Séance du
jeudi 17 décembre 1998 à
17h
54e
législature -
2e
année -
2e
session -
57e
séance
54e législature
No 57/VIII
Jeudi 17 décembre 1998,
nuit
La séance est ouverte à 20 h 30.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Guy-Olivier Segond, Gérard Ramseyer, Micheline Calmy-Rey, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Juliette Buffat, Erica Deuber-Pauli, Henri Duvillard, Bénédict Fontanet, Alexandra Gobet, Claude Haegi, Michel Halpérin, Alain-Dominique Mauris et Olivier Vaucher, députés.
3. Annonces et dépôts :
a) de projets de lois ;
Néant.
b) de propositions de motions ;
Le président. La proposition de motion suivante est parvenue à la présidence :
Cette proposition de motion figurera à l'ordre du jour d'une prochaine session.
c) de propositions de résolutions ;
Le président. Nous avons reçu la proposition de résolution suivante :
M. Luc Gilly(AdG). Je constate qu'Erica Deuber est absente. Je demande donc à sa place que ce projet de résolution puisse être traité le plus tôt possible, soit ce soir soit demain dans la journée, et qu'elle soit aussi déposée sur les tables.
Le président. Cette résolution sera distribuée sur vos tables et sera traitée à la fin de l'ordre du jour. Je soumets à votre approbation cette proposition de rajouter ce projet de résolution à l'ordre du jour de cette session.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
d) de demandes d'interpellations ;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
La commission ad hoc s'est réunie les 8, 15 et 29 mai, 12 et 19 juin, 3 juillet, 4, 11 et 18 septembre et le 16 octobre 1998 sous la présidence de Mme Elisabeth Reusse-Decrey (remplacée deux fois par la vice-présidente Mme Madeleine Bernasconi, et Mme Anne Briol en l'absence de celle-ci).
Les travaux n'ont été accompagnés par aucun conseiller d'Etat ni secrétaire de département du DAM ou DJPT.
Préambule
Suite au recours de droit public contre la décision du Grand Conseil de Genève prise le 27 juin 1997 de déclarer l'initiative irrecevable, le Tribunal fédéral en date du 12 février 1998 donne raison aux recourants.
Le 23 avril 1998, le Grand Conseil déclare l'initiative recevable et la commission ad hoc peut se mettre au travail pour se déterminer sur le fond de celle-ci dès le 8 mai 1998. Un nouveau recours est déposé le 3 juin 1998, cette fois par trois députés opposés à l'initiative et à la décision du 23 avril 1998. Nouvelles procédures entre les recourants, les initiants, la commission législative et le président du Grand Conseil M. René Koechlin. Pour conformité, le Grand Conseil annule la décision du 23 avril 1998 et une nouvelle décision du Grand Conseil en date du 29 juin 1998 déclare l'initiative recevable. Le recours des députés Balestra, Blanc et Ducommun devient sans objet et ils retirent leur recours. La commission ad hoc peut continuer ses travaux ! En date du 16 octobre 1998, la majorité de la commission vote favorablement sur le fond de l'initiative.
A Genève, une culture et une politique de paix, c'est nécessaire et c'est possible
C'est le 28 août 1996 que le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA) a remis son initiative « Genève, République de paix » - ci-après GRP - à la Chancellerie d'Etat. Cette initiative est soutenue par : Femmes pour la Paix, l'Alliance de Gauche, les Jeunesses socialistes, les Verts, le Parti du Travail, solidaritéS, le Parti Socialiste genevois et les syndicats SIT et SIB. Elle a obtenu l'appui de 11 178 citoyennes et citoyens du canton.
Insérer un article pacifiste dans la constitution genevoise, tel est le but de cette initiative, et c'est par ce levier-là qu'elle veut, par des mesures cantonales concrètes, faire avancer et consolider un message d'ouverture, d'innovation et de courage pour renforcer l'idée que la prévention et la compréhension sociale des conflits doivent avant tout être de nature non-violente. Déléguer la solution aux militaires ne peut qu'aggraver les conflits !
Cette initiative doit aussi orienter les responsables politiques du canton pour répondre à la majorité des citoyennes et citoyens qui soutiennent (à une exception près) depuis des dizaines d'années chaque votation concernant les problèmes liés à l'armée et à la paix !
La solidarité, la justice sociale et le renoncement à la violence sont les objectifs auxquels le gouvernement genevois doit impérativement donner la priorité. L'initiative propose des mesures concrètes qui vont dans ce sens : un programme d'éducation à la paix dans le cadre de l'instruction publique ; la création d'un institut de recherche pour la paix ; l'accueil des plus démunis et des victimes de la violence ; enfin, le renoncement à la possibilité pour le canton d'appeler et d'engager les troupes de l'armée contre la population. Le canton développera des moyens civils et non violents pour résoudre les conflits internes. Il en va de même pour la protection des rencontres internationales.
Travaux de la commission
Il a fallu dix séances de commission et onze auditions pour conclure nos travaux ! Deux raisons majeures prolongèrent nos débats :
une partie de la commission entendait pratiquement que l'on reparte à zéro sur la recevabilité juridique de l'initiative 109, mais telle n'était pas la mission de la commission ;
un homme, seul, parfois accompagné de ses « lieutenant(e)s », le député Pierre Froidevaux, rapporteur de minorité, revint à la charge durant 9 séances pour imposer d'une manière ou d'une autre l'armée dans le contexte de cette initiative à caractère éminemment civil ! Chaque fois que nous parlions de culture de paix et d'autres approches non-violentes des conflits, M. Froidevaux ressortait de son chapeau le département militaire (juge et partie, quel paradoxe !).
Ainsi, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai rappelé et je rappelle que cette initiative n'est pas abolitionniste. Elle comble bien un oubli important dans notre constitution, l'affirmation et l'encouragement nécessaires d'une culture et d'une dynamique politique pacifiste, afin que Genève devienne réellement cette « ville internationale de paix ».
A nouveau, les représentants de l'Entente ont accusé les initiants de vouloir abolir de fait l'armée à Genève par la petite porte, en arguant que l'initiative outrepassait les compétences cantonales et ne respectait pas la constitution fédérale. Ils étaient encouragés dans ce sens par le rapport du Conseil d'Etat qui a avancé des arguments plus que douteux pour invalider partiellement l'initiative tout en la dénaturant complètement et en détournant le sens donné par les initiants !
Le grand remous et le feuilleton faits autour de cette initiative viennent certainement du fait qu'elle a été lancée par le Groupe pour une Suisse sans Armée. Faut-il pour autant empêcher ces gens de réfléchir et de proposer une modification de la constitution par le biais d'une initiative cantonale pacifiste et civile ? Plus de 11 000 citoyennes et citoyens l'ont appuyée, et, pour rappel, les Verts, le Parti Socialiste, l'Alliance de Gauche (Parti du Travail, Indépendants et solidaritéS), les Jeunesses socialistes, Femmes pour la Paix, et les syndicats SIB et SIT la soutiennent.
Un autre groupe de citoyennes et citoyens aurait-il déposé cette initiative que l'Entente ne la prendrait pas en grippe de cette manière ! Car au cours des séances, souvent vives, chacun(e) a petit à petit admis la pertinence de « Genève, République de paix » sur bien des aspects. Force est pourtant de constater malgré tout le peu d'intérêt pour ce projet par le taux d'absentéisme de l'Entente sur cet objet et l'intérêt du député Michel Balestra, pourtant auteur d'un des deux recours contre l'initiative qu'on ne vit que deux fois !... (?)
Auditions
En date du 15 mai 1998, nous avons auditionné Maryelle Budry (Femmes pour la paix, Femmes en noir et GSsA), Sébastien L'haire (permanence pour le service civil et problèmes militaires, et GSsA) et Tobia Schnebli (GSsA). Les textes remis sont en annexe du présent rapport. Je ferai mien le texte de Tobia Schnebli que nous avons écrit ensemble et qui résume parfaitement les discussions que la commission a tenues durant ses séances. Vous pourrez donc le lire à la suite des auditions.
Le 28 mai, audition de Mme Martine Brunschwig Graf, présidente des affaires militaires. Durant une heure, la présidente nous a fait part de ses doutes, tant sur le plan de la marche à suivre pour la commission que sur la recevabilité de l'initiative qui, pour elle, est en porte-à-faux avec la solidarité confédérale. Mme Brunschwig Graf propose l'idée d'un contre-projet comprenant les aspects intéressants de l'initiative (recherche, création d'un institut pour la paix) et faisant intégrer l'armée dans son rôle spécifique pour Genève. Elle parle surtout du maintien de la paix, alors que l'initiative va plus loin dans le sens d'une véritable culture de la paix par la mise en place d'éléments importants à certains niveaux.
L'audition de M. Gérard Ramseyer n'éclairera malheureusement pas la lanterne des députés puisque le chef du Département de justice et police et des transports annonce d'emblée que son département n'est pas compétent pour parler du fond. Il n'est compétent que pour analyser la forme, et M. Ramseyer de repartir sur des considérants juridiques, de recours et de délai. La commission constate qu'entre les deux présidents, l'interprétation sur la suite des travaux ne sont pas les mêmes, malgré l'éclairage de M. Balland, secrétaire adjoint du DJPT.
19 juin : audition de M. Jean Freymond qui représente l'Etat de Genève dans le centre d'études stratégiques ; il est colonel et appartient à la commission militaire consultative. Il est venu en tant que représentant du Centre d'études pratiques de la négociation internationale. Ce centre existe depuis 20 ans et s'intéresse à la paix sur plusieurs fronts. Il a travaillé avec des Turcs et Kurdes, avec des gens du Kosovo, sur la formation à la diplomatie avec certains pays africains, avec la Corée du Nord, et a participé à une réunion sur les conflits du Moyen-Orient.
Mais il s'agit là d'une approche « légère », dit M. Freymond. Une maison pour la paix se fera tôt ou tard à Genève, dit-il, et la ville pourrait être un lieu rayonnant dans ce domaine. Mais à qui sera ouverte cette maison ? Tout en admettant que la prévention doit être fortement encouragée et qu'il y a un paradoxe dans le fait que ce soit le Département de la défense qui prenne l'initiative, M. Freymond accepte avec fatalisme la violence planétaire. Les exportations d'armes et le surarmement de la planète ne concernent pas son centre...
M. Freymond ne veut pas politiser le débat, car il divise. La paix doit rassembler autour d'un même combat, celui des valeurs de justice sociale et de retrouver la dignité des êtres et des communautés. Force est de constater que la recherche de la paix est un combat politique parce qu'il est un choix de société différent du discours officiel, qu'il soit au niveau international, national ou cantonal. « Si tu veux la paix, prépare la guerre » est encore un mot d'ordre accepté par la grande majorité des politicien(ne)s.
M. Freymond estime que l'initiative 109 a des choses importantes à apporter, mais que les points concernant l'armée sont dépassés, l'armée suisse étant en cours de restitution à un usage civil...
Puis audition de M. Marc Vuilleumier, éminent historien, qui ne parlera pas de l'initiative, mais des différents mouvements de paix que Genève a connus. Dès le début du XIXe siècle, J.-J. de Seillon a été le premier pacifiste genevois. De succès en échecs, la promotion de la paix divise toujours. Le Peace Bureau International est créé en 1891 à Milan. Il s'installe à Berne, puis à Genève où il existe toujours. La Croix Rouge internationale est fondée pendant la Première Guerre mondiale. L'allégement des souffrances ne fait pas la paix, mais avec la guerre, la Croix Rouge aura une valeur pacifiste aux yeux de l'opinion publique. L'Agence internationale des prisonniers de guerre joue un rôle important à Genève. Si durant l'entre-deux-guerres la Société des Nations a pour but le maintien de la paix, elle subit rapidement un échec dès 1920, parce qu'elle devient vite une sorte de club des vainqueurs de la Première Guerre mondiale. Les prémices de l'ONU étaient lancées. La Croix-Rouge et la SdN sont à l'origine de la conception de l'Esprit de Genève, et depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, Genève a acquis à nouveau une certaine célébrité grâce aux conférences internationales (sur la Corée, l'Indochine, l'Algérie par exemple) et à l'établissement d'organisations internationales. Genève, cité de paix.
M. Vuilleumier indique que beaucoup d'Etats ont prétendu mener une politique pacifiste. On évite certains engrenages menant à la guerre. Pourtant, tous les pays continuent d'entretenir une armée. Rien n'est fait à Genève pour comprendre la cause des conflits, à part quelques études individuelles.
Audition d'Andreas Gross (conseiller national et politologue), qui déclare que la chose qui lui paraît la plus importante est de séparer la paix et l'armée. Lui-même s'est engagé dans ce sens. Les deux axes principaux d'un travail pour la paix sont, d'une part, l'augmentation de la chance de vie pour tout le monde et, d'autre part, apprendre à vivre le conflit. Ce dernier, enfant de la liberté, n'est pas synonyme de violence. Ces deux axes sont liés par la violence en tant qu'influence sur la réduction des chances de vie. M. Gross ajoute que la tranquillité n'est pas liée à la paix... mais au cimetière. Concernant l'initiative, il y voit une invitation faite au canton d'encourager le processus de paix et de réfléchir à tout ce qu'il est possible de faire dans ce sens, sachant qu'il s'agit d'un processus sans limites. M. Gross précise que cette initiative ne devrait pas concerner l'armée, celle-ci étant une institution à part. Il estime qu'il serait intéressant de développer la théorie présente dans l'initiative pour montrer la potentialité de la pratique d'un tel concept. Développer ce concept toucherait à tous les domaines de la politique. Il s'agit donc d'une opportunité énorme pour le canton.
Il ajoute qu'il ne faut pas juger un projet par ses auteurs. Il s'agit d'un projet pacifiste et non antimilitariste. Même si l'armée constitue un obstacle, elle n'est pas concernée par le fond du problème. Le travail pour la paix est un processus sans fin. Un tel projet ferait progresser le canton et l'ensemble de la Confédération. Développer la paix est un effort permanent et devrait être le discours de tous les politiciens. Il s'agit de développer une approche visant un processus qui augmenterait les potentialités de la paix et qui réduirait la violence.
En tant qu'historien et politologue, il pense que l'initiative 109 est une chance énorme. Il faut élaborer une philosophie de maintien et de développement de la paix en établissant des critères.
Est-ce que les Chambres fédérales vont démolir l'initiative si elle est acceptée, demande un député ? M. Gross de répondre : « que ce qui heurte la loi pousse les cantons à changer ce droit. Mais l'initiative, en grande partie, ne heurte pas ce droit national, mais suit une ligne. » M. Gross se dit favorable à l'intégration de la démocratie directe au sein de l'Union Européenne. De même, il est favorable aux initiatives cantonales, le vrai changement étant le résultat d'efforts cantonaux, voire communaux (ex : vote des femmes, environnement, etc.). Ainsi, il faut envisager une politique plus préventive que répressive.
Audition de Mmes Marie-Hélène Domergue et Laurence Reichler, venues présenter l'Association suisse de communication non-violente (ASCNV). L'initiative 109 est un plus et va dans le sens du travail effectué. Celle-ci est le genre de projet dont elles et leurs collègues rêvent. Elles sont particulièrement intéressées par le programme d'éducation et de prévention des conflits. Cette jeune association enseigne par des séminaires tous publics. Une de ces dames est enseignante et travaille ce thème avec ses élèves, mais la demande est grande parmi les enseignants. Approche différente de la violence, meilleures relations entre élèves et professeurs. Mme Reichler a travaillé longtemps à l'étranger avec des jeunes requérants d'asile et les jeunes du pays d'accueil, ainsi qu'avec des organisations humanitaires confrontées à des problèmes de communication. Le travail de cette association est remarquable et demanderait un soutien actif, car la demande est forte. La communication non-violente reste peu développée en Suisse, au contraire de l'Autriche, par exemple.
Audition de M. Colin Archer, secrétaire du Bureau international de la paix (BIP), qui constate que l'on n'a pas vraiment su faire face aux défis du XXe siècle dans le domaine des conflits. Il y a eu une recrudescence durant ce siècle d'Etats échoués. Dans ce cadre, la culture de la paix ne cherche pas seulement à diminuer l'armement, mais à favoriser la notion de démocratie et à renforcer la position des sociétés civiles. Il s'agit d'instaurer une tradition de respect mutuel et de dialogue.
Concernant plus particulièrement Genève, M. Archer estime qu'en tant que ville diplomatique, elle pourrait être active dans de nombreux projets internationaux, notamment au niveau institutionnel. Elle pourrait prendre une place de leadership dans l'éducation à la paix. Cette éducation pourrait se faire par le biais de l'école et des médias. Cette conception d'éducation à la paix serait beaucoup plus fructueuse que celle, traditionnelle, de repli militaire.
Abordant la question de la reconversion de l'industrie militaire, il reconnaît qu'il y a évidemment un risque de chômage lié à cette reconversion. Il rappelle que des études ont été faites à ce propos au BIT et note qu'il y a actuellement un ralentissement des efforts dans ce domaine. Il faudrait donc revoir la stratégie, sachant que plus de 750 milliards de dollars sont consacrés chaque année à des fins destructives, ce qui est aberrant. Ainsi, dans cette nouvelle stratégie, la Suisse pourrait jouer un rôle important.
Au niveau municipal, M. Archer rappelle qu'il existe plusieurs réseaux établis entre les villes, dont celui des villes messagères de paix. Lors de la conférence, elles seront toutes regroupées pour se concerter et débattre de leur rôle dans la promotion de la paix. Le BIP a demandé à la Ville de Genève de participer. M. Archer ajoute qu'à La Haye on fêtera le 100e anniversaire de la première conférence sur la paix, organisée à l'époque par le tsar de Russie. Revenant sur le rôle des municipalités, M. Archer conclut en disant qu'il y a énormément de possibilités pour une ville qui s'affiche de mettre en avant une vision non militaire de la sécurité.
A la question de savoir qui de l'armée ou de la société civile doit être le moteur de la réflexion sur une culture de paix, M. Archer répond que c'est à la société civile de prendre ce rôle, en utilisant la force de la population elle-même. Le problème des forces armées est que leur problématique est réduite à une problématique militaire. Or les défis de la société contemporaine ne peuvent être envisagés par le biais d'une solution militaire. Par exemple, le problème du Kosovo n'est pas d'ordre militaire. Ainsi les défis actuels s'inscrivent dans le cadre d'une force économique s'opposant à la fragilité des sociétés. Concernant le chômage, est-ce que l'armée a des projets dans ce domaine ? Ainsi, il s'agit d'abord de défis politiques. Maintenant, ce n'est pas uniquement la société civile qui doit être le moteur de la réflexion, car elle est encore trop faible. Il y a donc nécessité d'un partenariat avec les domaines de la recherche, de l'enseignement et de la justice, notamment pour la promotion d'une voie non militaire.
M. Archer indique que l'UNESCO a déclaré l'an 2000 année internationale de la culture de la paix. Il y a là une opportunité de mettre en avant des projets allant dans ce sens, entre autres au niveau des médias, de l'enseignement et de l'édition. On recherche surtout une participation des jeunes puisqu'ils appartiennent à une génération qui n'a pas connu la guerre. Il s'agit de créer quelque chose de nouveau qui impliquerait tous les domaines de la société. D'où l'importance du partenariat.
M. Archer estime que dans l'initiative, il n'y a rien qui puisse poser problème. Les points soulevés sont tout à fait pertinents. Pour lui, la réduction des dépenses militaires est indispensable. Quant à l'idée de l'Institut de la paix, c'est un projet qui traîne depuis de longues années. Le point peut être le plus important de l'initiative est celui touchant à l'enseignement. Il est absolument essentiel que Genève s'affiche comme étant à l'avant-garde de l'éducation à la paix. M. Archer soulève ensuite la question de l'accueil des victimes de violence, aspect qui est souvent négligé, et celle du service civil, qui pourrait être un moyen de favoriser les ressources humaines des ONG. M. Archer note que parfois des décisions politiques ne sont pas soutenues financièrement. Dans ce cas, il serait tragique si dans le cadre de ce projet on laissait tomber l'investissement financier.
Les auditions furent de qualité et il n'est pas possible dans ce rapport d'en écrire davantage. Je me réserve pour la plénière, afin de compléter si besoin est.
Pour conclure cette partie, vous aurez remarqué combien la grande majorité de ces auditions soutiennent le bien-fondé de l'initiative 109 et combien ces personnes espèrent d'une manière ou d'une autre voir cette culture de paix devenir une réelle démarche encouragée à Genève.
Deux événements encore :
Un contre-projet a bien été proposé par M. Froidevaux. La majorité de la commission a refusé celui-ci en « préconsultation ». Le député Béné a d'ailleurs annoncé son retrait à la dernière séance du Grand Conseil en date du 3 décembre 1998.
Ce contre-projet était une réduction massive de l'initiative 109, vidée de sa substance, où il était plus question de politique de sécurité que de paix et où l'armée reprenait sa place face à ce projet citoyen. Le contre-projet se substituait également au canton, aux communes, à leurs administrations et aux institutions publiques.
Un nouveau recours de droit public a été déposé par un citoyen contre la décision du Grand Conseil de la République et canton de Genève du 26 juin 1998, publiée dans la FAO du 4 juillet 1998, déclarant recevable l'initiative 109. Ce recours a été déposé le 4 septembre de cette année. Il n'a pas eu d'effet suspensif pour la suite de nos travaux. Me Lachat, mandaté par le Grand Conseil, et auditionné par notre commission, nous a affirmé qu'il n'y avait pas d'obstacle à ce que la commission poursuive ses tâches.
Arguments en faveur du soutien sur le fond de l'initiative
La construction de la paix : actualité d'une démarche
Le mot « paix », qui se trouve dans le titre du nouvel article constitutionnel proposé par cette initiative (« Politique de paix »), mérite une brève clarification préliminaire. Par paix, nous n'entendons pas l'absence de conflits, ou l'empêchement de leur dénouement, mais plutôt des processus de gestion des conflits par des moyens non-violents.
La paix, la recherche de solutions non-violentes des conflits, est certainement un domaine qui a de l'avenir. Le fossé grandissant entre parties « riches » et « pauvres » de la planète, l'augmentation des inégalités sociales à l'intérieur de notre société, sont autant de facteurs qui favorisent la multiplication et l'aiguisement des conflits.
Depuis la fin de la guerre froide, on peut constater que la nécessité de mettre en oeuvre des politiques de prévention des conflits avec des moyens non-militaires commence à être de plus en plus reconnue, du moins au niveau des discours et des intentions. C'est le cas au niveau international, par exemple avec l'adoption de l'« Agenda pour la paix » par l'Assemblée générale de l'ONU en 1992, ou encore avec le « Programme pour une culture de la paix » de l'UNESCO. Toutefois, ces programmes se heurtent encore largement à la prédominance des intérêts particuliers des Etats ainsi que de leur politique de puissance. L'énorme disproportion entre les moyens consacrés aux budgets militaires et ceux alloués aux instruments civils de prévention des conflits en dit long sur la réelle volonté de poursuivre une politique de paix avec des moyens pacifiques.
Dans ces conditions, il est plus que compréhensible que les organisations internationales actives dans la prévention des conflits, ou dans le traitement de leurs conséquences, font de plus en plus appel, pour la « construction de la paix », à la collaboration d'acteurs et intervenants non étatiques (les ONG, les collectivités locales).
La situation en Suisse
La disproportion entre moyens militaires et civils mentionnée plus haut vaut aussi pour la Suisse. Dans notre pays aussi, c'est encore presque exclusivement la Confédération, avec ses institutions (armée, diplomatie, relations internationales) qui est chargé de la réalisation de cette politique.
Bien qu'une réorientation de la politique de sécurité semble s'amorcer en Suisse, force est de constater que c'est encore et surtout avec les moyens militaires (le développement et l'entretien de la force militaire et policière) qu'elle est pratiquée. La réorientation de cette politique envisagée par différentes commissions d'études - officielles, comme celle présidée par l'ancien ambassadeur Edouard Brunner ou privées, comme celle présidée par l'ancien conseiller aux Etats Otto Schoch - se dirige vers une intégration de l'armée et de la politique de sécurité suisses dans l'OTAN. Malgré des formules alléchantes, telles le « Partenariat pour la paix », il faut bien admettre que l'OTAN reste une alliance militaire, dont l'action concrète répond surtout aux intérêts stratégiques de la première puissance militaire et économique de la planète (les Etats-Unis d'Amérique).
« Genève, République de paix »
Face à cette évolution, qui risque de faire de Genève une base de l'OTAN (ne fût-ce qu'au niveau « diplomatique » et/ou dans la formation de cadres spécialisés « ès interventions militaires pour la paix »), nous pensons qu'il est important de promouvoir une autre conception de la paix et de la résolution des conflits. De par son rôle international (siège européen de l'ONU), son passé (lieu de fondation de la première organisation pacifiste sur le continent européen, berceau de la Croix-Rouge, siège de la Société des Nations et de la Conférence pour le désarmement, ...) et sa richesse actuelle en mouvements et organisations non gouvernementales actives pour la paix, le désarmement, le respect des droits humains et le soutien à une multitude de populations opprimées, Genève possède déjà un terreau extrêmement fertile dans le domaine de la paix et de la prévention des conflits violents. Les désastres humanitaires, les guerres, mais aussi les violences quotidiennes de cette fin de siècle sont autant de preuves des manquements si ce n'est de la faillite des politiques de sécurité officielles. Il nous semble que les énergies, les expériences, les intelligences présentes à Genève sont à même de développer et d'innover dans ce domaine.
Commentaire aux différents points de l'initiative
Principes
L'initiative « Genève, République de paix » n'est pas un simple « manifeste » anti-armée. Elle ne vise pas non plus à expulser l'armée suisse du canton. Les prérogatives en matière de politique militaire et de diplomatie restent confédérales. « Genève, République de paix » permettrait cependant de développer des approches tout à fait complémentaires, novatrices et originales par rapport à la politique de sécurité nationale. Avec l'introduction de ce nouveau titre dans la constitution, nous voulons donner une base constitutionnelle au développement par le canton, avec les moyens et les compétences qui lui sont propres, d'une politique de construction de la paix basée sur une conception solidaire de la paix, à réaliser avec des moyens non militaires. Cette politique devrait se construire « par le bas », donc avec (et non pas « pour » ou « au nom de ») la population et les acteurs de la société civile, que ce soit au niveau local, ou au niveau international.
Dans ses principes, l'article constitutionnel prévoit le « développement d'une véritable culture de la paix ». Une brève explication de ce concept s'impose.
Le besoin d'approches civiles pour la prévention des conflits et pour la construction de la paix n'est pas un postulat formulé uniquement par le GSsA ou par d'autres mouvements pacifistes : en novembre 1997, l'Assemblée générale de l'ONU a proclamé l'an 2000 « Année Internationale pour une culture de la Paix ». Voici les buts principaux définis dans le « Programme pour une culture de la Paix » de l'UNESCO :
« promouvoir le respect des droits de l'homme, la tolérance et les principes démocratiques ;
encourager le dialogue entre les cultures et le pluralisme culturel ;
lutter contre toute forme de discrimination ;
rejeter la violence ;
reconstruire les infrastructures sociales et politiques qui soutiennent la paix et le développement durable ;
prévenir l'escalade des conflits violents ;
faciliter l'instauration d'un dialogue constructif dans les phases de tension précédant ou résultant d'un conflit.»
UNESCO, Bulletin Culture de la Paix, n. 2, avril 1997, Paris.
Moyens
Trop souvent, les beaux principes restent lettre morte dans leur application concrète. C'est pourquoi, la deuxième partie de l'article constitutionnel contient une série de moyens qui permettent au canton de réaliser concrètement quelques aspects de la politique de paix envisagée dans les « principes » fixés au début. La subdivision en trois parties (les alinéas 2, 3 et 4) de la partie consacrée aux « moyens » reflète des différences importantes quant à la nature des tâches attribuées au canton et à la manière de poursuivre leur réalisation.
Alinéa 2 : démarches politiques
On trouve ici des objectifs que l'on pourrait qualifier de « démarche politique » à suivre par le canton à tous les niveaux (local et global), comme le « soutien » aux démarches visant le désarmement, la solidarité entre les peuples, le respect des droits humains et des femmes. On comprend d'autant plus mal le reproche de non-conformité au droit fédéral de ce point (l'intervention auprès des institutions nationales et internationales compétentes dans le sens du soutien à toute démarche visant le désarmement global, la coopération, etc. (cf. alinéa 2) formulée dans le rapport du Conseil d'Etat et repris par la minorité de la commission législative du Grand Conseil, que dans ce même rapport le Conseil d'Etat soutient que « depuis de très nombreuses années, la paix, le désarmement, les questions de sécurité et l'ensemble des instruments susceptibles de résoudre les conflits sont au coeur des activités de beaucoup d'institutions genevoises, internationales, nationales ou cantonales, universitaires et non universitaires que souvent le canton ou la ville soutiennent. » (Rapport du Conseil d'Etat sur l'initiative 109A, du 18 déc. 1996, p. 28.)
La réduction des dépenses militaires, la restitution à des usages civils des terrains militaires et la conversion civile des activités (économiques ou institutionnelles) liées au domaine militaire sont des objectifs politiques pour lesquels la marge de manoeuvre cantonale est très limitée. C'est la raison du choix du mot « encourager » au début des points a), b) et c) de cet alinéa 2. Cependant le canton devrait prendre position en faveur de ces objectifs, à chaque fois que l'occasion se présente, que ce soit lors d'une consultation par les autorités fédérales au sujet de la politique de sécurité ou de la renégociation d'un contrat de bail avec les autorités militaires.
Alinéa 3 : mesures concrètes
Cette partie de l'initiative contient des objectifs qui s'inscrivent directement dans la prévention des conflits violents et du développement d'une culture de la paix, avec des mesures concrètement réalisables par les autorités cantonales. Les points a) (encouragement à la recherche pour la paix et soutien des actions de la société civile pour la solution non-violente des conflits) et b) (Institut de recherches pour la paix) permettraient aux organisations et associations déjà actives dans la société civile de recevoir un appui politique et matériel dans leurs activités. Par exemple, les acteurs non institutionnels proposant des solutions non-violentes aux conflits dans leurs régions pourraient trouver à Genève des occasions de rencontre et une tribune dont ils ne disposent que très difficilement, sinon jamais, ailleurs.
L'éducation à la paix est un élément essentiel de tout projet de « promotion » de la culture de la paix (al. 3, point c). Le développement des phénomènes de violence auprès des jeunes rappelle l'intérêt de cette proposition au niveau local également (voir à ce propos le texte annexe de Mme Marielle Budry).
L'accueil des victimes de la violence (point d), est lui aussi un moyen de limiter la portée et les effets de la violence ; sans parler de la nécessité d'entretenir et de réactualiser dans la pratique le principe de « Genève cité de refuge ».
Dans plusieurs pays européens, où le service civil a été introduit depuis longtemps, ce sont souvent des communautés locales (communes, villes, régions) qui s'occupent de la promotion de cette alternative au service militaire (point e). Les bénéficiaires en sont non seulement les jeunes, qui ont ainsi plus de possibilités de s'engager dans d'autres tâches plutôt que dans l'apprentissage des « vertus » et des compétences guerrières, mais aussi les collectivités publiques elles-mêmes qui peuvent ainsi améliorer leur offre de services à la communauté dans toute sorte de domaines. En Suisse, les lacunes à combler à ce niveau sont évidentes (voir à ce propos le texte annexe de Sébastien L'haire).
Toujours à l'alinéa 3, l'initiative postule le renoncement à toute manifestation de promotion militaire, (point f). En demandant au canton de développer une culture de paix, l'initiative ne pouvait accepter que l'on puisse d'une manière quelconque promouvoir le contraire.
Dans le cadre des obligations confédérales, le canton doit organiser des journées d'information aux futures recrues, garder une administration militaire et s'occuper de l'arsenal. Ce sont des obligations qui incombent aux cantons, et l'initiative ne peut pas y toucher. En revanche, les défilés militaires, ainsi que toute manifestation publique de promotion des activités militaires dépassant le cadre strict des obligations confédérales ne pourraient plus se faire avec le soutien de la part du canton. Les démonstrations musclées de force sont d'un autre temps.
Alinéa 4 : « Plus jamais ça ».
Ici sont contenues des dispositions concernant la mise en oeuvre de moyens non militaires pour garantir la sécurité de la population à l'intérieur du canton et le renoncement à faire appel à l'armée.
Le besoin de sécurité concerne des domaines (par exemple la sécurité sociale ou environnementale) qui dépassent très largement les menaces causées par les agissements d'individus ou de groupes armés. Mais même face à ces dernières, les réponses militaires constituent plutôt une partie du problème que de la solution. Faut-il rappeler que l'Algérie, Israël ou l'Irlande du Nord sont parmi les pays les plus militarisés au monde ? La sécurité n'est pas un défi militaire mais politique. La répression militaire n'éliminera jamais les causes de la violence, de l'insécurité et des troubles.
Le canton renoncerait à sa faculté d'appeler à la troupe pour assurer le maintien de l'ordre intérieur (point b). Consulté en 1996 à propos des nouvelles ordonnances sur le recours à la troupe, le gouvernement cantonal avait déjà fait état de son opposition à faire usage de cette faculté. « Une armée de milice n'est pas un moyen adéquat pour assurer l'ordre public » avait déclaré J.-P. Maitre (Journal de Genève 30.1.97). « Plus jamais ça » ? Il est effectivement très difficile de trouver quelqu'un à Genève qui n'approuve pas l'admonestation inscrite sur le monument du massacre de 1932. Pourtant, on constate que le recours à la troupe continue à être envisagé par les responsables militaires et de l'administration civile pour des conflits d'ordre civil et de nature non-violente, qui n'ont rien à voir avec une situation de guerre civile. C'était le cas avec le scénario de l'exercice du bataillon genevois de fusiliers territoriaux 121 du 7 juin 1996 (une manifestation de chômeurs devant l'Hôtel des finances) ou encore avec la menace du recours à la troupe proféré par le chef de la police genevoise lors d'une rencontre (25 août 1998) avec les responsables du syndicat des policiers qui évoquaient la possibilité d'une grève de la police.
L'introduction de ces dispositions dans la constitution mettrait un terme aux tentations de certains responsables de recourir à la force militaire et les obligerait à parcourir la voie des solutions politiques et civiles pour la résolution des conflits.
Le dernier point (c) de l'alinéa 4 concerne la garantie de la sécurité des conférences internationales par des moyens non militaires. Aux considérations exposées pour les points précédents on peut en ajouter d'autres, d'ordre pratique et d'ordre « symbolique ». D'abord, il n'est pas du tout établi que le déploiement de l'armée ait été nécessaire pour la tenue des rares conférences internationales pour lesquelles on a fait appel à l'armée à Genève. Tout le monde s'accorde sur le fait que la garantie de la sécurité de ces conférences incombe à la police, puisqu'elle seule est entraînée de manière professionnelle à la protection rapprochée et à la lutte anti-terroriste. Quand ils étaient présents, les miliciens de l'armée suisse ont effectué des tâches de caractère subsidiaire (circulation routière, surveillance de bâtiments). La mise en oeuvre de moyens civils ne devrait donc pas poser de problèmes insurmontables, comme l'affirme le Conseil d'Etat dans son rapport. En revanche, l'aspect symbolique de la présence des troupes semble nettement plus important. Quand les soldats sont présents lors de conférences pour la paix, cela permet aux tenants de l'approche militaire de la sécurité de réaffirmer le rôle indispensable de l'armée pour l'aboutissement des processus de paix. A l'inverse, nous croyons que si Genève se donnait les moyens pour offrir un cadre le plus démilitarisé possible aux rencontres internationales pour la paix, le désarmement, les droits humains ou la coopération internationale qui s'y déroulent, cela ne pourrait que favoriser la réalisation de ces objectifs.
Enfin, pour situer la portée réelle des dispositions contenues dans l'alinéa 4, il convient de rappeler que la faculté de la Confédération (Conseil fédéral, assemblée fédérale) de faire appel à la troupe pour effectuer un service d'ordre dans le canton de Genève demeure inchangée.
Conclusion
A la fin de la dixième séance de cette commission ad hoc, le 16 octobre 1998, les commissaires acceptent l'initiative 109 par 7 OUI (1 Ve, 3 S, 3 AdG) contre 5 NON (3 L, 2 R).
L'initiative ne sera pas soumise en votation populaire avant la décision du Tribunal fédéral. En attendant une réponse positive du Tribunal fédéral, j'encourage les députées et députés à voter en faveur d'un projet d'avenir en soutenant l'initiative cantonale « Genève, République de paix ». Pour du sang neuf, votez l'initiative 109.
« La civilisation de notre époque, que l'on pouvait croire destinée à convier les hommes à la fraternité, s'affirme au contraire chaque jour davantage en leur fournissant les moyens de s'anéantir les uns les autres plus aisément, plus sûrement, plus commodément. Il semble, en vérité, que, désormais, le progrès moderne consiste surtout dans la recherche et la découverte des meilleurs engins de destruction. (...) » Henri Dunant, dans « L'avenir sanglant, 1859 ».
Annexe ci-joint à insérer ici IN 109 (en plus du t. à p.
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RAPPORT DE LA MINORITÉ
Introduction
La commission ad hoc a consacré 10 séances à l'étude de l'initiative populaire 109 intitulée « Genève, République de paix ! ». Et pourtant, il n'y a pas eu de vrai débat sur le fond. La querelle s'est surtout cantonnée à des aspects de procédure sans qu'ils soient, pour autant, élucidés. L'Alternative semble tant craindre l'issue des débats qu'elle en a imposé la clôture avant de connaître la réponse du Tribunal fédéral, sous prétexte de contrer le pouvoir judiciaire par une démonstration politique en obtenant un vote favorable du Grand Conseil. Ils veulent ainsi éviter d'avoir à justifier les termes d'une initiative idéologique dont le but réel n'est que de légaliser la désobéissance civique prônée de façon monomaniaque par la section genevoise du GSsA.
Pourtant, des citoyens se sont donnés la peine de relancer aujourd'hui le débat de la politique de paix en signant cette initiative. Lors de son audition, le comité du Groupe pour une Suisse sans Armée a même rapporté à quel point la récolte des signatures fut difficile. Si tous nos citoyens adhèrent très vraisemblablement à une politique de paix plus active de la part de notre canton, tous ne sont pas en accord avec les méthodes et moyens du GSsA. Il y avait donc lieu d'élargir la discussion afin d'assurer d'abord la paix de nos débats avant de vouloir exiger que les autres se donnent la paix.
Il est très dommageable que les excellentes idées véhiculées dans cette initiative n'aient pas bénéficié d'une meilleure mise en valeur, comme nous le recommandait d'ailleurs le conseiller national Andreas Gross, membre du GSsA, lors de son audition. En effet, au cours de cette dernière décennie, les équilibres politiques ont été chamboulés par la disparition de la politique dite des « deux blocs ». Les droits de la personne et les moyens pour les garantir se coordonnent maintenant de plus en plus à un niveau supranational, notamment pour l'ensemble des pays occidentaux. Les droits de l'homme sont discutés dans les grandes organisations internationales qu'abrite notamment Genève. Certains de nos concitoyens, en guerre avec notre législation, ont pu obtenir que leur bon droit soit reconnu à la Cour européenne des Droits de l'Homme. Les droits de la personne sont ainsi en perpétuelle évolution. Les respecter, c'est garantir la Paix, qui n'est jamais et ne sera jamais acquise.
Malgré cette évolution, il arrive encore que des droits reconnus soient remis en cause par des citoyens qui vont jusqu'à refuser la compétence des instances internationales. Lorsque ces conflits politiques quittent l'arène des parlements pour descendre dans la rue, il peut arriver que, parfois et par malheur, ils dégénèrent en conflits sanglants.
Contenir cette violence est un acte de solidarité qui ne peut plus se satisfaire des frontières politiques, cela nécessite l'engagement des moyens les plus divers qui, tous, doivent mener à une véritable culture de la Paix.
Aussi, la minorité vous recommande un contre-projet qui tienne mieux compte de tous les composants qui conduisent à un état de Paix.
Présentation de l'initiative
Une initiative purement antimilitariste
Cette initiative se résume à deux types de mesures. Celles qui seront appliquées et celles qui ne manifestent qu'une intention. L'interdiction de notre armée de milice sur le sol cantonal est la seule représentante de la première catégorie. Cette interdiction est donc la seule certitude en cas d'approbation de cette initiative par le souverain, à condition, bien évidemment, que le Tribunal fédéral et au demeurant les Chambres fédérales puissent considérer ce texte comme constitutionnel en lui accordant leur garantie. Toutes les autres mesures ne sont que des intentions, sans que la majorité n'ait même indiqué comment mettre en place ce programme. Bien que la majorité s'y refuse, le débat doit être porté sur les véritables enjeux politiques de l'initiative, à savoir quel soutien politique notre canton doit-il donner à nos autorités fédérales quant au rôle de notre armée ?
En dehors du refus de notre armée, la minorité soutient les idées contenues dans le reste de l'initiative. Le rapporteur de minorité ne va donc pas les développer. Tout au plus regrette-t-il de ne pouvoir en faire la critique, la majorité ne s'étant pas donnée la peine d'indiquer les moyens qu'elle entendait mettre en place pour les faire appliquer.
La cause des conflits selon les initiants : la présence de l'armée
En commission, le comité d'initiative, comme le conseiller national Andreas Gross, ont attribué l'origine des conflits armés directement à la présence de l'armée elle-même. Ils ont estimé que si l'humanité tout entière voulait bien se dessaisir de tous ses moyens pour se faire la guerre, la Paix serait définitivement assurée. Pour eux, la présence d'une force militaire dans un Etat retient l'expression des droits démocratiques, ne laissant aux citoyens que la possibilité de s'exprimer de manière violente lorsque ceux-ci sont par trop malmenés par le pouvoir politique en place. Si les Etats refusaient de recourir à toute force coercitive, les citoyens régleraient leurs différends entre eux bien avant que leur situation ne soit devenue exagérément conflictuelle, les Etats n'ayant plus eux-mêmes les moyens d'imposer à leurs citoyens une volonté autre que celle librement acceptée. Bien que cette philosophie n'ait pas de repères historiques dans notre République, ils estiment que Genève, ville internationale, siège de si nombreuses organisations développant des programmes de paix sur une échelle universelle, se doit d'avoir un tel article constitutionnel afin de montrer cet exemple au monde entier.
Le rôle de l'armée suisse dans les conflits : cette armée n'en a jamais été la cause
Les initiants reconnaissent que l'armée suisse n'a jamais été la cause d'un conflit intérieur ou extérieur. Cette initiative n'est donc pas le reflet d'une faute ou d'une erreur des autorités du canton vis-à-vis de l'Histoire.
Mais pour asseoir leur postulat initial, les initiants ont tenté de faire référence à l'Histoire, mais surtout à celle qui n'est pas encore écrite tant elle est controversée. Lorsque la minorité a demandé des faits incontestables, l'Alternative n'a autorisé que l'audition de M. Marc Vuilleumier. Bien que nous ne puissions reconnaître en lui la qualité d'expert neutre, lui-même n'a pas pu faire une seule référence historique qui puisse entériner l'hypothèse de base des initiants, pourtant clef de voûte de leur action politique.
Au contraire, M. Andreas Gross s'est dit, quant à lui, tout à fait favorable à notre système de milice, comme à son financement. A deux reprises, il s'est proposé de participer à l'élaboration d'un contre-projet qui puisse mieux prendre en compte la volonté pacifiste des initiants avec les impératifs d'une politique de sécurité sur le plan national et transnational. Cette ouverture, soutenue immédiatement par l'Entente, a été rejetée brutalement et sans ménagement par les commissaires membres du comité d'initiative qui tenaient à rester figés sur leur texte constitutionnel en refusant systématiquement ce débat.
Ainsi, si la majorité n'a pu faire la démonstration que l'armée était la cause des conflits, elle a montré, par son intransigeance, que la disparition du débat démocratique l'était malheureusement bien quant à lui.
Cette initiative est défavorable à l'image de Genève, la ville internationale où se discute la paix
En l'absence d'une référence politique antérieure, on aurait pu cependant saluer la démarche originale contenue dans l'initiative pour notre République. L'initiative aurait créé une sorte de « laboratoire politique ». Il faudrait tenter l'expérience, dira la majorité plurielle ! Or, cette démarche n'est qu'une insoutenable aventure.
Pour le conseiller fédéral Adolf Ogi, l'initiative pourrait au contraire placer Genève dans une situation si délicate qu'elle ne serait plus à même de garantir son rôle de ville internationale promouvant la paix. En effet, les belligérants ont besoin d'un endroit sécurisé pour se rencontrer. Cet impératif de sécurité nécessite l'ensemble de nos moyens, y compris ceux de l'armée.
Lors de la dernière conférence majeure en date, celle de l'OMC, le pouvoir politique a dû mobiliser de forts contingents de policiers et de gardes- frontières extracantonaux pour assurer la sécurité de nos concitoyens. Le recours à l'armée a été limité à la logistique, excepté ceux dévolus à la sécurité de l'espace aérien.
Le remplacement de ces moyens par une structure civile est totalement illusoire. D'une part, l'Alternative critique régulièrement notre police cantonale et aurait tendance à plutôt lui enlever des moyens qu'à lui en donner et d'autre part l'état de nos finances rend un tel projet tout simplement utopique.
La situation de Genève sur le plan intérieur est déjà des plus difficiles. Or, l'Alternative cherche maintenant à nuire en plus à l'image de la Genève internationale. En ne pouvant donner l'assurance d'une sécurité optimale aux pays en conflit qui viendraient chez nous parler de paix, nous risquerions la disparition de ces conférences au profit de villes déjà en vive concurrence comme Bonn ou Vienne.
Une politique de paix plus active grâce à un contre-projet
Le rapporteur de minorité vous propose de soutenir le projet de loi 7909, contre-projet à l'initiative 109. La nécessité de ce nouvel article constitutionnel ainsi rédigé figure dans l'exposé des motifs. Il entend encore souligner l'importance de ce texte qui complète l'initiative 109 en y intégrant la politique de sécurité et un engagement humanitaire plus actif. Cet engagement de Genève permettrait d'améliorer encore son image sur le plan international.
Aux yeux du monde, la Suisse - et particulièrement Genève - est le berceau du droit international. Les Conventions de Genève ont scellé le rôle de la Croix-Rouge comme organisme éminemment neutre dans les conflits. Genève a été ensuite reconnue en étant choisie pour abriter le siège de la SDN, prémice d'une aura extraordinaire qui a offert et qui continue d'offrir à Genève une renommée planétaire.
Nous avons beaucoup reçu, nous devons aujourd'hui beaucoup donner.
Un nouvel engagement de Genève sur le plan international nécessite de débattre de notre neutralité, figée depuis 1815. Le contre-projet est cette chance. La neutralité suisse est notre neutralité, elle est ce que nous en faisons, ce que nous la croyons être ; elle est à notre image, à l'image de notre place aujourd'hui dans le monde, elle est si helvétique que bien peu la comprennent encore au-delà des frontières.
Aussi, le rapporteur de minorité vous recommande de soutenir le projet de loi 7909 qui indique aux autorités fédérales notre soutien à la formation des bérets bleus et jaunes. Ceux-ci deviendront aussi nos ambassadeurs de paix et exprimeront notre solidarité et notre volonté d'aplanir les différends à l'origine de tant de souffrance.
ANNEXE
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit :
Art. 160D (nouveau)
1 Dans la limite du droit fédéral, le canton développe et applique une politique de sécurité fondée sur la mise en oeuvre de moyens pacifiques, aptes à résoudre tout conflit au niveau local et international. Il encourage activement la recherche et la promotion de mesures de prévention des conflits à travers le développement d'une véritable culture de paix. Cette politique est réalisée en collaboration avec les autorités fédérales .
2 Dans ce but, le canton soutient toute démarche visant à la prévention de la guerre, la coopération et la solidarité entre les peuples et le respect des droits de la personne. A de telles fins, il peut soutenir ou créer des institutions de droit public ou privé, ou encore s'y associer. De plus, le canton encourage la mise à disposition des installations et des équipements de l'armée pour des mesures de promotion de la paix internationale.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Selon l'article premier de la loi fédérale sur l'armée et l'administration militaire (LAAM), du 3 février 1995, l'armée contribue à la prévention de la guerre et de ce fait au maintien de la paix.
Dans le cadre de sa mission, elle doit en outre :
1. soutenir les autorités civiles lorsque leurs moyens ne suffisent plus pour faire face aux menaces graves contre la sécurité intérieure ;
2. soutenir les autorités civiles lorsque leurs moyens ne suffisent plus pour maîtriser d'autres situations extraordinaires, en particulier en cas de catastrophes dans le pays et à l'étranger ;
3. contribuer aux mesures de maintien de la paix dans le contexte international.
Aujourd'hui, des troupes de sauvetage sont instruites sur la place d'armes de Genève. Il est question de leur transfert à Wangen an der Aare. Genève deviendrait alors la place d'armes des bérets jaunes et des bérets bleus. A ces derniers seraient confiés la tâche essentielle de la promotion de la paix sur le plan international.
Le Conseil d'Etat a agi et continue d'agir pour la promotion de la paix. Il est par exemple membre fondateur de la Fondation du « Centre de politique de sécurité » ainsi que de celle du « Centre international de déminage humanitaire - Genève ».
Lors de l'analyse du rapport Brunner, le Conseil d'Etat a soutenu la recommandation de former des militaires volontaires tant suisses qu'étrangers dans le domaine du déminage et autres techniques de destruction d'armes. Cette prise de position renforce l'image de Genève qui entend être, en Suisse et dans le monde, à l'avant-garde des efforts allant dans ce sens. En décidant de la formation des bérets jaunes et bleus à Genève, la Confédération lui reconnaît, elle aussi, ce rôle fondamental passé, présent et futur.
L'initiative « Genève, République de paix » veut, de manière contraignante, orienter l'action des responsables politiques dans une vision antimilitariste. Or, vouloir gêner à quelque niveau que se soit, les capacités de notre armée à assurer son rôle, nuit à sa tâche fondamentale du maintien de la paix. Indéniablement, l'armée suisse fait partie de nos institutions oeuvrant pour la paix.
Les initiants relèvent l'image d'une armée militariste. Ce concept n'est en accord ni avec l'Histoire de notre pays, ni avec une armée de milice qui se confond avec notre patrimoine démocratique. Aussi, devient-il légitime aujourd'hui d'inscrire un nouvel article constitutionnel qui rappelle aussi aux corps de troupes genevois les missions qu'entend donner la Confédération à l'armée en général.
Nous souhaitons que notre Conseil réserve un bon accueil à ce présent projet de loi constitutionnelle qui ordonne la poursuite et le développement d'une culture de paix, afin qu'elle se fasse dans les tâches fondamentales de l'Etat comme par exemple la période de scolarité obligatoire ou à travers des organismes tant publics que privés oeuvrant dans ce même sens. Ses buts sont ainsi en harmonie avec les autorités fédérales, gage de paix intérieure.
Débat
M. Luc Gilly (AdG), rapporteur de majorité. Je rappelle que nous traitons de l'initiative «Genève, République de paix» et que nous allons discuter et voter sur le fond et non sur la forme, c'est-à-dire sur le contenu de l'initiative et non sur sa partie juridique puisque, pour le moment, ce point a été réglé et qu'un recours est déposé devant le Tribunal fédéral dont nous n'avons toujours pas reçu la réponse.
La commission ad hoc a donc décidé de conclure ses travaux sur cette initiative en attendant la réponse du Tribunal fédéral et en attendant, je l'espère, de pouvoir la soumettre à la population genevoise le plus rapidement possible.
S'agissant des travaux de la commission, il faut dire que nous avons eu dix séances de commission et onze auditions, ce qui était un peu fastidieux.
Lorsque nous parlons de paix, je ne comprends pas le désintérêt que j'ai pu constater de la part de l'Entente. Je dois le rappeler - même si j'entends derrière moi des oh ! et des ah ! - car la présence de l'Entente dans cette commission n'a pas été à la hauteur du débat que nous aurions pu avoir au sujet de cette initiative. L'objet en cause et la recherche de la paix sont suffisamment importants et délicats pour espérer avoir un peu plus d'attention.
Et lorsque j'entends des oh ! et des ah !, je dis simplement à M. Froidevaux qui est devant moi qu'un jour nous étions seuls en commission à essayer de sauver la mise. Comme je l'ai dit dans mon rapport, je rappelle aussi que M. Balestra - qui avait déposé un recours retiré par la suite - est venu deux fois à cette commission ! Il y a donc une certaine légèreté de la part de l'Entente que j'aimerais comprendre.
Il me semble difficile d'admettre... (Commentaires.) John, tu me laisses parler, s'il te plaît !
Le président. Vous avez terminé, Monsieur le rapporteur ?
M. Luc Gilly, rapporteur de majorité. Non, j'aimerais simplement qu'on se taise ! Je rappelle que cette initiative a pour but d'inscrire dans notre constitution genevoise un article sur la recherche de la paix et une véritable culture de paix qui me semblent plus que jamais nécessaires. Chacun est d'accord sur ce point ; c'est simplement le contenu de l'initiative qui dérange beaucoup de gens. Si c'est le GSsA qui l'a lancée, ce n'est pas une raison pour la maltraiter !
J'ai dit aussi dans mon rapport que, si un autre groupe avait lancé cette initiative, elle aurait eu beaucoup moins de mal à passer et à être entendue. D'autre part, je ne pense pas que ce soit une maladie d'être pacifiste et antimilitariste car, si c'est une maladie, dans ce cas plus de la moitié des Genevois sont malades du pacifisme et de l'antimilitarisme.
Le Grand Conseil va donc attendre la décision du Tribunal fédéral. J'aimerais maintenant qu'on puisse lancer les débats, mais avant de conclure ma première intervention, je rappellerai, Monsieur le président, que M. Froidevaux et certains de ses collègues avaient proposé un contre-projet. Ce contre-projet a été retiré lors de la dernière séance du Grand Conseil le 3 décembre 1998. Par conséquent, je ne comprends pas que ce contre-projet et surtout le développement des arguments de la part du rapporteur de minorité figurent encore dans notre rapport.
M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur de minorité. Pour clore cet aspect formel de la présence d'un contre-projet dans le rapport de minorité : nous avons décidé de retirer le contre-projet à l'initiative 109 associé à ce rapport de minorité lors de la dernière séance du Grand Conseil pour éviter un double débat, afin d'être absolument formel et ne faire qu'un débat sur l'initiative 109 pour faciliter les travaux parlementaires.
Quant au débat sur le fond à propos de cette initiative, M. Luc Gilly est le porte-parole d'une très belle utopie ! Il est très important que nombreux soient ceux qui puissent partager avec lui le même idéal. Personnellement, je n'aurais pas souhaité onze mille signatures mais quatre cent mille, soit tous les habitants de Genève, étrangers y compris. J'aurais alors été heureux de partager avec vous ce soir l'euphorie d'un tel rêve porteur d'espoir à terme, à très long terme, car en fait même si tous les habitants de Genève, moi-même y compris, avaient signé votre initiative, j'aurais tout de même mis un non dans l'urne au vote final. Pour pouvoir rejoindre votre idéal durablement, j'aurais en effet eu besoin aussi et surtout de l'engagement des habitants de la planète entière.
Or, près de la moitié du monde est engagée de manière plus ou moins constante dans un processus guerrier. Que valent donc onze mille intentions de paix démilitarisée contre trois milliards de personnes qui imposent leur paix par leurs guerres. Par exemple, cette nuit même et en ce moment, de nouvelles souffrances sont venues s'ajouter à bien d'autres. La paix mondiale est discutée constamment dans des organisations internationales bien plus puissantes que notre République. Ces organisations ont des buts sans doute sincères et pourtant, même elles, se laissent aller à des actes qui échappent à l'entendement.
Que ferait donc Genève avec cet nouvel article constitutionnel qui interdit toute présence militaire sur son sol ? Bien évidemment, son rôle de ville internationale lui serait retiré, car elle serait parfaitement incapable d'assurer la sécurité des grandes conférences. Les moyens civils ont un coût que plus personne ne veut assumer ; ni le canton, ni la Berne fédérale. Par exemple, les factures de l'OMC ne seraient pas payées !
A croire les initiants, nous devrions nous replier sur nous-mêmes et laisser les autres se battre pour la paix. C'est un bien drôle de signe en cette période de l'Escalade. En fait, la majorité agit comme si elle ne supportait plus les contraintes. Tuons le malade, cela évitera de devoir le soigner ! Tuons l'armée, cela fera disparaître la guerre !
Si tout cela était si simple, il y a bien longtemps que le niveau des souffrances humaines aurait été abaissé ; pourtant il n'a pas été nécessaire d'engager l'armée pour assister à des massacres en Algérie, au Rwanda ou en Irlande du Nord. Il n'est pas nécessaire d'être Russe pour être incapable de lutter contre le crime organisé, être Genevois suffit aussi maintenant !
Notre future présidente de la Confédération disait récemment : «La perfection est inhumaine.» Ce constat, je suis bien obligé de le faire mien ! Mais il y a un avantage à ne pas être parfait : nous devenons alors perfectibles. L'imperfection impose la recherche du mieux qui nous éclaire chaque jour dans notre compréhension de la condition humaine. Cet effort de compréhension nous montre nécessairement que nous ne sommes pas faits que de bien ; nous avons aussi à composer avec du moins bon. C'est pour cela que nous ne pouvons suivre vos utopies, Monsieur Gilly !
Mme Anne Briol (Ve). Il est tout de même un peu cocasse de lire sous la plume du rapporteur de minorité que la commission n'a pas su débattre sur le fond de l'initiative 109. C'est en effet le rapporteur de minorité lui-même qui n'a pas cessé de remettre sur le tapis des questions de procédure au cours des débats de la commission et il ne peut donc s'en prendre qu'à lui-même.
Je rappellerai aussi, comme l'a fait M. Gilly, qu'au début des travaux la droite ne semblait pas vouloir participer à un débat puisque le rapporteur de minorité s'est même vu devoir représenter la droite à lui tout seul au cours d'une séance.
Mais venons-en au débat sur le fond puisque c'est ce qui nous intéresse ce soir. L'initiative Genève, République de paix permettrait à Genève de faire preuve d'innovation en développant une véritable culture de paix indépendante de l'armée. Ceci par des moyens divers allant de l'incitation à la réduction des dépenses militaires jusqu'au développement d'un programme d'éducation à la paix dans le cadre de l'instruction publique.
De par son rôle international et sa richesse en mouvements et organisations non gouvernementales actifs dans les domaines du respect des droits de l'homme et de la paix, Genève se doit de développer la recherche de solutions non violentes aux conflits. Les Verts jugent que les moyens proposés par l'initiative sont cohérents et crédibles. Elle propose en effet des démarches politiques, tel qu'on peut le voir à l'alinéa 2, demandant de soutenir toute démarche visant le désarmement, la coopération et le respect des droits de l'homme ; et des actions concrètes, tel qu'on peut le voir à l'alinéa 3, demandant un développement d'un programme d'éducation à la paix ou l'accueil des victimes de la violence. Ne soyons pas frileux et développons à Genève une politique de paix d'avenir.
M. Régis de Battista (S). Je tiens tout d'abord à remercier le rapporteur de majorité pour son rapport qui a été long et difficile. Pour cette première intervention, je ne rentrerai pas dans le contenu de l'initiative. Par contre, je tiens à souligner son importance pour notre canton ouvert à la paix, au dialogue et au monde international.
Nous avons la chance de pouvoir nous prononcer sur cette question dans un contexte de politique mondiale difficile qui demande à des gouvernements de trouver d'autres réponses que l'habituel refrain : préparons la paix en préparant la guerre ! C'est dans ce sens que je vais féliciter les acteurs de l'Appel de La Haye pour la paix 1999, qui demande à la société civile d'organiser une conférence mondiale sur la paix en mai 1999. L'initiative 109 va dans le même sens et montre concrètement comment Genève doit travailler pour la paix.
Concernant le rapport de minorité, il ne faut pas être dupe : c'est une simple récupération politique ! J'en veux pour preuve le retrait du projet de loi 7909 modifiant la constitution de la République et canton de Genève. Ce dernier n'était qu'un copier-coller dans lequel l'armée est proposée comme un acteur de promotion de la paix, ce qui n'a jamais été le cas. Durant le débat en commission, il a été clairement démontré que l'armée ne peut être l'acteur ou le moteur de la promotion de la paix. C'est plutôt le rôle de la société civile à travers les associations et les ONG. Par ailleurs, l'armée ne peut pas être juge et partie.
Nous savons tous que l'armée, même ceux qui la défendent, est en perte de vitesse et qu'elle se cherche d'autres objectifs afin de faire passer ses dépenses. Nous savons qu'elle a été contrainte de changer et que cette mutation n'est qu'un simple traitement cosmétique.
Pour revenir au rapport de minorité sur l'IN 109, je ne peux accepter les propos «monomaniaques» de M. Froidevaux, qui utilise ce terme pour qualifier la section genevoise du GSsA. Comme l'ont dit mes prédécesseurs, il n'est pas étonnant qu'il tienne ces propos car, plus d'une fois, il était seul en commission et s'est plaint d'être le seul moteur de l'Entente dans cette affaire. Il est également surprenant de lire que nos débats n'ont pas été démocratiques, alors que nous avons auditionné des acteurs importants de Genève et spécialement à sa demande. C'est là une chose à souligner ! L'Alternative a voté l'arrêt des auditions afin que le peuple puisse enfin se prononcer.
Pour terminer, je tiens à souligner que cette initiative a peut-être des articles qui interpellent le Conseil national mais c'est le but que recherchent les initiants et c'est aussi le but que mes collègues députés de l'Alternative ont, je crois, bien compris. La promotion de la paix dans une démocratie est un débat national mais ce n'est surtout pas un débat qui doit être étouffé en commission par des députés. C'est pourquoi, au nom de mon groupe, je vous demande d'accepter le rapport de majorité afin que le peuple puisse se prononcer après la décision du Tribunal fédéral.
M. Michel Balestra (L). Mesdames et Messieurs, vous savez que l'initiative que vous proposez de voter aujourd'hui n'est pas conforme au droit supérieur. Il n'est pas dans mes habitudes de perdre du temps sur un texte que nous n'avons pas le droit de soumettre au suffrage populaire en l'état. Les réserves que vous avez exprimées en parlant de la réponse du Tribunal fédéral sont la preuve que vous êtes tout à fait conscients de cet état de fait.
Monsieur le rapporteur de minorité, je comprends que ma présence vous ait manqué en commission, mais à mon sujet l'adjectif «léger» est inapproprié, bien que chaque matin, sur ma balance, croyez-moi, j'en rêve ! (Rires.)
Je comprends les soucis exprimés par M. Froidevaux mais qu'il se rassure, la Suisse est une confédération d'Etats et les règles en matière de défense et de politique étrangère sont de compétence fédérale ! Dans ce débat, le Grand Conseil se discrédite puisqu'il propose de soumettre au vote populaire un texte mensonger car non conforme au droit supérieur.
Tous les députés qui, comme moi par ma politique de la chaise vide en commission, refusent cette mascarade doivent aujourd'hui refuser cette initiative illégale. S'il est vrai que notre Grand Conseil est le législateur par délégation de la suprême autorité du peuple, il est le législateur au niveau cantonal. Il ne saurait en aucun cas se substituer au législateur fédéral qui est le peuple de la Suisse entière avec la majorité des cantons et la majorité populaire. Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, je n'ai pas participé aux séances de commission. Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, je refuserai le texte de l'initiative et voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, j'approuverai le rapport de minorité !
Mme Marie-Thérèse Engelberts (PDC). Notre groupe fait sien le principe de l'initiative cantonale en ce qui concerne l'encouragement actif de la recherche et de la promotion des mesures de prévention des conflits à travers le développement d'une véritable culture de paix.
Nos divergences avec le rapport de majorité se situent dans l'amalgame des moyens proposés. Nous estimons important de renforcer toutes les mesures déjà prises d'ailleurs, en grande partie, dans l'enseignement, de l'école primaire à l'école secondaire, mais également - et il y a certainement là un certain vide - dans les écoles professionnelles et à l'université, pour assurer le développement de l'enfant, de l'adolescent et des jeunes adultes dans un esprit de tolérance, de respect de la différence et de non-violence.
Mettons également toute notre énergie à renforcer les mesures économiques, sociales et éducatives qui permettraient d'assurer véritablement la bienveillance de chacun à l'égard des autres. Nous ne pouvons croire que les initiants ont eu pour unique objectif le développement de cet esprit de tolérance au vu de l'ensemble des moyens proposés. Nous y voyons en fait une manière détournée de vider l'initiative de son sens premier et c'est probablement la raison d'un certain découragement à participer au débat.
Nous rejetons cette manoeuvre et de ce fait nous rejetterons l'initiative, et nous restons dans l'attente de la décision du Tribunal fédéral.
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). En tant que présidente de la commission ad hoc qui a mené ces travaux, je dirai quelques mots à l'intention de M. Balestra, car j'estime important de répéter ici ce qu'a décidé la commission.
Monsieur Balestra, vous venez de dire que vous avez choisi de mener la politique de la chaise vide. C'est votre choix, mais il ne faut pas ensuite venir dire des sottises devant ce Grand Conseil.
La première sottise a été d'affirmer avec une certitude quasi totale que cette initiative n'était pas conforme au droit fédéral. Vous n'en savez rien ! Ce sujet est pendant devant le Tribunal fédéral, qui nous donnera une réponse et, à ce moment-là seulement, vous pourrez dire : «On avait bien raison» ou encore : «On a eu tort».
La deuxième sottise a été de dire que nous allions nous moquer du suffrage populaire, soumettre au vote une initiative dont nous ne sommes pas sûrs du contenu. Vous faites erreur, Monsieur Balestra, car il a été décidé à l'unanimité de la commission - et c'est peut-être la seule fois où nous avons pris une décision unanime - que cette initiative ne serait pas soumise au peuple avant la décision du Tribunal fédéral.
M. Pierre Vanek (AdG). Je reviendrai sur la question du poids de M. l'honorable député Michel Balestra. Malgré ce que lui dit sa balance tous les matins, je crois qu'il est effectivement un peu léger dans cette histoire. Il est léger, il l'a admis lui-même, pour avoir pesé moins que le poids d'une plume sur les travaux de la commission, puisque apparemment il n'y était pas. Il est léger aussi, comme l'a relevé ma préopinante, Mme Reusse-Decrey, en s'instaurant tout à coup juge fédéral et en se permettant de déclarer que cette initiative est irrecevable au regard du droit supérieur. (L'orateur est interpellé.) Absolument, c'était le sens de mes propos. Je signale que la dernière fois que nous avons ferraillé dans cette enceinte sur la recevabilité de l'initiative, dans un mouvement d'humeur, votre ex-majorité a déclaré l'initiative globalement irrecevable. Cette décision a été cassée par le Tribunal fédéral et cela démontre que vous n'êtes en tout cas pas infaillible en la matière ou que vous vous laissez guider par des considérations politiques qui sont étrangères au droit.
Je pourrais ouvrir à nouveau le débat sur la recevabilité, évoquer, si on l'ose encore, le préavis d'un certain avocat très sourcilleux quant à la manière dont on parle de lui ici. Je ne le ferai pas, parce que ce débat a effectivement déjà eu lieu et que j'ai eu l'occasion de m'exprimer longuement sur cette question de la recevabilité... (Commentaires.) Mais écoute, Lombard, et tu sauras de quoi on parle et tu parleras à ton tour !
Sur le fond, Mesdames et Messieurs les députés, ce qu'a dit ici le rapporteur de majorité..., de minorité, excusez-moi, c'est l'habitude ! Les habitudes se perdent difficilement ! (Rires et exclamations.) Quoi qu'il en soit, de quelque côté de la table que vous soyez, Monsieur Froidevaux, vous avez dit des bêtises insondables. D'une part, vous nous déclarez qu'il aurait fallu que quatre cent mille habitants de ce canton, dont les étrangers, les bébés et Dieu sait qui, signent cette initiative, ainsi que vous-même. Pour obtenir ce résultat - peut être pas quatre cent mille, mais trente ou cinquante mille signatures, ce qui aurait été bien - il aurait fallu signer cette initiative le moment venu ! Maintenant, c'est un peu tard.
Ce sont donc des déclarations légères et qui ne veulent rien dire. Vous dites ensuite : «Je déposerai tout de même un non dans l'urne» et vous faites tout un développement consistant à dire que, sur cette planète, des milliards de personnes sont engagées dans des processus guerriers et qu'il faudrait donc que toute la population de la planète, comme les quatre cent mille Genevois, signe cette initiative.
Mesdames et Messieurs, avec de tels raisonnements, M. Froidevaux peut nous démontrer qu'il y a - et nous le savons tous - des centaines de millions, voire des milliards de personnes sur cette planète qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, qu'il y a des centaines de milliers d'enfants qui meurent de faim dans le monde et que, par conséquent, il faut appliquer ce genre de politique aussi à Genève !
Effectivement, en matière de prestations sociales, certains s'évertuent à nous le rappeler : nous sommes au-dessus de la moyenne helvétique. Et en matière d'engagement en faveur de la paix, nous devrions être fiers d'aller au-delà de la moyenne non pas nationale mais planétaire que M. Froidevaux nous a donnée comme référence.
Vous avez par ailleurs fait allusion à des régions en conflit, comme l'Irlande du Nord, pour expliquer qu'il n'est pas possible d'appuyer cette initiative hic et nunc à Genève. Pensez-vous sérieusement qu'il soit judicieux que l'armée républicaine irlandaise renonce à désarmer, que le gouvernement britannique renonce à retirer ses troupes ? Je ne citerai que cet exemple à l'encontre de la position un peu débile que vous avez affichée dans ce Grand Conseil ce soir. Non, Monsieur Froidevaux, en Irlande du Nord, après des dizaines d'années, voire des centaines d'années de conflit dans cette île, dues à la colonisation britannique, un processus de paix qui peut servir la démocratie est maintenant engagé. On ne peut pas faire moins à Genève et c'est ce que je souhaite en appuyant cette initiative.
M. René Koechlin (L). D'abord, je déplore que le texte de l'initiative ne figure pas dans le rapport...
Le président. Monsieur le député, il a été déposé sur vos places pour pallier ce manque que nous avons aussi constaté et regretté.
M. René Koechlin. Cela m'a échappé, Monsieur le président !
Mesdames et Messieurs, je pense qu'il faut se battre pour la paix. (Brouhaha.) Il faut construire la paix. A cet égard et en ce qui me concerne, je soutiens tout ce qui construit la paix, mais à condition que cette construction soit fondée sur un terrain solide, un terrain qui tienne compte des réalités.
Il n'y a rien qui affaiblisse autant une construction que l'utopie, que de nager dans l'utopie, dans le rêve ; et le risque d'inconstitutionnalité en est une forme. Ainsi, si je partage totalement les objectifs que poursuivent les initiants, à savoir de construire la paix, j'ai des doutes quant aux moyens de les atteindre tels qu'ils sont proposés par l'initiative. Ils posent en effet une équation qui pourrait se formuler ainsi : construire la paix en détruisant l'armée. C'est ce que préconisent les initiants.
Excusez-moi de vous le rappeler une fois encore : c'est pour avoir vécu, enfant, la guerre de près - quelque chose qui m'a énormément marqué, même si cela fait rire Mme Reusse-Decrey, une chose qui m'a si profondément marqué, Mesdames et Messieurs, que je crois pouvoir prétendre être un champion de la construction de la paix. Car il n'y a rien de plus tragique, de plus horrible, de plus inhumain que la guerre. Surtout quand cette guerre vous prend aux tripes jusque chez vous, que la violence est là, à votre porte, aveugle, et que personne ne peut s'y opposer. C'est ce qu'il y a de plus terrible ; et c'est ça, la guerre !
C'est contre cette guerre, violente, qu'il faut s'élever et tout faire pour construire ce que l'on appelle la paix. Et toute initiative qui va dans ce sens doit être soutenue sans réserve. Mais si l'on veut que cette initiative aboutisse, il faut qu'elle propose des moyens réalistes, vraiment efficaces et non pas des trucs de pacotille qui consistent simplement à défendre une politique antimilitariste à propos de laquelle on peut avoir de sérieux doutes. Que l'on propose des choses qui servent réellement la paix ; alors je me battrai pour ce genre d'initiative et je la soutiendrai ; mais il faudra qu'elle préconise d'autres moyens que ceux qui nous sont suggérés ce soir ! (Applaudissements.)
M. Jean-François Courvoisier (S). Lorsque M. Froidevaux prétend que cette «initiative idéologique a pour seul but de légaliser la désobéissance civique prônée de manière monomaniaque par la section genevoise du GSsA», ces accusations sont sans fondement. M. Froidevaux nous fait un procès d'intention, car le but du GSsA n'est pas de pousser à la désobéissance mais d'offrir une alternative à ceux qui refusent d'apprendre à tuer !
Si aujourd'hui nous tenons à cette initiative, c'est que c'est la seule manière pour notre canton de contribuer à une paix juste, contrairement au Partenariat pour la paix de l'OTAN qui veut imposer la paix des plus forts sans aucun égard pour les plus défavorisés de la planète. Lorsque M. Ogi, chef du DMF, est venu présenter à Genève ce que représentait l'adhésion de la Suisse au Partenariat pour la paix de l'OTAN, nous étions seulement deux députés à assister à sa conférence. Ce Partenariat de la paix nous permet une collaboration à la carte avec l'OTAN sans être jamais obligés d'intervenir contre notre gré, mais le fait d'être partenaire nous interdit d'être adversaires.
La Suisse s'est également engagée à autoriser le survol de son territoire lors d'opérations de l'OTAN destinées au maintien de la paix armée américaine. Cette adhésion signifie que notre pays s'est aligné sur la plus grande puissance économique et militaire du monde. A la suite de la disparition de l'Union soviétique, les peuples les plus défavorisés se sentent orphelins et les Etats-Unis ont beau jeu d'imposer leur dictature économique à toute la planète. Les partisans de notre adhésion au Partenariat de la paix de l'OTAN ressemblent beaucoup à ceux qui, en 1940, désiraient que la Suisse adhère à l'ordre nouveau de l'Allemagne nazie, qui semblait à l'époque la seule grande puissance européenne.
Voilà la paix que préconise le Conseil fédéral ! Heureusement, notre canton n'a que 4 kilomètres de frontière avec la Suisse, ce qui nous donne le droit d'avoir une manière un peu différente de servir la paix que celle du président Clinton, qui frappe l'Irak pour suspendre son procès en destitution.
Aujourd'hui notre soutien massif à cette initiative sera un message symbolique de la Genève internationale à tous ceux qui souffrent des guerres et permettra à notre République d'oeuvrer utilement pour une paix qui ne consistera pas à réduire en esclavage ceux qui sont moins riches et moins bien armés.
Je terminerai par une pensée que l'écrivain français Paul Reboud a écrite à l'issue de la guerre de 14-18 : «Soyons, sans espoir de récompense, ces hommes de bonne volonté dont les efforts successifs édifieront peu à peu la paix dans le monde.» Je citerai également le catholique français Georges Bernanos : «Les dangers du monde moderne ne viennent pas des révoltés mais des soumis.» Je vous remercie.
M. Luc Gilly (AdG), rapporteur de majorité. Je répondrai tout d'abord à M. Froidevaux, à M. Koechlin ensuite et je rappellerai les principes généraux de cette initiative pour ceux qui n'ont encore rien compris.
Monsieur Froidevaux, j'aimerais vous dire que la réflexion qui a animé le GSsA lors de l'élaboration de cette initiative était la suivante : depuis plus de vingt ans, Genève a fait montre d'une certaine orientation vers le pacifisme à l'occasion de tous les votes qui lui ont été soumis au niveau fédéral.
Puis nous avons eu les événements du défilé militaire en 1995 et à la suite de ceux-ci, nous avons décidé de discuter sérieusement de l'opportunité de proposer quelque chose au niveau cantonal. Aussi, lorsque vous dites que cette initiative - somme toute modeste, Monsieur Froidevaux, mais porteuse d'espoir en tout cas - ne va pas révolutionner ni sauver la planète, je vous réponds qu'elle est cantonale et vous le savez ! Alors, arrêtez de nous parler de sauver la planète avec une initiative bout de bois, comme vous la qualifiez de nouveau. C'était la première chose que je voulais vous dire.
Quant au délire des quatre cent mille signatures, Monsieur Froidevaux, allez récolter des signatures pour des initiatives ou des référendums et on verra comment cela se passe pour vous ! Je vous rappelle d'ailleurs que c'est pendant l'été que nous avons dû récolter ces signatures. Bref, le problème n'est pas là, car l'initiative a abouti au niveau des signatures.
Quant à M. Koechlin, s'il est tellement persuadé de faire des efforts pour la paix, qu'il lance lui-même une initiative telle qu'il la conçoit. Je rappelle que l'initiative «Genève, République de paix» n'est pas une initiative abolitionniste ! Comment faut-il vous le dire, pour la trente-cinquième fois, Mesdames et Messieurs les députés ?
Nous avons trouvé des moyens réalistes pour cette initiative, Monsieur Koechlin, et je vais vous les rappeler. Je me réjouis que nous continuions à nager dans l'utopie parce que, sans utopie, nous pouvons tous de suite rentrer à la maison sans en débattre...
Le président. La parole est à M. Froidevaux, rapporteur de minorité.
M. Luc Gilly, rapporteur de majorité. Je n'ai pas terminé mon intervention, Monsieur le président.
Le président. Il me semblait que vous aviez fini, Monsieur Gilly. Il y avait des pauses dans votre intervention... A vous !
M. Luc Gilly, rapporteur de majorité. M. Froidevaux me laisse la parole et je le remercie. Je voulais rappeler en quelques mots les enjeux de cette initiative. Il s'agit tout d'abord d'une réflexion en direction de la paix. Et la paix, personne ne le contestera et ne peut le contester, est un processus. C'est une recherche permanente qui n'a pas de fin et en tout cas pas de solution dans les aboutissants de l'initiative. C'est un début à quelque chose, c'est une démarche, c'est un souhait, c'est une volonté et c'est un choix politique, mais il est évident qu'elle ne solutionnera pas tous les problèmes genevois.
Genève est évidemment un terrain fertile pour parler de ces problèmes et de ce souhait, pour instaurer d'une façon un peu plus claire, à travers notre constitution, ces principes dans la loi. Nous avons énoncé des principes généraux et des principes civils et, à ce sujet, les travaux de la commission ont été difficiles à délimiter : en effet, chaque fois que nous parlions civil, c'était le mot armée qui sortait en face et M. Froidevaux a systématiquement refusé de comprendre que l'initiative était un projet civil : c-i-v-i-l, Monsieur Froidevaux !
Il serait peut-être temps de donner à la société civile quelques moyens aussi de débattre avec la base. A ce propos, j'aimerais lire les principes de l'UNESCO qui a défini un programme pour la paix pour l'an 2000. Quelques principes sont clairs et vont exactement dans ce sens - et nous ne les connaissions pas au moment où nous avons lancé cette initiative. Ces principes sont les suivants :
- promouvoir le respect des droits de l'homme, la tolérance et les principes démocratiques,
- encourager le dialogue entre les cultures et le pluralisme culturel,
- lutter contre toute forme de discrimination,
- rejeter la violence,
- reconstruire des infrastructures sociales et politiques qui soutiennent la paix et le développement durable, et enfin les deux derniers, Monsieur Froidevaux, ne vous impatientez pas :
- prévenir l'escalade des conflits violents,
- faciliter l'instauration d'un dialogue constructif dans les phases de tension précédant ou résultant d'un conflit.
Tout cela, Monsieur Froidevaux, Mesdames et Messieurs les députés, s'applique à la société civile, peut et doit s'adapter à un canton si nous en avons le courage politique.
Compte tenu de ces principes, généraux, je le conçois, nous avons dans cette initiative énoncé quelques moyens d'y parvenir. Ces moyens ne sont, somme toute, pas compliqués. A l'alinéa 2, il y a une démarche dans laquelle le canton et les autorités politiques devront évidemment s'investir, mais je ne pense pas que cela soit très contraignant. Vous avez sous les yeux cet alinéa 2 : il s'agit là des moyens que le canton se donnera.
Par contre, les mesures concrètes qui seraient destinées au civil pourraient commencer tout de suite pour avoir, à long terme, des effets intéressants et importants. C'est le débat sur l'approche et la résolution des conflits de façon non violente. C'est l'institut de recherche pour la paix qui devrait être créé au plus vite à Genève et qui devrait être ouvert à tout le monde et pas seulement aux spécialistes. C'est l'éducation à la paix dans les écoles - il est vrai qu'il se passe déjà pas mal de choses dans les écoles - par un programme qui devrait être mis en place de façon beaucoup plus concrète, beaucoup plus formelle et beaucoup plus suivie, tant aux niveaux primaire et secondaire que dans les centres d'apprentissage, et en tout cas encouragé à l'université.
Il y a également un chapitre sur la promotion du service civil. Les pistes ne manquent pas pour concrétiser un service civil encore plus actif dans le canton. Il y a déjà simplement l'information à donner, à ne pas confondre avec la publicité comme je l'entends toujours dire. Vouloir déjà simplement informer les citoyens qu'ils ont le droit de faire un service civil, ce serait le minimum. Cela se trouve aussi dans notre initiative. Autre point : le renoncement aux défilés militaires ou à toute promotion de la vie militaire à Genève pour les raisons que vous connaissez bien.
Au quatrième et dernier alinéa, nous demandons que la sécurité à Genève soit assurée par des moyens civils. Nous avons déjà suffisamment discuté de ce point, mais nous pourrons y revenir si ce n'est pas clair.
Il y a encore le renoncement à la troupe pour le service d'ordre intérieur en cas de troubles graves ou moins graves à Genève. Par rapport à cet article tellement contesté, je rappelle que le Conseil d'Etat - par la voix de M. Vodoz - lorsqu'il a été consulté sur les mesures qu'entendait prendre l'armée face aux violences possibles et à la répression des manifestations, avait été très négatif quant au recours à la troupe pour régler ce genre de problèmes. Je ne vous rappellerai pas les événements de 1932.
Il y a enfin le problème de la sécurité des conférences internationales avec des moyens non militaires. Il s'agit de quelque chose de réalisable, qui pose effectivement des problèmes mais qui doit être discuté. Il est vrai, Monsieur Froidevaux, que le problème financier existe, mais il n'est pas en contradiction avec les tâches que le canton et la Confédération doivent assumer par rapport aux conférences internationales. On peut en discuter et on devra de toute façon discuter des moyens concrets de réaliser cette initiative le jour où elle sera acceptée. J'en reste là pour le moment et je passe la parole à M. Froidevaux.
Le président. Si vous permettez, Monsieur Gilly, c'est moi qui lui passerai la parole, et je vous prierai dorénavant de rester dans les délais du temps de parole réglementaire.
M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur de minorité. J'aimerais rassurer M. Gilly quant au soutien de la minorité sur le projet civil qui encadre l'initiative 109.
Effectivement, si cette initiative n'était pas précisément abolitionniste, nous ne devrions pas aujourd'hui la contrecarrer et nous la soutiendrions avec vous. Or, vous faites de ce projet civil un projet antimilitariste et nous ne pouvons que nous y opposer.
Lorsque je dis que j'aurais souhaité que plus de personnes aient signé l'initiative, ce n'est pas l'aspect légaliste qui me préoccupe. J'aurais simplement aimé que le rêve qui se dégage de la pensée de M. Gilly et des initiants soit partagé par le plus grand nombre et, si possible, par la terre entière. Or, la nature humaine est composée de tant de particularités que nous ne pouvons malheureusement pas avoir la même utopie que vous. Nous devons constater qu'il y a du bien et du moins bien, ce qui fait qu'il existe des situations de crise pouvant aller jusqu'à la guerre, tout aussi imprévisibles que non souhaitables.
Nous n'aimons pas non plus devoir juger nos concitoyens, ni les faire emprisonner, et pourtant nous devons prendre des mesures de ce type afin d'assumer des dérapages. L'armée, elle aussi, permet de prévenir certains dérapages et nous ne pouvons que soutenir l'idée d'un maintien de la paix sécurisé.
J'aimerais revenir sur certaines critiques qui m'ont été faites. Mme Anne Briol m'a reproché un certain légalisme parce que j'avais signalé que le travail fait en commission n'était pas conforme. Effectivement, après avoir lu l'avis de droit du Tribunal fédéral, je signalais que le travail parlementaire n'était pas exécuté correctement. Il a d'ailleurs fallu attendre le mois de juin pour que le Grand Conseil fasse effectivement son travail. Mes interventions au sein de la commission ad hoc étaient donc parfaitement justifiées.
M. de Battista a affirmé, durant les travaux en commission, que l'armée ne pouvait être le promoteur de la paix et que cela avait été clairement démontré. J'aime bien cette phrase et j'aurais aimé la voir démontrée, mais je n'ai pas rencontré la moindre personne ni le moindre argument historique pouvant me permettre de penser que l'armée est à l'origine des guerres.
Quant aux auditions, j'ai eu beaucoup de peine à les obtenir. Nous étions évidemment dans un cadre qui dépassait le cadre cantonal et, pour parler de paix, il fallait s'entourer de spécialistes fédéraux mais aussi internationaux. Je n'ai pu obtenir de la commission qu'on s'adresse au HCR ou à d'autres organisations. Vous avez pu proposer, comme historien, M. Marc Vuilleumier ; M. Jean-Jacques Langendorf, lui, n'a pas pu venir.
Vous n'avez pas laissé la possibilité à la minorité d'obtenir des auditions autres que celle d'Andreas Gross, qui s'est heureusement révélé être un politicien de très haut niveau. Il a su parfaitement cadrer cette initiative et je rappelle qu'il a émis les plus grands doutes quant à sa faisabilité. Il a à deux reprises souhaité que la commission planche sur un contre-projet. Nous avions nous-mêmes soutenu son idée d'examiner avec lui ce contre-projet à l'initiative pour être plus conforme tant à l'aspiration du peuple genevois qu'aux objectifs d'une paix sécurisée, cette paix que je vous propose ce soir par le biais du contre-projet à l'initiative 109.
M. Michel Balestra (L). Excusez-moi d'intervenir à nouveau, mais pris et repris à partie, il me faut bien répondre.
Sachez tout d'abord, Monsieur Vanek, que le Tribunal fédéral n'a pas cassé le vote du Grand Conseil : il lui a demandé de le motiver puisqu'une partie disait que cette initiative était totalement recevable et une autre qu'elle était partiellement irrecevable ; le Grand Conseil l'a votée totalement irrecevable, raison pour laquelle le Tribunal fédéral lui a demandé de motiver cette position et c'était la moindre des choses !
Contrairement à ce que Mme Reusse-Decrey a affirmé, je vous rappelle - puisque je suivais vos merveilleux travaux par l'intermédiaire des procès-verbaux - que lors de la dernière séance de la commission sur l'initiative 109 à laquelle j'ai participé, je vous ai proposé de ne pas voter ce texte tant que le Tribunal fédéral ne s'était pas prononcé. C'est d'ailleurs le conseil que vous a aussi donné Me Lachat, l'avocat que vous avez mandaté pour défendre la position du Grand Conseil dans cette affaire devant le Tribunal fédéral, et vous n'avez pas voulu l'écouter !
Madame Reusse, votre unanimité à voter un texte sous réserve de son annulation totale ou partielle par le Tribunal fédéral est ridicule ! En effet, Mesdames et Messieurs, je vous le demande : quel texte soumettez-vous à notre parlement ? Vous ne le savez pas puisqu'il ne figure même pas dans votre rapport de majorité ! Sur quel texte proposez-vous que nous votions ? Sur un texte à venir, sur un texte à juger, sur un texte à censurer ou sur un texte écrit ?
Quelle farce ! Je n'ai jamais vu ce Grand Conseil se livrer à une pareille pantalonnade sur un sujet aussi important car en effet, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est plus Genève, ville de l'ONU, Genève, ville d'Henry Dunant, Genève, ville du désarmement par les conférences comme celles de Reagan ou Gorbatchev, mais Genève, ville des Gilly, Vanek, Pagani et consorts qui confondent le législatif avec un cirque.
Mesdames et Messieurs, vous avez juré par votre serment de servir votre Etat et l'Etat fédéral dans le respect des institutions ! Si aujourd'hui vous me trouvez un peu léger par le nombre de mes présences pour traiter ce dossier, aujourd'hui je vous juge comme étant un peu légers face à votre devoir. Vous êtes légers face à votre fonction, vous êtes légers face à votre serment ! (Applaudissements.)
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Je répondrai aux envolées lyriques de M. Koechlin par une autre envolée lyrique. Il dit qu'il n'aime pas les utopies et notamment celle qui sous-tend l'initiative «Genève, République de paix». Ce sont pourtant les utopies qui font avancer le monde. Il se réfère à des principes de Realpolitik qui vont dans le sens de la paix et si un de ces principes est : Si vis pacem para bellum, il est évident que nous ne pouvons pas y adhérer et que l'initiative «Genève, République de paix» va précisément à l'encontre de ce principe.
M. René Koechlin (L). Contrairement aux allégations du rapporteur de majorité, ayant été pris à partie quant à mon interprétation d'un texte que je ne citais que de mémoire pour l'avoir lu il y a un certain nombre de lustres, j'ai repris connaissance de ce texte et tiens, avant d'y faire allusion de façon plus détaillée, à faire observer que ce débat n'a rien de manichéen.
Ne nous trompons pas sur nos intentions ! Nous sommes tous des partisans de la paix, mais nous divergeons simplement sur les moyens. C'est si vrai que quand je lis le principe énoncé dans l'initiative, j'y adhère totalement. Et je constate qu'il s'agit aussi d'un principe défendu et observé par notre pays depuis des années.
Cela dit, la Suisse a connu des moments autrement plus difficiles que ceux que nous traversons aujourd'hui.
Mais parlons des moyens. Sous chiffre 2, le texte de l'initiative énonce sous lettres a, b et c toutes les mesures visant, en fin de compte, à supprimer l'armée et qui sont tout simplement antimilitaristes. Là, nous divergeons. Nous ne voyons réellement pas l'utilité de ce genre de mesures dans la défense de la paix. Il existe des moyens beaucoup plus efficaces d'atteindre cet objectif que celui qui se borne à supprimer l'armée sous quelque forme que ce soit, surtout notre armée, notre brave armée suisse qui n'a rien d'agressif et qui n'est en tout cas pas une armée qui promeut la guerre dans le monde !
Si nous pouvions amender le texte, je supprimerais les lettres a, b et c du chiffre 2 : «moyens» de l'initiative. Par exemple, sous chiffre 4 au lieu de : «Le canton met en oeuvre et développe des moyens non militaires pour garantir la sécurité de la population» (pourquoi non militaires ?), je dirais : «...développe des moyens notamment civils» mais des moyens surtout efficaces, car c'est ce qui importe ! Or, cela vous ne le dites pas, parce que vous voulez que ce ne soit pas militaire, un point c'est tout. Que ce soit efficace ou non, cela vous est égal !
C'est pourquoi votre initiative est ridicule. Personnellement, je préfère quelque chose d'efficace. J'aurais donc écrit : «des moyens notamment civils et aussi efficaces que possible».
A la lettre b), vous dites : «il renonce à l'engagement des troupes de l'armée pour assurer le service d'ordre». C'est à nouveau ridicule et là aussi, je supprimerais la phrase. Enfin, à la lettre c, je terminerais en disant : «...pour garantir la sécurité des conférences internationales par les moyens les plus adéquats» et de nouveau, nous pourrions ajouter : «les plus efficaces». Mais non, vous, vous dites frileusement : «par des moyens non militaires», simplement pour affirmer une doctrine à travers une initiative dont les objectifs sont louables et que je vise aussi, mais dont les moyens sont absurdes.
Vos moyens sont absurdes, Mesdames et Messieurs, et c'est la raison pour laquelle je ne peux adhérer à votre initiative.
M. Jean-François Courvoisier (S). Puisque nous parlons de la sécurité des conférences internationales, je voudrais dire que l'armée n'est pas du tout un moyen efficace. Je ne pense pas que les conférenciers vont être attaqués par des avions à réaction ou des tanks. Lors d'une conférence à Vienne, il y a quelques années, douze conférenciers ont été victimes d'attentats avec de minuscules colis piégés. Pour assurer la sécurité, il nous faudrait donc avoir des chiens policiers, des détectives mais en tout cas pas une armée qui sera absolument inutile si ce n'est pour impressionner les gens !
J'étais moi-même à Saint-Michel, la veille du dernier attentat dans le métro. Il y avait trois cents soldats armés et casqués devant la station de métro et cela n'a pas empêché le métro de sauter le lendemain !
M. Régis de Battista (S). Ce débat montre bien ce qui s'est passé en commission. A mon sens, le problème est très simple et nos collègues de l'Entente doivent admettre que l'organisation militaire ne peut être l'acteur de la promotion de la paix. Les temps ont changé et l'acteur actuel c'est tout simplement la société civile. L'armée n'a pas le monopole de la paix. Ce sont des gens qui l'ont, des gens qui veulent organiser un débat démocratique en Suisse et certains de nos collègues députés de l'Entente n'arrivent pas et ne peuvent pas le comprendre. Ils n'arrivent tout simplement pas à le digérer ; c'est quelque chose de viscéral !
Je pense également que certains députés mélangent beaucoup leurs prises de position personnelles avec la prise en considération de l'initiative. En effet, si vous lisez le début de cette initiative, à l'article 160D (nouveau), une phrase explique très clairement que cette initiative est lancée dans les limites du droit fédéral. Il incombe au Tribunal fédéral, au Conseil national, ou aux autorités supérieures, comme on les appelle, de définir les principes. C'est avec elles que nous voulons un débat et il ne faut pas avoir peur de ce débat. Si nous décidons selon la loi de changer les choses, les autorités les changeront mais ce n'est pas forcément à vous de tout supprimer.
Cette initiative a été traitée d'antimilitariste. Cela est faux ! L'initiative du Groupe pour une Suisse sans armée pour abolir l'armée, oui ! Cette initiative «Genève, République de paix» ne veut pas abolir l'armée mais travaille pour la paix ; nous voulons en être les acteurs et c'est une place que vous ne voulez pas nous laisser.
Pour moi, la paix est une acceptation des différences et c'est ce que vous n'arrivez pas à admettre. Nous n'avons pas forcément le même point de vue. Vous dites que nous sommes bons et bien gentils, voire naïfs, mais vous devez admettre que nous avons une autre conception de la paix et nous laisser notre place en nous donnant, à nous aussi, les moyens de construire la paix.
Ce n'est pas uniquement à vous qu'il revient de dépenser des milliards pour faire une armée car cette paix que vous nous préparez n'est pas le remède génial pour supprimer les guerres. La paix nécessite d'autres moyens et d'autres acteurs et c'est ce que vous devez comprendre.
Je m'adresse à M. Froidevaux concernant la question de savoir qui est le moteur. M. Colin Archer, secrétaire du Bureau international de la Paix (BIP) à Genève, a été très clair dans son audition. Il a expliqué qu'il incombait à la société civile d'organiser ce débat. Vous devez l'admettre car ce n'est pas moi qui l'invente, ce sont des spécialistes et, à cet égard, je vous invite à vous rendre en mai prochain à La Haye pour y suivre cette conférence sur l'abolition des guerres, intitulée conférence pour la paix.
Au sujet de la remarque de M. Froidevaux concernant l'interview de M. Gross, il nous faut de nouveau être très clairs. M. Gross a expliqué qu'il était intéressé à travailler avec vous, ce que vous ne nous laissez pas faire. C'est dans le même sens que M. Gross participe à de nombreuses commissions, avec des militaires, pour trouver des solutions et surtout faire comprendre la notion de paix. Concernant le HCR et les auditions qui n'ont pu avoir lieu, ce que vous dites n'est pas vrai ; nous avons eu toute une série d'auditions à la demande expresse de M. Froidevaux et de lui seul comme nous l'avons déjà dit et redit. Certaines auditions dont celle du HCR n'ont pas pu se faire uniquement parce que leurs représentants ne sont pas venus. (Remarque.) Oui, pardon, il s'agit du CICR.
Si vous me le permettez, je voudrais faire un parallèle et rappeler la lutte qu'il a fallu mener en Suisse pour inscrire l'objection de conscience dans notre constitution. Je voudrais rappeler la réflexion qu'il a fallu mener dans ce pays et à Genève pour que l'on comprenne qu'il fallait arrêter d'emprisonner les jeunes de 19 à 21 ans. Il y a parmi nous dans cette salle des collègues officiers qui ont été des juges de tribunal.
Je veux dire par là qu'une véritable promotion de la paix devrait permettre de les entendre et malheureusement nous nous sommes battus pendant vingt ans pour y parvenir. Nous sommes des acteurs de cette paix, c'est nous qui l'avons faite et il a fallu se battre contre vous pour l'obtenir.
Pour conclure, je dirai que le projet de loi 7909 est ridicule. Vous ne proposez strictement rien ! Quand on parle de solutions, on se limite à encourager le canton à mettre à disposition de l'armée des installations et des équipements. Tout cela pour quoi ? Pour nous refiler cette histoire des casques bleus, des casques jaunes et des casques verts. Simplement, cette pilule avec les capitaux que vous voulez nous faire avaler, nous n'en voulons pas ! (Brouhaha.)
Le président. Je salue la présence de notre ancienne collègue Claire Chalut à la tribune du public. (Applaudissements.)
M. Pierre Vanek (AdG). Je ferai une petite remarque préliminaire à l'intention de M. Koechlin que j'ai écouté avec attention.
Monsieur Koechlin, vos propos m'ont un peu surpris. Vous nous avez dit : d'accord avec tous les principes et les belles idées mais pas d'accord avec les moyens de les mettre en oeuvre. Il est évident qu'avec les belles idées et les grands principes dans cette enceinte nous serons forcément d'accord pour voter des résolutions en faveur de la paix, de la liberté et de la justice sociale.
Malheureusement, il nous faut mettre en oeuvre les idées et c'est pour cela que nous sommes assis sur des bancs opposés dans cette salle et que nous débattons régulièrement d'options différentes.
Vous avez taillé aux ciseaux dans cette initiative et à la fin de votre intervention, vous avez insisté en disant : il aurait fallu écrire que le canton met en oeuvre et développe non pas «des moyens non militaires» mais «des moyens notamment civils». Monsieur Koechlin, Mesdames et Messieurs, vous savez bien que l'initiative a pour objet de transformer un tant soit peu la réalité. Fort heureusement, notre République n'est pas un régime post coup d'Etat militaire et nous mettons d'ores et déjà en oeuvre des moyens notamment civils pour assurer la sécurité de la population, ce dont je me félicite. Aussi, voter une initiative qui dirait : «Il faut faire en la matière notamment du civil» équivaudrait à la pantalonnade qu'évoquait tout à l'heure Michel Balestra.
Cela me permet d'assurer la transition car, sans mettre en cause en aucune manière M. Balestra et lui donner l'occasion de réintervenir, je ferai observer à cette assemblée qu'il nous a fait beaucoup d'honneur. Il a en effet commencé par évoquer Genève, ville d'Henry Dunant, pour finir par Genève, ville de Pagani, de Vanek et de Gilly - peut-être pas dans cet ordre. Merci, Monsieur Balestra, de cet hommage mais, au-delà de cette remarque que je prends comme un compliment, vous avez laissé entendre et même plus que laisser entendre : vous avez déclaré qu'en votant cette initiative les députés que vous avez, vous, Monsieur Balestra, mis en cause, dérogeaient au serment qu'ils ont prêté dans cette salle au début de la législature.
Ce serment dit que nous jurons, ou promettons en l'occurrence, solennellement de prendre pour seul guide dans l'exercice de nos fonctions les intérêts de la République selon les lumières de nos consciences. Mesdames et Messieurs, c'est ce que nous faisons en intervenant dans ce débat... (Exclamations et brouhaha.). Effectivement, en mon âme et conscience - et je pense parler pour mes collègues - je crois qu'il est dans l'intérêt de cette République, à laquelle je suis attaché, de progresser de manière concrète vers la démilitarisation, car c'est une nécessité pour cette planète, comme l'évoquait tout à l'heure le rapporteur de minorité - qui s'est évaporé et il y a là aussi un peu de légèreté !
J'ajouterai que ce serment nous demande de ne jamais perdre de vue que nos attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple. Mesdames et Messieurs, le peuple auquel se réfère ce serment est le peuple qui dans ce canton a voté, à une majorité réduite, je vous l'accorde, mais à une majorité néanmoins - et c'est cela la règle de la démocratie - pour l'abolition de l'armée suisse. (Brouhaha.)
Or, nous préconisons des mesures en vue d'encourager la réduction des dépenses militaires, d'encourager la restitution à des usages civils des terrains affectés à l'armée dans le canton, en intervenant auprès de la Confédération. Certes, il ne s'agit pas de demander à la police de M. Ramseyer d'aller évacuer l'armée comme il évacue les squatters, mais de le demander à la Confédération et d'encourager la conversion civile des activités économiques, financières et institutionnelles en relation avec le domaine militaire.
La modération de cette initiative est extrême - et c'est le seul aspect extrême de cette initiative - mais sérieusement, Monsieur Balestra, dire que des députés dérogent à leur serment en la défendant, c'est cela la pantalonnade que vous évoquiez. J'allais employer un gros mot mais je me suis retenu, sachez-m'en gré ! (Commentaires et applaudissements.)
Le président. Il y a encore trois orateurs inscrits. Le Bureau vous propose de clore la liste des orateurs pour ce premier débat qui dure depuis plus d'une heure. Je crois que l'essentiel a été dit par tous les groupes. S'il n'y a pas d'opposition, nous ferons ainsi.
(Commentaires et brouhaha.)
M. Luc Gilly (AdG), rapporteur de majorité. Si vous voulez continuer le débat à ma place, allez-y ! Monsieur Annen, c'est moi qui parle, vous prendrez la parole après, s'il vous plaît ! (Brouhaha.)
Une voix. Vas-y, Luc !
M. Luc Gilly, rapporteur de majorité. J'aimerais tout d'abord m'excuser pour avoir effectivement oublié de remettre le texte de l'initiative dans mon rapport, mais la plupart d'entre vous l'ont et le connaissaient déjà. Il est sur votre bureau, Monsieur Balestra ? J'ai aussi ce texte sous les yeux et je n'ai toujours pas vu où cette initiative parlait de repousser l'armée suisse hors du canton de Genève. (Commentaires.) Nous n'avons donc pas le même texte.
En commission, nous avons tous été impressionnés par Andreas Gross, au grand étonnement de l'Entente, qui n'a pas arrêté de féliciter Gross, le vrai politologue, le type qui a tout compris... Or, ce que M. Gross a dit, nous l'avons dit, je l'ai dit quinze fois. Simplement, je ne m'appelle pas M. Gross, je m'appelle M. Gilly et n'ai peut-être pas la même persuasion qu'un député qui siège à Berne, n'est-ce pas ?
Pour contredire tout ce que j'ai entendu sur M. Gross, j'ai pris la peine de souligner plusieurs choses. Au sujet de cette initiative, M. Gross a dit d'entrée qu'il fallait tout de suite séparer la paix de l'armée, que la paix est un processus sans limites, que cette initiative ne doit pas concerner l'armée, celle-ci étant une institution à part. Il a aussi dit que cette initiative était une opportunité énorme pour le canton.
A la deuxième page - je ne vous ferai pas l'injure de tout vous lire - il a dit que, si l'armée constituait un obstacle dans le cadre de cette initiative, elle ne devait pas être un obstacle sur le fond du problème que soulève l'initiative.
Il a également dit que la paix était un effort permanent et devrait être le devoir de tous les politiciens, qu'il s'agit de développer une approche visant un processus qui augmenterait les potentialités de la paix et qui réduirait la violence. Par ailleurs, la promotion de la paix n'est pas équivalente au maintien de la paix et c'est toujours là que le bât blesse entre les positions de M. Froidevaux et les miennes !
Je répète que M. Gross a aussi répondu à M. Froidevaux que l'initiative était une chance énorme mais qu'il fallait élaborer une philosophie de maintien ou de développement de la paix en établissant des critères. C'est de cela que nous discuterons quand il s'agira de mettre sérieusement les choses en place lors du vote et de l'acceptation de cette initiative.
Il a encore affirmé que la liberté et la paix étaient inséparables et, avant de retourner à Zurich, il a conclu en disant qu'il était favorable aux initiatives cantonales, les vrais changements étant le résultat d'efforts cantonaux, voire communaux, exemple : le vote des femmes, l'environnement... Il faut envisager une politique plus préventive que répressive. Tout cela dans le sens, s'agissant de cette initiative, d'une plus grande démocratie pour notre canton et pour accorder une plus large place à la société civile dans le canton.
Par conséquent, Monsieur Froidevaux, je ne sais pas qui peut prétendre s'approprier les phrases de Gross. Il a été extrêmement clair et si vous relisez mon premier rapport de l'an dernier et le rapport de ce soir, les choses sont dites de la même façon et de manière encore bien plus explicite puisque j'ai eu le temps de les développer. Donc, soit nous n'avons pas les mêmes yeux, soit nous n'avons pas les mêmes oreilles, en lisant les textes et en entendant nos arguments.
Mme Micheline Spoerri (L). Je dirai aux membres de cette commission que leurs leçons de morale permanentes commencent à nous énerver. Nous venons en commission quand nous le voulons et il n'appartient pas aux gens d'en face de nous dire quand nous devons venir ou pas. (Commentaires.)
Permettez-moi de terminer, s'il vous plaît, Monsieur ! Vous continuez et vous vous obstinez dans des leçons de morale permanentes. Occupez-vous de vos groupes respectifs et laissez les autres vivre comme ils l'entendent ! (Brouhaha et commentaires.)
En ce qui concerne la procédure, Mme Briol s'étonnait que nous y soyons attachés, mais le traitement d'une initiative parlementaire n'est déjà pas simple et nous avons en plus débuté nos travaux dans une espèce de brouillard complet. Je me souviens - même si je n'ai effectivement pas été présente à toutes les séances - d'avoir réclamé que l'on auditionne au moins le Conseil d'Etat pour essayer d'avoir une petite boussole dans cette affaire.
Bien que le fond soit beaucoup plus important que la forme, dans le cas particulier si vous voulez que votre initiative aboutisse, vous devez être, Mesdames et Messieurs les initiants, les premiers à respecter les procédures. Cela concerne la forme.
Sur le fond, Monsieur le rapporteur, vous êtes antimilitariste, antimilitariste, antimilitariste ! C'est votre conviction et elle est respectable, mais permettez-nous de vous dire que M. Andreas Gross a apporté à cette discussion une dimension, une finesse d'analyse et de réflexion exceptionnelles que ni vous ni M. le député de Battista n'ont été capables de susciter dans cette commission. Par conséquent, ne nous faites pas des scènes de jalousie vis-à-vis de M. Andreas Gross ! Admettez qu'il a à la fois entendu vos arguments, puisqu'il y a adhéré au début de la démarche, et su nous dire à quel point nous devions être beaucoup plus ouverts dans la réflexion sur la paix.
Nous partageons son point de vue, en tout cas sur le fond, et je crois que l'Entente a été très sensible à cette audition qui nous a un peu ébranlés, il faut le dire. Je vais m'arrêter là car je pense qu'on a déjà assez parlé ce soir.
M. John Dupraz (R). Il y a des choses qu'on ne peut tout de même pas laisser passer. Après les propos de M. de Battista et de M. Vanek, je constate que ce sont plus des bestiaux politiques que des députés humains, animés par un instinct grégaire et primaire d'antimilitaristes.
Je croyais savoir que le parti socialiste était un parti démocratique respectueux des institutions. Je constate que M. de Battista est un mouton noir égaré... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) et qu'il n'a aucun respect pour les institutions.
Il y a dans cette initiative des choses piquantes. On dit au chiffre 4 : «Le canton met en oeuvre et développe des moyens non militaires pour garantir la sécurité de la population» et «il encourage la prise en charge de toutes les tâches concernant la sécurité dans le canton par des organismes civils». Or, vous êtes tous contre la protection civile aussi ! Que voulez-vous en fait ? Vous êtes simplement des esprits primaires, antimilitaristes et rien d'autre. Quant au serment... (Commentaires.) Oh, pour ce qui est de cet espèce d'affreux bonhomme, là-bas, Pagani, voilà vingt-cinq ans qu'il sème la pagaille dans la République et il veut nous faire la morale ! Mais au Moyen Age, on t'aurait déjà transpercé de piques et mis dans le feu ! (Rires.) A-t-on besoin de citoyens qui sont des destructeurs permanents des institutions, de nos propriétés et de notre République ? (Protestations.)
Pour en revenir au serment que vous évoquiez, Monsieur Vanek, vous êtes un peu court dans vos lectures - mais il est vrai que vous avez la vue courte comme votre esprit et vos idées - car le serment dit aussi : «d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie». De cela, vous vous en moquez éperdument ! Ce qui vous importe, c'est la pagaille, la chienlit pour pouvoir jouir de la pagaille. Vous vous en nourrissez et c'est la seule chose qui vous intéresse. Vous êtes contre tout.
En fait, le véritable débat que vous proposez dans votre initiative, c'est l'appartenance de Genève à la Suisse. Il y a des règles et il y a des institutions et si vous voulez une Genève sans armée, vous devez d'abord demander la sécession. Après seulement, nous pourrons commencer à discuter, mais je pense que là vous ne serez pas nombreux.
Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Le monde est pour le moins paradoxal. Avant d'en venir au texte de l'initiative et à l'enjeu de ce soir, j'aimerais rappeler quelques événements auxquels j'ai assisté et qui datent du début de la précédente législature.
J'ai vécu un moment paradoxal le jour où je me suis retrouvée dans une manifestation à caractère culturel avec des gens de vos partis, pour la plupart plutôt opposés à l'armée. Il se trouvait que ce soir-là nous apprenions que l'ONU intervenait pour protéger enfin Sarajevo. C'était quelque chose de souhaité par tous et le soulagement des personnes présentes, alors que nous étions dans une exposition qui nous montrait les désastres de Sarajevo, se passait de commentaire.
Ce soir-là, nous avons eu l'honnêteté de ne pas utiliser cette discussion ni dans un sens ni dans l'autre, mais de reconnaître que nous étions les uns et les autres vraiment soulagés de savoir qu'il se passait quelque chose en faveur du maintien de la paix à Sarajevo.
Si je vous parle de cela aujourd'hui, c'est simplement pour vous rappeler que ce grand manichéisme qui consiste à mettre la paix d'un côté et l'armée de l'autre n'a pas de sens. Dès lors que cela se passe en dehors de nos frontières, dès lors que la promotion de la paix se passe à l'extérieur de nos frontières, tous ceux qui ce soir ont tenu les discours qu'ils ont tenus à l'égard de l'armée tiennent des discours de nature différente.
Je vous demande donc, dans ce débat et dans vos décisions, de réconcilier ce qui vous soulage lorsque les événements se passent à l'extérieur avec les options que vous prenez à l'intérieur de ce pays.
Tant dans l'initiative que dans le contre-projet qui vous a été proposé par certains membres de la commission, il est question de politique de sécurité. Mesdames et Messieurs les députés, il faut être honnête et reconnaître que la politique de sécurité est faite de différents éléments. Elle n'est pas faite que des voeux pieux d'un canton, fût-il le canton de Genève, fût-il dans le domaine de la promotion de la paix mentionnée dans l'initiative.
Comme on l'a rappelé, nous avons des responsabilités communes et confédérales. Je ne vous cache pas que je regrette infiniment qu'à l'heure où la définition des nouvelles missions de l'armée s'attache à donner à Genève, dans le domaine qui vous est cher - la promotion de la paix - et dans des domaines un peu caricaturés par certains - les bérets jaunes et les bérets bleus - mais qui ont une relation tout à fait précise avec Sarajevo et d'autres endroits de la planète, vous choisissiez précisément ce moment pour en faire un conflit. Vous nous présentez Genève comme une ville qui définit sa propre politique alors qu'elle a la grande chance de l'insérer dans un concept avec sa spécificité liée à son expérience internationale, à sa véritable culture de la paix, à ses institutions universitaires ou non qui aujourd'hui déjà traitent de ces problèmes.
C'est la raison pour laquelle je regrette infiniment que vous n'ayez pas jugé bon de vous réunir derrière un contre-projet qui n'allait en rien contre vos convictions ni contre ce que vous prônez mais qui permettait juste de réconcilier les choses et d'avancer.
Il y a dans ce pays, Mesdames et Messieurs, une armée. Elle a notamment pour mission la promotion de la paix. Les cantons ont pour mission d'exécuter certaines de ces tâches. Dans ce contexte, comme l'a rappelé un député, soit Genève s'extrait de ces missions confédérales soit elle admet d'intégrer tout cela dans une mission qui lui permet d'être le chef de file dans un domaine qui lui est naturel. Pour pouvoir le faire, il faut éviter ce débat stérile auquel l'initiative donne lieu en demandant à Genève de s'extraire peu à peu de toute mission qui aurait une relation avec l'institution que représente l'armée dans ce pays.
Encore une fois, avant ce vote, il est regrettable que vous n'ayez pas le courage, à un moment donné, d'admettre que ce débat n'a pas lieu d'être, que vous êtes dans une institution dans laquelle nous sommes insérés et que nous sommes tous, dans ce parlement, favorables à la promotion de la paix, favorables aux institutions qui en font la démarche et favorables aussi à une politique de sécurité.
Lorsque vous prétendez qu'un canton, tout seul dans son coin, peut mener une politique de sécurité, alors que la Suisse est incapable de pouvoir la mener seule et qu'elle sait d'ores et déjà qu'elle doit s'insérer dans un contexte international, je regrette, mais en tant que responsable de département qui suis censée se préoccuper de ces éléments, qui ai assumé au sein de la Confédération et pour le compte du pays, l'année dernière, une charge qui consistait à faire un exercice pour la sécurité civile autant que militaire, je ne peux pas adhérer à votre démarche. Je ne peux pas la défendre et je ne peux pas la représenter.
J'ai été auditionnée au début des débats. Depuis, je n'ai jamais eu l'occasion de vous dire quoi que ce soit d'autre sur ce sujet. Je n'ai jamais été convoquée depuis pour vous expliquer ce qui était discuté au niveau fédéral ni quels étaient les enjeux.
Vous avez aujourd'hui une chance car ce contre-projet ne va à l'encontre d'aucune de vos opinions, mais vous commettez une faute si vous votez l'initiative car vous donnez un mauvais signal. En effet, quoi que vous pensiez, il y aura toujours une armée dans ce pays et il y aura toujours un rôle pour Genève ; simplement, vous m'affaiblirez grandement, lorsque je devrai ensuite, en votre nom et au nom de ce canton, négocier les missions pour la paix qui devraient être dévolues à Genève.
Réfléchissez avant ce vote, parce que je regretterai infiniment que vous ne me donniez pas les moyens de défendre ce à quoi nous croyons tous ! (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs, nous allons nous prononcer sur les conclusions de la majorité de la commission qui propose d'approuver cette initiative par 7 voix contre 5 et qui précise, en conclusion de son rapport, qu'elle ne sera pas soumise en votation populaire avant la décision du Tribunal fédéral. Conformément à l'article 121 de notre règlement, vous êtes appelés à vous prononcer sur la prise en considération de cette initiative.
Les conclusions de la majorité de la commission ad hoc (acceptation de l'initiative) sont mises aux voix.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
L'adjoint du sautier compte les suffrages.
L'initiative est acceptée par 47 oui.
M. Pierre Froidevaux (R), rapporteur de minorité. Je prends acte de la décision du Grand Conseil, mais la proposition qui est faite dans le rapport de minorité devrait aussi être soumise au vote.
Le président. Monsieur Froidevaux, je l'aurais soumise au vote si les conclusions de la majorité avaient été refusées. Cette initiative ayant été acceptée, elle me semble assez incompatible avec l'autre proposition et, par conséquent, nous ne pouvons pas voter deux propositions qui se contredisent.
Le Grand Conseil a fait son choix. Il appartient à chacun maintenant de prendre ses responsabilités. Nous passons au point suivant de l'ordre du jour.
5. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève (D 1 05). ( -)
A la demande du Conseil d'Etat, vous trouverez ci-joint le projet de loi 7899 extrait du budget 1999. Pour le rapport (majorité/minorité), veuillez vous référer au rapport sur le budget 1999 (PL 7895-A à PL 7908-A).
Annexe Lettre de M. Hensler
Premier débat
Mme Marianne Grobet-Wellner (S), rapporteuse de majorité. Il serait utile de rappeler ce dont il s'agit. Le projet de loi 7899 porte sur la loi de gestion administrative et financière de l'Etat de Genève et les modifications qui doivent y être apportées pour tenir compte des recommandations de l'inspection cantonale des finances et de l'audit de l'Etat, conformément aux engagements pris par le Conseil d'Etat.
Ces modifications portent sur les points suivants :
L'application des normes comptables internationales IAS (International Accounting Standards) afin de supprimer les disparités actuelles dans la présentation des résultats des entités dans lesquelles l'Etat de Genève a des intérêts importants. Cependant, une limite sera fixée par le Conseil d'Etat afin d'éviter que ces normes IAS occasionnent une charge disproportionnée pour les petites entités.
L'établissement du principe de la non-thésaurisation des subventions et la restitution des sommes non dépensées. Cette restitution est modulable, notamment pour tenir compte de fonds privés dans les résultats des entités. (Brouhaha.)
La troisième modification concerne la présentation des résultats des entités de droit public en annexe du budget et des comptes annuels de l'Etat, afin d'avoir une vue d'ensemble de la situation et des engagements de l'Etat.
En quatrième lieu, ce projet de loi propose de passer de la méthode d'amortissement sur la valeur résiduelle à celle dite linéaire, basée sur la valeur initiale et la durée réelle des investissements.
Ceci aura donc pour effet, et c'est important, que le taux d'amortissement sera adapté à la réalité...
Le président. Madame le rapporteur, excusez-moi de vous interrompre. Mesdames et Messieurs les députés, il est impossible de débattre dans le brouhaha de cette salle. Je prie ceux qui ont des discussions particulières de les tenir à l'extérieur. Monsieur Lescaze, veuillez avoir l'amabilité soit de vous asseoir, soit de faire silence, soit d'aller parler à l'extérieur !
Madame le rapporteur, je vous remercie de prendre le micro devant vous de manière qu'on puisse vous entendre clairement. Vous avez la parole !
Mme Marianne Grobet-Wellner, rapporteuse de majorité. La possibilité d'adaptation pour des situations spécifiques est cependant possible, notamment en ce qui concerne les investissements antérieurs à 1996. Il y a dans ce cas un problème parce que, pour le moment, l'Etat ne dispose pas des données exactes concernant la valeur d'acquisition. Ce manque d'information est la conséquence de l'absence de suivi des investissements avant 1996.
Des adaptations seront donc apportées ces prochaines années pour préciser et corriger les valeurs, le cas échéant.
Il convient de préciser que le total des amortissements selon l'ancienne méthode résiduelle serait de 305 millions de francs, avec la réduction habituelle de 10 à 6% qui correspond environ à 100 millions de francs. Selon la méthode linéaire, on aboutit à 225 millions de francs d'amortissements, soit, compte tenu de la réduction qui précède, une augmentation de 20 millions.
Je rappelle que ces modifications s'inscrivent dans les engagements pris par le Conseil d'Etat suite aux recommandations de l'inspection cantonale des finances et de l'audit. La commission s'est prononcée à l'unanimité en faveur de ce projet de loi et vous recommande donc de le voter tel qu'il vous est proposé.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7899)
modifiant la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève (D 1 05)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993, est modifiée comme suit :
Art. 1, al. 2 (nouvelle teneur)
al. 3 à 5 (nouveaux)
2 Les établissements cantonaux, les fondations cantonales de droit public ainsi que les institutions de droit privé dans lesquelles l'Etat possède une participation majoritaire au capital ou dans le financement de l'exploitation ou d'une représentation majoritaire au sein des organes supérieurs sont soumis aux normes comptables internationales, (ci-après IAS : International Accounting Standards).
3 Le Conseil d'Etat édicte les principes comptables applicables aux institutions dont le volume des comptes ne justifie pas la soumission aux normes IAS. Il en fixe la limite.
4 Des entités bénéficiant de prestations cantonales (garantie de déficit, caution, prêt, etc.) peuvent être soumises aux normes IAS à la demande du Conseil d'Etat.
5 Restent réservées les dispositions du droit cantonal des conventions intercantonales et du droit fédéral.
Art. 1A Modalités d'application (nouveau)
1 Dans le cadre des principes généraux énoncés par les normes IAS et pour des règles non précisées dans le détail, le Conseil d'Etat prévoit des modalités d'application, notamment les taux d'amortissement, à l'intention des entités mentionnées à l'article 1, alinéa 2.
2 Dans la présentation de leurs comptes annuels, les entités mentionnées à l'article 1, alinéa 2, indiquent les règles et modalités pratiquées, ainsi que toute information permettant de répondre aux exigences des normes comptables internationales.
Art. 25, al. 4 (nouveau)
4 Les budgets des établissements et des fondations de droit public sont publiés en annexe du budget de l'Etat.
Art. 32, al. 1 Amortissements (nouvelle teneur)
al. 2 (nouvelle teneur)
al. 3 (nouveau)
1 Les amortissements sont calculés sur la valeur d'acquisition (ou initiale) de chaque actif inscrit au bilan. Le montant des amortissements figure chaque année au budget de fonctionnement.
2 Les taux d'amortissement des actifs sont fixés en fonction de leur dépréciation effective ou selon leur durée d'utilisation et ils figurent dans un règlement d'application. Restent réservées les dispositions du droit cantonal ou fédéral, ainsi que des cas spéciaux non prévus par le règlement d'application et qui sont traités selon les principes généraux énoncés par les normes IAS.
3 Les comptes annuels présentent, en annexe, une liste des principaux types d'actifs avec le taux d'amortissement pratiqué. Cette liste est auditée chaque année par les organes de contrôle.
Art. 36, al. 4 (nouveau)
4 Les montants non dépensés après détermination du résultat comptable établi selon les normes fixées à l'article 1 ne peuvent pas être thésaurisés par l'entité. Ils sont restituables à l'Etat selon des modalités à définir. Restent réservées des dispositions du droit cantonal ou un accord spécifique (contrat de prestations ou analogue) visant notamment à encourager la recherche de fonds privés, une répartition du résultat entre l'entité et l'Etat, la constitution d'une réserve pour déficits futurs.
Art. 58, al. 2, lettre h (nouvelle)
Art. 72 Disposition transitoire (nouveau)
Les entités mentionnées à l'article 1, alinéa 2 doivent respecter, au plus tard pour l'exercice comptable 2001, les normes IAS.
Article 2 Modification à une autre loi (H 3 25)
La loi sur l'aéroport international de Genève, du 10 juin 1993, est modifiée comme suit :
Art. 35 En général (nouvelle teneur)
L'établissement tient une comptabilité selon les normes comptables internationales (IAS).
6. Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève chargée d'étudier les objets suivants :
La Commission de l'énergie et des SIG, sous la présidence de M. Pierre Vanek, s'est réunie le 16 octobre, ainsi que le 6 et 13 novembre 1998, pour examiner les projets de lois 7854 et 7855, modifiant la constitution de la République et canton de Genève (A 2 00) et la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève (L 2 35), déposé le 13 mai 1998 et renvoyé par le Grand Conseil à la Commission de l'énergie et des SIG lors de la séance du 11 juin 1998.
M. .
à la séance du 16 octobre
M. M. J.-P. Genoud, directeur de l'OCEN
M. G. Fatio, président des SIG
M. M. D. Auderset, adjoint de direction, services généraux
M. M. Y. Duchemin, secrétaire général adjoint
M. M. M. Gregorio, chef de division, service du gaz
M. M. S. Mattatia, sous-directeur technique, service électricité
M. M. C. Michelet, directeur du service comptabilité et finances
M. M. H. Rufenacht, chef de division, service de l'eau
à la séance du 6 novembre
M. M. J.-P. Genoud, directeur de l'OCEN
à la séance du 13 novembre
M. M. J. Suter, directeur des services financiers du DIAE
Mme Mme L. Boissier, adjointe administrative, OCEN
M. G. Fatio, président des SIG
M. M. P.-A. Horta, division financière SIG
Introduction
Le but des projets de lois présentés par le Conseil d'Etat est de permettre :
aux Services industriels de devenir un opérateur performant en matière de télécommunications ;
l'introduction de comptabilités financières analytiques conformes aux normes de l'International Accounting Standards Commitee (IASC) (voir annexe 2) afin d'améliorer la transparence des états financiers et la lecture de ceux-ci. (article 24, al. 1, projet de loi 7855) ;
la possibilité, pour les Services industriels, d'étendre leur prestation au-delà des limites du canton de Genève.
Activité de télécommunication
En effet, les Services industriels profitant des tracés et emplacements dont il dispose déjà (secteur électrique, hydraulique et gaz), ainsi que de ses compétences en matière de construction et d'exploitation de réseaux, peut mettre sur pied rapidement les infrastructures nécessaires à la transmission des télécommunications et ensuite, par le biais de l'utilisation de ces infrastructures, proposer toute une série de prestations.
Cette nouvelle activité, qui peut à première vue paraître assez éloignée des compétences des Services industriels, présente en réalité des synergies importantes avec les missions de base de cet établissement public. En outre, dans le domaine des télécommunications, les Services industriels ont acquis un savoir-faire important, qu'ils ont d'abord utilisé pour les besoins propres à l'entreprise (télécommande et télécontrôle des installations). Il est techniquement possible qu'à l'avenir, le réseau électrique des Services industriels soit utilisé, par les entreprises et par le grand public, pour transmettre des communications.
Ainsi, constatant que le marché des télécommunications s'est libéralisé, en Suisse et dans l'Union européenne, depuis le 1er janvier 1998, en particulier dans les domaines majeurs de la téléphonie fixe et de la téléphonie mobile, les Services industriels ont donc souhaité rechercher une meilleure rentabilisation de leurs réseaux et, a cet effet, ils ont pris une participation de 2 millions de francs au capital-actions de la société diAX-Holding, sans pour autant que ses prestations soient mises à la seule disposition de cette dernière.
diAX-Holding, qui a obtenu de l'autorité fédérale l'une des trois concessions de téléphonie mobile, est constituée par le regroupement des principales entreprises d'électricité suisses auxquelles s'est associé l'un des plus grands opérateurs telecom des Etats-Unis, la société SBC Communication.
Au moment où le marché de l'électricité et du gaz va être soumis aux conséquences découlant de la libéralisation de ces marchés, il est indispensable de doter les Services industriels de Genève de nouvelles sources de revenus, afin d'asseoir leur solidité financière et d'être à même de remplir leur mission, notamment en offrant leurs prestations également à l'extérieur du canton.
La transparence
Les risques inhérents au développement d'activités nouvelles ainsi qu'a l'extension de celles-ci à l'extérieur du canton, exige un contrôle de la part des pouvoirs publics qui, à l'heure actuelle, se concrétise par :
la présence d'administrateurs nommés par les autorités ;
le contrôle du Parlement sur les budgets d'exploitation et d'investissements ;
l'approbation par le Parlement du rapport de gestion et des modifications du capital de dotation ;
l'accord du Conseil d'Etat concernant l'engagement hors budget des dépenses d'investissements, d'engagements, approbation du plan des amortissements et des emprunts lorsqu'ils dépassent 5 Mios ou excèdent une durée de 3 ans.
En revanche, en ce qui concerne la transparence des états financiers, il est souhaitable que les Services industriels de Genève tiennent des comptabilités financières et analytiques conformes aux normes de l'International Accounting Standards Commitee (IASC) (voir annexe 2).
Séance du 16 octobre
Audition des représentants des SIG
Lors de son audition, M. Fatio fait part à la commission des intentions des SIG d'être présents, en tant que prestataire, dans le marché des télécommunications. Le développement du marché des télécom représente un chiffre d'affaire supplémentaire de 3 milliards, que se partageront les nouveaux opérateurs. Le savoir-faire des SIG, ainsi que la possibilité d'utiliser les infrastructures électriques comme support de télécommunication à partir de certains développements représente un atout pour la société. M. Fatio informe la commission de la prise de participation des SIG dans diAX à hauteur de 5,4 % (1,4 % direct, représentant 2 mio de francs et 4 % indirects via EOS). Questionné au sujet de la faible participation des SIG dans diAX, M. Fatio estime ne pas avoir besoin d'augmenter leur participation, ce pourcentage étant suffisant pour assurer leur crédibilité en Suisse romande. Selon M. Fatio les moyens financiers des SIG devant être destinés a l'activité industrielle de cette dernière.
D'autre part, étant donné leur savoir-faire, les SIG ont affiché leur intention d'offrir leur prestation à l'extérieur de notre canton, et plus concrètement à des pays en voie de développement. Dans ce contexte, ils ont demandé a supprimer la référence « canton de Genève » à l'art. 1. Malgré ces arguments, M. Cramer estime que dans la loi cette disposition oblige à assurer la fourniture d'énergie dans tout le canton. Les commissaires s'accordent a dire qu'il faudrait articuler les chances pour que les SIG aient l'autorisation de rentrer dans les marchés, tout en affirmant la responsabilité de service sur le canton et la prise en compte de son activité et sa mission.
M. Fatio informe que les SIG seront attentifs aux recommandations faites par le Conseil d'Etat, à savoir : transparence dans les futures activités, respect des données concurrentielles en évitant les distorsions commerciales et aventures financières s'avérant potentiellement dangereuses.
Enfin, à la question de M. Nissim, pour quelle raison il n'a pas été fait mention au développement durable, M. Fatio estime que l'article 160C est suffisamment explicite et contraignant.
Séance du 6 novembre
Discussion
Lors du débat d'entrée en matière, la commission s'est posé la question du bien-fondé de l'extension de la mission des SIG; notamment sur l'activité liée aux télécommunications, les liens avec Télégenève et la concurrence. En réponse à ces questions, M. Cramer considère que l'avenir des SIG est lié à sa capacité de développer un certain nombre de prestations de service et être également un fournisseur de services. Les SIG fournissent déjà en matière de conseils aux consommateurs. Il est donc très positif que les SIG puissent s'engager dans le domaine des télécommunications, car il y a des raisons historiques pour lesquelles les SIG se sont trouvés en situation de s'engager dans ce domaine :
les télécommunications sont un système de réseau et les SIG ont une compétence en la matière ;
ils ont déjà construit les infrastructures nécessaires pour leurs propres besoins. A ce sujet, EOS ayant été approché par diAX pour bénéficier des capacités de transport, les SIG se sont trouvés associés. Il leur a paru qu'ils pouvaient entrer en relation avec diAX avec la condition, entre autres, qu'il n'y aurait pas d'exclusivité, c'est-à-dire qu'ils seraient un partenaire à l'écart de tout autre. Ils ont donc acheté des actions de diAX. Il a interpellé les SIG pour leur signaler qu'ils étaient dans une situation délicate ;
le Conseil d'Etat s'est posé la même question que la commission et une rencontre a eu lieu avec les SIG afin de voir ce qu'impliquait pour une régie le fait de s'engager dans les télécommunications. Il a appris qu'il n'y avait pas d'incompatibilité. Les SIG vont être de plus placés dans une situation concurrentielle ; c'est déjà le cas pour le gaz ; il va en être de même pour l'électricité. Leur situation de régie individuelle n'implique pas un monopole.
Toutes ces synergies sont autant de raisons pour pousser le Conseil d'Etat à soutenir cette démarche.
Au sujet des possibles redevances pour les communes, M. Cramer indique que l'emprise étant identique la question ne se pose pas. Enfin, s'agissant d'éviter de conférer un monopole, toute entreprise s'adressant aux SIG pour faire passer des fils dans leur installation, pourra conclure aux mêmes conditions qu'avec diAX.
Vote d'entrée en matière
Soumise au vote, l'entrée en matière du projet de loi est acceptée à l'unanimité ( 2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 3 S), après quoi, la commission procède à la lecture article par article sur la base du document figurant à l'annexe 1.
Art. 158, al. 1 - variante (voir annexe 1).
M. Cramer précise qu'une phrase a été ajoutée pour tenir compte des trois points évoqués par les SIG « exercer leurs activités à l'extérieur du canton et fournir.... ». S'agissant d'activité nouvelle, la formulation précédente n'était pas suffisante.
l'art. 158, al.1 nouvelle teneur est accepté à l'unanimité (2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 3 S)
Article 1, al. 1 et 2 But (nouvelle teneur) et al.3 (nouveau) (les al. 3à 5 anciens devenant les al. 4 à 6) (voir annexe 1)
Alinéa 1
Cette nouvelle teneur de l'alinéa 1 est proposée comme variante au projet de loi 7855, par le département. Elle consiste a introduire dans le texte à la 7e ligne après le but décrit ci-dessus, l'expression « exercer leurs activités à l'extérieur du canton » et remplacer l'adverbe « notamment » par la conjonction « et ».
L'alinéa 1 (variante au projet de loi 7855) est accepté à l'unanimité (2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 3 S).
Alinéa 2
La modification présentée par le département comme variante au projet de loi 7855, consiste à reprendre la précision « et passer toute convention destinée à faciliter et garantir l'approvisionnement dans le canton de Genève » qui avait disparu du nouveau texte, sans raison.
L'alinéa 2 (variante au projet de loi 7855), amendé, est accepté à l'unanimité (2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 3 S).
Alinéa 3
La modification consiste à reprendre, dans la variante au projet de loi 7855, les termes « énergies renouvelables », énoncés à l'art. 160C de la constitution, dans la phrase du projet de loi 7855 « ... du développement prioritaire (des énergies renouvelables) et du respect de l'environnement, énoncés à l'art. ... »
Une précision est amenée au sujet de l'expression « conservation de l'énergie ». Ce terme, qui exprime une notion qualitative et quantitative avait été préféré à celui d'économie d'énergie à l'époque où cette disposition a été rédigée dans la constitution. Il est tout à fait adéquat.
L'alinéa 3 (variante au projet de loi 7855), amendé, est accepté à l'unanimité (2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 3 S).
Le président propose alors d'inverser l'alinéa 2 contenant la référence constitutionnelle avec l'alinéa 3 (2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 3 S).
Cet amendement d'inversion est accepté à l'unanimité (2 L, 1 R, 3 Adg, 1 V, 3 S).
M. Cramer informe la commission que des dispositions figurant aux art. 24 et 25, ont été préparées par le Département des finances et les SIG. Ces dispositions concernent :
l'art. 24, où les normes de l'IAS seront adoptées comme cadre de référence ;
l'art. 25, où les principes de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat figurent comme cadre de référence.
Ces dispositions ont pour but de normaliser le compte d'exploitation et bilan de toutes les régies. Les SIG ayant déjà commencé à introduire ces dispositions dans l'écriture de leur exercice comptable.
M. Cramer rappelle que les SIG sont un établissement public autonome. Ainsi, quand ils décident, par exemple, de construire un immeuble au Lignon ou une station de transformation, ils ne consultent pas le Grand Conseil. Le contrôle s'effectue au niveau du budget qui est présenté par la direction et approuvé par le conseil d'administration. Ce texte signifie que les SIG auront la base légale pour pouvoir contracter avec un opérateur.
La question de la surévaluation d'actif dans le but d'équilibrer des budgets à l'origine déficitaire, a été mis en exergue lors du travail de notre commission (il est fait référence aux terrains occupés par l'association Artamis) en espérant que les dispositions adoptées dans ces projets de lois éviteront de telles pratiques.
Article 21, al. 3, nouvelle teneur (voir annexe 1)
Cette nouvelle teneur de l'alinéa 3 est proposée comme variante au projet de loi 7855, par le département. Elle consiste à introduire dans le texte actuel « Il s'assure (le contrôle financier des SIG) que les recettes et dépenses sont portées en compte, conformément aux dispositions des budgets, des lois et règlements et exécute toutes les tâches... » après des lois « des normes en vigueur »
L'alinéa 3, (variante au projet de loi 7855), est accepté à l'unanimité (2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 3 S).
Dans le but de hiérarchiser les termes, M. Beer propose d'inscrire par ordre « ...des lois, règlements et normes en vigueur... ».
Cet amendement d'inversion est accepté à l'unanimité.
L'art. 21, al. 3 amendé, avec l'adjonction de « règlement et norme » est ainsi accepté à l'unanimité (2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 3 S).
Article 24, al. 1, Comptabilité, exercice comptable (nouvelle teneur) (voir annexe 1)
Proposition projet de loi 7855, nouvelle teneur :
Les Services industriels tiennent une comptabilité adaptée à la nature et à l'étendue de l'établissement et permettant de se rendre compte aussi exactement que possible de sa situation financière. Ils adoptent comme cadre de référence comptable les normes comptables internationales (International Accounting Standards Commitee (IASC).
Variante présentée par le département
Les Services industriels tiennent une comptabilité selon les normes comptables internationales, ci-après IAS (International Accounting Standards).
M. Pagani propose d'ajouter la disposition figurant à l'article 24, tel que prévu au projet de loi 7855 en enlevant le terme « committee », car il est sceptique quant à l'introduction uniquement des normes IAS.
L'art. 24, al. 1 selon la variante du projet de loi 7855, amendé, est accepté à l'unanimité (2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 3 S).
Article 25 Bilan et principes d'amortissement (nouvelle teneur) (voir annexe 1)
Alinéa 1
Cette nouvelle teneur de l'alinéa 1 est proposée comme variante au projet de loi 7855, par le département. Elle consiste a remplacer le texte actuel. M. Cramer explique qu'il s'agit d'un renvoi aux normes IAS et à la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat. Cette disposition est introduite à la demande du Département des finances qui souhaite qu'à l'Etat, dans les communes et autres régies autonomes, on ait les mêmes critères comptables et d'amortissement. Le but, étant d'éviter que des communes jouent sur leur taux de centime additionnel en faisant varier le taux d'amortissement ou comme, par exemple, l'aéroport qui ne verse pas les redevances nécessaires à l'Etat.
L'alinéa 1 nouvelle teneur, variante au projet de loi 7855, est accepté à l'unanimité.
Le président propose de faire une inversion en faisant figurer dans le texte la mention de la loi avant celles des normes internationales.
Cet amendement d'inversion est accepté à l'unanimité.
L'art. 25 al. 1, selon la variante du projet de loi 7855, amendé, est accepté à l'unanimité ( 2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 3 S).
Alinéa 2
M. Cramer fait remarquer aux membres de la commission, que cette disposition est très importante pour les SIG, car les critères d'amortissement appliqués ces dernières années ont amené à des situations aberrantes.
Les immobilisations faisant partie intégrante du bilan et des comptes de résultat, M. Velasco trouve que cet alinéa est redondant avec l'alinéa 1 et par conséquent propose de le supprimer.
Certains membres de la commission comprennent que c'est une précision supplémentaire qu'on donne à l'alinéa 2, mais néanmoins, souhaitent la présence d'un représentant du département, lors de la prochaine séance, afin que des précisions soient données avant le vote final.
Mme Fehlmann propose d'inverser, dans cet alinéa, les termes « loi » et « normes ».
L'alinéa 2, amendé, est accepté par 9 oui (2 L, 1 R, 3 Adg, 1 Ve, 2 S) moins 1 abstention (S).
Article 38, lettre b) : abrogée (voir annexe 1)
Cette nouvelle teneur de l'art. 38, lettre b abrogée, est proposée comme variante au texte de loi actuel par le département.
L'abrogation de la lettre b est acceptée à l'unanimité.
Le président fait remarquer qu'avant de procéder au vote final, la commission attend une note explicative sur les alinéas 1 et 2 ainsi que sur les normes IAS.
Séance du 13 novembre
Audition des représentants des SIG, M. G. Fatio, président des SIG, M. Horta P.-A., division financière SIG et M. J. Suter, directeur des services financiers du DIAE
Présentation par M. Horta des IASC ( International Accounting Standards Commitee) (voir annexe 1)
Le but des normes IAS est d'homogénéiser, à une échelle mondiale, la présentation des états financiers des entreprises et administrations. Comme élément d'aide à la décision, l'élaboration des comptes et bilan élaborés selon ces normes, doit donner des informations sur la situation financière, la performance et l'évolution des services ou entreprises. Elles exigent une application rigoureuse afin d'avoir des éléments comparatifs entre entreprises ou exercices. Cela doit être un outil d'évaluation et d'information transparente. L'IASC est un organisme où la progression des membres est très importante, car cette norme se diffuse partout dans le monde. Très prochainement, on sera certainement obligé d'adopter ces normes ; car même si à l'heure actuelle elles ne sont pas imposées dans un cadre légal, l'Union européenne, elle, tend de s'en rapprocher.
Les SIG, réalisant qu'ils n'avaient pas de cadre formel comptable les obligeant à une certaine transparence, jusqu'à fin 1994, ont choisi ce cadre exigeant. L'objectif étant de répondre aux contraintes et évolutions de l'environnement économique.
Concernant l'alinéa 2 de l'art. 25, M. Suter confirme qu'il y a redondance avec l'alinéa 2 et par conséquent, il ne voit aucun inconvénient à ce que l'on supprime celui-ci. En effet, il apparaît selon les explications fournies par M. Horta, que cet alinéa proposé comme variante, a été conçu dans le but de remplacer l'actuel alinéa 2. Hors les immobilisations, qui se réfèrent aux immeubles, routes, etc., est un des postes du bilan et par conséquent, elles sont comprises à l'alinéa 1. A la suite à ces explications, le président met au vote l'abrogation de cet alinéa.
L'alinéa 2 de l'art. 24 nouvelle teneur est abrogé à l'unanimité (2 L, 2 R, 2 PdC, 2 S, 2 Ve, 3 AdG).
L'alinéa 3 de cet article devient ainsi l'alinéa 2.
M. Mauris propose de changer le titre de l'art. 25 « Bilan et principes d'amortissement » et de l'appeler « bilan et compte de résultat ».
libellé
L'amendement du titre de l'art. 25 est accepté à l'unanimité.
Au vote d'ensemble, l'article 25 nouvelle teneur est accepté à l'unanimité (2 L, 2 R, 2 DC, 2 S, 2 Ve, 3 AdG).
S'agissant du projet de loi constitutionnelle, M. Cramer suggère de rajouter une parenthèse avec la mention « mission des Services industriels » dans le titre afin d'éclairer les électeurs.
Cet amendement est acceptée à l'unanimité.
Concernant le projet de loi 7855 art. 21, al. 3, les commissaires proposent d'ajouter une virgule après « vigueur ».
Cet amendement est accepté à l'unanimité.
Conclusion
Des considérations telles que la possibilité donnée aux SIG d'augmenter leurs recettes et prestations en participant au marché des télécommunications, en étendant leur prestation au-delà des limites du canton de Genève et en introduisant une comptabilité financière analytique conforme aux normes de l'International Accounting Standards Commitee (IASC) afin d'améliorer la transparence des états financiers et la lecture de ceux-ci, confirment l'utilité des projets de loi 7854 et 7855.
Vote
Soumise au vote final, la Commission de l'énergie s'est déclarée d'accord avec les projets de lois 7854 et 7855 à l'unanimité (2 L, 2 R, 2 DC, 2 S, 2 Ve, 3 AdG) et recommande au Grand Conseil d'accepter ces projets de lois.
Annexes :
1. Triptyque des projets de lois.
Informations sur les normes comptables IAS.
ANNEXE 1
p.16
17
18
19
20
ANNEXE 2
p.21
22
23
Premier débat
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Je tiens à apporter une correction à la fin de mon rapport : il ne s'agit pas de la commission des travaux mais évidemment de la commission de l'énergie.
PL 7854-A
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi constitutionnelle(7854)
modifiant la constitution de la République et canton de Genève (mission des Services industriels de Genève) (A 2 00)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit :
Art. 158, al. 1 (nouvelle teneur, sans modification de la note)
1 Les Services industriels de Genève (ci-après : les Services industriels), établissement de droit public, doué de la personnalité juridique, autonome dans les limites des présentes dispositions constitutionnelles et de la loi qui en détermine les statuts, ont pour but de fournir dans le canton de Genève l'eau, le gaz, l'électricité et de l'énergie thermique. Ils peuvent en outre développer des activités dans des domaines liés au but décrit ci-dessus, exercer leurs activités à l'extérieur du canton et fournir des prestations et des services en matière de télécommunications.
PL 7855-A
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7855)
modifiant la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève (L 2 35)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La loi sur l'organisation des Services industriels de Genève, du 5 octobre 1973, est modifiée comme suit :
Art. 1, al. 1 et 2 But (nouvelle teneur) et al. 3 (nouveau) (les al. 3 à 5 anciens devenant les al. 4 à 6)
1 Les Services industriels de Genève (ci-après les Services industriels), établissement de droit public genevois fondé sur les articles 158 à 160 de la constitution genevoise, ont pour but de fournir dans le canton de Genève l'eau, le gaz, l'électricité et de l'énergie thermique. Ils peuvent en outre développer des activités dans des domaines liés au but décrit ci-dessus, exercer leurs activités à l'extérieur du canton et fournir des prestations et des services en matière de télécommunications.
2 Les Services industriels exercent leurs activités dans le respect de la législation applicable en matière d'énergie et conformément aux principes de la conservation de l'énergie, du développement prioritaire des énergies renouvelables et du respect de l'environnement, énoncés à l'article 160C de la constitution genevoise.
3 Les Services industriels peuvent créer, acquérir, louer, exploiter tout moyen de production, de transport, de distribution et de vente, assurer tout service se rapportant à la réalisation de leur but. Ils peuvent de même participer à toute entreprise suisse ou étrangère de fourniture d'eau, de gaz, d'électricité, d'énergie thermique ou de télécommunications et passer toute convention destinée à faciliter et garantir l'approvisionnement dans le canton de Genève.
Art. 21, al. 3 (nouvelle teneur)
3 Il s'assure que les recettes et dépenses sont portées en compte, conformément aux dispositions des budgets, des lois, des règlements et des normes en vigueur, et exécute toutes les tâches de contrôle qui lui sont confiées par le conseil d'administration ou le conseil de direction.
Art. 24, al. 1 Comptabilité, exercice comptable (nouvelle teneur)
1 Les Services industriels tiennent une comptabilité adaptée à la nature et à l'étendue de l'établissement et permettant de se rendre compte aussi exactement que possible de sa situation financière. Ils adoptent comme cadre de référence comptable les normes comptables internationales, ci-après IAS (International Accounting Standards).
Art. 25 Bilan et compte de résultat (nouvelle teneur)
Le bilan et le compte de résultat sont définis selon les principes énoncés dans la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993, et les normes internationales IAS.
Art. 38, lettre b (abrogée)
Le président. La loi 7855 sera promulguée après l'adoption de la loi constitutionnelle 7854 par le peuple.
Le présent rapport intermédiaire émanant de la Commission judiciaire a pour but de vous proposer de modifier l'art 120, alinéa 1 de la loi sur l'exercice des droits politiques qui prescrit que « l'élection des juges prud'hommes a lieu conformément aux articles 50 et 140 à 142 de la constitution genevoise, au cours de la période allant du 1er février au 30 avril ». En effet, il est apparu à la commission que les délais impartis pour adopter et présenter devant le Grand Conseil la loi 7829 étaient trop courts. C'est pour cette raison que la commission vous propose de voter des dispositions proposées à la fin du projet de loi 7829, en les adaptant à la situation évoquée ci-dessus, de manière à ce que l'élection générale de 1999 soit reportée et que, dorénavant, les élections aient toujours lieu dans la période entre le 1er juillet et le 31 décembre.
La Commission judiciaire, après avoir retourné le problème dans tous les sens et surtout pressé le pas pour faire aboutir au plus vite ses travaux, vous propose de reporter de quelques mois l'élection des juges de la juridiction du travail pour les raisons suivantes :
Un long et complexe travail d'élaboration et de transformation de cette juridiction est sur le point d'aboutir avec l'assentiment de l'ensemble des partenaires sociaux. Ce travail serait réduit à néant ou tout au moins reporté de 6 ans, dans la mesure où l'élection prévue au début de l'an prochain prolongerait de fait l'ancienne formule pour la même période.
Quelque 200 000 F devraient être dépensés pour organiser une élection générale au début de cette année alors que cette somme pourrait être économisée si le Grand Conseil et le corps électoral approuvent un nouveau mode d'élection de cette juridiction.
La Communauté d'action syndicale (CGAS), pour protester contre la lenteur de la procédure de réforme et notamment des tergiversations du Conseil d'Etat a refusé de déposer la liste des juges prud'hommes dans les délais qui lui étaient impartis. Ce qui rend impossible toute élection de cette juridiction, du moins du côté des employés.
Compte tenu que nous sommes dans une judiciation de 6 années, la Commission judiciaire a estimé qu'une si longue période a un effet de chevauchement acceptable.
Ainsi, Mesdames et Messieurs les députés, la commission, à l'unanimité moins une abstention libérale, vous invite à adopter l'art. 120, al. 1 et 192 selon le texte modifié ci-après. Cette modification de loi ouvre enfin la voie à l'organisation sur une base nouvelle de cette juridiction.
En considérant que la Commission judiciaire est sur le point de terminer le travail de rédaction et que le rapport sur cet objet devrait vous être transmis au tout début de l'an prochain.
Premier débat
Mme Nicole Castioni-Jaquet (S). Je ne ferai que confirmer la position des socialistes qui rejoint évidemment celle des commissaires à la commission judiciaire.
Les socialistes vous demandent de soutenir ce rapport. Son refus renverrait aux calendes grecques l'entrée en vigueur de la loi 7829 et serait dommageable pour les justiciables, les partenaires sociaux et la juridiction des prud'hommes dans son ensemble. En effet, les modifications apportées par ce projet de loi sont souhaitées par l'ensemble des partenaires sociaux. Nous avons noté également que la CGAS n'a pas déposé la liste des juges salariés dans les délais réglementaires. L'UAPG a d'ailleurs dit, dans une lettre dont nous avons reçu copie, que certains groupes ne seront pas tout à fait complets, faute de candidats et faute de temps.
Le rapport présenté étant particulièrement clair, je ne vais pas m'étendre sur ce point plus longuement. Je vous demande simplement de soutenir ce rapport et je vous en remercie.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. La commission judiciaire s'est trouvée dans une position inextricable, après un long travail d'élaboration pour réformer cette juridiction des prud'hommes qui semble d'un autre temps.
La commission a modifié au pas de charge l'ensemble de la loi. Elle a achevé ses travaux il y a à peine deux semaines. Il s'agissait de savoir si nous allions repartir pour une législature de six ans avec l'ancienne procédure ou si nous nous donnions le temps nécessaire pour peaufiner cette loi et mettre à disposition de cette juridiction une législation moderne.
C'est ainsi que nous avons décidé, à l'unanimité moins une abstention libérale, de vous proposer cette modification de la loi sur l'exercice des droits politiques qui repousse de quasiment huit mois l'élection des juges prud'hommes en donnant la possibilité de prolonger de six mois le mandat des anciens juges.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Le groupe démocrate-chrétien votera bien entendu ce projet de loi. Cependant, je vous ferai part d'un regret, à savoir que la commission n'ait pas tenu compte de l'opinion des partenaires sociaux.
Dans le courant du mois de septembre, les partenaires sociaux ont été informés du renouvellement de la juridiction des prud'hommes et du délai extrêmement court pour déposer leurs listes de candidats, qui était d'à peine plus de deux mois. Compte tenu de ce délai particulièrement serré et de la présentation devant la commission judiciaire du projet de loi dont nous traitons ce soir, ils ont demandé de reporter l'élection de quelques mois afin de pouvoir procéder à un renouvellement selon la nouvelle disposition. Cette demande, pleine de bon sens, a pourtant été rejetée.
Après deux mois de recherche intense de candidats, la commission a décidé, devant ce cas de force majeure que représente en l'occurrence le non-dépôt d'une partie des listes de candidats, de reporter cette élection.
Je regrette donc que le message des partenaires sociaux n'ait pas été entendu plus tôt et que l'on ait dû procéder à un travail inutile et surtout à une mobilisation inutile de candidats qui ne pourront finalement pas siéger prochainement.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7829-A-I)
modifiant la loi sur l'exercice des droits politiques (A 5 05)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982, est modifiée comme suit :
Art. 120, al. 1 (nouvelle teneur)
1 L'élection des juges prud'hommes a lieu conformément aux articles 50 et 140 à 142 de la constitution genevoise, au cours de la période allant du 1er juillet au 31 décembre.
Art. 192 (nouveau)
Les prud'hommes élus lors de l'élection générale des 27 et 28 avril 1993 ainsi que lors d'élections complémentaires postérieures exercent leur charge jusqu'à l'entrée en fonction des nouveaux juges prud'hommes élus en vertu de l'art. 120, al. 1 de la présente loi.
Sous la présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, la Commission des affaires sociales a consacré 6 séances (6, 13, 20 octobre 1998 et 3, 10, 17 novembre 1998) à l'étude du projet de loi 7893.
Ont collaboré aux travaux de la commission : M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat, Mme Marie da Roxa, directrice de l'OCPA, MM. Paul-Olivier Vallotton, directeur de cabinet et Michel Gönczy, directeur de l'action sociale.
Les commissaires remercient Mme Nicole Seyfried pour la tenue des notes de séances.
Introduction
Le projet de loi 7893 modifie diverses lois cantonales relatives à des prestations sociales. Certaines modifications s'imposent aux cantons suite à la 3e révision de la législation fédérale sur les prestations fédérales complémentaires à l'AVS et à l'AI. Il s'agit des articles 1 et 2 de la loi sur les prestations fédérales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l'assurance-invalidité (J 7 10), ainsi que de l'art. 2, al. 3, de l'art. 6, de l'art. 7, al. 1, lettre a, de l'art. 12 et de l'art. 28 de la loi sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l'assurance-invalidité (J 7 15).
D'autre part, certaines modifications sont nécessaires suite à la jurisprudence des instances de recours fédérales et cantonales. Il s'agit de l'article 2, al. 2 de la J 7 15, de l'article 2, al. 2 et de l'art. 43 de la loi sur les prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin de droit (J 2 25) ainsi que de l'art. 17 de la loi relative aux établissements médico-sociaux accueillant des personnes âgées (J 7 20).
Par ailleurs, le projet de loi 7893 propose de modifier la législation sur les prestations complémentaires cantonales (art. 3, art. 5, al. 6, art. 8, art. 9, art. 15, art. 18, art. 19, art. 29, art. 31 à 34 et art. 48 de la J 7 15) de façon à aligner le régime genevois des prestations complémentaires cantonales sur le régime fédéral des prestations complémentaires fédérales.
Enfin, le projet de loi 7893 propose de modifier l'article 28, al. 1 de la loi cantonale sur les allocations familiales (J 5 10) avec pour objectif d'introduire une limite de revenu, limite au-delà de laquelle la contribution AF ne sera plus perçue.
Seules les modifications ayant fait l'objet d'une discussion politique seront reprises et commentées dans le présent rapport. Nous renvoyons le-la lecteur-trice à l'exposé des motifs du projet de loi 7893, déposé par le Conseil d'Etat le 9 septembre 1998, pour les autres modifications, et plus particulièrement celles consécutives à la 3e révision de la législation fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et l'AI.
De la même manière, seuls les amendements proposés dans le cadre des travaux de la Commission des affaires sociales ainsi que les votes n'ayant pas obtenu le soutien unanime ou n'ayant pas fait l'objet d'oppositions des commissaires figureront dans le présent rapport.
Prestations cantonales complémentaires à l'AVS/AI : délais de séjour
Contrairement à la législation fédérale en matière de prestations complémentaires à l'AVS/AI, législation applicable sur l'ensemble du territoire suisse et qui ne prévoit donc pas de délais de séjour pour les Confédérés-ées, l'actuelle législation genevoise prévoit des délais de séjour dans le canton pour pouvoir bénéficier de prestations sociales. Ces délais de séjour diffèrent en fonction de la nationalité des prestataires. Alors que le droit aux prestations cantonales complémentaires à l'AVS et à l'AI est immédiat pour les Genevois-es, il implique un délai de séjour de 7 ans pour les Confédérés-ées non-Genevois-es et un délai de séjour de 10 ans pour les étrangers-ères. De la même manière, un traitement différencié selon la nationalité est également en vigueur dans le domaine des prestations cantonales accordées aux chômeurs-euses en fin de droit (RMCAS). Le droit aux prestations est ainsi immédiat pour les Genevois-es, mais implique un délai de 3 ans pour les Confédérés-ées non-Genevois-es et de 7 ans pour les étrangers-ères.
Le Tribunal fédéral et la Commission cantonale de recours AVS-AI, se fondant sur le principe de la liberté d'établissement figurant à l'article 43, alinéa 4 de la Constitution fédérale, ont considéré le traitement différent des Genevois-es et des Confédérés-ées non-Genevois-es comme une inégalité contraire à la Constitution fédérale. La législation sociale genevoise doit alors, pour se conformer à la jurisprudence, définir un délai de séjour identique pour tous-tes les citoyens-ennes suisses, qu'ils-elles soient Genevois-es ou Confédérés-ées. Compte tenu de la situation financière de l'Etat de Genève, le projet du Conseil d'Etat suggère d'imposer aux Genevois-es le même délai de séjour qu'aux Confédérés-ées.
Dans le cadre de ses travaux, la Commission des affaires sociales a examiné différentes possibilités.
S'agissant du délai pour le droit aux prestations cantonales complémentaires à l'AVS et à l'AI, le souci principal des commissaires a été d'éviter que des rentiers-ères d'autres cantons ne viennent s'établir à Genève, attirés par les prestations genevoises. Seuls trois cantons (BS, ZH et GE) proposent des prestations complémentaires cantonales venant s'ajouter aux prestations complémentaires fédérales. Relevons encore que les deux autres cantons concernés imposent également un délai de séjour à tous-tes les requérants-es confédérés-ées, sans distinction, ainsi qu'aux étrangers-ères. Dans façon à ne pas favoriser le "; tourisme social ", la commission a été d'avis de suivre la proposition du Conseil d'Etat en introduisant un délai de séjour pour les Genevois-es. Par ailleurs, la Commission des affaires sociales, considérant que le délai de séjour pour les étrangers-ères a été ramené de 15 à 10 ans au niveau de la législation fédérale, a trouvé logique de ramener au niveau de la législation genevoise, et par analogie, la durée de séjour pour les Confédérés-ées de 7 à 5 ans. De plus, de façon à ne pas pénaliser les personnes ayant séjourné durant une courte période hors du canton, la Commission des affaires sociales, par 11 voix pour (2 AdG, 3 S, 2 Ve, 2 DC, 2 R), 2 voix contre (L) et 1 abstention (L), a amendé l'art. 4 du projet de loi 7893 en supprimant la notion, retenue dans le projet du Conseil d'Etat, de l'absence d'interruption de domicile dans le canton de Genève durant le délai de séjour. Ainsi, l'art. 2, al .2 de la J 7 15 a été accepté avec la formulation suivante : "; Le requérant suisse doit avoir été domicilié dans le canton de Genève et y avoir résidé effectivement 5 ans durant les 7 années précédant la demande prévue à l'article 10 ".
S'agissant du délai pour les prestations cantonales accordées aux chômeurs-euses en fin de droit, après avoir vérifié, notamment en pensant aux personnes qui ne seraient pas véritablement domiciliées sur le territoire genevois, ou par rapport aux requérants-es d'asile qui doivent parfois attendre plusieurs années avant d'obtenir une décision quant à leur statut, que la notion de "; domicilié " devait bien être comprise au sens du code civil, la Commission des affaires sociales a accepté, par 12 voix pour et 2 voix contre (AdG), l'article 5 du projet de loi 7893, modifiant ainsi l'art.2 de la J 2 25.
Financement des établissement médico-sociaux
Le système de financement des établissement médico-sociaux accueillant des personnes âgées (J 7 20), défini sur la base du tarif-cadre cantonal fixant le prix forfaitaire de la journée à la charge de l'assurance-maladie à 106 F, a été modifié par décision du Conseil fédéral, ramenant la participation des assureurs-maladie à 69 F par journée. Cette modification a pour conséquence d'alléger la part de l'assurance-maladie et d'augmenter les subventions cantonales et/ou le prix de pension facturé aux pensionnaires, prix de pension généralement pris en charge par les prestations complémentaires. Si cette réduction de la part prise en charge par l'assurance devait se reporter sur les subventions cantonales, on augmenterait d'autant les dépenses de l'Etat. En revanche, si l'on retenait l'option consistant à augmenter le prix de pension, des subventions fédérales seraient accordées. En effet, selon la capacité financière des cantons, la Confédération rembourse une part des prestations complémentaire fédérales, jusqu'à concurrence de 10 %. Ces prestations complémentaires prennent en charge une part importante du prix de pension facturé aux pensionnaires et complètent ainsi les revenus des pensionnaires. Selon les indications fournies par l'administration, cette dernière solution permettrait à l'Etat de Genève de toucher 3,5 millions de francs de subventions fédérales.
Après un long débat, la Commission des affaires sociales a adopté, par 13 voix pour et 1 abstention (L), l'article 6 du projet de loi 7893, modifiant l'article 17 de la J 7 20. Cependant, de manière à rendre saillante la participation financière des pensionnaires, le projet du Conseil d'Etat est amendé à sa lettre a. La formulation retenue indique ainsi clairement que "; les prix de pension facturés aux pensionnaires et reconnus par l'Etat, comprennent le prix hôtelier et une contribution aux soins ".
Prestations complémentaires : prise en compte des enfants de rentiers-ères AI
La prise en compte des enfants de rentiers-ères AI est nettement plus favorable dans la législation genevoise que dans la législation fédérale. Alors que dans la législation fédérale cette prise en compte se fait en appliquant un barème dégressif, dans la législation cantonale, la prise en compte des enfants se fait de manière linéaire. De ce fait, la situation genevoise permet à des rentiers-ères AI ayant plusieurs enfants d'obtenir des assurances sociales un revenu plus élevé que celui qu'ils auraient réalisé en restant actifs. Cette situation s'explique notamment par le fait que certaines dépenses induites par les enfants (frais de loyer, cotisations de l'assurance-maladie) sont également prises en charge par les assurances sociales. Les modifications prévues dans l'article 3 du projet de loi 7893, acceptées par la Commission des affaires sociales par 13 voix pour et 1 abstention (AdG), proposent d'aligner la législation genevoise sur la législation fédérale, c'est-à-dire d'appliquer à l'avenir un barème dégressif.
Allocations familiales : contributions des indépendants-es
La loi actuelle ne prévoit pas de plafond au niveau de la contribution des indépendants-es au régime des allocations familiales. Selon le Conseil d'Etat cette situation risque d'engendrer un surfinancement inutile du système des indépendants-es. De manière à remédier à cette situation, le projet de loi 7893 propose d'introduire une limite annuelle de 243 000 F, limite au-delà de laquelle la contribution AF ne serait plus perçue. Certains commissaires proposent que les caisses diminuent leur taux, en lieu et place de l'introduction d'un plafond. Au vote, et par 7 voix contre (2 R, 3 L, 2 DC) et 7 voix pour (3 S, 2 Ve, 2 AdG) une proposition visant à refuser l'introduction d'un plafond est rejetée par la Commission des affaires sociales. L'article 8 du projet de loi 7893, modifiant l'article 28, alinéa 1 de la J 5 10, est accepté par la Commission des affaires sociales par 8 voix pour (1 Ve, 1 S, 2 R, 1 DC et 3 L) et 4 contre (2 AdG et 2 S).
Abrogation de certaines dispositions
Le projet de loi présenté par le Conseil d'Etat prévoyait, dans un souci de simplifier la législation cantonale, d'abroger toutes les dispositions cantonales reproduisant les dispositions du droit fédéral, et donc applicables par analogie. Il s'agissait ainsi d'abroger l'article 5, al. 6, les articles 9, 18, 31, 32, 33 et 34 de la loi J 7 15. Par 12 voix pour et 2 abstentions (1 L et 1 R), les commissaires ont toutefois préféré conserver le statu quo, et se sont prononcés en faveur du maintien des articles susmentionnés. Plusieurs raisons ont présidé à cette décision, notamment un souci de transparence et d'accessibilité pour les utilisateurs-trices de la loi et une volonté de devoir passer par une révision législative au cas où le droit fédéral viendrait à être modifié, ce qui ne pourrait plus être le cas si l'on transposait le contenu des ordonnances fédérales dans des règlements cantonaux.
Audition de représentants de la Maison de retraite du Petit-Saconnex
Le 3 novembre 1998, dans le cadre de ses travaux relatifs au projet de loi 7893, la Commission des affaires sociales, faisant suite a une demande d'audition de la part de la Maison de retraite du Petit-Saconnex (MRPS), a reçu MM. Robert Baud et Raymond Minger, respectivement président de la commission administrative et directeur général de l'établissement. Bien que le problème présenté lors de l'audition porte sur le prix de pension et ne concerne par conséquent pas directement le projet de loi 7893, et bien que ce problème fasse par ailleurs actuellement l'objet d'une procédure en cours auprès du Tribunal administratif, la Commission des affaires sociales relève toutefois les informations apportées lors de cette audition. Parmi elles, retenons que le conflit qui oppose la MRPS à l'Etat est lié au modèle de calcul des prix de l'établissement qui diffère sensiblement de celui retenu par l'OCPA. Cette différence s'explique notamment par la situation particulière et unique dans le canton de Genève de la MRPS. En effet, le nombre de ses pensionnaires de la catégorie A, à savoir considérés comme peu ou pas dépendants-es, représente plus de la moitié des résidents-es et est spécialement élevé pour un EMS.
Les personnes auditionnées regrettent également que la nouvelle teneur de l'article 17 de la J 7 20 ne fasse selon le projet du Conseil d'Etat désormais plus référence à la part hôtelière et militent en faveur de sa réintroduction.
La discussion qui s'est ensuite engagée a fait clairement ressortir la nécessité de rappeler que la législation sur les EMS poursuit deux objectifs. D'une part, il s'agit de sortir de l'assistance publique les personnes âgées placées en EMS. D'autre part, il convient d'améliorer le contrôle des EMS, notamment au niveau de la qualité des prestations, des conditions de travail du personnel, et d'introduire une comptabilité uniforme pour l'ensemble des EMS. Il est encore intéressant de relever que la diminution du nombre de personnes âgées de catégorie A vivant dans un EMS est un phénomène constant depuis plus de 10 ans. Ce phénomène n'est donc pas à associer à la législation sur les EMS, mais bien à une volonté de plus en plus marquée de la part des personnes concernées de rester le plus longtemps possible dans leur propre domicile, si nécessaire en bénéficiant de l'aide à domicile.
Au bénéfice de ces explications, Mesdames et Messieurs les députés-ées, la Commission des affaires sociales, unanime, vous prie de suivre ses conclusions et de voter le projet de loi 7893 tel qu'il ressort de ses travaux.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi
(7893)
modifiant diverses lois cantonales relatives à des prestations sociales
(J 7 10 - J 7 15 - J 2 25 - J 5 10 - J 7 20)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
1 La présente loi modifie diverses lois cantonales relatives à des prestations sociales.
2 Ces modifications sont :
Article 2 J 2 25
La loi sur les prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin de droit, du 18 novembre 1994, est modifiée comme suit :
Art. 2, al. 2 Bénéficiaires (nouvelle teneur)
2 Le requérant suisse doit avoir été domicilié dans le canton de Genève et y avoir résidé effectivement, sans interruption, durant les 3 années précédant la demande prévue à l'article 10.
Art. 43 Disposition transitoire (nouveau)
Une prestation en cours ne peut être réduite du fait du délai de séjour introduit pour les Genevois à partir du 1er janvier 1999.
Article 3 J 5 10
La loi sur les allocations familiales, du 1er mars 1996, est modifiée comme suit :
Art. 28, al. 1 Contributions des indépendants et des salariés d'un employeur exempt de l'AVS (nouvelle teneur)
1 Les personnes de conditions indépendantes et les salariés d'un employeur non tenu de cotiser à l'assurance-vieillesse et survivants paient une contribution correspondant au moins à 1,3 % et au plus de 2,5 % des revenus soumis à cotisations dans l'assurance-vieillesse et survivants jusqu'à un montant maximum de 243 000 F par année. La contribution annuelle est au minimum de 120 F.
Article 4 J 7 10
La loi sur les prestations fédérales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l'assurance-invalidité, du 14 octobre 1965, est modifiée comme suit :
Art. 1 Principe (nouvelle teneur)
Ont droit aux prestations complémentaires fédérales les personnes :
Art. 2 Réglementation cantonale (nouvelle teneur)
1 Les réglementations qui, aux termes de la législation fédérale, relèvent de la compétence des cantons sont édictées par le Conseil d'Etat.
2 Ces dispositions concernent :
Article 5 J 7 15
La loi sur les prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l'assurance-invalidité, du 25 octobre 1968, est modifiée comme suit :
Art. 2, al. 2 et 3 Bénéficiaires (nouvelle teneur)
2 Le requérant suisse doit avoir été domicilié dans le canton de Genève et y avoir résidé effectivement 5 ans durant les 7 années précédant la demande prévue à l'article 10.
3 Le requérant étranger, le réfugié ou l'apatride doit avoir été domicilié dans le canton de Genève et y avoir résidé effectivement, sans interruption, durant les 10 années précédant la demande prévue à l'article 10.
Art. 3 Revenu minimum cantonal d'aide sociale al. 1, 2 et 4 (nouvelle teneur) et 5 (nouveau)
1 Pour les personnes vivant à domicile, le revenu minimum cantonal d'aide sociale garanti s'élève, au 1er janvier 1998, à 21 727 F par année s'il s'agit d'une personne célibataire, veuve, divorcée, séparée de corps ou de fait.
2 Le revenu minimum cantonal d'aide sociale est fixé :
4 Les bénéficiaires du revenu minimum cantonal d'aide sociale ont droit au remboursement des frais de maladie et d'invalidité dans les limites définies par la législation fédérale, mais seulement jusqu'à concurrence du solde non remboursé au titre des prestations complémentaires fédérales.
5 Pour des personnes vivant dans un home ou dans un établissement médico-social, le revenu minimum cantonal d'aide sociale garanti s'élève au montant des dépenses prévues à l'article 6, alinéa 2, non couvertes par les revenus définis à l'article 5.
Art. 6 Dépenses déductibles (nouvelle teneur)
1 Pour les personnes vivant à domicile, sont déduits du revenu :
2 Pour les personnes qui vivent définitivement ou pour une longue période dans un home ou dans un établissement médico-social, sont déduits du revenu :
Art. 7, al. 1, lettre a Fortune (nouvelle teneur)
Art. 8 Demeure personnelle (nouvelle teneur)
1 Sur demande de l'intéressé, l'office peut déterminer le montant de la prestation sans tenir compte de l'immeuble ou de la partie d'immeuble qui lui sert de demeure permanente, à lui, à son conjoint et à ses enfants à charge, pour autant que ce bien soit grevé d'une hypothèque au profit de l'Etat.
2 Il est accordé à l'Etat une hypothèque légale, en garantie du remboursement des prestations accordées en vertu de l'alinéa 1.
3 En dérogation à l'article 836 du code civil, cette hypothèque est inscrite au registre foncier ; l'intéressé en est informé préalablement.
4 Peuvent être grevés de cette hypothèque les immeubles inscrits au nom du bénéficiaire ou au nom de son conjoint non séparé de corps ni de fait.
5 L'inscription a lieu sur la seule réquisition du chef de l'office qui a également la possibilité d'en demander la radiation.
6 Cette hypothèque prend rang après celles qui sont inscrites antérieurement. Elle profite des cases libres.
Art. 12 Refus de la prestation (nouvelle teneur)
Lorsqu'une rente AVS/AI a été refusée ou supprimée sur la base de l'article 18, alinéa 1, de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946, ou de l'article 7 de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité, du 19 juin 1959, la prestation complémentaire cantonale est refusée ou supprimée, temporairement ou définitivement.
Art. 15, al. 2 (nouvelle teneur) et 3 (nouveau)
2 Pour les personnes vivant à domicile, le montant annuel de la prestation ne peut dépasser, dans l'année civile, le quintuple du montant annuel minimum de la rente simple de vieillesse fixée à l'article 34, alinéa 5, de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946, sous déduction du montant des prestations fédérales complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité déjà versées.
3 Si le bénéficiaire n'a pas droit au revenu minimum cantonal d'aide sociale durant toute l'année, celui-ci est réduit en proportion de la durée du droit.
Art. 28 Prescription (nouvelle teneur)
Les restitutions prévues aux articles 24 et 26 peuvent être demandées par l'Etat dans un délai d'une année à compter de la connaissance du fait qui ouvre le droit à la restitution, mais au plus tard 5 ans après la survenance de ce fait.
Art. 29 (abrogé)
Art. 48 Disposition transitoire (nouvelle teneur)
Une prestation en cours ne peut être réduite du fait du délai de séjour introduit pour les Genevois à partir du 1er janvier 1999.
Article 6 J 7 20
La loi relative aux établissements médico-sociaux accueillant des personnes âgées, du 3 octobre 1997, est modifiée comme suit :
Art. 17 Financement (nouvelle teneur)
Les charges financières des établissements reconnus d'utilité publique sont couvertes :
Article 7
La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1999.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- le souhait du pouvoir judiciaire d'avoir une liaison directe avec le Parlement ;
- les échanges de correspondance ayant eu lieu à ce sujet entre les deux pouvoirs ;
invite la Commission judiciaire
- à examiner l'opportunité de légiférer dans le sens souhaité par le pouvoir judiciaire ;
- à soumettre le cas échéant une proposition de projet de loi au Conseil d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Lors de la dernière législature, le procureur général a adressé au bureau du Grand Conseil un courrier dans lequel il était demandé de procéder à une clarification des relations entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif. Cette demande s'inscrit dans une réflexion initiée depuis plusieurs années et qui vise à assurer une certaine indépendance du pouvoir judiciaire dans le domaine administratif.
Les points soulevés consistent à permettre au pouvoir judiciaire de se déterminer de manière plus adéquate sur les questions traitées par le Grand Conseil le concernant, et plus particulièrement de répondre directement aux députés lors du dépôt d'interpellations et d'être présent lors des séances de commissions lorsque les travaux traitent de sujets pour lesquels son avis est nécessaire.
En date du 20 avril 1998, suite à l'audition du procureur général, notre bureau a décidé de consulter les chefs de groupe sur la base d'un document relevant de manière précise les modifications souhaitées pour le pouvoir judiciaire
L'examen de ces prises de positions démontre qu'il s'agit de questions délicates et qu'il serait judicieux que ces questions soient étudiées en commission avant de décider s'il est nécessaire de légiférer dans ce domaine.
C'est la raison pour laquelle nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer directement cette motion à la Commission judiciaire.
Annexes :
Lettre du 24 avril 1997 adressée par le procureur général à Mme Christine Sayegh, présidente du Grand Conseil 1996-1997
Proposition de modification législative élaborée par le pouvoir judiciaire
Prises de position des chefs de groupe
ANNEXE 1
p.3
p.4ANNEXE 2
p.5
6
7
8
9
ANNEXE 3
p.1011
ANNEXE 4
p.12
ANNEXE 5
p.13ANNEXE 6
p.14ANNEXE 7
p.15ANNEXE 8
p.16
Débat
M. René Koechlin (L). Je rappellerai brièvement que le pouvoir judiciaire, par la voix du procureur général, a saisi à plusieurs reprises le précédent Bureau du Grand Conseil pour lui demander de développer les relations entre ledit pouvoir judiciaire précisément et notre parlement. Nous avons demandé au procureur de nous faire des propositions concrètes qui expriment, par un ou plusieurs projets, les intentions du pouvoir qu'il représente.
Dans certains cas, ces propositions nous ont semblé aller trop loin. Nous les avons soumises aux différents groupes de ce parlement. Ces groupes se sont exprimés et le Bureau s'est rendu compte qu'en réalité les questions soulevées avaient un caractère juridique assez pointu et qu'elles devaient donc être traitées par la commission judiciaire de ce Grand Conseil, mieux à même de rentrer dans les détails et d'entendre les intéressés, en particulier le procureur général.
C'est la raison pour laquelle le Bureau - en l'occurrence cinq de ses six membres - rédigé cette motion et vous propose de la renvoyer à la commission judiciaire. Je vous prie donc de bien vouloir donner suite à la proposition du Bureau.
M. Bernard Lescaze (R). Bien entendu, nous acceptons l'examen de cette motion du Bureau par la commission judiciaire.
Je tiens toutefois à faire remarquer au Grand Conseil que la proposition émanant du Palais de justice se divise en deux volets bien distincts. Si pour l'un d'entre eux, à savoir la réponse directement par le pouvoir judiciaire à une interpellation, nous paraît légitime et acceptable, en revanche, la demande du pouvoir judiciaire de pouvoir siéger dans les commissions parlementaires - à titre d'expert et bien évidemment sans droit de vote - me paraît, de par notre règlement, contrevenir au principe de la séparation des pouvoirs.
Tant à la commission judiciaire qu'à la commission législative, commissions que j'ai eu l'honneur de présider l'une et l'autre, j'ai constaté que, chaque fois que nous avions besoin du pouvoir judiciaire, celui-ci était dûment représenté par des experts qui y siégeaient et qui pouvaient répondre. Mais, en revanche, il pourrait arriver qu'à un moment donné de nos délibérations nous ayons envie de siéger entre représentants du pouvoir législatif hors de la présence du pouvoir judiciaire, ne serait-ce que pour discuter ou voter, et à ce moment précis la disposition que le procureur général souhaite introduire ne le permettrait pas.
Cette proposition est nocive pour la séparation des pouvoirs et, comme la plupart des groupes se sont exprimés par écrit, je pense que la commission judiciaire saura lui faire le sort qu'elle mérite. Je vous remercie de l'examiner soigneusement en commission.
M. Claude Blanc (PDC). Ces derniers temps, notre système a une fâcheuse tendance à tout mélanger. Notre Grand Conseil a la tentation de s'ériger en chambre d'accusation internationale et le procureur général voudrait faire de la politique.
Quant un Etat démocratique commence à ne plus voir la différence entre le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire, je pense qu'il est en danger. Chacun doit faire son travail : le pouvoir législatif légifère et le pouvoir judiciaire fait respecter les lois qui ont été votées par le pouvoir législatif.
Vouloir mélanger les deux, c'est tomber dans une dérive où la démocratie est en danger. Or, nous ne devons pas entrer dans cette dérive et nous devons dire fermement au procureur général de se mêler de ses affaires - il en a assez sur les bras. Nous ne voulons pas nous mêler de la manière dont il les traite, contrairement à ce que disait mon excellent collègue, M. Lescaze, qui essayait d'interférer dans le travail du Palais de justice.
Ce que fait la justice ne nous regarde pas, Monsieur Lescaze, mais ce que nous faisons ne regarde pas la justice, non plus. Ma grand-mère disait toujours : à chacun son métier et les vaches seront bien gardées !
M. Gérard Ramseyer. Mon département n'a aucune objection à ce que le pouvoir judiciaire puisse répondre directement aux questions et aux interpellations qui le concernent.
Conformément au principe de la séparation des pouvoirs, le gouvernement ne dispose en effet pas des éléments de réponse requis. Il est donc entièrement tributaire des informations que le pouvoir judiciaire veut bien lui donner, Dès lors, la procédure envisagée présente une simplification bienvenue.
S'agissant cependant de la représentation du pouvoir judiciaire aux travaux des commissions parlementaires, il a été observé que, dans le processus d'élaboration et d'adoption des lois d'organisation judiciaire et de procédure, le principe de la coopération des pouvoirs fonctionnait bien. En effet, le pouvoir judiciaire est toujours associé par le DJPT à la préparation des textes qui le concernent et il est ensuite entendu en commission.
Comme vous l'avez relevé, Mesdames et Messieurs les députés, lorsqu'un projet de loi est particulièrement complexe, un juge assiste en général en qualité d'expert aux séances des commissions. Le Conseil d'Etat ne peut donc que se féliciter de la contribution ainsi apportée par les magistrats aux différents stades d'adoption des projets de lois.
Je suis entièrement d'accord avec M. Blanc pour dire que chacun a son travail et encore plus d'accord avec lui pour dire que, lorsque ce Grand Conseil s'érige en tribunal, il ne respecte pas ses fonctions. Cela étant, le Grand Conseil est bastant pour décider si le pouvoir judiciaire s'exprime devant les commissions parlementaires. C'est la raison pour laquelle mon département n'a pas d'avis particulier à exprimer.
Comme je l'ai dit, le système me paraît bien fonctionner actuellement. Je suis aussi d'accord que la séparation des pouvoirs implique que chacun effectue sa part du travail dans la seule activité qui lui revient mais, encore une fois, il s'agit d'une décision qui vous incombe. Je pense qu'il est néanmoins utile que nous puissions en débattre en commission.
M. René Longet (S). En tant que cosignataire de cette motion, je tiens à souligner les propos de M. Ramseyer. Je suis très heureux de l'avoir entendu ce soir parce qu'il répond très clairement à M. Blanc.
En effet, M. Ramseyer nous explique, d'une part, que c'est une simplification de pouvoir s'adresser directement à la justice pour avoir des renseignements que le Conseil d'Etat, pour les raisons que vous avez données, ne peut pas avoir. D'autre part, la pratique d'associer le pouvoir judiciaire dans des travaux compliqués se fait déjà. Par conséquent, si la commission judiciaire entre en matière de la même manière que le Conseil d'Etat, nous aurons assez rapidement une amélioration significative de l'accès aux informations.
Je tenais à le souligner parce que les interventions précédentes laissaient entendre qu'il y avait une certaine froideur dans l'accueil par le Grand Conseil de cette motion et que son renvoi en commission n'aurait d'autre raison que de faire plaisir à l'ancien Bureau.
Nous avons largement progressé ce soir et j'aimerais saluer cette position du Conseil d'Etat et appeler la commission judiciaire à travailler dans ce sens pour préparer une législation qui nous permette de fonctionner effectivement de cette façon.
Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission judiciaire.
En date du 16 janvier 1998, 14 locataires domiciliés au 5, rue des Evaux ont déposé une pétition auprès du Grand Conseil. La Commission des pétitions l'a examinée lors de ses séances des 6 avril, 8 et 15 juin, 31 août et 7 septembre 1998 sous la présidence de Mme Mireille Gossauer-Zurcher.
La teneur de la pétition est la suivante :
Pétition(1186)
";Nuisances d'un voisin au 5, rue des Evaux"
Mesdames etMessieurs les députés,
Depuis quelques années, nous subissons des nuisances importantes et nocturnes émanant du locataire cité en référence.
La Régie Burger a été maintes fois mise au courant de la situation. Nous sommes même allés au tribunal dans le courant 1997, mais ce locataire est toujours aussi dérangeant.
Suite à nos appels répétés, la police d'Onex intervient à tout moment, mais ce locataire est toujours aussi dérangeant.
Nous avons fait preuve de beaucoup de patience mais devons en arriver à vous adresser un dossier, à savoir :
- ma dernière lettre recommandée à la régie
- une pétition signée par certains locataires.
Nous vous remercions de bien vouloir mettre à l'ordre du jour de la prochaine séance notre requête.
Veuillez agréer, Mesdames et Messieurs les députés, nos salutations distinguées.
N.B. : 14 signatures
Au nom des locataires, p.a. M. Christian Rosé, 5, rue des Evaux, 1213 Onex
Travaux de la commission
Audition des pétitionnaires : Mme M. Rossoz et MM. V. Peclard et C. Rose (6 avril 1998).
Les pétitionnaires expliquent que depuis quatre ans ils se plaignent du bruit émis par la personne mise en cause dans la pétition (ci-après M. D.) Pour l'un d'entre eux, qui doit notamment se lever à 4 h. pour aller à son travail, la vie devient impossible, car il subit la musique de son voisin jusqu'à minuit au moins ainsi que d'autres perturbations.
Selon eux, leur voisin est alcoolique et drogué et bien que la police soit intervenue plusieurs fois pour tapage nocturne, il recommence toujours. Il lui arrive parfois de jeter des meubles par la fenêtre.
Les pétitionnaires disent avoir vu des jeunes, apparemment drogués, sortir de chez lui. Ils ont même eu l'impression qu'il battait certaines filles fréquentant son appartement. De plus, sa mère qui loge parfois chez lui, subirait aussi ses comportements violents.
Enfin, ils ne comprennent pas pourquoi la régie ne fait rien ; bien qu'elle dispose d'un épais dossier sur M. D. Ils estiment aussi que celui-ci devrait avoir un traitement psychiatrique, car il est dangereux : il risque d'arriver un malheur si personne n'intervient et ce d'autant plus que M. D. aurait une arme à son domicile. Les pétitionnaires vont jusqu'à penser qu'il serait protégé par quelqu'un dans la police.
Audition de M. Philippe Bocquet, sous-brigadier au poste d'Onex(8 juin 1998).
En préambule à cette audition, la présidente précise que selon les pétitionnaires, M. D. vendrait de la drogue à des mineurs et qu'en plus il bénéficierait d'une certaine protection. Les commissaires souhaitent entendre le point de vue de M. Ph. Bocquet sur ces deux points.
M. Bocquet indique qu'il n'a jamais eu affaire personnellement avec M. D. Il sait cependant que plus d'une cinquantaine de personnes se plaignent de lui pour différentes raisons, que plusieurs interventions de police ont eu lieu à son domicile et qu'il est régulièrement en état d'ébriété. Il ne se manifeste pas seulement dans son immeuble mais fait souvent des esclandres dans la rue, sur les terrasses de bistrots, etc. En fait, il est connu de la police depuis 1983 alors qu'il n'avait que 14 ans...
M. Bocquet ne dispose d'aucun élément pour affirmer que M. D. se livrerait à du trafic de drogues et selon lui il ne bénéficie d'aucune protection du poste de police d'Onex.
Selon M. Bocquet, M. D. est le cas typique devant lequel la police est désarmée. Il est à l'origine de nuisances mais quand il s'agit de bruit, la police ne peut que lui infliger des amendes qu'il ne paye d'ailleurs pas lui-même puisque l'Hospice général subvient à ses besoins. A son avis, il nécessiterait un suivi médical, voire psychiatrique. Pour conclure, il estime que la question principale est de savoir comment cet homme en est arrivé là sans que l'on ait pu intervenir avant. Les différents services ou institutions chargés de suivre son dossier ne portent-ils pas certaines responsabilités ?
Audition de Mme Béatrice Gisiger, conseillère administrative de la Ville d'Onex et de M. Pierre-Antoine Lacroix, responsable du service social d'Onex (15 juin 1998).
Au vu de l'audition précédente, la commission souhaitait savoir si le cas de M. D. était connu du service social et s'il y avait une coordination avec l'Hospice général à son sujet.
Selon M. Lacroix, M. D. est connu depuis environ 10 ans du service social, en raison du bruit qu'il fait subir à ses voisins mais jusqu'à présent, son dossier n'était traité que par l'Hospice général. Il pense que l'Hospice général ne fait rien d'autre que de lui assurer une aide financière. L'Hospice général et le service social d'Onex devraient travailler en partenariat.
Il estime en outre que la loi sur les services d'aide et de soins à domicile a pour effet de mettre à l'écart les travailleurs sociaux communaux du champ social où ils devraient intervenir par une action de proximité. Pour lui, les CASS n'intègrent pas réellement l'action sociale.
Il met donc en cause le système actuel de l'aide sociale qui ne fait qu'"; arroser " les gens en difficulté alors qu'il convient de mener aussi un travail de fond avec eux, de les faire participer à la résolution de leurs problèmes.
Mme Gisiger relève que c'est néanmoins à la suite de cette pétition que le service social a entrepris des démarches vis-à-vis de ce cas. D'une façon générale, cette affaire pose le problème de l'établissement du CASS dans la commune d'Onex. En effet, le service social communal a de la peine à trouver sa place dans la structure qui se constitue entre l'Hospice général et les services d'aides à domicile. Elle a l'impression que le rôle du service n'est pas assez reconnu. Cela risque de compromettre le nécessaire travail de réseau entre les services et le travail de proximité auprès de la population.
Audition de MM. Robert Cuénod, directeur de l'Hospice général et de M. Hugo Lopez, assistant social à l'Hospice général (31 août 1998).
La présidente précise d'emblée que l'audition porte surtout sur les rapports entre l'Hospice général et les services communaux dans le cadre des CASS.
M. Cuénod signale tout d'abord que l'Hospice général n'a pas les compétences légales pour intervenir dans la vie d'une personne adulte sans son consentement. Pour ce faire, il y a des procédures (mise sous tutelle par ex.) qui prennent du temps.
Concernant la question du partenariat, l'Hospice général travaille déjà sur cette base avec de nombreux partenaires, privés et publics. Il rappelle d'ailleurs que ce partenariat est prévu dans la loi sur l'aide et les soins à domicile. La mise en place des CASS a précisément pour but de favoriser le travail de proximité en instaurant des collaborations avec les services sociaux des communes et ceux de la Ville de Genève. Des efforts de coordination ont été réalisés sur le plan institutionnel, notamment par le biais de la signalisation, de la nomination des coordinateurs et la collaboration entre les partenaires. Du côté social, l'Hospice général entretient des relations avec M. Ph. Aegerter, pour la Ville de Genève et M. M. Hug pour l'Association des communes genevoises. Il admet néanmoins qu'il existe encore des dysfonctionnements mais que ceux-ci sont évalués afin de pouvoir y remédier. Il relève enfin que l'Hospice général accomplit aussi un travail de proximité et une action de type communautaire et ne fournit pas seulement des prestations sociales et financières. Il y a souvent plusieurs partenaires qui s'occupent d'une même personne. L'Hospice général est donc obligé de collaborer avec les autres services.
M. Lopez ajoute que d'ici environ 6 mois, l'organisation des CASS impliquera l'établissement d'un dossier unique pour chaque client. Les travailleurs sociaux, qu'ils soient issus du canton ou d'une commune, agiront au sein de la même unité d'action sociale. Il s'agit de l'application de la loi sur l'aide et les soins à domicile qui prévoit une action intégrée.
Pour revenir au cas de M. D., il informe la commission que ce dernier est suivi régulièrement par l'Hospice général depuis septembre 1997. Ce cas a nécessité de nombreuses interventions de la part de l'assistante sociale en charge du dossier. Il annonce que cette dernière a pu lui trouver un autre appartement dans lequel il emménagera le 1er octobre 1998 ce qui va mettre un terme au problème des voisins du 5, rue des Evaux.
Discussion
A la suite de l'audition des pétitionnaires, il est apparu que si la résolution du cas de M. D. ne relevait pas de la compétence de la commission, la pétition soulevait un certain nombre de problèmes qui présentent un certain intérêt pour les députés.
Il s'agissait d'une part de comprendre pourquoi cette situation s'est enlisée si longtemps et d'autre part comment s'articulaient les relations entre les différents acteurs en présence. Il a paru important à la majorité des commissaires de confronter les points de vue de la police et des services sociaux, en l'occurrence l'Hospice général et le service social de la commune d'Onex. Ceux-ci ont révélé la difficulté de collaboration notamment dans la mise en place des CASS, les résistances qui s'organisent et les problèmes de communication, alors que dans le discours les termes de partenariat, de réseau et de travail de proximité reviennent sans cesse.
L'ensemble de la commission pense que cette pétition a été l'occasion de mesurer les problèmes qui se posent sur le terrain entre les divers acteurs du social et de mieux percevoir quel peut être le rôle de chacun.
La pétition est désormais sans objet puisque le problème concret qu'elle soulevait a été (temporairement) résolu par le déménagement de M. D.
La commission décide donc à l'unanimité de la déposer sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement. Je vous propose donc Mesdames et Messieurs les députés, de suivre les mêmes conclusions.
Débat
M. Walter Spinucci (R). La commission des pétitions a consacré cinq séances à l'examen de cette pétition. J'espérais qu'après un travail aussi important la commission parviendrait à formuler des recommandations utiles afin de régler définitivement ce problème, si faire se peut.
Je constate à la lecture des conclusions du rapport que la pétition est désormais sans objet puisque le problème concret qu'elle soulevait a été temporairement résolu par le déménagement de cette personne. Le terme «temporairement» est effectivement très approprié car il faut savoir que, dès son déménagement dans une rue adjacente à 50 mètres du premier domicile, la bagarre a repris de plus belle avec les nouveaux colocataires.
Doit-on déduire des propos contenus dans ce rapport que le simple déplacement d'un individu décrit comme très dérangeant pour la collectivité peut constituer en soi une réponse efficace ? Ce jeu qu'on appelle de la patate chaude serait-il la solution ? Nous ne sommes pas vraiment rassurés pour ce nouveau voisinage et ce, d'autant que son nouveau logement se situe à une rue du précédent... (Commentaires.)
Le président. Poursuivez, Monsieur Spinucci, et ne vous occupez pas des nuisances des voisins !
M. Walter Spinucci. Je relève également à la lecture du rapport qu'un sentiment de frustration demeure au niveau du service social de la commune quant aux capacités de l'Hospice général, en dépit de ce qu'il prétend, de mettre en place un suivi professionnalisé dépassant le seul règlement financier, ainsi que les difficultés rencontrées pour établir, avec cette institution, des liens de collaboration intelligents.
Nous aurions vivement souhaité en savoir plus sur les difficultés de collaboration entre l'Hospice général et les services sociaux communaux ainsi que sur la perception des rôles de chacun. Quelle analyse en font les commissaires à l'issue de ces conversations sans doute très instructives ?
Cet organisme mystifie bel et bien le citoyen lorsqu'il prétend accomplir un travail de proximité comparable à celui, réel ou potentiel, effectué par les services sociaux des communes. Plutôt que de s'accaparer tous pouvoirs en matière d'action sociale, l'Hospice général ferait sans doute mieux de reconnaître ses limites et d'admettre, le cas échéant, de composer et coopérer, plutôt qu'imposer, avec les organismes communaux agissant selon d'autres valeurs.
Ni l'Hospice général ni le service social communal ne peuvent venir à bout facilement d'un comportement socio-pathologique aigu. Une action coercitive, éducative, voire répressive serait plus indiquée dans certains cas, même moins spectaculaires. Des organismes de répression avouent ou admettent qu'il faut malheureusement attendre un événement majeur ou tragique pour agir.
Je regrette que la commission se soit bornée à faire l'état des lieux en escamotant les vrais problèmes, sans proposer de solutions concrètes, et qu'elle n'ait pas profité de cette pétition pour essayer de redéfinir les rôles de chacun.
M. Albert Rodrik (S). Je me permets de revenir sur un passage de l'intervention de M. Spinucci pour confirmer très solennellement que l'Hospice général n'a aucune volonté d'hégémonie, qu'il attache un prix particulier à sa collaboration avec les autorités communales et avec les services sociaux communaux et qu'il ne prétend détenir aucune vérité particulière sinon la nécessité de servir ceux qui s'adressent à lui.
A l'Hospice général, nous tenons à ces bonnes relations et nous ne voulons pas que se créent des antagonismes qui ne peuvent être que nuisibles à ceux qui s'adressent tant à l'Hospice général qu'aux services sociaux.
Si demain, suite au vote populaire, les crédits sont acceptés en faveur de cette fondation pour l'hébergement des personnes handicapés psychiques, des solutions pourront être trouvées, en dehors de la répression et de façon adéquate, à des cas douloureux qui ne doivent précisément pas être réglés par la répression.
Mesdames et Messieurs, je ne pensais pas que cette pétition nous amènerait à de telles considérations, mais je tiens à répéter que les graves problèmes sociaux qui sont évoqués ne peuvent pas être résolus par des surenchères ou des concurrences entre des organismes d'Etat ou des services communaux qui ont leur place et leur valeur.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse. J'adhère à ce qu'a dit M. Rodrik. Si M. Spinucci a fait quelques remarques tout à fait judicieuses, il faut peut-être rappeler que ce n'était pas le rôle de la commission des pétitions d'aller plus loin.
Certains pensaient déjà que la commission n'aurait pas dû procéder à toutes ces auditions, mais il me semble qu'en définitive les commissaires étaient tout de même satisfaits d'avoir pu approfondir certaines questions. Il est vrai que nous sommes dans une phase un peu particulière de mise en place des CASS et que cela devrait certainement donner lieu par la suite à une meilleure coordination des services sur le plan cantonal et sur le plan communal.
Ce cas soulevait effectivement certains problèmes, mais il n'était pas du ressort de la commission d'aller plus loin.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.
Dans sa séance du 2 novembre 1998, la Commission des pétitions a traité la pétition dont voici le texte :
Pétition(1219)
sur la vente d'affaires m'appartenant par le dépôt de l'Etat
Mesdames etMessieurs les députés,
Je viens d'apprendre ce soir même qu'une vente allait avoir lieu demain matin 6 octobre au dépôt de l'Etat de la route de Frontenex et que certaines des affaires m'appartenant y étaient exposées dans ce but.
Il s'agit là d'une manière détournée de voler les gens.
Par la présente, je vous demande d'enregistrer une plainte contre la vente des objets qui m'appartiennent, et qui appartiennent à des tiers, par le dépôt des ventes de la route de Frontenex.
Ces objets ont été enlevés dans le cadre de diverses évacuations dont nous avons été l'objet mon mari et moi-même.
Toutefois, nous n'avons pas été avertis de cette vente, pas plus qu'il n'y ait eu de décision légale à ce sujet.
Les différents jugements, hors délais, viciés dans la forme, dont les évacuations ont précédé lesdits jugements, et Monsieur Gafner qui s'excusait de devoir procéder en sachant que le droit ne le permettait pas tel qu'il était écrit (donc pas celui préfabriqué) mais qu'il avait des enfants et bientôt la retraite, ce qui l'empêchait de contredire un ordre.
Vu qu'il y a dans les affaires enlevées des choses ne m'appartenant pas qui seront vendues le 6 octobre aux enchères, je me permets de me rendre sur place pour la sauvegarde desdits objets, et dans les jours qui vont suivre je déposerai plus en détail et avec les pièces mon opposition et donc ma plainte pénale.
. .
A l'unanimité des membres présents, il a été décidé de classer cette pétition, le problème relevant de la justice.
En guise de rapport, vous trouverez en annexe, la lettre que la présidente de la Commission des pétitions a écrite à Madame Reubi-Latinov.
Nous vous proposons donc, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir suivre les conclusions de la commission.
Annexe p. 3
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (classement de la pétition) sont adoptées.
Par ces quelques lignes, le Conseil d'Etat vous présente le rapport de l'instance extérieure chargée d'évaluer les effets de la loi sur l'aide à domicile (K 1 05) (cf. article 9, alinéa 4).
1. INTRODUCTION
1.1 Les propositions du Conseil d'Etat
Le Conseil d'Etat, entendant poursuivre le transfert des soins hospitaliers vers les soins à domicile et maintenir le moratoire sur la construction de nouveaux EMS, a proposé au Grand Conseil, en août 1996 :
- d'une part, différentes modifications législatives et organisationnelles ;
- d'autre part, de voter un 2e crédit quadriennal pour l'aide à domicile (1997-2000), d'un montant total de 289 500 000 F, financé par le centime additionnel pour l'aide à domicile, accepté en votation populaire du 16 février 1992, et par des transferts de crédits hospitaliers.
1.2 Les décisions du Grand Conseil
Le 5 décembre 1996, le Grand Conseil a voté les différentes modifications proposées par le Conseil d'Etat et a ouvert un crédit quadriennal de 289 500 000 F, destiné à financer la poursuite du développement des soins à domicile durant la période 1997-2000.
1.3 Le comité de direction de l'aide à domicile
Afin d'assurer la mise en oeuvre de diverses réformes et de veiller au bon usage du 2e crédit quadriennal (1997-2000) de développement de l'aide à domicile, le Conseil d'Etat et le Grand Conseil ont mis en place le comité de direction de l'aide à domicile.
Le comité de direction est composé de huit membres, dont cinq représentants des directions des services publics et privés d'action sociale et d'aide à domicile et deux représentants des coordinateurs des centres d'action sociale de quartier et de commune. Il est présidé, à plein temps, dès le 1er juin 1997, par un haut fonctionnaire nommé par le Conseil d'Etat, Mme Nicole Fichter.
1.4 L'organisation par secteurs territoriaux desservis par des centres d'action sociale et de santé (CASS)
Conformément à la nouvelle législation votée le 5 décembre 1996, le Conseil d'Etat a chargé le comité de direction de la mise en place de la nouvelle organisation qui comprend :
a) une organisation par secteurs, desservis par 22 centres d'action sociale et de santé (CASS), regroupant et intégrant les différentes activités des services, publics et privés, d'action sociale et d'aide à domicile ;
b) une action décentralisée au niveau des secteurs, mais intégrée dans les CASS, en renforçant la coordination entre les services publics et privés, notamment par la constitution d'un dossier unique du client ;
c) de veiller à la coordination et à la gestion de l'ensemble du secteur des soins à domicile, représentant 1500 collaborateurs et un budget de 93.6 millions par année.
1.5 L'informatique commune
Afin de permettre la réalisation, dans les meilleurs conditions, de la décentralisation et de l'intégration des activités des services d'action sociale et d'aide à domicile dans les centres de secteurs, le Conseil d'Etat a décidé, le 28 mai 1997, d'étudier et de mettre en place un système informatique (hardware et software) unique, commun aux services, privés et publics, qui assurent les prestations d'aide sociale (Hospice général) et les prestations d'aide à domicile et de soins à domicile (Fédération des services d'aide à domicile).
1.6 L'évaluation des effets de la nouvelle législation
Conformément à l'article 9, alinéa 4 de la loi sur l'aide à domicile, révisée le 5 décembre 1996, le Département de l'action sociale et de la santé a confié à Mme Marthe Erismann, consultante en organisation sanitaire et médico-sociale (ORES Conseil), le mandat d'une première évaluation des effets de la loi sur l'aide à domicile après deux ans.
Le Conseil d'Etat communique au Grand Conseil :
a) ci-après, sous chiffre 2, un résumé du rapport d'évaluation, rédigé par son auteur ;
b) en annexe, le rapport d'évaluation dans son intégralité.
2. RÉSUMÉ DU RAPPORT D'ÉVALUATION
2.1 Généralités
Dans le cadre de sa politique et de sa planification sanitaires, le canton de Genève valorise et développe l'aide à domicile. Le débat sur l'importance de ce domaine remonte à 1985, année de l'initiative populaire
Source : Rapport de la commission chargée d'étudier l'initiative populaire "; soins à domicile " et le projet de loi sur l'aide à domicile, 26 août 1991, IN 14 - D PL 6738.
A l'origine de cet intérêt pour "; ce domaine ", on peut distinguer un problème de société : comment répondre aux demandes de la population, alors que l'offre de prestations est insuffisante ? Comment faire face aux nouveaux besoins que va entraîner le vieillissement de la population ? La réponse donnée est double : rationaliser le domaine de l'aide et des soins à domicile, terrain d'action peu coordonné de services tant privés que publics, et parallèlement renforcer les ressources disponibles. Par ailleurs, il est prévu d'articuler l'ambulatoire avec l'hospitalier et l'hébergement, les deux autres volets du triptyque de la santé. Les pouvoirs publics genevois décident, en effet, d'agir à trois niveaux :
a) développer l'aide à domicile ;
b) réduire le nombre de lits hospitaliers ;
c) imposer un moratoire sur la construction des EMS jusqu'au 31 décembre 2000.
L'idée défendue est que la substitution des prises en charge b) et c) par l'aide à domicile est source d'économies.
Pour réaliser ces objectifs, il est imaginé, au plan de l'aide à domicile, de mettre en place un dispositif organisé par secteur géographique doté d'un centre dans lequel les services d'intervention sont regroupés. Bien qu'orientée sur l'aide au ménage et les soins à domicile, l'organisation qui va être mise en place concerne aussi les actions sociales qui sont l'apanage de l'Hospice général et des services sociaux communaux.
2.2 Mandat et méthode
La loi sur l'aide à domicile, dans sa dernière version (1996), prévoit que ses effets seront évalués par une instance extérieure (art. 9). Tous les deux ans, en automne, le Conseil d'Etat devra présenter au Grand Conseil un rapport communiquant les résultats de cette évaluation.
Le mandat de la recherche évaluative a été confié par M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat chargé du Département de l'action sociale et de la santé, à ORES Conseil Marthe Erismann, en avril 1997. Le présent document est un résumé du rapport remis au mandant.
L'évaluation comprend trois parties : une étude de fonctionnement, une étude des relations et une étude de pilotage. Les huit éléments figurant dans le tableau ci-dessous font l'objet d'une analyse particulière.
Tableau A : Les huit éléments de l'évaluation.
L'évaluation approfondie porte sur une courte période (janvier 1997 à juillet 1998) ; ce laps de temps est d'autant plus limité que les nouveautés introduites par la révision de la loi ne vont se traduire dans les faits qu'à partir du printemps 1997. L'étude n'ignore pas, toutefois, l'observation sur une plus longue durée. Comme l'impulsion de développer l'aide à domicile remonte à 1993, certaines questions sont examinées avec un plus grand recul (1993-1997).
Pour l'essentiel, l'évaluation est donc concomitante (contemporaine) et se centre sur la mise en oeuvre des changements apportés par le texte légal de 1996 ; dans une moindre mesure, elle sera rétroactive pour observer l'évolution parallèle des trois domaines de la santé (l'hospitalier, l'ambulatoire et l'hébergement) ; elle sera de l'ordre du monitoring (contrôle des effets et du suivi) quand elle abordera les outils de pilotage.
De la signature du contrat à la remise du rapport, l'étude évaluative a franchi sept étapes : recherche préparatoire, projet d'évaluation, élaboration des outils d'analyse, récolte d'informations, visites des CASS, analyse des informations et rédaction du rapport.
Pour recueillir les données pertinentes, quatre voies ont été empruntées :
a) la lecture de tous les documents mis en circulation : une procédure de collaboration a été signée avec la présidente du comité de direction. Cet accord de coopération a grandement facilité l'accès aux écrits significatifs. Les services employeurs ont aussi volontiers fourni les pièces reflétant leurs activités ;
b) la conduite d'entretiens individuels avec les protagonistes de la réforme : suivant les cas, ces interviews avaient un caractère exploratoire, d'information ou de validation d'observations. Certaines entrevues ont permis de rencontrer des responsables des autres domaines de la santé et de l'action sociale. Au total quarante personnes à titre individuel et plus de cinq cents lors d'entretiens de groupe ont été entendues ;
c) la visite des 20 centres organisée en trois temps : une rencontre avec les coordinateurs a précédé l'envoi d'un questionnaire qui devait servir de guide à la journée passée dans le terrain. Cette "; immersion " dans chaque CASS a été un moment déterminant de l'évaluation ;
d) l'envoi de questionnaires différents, à un échantillon de médecins de pratique libérale, à l'ensemble des directeurs d'EMS, à un échantillon aléatoire de clients. Rappelons qu'un questionnaire destiné aux professionnels de chaque unité de service des CASS a récolté l'avis de 366 collaborateurs.
2.3 Un processus par étape
Pour comprendre la portée de l'évaluation, il est nécessaire de se souvenir que le développement de l'aide à domicile est un processus par étape. On peut distinguer cinq séquences :
2.3.1 Le problème de société à l'origine de la loi (l'origine)
Ayant déjà été évoqué plus haut, il peut être résumé de manière succincte : la demande de prestations d'aide et de soins à domicile n'est pas couverte ; le vieillissement de la population va dans les années à venir empirer cette situation ; par ailleurs, l'hospitalier et l'hébergement sont onéreux dans un contexte de recherche de maîtrise des coûts de la santé. L'aide à domicile doit avoir un développement prioritaire et se substituer partiellement aux deux autres domaines.
2.3.2 La loi initiale de l'aide à domicile, de 1992 (la constitution)
La nouvelle législation optait pour une organisation par secteur géographique (communes ou quartiers), les professionnels de la santé et du social étant regroupés dans des centres. Le dispositif à mettre en place implique une répartition des tâches : les communes mettent à disposition des locaux et les entretiennent. Le canton prend en charge la coordination, la sectorisation et les subventions. Celles-ci sont attribuées à des services privés d'aide à domicile reconnus d'utilité publique. Les dépenses de l'Etat s'inscrivent dans un crédit de programme pour la période 1993-1996. Elles sont en partie financées par la perception d'un centime additionnel. Pour superviser le réaménagement de l'aide à domicile, une commission cantonale est créée avec une large représentation des milieux intéressés, publics et privés.
2.3.3 La mise en oeuvre 1993-1996 (l'application)
Dans son rapport au Grand Conseil
RD 262 / PL 7497. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le premier programme quadriennal (1993-1996) de l'aide à domicile et Projet de loi modifiant la loi sur l'aide à domicile (K 12). Ci-après dans ce texte: "; le rapport de 1996 ".
Le rapport souligne que le programme politique a été réalisé et que la population en retire des effets bénéfiques. Il constate sur un autre plan, les signes d'un transfert des prises en charge de l'hospitalier et de l'hébergement vers l'aide à domicile.
Au passif de l'expérience, le bilan du Conseil d'Etat relevait le fonctionnement de la commission cantonale et celui des centres médico-sociaux. A l'origine de ces difficultés, l'absence d'un chef de projet pour la réforme et de coordinateurs pour les centres jouait sans doute un rôle non négligeable.
2.3.4 Les adaptations de la loi de 1996 (la remédiation)
Sur la base de ces enseignements, le rapport proposait quatre mesures pour améliorer le dispositif : l'adoption de neuf principes directeurs qui vont orienter les choix et les acteurs, la modification du fonctionnement de la commission cantonale, la création d'un comité de direction et la révision de l'organisation des centres médico-sociaux.
Une attention particulière est réservée aux centres, dorénavant baptisés "; centres d'action sociale et de santé " (CASS), qui sont organisés en trois unités de service et placés sous la conduite d'un coordinateur. Les professionnels, répartis entre les unités, restent toutefois rattachés à leurs employeurs. Le rapport cite les services qui seront actifs dans les CASS à savoir la Fédération des services privés d'aide à domicile (FSAD), l'Hospice général et les services sociaux communaux.
2.3.5 Les développements récents 1997-1998 (la relance)
Cette phase peut être comprise comme un second temps de la mise en oeuvre. Vu les importants changements dictés par la loi, elle doit être considérée comme un moment de relance, de réactivation de la réforme. Cette étape est au coeur de la présente évaluation qui va examiner dans quelle mesure les dispositions prises ont eu des effets sur la réalité.
2.4 L'étude de fonctionnement
Sous ce titre sont abordés successivement la cohérence de l'ensemble, la commission cantonale, le comité de direction et les CASS.
2.4.1 La cohérence de l'ensemble
Un des principaux apports de la révision de la loi réside dans le fait d'adopter des principes directeurs. Ils indiquent un sens, des priorités. Ils sont toutefois de nature différente : certains relèvent d'une logique d'organisation (centralisation versus décentralisation), d'autres d'un secteur d'activité (information, communication, collaboration de l'entourage).
D'autres encore se présentent comme des qualités du système (cohérence, efficacité). La diversité de ces axes, le caractère abstrait de certains nécessitent une analyse et le choix d'indicateurs pertinents, démarche qui ne sera pas aisée. Le premier principe "; mettre le client au centre du dispositif " semble à contre-courant des autres postulats, car le dispositif a été conçu à partir de schémas d'organisation, de structures déjà existantes ou à créer.
Les actes fondateurs de la nouvelle organisation ont été posés par les instances dirigeantes entre mars et juin 1997 : nomination de la présidente du comité, constitution de la commission cantonale, de son bureau et du comité de direction. Dans un second temps, la plupart des initiatives ont concerné le fonctionnement des CASS.
Il a déjà été relevé que la relance et l'approfondissement de l'aide à domicile portent sur une courte durée (19 mois). Si le temps pour agir a été court, les événements et initiatives pour modifier le cours des choses ont été nombreux. La figure ci-dessous récapitule les étapes-clés.
Figure A : La relance de la réforme.
Trois dossiers méritent d'être signalés pour leur importance : le choix et la nomination des coordinateurs, le programme-cadre des locaux négocié avec l'Association des communes genevoises et le modèle de fonctionnement des CASS.
Pour le court laps de temps pris en compte, le travail fourni est considérable. La somme d'initiatives prises, la quantité de pistes de réflexion ouvertes font penser à un immense chantier, à la dimension des questions à résoudre. La réforme a pris son envol et un rythme accéléré. Impulsée par le comité directeur, cette activité amène à s'interroger sur la capacité des acteurs à prendre des mandats nouveaux (groupes de travail) et à s'approprier les changements.
Globalement, chacun des organes dirigeants semble avoir trouvé sa place et son rôle. Organisme plénier, la commission cantonale joue un rôle de synthèse, de plate-forme. Structure exécutive, le bureau de cette commission remplit une fonction de relais. Instance professionnelle, le comité directeur est le cerveau et la main agissante de la réforme.
2.4.2 La commission cantonale de l'aide à domicile
La commission cantonale assiste le Conseil d'Etat dans l'élaboration et la mise en oeuvre de la politique d'aide à domicile. Du fait de la qualité et du nombre de ses membres (23), elle remplit un rôle politique, ou plus exactement d'articulation entre le politique, la société et les services opérationnels. Elle réunit presque tous les intérêts et points de vue. Aussi, offre-t-elle une tribune où un consensus peut se dégager, où les principales décisions peuvent être entérinées.
Déchargée du suivi des opérations, allégée des questions secondaires, la commission qui s'est réunie 6 fois de mai 1997 à juin 1998, ratifie les initiatives préparées ailleurs (le comité de direction et le bureau). Elle utilise peu (pour l'instant) sa compétence de proposition qui lui est offerte par la loi.
La commission élit un bureau de quatre membres chargés des affaires courantes. De fait, cet organe ne s'est pas limité à gérer l'ordinaire. Il a joué un rôle actif dans la recherche de consensus, la relation avec le DASS, la validation de l'information, l'avancement des dossiers. Il représente une instance de conseil, de recours et de référence pour le comité. Réunis à 11 reprises depuis sa création, ses membres paraissent avoir trouvé un mode de fonctionnement, une mise en commun de leurs compétences des plus satisfaisants.
2.4.3 Le comité directeur
Formé de cinq membres représentatifs des services employeurs et de deux coordinateurs des CASS, le comité est placé sous l'autorité de sa présidente. Celle-ci est nommée par le Conseil d'Etat pour une fonction exercée à plein temps. Selon la loi, les compétences du comité relèvent de l'exécution, de la mise en oeuvre et de la dimension opérationnelle. Dans les faits, il ne s'est pas cantonné dans ce rôle d'appréciation. Avec des techniques de gestion éprouvées, il a assumé la relance et l'approfondissement de la réforme. Dans un feu roulant d'initiatives, il a mandaté une quinzaine de groupes de réflexion pour étudier les principales questions liées à l'organisation et aux principes directeurs.
Avec le comité de direction, et en particulier sa présidente, l'aide à domicile a trouvé son centre névralgique, capable de donner un élan, un encouragement, un infléchissement, susceptible de lancer un débat, de commander une étude (auprès d'un expert), de motiver les praticiens, ce qui lui faisait hier cruellement défaut.
Produisant une somme de travail impressionnante, ce comité et sa présidente jouent un rôle de pivot (le point fixe) et d'ordonnateur (la mise en ordre) de la réforme. Or, cet organe de direction est à la fois composite dans sa formation et partagé dans ses intérêts. En effet, les représentants des directions des services employeurs peuvent se sentir tiraillés entre l'intérêt supérieur de la réforme et la sauvegarde des acquis des services. Ils sont alors placés devant un choix entre deux loyautés.
Le lancement et le suivi des nombreux dossiers ont entraîné une lourde charge de travail. La présidente s'est attachée les services d'un administrateur et de secrétaires (1,8 postes). Pour répondre aux nécessités, une petite cellule de travail permanente s'est donc constituée et est appelée à se renforcer, ne serait-ce que pour consacrer plus de temps aux tâches de communication et d'information. Il serait nécessaire de définir le statut et la dotation en personnel de cette modeste équipe.
Les procédures de consultation auprès des organisations syndicales et des commissions de personnel n'ont pas évité des situations de tension. Le projet d'organisation du fonctionnement des CASS a ainsi pris du retard.
2.4.4 Les centres d'action sociale et de santé (CASS)
La loi de 1996 met l'accent sur l'intégration des activités, la nomination d'un coordinateur, l'organisation en trois unités de service et la constitution d'une commission consultative. Sur cette base, les CASS se mettent en place et s'organisent de manière empirique, en attendant que le modèle de fonctionnement soit adopté définitivement. Ce document sera un guide essentiel, car il détaille pour chaque tâche le niveau de responsabilité et de coordination ; il distingue également quatre niveaux de délibération.
Un pas important vers l'intégration a été franchi avec la décision de créer la Fondation pour l'aide et les soins à domicile qui regroupera les trois services de l'actuelle Fédération (SASCOM, AGAD, APADO). Cette mise en commun permettra une rationalisation des prestations en fonction de valeurs et de normes communes. La gestion des ressources humaines et économiques y gagnera en efficience.
Les coordinateurs ont été nommés et sont entrés en fonction au début de l'année 1998. Le cahier des charges de ce poste répertorie les responsabilités et les tâches qui incombent à ce nouveau collaborateur dont le statut reste équivoque. En effet, le coordinateur exerce sa fonction à temps partiel (de 20 à 50 %) et reçoit une indemnité. Du point de vue hiérarchique, il est subordonné au comité de direction pour ses attributions de coordination, mais reste rattaché à l'employeur professionnel. Il porte plusieurs casquettes avec tous les risques de confusion et d'incompatibilité qu'une telle situation implique. La situation et l'autorité de ce nouveau responsable nécessitent une clarification.
L'organisation en trois unités est encore une réalité virtuelle. Elle implique que plusieurs questions soient réglées : rôle des secrétaires sociales, cohabitation des assistants sociaux de l'Hospice général et des services sociaux communaux, aménagement des plages de coordination.
Par un arrêté du Conseil d'Etat, le feu vert a été donné, en mai 1998, pour constituer des commissions consultatives. Ces organes réuniront autour de la table, des autorités communales, des usagers et des partenaires locaux de l'aide à domicile (action sociale et santé). Ils devraient être un canal privilégié de coopération entre les CASS et leur environnement. A l'heure actuelle, un appel a été lancé pour que les membres de ces commissions soient désignés.
La visite d'une journée dans chaque CASS a permis de constater qu'il y a dans la phase actuelle de la réforme, autant de CASS que de contextes différents. De la dispersion des locaux à leur regroupement sous un même toit, de la juxtaposition à la coopération des services, du travail séparé à l'expérimentation de formes de coopération, tous les cas de figure se présentent.
De ce bilan ressort ce qui reste à accomplir pour que la première priorité fixée par le Conseil d'Etat pour la période 1997-2000 soit respectée, à savoir la mise en place de la nouvelle organisation.
Lors des visites des CASS, les professionnels ont mis en évidence que la réponse aux demandes des clients est aujourd'hui plus rapide et mieux adaptée. La qualité des prestations est en hausse. Les acteurs du terrain déplorent, cependant, les changements incessants d'intervenants dans une prise en charge à domicile. Ils stigmatisent la difficulté d'assurer des remplacements, faute de personnel suffisant. Ils invoquent le manque de temps pour faire face à la multiplication des tâches découlant de la réforme. Dans ces doléances, il n'est pas toujours clair de distinguer ce qui est lié au changement de structure ou à une évolution de la typologie et des besoins de la clientèle.
Les employés des CASS expriment des attentes ambivalentes propres à un changement de pratique et d'environnement professionnels. Ils suggèrent des structures moins hiérarchisées (ou plus exactement une diminution des doubles hiérarchies) qui valorisent les relations transversales ; ils appellent de leurs voeux une meilleure connaissance mutuelle et une reconnaissance des statuts et compétences professionnelles. De nombreux collaborateurs insistent sur la prise en compte de leur rôle, de leur travail et de la spécificité de chaque fonction.
Il existe chez les prestataires qui ne sont pas encore rassemblés dans les mêmes murs une impatience à emménager dans un lieu commun. Le regroupement géographique dépend des communes qui, dans quelques cas, bloqueraient le développement des centres. Ces résistances amènent à s'interroger sur le rôle des municipalités, au-delà de ce que prescrit la loi. Sont-elles des pourvoyeuses et des gestionnaires des locaux et des équipements ? Sont-elle impliquées (ou consultées) dans les activités des CASS ?
2.6 L'étude des relations
2.6.1 Le traitement des clients
La priorité donnée aux clients se traduit par un choix des méthodes de travail qui vont déterminer l'accueil, l'orientation et la prise en charge des personnes qui s'adressent aux CASS. Ces manières de faire sont au nombre de trois :
a) le guichet unique ;
b) le dossier unique ;
c) le recours aux ressources d'une équipe multidisciplinaire présente dans les CASS, ainsi qu'à toutes les possibilités offertes par les autres membres du réseau de l'aide à domicile situés hors des CASS.
Les jalons pour créer un dossier et un guichet uniques ont été posés. Des réflexions ont été en effet engagées pour appréhender la demande des clients, la qualité des prestations, la procédure de traitement des plaintes, l'organisation téléphonique. Par ailleurs, un arrêté du Conseil d'Etat amène les différents services employeurs à choisir un système informatique identique et commun, ainsi l'organisation informatique de l'action sociale, de l'aide et des soins à domicile fait l'objet d'une étude complexe. Chargé de mener à bien ce projet, un groupe de pilotage doit prochainement remettre un rapport de synthèse sur l'entrée en vigueur du dossier unique.
Le guichet unique n'a pas fait l'objet d'une réelle réflexion avec les acteurs du terrain, alors qu'il soulève de multiples questions. Il en va de même avec l'équipe multidisciplinaire (la réponse interprofessionnelle) qui implique une philosophie et des buts communs, une méthode d'analyse partagée, la reconnaissance et la spécificité de chaque discipline et une bonne communication entre les différents professionnels.
Le principe de ramener l'attention sur le client a été abordé en termes d'instruments (guichet et dossier uniques). Une autre approche est également possible : celle qui serait centrée sur la liberté de choix de la clientèle du lieu de soins et de vie.
Mais de quels clients s'agit-il ? On sait peu de chose actuellement des profils et des attentes des clients, comme on est peu renseigné sur leur trajectoire. Une typologie a bien été élaborée par un groupe dit "; de synthèse ", à partir des demandes. Ce type de démarches, de même que les enquêtes de satisfaction doivent être encouragées pour mieux connaître les clients et leurs besoins.
La consultation auprès d'un échantillon de clients a montré que ceux-ci sont faiblement concernés par les enjeux d'organisation et de structures. Ils sont en revanche sensibles à la forte rotation des collaborateurs qui leur rendent visite.
2.6.2 Les relations avec les EMS et les hôpitaux
Le rapport de 1996 préconise un glissement de l'hospitalier vers l'aide à domicile. Il prône un renforcement de la collaboration entre les deux domaines par différents moyens : fiches de liaison, dispatching des clients... En fait, il s'agit d'aménager des interfaces entre, d'une part l'hospitalier et le domiciliaire, d'autre part le domiciliaire et l'hébergement.
Un groupe ad hoc a étudié ce problème et proposé de créer le RUMS ou relais des urgences médico-sociales de l'aide à domicile, sur le modèle du Bureau d'orientation des urgences médico-sociales vaudois. L'organisation et le fonctionnement de cette équipe d'intervention seront discutés prochainement. Sa mise en place fait partie des priorités : en effet, les soignants hospitaliers n'ont plus le temps de préparer les sorties des clients avec leurs collègues de l'aide à domicile. En fait, ce sont les assistants sociaux qui organisent les passages.
Dans leurs réponses au questionnaire, les médecins indépendants confirment la difficulté de ces transferts. Ils estiment, par ailleurs, que le choix du lieu de vie et de soins appartient bien aux clients et à leurs proches. Le rôle du médecin, s'il intervient, prend la forme d'un conseil et non d'une décision.
Les directeurs d'EMS, interrogés à leur tour, pensent que la décision d'hébergement est prise par le client, avec l'appui de ses proches. Ces responsables d'institution ont une connaissance approximative du dispositif domiciliaire et de ses prestations, faute de collaboration et d'information d'un domaine à l'autre. Ils se disent ouverts à une coopération et désignent des activités qui pourraient bénéficier d'un rapprochement. A noter que les clients des EMS sont de plus en plus âgés ce qui nécessite des aides et des soins plus importants quantitativement et qualitativement.
2.6.3 L'information et la communication
Améliorer l'information et la communication figure parmi les principes directeurs mis en évidence par le rapport de 1996. Le comité directeur s'est adressé à une entreprise spécialisée pour qu'elle imagine un plan de communication pour l'aide à domicile. Cette agence a proposé un large éventail de moyens qui se complètent dans leurs objectifs et leurs publics-cibles. Le choix d'une identité visuelle devait répondre à quatre objectifs :
a) adopter un ensemble de règles cohérentes ;
b) faire connaître le nouveau logo aux publics-cibles ;
c) renforcer le processus d'harmonisation ;
d) communiquer une image positive, qualitative et professionnelle.
Le plan directeur de la communication a été adopté en mars 1998 et plusieurs supports sont réalisés (ou en voie de réalisation) : la newsletter interne dont trois numéros sont sortis, l'inventaire des publications existantes, l'adoption d'un logo type inspiré de celui des HUG, la signalisation des bâtiments des CASS en ville de Genève. Un projet de plaquette de présentation est à l'examen. Un rapport d'activité est prévu pour l'exercice 1998, selon une politique en vigueur aux HUG.
2.7 L'étude de pilotage
Le système d'information de l'aide à domicile peut être compris comme un ensemble avec ses subdivisions (sous-systèmes) : les ressources financières, le personnel, l'organisation/les structures, les prestations, la clientèle, les coûts. Les trois premières entités représentent les ressources investies (les imputs), les trois dernières le résultat des activités, les prestations fournies à la clientèle (les outputs). En combinant les données de base de ces différents aspects de l'aide à domicile, on obtient des indicateurs permettant une analyse régulière, chiffrée, mesurable. Le système doit encore être complété pour servir à différents niveaux et répondre, selon les circonstances, aux besoins des responsables politiques, des gestionnaires du dispositif et aux professionnels du terrain.
Le rapport de 1996 propose une série d'indicateurs de substitution entre hôpitaux et domicile, d'un côté, domicile et EMS de l'autre. Dans la mesure où ces indicateurs sont quantitatifs, ils doivent être complétés d'observations qualitatives pour livrer des informations qui permettent des remédiations.
Quatre études ont été menées pour définir les données de base nécessaires pour assurer un suivi régulier (sous forme de monitoring) de la gestion du domaine domiciliaire. Citons ces analyses :
a) création d'un tableau de bord des ressources humaines ;
b) définition des éléments du tableau de bord de la clientèle ;
c) choix des indicateurs économiques ;
d) sélection d'indicateurs de suivi des principes directeurs du dispositif.
Signalons également les travaux des groupes de travail "; statistiques " du Groupe romand de la santé publique (GRSP) et du Groupement romand des affaires sociales (GRAS) qui se sont centrés sur la structure des charges et des produits des services d'aide et de soins à domicile des cantons romands, de Berne et du Tessin.
Dans le chapitre "; synthèse " de l'étude sont abordées des questions qui nécessitent de prendre du champ, d'avoir un regard rétroactif. Une analyse des effets (1993-1998), tels que trois groupes de personnes (médecins indépendants / directeurs d'EMS / professionnels de l'aide à domicile) les identifient, montrent une fois encore la nécessité de consolider la continuité de l'action entre ces trois domaines.
Une autre analyse sur la substitution hôpitaux / domicile et domicile / EMS fait apparaître des tendances qui vont clairement dans le sens de la volonté populaire :
a) offrir la possibilité d'être soigné à domicile plutôt qu'à l'hôpital lorsque cela est possible ;
b) vivre le plus longtemps possible chez soi, repoussant ainsi, voir évitant l'entrée en EMS ;
c) maîtriser les dépenses de santé en donnant la priorité au type de prise en charge le moins onéreux.
Trois questions particulières sont également traitées : la dotation en personnel, l'importance de l'évaluation de la qualité des prestations et la dualité de l'action sociale.
Au fil des entretiens, une plainte a été formulée de manière récurrente : l'insuffisance de la dotation en personnel. L'analyse des chiffres disponibles ne peut montrer que cette assertion est fondée. Elle met en évidence qu'il n'y a pas de relation bien établie d'un CASS à l'autre entre l'effectif d'employés et la population du secteur. Elle révèle aussi que l'équilibre interne aux CASS entre professionnels de différents services (ou unités de service) varie considérablement d'une situation à l'autre. D'où la nécessité d'évaluer la charge de travail des collaborateurs et d'établir des critères de dotation en personnel, valables pour tous les CASS. La qualité fait l'objet d'une courte évocation pour souligner l'importance :
a) de clarifier les définitions ;
b) de choisir un système identique pour les différentes unités ;
c) de garantir la qualité des prestations par une évaluation (une mesure) systématique et régulière ;
d) de permettre une comparaison entre les CASS.
La dualité de l'action sociale dans les CASS provient du fait que l'Hospice général et les services sociaux communaux se référent à des légitimités, des références et des pratiques qui sont (seraient ?) différentes. Pour que les centres ne reproduisent pas, à leur échelle, des conflits externes, il est nécessaire qu'un modus vivendi soit trouvé. Pour la réussite de la réforme, un certain consensus doit exister entre quatre "; sphères " : les politiques, les gestionnaires, les professionnels du terrain et les clients.
Dans sa conclusion, l'étude situe le déploiement dans le temps et l'espace. La réussite d'une réforme implique une certaine pression, mais elle exclut la précipitation. Le changement demande une maturation et une appropriation par les acteurs. Moins que de prendre de nouvelles initiatives, il est nécessaire d'appliquer et de finaliser. L'aide à domicile doit se penser en terme de réseau, celui-ci devant remplir certaines conditions : être délimité, avoir défini des critères d'appartenance, avoir un but à partager, être organisé, entretenir une vie interne et accepter une autorité de coordination.
Un rapide retour sur les principes directeurs amène à s'interroger sur la cohérence qui ne concerne pas seulement les relations entre les structures mais aussi le degré de communauté d'intérêts entre les objectifs du réseau et de ses éléments constitutifs (une question d'adhésion). Il est également relevé qu'il faut soutenir dans la réforme ce qui va dans le sens de l'intégration et de la mise en commun (comité directeur, coordinateurs, commissions consultatives des CASS).
En dernier ressort, ce qui est demandé, tant aux gestionnaires qu'aux professionnels du terrain, c'est un changement de pratiques et de mentalités. Plus précisément de passer d'un point de vue personnel à une vision commune, d'une logique de services employeurs à celle des centres d'action sociale et de santé, d'une entité isolée à la constitution d'un réseau de l'aide à domicile, d'un langage différent à des notions communes, d'un usage réservé de l'information au partage de celle-ci, d'une organisation de travail individualiste à une planification au service du client, de la situation momentanée du client à celle de trajectoire.
2.8 Les recommandations
Dans chacun des chapitres de l'étude, des recommandations ont été formulées. Elles sont regroupées dans le tableau ci-dessous.
Recommandations
Degré de priorité
Type de mesure
Responsabilités
1
2
3
D
O
I
E
DASS
CCAD
CD
SE
CASS
1. Modifier l'intitulé de la loi
X
X
R
2. Préciser la place du social dans laloi
X
X
R
3. Préciser le rôle des communes
X
X
R
Ex
4. Revoir la liste des prestations
X
X
R
Ex
5. Introduire un représentant des EMS dans la commission cantonale
X
X
R
Ex
6. Opter pour un réseau de l'aide àdomicile et le définir
X
X
X
R
Ex
C
C
7. Définir le statut et la dotation del'équipe permanente du comitéde direction
X
X
R
Ex
8. Rédiger une charte des CASS
X
X
X
R
Ex
C
C
9. Préciser le statut du coordinateur
X
X
X
R
Ex
C
C
10. Tester (voire remédier à) la répartition des compétencesCD / SE / CASS
X
X
X
R
Ex
C
C
11. Imaginer les scénarios d'organisation future
X
X
R
12. Instaurer une réflexion sur leguichet unique
X
X
X
R
Ex
C
Recommandations
Degré de priorité
Type de mesure
Responsabilités
1
2
3
D
O
I
E
DASS
CCAD
CD
SE
CASS
13. Organiser une réflexion sur la multidisciplinarité
X
X
R
C
C
14. Développer les interfaces Hôpitaux / domicile / EMS
X
X
R
Ex
C
15. Créer une équipe mobile de soins psychiatriques
X
X
R
Ex
C
C
16. Renforcer la collaboration entreles assistants sociaux / Hôpitaux/ CASS
X
X
R
C
C
17. Développer la collaboration avecles EMS
X
X
R
Ex
18. Développer des séjours de courtedurée en EMS
X
X
R
Ex
C
C
19. Offrir des stages aux professionnels dans les Hôpitaux/ EMS
X
X
R
Ex
C
20. Etablir des critères de dotation enpersonnel des CASS
X
X
X
R
Ex
C
21. Introduire le tableau de bord de ladotation en personnel des CASS
X
X
X
R
Ex
C
22. Lancer des actions pour renforcerle sentiment d'appartenance
X
X
X
R
Ex
C
23. Développer une réflexion sur lesvaleurs professionnelles dansles CASS
X
X
X
R
Ex
24. Développer des actionsd'explicitation de la réforme
X
X
R
Ex
25. Etablir un plan de formation sur l'accompagnement du changement
X
X
X
R
Ex
26. Concrétiser toutes les étapes duplan directeur de la communication
X
X
R
27. Développer des actionsd'information vers les partenaires
X
X
R
C
C
Recommandations
Degré de priorité
Type de mesure
Responsabilités
1
2
3
D
O
I
E
DASS
CCAD
CD
SE
CASS
28. Elaborer une typologieopérationnelle de la demandedes clients
X
X
R
C
C
29. Adopter une convention communequi définit la prise en charge
X
X
X
R
Ex
30. Traiter des valeurs de l'aide àdomicile dans les organesd'information
X
X
X
R
31. Introduire un système demanagement de la qualité communà l'ensemble du dispositif
X
X
X
R
Ex
C
32. Préciser le contenu des principes généraux : "efficacité" et "cohérence"
X
X
X
R
C
C
33. Compléter les indicateurs desubstitution par des critères qualitatifs
X
X
X
R
Ex
C
34. Introduire un 11ème principe : " le libre choix du lieu de vie"
X
X
X
R
Ex
C
35. Définir des indicateurs pour "suivre" le rôle joué par l'entourage
X
X
X
R
Ex
36. Introduire des indicateurs d'activitépar unité de service des CASS
X
X
X
R
Ex
37. Introduire des indicateurs de satisfaction (clients et personnel)
X
X
X
R
Ex
C
38. Appliquer les décisions prises dansle programme-cadre des locaux
X
X
R
C
C
39. Finaliser et appliquer les mesuresd'équipements techniques
X
X
R
Ex
C
40. Réaliser le programme d'informatisation
X
X
X
R
Ex
C
3. CONCLUSION
Conformément à l'article 9, alinéa 4 de la loi sur l'aide à domicile (K 1 05), le Conseil d'Etat communique, en annexe, l'intégralité du rapport, qui a été résumé par son auteur au chiffre 2.
De l'avis du Conseil d'Etat, le rapport d'évaluation montre clairement que l'aide à domicile a trouvé sa place au sein de la politique de la santé et qu'elle a gagné sa légitimité par rapport aux soins hospitaliers.
Les diverses résistances mises en évidence - en particulier du côté des services d'action sociale - devraient s'atténuer avec la mise en place de l'informatique commune, du guichet universel et du dossier unique. A défaut, le Conseil d'Etat proposera au Grand Conseil de prendre les mesures nécessaires en septembre 2000, au moment du prochain rapport d'évaluation, des éventuelles modifications législatives et du 3e crédit quadriennal 2001-2004.
Dans l'intervalle, les recommandations énumérées au chiffre 2.8 seront progressivement mises en oeuvre, sous la responsabilité des différents organes compétents.
Annexe: Rapport d'évaluation de l'aide à domicile (remis en séance)
Débat
M. Pierre-Alain Champod (S). Je demande que ce rapport soit renvoyé à la commission des affaires sociales qui aura l'occasion de l'étudier.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce rapport divers à la commission des affaires sociales est adoptée.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant:
les problèmes structurels et financiers que connaissent certains instituts universitaires genevois, en particulier ceux se vouant à la recherche et à l'enseignement dans le domaine international ;
les négociations qui se déroulent sous l'égide des autorités fédérales concernant l'avenir de plusieurs d'entre eux ;
l'annonce de la fermeture de l'Académie internationale de l'environnement (AIE), la réduction des contributions qui lui sont allouées et les licenciements en cours et prévus en son sein, liés à ces restrictions ;
la nécessité d'adapter constamment l'activité des instituts universitaires concernés aux thématiques économiques, politiques et sociales apparaissant sur le plan mondial, et de leur permettre de répondre aux exigences scientifiques (recherche) et pédagogiques (enseignement) en rapide évolution ;
invite le Conseil d'Etat
en concertation étroite avec les intéressés,
à développer un projet de coopération organique entre les instituts universitaires traitant du domaine international, en leur proposant une effective mise en réseau, en maintenant, globalement, au moins les financements existants ;
à faire tout ce qui est en son pouvoir pour que l'Académie de l'environnement ne soit pas l'objet d'un démantèlement « à froid » mais que ses personnels, programmes et potentiels soient maintenus jusqu'à la réalisation visée au point 1.
EXPOSÉ DES MOTIFS
L'annonce de la fermeture de l'Académie internationale de l'environnement, fondation créée en 1992, est le dernier en date des événements révélateurs d'une crise rampante des institutions de recherche et d'enseignement oeuvrant autour de thèmes essentiels de la Genève internationale.
En effet, la diversité et la qualité de l'enseignement et de la recherche universitaires - dans le cadre de l'Université elle-même et dans les instituts universitaires et para-universitaires
L'AIE n'est pas une institution universitaire stricto sensu, n'ayant pas vocation à décerner des titres académiques. Elle remplit des fonctions de recherche et de formation continue essentiellement.
Dès lors, le sort de ces enseignements et de ces recherches doit nous tenir très fortement à coeur. Il s'agit en particulier de l'Institut universitaire de hautes études internationales (HEI), de l'Institut universitaire d'études du développement (IUED), de l'Académie internationale de l'environnement (AIE), de l'Institut européen (l'Institut d'architecture pourrait être concerné dans la mesure où il s'oriente sur les problèmes d'aménagement et d'urbanisme liés au développement durable).
Si jusqu'à récemment chaque institution pouvait mener ses activités dans une relative quiétude, à l'abri de soucis financiers majeurs, la crise est aujourd'hui bien réelle. Que l'on en juge :
L'Institut HEI a vu la démission de son nouveau directeur à peine nommé, un mois avant la rentrée universitaire et qui n'a jamais occupé son poste. Un directeur intérimaire a été nommé dans l'urgence, en la personne du professeur Peter Tschopp, mais pour six mois seulement (!).
L'Académie internationale de l'environnement, dans « l'oeil du cyclone » depuis sa création, est désormais agonisante. Sa fermeture prochaine est annoncée et le personnel risque d'être licencié individuellement, sans perspective de maintien des capacités des groupes de chercheurs et des programmes.
L'IUED connaît-elle aussi des problèmes financiers, suite à des coupures budgétaires successives ; à l'interne, le débat s'instaure sur la notion même de développement (« il était une fois le développement » proclame un ouvrage d'un groupe de professeurs de l'IUED), suggérant la recherche d'un nouveau paradigme, plus global.
Quant à l'Institut d'architecture, son directeur a donné sa démission avec fracas et le nouveau directeur constate que les étudiants désertent les cours et s'orientent davantage, par exemple vers l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL).
Il y a heureusement tout de même une bonne nouvelle : l'Institut européen sort d'une crise de plusieurs années.
Le problème que pose l'avenir des institutions universitaires n'échappe pas aux autorités fédérales. Ces dernières se préoccupent de plus en plus de la situation, vu qu'une grande partie de leur financement provient de l'Office fédéral de l'éducation et de la science (OFES) ou de la Direction du développement et de la coopération (DDC). Il apparaît que le secrétaire d'Etat à la science et à la recherche, M. Charles Kleiber, est en passe de soumettre des propositions quant au sort de ces instituts. Ces tractations se déroulent malheureusement en grande partie sans la participation active des personnes concernées.
Dès lors, les conditions sont réunies pour que notre canton n'assiste pas passivement au passage de la tornade, mais participe activement à la structuration et à la réorganisation des compétences existantes, autour d'un concept clair. Contribuer à ce débat est l'objet de la présente motion. Car au lieu de se lamenter ou de dénoncer les erreurs passées et les occasions manquées, il convient de saisir l'occasion qu'offre cette crise, qui n'est pas tout à fait un hasard, pour relever les défis et mettre en place un projet d'avenir.
La première question qui vient à l'esprit est celle de savoir si les structures et le morcellement des approches dispensées par de nombreuses et multiples institutions sont toujours adaptés aux exigences de l'enseignement et la recherche actuelles. Il y a tout lieu de croire que la réponse est négative.
La proposition que nous souhaitons faire consiste dès lors à réunir les trois champs actuellement séparés que sont la problématique des relations internationales, celle de l'environnement et celle du développement. Cette proposition fait d'autant plus sens que ces trois domaines sont étroitement liés, et ceci à tous les niveaux. C'est précisément la réunion de ces approches - enseignées séparément dans les divers instituts - qui donnera sa valeur ajoutée au tout, et évitera que l'on puisse, comme c'est le cas, enseigner l'un des aspects dans l'ignorance des deux autres.
Actuellement, malgré la multitude des enseignements dispensés par les instituts universitaires et l'université, il subsiste des lacunes importantes dans les programmes d'enseignement - nous insistons sur la notion de « programme » cohérent par opposition aux cours isolés - en ce qui concerne les Droits de l'Homme (ou Droits fondamentaux, ou Droit de la personne ou Droits humains), le développement durable, l'écologie ou l'environnement, etc.
Chaque institut possède un potentiel d'enseignement et de recherche important, de même qu'une « culture pédagogique », accumulés durant des années, qui seront mises en valeur dans un nouveau cadre institutionnel qui leur permettra de valoriser leurs complémentarités au lieu de se complaire dans une certaine juxtaposition. Il en résultera une cohérence accrue, une lisibilité bien plus grande, et une meilleure adéquation aux défis multiformes du monde actuel.
De plus, dans ses relations et collaborations avec d'autres instituts d'enseignement de recherche suisses, européens ou internationaux, la nouvelle entité aurait davantage de moyens et de poids pour mettre en place des conventions ou des projets de recherche communs.
Enfin, d'autres instituts pourraient rejoindre, soit dès le début, soit plus tard la nouvelle structure, en particulier le Centre universitaire d'étude des problèmes de l'énergie ou l'Institut Henry Dunant (qui dépend actuellement de la Croix-Rouge).
L'idée d'un regroupement d'instituts universitaires ou para-universitaires n'est pas nouvelle. Elle a déjà été avancée par le groupe radical, il y a quelques années, et par M. Blankart, ancien secrétaire d'Etat, et chargé de cours à l'Institut européen. Si cette proposition n'a pas eu de suite, c'est probablement parce qu'elle est arrivée trop tôt et qu'elle a soulevé la résistance de structures qui plaçaient alors leur indépendance (leur « identité ») au premier rang de leurs priorités institutionnelles.
Elle était aussi perçue comme la création d'une trop grosse structure, insuffisamment dessinée, qui a pu faire peur. Mais les temps ont changé et le moment est propice pour mettre en oeuvre un projet assurant une réelle synergie. Il n'est en tous cas plus possible de chercher à résoudre les problèmes particuliers à chaque institut sans penser au tout ; la seule issue acceptable est une issue qui envisage la situation globalement.
Nous voyons essentiellement deux voies pour arriver au but recherché par l'invite de la présente motion, la première ayant notre préférence, mais la seconde étant tout aussi envisageable, pour peu que les acteurs l'acceptent :
Modèle A
Ce modèle consiste au regroupement dans une nouvelle unité universitaire interdisciplinaire - que l'on pourrait appeler provisoirement Institut universitaire d'étude du développement humain (ou social) - des trois axes que sont l'Institut universitaire de hautes études internationales, l'Institut universitaire d'études du développement et bien entendu, de l'Académie internationale de l'environnement. Ces trois entités seraient mises « en réseau » sous l'égide d'un seul Conseil de fondation. Aujourd'hui, chacun de ces instituts dispose de son propre Conseil de fondation, qui ne communique guère avec les deux autres.
Le nouveau Conseil de fondation unique aura comme tâche de veiller aux synergies, et en particulier :
de coordonner des programmes de cours pour que les différents enseignements atteignent la masse critique tout en éliminant des doublons,
de renforcer la recherche en veillant à susciter des équipes interdisciplinaires,
de mieux structurer les financements,
de coordonner l'infrastructure administrative (bibliothèques, documentation, publications, etc.), actuellement dispersée,
de gérer le budget de la nouvelle entité, étant entendu que les moyens financiers actuels seront mis ensemble et leur total garanti au moins au niveau actuel.
Modèle B
Le même résultat pourrait être atteint sans modifier les structures de décision, mais en conditionnant clairement les subsides fédéraux et cantonaux à l'exigence d'une coordination et interaction des programmes, au sens de l'exposé ci-dessus. Ce modèle pourrait être offert en alternative aux institutions, sous réserve d'une volonté claire de l'autorité de financement de formuler de telles conditions. Parmi ces « conditionnalités », la plus importante est la garantie de l'effectivité du réseau, des échanges et des coordinations.
Dans tous les cas de figure, il convient de relever que :
La nouvelle entité serait interdisciplinaire par essence et compléterait l'enseignement universitaire proprement dit, plus orienté vers les études disciplinaires. L'Université et la nouvelle entité, en interface constante, mèneront un dialogue impliquant toutes les facettes méthodologiques et scientifiques. La création de l'entité permettrait également d'instaurer une « école de doctorat » interdisciplinaire et d'approfondir l'interdisciplinarité dans la théorie et la pratique (qui est loin d'être aussi aisée qu'on le dit).
Les interlocuteurs privilégiés, du côté de l'Université, en seraient les centres pluridisciplinaires existants. Ainsi le Centre universitaire d'écologie humaine (CUEH), qui regroupe des compétences issues de diverses disciplines et facultés, est déjà en partie chargé au sein de l'Université de répondre aux demandes et suivre les projets communs. Il est tout à fait dans la logique des choses qu'un lieu interdisciplinaire ait pour répondant et partenaire du côté universitaire un autre lieu interdisciplinaire.
Conclusion et procédure
Nous vous soumettons par la voie de la présente motion une orientation qui à notre sens s'impose, et qui doit maintenant être étudiée avec les intéressés. L'affaire est urgente et une proposition genevoise doit être affirmée rapidement, car au plan fédéral les décisions sont imminentes. Une solution devrait être acceptée avant la fin de l'année 1998/99, afin que les premières mesures puissent entrer en vigueur au début de l'année 1999/2000. La présente motion exprime le souhait du Grand Conseil que la voie du regroupement soit étudiée et, avec l'accord des intéressés, réalisée au plus vite, dans le cadre des compétences de chacun.
La crise que révèle la fin programmée de l'Académie de l'environnement doit être mise à profit pour réaliser les réformes structurelles qui s'imposent depuis longtemps, pour dégager à partir de ce qui existe la plus-value qui résulte d'une véritable coopération autour de sujets par essence complémentaires.
Au bénéfice de ces explications, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, de faire bon accueil à la présente proposition.
Débat
M. René Longet (S). Ce n'est pas la première fois que ce Grand Conseil est saisi de propositions qui visent à mettre en discussion une meilleure cohérence de la compétence universitaire genevoise dans les domaines liés aux affaires internationales.
Tous les groupes sauf un ont signé cette motion. Parmi ses atouts et ses forces, Genève possède cette compétence d'être à la pointe de la recherche et du savoir dans le domaine international.
Nous avons à Genève un certain nombre d'instituts, de compétences scientifiques et d'enseignements et il s'agit aujourd'hui de se poser la question de savoir si ces instituts et ces compétences fonctionnent de manière optimale. Ils font effectivement un excellent travail au niveau où ils sont mais la fermeture maintenant décidée de l'Académie internationale de l'environnement a été le déclencheur qui nous a montré qu'il fallait faire quelque chose. Il ne faut pas simplement attendre que les institutions puissent se fédérer toutes seules, sans impulsion ni soutien politique.
Sur un plan politique, notre intention est de dire, premièrement, que cet atout est important pour Genève et qu'il a besoin de notre soutien. Tous les partis ont signé, sauf un, et expriment cette opinion par cette proposition de motion.
Deuxièmement, nous avons envie d'appuyer globalement les interventions actuelles de la Berne fédérale et de M. Charles Kleiber en particulier qui, a priori, ne nous posent pas de problèmes, et les interventions effectuées depuis un certain nombre de mois par le Conseil d'Etat. Nous trouvons juste qu'à Berne et à Genève le pouvoir exécutif et ses acteurs, à savoir un secrétaire d'Etat et les responsables cantonaux, se soient emparés du dossier, estimant qu'il ne fallait pas attendre et laisser les institutions seules face à leur avenir. Il convient au contraire d'en discuter ouvertement avec tous les intéressés en fonction d'un projet politique.
Nous souhaitons proposer au Grand Conseil et au Conseil d'Etat une démarche en trois temps. La première étape a eu lieu au mois de novembre. A l'égard de Berne et de notre Conseil d'Etat, le Grand Conseil, à travers les partis politiques signataires, a manifesté sa volonté de renforcer la position et les compétences de Genève et d'améliorer la coordination.
Nous avons donc établi globalement une plate-forme politique pour appuyer les exécutifs cantonal et fédéral dans leur travail. Il me semble que Mme Brunschwig Graf l'a bien ressenti ainsi. Nous sommes ici pour créer une plate-forme favorable nous permettant d'aller dans cette direction.
Dans un deuxième temps, il appartient au gouvernement cantonal en l'occurrence, mais aussi au gouvernement fédéral puisqu'il s'agit aussi d'un réseau des compétences au niveau suisse, de faire des propositions annexes Nous n'avons pas l'ambition de faire ce travail car ce n'est ni notre rôle ni notre compétence et nous n'avons pas non plus les moyens de le faire.
Dans la motion, nous avons proposé quelques pistes et donné quelques indications. Je tiens à signaler que ces indications sont parfois un peu abruptes notamment pour l'Institut d'architecture. Sur cet institut, il y a dans l'exposé des motifs un paragraphe qui est aujourd'hui dépassé. Nous soutenons l'idée qu'il convient de fédérer un maximum de forces autour de projets concernant les affaires internationales et la compétence en matière de politique internationale. Ces efforts ne doivent pas être découplés d'une préoccupation essentielle, qui était celle de l'Académie de l'environnement et qu'il s'agit de maintenir, à savoir la compétence en matière de développement durable.
A l'inverse, ce lien matériel revendiqué signifie par exemple que l'Institut universitaire de hautes études internationales et l'Institut universitaire d'études du développement doivent véritablement coopérer. Il ne doit pas y avoir deux visions parallèles d'une même problématique, ce qui ne signifie pas pour autant qu'il y ait une pensée unique. Il faut que les différents éléments coopèrent de manière organique.
Nous sommes maintenant à peu près à cette étape. Mme la présidente va peut-être nous parler plus longuement de cette étape, bien que beaucoup de choses aient déjà été dites publiquement.
Le troisième temps est une étape ultérieure où le parlement joue un rôle déterminant. C'est cette étape que nous souhaitons nous réserver en quelque sorte. A ce stade, il suffit pour nous de prendre acte de ce qui est proposé et décidé par le gouvernement afin de pouvoir éventuellement réagir et corriger certaines choses si besoin est.
Je précise à l'intention du Conseil d'Etat que le signal politique dont vous pourriez avoir besoin a été donné par le dépôt même de la motion soutenue par tous les partis sauf un.
Nous souhaitons que les choses se passent comme il se doit au niveau gouvernemental et, par la suite, pouvoir les analyser au niveau parlementaire. Pour ce faire, nous proposons de renvoyer la motion en commission de l'enseignement supérieur pour qu'elle puisse examiner cette question. Elle ne va pas refaire votre travail ni le critiquer a priori mais nous permettre d'avoir un écho un peu plus large pour que le parlement puisse aussi se faire une opinion de manière approfondie.
Pour toutes ces raisons, nous pensons que cette motion manifeste une volonté politique importante. Pour que le partage du travail entre l'exécutif et le législatif se fasse dans les formes que j'ai proposées, nous vous proposons, Mesdames et Messieurs, de renvoyer cette motion en commission.
Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'enseignement supérieur.
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
Sous la présidence de Mme Fabienne Bugnon, en présence de M. Laurent Moutinot, président du DAEL, en présence également de MM. Gainon, Pauli et Baertschi, collaborateurs du DAEL, la commission a étudié le projet de loi ci-dessus, en date du 30 septembre 1998.
La commission débat du projet de loi et notamment de son article 46, alinéa 2, lettre c ( nouvelle teneur ).
M. Moutinot a déclaré que le Conseil d'Etat est défavorable à ce projet en rappelant que la Commission des monuments, de la nature et des sites doit répondre aux buts qui lui sont fixés par la loi. Le Conseil d'Etat craint, en effet, que cette commission ne devienne une forme de chambre d'enregistrement dont les préavis seraient dévalorisés. Avec une composition trop unilatérale, les préavis perdraient leur force juridique.
M. .
20 membres au total, dont 5 représentants d'associations.
De surcroît, parmi les membres désignés par le Conseil d'Etat, une majorité appartient aussi à une association.
L'Association patrimoine vivant n'est pas représentée car elle n'a pas fait la demande dans les délais convenus. Répondant à une question de la présidente, M. Baertschi précise que dans la législature précédente, les associations d'architectes étaient d'avantage représentées. Cela étant, les associations de sauvegarde étaient également bien présentes puisque des personnes désignées sont membres de plusieurs associations de sauvegarde. Une discussion animée s'instaure. Cette discussion s'éloigne un peu du sujet du projet de loi pour refaire l'Histoire !
En guise de conclusion, M. Moutinot, de concert avec M. Baertschi, rappelle l'importance des préavis de la Commission des monuments, de la nature et des sites. Si le projet de loi proposé devait être accepté, il pourrait conduire à la dévaluation de l'impact des préavis de la CMNS.
Après cette discussion, la commission se prononce contre l'acceptation du projet de loi par 6 oui et 8 avis contraires.
Au vu de ce qui précède, la Commission d'aménagement du canton vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de rejeter le projet de loi 7800.
RAPPORT DE LA MINORITÉ
Il apparaît utile de rappeler que le but de la Commission des monuments, de la nature et des sites (CMNS) est de veiller à ce que les buts de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (LPMNS) soient respectés.
Le présent projet de loi vise à modifier la composition de la CMNS tout en maintenant le nombre actuel de ses membres, telle qu'elle figure à l'article 46 LPMNS, afin de s'assurer que les associations d'importance cantonale, poursuivant notamment des buts de sauvegarde de la nature et du patrimoine, soient dûment représentées.
Actuellement, la loi prévoit que cette commission est composée :
a) d'un membre de chaque parti siégeant au Grand Conseil, désigné par ce dernier ;
b) de 3 membres sur proposition de l'Association des communes genevoises, dont un désigné par la Ville de Genève ;
c) de 11 membres titulaires et de 3 membres suppléants comprenant, notamment, 1 membre désigné par la Chambre genevoise d'agriculture, des spécialistes et des délégués d'associations d'importance cantonale poursuivant par pur idéal les buts évoqués ci-dessus.
La CMNS est donc composée de 20 membres, sans pour autant, toutefois, que la loi ne donne de garantie à ce que les protecteurs de la nature et du patrimoine soient réellement et équitablement représentés.
La composition actuelle de cette commission, qui compte notamment des représentants de la Société d'art public, du Boulet, du WWF, de Pro Natura, peut être considérée comme satisfaisante (à l'exception d'Action patrimoine vivant qui ne compte aucun représentant).
Il n'en a pas été de même dans le cadre de la précédente législature, où la composition de cette commission a été vertement critiquée. C'est pour éviter que le travers d'une commission "; alibi " ne se reproduise, que la minorité de la Commission de l'aménagement a considéré nécessaire que la loi donne une garantie minimale de représentativité.
Minimale en ce sens que seule la lettre c de l'art. 46 serait modifiée afin que parmi les 11 membres et les 3 suppléants visés par cette disposition, une majorité (soit 6 membres au minimum parmi les 20 membres que compte la commission) soit composée de délégués d'associations cantonales poursuivant par pur idéal les buts fixés par la LPMNS.
L'expérience de la législature écoulée nous amène à considérer que cette modification législative a toute sa raison d'être et permettra de s'assurer que la CMNS conserve sa crédibilité.
C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députéEs, la minorité de la Commission d'aménagement du canton, ose espérer que la majorité du Grand Conseil se ralliera à son point de vue et vous invite à voter son rapport !
Premier débat
Mme Françoise Schenk-Gottret (S), rapporteuse de minorité. Il convient de se référer à quelques passages de la loi dont je vous épargnerai la lecture intégrale. Je rappellerai néanmoins l'article 1 dans ses trois premiers points : «La présente loi a pour but de conserver les monuments de l'histoire de l'art, l'architecture et les antiquités immobilières ou mobilières situées ou trouvées dans le canton, de préserver l'aspect caractéristique du paysage et des localités, les sites évocateurs du passé et les beautés naturelles, d'assurer la sauvegarde de la nature en ménageant l'espace vital nécessaire à la flore et à la faune et en maintenant les milieux naturels.»
Il faut aussi rappeler l'article 46 concernant la composition de la Commission des monuments, de la nature et des sites (CMNS). Elle est composée d'un membre de chaque parti représenté au Grand Conseil, désigné par ces derniers ; de trois membres sur proposition de l'Association des communes genevoises dont un désigné par la Ville de Genève, et enfin, à la lettre c), de onze membres titulaires et trois membres suppléants comprenant notamment un membre désigné par la Chambre genevoise d'agriculture, des spécialistes et des délégués d'associations d'importance cantonale poursuivant par pur idéal les buts énoncés à l'article 1.
Ce projet de loi a en fait une ambition très modeste et il n'y a donc pas de raison de monter au créneau. La commission est en effet composée de vingt membres et la modification apportée ne porte que sur la lettre c) de l'article 46 ; cela signifierait que six membres parmi les vingt qu'elle compte seraient délégués d'associations cantonales, qui poursuivent par pur idéal les buts fixés par la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (LPMNS).
Nous aurions ainsi une répartition plus équitable dans la composition de la commission, les dérapages de la précédente législature ne se reproduiraient plus et la CMNS retrouverait sa crédibilité.
M. René Koechlin (L). Ce projet de loi nous oblige à constater que la CMNS perd progressivement son impact et sa compétence. C'est là le constat d'un vieux briscard. Ayant pour ainsi dire assisté à sa création, je me souviens qu'à l'époque cette commission comportait presque exclusivement des professionnels reconnus pour leurs compétences en matière d'architecture et d'histoire de l'architecture, d'archéologie, de protection de la nature et de sauvegarde des sites.
En remplaçant peu à peu ces professionnels par des amateurs - il faut bien le dire - émanant d'associations et autres amicales, dont les membres se bornent à manifester de l'intérêt pour les objets en cause mais n'ont pas nécessairement et suffisamment donné la preuve de leurs compétences réelles, on «déprofessionnalise» cette commission. Cela signifie que ses avis sont de moins en moins respectables et de moins en moins pris au sérieux par les professionnels qui sont chargés d'appliquer les décisions ou d'interpréter les préavis.
Ce projet de loi va donc exactement dans le sens contraire du renforcement des compétences et de la crédibilité de cette commission. C'est pourquoi je vous enjoins vivement à le rejeter purement et simplement.
M. Bernard Lescaze (R). Je constate, en lisant le rapport de Mme Schenk-Gottret qui tend à faire accepter cette modification, qu'elle donne elle-même un argument pour la rejeter. En effet, elle écrit à la page 4 du rapport : «La composition actuelle de cette commission (...) peut être considérée comme satisfaisante».
J'en donne acte à Mme Schenk-Gottret ; elle a parfaitement raison. Je le sais pour avoir, depuis plusieurs législatures, en tant qu'amoureux du patrimoine, suivi les travaux de cette commission à des titres divers.
Je n'ai pas constaté la prétendue déliquescence que croit y voir M. Koechlin. J'ai peut-être constaté une plus grande âpreté des conflits en raison sans doute de la détérioration de la situation économique. En revanche, je lui donne acte que, à l'heure actuelle, la composition de cette commission est particulièrement satisfaisante. Le conseiller d'Etat chargé du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement peut en être remercié et, en conséquence, le groupe radical refusera la modification proposée.
M. Laurent Moutinot. Les préavis de la CMNS doivent être pris au sérieux. Il m'a été reproché de ne pas le faire et j'ai dû préciser les chiffres : au cours des douze derniers mois, la CMNS a rendu 892 préavis dont une douzaine a été écartée partiellement ou totalement. C'est dire l'importance que j'attache aux préavis de cette commission et c'est précisément parce que j'y attache de l'importance que je souhaite qu'elle conserve toute la crédibilité nécessaire.
Dans la loi actuelle, il est d'ores et déjà précisé que, outre les membres désignés par le Grand Conseil et ceux désignés par la Ville et les communes, doivent siéger des spécialistes des domaines soumis à l'appréciation de la commission. Compte tenu de la formulation du projet de loi qui vous est soumis, je crains que la CMNS n'en vienne à être considérée - non pas par moi, car on m'a dit que ce projet n'était pas dirigé contre moi mais contre un éventuel successeur - comme la pure et simple chambre de résonance de certains milieux et qu'elle ne perde ainsi sa crédibilité.
Il est nécessaire, et la loi actuelle le prévoit déjà, que des représentants spécialisés dans la protection de l'environnement ou du domaine bâti siègent dans cette commission. Je vous demande de ne pas faire de cette commission une simple fédération des mouvements de protection du patrimoine, dont les avis nous sont précieux mais qu'il convient de ne pas confondre avec le travail de la CMNS.
J'ajouterai que la présence à la CMNS de personnalités d'opinions différentes, représentant divers milieux, lui donne une crédibilité qui, par la suite, permet au département d'imposer ses préavis à des personnes qui pourraient avoir tendance à les contester.
Je remercie Mme Schenk-Gottret de m'avoir donné acte que la composition actuelle était satisfaisante. A mon avis, une composition de ce type doit prévaloir et le texte légal doit rester tel qu'il est.
Mon propos n'est pas de critiquer les milieux de protection du domaine bâti, mais de leur permettre de s'exprimer dans un cadre qui leur assure toute crédibilité. C'est la raison pour laquelle je vous invite à rejeter ce projet de loi.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7800)
modifiant la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (L 4 05)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites, du 4 juin 1976, est modifiée comme suit :
Art. 46, al. 2, lettre c (nouvelle teneur)
Le président. Messieurs Annen et Brunschwig, vous feriez mieux de convaincre vos collègues d'être présents plutôt que de contester des votes qui sont clairs !
Nous passons au point suivant : proposition de motion 1247.
Mme Dolorès Loly Bolay(AdG). Je demande que le point 26, interpellation 2006, soit traité en même temps que le point 24. Ma question rejoint tout à fait la motion 1247.
Le président. Il en sera fait ainsi.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le 7e rapport de la Commission de contrôle de gestion au Conseil d'Etat du 27 décembre 1973 concluait de la manière suivante : "; En 1974, les locations de l'Etat avoisineront 10 millions de francs, compte tenu de l'indexation de la quasi-totalité des baux. Ainsi que la commission l'a souligné à maintes reprises, il est évident que la capitalisation de ces sommes permettrait l'édification de plusieurs centres administratifs importants. La concentration de services qui en résulterait aurait non seulement l'avantage de permettre d'importantes économies de gestion, mais encore de faciliter les démarches du public auprès de l'administration. La commission insiste pour que de telles constructions fassent l'objet d'études approfondies, de manière à être adaptée économiquement aux besoins des futurs utilisateurs ". Un quart de siècle plus tard, la situation ne s'est pas notablement améliorée, bien au contraire.
L'objet de la présente motion est d'obtenir du Conseil d'Etat un rapport détaillé sur l'ensemble des locations et sur les moyens d'améliorer la situation, tant sur le plan des charges que sur le plan de la rationalisation administrative.
Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à réserver bon accueil à la présente motion.
Débat
Le président. Madame Loly Bolay, veuillez développer votre interpellation.
Mme Dolores Loly Bolay (AdG). Je comprends les soucis des signataires de la motion 1247 et m'interroge quant à la politique menée par l'Etat concernant les locations d'immeubles à des tiers. 23 millions de francs sont dépensés chaque année pour des locations dont certaines sont nécessaires et se justifient, tandis que pour d'autres on est en droit de se poser la question.
C'est pourquoi mon interpellation au point 26 de l'ordre du jour rejoint tout à fait cette motion et je vous demande, Monsieur le conseiller d'Etat, de me répondre sur la question relative à la location, par l'Etat de Genève, d'un magnifique duplex de 642 m2 au 63, rue de Lausanne. Je désire savoir le prix de cette location et si elle s'avère vraiment indispensable.
M. Alain Etienne (S). Comme nous l'avons indiqué dans cette motion, nous pensons qu'il serait judicieux de demander au Conseil d'Etat de faire un bilan ainsi qu'une analyse critique de la gestion de l'ensemble des locaux destinés aux activités de l'Etat et loués à des tiers.
23 millions de francs par année, c'est ce que l'Etat paie, semble-t-il, actuellement comme loyers ! Ne serait-il pas plus utile d'acquérir des bâtiments ou de construire des nouveaux centres administratifs ? La planification de plusieurs grands centres administratifs et le regroupement des services de l'administration permettrait certainement des économies, une certaine rationalisation du travail administratif, et de faciliter les démarches du public auprès de l'administration.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à faire bon accueil à cette motion et à la renvoyer directement au Conseil d'Etat.
M. Laurent Moutinot. Je répondrai lors d'une prochaine séance à la question de Mme Bolay Cruz. Il faudra que vous me donniez l'adresse, car je n'ai pas eu le temps de la noter.
En revanche, j'accepte volontiers la motion et je vous fournirai un rapport détaillé sur la situation des locations de l'Etat et sur les solutions que je propose pour améliorer cette situation.
I 2006
La réponse du Conseil d'Etat à cette interpellation figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
M 1247
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1247)
concernant la politique de location de locaux par l'Etatauprès de tiers
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- que le montant global des locations de locaux par l'Etat auprès de bailleurs tiers avoisine 23 millions de francs par année ;
- qu'à l'heure où des économies sont nécessaires il convient de rechercher toutes les mesures utiles susceptibles de diminuer cette charge ;
- qu'il convient en particulier d'examiner les avantages respectifs de la location par rapport à l'acquisition de bâtiments ou à la construction de nouveaux bâtiments tant sur le plan du coût que de la rationalisation de l'activité de l'administration ;
invite le Conseil d'Etat
à lui présenter un rapport sur la situation actuelle des locaux loués par l'Etat à des tiers assorti d'une analyse critique et de proposition d'économie et de rationalisation de la gestion des locaux destinés aux activités de l'Etat.
La Commission des pétitions a étudié la pétition 1206 au cours de ses séances du 14 septembre et du 12 octobre 1998 sous la présidence de Mme Mireille Gossauer-Zurcher. M. Lionel Ricou a pris les notes de séances.
Les mille trois cent vingt-cinq signataires de la pétition demandent le maintien à l'endroit actuel du Club international de tennis (ci-après CIT) menacé par le projet de construction du nouveau collège Sismondi.
Texte de la pétition
Pétition pour le maintien du Club international de tennis au chemin Rigot
Les soussignés (membres du Club, fonctionnaires des organisations internationales, habitants du quartier, voisins, sympathisants, joueurs de tennis d'autres clubs et visiteurs occasionnels) demandent que le Club international de tennis, 5, chemin Rigot, 1202 Genève, puisse, dans le cadre de l'aménagement de la place des Nations et de la reconstruction du collège Sismondi, se maintenir sur le terrain de la campagne Rigot où il se trouve depuis plus de 60 ans et qui est un lieu de rencontre particulièrement fréquenté aussi bien par des Genevois que par des internationaux.
N.B. : 1325 signatures
M. .
Travaux de la commission
Audition des pétitionnaires
M. Gustave Ott, Mme Carolyn Riding, M. Frédéric Plassard
Le club occupe la place actuelle depuis sa création en 1937, c'est-à-dire cinq ans avant que M. J.-D. Rockefeller fasse don de la campagne Rigot à l'Université de Genève. Au bénéfice d'un droit de superficie jusqu'en 1975, le CIT loue actuellement le site pour un montant représentant le 12 % des cotisations des membres. Le bail est résiliable avec un préavis de trois ans.
Le club dispose de dix courts, de vestiaires et d'une buvette restaurant. Il n'a jamais été subventionné et par les cotisations de ses 670 membres, dont 363 du secteur des organisations internationales, il assume les nombreux investissements et les coûts de fonctionnement. Depuis 1980, le CIT a investi plus de deux millions et demi pour la construction de courts, pour la rénovation des vestiaires et l'aménagement du club-house. L'activité du club et de sa buvette procurent du travail à plus de huit personnes.
Lors de discussions avec les fonctionnaires du département, les seules perspectives énoncées étaient de l'ordre du déplacement du club sur d'autres terrains tel que celui qui est près du Centre oecuménique européen. Par contre, la possibilité de construire le collège sur cette même parcelle n'est pas étudiée. Dans le cas où le CIT se verrait contraint de s'en aller, le club n'aurait pas les fonds nécessaires pour sa reconstruction et selon M. Ott, tout dépend du gouvernement et de l'Etat.
La donation de la campagne Rigot par M. J.-D. Rockfeller a fait l'objet de certaines conditions. Une de ces clauses constituera probablement une clé du problème puisque le bénéficiaire du terrain ne peut rien construire sans l'accord des Nations Unies.
Audition du Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement
M. Marc Andrié, chef de la division des études et constructions, et M. Jacques Moglia, chef du service des études et plans d'affectation
Le collège Sismondi fut construit en 1955. Les bâtiments accueillent actuellement cinq cents élèves alors qu'ils ne sont prévus que pour quatre cent cinquante. Le projet du nouveau collège prévoit sept cent cinquante places.
Le projet était intégré à l'aménagement de la place des Nations dont le PLQ s'est vu rejeté en votation populaire en Ville de Genève. Depuis, le Conseil d'Etat a décidé de maintenir le projet de construction du collège à la place du CIT pour notamment des raisons d'économie et d'ouverture visuelle sur le parc depuis la place des Nations. La reconstruction du collège sur son emplacement actuel nécessiterait un travail par étapes et le déplacement provisoire des élèves dans d'autres locaux, ce qui occasionneraient une dépense supplémentaire de 1,5 millions de francs.
En 1997, à la suite d'un échange de terrain, l'Etat de Genève devient propriétaire de la campagne Rigot et n'a donc aucune obligation contractuelle de prendre en charge la reconstruction des courts de tennis et du club-house. Le rapport entre le CIT et l'Etat est un contrat de bail valable jusqu'en 2001.
Bien qu'il n'y ait pas encore eu de proposition de terrain pour le club, M. Andrié informe que le DAEL souhaite mettre à disposition du CIT un droit de superficie à des conditions préférentielles si possible proche de la place des Nations.
M. Moglia explique que le PLQ devra être modifié, mais que le DAEL est obligé de trouver une solution globale pour le relogement du CIT, de la bibliothèque de HEI, etc.
Discussion et vote
Choisir entre l'implantation d'un collège ou d'un terrain de sport ne fait pas hésiter une majorité de commissaires ; la construction d'un collège est prioritaire. C'est d'ailleurs ce principe de priorité et la volonté du DAEL de trouver une solution globale qui rallieront les commissaires à l'unanimité sur la proposition de dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Au-delà de ce principe primordial, les avis sont beaucoup plus nuancés. Pourtant, si la doctrine des uns ou des autres ne peut accepter l'attente d'une proposition du DAEL, le débat donnera lieu à des positions comparables à une guerre de tranchées où l'intérêt général, celui de Genève, s'embourberait. L'intérêt général, le vôtre, le nôtre, c'est que Genève puisse être en mesure de perpétuer son rôle de cité internationale.
C'est sur ces considérations, Mesdames et Messieurs les députés, que nous vous invitons à suivre la décision unanime de la commission pour le dépôt de la pétition 1206 sur le bureau du Grand Conseil pour information.
Débat
M. Jean-Marc Odier (R), rapporteur. L'objectif des pétitionnaires est le maintien des installations du Club international de tennis qui est menacé par la construction du nouveau collège Sismondi. La commission des pétitions s'est tout de suite prononcée en disant que la construction d'un collège était une priorité mais que le département devait proposer un terrain de remplacement pour ce club.
Dans l'intérêt de la Genève internationale que nous défendons tous, l'Etat doit absolument trouver une solution globale. Dans ce contexte, la commission vous propose de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.
Le président. Nous avons ainsi terminé l'examen des anciens objets.
Nous pouvons enfin aborder les nouveaux objets. Il y a longtemps que cela ne nous était pas arrivé !
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
décrète ce qui suit :
Article unique
1 La bourgeoisie d'honneur est conférée à M. Pekka Johannes Tarjanne eu égard au rôle prépondérant qui a été le sien dans l'exercice de ses fonctions de Secrétaire général de l'Union internationale des télécommunications (UIT), dans la mise en oeuvre et le développement de l'accès universel aux télécommunications et à l'information, par son activité dans le développement des conférences de Telecom, associant par là même le canton de Genève, auquel il est profondément attaché, à son éminente réputation.
2 La bourgeoisie d'honneur est également accordée à Mme Aino Tarjanne en considération de son rôle significatif au côté de son mari.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Nous soumettons aujourd'hui à votre approbation un projet de loi sur l'application de la disposition prévue à l'article 30 de la loi sur la nationalité genevoise qui permet, sur proposition du Conseil d'Etat, de décerner la bourgeoisie d'honneur à un Confédéré ou à un étranger qui a rendu au canton de Genève ou à la Suisse des services importants ou qui s'est distingué par ses mérites.
La bourgeoisie d'honneur a été accordée entre autres à M. Francis Blanchard, ancien directeur général de l'Organisation internationale du travail en 1989, au Dr Halfdan Mahler, ancien directeur de l'Organisation mondiale de la santé en 1989 et à M. Hugues Gall, ancien directeur général du Grand Théâtre en 1995.
M. Pekka Johannes Tarjanne est né le 19 septembre 1937 à Stockholm. Il est de nationalité finlandaise. Il a obtenu un doctorat en technologie en 1962 à l'Université de technologie d'Helsinki.
Il s'est consacré à la recherche et à l'enseignement au Danemark et aux Etats-Unis, avant de retourner en Finlande pour y enseigner la physique théorique à l'Université d'Oulu en 1965 et 1966, puis à celle d'Helsinki de 1967 à 1977.
Après avoir été élu député au Parlement en 1970, il a été ministre des transports et des communications de 1972 à 1977. Cette carrière politique lui a permis d'acquérir une grande expérience des affaires internationales dans le cadre de la coopération intergouvernementale.
En 1977, M. Pekka Tarjanne est devenu directeur général des Postes et Télécommunications de Finlande. Sous sa direction, le secteur des télécommunications a été réorganisé, les services des télécommunications et des équipements terminaux ont été déréglementés et les Postes et Télécommunications ont été transformées en une société commerciale.
Elu au poste de Secrétaire général de l'Union internationale des télécommunications (UIT) par la Conférence des plénipotentiaires de Nice, Pekka Tarjanne a pris ses fonctions le 1er novembre 1989. Il a été réélu par la Conférence des plénipotentiaires de Kyoto pour un second mandat à partir du 1er janvier 1995. Sous son autorité, une nouvelle UIT a pris forme, de nouvelles structures et méthodes de travail ont été mises au point.
Durant ses deux mandats, M. Tarjanne a été très actif dans le développement des conférences de Telecom à Genève en 1991 et en 1995, et dans la préparation de Telecom 1999 et Telecom 2003. Il a également activement participé à l'élaboration des conférences régionales, comme Telecom Africa en 1998 en Afrique du Sud, et à Telecom Interactive, créée à Genève en septembre 1997 et qui aura lieu tous les deux ans.
Depuis 1971, date de la première manifestation, Genève a accueilli toutes les expositions mondiales de Telecom qui se tiennent tous les quatre ans. Dès 1987, le Conseil d'Etat a mis en place un groupe de liaison qui coordonne les différents intervenants afin d'assurer un déroulement optimal des expositions. Grâce au soutien de M. Tarjanne, Genève verra l'organisation des Telecom 99 et Telecom 2003. L'exposition Telecom a, depuis ses débuts, pris une envergure extraordinaire, passant de 250 exposants et 10 000 visiteurs en 1971 à plus de 1000 exposants et 155 000 visiteurs en 1995. Ce succès entraîne des retombées économiques importantes pour Genève et contribue à la renommée de la Genève internationale.
L'environnement international des télécommunications est en plein bouleversement, en raison d'un grand nombre de facteurs très divers, qui influent sur les fondements internationaux plus que séculaires des réseaux mondiaux de télécommunication.
L'UIT est la seule organisation mondiale ouverte à tous les acteurs du secteur des télécommunications, qu'il s'agisse de gouvernements, de régulateurs, d'industriels (radiodiffuseurs, exploitants, fournisseurs de services ou fabricants) ou d'utilisateurs. Elle compte actuellement 188 états membres et 482 entreprises ou organisations, qui à eux tous représentent les secteurs public et privé de l'infocommunication.
M. Pekka Tarjanne s'est attaché à mettre en place ces structures et ces réformes approuvées par les plénipotentiaires, afin de permettre à l'UIT de mieux faire face aux changements qui caractérisent le monde des télécommunications.
Il a su développer les relations de l'UIT avec le secteur privé. M. Tarjanne encourage l'accès universel aux télécommunications et à l'information et c'est sous sa direction que les membres de l'UIT ont jeté les fondations technologiques grâce auxquelles il sera possible de réaliser l'accès universel aux télécommunications de base, objectif fixé en 1984 par la Commission indépendante pour le développement mondial des télécommunications. M. Tarjanne souhaite un accès pour tous à un prix raisonnable et que les applications existantes puissent satisfaire tous les besoins de développement de l'homme, dans toutes leurs diversités , que ces besoins soient individuels, sociaux, culturels, politiques ou environnementaux.
Sous l'autorité et l'impulsion de M. Tarjanne, on peut citer au nombre des succès de l'UIT :
- les expositions Telecom qui ont lieu à Genève et qui connaissent un succès toujours croissant. Elles regroupent tous les quatre ans, les industries et les gouvernements du monde entier, leur permettant d'échanger leurs idées et de créer des partenariats. Elles jouent donc un rôle fondamental dans le développement mondial ;
- la mise au point de techniques comme les réseaux intelligents pour les services, la hiérarchie numérique synchrone pour la transmission ou l'ATM pour la commutation large bande ;
- l'établissement des bases de l'infrastructure mondiale de l'information, annoncée par le vice-président des Etats-Unis, M. Al Gore, lors d'une conférence mondiale de l'UIT tenue à Buenos Aires en 1994 ;
- la publication rapide de normes mondiales pour des applications commerciales répondant aux besoins du marché (modems à grande vitesse, normes de téléphonie par Internet, transmission audio, de données et vidéoconférence assistée par ordinateur, ADSL, télévision numérique, multimédia, etc.) ;
- la conception et l'exploitation du service de numéros universels de libre appel international, dont la souplesse répond aux besoins d'entreprises qui opèrent dans le monde entier, car il permet à leur personnel et à leurs clients d'établir des communications internationales en libre appel au moyen d'un numéro unique, sans avoir à installer des bureaux à l'étranger ce qui est coûteux.
De plus, grâce aux travaux préparatoires effectués à l'UIT, la téléphonie mobile et d'autres services de radiocommunications comme la radiomessagerie, la radiodiffusion et la télévision d'abonné par satellite, les systèmes mondiaux de radiorepérage, etc., se développent rapidement dans nombre de marchés du monde. Ajoutons à cela les systèmes de plus en plus sophistiqués de navigation, de sécurité aérienne et maritime, les nouveaux systèmes mobiles de transmission de données par ordinateur portable et des douzaines d'autres applications sans fil en gestation.
Par ailleurs, soucieux de réduire l'écart technologique entre les pays industrialisés et les pays en voie de développement, un des objectifs essentiels de l'UIT, M. Tarjanne a renforcé le Bureau de développement des télécommunications (BDT), faisant ainsi preuve d'un grand humanisme.
Notre Conseil,
considérant que sous la conduite de M. Pekka Tarjanne, l'Union internationale des télécommunications a remarquablement rempli son rôle en tant qu'autorité directrice et coordinatrice sur le plan mondial,
estimant que M. Pekka Tarjanne et Mme Aino Tarjanne, son épouse, ont contribué de manière importante à la renommée de Genève sur le plan international,
saluant les efforts que M. Tarjanne n'a cessé de déployer pour le développement des télécommunications à travers le monde et l'accès pour tous aux télécommunications et à l'information,
est dès lors convaincu qu'il convient de faire usage de la disposition particulière de l'article 30 de la loi sur la nationalité genevoise et de décerner à M. Pekka Tarjanne, secrétaire général de l'Union internationale des télécommunications, et à Mme Aino Tarjanne, la bourgeoisie d'honneur.
Tels sont, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous incitent à vous recommander chaleureusement d'approuver le présent projet de loi.
Préconsultation
Le président. Je vous propose la discussion immédiate de ce projet de loi. Il n'y a pas d'opposition, nous passons au vote en premier débat.
Premier débat
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Article unique
Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Nous souhaitons évidemment que vous votiez ce projet de loi. A la relecture et sur la suggestion de certains députés, nous proposons un amendement à l'alinéa 2. Il s'agit de supprimer la fin de la phrase : «...en considération de son rôle significatif au côté de son mari.», car certains estiment que ce propos peut être interprété dans un sens désagréable, ce qui n'était pas dans l'intention du Conseil d'Etat. Nous ne voulons soulever aucune suspicion quant à la formulation de cette phrase.
Si vous êtes d'accord de voter cet amendement et de terminer l'alinéa 2 comme je viens de le dire, nous vous en remercions d'avance.
Le président. Nous nous prononçons sur l'amendement du Conseil d'Etat consistant à supprimer la fin de l'alinéa 2 de l'article unique, qui serait donc ainsi libellé :
«La bourgeoisie d'honneur est également accordée à Mme Aino Tarjanne.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article unique ainsi amendé est adopté.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7947)
accordant la bourgeoisie d'honneur de Genève à M. Pekka Johannes Tarjanne, secrétaire général de l'Union internationale des Télécommunications à Genève, ainsi qu'à son épouse.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
décrète ce qui suit :
Article unique
1 La bourgeoisie d'honneur est conférée à M. Pekka Johannes Tarjanne eu égard au rôle prépondérant qui a été le sien dans l'exercice de ses fonctions de Secrétaire général de l'Union internationale des télécommunications (UIT), dans la mise en oeuvre et le développement de l'accès universel aux télécommunications et à l'information, par son activité dans le développement des conférences de Telecom, associant par là même le canton de Genève, auquel il est profondément attaché, à son éminente réputation.
2 La bourgeoisie d'honneur est également accordée à Mme Aino Tarjanne.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose que le point 28, rapport de la commission ad hoc audit de l'Etat, qui est visiblement un point étroitement lié aux débats de demain sur le budget, soit traité demain à la fin des débats, ou dans le cadre des débats sur le budget si vous le souhaitez. Cela me paraît plus approprié.
Le point 29 de notre ordre du jour porte sur un projet de loi qui peut nous entraîner dans un long débat. Il s'agit du projet de loi 7221-A, qui dépend aussi en grande partie de la votation du dimanche 20 décembre et des décisions que nous prendrons sur le budget. Si vous n'y voyez pas d'objection, il me semblerait plus opportun de le porter à l'ordre du jour d'une prochaine séance du Grand Conseil.
M. Claude Blanc(PDC). Je ne vois pas de raison objective à ce que ce projet soit renvoyé puisqu'il est à l'ordre du jour. Je ne vous demande pas de le traiter ce soir puisqu'il est déjà 23 h, mais je ne vois pas la nécessité de le renvoyer à une prochaine séance. Pourquoi ne pas le traiter demain si nous le pouvons ? Ce point entre aussi dans le cadre de la discussion sur le budget, car ses conséquences sur le budget sont évidentes. Je ne vois donc pas pourquoi on le reporterait au mois de janvier.
Le président. Nous le traiterons donc à la suite du débat sur le budget.
Je vous propose de traiter encore un point, qui n'a rien à voir avec les débats sur le budget. Il s'agit de voter le projet de résolution intitulé : «Pour en finir avec le martyre du peuple irakien».
Débat
Mme Salika Wenger (AdG). Au début de cette séance, nous avons beaucoup parlé de guerre et de paix. Certains ont même prétendu que l'armée défendait la paix, ce qui serait une première !
Il en est des armées comme de la guerre. Aussi redoutables et dangereuses soient-elles, elles ont toujours été utilisées, et plus souvent pour défendre des intérêts matériels que la paix. C'est le cas en ce moment précis où je vous parle. Une vraie guerre a lieu et elle tue indifféremment civils, enfants et femmes, et ce pour la gloire bien éphémère d'un président aux abois.
Je tiens à dire ici ma révolte devant le cynisme dont font preuve les «impuissants» de ce monde ! C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à voter pour plus de respect des vies humaines et moins d'orgueil meurtrier.
Mise aux voix, cette résolution est adoptée. Elle est adressée au Conseil d'Etat.
Elle est ainsi conçue :
Résolution(393)
pour en finir avec le martyre du peuple irakien
Le président des Etats-Unis, M. Clinton, a décidé de fouler aux pieds les travaux du Conseil de sécurité de l'ONU en conseillant aux inspecteurs de l'UNSCOM de quitter la capitale irakienne presque au saut du lit, préparant ainsi les frappes aériennes. Ce sont à nouveau les mêmes images-spectacle de CNN qui ont envahi les écrans de tous les pays. Mais, aujourd'hui, ces images cachent mal la détresse d'un peuple pris entre le marteau et l'enclume.
Que dire de la lâcheté d'une grande nation qui s'acharne sur un pays qui aux dires des spécialistes est dans l'incapacité de répliquer et dans ce cas pourquoi intervenir sans laisser le temps au Conseil de sécurité d'en débattre ? D'autant plus qu'un autre rapport émanant de l'agence internationale de l'énergie atomique et transmis à M. Kofi Annan, indique que l'Irak a fourni « le nécessaire niveau de coopération » et que l'AIEA indique que le désarmement de l'Irak peut être considéré comme achevé.
Difficile de ne pas faire le rapprochement entre cette frappe aérienne qui va coûter des milliers de vies irakiennes et le fait que la Chambre des représentants devait statuer aujourd'hui sur le cas de Clinton à propos de l'affaire Lewinsky.
Remettre en cause le fragile équilibre de toute une partie de la planète pour des problèmes de politique intérieure est totalement inadmissible. Et nous nous élevons contre la prise en otage du sort de tout un peuple pour de pures raisons stratégiques.
Le Grand Conseil de la République et canton de Genève proteste formellement contre cette agression contre le peuple d'Irak et décide que cette protestation sera transmise aux représentants des Etats-Unis d'Amérique et leurs alliés.
Par ailleurs, le Grand Conseil décide la publication immédiate dans le « New York Times » et dans le « Washington Post » de la présente résolution.
Le président. Nous arrêtons là nos travaux. Ils reprendront demain à 8 h. Je vous souhaite une bonne nuit. Je vous rappelle de prendre en sortant vos bouteilles à la salle Petitot.
La séance est levée à 23 h.