Séance du
jeudi 3 novembre 2022 à
20h30
2e
législature -
5e
année -
6e
session -
34e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Jean-Luc Forni, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat, Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco, Nathalie Fontanet et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Antonio Hodgers et Mme Fabienne Fischer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Ruth Bänziger, Alexis Barbey, Diane Barbier-Mueller, Thomas Bläsi, Thierry Cerutti, Marta Julia Macchiavelli, Christina Meissner, Philippe Morel, Vincent Subilia, Salika Wenger et François Wolfisberg, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Anne Bonvin Bonfanti, Rémy Burri, Florian Gander, Jean-Charles Lathion, Aude Martenot, Jean-Pierre Pasquier, Maria José Quijano Garcia, Helena Rigotti et Sébastien Thomas.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment d'une procureure. Je prie le sautier de la faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (La procureure entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)
Madame, vous êtes appelée à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyenne et comme magistrate du Ministère public;
- de constater avec exactitude les infractions, d'en rechercher activement les auteurs et de poursuivre ces derniers sans aucune acception de personne, le riche comme le pauvre, le puissant comme le faible, le Suisse comme l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
A prêté serment: Mme Florence Pastore.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment d'un magistrat du Pouvoir judiciaire. Je prie le sautier de le faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (Le magistrat entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)
Monsieur, vous êtes appelé à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;
- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
A prêté serment: M. Claude Auer.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Le président. Nous abordons à présent notre première urgence, le PL 12782, classé en catégorie II, trente minutes. Ce texte a fait l'objet d'une demande d'urgence du Bureau en vue d'un renvoi à la commission des finances, sur lequel je vous fais voter. Est-ce que tout le monde est présent ? (Commentaires.)
Mis aux voix, le renvoi pour six mois du projet de loi 12782 à la commission des finances est adopté par 52 oui (unanimité des votants).
Un rapport doit être rendu dans les six mois (article 194 LRGC).
Premier débat
Le président. Nous passons à l'urgence suivante, soit le PL 13160-A. Ce débat est classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de Mme Dilara Bayrak, à qui je cède la parole.
Mme Dilara Bayrak (Ve), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi vise à réorganiser le Tribunal des prud'hommes, notamment en enlevant certaines catégories professionnelles: il s'agit de passer de cinq groupes à quatre groupes professionnels et de renommer certaines fonctions apparaissant dans la loi sur le Tribunal des prud'hommes afin de pouvoir mettre à jour les professions. Ces regroupements ont en effet été pensés et élaborés il y a plusieurs années et n'ont plus véritablement de fondement aujourd'hui; il a donc fallu revoir ce mode d'organisation du tribunal. La réorganisation des groupes permettra ainsi de mieux attribuer les cas arrivant au Tribunal des prud'hommes et d'améliorer le fonctionnement de celui-ci.
Le deuxième axe de ce projet de loi consiste à modifier le mode de désignation des personnes élues à la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice, à savoir celui des juges assesseurs. Cela permettra d'harmoniser la méthode d'élection de ces derniers et d'uniformiser toutes les élections des juges assesseurs au sein de la Cour de justice. C'est d'ailleurs pour cette raison que l'urgence a été demandée, de sorte que l'élection des juges assesseurs à la Chambre des prud'hommes puisse avoir lieu dans les délais, au vu des prochaines élections.
Nous avons eu une présentation étendue du DSPS, de la direction des affaires juridiques et d'une délégation du Pouvoir judiciaire, qui a pu amplement montrer pourquoi ce projet de loi était pertinent et devait être voté en urgence. Un rapport de minorité avait cependant été annoncé par le MCG, qui - je le remarque - ne l'a finalement pas déposé. Je suppose que le groupe MCG indiquera pourquoi il n'a pas souhaité voter ce texte, qui autrement aurait pu être traité aux extraits. Je laisse le soin au groupe concerné, s'il le désire, de le faire dans les prochaines minutes.
Je signale en outre que des travaux supplémentaires n'ont pas été nécessaires, le projet de loi étant assez explicite. Toutefois, plusieurs amendements ont été proposés par la direction des affaires juridiques, lesquels prévoient des dispositions transitoires. Ils figurent en annexe au projet de loi. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Youniss Mussa (S). Chères et chers collègues, le projet de loi qui nous occupe aujourd'hui a été soutenu par une large majorité des groupes politiques en commission. Pour ma part, je souhaiterais vous expliquer pourquoi le parti socialiste soutiendra ce texte présenté par le Conseil d'Etat.
Ce projet de loi remet à jour une loi établie il y a de nombreuses années, en 2011 plus exactement. En résumé, il prévoit la modification de l'organisation des groupes professionnels représentés au Tribunal des prud'hommes. L'adoption des dispositions du présent projet de loi n'implique pas de modifications substantielles du fonctionnement du Tribunal des prud'hommes ou de la Chambre des prud'hommes, qui donne pour l'essentiel pleinement satisfaction. En revanche, ce texte apporte un correctif à deux problématiques de nature organisationnelle. La première, relative au Tribunal des prud'hommes, est la répartition désuète et déséquilibrée des branches d'activité dans les cinq groupes professionnels qui le composent. La seconde, qui concerne la Chambre des prud'hommes, porte sur le mode de désignation des juges assesseurs.
Le regroupement des branches professionnelles doit être amélioré pour gagner en cohérence et correspondre à la configuration actuelle du monde du travail ainsi que de l'activité économique. Certains regroupements retenus il y a plus de dix ans n'ont plus de sens aujourd'hui. Ils impliquent en outre un grand déséquilibre du nombre de procédures parmi les cinq groupes professionnels, ce qui rend l'attribution de celles-ci, la planification des audiences et plus généralement la gestion de chaque groupe professionnel inutilement complexes.
Par ailleurs, cette réforme est aussi conduite avec les partenaires sociaux. L'UAPG ainsi que la CGAS soutiennent en effet cette réforme organisationnelle. Il en résultera une plus grande cohésion et un meilleur équilibre des juges au sein du Tribunal des prud'hommes. Ce dernier comprendra quatre groupes professionnels qui représentent le tissu économique de notre canton, et une meilleure organisation interne sera garantie. Pour ces différentes raisons, le groupe socialiste votera ce projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, nous passons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13160 est adopté en premier débat par 56 oui contre 8 non et 1 abstention.
Le projet de loi 13160 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13160 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui contre 9 non (vote nominal).
Premier débat
Le président. Nous passons à l'urgence suivante. Il s'agit du PL 13010-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. La parole revient à Mme Amanda Gavilanes.
Mme Amanda Gavilanes (S), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. J'ai donc le plaisir, Mesdames et Messieurs les députés...
Une voix. On n'entend pas ! (Commentaires.)
Mme Amanda Gavilanes. On ne m'entend pas. C'est parce que d'habitude on m'entend trop ! Alors... J'ai perdu la connexion, alors que c'est un projet de loi sur le wifi !
Mesdames et Messieurs les députés, j'ai le plaisir de vous présenter aujourd'hui le rapport sur le PL 13010 qui a occupé la commission des travaux durant six séances entre novembre 2021 et avril 2022. Il s'agissait d'étudier un crédit d'investissement de 9 194 400 francs destiné à équiper les établissements de l'enseignement secondaire I et II d'un réseau sans fil.
La commission des travaux a traité conjointement deux projets de lois présentés par le Conseil d'Etat: le PL 13010 et le PL 13011. C'est le premier qui fait l'objet du présent rapport; il porte sur l'équipement en réseau wifi des établissements du secondaire I et II. La commission a auditionné les conseillers d'Etat chargés des départements de l'instruction publique et des infrastructures ainsi que leurs collaborateurs et collaboratrices, l'association RUNE-Genève, la Fédération des associations des maître-sse-s du cycle d'orientation, la Société pédagogique genevoise ainsi que l'Union des associations patronales genevoises.
Après d'intenses discussions et controverses, la commission a décidé d'accepter l'entrée en matière sur le projet de loi, considérant qu'il était nécessaire de ne pas entraver l'accès à internet dans les établissements de l'enseignement secondaire I et II. En effet, la qualité de l'enseignement, à l'ère du numérique, dépend largement du socle sur lequel on le fait reposer. Or l'accès à une connexion efficace constitue ce socle, et la connectivité dans les établissements du secondaire I et II peut être considérée comme une infrastructure critique. C'est pourquoi il est indispensable de mettre en place des réseaux sans fil qui permettent un enseignement mobile et multiforme. (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Madame la rapporteuse. (Un instant s'écoule.)
Mme Amanda Gavilanes. Le réseau est saturé, je suppose !
Le président. La classe est indisciplinée, disons.
Mme Amanda Gavilanes. C'est ça. (Un instant s'écoule.) Je poursuis donc, après cette coupure de réseau. Il est de notre devoir d'offrir aux jeunes en formation un environnement propice à l'acquisition des savoirs classiques et numériques. Il s'agit également de garantir le respect des obligations intercantonales issues du concordat HarmoS et du plan d'action en faveur de l'éducation numérique de la CIIP, du 22 novembre 2018. Bien qu'il nous en coûte de le reconnaître, Genève est largement à la traîne en matière d'éducation au numérique et par le numérique, et surtout dans la mise à niveau de ses infrastructures numériques et de ses réseaux, notamment wifi, au sein des établissements du secondaire I et II.
A 10 voix contre 3 et 2 abstentions, la commission, comme je vous le disais précédemment, a accepté ce projet. Nous vous encourageons donc à faire de même et, par votre voix et votre vote, à faire enfin entrer les établissements du secondaire genevois I et II dans le XXIe siècle. Merci.
M. Youniss Mussa (S). Chères et chers collègues, le numérique, c'est à la fois le présent et l'avenir ! L'accès à internet dans les établissements scolaires du secondaire I et II est nécessaire et doit être garanti partout et pour tous. Par ailleurs, le débat concernant le numérique n'a pas de clivage politique, mais le numérique est décrié par celles et ceux qui craignent les progrès numériques, par celles et ceux qui ne comprennent pas les enjeux scolaires et les besoins des écoles en la matière.
Le numérique est déjà partout: il y a notamment urgence à former les élèves dans ce domaine afin que ceux-ci puissent pleinement comprendre, évaluer, s'engager et créer dans une société numérique. Souhaitons-nous laisser les élèves genevois dans le siècle passé, leur faire prendre du retard sur les élèves des autres cantons, les déconnecter des réalités dans lesquelles ils risquent de se retrouver plus tard dans le monde du travail ?
D'autres enjeux importants doivent être pris en considération, à l'heure de la cybercriminalité, des GAFAM et des fake news qui fragilisent notre démocratie. L'école a un rôle important à jouer et l'optique de ce projet de loi est de fournir une éducation numérique. Il s'agit en effet de préparer les élèves à être de futurs citoyens dans une société où le numérique est partout afin qu'ils puissent l'utiliser à bon escient. Ce projet de loi est donc un pas en avant pour que les élèves genevois ne soient pas laissés au bord du chemin en ce qui concerne les enjeux relatifs au numérique.
Ces outils numériques ne seront utilisés qu'en cas de plus-value pédagogique claire. Il est en effet impensable d'imaginer qu'à l'école de commerce ou à l'ECG, par exemple, les élèves puissent étudier sans le numérique, car ces filières comportent de nombreux objectifs d'apprentissage liés à l'acquisition de compétences en lien avec le numérique. Les supports de cours sont construits à un niveau plus large que cantonal et ont souvent une forme numérique ou font appel à des technologies interactives; il y a donc une nécessité impérative de disposer du wifi dans les écoles. Il est également à noter que les établissements déjà dotés du wifi ont fait part de leur pleine satisfaction.
Comme je l'ai déjà dit, au niveau national, les autres cantons ne nous attendront pas: ils ont déjà commencé à mettre en oeuvre la stratégie commune pour la gestion de la transition numérique dans le domaine de l'éducation. Nous devons respecter nos engagements si nous voulons que notre canton soit crédible. Un refus de ce projet de loi menacerait l'aptitude du canton de Genève à répondre aux divers cadres de référence intercantonaux et cantonaux.
Parce que ce projet de loi a été largement travaillé et accepté en commission, parce qu'il répond aux enjeux de notre époque, parce qu'il participe à former au mieux les enfants de notre canton, je vous invite, au nom du parti socialiste, à l'accepter. Je demande aussi le vote nominal sur le vote d'entrée en matière. Je vous remercie.
Le président. Etes-vous soutenu, Monsieur le député ? (Plusieurs mains se lèvent.)
Une voix. 13, 14... Il n'est pas suivi. (Un instant s'écoule. Commentaires.)
Le président. Maintenant on arrive à 21 mains, Monsieur le député: le vote d'entrée en matière sera donc nominal. Je passe la parole à M. Olivier Cerutti.
M. Olivier Cerutti (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, ce projet de loi aurait pu passer aux extraits, comme on l'a dit et redit dans cet hémicycle. Je remercie du reste la rapporteuse qui a bien décrit ce qu'il en était.
L'équipement des cycles d'orientation et de nos établissements du secondaire est véritablement nécessaire, et j'ajouterai que ceci est une réelle condition-cadre de notre économie, qui doit bénéficier d'un réseau sans fil de haut débit. Pourquoi est-ce que je dis ça ? Parce qu'aujourd'hui, nous avons changé de paradigme: le téléphone portable était d'abord un appareil qui nous permettait de communiquer, mais il est très vite devenu un appareil photographique; et d'un appareil photographique, il est très vite devenu un outil servant à envoyer des messages. Actuellement, il devient une des conditions-cadres de notre économie. Pourquoi ? Parce qu'avec ce petit appareil, on a la possibilité, notamment dans l'économie, je dirais, pratique, dans l'économie du service, d'effectuer très vite des interventions ponctuelles. Pourquoi ? Parce qu'on peut prendre une photo, lire sa messagerie, envoyer un rapport, consulter sur internet des catalogues et faire des commandes en direct sur la base de ceux-ci. On voit donc que cet outil de travail est très précieux ! Par exemple dans la construction, car il permet la lecture d'un plan en PDF, et notamment celle d'un plan dont les cotes viennent de changer.
C'est donc une véritable condition-cadre de notre économie à l'heure actuelle; nous avons besoin d'une réelle éducation au numérique, et d'une éducation sécurisée: la sécurité - on l'a dit et redit - est un axe important de cet élément pédagogique qu'on doit réussir à transmettre aux élèves qui vont arriver demain sur le marché du travail.
Mesdames et Messieurs, le parti démocrate-chrétien vous invite à voter ce crédit d'investissement qui va simplement permettre à nos cycles d'orientation, à nos écoles du secondaire et à nos écoles professionnelles de bénéficier d'un véritable outil de travail. Je vous invite donc à voter ce projet de loi. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Stéphane Florey (UDC). Du point de vue de ceux qui ont refusé le projet, notamment l'UDC, nous aurions voulu... En ce qui concerne les écoles professionnelles, les collèges, les préadultes, les adultes et l'université, il n'y a pas de problème. Ces jeunes font ce qu'ils veulent aujourd'hui: nous n'avons aucun souci à ce sujet, et c'est assez logique qu'il y ait du réseau wifi dans ces bâtiments.
Ce qui nous pose problème, à nous, c'est le cycle d'orientation. A un moment donné dans les débats, il était question de scinder le projet de loi en deux, c'est-à-dire de couper l'école obligatoire du wifi et de l'installer uniquement au postobligatoire. Quand on voit toutes les associations qui luttent de nos jours contre les dangers d'internet, contre la dépendance des jeunes à ces réseaux wifi, justement...
En commission - je suis désolé de le dire ici -, Madame la conseillère d'Etat, vous ne nous avez nullement convaincus, en tout cas du point de vue de l'UDC. Selon nous, c'est vraiment le loup qui va entrer dans la bergerie, parce qu'on sait que tôt ou tard, il y aura des débordements avec ces accès wifi.
Certains disent qu'actuellement tout le monde a un téléphone. On peut le penser, mais ce n'est pas vraiment le cas. Enormément de jeunes - vous seriez surpris de leur nombre - ont récupéré un natel soit de leurs parents soit de leurs frères et soeurs, mais ils n'ont pas d'abonnement téléphonique: ils ont uniquement un accès à internet quand ils sont à la maison, ou ailleurs de temps en temps. Par conséquent, un des problèmes que je vois, c'est qu'au cycle d'orientation, ils vont profiter de ces accès ouverts; et on vous dira ce qu'on voudra, mais à un moment ou à un autre, il y aura des dérives, des accès qui ne devraient pas avoir lieu. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Or on n'a obtenu aucune garantie quant à la sécurisation de ces réseaux. C'est pour ça que nous aurions voulu que les bâtiments de l'école obligatoire ne soient pas équipés du wifi. Selon nous, aucun motif valable ne peut faire dire à présent qu'il faut absolument ouvrir les cycles d'orientation au wifi.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Stéphane Florey. Et encore, on ne parle même pas de l'école primaire, mais enfin, voilà ! Comme aucun amendement à ce sujet n'a été présenté par le département...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Stéphane Florey. ...nous vous recommandons de refuser le projet de loi. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Rémy Pagani, pour autant qu'on puisse le voir !
M. Rémy Pagani (EAG). Je suis là, Monsieur le président !
Le président. Vous êtes masqué par un mur de discussions. (Commentaires. Rires.) Messieurs, s'il vous plaît, laissez parler M. Pagani.
M. Rémy Pagani. Le décompte de mon temps a déjà commencé !
Le président. Non, il démarre maintenant, Monsieur le député.
M. Rémy Pagani. Très bien, merci, Monsieur le président. J'ai écouté avec attention les arguments très... disons... pseudo-convaincants qui consistent à dire: «C'est l'époque, c'est la mode, on va passer dans le XXIe siècle, on est en retard.» Non, ce ne sont pas des arguments convaincants. Ce ne sont même pas des arguments, c'est simplement aligner des noix sur un bâton et ça revient à dire: «Il faut faire comme les autres.»
En ce qui nous concerne, nous nous posons un certain nombre de questions, notamment au sujet de l'égalité face au numérique. Je m'explique: s'il n'y a par exemple qu'un ordinateur dans les familles alors qu'il y a quatre gosses, eh bien l'Etat va faire pression sur la famille non seulement pour que chaque enfant ait un ordinateur, mais en plus pour qu'il soit relié aux grands groupes multinationaux - qui d'ailleurs ne paient pas d'impôts ou en paient le moins possible, qui arrivent à se soustraire à l'obligation de l'impôt. On va donc faire du commerce indirectement à l'intérieur des écoles: l'Etat va promouvoir toutes ces grandes multinationales qui vendent des programmes et du matériel informatique.
Ces deux problèmes se posent réellement et malheureusement ils n'ont, à notre sens, pas trouvé réponse, même si nous avons voté ce projet visant à installer le wifi. Evidemment, ici aussi tout le monde a besoin du wifi, ça permet de faire des économies, ça évite, comme l'a dit le précédent préopinant... (Remarque.) Excusez-moi, c'est un pléonasme ! Enfin bon, il y a effectivement la possibilité de ne pas contracter un abonnement téléphonique et d'utiliser le wifi, ce qui est bien. Pourtant, les deux problèmes que j'ai soulevés n'ont pas trouvé réponse.
Il y a quarante ans, l'Etat offrait des livres à tous les enfants. Il savait, en effet, que certaines familles n'avaient pas le budget pour payer aux enfants des livres, il en offrait donc. Aujourd'hui, malheureusement... Enfin, je ne dis pas qu'il faut offrir des ordinateurs à tous les enfants, simplement que cette problématique-là n'a pas été résolue par le département. On attendait effectivement des amendements. Quoi qu'il en soit, on n'a pas trouvé de réponse.
S'agissant des logiciels, on entre complètement dans une logique commerciale, et personne ne nous a dit: «Non, on va travailler avec des logiciels hors système commercial, on va s'en donner les moyens.» En conséquence de quoi nous voterons cette installation de wifi, mais avec beaucoup de réticences.
A été soulevée la question - j'en profite, Monsieur le président... Je vois que vous ne m'écoutez pas, mais enfin bref ! (Commentaires.) Vous n'êtes pas obligé de m'écouter de toute façon !
Une voix. Mais si, quand même ! (Commentaires.)
M. Rémy Pagani. Oui, bon, un peu ! Qu'il y en ait au moins un qui suive ! Il a été dit que ça posait des problèmes psychologiques aux enfants qui ont déjà des problèmes...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Rémy Pagani. Oui, merci. On n'a pas non plus résolu ce problème, en disant qu'il fallait mettre en place une structure pour veiller...
Le président. Il vous faut conclure. (Exclamations.)
M. Rémy Pagani. ...à ce que les enfants ne soient pas pris au piège par cette informatique.
Le président. C'est terminé, merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Florian Gander.
M. Florian Gander (MCG), député suppléant. Merci, Monsieur le président. Chers collègues, lors des débats de la commission des travaux, le MCG a beaucoup douté. Nous avons parlé de deux projets de lois que nous avons souhaités bien distincts, et heureusement. Au moment du vote final, le MCG s'est abstenu. Pourquoi ? Après discussion, on s'est rendu compte qu'effectivement nous avons besoin du wifi, mais la crainte du MCG, qu'il avait déjà exprimée en commission, est qu'on sera déjà passé à autre chose lorsque le réseau sera installé; en fait, le principe est bon, mais les technologies risquent d'évoluer très rapidement et on va se retrouver un petit peu en retard. L'essentiel est qu'on puisse donner à nos jeunes une formation avec le matériel nécessaire dans le secondaire I et le secondaire II; on ne peut pas rester «à la ramasse» vis-à-vis des autres cantons, et sans ces technologies, les formations qui doivent être effectuées dans nos écoles ne peuvent pas l'être.
Quoi qu'il en soit, nous restons très attentifs à l'utilisation qui sera faite de ce réseau wifi et principalement à la sécurité de ce dernier, parce qu'actuellement, ce n'est pas le meilleur système de protection des données. Ce point sera quand même important, et on espère que l'OCSIN et le service écoles-médias vont travailler conjointement pour protéger un maximum ces données. Pour ces raisons-là, le groupe MCG, malgré son abstention en commission, a décidé de soutenir ce projet de loi.
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit d'un projet de loi important, en lien notamment avec les enjeux de l'éducation au numérique et avec l'application des ordonnances fédérales sur la formation professionnelle et la formation générale de nos élèves.
Sans vouloir refaire ici tout le débat sur le numérique, je vous rappellerai que quand on parle de numérique à l'école, il est question de trois grands domaines. Premièrement, on traite de la science informatique en tant que telle. On aborde aussi l'utilisation des outils, car on doit apprendre aux élèves à les manier à bon escient pour qu'ils deviennent, à terme, des citoyennes et des citoyens dans un monde très numérisé. Enfin, il y a tout le travail autour de la culture numérique, autour de la prévention; et Dieu sait, Mesdames et Messieurs les députés, si c'est important aujourd'hui. On ne peut actuellement pas faire abstraction du fait que nous vivons dans une société numérique et qu'on doit y préparer nos élèves.
Je vais essayer de répondre à quelques-unes de vos interrogations, notamment aux vôtres, Monsieur Florey. Vous nous dites que vous n'avez aucun souci pour le secondaire II, mais que le problème concerne le cycle d'orientation; vous nous dites aussi que des parents peuvent s'inquiéter. Vous mettez également en avant le fait que, parfois, les jeunes n'ont pas d'abonnement téléphonique et qu'ainsi ils vont avoir accès, par le wifi, à toute une série de données. Mais sachez, Monsieur le député, que les téléphones portables sont interdits dans les écoles pendant les heures de cours. (Commentaires.) Monsieur le député, vous n'êtes pas dans les écoles; si les élèves utilisent leur téléphone, ils se le font confisquer, en tout cas pendant la journée. Par conséquent, à mon sens, ce n'est pas un argument.
La sécurité ! Le réseau wifi permet justement de sécuriser un certain nombre de choses. Et sachez aussi qu'internet est filtré dans les écoles. Si vous essayez d'aller sur des sites qui sont plus ou moins scabreux - selon les thématiques -, vous verrez que vous n'arrivez pas à faire dans les écoles ce que vous pouvez faire chez vous, par exemple, où vous avez accès absolument à tout. Il n'y a donc pas de risques à ce niveau-là.
A propos des remarques du député Pagani, le DIP est très attentif à la question de l'égalité face au numérique. Vous avez parlé des grands groupes; nous menons actuellement - je l'avais expliqué en commission, Monsieur le député - un projet pilote qui concerne plusieurs cycles: il vise à sortir des GAFAM et à déposer tout ce qui se fait chez un hébergeur genevois que je ne nommerai pas pour des raisons évidentes, mais que vous connaissez peut-être. Ce projet est actuellement en évaluation, et dans les cycles d'orientation qui l'utilisent, on est extrêmement content. Ça amènera probablement le Conseil d'Etat à revenir devant vous avec un projet d'investissement pour qu'on puisse généraliser ce type d'équipements dans les cycles d'orientation.
Quant à la question des livres ou du matériel, vous nous dites qu'il y a quarante ans, l'Etat offrait des livres. Mais c'est toujours le cas ! A l'école obligatoire, tout est payé ! On était d'ailleurs un canton plutôt en avance dans ce domaine, quand je vois nos voisins vaudois qui faisaient encore payer un certain nombre d'équipements à leurs élèves. A Genève, tout est payé ! La question pourrait effectivement se poser au niveau du secondaire II: l'école est certes gratuite, mais l'équipement doit être fourni. Concernant le cycle d'orientation, si on avait besoin que chaque élève ait un ordinateur - mais on n'en est pas là -, eh bien ce serait à l'Etat d'en assumer les coûts, comme à l'époque ceux de la règle à calculer ou de la machine à calculer qu'on a tous reçues un jour ou l'autre à l'école.
Voilà ce que je voulais dire pour l'essentiel. Je souhaiterais aussi rappeler qu'à l'école obligatoire, et même de manière générale, on utilise essentiellement des logiciels libres. Je vous ai parlé du projet qui s'appelle Pentila Néro mené au cycle et qui vise à nous sortir des GAFAM; il fonctionne en logiciel libre.
Je crois, Mesdames et Messieurs les députés, que le canton est attentif à tous ces éléments, mais qu'on ne peut pas, aujourd'hui, faire abstraction de ce que nous vivons dans une société numérique. On doit y préparer nos élèves, sinon ce serait en faire des illettrés de l'électronique - il me semble que vous allez même traiter ce soir une motion relative à ce sujet. Voilà, merci de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous passons au vote d'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 13010 est adopté en premier débat par 71 oui contre 8 non et 14 abstentions (vote nominal).
Le projet de loi 13010 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13010 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 73 oui contre 8 non et 15 abstentions (vote nominal).
Premier débat
Le président. Nous passons à notre quatrième urgence, le PL 12521-A. Je rappelle que l'inscription du courrier 4055 au Mémorial a été demandée et acceptée tout à l'heure.
Le président. Le débat sur cet objet est classé en catégorie II, soixante minutes, ce qui signifie que chaque rapporteur a six minutes à disposition et chaque groupe six minutes. Les amendements ne donnent pas droit à du temps de parole supplémentaire, seules les demandes de renvoi en commission donnent droit à trois minutes supplémentaires aux rapporteurs et au Conseil d'Etat. Initialement, il avait été décidé que le temps de parole du Conseil d'Etat devait être de six minutes; simplement, au regard du nombre d'amendements déposés et pour respecter la proportionnalité des débats, M. Poggia aura droit à deux fois sept minutes. (Exclamations.) Je passe donc la parole... (Commentaires.) Je passe donc la parole...
Une voix. Vous me faites beaucoup d'honneur en pensant que ma parole va renverser les choses ! (Commentaires.)
Le président. Je passe la parole à Mme la rapporteure de majorité Xhevrie Osmani.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, depuis l'entrée en vigueur de la LPol, pas moins de huit objets - projets de lois, motions et pétitions - ont été déposés et renvoyés à la commission judiciaire et de la police, tous critiquant l'organisation induite par la loi sur la police. Depuis lors, des études et sondages ont souligné les limites d'une organisation en silos qui a cloisonné le métier, décrivant une organisation peu lisible et inefficace, qui a engendré une dégradation de l'action sur le terrain. Je tiens à dire que de nombreuses personnes ont été auditionnées pendant ces travaux: le département, la commandante de la police, le chef des opérations, les syndicats de police et des polices municipales ainsi que la commission du personnel de la police. Les travaux ont duré plus de trois ans et ont fait l'objet de 24 séances. Ce rapport a tenté de restituer les discussions aussi fidèlement que possible.
Le PL 12521 s'est considérablement détaché des autres objets, puisqu'il est le plus abouti et propose un changement clair dans l'organisation de la police, en intégrant également le pilier de la formation. Ce projet de loi ne propose pas un retour en arrière, mais corrige ce qui ne fonctionne pas. En effet, il propose de rétablir la gendarmerie comme une seule fonction, dont les différents silos actuels constitueraient des missions et non plus des services, en conservant la police internationale, la police de proximité, la police-secours et la police routière. La police judiciaire, répondant au Ministère public, serait détachée. Ce détachement ne constitue toutefois pas un clivage, mais une distinction dans la mission, qui ne répond pas aux mêmes objectifs que ceux des uniformés.
Ce nouvel arrangement organisationnel permet une transversalité requise par la fonction de policier et se veut une critique forte de ce qui a été prôné par la LPol, à savoir une police qui a multiplié les silos et les états-majors. Ces silos sont hermétiques et concurrents à tel point que les différents services ne peuvent se porter appui lorsqu'ils sont débordés.
La transversalité et la coordination sont grandement absentes. Pour rappel, tous les uniformés ont la même formation, à savoir le brevet fédéral instauré depuis 2005. Il y a moins de policiers sur le terrain; les sous-effectifs et le nombre d'heures supplémentaires ont été dénoncés à maintes reprises. En témoignent les effets sur le terrain: la police n'arrive pas toujours à répondre aux appels de la population. En appui aux études, les syndicats nous ont fait part de la perte du sens des missions qui affecte le moral de la police.
La réorganisation proposée par le projet de loi permet de mettre fin à des strates hiérarchiques pléthoriques; selon ce qui nous a été décrit, un nombre important de lieutenants et officiers supérieurs peuvent donner des injonctions paradoxales. On dénombre plusieurs services et directions avec leurs chefs, qui ont pour la plupart des états-majors, des services de ressources humaines et plusieurs commandants.
Un autre bénéfice de ce projet de loi est l'ancrage dans la loi d'une école de formation cantonale à Genève. La qualité de l'Académie de Savatan ainsi que son caractère militarisé ont été fortement critiqués. Par ailleurs, la LPol a causé une baisse quantitative et qualitative du recrutement, dont les chiffres nous ont été avancés en commission et mis en perspective avec la situation ante. La formation de Savatan est décrite comme étant lacunaire et inadaptée, et même reconnue comme un échec. La délocalisation de la formation a eu une incidence énorme sur la motivation des candidats. La distance jusqu'à Savatan dissuade plusieurs candidats de postuler et rend difficile une conciliation avec la vie privée et familiale des aspirants et aspirantes. Les instructeurs qui sont sur le site ne sont pas toujours au fait des pratiques, des procédures et de la réalité cosmopolite de Genève. Il nous est décrit que beaucoup d'aspirants qui reviennent à Genève au bout d'un an doivent être reformatés au sein de leur service, car il existe des détails et des procédures qu'ils ignorent. A tout point de vue, les travaux ont montré que cette formation n'est pas adaptée à notre réalité cantonale, à ses aspects sociodémographiques, topographiques et culturels.
Durant nos travaux, nombre de ces constats avaient engagé le département dans un travail qu'il a livré en réponse à la motion 2540 votée par ce parlement. Le département a émis des axes de réflexion et des recommandations qui n'ont pas fait l'objet de propositions législatives et a fait savoir qu'il ne déposerait pas de projet de loi allant dans le sens ou comprenant les deux changements majeurs voulus par ce projet de loi, à savoir le retour de la gendarmerie pour mettre fin au système des silos et la volonté d'inscrire une formation cantonale à Genève. La majorité de la commission, constituée de tous les partis sauf le PLR, a refusé les amendements du département, estimant que les écueils les plus problématiques de la loi actuelle ont été évacués par le présent projet de loi.
Forte de ces considérations, la majorité de la commission judiciaire et de la police vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter le PL 12521. Merci.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de minorité. Mesdames les députées, Messieurs les députés, ce projet de loi va induire des défauts structurels graves au sein de la police et va rendre son pilotage impossible; on peut le traduire par plus d'opacité et moins d'efficacité.
Commençons par un bref résumé de la forme de nos travaux pour préciser que, contrairement à ce qui a été dit, ce n'est pas pendant 22 séances que nous avons traité cet objet puisque - et la rapporteuse de majorité l'a dit - les objets liés à la police avaient été groupés, ce qui fait qu'on voit apparaître 22 fois le numéro du PL 12521, mais en fait, nous avons traité cet objet durant huit séances. C'est beaucoup, mais par rapport à 22, c'est déjà beaucoup moins.
Et qu'avons-nous fait pendant ces huit séances ? Les auditions des divers syndicats et de la commission du personnel de la police ou leurs courriers ont occupé cinq séances; le département de la sécurité a été entendu à quatre reprises, parfois en présence de la commandante de la police et du directeur des opérations; deux séances ont été consacrées à des présentations et discussions sur la formation policière et la gouvernance, dont aucun élément n'a été retenu dans le cadre du PL 12521. Par contre, le Ministère public n'a pas été auditionné, alors que, depuis Justice 2011, l'entier de la police travaille pour toutes les activités judiciaires; 75% des activités judiciaires sont réalisées par la gendarmerie actuelle et non pas par la police judiciaire, qui n'en réalise que 25%. (Remarque.) Le Ministère public n'a pas été auditionné. Nous n'avons pas auditionné les chefs des services qui sont tellement critiqués ici, c'est-à-dire les chefs de police-secours, de la police de proximité, de la police internationale ou de la police routière. Ce sont ces services qui ont des policiers et des gendarmes en contact avec la population. Nous n'avons pas auditionné ces services. Nous n'avons pas non plus auditionné l'organe de médiation de la police, qui, avec le nouveau projet de loi, se retrouve chargé de tâches qui relèvent aujourd'hui de l'inspection générale des services.
On voit donc très bien que le travail effectué a consisté à recevoir des personnes qui étaient a priori favorables au projet de loi; le département a été auditionné en position défensive, mais ceux qui pouvaient vraiment nous renseigner sur la manière dont fonctionne aujourd'hui la police de terrain et le Ministère public chargé de toutes les activités judiciaires de la police n'ont pas été auditionnés. Voilà donc pour la forme. Le travail a effectivement été bâclé, il n'a été fait que partiellement. (Commentaires.) C'est la raison pour laquelle ce projet, à la fois sur le fond et la forme, n'est pas acceptable.
Maintenant, je ferai un rappel historique: la loi sur la police actuelle - la LPol tant critiquée -, contrairement à ce que ses détracteurs prétendent, n'a pas consisté à créer ex nihilo de nouvelles structures en silos ou de nouvelles hiérarchies, mais à donner une base légale cohérente à des innovations qui s'étaient imposées progressivement en tant que besoins au commandement de la police depuis le début des années 2000 déjà. Souvenons-nous du projet Phénix, qui a façonné les contours de la police du futur et de la LPol actuelle et qui a été présenté en juin 2011: il avait pour objet d'identifier toutes les missions que la police devait être en mesure d'accomplir pour répondre aux besoins de la population. C'est ce qu'on retrouve aujourd'hui dans les différents services tant critiqués - police-secours, police de proximité, police internationale, police judiciaire et police routière. Ces missions ont fondé la structure actuelle. Il s'agissait de rendre plus visibles et plus efficaces les activités de prévention, de police de proximité au service de la population. C'est à ce moment-là que le service des commissaires et la direction des opérations ont été instaurés, de même que le projet de formation intercantonale, qui s'inscrivait dans un nouveau concordat romand. En 2011, quand ce projet a été présenté, il a reçu un accueil politique et syndical largement positif. Il faut donc se remettre dans l'histoire et non pas accuser la LPol d'avoir tout à coup imposé une organisation. On a tous un peu en tête l'idée que cette loi est celle de Pierre Maudet: Pierre Maudet a mis en forme juridique des modifications organisationnelles et structurelles qui s'étaient imposées en tant que besoins bien en amont. Et ça, c'est un point essentiel à retenir pour la suite de nos débats.
Je reviens sur des changements majeurs qu'introduirait ce PL 12521, notamment la suppression de la direction des opérations. On est en train de critiquer la question de la coordination; c'est la direction des opérations - une solution d'ailleurs trouvée bien avant le projet de réforme qui a conduit à la LPol, c'est-à-dire entre 2008 et 2011, qui avait pour but de coordonner tous les moyens de la police en vue des grands événements ponctuels, à l'instar des grandes conférences internationales. A l'origine, la direction des opérations était intégrée à l'état-major de la gendarmerie, mais elle est devenue une entité propre et transversale en 2012 - une fois de plus, avant la LPol attaquée aujourd'hui.
La suppression de la direction des opérations que vous voulez est un retour en arrière qui limite la capacité du commandement de la police à acquérir la vue d'ensemble de la situation et des engagements, met à néant les efforts de consolidation et de diffusion du renseignement et réduit la capacité de planification et de mobilisation des forces nécessaires en cas de besoins ponctuels ou sur la durée. La direction des opérations permet le suivi du renseignement, de la planification - le centre des opérations et de la planification, où l'on gère notamment la mobilisation des policiers -, de l'engagement - la centrale d'engagement, de coordination et d'alarme -, de l'urgence - les commissaires - et de la conduite permanente des moyens policiers. Supprimer la direction des opérations serait donc une véritable catastrophe pour la police.
S'agissant de la gouvernance, la commandante de la police se trouve aujourd'hui en ligne directe avec les chefs de service de la direction des opérations, de police-secours, de la police de proximité, de la police internationale, de la police routière et de la police judiciaire. Ce groupe-là constitue un comité de direction. Cela permet à la commandante d'avoir une action directe sur le fonctionnement de la police. Avec l'organisation que vous proposez - un nouveau commandement de la gendarmerie -, vous créez un niveau hiérarchique supplémentaire, qui va continuer à avoir en son sein des silos comme ceux que vous évoquez, perdant toute capacité de coordination et faisant écran aux possibilités pour la commandante de la police d'agir directement sur les différents services. Donc, davantage d'opacité, un pilotage opérationnel et un contrôle politique et démocratique qui se perdent. Je vais m'arrêter là pour le moment. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Sébastien Desfayes (PDC). J'aimerais d'abord revenir sur les critiques portant sur la forme émises par le député Conne à l'égard de la commission judiciaire. Il indique que celle-ci a commis une erreur en ne souhaitant pas entendre le procureur général. Ce que je tiens à lui rappeler - vous transmettrez, Monsieur le président -, c'est que lui-même a été président de la commission judiciaire et qu'en cette qualité, il a présidé les travaux sur la réforme de la LPol. Sous sa présidence, je crois que quatre ou cinq séances ont été consacrées à ce sujet, et pas une fois il ne nous a proposé d'entendre le procureur général. Pourquoi ? Tout simplement parce que cette réforme n'a aucun impact sur le travail de la police judiciaire et sa relation avec le Pouvoir judiciaire. Voilà ce que je tenais à dire par rapport aux critiques à teneur desquelles la commission judiciaire aurait bâclé son travail.
Sur le fond, vous le savez, la sécurité des biens et des personnes, c'est le premier devoir de l'Etat. Et pour avoir une sécurité, on doit avoir une police, une police motivée, bien organisée et bien formée. Aujourd'hui, et tout le monde le sait et tout le monde le dit, que ce soit en commission ou à demi-mot, quel que soit le grade, la police est en état de déliquescence, la police aujourd'hui, du fait de la LPol, privilégie la bureaucratie au détriment de la présence sur le terrain, et l'on a aujourd'hui à Savatan une formation qui est militaire ! Une formation qui ressemble à celle qui est dispensée à des milices ! Je n'ai pas dit des soudards, mais des milices ! (Commentaires.) Ce n'est pas une formation pour une police républicaine !
Ce constat est unanimement partagé, et sauf à être dans un déni total, absolu, on doit prendre ses responsabilités. C'est ce que la commission judiciaire a fait. Elle a subi beaucoup de pression de la part du Conseil d'Etat, mais elle a assumé ses devoirs et elle est aujourd'hui extrêmement fière du projet de loi qui vous est soumis. Mme Osmani a parlé - et a bien parlé - déjà du premier axe de la réforme, qui est celui des silos. Le député Conne nous a dit: «La direction des opérations, c'est quelque chose de fondamental.» Oui ! Quand on a six silos, avec une confusion totale dans les missions, on a bien entendu besoin, en dessus, d'un étage supplémentaire, d'une couche supplémentaire du millefeuille, parce qu'on ne sait pas qui fait quoi, qui commande qui et quelles sont les missions de chacun des silos. Et on a, à cause de ça, un gonflement de la hiérarchie; on a des armées mexicaines. Pour abreuver cette hiérarchie et pour donner suite au ruissellement bureaucratique qui en est la conséquence, on assiste à un déplacement des effectifs. Et les effectifs, loin d'être sur le terrain, sont aujourd'hui dans les bureaux ! (Remarque.) On a des ronds-de-cuir, alors qu'on a besoin de personnes sur le terrain ! Ça, c'est quelque chose d'inadmissible ! C'est quelque chose qui est contraire aux intérêts de Genève et de sa population. Et on a aussi, à cause des silos, des services qui sont jaloux des prérogatives des autres, et on assiste à une guerre - je ne vais pas dire des polices, mais pire encore, à une guerre des silos. Est-ce qu'on veut continuer avec ça ? Il en est absolument hors de question ! Personne ne le veut, que ce soient les policiers sur le terrain ou les gradés. Alors simplement, ce que nous proposons, c'est de revenir à la simplicité et à l'efficacité et d'avoir la gendarmerie et la police judiciaire, parce qu'il s'agit bien de dieux... de deux métiers distincts. (Rires.)
J'aimerais également parler de la formation. Un rapport qui a dans un premier temps été caché aux médias a éclairé d'une lumière crue la formation à Savatan. La RTS a pu avoir connaissance de ce rapport. Je vais simplement vous lire des extraits cités par la RTS: «Certes, il faut de la discipline, mais "on ne peut pas préparer des miliciens à des situations de combat" [...] A Savatan, "on axe trop sur la crise"» et on forme des CRS. «[...] l'accent mis sur le conditionnement physique entraîne des dérives dans la formation. "Le mode martial amène à privilégier l'intensité plutôt que le contenu, l'obéissance plutôt que la capacité de discernement, la conformité plutôt que l'autonomie." [...] les aspirants perçoivent tout environnement comme a priori dangereux.»
Est-ce cette formation que l'on veut donner aux policiers de Genève ? Bien entendu que non. Eux n'en veulent pas. Vous demandez à n'importe quel policier, même ceux qui sortent de Savatan, ils disent: «Vous devez changer !» Nous ne voulons pas d'une formation militaire. Je le répète, nous voulons une formation républicaine, et une formation dispensée à Genève. Pourquoi ? (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Simplement pour que la formation tienne compte aussi des spécificités du canton et de la région, comme l'a relevé Mme Osmani.
Alors on peut dire que la police est un corps abstrait, quelque chose d'immatériel. Non: la police, la qualité de la police...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Sébastien Desfayes. ...dépend des hommes et des femmes qui la forment. On peut nous dire de ne pas tenir compte de leur avis.
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Sébastien Desfayes. Ce serait une grave erreur. Nous les avons entendus et nous redonnerons au canton la police qu'elle mérite ! Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Youniss Mussa (S). Chères et chers collègues, une critique du régime actuel réside dans le fait que la police est organisée en silos. Des études ont notamment prouvé que les policiers et policières ont une opinion très défavorable de l'attitude de l'état-major et de ses relations avec eux; ensuite, un moral très dégradé, une motivation en berne, une perte de satisfaction au travail et une évaluation pessimiste de l'avenir de la profession. Enfin, les policiers et policières émettent des plaintes plus ciblées concernant le volume de travail, les équipements, les horaires, les congés ou encore la formation. Ils jugent que la LPol actuelle péjore leurs capacités opérationnelles.
Le problème du cloisonnement des services revient rapport après rapport. Police-secours, police routière, police internationale, police de proximité: ce cloisonnement partait d'une bonne intention, mais il est évident que l'ancienne gendarmerie permettait une plus grande fusion des profils et une moindre différenciation. Même si elle comptait déjà de nombreux spécialistes à l'interne, l'image extérieure était davantage celle d'un corps de police unifié et polyvalent.
Concernant la formation, le parti socialiste défend une formation qui réponde aux demandes des policiers, notamment celle de pouvoir concilier leur vie privée et leur vie professionnelle, une formation genevoise adaptée aux réalités genevoises.
Après quatre ans de travail, 24 séances de commission, la très large majorité de la commission, à l'exception du PLR, a souhaité améliorer l'organisation de la police dans notre canton. Alors vous transmettrez, Monsieur le président, au conseiller d'Etat Mauro Poggia: le travail n'a pas été bâclé - j'invite les personnes qui nous regardent à prendre connaissance du rapport de 350 pages.
Les demandes de la part des policiers, des syndicats et de la population sont claires: Genève se doit d'avoir la police la plus efficace, une police capable de répondre à toutes les interventions, une école leur permettant de se former au mieux. Tous ici sauf le magistrat et le PLR pensent que la LPol doit être améliorée. Le temps de l'expérimentation est terminé, il faut avoir le courage de reconnaître ce qui ne fonctionne pas dans l'organisation et la formation de la police. Combien de projets de lois, combien de motions, combien de questions, combien de pétitions faut-il pour que le conseiller d'Etat se rende compte des dysfonctionnements de la LPol actuelle, du sentiment d'abandon de la part des policiers, d'un taux de pensées suicidaires qui n'a jamais été aussi élevé ? Quelles réponses de la part du conseiller d'Etat ? Aucune. Alors oui, Monsieur le conseiller d'Etat, la majorité de ce parlement a décidé d'effectuer le travail que vous auriez dû faire en travaillant sérieusement sur une réforme. Le travail bâclé vient des rangs du PLR et du magistrat.
Aujourd'hui, le conseiller d'Etat Mauro Poggia - vous lui transmettrez, Monsieur le président - arrive avec une série d'amendements, mais où était-il lors du travail en commission ? Il n'a pas fait le travail; le parti socialiste ne sera pas dupe par rapport à sa tactique pour noyer la réforme en déposant une série d'amendements vingt-quatre heures avant le vote en plénière. Nous l'invitons à faire preuve d'un peu plus de respect pour le premier pouvoir de ce canton qu'est le parlement. (Remarque.)
Les policiers et policières méritent que nous leur garantissions des conditions de travail dignes, stimulantes, en faisant preuve d'écoute, ce qui a malheureusement manqué jusqu'ici, je le crois. Pour toutes ces raisons, je vous invite, au nom du groupe socialiste, à voter ce projet de loi ainsi que les amendements déposés par la majorité. Je vous remercie.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, est-ce que ce soir, nous avons le courage de parler vrai, de parler juste et de sortir de nos habitudes, de nos clivages et de nos chapelles politiques ? Personnellement, en treize ans de mandat, c'est la première fois que, dans une commission, je vois un tel consensus sur un projet de loi entre des groupes fondamentalement, idéologiquement différents. Mais pourquoi ? Parce que, bien sûr, ce projet de loi vise au «bien-être», entre guillemets, de la police, mais surtout à son efficacité pour notre population genevoise ! Rappelons quand même qu'en ce qui nous concerne, déjà le 16 novembre 2017, nous avions déposé un projet de loi qui demandait justement une refonte et une différenciation entre le travail de la police judiciaire d'une part et de la gendarmerie d'autre part, ce qui a été repris dans ce projet de loi.
Où sommes-nous arrivés aujourd'hui ? Nous sommes arrivés à une clé de voûte, pas à un travail bâclé ! Rappelons que ce projet de loi a été déposé le 14 mai 2019, or nous sommes à la fin de l'année 2022. Dire qu'on a bâclé le travail... Quand on regarde les 350 pages - entre parenthèses, je remercie Mme Xhevrie Osmani pour son excellent rapport -, on voit que tout a été exploité, tout a été vu.
Ce qui me navre ce soir, c'est qu'au lieu d'entrer en matière sur un projet de loi pour faciliter, améliorer la vie de Genève, nous entrons dans un conflit avec le Conseil d'Etat. Est-ce normal ? Je réponds: non, ce n'est pas normal ! Nous ne sommes pas là pour dire que vous avez mal travaillé et que ce n'était pas bien. La situation a évolué. Un premier projet de loi a montré ses défaillances, a montré qu'il ne convenait pas; il fallait que la députation s'en occupe. Elle l'a fait sciemment, longuement, sans précipitation. Vous avez lu le rapport, d'autres députés s'exprimeront, mon but n'est pas de dire, pour chaque chose, ce qui est bien, mais qu'il est essentiel pour notre république que ce soir... L'Union démocratique du centre ne tient pas un discours électoraliste; elle n'est pas assujettie aux syndicats de police; elle pense que le projet initial de la loi sur la police n'est pas bon; que le projet que nous soumettons à votre vote ce soir est abouti et a réussi à obtenir de nombreux accords et de nombreux soutiens. Je rappelle quand même - cela a été dit, je crois, par Mme Osmani - qu'il y a eu des expertises; la Cour des comptes s'est exprimée à ce sujet, d'autres aussi se sont exprimés.
En ce qui concerne l'Union démocratique du centre, nous refusons de mener un combat contre le Conseil d'Etat. Celui-ci devrait comprendre que ce travail de consensus effectué par une grande majorité des députés à la commission judiciaire vise à améliorer notre situation, la situation de la sécurité à Genève, et non pas à entrer dans de vaines luttes de chapelles. Raison pour laquelle l'Union démocratique du centre s'associe aux cinq autres partis et vous demande d'accepter ce projet de loi, ainsi que les deux amendements proposés par notre commission. Je vous remercie.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Jean Batou (EAG). Le projet de loi 12521 a été déposé il y a trois ans et demi pour répondre à une crise sérieuse au sein de la police. Cette crise avait été identifiée notamment par un sondage organisé par la commission du personnel ainsi que par une étude de l'Université de Genève; elle résultait en bonne partie de changements introduits par la nouvelle LPol entrée en vigueur en 2016. Tous les partis, qu'ils aient soutenu la LPol à l'époque ou qu'ils s'y soient opposés, sauf le PLR, sont arrivés à la même conclusion: cette loi ne fonctionne pas, il faut la réformer. C'est le travail qui a été réalisé par la commission judiciaire et de la police.
Nous vivons aujourd'hui un paradoxe, puisque le principal architecte de cette loi, Pierre Maudet, confiait récemment sur Léman Bleu qu'il avait commis des erreurs à l'époque et qu'il avait sous-estimé l'importance de la cohésion de la gendarmerie, et c'est maintenant le représentant au Conseil d'Etat du parti qui avait lancé le référendum contre la LPol qui la défend dur comme fer; comprendra qui pourra.
Que voulons-nous ? Nous voulons une police citoyenne, proche de la population, qui la protège quand elle fait appel à elle, en particulier les plus faibles d'entre nous. Nous voulons une police au service du public tout comme le corps enseignant, les travailleurs sociaux et l'hôpital, avec lesquels elle est appelée à collaborer. Nous voulons une police formée dans une école proche du terrain genevois et de ses spécificités, dont les aspirants restent intégrés dans leur cadre de vie, dans leur famille, dans leur quartier. Nous voulons une police qui reconnaisse les différences entre le métier de gendarme et celui d'inspecteur de la police judiciaire et permette aux aspirants de choisir entre ces deux filières. Nous voulons enfin une police dont la formation soit décidée par le canton dans lequel elle opère et non au gré d'accords intercantonaux qui échappent à tout contrôle démocratique.
Que ne voulons-nous pas ? Nous ne voulons pas d'une police qui sous-traite ses missions à des services cloisonnés, séparés, spécialisant de façon excessive les tâches de ses membres au risque de les priver d'une expérience diversifiée et d'un contact varié avec la population. Nous ne voulons pas d'une police structurée à la façon d'une armée mexicaine avec une pléthore de gradés. M. Poggia le reconnaissait dans une lettre adressée à notre commission le 22 septembre dernier: il nous écrivait que si le projet de loi 12521 était adopté par le parlement, il ne saurait plus que faire d'un certain nombre de gradés et de hauts cadres au sein de la police. Enfin, nous ne voulons pas d'une police formatée en caserne dont le bilan de la loi d'organisation soit confié au rédacteur en chef de la «Revue militaire suisse».
Pour l'ensemble de ces raisons, Mesdames et Messieurs, nous vous appelons à accepter le projet de loi 12521 de même que l'amendement pour des mesures transitoires qui va dans le sens de trouver un accord avec le magistrat. Celui-ci objecte que le retour de la formation à Genève prendra du temps; eh bien nous lui laissons deux ans pour la rapatrier ici. Quant à la réorganisation de la police, elle pourra se faire un peu plus vite. Ces mesures transitoires sont importantes. Merci. (Applaudissements.)
M. François Lefort (Ve). Bon, tout a été dit, mais je signalerai néanmoins au rapporteur de minorité que jamais des demandes pour auditionner des chefs de service n'ont été présentées en commission ! J'entends cela pour la première fois, et il siégeait pourtant avec nous en commission. Pourquoi ne nous en a-t-il pas parlé ?
J'ajouterai qu'il n'a nul besoin de reprendre des qualificatifs dégradants pour décrire le travail effectué par les députés de la majorité qui ne lui plaît pas, comme «travail bâclé» - ce ne sont pas ses mots, bien sûr, je les ai entendus dans d'autres bouches -, et espérer ainsi obtenir quelque crédit de ce parlement et des rares auditeurs qui ne sont pas encore épuisés par les vaines tartarinades que nous entendons ce soir. Un rapport de 350 pages de l'excellente députée Xhevrie Osmani, cela ne souscrit pas exactement aux critères d'un travail bâclé.
Concernant le procureur général - que nous apprécions beaucoup par ailleurs -, convoqué en grand témoin du manque de professionnalisme de la commission, je rappellerai que la première volée des amendements du département, dont vous trouverez copie dans le rapport de l'excellente députée Xhevrie Osmani, ne lui ont jamais été présentés avant de nous être soumis. Or la norme, quand des projets de lois touchent au Pouvoir judiciaire, c'est précisément de présenter les amendements d'abord au procureur général. Si ces amendements ont fatalement succombé en commission, c'est parce qu'ils étaient inadéquats, et ils étaient inadéquats parce que produits dans la fébrilité et l'urgence face à la révélation soudaine que notre projet de loi était majoritaire en commission - un projet de loi qui datait pourtant de 2019 et était donc connu depuis longtemps, mais cela n'était visiblement pas crédible aux yeux du département.
Le texte que nous vous proposons ne constitue certainement pas la solution ultime, Mesdames et Messieurs, mais il est meilleur que la loi actuelle et il passera ce soir. Il passera d'ici peu, parce qu'il y a une majorité solide. Il passera avec quelques amendements du Conseil d'Etat - ce n'est pas pour lui faire plaisir, mais parce qu'ils sont justes - figurant dans la nouvelle volée d'amendements que nous avons reçus hier et que nous avons étudiés en moins de vingt-quatre heures: nous les avons analysés et nous nous sommes déterminés dessus. Et sans bâcler le travail ! En vingt-quatre heures ! Nous avons réussi à trier l'utile de l'inutile, mais surtout en conservant la majorité.
En résumé, les Verts, cosignataires de ce projet de loi depuis le début, Monsieur le magistrat, voteront des amendements du Conseil d'Etat, mais pas tous. Je m'en excuse, je suis navré. Ils voteront les modifications du Conseil d'Etat aux articles 5, 6 et 62, soit trois amendements sur onze. Je m'en excuse encore, ce n'est pas suffisant, je sais. Et ils voteront bien sûr l'amendement de la majorité présenté par le député Batou qui introduit des dispositions transitoires à 2023 et 2025 pour la mise en oeuvre de cette nouvelle LPol, qui est plus utile, plus juste et plus efficace que l'ancienne loi sur la police. «Alea jacta est !» A plus tard. (Applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). En 2014, le MCG était opposé à la nouvelle loi sur la police, cette LPol qui signait la destruction de la gendarmerie et créait des silos, des structures qui, comme nous l'avions prévu, comme nous l'avions hélas - hélas ! - annoncé, désorganisaient le fonctionnement de la police. Nous avons ensuite vu tous ces défauts se concrétiser: accroissement massif et inquiétant de la hiérarchie - certains ont parlé d'armée mexicaine, on n'en est pas tellement loin -, service à la population péjoré malgré ses besoins. Nous avions même déposé un référendum et nous avions obtenu les signatures suffisantes en 2015 pour faire voter les Genevois sur cette loi.
Je rappelle que Roger Golay lui-même, alors conseiller national - il avait présidé la commission chargée de la sécurité au niveau national et était donc tout à fait compétent dans ce domaine -, le prédisait: «Attention, nous allons droit dans le mur avec cette nouvelle loi !» Il l'annonçait, nous l'annoncions, et nous voyons maintenant, quelques années plus tard, suite à un travail législatif, suite aux efforts du département également... Je tiens ici à remercier Mauro Poggia, qui a travaillé de son côté au sein des services pour améliorer une partie du fonctionnement du département, mais ce n'était malheureusement pas suffisant, il faut vraiment passer par la voie législative, par des changements structurels.
C'est ce que propose le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui et c'est pour cela qu'il est important de le voter, Mesdames et Messieurs. Il faut l'accepter pour réintroduire la gendarmerie, c'est une nécessité. On se rend compte que la suppression de la gendarmerie a été quelque chose de l'ordre du gadget qui a eu des répercussions très négatives, cela a divisé la police en ces silos absurdes. C'est la même vision qui a fait faillite à Neuchâtel. Quel grand bien aurions-nous pu retirer si nous avions vu ce qui se passait dans les montagnes neuchâteloises ! Nous aurions compris que la situation telle qu'elle était se dégradait dans ces régions; elle s'est détériorée à Genève.
Ce que nous voulons, au MCG, est très simple: nous voulons une police au service de la population, au service des citoyens, nous voulons une police républicaine, une police citoyenne. Voilà ce que nous défendons depuis des dizaines d'années et que nous continuerons à défendre. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes associés à ce projet de loi et vous invitons à l'adopter.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, l'article 11 de notre constitution cantonale consacre les principes de consultation et de concertation. L'article 110, quant à lui, souligne l'importance de la consultation des communes lors de travaux préparatoires concernant des actes législatifs importants. La loi sur la police est un acte législatif important. Dans le cadre de ses travaux, la commission s'est contentée d'entendre le département, l'état-major de la police et les différents syndicats; elle n'a pas jugé utile d'auditionner les communes ni les chefs des différents services de la police.
Or l'article 11, alinéa 1, de la loi sur la police stipule: «Par sa visibilité et ses partenariats durables avec la population et l'ensemble des institutions publiques et privées, notamment les communes, la police de proximité assure la prévention de la criminalité, selon les spécificités sociétales de chacun des secteurs dans lesquels elle est déployée.» C'est dire l'importance des interactions qui existent et qui doivent continuer d'exister entre les communes et la police de proximité.
La commission n'a pas non plus estimé judicieux de recevoir le Ministère public. Pourtant, le terme «police» apparaît à 109 occurrences dans le code de procédure pénale suisse qui, à son article 15, lui consacre même une disposition spécifique et cardinale pour tout le pays. C'est dire l'importance des interactions qui existent et qui doivent continuer d'exister entre la police cantonale et le Ministère public.
Nous reconnaissons bien volontiers que la loi sur la police, dans sa forme actuelle, est perfectible. C'est d'ailleurs le lieu de rappeler que c'est sur l'initiative de notre groupe... (L'orateur insiste sur le mot «notre».) ...que le Grand Conseil a adopté une motion demandant un bilan de cette loi trois ans après son entrée en vigueur. Nous ne comprenons donc pas l'empressement de la majorité de ce parlement à voter ce projet de loi sans consulter les partenaires essentiels de la police que sont les communes et le Ministère public. Il nous est difficile d'y voir autre chose qu'une manoeuvre bassement électoraliste et clientéliste procédant d'un grave mépris de nos institutions.
Mais il y a plus. Les différentes modifications législatives qui nous sont proposées nous laissent songeurs. Prenons quelques exemples. Le projet de loi veut rétablir la gendarmerie. Le groupe PLR n'a pas d'objection de principe à cela; nous savons que nos forces de l'ordre sont attachées à leur histoire et aux traditions dont elles sont les héritières depuis plus de deux cents ans. Néanmoins, il nous est difficile de comprendre que ce retour à la gendarmerie, qui est historiquement un corps d'origine militaire, s'accompagne d'une suppression de la référence à l'organisation militaire de la police qui existait pourtant déjà dans l'ancienne loi. La rapporteure de majorité, qui excelle dans l'art du copier-coller de procès-verbaux, va même parler de militarisation de la police alors que l'on n'exige aujourd'hui plus du tout des aspirants policiers qu'ils fassent leur école de recrue. Quant au chef de groupe du PDC - le parti du Centre -, il soutient qu'on ne peut pas former des miliciens au combat; se sentait-il donc si inutile au sein des troupes d'artillerie dans lesquelles il a servi ?
Cette approche est d'autant plus incompréhensible que l'on nous propose désormais de soumettre la police à une hiérarchie pyramidale. Alors nous savions que notre collègue Jean Batou s'était découvert une soudaine passion pour les questions de politique de sécurité, mais nous ne savions pas qu'il était également un égyptologue de renommée mondiale !
Autre exemple: le projet de loi tel qu'il nous est présenté aujourd'hui semble vouloir armer le personnel administratif de la police. On ne peut que s'en étonner. J'ai encore dans le souvenir un projet des Verts visant à créer des détachements non armés de police sur le modèle britannique. Oui, Mesdames et Messieurs, nos bobos voulaient des «bobbies» !
Encore un exemple: on oublie les assistants de sécurité publique. Si on avait auditionné le Ministère public, il nous aurait dit la contribution décisive des ASP dans le convoyage des détenus. Enfin, on laisse de côté la dimension répressive de la police. Mesdames et Messieurs, comment voulez-vous que notre canton puisse continuer de pourrir la vie aux automobilistes et autres deux-roues motorisés si la police ne peut pas les sanctionner ?
Le Conseil d'Etat a déposé un certain nombre d'amendements qui auront notre soutien. Néanmoins, nous aurions aimé que l'état-major de la police puisse aussi en prendre connaissance, que les communes et le Ministère public soient consultés, donc pour l'ensemble de ces raisons, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs, à renvoyer ce projet de loi à son expéditeur, qui l'a travaillé dans la précipitation et l'aveuglement. Merci de votre attention. Renvoi en commission, donc ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Je cède la parole aux rapporteurs et au Conseil d'Etat s'ils souhaitent intervenir à ce sujet. Madame Xhevrie Osmani, c'est à vous.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Le travail ayant été effectué, nous refuserons bien naturellement cette demande de renvoi en commission.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de minorité. Comme cela a été indiqué, le travail n'étant pas complet, il est essentiel de renvoyer ce projet de loi en commission. Merci.
M. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le renvoi en commission s'impose, puisque le travail réalisé en commission, je le répète, n'est pas digne d'un parlement. Si cette loi que vous avez modifiée était un prévenu condamné par un tribunal comme vous l'avez condamnée lors de la séance du mois de septembre, vous auriez honte pour notre justice, Mesdames et Messieurs.
Lors de vos travaux, vous avez entendu les syndicats et uniquement les syndicats, y compris celui des APM, des agents de police municipale genevoise, vous avez également auditionné le département qui, chaque fois que vous l'avez invité, est venu vous faire part de l'état des opérations, a toujours reconnu qu'un processus était en cours et que la loi sur la police devait être modifiée sur certains points, y compris ses règlements, y compris des directives, parce que nous étions conscients que la situation telle que nous la connaissions - mais qui a évolué depuis - méritait des changements.
Or voilà qu'un projet de loi déposé, je le rappelle, en 2019, depuis que le nouveau président de la commission a pris ses fonctions, en quatre mois à peine, dont deux mois de vacances, a été paqueté avec des amendements qui font pourtant l'objet d'une réponse aujourd'hui, même si elle est jugée tardive. Je voudrais remercier le rapporteur de minorité pour la qualité de son travail, un travail d'analyse et pas simplement de copier-coller des procès-verbaux de séances. (Exclamations.)
En effet, je pense qu'un rapport doit refléter les débats. Dans le cas d'espèce, les votes ont eu lieu sans le moindre débat. Prenez les dernières pages du rapport sur les votes, Mesdames et Messieurs: il n'y a eu aucune discussion. Or lorsqu'on doit appliquer une loi, que fait-on en cas de doute ? On va chercher la volonté du législateur. Il n'y a eu aucun débat sur l'ensemble des amendements, c'était un peloton d'exécution ! Avec toujours les mêmes qui votaient oui et les mêmes qui votaient non, très largement minoritaires. Ce n'est pas ce que j'appelle un travail digne, Mesdames et Messieurs.
Le but n'est pas de procrastiner; j'avais d'ailleurs moi-même indiqué qu'à fin 2022, le tout devait être sous toit. Si ce projet de loi retourne en commission, en deux ou trois mois, avec quelques séances, vous pouvez entendre le Ministère public. A cet égard, Monsieur le président, vous rappellerez à M. le député Desfayes, qui semble souffrir de troubles de mémoire, qu'en ce qui concerne la LPol, le Ministère public avait obtenu de disposer d'un représentant à toutes les séances; c'est M. le premier procureur Grodecki qui représentait le Ministère public, ce qui veut dire que l'on avait bien conscience alors que l'on ne modifie pas une loi sur la police sans que le Ministère public soit présent. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Madame Dilara Bayrak, vous souhaitiez vous exprimer sur le renvoi en commission ? (Commentaires.) Non, voilà, on est d'accord. Aussi, préalablement à votre prise de parole, nous procédons au vote sur la proposition de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12521 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 69 non contre 27 oui et 1 abstention.
Le président. Nous poursuivons la discussion. Allez-y, Madame Dilara Bayrak.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Oui, merci, Monsieur le président. C'est intéressant que je prenne la parole maintenant, juste après le magistrat Mauro Poggia. Le parlement a largement donné l'occasion au Conseil d'Etat d'avancer sur ce sujet: trois ans ! Trois ans pour produire des rapports, réaliser un état des lieux, nous indiquer ce qui allait et ce qui n'allait pas dans la LPol. Trois ans qui n'ont servi absolument à rien si ce n'est à épuiser notre patience.
A la place, nous avons reçu un rapport tronqué qui ne reflète pas la manière dont il a été produit, sur la base de quelles auditions, pourquoi, et sa version finale ne nous est jamais parvenue malgré le vote de la motion mentionnée par le député Alder tout à l'heure, nous ne l'avons jamais obtenue.
C'est pourtant le devoir et la tâche principale du pouvoir législatif que de tendre l'oreille, d'être à l'écoute des souffrances des uns et des autres, et c'est ce que nous avons fait lorsque nous avons auditionné la police.
Je ne peux pas passer sous silence ce qui s'est produit lors du traitement de ce projet de loi, les menaces que nous avons subies, les pressions et les chantages auxquels nous avons été exposés, notamment à travers les médias, via les courriers du président du Conseil d'Etat ici présent, c'est juste scandaleux. C'était un irrespect total envers le travail de la commission, envers les députés, envers le fonctionnement même de nos institutions. On est même allé jusqu'à critiquer les députés de milice et le fonctionnement de ce parlement !
Je tiens à rappeler au député Alder que la commission du personnel a été entendue, que les syndicats ont été auditionnés, et plutôt que de vociférer en séance plénière, il aurait dû effectuer son travail en commission au lieu de claquer la porte et de partir au milieu des débats ! (Applaudissements.) Je vous remercie. (Commentaires.)
Une voix. Merci, merci beaucoup ! (Rires.)
Le président. Je vous remercie. La parole va à M. Yvan Zweifel pour quarante-cinq secondes.
M. Yvan Zweifel (PLR). Merci, Monsieur le président. Très rapidement, j'aimerais juste signaler que nous nous retrouvons maintenant, à l'issue de ce débat, avec onze amendements qui n'ont pas été discutés; l'audition du procureur général, pourtant essentielle, n'a pas été menée, celle des communes n'a jamais été faite non plus. Des questions demeurent en suspens: que se passera-t-il au niveau de la formation si l'on quitte Savatan ? Que se passera-t-il pour ces nombreux gradés dont on nous dit qu'ils sont nouvellement arrivés ? Mesdames et Messieurs, tous ces problèmes font qu'aujourd'hui, le PLR n'est pas en mesure de se prononcer sur le fond. Vous avez refusé le travail jusqu'au bout, vous avez refusé le renvoi en commission, en conséquence de quoi, parce que nous sommes dans l'impossibilité de nous prononcer sur le fond, le groupe PLR s'abstiendra.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je rends la parole à M. François Lefort pour cinquante-quatre secondes.
M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. J'ai bien entendu la plaidoirie de Me Alder, constitutionnaliste émérite, mais la non-consultation du procureur général n'est pas de notre fait. Pourquoi convoquer le procureur général ? Pour lui demander son avis sur des amendements qui ne lui ont jamais été présentés par le département ? La réponse est vôtre. La précipitation est celle du département, et la fébrilité qui s'est emparée de vous ou plutôt la schizophrénique partie radicale de votre parti qui est gagnée par cette agitation est vôtre également.
Pour notre part, nous ne sommes pas agités. Le moment est venu, et nous nous sommes montrés patients. Nous nous sommes montrés patients, nous n'avons rien bâclé. Ces permanentes accusations de légèreté, je vous les renvoie à vous ainsi qu'au département. Nous avons toujours été transparents sur nos objectifs; ils ont été déclarés, ils étaient clairs, ils étaient transparents et ils ont été atteints ce soir. Une minorité en est atterrée, cela arrive, c'est un apprentissage. Nous, les Verts, connaissons bien le statut de minorité, mais ce soir, nous sommes majoritaires et c'est pour le bien de la population. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie. Monsieur Alberto Velasco, la parole vous revient pour deux minutes.
M. Alberto Velasco (S). Merci, Monsieur le président. Ecoutez, chers collègues, je ne voulais pas intervenir, mais quand j'entends le président du Conseil d'Etat soutenir que M. Grodecki a siégé lors de nos travaux...! Monsieur le président, Grodecki n'a jamais siégé lors de nos travaux ! Il a participé une fois, effectivement, parce que M. le procureur général nous l'avait délégué pour un autre projet de loi, mais pas dans le cadre de la loi sur la police.
Ensuite, Monsieur le président, j'aimerais dire que c'est tout de même un peu cavalier, alors que vous avez eu trois ans pour répondre à ce qu'on vous demandait, de prétendre que le rapport a été bâclé quand la rapporteure n'a eu que deux semaines pour le rédiger. Vous, vous avez eu trois ans pour nous fournir une réponse. Je considère que ce n'est pas normal, Monsieur le président, de venir nous faire la leçon alors que nous vous avons interpellé à plusieurs reprises ici, notamment à l'occasion des budgets et des comptes, nous vous avons demandé de déposer les propositions d'amendements une fois pour toutes. Et c'est bien parce que nous n'avons jamais obtenu de réponse que nous avons élaboré notre propre projet de loi.
Je tiens enfin à vous dire, Monsieur le président, que nous avons été très étonnés quand, le dernier jour de la commission, votre secrétaire adjoint nous a dit que les amendements qu'il déposait étaient des prises de notes ! Nous pensions que les modifications présentées par le représentant de votre département avaient été discutées au sein des services ou du moins du Conseil d'Etat. Mais non, il nous a dit: «Ce sont des notes.» C'était en réponse à une observation du député Baertschi, si je ne me trompe pas. On était soufflés ! Donc non, Monsieur le président, non, non ! On a dû faire le travail, faute de quoi on en avait encore pour deux ans d'attente. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. C'est maintenant le tour de M. André Pfeffer pour deux minutes quarante-cinq.
M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. J'aimerais rappeler quelques faits avérés et incontestés: la loi actuellement en vigueur a démultiplié les secteurs et les silos au sein de la police genevoise, les chefs et l'encadrement dans les bureaux; elle a augmenté les difficultés de collaboration entre les différents services et diminué le nombre d'agents sur le terrain. A Genève, nous avons environ 1800 policiers cantonaux, 400 policiers municipaux et 7000 à 8000 agents de sécurité privée. Genève a besoin d'une police cantonale efficace et bien organisée ainsi que de policières et policiers motivés qui puissent travailler dans de bonnes conditions. Merci de votre attention.
Le président. Je vous remercie et donne la parole à M. Jean Batou pour une minute trente.
M. Jean Batou (EAG). Merci, Monsieur le président. Nous arrivons au terme d'un débat qui montre que la discussion démocratique, la réflexion collective peuvent amener à des solutions. Même si nous aurions souhaité une intervention plus proactive de la part de l'exécutif dans cette affaire, le parlement a réussi lentement, parce que c'est ainsi qu'il travaille, après trois ans et demi, à aboutir à un consensus autour de ce projet de loi. C'est tout le contraire du magistrat responsable de ce département qui a dit, pour l'anecdote: «L'inertie est le plus grand mouvement de l'histoire.» Eh bien non, l'inertie n'est pas le plus grand mouvement de l'histoire; ce qui fait avancer les dossiers, c'est la réflexion collective et le respect des procédures démocratiques.
Mesdames et Messieurs, je vous appelle à voter ce projet de loi, à accepter les amendements défendus par la majorité et enfin à vous féliciter que nous soyons arrivés, tous ensemble, à la fin d'un processus qui ouvre la porte à une amélioration du travail de la police, laquelle constitue une partie très importante du secteur public et mérite de travailler dans des conditions acceptables; elle doit être à la fois proche et au service de la population. Je demanderai le vote nominal sur ce projet de loi et sur les amendements. Merci.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Normalement, on demande le vote nominal avant chaque vote. Et le vote final est de toute façon déjà nominal. (Commentaires.) Le vote final est nominal. A présent, la parole échoit à M. le président du Conseil d'Etat, Mauro Poggia, pour deux fois sept minutes, soit quatorze minutes.
M. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je ne vais pas tenter de convaincre celles et ceux qui ne sont pas convaincus: pour espérer convaincre, il faut qu'il y ait un débat. Il n'y a pas eu de débat et...
Des voix. Oh !
M. Mauro Poggia. ...contrairement à ce qui a été dit - beaucoup de contrevérités ont été dites ici et il serait trop long de les prendre les unes après les autres -, le département a fait le travail. Il a fait le travail, parce qu'on ne modifie pas une loi sur la police comme une loi sur l'imposition de sacs de détritus ! La loi sur la police est un texte qui a besoin de stabilité, et c'est vrai qu'elle a été immédiatement critiquée; c'est vrai qu'elle a créé un émoi. C'est vrai que plusieurs objets ont immédiatement été déposés par les parlementaires, puis le travail a dû être fait.
Je rappelle que j'ai repris la sécurité au début de l'année 2019; il a fallu comprendre quel était le problème. J'étais aussi convaincu, parce que j'écoutais ce qui se disait autour de moi, que cette loi avait créé des silos étanches, qu'elle ne permettait pas la coordination et la mobilité transversales, et j'ai dû me faire mon opinion. J'ai mandaté, effectivement sous mon autorité, une personne qui a mené plus de cent septante entretiens à tous les niveaux de la hiérarchie - et pas seulement auprès de la police genevoise, mais également de l'ensemble des hiérarchies policières romandes et suisses - pour regarder ce qui se fait ailleurs et comment améliorer les choses.
Nous avons été entendus le 3 octobre 2019, le 18 juin 2020, le 17 décembre 2020, le 11 mars 2021, le 4 novembre 2021, le 28 avril 2022, puis encore juste avant le vote - mais c'était pour la forme puisque les dés étaient apparemment déjà jetés - le 29 septembre 2022. Chaque fois, avant cette dernière séance, les rapports avec la commission étaient bien sûr courtois - c'est la moindre des choses -, mais également constructifs ! Il n'y avait pas d'interrogations, s'agissant des commissaires; ils ne disaient pas, comme cela semble être le cas ici: «Mais vous nous menez en bateau, vous essayez de procrastiner pour ne rien changer du tout !» Pas du tout ! Mes interlocuteurs étaient convaincus de la bonne foi avec laquelle le travail se faisait et de la bonne foi avec laquelle nous avancions !
Et tout d'un coup, avec l'arrivée du nouveau président à la tête de la commission judiciaire et de la police, le 1er juin, on nous dit: «Il faut que vous nous transmettiez des amendements avant fin juin, sinon on votera le texte tel quel !» Alors je suis venu avec des amendements, qui n'étaient pas encore des amendements du Conseil d'Etat - les amendements du département sont bien sûr discutés avec mes collègues et ensuite, parce que nous avons un partenariat social, ils sont discutés avec les syndicats et avec la commission du personnel, puis nous venons vers vous avec un travail fini. Nous les avons déposés, et qu'a fait alors la commission ? Pendant l'été, elle a envoyé les textes tous azimuts - ils ont fait le tour de la république - en disant: «Déterminez-vous, parce qu'en septembre, on va voter !» Voilà comment a travaillé la commission judiciaire et de la police, Mesdames et Messieurs; c'est pourquoi je dis qu'on ne peut pas traiter de cette manière une loi sur la police et la sécurité de ce canton.
La loi sur la police comporte des problèmes, mais elle n'a pas généré tous les problèmes ! Les modifications qui se sont concrétisées dans la LPol sont bien plus anciennes. Je rappelle que le code de procédure pénale a été voté bien avant - sauf erreur en 2011 -, et ce code de procédure pénale a aussi impliqué des réformes de la police. C'était bien avant la loi sur la police ! Quand, lundi dernier, j'entends avec effarement M. le député Batou, que l'on interroge sur le triste événement du vendredi précédent - un inspecteur, dans un état pour le moins éméché, a tiré sur une poubelle dans son bureau -, déclarer à la radio que c'est à cause de la LPol, je me dis que là, on a perdu tout sens des responsabilités ! (Remarque.) Verbatim, Monsieur Batou, verbatim ! (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Mauro Poggia. Je pense donc qu'il faut changer les choses, mais il faut le faire avec intelligence, avec pondération. Et il faut bien sûr le faire d'ici la fin de l'année - je n'ai aucun problème avec cela ! C'est la raison pour laquelle j'étais effaré... (L'orateur insiste sur le mot «effaré».) ...de voir la précipitation avec laquelle on a simplement servi de porte-parole aux syndicats, qui ont fait leur travail. Je n'ai rien contre les syndicats de police: ils sont venus porter une certaine voix. Mais de là à croire ce qui vous a été dit - sur le taux de suicide, l'ambiance déplorable -, ça n'a rien à voir avec ce que j'observe au quotidien ! Je vais à Savatan ! Lisez le journal «La Région» d'aujourd'hui: on y voit la major de promotion, sortie première des aspirants, que l'on interroge sur son expérience à Savatan. Elle dit que c'était une super ambiance: le fait qu'on ait dormi là-bas, dit-elle, a vraiment créé un esprit de corps; on a pu travailler ensemble et on a pu nouer des relations avec des polices d'ailleurs, y compris des polices fédérales. Ce qui soude véritablement le corps de police à un niveau supracantonal ! Aujourd'hui, vous voulez vous replier sur ce qu'il y avait avant, parce que c'était mieux avant ! Bien sûr, si vous demandez à quiconque ici ce qu'il pense de sa jeunesse par rapport à aujourd'hui, je suis sûr qu'une majorité dira que c'était mieux avant, parce qu'on a cette nostalgie de ce qui était avant !
C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à la Cour des comptes de faire une analyse objective de la qualité de la formation. La Cour des comptes a accepté, elle est entrée en matière, et que décidez-vous finalement ? On n'a pas besoin de la Cour des comptes ! On n'a pas besoin de savoir si le Ministère public considère que les policiers font leur travail moins bien qu'avant, puisqu'on sait, les syndicats nous l'ont dit ! C'est donc forcément moins bien qu'avant; il faut changer les choses, il faut rapatrier les gens ici. Tout le concept de formation de la police a été changé: avant, la formation s'étendait sur une année, puis les gens entraient dans les corps auxquels ils étaient affectés. Aujourd'hui, elle se déroule sur deux ans; les premiers à avoir suivi le cursus sur deux ans ont fini en septembre 2022, Mesdames et Messieurs - hier ! Et on vient nous dire qu'il faut tout changer ?!
J'étais avec mes collègues romands à Morat aujourd'hui pour parler également de cette école multi-sites que l'on est en train de construire, afin précisément d'avoir une vision d'avenir et de ne pas se recroqueviller sur soi ! Mais je dois vous dire que les décisions que vous êtes sur le point de prendre interrogent ! Partout ailleurs, on se dit: mais comment fonctionne Genève ?! Comment peut-on, en tant que parlement, se prononcer sans même entendre des formateurs, sans même entendre le Ministère public, sans même entendre toutes les parties prenantes du travail de la police ? J'ai vu des chefs de service dire, la larme à l'oeil, quand la décision de la commission a été rendue: «Mais on ne m'a même pas entendu pour savoir comment sont les choses !» Ah, mais personne n'a demandé à l'être - pourtant, vous n'avez pas hésité une seconde à faire venir les syndicats ! Vous avez tellement peur d'entendre un autre son de cloche que celui dont vous avez envie, parce qu'il sonne de manière agréable à vos oreilles, que vous avez écarté tous ceux qui pouvaient vous dire autre chose !
Nous cherchons la même chose, vous et moi ! Nous voulons que la police soit efficace ! Nous souhaitons qu'elle soit à l'écoute de la population, qu'elle puisse intervenir rapidement, qu'il y ait davantage de fluidité entre les corps ! Vous pensez qu'on va effacer tous les problèmes en recréant la gendarmerie ? Ce que vous faites aujourd'hui, c'est créer une gendarmerie et une police judiciaire totalement hermétiques ! Vous êtes en train de semer les ferments d'une guerre des polices ! Vous savez que, de tout temps, il y a eu des difficultés à faire travailler ensemble ceux qui sont en civil et ceux qui sont en uniforme; et pourtant, ça commençait à marcher ! Et aujourd'hui, vous êtes en train de les séparer parce que vous considérez qu'on ne les forme pas bien.
Savez-vous combien d'aspirants de la police judiciaire sont formés par année, pour Genève ? Deux, Mesdames et Messieurs, deux ! Deux - et encore, pourquoi ? Parce que la police judiciaire ne veut pas accepter ceux de la police uniformée qui font acte de candidature; elle veut former les siens. Deux ! Ça fait combien de personnes depuis que cette loi sur la police est en vigueur ? Et on vient nous dire que plus rien ne marche parce que la LPol a tout cassé ?! Mais c'est n'importe quoi, Mesdames et Messieurs ! Vous êtes en train de vous jeter là-dedans la tête la première alors que vous devez faire un travail d'analyse, un travail de réflexion pour que les réponses que vous allez apporter dans cette loi soient véritablement celles que la population attend.
Monsieur le président, vous avez, je crois, porté au Mémorial une lettre que m'a écrite mon collègue, M. Vassilis Venizelos, qui s'occupe de la sécurité dans le canton de Vaud, très inquiet de ce qui se passe. Parce que nous travaillons ensemble... (L'orateur insiste sur le mot «ensemble».) ...pour essayer de construire une école qui nous permette aussi de faire des économies - ce n'est pas inutile ! Le coût par aspirant n'est bien évidemment pas le même si un cours est donné pour une classe de vingt-cinq ou pour une classe de cinquante. Or on veut ramener la formation ici, comme c'était le cas avant. Alors mon prédécesseur a sans doute manqué de tact. Sans doute ! Sans doute que, quand il a décidé de partir à Savatan, il aurait dû parler et faire participer notre centre de formation cantonal. Eux aussi sont restés dans l'incompréhension, parce qu'ils n'avaient finalement pas démérité. Pourquoi leur a-t-on retiré cette tâche ? Il fallait les associer à la démarche - mais ça ne veut pas dire qu'on va réparer les choses en faisant revenir la formation ici. En a-t-on les compétences ? Combien ça va coûter en plus pour le canton ? Et pour une qualité meilleure ? Certainement pas.
Avec cette formation sur deux ans, il y a un tronc commun d'un an à Savatan - mais ça peut être n'importe où ailleurs -, puis une année dans les différents corps. Si on est choisi, parce qu'on a les compétences et les affinités, pour la police judiciaire, eh bien cette deuxième année se concentrera davantage sur une formation de police judiciaire. Mais il faut qu'on apprenne les éléments de base ! Sinon on est un collaborateur scientifique, par exemple un ponte de l'analyse des infractions en cybercriminalité, et on est engagé non pas comme policier mais comme collaborateur scientifique assermenté - c'est autre chose. Si on est policier, on doit pouvoir jouir d'une mobilité au sein de l'institution qui offre des possibilités d'évolution de carrière - tout au long de sa carrière -, ce qui n'est pas réalisable avec le fonctionnement hermétique que vous êtes en train de créer ici.
Les amendements déposés visent à essayer de sauver les meubles, passez-moi l'expression, par rapport à la casse que vous avez faite ! On essaie d'apporter quelques éléments pour permettre au moins de garder un coordinateur, pour pouvoir aussi dire à la police judiciaire qu'elle doit, lorsque des opérations touchent à ses compétences, s'y associer ! Plus rien ne rend cela possible dans la loi que vous allez voter aujourd'hui ! La police judiciaire n'entend que les ordres de son supérieur, chef de la police judiciaire, et ne rend plus de comptes à personne - si ce n'est bien sûr à la commandante de la police, qui ne peut pas être sur le terrain.
Je vous ai également remis la lettre du Ministère public, extrêmement surpris de ne pas être entendu et qui demandait à l'être avant même que l'on décide finalement de voter. Le Ministère public a donc sollicité son audition, mais on a voté sans même l'entendre alors que lui aussi va pâtir des modifications que vous vous apprêtez à adopter. Voilà pourquoi des amendements ont été déposés; ils parlent d'eux-mêmes - j'ai inclus un exposé des motifs -, ce sont des modifications tellement évidentes ! Tellement évidentes ! Dites-vous que l'on a même oublié de mettre dans la loi, votée dans la précipitation, que la gendarmerie a également des tâches répressives ! Seules des tâches préventives y sont mentionnées pour la gendarmerie - des «bobbies», en fait. Alors j'ai signalé qu'il faudrait peut-être ajouter qu'elle doit aussi pouvoir procéder à une arrestation; mettons-le dans la loi, ça peut servir ! Mais on n'y a pas pensé, et c'est un exemple parmi d'autres.
Voilà comment a travaillé la commission ! Ça vous fait rire, parce que vous n'en avez finalement rien à faire - je crois que ça ne préoccupe pas beaucoup l'extrême gauche qu'on affaiblisse notre police, Mesdames et Messieurs, mais la population, oui. C'est pourquoi je pense qu'un renvoi en commission... (Protestations.) ...serait la plus sage des décisions. C'est ce que je vous demande une fois encore: que le bon sens réussisse à primer et que l'on fasse, pour les Genevoises et les Genevois, un travail digne de ce nom. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une nouvelle demande de renvoi en commission, je donne par conséquent la parole aux rapporteurs, en commençant par la rapporteure de majorité. Madame Xhevrie Osmani ?
Mme Xhevrie Osmani. Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste rappeler que le temps écoulé... (Remarque de M. Jean Batou. Un instant s'écoule.)
Le président. Vous avez trente secondes, Monsieur Batou.
M. Jean Batou (EAG). Monsieur le président, ce que cite verbatim le magistrat ce soir montre une seule chose: il n'écoute pas les gens qui ne sont pas d'accord avec lui. (Applaudissements.)
Une voix. Je vous l'enverrai ! (Remarque.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Madame Xhevrie Osmani, vous avez la parole sur le renvoi en commission.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste rappeler que plusieurs mois se sont écoulés entre le vote d'entrée en matière et les votes finaux, durant lesquels le département a dormi. Dans l'organisation de nos travaux, les personnes sont libres d'être entendues et de demander une audition, ce que vos chefs de service n'ont pas sollicité, contrairement aux syndicats. Pour ce qui est du renvoi en commission, nous le refusons une fois de plus. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la rapporteuse de majorité. Monsieur le rapporteur de minorité, sur le renvoi en commission ?
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de minorité. Oui, il faut renvoyer ce projet de loi en commission.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. J'invite maintenant l'assemblée à se prononcer sur la demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12521 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 69 non contre 27 oui.
Le président. Nous passons donc au vote d'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12521 est adopté en premier débat par 69 oui contre 3 non et 22 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 1, al. 3 (nouveau, l'al. 3 ancien devenant l'al. 4), et 3 (nouvelle teneur avec modification de la note).
Le président. Nous sommes saisis d'un premier amendement du Conseil d'Etat à l'article 4:
«Art. 4, al. 1 (nouvelle teneur)
1 La hiérarchie de la police est structurée par niveau de grades et de fonctions.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 54 non contre 40 oui et 2 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 4 (nouvelle teneur avec modification de la note) est adopté.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat à l'article 5:
«Art. 5 Equipement (nouvelle teneur)
Les membres du personnel de la police sont équipés et, cas échéant, armés, aux frais de l'Etat.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 93 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'art. 5 (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté.
Le président. Nous passons à l'article 6, pour lequel le Conseil d'Etat a aussi déposé un amendement. Je vous le lis:
«Art. 6, al. 2, phrase introductive (nouvelle teneur) et lettre a (nouvelle, les lettres a à d anciennes devenant les lettres b à e)
2 Les services d'appuis, placés sous l'autorité du chef d'état-major, facilitent l'action de la police et sont composés de:
a) la direction des services d'état-major;»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 93 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'art. 6 (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté.
Le président. Nous sommes également saisis d'un amendement du gouvernement à l'article 7:
«Art. 7 Commandement (nouvelle teneur)
Le commandement de la police est assuré par la commandante ou le commandant de la police, des chefs ou des cheffes de la gendarmerie, de la police judiciaire et de l'état-major.»
Celles et ceux qui acceptent... (Un instant s'écoule.) Messieurs les députés Desfayes et Cruchon, vous n'avez plus de temps de parole. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 67 non contre 27 oui et 2 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 7 (nouvelle teneur avec modification de la note) est adopté.
Le président. Nous passons à l'article 8, pour lequel l'exécutif a déposé l'amendement suivant:
«Art. 8, phrase introductive (nouvelle teneur)
Les policières et les policiers, ainsi que les agentes et les agents de sécurité publique:»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 67 non contre 27 oui et 2 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 8 (nouvelle teneur avec modification de la note) est adopté, de même que l'art. 9 (nouvelle teneur avec modification de la note).
Le président. Le prochain amendement du Conseil d'Etat concerne l'article 10. Le voici:
«Art. 10, al. 1 (nouvelle teneur)
1 La gendarmerie assure auprès de la population une présence effective et préventive, et assume les prérogatives répressives prévues par la loi, notamment dans les domaines de la circulation, du secours d'urgence et de la proximité.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 50 oui contre 46 non.
Mis aux voix, l'art. 10 (nouvelle teneur avec modification de la note) ainsi amendé est adopté.
Le président. Nous sommes saisis d'un nouvel amendement du gouvernement à l'article 11:
«Art. 11, al. 3 (nouveau, l'al. 3 ancien devenant l'al. 4)
3 La police judiciaire contribue en outre au maintien de l'ordre public dans des domaines spécifiques et traite les affaires transmises par les autres services de la police.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 37 oui.
Mis aux voix, l'art. 11 (nouvelle teneur avec modification de la note) est adopté, de même que les art. 12 (nouvelle teneur avec modification de la note) à 15 (abrogé).
Le président. L'amendement suivant, également déposé par l'exécutif, concerne l'article 19. Je vous le lis:
«Art. 19, al. 1 (nouvelle teneur)
1 La police comprend trois catégories de personnel:
a) les policières et les policiers, soit les gendarmes et les inspectrices et inspecteurs;
b) les agentes et les agents de sécurité publique, armés et non armés;
c) le personnel administratif.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 67 non contre 27 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'art. 19, al. 1 et 2 (nouvelle teneur), est adopté, de même que les art. 20 (nouvelle teneur de la note) et al. 3 (nouveau), à 24, al. 1 (nouvelle teneur) et al. 8 (nouveau).
Le président. Nous passons à l'amendement déposé par le Conseil d'Etat à l'article 31. Le voici:
«Art. 31, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Les compétences du centre de formation de la police et des métiers de la sécurité du canton de Genève sont valorisées dans le cursus de formation des aspirantes et aspirants genevois. Il en va de même dans la perspective d'une école romande unique multi-sites.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 70 non contre 26 oui.
Mis aux voix, l'art. 31, al. 1 (nouvelle teneur), est adopté.
Le président. Le gouvernement a aussi déposé un amendement à l'article 34:
«Art. 34, al. 2 (nouvelle teneur)
2 L'affectation dans un autre corps au sens de l'article 6, alinéa 1, de la présente loi ne peut se faire que sur demande ou avec l'accord des personnes concernées, sous réserve des besoins impératifs de service.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 68 non contre 27 oui.
Mis aux voix, l'art. 34 (nouvelle teneur) est adopté, de même que les art. 37, al. 1 (nouvelle teneur), et 38, al. 2 (nouvelle teneur).
Le président. Nous passons au dernier amendement du Conseil d'Etat: il vise à biffer l'article 62, alinéa 2, lettre e nouvelle.
Mis aux voix, cet amendement (art. 62, al. 2, lettre e (biffée)) est adopté par 95 oui et 1 abstention.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 67, déposé par M. Batou et consorts, dont voici la teneur:
«Art. 67, al. 5 et 6 (nouveaux)
Modifications du ... (à compléter)
5 Les modifications emportant une réorganisation de la police, soit les articles 4, 6, 7, 10, 19, alinéas 1 et 2, ainsi que la suppression des articles 13 à 15, sont mises en oeuvre avec effet au 1er juin 2023 au plus tard.
6 La modification liée au retour de la formation dans le canton de Genève, soit l'article 31, alinéa 1, doit être effective au 1er janvier 2025 au plus tard.»
Mis aux voix, cet amendement (art. 67, al. 5 et 6 (nouveaux)) est adopté par 72 oui et 25 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Troisième débat
Le président. Nous arrivons au troisième débat, qui est demandé.
Une voix. Oh !
Le président. MM. Murat-Julian Alder et Yvan Zweifel ont déposé un amendement à l'article 4; il s'agit de la reprise de celui déposé par le Conseil d'Etat au deuxième débat. Je vous le lis. (Brouhaha.)
«Art. 4, al. 1 (nouvelle teneur)
1 La hiérarchie de la police est structurée par niveau de grades et de fonctions.» (Brouhaha.)
Des voix. Chut !
Une voix. On n'entend rien !
Une autre voix. Vous pouvez répéter, Monsieur le président, s'il vous plaît ?
Une autre voix. Il faut vous taire ! (Le président relit l'amendement.)
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 47 oui.
Le président. Monsieur Alder, il vous reste sept secondes. (Remarque.) C'était une erreur, très bien. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote d'ensemble.
Mise aux voix, la loi 12521 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 68 oui contre 6 non et 19 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Mesdames et Messieurs, il est onze heures moins le quart: il est temps de clore nos travaux. Je vous souhaite une bonne fin de soirée et vous donne rendez-vous demain à 14h pour notre séance des extraits. Bonne rentrée !
La séance est levée à 22h45.