Séance du jeudi 23 avril 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 7e session - 14e séance

No 14/II

Jeudi 23 avril 1998,

nuit

Présidence :

M. Jean Spielmann,premier vice-président

puis

M. René Koechlin,président

La séance est ouverte à 20 h 35.

Assistent à la séance : Mme et MM. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat, Guy-Olivier Segond, Carlo Lamprecht, Micheline Calmy-Rey et Robert Cramer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mme Martine Brunschwig Graf et M. Laurent Moutinot, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Nicolas Brunschwig, Erica Deuber-Pauli, Pierre Marti, Pierre Meyll et Françoise Schenk-Gottret, députés.

3. Correspondance.

Le président. La correspondance suivante est parvenue à la présidence et figurera au Mémorial :

C 764
L'Association des riverains de l'autoroute nous fait part de ses remarques concernant l'éventuelle construction d'un restoroute à Bardonnex. ( )C764

ANNEXE

M. Rémy Pagani(AdG). Je demande une modification de l'ordre du jour. Un fait nouveau étant intervenu, le projet de loi 7836 sur l'aéroport doit être renvoyé au plus vite en commission. Je suggère que nous en débattions demain à la séance de 17 h 30. J'ai annoncé que 15 millions...

Le président. Je suis désolé, Monsieur le député. Ce point de l'ordre du jour est réglé. Nous en sommes à celui de la correspondance.

M. Rémy Pagani. Je crois savoir que le règlement nous autorise à modifier l'ordre du jour en tout temps.

Le président. Il s'agit donc d'une motion d'ordre de modification de l'ordre du jour et je la mets aux voix.

Mise aux voix, cette motion d'ordre est rejetée (la majorité des deux tiers n'étant pas atteinte).

4. Annonces et dépôts :

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

M 1142-A
5. Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et M. Nicole Castioni-Jaquet, Dominique Hausser et Elisabeth Reusse-Decrey concernant l'expression des droits politiques et civils des personnes mal voyantes. ( -) M1142
Mémorial 1997 : Développée, 5678. Renvoi en commission, 5680.
Rapport de Mme Anita Cuénod (AG), commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil

La motion 1142, déposée le 6 juin 1997, a été traitée le 3 décembre 1997 et le 7 janvier 1998 par la commission des droits politiques et règlement du Grand Conseil, présidée par M. John Dupraz.

Introduction

Si la majeure partie des citoyens peut s'exprimer librement dans les scrutins, il n'en va pas de même pour bon nombre de mal voyants. Ces derniers ont en effet quelques difficultés à exprimer leurs opinions dans la confidentialité puisqu'ils doivent avoir recours à une tierce personne pour exprimer leur vote. L'audition des personnes ci-après a permis aux membres de cette commission de mieux comprendre la situation à laquelle sont confrontés les mal voyants lors de votations/élections.

Audition

Mme Anne Pillet, MM. Denis Fauconnet et André Assimacopoulos, représentants l'Association pour le bien des aveugles, à Genève décrivent en préambule la situation actuelle.

La Fédération suisse des aveugles, à Lausanne, organise pour chaque votation fédérale un enregistrement sur cassettes des brochures officielles, destiné à tous ceux qui en font la demande. A Genève, l'Association pour le bien des aveugles effectue le même travail en ce qui concerne les votations/élections genevoises. Le nombre de Genevois recevant ces cassettes s'élève actuellement à 22. Il est cependant utile de savoir que le délai entre la réception de la brochure par le service compétent et la retranscription par la personne bénévole de l'association est très court et que ne reçoivent ces cassettes que les personnes qui en font la demande. Le Dr. Assimacopoulos demande s'il ne serait pas possible de faire envoyer à l'association l'épreuve de la brochure au moment où le bon à tirer est donné, afin de ne pas attendre les délais d'impression.

La motion résume en substance une question simple : faut-il que ce soit une association privée qui ait la charge d'effectuer cette tâche ? Même si ses membres l'accomplissent volontiers.

On sait que Genève recense environ 1200 mal voyants, mais que les lecteurs de braille ne comptent pas plus de 40 personnes et donc que la piste proposée initialement dans la motion (mettre à disposition les documents de vote en braille) n'est pas un objectif relevant. D'autre part, il semble important de tenir compte des gens dont la vue diminue sensiblement, qui seront confrontés aux difficultés d'exprimer leurs opinion lors d'une votation. En résumé, si l'information ne pose pas de problèmes insurmontables, le vote de manière autonome est toujours impossible.

Des pistes restent à explorer, telles que des bulletin de vote munis d'un chablon pour permettre d'identifier l'endroit où répondre ou la présence d'une personne assermentée dans les locaux de vote ou encore le vote sur cassette. Seule une de ces possibilités permettrait la confidentialité.

Discussion et vote

La commission dans son ensemble a exprimé sont admiration pour le travail effectué par cette association et ses animateurs, tout en se rendant compte que les coûts qui leurs incombent constitue peut-être un problème, mais leur demande n'est pas de nature financière. Ils expriment en fait le souci de l'intervention officielle dans le domaine du droit constitutionnel de l'exercice des droits politiques. Les 2 invites de la motion, difficilement réalisables et peu dans la cible des besoins des mal voyants sont remplacées par un amendement adopté à l'unanimité de cette commission:

invite le Conseil d'Etat :

à explorer les voies permettant de faciliter l'exercice des droits politiques par les personnes aveugles et mal voyantes, notamment en collaboration avec l'Association genevoise du bien des aveugles.

Il semblerait judicieux, dans une perspective d'information la plus large possible, que toute disposition, solution ou amélioration de la situation actuelle soit diffusée dans les services hospitaliers et cabinets médicaux des ophtalmologues, par où transitent bien évidemment les personnes atteintes de déficience visuelle.

Cette commission vous soumet, Mesdames et Messieurs les députés, cette motion et vous engage à voter son renvoi au Conseil d'Etat.

Débat

Mme Anita Cuénod (AdG), rapporteuse. Je me réjouis avec les motionnaires et l'ensemble de la commission des droits politiques que le Conseil d'Etat et le service des votations et élections aient à coeur de faciliter le vote des personnes mal voyantes.

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1142)

concernant l'expression des droits politiques et civilsdes personnes mal voyantes

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant :

- l'article 2, alinéa 1, de la constitution : "; Tous les Genevois sont égaux devant la loi " ;

- l'article 41 de la constitution : "; Les citoyens, sans distinction de sexe, âgés de 18 ans révolus, ont l'exercice des droits politiques, à moins qu'ils ne se trouvent dans un cas prévu à l'article 43 " ;

- la nécessité de permettre à chacun d'exercer les droits politiques qui sont les leurs,

invite le Conseil d'Etat

à explorer les voies permettant de faciliter l'exercice des droits politiques par les personnes aveugles et mal voyantes, notamment en collaboration avec l'Association genevoise du bien des aveugles.

R 361
6. a) Proposition de résolution de MM. Dominique Hausser, Régis de Battista, Gilles Godinat, Luc Gilly, Antonio Hodgers et Chaïm Nissim pour une révision urgente de la législation en matière de stupéfiants. ( )R361
M 1191
b) Proposition de motion de MM. Dominique Hausser, Régis de Battista, Gilles Godinat, Luc Gilly, Antonio Hodgers et Chaïm Nissim pour un développement de la politique en matière de drogues visant à une amélioration de la prévention des dépendances et à la diminution des risques liés aux drogues. ( )M1191

Proposition de résolution(361)

pour une révision urgente de la législation en matière de stupéfiants

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :

- l'article 93, al. 2 de la constitution fédérale et l'art. 156 de la loi genevoise portant règlement sur le Grand Conseil ;

- le rejet sans appel de l'initiative "; jeunesse sans drogues " (moyenne suisse 70%, Genève > 82%) ;

invite les Chambres fédérales et le Conseil fédéral

- à réviser dans les plus brefs délais la loi sur les stupéfiants en prenant comme point de départ les propositions faites par la commission d'experts sur la révision de la loi sur les stupéfiants (commission Schild) ;

invite le Conseil d'Etat

- à s'associer à la démarche et à appuyer fermement et par tous les moyens à sa disposition cette initiative cantonale.

Proposition de motion(1161)

pour un développement de la politique en matière de drogues visant à une amélioration de la prévention des dépendances et à la diminution des risques liés aux drogues

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant :

- le rejet sans appel de l'initiative "; Jeunesse sans drogue " ;

- le principe d'opportunité autorisé par la loi sur les stupéfiants ;

- les recommandations de la commission fédérale d'experts sur la révision de la loi sur les stupéfiants (commission Schild) ;

invite le Conseil d'Etat

1. à ne plus poursuivre la consommation, la possession et l'acquisition pour sa consommation personnelle de stupéfiants ;

2. à élaborer de surcroît, dans le cadre de la législation fédérale actuelle, une politique cantonale visant à renforcer la prévention des problèmes potentiels liés à la consommation de psychotropes - en particulier de cannabis et autres produits dérivés du chanvre - et des effets néfastes du marché illégal.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Préambule

Nul besoin de longs discours pour justifier une révision rapide la législation suisse en matière de stupéfiants.

Cette loi étant fédérale, ce sont les autorités fédérales qui doivent aujourd'hui mettre en chantier cette révision. Il est de la compétence du Grand Conseil et du Conseil d'Etat de déposer auprès des autorités fédérales législatives et exécutives une initiative cantonale les invitant à entamer cette révision et de leur suggérer clairement le sens que devra prendre cette révision. Cette démarche se présente sous la forme de la résolution qui est soumise au Grand Conseil.

Même en étant très rapide, cette démarche fédérale prendra un certain temps. De plus il importe que le canton de Genève poursuive sa réflexion dans le domaine de la politique en relation avec les drogues. En avril 1995 le parlement a adopté, sur la base du rapport du président de la commission mixte, une motion confirmant les efforts entrepris jusqu'alors et invitant le Conseil d'Etat à développer diverses activités concrètes dans le domaine de la prise en charge médicale et sociale des personnes ayant des problèmes liés à la consommation de stupéfiants.

Il importe de poursuivre ces efforts, mais également d'élaborer de nouvelles stratégies déjà dans le cadre de la législation fédérale. Cela devra permettre premièrement une application cantonale de la majorité des recommandations de la commission fédérale d'experts sur la révision de la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants (dite commission Schild) dont le rapport a été publié en février 1996 et deuxièmement un élargissement de la réflexion de la commission en ce qui concerne le cannabis. Et c'est le but de la motion associée à la résolution.

Développement

La commission Schild est d'avis que les objectifs prioritaires de toute politique en matière de drogue doivent consister à éviter l'apparition de la dépendance et de ces conséquences ainsi qu'à maintenir et si nécessaire à améliorer la situation sociale et l'état de santé des consommateurs de drogues.

La Confédération a élaboré une politique visant à :

1. La prévention des dépendances ;

2. La prise en charge médicale et sociale diversifiée (de l'aide à la survie à l'abstinence en passant par toute une palette de prestations) ;

3. La répression de la criminalité associée aux stupéfiants.

Il faut reconnaître que le développement du deuxième est remarquable et les expériences et innovations dans ce domaine ont été importantes sur l'ensemble du territoire.

Divers efforts ont été entamés en matière de prévention des dépendances, mais ces actions restent limitées et il y a trop souvent encore confusion entre consommation et dépendance.

La répression de la criminalité reste trop fortement axée sur les consommateurs et pas suffisamment sur les comportements réprimés par le code pénal ; elle est de plus précisée en ce qui concerne les stupéfiants dans une loi fédérale.

L'intégration préconisée est encore à un stade très préliminaire non en raison de blocage ou de refus de dialogue entre les différents partenaires, mais principalement en raison du cadre légal qui ne permet tout simplement pas d'appliquer simplement des évidences démontrées par diverses expériences et analyses scientifiques.

Ce sont entre 340 et 460 millions (données 1994) qui sont engagés par an pour la prise en charge médicale et sociale dans des programmes largement évalués et ayant montré un certain nombre de progrès importants, et les problèmes afin de les améliorer.

Ce sont 500 millions (données 1991) qui sont dépensés par an pour la répression dont une grande partie consiste à poursuivre et à opprimer les consommateurs les plus fragilisés et précarisés ou des jeunes en quête d'une expérience sans risque pour leur santé ou pour leur intégration sociale. Il ne s'agit pas ici de reprocher à la police et à la justice d'appliquer la loi, ni de ne pas comprendre la diversité d'interprétation du principe d'opportunité. Il s'agit simplement de constater que selon le lieu, le policier ou le juge, des situations identiques sont traitées différemment. Mais les données à disposition ne montre avec cette stratégie aucune évolution dans un sens favorable visant à réduire les risques.

Ce sont 30-35 millions (données 1994) qui ont été engagé pour la prévention. On peut alors sans peine comprendre que les actions entreprises ne pourront être que modestes.

Ces estimations qui ne prennent pas en compte les interventions non spécialisées mais qui pourraient avoir une influence, ni les coûts indirects ; ceci n'empêche en aucune manière de se rendre compte des ordres de grandeur.

On réalise immédiatement que des efforts doivent être aujourd'hui en matière de prévention des dépendances et un effort important est nécessaire pour réduire les problèmes de dimension économique et sociétale liés aux drogues. Ce complément est indispensable pour renforcer et stabiliser tant la politique fédérale que cantonale.

La commission Schild dans ce sens recommande l'intégration des dispositions relevant du droit des médicaments dans la future loi fédérale sur les agents thérapeutiques, ce qui inclus la quasi-totalité des substances actives mentionnées dans la liste des stupéfiants. La commission malgré son souhait semblait à l'époque peu optimiste quant au calendrier ; mais peut-être qu'aujourd'hui peut-on être plus optimiste ?

Une solution transitoire et une révision partielle de la loi sur les stupéfiants peuvent résoudre certaines difficultés dans l'intermédiaire. Ces procédures transitoires sont actuellement en discussion et devraient être mises en oeuvre au début 1999. Une révision de la loi sur les stupéfiants devrait être mise en consultation ces prochaines semaines.

La commission insiste sur le rôle de la confédération et des cantons et communes pour développer les programmes de prévention des dépendances et d'adopter des stratégies diversifiées et innovatrices comme cela été le cas dans le champ de la prise en charge.

La commission considère que la pénalisation de la consommation ne se justifie pas : elle n'a pas d'effet sur la prévention des dépendances et elle ne permet guère d'infiltrer le milieu des trafiquants et a même des effets négatifs sur la politique de la santé. En outre, elle s'insère difficilement dans le système des valeurs du système juridique suisse. Il est par conséquent nécessaire de dépénaliser la consommation et les actes préparatoires associés et ceci pour tous les stupéfiants.

Sur la base de ce rapport et dans le cadre de la loi actuelle sur les stupéfiants, il est possible d'élaborer plus avant la politique cantonale en la matière.

Tout comme au niveau fédéral, des engagements très importants ont été faits dans le domaine de la prise en charge.

Les invites de la motion doivent être entendues et comprises comme une mise en application cantonale aussi rapidement que possible des recommandations de la commission Schild tout en ne sortant pas du cadre légal fédéral.

Par exemple, afin d'appliquer de fait la dépénalisation de la consommation (pour tous les stupéfiants) et des actes préparatoires (acquisition et possession), il est parfaitement possible d'utiliser le principe d'opportunité de manière étendue et d'en assurer une application uniforme par les autorités judiciaires et policières du canton de Genève.

Les autorités cantonales ont mis sur pied à fin janvier 1998, une unité de police visant à réprimer le crime organisé et ont salué la proposition du conseil fédéral visant à élargir les compétences de la confédération dans ce domaine. Cependant pour assurer une lutte contre la criminalité (moyenne ou grande), il importe d'appliquer d'autres mesures qui auront un effet négatif sur le marché noir et qui de plus permettraient de diminuer des risques associés à la consommation de stupéfiants.

Dans ce sens une réflexion doit être menée autour du cannabis ; plusieurs expériences ou projets en Europe et en Suisse se sont mis en place ces dernières années. Bien qu'illégale au sens étroit de la loi, l'expérience menée durant une partie 1997 à Genève fournit des pistes intéressantes, qu'il vaut la peine d'examiner, dans la mesure où les éléments contextuels et locaux sont des paramètres importants dans la réussite ou l'échec de projets d'intervention dans le domaine de la drogue (Plusieurs études récentes le mettent en évidence).

De même, une approche pragmatique doit se mettre en place face à l'usage de psychotropes synthétiques, qui bien que restant un problème relativement marginal puisse avoir des conséquences sévères selon les produits vendus sous le label "; Ecstasy ".

Le rapport du Conseil d'Etat sur cette motion, qui sera transmis dans les 6 mois au plus au Grand Conseil, comme le précise la loi, comprendra non seulement la formulation de grands principes, mais également les objectifs opérationnels, les mesures concrètes existantes, à réorienter ou à développer, les différents acteurs impliqués pour chacune des mesures, le calendrier de mise en oeuvre des propositions, de même que les implications financières (ré allocation de ressources, augmentation ou au contraire diminution des dépenses, au niveau global).

Compte tenu de ce qui précède, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à accueillir favorablement cette motion et cette résolution et à les adresser directement aux Autorités fédérales et au Conseil d'Etat.

Débat

M. Dominique Hausser (S). Ces projets de résolution et de motion tendent à poursuivre et à développer les orientations politiques acceptées par ce Grand Conseil voici trois ans.

Toutefois, j'avoue ma surprise de les voir inscrits sous le département de justice et police et des transports, alors qu'ils concernent tout autant, sinon plus, le département de l'instruction publique et celui de la santé et de l'action sociale.

Je ne reviendrai pas sur l'ensemble de l'exposé des motifs. Je me contenterai de souligner quelques points à partir d'exemples concrets.

Nul besoin de vous rappeler que la loi sur les stupéfiants est fédérale. Sa dernière révision date de 1975. En 1989, la sous-commission méthadone de la Commission fédérale des stupéfiants avait recommandé de la revoir à nouveau, notamment pour dépénaliser la consommation de l'ensemble des psychotropes, la sanction pénale n'apportant que la désapprobation morale et sociale de leur consommation abusive.

Suite à l'adoption, en juin 1994, de la plate-forme commune interpartis approuvée par les partis socialiste, radical et démocrate-chrétien suisses, le Conseil fédéral a constitué, à fin 1994, une commission d'experts pour réviser la loi fédérale sur les stupéfiants du 3 octobre 1951. Après avoir travaillé pendant une année, cette commission a rendu son rapport au Conseil fédéral en décembre 1995, rapport publié et diffusé en février 1996.

Les experts ont suggéré et argumenté diverses modifications de cette loi. Or, depuis deux ans, les autorités fédérales n'ont pas bougé. Notre projet de résolution entend leur rappeler l'urgente nécessité de réviser cette loi sur la base des recommandations faites et largement soutenues par celles et ceux qui ont longuement oeuvré dans ce domaine.

C'est pourquoi je vous invite à soutenir ce projet et à le renvoyer à l'autorité fédérale.

Les modifications législatives nécessitant beaucoup de temps, il est nécessaire de poursuivre et de renforcer la politique pragmatique et les interventions tendant à réduire les risques liés aux drogues. C'est le but de la motion.

Nous pouvons nous féliciter, à Genève, d'un soutien médical et d'une prise en charge sociale de qualité. Il ne faut cependant pas nous endormir sur nos lauriers. Nous devons veiller à un suivi attentif et à une adaptation des prestations en fonction des problèmes, des besoins, des demandes et des priorités.

L'objectif principal de la motion est la prévention des risques liés à la consommation des drogues. Il s'agit de cibler une population avant même qu'elle ne demande un appui médical, thérapeutique ou social.

Voici trois exemples :

1. En dehors des chiffres connus de la mortalité et de la morbidité dues à la consommation de tabac et d'alcool, le principal problème lié aux psychotropes concerne les femmes de 45 à 60 ans qui recourent aux sédatifs, somnifères - voire aux amphétamines pour compenser les effets des premières substances - tout en s'adonnant à une consommation alcoolique cachée, excessive, voire abusive. Ce grave problème, encore tabou, mérite que l'on développe des interventions appropriées.

2. La consommation de produits de synthèse a augmenté ces dernières années. Même si celle des produits sous la dénomination «ecstasy» reste encore marginale, nous ne pouvons l'ignorer. Les tablettes d'ecstasy contiennent de nombreuses substances qui vont du DMA à l'aspirine, en passant pas les antibiotiques et les bêtabloquants. La quantité des substances actives varie de 1 à 20. Dès lors, nous pouvons imaginer les conséquences dramatiques de leur absorption, puisqu'on ignore ce que l'on consomme véritablement. Le canton de Berne l'a bien compris. Il a développé un concept qui tend à nouer le dialogue avec les consommateurs potentiels et offre la possibilité de tester en quinze minutes le contenu des pilules vendues lors de soirées dansantes. Cette expérience mériterait d'être faite dans notre canton.

3. La consommation de cannabis est importante. Sans la dramatiser, il importe d'envisager des interventions pour en réduire les conséquences les plus négatives. Comme tout psychotrope, le cannabis influence les comportements et il s'agirait, en particulier, d'inviter les consommateurs à gérer leur consommation, c'est-à-dire s'en abstenir avant d'aller travailler, de se rendre à l'école ou de prendre le volant, etc. Le marché illégal favorise la diffusion de produits dont le contenu peut être très variable, alors que la quantité de substances actives implique une gestion relativement complexe. Fumer du cannabis génère des problèmes similaires à ceux du tabac; ce faisant, on peut plus facilement en gérer les effets quasi immédiats, ce qu'une absorption par voie orale ne permet pas de faire.

Ces trois exemples montrent l'impérieuse nécessité, pour le canton de Genève, de renforcer de manière notable le volet de la prévention des risques.

Permettez-moi encore d'aborder le thème de la répression du consommateur. Une fois de plus, je répète que la punition pénale n'a entraîné aucune diminution de la demande et encore moins celle de l'offre. La loi sur les stupéfiants, en vertu de l'article 19A, permet de renoncer à une poursuite pénale. A Genève, contrairement à ce qui se passe dans les autres cantons, la majorité des consommateurs arrêtés par la police ne sont pas déférés devant la justice, mais systématiquement mis à l'amende. Il n'en demeure pas moins qu'une analyse, plus fine, menée par l'Office fédéral de la police en 1994, révèle que, si la procédure est différente, le résultat est identique dans tous les cantons. La proportion des consommateurs passant par la prison ou mis à l'amende est quasiment la même.

Le pourcentage de consommateurs de cannabis amendés, par rapport à leur groupe, est plutôt faible comparé à celui des consommateurs d'autres psychotropes. Mais ce sont souvent les mêmes qui se font contrôler et cela démontre le peu d'efficacité de cette mesure. Elle ne limite pas le marché illégal et, par conséquent, n'en réduit pas les effets.

Il faut être pragmatique et renoncer à des mesures inefficaces pour en rechercher d'autres qui permettent d'atteindre notre objectif réaffirmé en 1995 : la réduction des problèmes liés aux drogues.

Je suis certain que le Conseil d'Etat, avec l'appui de la commission mixte, fera diligence pour répondre à cette motion que je vous invite à soutenir.

M. Pierre Froidevaux (R). Les initiants nous proposent essentiellement quatre axes de réflexion :

1. Réviser la loi fédérale, afin d'assurer son application uniforme dans l'ensemble du pays.

2. Ne plus poursuivre les toxicomanes consommateurs.

3. Inscrire, comme agents thérapeutiques, les produits dérivés du chanvre.

4. Mieux soutenir la prévention.

A titre plus personnel que représentatif de mon groupe, j'aurais tendance à suivre la plupart de vos propositions. Avoir le courage politique de débattre publiquement de ces douloureux problèmes ne peut que servir l'intérêt général.

Est-ce que tout est sain ? J'aurais tendance à le croire, mais il serait préférable de mieux nous en convaincre en faisant examiner vos projets par la commission de la santé.

Je ne souhaite pas prolonger le débat en dehors d'un seul point qui m'apparaît être le plus important et le plus complexe : votre souhait de voir la prévention de la toxicomanie mieux soutenue.

Lors de la précédente législature et à l'occasion de la mise en place des programmes d'aide à la survie, nous avions discuté de la nécessité d'étudier les causes profondes de la toxicomanie.

Lors de son audition, Mme le docteur Annie Mino nous avait appris que 90% des femmes toxicomanes avaient subi un acte sexuel non consenti, avant leur puberté. Cette blessure infligée à une enfant, le plus souvent par une personne de son entourage, est une cause de graves troubles psychiques. Si, de plus, la situation est masquée par l'entourage, l'enfant ou l'adolescente n'ont aucune chance de pouvoir l'exprimer et gardent leur blessure secrète.

Dès lors, comment peuvent-elles concevoir de devoir rejoindre le monde des adultes, alors que ceux-ci ont commis un crime indicible ? Comment peuvent-elles accepter leur devenir de femme ? Ce passage de l'état d'enfant à celui d'adulte s'accompagne de doutes obligés qui conduisent, dans bien des cas, à une anxiété pathologique. Abandonnées par leur cadre familial, elles ne pourront avoir recours, pour se calmer, qu'à des produits illicites qui circulent précisément dans leur milieu, dès un âge critique atteint.

Il y a trois ans, nous n'avions pu aller aussi loin, certains députés ayant craint de culpabiliser la cellule familiale. J'observe que les auteurs de ces projets inscrivent le phénomène de drogue «dans les problèmes de dimension économique et sociétale». L'exemple très culpabilisant que je viens de citer, où la cause directe est familiale, relève d'un fait de société et, par conséquent, d'un problème politique. Tous les jours, nous assistons à des progrès dans la reconnaissance de la maltraitance et de la négligence d'enfants. Nous devons continuer de lutter dans ce sens.

La deuxième cause reconnue par les auteurs de ces projets est d'origine économique. Seul le retour au plein emploi pourra améliorer la situation générale. Aussi ne puis-je que formuler mes voeux pour que la nouvelle majorité soutienne, en toutes circonstances, la création de places de travail.

M. Gilles Godinat (AdG). Je ne reviendrai pas sur les points soulignés par mes collègues, notamment sur la nécessité d'une prévention intelligente en matière de consommation de substances quelles qu'elles soient.

Ma première réflexion, en ma qualité de citoyen, est que quiconque examine la politique en matière de prévention d'abus de substances ne peut être que frappé par l'incohérence, pour ne pas dire l'hypocrisie, démontrée par les diverses politiques appliquées. Il n'y a pas si longtemps, la consommation de certaines substances était encouragée : je pense au tabac, à l'alcool, aux analgésiques. D'autres, par contre, sont proscrites, voire réprimées avec brutalité. En examinant froidement la situation, on relève un manque de cohérence dans les mesures appliquées.

Maintenant, c'est au tour du professionnel de la santé d'intervenir. Pourquoi ce manque de cohérence ? Parce que, dans la définition légale des stupéfiants, des zones restent floues. C'est pourquoi je souhaite un débat qui fasse montre de rigueur scientifique. Comme souligné par le professeur Peters, de Lausanne, il faudrait avoir le courage, comme l'a eu le CIPRET dans un excellent travail, de décrire les réels dangers de chaque substance, afin que tout le monde en soit clairement informé. Et cela sans faux débat ! Or, actuellement, la prise de certaines substances est dramatisée, alors que la consommation d'autres est banalisée.

Reconnaissons qu'il demeure encore des zones d'ombre dans les milieux médicaux quant à la définition de ces substances. La classification américaine s'est révélée plus aisée en relevant simplement l'addiction, le phénomène psychologique de dépendance à certains produits, c'est-à-dire en insistant davantage sur la dépendance aux produits plutôt que sur les produits eux-mêmes. C'est là une démarche fondamentale pour tout thérapeute qui veut aider un patient : il doit travailler sur la relation de dépendance.

Toujours sur le plan professionnel, je tiens à apporter publiquement ici le témoignage de certains patients qui consomment régulièrement du cannabis. Pourquoi le font-ils ? Ils le font pour se soigner. J'ai noté des effets curatifs et bénéfiques dans le domaine des douleurs articulaires chroniques, des migraines, des spasmes musculaires douloureux, à certains stades de douleurs chroniques et des états anxieux chroniques. En tant que médecin, je puis témoigner que le cannabis peut exercer un effet bénéfique dans ces pathologies. (Applaudissements.)

Mme Barbara Polla (L). Je distingue deux pôles dans ce débat, et non quatre axes comme M. Froidevaux, à savoir la résolution, d'une part, et la motion, d'autre part.

Je me contenterai d'une remarque formelle sur la résolution. Il me paraît difficile d'inviter les Chambres et le Conseil fédéral à réviser, dans les plus brefs délais, la loi sur les stupéfiants, alors qu'une votation populaire doit avoir lieu sur l'initiative Droleg, le pendant ultra-libéral, si je puis dire, de l'initiative dite «Pour une jeunesse sans drogue». Il serait bien plus efficace de s'en tenir à la législation fédérale, sachant que cette votation, comme celle de l'initiative «Pour une jeunesse sans drogue», suscitera un nouveau débat sur la question, de nombreuses prises de position et des possibilités législatives. Par conséquent, il me paraît actuellement inadéquat de vouloir modifier au plus vite la loi sur les stupéfiants, car sa révision dépendra du vote populaire de l'initiative Droleg.

J'en viens à la motion. Son titre est prometteur puisqu'il propose de développer une politique en matière de drogues visant à une amélioration de la prévention des dépendances et à la diminution des risques liés aux drogues.

Nous partageons évidemment ces objectifs. Comme les initiants, nous pensons que même si la politique genevoise est particulièrement efficace en la matière - une raison, parmi d'autres, de l'opposition des libéraux à l'initiative «Pour une jeunesse sans drogue» - rien ne doit être négligé quand il s'agit d'augmenter les capacités de prévention et de diminution des risques. En référence à la deuxième invite de la motion, nous serons intéressés à contribuer à l'élaboration d'approches législatives pragmatiques tendant à améliorer encore la prévention et la diminution des risques. Je pense aussi que la commission de la santé est tout à fait apte à en débattre puisqu'elle a déjà traité du sujet.

En revanche, au nom du groupe libéral, je m'oppose fermement à la première invite. La motion propose des moyens de prévention et cette invite propose de dépénaliser la consommation, la possession et l'acquisition pour la consommation personnelle !

Je démens ce qui a été affirmé, à savoir que ce Grand Conseil se serait prononcé affirmativement à cet égard. Je suis formelle : le groupe libéral ne s'est jamais prononcé en faveur de la dépénalisation. La réflexion et les débats tenus au sein de notre parti sur l'initiative «Pour une jeunesse sans drogue» l'ont amené à la refuser parce que nous avons estimé que rien ne devait être négligé pour aider à la survie, à l'exception de la dépénalisation et de la libéralisation.

Je vous rappelle que Ruth Dreifuss - qui préconisait le rejet de l'initiative au nom de l'Office de la santé publique - a insisté, dans ses nombreux messages, sur le fait que ce refus ne supposait, en aucun cas, la dépénalisation ou la libéralisation de la consommation de drogues.

Nous sommes absolument convaincus que la poursuite pénale de l'acquisition et de la consommation de drogues constitue un moyen préventif très important. Nous ferions encourir un risque démesuré à notre jeunesse et à l'ensemble de la population genevoise si nous acceptions la première invite.

Il est vrai que les personnes qui consomment des drogues dites douces n'en arrivent pas forcément à consommer des drogues dites dures. Par contre, il est tout aussi vrai et établi que la majorité de la jeunesse dépendante des drogues dures a commencé par consommer des drogues dites douces.

Dans nos écoles, les jeunes qui consomment des drogues dites douces sont la première cible des dealers. Idem pour l'ecstasy dont on dit que c'est une drogue douce sans danger. Ce n'est qu'après coup, et c'est le cas de l'ecstasy, que l'on se rend compte que la consommation de ces drogues prétendument douces entraîne des effets très graves et permanents sur la santé, notamment sur la santé mentale.

Vous avez raison, Monsieur Froidevaux, de souligner les problèmes sociaux et économiques liés à la consommation de drogue. Mais avant tout, cette consommation a lieu parce que la drogue se vend et fait gagner beaucoup d'argent à ceux qui en font le commerce.

Je n'écarte donc pas les problèmes évoqués par M. Froidevaux, mais pour nous la prévention pénale reste et restera un instrument important pour prévenir la toxicomanie, notamment chez les jeunes qui sont les plus touchés.

M. Chaïm Nissim (Ve). Moi, j'aime bien fumer de l'herbe ! J'ai commencé à le faire à 14 ans et cela fait maintenant trente-quatre ans que je fume deux ou trois joints par mois. J'adore ça ! Comme je ne consomme ni tabac, ni alcool, je suis convaincu d'être en meilleure santé, avec mes quelques joints, que de nombreuses personnes ici présentes qui boivent beaucoup et fument tout autant.

J'ai commencé dans un pays à forte minorité musulmane. Cela m'a permis de relativiser les problèmes de prohibition, les musulmans interdisant l'alcool, mais tolérant, voire permettant le shit. Les interdits varient et cela confirme ce que mon collègue Godinat a dit à propos de la dramatisation du shit.

Je crois, Monsieur Ramseyer, que vous êtes en grande partie responsable de cette dramatisation avec les actions menées par votre département contre la Cave à chanvre et le Delta 9. Voilà des lieux où la vente était contrôlée, où des gens proposaient un produit de qualité à un prix bas. Vous avez cherché à criminaliser ces gens. Ce n'était pas habile, à mon avis, parce que ce faisant vous avez fait montre du même état d'esprit qui régnait à l'époque d'Al Capone, aux Etats-Unis, lors de la prohibition de l'alcool qui a enrichi les bookmakers.

C'est pourquoi je me permettrai d'ajouter une invite à la résolution...

Une voix. Fais-le en commission !

M. Chaïm Nissim. Je veux bien le faire en commission, mais il semble que l'Alternative proposera un renvoi direct au Conseil d'Etat... (Protestations.) C'est bien ça, Monsieur Hausser ? Quoi qu'il en soit, je déposerai en commission cette deuxième invite que je vous lis maintenant :

«- à autoriser la mise en place de lieux de vente contrôlés par l'Etat afin de permettre la consommation de chanvre et de ses dérivés aux adultes résidant en Suisse.»

Mme Marie-Thérèse Engelberts (PDC). Sans avoir la même provenance culturelle et l'expérience de M. Nissim en la matière, j'aborderai la question sous un autre angle.

Pas tout le monde n'a la possibilité, comme Michaux, d'écrire sous l'influence de la drogue. Le poète en avait la maîtrise, la force et la liberté.

Pour nous, démocrates-chrétiens, ces propositions de résolution et de motion ne sauraient être acceptées en l'état. Elles doivent être renvoyées à la commission de la santé qui devra examiner les questions que nous nous posons, et cela sans rien dramatiser.

Ces questions ont trait à l'évaluation actuelle et exhaustive des connaissances scientifiques, lesquelles font l'objet de nombreux débats contradictoires. Elles concernent aussi les expériences concrètes, pragmatiques, conduites dans différents pays d'Europe, en matière de dépénalisation et de libéralisation, de même que l'établissement des rapports et des conséquences entre consommation et dépendance. En la matière, les textes scientifiques ne convergent pas, c'est le moins que l'on puisse dire !

Maintenant, je pose une question plus personnelle. Comme mère de famille d'adolescents et de jeunes adultes, je me demande, seule ou en famille, quelle est ma capacité à pouvoir les informer, les éduquer, les seconder, faire de la prévention, leur permettre d'accéder à un libre arbitre responsable, leur faire acquérir un propre discernement, si un minimum de structures extérieures, sans cesse remises en question, n'existe plus. Personnellement, je souhaite un débat sur le type de contraintes extérieures à mettre en place. Les forces individuelles ne sont pas illimitées et notre débat me semble n'être destiné qu'aux privilégiés.

Au risque de paraître ringarde aux yeux de certains, je prends le risque d'émettre mes doutes, mes craintes, face à l'insécurité due aux déclarations des tenants de la légalisation de la consommation des drogues.

Dans le domaine thérapeutique, ces substances sont sous contrôle et, par conséquent, ne posent pas de problème. S'il est vrai que l'interdit n'exclut pas les débordements, s'il est vrai que la pénalisation, souvent mal ciblée, est peu efficace en matière de prévention, la libéralisation telle que proposée aujourd'hui ne peut apporter la liberté qu'à ceux qui peuvent déjà la maîtriser. Mais la dépendance est pour les autres et c'est de ceux-là dont nous aimerions parler en commission. La dépendance - faut-il le rappeler ? - est avant tout une souffrance.

M. Régis de Battista (S). Dans un domaine aussi important, le Conseil fédéral doit connaître les positions cantonales afin d'orienter sa politique. La même démarche a été faite par les cantons de Zurich et de Bâle-Campagne. Des initiatives seront prochainement déposées afin que le Parlement fédéral entre rapidement en matière et ouvre le débat.

A mon avis, c'est «là» le rôle d'un député et des représentants des autorités genevoises. Je crois que la pénalisation et la répression ont suffisamment montré leur échec. Pour résoudre un problème aussi grave pour notre jeunesse, le politique doit participer à la prévention. Et c'est dans ce sens que la résolution et la motion sont pertinentes.

Renommée pour exercer une prévention dans bien des domaines, Genève ne peut que soutenir ce type de propositions. Il est donc raisonnable de les renvoyer d'urgence au Conseil d'Etat, lequel est à même de prendre ses dispositions. C'est à nous, députés, d'orienter la politique du président du Conseil d'Etat, afin de ne pas réitérer les malheureux incidents évoqués par mon collègue Chaïm Nissim.

M. Christian Ferrazino (AdG). Je ne voulais pas intervenir, mais les propos de Mme Polla ne peuvent être laissés sans réponse.

Madame Engelberts, je ne suis pas un fumeur de joints, contrairement à mon collègue Nissim. Par contre, je suis sensible à certains arguments, notamment à ceux du docteur Godinat qui nous a expliqué que certains stupéfiants peuvent être bénéfiques sur le plan thérapeutique. Aussi je m'étonne, Madame, que vous ne le reconnaissiez pas, vu votre qualité professionnelle. Dès le moment où vous admettrez que de telles substances, placées sous contrôle, peuvent être bénéfiques, vous devrez faire le chemin avec nous et vous détacher des propos ahurissants de Mme Polla qui recommande, au nom du groupe libéral, d'aller à l'encontre de la première invite de la motion visant à dépénaliser les consommateurs de stupéfiants.

Madame Polla, nous n'en sommes plus là et la police a mieux à faire qu'à perdre son temps en poursuivant des consommateurs de stupéfiants. Vous avez recouru à des propos doctes, d'inspiration médicale, pour nous expliquer que dépénaliser cette consommation n'était pas la meilleure des choses à faire. Je vous réponds au niveau du bon sens. Pensez-vous que c'est la bonne solution que de continuer à enfermer des gens, à les mettre à l'amende, parce qu'ils consomment des stupéfiants ? Je vous dis, ainsi qu'à M. Ramseyer qui se plaint fréquemment du manque de moyens de la police pour accomplir les tâches qui sont les siennes, qu'il vaudrait mieux, pour celle-ci, de concentrer ses efforts sur les vrais crimes et les vrais délits plutôt que d'arrêter les consommateurs de stupéfiants pour noircir X pages de papier - c'est intéressant ! - et les transmettre au procureur général qui, à son tour, réexaminera le dossier et noircira du papier - de plus en plus intéressant ! - pour infliger une sanction.

Quasiment tout le monde s'accorde à reconnaître que la police a mieux à faire que de pourchasser des consommateurs de stupéfiants. Ne serait-ce que pour cette seule raison, nous devons renvoyer cette motion au Conseil d'Etat en l'invitant à faire ce que certains cantons ont déjà fait, à savoir ne plus poursuivre lesdits consommateurs.

M. Dominique Hausser (S). Si M. Nissim avait lu le rapport de la commission Schild, il se serait abstenu de déposer son amendement dont la teneur entre dans les propositions de la commission d'experts sur la révision de la loi sur les stupéfiants.

Par conséquent, le groupe socialiste s'abstiendra sur cet amendement qui n'apporte rien à la résolution.

De plus, je rappelle que le canton ne peut déroger à une loi fédérale pour mettre en pratique des actions illégales.

Il importe, au niveau cantonal, de réfléchir aux moyens, et c'est là tout le sens de la motion. Il est nécessaire d'inviter le Conseil fédéral et les autorités fédérales à réviser la loi sur les stupéfiants afin de pratiquer une politique plus pragmatique et plus cohérente.

Je laisse au groupe libéral le choix de sa décision. Néanmoins, je rappelle à Mme Polla que le Grand Conseil a été très clair en ce qui concerne la répression. La quatrième invite de la motion votée à l'époque concernait la répression du grand trafic relevant de la responsabilité du département de justice et police et des transports. Elle doit recevoir la place qu'elle mérite dans une politique globale, conçue pour permettre aux personnes toxicomanes de bénéficier des autres volets de la politique gouvernementale. Notre parti avait ajouté - sans modifier pour autant les invites après un long travail des commissions sociale et de la santé - que cela devait permettre une politique globale en matière de drogue, de manière générale, et pas seulement des personnes malheureusement déjà dépendantes de psychotropes.

Mme Barbara Polla (L). Monsieur Ferrazino, le groupe libéral est convaincu, au niveau juridique, qu'il est intéressant, important, essentiel, en matière de prévention, de poursuivre pénalement la consommation de drogue.

Je suis particulièrement préoccupée par les jeunes qui constituent la cible majeure visée par les trafiquants. Or que font-ils, dans leur grande majorité, pour payer la drogue qu'ils consomment ? Ils en vendent eux-mêmes ! Par conséquent, pénaliser la consommation c'est pénaliser la vente et agir directement en faveur de la prévention.

Nous sommes contre la vente et la consommation pour les raisons que j'ai exposées. Bien que je trouve peut-être courageux de la part de M. Nissim d'exposer ses habitudes, je ne m'y arrêterai pas, et le groupe libéral rejettera son amendement.

Nous sommes prêts, à la commission de la santé, à suivre toutes les investigations supplémentaires amenant à une meilleure prévention, à examiner tous les problèmes sociaux et à leur trouver les meilleures solutions. En revanche, nous ne sommes pas prêts à considérer, de quelque manière que ce soit, la dépénalisation de la consommation.

Si nous acceptons le renvoi de la motion à la commission de la santé, nous nous opposons, par contre, à son renvoi au Conseil d'Etat. Si la question devait se poser au moment du vote, je demanderais l'appel nominal.

M. Christian Ferrazino (AdG). D'après ce que vous dites, Madame Polla, le groupe libéral est pour la pénalisation parce que vu la cherté de la drogue il faut nécessairement en vendre pour en consommer.

Ce constat aurait pu amener votre groupe à une autre conclusion. La cherté de la drogue obligeant le consommateur à en vendre, il aurait pu se dire qu'en baissant son prix cette obligation disparaissait.

Je partage entièrement le point de vue de notre ami Nissim qui nous propose - si j'ai bien compris, car je suis novice dans ce domaine ! - des lieux de vente sous contrôle de l'Etat. Cela présenterait un double avantage que vous aurez saisi tout comme moi, Madame Polla ! Un prix qui ferait que les gens ne seraient plus obligés de vendre pour consommer, et la qualité ! On connaît une régale du sel et ça n'a pas l'air de vous gêner ! Peut-être que pour certains le sel des stupéfiants a plus de saveur que celui que vous utilisez pour votre cuisine, Madame Polla !

Je suis prêt à suivre M. Nissim si son amendement exprime cette idée. J'ignore si le canton de Genève est compétent pour la concrétiser, mais nous pourrions l'exprimer en tant que volonté politique. Si le canton de Genève n'est pas compétent, nous pourrions intervenir au niveau des autorités fédérales pour qu'elles appliquent cette solution qui présente le double avantage que je viens de souligner.

M. Chaïm Nissim (Ve). Monsieur Ferrazino, vous avez parlé de la poursuite des consommateurs. Ce n'est pas tout à fait exact. Dans les cas que j'ai cités, la police a poursuivi les vendeurs.

J'en viens à ma proposition d'amendement. Plutôt que d'inviter le Conseil d'Etat «à autoriser la mise en place, etc.», nous pourrions l'inviter «à étudier la mise en place, etc.». S'agissant d'une résolution, le Conseil d'Etat est libre de l'appliquer ou pas.

La résolution comporte deux invites, l'une étant adressée aux Chambres fédérales et au Conseil fédéral, l'autre au Conseil d'Etat. Mon amendement constitue donc une deuxième invite au Conseil d'Etat.

Monsieur Hausser, je doute de votre sincérité quand vous dites que mon amendement ne serait pas valable au niveau de la loi fédérale. Je suis convaincu qu'un canton dispose d'une marge de manoeuvre pour libéraliser. Les cantons de Zurich et de Bâle-Campagne ont donné l'exemple. Cette marge de manoeuvre existe donc bel et bien, mais il manque au Conseil d'Etat la volonté politique de l'utiliser.

Je maintiens mon amendement en le modifiant comme suit :

«- à étudier la mise en place de lieux de vente, etc.»

Mme Barbara Polla (L). Monsieur Ferrazino, je tiens à vous rappeler notre serment qui est de travailler pour le bien de la patrie qui nous a confié ses destinées. Pour tous les sujets dont nous traitons, et pour la toxicomanie plus encore, il est donc des limites que la plaisanterie ne saurait dépasser.

Proposer de vendre à Genève la drogue la meilleure et la moins chère en comparant cela à la libéralisation du marché du sel est tout simplement inadmissible !

Nous avons tendance à oublier, au sein de ce Grand Conseil, que nous ne sommes pas les seuls à vivre sur cette terre. Si la libéralisation de la drogue était envisagée, elle ne pourrait avoir lieu qu'à l'échelon mondial.

Je refuse d'imaginer que notre canton devienne un lieu où se rendraient tous les gens intéressés par le scoop Ferrazino : «A Genève, nous avons la drogue la moins chère, la meilleure, et, en plus, c'est l'Etat qui l'offre !» (Applaudissements.)

M. Christian de Saussure (L). Nous avons suffisamment de drogues et de psychotropes hélas légalisés. Nous avons l'alcool et le tabac. Nous disposons de la morphine, strictement contrôlée, pour lutter contre la douleur. Elle produit un effet thérapeutique certain, peut-être similaire à celui que pourraient déployer le haschich et le cannabis s'ils étaient distribués sous contrôle médical. Nous avons aussi les benzodiazépines. Je n'hésite donc pas à dire que médecins et pharmaciens sont des dealers légaux. Néanmoins, j'aimerais simplement vous faire remarquer une chose:

Quel que soit le psychotrope utilisé - tabac, alcool, cannabis ou autre - il est «essayé», la première fois, par les adolescents de 12 à 15 ans. Pourquoi les jeunes consomment-ils de la drogue ? Parfois par mal-être, mais très souvent pour transgresser un interdit.

Bien que ne m'inquiétant pas particulièrement des effets du haschich, je souhaite, néanmoins, qu'il demeure dans l'illégalité précisément pour induire la transgression. Si on banalise le haschich et qu'on le rende facilement accessible, les jeunes, qui recherchent la transgression, recourront à l'héroïne ou à la cocaïne. D'où des conséquences particulièrement dramatiques.

Il est prématuré de renvoyer la résolution et la motion au Conseil d'Etat. Il faut, au préalable, que la commission de la santé ait une discussion de fond.

M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. Je ne désire pas me laisser entraîner dans une polémique.

Monsieur le député Hausser, j'observe que vous ne parlez que du haschisch, alors que votre texte passe en revue tous les stupéfiants. J'en déduis que vos propos concernent aussi bien le haschisch que l'héroïne et la coke.

Vous donnez des chiffres alors que votre bibliothèque en possède d'autres exprimant le contraire. Si vous le désirez, je peux vous faire profiter de la mienne. Vous constaterez qu'elle contient autant de volumes pour que de volumes contre.

De plus, vous sous-estimez les problèmes, ce qui est tout aussi facile que de les surestimer. Ce qui fait que ce débat me paraît vain en dehors d'aspects patents.

La résolution 361 vise à inciter l'autorité fédérale à réviser la loi fédérale sur les stupéfiants sur la base des propositions faites par la commission Schild. Cette étude est en cours et vous le savez, Monsieur le député. Les experts sont auditionnés.

Monsieur le député, on vous a dit, à Berne, que cela prendra beaucoup de temps et c'est bien là votre souci. Certes, cela prendra du temps, parce que l'Organe international de contrôle des stupéfiants, qui appartient à l'ONU, a critiqué très vertement la politique suisse en la matière. Par conséquent, la Confédération sera très prudente avant d'envisager la dépénalisation. Or cet organe international travaille, réfléchit et s'informe tout comme vous. Par conséquent, vous n'avez pas d'exclusivité dans ce domaine.

Nous aurons bientôt à débattre de l'initiative Droleg. Personnellement, je la combattrai, mais je ne serai pas tout seul : je serai avec Mme Dreifuss dont l'appartenance politique devrait vous dire quelque chose.

Quant à la motion 1191, elle tend à ne plus poursuivre pénalement les personnes qui détiennent des stupéfiants. En l'occurrence, toutes les drogues sont concernées et pas seulement les douces.

Je vous informe de ce que vous savez déjà. Le Conseil d'Etat n'est pas compétent pour statuer sur cette première invite. La décision de renoncer ou non à ouvrir une information pénale est une décision de politique criminelle. Or, à Genève, cette politique est de la compétence du procureur général, lequel procureur a pris la peine de répondre à votre motion dans un article publié, le 19 mars, dans «Le Temps». A la question : «Le Conseil d'Etat peut-il intervenir ?», il a répondu «Non ! Le Conseil d'Etat n'a rien à dire. Ces décisions appartiennent au législateur fédéral, puis, pour ce qui concerne l'application, aux autorités judiciaires cantonales.» A la question : «Donc, vous n'appliqueriez pas les invites de la motion ?», M. le procureur général a répondu : «Je ne pourrais pas le faire même si je le voulais. Et je précise que je ne le veux pas.»

A Genève, la politique criminelle juridique est de la compétence du procureur général qui définit les priorités, peut renoncer à poursuivre, ce dont il ne se prive pas. Le fait de renoncer à poursuivre, d'une manière générale, tous les consommateurs sans exception va plus loin et n'entre plus dans le cadre de décisions pouvant être prises par M. le procureur général.

Monsieur le député Godinat, vous avez rappelé, à juste titre, que des substances sont diabolisées par rapport à d'autres totalement banalisées. Comment vous donner tort ! C'est la vérité même. Mais plutôt que tout banaliser, ne pensez-vous pas que l'on pourrait un peu plus diaboliser d'un côté et moins de l'autre ? Un abandon total ne vous apparaît-il pas comme un abandon dans tout le sens du terme ?

J'aimerais rendre ce Grand Conseil attentif au fait que de manière consensuelle, tous partis confondus, les milieux politiques genevois se louent de la politique genevoise en matière de drogue. Ils se vantent, sur le plan romand et suisse, du bon résultat obtenu à Genève. Avec cette résolution et cette motion, vous prenez la responsabilité, Monsieur le député, de mettre fin à quelque chose qui fonctionne. Je vous laisse cette responsabilité.

M. Christian Ferrazino (AdG). J'ai l'impression que vous êtes un peu dur d'oreille, Monsieur le président Ramseyer. Par conséquent, je m'exprimerai avec une certaine force.

Monsieur le président, nous n'acceptons pas que vous remettiez la responsabilité sur le procureur général en disant que, la politique criminelle étant de son ressort, vous n'avez aucune compétence en tant que chef de la police.

Faut-il vous rappeler, Monsieur le chef de la police, que s'il y a un chef c'est bien vous, et qu'un chef donne généralement des instructions ?

Le président. Je vous rappelle que le débat, maintenant, ne porte plus que sur le renvoi en commission.

M. Christian Ferrazino. La raison d'un renvoi au Conseil d'Etat et non en commission nous est fournie par le fait que M. Ramseyer, en sa qualité de chef de la police, peut donner des instructions à sa police en disant que sa première priorité n'est pas de pourchasser les consommateurs de stupéfiants, parce qu'il en a d'autres. Et si la police ne noircit pas des pages de papier en pourchassant les consommateurs, le procureur général n'aura pas de travail à effectuer. Par conséquent, il ne sera pas placé devant le dilemme que vous venez d'évoquer. Pour qu'il se prononce, il faut que la police ait préalablement procédé à des arrestations.

C'est pourquoi cette motion rappelle à votre police qu'elle a d'autres priorités que de poursuivre les consommateurs de stupéfiants. Raison pour laquelle, nous vous invitons à renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat.

Motion 1191

Le président. Nous voterons le renvoi de la motion en commission de la santé demandé par M. Christian de Saussure. C'est cela qui prime en vertu de l'article 78 du règlement.

La proposition de renvoyer la motion à la commission de la santé est mise aux voix.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Cette proposition est rejetée par 43 non contre 39 oui.

Résolution 361

Le président. Je vous lis l'amendement de M. Chaïm Nissim qui consiste en une deuxième invite au Conseil d'Etat :

«- à étudier la mise en place de lieux de vente contrôlés par l'Etat afin de permettre la consommation de chanvre et de ses dérivés aux adultes résidant en Suisse.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Résolution 361 et motion 1191

Le président. Nous mettons aux voix, par appel nominal, le renvoi simultané de la résolution et de la motion au Conseil d'Etat.

M. Dominique Hausser (S). Monsieur le président, la résolution doit être renvoyée directement au Conseil fédéral.

Le président. La procédure prévoit de renvoyer cette résolution au Conseil d'Etat qui la transmettra au Conseil fédéral. Cela apparaît d'ailleurs dans le texte même de la résolution. Est-ce exact ? L'appel nominal (Appuyé.) a été demandé par Mme Polla, nous allons y procéder.

Celles et ceux qui acceptent cette proposition de renvoi répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non.

Cette proposition de renvoi est rejetée par 44 non contre 43 oui.

La proposition de résolution et la proposition de motion sont rejetées.

Ont voté non (44) :      

Bernard Annen (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Roger Beer (R)

Jacques Béné (L)

Janine Berberat (L)

Madeleine Bernasconi (R)

Claude Blanc (DC)

Thomas Büchi (R)

Juliette Buffat (L)

Christian de Saussure (L)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Gilles Desplanches (L)

Hervé Dessimoz (R)

Jean-Claude Dessuet (L)

Hubert Dethurens (DC)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

John Dupraz (R)

Henri Duvillard (DC)

Marie-Thérèse Engelberts (DC)

Bénédict Fontanet (DC)

Pierre Froidevaux (R)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Nelly Guichard (DC)

Claude Haegi (L)

Janine Hagmann (L)

Michel Halpérin (L)

Yvonne Humbert (L)

Bernard Lescaze (R)

Armand Lombard (L)

Olivier Lorenzini (DC)

Alain-Dominique Mauris (L)

Jean-Louis Mory (R)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Jean-Marc Odier (R)

Barbara Polla (L)

Stéphanie Ruegsegger (DC)

Walter Spinucci (R)

Micheline Spoerri (L)

Pierre-François Unger (DC)

Olivier Vaucher (L)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Pierre-Pascal Visseur (R)

Ont voté oui (43) :

Esther Alder (Ve)

Charles Beer (S)

Fabienne Blanc-Kühn (S)

Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)

Dolores Loly Bolay (AG)

Anne Briol (Ve)

Christian Brunier (S)

Fabienne Bugnon (Ve)

Pierre-Alain Champod (S)

Bernard Clerc (AG)

Jacqueline Cogne (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Pierre-Alain Cristin (S)

Anita Cuénod (AG)

Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)

Régis de Battista (S)

Jeannine de Haller (AG)

Alain Etienne (S)

Laurence Fehlmann Rielle (S)

Christian Ferrazino (AG)

Magdalena Filipowski (AG)

Luc Gilly (AG)

Gilles Godinat (AG)

Marianne Grobet-Wellner (S)

Christian Grobet (AG)

Dominique Hausser (S)

David Hiler (Ve)

Antonio Hodgers (Ve)

René Longet (S)

Louiza Mottaz (Ve)

Chaïm Nissim (Ve)

Danielle Oppliger (AG)

Rémy Pagani (AG)

Véronique Pürro (S)

Jean-Pierre Restellini (Ve)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Albert Rodrik (S)

Martine Ruchat (AG)

Christine Sayegh (S)

Alain Vaissade (Ve)

Pierre Vanek (AG)

Alberto Velasco (S)

Salika Wenger (AG)

Personne ne s'est abstenu

Etaient excusés à la séance (5) :

Nicolas Brunschwig (L)

Erica Deuber-Pauli (AG)

Pierre Marti (DC)

Pierre Meyll (AG)

Françoise Schenk-Gottret (S)

Etaient absents au moment du vote (7) :

Michel Balestra (L)

Liliane Charrière Debelle (S)

René Ecuyer (AG)

Alexandra Gobet (S)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

René Koechlin (L)

Louis Serex (R)

Présidence :

M. Jean Spielmann, premier vice-président.

 

7. Ordre du jour.

M. Pierre Vanek (AdG). J'interviens sur un point d'application du règlement. Pouvant en tout temps interrompre le débat...

Le président. En tout temps, Monsieur le député, mais avec l'appui des deux tiers de l'assemblée.

M. Pierre Vanek. Je suis désolé de vous contredire, Monsieur le président. L'article 79A prévoit qu'un député tout seul peut, en tout temps, interrompre le débat pour inviter le Bureau à faire appliquer le règlement. C'est ce que j'entends faire en attirant votre attention sur l'intention de mon collègue Rémy Pagani qui voulait, tout à l'heure, déposer une motion d'ordre pour que le PL 7836, inscrit sous le point 52 de notre ordre du jour, soit traité demain à 20 h 30 pour des motifs qu'il aurait voulu exposer.

Or, l'article 79 prévoit une motion d'ordre pour l'interruption immédiate d'un débat, vote à l'appui, ou pour ne plus donner la parole aux députés. Il ne s'agit pas de cela. N'étant pas expérimenté, Monsieur Pagani s'est trompé.

Il s'agit de l'application de l'article 97 du règlement, intitulé «Maîtrise du Grand Conseil», qui stipule que le Grand Conseil est maître de son ordre du jour et peut en tout temps le modifier.

A la lumière de ces explications, nous pouvons considérer que la proposition de notre collègue est acceptée. Sinon, nous pouvons de nouveau procéder à un vote, auquel cas je le proposerai à la majorité simple, ce dont je vous remercie, Monsieur le président.

Le président. Les députés inexpérimentés ont quand même l'occasion de lire intégralement l'article 79. S'ils l'ont fait, ils auront constaté que l'alinéa 2 stipule que la motion d'ordre doit être immédiatement mise aux voix. Cela a été fait. Et qu'elle ne peut être acceptée qu'à la majorité des deux tiers des députés présents. Cela n'a pas été le cas.

Comme il s'agit d'un point que vous souhaitez voir traiter demain, à 20 h 30, je vous propose de présenter votre demande quand nous passerons à l'ordre du jour de ladite séance. Le Grand Conseil appréciera à ce moment-là.

 

P 892-A
8. Rapport de la commission judiciaire chargée d'étudier la pétition : Ouvrez les dossiers. ( -)P892
Rapport de M. Bénédict Fontanet (DC), commission judiciaire

Déposée par un millier de signataires, la pétition susmentionnée a été renvoyée de la commission des pétitions à la commission judiciaire. Cette dernière l'a examinée lors de ses séances des 30 janvier 1992, 13 janvier 1993 et 10 février 1994, en présence de M. Bernard Ziegler, puis de M. Gérard Ramseyer, présidents successifs du Département de justice et police et des transports. M. Laurent Walpen, chef de la police, a été auditionné.

La commission a proposé au représentant des pétitionnaires, M. Michel Thévenaz, de procéder à son audition. En vain. Le 3 février 1992, la commission a transmis à M. Michel Thévenaz le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 630, dont il ressort que le traitement des documents établis pour assurer la sécurité de l'état ("; dossier 5 ") est de la compétence exclusive de la Confédération. La commission a également rappelé au pétitionnaire que l'accès aux dossiers de police judiciaire était régi par les articles 3A et 3B de la loi genevoise sur les renseignements et les dossiers de police et la délivrance des certificats de bonne vie et moeurs. Ce courrier est resté sans réaction.

Audition de M. Laurent Walpen, chef de la police

Entendu le 10 février 1994, M. L. Walpen a rappelé qu'il existait deux types de fichiers de police, le premier, "; 4 ", incluant les dossiers de police judiciaire et régi par la loi cantonale sus-rappelée et le second, "; 5 ", contenant les données recueillies sur mandat du Ministère public fédéral pour assurer la sûreté de l'Etat. A la suite d'une réclamation de droit public du canton de Genève, le Tribunal fédéral a jugé que la législation cantonale ne pouvait s'appliquer au fichier "; 5 ".

Discussion de la commission et conclusions

La question des dossiers de police a été traitée en détail dans le cadre de la motion 630 (Mémorial 1990, pp. 736 à 770 et 4712 à 4811 ; 1992, pp. 295 à 337).

La commission a donc décidé, par 8 voix (4 L, 2 DC, 2 R) et 5 abstentions (2 S, 2 AdG, 1 Ve) le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil, à titre de renseignement.

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Débat

Le président. La commission judiciaire a décidé par huit voix et cinq abstentions de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Il en sera fait ainsi s'il n'y a pas d'autre proposition.

M. Pierre-Alain Champod (S). Monsieur le président, je comprends votre souci de faire avancer rapidement nos travaux. Aussi permettez-moi quelques brèves remarques,

Je ne trouve pas normal que cette pétition ait été traitée avec un tel retard. Nous n'en débattons qu'aujourd'hui alors qu'elle a été déposée en 1992 ! C'est inadmissible.

Sur le fond, cette pétition s'inscrit dans la problématique des fiches. Au début des années nonante, la population suisse a découvert, avec effarement, que de nombreuses personnes avaient fait l'objet d'une surveillance policière en raison de leurs options politiques. Ces personnes, dont je fais partie puisque j'ai été fiché, n'avaient commis aucun délit réprimé par le code pénal. Elles avaient simplement fait usage des droits démocratiques garantis par la Constitution. Elles avaient, par exemple, recueilli des signatures pour des référendums ou des initiatives. Elles étaient actives dans le monde associatif ou avaient participé à des manifestations.

Un gigantesque travail de fourmi avait été fourni par la police politique. Son coût énorme a débouché sur des informations souvent très banales et parfois fausses. Certains rapports ont empêché des personnes d'accéder à des postes dans l'administration. Il s'agissait donc d'une affaire particulièrement grave.

Sans refaire l'historique des fiches, il me semblait important de le rappeler.

Si j'ai bien saisi le sens du rapport, le Tribunal fédéral a déclaré que la demande des pétitionnaires était contraire au droit fédéral et qu'il ne pouvait lui être donné suite pour des raisons juridiques.

Le problème des fiches reste extrêmement préoccupant. Il faut absolument éviter la reproduction d'une telle situation. Les socialistes espèrent vivement que le peuple suisse acceptera l'initiative «Pour une politique sans police fouineuse» qui lui sera soumise en juin. Si cette initiative est acceptée, nous aurons enfin un article constitutionnel qui rendra illégale la surveillance des personnes qui n'ont pas les opinions de la majorité au pouvoir.

M. Bénédict Fontanet (PDC), rapporteur. Je partage l'opinion de mon préopinant dans le sens que rendre compte de cette pétition au terme de huit ans est des plus surprenant. Je le lui concède volontiers.

Cela étant, la problématique des fiches, des dossiers 4 et 5, ainsi que la problématique de la Police fédérale et du Ministère public fédéral, ont été examinées à fond par la commission judiciaire en 1990, puis en 1992. Cette pétition a été oubliée dans les tiroirs de la commission judiciaire. Non pas qu'elle n'ait pas été traitée il y a huit ans, mais comme nous n'avions pas pu entendre le responsable des pétitionnaires qui n'avait ni déféré aux convocations qui lui avaient été adressées, ni répondu aux lettres qui lui avaient été écrites, cette pétition est restée dans les tiroirs de la commission judiciaire.

Huit ans après, on m'a fait remarquer que j'avais eu la bonne idée de rapporter sur la motion 630 et que je pourrais écrire quelques mots sur la pétition pour qu'elle soit classée et expurgée de l'ordre du jour de la commission judiciaire. C'est la raison, ce soir, de sa présentation.

Je puis vous assurer, cher collègue, que sa problématique a été traitée longuement par la commission judiciaire lors de ses travaux qui remontent à sept ans et quelques mois.

C'est pour cette raison que je vous demande de bien vouloir suivre le rapport de la commission et de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Je répète que la personne qui avait déposé la pétition et les gens qui la soutenaient ne se sont pas présentés devant la commission pour en discuter.

Les conclusions de la commission judiciaire (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont mises aux voix.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Les conclusions de la commission judiciaire (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 38 oui contre 20 non.

P 1120-A
9. a) Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition concernant les nuisances d'une résidence pour réfugiés. ( -)P1120
Rapport de M. Bernard Lescaze (R), commission des pétitions
P 1164-A
b) Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour la démolition du mur en construction sur la terrasse du CERA. ( -)P1164
Rapport de majorité de M. Bernard Lescaze (R), commission des pétitions
Rapport de minorité de Mme Anita Cuénod (AG), commission des pétitions

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

En fait : le ler juin 1996 était déposé au secrétariat du Grand Conseil une lettre signée d'une vingtaine de locataires des immeubles 35-37, avenue de la Praille protestant contre les nuisances d'une résidence pour réfugiés, en particulier contre l'utilisation comme terrasse d'une toiture de l'immeuble 41, avenue de la Praille, où logent des requérants d'asile.

Primitivement, cette lettre avait été adressée à la Régie Moser qui, ne pouvant rien faire, avait suggéré aux locataires de s'adresser à la commission des pétitions. Recevant cette lettre, M. Pierre Stoller, sautier, l'avait considérée comme valant pétition et en informa la commission des pétitions le 17 juin 1996.

Les pétitionnaires souhaitaient que le grillage qui clôturait la terrasse soit remplacé par un mur ou que l'accès à cette terrasse soit interdite.

Le ler juillet 1996, la commission des pétitions était informée de la suspension de la pétition, des travaux devant être effectués durant l'été.

Une année plus tard, un mur s'édifiait sur la terrasse du CERA. Indignés par cette construction, d'autres locataires des 35-37-39 avenue de la Praille protestaient par voie de pétition, munie de 350 signatures, tant auprès du Grand Conseil que du Conseil municipal de Carouge. Ils exigeaient la démolition de ce mur. Fin juin 1997, un commando anonyme exauçaient leurs voeux et détruisait ce mur, comme la presse locale le rapporta abondamment.

Travaux de la commission : Face à cette situation nouvelle, le 25 août 1997, la commission se trouva partagée entre ceux qui estimaient que la pétition P 1164 était devenue sans objet, le mur étant démoli, et ceux qui estimaient que le problème n'était pas réglé dans la mesure où les gravats du mur empêchaient les réfugiés d'utiliser la terrasse.

La commission décida d'entendre les pétitionnaires. Il convient ici de rappeler que lors de sa séance du 12 juin 1997, le Grand Conseil entendit une interpellation urgente de M. Luc Gilly sur le sujet (IU 348, Mémorial 1997, pp. 4233-4234) à laquelle répondit M. Philippe Joye, conseiller d'Etat (Mémorial 1997, pp. 4483-4484) et que lors de la même séance, une résolution interpartis R 339 s'élevant contre l'absurdité de la construction d'un mur sur la terrasse du Centre d'enregistrement des requérants de la Praille fut adoptée à l'unanimité par le Grand Conseil et renvoyée au Conseil fédéral (Mémorial 1997, p. 42)

Le 8 septembre 1997, la commission auditionne Mmes Erica Loup et Henriette Stebler qui confirment que leur pétition été partiellement satisfaite par la destruction du mur, mais qui souhaitent que les requérants d'asile puissent utiliser la terrasse et espèrent qu'une barrière de verdure pourra remplacer le mur. Les pétitionnaires manifestent leur souci d'un accueil de qualité envers les réfugiés, qui ne leur donne pas l'impression de vivre dans une prison. Il leur est rappelé que le CERA dépend de la Confédération, même si c'est le Département cantonal des travaux publics qui avait donné l'autorisation de construire le mur.

Le 6 octobre 1997, la commission prend connaissance d'une lettre du 25 septembre des pétitionnaires, qui maintiennent leur pétition, tout en formulant diverses suggestions pour l'édification de barrières en bambous avec plantes grimpantes, ou remise d'un grillage dissimulé par de la verdure, voire l'installation de bacs avec des arbustes, espérant ainsi que le calme et la sérénité reviennent entre locataires et requérants de la Praille. Le 13 octobre 1997, la commission des pétitions décide, après une brève discussion de traiter les deux pétitions P 1120, réclamant un mur et P 1164 le rejetant dans un seul rapport. Toutefois , une partie de la commission souhaite classer la P 1120 et renvoyer la P 1164 au Conseil d'Etat.

Cette solution est refusée par 6 non (2DC, 1R, 3 L) contre 5 oui (2 AdG, 2 S, 1Ve) sur 11 présents.

La Pétition 1120 est déposée sur le bureau du Grand Conseil par 6 oui (2 DC, 1 R, 3 L) contre 5 non (2AdG, 2 S, 1Ve)

La Pétition 1164 est déposée sur le Bureau du Grand Conseil par 6 oui (2 DC, 1 R, 3 L) contre 5 non (2 AdG, 2S, 1 Ve).

Pour ce qui regarde cette dernière pétition, la majorité vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de la déposer parce qu'elle considère qu'elle n'a plus d'objet, même si elle partageait les motivations des pétitionnaires hostiles à l'édification du mur, comme l'a prouvé le vote unanime du Grand Conseil, le 12 juin 1997, de la résolution R 339 contre ce mur.

Pétition(1120)

concernant les nuisances d'une résidence pour réfugiés

Par cette lettre, nous souhaitons porter à votre connaissance, au nom des locataires habitant aux 35 et 37, avenue de la Praille, les nuisances causées par certaines personnes de la Résidence sise au 4 1, avenue de la Praille.

En effet, depuis la destruction de l'immeuble sis au 39, avenue de la Praille, les locataires susmentionnés et cosignataires de cette lettre ont pour vis-à-vis directs les toits de l'arrière de l'immeuble du 41, avenue de la Praille.

L'un des toits de l'arrière de cet immeuble clos par un simple grillage est utilisé comme terrasse par une quinzaine, voire une vingtaine, de personnes adultes de sexe masculin habitant la Résidence pour réfugiés. Ces personnes se réunissent régulièrement de 9 heures du matin à 10 heures du soir du lundi au dimanche inclus.

Ces personnes installées une bonne partie de la journée sur ce toit crient, hurlent, s'interpellent, jouent aux cartes ou même au football. Le bruit de ces hurlements reviennent d'autant plus forts en direction de nos balcons que les deux murs de côtés font chambre d'écho.

D'autre part, certains locataires du 37, avenue de la Praille ont surpris à plusieurs reprises un des hommes se trouvant sur le toit en train d'épier avec des jumelles une petite fille qui jouait dans le petit parc à l'arrière de l'immeuble.

Cette situation a pour conséquence intolérable qu'il n'est plus possible d'ouvrir les fenêtres donnant sur nos balcons à l'arrière de l'immeuble sans subir un vacarme épouvantable et continuel. A cela s'ajoute le sentiment désagréable d'être épiés et de savoir nos enfants être l'objet d'une attention particulièrement minutieuse de la part de certaines de ces personnes.

Par la présente, nous vous sommons de prendre des mesures immédiates afin qu'il soit mis fin à cette situation intolérable entravant le bon usage de nos objets locatifs et en diminuant par conséquent notablement la valeur.

Ces mesures doivent à notre avis être radicales et consister soit en l'interdiction d'accès à ce toit, soit en la construction d'un mur en lieu et place du grillage susmentionné à l'occasion de la reconstruction du nouvel immeuble sis au 39, avenue de la Praille actuellement en chantier.

Sans réaction immédiate et efficace de votre part, nous n'aurons pas d'autres alternatives que de demander des diminutions de loyers correspondant à la gêne causée par cette situation intolérable.

Dans l'attente de vos nouvelles et en espérant que vous saurez lire dans ces lignes une revendication légitime et que vous aurez à coeur de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour que cette situation ne perdure pas.

N.B. : 20 signatures

Les locataires des 35 et 37avenue de la Praille

Pétition(1164)

pour la démolition du mur en construction sur la terrasse du CERA

C'est avec indignation que nous assistons à la construction d'un mur au Centre de requérants d'asile (CERA) à l'avenue de la Praille 41.

Nous demandons que celui-ci soit démoli.

Nous n'avons pas peur des réfugiés, ce sont des êtres humains qui méritent notre solidarité et notre amitié.

N.B. : 350 signatures

Pour les instigateurs de la pétition

Cesaretto D.35, av. de la Praille1227 Carouge

Extrait du Texte de la séance n° 29 du 13.06.1997

Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Luc Gilly sur la construction d'un mur sur la terrasse du CERA de La Praille. (IU 348)

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je partage entièrement les préoccupations de M. Luc Gilly concernant la qualité de l'accueil des personnes requérantes d'asile dans notre canton.

Je ne suis pas loin non plus de partager son avis, selon lequel la solution retenue dans le cas particulier n'est pas la plus satisfaisante. Malheureusement, l'autorité compétente, donc l'Office fédéral des réfugiés, a dû tenir compte d'un contexte délicat.

En effet, à tort ou à raison, de très nombreux habitants du voisinage se sentaient épiés par les usagers de la terrasse litigieuse. A ce stade, il faut préciser que ladite terrasse, d'une surface d'environ 100 m2, n'était à l'origine pas conçue comme espace extérieur accessible mais comme couverture d'une construction basse, sur cour, pourvue de lanterneaux surélevés, de 1,80 m sur 3,20 m, ce qui rend de toute manière l'utilisation malaisée. Elle est délimitée sur deux côtés par les façades des immeubles voisins. Les deux autres côtés étaient jusque-là munis de grillages d'un aspect carcéral fort discutable.

La situation qui a prévalu à ce jour était tout à fait insatisfaisante, sans compter les plaintes virulentes évoquées ci-dessus et laissait craindre une évolution du conflit, difficile à gérer, et, bien entendu, dommageable pour les requérants d'asile.

C'est dans ce contexte que l'Office fédéral des réfugiés a conçu le projet du mur litigieux destiné à servir d'écran visuel articulé autour de deux bacs à fleurs, de manière à rendre son aspect plus convivial. Ce projet est tout à fait conforme aux dispositions légales en matière de construction. Il a été approuvé par la commune qui a participé aux discussions préalables et par la commission d'architecture qui l'a accueilli favorablement.

Le mur en cours de construction a donc été autorisé par la police des constructions, le 25 mars 1997. L'autorisation a été publiée dans la FAO du 2 avril 1997, sans donner lieu à aucun recours. Tout en admettant qu'il est regrettable de devoir désamorcer des conflits par ce type de solution, je souhaite vivement que ce projet permette un apaisement des relations entre les personnes en cause, tout en améliorant la situation du point de vue esthétique.

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RAPPORT DE LA MINORITÉ

Que dire de ce mur qui n'ait déjà été dit ? Pas grand chose, si ce n'est que sa construction est l'illustration parfaite de l'intolérance. Celle de voisins gênés par la vue de ces "; étrangers qui abusent de l'hospitalité suisse ". De la peur de l'autre, qui d'en bas regardait son voisinage apeuré. Il a été construit, c'est dommage pour nous qui oeuvrons pour l'ouverture, l'accueil et la tolérance ainsi que pour une autre catégorie de voisins qui elle n'en voulait pas. Ils ont fait une pétition, munie de plus de 1000 signatures, demandant la démolition officielle de ce mur.

Et, par un beau matin de juin, las d'attendre cette hypothétique démolition et furieux d'avoir honte, un petit commando d'amis, une cinquantaine de citoyens courageux, s'est réuni sur place... et a fait tomber ce mur.

Pour la commission et la majorité de la législature précédente, plus de mur donc plus de problème. Mais les choses sont-elles si simples ? Non, pas vraiment. Si le mur a été officieusement démoli, peut-on estimer que les voeux des pétitionnaires sont réalisés ? Pas vraiment. Ils demandent, par un complément à leur pétition, qu'une solution de remplacement soit trouvée, afin de permettre de préserver l'intimité des habitants et des requérants : bacs à fleurs, haie de thuyas ou plantes grimpantes. Nous estimons qu'ils doivent être entendus, pas seulement par les membres de la commission des pétitions et par ce Grand Conseil. Nous voulons que le Conseil d'Etat prenne sa part de responsabilité dans cette problématique et facilite la résolution de ce conflit dont les requérants d'asile ont été les premières victimes - privés de terrasse durant des mois et jusqu'à aujourd'hui.

Renvoyons donc, Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition au Conseil d'Etat, qui saura dans sa grande sagesse intercéder auprès des autorités fédérales afin d'aboutir à une solution digne de notre canton !

Débat

Mme Anita Cuénod (AdG), rapporteuse de minorité. J'ai quelque chose d'important à ajouter, mais je précise que je ne m'exprime, pour l'essentiel, que sur la pétition 1164.

Par souci d'éthique politique et de cohérence, nous ne pouvons nous contenter du dépôt de cette pétition pour information, et encore moins du statu quo consistant à considérer la situation comme étant normalisée.

Ce mur a été détruit par un groupe de citoyens indignés par l'autorisation de sa construction délivrée par les autorités genevoises, et désireux de rendre compte publiquement de leur refus de l'intolérance.

Par souci d'éthique politique et de cohérence, disais-je, nous ne voulons pas d'un mur aux connotations racistes. Nous n'en voulons pas non plus parce que ce Grand Conseil a voté à l'unanimité, le 12 juin dernier, la résolution 339 invitant le Conseil fédéral à intervenir de toute urgence pour exiger l'arrêt des travaux et la démolition de ce mur en construction autour de la terrasse du Centre d'enregistrement des requérants d'asile de La Praille.

Je tiens à remercier Bernard Lescaze de son rapport objectif qui rend parfaitement compte de tous les aspects de cette problématique. Nous divergeons sur la solution apportée à cette triste histoire. Nous estimons, à juste titre, que le Conseil d'Etat doit prendre ses responsabilités et intervenir auprès de l'ODR pour que les conditions de vie des résidents du CERA soient dignes de la ville qui l'abrite.

Nous demandons, bien évidemment, le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité. Il est évident que l'ensemble de la commission a condamné l'édification du mur et s'est félicitée de sa destruction par des moyens divers.

Comme l'a dit la rapporteuse de minorité, peu de chose nous sépare, si ce n'est le bon sens. Ce Grand Conseil doit, hélas, se préoccuper d'objets suscitant un débat du simple fait de leur existence.

La majorité de la commission, considérant qu'il n'y a plus de mur, a estimé que les deux pétitions sont devenues sans objet et qu'il ne convenait pas de débattre d'un objet virtuel.

Le sort des requérants d'asile, qui semble tant préoccuper ceux qui ont suivi le rapport de Mme Cuénod, devrait leur inspirer autre chose que des discussions sur un objet dépassé.

Il est des moments où il faut savoir prendre acte de la situation et aller de l'avant. C'est pour cette raison que la majorité de la commission vous propose le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Mme Mireille Gossauer-Zurcher (S). Le groupe socialiste soutiendra évidemment le rapport de minorité sur la pétition 1164. En effet, le mur n'existe plus, mais la terrasse du CERA, elle, sera fermée à ses pensionnaires.

Les pétitionnaires pour la démolition du mur maintiennent leur pétition pour l'aménagement d'un espace plus convivial et la concrétisation de diverses propositions énoncées dans le rapport.

Tout comme Mme Cuénod, nous pensons que le Conseil d'Etat pourra intervenir auprès des autorités fédérales pour que les requérants d'asile bénéficient de conditions moins carcérales et accèdent à une terrasse arborisée.

Par conséquent, nous demandons le renvoi de la pétition au Conseil d'Etat.

Mme Anita Cuénod (AdG), rapporteuse de minorité. Mme Gossauer a dit l'essentiel. En effet, les pétitionnaires, en guise de suite à leur pétition, ont fourni des indications très précises quant à ce qui pourrait être fait pour remplacer le mur. Ils ont reçu une réponse de l'ODR, réponse que je transmettrai à M. le conseiller d'Etat, pour qu'il constate que la discussion est possible avec l'ODR.

Depuis la construction et la démolition du mur, nous savons, d'après les témoignages de certains résidents proches du CERA, que les requérants d'asile ne peuvent plus se rendre sur la terrasse. Je profite de mon intervention pour demander que la commission des visiteurs officiels se déplace sur les lieux, comme elle l'a fait il y a plusieurs années.

Pétition 1120

Le président. Cette pétition n'ayant plus d'objet, la commission propose de la déposer sur le bureau du Grand Conseil. Je mets aux voix cette proposition.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétitionsur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont rejetées.

Le président. Les conclusions de la commission étant rejetées, que l'un de ceux ayant voté contre le rapport fasse une proposition.

Mme Anita Cuénod (AdG), rapporteuse de minorité. Nous sommes cohérents, Monsieur le président, nous avons voté comme nous l'avons fait en commission. Si, en commission, nous nous sommes opposés au dépôt de la pétition, à titre de renseignement, sur le bureau du Grand Conseil, c'est parce que nous voulions son classement.

Le président. Cette pétition est donc classée.

Pétition 1164

M. Claude Blanc (PDC). Puisque nous sommes obligés de voter en premier sur la proposition la plus éloignée, je propose également le classement de la pétition 1164.

Le président. Monsieur le député, nous avons le choix entre trois propositions. Pour que tout soit clair, je demande à M. le député Lescaze de bien vouloir préciser la proposition de la majorité.

M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité. Je demande le dépôt des deux pétitions sur le bureau du Grand Conseil. Les explications de Mme Cuénod sont exactes : ceux qui ont refusé le dépôt de la pétition 1120 voulaient son classement; ceux qui ont refusé le dépôt de la pétition 1164 voulaient son renvoi au Conseil d'Etat. C'est parfaitement clair. Mais comme beaucoup de gens n'étaient pas dans cette salle lors du vote, les choses sont devenues confuses, parce que seul le second rapport sur la pétition 1164 a fait l'objet d'un rapport de minorité de Mme Cuénod.

Le vote de la minorité est parfaitement cohérent.

Le président. Tout est clair, nous sommes en présence de trois propositions. Je mets aux voix la proposition la plus éloignée, qui est celle de M. Claude Blanc, à savoir le classement de la pétition 1164.

Mis aux voix, le classement de la pétition est rejeté.

Mises aux voix, les conclusions du rapport de minorité (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.

P 1127-B
10. Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : Entrave à l'action pénale. ( -) P1127
 Mémorial 1996 : Renvoi en commission, 5383.
 Mémorial 1997 : Renvoi en commission, 9315.
Rapport de Mme Janine Hagmann (L), commission des pétitions

En date du 17 septembre 1996, Maître Sambuc adressait aux autorités cantonales une pétition P 1127 pour dénoncer une entrave à l'action pénale. Après l'avoir enregistrée, le Grand Conseil la renvoya à l'examen de la commission des pétitions. Cette dernière, sous la présidence de Mme Janine Hagmann, de M. Luc Barthassat puis de Mme Mireille Gossauer-Zurcher, la traita lors de ses séances des 7 et 28 octobre, 4 et 25 novembre 1996, 3 et 24 février, 3 et 10 mars, 12 mai 1997, 19 janvier et 2 mars 1998. La teneur en est la suivante :

PÉTITION

But

1.  Plainte et dénonciation pour entrave à l'action pénale à l'encontre de la police et du Parquet genevois, entrave ayant pour effet de protéger au moins un proxénète d'enfants et un pédophile genevois.

2.  demande de création d'une commission d'enquêtes sur les éventuelles protections ou complaisances au sein de la magistrature et de la police genevoises dont profiteraient certains pédophiles à Genève.

3.  Demande que le Grand Conseil invite le Conseil d'Etat, en vertu des pouvoirs qui lui sont attribués à l'article 124, alinéa 1, de la constitution genevoise, à désigner une personnalité indépendante, choisie en dehors de la magistrature, et qui aura pour mission :

- de prendre connaissance des diverses procédures pénales dont il est fait mention dans le corps de la présente et de ses annexes;

- d'enquêter sur la manière dont elles ont été conduites par la police et le Parquet;

- d'ouvrir et d'instruire toute enquête de polie et judiciaire jugée utile pour établir la vérité.

Commentaires :

Le nombre élevé de séances consacrées par la commission à l'étude de cette pétition montre la complexité de cette requête et la perplexité des députés qui ont voulu exercer le plus consciencieusement possible leur mandat sans toutefois dépasser leurs compétences.

Un premier rapport a été déposé le 15 septembre 1997. Pour faire suite à la demande de tous les chefs de groupe, ce rapport a été renvoyé en commission lors de la séance du Grand Conseil du 4 décembre 1997. Ce renvoi a permis de compléter l'information et a ainsi rassuré les députés.

1. Auditions

Maître Sambuc, pétitionnaire

Maître Sambuc explicite les faits relatés dans la lettre accompagnant la pétition :

1. En date du 25 mars 1995, un inconnu a abordé Roland S., accusé de pédophilie comme chacun le sait, et lui a déclaré :

- qu'il vivait à Genève ;

- qu'il était marié, avait deux enfants mais qu'il était pédophile ;

- qu'Edwin Basas, l'accusateur de Roland S., avait eu des rapports sexuels avec lui, lui avait fourni de jeunes garçons de 14-15 ans et, à sa demande, un garçonnet de 10 ans avec lequel il avait pu jouer au bébé en le langeant, lui talquant les fesses, lui donnant à manger à la petite cuillère, etc. ;

- que ce faisant il avait découvert le summum de la jouissance sexuelle ;

- que toutefois Edwin Basas parlait trop et qu'il était aujourd'hui menacé de chantage ;

- qu'il priait en conséquence Roland S. de l'en débarrasser moyennant 20'000F.

2. Cet événement a fait l'objet d'une note détaillée adressée au Parquet le 11 avril 1995 (voir pièces 1 et 2).

En particulier une description précise de l'individu était donnée à la justice.

3. Ce n'est que le 30 juin 1995 - soit dix semaines plus tard - que Roland S. s'est vu demander incidemment, alors qu'il était entendu par l'inspecteur Lüthy pour une autre affaire, s'il confirmait les faits relatés.

4. Il n'y a eu :

- aucun interrogatoire sérieux de Roland S., interrogatoire qui n'a duré que quelques minutes ;

- aucun portrait-robot dressé ;

- l'inspecteur Lüthy a fait mention d'un total manque d'intérêt pour les faits dénoncés.

5. En date du 21 septembre 1995, le soussigné a directement accusé le Parquet de protéger un proxénète (voir pièce 3). Cette accusation a été protocolée par le juge d'instruction, sans autre réaction.

6. En date du 7 juin 1996, Roland S. a déposé plainte pénale contre l'inspecteur Lüthy (qui travaille à la brigade des moeurs depuis huit ans) et la substitut Cuendet pour entrave à l'action pénale (voir pièce 4 avec annexes 1 à 14).

7. Cette plainte a été classée en date du 11 juillet 1996 par le procureur Bernard Bertossa aux motifs, pour ce qui a trait aux faits visés sous point 1 à 4, que :

"; les recherches utiles ont été requises et effectuées à la suite de votre dénonciation et n'ont pas abouti (PG 1202/95) " (voir pièce 5).

8. Aujourd'hui, le proxénète en question est toujours à Genève où il circule librement sous la protection de diverses associations d'aide... à l'enfance, en particulier celle de Mme Piret.

9. Or, Edwin Basas était déjà proxénète d'enfants à Manille où deux plaintes ont été déposées à son encontre en mars/avril 1993.

Questions

10. Roland S. a été vaguement et brièvement interrogé sur cette affaire, 10 semaines après sa dénonciation.

Aucun portrait-robot n'a été dressé.

Pourquoi ce manque de diligence et cette passivité ?

11. Edwin Basas a-t-il été interrogé? A-t-il été surveillé?

Quelles ont été les enquêtes entreprises pour identifier le pédophile, la victime et sa famille?

Pourquoi la police et le Parquet ne se mobilisent-ils pas alors que les faits relatés sont d'une extrême gravité, les détails donnés précis et permettant d'ouvrir à l'évidence une enquête sérieuse?

Quels sont les pédophiles qui sont protégés ainsi indirectement?

En vous remerciant de l'attention prêtée à la présente et en restant à votre disposition pour une audition, je vous prie de recevoir, Monsieur le président et Mesdames et Messieurs, mes salutations respectueuses.

 Henri-Philippe Sambuc

 11, avenue Antoinette

 1234 Vessy

. .

Mme Piret, donne quelques éléments de l'histoire de ce dossier. Impliquée d'une façon indirecte dès 1989, elle devient active dès 1989 en reconnaissant Edwin B. et en remettant à la police les déclarations protocolées de ce dernier faites au consulat des Philippines. Edwin lui est même confié momentanément. Elle s'est efforcée de l'aider dans la mesure de ses moyens, notamment en lui faisant prendre des cours de français jusqu'à son placement par la Protection de la Jeunesse dans un foyer qu'il quittera âgé de 21 ans.

Elle connaît l'endroit où habite le jeune homme mais pas ses moyens d'existence. Elle signale que la plainte pénale déposée contre elle par Maître Sambuc pour faux témoignage a été classée.

M. Urs Rechsteiner, chef de la police de sûreté, MM. André Fontaine, Christian Lüthy et Jean-Dominique Peillex, inspecteurs de la brigade des moeurs

M. Rechsteiner déclare que pas moins de huit personnes de la brigade des moeurs ont travaillé sur ce dossier, principalement l'inspecteur Lüthy. Les agents présents ont été déliés de leur secret de fonction par le département pour répondre aux députés. Il rappelle que c'est bien parce que les autorités judiciaires argoviennes ne sont pas entrées en matière sur le dossier Roland S. que Genève a insisté pour qu'il soit traité dans notre canton. Tant la police que la justice ont déployé beaucoup d'énergie pour faire aboutir ce dossier.

L'inspecteur Lüthy explique que, dans le canton d'Argovie, Roland S. était soupçonné de trafic d'enfants, mais il n'y a pas eu de suite. Roland S. a admis au cours du procès avoir fait venir des enfants des Philippines. La police et un juge d'instruction se sont rendus à Manille pour recueillir des éléments qui ont confirmé les faits le concernant.

En ce qui concerne la dénonciation de Roland S. suite à sa rencontre avec le pédophile genevois, l'inspecteur Lüthy explique qu'il a fallu attendre quelques semaines pour interpeller B. qui vit à gauche et à droite pour avoir son point de vue. La police n'a pas pu identifier la personne que Roland S. dit avoir vue à la Servette.

Quant à Edwin B., il vit dans un hôtel de la ville, n'a pas de métier, craint les convocations et a peur d'être confronté à Roland S. Son autorisation de séjour est basée sur l'affaire judiciaire et les recours qu'elle a entraînés.

Le chef de la police, M. Rechsteiner, explique à la commission que la police n'a pas d'éléments pertinents pour traiter Edwin B. de proxénète... La police l'a fait suivre, mais n'a constaté ni prostitution, ni proxénétisme. Au sujet des plaintes de Manille notamment, il se demande pourquoi tant d'éléments parviennent après le procès. A son tour, l'inspecteur Fontaine déclare qu'aucune plainte n'est arrivée à la brigade des moeurs concernant Edwin B., il n'a jamais été vu avec des enfants. D'autre part, dit-il, les plaintes avérées parviendraient normalement par un courrier officiel tel qu'Interpol (ou par voie diplomatique). Il déclare que la brigade serait prête à enquêter sur un réseau de pédophiles, mais elle n'a pas d'indices. Une fois encore, il confirme qu'il n'y a pas d'éléments concrets qui permettent d'enquêter plus avant quant à cette pétition.

L'inspecteur Peillex déclare qu'Edwin B. vit avec une prostituée et pour répondre à une question, il fait remarquer que la prostitution n'est pas un délit, que c'est une profession pour laquelle on peut obtenir un certificat de bonne vie et moeurs.

M. .

Le procureur rappelle que la lutte contre la criminalité en matière sexuelle a été renforcée ces dernières années à Genève. Ne désirant pas violer la Constitution en dérogeant au principe de la séparation des pouvoirs, il ne répondra qu'aux questions touchant d'une manière générale les procédures ou la politique du Parquet à l'égard de la criminalité sexuelle, mais n'évoquera pas ce qui a été fait ou non par ses services. Il trouverait anormal que le Grand Conseil entre en matière sur cette pétition, car le pouvoir législatif n'a pas la compétence de traiter des verdicts. Les différents pouvoirs sont réglés par la Constitution et le Grand Conseil n'a pas la compétence de contrôler le travail de la justice. Ce contrôle ne peut se faire que lors de l'élection des juges, de l'établissement de nouvelles lois ou encore par le biais du budget.

En ce qui concerne le système de l'enquête parlementaire, c'est au Grand Conseil d'apprécier ses possibilités et ses limites. Mais on ne pourra jamais demander aux juges de répondre à des questions touchant une affaire particulière. Le contrôle se fait par les autorités de recours et par le Conseil supérieur de la magistrature. Celui-ci a d'ailleurs été saisi.

Toute rumeur ou toute dénonciation ne mérite pas une pétition ni une enquête parlementaire.

Il est impossible d'être tout à fait sûr que tout a été fait pour découvrir la vérité (car il est évident que les juges pourraient se couvrir mutuellement). L'unique garantie est la confiance dans le fonctionnement de la justice.

Une rumeur ne suffit pas à ouvrir une enquête, sans cela on ne s'en sortirait plus. Mais on ne peut soupçonner tout le monde d'être pédophile, voleur, escroc, ou corrompu.

M. Bertossa comprend bien le dilemme dans lequel se trouve la commission. Après l'affaire Dutroux, le législatif ne veut prendre aucun risque dans une histoire de pédophiles.

Deuxième audition de Maître Sambuc

Après avoir reçu une note de dossier signée par M. U. Rechsteiner le 24 janvier 97 confirmant les recherches de deux inspecteurs genevois à Manille, qui n'ont pas pu prouver l'authenticité des pièces remises au dossier par le pétitionnaire, la commission a désiré redonner la parole à Maître Sambuc.

Ce dernier attend une attestation des plaintes déposées contre B. à Manille et les transmettra à la commission dès réception. ( Elles parviendront en effet en avril mais leur authenticité ne peut être prouvée).

Le pétitionnaire annonce qu'il est l'objet d'une plainte émanant du procureur devant la commission du barreau.

Comme annoncé en préambule, la commission des pétitions, composée en grande partie de députés nouvellement élus, a été saisie à nouveau de la pétition P 1127 pour obtenir un complément d'informations. Elle a alors auditionné :

M. Pierre Heyer, juge à la Cour de justice et Mme Isabelle Cuendet, juge au Tribunal de première instance.

Mme Cuendet n'a pas obtenu la levée du secret de fonction. Elle n'est par conséquent autorisée à parler que de ce qui s'est dit lors du procès public à la Cour d'assises. Le procès de Roland S. a eu lieu après une très longue procédure. Roland S. a été condamné à 5 ans de réclusion. Maître Sambuc a maintenant épuisé toutes les voies de recours, le Tribunal fédéral ayant débouté Roland S. lors du recours en révision du procès. Mme Cuendet tient à rassurer les députés.

La politique générale du Parquet en matière de criminalité sexuelle s'est fortement développée ces dernières années. Deux substituts ont été spécialement chargés de ce type d'affaires. Des réunions fréquentes ont eu lieu avec des spécialistes, ce qui a permis aux magistrats de mieux connaître ces problèmes. Des rencontres ont été organisées avec le service de Protection de la Jeunesse, avec des organisations spécialisées dans la protection des femmes et des enfants. Cela a été très utile puisque les dénonciations sont devenues beaucoup plus fréquentes. Les deux substituts sont maintenant bien connus des services qui s'occupent de la criminalité sexuelle. De plus en plus d'affaires ont été traitées et de nombreuses procédures ont été menées à terme. Si les députés ont l'impression que rien n'est entrepris, c'est peut-être parce que plusieurs affaires ont été jugées à huis clos sur demande des victimes. Le procureur général est en train de mettre au point un protocole d'intervention dans les affaires de criminalité sexuelle. La police a été informée et travaille avec les autres cantons. Le service de Protection de la Jeunesse a aussi des contacts réguliers avec le Parquet. Jamais il n'a été question de couvrir quoi que ce soit. C'est pour toutes ces raisons que Mme Cuendet a beaucoup de peine à comprendre les accusations de laxisme formulées à l'égard de la Justice.

M. Heyer a obtenu cette levée du secret de fonction et cela parce qu'il était président du Conseil supérieur de la magistrature l'année dernière, lorsque cette affaire a été traitée par le CSM.

Le CSM a eu vent de cette affaire lorsque M. Ramseyer en a parlé lors d'une séance. Ce dernier avait reçu une lettre de Me Sambuc qui se plaignait de M. Bertossa et l'accusait de couvrir une affaire de pédophilie. Me Sambuc n'avait pas encore saisi le CSM. M. Heyer lui a alors écrit une lettre dans laquelle il demandait tous les éléments de l'affaire. Le CSM a alors reçu la pétition, ainsi que la correspondance entre Me Sambuc et M. Ramseyer. M. Heyer a rencontré l'avocat en octobre 1996. Me Sambuc lui a affirmé qu'il avait l'intime conviction que l'attitude du procureur général n'était pas claire. Me Sambuc a alors raconté que son épouse avait parlé avec une avocate qui s'était entretenue avec un psychologue genevois qui aurait affirmé traiter des magistrats pour pédophilie. Me Sambuc a donné le nom de cette avocate. Celle-ci a confirmé son entretien avec le psychologue. Elle aussi a donné le nom de ce dernier. M. Heyer a ainsi pu remonter la chaîne pour le bien de l'enquête. Le psychologue a confirmé la discussion qu'il a eue avec cette avocate. Mais il a nié avoir dit qu'il soignait des magistrats pour pédophilie. Il n'en soigne pas et n'en a jamais soigné. Ce qu'il a dit à l'avocate, c'est qu'il courait depuis longtemps des rumeurs dans le milieu des psychiatres genevois comme quoi il y aurait à Genève un réseau de pédophiles juges- avocats . Il n'y a donc strictement rien de concret, aucun élément de preuve ou même de suspicion qui permette d'apporter le moindre crédit à ces accusations.

A la suite de la discussion qu'il a eue avec l'avocate et le psychologue, M. Heyer a écrit à Me Sambuc qu'aucun élément ne pouvait justifier d'aller plus loin, sauf si des faits nouveaux lui étaient communiqués. A partir de ce jour, M. Heyer n'a plus jamais entendu parler de Me Sambuc. Il tient encore à préciser qu'en 26 ans au Palais de justice, il n'a jamais entendu de rumeurs de ce type. De plus, il est totalement faux de croire que la justice est laxiste en matière de criminalité sexuelle. Elle ne l'a jamais été et l'est encore moins depuis l'arrivée de M. Bertossa. Des procédures ont été mises en place pour protéger les enfants et les femmes sur le plan de leur intégrité sexuelle. Il ne croit pas une seconde au laxisme du Parquet dans ce domaine. M. Heyer n'a jamais rencontré une personne au Palais de justice qui ne voulait pas aller au fond des choses dans une affaire de ce type. Cela ne signifie pas que c'est impossible, mais rien, absolument rien ne l'indique. Enfin, il rappelle que les magistrats ont prêté serment et sont intègres.

M. Heyer estime que Me Sambuc a fait des extrapolations extraordinaires. Il n'a pas réussi à prendre la distance que tout avocat doit prendre lorsqu'il défend un client. Il ne faut pas oublier que toute cette affaire a été mise en route par une seule personne.

2. Discussion et vote

Les députés de la commission des pétitions sont tous conscients qu'ils ne doivent pas transgresser le principe de la séparation des pouvoirs. Le Grand Conseil n'a pas la compétence de contrôler le travail du pouvoir judiciaire, encore moins de se transformer en tribunal.

L'étude de cette pétition, déposée la même année que l'affaire Dutroux en Belgique, a créé un sentiment de perplexité. Jusqu'où donner de la crédibilité à des rumeurs, contribuer à faire enterrer des affaires de criminalité sexuelle envers des enfants, entrer peut-être dans le jeu d'un avocat qui s'est énormément investi dans une affaire qui lui tenait à coeur mais dont il n'a pas réussi à prendre la distance nécessaire ?

Il a été difficile de prendre position . Le sujet a été traité avec bon sens et conscience, chacun ayant une perception nuancée de la gravité des actes évoqués dans cette pétition. La difficulté à clarifier les objectifs de cette pétition a même créé un malaise au sein de la commission. Il a fallu l'audition de M. Heyer et de Mme Cuendet pour rassurer les commissaires. Ces derniers pensent que Maître Sambuc s'est servi de son droit de pétition pour tenter de faire contrôler le travail de la justice par le parlement. Les députés ne veulent pas entrer dans cette problématique. Ils savent que la commission des pétitions ne figure pas en qualité d'organe de contrôle du Pouvoir judiciaire.

C'est pourquoi, à l'unanimité des membres présents lors du vote de la séance du 19 janvier 1998, les commissaires de la commission des pétitions vous recommandent, Mesdames et Messieurs les députés, le dépôt de la P 1127 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.

 

RD 297
11. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur l'exercice 1996 de la Fondation de droit public pour la construction et l'exploitation de parcs de stationnement. ( )RD297

Nous avons l'honneur de vous communiquer, avec le présent rapport établi conformément à l'article 6 de la loi du 23 octobre 1968 concernant la fondation de droit public pour la construction et l'exploitation de parcs de stationnement (Fondation des Parkings), le rapport de gestion et les comptes la Fondation pour l'exercice 1996. Ils comprennent les comptes de chacun des parkings gérés par la Fondation.

Ces documents présentent de manière très complète l'ensemble des informations relatives aux activités de la fondation, établissement public autonome chargé de construire et d'exploiter des parkings dans le cadre de la politique des transports arrêtée par les autorités.

Le Conseil d'Etat a approuvé le bilan, les comptes et le rapport de gestion de la Fondation des parkings du 17 juin 1997, dans sa séance du 2 mars 1998.

L'année 1996 a été marquée par un événement particulier qui témoigne du dynamisme de la Fondation et de son efficacité: l'ouverture après un chantier de 3 ans du parking de Saint-Antoine/Vieille-Ville et de son site archéologique, le 1er avril 1996. Ce parking a d'ailleurs le prix européen du parking 1997 décerné par l'Association européenne des parkings (EPA).

Parkings d'échange P+R

Onze parkings, représentant plus de mille places, sont destinées aux pendulaires qui peuvent stationner leur véhicule aux portes de Genève et poursuivre leur route avec les transports en commun grâce à un abonnement combiné parking-TPG pour une somme modique.

Pour la prochaine décennie, quelque 8'000 places P+R devraient être mises à disposition afin de faciliter l'accès au centre ville. D'ailleurs, en 1997, la Fondation a déposé deux demandes préalables d'autorisation de construire pour les parkings P+R Bachet de Pesay (500 places) et P+R Genève-Plage (650 places).

De plus, l'autorisation définitive de construire a été obtenue pour le parking P+R Etoile aux Acacias (600 places) qui fait l'objet d'une demande de droit de superficie auprès de la commune de Carouge et du Grand Conseil.

D'autres projets sont à l'étude ou en attente de règlement politique (Palettes 250, Sous-Moulin 550, Frontenex 770, Sécheron 800).

Parkings habitants

Sept parkings, représentant près de deux mille places, sont destinées aux habitants de quartiers peu favorisés dans ce domaine (Pâquis, Saint-Jean, Onex)

Parkings publics

La Fondation possède et gère trois parkings publics qui outre celui de Saint-Antoine, sont liés aux activités de Palexpo et de l'Arena, représentant quelque 2'850 places.

La Fondation gère pour le compte de l'Etat de Genève 7 parkings publics représentant environ 2'220 places.

La Fondation gère le parking de Cornavin (900 places) ainsi que la galerie commerciale (3'000 m2) qui lui est liée pour le compte de la société Parking de la Place de Cornavin SA.

De plus, la Fondation des Parkings est actionnaire, d'une part, du parking de Plainpalais (37.5 %) et, d'autre part, du parking de Cornavin (45 %).

En outre, soucieuse de la problématique du stationnement au centre-ville, la Fondation a mis en place un système d'information pour tous les parkings publics de Genève indiquant aux automobilistes les places libres dans les parkings.

Financement

Soucieuse de ses deniers, la Fondation a proposé au Conseil d'Etat de garantir les emprunts hypothécaires (Fr. 40'000'000.-) que la Fondation a contractés pour la construction de divers parkings P+R, habitants ou publics. Cette garantie a été acceptée par le Grand Conseil à la fin de l'année 1997.

Cette garantie, qui permet une économie substantielle sur les intérêts à payer, ne permet cependant pas à la Fondation de construire et d'exploiter les différents projets de parkings P+R prévus ces prochaines années. D'autres ressources devront y être affectées, à l'exemple des recettes des macarons destiné à faciliter le parcage des habitants dans les quartiers urbains selon la décision du Grand Conseil. prise en 1997.

A la fin de l'année 1996, la Fondation possédait une réserve financière lui permettant de faire face à tous ses engagements, mais malheureusement pas aux investissements futurs.

Le Conseil d'Etat a engagé une réflexion à ce propos et aura l'occasion de soumettre des propositions au Grand Conseil soit au travers du financement des parkings P+R soit au travers d'une dotation budgétaire annuelle pour la Fondation.

Au bénéfice de ces explications, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à prendre acte du présent rapport.

Débat

M. Rémy Pagani (AdG). De notre lecture du rapport, il ressort que les fonds sont relativement équilibrés. En revanche, nous trouvons quelque peu pernicieuse la logique qui prévaut à la dynamique et à la politique de cette fondation. Nous l'avons dénoncée. Cette fondation a pour objectif de faciliter l'implantation de parkings au centre-ville, ce qui signifie l'engorger davantage, susciter des embouteillages, augmenter les nuisances de toutes sortes, notamment sonores et atmosphériques.

Une voix. Tu y vas bien en voiture !

M. Rémy Pagani. En principe, j'utilise mon vélo ! A notre avis, l'ensemble de la politique de cette fondation doit être révisée. Par conséquent, nous n'acceptons pas sa recapitalisation pour lui donner un blanc-seing. C'est pourquoi, et pas plus tard que tout à l'heure, nous avons sollicité du Conseil d'Etat des budgets d'affectation objet par objet. Nous tenions à préciser la position de notre groupe afin qu'elle figure dans le Mémorial.

M. John Dupraz (R). Il est intéressant d'entendre M. Pagani à propos de ces parkings. Il est vrai qu'il a une tête à pédaler ! D'autre part, je crois savoir que M. Grobet s'est battu pendant dix ans pour faire construire le parking de la promenade Saint-Antoine, lequel est particulièrement bien situé. Il n'engorge pas le centre-ville, il permet d'accéder à la Vieille-Ville tout en l'ayant débarrassée de ses voitures. Il a encore libéré la promenade Saint-Antoine. C'est là le fait d'une politique intelligente !

Par dogme, vous êtes contre la voiture, Monsieur Pagani. C'est entendu, mais nous, nous approuvons ce rapport.

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur Dupraz, vous pourriez vous abstenir de faire des observations parfaitement désagréables à l'égard d'un collègue député. Essayez de vous dominer un peu sur le plan des remarques personnelles ! (Protestation de M. John Dupraz.) Monsieur Dupraz, je n'ai pas pour habitude d'adopter le ton de vos interventions, lequel vous est coutumier en fin de soirée.

Cela dit, le parking de Saint-Antoine avait été considéré, à un certain moment, comme le dernier à devoir être construit en bordure de la petite ceinture... (Interruption de M. Claude Blanc.) A chacun son interprétation devant l'Histoire et devant le Bon Dieu, Monsieur Blanc ! Toujours est-il qu'il avait même été suggéré - il est vrai que vous n'en vouliez pas - que ce parking de Saint-Antoine constituât un contre-projet au projet, balayé par le peuple, de parking à l'Alhambra.

Vous avez raison, Monsieur Dupraz, le parking de Saint-Antoine est bien situé, mais il ne justifie pas l'implantation d'autres parkings au centre-ville. N'étant pas contre la voiture, comme vous le prétendez, notre priorité actuelle est de favoriser la construction de parkings à l'entrée de la ville, sur les axes des transports publics, conformément à la décision prise par le Conseil d'Etat, il y a huit ans.

Le parking des Acacias est attendu avec impatience. M. Ramseyer nous a dit, tout à l'heure, que ce projet avait été bloqué par le gouvernement monocolore pendant quatre ans... (M. Gérard Ramseyer secoue la tête.) Vous avez beau secouer la tête, Monsieur Ramseyer, il n'empêche que vous êtes gêné parce que vous n'avez pas réussi à nous expliquer pourquoi ce parking n'a pas été réalisé. Je rappelle que l'autorisation de construire a été délivrée alors que j'étais encore au département des travaux publics. Que vous le reconnaissiez ou pas, ce dossier a été mis dans un tiroir, comme celui des Teppes de Biolay et d'autres encore. Heureusement, grâce au nouveau Conseil d'Etat, ils refont surface.

L'intervention de M. Pagani est parfaitement pertinente dans le sens que le Conseil d'Etat doit présenter un crédit ad hoc à ce Grand Conseil pour chaque ouvrage, comme c'était le cas antérieurement pour les parkings d'échange.

Monsieur le président, vu l'importance de cet objet, je demande, au nom de notre groupe, que le rapport du Conseil d'Etat, conformément à l'usage, soit renvoyé devant la commission des transports... (L'orateur est interrompu.) Cela vous gêne ? L'avis de la commission des transports ne vous importe-t-il donc pas ? La dernière fois, nous avons obtenu des explications fort intéressantes de la part de M. Borel, directeur de la fondation.

Plutôt que d'allonger ce débat, je vous suggère, Monsieur le président, de mettre aux voix le renvoi de ce rapport en commission des transports.

Le président. Dès maintenant, le débat porte uniquement sur cette proposition de renvoi en commission.

Mme Liliane Charrière Debelle (S). Nous pouvons discuter du renvoi en commission, mais je tiens à dire que ce rapport a un goût de réchauffé. Il s'en tient à 1996. Dès lors, si ce renvoi est accepté, que l'on débatte en commission de ce qui s'est passé l'an dernier et non de ce qui est terminé depuis fort longtemps.

Ce rapport parle de l'inauguration du parking de Saint-Antoine en avril 1996. Depuis, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts. Si jamais la commission des transports devait s'attaquer à ce rapport, elle devrait se pencher sur la situation en 1997. Elle serait plus au goût du jour.

M. Rémy Pagani (AdG). Je soutiens le renvoi en commission des transports. Ainsi, nous saurons ce qui s'est passé en 1997 et pourrons, si besoin est, orienter la politique de la fondation dans une autre direction.

Parallèlement à ce soutien, je demande la communication du rapport 1998 qui doit être également établi.

M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. Je voudrais juste rectifier une erreur, à l'intention de M. Pagani. La politique des parkings n'est pas le fait de la fondation. Elle est celui du Conseil d'Etat et notamment celui d'une délégation du Conseil d'Etat à l'aménagement, à l'environnement et aux transports, composée de moi-même, qui la préside, de M. Moutinot et de M. Cramer.

La politique de stationnement, qui comprend les parkings, a été plébiscitée ici même, par ce Grand Conseil. Il n'y a donc pas péril en la demeure !

Pour vous rassurer pleinement, je rappelle que la priorité de nos travaux va aux «Park and ride», les parkings de périphérie et d'échange.

Un renvoi en commission constituerait une manière de bloquer nos travaux, je suis navré de le dire ! Vous aimeriez que l'on parle, en été 1998, d'un rapport qui porte sur 1996 et qui n'est revenu de l'ICF qu'en décembre 1997 ! Entre-temps, nous avons avancé ensemble. La commission des transports a déjà examiné la situation de 1997. Alors pourquoi ressortir un document de 1996 ? C'est de l'obstruction pure et simple, et je ne l'accepte pas !

M. Christian Grobet (AdG). Les propos de M. Ramseyer sont inadmissibles. On diffère délibérément la présentation d'un rapport devant le Grand Conseil que l'on prétend ensuite sans intérêt parce que trop tardif !

Continuez sur cette voie, Monsieur Ramseyer, et présentez-nous le rapport 1997 dans dix-huit mois pour que nous n'ayons plus rien à dire ! Ce n'est pas normal de retarder la communication des rapports pour déclarer ensuite qu'ils n'ont plus d'intérêt.

M. Claude Blanc (PDC). M. Grobet dépasse les bornes ! Il accuse le Conseil d'Etat d'avoir retardé la présentation de ce rapport pour que nous ne puissions plus en parler, alors que lui, au Conseil d'Etat, a trompé le Grand Conseil pendant douze ans en ne lui présentant pas des suppléments de crédits dont le Grand Conseil n'a eu connaissance que quatre ans après son départ.

Vous reprochez au Conseil d'Etat le centième de ce que vous avez fait. Dès lors, vous pouvez vous rasseoir et vous taire, car le moment est malvenu de vous mettre en évidence ! (Applaudissements.)

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce rapport à la commission des transports est rejetée.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

 

PL 7825
12. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi générale sur les contributions publiques (impôt sur les bénéfices et gains immobiliers - poursuite en réalisation de gage) (Défense de payer et séquestre) (D 3 05). ( )PL7825

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit :

Art. 81, al. 4 (nouveau)

4 L'alinéa 3, lettre a de la présente disposition ne s'applique pas lors de l'aliénation d'un immeuble intervenant dans le cadre d'une poursuite en réalisation de gage intentée contre une personne morale.

Art. 82, al. 9 (nouveau) Immeuble figurant dans les comptes

9 Lorsque l'immeuble appartient à une personne morale ou à une personne physique astreinte à tenir des livres dans les comptes de laquelle il figure, le bénéfice ou gain imposable correspond à la différence entre la valeur d'aliénation et le montant pour lequel l'immeuble figure dans les comptes. Les alinéas 2 à 5 et 8 de la présente disposition ne s'appliquent pas.

Art. 86 A, al. 5 (nouveau)

5 Lorsque l'aliénation de l'immeuble intervient dans le cadre de la poursuite en réalisation de gage intentée contre une personne morale, la somme à consigner correspond à la partie du bénéfice résultant de l'opération multipliée par le taux maximum de l'impôt sur le bénéfice de la personne morale, compte tenu des centimes additionnels cantonaux et communaux.

Art. 371 A, al. 1, lettre b (nouvelle teneur)

 al. 2 (nouvelle teneur)

b) exiger des sûretés en tout temps et même avant que le montant de l'impôt ne soit fixé par une décision entrée en force. La demande de sûreté indique le montant à garantir; elle est immédiatement exécutoire. Dans la procédure de poursuite, elle produit les mêmes effets qu'un jugement exécutoire. La demande de sûretés est assimilée à l'ordonnance de séquestre, au sens de l'article 274 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite. Le séquestre est opéré par l'office des poursuites compétent.

2 L'opposition à l'ordonnance de séquestre, prévue à l'article 278 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite est irrecevable.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Les sociétés anonymes propriétaires d'un immeuble ont, en raison des règles légales régissant la tenue de leur comptabilité, constitué d'importantes réserves latentes sur ce type d'actifs qui ne sont imposées qu'à l'occasion de l'aliénation de ces biens ou en toute fin d'exploitation lorsque la société est liquidée.

La pratique fiscale qui autorise l'amortissement des immeubles à usage commercial, à l'exclusion des immeubles d'habitation ou de bureaux, favorise encore la constitution de telles réserves. La valeur réelle de ces sociétés n'apparaît ainsi plus à la lecture de leur bilan. Les Administrations fiscales s'accommodent de ce principe sachant bien que dans le cours ordinaire des choses, les plus-values constituées pendant la vie de la société seront taxées lors de l'aliénation de l'immeuble, au plus tard lors de la liquidation de la société.

Dans les faits, la liquidation forcée des sociétés anonymes et plus particulièrement des sociétés dites immobilières a posé et pose problème sur le plan fiscal. Plutôt que de faire liquider la société par la voie de faillite, étant donné que, dans ce cas, la créance d'impôt représente une dette de masse qui doit être intégralement payée avant toute distribution aux créanciers (ATF 122 III 246 ss), les principaux établissements de crédit de la place recouvrent leurs créances au moyen de la procédure de poursuite en réalisation de gage. Propriétaires des cédules hypothécaires grevant l'immeuble de leur débiteur, ils exigent la réalisation de leur gage sans requérir la faillite de la société.

Sous déduction des frais de réalisation, le produit net de la vente de l'immeuble est ainsi distribué au créancier gagiste jusqu'à concurrence de ses créances, intérêts et frais de poursuite compris. La société toujours en activité ne déclare le bénéfice en capital résultant de la vente de l'immeuble que l'année suivante tant et si bien que l'Administration fiscale se retrouve en face d'une coquille vide qui n'a plus la moindre liquidité pour s'acquitter de sa dette d'impôt. Seule demeure dès lors la possibilité pour le fisc d'actionner en responsabilité l'administrateur de la société, ce qui suppose d'une part une procédure judiciaire et, d'autre part, la solvabilité de l'administrateur.

D'autres cantons confrontés au même problème ont réagi. Trois cantons, soit ceux de Zurich, du Tessin et de Vaud imposent les bénéfices de liquidation au terme de la procédure de poursuite et font valoir leurs créances au titre de frais de réalisation de gage. Contestée, cette façon de faire a été admise par le Tribunal fédéral dans un arrêt du 6 juin 1996 en matière d'impôts zurichois.

Actuellement, aucune disposition de la loi fiscale genevoise n'autorise semblable imposition. C'est la raison pour laquelle le présent projet modifie la loi générale sur les contributions publiques afin de permettre à l'Administration fiscale d'appréhender directement les plus-values résultant de l'aliénation d'un actif au stade de la réalisation du gage.

Techniquement, cette modification suppose la suppression de la clause d'exonération de l'impôt sur les bénéfices et gains immobiliers (IBGI) lors de ventes forcées aboutissant à une insuffisance de gage pour les créanciers gagistes (art. 81 al. 3 lettre a de la loi générale sur les contributions publiques - LCP).

De même convient-il de compléter l'article 86 A LCP (consignation et sûretés) par un cinquième alinéa précisant l'obligation de consigner un montant correspondant à l'impôt cantonal sur le bénéfice de la personne morale, calculé au taux maximum (compte tenu des centimes additionnels cantonaux et communaux).

Il y a lieu, enfin, de corriger une imprécision relative à la définition du bénéfice imposable (art. 82 LCP) lorsque l'immeuble aliéné appartenait à une personne morale ou à une personne physique astreinte à tenir des livres, dans les comptes desquels il figure. En pareil cas, la définition du bénéfice telle que ressortant des alinéas 1 à 5 de l'article 82 LCP n'est pas pertinente et il convient de la faire figurer dans un nouvel alinéa 9.

Le présent projet de loi propose en outre une modification de l'article 371 A (défense de payer et séquestre).

La loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD) prévoit que l'Administration cantonale de l'impôt fédéral direct peut, au moyen d'une demande de sûretés, exiger d'un contribuable, qui n'a pas de domicile en Suisse ou qui met en péril une créance d'impôts, des sûretés (art. 169 al. 1). En outre, la LIFD contient quelques règles qui dérogent à la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP); c'est ainsi, notamment, qu'elle assimile la demande de sûretés à une ordonnance de séquestre (art. 171 al. 1) et qu'elle permet à l'Administration cantonale de l'impôt fédéral direct de rendre une ordonnance de séquestre, contrairement à ce qui est prévu dans la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite où le juge est seul compétent en pareil cas (art. 272 LP).

Cependant, conformément aux règles de la LP qui, pour le surplus, sont applicables, cette ordonnance de séquestre, à elle seule, ne déploie aucun effet. Elle doit être validée par une poursuite ou une action en justice (art. 279 al. 1 LP). Et, dans l'hypothèse d'une poursuite, le contribuable-débiteur peut faire opposition ce qui a pour conséquence que le créancier, qui veut requérir la continuation de la poursuite, doit obtenir la mainlevée de l'opposition (art. 80 et ss. LP).

Et, pour obtenir du juge la mainlevée définitive de l'opposition, le créancier doit être au bénéfice d'un jugement exécutoire (art. 80 al. 1 LP). A cet égard, il est important de noter que l'art. 169 al. 1, 3ème phrase, LIFD, assimile la demande de sûretés à un jugement exécutoire, ainsi que l'autorise l'art. 80 al. 2 ch. 2 LP.

De son côté, l'art. 78 LHID octroie aux cantons la faculté d'adopter des dispositions analogues à celles contenues dans la LIFD de même que l'art. 80 al. 2 ch. 3 LP autorise les cantons à prévoir, dans leur législation, que leurs décisions, relatives à des obligations de droit public, sont assimilées à des jugements exécutoires.

Bon nombre de cantons (FR, VD, NE, VS, ZH, BE, BL, notamment) ont fait usage des facultés accordées par la législation fédérale. Genève fait exception à la règle en ne prévoyant en particulier pas, dans sa législation, l'assimilation de la demande de sûretés à un jugement exécutoire. Ce qui a pour conséquence de rendre inefficace et donc inutilisable l'actuel art. 371 A al. 1, lettre b, LCP.

On comprendra, dans ces conditions, l'importance que revêt la modification de l'art. 371 A LCP, en particulier de la lettre b de l'alinéa 1, en conformité avec les art. 169 LIFD et 80 al. 2 ch. 3 LP. A ce stade, il convient de préciser qu'aucune voie de droit ordinaire n'est ouverte contre la demande de sûretés fondée sur l'art. 371 A, al. 1, lettre b, LCP qui ne peut faire l'objet que d'un recours de droit public au Tribunal fédéral, au sens des art. 83 et ss. de la loi fédérale d'organisation judiciaire.

Quant à la modification de l'alinéa 2 de l'art. 371 A LCP, elle consiste simplement en une adaptation du texte à la nouvelle loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, entrée en vigueur le ler janvier 1997, qui parle désormais de l'opposition à l'ordonnance de séquestre (art. 278 LP).

Au bénéfice de ces explications, nous vous remercions d'ores et déjà de bien vouloir réserver un bon accueil à ce projet de loi.

Préconsultation

M. Pierre Froidevaux (R). La créativité de notre administration fiscale doit réjouir tous nos citoyens. Auparavant, il fallait gagner quelque chose pour payer des impôts. Depuis quelques années, on en paie déjà en ne consommant qu'un petit rien. Grâce à notre exécutif pluriel, on pourra payer des impôts en perdant de l'argent. Quel bel exemple de solidarité fiscale ! Même ceux qui n'ont plus que des dettes «raqueront» comme les riches. Telle est la philosophie de ce beau projet de loi !

Pourtant les pauvres ne peuvent pas payer, même avec la gauche au pouvoir. Alors, on va demander à celui qui a fait confiance au quidam devenu failli de payer les impôts du pauvre. C'est donc aux banques de payer.

Monsieur le président, votre exécutif serait-il en rogne contre elles ? A-t-il besoin d'exprimer un quelconque sentiment de vengeance ? Mais qui paiera, en définitive, ces fameux impôts si ce n'est le très modeste contribuable, client des banques genevoises ?

Les banques risquent de répercuter leurs hausses de charges sur ce client. Et ce sera à nouveau la classe moyenne qui sera pressurisée, tandis que le riche continuera à s'affranchir en trouvant d'autres places financières pour placer ses gains.

M. Claude Blanc. Pressurée et non pressurisée !

M. Pierre Froidevaux. Vous avez raison, Monsieur Blanc !

Une voix. C'est chez toi qu'on est pressurisé !

M. Pierre Froidevaux. La philosophie de ce projet de loi est pernicieuse. Elle me fait penser à un personnage de bande dessinée, appelé Isnogood, qui a passé sa vie à vouloir être vizir à la place du vizir, en inventant sans cesse des impôts plus farfelus les uns que les autres. Nous sommes pourtant dans un monde plus réel que celui, imaginaire, d'une fiction dessinée. Ce projet n'aboutira pas tant il heurte les principes élémentaires du droit.

A l'occasion d'une vente forcée, les gages détenus par la banque sont imprescriptibles selon le droit civil fédéral. Personne ne peut penser pouvoir détenir ces droits, si ce n'est le créancier gagiste. Il n'existe qu'une seule exception : un bien immobilier grevé d'hypothèques légales. Or les hypothèques légales relèvent du droit civil toujours supérieur au droit fiscal.

Je ne vois pas comment le Tribunal fédéral pourrait suivre les auteurs de ce projet de loi tant ils dénaturent les liens économiques dont la stabilité est garantie par une loi remontant au 11 avril 1889.

La philosophie de ce projet de loi est véritablement antiéconomique et donc franchement asociale.

Aujourd'hui, le pouvoir économique échappe chaque jour davantage au pouvoir politique. Plus l'économie s'affranchit de notre pouvoir, plus elle nous abandonne des charges sociales. Nous ne pouvons trouver d'autre issue, pour assurer la cohésion de la société, que de retrouver le plein emploi en favorisant nos outils de production par une révision de la fiscalité des entreprises.

Notre seule voie de salut est de rendre notre fiscalité attractive aux investisseurs qui, actuellement, s'éloignent de nous pour aller sur les marchés mondiaux. C'est cette révision que nous attendons tous.

Auparavant, l'Etat lançait son filet fiscal sur nos concitoyens et ramenait de beaux poissons. A force de toujours les pêcher au même endroit, il n'en a plus attrapé. Ne restent que les vieux qui ne peuvent nager bien loin...

Une voix. Grobet !

M. Pierre Froidevaux. Examinant leurs carcasses, l'administration fiscale leur trouve de beaux restes. Alors, elle taxe leur chair vieillie, dont il ne subsiste, en fait, que des arêtes. (Rires.) Manger des arêtes en croyant déguster de la bonne chair est une confusion que nous ne saurions faire ! Je ne vous souhaite par le surnom de Isnogood, Madame Calmy-Rey ! (Rires.)

M. Michel Halpérin (L). L'intervention de M. le député Froidevaux a eu le mérite de mettre en joie le ministre des finances. Par les temps qui courent, cela n'a pas de prix ! (Rires.)

Néanmoins, je me permets, mon cher collègue député, une petite correction: Mme la conseillère d'Etat Calmy-Rey ne peut pas être comparée au grand vizir Isnogood, parce qu'elle est calife et qu'il n'y a personne pour vouloir être calife à la place du calife dans cette assemblée, pour les raisons mêmes qui font qu'il est si difficile de la mettre en joie! (Rires.)

Je pourrais être bref sur le fond, car, pour l'essentiel, je suis d'accord avec M. Froidevaux. Je crois que ce projet de loi est malvenu et qu'il est incompatible avec le droit fédéral et les besoins actuels de notre économie.

Il est malvenu parce qu'il y a quelque chose de profondément discutable à vouloir créer un privilège de l'Etat sur la condition du créancier gagiste. De quoi s'agit-il ?

En deux mots, il faut savoir qui, du gagiste ou de l'Etat, sera le premier payé sur le produit de réalisation d'un immeuble dont le propriétaire n'a pas pu faire face à ses obligations de débiteur.

Jusqu'à maintenant et conformément aux articles 820 et suivants du code civil, c'est le créancier gagiste qui est payé le premier. Il se rembourse de son gage jusqu'à hauteur de son crédit gagé. Le reste sert à payer les créanciers non gagistes, y compris l'Etat.

Dans la proposition qui nous est faite, il est question de donner un privilège à l'Etat sur le créancier gagiste en lui permettant de se payer d'abord. D'où la pertinence de la remarque de M. Froidevaux : faire cela, c'est concéder une forme d'hypothèque légale à l'Etat pour ses créances de droit public. Cette façon de faire ne saurait être admise. Nous devons agir conformément au droit civil. De ce point de vue, le projet n'est pas convenable au sens ordinaire du terme, parce qu'il prélève sur la substance non pas du débiteur mais du créancier. Il n'est pas compatible avec le droit fédéral, parce qu'il donne une prime à la créance fiscale sur la situation voulue par le législateur fédéral depuis un siècle qui est le privilège du créancier.

J'en viens au troisième volet qui est celui de l'opportunité économique et qui rejoint la finalité des dispositions du code civil. Si on a voulu - et cela tombe sous le sens - privilégier les créanciers gagistes, c'est parce qu'il est nécessaire, dans une économie raisonnablement dynamique, que des gens disposant de liquidités encouragent ceux qui n'en ont pas à entreprendre. Si dans l'immobilier comme dans le reste les créanciers sont le plus souvent des banques, du fait de leur métier, les créanciers privés sont également concernés.

La conséquence de ce projet s'il était adopté serait que les créanciers potentiels intégreront ce paramètre dans leurs choix. Ils ne prêteront plus dans les mêmes proportions, parce qu'ils tiendront compte du risque que l'impôt leur fait courir par le privilège donné à l'Etat, ce qui signifiera la réduction des montants disponibles pour les crédits, donc une diminution des activités économiques, ce qui serait franchement déraisonnable dans la période que nous traversons. Cela le serait d'autant plus que le bénéfice fiscal de l'opération est sérieusement discutable. Vous vous rendez bien compte que la part du produit de la réalisation du gage qui serait retenue par l'administration fiscale au titre de l'impôt n'entrera pas, cela va sans dire, sauf pour M. de la Palice, dans la poche du créancier. Par conséquent, celui-ci, qu'il vende ou non, aura un bénéfice réduit, voire une perte sur son gage qui se traduira par la diminution de sa propre surface fiscale lorsqu'il devra payer, à son tour, ses impôts ordinaires. Nous croirons avoir fait faire une bonne affaire à l'Etat alors qu'en réalité le résultat sera vraisemblablement nul, puisque la perte de l'un sera compensée par le gain de l'autre.

Ce processus, qui, finalement, ne sera pas profitable à l'Etat, se révèle antiéconomique, contraire aux principes juridiques fondamentaux dont nous nous réclamons en général et, par-dessus le marché, contraire aux besoins de relance de notre économie auxquels chacun se dit attaché, ne serait-ce qu'au titre des emplois qu'elle permettrait de créer. En plus, nous ferions cela pour rien ! Quelle absurdité !

Mme Christine Sayegh (S). Ce projet est déjà étudié par la commission fiscale dont M. Froidevaux est membre. Si M. Froidevaux est le député avocat des créanciers gagistes, je serai alors le député médecin des finances de l'Etat.

Le problème de la SI est, il est vrai, un artifice légal qui permet une économie d'impôt, puisque le capital de la SI est souvent inférieur de dix fois à la créance gagée. Chaque fois qu'il y a une réalisation de gage, la SI réalise un bénéfice. Il est évident qu'elle ne peut pas disposer de ce montant, puisqu'elle doit le verser aux actionnaires pour qu'ils remboursent les créanciers gagistes qui sont des organismes financiers, des banques notamment.

C'est un artifice qui péjore notre qualité de vie sociale, puisque nous recherchons des recettes. Vous êtes bien placés pour le savoir puisque vous n'ignorez rien des comptes. Par conséquent, ce projet de loi est tout à fait normal. Un bénéfice de société immobilière doit être taxé.

Je rappelle que le Tribunal fédéral a admis que l'impôt sur le bénéfice d'une société immobilière doit être considéré comme une charge de l'immeuble et doit être acquitté préalablement à la distribution des deniers.

Je demande donc le renvoi de ce projet de loi à la commission fiscale.

M. David Hiler (Ve). Nous avons entendu plusieurs arguments. J'avoue une incompétence au moins égale à celle de M. Froidevaux en ce qui concerne les arguments de nature juridique. Je resterai donc muet à leur sujet.

Reste à définir qui doit se servir en premier. La brillante argumentation de M. Halpérin prendrait tout son sens s'il s'agissait d'une matière fiscale portant sur l'année en cours. Mais le problème auquel nous nous trouvons confrontés c'est que par des artifices, soit la différence notable entre la valeur portée au bilan et la valeur réelle, le fisc se trouve marri et pour longtemps. Le seul moment où il pourrait se servir c'est au moment où toute l'assiette fiscale lui échappe.

Sur le plan de l'équité, je ne vois pas pourquoi l'Etat ne pourrait pas, quand un problème se pose, toucher ce qui lui est dû sur une longue période, s'agissant d'une société qui n'a pas payé d'impôts sur la valeur réelle d'un immeuble pendant de longues années. C'est indispensable, ne serait-ce que par équité à l'égard de ceux qui utilisent des structures juridiques moins «magouilleuses».

Je ne comprends pas que l'on admette, dans la situation économique actuelle, que les banques se servent, en toute légitimité, avant l'Etat. C'est cela que vous dites, Messieurs Froidevaux et Halpérin. Tout le monde sait que les banques croulent sous les dettes, que l'on se fait un souci terrible pour leur santé, qu'elles ne réalisent pas de bénéfices, alors que l'Etat, lui, roule sur l'or ! C'est l'avis unanime de cette assemblée !

Vous dites, Monsieur Halpérin, que ce que nous toucherons en plus sera perdu par la suite, le bénéfice des banques étant diminué. Permettez-moi de vous faire observer qu'un bénéfice est déterminé après un certain nombre de provisions autorisées sur le plan comptable, mais que jamais le bénéfice imposable ne correspond au bénéfice réel. Vous ne l'ignorez pas, puisque votre vie professionnelle et vos gains relèvent, en partie, de ce domaine. (Applaudissements.)

M. Bénédict Fontanet (PDC). L'exposé de M. Hiler est, certes, intéressant, mais on peut aussi justifier un hold-up de cette façon. (Rires et applaudissements, protestations de M. David Hiler.) Monsieur Hiler, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit et ne me faites pas l'injure d'imaginer que je pourrais vous supposer plus bête que vous ne l'êtes en réalité. (Rires.)

Le président. Monsieur Fontanet, si vous parliez du projet de loi ?

M. Bénédict Fontanet. On déraisonne quand on dit que la société immobilière est un artifice. Pendant des années, l'administration fiscale a encouragé la constitution des sociétés immobilières et a soutenu ce type de construction juridique. Jusqu'à preuve du contraire, ce n'est pas un délit pénal de détenir un immeuble par l'intermédiaire d'une société immobilière.

Néanmoins, je peux vous rejoindre sur la problématique de l'imposition de la réserve latente, constituée d'un point de vue comptable, à l'intérieur d'une société immobilière par rapport à quelqu'un qui détiendrait un immeuble en nom.

Cela étant, j'estime que ce projet est mauvais pour les raisons déjà exposées. Je ne suis pas du tout convaincu de sa compatibilité avec les dispositions du droit fédéral sur les gages immobiliers. A teneur du code civil, si l'Etat peut prendre, dans certaines circonstances, une hypothèque légale, il ne peut pas théoriquement, en raison de la nature absolue de la garantie constituée par le gage immobilier, passer avant le créancier gagiste. Cela n'a rien à voir avec mon amour ou mon désamour pour les banques, ou encore pour M. Halpérin. Je ne vous ferai pas l'injure de prolonger un cours de droit qui aurait, pour seul effet, d'ennuyer tout le monde.

En imaginant que ce projet soit compatible avec notre ordre juridique supérieur, en l'occurrence avec notre code civil, je ne suis pas certain que le résultat soit à la hauteur des espérances de l'administration fiscale, et ce pour les raisons suivantes :

Tout d'abord, je prends l'exemple d'un gage réalisé rapportant 5 millions de francs au créancier gagiste et générant environ l,5 million d'impôts passant avant le créancier gagiste. La banque, qui ne recevra pas ce dernier montant, le provisionnera dans ses comptes, ce qui diminuera son résultat d'autant.

Par voie de conséquence, le résultat en termes de perception d'impôts supplémentaires sera faible, même s'il est vrai que le taux d'imposition, en matière de banque, est inférieur à ce qu'il est en matière de société immobilière, eu égard à la manière dont les personnes morales sont imposées.

Si nous adoptons ce type de dispositions, les banques ne réaliseront plus leurs cédules hypothécaires puisqu'elles feront une perte. Les juristes ayant une imagination illimitée, ils favoriseront l'émergence d'autres constructions juridiques qui éviteront de recourir à la réalisation du gage immobilier.

Une voix. Comment cela ?

M. Bénédict Fontanet. C'est simple. Il suffit de constituer une société qui reprenne les gages et les créances. On attend et on revend quand l'immeuble a acquis une valeur supérieure. En fin de séance, Monsieur Halpérin et moi-même serons à la disposition de ceux que cela intéresse. (Rires.)

Ce projet de loi va à l'encontre des buts qu'il poursuit, même s'il pose une question pertinente : celle de la problématique de l'imposition des réserves latentes constituées au terme, parfois, de dizaines d'années par les sociétés immobilières.

Ce projet ayant déjà été étudié en commission fiscale, nous serions bien en mal de nous opposer à son examen. C'est avec un bonheur certain que nous tâcherons de convaincre Mme le chef du département, sans prendre la place du calife peut-être enviée par M. Froidevaux, que ce projet est mauvais et qu'il faut le retirer.

Présidence de M. René Koechlin, président

M. Bernard Clerc (AdG). Je ne fais pas partie de ceux qui pensent que l'équité fiscale ne vaut que sur le plan intellectuel. Je ne fais pas partie de ceux qui pensent que l'on peut trouver des combines pour détourner l'imposition et que si le fisc met le doigt sur ces combines, on peut en trouver d'autres pour continuer à entraver l'imposition.

Vous parliez de hold-up, tout à l'heure ? Pour moi, votre façon de faire est tout simplement du gangstérisme légal, mais du gangstérisme quand même.

Dans quel cas de figure nous trouvons-nous ? Dans celui de sociétés immobilières qui ont bénéficié de prêts largement supérieurs à la valeur des immeubles, prêts qui, très souvent, ont été cédés aux actionnaires eux-mêmes pour des activités n'ayant rien à voir avec des activités immobilières. Un jour, le jeu se termine mal et l'on se retrouve failli.

Que se passerait-il si la faillite était normalement prononcée ? Le fisc pourrait participer à la masse en faillite et revendiquer le paiement de l'impôt. (Dénégation de M. Michel Halpérin.) Parfaitement, Monsieur Halpérin ! C'est pour éviter ces mises en faillite que l'on engage la poursuite en réalisation de gage qui permet aux banques de contourner la loi.

Vous qualifiez ce projet d'antiéconomique. Je pense exactement le contraire, et voilà pourquoi :

Ce projet de loi peut retenir les banques et autres prêteurs à consentir des crédits dépassant largement la valeur du bien immobilier, comme ils l'ont fait dans les années quatre-vingts. Il est donc très intéressant sur le plan économique.

Quant à la perte de la ressource fiscale procurée par les banques, laissez-moi doucement rigoler ! Ces dernières années, l'ensemble des banques suisses a provisionné quarante milliards de francs sur les prêts consentis tant en matière immobilière qu'en matière entrepreneuriale, soit l'équivalent du budget annuel de la Confédération. Malgré cela, les bénéfices des banques n'ont pas cessé d'augmenter, alors que leurs impôts, eux, n'ont pas cessé de diminuer.

On peut facilement jouer avec les provisions et vous le savez, Monsieur Halpérin ! Si les banques ne veulent pas payer d'impôts, elles n'en paient pas. Si elles veulent en payer, elles le font en provisionnant un maximum. Elles jouent avec leurs filiales à l'étranger, et vous le savez aussi... (Protestations.) A une échelle restreinte, vous venez de dévoiler des combines à faire, et vous me feriez croire qu'on ne pourrait pas truquer, pour ne pas payer d'impôts, des bilans portant sur des milliards ! Laissez-moi rire !

Ma conclusion : nous soutiendrons ce projet qui, à notre avis, ne va pas assez loin. En effet, il faudrait modifier l'article 81, alinéa 3, lettre b)...

Le président. Veuillez conclure, Monsieur le député.

M. Bernard Clerc. Pas de problème, j'en ai terminé pour le moment.

Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat. Le projet que nous vous présentons ce soir est un projet très raisonnable.

En raison des règles légales qui régissent la tenue de leur comptabilité, les sociétés anonymes propriétaires d'un ou de plusieurs immeubles ont constitué des réserves latentes sur les actifs immobiliers. Ces réserves sont imposées à l'occasion de la vente, lors de la liquidation de la société.

La pratique fiscale genevoise, qui autorise l'amortissement des immeubles à usage commercial, à l'exclusion des immeubles d'habitation et de bureaux, favorise encore la constitution de ces réserves.

Dans ce contexte, la liquidation forcée de sociétés immobilières pose problème sur le plan fiscal.

Dans un premier temps, la polémique s'est instituée autour de la qualification donnée à la créance fiscale, née du dégagement des réserves latentes. Les offices de poursuites traitaient cette dette d'impôt comme une dette du failli. Les autorités fiscales soutenaient, au contraire, l'opinion selon laquelle cette dette représente une dette de la masse en faillite.

Dans le premier cas, ce sont des dettes ordinaires qui ne sont payées que lorsque tous les autres créanciers ont été remboursés. Dans le deuxième cas, les dettes de masse sont couvertes en premier et l'administration fiscale récupère son dû avant toute répartition entre les créanciers.

En 1994, le Tribunal fédéral a tranché en faveur de la deuxième option. Depuis, plutôt que de faire liquider la société par voie de faillite, les principaux établissements de crédit de la place ont pris l'habitude de recouvrer leurs créances au moyen, non plus de la faillite, mais de la poursuite en réalisation de gage. Propriétaires de cédules hypothécaires grevant l'immeuble de leur débiteur, ils exigent la réalisation de leur gage sans demander la faillite de la société.

Le produit de la vente est distribué aux créanciers gagistes. L'établissement bancaire ne déclare que l'année suivante le bénéfice en capital résultant de la vente et l'administration fiscale se trouve devant une coquille vide qui ne dispose plus de la moindre liquidité pour acquitter l'impôt.

A ce jour, aucune disposition de la loi sur les contributions publiques ne permet d'imposer. Restent deux possibilités :

L'administration fiscale pourrait, chaque fois qu'elle a connaissance d'une procédure en poursuite de réalisation de gage à l'encontre d'une société immobilière, requérir la mise en faillite auprès du Tribunal de première instance. Le désavantage : l'obligation, pour l'administration fiscale, de connaître les procédures, le succès souvent aléatoire et, de toute façon, l'administration fiscale paie tous les frais de la faillite.

La deuxième possibilité est celle de la modification législative. Elle a été choisie dans le cas présent.

Ce projet de loi raisonnable - certains pensent qu'il ne va pas assez loin - permettra au fisc de récupérer l'impôt qui lui est dû.

Permettez-moi d'ajouter qu'aucun intervenant n'a fait allusion à la deuxième partie du projet qui vise à modifier l'article 371 de la loi sur les contributions publiques. Le but de cette modification est de permettre au séquestre de déployer ses effets, c'est-à-dire d'être opéré rapidement. Il faut donc que l'administration fiscale puisse lever l'opposition du créancier au moyen d'un jugement exécutoire, ce qui n'est pas le cas actuellement. Faute d'avoir introduit cette clause dans la loi, l'administration fiscale n'a pas pu valider nombre de ses créances.

Voilà les objectifs de ce projet que je vous demande de bien vouloir renvoyer en commission.

Ce projet est renvoyé à la commission fiscale.

PL 7595-A
13. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Florian Barro, Claude Basset, Claude Blanc, Thomas Büchi, Hervé Burdet, Sylvie Châtelain, Anita Cuénod, Henri Duvillard, Jean-Pierre Gardiol, Dominique Hausser, René Koechlin, David Revaclier et Yves Zehfus modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil, du 13 septembre 1985 (B 1 01). ( -) PL7595
Mémorial 1997 : Projet, 2169. Renvoi en commission, 2170.
Rapport de M. Dominique Hausser (S), commission des finances

Dans le cadre des travaux de la commission des travaux sur un nombre certain de crédits de bouclement, il est apparu que la loi portant règlement du Grand Conseil se référait à une loi abrogée. Il s'agit donc simplement d'une modification formelle. Il s'agit de remplacer la référence à l'ancienne loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique, du 11 janvier 1964 (abrogée), par l'actuelle loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève.

La commission des finances a voté ce projet de loi à l'unanimité le 7 janvier 1998 et vous invite à en faire de même.

Projet de loi

(7595)

modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève (B 1 01)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

décrète ce qui suit:

Article unique

La loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève, du 13 septembre 1985, est modifiée comme suit:

Art. 223, al. 2 (nouvelle teneur)

2 La commission des travaux examine les objets qui lui sont renvoyés par le Grand Conseil dans le cadre de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993, ou portant sur des travaux financés ou subventionnés par l'Etat, ou fournit des préavis aux autres commissions auxquelles de tels objets sont renvoyés.

Premier débat

M. Pierre-François Unger (PDC). Je ne reviendrai pas sur l'acceptation unanime de ce projet de loi, sauf pour dire que nous voterons prochainement l'abrogation de la notion de préavis aux autres commissions dans tous les articles qui touchent aux fonctions d'une commission permanente du parlement.

Eu égard au chevauchement des affaires dans le temps, je propose que nous adoptions ce projet de loi en supprimant cette référence au préavis, puisque nous la voterons, demain ou après-demain, pour l'ensemble des commissions.

Par conséquent, je formule un amendement qui consiste à supprimer la fin de l'article 223, alinéa 2, et à le terminer par  :

«...sur des travaux financés ou subventionnés par l'Etat.»

la notion des préavis aux commissions ayant été supprimée, à l'unanimité, dans le rapport qui vous sera prochainement rendu.

M. Dominique Hausser (S), rapporteur. M. Unger a raison. Il est vrai que ce projet de loi, datant de près d'une année, est resté en panne à la commission des finances, tout le monde supposant l'avoir renvoyé à la commission du règlement du Grand Conseil, ce qui n'a pas été le cas.

L'amendement de M. Unger prend tout son sens pour autant que l'ensemble des projets à voter prochainement le soient compte tenu de cette suppression.

Par souci de cohérence, je suggère de voter le projet tel quel, sachant que nous voterons, dans la même série, la suppression de la notion de préavis. Cela ne changera rien au résultat final. S'il advenait que le projet à débattre prochainement soit refusé, ce que je ne crois pas, il serait dommage que seuls les préavis de la commission des travaux soient supprimés.

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Article unique (souligné)

Article 223, alinéa 2 (nouvelle teneur)

Le président. Je mets aux voix l'amendement de M. Pierre-François Unger qui consiste à supprimer la fin de l'article et à le terminer par :

«...sur des travaux financés ou subventionnés par l'Etat.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 223 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'article unique (souligné) est adopté.

Troisième débat

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi

(7595)

modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève (B 1 01)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

décrète ce qui suit:

Article unique

La loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève, du 13 septembre 1985, est modifiée comme suit:

Art. 223, al. 2 (nouvelle teneur)

2 La commission des travaux examine les objets qui lui sont renvoyés par le Grand Conseil dans le cadre de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993, ou portant sur des travaux financés ou subventionnés par l'Etat.

PL 7612-A
14. Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier le projet de loi de MM. Pierre Kunz, Jean-Philippe de Tolédo, Bénédict Fontanet, Jean-Claude Vaudroz, Armand Lombard et Michel Balestra modifiant la loi sur les allégements fiscaux pour les réserves de crise (D 3 50). ( -) PL7612
Mémorial 1997 : Projet, 3431. Renvoi en commission, 3432.
Rapport de M. Nicolas Brunschwig (L), commission fiscale

1. Introduction

La commission fiscale s'est réunie à deux reprises pour étudier ce projet de loi. Madame Micheline Calmy-Rey, Conseillère d'Etat, Présidente du Département des Finances a participé à nos travaux, ainsi que MM. Pietro Sansonetti, Directeur des affaires fiscales et Georges Adamina, Directeur de la taxation.

2. Présentation du projet de loi

Une loi fédérale permet aux entreprises employant au moins 20 personnes de constituer des réserves de crise au moyen de versements déductibles de leur bénéfice imposable au titre de charges justifiées par l'usage commercial. Une fois constituées, ces réserves de crise sont assimilées d'un point de vue fiscal à des réserves ouvertes constituées au moyen de bénéfices imposés. Cependant, ces réserves de crise ne peuvent être utilisées "; libérées " que pour assurer l'équilibre de l'évolution conjoncturelle "; se maintenir en cas de difficultés économiques " et combattre le chômage.

Le législateur cantonal n'a aucun pouvoir sur cette possibilité accordée par le droit fédéral. La seule exception provient du fait, qu'avec l'accord du Conseil Fédéral, les cantons peuvent décider que ce sont toutes les entreprises de droit privé occupant au moins 10 collaborateurs (et non 20) qui bénéficieraient de cette possibilité.

On notera qu'à l'exception de Saint-Gall, Tessin, Vaud, Neuchâtel, Zoug, Bâle-Campagne et Genève, tous les cantons ont déjà demandé et obtenu cet accord du Conseil Fédéral.

La portée de ce projet de loi vise à mettre Genève au bénéfice de cette disposition, afin que les entreprises qui emploient entre 10 et 19 personnes puissent constituer ces réserves de crise en profitant d'allégements fiscaux.

Les réserves de crise ne peuvent excéder 20% du montant total des salaires annuels.

3. Situation genevoise

L'utilisation de ces possibilités de constitution de réserves de crise a été assez modeste à Genève. Depuis 1988, il a été constitué pour un montant total de 12 millions de francs. A présent, la totalité de ces réserves a été libérées.

En prenant un taux d'impôt moyen de 30%, la perte de rentrées fiscales fédérales, cantonales et communales s'élèverait à 3,6 millions pour ces quelques dix années.

Cependant, ces réserves de crises ont très certainement permis soit des dépenses publiques inférieures (chômages), soit d'autres rentrées fiscales (investissements faits par les entreprises concernées).

4. Discussion

Il est tout d'abord constaté que si ces possibilités ont été peu utilisées, cela provient du fait que les fonds sont bloqués sur un compte bancaire et que dès lors, actuellement peu d'entreprises ont la trésorerie nécessaire. Par contre, à moyen et long terme, il est reconnu que ce type d'instrument peut être bon et avoir une action anti-cycliques.

Il s'agit en quelque sorte d'un 3e pilier lié pour entreprises.

Deux questions essentielles ont été évoquées par la commission :

L'éventuel coût de cette mesure ?

Celui est estimé comme très faible à insignifiant. En effet, l'élargissement de cette mesure aux entreprises de 10 à 19 employés correspond à 15 935 emplois, soit 8,9 % du total d'emplois dans les entreprises privées. Par extrapolation, le coût pourrait augmenter donc d'environ 10 %. Le manque à gagner fiscal ayant été d'environ 3 600 000 francs pour 10 ans, soit en moyenne 360 000.- par an. Dès lors, un élargissement pourrait représenter un manque à gagner complémentaire de quelques 40 000.- par an. De plus, ce chiffrage ne tient pas compte des économies potentielles que cela représentera dans le futur pour les collectivités publiques, ainsi que des recettes fiscales potentielles.

Pourquoi exclure les PME de ces mesures incitatives ?

Poser la question, c'est y répondre. En effet, il est anormal qu'une catégorie d'entreprises soit exclue. Malheureusement, le droit fédéral ne nous donne pas la latitude de proposer cette mesure à toutes les entreprises. Par contre, donnons la possibilité aux PME employant entre 10 et 20 personnes d'en faire usage si elles le désirent.

5. Conclusion et vote

Tous les partis estiment à juste titre que la création d'emplois se fera principalement par les PME, il s'agit donc de leur donner un maximum de chances et en tout état de cause de ne pas les discriminer.

De plus, même si nous sommes convaincus que cette mesure n'aura que des effets limités sur l'emploi ; elle va néanmoins dans la direction de la stimulation économique.

Enfin, il nous semblerait faux de ne pas montrer notre attachement aux PME par le biais de signes modestes et concrets qui peuvent représenter des images symboliques significatives.

Pour toutes ces raisons, la commission fiscale a accepté par 7 voix (2 L, 2 R, 3 S) contre 0 et 5 abstentions (2 Ve et 3 AdG) ce projet de loi et vous recommande d'en faire autant.

Premier débat

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(7612)

modifiant la loi sur les allégements fiscaux pour les réserves de crise(D 3 50)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit:

Article unique

La loi sur les allégements fiscaux pour les réserves de crise, du 16 décembre 1988, est modifiée comme suit:

Art. 2 Entreprises habilitées (nouvelle teneur)

Peuvent bénéficier des allégements les entreprises qui emploient au moins 10 travailleurs.

M 1179
15. Proposition de motion de Mme et MM. Bernard Clerc, Christine Sayegh, David Hiler et Daniel Ducommun relative à un bilan des audits réalisés à l'Etat de Genève et dans les établissements publics. ( )M1179

EXPOSÉ DES MOTIFS

Depuis plusieurs années, la mode est aux audits. Cette mode sensée apporter des réponses rationnelles à des dysfonctionnements ou à des problèmes d'organisation a culminé avec la mise en oeuvre, acceptée par le peuple, de l'audit général de l'Etat. Celui-ci est le plus connu et le Conseil d'Etat s'en est inspiré pour élaborer des propositions actuellement à l'étude dans une commission du Grand Conseil.

Notre parlement ne dispose d'aucune vision d'ensemble des différentes expertises effectuées ces dernières années que ce soit en terme de coûts ou de prestations réelles fournies aux collectivités publiques. C'est l'objet de la présente motion qui devrait permettre au Grand Conseil de se forger une opinion sur la pertinence de ce type d'expertises en terme de rapport coût/efficacité.

Débat

M. Bernard Clerc (AdG). Chacun connaît les résultats de l'audit de l'Etat et son coût d'environ 7,5 millions. J'ajouterais que cet audit est l'arbre qui cache la forêt.

Depuis plusieurs années, les audits se sont multipliés dans tous les secteurs de l'Etat et des établissements publics, s'appliquant souvent et plusieurs fois aux mêmes services pour traiter de questions différentes. Ce mode de faire continue.

En effet, nous avons appris récemment que l'université avait fait procéder à un audit pour connaître l'image qu'elle donnait d'elle-même à l'extérieur. Je ne suis pas convaincu de la nécessité et de la priorité d'un tel audit au vu de la situation actuelle.

L'Etat est une vache à lait pour les différentes entreprises qui pratiquent des audits et des expertises. Il est donc temps d'avoir une vision d'ensemble.

C'est pourquoi nous vous proposons cette motion qui remet les choses à plat sur deux niveaux.

Le premier niveau est quantitatif; nous devons connaître le coût global de ces audits et leurs auteurs.

Le deuxième niveau est qualitatif. Il touche aux résultats et à l'efficacité des audits, afin de juger de la pertinence ou non de les poursuivre; dans quel cas les mener et dans quel cas y renoncer.

Nous vous proposons de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat. Quelques mots pour aborder brièvement la question de l'exécution des mandats d'évaluation des audits demandés par la motion.

On peut se demander s'il appartient au Conseil d'Etat, qui est le commanditaire, de pratiquer l'évaluation demandée par la motion. Ne serait-il pas plus adéquat d'en confier l'exécution à l'inspectorat cantonal des finances, par exemple ?

Cela étant, le Conseil d'Etat accepte volontiers la motion et tentera d'y répondre de son mieux.

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1179)

relative à un bilan des audits réalisés à l'Etat de Genève et dans les établissements publics

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant :

invite le Conseil d'Etat

à présenter au Grand Conseil un rapport quantitatif et qualitatif portant sur :

 

M 1094-A
16. Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Roger Beer, Thomas Büchi, Hervé Dessimoz, Daniel Ducommun, Michel Ducret, John Dupraz, Pierre Froidevaux, Elisabeth Häusermann, Pierre Kunz, Gérard Laederach, Bernard Lescaze, David Revaclier, Marie-Françoise de Tassigny, Jean-Philippe de Tolédo et Michèle Wavre pour la relance de l'activité économique et l'augmentation de l'attrait fiscal de Genève pour les personnes morales. ( -) M1094Rapport de M. Jean-Claude Vaudroz (DC), commission fiscale
Mémorial 1996 : Développée, 6624. Adoptée, 6630.
Rapport de M. Jean-Luc Ducret (DC), remplacé par M. Jean-Claude Vaudroz (DC), commission fiscale

Préambule

Cette motion 1094 a pour objectif de contribuer aux effets d'une relance économique par l'application de l'arrêté fédéral en faveur des zones économiques en redéploiement (arrêté Bonny) au canton de Genève.

Il s'agit principalement d'accorder aux entreprises une exonération de l'impôt fédéral direct durant une période de 10 ans.

Il est bien de savoir que notre canton a déjà provoqué deux démarches dans le même sens. La première sous la forme d'un postulat de M. Jean-Philippe Maitre en date du 17 décembre 1992. Le Conseil fédéral était invité a revoir les critères d'application de "; l'arrêté  Bonny " en tenant compte de l'évolution économique cantonale et de moduler l'aide en fonction des particularités de leur situation. Ce postulat a été approuvé par le Conseil fédéral le 24 février 1993.

La seconde démarche a été réalisée sous la forme d'une lettre du Conseil d'Etat adressée le 15 novembre 1995 au Conseiller fédéral J.-P. Delamuraz. Il était précisé que la décision du Conseil fédéral du 20 octobre 1994 concernant la détermination des régions dont l'économie est menacée a subitement créé de véritables inégalités de traitement entre les cantons, provoquant par là même une véritable distorsion de concurrence à la fois peu souhaitable et contraire aux objectifs visés par "; l'arrêté Bonny ".

Discussion

Si certains députés ne se font pas d'illusions sur l'issue de cette démarche, ils apportent toutefois leur soutien à cette motion. Il est fait part du regret de ce processus de sous-enchère fiscale qui peut inciter d'autres cantons à prétendre être des zones économiques en redéploiement. Il est évident que l'application de "; l'arrêté Bonny " à une région la favorise par rapport à celles qui n'en bénéficient pas, créant ainsi des inégalités de traitement. Cela est vrai malgré que l'exonération fiscale relative à "; l'arrêté Bonny " concerne le droit fédéral, à l'exclusion du droit cantonal.

Il est regrettable et dommageable pour Genève que les principaux districts du canton de Vaud, par exemple ceux de Nyon, qui entrent dans le champ d'application de "; l'arrêté Bonny ", en comparaison à certaines communes genevoises comme Vernier, Carouge ou Plan-les-Ouates (qui comprennent d'importantes zones industrielles), par exemple, qui n'y entrent pas.

Conclusion

Considérant le fait que la compétitivité entre le canton de Genève et celui de Vaud en particulier est à moyen et long terme une aberration, qu'il conviendrait d'avoir une vision régionale (zone du bassin lémanique) plutôt que cantonale et de créer ainsi des synergies basées sur la complémentarité et la particularité de chaque canton et ainsi permettre d'avantager globalement la région.

Nous vous proposons de voter cette motion pour ses effets de relance de l'activité économique et l'augmentation de l'attrait fiscal de Genève pour nos entreprises en vous rappelant que votre commission fiscale l'a adoptée à l'unanimité.

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Débat

M. Daniel Ducommun (R). En automne 1996, le groupe radical lançait plusieurs actions parlementaires, dont celle présentée ce soir, afin de favoriser la relance par une politique de promotions économiques dynamiques.

L'une consiste à obtenir pour nos communes une extension du champ d'application de l'arrêté fédéral en faveur des zones économiques en redéploiement, le célèbre arrêté Bonny.

Nous sommes convaincus que l'installation et le développement de nouvelles entreprises sont les seules possibilités permettant de relancer l'activité économique, de créer des emplois et, par conséquent, de diminuer le chômage.

L'exonération fiscale cantonale et fédérale est un atout de poids pour rehausser l'attrait de Genève.

Merci au rapporteur de concrétiser enfin les travaux de la commission fiscale ! Merci, Monsieur Vaudroz, d'avoir pallié les défaillances de votre collègue et merci à cette assemblée de son soutien massif à notre démarche !

Notre principale préoccupation concerne l'autorité fédérale. Manifestement, elle doit mettre à la poubelle toutes les demandes du canton de Genève ! L'inégalité de traitement entre les cantons suisses est flagrante. Alors que Neuchâtel poursuit, grâce à l'arrêté Bonny, une politique attractive de promotion économique, alors que plusieurs communes vaudoises prennent des dispositions de déploiement dynamique avec l'appui du Conseil d'Etat et du Grand Conseil, Genève est totalement ignorée avec son taux de chômage le plus élevé du pays ! Il ne se passe rien du côté de Berne. La Confédération continue de bricoler, elle laisse l'ex-OFIAMT se scléroser dans des tâches administratives. La Suisse doit être le seul pays au monde qui se montre aussi peu offensif en matière de promotion économique.

Souhaitons que notre modeste motion sensibilise le nouveau conseiller fédéral Couchepin. Nous vous remercions de confirmer le soutien unanime de la commission fiscale.

Mme Christine Sayegh (S). Ce n'est pas le moment de parler d'allégement fiscal vu l'état des finances tant cantonales que fédérales.

Par contre, il y a lieu de se demander si l'allégement fiscal est véritablement un moyen de relance économique.

Cette motion tend à supprimer une inégalité de traitement, voire une distorsion de concurrence, entre les cantons. Elle demande au Conseil fédéral de faire bénéficier Genève des allégements fiscaux fédéraux résultant de l'arrêté Bonny.

Cette motion est un troisième essai. Sera-t-il transformé ? Nous ne découragerons pas les motionnaires et voterons cette motion qui a été acceptée à l'unanimité de la commission.

M. David Hiler (Ve). Il nous faut parfois défendre des causes impopulaires et je vais le faire.

Je suis toujours gêné d'entendre des responsables de ce canton se plaindre d'être péjorés par l'attitude de la Confédération, d'être considérés comme ses nouveaux pauvres.

J'aimerais rappeler que Neuchâtel dispose, certes, d'aides et d'un certain nombre d'atouts, mais que ses prestations et son niveau de vie ne sont pas ceux de Genève.

Il est vrai que notre taux de chômage est très élevé, mais il est tout aussi vrai que nous restons un canton extrêmement riche. Le rapprochement de ces deux constats, vérifiables statistiquement, devrait nous inciter - plutôt qu'à pleurnicher sur l'abandon de la Confédération - à nous demander pourquoi, avec un tel potentiel de richesse, de prestations et d'éducation, nous ne sommes pas capables de régler le problème du chômage dans ce canton et pourquoi, en étant l'une des villes les plus riches du monde, nous sommes constamment mécontents.

A ceux qui se prennent pour les victimes de grandes injustices, je dirais que le style de vie dans certains cantons ayant réussi leur équilibre fiscal tout en ayant beaucoup moins de chômage n'a rien à voir avec celui de Genève.

Ce type de discours pleurnichard éveillant toujours ma méfiance, je m'abstiendrai, pour ma part, de participer à cette unanimité qui me paraît quelque peu déplacée.

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1094)

pour la relance de l'activité économique et l'augmentationde l'attrait fiscal de Genève pour les personnes morales

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :

- que l'arrêté fédéral en faveur des zones économiques en redéploiement (arrêté "; Bonny ", RS 951.93, publié au RO 1996, pages 1918-1921) permet aux entreprises d'obtenir des avantages financiers et des allégements fiscaux de la Confédération;

- que cet arrêté s'applique à l'ensemble du canton de Neuchâtel et aux principaux districts du canton de Vaud, mais pas au canton de Genève;

- que les considérations fiscales remplissent une fonction importante pour les entreprises lors du choix du lieu de leur installation en Suisse;

- que l'exclusion du canton de Genève du champ d'application de l'arrêté fédéral en faveur des zones économiques en redéploiement crée une distorsion de concurrence qui nuit au développement de Genève;

- que le canton de Genève souffre depuis plusieurs années d'une grave crise structurelle et a perdu de nombreuses entreprises, notamment dans le secteur secondaire;

- que le niveau élevé de chômage ne pourra être réduit que par la création de nouveaux emplois;

- que les entreprises existantes tendent à réduire leur personnel et qu'il est donc nécessaire d'attirer de nouvelles entreprises à Genève;

- que tout ou partie du canton de Genève peut être considéré comme une zone économique en redéploiement,

invite le Conseil d'Etat

1. à examiner sans délai si tout ou partie du canton de Genève remplit les conditions légales prévues par l'article 2 de l'arrêté fédéral du 6 octobre 1995 en faveur des zones économiques en redéploiement;

2. à intervenir auprès du Conseil fédéral et du département fédéral de l'économie publique afin que l'ordonnance du 17 juin 1996 concernant la détermination des zones économiques en redéploiement soit modifiée au plus vite pour inclure tout ou partie du canton de Genève.

 

M 1165-A
17. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mme et MM. Pierre-Alain Champod, Dominique Hausser, Pierre Vanek, Jean Spielmann, Fabienne Bugnon et David Hiler sur le maintien du personnel de la fonction publique. ( -) M1165
Mémorial 1997 : Développée, 9799. Adoptée, 9804.

Sur proposition du Conseil d'Etat, les postes de travail de la fonction publique pour l'année 1998 ont été rétablis par le Grand Conseil lors du vote du budget 1998 à teneur des effectifs inscrits au budget 1997.

Cette décision a été mise en application par le Conseil d'Etat.

ANNEXE

Motion(1165)

sur le maintien du personnel de la fonction publique

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :

- le nombre élevé de chômeurs dans le canton ;

- le rôle de l'Etat employeur dans la politique de l'emploi du canton ;

- les nombreuses suppressions d'emplois effectuées dans la fonction publique ces dernières années ;

- la nécessité d'offrir des services de qualités à la population ;

invite le Conseil d'Etat

à ne pas réduire les effectifs de la fonction publique en 1998.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

I 1998
18. Interpellation de M. Bernard Clerc : Programme de stabilisation de la Confédération : quelles conséquences sur le budget du canton ? ( ) I1998
Mémorial 1998 : Annoncée, 860.

M. Bernard Clerc (AdG). Mon interpellation s'adresse à Mme Calmy-Rey.

Le 7 juin prochain, le peuple suisse se prononcera sur des dispositions tendant à assainir les finances fédérales et à mettre en oeuvre le plan dit Villiger qui prévoit des économies de plus de deux milliards de francs d'ici 2001.

Une bonne partie des mesures proposées touchent les prestations sociales, l'assurance-chômage et les rentes d'invalidité.

Une réduction des transferts aux cantons, de l'ordre de 500 millions, figure en bonne place dans les économies prévues. Une telle réduction aurait un impact important sur nos finances cantonales et, par conséquent, sur les prestations.

Dès lors, il importe que les citoyens et citoyennes de notre canton soient informés des conséquences de ces mesures avant la votation du 7 juin prochain.

C'est pourquoi je vous prie de bien vouloir répondre aux questions suivantes :

1. Quel est le montant estimé de la réduction des transferts en provenance de la Confédération pour le canton de Genève ?

2. Dans quels domaines ces réductions interviendront-elles et quelles en seront les conséquences pour les prestations et les comptes du canton ?

Le président. Il sera répondu à cette interpellation lors d'une prochaine séance.

I 1999
19. Interpellation de M. Bernard Clerc : Clients de la Banque cantonale : selon que vous serez riche ou misérable... ( ) I1999
Mémorial 1998 : Annoncée, 860.

M. Bernard Clerc (AdG). «Le Courrier» a révélé, voici trois mois, qu'un requérant d'asile, titulaire d'un permis N, s'est vu refuser l'ouverture d'un compte, à la Banque cantonale, pour y faire virer ses indemnités de chômage.On peut s'interroger sur la nature discriminatoire d'une telle décision. Les établissements privés, eux, semblent moins restrictifs.

La Banque cantonale considérerait-elle tous les requérants d'asile comme des clients à risques ? Une telle attitude ne renforce-t-elle pas, dans l'opinion publique, l'idée que les requérants d'asile sont tous des trafiquants ou des personnes cherchant à vivre à crédit ?

Cette décision nous étonne d'autant plus que des personnalités en vue, dans notre République, ont obtenu des crédits faramineux qu'elles sont bien en peine de rembourser aujourd'hui.

La Banque cantonale n'a certainement pas la même attitude vis-à-vis de titulaires de comptes domiciliés à l'étranger qui déposent leur argent chez nous pour échapper au fisc de leur pays.

N'est-il pas révélateur, à cet égard, que la première question posée par notre établissement cantonal porte sur la déclaration ou non des fonds qui lui sont confiés ? J'appelle cela de l'incitation à la fraude fiscale.

Mais revenons au sujet de mon interpellation avec les deux questions suivantes :

1. Le refus d'ouverture d'un compte à un titulaire de permis N découle-t-il d'une politique générale de la Banque cantonale ? Dans l'affirmative, sur quoi se fonde-t-elle ?

2. Le Conseil d'Etat approuve-t-il une telle politique ?

Le président. Il sera répondu à cette interpellation lors d'une prochaine séance.

La séance est levée à 23 h 10.