. En premier lieu, on trouve le service d'audit interne, dont la mission est d'évaluer les systèmes de contrôle interne, ainsi que les processus de gestion des risques et de gouvernance, en s'assurant notamment de leur conformité aux lois, règlements et directives. De plus, le service d'audit interne doit suivre les actions entreprises pour corriger les dysfonctionnements identifiés et contribue à l'amélioration de l'efficacité et de l'efficience des processus. En second lieu, on retrouve le contrôle et l'évaluation des politiques publiques par l'intermédiaire d'un organe indépendant, à savoir la Cour des comptes. Enfin, en troisième lieu on retrouve la révision des états financiers de l'Etat. L'objectif de cette révision est de s'assurer que l'information financière fournie donne une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et des résultats, en conformité avec la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat.
La loi sur la surveillance de l'Etat établit aussi de nouvelles répartitions des rôles en matière de surveillance entre les différents acteurs du contrôle: la Cour des comptes, qui conserve les contrôles de légalité et de gestion et qui reprend les tâches d'évaluation des politiques publiques; le service d'audit interne, chargé de l'audit interne pour assister le Conseil d'Etat dans sa tâche de surveillance; le réviseur externe des comptes qui, avec un délai de transition géré par l'audit interne - ex-ICF - de deux ans, aura pour mission de certifier les comptes de l'Etat; et enfin le Conseil d'Etat pour la surveillance de l'administration cantonale et des institutions de droit public.
La loi fixe enfin les principes définis dans la nouvelle constitution, soit les principes de l'organe d'audit interne - c'est l'article 221 de notre nouvelle constitution - de l'évaluation des politiques publiques - c'est l'article 128 - et de la révision des comptes de l'Etat - il s'agit de l'article 222.
La loi qui est proposée va renforcer la mise en place de systèmes de contrôle interne performants. Le service d'audit interne aura non seulement la tâche d'assurer que les systèmes de contrôle interne sont mis en place et fonctionnent, mais il sera aussi la cheville ouvrière permettant la révision externe des comptes de l'Etat. Par sa connaissance du fonctionnement de l'administration, de ses mécanismes financiers et des systèmes de contrôle de l'Etat, le service d'audit interne garantira que la gestion financière de l'Etat est en conformité avec la loi. Le service d'audit interne sera donc un acteur incontournable dans le cadre de la révision des comptes de l'Etat.
Grâce à ce projet de loi, il n'y aura plus de confusion possible entre les travaux du service d'audit interne et ceux de la Cour des comptes. Le pouvoir législatif comme le pouvoir exécutif conserveront les moyens nécessaires pour exercer leur mission, respectivement de haute surveillance et de surveillance de l'administration.
Enfin, et c'est l'objet du rapport de minorité - nous y reviendrons - la loi sur la surveillance tranche une question restée ouverte dans la constitution concernant la révision des comptes de l'Etat. Il s'agit de l'article 222, comme je l'ai dit. Après une large consultation et analyse, la majorité de la commission de contrôle de gestion a estimé que la Cour des comptes ne pouvait pas cumuler son rôle d'organe indépendant de contrôle de l'Etat avec celui de réviseur externe des comptes. En confiant la révision des comptes de l'Etat à une entreprise externe compétente, le canton de Genève fait oeuvre de pionnier en la matière, rendant ses états financiers encore plus crédibles et transparents qu'ils ne l'étaient par le passé.
S'appuyant sur un cahier des charges précis, définissant avec exactitude le sens de la mission confiée et reposant principalement sur les travaux menés par le service d'audit interne, le rôle du réviseur externe sera de certifier les comptes de l'Etat en apportant toute l'indépendance et la crédibilité d'un réviseur certifié, membre de la Chambre fiduciaire suisse.
Avec les normes IPSAS, la révision récente de la LGAF et à présent la loi sur la surveillance de l'Etat, notre Grand Conseil dote notre canton de lois modernes qui donnent du crédit à nos institutions. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, le rapporteur que je suis vous invite à voter le projet de loi tel qu'il est sorti de commission, avec les amendements techniques qui seront proposés par le Conseil d'Etat, un amendement technique que je vous présenterai - parce que dans le feu de l'action nous avons oublié de voter un alinéa à l'article 15 - et une proposition de mon collègue Béné concernant l'autorité de surveillance des fondations de prévoyance. (Applaudissements.)
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, soyons clairs: le rapport de minorité que je vais vous présenter maintenant ne vise que le chapitre III, sur lequel le rapporteur de majorité vient de terminer son exposé, c'est-à-dire la question de savoir si l'on confie la révision des comptes de l'Etat à un organisme externe. Sur tous les autres points, nous avons - du moins l'Union démocratique du centre - travaillé et appuyé les travaux tout au long de ces deux ans, comme l'a dit le rapporteur de majorité, et même si je vais m'opposer à lui, je le remercie pour l'excellence de son rapport s'agissant de tout le reste.
Mesdames et Messieurs les députés, quelle est la question que je vous pose, que notre minorité vous pose ce soir ? Il ne sert à rien de partir dans de longs développements, alors la voici: voulez-vous confier la révision des comptes de l'Etat à une société extérieure, quelle qu'elle soit, ou voulez-vous que cela reste dans le giron de l'Etat ? (Brouhaha.) Pourquoi le groupe UDC demande-t-il cela ? Est-ce que c'est faire oeuvre de pionnier que d'être le premier en Suisse à faire ce que les autres cantons appellent une Genferei ? Parce que même à Berne... Il n'y a aucun canton suisse qui fait cela ! Alors oui, je vais m'y opposer et déplorer que le Conseil d'Etat ait demandé ce soir l'urgence sur cet objet, parce que dans mon rapport de minorité il est clairement dit que, face à cela, j'ai déposé un projet de loi constitutionnelle pour demander une modification. Donc c'est vrai que, au niveau parlementaire, je suis courroucé, mais j'admets, Monsieur le conseiller d'Etat, que c'est la constitution ou du moins l'Assemblée constituante qui, avec le vote populaire, vous a conduit à faire cela.
Voyez maintenant notre argumentation et les raisons que nous avons de ne pas vouloir confier la révision des comptes de l'Etat à une société externe. On peut citer plusieurs motifs - je viens de vous en donner quelques-uns - et notamment le coût mais, Mesdames et Messieurs les députés, pour avoir enquêté avec mon groupe - vous nous le permettrez - dans différents cantons et auprès de la Confédération, je peux dire qu'il y a quand même une notion de confidentialité, une notion que même avec ces grands organismes - puisqu'il existe cinq ou six fiduciaires de ce genre en Suisse - nous ne pourrons pas assurer. Vous savez très bien que tout ce que l'on ne dit pas ou tout ce qui ne part pas à l'extérieur ne risque pas d'être divulgué. En dehors de cela, Mesdames et Messieurs les députés, il y a une question de coût. Jusqu'à présent et durant de nombreuses années, que je sache, l'Inspection cantonale des finances a rempli parfaitement sa mission, il n'y a jamais eu de critiques, donc il n'y a pas de raison de confier cette tâche à l'extérieur.
Mesdames et Messieurs les députés, avant que je n'aille plus loin, j'ai vu qu'il y avait une demande d'amendement visant à confier la révision des comptes de l'Etat à la Cour des comptes. Comme le rapporteur de majorité l'a dit, nous avons entendu la Cour des comptes; il est vrai qu'elle est censée se soumettre à la constitution, notamment, mais la Cour des comptes estimait que c'était trop complexe et que cela n'était pas dans ses qualités.
Mesdames et Messieurs les députés, j'ai déposé le 12 novembre 2013 mon projet de loi constitutionnelle 11321 mais, pour des raisons que je ne mettrais aucunement sur le compte d'une mauvaise volonté, je n'ai pas encore été entendu par la commission de contrôle de gestion qui l'a reçu peu de temps après. L'Union démocratique du centre pense en tout cas qu'il existe une nouvelle distribution dans notre Grand Conseil, que les voix ne sont plus les mêmes, que de nouveaux partis sont là, et peut-être de nouvelles conceptions. C'est la raison pour laquelle, Monsieur le président, face à tous ces éléments, je demande formellement de renvoyer ce projet de loi en commission, parce qu'il est clair que, même s'il y a un amendement - qui ne modifierait pas la constitution - demandant que la révision des comptes de l'Etat soit assurée par la Cour des comptes, ce n'est pas sur le siège ce soir que nous allons pouvoir le faire, vu tous les travaux qui ont été menés. Monsieur le président, je demande donc le renvoi en commission de ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le député. Seuls les deux rapporteurs et le Conseil d'Etat peuvent s'exprimer sur cette demande de renvoi en commission. Monsieur Slatkine, vous avez la parole.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Le rapporteur de minorité nous propose un renvoi en commission: c'est dire que les travaux qui sont menés depuis deux ans par la commission de contrôle de gestion devraient être remis en cause. C'est dire aussi que l'effort de David Hiler - puisque c'est un projet qui émane non pas de notre nouveau ministre des finances, mais de l'ancien, je tiens à le préciser, soit David Hiler - n'aurait pas de sens. (Brouhaha.) Ce que demande l'UDC, c'est en fait de revenir sur la constitution qui vient d'être acceptée par la population genevoise, or celle-ci a voté cette constitution en toute connaissance de cause ! Renvoyer le PL 11150 en commission, c'est ne pas vouloir réorganiser la surveillance dans notre canton et en rester à un stade où il y a de nombreuses confusions, comme on l'a vu très souvent en commission. Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser ce renvoi.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Lussi, voulez-vous vous exprimer à nouveau ?
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. J'aimerais simplement donner une réponse au rapporteur de majorité. (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, les personnes qui se trouvent à ma droite !
M. Patrick Lussi. Il ne s'agit pas de remettre en cause tous les travaux, mais...
Le président. Monsieur Romain de Sainte Marie, s'il vous plaît !
M. Patrick Lussi. ...mais bien de remettre en cause un phénomène capital, un phénomène qui peut s'avérer dangereux, à savoir la question de savoir si l'on confie à une entreprise extérieure la révision des comptes de l'Etat. Plusieurs solutions existent, c'est pourquoi on pourrait se décider rapidement. Et si je vous propose cela, c'est qu'il y a un amendement qui demande que la révision des comptes de l'Etat soit assurée par la Cour des comptes. En ce qui concerne l'Union démocratique du centre, nous ne voulons pas que cette révision aille à un organisme privé, c'est la raison pour laquelle nous maintenons notre demande de renvoi en commission, uniquement pour régler et fixer les détails de ce chapitre III que nous contestons.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Le Conseil d'Etat souhaite-t-il s'exprimer ? (Remarque.) Monsieur Dal Busco, vous avez la parole.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat a demandé l'urgence sur ce projet de loi. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) J'ai pris note, Monsieur le rapporteur de minorité, que vous n'exercez pas votre courroux à notre égard, mais tout simplement parce qu'il y a effectivement une nécessité constitutionnelle, mais aussi une nécessité pratique à aller de l'avant, à clarifier un certain nombre de dispositions et de rôles, ce que fait de manière excellente le projet de loi, et également à se préparer, le cas échéant - sous réserve bien sûr de l'issue de ce débat - à organiser ce futur contrôle externe, puisque c'est ainsi que le projet de loi le prévoit, de manière adéquate. Cela prend un certain temps, c'est donc la raison pour laquelle le Conseil d'Etat vous invite à traiter, si vous le voulez bien, ce projet de loi ce soir et à ne pas le renvoyer en commission.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vais donc mettre aux voix cette demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11150 à la commission de contrôle de gestion est rejeté par 73 non contre 13 oui.
Le président. Nous poursuivons notre débat, et la parole est à M. Bertrand Buchs.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci beaucoup, Monsieur le président. J'aimerais d'abord adresser tous mes remerciements au rapporteur de majorité, qui a accompli un travail énorme de clarté et de clarification dans une loi très compliquée, une loi dont l'écriture a nécessité deux ans et qui a été rédigée - c'est une nouveauté - avec l'aide... (Brouhaha.)
Le président. Excusez-moi, Monsieur le député, mais il faudrait vraiment que les rangs du MCG fassent silence parce qu'on n'entend pas ce qui se passe dans la salle. (Commentaires.) Allez parler à l'extérieur, ça ira très bien aussi ! Monsieur Buchs, vous pouvez continuer.
M. Bertrand Buchs. Merci beaucoup, Monsieur le président. Je disais que cette loi avait été écrite en collaboration avec le parlement, le département des finances et l'administration; c'est une première, et cela a permis d'avancer vite et d'effectuer un travail extrêmement intéressant.
J'aimerais citer l'article 222 de notre nouvelle constitution, qui dit simplement ceci: «1 Le contrôle externe de l'Etat est assuré par la Cour des comptes.» C'est la loi que l'on va voter ! Et à l'alinéa 2 on lit ceci: «2 La révision des comptes de l'Etat est assurée par un organe externe et indépendant désigné par le Grand Conseil. Il peut s'agir de la Cour des comptes.» Il est donc inscrit dans la constitution qu'il s'agit d'un organe externe à l'Etat, de même qu'il est précisé que c'est le Grand Conseil qui désignera cet organe externe. Il est aussi marqué qu'il peut s'agir de la Cour des comptes, mais quand on a auditionné cette dernière, Mesdames et Messieurs les députés, elle n'était pas du tout enthousiaste à l'idée d'accomplir ce travail de révision externe des comptes. En effet, elle n'a pas les moyens de le faire: il faudrait réviser la Cour des comptes, augmenter son personnel et probablement créer une deuxième chambre pour que cette Cour puisse faire ce travail, et c'est vrai que la constitution nous demande une révision externe, qui ne dépende pas de l'Etat, il est donc logique que nous confiions ce travail à une fiduciaire externe.
D'autre part, c'est une loi moderne. L'Etat, comme l'a très bien dit M. Slatkine, a changé plusieurs lois - et nous les avons votées - notamment la LGAF, et avec maintenant la loi sur la surveillance de l'Etat, nous avons vraiment des lois modernes qui offrent, au niveau des comptes de l'Etat, une clarté et une lecture permettant aussi - et il ne faut pas l'oublier - lorsque l'Etat demande des crédits ou des emprunts sur le marché international, de montrer des comptes qui sont justes, qui sont certifiés, et c'est extrêmement important sur le marché actuel.
Il est aussi important de clarifier - et c'est ce que l'on a fait - la responsabilité, parce que jusqu'à présent il y avait un chevauchement entre le travail de l'Inspection cantonale des finances et celui de la Cour des comptes. Maintenant c'est clarifié: ce que fait l'ICF, la Cour des comptes ne le fera pas, et ce que fait la Cour des comptes, l'ICF ne le fera pas. Je rappelle également qu'on clarifie le fait que la Cour des comptes est dépendante du Grand Conseil, que nous sommes l'organe de surveillance de la Cour des comptes, et que le Conseil d'Etat sera l'organe de surveillance de l'ICF. Cela est extrêmement clair. Et nous avons refusé, puisqu'elle nous le demandait, que la Cour des comptes devienne un quatrième pouvoir, et nous avons intégré la loi sur la Cour des comptes dans cette loi sur la surveillance de l'Etat.
Je vous demande donc de voter cette loi avec enthousiasme, parce que c'est un travail magnifique qui a été accompli, d'accepter les amendements qui ont été présentés par le Conseil d'Etat, par M. Slatkine et par M. Béné, et d'être pour la modernité de l'Etat ! On n'arrête pas de nous dire que l'Etat est mal géré, qu'on ne peut pas lire ses comptes, etc., or pour une fois que l'on est en avance sur le reste de la Suisse, on nous en fait le reproche. (Quelques applaudissements.)
M. Bernhard Riedweg (UDC). Dans toute société privée la révision est assurée par une fiduciaire extérieure, ce qui assure une objectivité au contrôle et rend ses états financiers plus crédibles et transparents. Toutefois, nous estimons que la révision des comptes de l'Etat doit rester au sein de l'administration et être confiée au service d'audit interne. Le cas échéant, cette compétence pourrait être attribuée à la Cour des comptes, ce qui va à l'encontre de la nouvelle constitution. L'audit interne doit avoir accès d'une manière permanente aux données fiscales et il ne doit pas y avoir de limitation de la surveillance sur l'administration fiscale cantonale, laquelle enregistre des revenus de 6,4 milliards, ce qui représente 84% des produits d'exploitation de l'Etat. Le coût engendré par l'externalisation de la révision des comptes de l'Etat à une fiduciaire représenterait le double, voire le triple du coût du service d'audit interne. De plus, cette fiduciaire externe n'ayant qu'un mandat limité à cinq ans, il pourrait y avoir des problèmes de suivi de ses recommandations, notamment concernant les réserves émises par ladite fiduciaire. Cela ne devrait toutefois pas empêcher le service d'audit interne d'engager ponctuellement des spécialistes disposant de compétences particulières. Nous ne pensons pas qu'à l'avenir les créanciers de l'Etat, essentiellement des banques, contestent le fait qu'il n'y ait pas une fiduciaire externe qui révise les comptes de l'Etat, puisque ses créanciers ont admis jusqu'ici les conclusions de l'Inspection cantonale des finances, qui devient le service d'audit interne, en charge de cette tâche.
Il est mentionné dans ce projet de loi que le contrôle exercé sur l'administration fiscale cantonale par un organisme externe est délicat, car celui-ci aurait accès aux données fiscales des personnes physiques et des personnes morales de notre canton. La confidentialité n'est ainsi pas assurée. En outre, le coût du contrôle par une entité externe sera beaucoup trop élevé, et sa fiabilité et l'exhaustivité des informations transmises pourraient être mises en cause. L'indépendance de la fiduciaire externe ne sera pas aussi grande que celle du service d'audit interne, car dans ce cas il y a une dépendance financière et cela pourrait nuire à l'impartialité de la fiduciaire externe. De plus, la qualité du travail de la fiduciaire externe ne sera pas garantie, car d'une part cet organisme dispose d'une moins bonne connaissance de l'Etat, et d'autre part le risque subsiste que, poussée par la rentabilité du contrôle, la fiduciaire externe puisse faire des contrôles moins intenses.
Ce qui est à recommander, c'est que les diverses entités chargées des contrôles se coordonnent pour garantir l'efficience de la surveillance de l'Etat. Or le projet de loi ne mentionne aucune obligation d'une telle coordination. Ce que nous aurions souhaité, c'est que, dans les contrôles effectués tant par le service d'audit interne que par la Cour des comptes pour les évaluations des politiques publiques, les mesures d'économies soient spécifiquement mentionnées dans le cadre du bon emploi des fonds publics. Il s'agit donc d'évaluer l'action publique sous l'angle de la pertinence. Le contrôle des calculs des indicateurs de performance de programme tel qu'il ressort des rapports sur les comptes annuels ainsi que le contrôle de la pertinence de ces indicateurs sont des éléments importants sur lesquels l'audit doit pouvoir se prononcer en vue de permettre une amélioration continue du budget par programme.
En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous proposons de suivre le rapport de minorité, qui demande le renvoi en commission, afin de retravailler le chapitre III.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Monsieur le président, laissez-moi peut-être tout d'abord, pour commencer, témoigner ma surprise devant tant de défiance exprimée par l'UDC à l'égard des fiduciaires; j'ai l'impression que nous vivons un grand moment dans ce parlement.
Ce projet de loi est important à plusieurs titres, parce qu'il permet premièrement d'introduire dans la loi les nouveautés de la constitution. Ce projet est aussi important parce que pour la première fois il englobe tout ce qui a trait à la surveillance de l'Etat; il a donc un caractère extrêmement pédagogique, car à l'intérieur de ce texte vous trouverez maintenant de manière extrêmement concise et bien décrite tout ce qui est en lien avec l'audit interne, l'audit externe et le rôle des différents organes. Il clarifie notamment le rôle de l'ICF qui, jusqu'à présent, avait un certain nombre de tâches extrêmement variées; aujourd'hui, afin d'adapter ses nouvelles tâches à la constitution, l'ICF - qui va s'appeler le service d'audit interne - va se concentrer uniquement sur l'audit et être un instrument essentiellement au service du Conseil d'Etat. La Cour des comptes, en plus de l'audit externe, va également reprendre la réalisation d'évaluations de politiques publiques, elle a d'ailleurs déjà commencé ces tâches-là. Nous nous réjouissons donc de cette loi qui, pour nous, est extrêmement bien rédigée.
En ce qui concerne maintenant la révision des comptes - parce que c'est de cela qu'il va être question ce soir, dans la mesure où, sur le reste de la loi, je crois que nous sommes tous d'accord - la constitution est très claire: il s'agit de confier la révision des comptes à un organe externe, et par conséquent revenir en arrière et vouloir modifier la constitution pour ces raisons-là nous semble extrêmement peu raisonnable. Nous avons donc le choix ce soir de confier la révision des comptes soit à un organisme externe, à une fiduciaire ou un mandataire externe, soit à la Cour des comptes.
Les Verts se sont ralliés - après une grande réflexion, je vous l'accorde - à l'idée de confier la révision des comptes à un organisme externe et non pas à la Cour des comptes, et cela pour plusieurs raisons. La première, c'est que la Cour des comptes, lors des auditions en commission de contrôle de gestion, mais également lors d'auditions à la Constituante, avait expliqué qu'elle ne souhaitait pas particulièrement entreprendre la révision des comptes. Nous désirons donc dans une certaine mesure suivre un peu le souhait de la Cour des comptes. Ensuite, pour des questions d'étanchéité des tâches, on ne peut pas imaginer que les mêmes membres de la Cour des comptes puissent en même temps exercer une révision des comptes et effectuer des contrôles d'audit au sein de l'Etat. Il faudrait donc créer une nouvelle chambre à la Cour des comptes, c'est-à-dire peut-être même engager de nouveaux juges, etc. Or la révision des comptes ne va pas occuper ces gens pendant toute une année, alors que fera-t-on de ces personnes engagées ? Cela va coûter extrêmement cher à notre Etat, et cela pour embaucher des gens qui seront occupés extrêmement peu de temps.
Enfin, s'agissant du dernier argument concernant le coût, Monsieur Lussi, je pense qu'il n'est pas très honnête, parce qu'on avait demandé au Conseil d'Etat de procéder à une évaluation et on s'était rendu compte que cela ne coûtait pas si cher que cela de demander à un mandataire externe d'effectuer la révision des comptes, dans la mesure où nous avons déjà le service d'audit interne qui va lui prémâcher énormément le travail. Et de croire que le mandataire externe va aller se plonger dans les déclarations d'impôts des gens est tout à fait risible, car tout le monde sait que ce n'est pas du tout son rôle et qu'il ne va jamais agir de la sorte.
Pour toutes ces raisons, les Verts voteront donc le projet de loi et les amendements techniques qui sont présentés ce soir, et refuseront l'amendement qui vise à confier à la Cour des comptes la révision des comptes.
Le président. Merci, Madame la députée. Je salue à la tribune le président du Conseil municipal, M. Pascal Rubeli. (Applaudissements.) La parole est à Mme la députée Lydia Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la refonte de la surveillance de l'Etat est une suite logique de la refonte de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat. L'environnement de l'Etat change et les lois doivent évoluer. Les travaux qui ont amené la commission de contrôle de gestion à proposer la loi qui nous est soumise ce soir ont été menés de manière constructive et nous en saluons la méthode. Sur le fond, cependant, il est important de rappeler que l'Etat est là pour servir la population. Il est constitutif de notre vivre-ensemble à Genève. A ce titre, la surveillance doit avant tout servir à améliorer et à faire évoluer le service à la population, plutôt qu'à le freiner et à le contraindre à suivre des procédures pour suivre des procédures. Par conséquent, toute la difficulté, en dehors de la loi et des articles qui nous sont présentés ce soir, est et sera de trouver la juste mesure, la proportionnalité entre le fait de poser et de faire respecter des cadres structurels et financiers indispensables à un contrôle de la juste utilisation des ressources financières, sans tomber dans l'usine à gaz du contrôle et de la surveillance pour le contrôle et la surveillance. Chercher la performance et l'efficience doit laisser une place à l'évolution, à la responsabilisation, à l'engagement des agents embauchés à l'Etat. Le suivi, la surveillance et le contrôle sont indispensables, comme je l'ai dit, mais il faut veiller à ne pas manier uniquement le bâton, la peur de l'audit et du contrôle, au lieu de privilégier l'intérêt public, les spécificités métier, les liens, les services, avec et à la population, ainsi que les forces de proposition dans ces services.
Nous, socialistes, serons attentifs au règlement d'application et à l'application de cette loi. Le groupe socialiste vous proposera un amendement, dont nous parlerons plus tard et sur lequel je reviendrai, concernant la désignation de l'organe de révision des comptes, mais en l'état le reste de la loi nous paraissait bien articulé. Cependant, et j'en parlerai tout à l'heure, notre nouveau groupe - vu que ce projet de loi a été élaboré lors de la précédente législature - a eu un débat et nous vous présenterons donc un amendement pour que ce soit la Cour des comptes qui effectue la révision des comptes de l'Etat. (Applaudissements.)
Mme Magali Orsini (EAG). Une fois n'est pas coutume, j'ai écouté avec attention les arguments de l'UDC... (Brouhaha.) ...et je les ai trouvés souvent fort pertinents pour ce qui est de cette partie qui concerne le choix du réviseur externe. Il s'agit de procédures qui sont parfaitement standard, connues, qui seraient facturées des centaines de milliers de francs par nos grandes fiduciaires, comme chacun le sait, et je pense qu'on pourrait parfaitement faire l'économie de montants astronomiques en confiant cette tâche à la Cour des comptes. Nous n'avons pas été enthousiasmés par les choix de la nouvelle constitution, nous ne sommes pas de ceux qui l'ont approuvée, mais néanmoins maintenant il y a quand même une certaine urgence: les comptes de l'Etat vont être présentés, il faudrait quand même savoir qui va les réviser, alors entre la peste et le choléra je dirais que je préfère tout de même, et de loin, la Cour des comptes. Cette dernière nous dit qu'elle n'est pas enthousiasmée, mais ma foi, je le répète, ce n'est pas nous qui avons choisi les termes de la constitution. Elle n'est pas enthousiasmée, mais il ne s'agit absolument pas de prendre en l'état les mêmes réviseurs qui feraient l'audit interne pour leur confier le contrôle externe. Il va sans dire qu'il faudrait choisir une cellule bien précise à qui l'on confierait cette tâche et, comme je l'ai dit, vu les centaines de milliers de francs qu'on économiserait sur une fiduciaire extérieure, je pense qu'on pourrait parfaitement affecter ces montants à des réviseurs nouveaux pour la Cour des comptes. (Applaudissements.)
M. Renaud Gautier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je n'avais pas l'intention de parler, mais lorsque j'entends M. Riedweg dire tout et son contraire deux fois, je ne peux pas m'empêcher de prendre la parole.
Voici un petit peu d'histoire: il y a douze ans un conseiller d'Etat chutait; l'une des raisons de sa chute était qu'il avait empêché l'ICF d'effectuer un contrôle au niveau des offices des poursuites et faillites. Cet événement a entraîné le fait que notre parlement a décidé après coup de créer une Cour des comptes qui devait être autonome et ne pas dépendre de l'exécutif, quoique étant sous la surveillance du législatif.
Dernièrement, les constituants - grâce leur soit rendue - ont décidé qu'il fallait qu'il y ait une révision des comptes mais que cette tâche ne pouvait pas franchement être confiée à autre chose qu'à la Cour des comptes. Cette dernière, dans un processus tout à fait itératif et intéressant, a été largement auditionnée pour la création de cette loi, puisque du reste c'est le chef du département des finances qui avait convoqué quatre députés - un socialiste, une Verte, un PLR et un PDC - pour l'accompagner dans la création de ce projet de loi, ce qui fait que c'est un projet véritablement intéressant... Nous avions donc à ce moment-là auditionné la Cour des comptes, qui a indiqué qu'elle n'avait actuellement ni les moyens ni les capacités d'effectuer la révision des comptes de l'Etat. Dans la mesure où l'on ne peut pas être au four et au moulin, il faudrait dès lors créer une deuxième chambre de la Cour des comptes, qui ne ferait que s'occuper de la révision des comptes; mais alors que ferait-elle pendant six mois de l'année, après avoir terminé la révision de ces comptes ? C'est la raison pour laquelle il a été décidé de confier cette tâche à une entité extérieure.
Mesdames et Messieurs les députés, celles et ceux d'entre vous qui disent que ça va coûter très cher oublient qu'aujourd'hui le coût de la révision est intégré dans les comptes de l'Etat, mais qu'il n'est pas quantifié. Aucun d'entre vous dans cette salle ne peut dire combien coûte la révision des comptes aujourd'hui effectuée par l'ICF. Ce qu'on peut en revanche dire, c'est que si l'ICF s'amaigrit pour devenir le service d'audit interne, alors les économies réalisées - cela a été démontré par le chef du département de l'époque - équivaudront à ce que devrait coûter un mandat d'audit externe, Monsieur Riedweg, tel qu'il existe - comme vous l'avez dit - dans les sociétés, dans le monde réel. On ne peut donc pas d'un côté souhaiter cela et de l'autre côté dire que ce n'est pas bien, cela me semble compliqué !
Donc les travaux ont mené à la conclusion que, dans la mesure où la Cour des comptes ne voulait pas de cette tâche, qu'elle n'était pas équipée pour cela et qu'elle n'en avait pas les moyens, la solution de confier cette révision à une entité extérieure, de façon que le Conseil d'Etat ait à sa botte ou à sa main, si je puis dire, l'audit interne, paraissait effectivement intéressante. Alors certains parlent d'une Genferei. Je partage souvent l'avis quant aux nombreuses Genfereien que l'on fait... (Brouhaha.)
Le président. Chut ! Monsieur Stauffer, s'il vous plaît !
M. Renaud Gautier. ...mais en l'occurrence c'est faux ! Il y a deux cantons en Suisse qui pratiquent les normes IPSAS, soit Genève et Zurich. Genève, dans cette affaire-là, est légèrement en avance... (Brouhaha.) Je m'excuse, Monsieur Velasco, je ne voudrais pas vous déranger... (Remarque. Rires.) Monsieur le président, vous remercierez M. Velasco de me laisser parler, c'est très aimable de sa part ! (Exclamations.) J'espère que je ne l'ai pas interrompu ! (Commentaires. Exclamations. Applaudissements.)
Le président. Poursuivez, Monsieur Gautier !
M. Renaud Gautier. Décidément, je suis sans limite quant aux surprises que me font les socialistes ces temps ! Donc, moralité, ça ne coûtera pas plus cher, c'est nécessaire, et nous sommes simplement un peu en avance sur Zurich, qui poursuit les mêmes réflexions que celles que nous menons maintenant du fait de l'adoption des normes IPSAS, lesquelles sont, je vous le rappelle, des normes compliquées, mais qui offrent effectivement une meilleure transparence que les différents éléments comptables qu'on peut trouver dans les autres cantons.
Mesdames et Messieurs les députés, c'est la raison qui commande de soutenir cette voie-là, laquelle a été proposée par un conseiller d'Etat qui connaissait parfaitement le dossier. Vouloir maintenant transférer cette charge soit à la Cour des comptes soit à l'ICF, c'est très franchement une marche arrière qu'on doit s'épargner. (Applaudissements.)
M. Pierre Weiss (PLR). Monsieur le président, je crois que quatre raisons militent en faveur du rapport de majorité. La première - et il m'étonne qu'elle ait un peu échappé à l'excellent rapporteur de minorité et à ses collègues - c'est la volonté de refuser le gaspillage financier. L'efficacité de l'Etat devrait être une préoccupation essentielle pour l'Union démocratique du centre, parti dont M. Lussi est un chantre, et à juste titre... (Remarque.) Un chantre ! (Commentaires.) Mais ce soir, je trouve qu'il nous a montré une considération insuffisante pour des possibilités d'économies financières, et je le regrette.
Deuxièmement, on ne fait pas de bricolage institutionnel. On a vu que la volonté de renvoyer cet objet en commission a échoué. Vous pourriez peut-être essayer de lancer une initiative pour une nouvelle constitution, laquelle modifierait le point qui vous chagrine tant, à savoir la responsabilité ou la non-responsabilité de la Cour des comptes dans cette affaire - un article constitutionnel, en l'occurrence ! Je pense toutefois que vous auriez peu de succès, car on ne bricole pas une constitution qui vient d'être adoptée.
La troisième raison qui, me semble-t-il, est en faveur de ce qui est proposé, c'est la qualité du travail accompli par l'Inspection cantonale des finances - respectivement la Cour des comptes - quand elle est saisie d'un certain nombre de tâches. Elle est d'une probité, d'une exemplarité, d'une hauteur de vue et d'une neutralité qui devraient suffire à instiller en vous la confiance dans les mécanismes actuels de l'Etat. C'est la raison pour laquelle je crois que c'est un combat d'arrière-garde qui est mené ici ce soir, mais je vois que vous le menez avec toute l'élégance dont vous êtes capables, c'est-à-dire avec grande modération, et je sais dans quel sens va aller la fin de ce débat.
J'aimerais terminer sur l'argument de la Genferei: il y a des Genfereien qui consistent précisément à faire dépenser plus - et nous en avons trop à Genève - et il y en a qui consistent à faire dépenser moins; en voilà une qui est proposée ce soir et, au nom de cette Genferei-là, chers collègues opposés au rapporteur de majorité, je vous encourage à adopter le projet de loi tel que sorti de commission et voté à la quasi-unanimité, et j'en profite pour féliciter le rapporteur de majorité.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi est assez énervant, parce que c'est vrai qu'on pourrait dire que de confier des mandats à des sociétés externes revient à dilapider l'argent par les fenêtres. Mais j'aimerais dire ceci: si les comptes ne sont pas contrôlés à l'interne de l'Etat, on économise des heures de travail des fonctionnaires, et ce que l'on ne dépense pas à gauche, on le dépensera à droite. Et finalement, au bout de l'exercice, on sait pertinemment que le secteur privé est toujours moins cher que la machine Etat. Donc si on devait parler purement en termes de politique économique, eh bien on devrait plutôt tendre à donner un mandat externe pour le contrôle des comptes et le rapport de comptabilité.
Maintenant, bien sûr, on pourrait dire que finalement la Cour des comptes est un organe différent, indépendant, mais je n'ai pas trouvé dans les statuts de la Cour des comptes - et ça fait un moment que je cherche - une qualification d'organe de révision d'une quelconque forme d'entité publique ou parapublique. Alors ça me pose un problème. Si je prends un corollaire avec le canton de Vaud, je vous cite l'article 728, qui dit ceci: «L'organe de révision doit être indépendant et doit former son appréciation en toute objectivité. L'indépendance de l'organe de révision ne doit ni être restreinte dans les faits, ni donner l'impression d'être restreinte.» Or si on parle de l'ICF, il n'y a pas besoin de vous expliquer qui paie l'ICF, qui va donner des instructions au niveau hiérarchique, ou bien, quand l'ICF a besoin de personnel, à qui elle doit aller demander un employé supplémentaire pour pouvoir accomplir la mission qui serait la sienne, c'est-à-dire procéder aux audits des comptes de l'Etat. Donc l'indépendance, là, elle n'y est pas ! Et à la Cour des comptes c'est la même chose, chers collègues. Quand la Cour des comptes a besoin d'un employé, elle doit s'adresser à l'office du personnel de l'Etat, alors là, de nouveau, en termes d'indépendance, on a un léger problème !
Alors je vous le dis, Mesdames et Messieurs les députés: selon moi, le fait de prendre une société externe, de mettre des garde-fous - parce qu'on peut en mettre - eh bien ça devrait coûter moins cher, ce serait plus professionnel et on aurait un oeil externe. Et pour ceux qui viendraient dire qu'il y a une société nommée Ernst & Young qui a démontré, dans l'affaire de la BCGe, sa capacité à contrôler, je suis d'accord, c'est un très bon argument. Mais rappelez-moi combien de centaines de millions l'Etat de Genève réclame à cette société pour avoir fauté, pour s'être trompée dans les comptes de la BCGe ? Il y a donc une responsabilité. Parce que si c'est l'Etat qui se contrôle lui-même et qu'on connaît le même pataquès qu'à la Banque cantonale, à qui est-ce qu'on va aller faire un procès ? Au bureau de l'Etat voisin ? Evidemment, vous avez compris l'incohérence du système de contrôle à l'intérieur d'une entité.
Mesdames et Messieurs les députés, les membres du MCG n'ont pas tous siégé dans la commission, il y a donc des appréciations qui sont différentes, on verra au moment du vote, on suivra les consignes du chef de groupe, et je vous dis simplement que ceux qui accepteront l'amendement visant à donner le mandat à la Cour des comptes se mettront hors la loi. Si maintenant vous voulez faire une genevoiserie de plus, eh bien faites-la, comme ça la Suisse entière rigolera, parce que c'est nous-mêmes qui nous contrôlons ! Et comme on sait que le système de contrôle à l'Etat fonctionne très bien, on se rappellera l'office du logement jadis de Mark Muller qui s'était autocontrôlé et qui ne savait même plus le nombre de logements qui étaient à louer ! Il y a même des locataires qui n'avaient jamais reçu de bordereau pour payer, et ce pendant environ une dizaine d'années. Moi je vous laisse juges, Mesdames et Messieurs les députés; en ce qui me concerne, à titre personnel, j'ai choisi: je refuse que l'Etat se contrôle lui-même et j'approuve le projet de loi avec des réviseurs externes. (Quelques applaudissements.)
M. Jacques Béné (PLR). Je tiens tout d'abord à remercier d'une part mon collègue Ivan Slatkine pour l'excellent travail qu'il a effectué avec ce rapport, et d'autre part le département des finances, et tout particulièrement Mme Bertholon, qui a dû subir pendant de très nombreuses séances la commission de contrôle de gestion et pour la LGAF et pour cette loi sur la surveillance, à refaire des triptyques dans tous les sens, etc. C'est vrai que c'étaient des lois qui n'étaient pas simples et je crois qu'on peut être globalement satisfait de l'ensemble du résultat. C'est une avancée majeure pour notre canton, mais il faut être conscient que c'est une loi qui sera certainement appelée - tout comme la LGAF - à être révisée périodiquement, en y rajoutant peut-être, en fonction de l'évolution des choses, certains éléments qui ont été évoqués dans les débats de la commission par les différentes personnes auditionnées. Je pense qu'on aura tous cette bible en main à différents moments durant cette législature pour voir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
Le débat ne porte effectivement que sur la question de savoir si la révision des comptes de l'Etat va être confiée à la Cour des comptes, à l'ICF ou à un réviseur externe, mais moi ce que j'ai de la peine à comprendre avec l'UDC, c'est que si c'est pour confier cette tâche à la Cour des comptes, alors autant la laisser à l'ICF ! Ils le font déjà, ça fonctionne, donc pourquoi est-ce qu'on changerait quelque chose qui fonctionne plus ou moins bien ? C'est une question de philosophie qui se pose aujourd'hui; il y a une partie de ce parlement qui sera pour la Cour des comptes et une autre partie qui sera contre. Moi je vois un très gros avantage à avoir un réviseur externe, c'est qu'on aura deux regards: on aura le regard de l'ICF qui va continuer à effectuer son pré-audit, car la préparation de la révision des comptes continuera à se faire avec l'ICF, qui devra très largement collaborer avec ce réviseur externe, qui lui prendra effectivement la responsabilité de la révision en indiquant si oui ou non c'est conforme.
J'y vois également un autre avantage, celui d'éviter les conflits d'intérêts qu'il peut y avoir pour la Cour des comptes ou pour l'ICF. Le réviseur va avoir affaire à tous les départements, comme l'ICF ou la Cour des comptes l'aurait fait, sauf que, avec ces deux organes, on sait très bien qu'en fonction des départements et des services il y a quand même des petites tensions, on le voit dans les rapports de l'ICF comme dans ceux de la Cour des comptes, et c'est normal, car on n'aime pas trop être contrôlé ! Moi je trouve donc assez bien que ce soit quelqu'un de l'extérieur, qui n'a strictement rien à voir avec l'Etat, qui puisse faire ce travail-là.
Le dernier point, Mesdames et Messieurs les députés, c'est que ce réviseur sera choisi et désigné par notre Grand Conseil, sur un préavis conjoint de la commission des finances et de la commission de contrôle de gestion. Et ce à quoi il faudra être très attentif, c'est le cahier des charges de ce contrôle externe, et dans ce cadre-là nous faisons entièrement confiance à notre ministre M. Dal Busco pour établir un cahier des charges qui soit cohérent et qui donne le maximum de chances de succès à ce réviseur pour accomplir son travail.
Et quant à votre projet de loi constitutionnelle, Monsieur Lussi, s'il n'a pas été traité à la commission de contrôle de gestion, c'est justement parce que l'on attendait de savoir ce qui allait advenir du projet de loi que nous sommes en train de traiter. Si ce projet est voté, il n'y a absolument plus aucune raison de continuer avec le projet de loi constitutionnelle. Et dans le cas où vous souhaitez vraiment modifier la constitution, il faut le faire par le biais d'une initiative, si ça vous fait plaisir et si vous pensez que c'est un sujet suffisamment important qui peut intéresser les Genevois. (Commentaires.) Et juste pour terminer, je dirai que, quand nous établissions l'ordre du jour de la commission de contrôle de gestion et que nous évoquions ce projet de loi constitutionnelle, personne au sein de l'UDC n'a demandé de traiter ledit projet, qui du reste a déjà été traité, puisqu'il l'a été dans le cadre des auditions et des travaux de la commission sur le projet de loi que nous sommes en train d'étudier ce soir. Je précise donc que personne n'a demandé de traiter ce projet de loi constitutionnelle avant la discussion de ce soir.
M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, je m'exprimerai sur cette question, hautement importante à mes yeux et pour les socialistes, d'externalisation de la surveillance des comptes. Je ne remets pas en cause la qualité d'excellentes entreprises d'audit, de très grandes sociétés, de multinationales comme de plus petites, en revanche, ce que je remets en question, c'est le risque que prendrait l'Etat de Genève à soumettre la révision de ses comptes à ce type d'entreprises, car il faut être honnête, c'est à des entreprises multinationales que nous confierions ces comptes, pas à des petites fiduciaires comme la PME de Mme Orsini, par exemple. (Exclamations. Commentaires.) Il y aurait certainement un conflit d'intérêts dans ce cas, même si elle en serait très contente, j'en suis certain ! Ces sociétés multinationales sont en effet des entreprises privées, elles ont des intérêts, et pour ma part je crois qu'il y a un risque à confier la révision des comptes - les comptes d'un Etat, avec aussi les secrets qu'ils peuvent comprendre - à des sociétés extérieures, à des grandes sociétés, qui ont aussi des intérêts et peut-être avec d'autres Etats également.
Pour illustrer cela, on peut citer plusieurs exemples. Il y a deux ans, beaucoup d'entre nous ont été choqués par les cas d'externalisation des rapports de radiologie des HUG, qui avaient sous-traité ces rapports à une entreprise française qui elle-même les avait sous-traités à une entreprise marocaine. Quid du secret médical ? Nous avons pu poser la question à l'époque, et je crois que c'est un excellent exemple. Qu'en est-il à ce moment-là de la révision des comptes par des sociétés privées dans lesquelles nous ne pouvons maîtriser le traitement de ces mêmes comptes ? Enfin, un autre cas qui est très parlant et qui met en avant toute l'importance aujourd'hui dans notre société des entreprises privées sur le fonctionnement et la stabilité des collectivités, c'est celui des agences de notation qui, au niveau international, peuvent décider des notes d'un pays ou d'un autre, d'une ville ou d'une autre, et ainsi de la stabilité de ces mêmes collectivités. L'importance ici est la même par rapport aux comptes de l'Etat de Genève: nous ne pouvons confier à une entreprise privée les comptes de l'Etat de Genève. Alors vous allez peut-être revenir sur l'argument selon lequel on ne peut pas non plus s'autocontrôler, mais la Cour des comptes, dans son principe même, est un organe indépendant de l'Etat de Genève, alors oui, créons une deuxième chambre à la Cour des comptes, mais en tout cas ne donnons pas autant d'importance et autant de pouvoir à une société privée sur notre canton de Genève. Je vous demanderai donc d'accepter l'amendement socialiste. (Applaudissements.)
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, je vais compléter les propos de mon collègue. Outre les remarques quant à la nécessaire indépendance économique de la société ou de l'entité qui devrait s'occuper de cette révision, on peut se poser la question de la capacité de la Cour des comptes à exercer ce travail. En effet, j'ai entendu il y a quelques minutes un député PLR dire que nous avions auditionné la Cour des comptes et qu'elle avait indiqué qu'elle n'avait pas les moyens, les capacités, le personnel et les collaborateurs pour accomplir ce travail, et que ce serait compliqué. Eh bien en certaines occasions j'ai vu les députés PLR un peu plus curieux et un peu plus insistants, par exemple quand la Cour des comptes avait décidé de louer des locaux d'elle-même ! En l'occurrence, ce n'est pas parce que la Cour des comptes dit quelque chose que c'est forcément ce que le Grand Conseil doit accepter et prendre pour - c'est le cas de le dire - argent comptant. A un moment donné, le Grand Conseil peut avoir des volontés politiques, comme garantir l'indépendance de l'Etat, l'indépendance de sa manière de travailler, et pour cette raison vouloir confier à l'un de ses organes le travail de révision. Certes, la Cour des comptes devra peut-être engager des collaborateurs supplémentaires, certes, ils ne trouveront peut-être pas de quoi s'occuper le reste de l'année après la révision des comptes de l'Etat, mais au demeurant cette nouvelle chambre de la Cour des comptes - et c'est notre choix à nous, politiques - pourrait aussi se charger du même travail pour les communes genevoises, et on pourrait même envisager à terme qu'une telle entité s'occupe des comptes des cantons romands et pas seulement du canton de Genève.
Je pense donc qu'il faut être un peu visionnaire; l'Etat doit prendre ses responsabilités et la Cour des comptes permet de le faire aujourd'hui avec à ce stade des garanties suffisantes d'indépendance pour accomplir correctement le travail. On peut effectuer un bilan dans quelques années et voir si cela fonctionne, mais il n'y a aucune raison de dire maintenant que, parce que la Cour des comptes ne le souhaite pas, cela n'est pas possible, car ce n'est pas un argument sérieux. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite donc encore une fois à voter l'amendement socialiste pour que la Cour des comptes s'occupe de ce travail. (Applaudissements.)
Mme Françoise Sapin (MCG), députée suppléante. Mesdames et Messieurs les députés, en matière de révision il existe un principe de base qui est inscrit dans la loi et dans les normes: toute entité doit être contrôlée par une entité extérieure à celle qui est vérifiée. Il s'agit d'un principe logique d'indépendance qui est également inscrit dans la loi sur la révision. Il figure aussi dans les normes d'audit suisses, qui sont émises par la Chambre fiduciaire, organe faîtier des experts-comptables en Suisse. Cela respecte en outre les normes IPSAS, que l'Etat de Genève a mises en place lui-même. C'est pour cette raison qu'il n'est pas possible que les comptes de l'Etat de Genève soient vérifiés par l'ICF ou par la Cour des comptes, car ces deux entités dépendent, soit d'une manière hiérarchique pour l'ICF, soit d'une manière financière pour la Cour des comptes, du Grand Conseil.
En ce qui concerne les coûts et certains propos que j'ai entendus ici, je vous rendrai attentifs au fait qu'il existe d'autres fiduciaires dans le canton que les «Big Five», et qui pratiquent d'autres tarifs. Il est également possible, selon un cahier des charges très précis, de mettre en place un groupe de fiduciaires genevoises sur un certain nombre d'années.
S'agissant de la confidentialité, je suis quand même très étonnée de ce que j'ai entendu dans cet hémicycle: en effet, il y a des étrangers de derrière la frontière qui travaillent à l'administration fiscale cantonale tous les jours, et il y a également des mandats donnés à des sociétés informatiques qui viennent à l'administration fiscale cantonale exercer des contrôles. (Quelques applaudissements.)
M. Michel Ducommun (EAG). Je dois dire que je me pose des questions - et je vais être un peu provocateur - quant aux capacités de lecture dans cette enceinte, parce que j'ai entendu que, si nous confiions la révision des comptes à la Cour des comptes, nous serions dans l'illégalité. Ce qui veut dire que ceux qui ont voté et construit la constitution ne connaissent rien à la légalité ! En effet, je vous lis l'article 222, alinéa 2: «La révision des comptes de l'Etat est assurée par un organe externe et indépendant désigné par le Grand Conseil. Il peut s'agir de la Cour des comptes.» Donc quand la constitution dit que la Cour des comptes peut être l'organe de révision, elle est dans l'illégalité, selon vous ! Je ne comprends pas comment on peut dire qu'à cause de la constitution il est impossible de confier la révision à la Cour des comptes, alors que la constitution indique qu'il peut s'agir de la Cour des comptes ! Selon moi - et je m'en excuse, peut-être que je comprends mal le français - la phrase «Il peut s'agir de la Cour des comptes», qui figure dans la constitution mot pour mot, signifie qu'il est possible que ce soit la Cour des comptes !
Le deuxième argument que j'ai entendu, c'est que les privés sont toujours meilleur marché, et que ce serait donc dans la perspective de réaliser des économies qu'on confierait ce mandat à des privés plutôt qu'à la Cour des comptes. Moi je vais vous citer des exemples que je connais. En France, on a assisté très fortement à une privatisation du service de l'eau, or le privé qui s'occupe de l'eau la vend plus cher qu'elle ne l'était quand elle était municipalisée. Les prix de l'eau, lorsqu'il y a privatisation, augmentent ! Il en va de même des prix des transports publics et des trains en Angleterre, lorsqu'ils sont privatisés: le train coûte plus cher en Angleterre lorsqu'il est privatisé que quand il ne l'est pas. Je crois que cette généralisation peut nous laisser penser que le fait de privatiser la révision des comptes risque plutôt, comme partout où il y a eu des privatisations, de coûter plus cher. Pour ces raisons, nous voterons l'amendement des socialistes afin de confier cette révision à la Cour des comptes. (Applaudissements.)
M. Bertrand Buchs (PDC). Monsieur le président, je crois qu'on est dans une bataille idéologique. Il faudrait peut-être revenir au texte ! La commission s'est penchée sur toutes les solutions proposées: elle a écarté l'ICF, elle a retenu la Cour des comptes et elle en a discuté. La Cour des comptes nous a dit très clairement qu'il ne s'agissait pas d'un problème de personnel, mais qu'actuellement elle ne pouvait pas faire ce travail-là. Et ce qu'on a aussi compris avec la Cour des comptes, parce qu'elle-même nous en avait fait la demande, c'est qu'elle voulait monter en puissance: d'une certaine façon, la Cour des comptes nous demandait de devenir le quatrième pouvoir de l'Etat; elle nous l'a demandé spécifiquement, et c'était au moment où la commission d'enquête parlementaire travaillait sur les événements qui se sont produits à la Cour des comptes. On ne pouvait pas accepter que la Cour des comptes demande d'être le quatrième pouvoir ! On a donc intégré, à la majorité des quinze membres de la commission, la loi sur la Cour des comptes dans cette loi sur la surveillance. Et si vous prenez, à la page 94, l'article 34 de cette loi intitulé «Champ d'application» et que vous lisez tout ce que doit effectuer la Cour des comptes, vous verrez que c'est énorme ! Ce que doit faire la Cour des comptes actuellement est énorme, selon cette nouvelle loi, et vous voulez lui donner encore en plus le contrôle externe de l'Etat ? Vous créez une structure énorme ! Une structure tentaculaire ! Et une structure qui risque de prendre beaucoup de pouvoir par rapport au reste de l'Etat. Faites simplement attention à ça ! En confiant le contrôle externe à quelqu'un d'autre, vous diluez le pouvoir et c'est très important de le dire. Il faut penser à ça !
Maintenant, une dernière chose: qui contrôle la Cour des comptes ? C'est vous qui la contrôlez, Mesdames et Messieurs les députés ! Alors s'il y a un problème dans le contrôle externe de l'Etat, s'il y a les mêmes problèmes que ceux dont a parlé M. Stauffer, s'il y a une erreur, si des choses sont faites de façon fausse, c'est vous les responsables ! Alors réfléchissez bien à la question de savoir si vous voulez prendre la responsabilité du contrôle externe de l'Etat et assumer cette responsabilité s'il y a des erreurs.
Présidence de M. Antoine Barde, premier vice-président
M. Alberto Velasco (S). Moi je tiens à vous dire ceci, chers collègues, puisqu'on met en cause la probité de l'ICF et de la Cour des comptes: qui a sorti les affaires de l'université ? Vous vous souvenez des affaires de l'université ! Qui les avait sorties ? C'est l'ICF ! Qui a sorti toutes ces affaires de la république ces trois dernières années ? C'est l'Inspection cantonale des finances, Mesdames et Messieurs !
D'autre part, que je sache - et peut-être que le Conseil d'Etat va nous le dire - quand ces instruments de contrôle facturent une prestation, est-ce qu'ils prennent une marge de 10 ou 15% ? Eh bien non ! Mais les fiduciaires, elles, prennent des marges ! Elles vont nous facturer 15 ou 20% ! De plus, on nous parle de la qualité de ces fiduciaires. Mais pour ce qui est des affaires liées aux banques au niveau international, aux Etats-Unis, elles étaient où, les fiduciaires ? Hein, ces fiduciaires dotées d'une grande probité, de professionnalisme, de transparence ? Elles n'ont pas vu les problèmes liés aux subprimes ?! Et par exemple les fameux problèmes de la Banque cantonale à l'époque ? Il y avait des fiduciaires qui contrôlaient la Banque cantonale ! Eh bien elles n'ont rien vu du tout, malgré le pognon qu'elles prenaient ! (Brouhaha.) Et chez Swissair, Mesdames et Messieurs, il y avait aussi des fiduciaires ! Elles n'ont rien vu du tout ! Par contre, effectivement, je dois dire que l'Inspection cantonale des finances a vu beaucoup de choses.
Par ailleurs, Mesdames et Messieurs les députés, quand nous avons traité de ce sujet à la Constituante, nous étions divisés. Nous étions divisés ! En effet, l'Inspection cantonale des finances est venue nous dire une chose qui était juste: elle, elle connaît l'Etat, parce qu'année après année elle a effectué la révision de ses comptes. Elle connaît donc parfaitement l'Etat ! Imaginez-vous en revanche qu'une fiduciaire contrôle les comptes de l'Etat: l'Etat de Genève, ce n'est quand même pas une petite ou une moyenne entreprise de 50, 100 ou même 500 personnes ! Il y a des milliers de travailleurs au sein de ce grand Etat, de nombreux services, alors imaginez-vous une fiduciaire qui viendrait contrôler les comptes pour la première fois...
D'autre part, un député, plus précisément M. Béné, a relevé un élément intéressant: il a dit que l'Inspection cantonale des finances ferait le travail et qu'il y aurait un superboss de ces fameuses fiduciaires - qui sont excellentes puisque, comme vous l'avez vu, toutes les affaires, ce sont elles qui les ont découvertes ! - qui viendrait dire à l'Inspection cantonale des finances: «Bravo, on vous met un bon point !», avant d'aller à l'Etat de Genève donner sa facture, de quelques millions, pour prendre la responsabilité de la véracité des comptes. Parce que quand je lis parfois les comptes de fiduciaires qui effectuent des audits, je vois qu'il y a toujours une phrase qui explique que les comptes sont en rapport avec telle norme X ou Y, mais à la fin elles disent toujours qu'elles ne garantissent pas qu'il ne puisse pas y avoir des malversations. C'est extraordinaire ! Alors que l'Inspection cantonale des finances, elle, garantit cela, Mesdames et Messieurs. Elle connaît l'administration, et elle va jusqu'au bout !
Par ailleurs, Monsieur Stauffer, c'est extraordinaire comme on revient à ses sources ! Vous savez, M. Stauffer était à l'époque libéral, puis il a fait une mutation et est allé au MCG, et là il est devenu populaire, proche du peuple, etc. Et maintenant, avec le succès, il reprend son statut normal, disons, celui d'un bon libéral ! Effectivement, vu la position qu'il a prise... Car c'est quand même hallucinant que le MCG défende aujourd'hui la privatisation du contrôle de l'Etat ! C'est quand même fou, je veux dire, pour un parti qui se voulait populaire, qui était anti-magouilles, etc. ! Et voilà que le père fondateur revient en disant qu'il faut confier la révision des comptes à une entreprise privée, parce que c'est moins cher. Mais franchement, sur quoi se base-t-il pour dire ça ? Sur quelle base ? Tout à l'heure, mon collègue d'Ensemble à Gauche a eu raison: dans tous les cas de privatisation de l'eau en France, les entreprises chargées de gérer l'eau étaient plus chères. Toutes, Mesdames et Messieurs les députés ! En Argentine également, toutes les entreprises étaient plus chères. Et c'est normal ! En effet, aux coûts de fonctionnement, aux coûts de gestion, il faut rajouter le bénéfice de 14 ou 15% ! C'est logique ! Or l'Etat ne prend pas 15%, Mesdames et Messieurs, il ne prend pas 15%, et en plus il connaît très bien ce qu'il doit contrôler.
J'en viens à mon dernier argument. Il y a ici des députés qui ont siégé comme moi à la commission des finances, notamment M. Weiss, et qui ont reçu les comptes de l'Etat comme moi je les avais reçus. Eh bien je n'ai jamais vu un député se plaindre des comptes de l'Etat, contrôlés par l'ICF ! Je n'ai jamais entendu dire qu'ils étaient mal faits ou qu'il y avait un manquement ou un déficit, Mesdames et Messieurs les députés ! Et aujourd'hui on vient nous dire que l'ICF ne serait pas compétente pour faire ce travail ? Non mais c'est hallucinant ! (Brouhaha.) On nous dit aussi que la Cour des comptes n'est pas suffisamment autonome pour contrôler l'Etat. Là je ne comprends plus rien ! Cette Cour des comptes a justement été mise en place... Et il faut dire comment cette institution a été construite ! Elle a tous les instruments pour garantir son indépendance totale. Totale ! Elle n'est rattachée à l'Etat que du point de vue administratif, mais elle n'est rattachée à aucune institution. Le Grand Conseil joue le rôle d'organe de contrôle, mais pas du tout dans les choix qu'elle fait, Mesdames et Messieurs. Par conséquent, je regrette que l'intérêt public... (L'orateur baisse son micro.)
Présidence de M. Antoine Droin, président
Le président. Il faut relever votre micro, Monsieur le député ! Voilà !
M. Alberto Velasco. Je regrette, Monsieur le président, que l'intérêt public et le bien commun laissent aujourd'hui la place à l'intérêt privé et au business... (Exclamations.) Oui, oui ! Parce que, Mesdames et Messieurs, je dois le dire, ces fiduciaires sont en général de votre côté, vos relations économiques sont de ce côté-là, donc je veux dire par là que je ne pense pas que ce soit une marque d'indépendance... (Commentaires.) Mais c'est la réalité ! Vous êtes insérés dans ce milieu-là, Mesdames et Messieurs ! Et c'est donc quand même louche que vous alliez à fond là-dessus et que vous vouliez à fond qu'on se tourne vers le privé ! Mesdames et Messieurs, je suis désolé, si vous avez un sens de l'Etat, si vous avez un sens du bien commun, du bien public, eh bien pour une dépense moindre de l'Etat - parce que vous êtes des gens qui voulez dépenser le moins possible - il faut voter l'amendement socialiste, s'il vous plaît, puisque c'est vous qui dites constamment...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Alberto Velasco. Pardon ?
Le président. Il vous faut conclure !
M. Alberto Velasco. Très bien ! Mesdames et Messieurs, c'est vous qui, jour après jour, nous rabâchez qu'il faut dépenser moins, qu'il faut faire des économies, et voilà, ces mêmes gens sont prêts à dépenser du pognon, comme ça, en disant que, allez, là-dessus, pas de problème...
Le président. C'est terminé, Monsieur Velasco, votre temps est écoulé ! Vous pourrez reprendre la parole plus tard, si vous le souhaitez.
M. Alberto Velasco. Monsieur le président, je vous remercie beaucoup et vous souhaite une bonne soirée ! (Rires. Applaudissements.)
M. Benoît Genecand (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, si toutes les fiduciaires sont de droite, j'invite Mme Orsini à s'asseoir deux places devant moi, si elle veut bien se déplacer... (Rires.) Nous l'accueillerons avec grand plaisir ! (Commentaires.)
Il y a quelques années, j'ai commencé comme non-député à lire les comptes de l'Etat. Je pense que peu de citoyens font cela, et il faut quand même avouer une chose: même pour ceux qui siègent à la commission des finances et les autres, les comptes de l'Etat sont extrêmement compliqués ! Même à la période du budget, peu d'entre nous s'y mettent vraiment, vont jusqu'au bout et comprennent les mécanismes ainsi que les méandres de ces comptes, car c'est extrêmement complexe.
Personne ici ne conteste que l'administration accomplit un travail remarquable; personne ne conteste l'intérêt d'avoir un organe comme l'ICF, qui réalise également un travail remarquable. Simplement, en fonction de la constitution, une grande partie d'entre nous se dit que, si un tiers vient une fois par année effectuer un audit - parce que c'est de cela qu'il s'agit: il n'est pas question de remplacer le travail interne, mais de l'auditer une fois par année - de temps en temps, et je vous le garantis, nous aurons des suggestions que nous n'aurions jamais eues avec un regard seulement interne, notamment en termes de comptabilisation des provisions ou des amortissements.
Le deuxième point que je voulais souligner - et vous transmettrez à M. de Sainte Marie, Monsieur le président, que je le déplorerai chaque fois que cela se reproduira - c'est que le fait d'associer «international» et «multinationales» à quelque chose de dangereux et d'hostile s'apparente à une panne de mémoire. C'est un manque par rapport à l'apprentissage qu'il aurait dû faire le 9 février et il est dangereux d'utiliser ce genre d'arguments. Ce qui est international, les multinationales, tout cela est très bienvenu à Genève, et notre canton est prospère parce qu'il accueille des sociétés multinationales. Ce n'est pas parce que cela devient des sociétés d'audit que tout à coup c'est le mal absolu ! Mme Sapin l'a d'ailleurs très bien dit, ça pourrait tout à fait être un consortium d'entreprises locales. Et si vraiment, les socialistes, vous ne voulez rien avoir à faire avec l'international, alors faites une proposition, remboursons les 13 milliards de dette - parce que, quand il s'agit d'emprunter, on n'est pas regardant sur la nationalité de celui qui nous prête - et à ce moment-là on n'aura de compte à rendre à personne et on pourra faire du purement local. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Mme Magali Orsini (EAG). En effet, je confirme à l'intention de M. Genecand que j'ai l'habitude de lutter contre mes propres intérêts, ce qui n'est pas forcément le cas de tout le monde ! Cela mis à part, je voulais aussi m'adresser à mon excellente consoeur Françoise Sapin: elle sait comme moi qu'à l'intérieur des grandes fiduciaires la notion d'indépendance est relative. Elle a été précisée par la Chambre fiduciaire. Il y a des personnes qui peuvent s'occuper de la comptabilité d'un client pendant toute l'année, et d'autres qui ont le droit d'effectuer le contrôle et la révision, du moment qu'elles n'ont pas du tout participé à la comptabilité. Ça, je pense que c'est une chose acquise, et on a bien répété tout à l'heure que, dans le cas de l'option de la Cour des comptes, il s'agirait clairement de s'adresser à des personnes différentes, comme cela se fait dans toutes les grandes fiduciaires surveillées par la Chambre fiduciaire.
Maintenant pour ce qui est de la compétence et de la complexité des comptes de l'Etat, je rappelle qu'il n'est en aucun cas dans le mandat d'un réviseur externe, au sens de la loi sur la révision, de changer la structure des comptes, de donner des conseils de gestion ou autres fantaisies de ce genre. Les normes sont extrêmement précises, le réviseur doit réviser les comptes et attester qu'ils sont conformes à la loi et au plan comptable qui a été défini. Point final ! Il ne faut donc pas du tout compter sur une fiduciaire extérieure pour venir mettre son nez dans nos organisations.
Quant à la moralité des multinationales, je suis désolée, mais ce n'est quand même pas nous qui avons brûlé les comptes d'Enron et qui avons provoqué la chute d'une fiduciaire aussi prestigieuse qu'Arthur Andersen. Voilà pour la petite histoire. D'une manière générale, il y a toujours un petit scandale par-ci par-là, à droite ou à gauche...
Une voix. Surtout à droite !
Mme Magali Orsini. ...mais jusqu'à nouvel ordre, on n'en a pas entendu parler en ce qui concerne notre Cour des comptes. Et quand on a la chance d'avoir cet outil, eh bien on en profite pour lui confier des mandats de cette importance. En conclusion, nous vous recommandons donc évidemment d'adopter l'amendement du parti socialiste.
Le président. Merci, Madame la députée. Je prie la personne qui est debout à la tribune de bien vouloir s'asseoir. Merci ! La parole est à M. Yvan Zweifel.
M. Yvan Zweifel (PLR), député suppléant. Merci, Monsieur le président. J'aimerais m'inscrire dans la lignée de ce qu'a dit notre collègue Mme Sapin. Les gens ne savent peut-être pas qui est Mme Sapin: c'est une experte-comptable diplômée et jurée aux examens d'expert-comptable de la Chambre fiduciaire suisse. Lorsqu'elle s'exprime, c'est donc une spécialiste qui parle, et j'en sais quelque chose, puisque j'ai moi-même dû subir comme jurée Mme Sapin lors de mes examens d'expert-comptable ! (Exclamations. Protestations.) Mais je l'ai bien subie puisque je les ai réussis ! (Exclamations. Commentaires.)
Cela étant, elle a relevé un fait qui paraît essentiel: elle a dit que tout auditeur, dans tous les cas de figure - qu'il soit public ou privé, que ce soit un auditeur interne d'une entreprise ou l'ICF, que ce soit un auditeur externe, une petite fiduciaire ou une grande multinationale, une «Big Four» - doit suivre des normes, le manuel suisse d'audit, notamment, les normes d'audit suisses, les IPSAS, les IFRS et d'autres encore. Toutes ces normes-là, qu'elles soient des normes d'audit ou de comptabilité, indiquent la même chose, à savoir qu'il y a une distinction claire entre un audit interne et un audit externe. L'audit interne sert à vérifier la gestion d'une entreprise, d'un département, d'un service ou de l'Etat, à analyser les processus, à voir quels sont les contrôles mis en place, qui est responsable de ces contrôles, à quelle fréquence ils sont effectués, etc. Le rôle d'un auditeur externe, c'est de certifier les comptes, de mettre un «Stempel» sur les comptes. Et M. Velasco - vous transmettrez, Monsieur le président - fait une confusion totale entre un audit de gestion et un audit financier. Quand il nous explique, à juste titre, que l'ICF a pu détecter certains éléments que n'aurait pas détectés un auditeur externe, il a raison ! Il a raison parce que c'est le rôle de l'ICF de détecter des fraudes ou ce genre de choses ! Mais ce n'est pas le rôle de l'auditeur externe. Son rôle à lui, c'est de certifier les comptes. Il ne faut donc pas confondre les deux choses, et en ce sens nous ne remettons pas du tout en question le rôle de l'ICF ou de l'audit interne, qui lui est propre. Cependant, nous voulons confier le rôle important et fondamental de la révision des comptes à un auditeur externe.
J'aimerais maintenant répondre à M. de Sainte Marie - vous transmettrez également, Monsieur le président - qui a raison dans un sens lorsqu'il dit qu'il y a des secrets à l'Etat et qu'il pourrait y avoir un danger si n'importe qui les découvrait. Rassurez-vous, les entreprises privées aussi renferment parfois des secrets: le détail des salaires, par exemple, est souvent un peu tabou, et en tant qu'ancien réviseur externe - puisque j'ai moi-même été réviseur externe, mais je ne le suis plus, pour ceux qui penseraient que je tombe sous le coup de l'article 24 - eh bien je peux vous dire que certaines entreprises rechignent à donner le détail des salaires, expliquant que c'est extrêmement secret. Il est alors possible, pour l'auditeur externe, de ne pas avoir ce détail des salaires, à la condition que le processus de comptabilisation des salaires ait été correctement audité par l'audit interne. Par conséquent, il est tout à fait possible de préciser dans le cahier des charges qui pourra être défini entre un auditeur externe et l'auditeur interne, soit l'ex-ICF, qu'il y a par exemple au niveau fiscal certains secrets qui doivent être gardés; et si l'on certifie que le processus de l'ICF est parfaitement aux normes à ce niveau-là, eh bien l'auditeur externe n'aura pas accès au détail de la fiscalité des personnes physiques comme des personnes morales. Donc de ce côté-là il y a des procédures qui peuvent être mises en place, et il ne faut pas penser que l'on se dirige vers une situation où quelqu'un d'externe aura toutes les informations possibles et imaginables sur l'Etat.
Enfin, vous voulez assurer comme nous l'indépendance, mais la seule et unique manière d'assurer l'indépendance de la vérification des comptes - et M. Stauffer l'a très bien dit - c'est en l'externalisant. S'il s'agit d'un organe de l'Etat, que ce soit un département directement payé par l'Etat ou la Cour des comptes, il y a forcément moins d'indépendance que si c'est quelqu'un d'externe. C'est tout à fait logique et normal ! En ce sens-là, il est logique d'externaliser. D'ailleurs je ne connais aucune entreprise privée dans ce pays, petite ou grande, qui fait vérifier ses comptes par l'audit interne. Ça n'existe pas, parce que ce n'est pas le rôle de l'audit interne ! Faire une Genferei, c'est faire dans le public quelque chose que personne ne fait ailleurs dans le privé.
Pour finir, Mesdames et Messieurs - et je conclurai sur ce point - passer par une société d'audit externe, c'est passer par des spécialistes dans ce domaine, qui sont diplômés en la matière et qui maîtrisent ces sujets-là. Cela aura un coût moindre, oui, moindre, d'abord parce qu'il est plafonné et fixé. En effet, quand vous signez un mandat avec une société externe, vous savez combien ça va coûter, ce qui n'est pas le cas - comme l'a très bien dit le rapporteur de majorité - si vous passez par l'auditeur interne ou par la Cour des comptes, parce que vous ne pourrez pas estimer ce temps-là. Si la Cour des comptes prend du temps pour s'occuper de l'audit financier, alors elle aura moins de temps pour d'autres audits tout aussi importants, comme ceux qui ont été évoqués par M. Velasco. C'est donc parce que je vais dans le même sens que lui qu'il faut évidemment externaliser la révision des comptes.
Je termine juste en citant encore M. Velasco - vous transmettrez, Monsieur le président - qui a prononcé cette phrase pleine de bon sens: «L'Etat connaît bien ce qu'il contrôle.» Evidemment, Monsieur Velasco, qu'il connaît bien ce qu'il contrôle: si je me contrôle moi-même, je me connais forcément mieux que n'importe qui d'autre ! C'est bien pour ça qu'il n'est pas indépendant, et c'est bien pour ça qu'il faut externaliser ce contrôle. (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais simplement répondre ceci - vous transmettrez, Monsieur le président - à M. Velasco: d'une part, on n'a compris qu'un mot sur trois lorsqu'il parlait et, d'autre part, venir critiquer le MCG en disant - on n'a pas tout compris - que l'on défend les Genevois... Oui, on défend les Genevois, à la différence du parti socialiste qui fait tout, je dis bien «tout»... (Brouhaha.)
Le président. Excusez-moi, Monsieur le député. J'aimerais bien que les journalistes s'assoient, là-bas ! (Commentaires.)
M. Eric Stauffer. Eh bien les journalistes discutent aussi ! C'est un parlement, c'est fait pour parlementer !
Le président. Allez-y, Monsieur Stauffer !
M. Eric Stauffer. Je disais donc que le parti socialiste fait tout en réalité pour détruire l'économie, pour que tout coûte plus cher au niveau de l'Etat, et puis quand on a des soucis comme à la prison de Champ-Dollon, eh bien il faut libérer tous les criminels, comme ça il n'y a plus de problème de surpopulation. (Commentaires. Protestations.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. Eh bien laissez-moi vous dire, chers amis socialistes, que ce n'est pas un modèle de société qui sied au MCG... (Commentaires.)
Le président. Madame Wenger, s'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. ...et que nous continuerons à défendre une économie forte pour pouvoir faire du social efficace, à la différence de votre parti... (Commentaires.) ...où c'est la nationalisation de tout et n'importe quoi, le système communiste dans sa plus belle splendeur. Alors je vous le dis, Mesdames et Messieurs: tandis que vous voulez continuer à augmenter la machine Etat, nous, nous voulons la dégrossir, parce que l'Etat coûte trop cher ! Regardez le nombre de fonctionnaires qu'il y a à Genève en comparaison avec d'autres cantons suisses, et vous comprendrez très vite où je veux en venir.
Il y a maintenant un moment où il faut siffler la fin de la récréation: au MCG nous ne voulons pas d'un mécanisme qui s'appellerait le frein à l'endettement, et pour ce faire il faut réaliser des économies là où c'est possible... (Commentaires.) ...et surtout - vous transmettrez à M. Velasco, Monsieur le président - donner l'autorité de contrôle et de révision des comptes à des gens qui sont indépendants. On aurait même pu pousser le bouchon plus loin en disant que, pour ne pas qu'il y ait, vous savez, de comptes audités ou révisés complaisants, il faut changer de réviseur toutes les années - ça pourrait être une obligation, le MCG y réfléchira ultérieurement. En effet, ça nous donnerait vraiment l'assurance d'une indépendance totale sur la méthode de contrôle et de révision des comptes de l'Etat.
Maintenant, encore une fois, pour le parti socialiste il faut engager une cinquantaine de fonctionnaires supplémentaires, il faut libérer les prisonniers, il faut nationaliser tous les appartements, tous les terrains, et finalement on se retrouvera comme dans les belles années en Russie, avec une marque de savon, une marque d'eau, une marque de brosse à dents... (Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. ...et tout le monde devra avoir la carte du parti pour aller chercher son ticket de rationnement... (Protestations. Le président agite la cloche.) ...pour aller manger ! (Applaudissements. Exclamations.)
M. Bernhard Riedweg (UDC). Je voudrais insister sur la confidentialité d'un réviseur externe: il a accès aux données fiscales des personnes physiques et des personnes morales, et c'est cela qui dérange l'Union démocratique du centre. La fiduciaire externe dépend financièrement de la rentabilité du dossier, et là le risque existe qu'elle ne traite pas le dossier de l'Etat avec toute l'attention et la rigueur exigées. De plus, la connaissance de l'Etat et de ses particularités par la révision externe n'est pas comparable aux connaissances dont dispose le service d'audit interne. Je tenais à spécifier cela.
M. Roger Deneys (S). Je voudrais d'abord formuler une remarque préliminaire, suite aux propos d'un député qui se trouve en face de moi... J'aimerais bien, parce qu'il y a peut-être des enfants qui regardent le Grand Conseil... (Rires. Commentaires. L'orateur désigne un cigare électronique.) ...qu'il range son vibromasseur, car sa vie privée ne me regarde pas ! J'aimerais qu'il arrête d'exhiber son objet dans la main comme maintenant ! Les sextoys n'ont pas leur place dans ce Grand Conseil ! (Rires.)
Le président. Monsieur Deneys, s'il vous plaît, restez dans le sujet !
M. Roger Deneys. Mais c'est véritablement scandaleux ! L'ancien président du Grand Conseil Renaud Gautier avait fait voter une loi concernant la tenue dans ce parlement...
Le président. Monsieur Deneys, venez-en au sujet, s'il vous plaît !
M. Roger Deneys. ...et j'estime qu'il n'est pas admissible de se comporter de la sorte dans cette salle. Il devrait donc retirer cet objet indécent de cette enceinte. (Commentaires.)
J'aimerais maintenant revenir à ce projet de loi. En l'occurrence, j'aimerais vous dire que la question de confier la révision des comptes à un réviseur privé externe... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...ou à la Cour des comptes se pose aussi, Mesdames et Messieurs les députés, parce que l'Etat n'est pas une entreprise privée. (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !
M. Roger Deneys. J'ai entendu un député PLR évoquer le fait que toutes les entreprises privées avaient un réviseur privé. Eh bien c'est normal ! La logique n'est pas la même. Et s'il est important de rappeler que, certes, les comptes de l'Etat sont compliqués, j'aimerais bien savoir en quoi les réviseurs qui seraient à la Cour des comptes seraient moins compétents que des réviseurs privés. Il n'y a aucun lien, dans le statut des réviseurs, entre le fait qu'ils soient payés par l'administration publique ou par une entreprise privée: il n'y a aucun lien entre le payeur et les compétences.
Et au demeurant j'aimerais quand même insister sur un point: on peut certes dire que, quand les réviseurs sont à l'Etat, à la Cour des comptes, ils sont moins indépendants. D'accord, ils sont moins indépendants parce qu'on va voter leur budget, mais à l'inverse un réviseur privé a une dépendance économique, et on l'a vu justement avec ces grandes sociétés de révision: à un moment, elles sont aussi relativement complaisantes pour laisser passer un certain nombre de dysfonctionnements... (Brouhaha.) ...parce qu'elles gagnent de l'argent avec ce contrôle. Et par ailleurs, M. Zweifel l'a évoqué, l'intervenante du MCG est directement concernée parce qu'elle est dans le business de cette révision. Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, je crois que c'est aussi bien là l'un des éléments du problème. (Brouhaha.) Quand des personnes sont intéressées, c'est un paramètre qui vient également dans la balance: il y a donc la question du coût, certes, la question de l'indépendance, certes, mais il y a aussi la question du fonctionnement. Et je crois qu'aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, on ne doit pas occulter le fait que l'Etat n'a pas pour seule vocation de faire des économies pour faire des économies, il doit également répondre à une mission d'intérêt général, qui est ce qu'on appelle encore le service public. Et cette pesée d'intérêts est faite aussi parce que les personnes qui travaillent au sein de l'Etat ont une vision de ce qu'est un service public qui fonctionne, et dans ce sens-là un réviseur interne est bien plus approprié qu'un réviseur externe, qui justement se base sur la logique économique du profit. Il est donc tout à fait raisonnable, à ce stade, de vouloir garder un réviseur interne, avec la Cour des comptes qui donne des garanties d'indépendance suffisantes, comme on a pu le constater à l'occasion de plusieurs de ses rapports. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite par conséquent à voter l'amendement socialiste pour que la Cour des comptes puisse réviser les comptes de l'Etat. (Applaudissements.)
M. Alberto Velasco (S). Monsieur le président, permettez que je m'adresse à mon collègue bien-aimé Stauffer...
Le président. Non, adressez-vous au président, Monsieur Velasco !
M. Alberto Velasco. Eh bien, Monsieur le président, je ne savais pas que de dire à quelqu'un qu'il est libéral était une insulte ! Moi je trouve qu'on peut être socialiste ou autre et qu'il est tout aussi honorifique d'être libéral que d'être socialiste, mais voilà que M. Stauffer se fâche parce que je l'ai qualifié de libéral. Est-ce une insulte que de dire à quelqu'un qu'il est libéral ? Je ne crois pas ! Vous voyez, il y a des gens honnêtes en face, donc il n'y a pas de problème ! (Exclamations.) Mais tout à coup vous sortez toute une série d'anathèmes, vous parlez de communisme... On n'a rien compris du tout ! La seule chose que je vous dis, c'est qu'à une époque je vous ai connu un peu plus populiste, à défendre les intérêts de l'Etat, à défendre le peuple, or soudainement, ces derniers temps, je vois une mutation, une transformation du MCG, au sujet du logement, et maintenant du contrôle... C'est quand même bizarre, je veux dire ! Le peuple risque d'être trompé là-dessus ! (Brouhaha.)
Cela dit, Mesdames et Messieurs, ce soir c'est la soirée des réviseurs, parce que vous avez vu qu'il y a des experts partout dans la salle qui nous font la leçon à nous, les politiques. Eh bien moi je vous demande une chose, Mesdames et Messieurs: qui contrôle les fiduciaires ? (Exclamations. Commentaires.) Qui révise les réviseurs ? Hein ? Qui ? Moi je pensais qu'en principe l'Etat était justement censé exercer des contrôles pour que ces sociétés se gèrent le plus honnêtement possible, que précisément l'Etat était un organe indépendant, dans le sens où il représentait l'ensemble des citoyens, l'ensemble de l'économie, l'ensemble des acteurs, l'ensemble des intérêts, et qu'à ce titre c'était justement l'organe qui était le plus appelé à avoir un avis sur ces mêmes fiduciaires. Mais voilà qu'on me dit que, non, pas du tout, aujourd'hui ce sont les fiduciaires qui sont l'organe censé contrôler, parce qu'elles n'ont aucun intérêt, Mesdames et Messieurs ! Il n'y a pas d'actionnaires dans les fiduciaires, vous savez, il n'y a pas d'actionnaires ! Ce sont des associations à but non lucratif ! Donc totalement indépendantes ! Les actionnaires amènent de l'argent pour que ça fonctionne, mais elles n'ont aucun intérêt ! Elles ne sont même pas cotées en bourse, d'ailleurs. Vous voyez l'indépendance de ces organes ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il est donc quand même étonnant que l'on nous dise que des organes qui sont justement soumis au marché, aux intérêts, doivent auditer un Etat qui, lui, est censé les contrôler. C'est magnifique ! Le raisonnement est magnifique !
Ensuite, Mesdames et Messieurs, on nous parle des compétences. Madame Sapin - vous transmettrez, Monsieur le président - je crois, mais je me trompe peut-être, que vous avez été fonctionnaire ! Donc à l'Etat il y avait d'excellents fonctionnaires, puisque M. Zweifel a relevé vos excellentes qualités ! Oui, voyez les qualités de madame ! (Remarque.) En Ville de Genève, en plus ! Vous voyez donc que l'Etat possède des experts-comptables certifiés, avec toutes les qualités possibles pour réaliser ce travail ! Il n'y a aucun problème à ce niveau-là !
J'en viens maintenant à la Cour des comptes. La Cour des comptes n'est pas un organe de l'Etat, je le répète. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Vous assimilez la Cour des comptes à l'Etat, mais elle n'est pas un organe de l'Etat. Elle y est liée administrativement, parce qu'il faut bien payer les salaires de ses membres, mais pour tout le reste elle est totalement indépendante. Totalement indépendante ! Et moi je suis franchement étonné que cette salle... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !
M. Alberto Velasco. ...alors que le politique devrait justement défendre l'intérêt commun et l'Etat, soit prête ce soir à nous dire que des privés vont nous indiquer, eux, si l'Etat est bien géré ou pas et si les comptes sont bien normés. Non, franchement, je suis profondément déçu de ce que je vois ce soir ici. Ayez un peu le sens de l'intérêt public, Mesdames et Messieurs les députés, et votez l'amendement socialiste ! (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Le Bureau a décidé de clore la liste. Sont encore inscrits Mme Orsini, Mme Wenger, M. Stauffer, M. Gautier et Mme Sapin. La parole est à Mme Orsini.
Mme Magali Orsini (EAG). Merci, Monsieur le président. Je serai extrêmement brève, parce que je voulais juste reprendre la réflexion de M. Roger Deneys par rapport aux propos de M. Yvan Zwe... Zwei...
Une voix. Zweifel ! (Brouhaha.)
Mme Magali Orsini. ...de M. Yvan Zweifel concernant la compétence des personnes à l'Etat. Effectivement, comme ça vient d'être dit, je ne vois pas fondamentalement quelle différence il y a entre un expert-comptable diplômé qui travaille à la Cour des comptes et un expert-comptable diplômé qui travaillerait chez qui vous savez ! Je ne veux citer personne... Je pense donc que les compétences sont tout à fait égales et qu'il n'y a vraiment aucune raison de jeter le discrédit sur les employés de l'Etat uniquement parce qu'ils travailleraient à l'Etat.
Mme Salika Wenger (EAG). Chers collègues, je dois dire qu'il y a eu de multiples répétitions sur le même sujet, et je n'ai pas la réputation d'une femme très patiente... (Exclamations.) Alors, Monsieur le président, j'aimerais que vous transmettiez ceci: l'extrême droite, par la voix de M. Stauffer, nous serine - je dis bien «nous serine» - son refrain anti-Etat en permanence. C'est bien simple: Mussolini n'a pas eu d'autre discours ! (Protestations.) Il n'a pas eu d'autre discours !
Le président. Madame, un peu de tenue, s'il vous plaît !
Mme Salika Wenger. Monsieur le président, je regrette, il est insupportable d'être en permanence insulté par une personne qui, comme moi maintenant, ne parle pas du sujet que nous traitons. De grâce, vous êtes en train de me demander d'arrêter cette intervention, alors je veux que vous ayez le courage de faire la même chose avec M. Stauffer... (Commentaires.) ...parce qu'il suffit ! Il suffit ! Je ne veux plus entendre les insultes de M. Stauffer ! (Commentaires.) Qu'il s'exprime sur le sujet et qu'il le fasse le mieux qu'il peut... (Brouhaha.) ...mais qu'il arrête d'insulter la droite et la gauche et tous les gens qu'il représente parce que, comme lui, nous avons été élus. Alors ça suffit, l'extrême droite, taisez-vous ! (Exclamations. Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Eric Stauffer. (Exclamations.)
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Oh, que de méchancetés ! Il y a des rappels que vous ne devriez pas faire, Madame la députée, mais passons. (Commentaires.) Je vais vous lire une petite lettre adressée à un gouvernement de gauche, à majorité de gauche. (Brouhaha.) Ecoutez bien: «Rapport de l'organe de contrôle fiduciaire: en notre qualité d'organe de contrôle fiduciaire, nous avons vérifié la comptabilité, le bilan, le compte de fonctionnement et le compte d'investissement de la commune X pour l'exercice arrêté au 31 décembre 2011. La responsabilité de l'établissement des comptes annuels incombe au Conseil administratif, alors que notre mission consiste à vérifier ces comptes et à émettre une appréciation les concernant. Nous attestons que nous remplissons les exigences légales de qualification et d'indépendance. Notre révision a été effectuée selon les normes de la profession en Suisse. Ces normes requièrent de planifier et de réaliser la vérification de manière telle que des anomalies significatives dans les comptes annuels puissent être constatées avec une assurance raisonnable. Nous avons révisé les postes des comptes annuels et les indications fournies dans ceux-ci en procédant à des analyses et à des examens par sondages. En outre, nous avons apprécié la manière dont ont été appliquées les règles relatives à la présentation des comptes, les décisions significatives en matière d'évaluation, ainsi que la présentation des comptes dans leur ensemble. Nous estimons que notre révision constitue une base suffisante pour former notre opinion. Selon notre appréciation, la comptabilité et les comptes annuels sont conformes aux dispositions légales et aux directives du département. Nous recommandons d'approuver les comptes annuels qui vous sont présentés. SFG - Société Fiduciaire et de Gérance SA, pour la commune d'Onex.» Commune dont je suis le magistrat des finances, comme vous le savez !
Alors quel problème y a-t-il, Mesdames et Messieurs les députés, à confier un mandat de révision à une société externe dans une commune à majorité de gauche ? Eh bien aucun ! Dans ce cas pourquoi est-ce que vous hurlez ce soir ? (Remarque. Exclamations.) Eh bien alors demandez à vos partis dans les communes de virer tous les mandats externes des fiduciaires et donnons-les tous en choeur à la Cour des comptes ! Mais arrêtez, vous n'êtes pas crédibles, vous êtes risibles, ce soir ! On voit bien, et je viens de vous en faire la démonstration, que la révision des comptes doit être faite par un organe indépendant. Vous voulez confier la révision des comptes à la Cour des comptes, alors il faut aussi lui donner celle des 45 communes, et finalement tout va bien, et comme ça quand il y aura un petit problème...
Le président. Monsieur Stauffer ?
M. Eric Stauffer. ...comme à la Gérance immobilière de la Ville de Genève ou de l'Etat...
Le président. Monsieur Stauffer, vous vous adressez à moi, s'il vous plaît.
M. Eric Stauffer. Mais avec grand plaisir, cher Antoine ! (Exclamations. Rires.) Et donc, Monsieur le président, quand il y aura des problèmes à la Gérance immobilière de la Ville de Genève ou de l'Etat, eh bien on demandera à la commission de contrôle de gestion d'essayer de faire son job; on n'aura de toute façon pas les pièces, et comme ça tout va bien, Madame la Marquise... Et puis tant qu'à faire, quand un magistrat s'en va, allez, vite, on va donner un petit mandat de location à un pote, 56 millions pour un immeuble loué par l'Etat, et tout va bien ! Eh bien ces contrôles-là, Monsieur Velasco, le MCG n'en veut plus ! Nous voulons des contrôles professionnels, faits par des professionnels... (Commentaires.) ...et non pas par une Cour des comptes qui a réussi à violer la loi en déménageant et en rendant les clés à l'Etat en disant: «Vos locaux ne nous conviennent pas, nous en avons pris à la rue du Rhône, c'était plus dans notre standing.» Eh bien ça, on n'en veut pas, Mesdames et Messieurs de la gauche ! Et j'aimerais ici rappeler, chers collègues, que la Cour des comptes n'est pas à majorité de droite ! La Cour des comptes est à majorité de gauche ! Cette gauche que vous voulez mettre encore en avant et qui, soi-disant, défend le petit peuple. Non, finalement, votre standing c'est la rue du Rhône, c'est la gauche caviar, c'est la gauche bobo, et nous on n'en veut pas. (Applaudissements. Exclamations.)
M. Renaud Gautier (PLR). Monsieur le président, je ne voudrais pas faire baisser la hauteur stratosphérique du débat... (Rires.) ...mais j'entendais juste peut-être rappeler ce que nous avons à voter ce soir. Il s'agit de la révision des comptes de l'Etat. Il ne s'agit pas de qualifier les compétences des fonctionnaires, il ne s'agit pas de juger de la véracité ou de l'utilité des politiques publiques, il ne s'agit pas de savoir si celui-ci est mieux que celui-là, il s'agit simplement que le premier pouvoir - ce parlement - ait la conviction que les comptes qu'il reçoit correspondent au plus près possible à la vérité, en l'occurrence à la vérité comptable. Point à la ligne ! Tout le reste n'est que débat politique, qui, après deux heures, devient franchement ennuyeux, mais le débat de ce soir porte sur la révision des comptes de l'Etat et rien d'autre.
Mme Françoise Sapin (MCG), députée suppléante. Mesdames et Messieurs les députés, ce que j'aimerais dire ici c'est qu'il ne s'agit pas d'argent: il s'agit de lois sur la révision, il s'agit de normes qui ont été mises en place par des instances de la profession. Il ne s'agit pas non plus de parler des compétences de l'ICF, pas du tout; je pense qu'elle fait un excellent travail, mais elle s'occupe de l'audit interne, et l'audit interne ce n'est pas la révision externe, comme cela a été relevé par un député. Ce même parlement veut faire contrôler les comptes par l'ICF ou par la Cour des comptes pendant une durée indéterminée, alors que la loi sur la gestion financière de l'Etat demande aux fiduciaires de changer tous les cinq ans pour ce qui est des contrôles des subventionnés. Enfin, j'aimerais répondre à un autre député, qui demandait qui contrôle les réviseurs. Depuis 2008, il existe une autorité de surveillance à Berne nommée ASR qui contrôle les fiduciaires et les réviseurs et qui donne les agréments aux diplômés pour exercer leur métier.
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, beaucoup de choses ont été dites. Le seul point que je relèverai maintenant, c'est le fait que mon préopinant M. Renaud Gautier ait essayé de remettre les débats sur la bonne voie. De quoi parlons-nous ce soir ? Je commencerai par cette première phrase, avant d'être acariâtre envers certains: pourquoi changer une équipe qui gagne ? Parce que tout ce que vous avez entendu, Mesdames et Messieurs, c'est uniquement dû - et là j'essaierai de ne pas être acariâtre et de ne pas critiquer - à des hautes cogitations au sein de l'Assemblée constituante auxquelles je n'ai pas participé et qui nous ont amené ce changement. Je tiens à le dire, je n'incrimine pas en cela le Conseil d'Etat, qui le met en application.
Par contre, vous me permettrez de lancer quelques piques. (Exclamations.) Quelques-uns mais surtout une députée ce soir s'est gargarisée de ses compétences d'experte-comptable, d'examinatrice aux examens, et j'incrimine Mme Françoise Sapin. (Exclamations.) Je lui demande simplement, après tout ce qu'elle nous a dit, de nous sortir un seul article, une seule norme - parce qu'elle nous a parlé des normes IPSAS, mais elle a oublié de mentionner les normes MCH2 - qui impose à un Etat, et je parle là d'un Etat de la Confédération suisse, de faire appel à un réviseur externe, tel que le stipule le chapitre III de la loi que nous traitons. Cela m'intéresserait beaucoup qu'elle nous sorte cela. Ça permettra au MCG et à son bouffon habituel... (Exclamations.) ...de faire plein de recours contre la Confédération suisse et tous les cantons... (Commentaires.) ...parce que, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons affaire - et je persiste... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Patrick Lussi. ...à une Genferei ! M. Stauffer - je n'ai pas honte de le dire, et il sait parfois comme je suis avec lui - m'a ce soir profondément déçu, parce qu'il nous a fait un numéro d'équilibriste. Et je dis simplement ceci: je croyais jusqu'à présent que seul le PDC était un artiste dans l'art du grand écart, mais je m'aperçois - et je n'incrimine pas le MCG - que M. Stauffer est même meilleur en la matière. Et c'est bien dommage, parce que - et, Monsieur le président, vous transmettrez à la presse... (Exclamations. Rires.) - tout ce qui a été dit ce soir est un écran de fumée: on trompe le citoyen. On trompe le citoyen, car dans tous les débats de la commission de contrôle de gestion auxquels j'ai participé, on n'a jamais réellement abordé la question de savoir quelle est l'obligation - mis à part l'article constitutionnel, qui résulte peut-être, on verra, d'une erreur qui a été faite - quelles sont les normes qui indiquent que nous sommes contraints de faire appel à un contrôle externe.
Ensuite, Mme Sapin a encore dit qu'il fallait changer de fiduciaire tous les cinq ans. Elle oublie simplement qu'elle parle de dispositions contenues dans une loi que nous discutons ce soir, mais qui n'est pas encore appliquée et qui n'était pas en vigueur jusqu'à présent.
Enfin, Mesdames et Messieurs les députés, je crois que l'excellent Pierre Weiss a dit que l'UDC, comme à son habitude, chipotait pour des peanuts. Il est certain en tout cas que jusqu'à présent nous avons eu des coûts très clairs pour cette révision des comptes de l'Etat par l'Inspection cantonale du feu... (Rires.) Euh, des finances ! Excusez-moi, c'est l'émotion ! En 2013, les coûts s'élevaient à 458 880 F... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Patrick Lussi. ...ils ont l'obligation de le dire. Je rappelle simplement que, avec cette nouvelle loi, il y aura une ouverture selon les procédures AIMP. On dit fréquemment, Mesdames et Messieurs - et je l'assume, quitte à entendre des sarcasmes - que l'Union démocratique du centre souvent se trompe, mais j'ai l'impression ce soir une fois de plus que l'Union démocratique du centre a une vision prémonitoire, parce que je me réjouis de voir dans quelque temps, par rapport à la réflexion de M. Weiss, combien nous coûtera exactement cette révision extérieure des comptes.
Enfin, Mesdames et Messieurs les députés, je tenais à vous dire une dernière chose, ainsi qu'à ceux qui nous écoutent et qui nous suivent... (Exclamations.) On est vraiment dans un article très secondaire, quand on regarde tout ce qui fonctionne, tout ce qui est fait. Et on a perdu quelques heures avec des envolées néfastes pour l'intérêt de la communauté, pour l'ensemble de notre communauté genevoise, envolées dans lesquelles on a entendu tout et son contraire, alors qu'il s'agit peut-être simplement d'une disposition mal appréciée, mal évaluée et mal connue que l'Assemblée constituante a rédigée et qui a amené les auteurs du projet de loi à proposer cet article - lequel a d'ailleurs fait l'objet de mon projet de loi - qui est peut-être une erreur.
Et à tous ceux qui disent que la constitution a été votée, je tiens simplement à répondre, pour les députés qui sont là, que l'on en est déjà au cinquième projet de loi visant à modifier la constitution: il y a le droit de vote pour les jeunes, la priorité aux transports publics... Bref, j'admire ce soir ceux qui nous disent que la nouvelle constitution votée est pire que les dix commandements issus du Sinaï et frappés de l'inscription divine... (Rires. Commentaires.) Les poules gloussent, mais ça m'est égal, Mesdames et Messieurs les députés ! L'Union démocratique du centre a l'habitude d'affirmer ses positions... (Commentaires.) ...et je le dis clairement. Ce soir, ce n'est pas un rapport dogmatique, ce n'est pas un rapport UDC, nous cherchons simplement à faire valoir l'intérêt du peuple... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Patrick Lussi. ...l'intérêt général, et je terminerai par ce propos terriblement acide: je me demande si les intérêts de quelques-uns ne sont pas en jeu dans le vote qui va avoir lieu tout à l'heure. (Exclamations. Brouhaha.)
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Je pense que tout a été dit, mais je voudrais quand même corriger certains points. Je vais d'abord parler de la confidentialité, puisque c'est un cheval de bataille du MCG: il faut juste expliquer au MCG que l'accès aux données fiscales est protégé, et que même la Cour des comptes n'y a pas accès. (Commentaires.) Et d'ailleurs cela a incité le groupe UDC... Oui, il s'agit de l'UDC, pardon ! ...à déposer le PL 10928, actuellement en cours de traitement à la commission de contrôle de gestion, pour permettre l'accès, par la Cour des comptes, à des données couvertes par le secret fiscal. (Commentaires.) Alors il faut juste avoir cela en tête, c'est assez amusant... (Remarque.) Non mais je vous le dis ! Donc l'ICF, en étant l'auditeur interne...
Le président. Monsieur Lussi, s'il vous plaît !
M. Ivan Slatkine. ...sera, comme je l'ai dit dans mon introduction, le bras armé pour aller contrôler les services qui sont couverts par le secret, et aucune fiduciaire externe n'aura accès à des données confidentielles, à des données fiscales. Il faut être très clair à ce niveau-là, je voulais le rappeler.
Concernant la Cour des comptes, il y a un argument qu'on n'a pas entendu aujourd'hui et qui pour moi est essentiel: la Cour des comptes a reçu, de la part du peuple, la mission de faire des audits de gestion, des audits de légalité, et chaque année nous recevons entre dix et vingt rapports de la Cour des comptes qui dénoncent des dysfonctionnements. Et le parti socialiste, soutenu par Ensemble à Gauche, veut demander à cette même Cour des comptes de venir nous dire une fois par an que les comptes sont en ordre et que tout roule. N'y a-t-il pas là une contradiction ? Comment le même organe qui viendrait toute l'année nous dire qu'il y a un dysfonctionnement dans tel service et des gaspillages dans tel département pourrait nous dire parallèlement que les comptes sont en ordre et qu'il n'y a aucun problème ? Moi j'y vois là une contradiction: la Cour des comptes est là pour accomplir le mandat que la population lui a confié, c'est-à-dire des audits de gestion et non pas la révision externe des comptes de l'Etat.
Et finalement, le projet de loi qui vous est proposé ce soir, qu'est-ce qu'il fait ? Il renforce le travail de l'audit interne - ex-ICF - parce qu'il lui permet de ne faire que de l'audit interne, il renforce le pouvoir de la Cour des comptes et il permet d'avoir une approbation des comptes par un réviseur externe, ce qui donnera encore davantage de crédit à la qualité des comptes de l'Etat et donc permettra, par rapport à nos créanciers, de donner encore plus de crédit quant à la solidité de notre Etat. Et donner du crédit quant à la solidité financière de notre Etat, c'est permettre de trouver des financements moins chers sur les marchés et donc d'avoir plus de moyens pour les prestations publiques.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous arrivons au terme d'un débat fort intéressant que j'ai suivi en quelque sorte avec un regard externe: en effet, comme on a invoqué l'Inspection cantonale du feu, j'ai cru à un moment donné que je ne serais pas appelé à m'exprimer au nom du Conseil d'Etat en fin de débat et je me suis demandé si ce n'était pas M. Maudet qui devait intervenir... (Rires. Remarque de M. Pierre Maudet.) Il le peut encore !
Une voix. Les finances sont en flamme !
M. Serge Dal Busco. Elles le sont peut-être, et c'est sans doute l'une des raisons, c'est même certainement la raison majeure pour laquelle il nous faut maintenant voter et nous doter d'un dispositif législatif sérieux, moderne, équilibré et clair, tel qu'il est institué par cette loi sur la surveillance.
La surveillance des activités étatiques, Mesdames et Messieurs les députés, est évidemment une tâche fondamentale d'un Etat de droit, et le fait de clarifier les rôles, comme cette loi permet de le faire, est bien sûr un acte fondamental. Outre le fait que nous mettions en oeuvre des volontés de la Constituante, il y a la nécessité - cela a d'ailleurs été dit dans la toute dernière intervention du rapporteur de majorité - d'instaurer un système de surveillance et de contrôle qui nous permette, vis-à-vis de l'extérieur, d'apporter un certain nombre de garanties et de gages. Il en va véritablement de nos finances publiques, de notre crédibilité sur le marché des capitaux, et dieu sait si le canton de Genève est actif - même un peu trop actif à mon goût et au goût de certainement beaucoup de gens dans cette assemblée - sur le marché des capitaux.
Je voudrais également saluer le travail de mon prédécesseur, M. David Hiler, qui a instauré - suite bien sûr à des injonctions et à des souhaits de ce parlement - un mode de faire tout à fait original, à savoir une collaboration, qui est peut-être appelée à se reproduire pour élaborer un projet de loi, avec le parlement et avec les collaborateurs du département des finances, à qui je transmettrai les remerciements que vous avez eu la courtoisie de formuler. Ce travail a été constructif, puisque l'écrasante majorité des articles et des dispositions n'est pas contestée, et seul un petit aspect, ô combien important, a provoqué ce soir un débat de cette ampleur.
Je ne voudrais certainement pas en rajouter au niveau de l'argumentation, mais je souhaiterais quand même, en guise de conclusion, essayer de rassurer les personnes qui se sont exprimées en ayant une certaine crainte, en particulier le rapporteur de minorité. S'agissant de la question des données fiscales et de l'accès à celles-ci - et un certain nombre de personnes professionnellement actives dans la révision l'ont très clairement indiqué - tout va se trouver dans la formulation du cahier des charges de ce mandat de révision externe. Et il est tout à fait clair qu'il n'y a absolument aucune nécessité de permettre - et d'ailleurs il n'y a pas de volonté de le faire - au réviseur externe d'accéder à des données confidentielles relevant du secret fiscal. Il va y avoir une coordination - laquelle aura du reste un impact direct sur le coût de ce mandat - avec l'auditeur interne, l'ex-ICF, qui lui a évidemment accès à toutes ces données. Ce sont des données agrégées, qui seront ensuite vérifiées, et il n'y a absolument pas de nécessité d'aller au-delà de ce que permet aujourd'hui le secret fiscal pour obtenir un contrôle externe des comptes de qualité.
Le deuxième aspect abondamment discuté - peut-être même sous la forme d'un épouvantail par certaines et certains d'entre vous - c'est le risque que des données sensibles tombent en des mains peu recommandables, et certains ont utilisé une épithète, que je ne vais pas répéter ici, en décrivant comme étant l'horreur absolue le fait que l'étranger puisse s'approprier ce genre de données. Il faut savoir qu'un réviseur actif - cela a été dit par des professionnels dans cette salle - doit avoir son siège en Suisse; il ne s'agit pas de multinationales décrites comme étant un épouvantail absolu, et les sociétés de révision sont évidemment soumises à une réglementation parmi les plus sévères au monde, à des règles très claires et à un agrément qui relève d'une loi fédérale sur la surveillance des réviseurs. Il n'y a donc pas de crainte à avoir non plus dans ce domaine-là.
Le troisième élément concerne la question des coûts. Le fait d'effectuer ce travail à l'interne a aussi un coût, Mesdames et Messieurs, c'est clair, et ce coût a même été articulé par l'Inspection cantonale des finances, qui l'a estimé également. C'est simplement du travail qui doit être fait, cela représente un certain nombre d'heures de travail, et cela a un coût. Et pour l'Etat, quand ce sont des gens à l'interne qui font ce travail, c'est un coût interne auquel il faut ajouter des coûts d'infrastructures, de loyers, etc. Bref, je peux vous le garantir, les coûts de production, vu les salaires que nous avons la possibilité de verser à des personnes qui sont très qualifiées à l'intérieur de l'Etat, sont tout à fait comparables - toutes choses étant par ailleurs égales - à ce que nous coûte une révision à l'externe. Il est donc bien évident que, si telle est la décision de ce parlement et que nous devons confier à l'externe - ce qui est hautement souhaitable - des tâches qui ne seraient plus assumées à l'interne, il y aura évidemment un équilibre au niveau des coûts, peut-être partiel, mais un équilibre quand même.
Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais conclure en vous disant qu'il est vraiment de la plus haute importance que notre canton se dote de cette législation, une législation moderne, qui est conforme aux standards nationaux et internationaux les plus élevés. Certains ont évoqué le terme de «Genferei», mais dans ce cas-là il s'agirait d'une Genferei tout à fait positive et tout à fait constructive. Nous devons, comme je vous l'ai indiqué, être particulièrement attentifs à ce contrôle et à la qualité de ce contrôle, précisément aussi parce que nous avons des gages à donner, notamment aux institutions qui nous prêtent de l'argent. Il est bien évident que les conditions sur les marchés vont être très importantes à l'avenir, et je ne doute pas que la qualité des contrôles que nous allons pouvoir opérer va nous rendre également plus compétitifs sur le marché des capitaux, auquel on a malheureusement encore aujourd'hui besoin de s'adresser.
En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à voter ce projet de loi sur la surveillance, avec les amendements que le Conseil d'Etat vous propose, qui sont des amendements techniques, mais grosso modo tel qu'il est sorti des travaux de la commission, qui a fait un excellent travail et que je remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant nous prononcer sur l'entrée en matière de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 11150 est adopté en premier débat par 83 oui contre 11 non.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 14.
Le président. A l'article 15, nous sommes saisis d'un amendement de M. Slatkine, qui vise à ajouter un alinéa 4. Le voici:
«Art. 15, al. 4 (nouveau)
4 Lorsque le service d'audit interne constate ou suspecte un délit ou une fraude dans le cadre d'un contrôle d'une entité visée à l'article 10, alinéa 1, lettre b ou c, il apprécie le niveau de communication approprié.»
Monsieur Slatkine, vous avez la parole.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Monsieur le président, il s'agit d'un amendement purement technique. C'est une proposition de l'ICF qui a été acceptée par la commission mais, en raison de la richesse de nos travaux, nous avons oublié de voter cet alinéa, il ne pouvait donc pas figurer dans la loi. Cependant, il y a eu une unanimité, aucune contestation n'a été formulée, et je vous invite par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, à soutenir cet amendement qui est purement technique.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je vais donc mettre aux voix cet amendement à l'article 15.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 81 oui contre 1 non et 15 abstentions.
Mis aux voix, l'article 15 ainsi amendé est adopté par 76 oui et 22 abstentions.
Mis aux voix, l'article 16 est adopté, de même que l'article 17.
Le président. A l'article 18, nous sommes saisis d'un amendement de M. Jacques Béné, qui consiste à ajouter une lettre d. L'article 18 deviendrait donc le suivant:
«Art. 18 Communication des rapports (lettre d, nouvelle)
Les rapports du service d'audit interne sont confidentiels. Ils sont communiqués:
a) au Conseil d'Etat, qui les communique aux entités concernées;
b) à la commission des finances et à la commission de contrôle de gestion;
c) au président de la Cour des comptes;
d) à l'autorité cantonale de surveillance des fondations et des institutions de prévoyance pour les entités qu'elle surveille.»
La parole est à M. Béné.
M. Jacques Béné (PLR). Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste préciser - je l'ai indiqué dans l'exposé des motifs qui suit mon amendement - que c'est quelque chose qui se pratique déjà aujourd'hui avec l'ICF et qu'il me paraît donc justifié de continuer de cette manière, car évidemment sans ces rapports l'ASFIP ferait un peu moins bien son travail.
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous allons nous prononcer sur cet amendement à l'article 18.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 72 oui et 24 abstentions.
Mis aux voix, l'article 18 ainsi amendé est adopté par 64 oui et 32 abstentions.
Mis aux voix, l'article 19 est adopté.
Le président. A l'article 20, nous sommes saisis d'un amendement de Mme Lydia Schneider Hausser, que voici:
«Art. 20 Organe de révision (alinéas 1 et 2, nouvelle teneur)
1 La révision des comptes de l'Etat est assurée par la Cour des comptes.
2 La révision annuelle des états financiers est effectuée conformément aux normes et pratiques professionnelles en vigueur.»
Il vous est également proposé d'abroger l'article 21. Madame Schneider Hausser, vous avez la parole.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'article 222 de la constitution stipule, dans son alinéa 2, que la révision des comptes de l'Etat est assurée par un organe externe et indépendant désigné par le Grand Conseil, qui peut être la Cour des comptes. Cela a été dit et je le répète. Pour nous, socialistes, l'Etat ne peut pas être réduit à une comparaison avec une entité ou une entreprise privée, dont on a cité les normes comptables. En effet, l'Etat est voué par définition à rester, à durer, à être stable. Les habitants d'un canton ne peuvent pas non plus être comparés à des clients. Les comptes de l'Etat de Genève, comme ceux de toutes les collectivités publiques de Suisse, sont régis par un modèle comptable harmonisé - le MCH2 - et en plus, à Genève, nous sommes actuellement complètement IPSAS-compatibles. Ces cadres comptables offrent une transparence et une uniformité des normes importantes, qui représentent déjà une garantie de qualité pour des potentiels bailleurs ou des agences de notation. En effet, quand on lit ce que les agences de notation ont dit ces dernières années, on voit que l'un des principaux critères pour attribuer la note au niveau de la gestion de l'Etat, c'est la transparence financière; c'est cela qui prime, plus que la tenue des comptes ou le rapport qu'a lu M. Stauffer tout à l'heure, qui est un rapport d'audit standard que l'on peut rédiger quand tout va bien.
Et il faut ajouter à cela toutes les normes qu'on a déjà, qui sont structurellement importantes et qui permettent une transparence de l'Etat. On a très clairement adjoint dans cette loi les deux niveaux de surveillance que sont l'ICF - qui devient maintenant le service d'audit interne, lequel s'assurera des systèmes de contrôle interne - et la Cour des comptes, avec ce qu'on lui a ajouté il n'y a pas si longtemps, c'est-à-dire l'évaluation des politiques publiques, qui appartenait avant à la CEPP, et l'évaluation de la bonne gestion. Je le répète, l'Etat ne peut pas être comparé à une entreprise privée, et je vous rappelle que si, pas plus tard qu'il y a six ans, l'Etat avait été géré de la même manière que les entreprises privées, on n'aurait simplement pas pu sauver nos entreprises privées bancaires suisses d'un certain marasme qui était déjà assez grand.
Il nous paraît donc tout à fait important de pouvoir garder une distance par rapport à ces normes et à ces mécanismes qui sont dédiés principalement aux entreprises privées, afin que justement l'Etat conserve une notoriété qui ne pourrait pas obtenir l'absolution dans une révision privée de ses comptes. Et il faut aussi relever que, au niveau de la population, cela a été confirmé par la constitution: qu'on soit pour ou contre, maintenant on vit avec, et on a donné un mandat potentiel à la Cour des comptes; donc soit on se dit que l'on procède à une révision de la constitution, et on devrait quasiment le faire en acceptant cette loi, soit on estime qu'il y a eu des débats suffisamment importants pour que cela ait été inscrit dans la constitution, que le peuple a acceptée.
Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes vous demandent encore une fois d'accepter cet amendement qui va dans le sens de garder un Etat tel que nous pouvons le connaître en Suisse et à Genève actuellement, c'est-à-dire qui soit un peu indépendant du privé et des normes de contrôle privées, en tout cas au niveau des comptes. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je vais passer la parole à M. Eric Stauffer et aux deux rapporteurs, puis nous voterons.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous venez d'entendre l'auteur de cet amendement et, peu avant, nous avons entendu notre nouvel grand argentier...
Une voix. Nouveau !
M. Eric Stauffer. Oui, notre nouveau grand argentier, excusez-moi, c'est un peu tard ! ...qui est venu nous expliquer de manière plus calme, plus posée et de façon non insultante que Genève avait besoin de se doter d'un système d'audit performant, parce qu'il est vrai que si on fait une genevoiserie - et le terme «genevoiserie», en tout cas dans la bouche du MCG, a été utilisé pour le cas où nous conférerions le contrôle de l'Etat à l'Etat lui-même - il est évident que les offices de cotation pourraient éventuellement changer les annotations financières du canton de Genève du fait de cette genevoiserie. Et s'agissant des implications - parce que ça peut paraître anodin, comme ça, quand on en discute au coin d'un parlement, un jeudi soir - si on passait ne serait-ce que de AAA à AA ou, pire encore, à B+, eh bien ça se traduirait, Mesdames et Messieurs, par une perte en dizaines de millions par année, car les offices qui prêtent de l'argent et qui font des crédits à la République et canton de Genève prendraient davantage d'intérêts à cause du risque potentiel. Evidemment ce n'est pas anodin, mais il est vrai que ce discours un peu technique échappe aux gens de la gauche, pour lesquels... (Exclamations.) ...dès que les caisses sont vides, il faut augmenter les impôts... (Exclamations.) Eh oui, c'est bien connu, bien sûr ! Nous, au MCG, on a évidemment une autre variante, qu'on défend parfois contre vents et marées, parfois contre notre propre alliée qu'est censée être l'UDC: nous voulons une économie forte pour pouvoir faire du social efficace.
D'autre part, durant mon discours, Monsieur le président - et je parle sous votre haute autorité de contrôle - vous ne m'aurez jamais entendu insulter nommément un député et encore moins le traiter de bouffon; je mets donc simplement en garde ceux qui prétendent être nos alliés: à la prochaine incartade, il pourrait y avoir des mesures de rétorsion... (Exclamations. Huées.) ...qui feraient qu'une certaine alliance pourrait disparaître aussi vite qu'elle est venue. C'est un avertissement que je vous donne de manière extrêmement solennelle...
Le président. Sur le sujet, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. ...et il n'y aura pas d'autre avertissement de la part du MCG. (Chahut.) Nous pouvons ne pas être d'accord sur des sujets, Mesdames et Messieurs, mais jamais le MCG ne se permettrait de traiter un élu UDC de bouffon, et j'attends vos excuses, Monsieur Lussi. (Applaudissements. Commentaires.)
M. Roger Deneys (S). Je dois dire que j'ai beaucoup de peine à comprendre la rhétorique de mon préopinant MCG; franchement, je ne saisis pas très bien pourquoi il peut lui déplaire d'avoir un réviseur interne, alors que ça se fait dans toutes les grandes collectivités publiques et les autres cantons suisses. Puis j'ai réfléchi au point suivant de l'ordre du jour, qui consiste à faire des cadeaux aux promoteurs... (Exclamations.) ...et me suis dit que c'est marrant: alors que le MCG, soi-disant parti du peuple, va faire des cadeaux à tous les promoteurs privés de la république, comme par hasard il faudrait critiquer la gauche caviar, dont les membres seraient des profiteurs, et comme par hasard il faudrait détourner l'attention et prétendre que la fonction publique travaille mal. (Commentaires.) Je suis assez surpris parce qu'en réalité, dans le parti de mon préopinant, environ 50% de la députation est composée de fonctionnaires ou d'ex-fonctionnaires; je n'ose donc imaginer que son leader suprême est en train de penser que ses troupes sont incompétentes ou mal outillées pour la fonction publique. (Exclamations. Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Roger Deneys. Mais c'est ce que je crois avoir compris de ses propos !
En l'occurrence, la proposition socialiste découle du bon sens, comme je l'ai dit tout à l'heure, car l'Etat n'est pas une entreprise privée. Cela se fait dans d'autres collectivités publiques et les compétences professionnelles des réviseurs au sein de l'Etat sont les mêmes qu'à l'extérieur. De plus, il n'y a aucune raison de vouloir confier des mandats à des entreprises privées quand on ne connaît pas les coûts à ce stade, et on ne peut en tout cas pas prétendre par principe que les entreprises privées seraient moins chères que le service public. Je vous en donne deux exemples, Mesdames et Messieurs les députés: s'agissant de la santé, est-ce que l'hôpital public est moins cher ou plus cher que les cliniques privées ? Je vous laisse répondre ! (Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Roger Deneys. Et le deuxième exemple... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Roger Deneys. Le deuxième exemple, Monsieur le président, c'est bien entendu les écoles. Qu'est-ce qui coûte le moins cher: l'école publique ou l'école privée ? (Commentaires.) Qu'est-ce qui offre la meilleure utilité à la collectivité ? Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, c'est clairement le service public, parce qu'il est au service de tous ! Il est au service de toutes et tous, malgré les attaques des libéraux, malgré les attaques des populistes qui sont vendus aux promoteurs.
Mesdames et Messieurs les députés, il faut donc voter cet amendement socialiste pour que ce soit la Cour des comptes qui fasse ce travail de révision et je vous invite par conséquent à l'adopter. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Alberto Velasco. (Brouhaha. Un instant s'écoule.)
Une voix. On vote !
Le président. La parole est à M. Alberto Velasco ! (Exclamations. Brouhaha.)
M. Alberto Velasco (S). Merci beaucoup, Monsieur le président. Je dois vous dire que j'ai été profondément choqué par les menaces de type factieux que le MCG nous a faites tout à l'heure. (Exclamations.) Il est extrêmement choquant... (Commentaires.) ...dans un parlement démocratique, d'assister à un tel langage. (Brouhaha.) C'est vrai que, pour vous, la notion de démocratie est difficile mais, vous savez, il faut vous y faire peu à peu.
Mesdames et Messieurs, en réalité ce qui se joue ce soir... Et je félicite les libéraux ! Je vous félicite, parce que vous avez réussi, malgré tout, pendant des années, à instaurer l'Etat libéral, et il est là. D'abord, vous avez commencé par imposer le catéchisme du marché - marché de la santé, marché des arts, marché du sport... (Commentaires.)
Une voix. Marché de la main-d'oeuvre !
M. Alberto Velasco. Tout est devenu un marché, Mesdames et Messieurs ! Tout est devenu un marché, et c'est vous qui avez instauré ça !
Ensuite, Mesdames et Messieurs... (Brouhaha.) Monsieur le président, est-ce que je peux m'exprimer ?
Le président. Oui, je veux bien !
M. Alberto Velasco. Ensuite vous avez procédé à des privatisations... (Chahut.)
Le président. S'il vous plaît, un peu de silence, qu'on puisse aller jusqu'à la fin de ce débat sereinement !
M. Alberto Velasco. Ensuite vous avez procédé à des privatisations... (Commentaires.) Mais oui, il faut écouter, parce que nous, on subit ! On subit, Mesdames et Messieurs, vos initiatives ! Vous avez ensuite procédé à des privatisations de services publics - santé, eau, électricité, et j'en passe. Et aujourd'hui on en est à la phase finale, où vous transformez l'Etat en une entreprise privée. (Commentaires.) La réalité c'est ça, Mesdames et Messieurs ! Vous transformez l'Etat en une entreprise privée à votre service, ou plutôt au service direct de vos entreprises. C'est extrêmement grave, ce que vous faites, et ce qui se passe ce soir est choquant, Mesdames et Messieurs. C'est choquant ! Et il est évident que nous ne voterons pas ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que j'ai peut-être commis une incartade de langage tout à l'heure... (Exclamations.) ...en qualifiant quelqu'un de bouffon, mais «bouffon» est pour moi quelque chose de rigolo, c'est quelqu'un qui amuse le peuple. En définitive, j'admets la remarque de M. Stauffer, je retire le terme de «bouffon» et préfère utiliser l'expression «bonimenteur de trottoir». (Rires. Exclamations. Applaudissements.)
Le président. Monsieur Lussi, on en reste à l'amendement !
M. Patrick Lussi. Cela dit, Mesdames et Messieurs les députés, ceux qui me connaissent savent que je ne change pas d'avis, et je suis prêt à aller beaucoup plus loin... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...même si la menace d'une scission arrive, que je dois être largué... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Patrick Lussi. Mon parti m'évincera certainement, et j'aurai le plaisir de siéger en auditeur libre ici... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Patrick Lussi. ...mais je ne changerai pas d'idée, parce qu'il y a des choses qui doivent être dites, Mesdames et Messieurs les députés, et c'est certainement la différence que l'on voit ce soir entre un parti d'importance nationale qu'est l'Union démocratique du centre et un groupuscule local, aussi fort soit-il, qu'est le MCG. (Exclamations. Chahut.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, s'il vous plaît, un peu de tenue !
M. Patrick Lussi. La compresse étant suffisamment forte, je pense, je tiens maintenant à en venir à l'amendement. Mesdames et Messieurs les députés, en commission nous avons largement discuté... (Chahut.) ...de la Cour des comptes, et il semblerait que ce point ait été écarté... (Le président agite la cloche.) ...raison pour laquelle, une fois de plus, juste pour le plaisir d'être désavoué... (Remarque.) Non, pas bouffon ! Je ne vous fais pas rire pour le moment...
Je pense que ce serait une erreur, sur le siège maintenant, de dire que la Cour des comptes pourrait se charger de ce travail; elle ne le pourrait pas, puisqu'elle l'a refusé à plusieurs reprises, ou du moins elle a donné des explications pour montrer qu'elle n'était pas compétente pour le faire. Par conséquent, Monsieur le président, je demande une fois de plus le renvoi de cet objet en commission, pour que l'on décide si la Cour des comptes est vraiment habilitée à faire ce travail.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je vais laisser la parole à M. Slatkine sur le renvoi en commission.
M. Ivan Slatkine (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je crois que, au stade où on en est, il ne s'agit pas de renvoyer cet objet en commission. L'amendement qui vous est proposé par le parti socialiste, et plus précisément par Mme Schneider Hausser, est pour le moins surprenant. Madame Schneider Hausser, vous avez passé toutes les séances de commission à travailler sur ce projet de loi, et penser qu'il suffit de voter votre amendement pour que la loi soit acceptable, ce n'est juste pas possible ! Vous remettez en cause toute l'architecture de ce projet de loi, car c'est tout le chapitre IV qu'il faudrait revoir si votre amendement était accepté ! Monsieur le président, j'ai donc envie de dire... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Ivan Slatkine. ...qu'il faut refuser le renvoi en commission ainsi que l'amendement du parti socialiste, mais si par hypothèse cet amendement venait à être accepté par une majorité, alors à ce moment-là, oui, il faudrait renvoyer ce projet de loi en commission, parce qu'il n'aurait plus aucun sens.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je mets donc aux voix cette demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11150 à la commission de contrôle de gestion est rejeté par 65 non contre 27 oui et 2 abstentions.
Le président. Nous poursuivons notre débat, et je passe la parole à Mme Engelberts.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, j'aimerais juste proposer une motion d'ordre: je ne sais pas si c'est le printemps et qu'il fait beau, mais je crois que ça ne nous a pas tellement inspirés, si ce n'est d'une manière excessive, avec des personnes qui s'exposent à faire des références historiques complètement démentes. Moi je crois qu'on n'est plus à notre place ici; on a meilleur temps d'aller dehors, de fumer une cigarette ou de faire ce qu'on veut, et demain on vote ce projet de loi. (Brouhaha.)
Le président. Vous voulez interrompre le débat, Madame la députée ?
Mme Marie-Thérèse Engelberts. J'aimerais juste qu'on vote une motion d'ordre pour arrêter le débat maintenant. (Brouhaha.)
Le président. Très bien. Nous allons donc voter sur cette motion d'ordre visant à suspendre la séance.
Mise aux voix, cette motion d'ordre est rejetée par 68 non contre 17 oui et 4 abstentions.
Le président. Nous allons maintenant nous prononcer sur l'amendement de Mme Schneider Hausser et autres signataires, que je vous relis:
«Art. 20 Organe de révision (alinéas 1 et 2, nouvelle teneur)
1 La révision des comptes de l'Etat est assurée par la Cour des comptes.
2 La révision annuelle des états financiers est effectuée conformément aux normes et pratiques professionnelles en vigueur.»
Cet amendement consiste également à abroger l'article 21.
Des voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenus ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien, il en sera fait ainsi.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 32 oui (vote nominal).
Mis aux voix, l'article 20 est adopté, de même que les articles 21 à 36.
Le président. A l'article 37, nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat visant à remplacer dans la seconde phrase «rapport de gestion» par «rapport d'activité». En voici donc la teneur:
«Art. 37, seconde phrase (nouvelle teneur)
[...] La Cour motive succinctement par une réponse écrite et dans son rapport d'activité les cas où elle décide de ne pas entrer en matière.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 72 oui et 20 abstentions.
Mis aux voix, l'article 37 ainsi amendé est adopté par 67 oui contre 2 non et 23 abstentions.
Mis aux voix, l'article 38 est adopté, de même que les articles 39 à 51.
Le président. Nous passons à l'article 52 souligné, qui modifie d'autres lois. (Commentaires.) L'amendement à l'article 51 sera traité au troisième débat ! Nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat concernant l'alinéa 1 de cet article 52 souligné. Le voici:
«Art. 52 (souligné) Modifications à d'autres lois (alinéa 1, nouvelle adjonction)
1 La loi sur l'information du public, l'accès aux documents et la protection des données personnelles, du 5 octobre 2001 (A 2 08), est modifiée comme suit:
Art. 41, al. 2 (nouvelle teneur)
2 Les compétences et les règles de fonctionnement de la Cour des comptes sont réservées, de même que celles de l'office cantonal de la statistique.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 76 oui contre 4 non et 14 abstentions.
Mis aux voix, l'alinéa 1 (Loi sur l'information du public, l'accès aux documents et la protection des données personnelles) ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'alinéa 2 (Loi sur l'exercice des droits politiques) est adopté, de même que l'alinéa 3 (Loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève).
Le président. Nous sommes maintenant saisis d'un amendement du Conseil d'Etat visant à ajouter un alinéa 4 à l'article 52 souligné. Je vous le lis:
«Art. 52 (souligné) Modifications à d'autres lois (alinéa 4 nouveau, les alinéas 4 à 12 anciens devenant les alinéas 5 à 13)
4 La loi sur la formation continue des adultes, du 18 mai 2000 (C 2 08), est modifiée comme suit:
Art. 12, al. 3 (nouvelle teneur)
3 Le Conseil d'Etat mandate la Cour des comptes pour établir un rapport d'évaluation tous les 4 ans. Il le transmet au Grand Conseil.»
Mis aux voix, cet amendement (création d'un alinéa 4 relatif à la loi sur la formation continue des adultes) est adopté par 61 oui contre 2 non et 26 abstentions.
Mis aux voix, l'alinéa 5 (Loi sur la surveillance des fondations de droit civil et des institutions de prévoyance) est adopté, de même que les alinéas 6 (Loi sur l'organisation judiciaire) à 13 (Loi sur les allocations familiales).
Mis aux voix, l'article 52 (souligné) est adopté.
Troisième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 50.
Le président. A l'article 51, nous sommes saisis d'un amendement de Mme Lydia Schneider Hausser, que voici:
«Art. 51, al. 5 (nouveau)
5 Avant la fin de l'exercice 2019, le Conseil d'Etat présente un rapport d'évaluation portant sur l'opportunité de poursuivre l'attribution de la révision des comptes à un mandataire extérieur spécialisé tel que prévu par les articles 20 et suivants de la présente loi.»
La parole est à Mme la députée Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, je pense que vous avez tous compris... (Exclamations. Commentaires.) Etant donné que visiblement c'est l'organe... (Chahut.) Non, je vais quand même finir !
Le président. S'il vous plaît !
Mme Lydia Schneider Hausser. Vu que c'est l'organe externe qui a été choisi par ce Grand Conseil pour la révision des comptes, nous proposons ici d'avoir une évaluation formelle à la fin d'un mandat de quatre ans, ce qui paraît logique en termes de révision des comptes, pour savoir si nous poursuivons ce système-là ou si nous revenons à un contrôle des comptes à l'intérieur de l'Etat ou du grand Etat, en tout cas au niveau de la Cour des comptes, comme la constitution le permet. (Remarque.)
M. Renaud Gautier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le diable gît dans les détails ! Cette très modeste modification inverse totalement le sens du travail que l'on fait dans ce parlement ! En effet, je vous rappelle que d'après cette loi c'est le parlement qui, sur proposition du Conseil d'Etat, va définir quel est l'auditeur externe, or là tout à coup c'est le Conseil d'Etat qui décide. C'est donc très fondamentalement changer le sens du contrôle des comptes que de demander au Conseil d'Etat de nous dire si c'est bien ou pas. C'est notre parlement qui fait ce travail, ce n'est pas le Conseil d'Etat ! Donc n'acceptez surtout pas cet amendement, parce que de fait vous changez le sens de la loi sur le contrôle. (Brouhaha. Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je vais mettre aux voix cet amendement à l'article 51. Le vote est lancé.
Une voix. Vote nominal ! (Brouhaha.)
Une autre voix. Trop tard !
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 52 non contre 32 oui et 8 abstentions.
Mis aux voix, l'article 51 est adopté.
Mis aux voix, l'article 52 (souligné) est adopté.
Le président. Nous nous prononçons maintenant sur l'ensemble de ce projet de loi ainsi amendé.
M. Eric Stauffer. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous êtes soutenu ou non ?
M. Eric Stauffer. Mais oui, largement !
Le président. Pas tout à fait largement, mais c'est le cas. (Remarque.) Nous passons donc au vote nominal.
Mise aux voix, la loi 11150 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 62 oui contre 23 non et 10 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)