République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2032-A
Rapport de la commission des affaires communales, régionales et internationales chargée d'étudier la proposition de motion de Mme et MM. Guy Mettan, Vincent Maitre, Serge Dal Busco, Philippe Schaller, Anne Marie von Arx-Vernon, Michel Forni, Bertrand Buchs, Guillaume Barazzone, Philippe Morel, François Gillet : Amélioration du trafic pendulaire dans le cadre du projet d'agglomération : pour la création d'un fonds d'équipement transfrontalier franco-genevois
Ce texte figure dans le «Recueil des objets déposés et non traités durant la 57e législature».
Rapport de majorité de M. Sandro Pistis (MCG)
Rapport de minorité de M. Philippe Morel (PDC)

Débat

Le président. Nous attaquons à présent le rapport sur la proposition de motion 2032. Nous sommes en catégorie II avec quarante minutes. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.

Présidence de M. Antoine Barde, premier vice-président

M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion présentée par le groupe PDC et soutenue par certains élus d'autres partis n'a pas été retenue par la majorité des commissaires lors de nos travaux. Cet écrit vise la constitution d'un fonds dans le but de souscrire à des projets d'équipement transfrontalier. Vous l'aurez compris, ce fonds serait alimenté non seulement par la France, mais tout particulièrement par les Genevois. Cette idée, qui nous a été décrite comme une alternative à la problématique de financement d'équipements transfrontaliers, n'a pas été retenue. Lors de l'étude, son premier signataire nous dit que l'argent a de la peine à se cristalliser pour la création de fonds d'équipement public transfrontalier, que des critiques portant sur les financements français ont été mentionnées et que si une agglomération était envisagée de manière commune, il était nécessaire de lancer des projets communs avec des financements communs. Lors des auditions, il est apparu que cette motion prévoit la constitution d'un fonds destiné à réaliser des investissements en France voisine. Lors de nos travaux, il nous a été rappelé tout particulièrement que la constitution d'un fonds est contraire à la notion de bonne gestion publique, puisqu'il s'agit d'affecter des sommes à des projets qui n'existent pas. Il a également été ajouté qu'il est par contre envisageable d'avancer projet par projet, loi par loi, de manière que des ordres institutionnels respectifs puissent fonctionner. Dès lors, à la lumière de ces explications et au nom de la majorité de la commission, je vous engage à ne pas soutenir cette motion.

M. Philippe Morel (PDC), rapporteur de minorité. Il s'agit ici de financement et, pour une fois, l'argent sera le nerf de la mobilité. En effet, le financement des grandes infrastructures, qu'elles soient en Suisse, en France ou transfrontalières, est assuré par les dispositions prises en Suisse et en France. Vous savez très bien que du côté suisse, les 850 millions qui ont été attribués par la Confédération à l'agglomération franco-valdo-genevoise servent au financement du CEVA et des lignes de tram TCOB et TCMC. Les grandes infrastructures seront financées, les grandes infrastructures seront construites. Or elles ne fonctionneront pas si, à une échelle inférieure, il n'y a pas d'infrastructures plus légères mais tout aussi importantes, qui seront finalement le nerf de la mobilité. Parmi ces infrastructures, il y a les P+R pour lesquels un financement n'est pas assuré. Il est fantastique d'avoir un CEVA, il est fantastique d'avoir des lignes de tram, il est fantastique d'avoir des moyens de déplacement rapides entre la France et la Suisse, et entre la Suisse et la France. Mais encore faut-il pouvoir y accéder et les utiliser ! La construction des P+R permettra de les utiliser. S'ils ne sont pas construits, nous continuerons à avoir une augmentation du trafic dans les années à venir. Comme vous le savez, l'augmentation des pendulaires est liée, d'une part, au problème de la construction en Suisse et des nécessités pour certains de se loger en France et, d'autre part, à la nécessité pour la Suisse d'avoir une importation de main-d'oeuvre française qui fait fonctionner une partie de notre économie. Si on ne finance pas ces petits morceaux d'infrastructures, qui coûtent le moins cher mais sont peut-être - encore une fois - le nerf de la mobilité, nous aurons de magnifiques superstructures qui ne pourront que peu être utilisées. La création de ce fonds est donc pragmatique. Elle correspond à un besoin et à une nécessité, et nous vous recommandons, malgré le score du vote concernant cette proposition de motion en commission, de la soutenir avec enthousiasme et conviction. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. François Lefort (Ve). Je risque de faire de la peine au rapporteur de majorité et m'en excuse par avance. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion invite le Conseil d'Etat à créer un fonds d'équipement conjoint entre Genève et la France, destiné à participer au financement d'infrastructures liées au trafic d'agglomération. C'est une bonne idée, mais c'est une vraie et fausse bonne idée. C'est une idée qu'on peut avoir au pays de Oui-Oui, mais pas à Genève ! Non pas parce que cette fausse bonne idée ne serait qu'un chiffon rouge agité devant la bestiole populiste et son fonds de commerce anti-frontaliers. Non, pas du tout ! (Huées.) Mais parce que cette proposition est tout bonnement infaisable. Monsieur le président, j'ai cru entendre des cris du côté de votre extrême droite.

Le président. S'il vous plaît ! Poursuivez, Monsieur le député !

M. François Lefort. Merci. Cette proposition est tout bonnement infaisable en pratique. Avec qui le faire, ce front transfrontalier ? Avec les départements, la région, les communes, les communautés de communes, les territoires ou les pays, tout le monde ? C'est une généreuse idée mais elle est infaisable, parce que ce genre d'idées ne se décrète pas au Grand Conseil genevois. Cela se discute avec les partenaires, qui ont par ailleurs déjà leurs propres fonds d'équipement aux différents niveaux que je viens de citer, et ils ont aussi leurs priorités. La méthode est autre. C'est celle que nous poursuivons déjà avec la France voisine, à savoir celle des groupements locaux de coopération transfrontalière, comme celui du téléphérique de Genève ou celui du Grand Genève. C'est le financement direct, projet par projet, de projets d'équipement frontaliers, cofinancés par les deux parties. Voilà la méthode ! Elle est plus simple, et elle est chaque fois combattue par le MCG et l'UDC. Ce fut le cas récemment avec le référendum sur le projet de loi 11115 - dont le vote aura lieu le 18 mai - qui doit partiellement financer cinq P+R à la frontière. (Commentaires.) Elle est combattue... Monsieur le président, il y a encore des cris à votre extrême droite.

Le président. S'il vous plaît ! Poursuivez.

M. François Lefort. Cette méthode découle du projet d'agglomération de deuxième génération, elle découle de la charte d'engagement signée par les parties prenantes au projet d'agglomération, en particulier en matière de transports publics. Cette méthode, ce sont des objectifs communs de coopération franco-genevoise par lesquels le Conseil d'Etat s'est engagé, sous réserve de notre approbation - c'est-à-dire l'approbation du Grand Conseil - à participer au financement à hauteur de 240 millions d'euros sur dix ans de projets d'intérêt significatif commun pour l'agglomération, donc pour la population genevoise. Ces projets ont été identifiés, ils sont annexés à la charte d'engagement. Voilà la méthode ! Il s'agit d'avancer projet par projet, avec l'acceptation du Grand Conseil. C'est une méthode transparente, démocratique et qui nous convient. C'est cette méthode-là qu'il faut défendre et poursuivre, et non celle d'un fonds d'équipement transfrontalier opaque, à la gestion tarabiscotée. Malgré toute la peine que je viens de faire au rapporteur de majorité, les Verts ne soutiendront bien sûr pas cette motion et, comme en commission, s'abstiendront.

M. Stéphane Florey (UDC). Tout d'abord, Monsieur le président, vous prierez M. Lefort de bien vouloir s'abstenir de proférer des âneries et des mensonges... (Rires.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Stéphane Florey. ...car le projet de loi sur les P+R, nous l'avons soutenu ! Je vous remercie. Maintenant, concernant cette motion... (Brouhaha.) Comme cela a été dit, cette motion est dangereuse pour plusieurs raisons. D'abord, la voter, ce serait s'assurer une perte totale de maîtrise de ce que nous voulons faire avec notre argent. Nous avons dit oui aux P+R pour certaines raisons, nous avons accepté de les subventionner. Il a aussi été rappelé qu'il y a le téléphérique qui fait déjà partie des subventions transfrontalières, puisque Genève paie pour ce genre de projets depuis des années. Par contre, si nous créons un fonds, nous allons l'alimenter avec un chèque en blanc, et on perdra totalement la maîtrise de ce que le Grand Conseil voudra bien payer à nos voisins français. L'accepter, ce serait aussi revenir en quelque sorte sur la parole que nous avait donnée l'ancien conseiller d'Etat Pierre-François Unger. A la commission des travaux, lors de l'étude de ce fameux projet de loi sur les P+R, il nous avait assuré - puisqu'il était fait mention du montant de 240 millions d'euros «promis», entre guillemets, et conditionnés à l'acceptation franc par franc de ce Grand Conseil - que nous en garderions la maîtrise, puisque chaque franc ferait l'objet d'un projet de loi. D'une certaine manière, accepter cette motion rimerait donc à revenir sur cette parole. Il y aurait de l'argent dans le fonds, on ne serait donc plus obligé de présenter des projets venant de ces 240 millions. J'en reviens à dire que, sur ce point-là, nous perdrions la totale maîtrise de nos investissements. Maintenant, il faut quand même rappeler que Genève reverse une partie des impôts à la source qui, eux, servent à subventionner des infrastructures dans les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie. Cette motion ne fait que doublon - voire «triplon» - avec ce qui est déjà existant. Elle ne sert donc à rien. C'est pour ça que le groupe UDC la refusera. Je vous remercie.

Présidence de M. Antoine Droin, président

M. Patrick Saudan (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, je vais être bref après mes préopinants. L'idée qui sous-tend cette motion - c'est-à-dire améliorer le financement de projets communs transfrontaliers - a été bien accueillie par le groupe PLR. Mais nous devons rejoindre les propos du département et du conseiller d'Etat Pierre-François Unger à l'époque, ainsi que de l'ensemble de la commission - puisqu'il y a eu une grande majorité dans cette commission - à savoir que le moyen proposé de faire un fonds d'équipement transfrontalier est simplement inadéquat. Cela a d'ailleurs même été reconnu dans le rapport de minorité, qui est un beau rapport de minorité. Monsieur le président, vous transmettrez à M. Lefort, pour rétablir la cohérence des débats, que le rapporteur de minorité est M. Morel et celui de majorité M. Pistis. Mais même M. Morel le reconnaît, puisque à la fin de son excellent rapport de minorité, il nous dit espérer que cette idée donnera d'autres idées pour améliorer le financement des projets du Grand Genève. En fait, le groupe PLR a simplement choisi la voie de la sagesse, suivra le Conseil d'Etat et vous propose de ne pas prendre en considération cette motion, même si nous souscrivons à l'idée qui la sous-tend. Je vous remercie.

M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, sur le fond, cette motion va clairement dans le bon sens pour soutenir un financement transfrontalier de certaines infrastructures, dont toute l'agglomération du Grand Genève a besoin. Sur la forme, il y a effectivement une problématique en termes de gouvernance. Pas besoin de rappeler que nous vivons aujourd'hui dans une agglomération de 800 000 habitants. Il y a un chiffre qu'il est toujours intéressant de rappeler, c'est qu'il y a environ 500 000 passages quotidiens de frontière d'un sens et de l'autre dans le Grand Genève. Nous avons besoin d'infrastructures de mobilité pour pouvoir relier la France voisine, le canton de Genève et celui de Vaud. Il y a de plus en plus de Genevois qui habitent en France. On connaît la problématique du logement et les coûts du logement qui font qu'un certain nombre de personnes sont obligées d'aller habiter en France. Il y a aussi de plus en plus de Français qui travaillent en Suisse, de plus en plus de Genevois qui font leurs courses en France - même si on peut le déplorer au passage, parce que c'est dommage pour les commerçants du canton de Genève - de plus en plus d'échanges entre la France voisine et Genève de manière générale. Et, nous n'en doutons pas, il y en aura de plus en plus avec l'arrivée du CEVA. Nous avons donc besoin d'infrastructures comme le CEVA, qui a aussi été cofinancé de manière transfrontalière. On a parlé des trams transfrontaliers - qui sont très importants - et des fameux P+R transfrontaliers, c'est-à-dire qu'ils seront construits en France voisine à l'entrée de l'agglomération genevoise. Ça, c'est vraiment important. Ce serait se tirer une balle dans le pied que de ne pas cofinancer ces P+R qui permettent aux frontaliers de parquer leur voiture pour entrer dans Genève en transports publics ou avec la mobilité douce. Il y a d'autres financements transfrontaliers, comme la fameuse ligne du Tonkin - le barreau sud - qui pourrait un jour relier Evian au Valais et bien entendu servir aux Genevois et à l'agglomération dans son ensemble.

Le problème est un problème de gouvernance. Aujourd'hui, nous n'avons pas de gouvernance au niveau du Grand Genève qui pourrait gérer ce fonds, comme on peut le lire dans le rapport. Quelle serait l'entité décisionnaire ? Les socialistes pensent que c'est une bonne idée que de financer des projets transfrontaliers, mais il faut le faire projet par projet. C'est la méthode retenue aujourd'hui dans le projet d'agglomération. Je crois qu'il faut poursuivre cette méthode. Du coup, le parti socialiste refusera presque à contrecoeur cette proposition. Nous disons oui à des fonds transfrontaliers projet par projet, mais non à un fonds dont on ne sait pas exactement à quoi il va servir et surtout comment et par qui il sera géré. Merci beaucoup. (Quelques applaudissements.)

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, peu importe les raisons qui vous animent ce soir. L'essentiel est de voter non à cette proposition de motion. Eh oui, évidemment ! Vous pensez bien que venir devant ce Grand Conseil aujourd'hui, après l'élection du mois d'octobre de l'année passée, qui a vu certains partis fondre comme des glaçons au soleil et d'autres grandir comme des champignons... Il serait complètement utopique... (Exclamations.) ...de voter un tel texte servant à financer - encore ! - des infrastructures en France. J'aimerais souligner la chose suivante, Mesdames et Messieurs, et j'aimerais que le gouvernement prenne ses responsabilités, notamment M. le président du Conseil d'Etat: dans l'accord franco-suisse de 1973 - à savoir ces fameux 3,5% que nous reversons aux départements de l'Ain et de la Haute-Savoie pour construire des infrastructures et qui représentent la bagatelle de 300 millions de francs par année - il est mentionné que les préfets de l'Ain et de la Haute-Savoie doivent venir une fois par année rendre compte au gouvernement des infrastructures qu'ils ont financées avec l'argent ainsi versé par Genève. Eh bien figurez-vous qu'apparemment, ce n'est plus le cas. En tout cas, j'ai une IUE qui l'atteste, puisque j'avais posé cette question il y a quelques années et que ça faisait plus de dix ans que personne n'était plus venu dire ce qui était fait des centaines de millions que nous payons à la France.

Mesdames et Messieurs, je veux bien que ce Grand Conseil joue les vertueux et vienne dire qu'il faut aider les pays en voie de développement. Mais depuis quand la France est-elle un pays en voie de développement qui a besoin de la manne financière suisse ? J'aimerais quand même vous signaler que le budget de l'armée française avoisine les 36 milliards d'euros. Je voudrais bien savoir en vertu de quoi nos amis français n'arrivent pas à financer quelques parkings ou parkings-relais avec leurs propres transports en commun. Il faut qu'on se rende compte que si on voulait un échange équilibré, le système de transports publics français de l'autre côté de la frontière - quel est déjà son nom ? Ce n'est pas la RATP - aurait aussi pu pousser les transports publics jusqu'à Genève comme nous l'avons fait. Eh bien non, ils ne l'ont pas fait ! Il n'y a que les bus des TPG ! En plus, on a été contraint d'immatriculer ceux-ci en France, d'y créer une société au nom des Transports publics genevois pour pouvoir amener et ramener des Français qui viennent travailler et gagner leur argent à Genève. Mesdames et Messieurs, la plaisanterie a assez duré. C'est non à ce projet ! Je vous rappelle que le peuple genevois va prochainement devoir se prononcer sur le financement de parkings en France par les Genevois, le référendum ayant abouti au nombre de signatures nécessaires. Je vous invite bien évidemment à gifler ceux qui ont initié ce genre de projets de lois qui servent à financer des parkings de l'autre côté de la frontière avec l'argument suivant: «Mais vous comprenez, Monsieur le député, ça coûte moins cher de faire des parkings en France que de les construire en Suisse.» Avec le même argument, je vous le dis, Mesdames et Messieurs...

Le président. Encore trente secondes.

M. Eric Stauffer. Je vais finir. Avec le même argument, déménageons l'administration fiscale en France, n'engageons plus que des Français en France, ça coûtera moins cher aux Genevois et comme ça on économisera des impôts ! Mais de qui se fout-on dans ce parlement ? Je vous demande donc, Mesdames et Messieurs, de voter non de manière sèche à ce torchon dont nous discutons ce soir. (Applaudissements.)

M. Guy Mettan (PDC). Monsieur le président, c'est toujours difficile d'avoir raison trop tôt, et surtout d'avoir raison trop tôt quand on prend la parole après M. Stauffer. Mais enfin, ce n'est pas du tout une raison pour s'avouer vaincu, ni - au cas où cette bataille devrait être perdue, ce que je ne souhaite évidemment pas - pour ne pas se battre afin de remporter la guerre. Parce que guerre il y a, guerre commune pour financer ensemble des infrastructures communes à la France et aux cantons de Vaud et de Genève. Que dit cette motion ? Elle dit simplement que Français et Suisses peuvent mettre ensemble un peu d'argent pour financer ces infrastructures. Pas plus tard que mercredi dernier a eu lieu une réunion du Groupement local de coopération transfrontalière, formé démocratiquement par des élus du canton de Vaud, de celui de Genève et de France voisine - tous des élus représentatifs - et présidé par notre estimé président M. Longchamp. Qu'a-t-on constaté pendant cette réunion ? Le besoin crucial et cruel de fonds, de financement pour les infrastructures communes. Il n'existe pas de système optimal qui ait été mis sur pied pour le faire. On a effectivement décidé de faire ça projet par projet. C'est bien de saucissonner, pourquoi pas ? Nous voterons évidemment pour le projet de développement de parkings transfrontaliers, comme cela a été dit tout à l'heure. Mais en saucissonnant les choses, on va aller au-devant d'un problème grave, c'est-à-dire que chaque fois qu'on aura un tout petit projet, il faudra aller devant le peuple. On aura un référendum, qui sera toujours susceptible d'être gagné ou perdu. On va perdre un temps infini !

Tandis que le projet qui vous est présenté ce soir est à la fois démocratique, transparent et efficace. Il est transparent, parce qu'on saura exactement quel projet sera financé avec les fonds réunis. Il est démocratique, puisqu'un GLCT a été instauré, qui est formé de 32 membres élus démocratiquement et qui auront justement pour tâche de gérer ce fonds. Tout sera fait de façon parfaitement démocratique et transparente. Rien n'empêche le GLCT de fournir chaque année au Grand Conseil un rapport sur les investissements qui seront consentis. On le fait pour bon nombre d'autres investissements, comme pour les établissements publics, par exemple. Rien n'empêche de le faire pour ceux-ci. Le projet est également efficace, parce qu'on aura un fonds de roulement qui nous permettra de répondre à la demande d'investissements en infrastructures.

Qu'est-ce qui est proposé ? C'est que les Français mettent 50% de leur part à travers les 240 millions de rétrocession qui leur est faite. Ils seront tout à fait d'accord d'entrer en matière, puisque c'est précisément dévolu à cet objet. De notre côté, nous pouvons prélever 25 millions par an - ça fait une somme totale de 50 millions - qui suffit pour faire face à la demande. On peut prélever ces 25 millions sur les 700 millions que nous attribuons chaque année à des investissements dans cette république. Pourquoi ne pourrait-on pas consacrer 4% de cette somme à des infrastructures transfrontalières ? Je le répète: c'est démocratique, transparent et efficace. Evidemment, c'est peut-être trop démocratique, trop transparent et trop efficace pour cette république, qui préfère se complaire dans des moyens d'arrière-garde pour faire avancer la région. J'invite donc celles et ceux qui avaient une sympathie pour ce projet à y réfléchir à deux fois et à le soutenir ce soir, afin que nous puissions faire progresser la cause transfrontalière, celle qui est commune à tous ceux qui défendent l'agglomération franco-valdo-genevoise.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je salue à la tribune la classe d'adultes du Centre de formation professionnelle, encadrée par Mme Catherine Luthy. (Applaudissements.) La parole est à Mme la députée Christina Meissner pour cinquante-sept secondes.

Mme Christina Meissner (UDC). Merci, Monsieur le président. S'il est un domaine dans lequel le financement des infrastructures est effectivement bien doté, c'est bien celui des projets transfrontaliers. Au-delà des centaines de millions que nous rétrocédons à la France, je vous rappelle qu'il y a déjà, via le projet d'agglomération, la possibilité de financer conjointement des projets précis. Il y a les groupements locaux de coopération transfrontalière, qui permettent aussi de le faire. On l'a par exemple fait pour l'assainissement des eaux du Pays de Gex. Il y a enfin les fonds Interreg qui sont là et qu'on utilise régulièrement, notamment pour les corridors biologiques et d'autres choses. En matière de fonds avec des projets précis, il y a donc déjà tout ce qu'il faut, et soit le projet de M. Mettan arrive un peu trop tard...

Le président. Il vous faut conclure.

Mme Christina Meissner. ...soit il s'agit simplement de trouver une raison à ce GLCT qui a été fait entre la Suisse et la France et qui se cherche une raison d'être, des projets à gérer de sa propre initiative.

M. François Lefort (Ve). Monsieur le président, vous transmettrez à M. Mettan que le Conseil d'Etat, lui, s'est engagé à investir 240 millions sur dix ans et à présenter des projets d'investissement que nous voterons avec plaisir, au contraire du MCG. Vous transmettrez également à M. Florey que j'ai en effet associé par erreur l'UDC au référendum MCG contre la loi 11115 destinée à financer les cinq P+R transfrontaliers. C'est vrai, et je m'en excuse. Je m'en excuse platement, une fois n'est pas coutume. Mais rassurez-le...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. François Lefort. ...l'UDC était bien incluse dans l'appellation «bestiole populiste» ! Merci, Monsieur le président. (Exclamations.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Roger Deneys pour une minute.

M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la position des socialistes a été exprimée par mon collègue tout à l'heure. Mais j'aimerais quand même dire que j'étais assez perplexe à la lecture de cette proposition de motion. En réalité, quelque temps plus tôt, j'avais rédigé un projet de loi sur mon blog qui concernait le financement de la partie française du CEVA. Je me suis toujours demandé si cette proposition de motion avait quelque part des droits d'auteur qui m'appartenaient peut-être mais, vu le sort qui lui est réservé ce soir, je ne pense pas que cela changera quoi que ce soit. Du coup, j'en profite pour saluer à la tribune les membres de la Global Labour University ainsi que mon précédent attaché parlementaire Martin Staub, qui va nous quitter bientôt. Je tiens à l'applaudir et à le remercier pour son travail. (Applaudissements.)

M. Philippe Morel (PDC), rapporteur de minorité. Le 31 décembre 1602 s'est tenue sur la Treille une réunion entre les notables de Genève qui ont planifié, annoncé et prévu la création d'une région franco-valdo-genevoise. Impossible, irréaliste, infaisable ? Comme le disait l'un de mes très estimés préopinants: non ! Heureusement, cette région se crée, se développe, et elle est prévue depuis décembre 1602. Le problème que nous avons n'est pas un problème de région, mais de gouvernance. Nous devons trouver un mode de gouvernance pour cette région, de manière que l'argent qui rentre et celui qui est investi soient contrôlés, que les projets financés soient agréés et qu'il existe un système et une logique dans l'organisation de cette région. C'est un problème de gouvernance ! La proposition de financement projet par projet est longue, difficile, laborieuse et ne correspond certainement pas à la vitesse avec laquelle l'actualité évolue de nos jours. Cette motion présente une solution pragmatique, peut-être pas parfaite, mais imaginative et créative, qui n'empêchera pas de garder le contrôle de ce qui se passe. Il faut accélérer les procédures, être pragmatique, permettre à cette région de se développer de manière aussi harmonieuse et rapide que possible, afin qu'elle soit créée avant l'an 2400... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !

M. Philippe Morel. ...et qu'elle existe pour le bien de ceux qui seront là après nous.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Philippe Morel. Je continue donc à vous recommander de soutenir cette motion qui vient certainement un peu avant l'âge mais n'en demeure pas moins importante. Merci.

M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous invite à rejeter cette motion pour les raisons qui ont été exprimées ici ou là et pour d'autres qui tiennent d'abord aux droits de votre parlement de même qu'aux droits populaires. Les investissements que nous entendons réaliser dans la région franco-valdo-genevoise, sous l'égide du GLCT, doivent se faire dans un cadre juridique clair, à savoir celui du vote de lois par votre parlement ainsi que la possibilité, pour ces lois, d'être soumises au délai référendaire et, si les référendums sont appelés, au vote du peuple. Ceci garantit que toute la transparence puisse être faite. Le Conseil d'Etat ne souhaite pas devoir gérer des fonds dont l'affectation n'est pas clairement déterminée, dont les enjeux et les objets ne sont pas clairement définis. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons à refuser ce projet. Nous préférons de loin la méthode qui consiste à vous proposer des projets de lois. Nous avons signé avec nos partenaires français certains accords sur des projets qui nous sont favorables à tous deux. C'est le cas des «Park and ride». Nous avons demandé à la France de construire cinq «Park and ride» sur son sol pour pouvoir décharger les routes cantonales genevoises de voitures qui n'ont rien à y faire et qui feraient mieux d'être garées dans des parkings idéalement situés. La configuration de notre canton fait que ces parkings doivent être en France. D'ailleurs, c'est une politique extrêmement économe de nos moyens puisque - je vous le rappelle - ces places de parking vont nous coûter 5000 F, alors que celles que nous avons construites il y a des années déjà à Genève-Plage nous coûtaient 60 000 F la place. En plus d'être infiniment plus efficace, cela procède d'une politique des transports intelligente. Si le peuple accepte ce projet, nous entendons vous proposer une autre série de projets qui seront soumis à votre parlement, sur lesquels vous aurez à vous prononcer. Si des référendums sont demandés, ce sera au peuple genevois de se prononcer sur des éléments essentiels au développement de notre région, à l'équilibre de notre canton et des départements français qui nous entourent. Je vous remercie donc, au nom du Conseil d'Etat, de refuser cette proposition de motion.

Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Nous allons passer au vote de la proposition de motion 2032.

Mise aux voix, la proposition de motion 2032 est rejetée par 54 non contre 20 oui et 21 abstentions.