Séance du jeudi 17 décembre 1998 à 17h
54e législature - 2e année - 2e session - 57e séance

PL 7800-A
14. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Christian Grobet, Erica Deuber-Pauli, Fabienne Bugnon et David Hiler modifiant la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites ( L 4 05 ). ( -) PL7800
Mémorial 1998 : Projet, 220. Renvoi en commission, 221. Renvoi en commission, 1705.
Rapport de majorité de M. Hervé Dessimoz (R), commission d'aménagement du canton
Rapport de minorité de Mme Françoise Schenk-Gottret (S), commission d'aménagement du canton

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Sous la présidence de Mme Fabienne Bugnon, en présence de M. Laurent Moutinot, président du DAEL, en présence également de MM. Gainon, Pauli et Baertschi, collaborateurs du DAEL, la commission a étudié le projet de loi ci-dessus, en date du 30 septembre 1998.

La commission débat du projet de loi et notamment de son article 46, alinéa 2, lettre c ( nouvelle teneur ).

M. Moutinot a déclaré que le Conseil d'Etat est défavorable à ce projet en rappelant que la Commission des monuments, de la nature et des sites doit répondre aux buts qui lui sont fixés par la loi. Le Conseil d'Etat craint, en effet, que cette commission ne devienne une forme de chambre d'enregistrement dont les préavis seraient dévalorisés. Avec une composition trop unilatérale, les préavis perdraient leur force juridique.

M. .

20 membres au total, dont 5 représentants d'associations.

De surcroît, parmi les membres désignés par le Conseil d'Etat, une majorité appartient aussi à une association.

L'Association patrimoine vivant n'est pas représentée car elle n'a pas fait la demande dans les délais convenus. Répondant à une question de la présidente, M. Baertschi précise que dans la législature précédente, les associations d'architectes étaient d'avantage représentées. Cela étant, les associations de sauvegarde étaient également bien présentes puisque des personnes désignées sont membres de plusieurs associations de sauvegarde. Une discussion animée s'instaure. Cette discussion s'éloigne un peu du sujet du projet de loi pour refaire l'Histoire !

En guise de conclusion, M. Moutinot, de concert avec M. Baertschi, rappelle l'importance des préavis de la Commission des monuments, de la nature et des sites. Si le projet de loi proposé devait être accepté, il pourrait conduire à la dévaluation de l'impact des préavis de la CMNS.

Après cette discussion, la commission se prononce contre l'acceptation du projet de loi par 6 oui et 8 avis contraires.

Au vu de ce qui précède, la Commission d'aménagement du canton vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de rejeter le projet de loi 7800.

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Il apparaît utile de rappeler que le but de la Commission des monuments, de la nature et des sites (CMNS) est de veiller à ce que les buts de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (LPMNS) soient respectés.

Le présent projet de loi vise à modifier la composition de la CMNS tout en maintenant le nombre actuel de ses membres, telle qu'elle figure à l'article 46 LPMNS, afin de s'assurer que les associations d'importance cantonale, poursuivant notamment des buts de sauvegarde de la nature et du patrimoine, soient dûment représentées.

Actuellement, la loi prévoit que cette commission est composée :

a)  d'un membre de chaque parti siégeant au Grand Conseil, désigné par ce dernier ;

b)  de 3 membres sur proposition de l'Association des communes genevoises, dont un désigné par la Ville de Genève ;

c)  de 11 membres titulaires et de 3 membres suppléants comprenant, notamment, 1 membre désigné par la Chambre genevoise d'agriculture, des spécialistes et des délégués d'associations d'importance cantonale poursuivant par pur idéal les buts évoqués ci-dessus.

La CMNS est donc composée de 20 membres, sans pour autant, toutefois, que la loi ne donne de garantie à ce que les protecteurs de la nature et du patrimoine soient réellement et équitablement représentés.

La composition actuelle de cette commission, qui compte notamment des représentants de la Société d'art public, du Boulet, du WWF, de Pro Natura, peut être considérée comme satisfaisante (à l'exception d'Action patrimoine vivant qui ne compte aucun représentant).

Il n'en a pas été de même dans le cadre de la précédente législature, où la composition de cette commission a été vertement critiquée. C'est pour éviter que le travers d'une commission "; alibi " ne se reproduise, que la minorité de la Commission de l'aménagement a considéré nécessaire que la loi donne une garantie minimale de représentativité.

Minimale en ce sens que seule la lettre c de l'art. 46 serait modifiée afin que parmi les 11 membres et les 3 suppléants visés par cette disposition, une majorité (soit 6 membres au minimum parmi les 20 membres que compte la commission) soit composée de délégués d'associations cantonales poursuivant par pur idéal les buts fixés par la LPMNS.

L'expérience de la législature écoulée nous amène à considérer que cette modification législative a toute sa raison d'être et permettra de s'assurer que la CMNS conserve sa crédibilité.

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députéEs, la minorité de la Commission d'aménagement du canton, ose espérer que la majorité du Grand Conseil se ralliera à son point de vue et vous invite à voter son rapport !

Premier débat

Mme Françoise Schenk-Gottret (S), rapporteuse de minorité. Il convient de se référer à quelques passages de la loi dont je vous épargnerai la lecture intégrale. Je rappellerai néanmoins l'article 1 dans ses trois premiers points : «La présente loi a pour but de conserver les monuments de l'histoire de l'art, l'architecture et les antiquités immobilières ou mobilières situées ou trouvées dans le canton, de préserver l'aspect caractéristique du paysage et des localités, les sites évocateurs du passé et les beautés naturelles, d'assurer la sauvegarde de la nature en ménageant l'espace vital nécessaire à la flore et à la faune et en maintenant les milieux naturels.»

Il faut aussi rappeler l'article 46 concernant la composition de la Commission des monuments, de la nature et des sites (CMNS). Elle est composée d'un membre de chaque parti représenté au Grand Conseil, désigné par ces derniers ; de trois membres sur proposition de l'Association des communes genevoises dont un désigné par la Ville de Genève, et enfin, à la lettre c), de onze membres titulaires et trois membres suppléants comprenant notamment un membre désigné par la Chambre genevoise d'agriculture, des spécialistes et des délégués d'associations d'importance cantonale poursuivant par pur idéal les buts énoncés à l'article 1.

Ce projet de loi a en fait une ambition très modeste et il n'y a donc pas de raison de monter au créneau. La commission est en effet composée de vingt membres et la modification apportée ne porte que sur la lettre c) de l'article 46 ; cela signifierait que six membres parmi les vingt qu'elle compte seraient délégués d'associations cantonales, qui poursuivent par pur idéal les buts fixés par la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (LPMNS).

Nous aurions ainsi une répartition plus équitable dans la composition de la commission, les dérapages de la précédente législature ne se reproduiraient plus et la CMNS retrouverait sa crédibilité.

M. René Koechlin (L). Ce projet de loi nous oblige à constater que la CMNS perd progressivement son impact et sa compétence. C'est là le constat d'un vieux briscard. Ayant pour ainsi dire assisté à sa création, je me souviens qu'à l'époque cette commission comportait presque exclusivement des professionnels reconnus pour leurs compétences en matière d'architecture et d'histoire de l'architecture, d'archéologie, de protection de la nature et de sauvegarde des sites.

En remplaçant peu à peu ces professionnels par des amateurs - il faut bien le dire - émanant d'associations et autres amicales, dont les membres se bornent à manifester de l'intérêt pour les objets en cause mais n'ont pas nécessairement et suffisamment donné la preuve de leurs compétences réelles, on «déprofessionnalise» cette commission. Cela signifie que ses avis sont de moins en moins respectables et de moins en moins pris au sérieux par les professionnels qui sont chargés d'appliquer les décisions ou d'interpréter les préavis.

Ce projet de loi va donc exactement dans le sens contraire du renforcement des compétences et de la crédibilité de cette commission. C'est pourquoi je vous enjoins vivement à le rejeter purement et simplement.

M. Bernard Lescaze (R). Je constate, en lisant le rapport de Mme Schenk-Gottret qui tend à faire accepter cette modification, qu'elle donne elle-même un argument pour la rejeter. En effet, elle écrit à la page 4 du rapport : «La composition actuelle de cette commission (...) peut être considérée comme satisfaisante».

J'en donne acte à Mme Schenk-Gottret ; elle a parfaitement raison. Je le sais pour avoir, depuis plusieurs législatures, en tant qu'amoureux du patrimoine, suivi les travaux de cette commission à des titres divers.

Je n'ai pas constaté la prétendue déliquescence que croit y voir M. Koechlin. J'ai peut-être constaté une plus grande âpreté des conflits en raison sans doute de la détérioration de la situation économique. En revanche, je lui donne acte que, à l'heure actuelle, la composition de cette commission est particulièrement satisfaisante. Le conseiller d'Etat chargé du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement peut en être remercié et, en conséquence, le groupe radical refusera la modification proposée.

M. Laurent Moutinot. Les préavis de la CMNS doivent être pris au sérieux. Il m'a été reproché de ne pas le faire et j'ai dû préciser les chiffres : au cours des douze derniers mois, la CMNS a rendu 892 préavis dont une douzaine a été écartée partiellement ou totalement. C'est dire l'importance que j'attache aux préavis de cette commission et c'est précisément parce que j'y attache de l'importance que je souhaite qu'elle conserve toute la crédibilité nécessaire.

Dans la loi actuelle, il est d'ores et déjà précisé que, outre les membres désignés par le Grand Conseil et ceux désignés par la Ville et les communes, doivent siéger des spécialistes des domaines soumis à l'appréciation de la commission. Compte tenu de la formulation du projet de loi qui vous est soumis, je crains que la CMNS n'en vienne à être considérée - non pas par moi, car on m'a dit que ce projet n'était pas dirigé contre moi mais contre un éventuel successeur - comme la pure et simple chambre de résonance de certains milieux et qu'elle ne perde ainsi sa crédibilité.

Il est nécessaire, et la loi actuelle le prévoit déjà, que des représentants spécialisés dans la protection de l'environnement ou du domaine bâti siègent dans cette commission. Je vous demande de ne pas faire de cette commission une simple fédération des mouvements de protection du patrimoine, dont les avis nous sont précieux mais qu'il convient de ne pas confondre avec le travail de la CMNS.

J'ajouterai que la présence à la CMNS de personnalités d'opinions différentes, représentant divers milieux, lui donne une crédibilité qui, par la suite, permet au département d'imposer ses préavis à des personnes qui pourraient avoir tendance à les contester.

Je remercie Mme Schenk-Gottret de m'avoir donné acte que la composition actuelle était satisfaisante. A mon avis, une composition de ce type doit prévaloir et le texte légal doit rester tel qu'il est.

Mon propos n'est pas de critiquer les milieux de protection du domaine bâti, mais de leur permettre de s'exprimer dans un cadre qui leur assure toute crédibilité. C'est la raison pour laquelle je vous invite à rejeter ce projet de loi.

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(7800)

modifiant la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (L 4 05)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1

La loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites, du 4 juin 1976, est modifiée comme suit :

Art. 46, al. 2, lettre c (nouvelle teneur)

Le président. Messieurs Annen et Brunschwig, vous feriez mieux de convaincre vos collègues d'être présents plutôt que de contester des votes qui sont clairs !

Nous passons au point suivant : proposition de motion 1247.

Mme Dolorès Loly Bolay(AdG). Je demande que le point 26, interpellation 2006, soit traité en même temps que le point 24. Ma question rejoint tout à fait la motion 1247.

Le président. Il en sera fait ainsi.