Séance du vendredi 7 octobre 2005 à 17h20
55e législature - 4e année - 12e session - 71e séance

M 1638
Proposition de motion de Mmes et MM. Rémy Pagani, Anne Mahrer, Gabriel Barrillier, Beatriz de Candolle, Jean-Michel Gros, Alain Etienne, Martin-Paul Broennimann, Françoise Schenk-Gottret, Nelly Guichard, Pierre-Louis Portier, Hugues Hiltpold, Michèle Künzler relative au plan localisé de quartier de la Tambourine signée par l'unanimité de la commission de l'aménagement
P 1351-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la pétition concernant le PLQ du quartier de La-Tambourine
Rapport de Michèle Künzler (Ve)
P 1517-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la pétition : Halte au bétonnage de la Tambourine
Rapport de Michèle Künzler (Ve)

Débat

Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse. Je vous signale tout d'abord une petite modification formelle. Au début du rapport, il manque une date: le 29 juin. C'est à cette date que le vote a eu lieu, mais j'ai oublié de le noter au début du rapport. Nous avons étudié ces pétitions en commission, un peu tardivement, et nous le regrettons. Si nous avions abordé ces objets plus vite, nous aurions peut-être eu une influence sur ce plan localisé de quartier qui est assez insatisfaisant.

Nous pensons que c'est un exemple à ne pas suivre. En effet, c'est un aménagement important qui a, surtout, été réalisé avec peu de concertation et de manière morcelée: tel périmètre a été accordé à une fondation de droit public, tel autre à une coopérative, tel autre encore à un constructeur privé. Cela s'est fait sans concertation entre les périmètres. Il en résulte un aménagement pas très adéquat puisque l'espace public n'est pas pensé, la commune de Carouge ne sait toujours pas si l'espace public lui appartient et si elle doit s'en occuper, ne serait-ce que pour le déneigement. Il y a beaucoup de choses à améliorer, et c'est pourquoi nous vous recommandons de renvoyer ces deux pétitions au Conseil d'Etat.

Par ailleurs, la commission, unanime, a rédigé une motion - parce que toutes les demandes des pétitionnaires ne sont pas adéquates... Nous avons donc rédigé tous ensemble une motion - c'est dire que, parfois, la commission peut être unanime - dans laquelle nous demandons au Conseil d'Etat de faire quelque chose pour améliorer ce lieu. Car l'espace public n'a pas été pensé et, cela, c'est vraiment grave.

M. Rémy Pagani (AdG). Affirmer que l'aménagement de ce secteur est relativement problématique, c'est peu dire. Je dirais qu'il est gravement problématique, Mesdames et Messieurs les députés. Pourquoi cela ? Parce qu'une entreprise, Battelle, a voulu partir et a vendu son terrain - tant mieux pour elle - à un prix relativement exorbitant: 19 millions, si mes souvenirs sont exacts. Bien évidemment, partant de ce constat-là, il ne pouvait en être autrement. En ce qui concerne l'aménagement de ce territoire, même s'il a été morcelé, on y a mis le plus d'habitations possible pour limiter les coûts au mètre carré que ce terrain a engendrés pour la collectivité. Partant de là, notre commission a été interpellée par les nouveaux habitants qui ont constaté que le logement qui leur était loué correspondait à certaines normes d'habitabilité, mais que les espaces publics, au niveau du «couinement» des bâtiments...

Une voix. Les bâtiments ne «couinent» pas ! (Rires et remarques.)

M. Rémy Pagani. Non, pardon: il sont «cougnés» ! (Rires.)Excusez-moi, je suis un peu fatigué ! Mais la campagne électorale finit dans vingt-quatre heures, et je serai plus en forme dimanche... Et peut-être que ce sera la dernière, comme dit Monsieur Weiss - je ne le souhaite pas pour lui, bref...

Cela étant, nous nous sommes déplacés dans ce périmètre et nous avons vu des aberrations: une des rues ne mesure que douze mètres de large et les voitures n'ont même pas la possibilité de se croiser... On nous propose d'aménager une place publique; oui, mais il faut mettre un immeuble à côté, plus un parking dessous, plus Dieu sait quoi...

Toujours est-il que notre commission est tombée d'accord, et à l'unanimité - c'est pour cela que je trouve important de prendre la parole - quant au fait que l'ensemble de cet aménagement doit être revu. Nous avons proposé une motion qui, à mon avis, correspond tout à fait aux exigences d'un aménagement à peu près correct. Bien évidemment, on ne va pas pouvoir rectifier toutes les erreurs - et les horreurs - qui ont été faites dans ce secteur. On va essayer, comme le suggérait un commissaire, de réduire un peu la densité, c'est-à-dire de soustraire un certain nombre de bâtiments et de les reporter dans le terrain qui jouxte la Tambourine et qui appartient à l'Etat - enfin, indirectement, puisqu'il appartient à l'Université.

Nous proposons donc que cette motion soit adoptée, c'est-à-dire renvoyée immédiatement au Conseil d'Etat. Il nous semble inutile de la renvoyer en commission, puisqu'elle est le fruit du travail intense et du vote unanime, je le souligne, de la commission d'aménagement.

Mme Anne Mahrer (Ve). Effectivement, l'urbanisation de la Tambourine illustre exactement tout ce qu'il faudrait éviter en matière d'urbanisation. Les autorisations de construire ont été délivrées et les constructions se sont réalisées avant même que les questions d'accès, du réseau des déplacements et des transports ne soient réglées. On a effectué un cloisonnement des projets, cela a déjà été dit, sans aucune vision globale, alors que ce périmètre est appelé à se développer. En effet, je vous le rappelle, le site de Battelle deviendra à terme un véritable campus qui accueillera plus de 3000 étudiantes et étudiants. De plus, le cycle de Drize et de nouveaux logements doivent être réalisés prochainement.

Il était donc temps de sortir des tiroirs la pétition 1351, datant de 2001, et de la traiter avec la pétition 1517 qui, elle, nous a été envoyée par les mêmes habitants de la Tambourine en décembre 2004, et il n'était pas inutile, non plus, de se rendre sur place avec la commission des travaux. La visite a confirmé nos craintes quant à l'urbanisation de ce secteur: aménagements extérieurs inexistants, espaces publics et accès non conformes au plan localisé de quartier initial. Ce même plan localisé de quartier devra être modifié à nouveau pour réaliser la place centrale et l'éventuel parking souterrain.

En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, le manque de coordination et de vision globale a abouti à des réalisations qui provoquent le mécontentement des habitantes et des habitants et qui vont occuper plusieurs collaboratrices et collaborateurs de deux départements afin d'améliorer ce qui peut encore l'être. C'est ce que demande la proposition de motion, signée par tous les commissaires de la commission d'aménagement. Les Verts vous invitent à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat et à attendre de sa part des réponses dans les meilleurs délais.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Je prends la parole non pas tant pour dénoncer, comme l'ont fait les préopinants l'aménagement pour le moins chaotique de ce quartier, mais pour essayer d'en tirer en tout cas deux leçons qu'il n'est pas inutile de mentionner publiquement.

Je voudrais tout d'abord rappeler que, si cet aménagement est particulièrement chaotique, c'est aussi parce que des gens du quartier s'étaient opposés à la hauteur des quatre immeubles initialement prévus. On a donné satisfaction aux opposants en ôtant un étage aux immeubles prévus, mais on en a construit un cinquième, ce qui est vraiment l'éclatante démonstration de ce qu'il faudrait éviter de faire. Il faut construire à des densités tout à fait normales et acceptables, étant donné l'exiguïté de notre territoire, mais sans sacrifier les espaces verts. Souvent, les gens ne se rendent pas compte qu'en réclamant des petits immeubles, en général de deux étages sur rez, ils mettent de côté ce qui est également vital pour un quartier: les espaces verts. En l'occurrence, des espaces verts, il y en a, puisque tout le bas de la parcelle Battelle a été réservé à ces fins, mais, cette parcelle ayant une forme très allongée, les espaces disponibles sont extrêmement décentralisés.

La deuxième leçon à tirer de cette malheureuse expérience, c'est la nécessité d'une vision globale - Mme Mahrer l'a évoquée. En effet, il semble, quand on regarde la carte, qu'il y a un triangle naturel formé par le chemin de Pinchat, le chemin Vert et la route de Troinex, et que c'est l'ensemble de ce triangle qui aurait dû être pris en compte, notamment pour l'organisation des transports tant privés que publics. Cela n'a pas été le cas et, maintenant, les bus n'arrivent ni à entrer ni à sortir du périmètre.

Une voix. S'ils ne peuvent pas entrer, ils n'ont pas besoin de sortir ! (Rires.)

Pierre-Louis Portier. Je veux dire qu'ils ont énormément de peine à manoeuvrer. J'espère donc que, si le Conseil d'Etat arrive à apporter une réponse satisfaisante aux différentes invites de la motion 1638, un circuit de bus cohérent et correct pourra enfin être mis en place. Et j'espère que les futurs habitants de ce quartier trouveront - parce qu'on leur aura aménagé des places de parking, des équipements et des espaces verts - un cadre de vie qui soit agréable pour eux.

M. Alain Etienne (S). Effectivement, ces pétitions montrent à quel point il est difficile aujourd'hui de faire de l'aménagement du territoire, et j'aimerais rappeler certaines choses dont une a déjà été mentionnée par M. Portier. Le plan localisé de quartier a subi des modifications, dues notamment à l'oppositions de propriétaires de villas situées sur la commune de Veyrier: l'accès prévu depuis le chemin Vert a été abandonné; ensuite, la commune de Carouge a elle-même demandé des bâtiments plus petits, ce qui fait qu'au lieu de quatre ce sont cinq bâtiments qui ont été construits, et les distances entre les immeubles sont beaucoup plus courtes. Sur place, on a l'impression d'un espace un peu étriqué... Mais il fallait tout de même rappeler que c'était à la demande de la commune et que cette dernière avait donné un préavis favorable au plan localisé de quartier.

J'aimerais rappeler également que, si l'on veut construire, si l'on veut proposer du logement à la population, Carouge est un endroit bien situé, puisqu'il est dans la ville et non plus à la campagne. Et il est un peu illusoire de faire croire que l'on peut faire vivre les gens à la campagne tout près de la ville.

Par ailleurs, il a été rappelé que les préoccupations des habitants doivent être prises en compte. Les aménagements extérieurs sont importants, et il faut en prendre soin. M. Portier a rappelé qu'il ne fallait pas faire du R+3+S... J'aimerais souligner qu'aux Communaux d'Ambilly il a été demandé de faire une zone 4, et que la zone 4 c'est précisément R+3+S. Alors, il faut être un peu cohérent !

J'aimerais aussi relever que l'élaboration des plans de quartier est un travail important et qu'il faut donner les moyens au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement de faire ces études. Il nous a été dit en commission que des heures de concertation sont nécessaire à la coordination; il faut nommer un chef de projet, donner des mandats extérieurs - ce qui demande des moyens supplémentaires. Et, lorsqu'on étudie le budget, il faut penser à donner au département les moyens de réaliser ces plans localisés de quartier.

Le parti socialiste soutient le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat, car on peut réaliser un aménagement global sur l'ensemble des parcelles de ce périmètre. Le parti socialiste soutient également le renvoi des pétitions, à titre d'exemple, parce qu'il faut que les préoccupations des habitants soient relayées au sein du Conseil d'Etat.

La présidente. Le Bureau vous propose de clore la liste. Sont encore inscrits: MM. Pierre-Louis Portier, Martin-Paul Broennimann et Pierre Ducrest.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Pour une fois que nous arrivons, dans cet hémicycle, à parler d'aménagement du territoire dans une ambiance cordiale, je ne souhaiterais pas la troubler. Je voudrais simplement rappeler à M. Etienne que, dans le cas des Communaux d'Ambilly, ce que l'Entente a proposé, soutenue en cela par l'UDC, c'est de prévoir une bande de zone 4 le long de la zone villas, ceci de façon à ne pas exacerber les oppositions des voisins. Et l'éventuelle perte de densification engendrée à cette occasion pourrait être reportée en zone 3, du côté de la forêt, où cela ne gêne personne. L'idée est de ne sacrifier ni la qualité de la vie des futurs habitants ni la densification des Communaux d'Ambilly.

M. Martin-Paul Broennimann (S). Très rapidement, j'aimerais intervenir pour dire qu'en effet, dans le cadre de la commission, personne n'était satisfait du résultat de l'aménagement du quartier de la Tambourine. Mais en même temps, le mauvais résultat «était la faute à personne »: beaucoup d'intérêts ont dû être satisfaits au fil du temps sur un périmètre limité. En plus, on a implanté les constructions sur la partie haute pour laisser le parc en bas, ce qui n'a pas arrangé les problèmes de proximité et de gabarit. Mais ce que j'aimerais souligner surtout, c'est que ce genre de problème peut trouver une solution, et de très beaux projets ont été proposés sur d'autres périmètres. Je pense que la voie à suivre est celle du «masterplan» ou du plan directeur de quartier qui vient en amont et qui nous permet vraiment de juger la qualité dans son ensemble avant de passer à l'élément contraignant qu'est le PLQ. C'est cette voie qu'il me semble devoir suivre pour le travail futur.

M. Pierre Ducrest (L). Nous sommes ici dans un cas où l'Etat a joué à l'apprenti sorcier. Ayant acquis une parcelle à Battelle, l'Etat a voulu y mettre un peu de tout: des bâtiments pour la FULE, des bâtiments subventionnés, il a dû accepter des éléments pour l'instruction publique, etc. Et cette situation pourrait fort bien se présenter à nouveau dans le canton ! L'Etat a besoin de terrain pour construire et, au moment où il a le terrain, il fait un mélange, il implante de tout sans penser, avec des circulations, avec des éléments d'aménagement et autres... C'est l'Etat qu'il faut interpeller ici ! Je l'ai fait il y a quatre ans, à propos de cette parcelle, en disant qu'il serait difficile de tout installer là-bas. Or maintenant, on se trouve avec une motion et des pétitions. Heureusement, et il faut les renvoyer au Conseil d'Etat. J'aimerais donner un simple conseil au Conseil d'Etat: quand il a acquis un terrain dans ce canton, puisque l'on parle de logement, etc., qu'il réfléchisse à deux fois avant de présenter des projets au Grand Conseil ! Mais en essayant surtout de prendre toutes les données du problème pour proposer les bonnes solutions.

De toute manière, ces terrains seront sur des communes ! Avec les difficultés qu'auront les communes. La commune de Carouge est un exemple, vous vous en rendez compte avec les difficultés qu'elle a pour gérer le rondeau de Carouge, compte tenu de l'aménagement de la parcelle de Battelle... C'est la quadrature du cercle !

Ce que je demande, c'est qu'une fois cette motion et les deux pétitions ayant été renvoyées au Conseil d'Etat, ce dernier établisse rapidement - rapidement ! - un plan localisé de quartier pour que les habitants puissent vivre dans un cadre agréable et que l'on propose une solution à la commune sur laquelle se trouvent les bâtiments. Cela pas dans dix ans, mais rapidement, Monsieur le Conseiller d'Etat !

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. J'aimerais tout d'abord remercier M. le député Portier et M. le député Etienne d'avoir rappelé que ce plan localisé de quartier, assez ancien, avait en son temps obtenu l'aval de la commune. Monsieur le député Ducrest, vous avez un peu la mémoire courte: lors de l'acquisition de ce terrain par l'Etat, votre Grand Conseil m'avait demandé de promettre que l'on construirait tout ce qui était prévu par le PLQ de manière à ne pas perdre des droits à bâtir. Je l'ai fait, sur la base d'un PLQ accepté par la commune.

Il se trouve, il est vrai, que l'on constate aujourd'hui certaines difficultés, notamment au sujet des espaces publics, des circulations et de l'accès pour les transports publics. Votre commission d'aménagement unanime nous demande de traiter rapidement ces questions. Le Conseil d'Etat est d'accord: ce plan doit pouvoir être amélioré, dans la mesure où c'est encore possible. Mais il faut être conscient de la conséquence: un certain nombre de bâtiments prévus sur la parcelle devront être construits ailleurs, ce que votre motion demande en relevant que le terrain propriété de l'Université, situé juste à côté, doit pouvoir accueillir une partie du programme universitaire prévu à Battelle.

Il faudra aussi aller expliquer - et je me réjouis de votre aide, Monsieur le député Ducrest - aux voisins, qui ne voulaient pas que l'on construise sur cette parcelle et qui étaient plutôt d'accord que l'on concentre les bâtiments sur Battelle, qu'aujourd'hui on a décidé de faire un peu différemment. C'est justifié et conforme à ce que souhaite votre commission d'aménagement, mais cela ne se fera pas sans douleur. Parce qu'on ne pourra pas accéder à cette parcelle sans passer par un chemin, lequel ne s'y prête pas vraiment aujourd'hui - c'est d'ailleurs l'une des difficultés.

Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat accepte votre motion. Il y répondra le plus vite possible, parce que je suis conscient de la difficulté de la situation dans laquelle les habitants se trouvent. Je dois tout de même vous rappeler que les travaux que cela implique demanderont beaucoup de temps aux collaborateurs, ce qui, compte tenu des perspectives budgétaires, risque de poser problème. Cependant, vu la gravité du problème, je vous assure que ce dossier est considéré comme étant prioritaire par mon département. (Applaudissements.)

Mise aux voix, la motion 1638 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 60 oui et 1 abstention.

Motion 1638

Mises aux voix, les conclusions de la commission d'aménagement du canton (renvoi de la pétition 1351 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 54 oui et 1 abstention.

Mises aux voix, les conclusions de la commission d'aménagement du canton (renvoi de la pétition 1517 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 60 oui et 1 abstention.