Séance du jeudi 23 juin 2022 à 17h10
2e législature - 5e année - 2e session - 12e séance

La séance est ouverte à 17h10, sous la présidence de M. Jean-Luc Forni, président.

Assistent à la séance: Mmes et MM. Mauro Poggia, président du Conseil d'Etat, Antonio Hodgers, Anne Emery-Torracinta et Nathalie Fontanet, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Serge Dal Busco, Thierry Apothéloz et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Marjorie de Chastonay, Jennifer Conti, Edouard Cuendet, Diego Esteban, Amanda Gavilanes, Jean-Marc Guinchard, Katia Leonelli, Alexandre de Senarclens, Vincent Subilia, Nicole Valiquer Grecuccio, Salika Wenger et François Wolfisberg, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Glenna Baillon-Lopez, Anne Bonvin Bonfanti, Rémy Burri, Denis Chiaradonna, Nicolas Clémence, Jean-Charles Lathion, Françoise Nyffeler, Jean-Pierre Pasquier, Helena Rigotti et Pascal Uehlinger.

Annonces et dépôts

Néant.

PL 13091-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le rapport de gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2021
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 23 et 24 juin 2022.
Rapport de majorité de Mme Caroline Marti (S)
Rapport de première minorité de M. Yvan Zweifel (PLR)
Rapport de deuxième minorité de M. Jean Burgermeister (EAG)

Suite du deuxième débat

E - ENVIRONNEMENT ET ÉNERGIE

Le président. Nous reprenons nos travaux sur le rapport de gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2021. J'appelle la politique publique E «Environnement et énergie». La parole échoit à Mme Adrienne Sordet.

Mme Adrienne Sordet (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, le bruit, d'abord - parfois dans cette salle, mais surtout dehors -, affecte notre qualité de vie. Bien qu'une stratégie antibruit ait été déposée, le processus d'assainissement du bruit routier a du retard, d'après les indicateurs des comptes. L'élaboration d'une stratégie vitesse, que nous attendons toujours, démontre qu'il faut aujourd'hui accepter de ralentir la cadence et de réduire le transport individuel motorisé - transport individuel qui devrait être électrique, d'ailleurs, selon le Conseil d'Etat. Alors oui à un parc de véhicules résiduels pour les déplacements professionnels, les livraisons et les personnes à mobilité réduite, mais c'est avant tout le transfert modal qui doit être promu pour les autres usages de la voiture.

L'eau, maintenant, ressource commune essentielle, doit être préservée par tous les moyens, car nous avons le luxe d'y avoir accès. C'est pourquoi nous nous devons d'en prendre soin et qu'il faut accentuer les efforts sur les indices IBCH, suivant les indicateurs des comptes, pour améliorer la qualité des cours d'eau et surtout renforcer le dialogue avec les autorités transfrontalières. Réfléchissons aussi ensemble à la gestion de l'eau en ville, notamment pour l'arrosage des plantations, qui permettent d'augmenter l'ombrage et de réduire les îlots de chaleur.

Cela m'amène à aborder la question du plan d'action biodiversité, dans le cadre duquel nous attendons encore un projet de loi d'investissement de la part du Conseil d'Etat. Il y a urgence, donc où est-il ?

Enfin, au niveau agricole, étant donné la situation actuelle et notre fragilité en approvisionnement alimentaire, des moyens doivent être investis pour favoriser l'accès à la terre, développer des projets de fermes agroécologiques et garantir des salaires rémunérateurs afin de tendre le plus possible vers la souveraineté alimentaire. Ces aspects sont essentiels, et pourtant, aucun indicateur ne permet de suivre leur progression, alors comment savoir si les choses avancent dans le bon sens ?

Concernant la politique énergétique du canton, il convient de s'attarder sur quelques points, car l'énergie représente l'un des défis majeurs aujourd'hui. Pour commencer, il y a un besoin urgent de nouvelles ingénieures et techniciennes, notamment dans le domaine du solaire, et nous profitons de cette prise de parole pour demander au gouvernement d'accélérer la mise en place de formations adaptées.

Les objectifs de certains indicateurs visés par le budget 2021 n'ont pas été atteints, tels que le nombre de watts par habitante ou la diminution d'électricité annuelle par résidente. Un important effort doit être déployé en matière de sensibilisation et d'information aux citoyennes par le biais du programme éco21, d'une part, qu'il faut renforcer avec un axe de sobriété, d'autre part via des mesures mises en oeuvre par exemple par l'Etat et les communes s'agissant de l'abaissement des températures intérieures ou du subventionnement au diagnostic des bâtiments. Ces points sont fondamentaux car, rappelons-le, la meilleure énergie reste encore celle que l'on ne consomme pas, et au vu du contexte actuel, ce que nous considérons comme acquis deviendra un luxe à l'avenir. Croire que la technologie trouvera une solution est illusoire, et il est vraiment nécessaire de mettre les bouchées doubles en termes de sobriété énergétique.

Alors oui, nous acceptons cette politique publique, mais de manière générale, le chemin est encore long et nous nous interrogeons quant à la définition du mot «urgence»: cette politique constitue l'un des piliers de la transition, mais elle reste pourtant sous-dotée - 1% de l'ensemble de l'enveloppe -, tandis qu'une baisse des ETP est constatée dans chaque rubrique. Mme Fontanet évoquait tout à l'heure la fragilité de la pyramide fiscale, mais qu'en est-il de la fragilité de la nature et de la société ? Que ferons-nous lorsque l'argent dans les caisses de l'Etat ne permettra pas de rattraper les dommages causés par le réchauffement climatique ? Je vous remercie. (Applaudissements.)

Mme Claude Bocquet (PDC). SIG poursuit sa politique d'investissement dans les énergies renouvelables. Plusieurs grandes centrales solaires ont été inaugurées en 2021: SolarCAD, qui produit plus de 0,5 gigawattheure par an, directement injecté dans le réseau de chauffage à distance; la centrale En Chardon, avec ses 5000 mètres carrés de panneaux solaires, qui produit 1 gigawattheure d'électricité chaque année; la centrale solaire SIG-FTI, dans la zone industrielle du Bois-de-Bay, qui produit annuellement 1,4 gigawattheure.

Les propriétaires privés sont également très intéressés à installer des panneaux solaires sur leur toit; malheureusement, les délais sont actuellement très longs. En effet, outre la pénurie de matériel, la Suisse est en retard par rapport à d'autres pays européens et n'a pas anticipé la formation des professionnels pour développer les énergies renouvelables, ce que l'on peut regretter. Un cadastre solaire a été élaboré afin d'optimiser le développement de cette énergie.

Cependant, la CMNS n'a pas pris la mesure du réchauffement climatique et continue à mettre des bâtons dans les roues des personnes qui habitent à la campagne. En zone 4B protégée, celles-ci se voient interdire d'installer des panneaux solaires sur leur maison sous prétexte que ce n'est pas joli, ou alors elles doivent les poser sur la face nord afin qu'ils ne soient pas visibles depuis la rue.

A l'heure où, avec la guerre en Ukraine, les risques de rupture de fourniture en électricité sont élevés, il me semble qu'il y a des choix à effectuer pour que nous soyons aussi indépendants que possible. Cette souveraineté est également capitale en ce qui concerne l'agriculture, on voit toute l'utilité de maintenir une paysannerie nourricière en Suisse et dans notre canton. Le soutien à l'agriculture pendant la pandémie, via des bons à la consommation, a été apprécié par les agriculteurs et agricultrices.

Nous attendons maintenant que l'Etat mette en pratique sa volonté de développer l'agritourisme à Genève, comme indiqué dans la feuille de route 2018-2023. Force est de constater que Genève est le canton où les possibilités de vivre une expérience de nuitées à la ferme sont les plus basses, et ce en raison d'une loi extrêmement restrictive, la LRDBHD, qu'il conviendrait de modifier.

Le temps m'étant compté, je ne peux pas aborder tous les aspects de la politique publique E. Je conclurai en indiquant que le PDC adoptera cette politique. Nous relevons que les investissements en faveur de l'environnement, de la biodiversité et ceux fournis pour assurer l'indépendance en énergie et en nourriture ont un coût, mais qu'ils sont vitaux pour le futur, et en période de crise, on se rend compte de la grande utilité de ces dépenses. Merci.

Le président. Je vous remercie. Monsieur Burgermeister, souhaitez-vous vous exprimer maintenant ou à la fin des interventions ?

M. Jean Burgermeister. Je parlerai pour la conclusion, Monsieur le président.

Le président. C'est noté. Alors la parole va à Mme Badia Luthi.

Mme Badia Luthi (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste votera le budget alloué à la politique publique de l'environnement et de l'énergie, mais nous tenons à commenter cette position en indiquant que le monde entier souffre des conséquences du réchauffement climatique, et notre pays n'y fait pas exception, comme les canicules précoces et inquiétantes de cette année nous le rappellent.

Nous nous trouvons face à de nombreux défis et nous devons avoir conscience de la gravité de la situation. Il est nécessaire de prendre des décisions pour soutenir la politique énergétique de même que d'engager des ressources afin d'assurer la transition. D'autre part, nous devons nous montrer cohérents dans nos discours et faire preuve de courage en stoppant l'hypocrisie qui règne dans certains domaines économiques, lesquels continuent à investir dans les énergies fossiles sans aucune vergogne.

Par ailleurs, le groupe socialiste invite le Conseil d'Etat à soutenir nos agricultrices et agriculteurs, qui sont de moins en moins nombreux en raison des contraintes qu'impose l'exercice de ce métier honorable. Les rares paysannes et paysans qui restent dans notre canton ont un grand mérite: ils mobilisent d'importants efforts pour maintenir leur activité, que ce soit au niveau financier ou en matière de soumission aux exigences dans le domaine, qui supposent toujours plus d'ajustements et de démarches pour se conformer aux directives environnementales devenues indispensables.

Mesdames et Messieurs les députés, nous devons rester attentifs à ce que les moyens accordés à la politique de l'environnement et de l'énergie soient suffisants pour faire face à l'ensemble des enjeux liés à l'atteinte de la neutralité carbone. Je conclus mon intervention en remerciant le département du territoire ainsi que le Conseil d'Etat pour tout le travail accompli et le soutien apporté dans ce secteur lors de la pandémie de covid. Merci. (Applaudissements.)

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, la politique de l'énergie est importante et suscite tout plein de débats en ce moment. Nous soutenons les projets menés par les Services industriels qui font partie de leur mission: la géothermie, les réseaux à distance - GeniLac, CAD rive gauche. Cadiom fonctionne depuis plusieurs années déjà, et il faudra raccorder de plus en plus d'immeubles à ce réseau dès que ce sera possible, ce qui occasionnera en revanche d'énormes travaux en ville avec les nuisances que l'on connaît. Citons encore la conception générale de l'énergie, qui est mise en oeuvre progressivement, l'abaissement des seuils IDC et l'assainissement des bâtiments - isolation, remplacement des vitrages et des modes de chauffage. Il s'agit d'une stratégie que nous défendons.

Maintenant, il faudra trouver le moyen - le sujet est en discussion - d'aider certains propriétaires à effectuer ces travaux si nous voulons aller de l'avant. Cette politique va dans le bon sens, mais il y a encore des solutions équilibrées à trouver, et ce n'est pas si évident que ça.

Il est clair que Genève ne va pas sauver le monde, mais il faut agir, il faut réaliser l'assainissement des immeubles à un rythme soutenu, à un rythme toutefois possible pour les entreprises de notre canton, pas à un rythme qui incitera de grands groupes étrangers à venir ici exécuter les chantiers nécessaires. Nous voulons que des sociétés genevoises soient mandatées pour accomplir le travail, et dans cette perspective, il faut certes aller vite, mais à une cadence qui puisse être suivie par les entreprises locales.

Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que le MCG avait à communiquer sur cette politique publique. Il s'était abstenu à la commission des finances et nous nous abstiendrons ici aussi en attendant la fin des négociations sur l'aide aux propriétaires pour leurs investissements. Merci.

M. Alexis Barbey (PLR). S'agissant de la politique de l'énergie, il faut bien se rendre compte que nous ne sommes pas devant une évolution, mais face à une véritable révolution, à laquelle doit présider le magistrat en charge. Il s'agit naturellement de revoir l'isolation des bâtiments et de promouvoir une politique énergétique liée aux immeubles, qui sont responsables d'environ 40% de nos émissions de CO2 par année.

Pourquoi est-ce compliqué ? Le département a déjà fait l'essentiel en adoptant un règlement indiquant dans quel intervalle de temps les bâtiments devaient être assainis afin qu'ils répondent aux nouvelles normes de dépense de chaleur. Les IDC sont en permanence à la baisse, ils représentent les nouveaux standards à respecter. Pourquoi est-ce extrêmement difficile ?

Dans le paysage des gens qui bénéficieront d'une meilleure isolation du bâti, il y a trois catégories de personnes: d'abord l'Etat - non seulement en tant que propriétaire, mais également comme gestionnaire du parc public -, puis les propriétaires et enfin les locataires. Or il se trouve que pour des raisons historiques, à Genève, on ne peut pas faire porter aux locataires le poids des rénovations liées à l'isolation des façades et de l'enveloppe, la législation nous en empêche. Dès lors, il ne reste plus que deux acteurs présents sur ce terrain, à savoir l'Etat et les propriétaires privés.

Voici le grand enjeu à l'heure actuelle, Mesdames et Messieurs, un enjeu auquel je vous incite d'ores et déjà à réfléchir, parce qu'il sera sur nos tables très prochainement: comment faire en sorte que les propriétaires participent pleinement à l'effort d'assainissement - dont ils tireront un bénéfice, puisque leurs immeubles seront mieux isolés et, partant, auront plus de valeur, mais pour lequel ils devront engager des dépenses substantielles auxquelles ils n'étaient pas préparés ?

Il nous faut maintenant trouver la bonne méthode afin d'amener les propriétaires fonciers à réaliser des travaux dont ils sont responsables, mais sans les décourager d'un point de vue financier; c'est là que l'Etat va devoir intervenir, Mesdames et Messieurs, pour que cette révolution qui est en marche puisse aboutir de façon positive.

Face à l'urgence climatique, devant l'impératif de rénover notre parc immobilier, je vous propose d'approfondir la réflexion et de développer une vision à long terme, laquelle englobe les deux protagonistes en présence, voire les trois, c'est-à-dire l'Etat, les propriétaires et les locataires, pour que nous puissions accomplir ce grand défi qui est le nôtre aujourd'hui. Je vous remercie.

M. Sébastien Desfayes (PDC). Effectivement, il s'agit d'une révolution, une révolution nécessaire, dictée par la crise climatique, mais je pense que nous devons nous montrer extrêmement prudents, parce que nous ne parlons pas ici, et je crois que le département des finances en est conscient, de cacahuètes. Non, il est question de rénovations dont le coût dépasserait plusieurs milliards, voire atteindrait dix milliards de francs suisses, à dépenser sur une dizaine d'années.

Alexis Barbey l'a dit et bien dit, il existe plusieurs acteurs: l'Etat en tant que propriétaire, les communes - ne les oublions pas - qui sont aussi propriétaires fonciers, les propriétaires individuels, les locataires et, in fine, les contribuables. En effet, c'est là le grand risque d'une révolution: si les propriétaires n'ont pas les moyens de s'acquitter du prix des travaux, et il y en a, et si aucun compromis n'est trouvé pour faire supporter au moins une partie des rénovations aux locataires, la solution sera très simple, on exigera des contribuables qu'ils paient l'ardoise, qu'ils règlent une addition qui s'annonce salée.

Alors, chers collègues, menons cette révolution, mais réfléchissons bien, parce que les conséquences financières seront extrêmement lourdes, et au vu des finances de l'Etat, nous devons faire preuve de prudence. Merci. (Applaudissements.)

M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Sur le terrain de la protection de l'environnement et de la nécessaire diminution massive et planifiée des émissions de gaz à effet de serre, force est de constater que le bilan du Conseil d'Etat est largement insuffisant. Je m'étonne d'ailleurs du soutien des Verts, qui dépend exclusivement, j'imagine, de l'étiquette du magistrat portant la responsabilité de la politique publique E, puisque en l'état, il est difficile de se satisfaire de ce qui a été réalisé d'une part, de ce qui est annoncé d'autre part.

Le Conseil d'Etat a publié un plan climat, d'accord, mais de la même manière qu'il a présenté un plan d'action en faveur de la biodiversité, c'est-à-dire qu'il n'en respecte pas du tout les termes ni en matière d'action ni de contribution budgétaire. S'agissant de la préservation de l'environnement, le gouvernement est passé maître dans l'art de faire de grands discours sans les matérialiser par la suite.

Le problème, c'est qu'il est difficile pour ce parlement de suivre dans la durée et de manière régulière l'action du Conseil d'Etat dans ce domaine. On l'a vu, en ce qui concerne la protection de la biodiversité, les sommes qu'on peut observer dans les comptes 2021 sont ridiculement faibles en comparaison de ce qui avait été exposé au moment de l'adoption du plan d'action en faveur de la biodiversité. Quant à la réduction des gaz à effet de serre, c'est la même chose: le gouvernement égrène toute une série d'objectifs dont chacun et chacune ici sait qu'ils ne seront pas atteints.

Il y a l'urgente nécessité de refaire entièrement l'isolation des bâtiments - sans aucune hausse des loyers, bien sûr -, mais aussi de baisser la part du transport individuel motorisé ou encore de planifier une diminution massive du trafic aérien. Sur tous ces sujets, Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons que relever que l'action a été insuffisante.

Cela démontre que le Conseil d'Etat n'a tiré aucune leçon de la pandémie de covid. En effet, nous savons aujourd'hui de manière certaine que l'élévation des températures, la destruction des milieux naturels et l'accroissement continu du trafic aérien sont des facteurs qui augmentent la probabilité de nouvelles épidémies à l'avenir, et si nous devons retenir quelque chose de cette crise, c'est bien de repenser la manière dont nous vivons, y compris notre rapport à la nature qui nous entoure, afin d'éviter de nouvelles catastrophes sanitaires et environnementales, afin d'enrayer une grande partie de la crise climatique.

Malheureusement, il est déjà bien trop tard, et je m'étonne que le Conseil d'Etat continue à traîner les pieds avec les remerciements du groupe des Verts. Du côté d'Ensemble à Gauche, nous refuserons naturellement cette politique publique comme les autres.

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de majorité. Je dirai quelques mots sur la question fondamentale de la rénovation énergétique du parc des bâtiments à Genève dans le cadre des efforts qui sont imposés par le plan climat et qui ont été évoqués par bon nombre de mes préopinants. Cet objectif et ces impératifs nous forcent à entreprendre des démarches majeures en la matière, avec la préoccupation tout aussi cruciale de préserver le niveau des loyers afin que ceux-ci restent accessibles à l'ensemble de la population, y compris aux personnes précaires qui, pour certaines, vivent dans des immeubles anciens avec des baux relativement modestes.

J'ai entendu M. Desfayes évoquer la problématique de certains propriétaires qui n'auraient pas les moyens d'effectuer de tels travaux d'assainissement; écoutez, un propriétaire porte tout de même la responsabilité d'abord d'entretenir son immeuble, mais également de constituer des réserves tout au long de la durée de vie dudit immeuble pour disposer des moyens, au moment où une rénovation importante est nécessaire, de la réaliser.

Un dernier commentaire: je constate avec regret que lorsqu'on souhaite prendre des mesures pour préserver l'environnement, cela suscite de très fortes réticences, et ce alors que l'urgence climatique nous commande au contraire des actions franches et immédiates, notamment, puisque la question de l'environnement constitue une thématique éminemment transversale, dans le domaine de la mobilité. Or les mesures de réduction du trafic, de promotion de la mobilité douce, de lutte contre le bruit sont systématiquement contestées, de même que la réforme de la fiscalité des véhicules à moteur qui est complètement à l'arrêt depuis plusieurs années à la commission fiscale quand nous devrions précisément y mettre un coup d'accélérateur.

M. Sébastien Desfayes (PDC). Très brièvement, Mesdames et Messieurs, je vous rassure, j'aimerais répondre à Mme Caroline Marti, qui a signalé que les propriétaires devaient prévoir de rénover leurs bâtiments. On peut imaginer qu'un propriétaire ait remplacé sa chaudière il y a deux ans, et il ne pouvait pas s'attendre - forcément pas - à ce qu'un nouveau règlement sorte le 15 avril 2022. A cela, il y a une conséquence très simple: à partir du moment où on enfreint la garantie de propriété, où on contraint - vraiment, il n'y a pas d'autre terme - des propriétaires à assainir leurs immeubles, eh bien il faut que l'Etat assume ses responsabilités. Merci.

M. Daniel Sormanni (MCG). Monsieur le président, vous transmettrez ceci à M. Burgermeister: je regarde le tableau des politiques publiques, et il n'y en a pas une seule que les membres d'Ensemble à Gauche valident. On n'en fait jamais assez selon eux. Genève est le canton où on avance le plus sur ces questions, où on paie le plus d'impôts, où il y a le plus de fonctionnaires, où il y a le plus de taxes, mais c'est encore insuffisant pour Ensemble à Gauche ! Vous n'êtes pas sérieux, Monsieur Burgermeister - vous lui transmettrez, Monsieur le président. C'est honteux !

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le député Barbey a parlé de révolution. Ce terme n'est pas usurpé si l'on se réfère par exemple aux XVIIIe et XIXe siècles: les historiens parlent aujourd'hui de révolution agricole et de révolution industrielle. On le voit, la révolution écologique représente un projet de rupture majeure avec les modèles économiques qui ont façonné nos sociétés, notamment durant le XXe siècle. Et si l'on se projette un peu - en 2050, en 2070 -, il n'est pas très difficile de se rendre compte que les systèmes prospères de demain seront ceux qui feront le moins appel aux énergies fossiles, qui seront les plus sobres en matière d'impact environnemental.

Ce constat est vrai tant pour les entreprises privées - qui ont très largement compris la nécessité de ce virage et, pour certaines d'entre elles, l'entament de manière sérieuse - que pour les collectivités. A quel moment adviendra la prospérité de demain ? Quand les élus, les institutions, les Etats auront finalement intégré que moins on dépend du fossile, moins on dépend du gaz, moins on dépend du pétrole, plus notre liberté sera importante. Il n'est ainsi pas exagéré de parler de révolution, et comme l'a souligné le député Desfayes, nous y sommes déjà, celle-ci est en marche, il n'y a plus de doute possible au niveau planétaire. La question est plutôt: comment procède-t-on ? Est-ce qu'on en subit les séquelles, comme en temps de canicule, comme avec le prix du gaz suite à une guerre en Europe ou celui des céréales pour la même raison, ou est-ce qu'on agit manière collaborative, anticipative et adéquate ?

Toute révolution, tout changement majeur de société nécessite des investissements, Mesdames et Messieurs. La Suisse l'a prouvé: pensez à notre magnifique réseau ferroviaire qui s'est développé dès le XIXe et surtout au XXe siècle ! Pensez aux barrages qui nous permettent aujourd'hui un large niveau de production indigène d'énergie et d'électricité. Dans de nombreux domaines, les mutations sociétales impliquent des investissements substantiels, en grande partie du secteur public, mais aussi du secteur privé, et c'est le rôle des entrepreneuses et des entrepreneurs d'anticiper le monde de demain pour investir dans les bons outils de production. Des réflexions importantes sont menées à ce sujet à Genève, nous sommes à la pointe sur les questions de finance durable car, encore une fois, l'équation est simple: le monde financier de demain, celui qui sera prospère, sera faible en carbone.

Cette révolution ou plutôt cette transition écologique - ce sont les historiens du XXIIe siècle qui emploieront le terme de révolution, nous avons encore plusieurs dizaines d'années devant nous pour mettre en oeuvre le projet -, il nous reviendrait plus cher de ne pas l'engager. En effet, des études actuelles démontrent de manière très claire que le coût de l'inaction, le prix du statu quo sera au final beaucoup plus élevé pour les ménages, pour la société, pour les entreprises, et cela est assez facile à comprendre quand on voit l'évolution du prix de l'énergie avec une guerre aux frontières de l'Europe.

Voilà donc le projet, et à notre échelle, il se traduit par une double mission. La première, je l'ai mentionnée, c'est de limiter notre dépendance aux énergies fossiles, par là même de réduire nos émissions de CO2 avec l'objectif primordial d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Mais dans le même temps, on le sait, notre climat va se dégrader, nous le sentons déjà ces jours, et nous devons par conséquent adapter notre territoire aux températures de demain. On estime que d'ici la fin du siècle, Genève affichera les valeurs du sud de l'Italie, et cela n'est pas sans conséquence sur l'urbanisme, sur les espaces verts en milieu urbain, sur l'agriculture et, de manière générale, sur l'organisation de nos sociétés.

Nous devons anticiper ce mouvement, et le plan climat se résume finalement à ces deux enjeux: d'une part moins dépendre de l'énergie fossile et, partant, moins émettre de CO2, d'autre part nous préparer à un climat qui sera globalement plus chaud, mais dont les amplitudes de température ne seront pas tout à fait celles du sud de l'Italie, puisque nous garderons une grande partie de nos hivers relativement secs et rigoureux, mais avec des étés qui ressembleront de plus en plus à ceux que nous venons de vivre.

Voilà, Mesdames et Messieurs, pour le grand discours. A l'échelle du canton, cette politique publique représente environ 1% des dépenses, c'est-à-dire que ce n'est pas une grande charge pour l'Etat en frais de fonctionnement, mais en matière d'investissements, vous le savez, le Conseil d'Etat a prévu des montants à hauteur de 6 milliards de francs afin de transformer nos infrastructures. Ainsi, évaluez la gestion du Conseil d'Etat non seulement à l'aune des budgets, mais surtout au regard de sa politique d'investissement, parce que qui dit changement structurel, qui dit révolution écologique, dit adaptation des infrastructures. Un investissement débute au temps T, mais il se termine au bout d'un moment, et on dispose ensuite d'équipements décarbonés. Dès lors, il faut voir cette évolution comme une occasion d'investir; le retour sur investissement, ce sont nos enfants qui en bénéficieront.

Très concrètement, pour répondre aux différentes questions soulevées, le projet de loi sur la biodiversité a pris un peu de retard, notamment à cause de la pandémie; il devrait, si tout va bien, être présenté par le Conseil d'Etat cet automne. Il fera la part belle aux infrastructures écologiques et aux enjeux de nature hors milieu urbain. Nous déposerons, j'espère en fin d'année, un projet de loi pour accompagner le plan d'arborisation cantonale; celui-là concernera la nature en ville, les objectifs de canopée. Voilà donc deux projets d'investissement qui vous parviendront d'ici la fin de l'année.

Pour la députée Bocquet, il y a aujourd'hui un large débat sur les tensions qui peuvent survenir entre patrimoine et énergie, c'est certain. A mon sens, nous devons trouver un équilibre. Il serait dommage de défigurer nos beaux villages avec des mètres et des mètres carrés de panneaux solaires, mais nous pouvons aller plus loin. Le département envisage de réadapter sa directive sur le patrimoine et l'énergie cet automne également.

Enfin, Mesdames et Messieurs, je vous prie de faire preuve d'un peu d'indulgence à l'égard du député Jean Burgermeister... (Rires.) ...dont le rôle est de s'agiter pour décrire tout ce qui ne va pas. Naturellement, chacun sait qu'avec des «y a qu'à, faut qu'on», on avance bien mieux ! Mais dites-vous que de cette agitation, il ressortira quelque chose: nous pourrions placer une mini-éolienne face à lui et récupérer l'énergie produite... (Applaudissements.) Ainsi, M. Burgermeister sera concrètement utile à la transition écologique ! Merci beaucoup. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, vous êtes priés de vous prononcer sur la politique publique E «Environnement et énergie».

Une voix. J'ai été mis en cause, Monsieur le président ! (Commentaires.)

Mise aux voix, la politique publique E «Environnement et énergie» est adoptée par 32 oui contre 6 non et 32 abstentions. (Commentaires pendant la procédure de vote.)

F - FORMATION

Le président. Nous abordons à présent la politique publique F «Formation» et, pour commencer, je passe la parole à M. Pascal Uehlinger. (Un instant s'écoule.) Monsieur Uehlinger...? (Un instant s'écoule. Commentaires.)

Des voix. Il n'est pas là ? (Commentaires.)

M. Pascal Uehlinger. C'était peut-être une erreur de ma part !

Le président. Ce n'est pas vous ? D'accord. Dans ce cas, je passe la parole à M. Youniss Mussa.

M. Youniss Mussa (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, au nom du parti socialiste, je tiens à remercier pour leur engagement et leur travail considérable les enseignants et les enseignantes, les élèves et étudiants qui, pour beaucoup d'entre eux, auront suivi une grande partie de leurs études dans des conditions économiques et psychologiques difficiles, ainsi que les entreprises qui ont fait le choix d'engager des apprentis dans une période économique instable.

Comme nous le savons, la politique publique de la formation représente un coût important pour l'Etat. Plutôt que de parler de coût, je préfère parler d'investissement - qui participe en grande partie à l'attractivité économique de notre canton et, in fine, à la perception de recettes fiscales -, notamment pour la qualité du personnel employable. En plus du budget 2021 accordé par notre parlement, à une large majorité, la commission des finances a accordé 19 millions de crédits supplémentaires au DIP pour les charges de personnel, notamment en raison de l'augmentation importante du recours aux remplaçants. Ces sommes n'ont pas été pleinement dépensées par le département, preuve de la bonne gestion des moyens financiers accordés par notre Grand Conseil au DIP.

En matière d'apprentissages, l'Etat a pu notamment aider les entreprises à embaucher des apprentis par le financement d'aides covid aux établissements les plus fragiles et en encourageant financièrement les entreprises à engager leurs premiers apprentis. La revalorisation de l'apprentissage passe aussi par la valorisation de celui-ci et par un travail étroit avec les entreprises. C'est ce que le DIP a fait et bien fait.

Alors oui, la formation a un prix, un prix important: plus de 2 milliards, mais l'Etat a su répondre aux divers enjeux posés par une pandémie, parce que notre parlement lui a donné les moyens nécessaires au moment du budget 2021, et, je le rappelle, avec le soutien du PLR, du PDC et du MCG. Permettez-moi de vous rappeler les mots du député Pierre Nicollier au moment du budget 2021: «Nous soutiendrons cette politique publique [de la formation]. [...] Nous allons dans la bonne direction.» (Commentaires.) Bref, vous l'aurez compris, les mêmes qui faisaient bonne figure au moment de la crise sanitaire en votant les budgets font à présent de la politique électorale pure, avec en ligne de mire les élections. Prêts à tout et sans aucune vision pour l'école, aujourd'hui, ils se contrediront par rapport au vote du budget. Cette attitude présage une casse importante, notamment dans le domaine de la formation, parce que, c'est bien connu, le PLR et l'UDC n'aiment pas ce qui est public, financé par l'impôt et accessible à toutes et tous sans condition de revenus ou de fortune, c'est-à-dire l'instruction publique. (Vifs commentaires.) A l'avenir, il nous faudra des moyens supplémentaires pour accompagner les parcours spécialisés. Il y a aussi les enjeux des flux migratoires... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît ! Laissez-le s'exprimer ! (Commentaires.) Laissez le député s'exprimer !

M. Youniss Mussa. ...notamment avec l'arrivée des petits Ukrainiens et Ukrainiennes, qui doivent recevoir un accueil à la hauteur de ce que nous sommes en mesure de leur offrir. Il faudra aussi donner des moyens à l'OMP pour pouvoir sauver cette institution qui aujourd'hui se trouve en situation de crise importante. Les mêmes partis que j'ai cités ont, pas plus tard qu'hier, refusé une demande de crédit portant sur l'enseignement spécialisé et sur les prestations médico-psychologiques. Cet office devrait pouvoir compter sur le soutien de tous les partis qui souhaitent permettre à l'Etat de mener à bien ses missions et de réparer ce qui a malheureusement dysfonctionné.

Vous l'aurez bien compris, le parti socialiste votera la politique publique de la formation, mais tient à alerter sur les enjeux importants à venir et répondra présent pour l'école et ses filières de formation et pour les jeunes. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG). On nous avait promis une école inclusive. Avec la crise de l'OMP, nous avons pu constater que nous avons une école disruptive. En effet, de véritables crises institutionnelles sont apparues au grand jour, notamment l'affaire du foyer de Mancy, un déséquilibre patent au sein de l'OMP et également la difficulté de répondre à cette question. Il ne suffit pas de mettre à la tête d'une direction une ancienne députée socialiste pour que ça fonctionne. Il faut également avoir une vision qui ne soit pas partisane et qui ne soit pas sclérosée, parce que force est de constater que le département de l'instruction publique, suite à la présence en son sein d'un certain parti depuis très longtemps, a pris des habitudes de scléroses, de mauvaises habitudes qui font qu'il dysfonctionne.

Il dysfonctionne aussi en grande partie parce que le personnel de terrain est trop souvent sacrifié à certaines structures, à un encadrement qui trop souvent n'est pas fonctionnel, malheureusement. Compte tenu de cette réalité, nous n'avons pas voté hier à la commission des finances les crédits pour les 55 postes supplémentaires, ce qu'on nous a reproché, comme l'a fait le député socialiste qui a pris la parole précédemment - vous transmettrez. Mais si nous ne l'avons pas fait, comme d'autres commissaires d'ailleurs, c'est parce qu'on nous demandait d'ajouter un encadrement qui ne nous semblait pas du tout pertinent, avec une organisation qui ne fonctionne pas, qu'il faudrait d'abord interroger, modifier, réformer. Nous, en tout cas le groupe MCG, nous sommes prêts à donner des moyens, nous l'avons montré, mais pas n'importe quoi, parce que malheureusement, pour la gauche, trop souvent, quand il y a un problème, quelle est la réaction ? «Rajoutons des moyens !» Alors quand c'est nécessaire, c'est vrai, il faut le faire... (Commentaires.) ...mais vouloir, dès qu'il y a un problème, rajouter des moyens... Après, c'est du toujours plus ! Par ailleurs, les moyens que l'on rajoute créent de nouveaux problèmes. (Commentaires.) C'est donc ça, la grande difficulté.

Il faut plutôt s'interroger, voir quels sont les objectifs que nous devons suivre, aller à l'essentiel. Il est vrai que l'école publique genevoise, surtout l'école obligatoire, est en souffrance et qu'il faudra bien un jour se repencher sur le plan d'études romand, qu'il faudrait sans doute modifier, peut-être ne plus respecter - ou avoir une autre philosophie de la politique de l'enseignement obligatoire à Genève. Tout cela, ce sont des choses à peut-être mettre en place, parce que l'objectif doit être un enseignement de base de qualité, ce que, malheureusement, pour le moment, nous n'avons pas. Pour cette raison, le groupe MCG refusera la politique publique F.

M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il convient d'abord de rappeler qu'aucun poste n'avait été accordé en 2020 au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse. Si la situation est un peu différente en 2021, est-ce que ce défaut de postes a été rattrapé ? On peut en douter. On sait que combler le déficit de moyens est toujours difficile et que la droite, d'une certaine manière, arrive à ses fins avec ce genre d'iniquité.

Si on regarde certains indicateurs, les améliorations sont difficiles à discerner, pour ne pas dire inexistantes. Genève entend mener une politique d'école la plus inclusive possible, mais c'est une mission impossible tant que les conditions ne seront pas modifiées. Il est souvent question de taux d'encadrement et de moyennes d'élèves par classe, or aucun de ces points ne s'améliore, et ce depuis des lustres. Les listes d'attente pour les consultations à l'OMP s'allongent. Les parents restent en attente de réponses qui ne viennent jamais. Les infirmières scolaires font aussi défaut: 1200 élèves pour une infirmière à l'école primaire; 1400 élèves pour une infirmière au cycle d'orientation, etc. Nous avions arraché péniblement quelques postes d'infirmières il y a deux ou trois ans au budget, mais on ne peut pas poursuivre ainsi.

Alors pourquoi continuer à dénoncer cette stagnation ? C'est assez simple: d'une part, Genève a les chiffres les plus mauvais de Suisse romande. A titre d'exemple, le canton de Neuchâtel affiche une moyenne de 18 élèves par classe, alors qu'ici, c'est 20, 20 élèves par classe depuis des années. Entre l'enseignement primaire, le cycle d'orientation et le secondaire II, le nombre d'élèves a augmenté de 1019 entre 2020 et 2021; mais les postes ne suivent pas, au regard de l'augmentation des charges de personnel, qui est inférieure à 1,3%. D'autre part, si on veut maintenir les élèves à besoins éducatifs particuliers ou handicapés dans les classes de l'enseignement régulier, tout le monde le comprend, il faut des conditions d'accueil acceptables, notamment en diminuant le nombre d'élèves par classe. Or, on n'y arrive toujours pas. Il n'y a aucun exemple où on voit que l'intégration d'élèves à besoins éducatifs particuliers ait généré une baisse de l'effectif de la classe dans laquelle ils étaient intégrés. Dans ces conditions - avec des classes pleines, des locaux insuffisants, un saupoudrage contraint des postes de soutien pédagogique -, comment peut-on continuer à charger la barque inconsidérément ? Comment peut-on mener une politique de la formation cohérente, qui marche sur ses deux pieds ?

Le DIP, s'il n'obtient hélas pas tous les postes d'enseignement dont il a besoin... (Remarque.) Et ce n'est pas le sujet, puisque ça concerne 2022, mais si les postes qui étaient demandés pour l'enseignement spécialisé ont été refusés hier à la commission des finances, c'est quand même un signe très inquiétant de la direction dans laquelle une certaine partie de ce parlement essaie de nous faire aller. Le DIP est donc malheureusement contraint de faire des choix et de mettre réellement en vigueur sa promesse de privilégier les forces au front des classes en diminuant notamment la bureaucratie - comme la législature de 2013 s'y était engagée, mais on attend toujours de voir quelque chose -, en modifiant une organisation administrative qui génère des tâches inutiles pour justifier son existence, etc.

Il est urgent de s'occuper des élèves d'abord, des postes de terrain, des postes au front des classes, des postes qui délivrent des prestations directes aux usagers, en l'occurrence les élèves, et d'améliorer ainsi les conditions de formation avec davantage de postes de terrain, en diminuant peut-être les hiérarchies, parce que, pour l'instant, ce qu'on voit, c'est que quand on met dix postes de terrain à un certain endroit, on en met à peu près la même pesée pour les hiérarchies ou les ressources humaines. Il ne s'agit pas de fustiger des services qui sont utiles, mais simplement de dire qu'il y a des priorités à avoir, et pour l'instant, on ne constate pas cette diminution de la bureaucratie, on ne voit pas cet accroissement des forces sur le terrain, on ne voit pas diminuer la moyenne d'élèves par classe, etc. Pour ces raisons, Ensemble à Gauche refusera la politique publique F.

Présidence de Mme Céline Zuber-Roy, première vice-présidente

Mme Joëlle Fiss (PLR). Chers collègues, le PLR se trouve dans l'obligation de refuser la politique publique F. Je vais seulement mentionner deux points. Le premier, c'est évidemment le dysfonctionnement de Mancy, qui résonne encore dans le canton de Genève. Le Conseil d'Etat a assuré que les jeunes autistes du foyer de Mancy qui ont subi des violences se portent bien physiquement. Les familles des autistes attendent toujours des réponses. Le PLR est en contact avec elles.

Deuxièmement, le peuple est d'accord avec le PLR sur le fait que la réforme du cycle d'orientation à Genève nuit à la qualité de l'enseignement dans le canton. La mixité, par principe, par idéologie, ne fera que mettre en évidence des inégalités au lieu de les effacer. Il faut donc une équité pour que les professeurs aient une disponibilité adéquate auprès des élèves ayant des difficultés. Voilà seulement deux raisons, chère Madame la présidente, chers collègues, parmi d'autres qui expliquent pourquoi le PLR va refuser la politique publique F. Merci.

M. Pierre Nicollier (PLR). Je souhaitais ajouter quelques éléments au point très pertinent que le député Baud a mentionné tout à l'heure. Effectivement, l'année passée, le DIP s'est vu attribuer 110 équivalents temps plein additionnels; avec 1000 élèves supplémentaires, cela signifie à peu près un pour dix élèves. Je suis d'accord avec lui sur le fait que c'est inquiétant et qu'on peut se demander pourquoi il y a de nombreux postes, mais pas de postes en face des élèves. La raison du refus, hier, de ceux qui étaient demandés, c'était qu'un tiers de ceux-ci étaient des postes de cadres, donc à nouveau pas en face des jeunes. Je pense qu'on se retrouve sur beaucoup de points avec le député Baud !

Je souhaitais aussi mentionner à l'attention du député Mussa qu'une grande part des économies par rapport au budget vient de l'annulation des camps. Je ne pense donc pas qu'on doit se féliciter d'une bonne gestion, parce que c'est plutôt triste que les camps n'aient pas pu avoir lieu, même si c'était dû à des éléments externes qui n'étaient pas sous notre contrôle !

Malheureusement, les comptes 2021 ne nous ont pas montré qu'il y avait un mouvement, une réflexion sur moins d'administration, sur plus de personnel sur le terrain, en face des élèves, et on continue dans cette gestion qui ne nous convient pas. C'est la raison pour laquelle nous refuserons la gestion pour le DIP. Merci.

M. Souheil Sayegh (PDC). Chers collègues, s'agissant de la politique publique F, Le Centre reconnaît aisément la difficulté liée à la gestion de la formation en période de crise. Nous n'en tiendrons aucunement rigueur au département, bien au contraire: Le Centre reconnaît l'effort consenti par l'ensemble du corps enseignant et l'en remercie.

Qu'il nous soit permis de souhaiter le renforcement de l'offre de formation à distance avec des outils modernes, qui permettrait à de nombreuses personnes de bénéficier d'une formation de qualité, répondant à l'évolution de notre société, que ce soit à l'école ou à l'université - cette même université que nous souhaitons libre et indépendante, et non pas terrorisée par la censure, comme les récents événements nous l'ont malheureusement rappelé.

Je crois que c'est le moment de rappeler que la qualité de l'enseignement ne passe pas par une augmentation du nombre de personnes dans l'administration, mais bien par le personnel sur le terrain, en face à face. Ce n'est qu'ainsi que le département pourra trouver le soutien du Centre au moment du budget, dans des limites raisonnables et sans garder en place les limites structurelles, comme au cycle d'orientation. Au vu de la récente votation au sujet du CO22 et de la division de la population et même du corps enseignant lui-même à ce sujet, la réforme du cycle s'impose et doit être une priorité.

Enfin, le PDC reste attaché à la création de nouvelles crèches, qu'elles soient subventionnées ou privées. Il reste attaché à la facilitation de la mise en place des règles d'usage, principalement s'agissant des crèches privées.

Malgré les défauts structurels apparents, le PDC acceptera ainsi la politique publique F, mais restera attentif au moment du projet de budget, s'agissant de l'acceptation des postes à pourvoir. Je vous remercie.

La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole va maintenant à Mme Dilara Barak.

Mme Dilara Bayrak (Ve). Bayrak, Madame la présidente ! Merci. A titre liminaire, j'aimerais remercier tous les enseignants et enseignantes qui ont fourni un travail exceptionnel durant ces années très compliquées, que ce soit 2020 ou 2021.

Je commencerai par reprendre les propos du député Baertschi et ensuite de la députée Joëlle Fiss. Je trouve franchement gonflé qu'on mentionne aujourd'hui l'OMP et le foyer de Mancy comme raisons pour refuser les comptes. Concernant l'OMP, si le MCG était une force de proposition pour des réformes, ça se saurait ! (Commentaires.) Pour ce qui est du foyer de Mancy, si le PLR est en contact avec les familles de ces personnes-là, nous nous réjouissons de voir aussi que vous allez voter tous les moyens supplémentaires et les futures réformes prévues... (Commentaires.) ...dans ce cadre-là, parce que jusqu'à ce jour, ce n'est pas le cas ! Cela a été très difficile de vous arracher ne serait-ce que quelques postes pour les profils spécialisés. Nous sommes contents de relever que vous avez changé de position et que vous êtes en contact avec les personnes qui subissent les institutions plutôt que d'en profiter !

Je continuerai avec un petit mot sur CO22, cette réforme qui a échoué en votation, en relevant qu'il est tout à fait dommage que vous ayez décidé de ne pas coopérer à ce propos, de ne pas participer aux travaux - en tout cas de manière efficiente - en commission, de ne pas mettre la main à la pâte, alors qu'il était encore temps de trouver des compromis et de faire en sorte que les institutions bénéficient à la population. Vous ne l'avez pas fait et c'est dommage, il faut le noter. Aujourd'hui, on va devoir se remettre au travail, dépenser des deniers publics... (Remarque.) ...et faire exactement le même exercice, en espérant que le PLR... (Commentaires.) ...cette fois, participe en commission. Ce serait sympa !

J'aimerais aussi dire un petit mot sur le fait que... (Remarque. L'oratrice s'interrompt.) Vous me laissez parler, Monsieur ? (Remarque.) ...dans le cadre du budget, nous attendons que des moyens soient accordés plutôt que l'on vienne encore une fois nous brasser - certes, on ne parle pas ici d'énergie - de l'air en disant qu'on peut faire mieux sans proposer de solutions qui soient durables et profitent aux personnes qui se trouvent sur le terrain et à celles qui ont besoin de ces prestations. Peut-être que si vous étiez un peu plus respectueux lors des débats, nous aurions beaucoup plus de facilité à trouver des compromis ! Merci.

Une voix. Alors là, c'est l'hôpital qui se fout de la charité ! (Commentaires.)

M. Bertrand Buchs (PDC). J'aimerais juste exprimer une interrogation. On n'arrête pas de se reprocher des choses les uns aux autres, de dire ce qui serait le mieux, le moins bien, le nombre de postes qu'il faudrait. Moi, je m'interroge sur la taille du département. Si on regarde les chiffres, on constate que c'est 54% du personnel de l'Etat. C'est un immense département, probablement trop gros. Les gens qui viendront à la prochaine législature devront non pas se taper dessus au niveau politique pour savoir qui a raison, mais peut-être se demander si cela est gérable: 54% du personnel de l'Etat, est-ce que c'est gérable ? Qu'il y ait à la tête du département quelqu'un de gauche, de droite ou du centre, est-ce que c'est gérable ? Est-ce qu'il est possible de gérer cela d'une façon cohérente ? Je pense qu'il faudra se demander s'il faut éventuellement rendre ce département un peu moins grand, de sorte que la personne qui le dirige ait la possibilité de mieux le gérer. Parce que tout ce qui arrive, c'est hyper compliqué ! Et là, Le Centre a joué son rôle, il a joué le jeu avec Mme la conseillère d'Etat, il a défendu la réforme du cycle, a essayé d'aller vers le mieux possible. Mais là, réfléchissez, chers collègues: l'instruction publique, c'est la chose la plus importante, avec la santé et avec d'autres départements; l'instruction publique et la formation des gens sont essentielles. Il est fondamental que les jeunes et les enfants puissent bénéficier d'une formation cohérente. Et, surtout avec la crise du climat, ainsi qu'avec la crise sociale qui s'annonce, il est crucial d'avoir des gens bien formés. Mais posez-vous la question au lieu de dire qu'il faut des postes à droite et à gauche: demandez-vous si ce département n'est pas trop grand ! Merci.

Des voix. Bravo !

M. François Baertschi (MCG). Comme j'ai été interpellé par une députée Verte, je tiens à lui répondre. Elle nous a dit, si j'ai bien compris, que le MCG ne faisait pas de propositions en matière scolaire. Je rappellerai quand même - mais bon, c'était avant qu'elle entre au Grand Conseil - que nous avions fait une proposition demandant qu'on assure un enseignement pour les jeunes jusqu'à 18 ans. Cette proposition a été acceptée et est entrée en vigueur. Elle s'amuse de cela, mais il y a beaucoup de jeunes qui sont actuellement en déshérence - des jeunes de plus de 18 ans, mais des jeunes moins âgés également. C'est toute une population qu'il ne faut pas laisser de côté. C'est une population très populaire de jeunes en déshérence, qui peut-être n'intéressent pas cette députée. Peut-être préfère-t-elle l'école sur les arbres ! Puisque c'est une des propositions, si j'ai bien compris, des milieux Verts ! Alors des propositions comme ça, faire des écoles sur les arbres ou dans la forêt... (Rire. Remarque.) ...comme j'ai cru comprendre que son parti ou son mouvement le proposait... (Commentaires.) ...le MCG n'en fera pas, vous l'aurez bien compris, nous laissons aux autres le soin de faire ce genre de propositions pour amuser la galerie ! Merci, Madame la présidente.

M. Patrick Dimier (MCG). Je veux juste revenir sur l'intervention de Mme Bayrak et sur celle de M. Buchs. Je pense que ce dernier pose la seule et vraie question. Qui trop embrasse mal étreint, dit l'adage. Ce département est manifestement beaucoup, beaucoup trop grand ! Mancy, c'est la pointe de l'iceberg. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'on a confié à l'instruction publique une institution qui relève davantage des problèmes médicaux que des problèmes d'instruction. Tant et aussi longtemps qu'on ne mettra pas de l'ordre dans ce foutoir, on n'y arrivera pas ! Par conséquent, si on peut inviter le parlement et la commission ad hoc à faire quelque chose, c'est bien entendu non seulement de mettre de l'ordre dans ce département, mais aussi et surtout de le réduire ! Merci !

Des voix. Bravo ! (Commentaires.)

M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je voulais quand même dire deux choses par rapport à ce qu'on vient d'entendre. D'abord, sur la formation obligatoire jusqu'à 18 ans, j'aimerais rappeler que c'est une innovation non pas du MCG, mais de la constitution de 2012, qui a été mise en oeuvre par notre magistrate. (Remarque.) Je pense donc que vous pourriez faire autre chose que vous attribuer les réformes qui ont été mises en place à l'initiative... (Remarque.) ...je crois d'une très large majorité des partis de l'Assemblée constituante. Je rappelle que le Conseil d'Etat socialiste de l'époque défendait aussi l'ancrage de cette formation obligatoire jusqu'à 18 ans dans la constitution. Donc, s'il vous plaît, un tout petit peu de modestie... (Commentaires.) ...serait vraiment de bon aloi ! C'est la première chose que je voulais dire.

Deuxièmement, je me réjouis d'apprendre dans cette séance que la droite de ce parlement est prête à voter des postes pour l'école inclusive ! J'invite donc notre magistrate à présenter des crédits là-dessus, parce que les attentes des familles et des associations qui représentent les élèves de notre canton qui sont exclus, qui doivent aller à l'école séparément, sont grandes ! Il ne faut pas se payer de mots et venir nous dire ici que vous êtes prêts à voter des postes pour ensuite ne pas le faire ! Je propose donc qu'on vous prenne au mot et que notre conseillère d'Etat vienne avec des demandes de crédits supplémentaires... (Remarque.) ...pour qu'enfin l'inclusion soit réalisée dans ce canton ! Je vous remercie. (Commentaires.)

Présidence de M. Jean-Luc Forni, président

M. François Baertschi (MCG). Bon, c'est un peu une partie de ping-pong, mais vous transmettrez au député socialiste qu'avant la Constituante, il y avait aussi un Grand Conseil qui existait - avant «sa» Constituante. Et dans ce Grand Conseil, le MCG avait déposé une proposition pour l'école obligatoire jusqu'à 18 ans ! (Commentaires.) Bien sûr, c'est quelque chose de trop ancien pour lui, mais il devrait quand même réaliser une fois que, hors du parti socialiste, il y a une vie politique et une école publique qui doit exister et qui peut exister !

Des voix. Bravo !

M. Yvan Zweifel (PLR), rapporteur de première minorité. Je me dois de réagir aux nombreux discours de députés de gauche qui nous expliquent à la fois que la droite est majoritaire depuis tellement longtemps dans ce parlement et que nous aurions sabré ou refusé plein de postes. Quand on regarde la réalité des chiffres, on constate qu'entre 2011 et 2021 - vous trouvez ces chiffres à la page 116 de mon rapport de minorité -, le nombre d'élèves à l'école primaire, secondaire I et secondaire II dans notre canton a augmenté de 7544, soit 11% de plus. Le nombre d'enseignants - et je parle uniquement des ETP - a, lui, augmenté de 815, ce qui représente 15% de plus. Par conséquent, non seulement l'augmentation du nombre d'enseignants a été plus importante que celle du nombre d'élèves, mais en plus, si vous calculez le ratio 7544 par 815 enseignants, cela représente 9,25 élèves par enseignant. Oser dire que l'on n'a pas voté les moyens, c'est soit n'avoir juste rien compris à la réalité des chiffres, soit tromper les gens !

Ce que souhaitent le PLR et la majorité... (Remarque.) ...responsable et raisonnable de ce parlement, c'est: engager, oui, mais engager pour des prestations sur le terrain et pas dans l'encadrement, pas dans l'administratif ! Parce que, en parallèle, l'évolution totale des ETP à l'Etat, c'est +29% ! On a donc engagé beaucoup de personnes dans l'encadrement, dans l'administratif, je ne sais encore où et pas sur le terrain. Cela vaut pour l'enseignement et cela vaut certainement aussi pour d'autres départements.

Pour conclure, pour ce qui est de l'OMP, puisqu'on en parle, s'il faut que ce soit dit et encore redit: oui, nous voterons des moyens, car il en faut de supplémentaires pour la catastrophe qui existe là-bas, mais nous voulons des moyens sur le terrain et en aucun cas dans l'encadrement. Qu'on aille les prendre ailleurs, au DIP ou à l'Etat, il y en a suffisamment !

Mme Dilara Bayrak (Ve). Je ne reviendrai pas sur les propos de M. Baertschi; je le laisse relire les projets de lois qu'il a mentionnés - qui ne situent pas les écoles dans les arbres, mais bon, c'est peut-être un peu trop compliqué ! Pour répondre à M. Zweifel, effectivement, des postes supplémentaires ont été accordés au DIP. Par contre, vous avez aussi compris, dans les nombreuses commissions, que l'encadrement nécessaire pour les élèves de manière générale a aussi augmenté et que les besoins des élèves d'aujourd'hui ne sont pas les mêmes. (Commentaires.) Les méthodes d'apprentissage ne sont pas les mêmes et il convient de les adapter aux besoins d'aujourd'hui.

Pour revenir sur cette question des postes de terrain ou pas, on a pu voir, que ce soit à la commission des finances ou dans d'autres, que les postes de terrain sont intrinsèquement liés aux postes qui ne sont pas directement considérés comme étant sur le terrain. (Commentaires.) Le personnel administratif et technique comprend aussi des postes comme des bibliothécaires, etc., et ils sont tout aussi nécessaires au fonctionnement des institutions publiques et au développement des prestations pour les élèves. Merci.

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de majorité. Je dirai quelques mots pour répondre à l'intervention du rapporteur de minorité, M. Zweifel, qui relève toujours les chiffres du nombre d'élèves, la démographie et tous ces éléments chiffrés. Il y a effectivement la réalité des chiffres; il y a aussi la réalité sociale, qui est extrêmement différente. Ce qu'on relève, c'est une augmentation d'à peu près 10% du nombre d'élèves dans l'enseignement ordinaire. Ce chiffre s'élève à plus de 15% dans l'enseignement spécialisé. Or ce sont bien entendu des élèves qui nécessitent précisément des taux d'encadrement bien plus élevés que dans l'enseignement ordinaire, eu égard à leurs difficultés et spécificités. Cela explique bien sûr l'augmentation de la prise en charge, qui est aussi corrélée à la complexification croissante des situations de ces élèves; celles-ci sont, avec le temps, toujours plus compliquées et nécessitent effectivement des moyens importants pour qu'on puisse leur assurer de bonnes conditions d'apprentissage et une bonne qualité d'encadrement.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, avant de répondre à quelques questions, j'aimerais - cela a été fait par certaines et certains d'entre vous - remercier les enseignants ainsi que le personnel administratif, les personnes des directions générales et les cadres du département, parce que nous venons de vivre deux ans et demi de covid, et l'école a tenu. Vous verrez aujourd'hui peut-être le rapport du SRED sur les résultats des élèves, qui montre qu'il n'y a pas eu de pertes particulières; l'école a tenu grâce à toutes celles et tous ceux qui sont engagés sur le terrain pour que l'école fonctionne. Aujourd'hui, nous faisons face à la crise ukrainienne. Les mêmes enseignants, les mêmes directions, les mêmes cadres du département font leur travail en plus de tout le reste pour accueillir ces élèves. Je tiens à les remercier ici.

Maintenant, quels sont les enjeux principaux du DIP depuis quelques années ? Le premier, c'est déjà simplement de faire face à l'augmentation du nombre d'élèves. (Commentaires.) Depuis quelques années, celle-ci est extrêmement importante à l'école primaire, et cela continue. (Remarque.) Depuis la dernière rentrée scolaire, elle touche le cycle d'orientation et, d'ici deux ou trois ans, elle touchera le secondaire II. (Remarque.) Cela sous-entend que nous sommes obligés, sans délivrer de nouvelles prestations, d'augmenter le nombre de postes, simplement pour répondre à cette augmentation du nombre d'élèves. Le Conseil d'Etat est en train de préparer le budget pour l'année prochaine et je peux vous dire que simplement par rapport à la démographie attendue en 2023, la croissance des charges du DIP, c'est déjà 1% en plus pour répondre aux besoins - simplement en lien avec l'aspect démographique ! Vous voyez donc bien que c'est un élément important.

Quand M. Zweifel nous dit... Et il le dit à chaque fois ! Mais je suis obligée à chaque fois de rectifier, parce que je ne peux pas laisser passer - j'allais dire du révisionnisme ou du négationnisme financier... (Commentaires.) ...dans ce cadre-là ! Vous savez très bien qu'un élève n'égale pas un élève. On a parlé de l'OMP - on y reviendra peut-être: à l'office médico-pédagogique, certains élèves nécessitent un encadrement de l'ordre de «un pour un», ce qui n'a rien à voir avec une classe de collège où vous aurez un enseignant devant une classe de vingt-quatre ou vingt-cinq élèves. A l'OMP, c'est le cas actuellement. Par ailleurs, vous savez très bien aussi - et cela avait été soutenu notamment par le PLR et par une majorité de ce parlement - qu'en 2014, le mercredi matin a été introduit à l'école primaire. On a rajouté une prestation, ce qui a forcément un impact sur des postes.

Vous ne pouvez pas exactement comparer l'augmentation du nombre d'élèves et l'augmentation du nombre de postes. Cela dépend des filières touchées, du nombre de cours donnés, si on a davantage d'apprentissages de type dual, etc. Au fond, si les entreprises offraient davantage de places d'apprentissage, l'école coûterait bien moins cher, puisque à ce moment-là, on pourrait fermer des classes à plein temps où on a des élèves toute la semaine. (Commentaires.) Selon où on se trouve, on ne peut donc pas dire qu'un élève égale un élève.

Un autre enjeu extrêmement important est l'augmentation des troubles - et c'est en lien avec la crise de l'OMP. On assiste, depuis quelques années... (Commentaires.)

Des voix. Chut !

Mme Anne Emery-Torracinta. On assiste depuis quelques années à une explosion des troubles chez les tout petits enfants. Et on ne le constate pas qu'à Genève ! On le voit partout sur le plan international. Je siégeais tout à l'heure à la CDIP, avec mes collègues de toute la Suisse, où l'on traitait une thématique liée à l'école inclusive et aux besoins particuliers. Or partout, partout, on observe la même chose: l'explosion des troubles chez les petits. Oui, ce sont des questions de société. Oui, il faut se préoccuper des crèches - mais elles ne font pas partie des prérogatives du DIP. On fait face à de véritables enjeux. On voit arriver ces petits complètement éclatés à l'école régulière à 4 ans. Et que se passe-t-il ? Il faut leur donner des soutiens pour qu'ils puissent rester en classe, ou même, dans les situations les plus difficiles, les rediriger vers des écoles spécialisées. C'est un des enjeux importants auxquels on fait face. Nous faisons face à d'autres enjeux, notamment par rapport à l'avenir de la formation professionnelle, aux besoins du marché du travail aujourd'hui, aux besoins des entreprises, notamment en lien avec le numérique, et je me réjouis que ce parlement - j'ose l'espérer - prenne aussi ses responsabilités pour doter l'école genevoise des moyens nécessaires.

Il a été question de la formation obligatoire jusqu'à 18 ans. Peu importe au fond de savoir qui est à l'origine de cette idée ! Toujours est-il... (Commentaires.) Toujours est-il que depuis un certain nombre d'années, et ce n'est pas l'effet de la formation obligatoire - il est encore un peu trop tôt pour le mesurer réellement, puisque c'est trop récent, si j'ose dire, 2018 c'est encore relativement récent -, ce qu'on observe à Genève, c'est l'augmentation du taux de certification: si l'on prend une classe d'âge, en général autour de 25 ans, et regarde combien de personnes sont certifiées, on s'aperçoit qu'à Genève, le taux augmente régulièrement depuis plusieurs années et que nous ne sommes plus les cancres, si j'ose dire, de la Suisse, mais que, grâce aux moyens importants qui ont été alloués - soutiens, notamment à la lecture, etc. -, on arrive à améliorer nos résultats. On le voit par rapport à la lecture: les dernières comparaisons intercantonales, qui datent de 2019, montrent que Genève était deuxième en lecture à la fin de l'école primaire. (Remarque.) Et ça, c'est un magnifique résultat qui est dû à l'investissement qui a été fait. (Remarque.)

Donc que souhaitez-vous, Mesdames et Messieurs les députés, dans un pays comme la Suisse, où notre seule richesse, c'est la formation ? Soit vous y mettez les moyens, les moyens de faire face à la démographie, de faire face aux nouveaux défis - je pense aux défis numériques -, de faire face aux enjeux de formation - on veut des gens toujours plus formés, toujours plus longuement formés, donc les études se rallongent de plus en plus -, soit on va y laisser des plumes ! Aujourd'hui, les autres cantons sont en train de faire des efforts massifs dans le numérique, et pratiquement rien ne se passe à Genève, faute de budget voté par le parlement !

Vous ne pouvez pas mener une politique qui est celle de la terre brûlée ! (Remarque.) Or pour moi, c'est une politique de la terre brûlée quand, en 2020, en pleine année covid, on n'a pas de budget à la rentrée, pas de nouveaux postes et les crédits supplémentaires pour les nouveaux postes qui sont refusés. On a dû certes faire des économies, mais, résultat des courses, ces économies ont placé le département dans des situations difficiles. Hier, je viens demander des postes pour l'OMP; moi, je ne veux pas entendre aujourd'hui des députés qui se plaignent de Mancy, qui trouvent que ce qu'il s'est passé est scandaleux... (Remarque.) ...et qui refusent de donner des moyens pour les enfants les plus fragiles de ce canton ! C'est ça que vous êtes en train de faire, Mesdames et Messieurs les députés, c'est une politique de la terre brûlée... (Vifs commentaires. Applaudissements. Huée.)

Mme Anne Emery-Torracinta. C'est de la politique politicienne... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Madame la conseillère d'Etat ! (Brouhaha.)

Mme Anne Emery-Torracinta. ...et pour reprendre ce que disait l'un d'entre vous... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît !

Mme Anne Emery-Torracinta. ...vous êtes sans doute, pour une majorité... (Vive remarque.) ...de ce parlement, des députés disruptifs, qui disent tout et son contraire dans la même phrase ! J'ai noté qu'on est prêt à donner des moyens, mais qu'il y a un problème quand on rajoute des moyens ! (Rires.) J'aimerais que le MCG choisisse enfin de quel côté il est ! Du côté des plus faibles... (L'oratrice est vivement interpellée.)

Des voix. Chut !

Mme Anne Emery-Torracinta. ...ou simplement du côté des personnes qui sont en place. (Commentaires.) Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite donc non seulement à accepter cette politique publique, même si cela n'a guère d'importance... (Rire.) ...mais surtout à nous donner les moyens d'avoir une école de qualité... (Commentaires.) ...et de répondre aux besoins des élèves les plus fragiles de ce canton. Merci. (Applaudissements. Huées.)

Le président. S'il vous plaît ! Ayez, s'il vous plaît, un comportement respectueux vis-à-vis du Conseil d'Etat ! La parole n'étant plus demandée, nous passons au vote.

Mise aux voix, la politique publique F «Formation» est rejetée par 50 non contre 39 oui et 3 abstentions.

G - AMÉNAGEMENT ET LOGEMENT

Le président. Nous enchaînons avec la politique publique G «Aménagement et logement». La parole n'étant pas... (Commentaires.)

Des voix. Aaah ! (Commentaires.)

Le président. Monsieur le député Rémy Pagani, vous avez la parole.

M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je citerai pour commencer cette intervention une phrase édifiante en ce qui concerne les attaques récentes de la droite parlementaire et de la droite tout court pour imposer de la propriété par étage. Le rapport d'activité sur la mise en oeuvre de la loi LUP 2020 - c'est-à-dire portant sur 2019 -, auquel je vous conseille de vous référer, dit à la page 23: «[...] près de 50% de logements destinés à la propriété (PPE et villas) ont été produits, alors que moins de 20% des ménages sont intéressés et éligibles à cause notamment des restrictions fédérales de financement.» Ce n'est pas nous qui le disons, ce sont les autorités. Et si on met en rapport cela avec le fait qu'on a de moins en moins de terrains du fait des ZDAM qui nous sont imposées par les autorités fédérales, c'est-à-dire du non-déclassement, et avec le fait qu'on produit 0,34% - 0,34% ! - de LUP, de HBM notamment... (Commentaires.) ...qui correspondent aux besoins de la majorité de la population, on voit qu'on va dans le mur ! Vous nous précipitez dans le mur, d'autant plus que la population augmente. Nous l'avons dénoncé et nous continuerons à le dénoncer. Une majorité de ce parlement vote prétendument en faveur de la classe moyenne, ce qui est pour nous un cheval de Troie permettant de limiter voire d'anéantir toutes les politiques publiques qui visent à mettre à disposition de la population des logements bon marché. Je vous remercie de votre attention.

M. André Pfeffer (UDC). Cette politique publique est très centralisée, très étatiste et très, très coûteuse. Genève dépense pour une administration pléthorique et plus qu'ailleurs pour des subventions et des aides. Hélas, il est possible que cette montagne d'argent public favorise également les augmentations de nos loyers. Mais notre spécialité genevoise peut être surprenante: par exemple, les généreuses subventions pour les HM - habitations mixtes - et surtout les coopératives d'habitation HM. Pour cette catégorie de logements, l'Etat aide. Il met souvent des terrains à disposition. L'Etat offre des tarifs de droits de superficie privilégiés. L'Etat accorde des aides et des cautionnements pour les trois quarts des fonds propres, etc., etc. Toutes ces aides pour finalement exiger de seulement 60% des locataires qu'ils remplissent les critères tels que taux d'occupation ou taux d'effort.

Une voix. C'est pas vrai !

M. André Pfeffer. Qui sont les 40% restants d'heureux bénéficiaires ? C'est délicat de le dire en public ! Les 40% d'heureux bénéficiaires sont souvent choisis par les partis qui gèrent et administrent les coopératives d'habitation HM, et, évidemment, avec l'argent public. Ce sont ces partis qui attribuent ces appartements. La pratique genevoise est particulière. Si à Zurich, les bénéficiaires des coopératives d'habitation se réunissent pour construire ensemble, les bénéficiaires des coopératives d'habitation genevoises, eux, veulent surtout des aides, des subventions et de l'argent public. Genève dépense plus qu'ailleurs et la situation pour le logement n'est pas meilleure qu'ailleurs. Par contre, je rappelle que le pouvoir d'achat des Genevois est le plus faible de ce pays. Cette situation est largement due au prix de nos logements. Merci de votre attention.

M. Sébastien Desfayes (PDC). D'abord, pour répondre à M. Pagani, nous assumons la défense de la classe moyenne, qui est la grande oubliée des zones de développement, notamment s'agissant d'une catégorie bien précise de logements, ce qu'on appelle les logements locatifs ZDLOC, loyers non subventionnés, mais à prix contrôlé. Entre 2010 et 2020, seulement 17% des logements construits étaient en ZDLOC.

Cela étant précisé, je crois que l'enjeu de cette législature pour ce qui est de l'aménagement et du logement, c'est le PAV. Le conseiller d'Etat a, dans un premier temps, compris l'importance de ce projet et l'enjeu capital d'avoir dans ce périmètre énorme - le dernier de Genève - une mixité sociale. Parce que la mixité sociale conditionne tout: l'école, les charges de l'Etat, ses recettes ainsi que la capacité d'une population à se mélanger et la possibilité de créer une certaine cohésion. Dans ce contexte-là, on a eu dans un premier temps un conseiller d'Etat plein d'énergie, plein d'enthousiasme, et qui a essayé, avec le talent qu'on lui connaît, de réunir les partis politiques du Grand Conseil pour tenter de trouver un consensus. Certaines propositions ont été émises. Mais ce qu'on doit relever, c'est - outre l'obstruction tout à fait inattendue d'Ensemble à Gauche - que le parti socialiste a simplement refusé le moindre compromis. On peut regretter que le Conseil d'Etat, au lieu d'insister, ait abandonné et soit aujourd'hui prêt à sacrifier le PAV à son sort, qui sera triste. Il n'y aura pas de mixité sociale, tout indique qu'il s'agira d'un ghetto, avec les conséquences que cela suppose.

Encore un dernier point, une légère critique au conseiller d'Etat Hodgers: il ne faut pas avoir peur des oppositions, il ne faut pas être frileux en matière de densification. Le plan directeur cantonal prévoit une densification des grands axes de transports publics lourds. Il faut y aller quand on a la possibilité de le faire, et on connaît des périmètres à Genève qui ne demandent qu'à être densifiés, mais il existe sur ces mêmes périmètres certaines oppositions, qu'elles viennent de l'extrême gauche, de la droite ou de la droite dure. Nous considérons qu'il ne faut pas avoir peur, qu'il vaut mieux gagner avec nos idées que perdre avec celles des autres. Et quitte à perdre, il n'y a rien d'infamant à perdre devant le peuple en défendant ces mêmes idées. Merci.

M. Alberto Velasco (S). Tout d'abord, j'aimerais dire au représentant de l'UDC que ce qu'il dit sur l'administration n'est pas vrai ! Parce que chaque fois que nous avons voulu doter, par exemple, le contrôle LDTR d'un poste ou deux, cela a été refusé, et on sait très bien que ce service est sous-doté. Or il est très important de contrôler les loyers, parce que nous avons connu à Genève une période - et c'est toujours le cas - d'augmentation de loyers invraisemblable et très difficile à vivre. Les loyers ont augmenté de 30% à 40%... (Remarque.) ...par rapport aux loyers de référence des quartiers ! Pourquoi ? Parce que les gens n'utilisent pas les outils à disposition dans le cadre de la loi sur les baux et loyers, c'est-à-dire la formule qui permet à une personne de revendiquer une baisse de loyer quand elle arrive dans un appartement - les gens ont peur. A Genève, nous nous trouvons dans une situation délicate. Les locataires ont peur de dénoncer les augmentations abusives. La peur, c'est difficile dans une société. C'est très difficile quand des citoyens ont peur d'utiliser les droits qu'on leur donne pour défendre leurs intérêts. C'est très délicat, et cela existe ! C'est terrible ! Cela devrait nous interroger, tous les députés, de droite et de gauche - de droite et de gauche ! C'est comme si les gens disaient: «J'ai peur d'aller voter, parce que si mon voisin me voit voter, je ne sais pas ce qu'il pourrait m'arriver.» (Remarque.) On est un peu là-dedans.

Deuxièmement, j'aimerais dire à nos collègues de l'UDC qu'il n'y a pas une seule fois, depuis que je siège dans ce parlement, où je les ai vus voter dans l'intérêt des locataires. Pas une seule ! Toujours non, toujours non ! Je comprends le vote du PLR. Je le comprends tout à fait. Venant de l'UDC, je ne comprends pas, parce que vous dites défendre les classes populaires. Je l'ai dit plus d'une fois ici, nous sommes un canton composé à 80% de locataires et un parlement composé à 60% d'anti-locataires. C'est une hérésie ! C'est une hérésie incroyable, et il faut que les citoyens le sachent.

S'agissant du PAV, j'aimerais dire à mon collègue qu'en 2018, en tout cas l'ASLOCA et le parti socialiste ont participé à l'accord du PAV. Nous l'avons signé, et cela n'a pas été facile. Cela n'a pas été facile, parce qu'il fallait effectivement admettre un pourcentage de logements en PPE, et vous savez très bien qu'on les a admis en droits de superficie. Mais cela a quand même représenté une avancée. Il a fallu convaincre les milieux des locataires, ce qui n'était pas facile. On ne peut donc pas dire que le parti socialiste n'est pas ouvert aux négociations. Ce n'est pas vrai ! Il était à la table des négociations; le parti socialiste a même participé à celles portant sur l'article 4A LGZD. On ne peut donc pas nous dire que nous ne sommes pas ouverts à la négociation. C'est vrai qu'elles peuvent être difficiles, mais moi je vous le dis, chers collègues, jamais je n'ai refusé de m'asseoir à une table pour négocier ! Jamais ! (Remarque.) Pardon ?

Des voix. Non, non, rien !

M. Alberto Velasco. Je ne sais pas, je suis interpellé, c'est pour ça que... (Remarque.) Alors il est possible, c'est vrai, qu'on ne soit pas d'accord. Mais vous ne pouvez pas dire qu'on ne s'est pas assis autour de la table. Je considère que le problème du logement à Genève est tellement difficile et complexe que les acteurs qui refuseraient de se mettre autour d'une table pour négocier commettraient presque un délit. Vous savez très bien qu'aujourd'hui, 8000 personnes sont inscrites dans des listes d'attente à l'office cantonal du logement et que, malgré le fait que le département construise du logement - il faut reconnaître qu'ils ont construit du logement -, on ne peut pas satisfaire cette liste. Quand, dans un canton dont le développement économique est le plus important de Suisse, avec la Ville de Genève qui est la deuxième la plus riche du monde, on voit des gens qui dorment dans la rue et des besoins en logements sociaux qui ne sont pas satisfaits, on ne peut pas être fier sur ce point-là. Voilà. Nous voterons cette politique publique. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs.

M. Francisco Valentin (MCG). Le canton crée des logements, et pourtant nous avons une pénurie grandissante de logements dits moyens. La loi MCG pour faciliter la transformation de bureaux en habitations, bien que votée et acceptée dans ce parlement, n'est jamais appliquée là où ce serait possible, en raison d'obscures tracasseries administratives ou de fausses excuses de complexité.

La loi MCG pour la priorité aux résidents de plus de cinq ans concernant l'accès aux logements subventionnés, combattue tant par le Conseil d'Etat que par un référendum de la gauche qui a lamentablement échoué devant le peuple, n'est pas appliquée comme elle le devrait, pas plus que la priorité aux résidents pour l'emploi, ce qui, par corollaire, les empêche d'avoir les moyens de se loger correctement à Genève. Encore un déni de la volonté populaire !

La pression des loyers plus abordables en France voisine, la possibilité d'acquérir une maison au prix du loyer d'un petit appartement, le scandale absolu des primes LAMal qui sont, pour des prestations égales, quasiment trois fois moins chères que pour un résident genevois, le coût de la vie bien moins élevé qu'à Genève accélèrent la fuite de contribuables de la classe dite moyenne et donc de rentrées fiscales pour Genève. Quant à prétendre que ces personnes reviendraient à Genève si on ne construisait que des LUP, cela relève soit d'une mauvaise vision, soit d'une mauvaise foi crasse. La première se soigne, la deuxième se combat ! Le MCG, le seul, le vrai - méfiez-vous des contrefaçons émergentes... (Rires.) ...mènera ce combat sans relâche !

La Genève à 1 million d'habitants ne séduit personne et est une hérésie géographique. Les zones villas, les véritables écoquartiers, les coopératives sont les garants de la mixité, de la biodiversité et du bien-vivre. Les grands ensembles bétonnés à la mode «banlieues ghettos françaises» ne leur ont visiblement rien appris ! Triste constat ! Genève, son magnifique lac et sa particularité méritent beaucoup mieux.

Pour ces raisons, le MCG refusera la politique publique G «Aménagement et logement». Néanmoins, pour refermer le sandwich pédagogique, bien qu'il soit un redoutable orateur, je salue la capacité d'écoute et de dialogue du conseiller d'Etat chargé du DT, ce qui nous permet parfois de trouver des terrains qui, à défaut d'être en jachère, sont au moins d'entente. (Rire.) Merci.

M. David Martin (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, nous n'avions pas prévu d'intervenir sur ces comptes, parce qu'en réalité... (Remarque. Rire. L'orateur s'interrompt.) Nous sommes surpris de ces débats qui ne portent finalement pas sur les comptes, mais qui sont chaque fois des occasions de refaire des débats sur de grandes généralités. On m'a soufflé que les Vaudois traitent leurs comptes en deux heures. Je trouve qu'on pourrait s'en inspirer, peut-être qu'on gagnerait du temps ! (Commentaires.)

Cela étant dit, je réagis aux attaques faites contre les coopératives, parce que vous savez tous que c'est mon sujet de prédilection. Je remercie le député Valentin d'avoir dit à quel point les coopératives sont le futur du logement à Genève. Je ne comprends donc pas ces attaques selon lesquelles les aides aux coopératives sont des coûts insupportables qui vont renchérir les loyers de tout le monde, etc. Mesdames et Messieurs, il n'y a pas photo, en réalité: les coopératives, à long terme, ce sont des loyers un tiers moins chers - cela a été démontré, notamment s'agissant de celles qui ont cinquante ans maintenant - et ces immeubles aujourd'hui ne reçoivent aucune aide de l'Etat. (Remarque.) Ce sont des immeubles dont les loyers sont peu chers, pérennes, sans aucune aide de l'Etat. Qu'est-ce que vous voulez comme meilleure démonstration, qu'est-ce que vous voulez comme meilleure politique du logement compatible avec les aspirations de la droite ? Vraiment, je ne comprends pas.

En plus, les droits de superficie, sur le long terme, ce sont des ressources pour l'Etat. Celui-ci engrange à terme davantage d'argent qu'il n'en a déboursé pour l'acquisition de ces terrains. (Commentaires.) Zurich a été cité comme exemple. Son taux de coopératives s'élève à 25%, avec un objectif politique annoncé de 33% à l'horizon 2025. Comment pensez-vous que les coopératives s'y sont développées ? Tout simplement grâce à la démarche d'acquisition foncière de la Ville, qui a permis de mettre à disposition des terrains pour ces coopératives. Il n'y a pas mille moyens d'y parvenir.

Enfin, ce qui a été dit sur les 40% de loyers libres des HM par le député UDC est parfaitement faux: il y a aussi des éléments de contrôle sur ces 40%, avec notamment des plafonds de fortune, ainsi que des taux d'effort minimaux dans les LUP. Par ailleurs, on ne peut pas dire que les coopératives sont des structures qui - je ne sais pas ce qui a été dit - accueillent leurs petits amis, font des sélections parmi les partis politiques... Franchement, ce sont des propos absolument inaudibles ! Toutes les coopératives que je connais, et j'en connais de nombreuses, pratiquent des listes d'attente avec des systèmes d'attribution par ancienneté qui sont scrupuleusement respectés. On doit reconnaître une excellente éthique dans les mécanismes d'attribution d'appartements au sein des coopératives - des critères d'attribution qui ne sont, soit dit en passant, pas du tout pratiqués dans le système d'attribution du marché libre: nous savons tous que, sur ce terrain-là, à Genève, c'est le piston qui constitue l'un des seuls moyens de parvenir à l'obtention d'un logement ! Donc un peu de respect pour ces coopératives qui font un boulot remarquable et qui sont un excellent moyen de produire des loyers bon marché sur le long terme ! C'est sur ce point-là que je souhaitais insister ce soir. Je vous remercie.

M. Stéphane Florey (UDC). Jusqu'à présent, on a beaucoup parlé de logements, je vais un peu parler d'aménagement. Parce que finalement, la cause de tout ce qui vient d'être dit provient de l'aménagement. Aujourd'hui, pour qui et pour quoi déclassons-nous? C'est ça, la question ! Vous dites sans arrêt, on l'entend année après année, que c'est la crise du logement, qu'il manque des logements... Mais pour qui manque-t-il du logement ? Véritablement, pour nos résidents ! Si vous regardez tout ce qu'on a construit ces deux dernières années et que vous calculez le ratio entre les résidents qui cherchent un logement et les personnes hors canton qui sont venues résider à Genève, si vous faites le calcul de ce qu'on a construit pour La Chapelle-Les Sciers et au quartier de l'Etang, vous vous apercevrez qu'à une ou deux unités près, on a construit et déclassé uniquement pour accueillir ces personnes. Mais finalement, pour nos enfants, pour nos résidents, qu'est-ce qu'on a fait ? Zéro ! On a construit exactement zéro logement pour nos résidents. C'est ça, la réalité aujourd'hui ! Et c'est ça qu'on peut déplorer.

On fait croire artificiellement à la population qu'on a une crise du logement, qu'on manque de logements, mais c'est faux. Aujourd'hui, on construit uniquement parce que nous subissons depuis des années - et ça fait des années que l'UDC le dit - une immigration totalement incontrôlée de la part du Conseil d'Etat, mais également de la Confédération... (Rires. Commentaires.) ...puisque c'est elle qui admet un certain nombre de personnes et qui les dispatche dans les cantons; mais les cantons ne faisant rien... (Commentaires.) ...on construit finalement pour ces gens-là ! (Commentaires.) Ou pour des personnes qui viennent d'autres cantons, mais ce n'est pas véritablement pour nous-mêmes que nous construisons. Et c'est là qu'on a un réel problème.

Nous créons artificiellement un besoin dont on pourrait largement se passer, puisque si on calcule d'une part les ratios de personnes en âge d'avoir un logement - 20-25 ans -, qui commencent leur vie active et qui auraient suffisamment de moyens pour prendre un appartement, et d'autre part les personnes qui libèrent des habitations - soit par décès, soit par déménagement -, on s'aperçoit finalement que 600 à 700 logements par année au grand maximum suffiraient non seulement à couvrir nos besoins, mais également à détendre ce manque d'habitations qui, je le dis encore une fois ici, est créé artificiellement par nos autorités qui préfèrent fermer les yeux sur nos véritables besoins plutôt que de voir la réalité en face. Ça, c'est pour nous problématique, et c'est là-dessus qu'on devrait axer la politique à la fois d'aménagement et du logement pour résoudre ce problème, au lieu de fermer les yeux et de continuer dans cette politique assez déplorable. C'est pour ça que l'UDC refusera cette politique publique. Je vous remercie.

Mme Diane Barbier-Mueller (PLR). Je vais quand même revenir sur les inepties que j'ai entendues de la part de notre président de l'ASLOCA et collègue député socialiste, M. Velasco. Qu'il parle d'un parlement composé à 60% d'anti-locataires et qu'il diabolise les propriétaires est vraiment regrettable. Mais ce sont les bases et les fondements de la stratégie de l'ASLOCA: diviser pour mieux régner. Je vais mentionner deux accords conclus entre les associations professionnelles représentantes des propriétaires et des régies et l'ASLOCA, donc main dans la main. Il y a eu l'accord tripartite dans le cadre de la crise covid pour le paiement des loyers commerciaux ainsi que le projet Domos, pour la prise en charge des arriérés de loyers, élaboré en partenariat avec l'ASLOCA et l'USPI. Je trouve qu'une telle diabolisation n'est pas très sport: il s'agit de partenaires qui devraient travailler ensemble.

Je reviens sur quelques chiffres. Fin 2020, près de 19 000 logements sociaux avaient été construits dans le canton, ce qui équivaut à presque 12% du parc. Le travail du Conseil d'Etat - que je vais encenser pour une fois - a été fait. Il faut donc arrêter de dire qu'il manque des logements sociaux. Juste pour l'année 2020, 712 LUP ont été construits, ce qui équivaut à 32% des logements neufs. Il faut donc arrêter de dire que les logements sociaux et l'OCLPF ne sont pas mis en avant: il y a davantage de logements sociaux construits qu'autre chose ! (Commentaires.) En mars 2020, un article de la «Tribune de Genève» relevait que 80% des personnes qui souhaitent devenir propriétaires ne le peuvent pas, faute d'offres. (Remarque.) Les vrais péjorés dans l'histoire, ce sont donc plutôt les propriétaires... (Rire.) ...que les logements sociaux... (Commentaires.) ...et je vous remercierai de verser aussi une larme pour ceux qui souhaitent acquérir une propriété, notamment pour leur retraite ! Parce que l'accession à la propriété est un réel enjeu social: cela permettrait effectivement aux personnes d'économiser de l'argent et cela enrichirait l'Etat, puisque ce sont des impôts qui sont payés, contrairement à certains autres types de logements.

Enfin, pour revenir sur la politique d'aménagement que M. Florey regrettait de ne pas avoir entendue, c'est le petit bémol de la stratégie du Conseil d'Etat: je regrette qu'on ne développe pas assez la zone constructible, c'est-à-dire qu'on n'encourage pas plus les surélévations et le respect de l'indice de densité dans les nouveaux projets. Merci, Mesdames et Messieurs. (Commentaires.)

M. Thomas Bläsi (UDC). En tant que simple membre de l'ASLOCA - UDC certes, mais locataire et membre de l'ASLOCA -, j'aimerais m'adresser à son président et lui dire que mon parti a signé les accords sur le logement et les a respectés. Par conséquent, en tant que membre de cette association, je me sens tout à fait respecté par l'UDC par rapport à la position qu'il a prise, tenue et négociée avec vous. Cela me paraît un peu bizarre de jeter comme ça une partie... (Remarque.)

Une voix. Chut ! (Rire. Remarque.)

M. Thomas Bläsi. Mais c'est bien ça ! (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît, pas de discussion entre députés ! Vous vous adressez au président ! (Commentaires.)

M. Thomas Bläsi. Merci, Monsieur le président.

Une voix. Et au Conseil d'Etat ! (Commentaires.)

Le président. Au président d'abord ! (Commentaires.)

M. Thomas Bläsi. En tout cas, les accords sont respectés et, à mon avis, l'intention des membres également, et c'est un peu déplorable de créer des divisions ainsi en interne, de la part d'une association qui a essentiellement pour but de défendre les locataires, qui ne sont pas forcément tous issus de votre milieu, Monsieur Velasco !

Un deuxième point, maintenant: le PAV. Le PAV ! J'ai entendu plein de choses là-dessus. J'ai entendu M. Desfayes, je crois... Mais le vrai problème, c'est: comment a-t-on pu laisser la direction cantonale du PAV se délocaliser dans les locaux de la Fondation PAV ? A un moment donné, on veut quand même protéger et faire la distinction entre les intérêts privés et un arbitrage étatique ! Alors pourquoi la direction du PAV est-elle désormais placée dans les locaux de la Fondation PAV ? Je pense que tout le monde peut être scandalisé par ça ! Alors que la hiérarchie cantonale du PAV, elle, reste là où elle était. (Remarque.) Si, si ! Vous devriez regarder ! En tout cas, je trouve qu'il y a des interprétations très malheureuses. Je vous remercie. (Commentaires.)

Une voix. Chut !

M. Patrick Dimier (MCG). J'aimerais juste revenir sur le débat précédent à propos des coopératives. Bien entendu, le MCG soutient et encourage les coopératives, cela a toujours été notre position. Simplement, la politique en matière d'attribution des dossiers à des coopératives est complètement noyautée par le groupe des Verts ! (Exclamations.) Ce qui résulte de cela, c'est qu'il n'y a que la Codha qui obtient des dossiers, et quand vous avez... (Remarque.) Je peux vous donner des exemples, Monsieur Martin, vous verrez ! Vous ne serez pas déçu ! (Commentaires.) Des coopératives nouvelles qui voudraient obtenir des dossiers, précisément, ne les obtiennent pas, parce qu'elles se les font gober par la Codha. Il ne faut donc pas se tromper sur la politique en matière de coopératives: oui, il s'agit d'un excellent moyen d'accession à une forme de propriété, mais veillons à ce qu'il y ait de l'équité dans les attributions ! C'est ce qui fait que la chatte a mal aux pieds, aujourd'hui. (Commentaires.)

Par ailleurs, j'entends énormément parler de réchauffement climatique, etc., etc. Est-ce que vous connaissez la principale source de réchauffement climatique ?

Une voix. Démographique ! (Commentaires.)

M. Patrick Dimier. C'est la démographie ! C'est la démographie... (Commentaires.) ...et, derrière elle, la densité. Par conséquent, tant et aussi longtemps - et notre collègue Florey avait raison de revenir sur ce sujet - qu'on laissera grossir notre ville, on ne résoudra pas ces problèmes. Je sais que certains groupes dans ce parlement veulent mesurer le nombre de mètres carrés utilisés par les gens pour pouvoir les enlever de là où ils sont ! Je vous dis tout de suite: on n'est pas encore dans un système communiste; on est certes dans un système néomarxiste... (Exclamation.) ...mais on n'est pas encore dans un système communiste ! Alors mener une politique de ciboulette, c'est-à-dire verte dehors, mais vide dedans... (Rires.) ...tant que vous voulez, mais pas avec nous ! (Commentaires.)

M. André Pfeffer (UDC). J'aimerais apporter une petite précision sur une déclaration que j'ai faite plus tôt, concernant les coopératives d'habitation HP. (Commentaires.) Je répète - et je demanderai peut-être même au Conseil d'Etat de le préciser -, dans les coopératives d'habitation HP... (Commentaires.) ...seulement 60% des locataires sont soumis... (Remarque.) ...aux critères de taux d'occupation et de taux d'effort. (Commentaires.) Pour les 40% restants, il y a certes des limites, mais des limites qui vont bien au-delà de ce qu'on peut considérer comme des critères pour des logements sociaux. Je répète encore une fois: on considère les coopératives d'habitation HP...

Une voix. HB !

M. André Pfeffer. ...comme des logements sociaux, comme des logements d'utilité publique, ils touchent aussi des subventions pour cela, mais je pense que c'est quand même un peu exagéré. Merci. (Remarque. Rire.)

M. Rémy Pagani (EAG). J'aimerais répondre à un certain nombre de points. Les demandeurs de logements aujourd'hui... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !

Une voix. Chut !

M. Rémy Pagani. ...ce sont, à 80%, des locataires; ce ne sont pas, contrairement à ce qui vient d'être dit, des demandeurs de logements en PPE. (Remarque.) Cela étant dit, on a quand même été surpris, en analysant le rapport d'activité de la Fondation PAV - puisqu'il est question du PAV - de constater que le Conseil d'Etat a octroyé des droits à bâtir à la banque Pictet sans passer par le parlement. C'est quand même assez étonnant, d'autant plus que la constitution genevoise ne permet des dérogations qu'en cas d'utilité publique. Or malheureusement, je n'ai pas l'impression que donner des droits à bâtir à la banque Pictet soit d'utilité publique. Je demande donc au gouvernement de s'expliquer sur cette question. Merci.

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat a entendu avec beaucoup d'intérêt... (Rire.) ...les échanges de votre parlement sur lui-même ! Je crois que certains députés ont répondu à l'essentiel des propos. Il reste donc très peu de choses concernant le Conseil d'Etat et le rapport de gestion. (Commentaires.) Je sais que la députée Bachmann a faim... (Rires. Commentaires.) ...je serai donc rapide !

S'agissant de la question de fond: pour qui est-ce que l'on construit ? Avec 1,4 enfant par femme, Monsieur Florey, et Mesdames et Messieurs les représentants - surtout Messieurs, d'ailleurs ! - de l'UDC et du MCG... (L'orateur est interpellé.) ...sans migration, la Suisse disparaîtrait. C'est ça, la réalité démographique ! (Remarque.) Sans migration, il n'y aurait plus de renouvellement de la population, et vous avez raison: il n'y aurait plus grand-chose à construire, et au bout d'un moment, d'un point de vue mathématique, en quelques générations, la Suisse disparaîtrait. (Commentaires.) Ce n'est pas tout à fait le modèle qui a fait la prospérité de Genève - ni de la Suisse, du reste. Cela pour souligner qu'effectivement, nous vivons dans une cité ouverte, avec beaucoup de va-et-vient; en réalité, il y a plus de 30 000 personnes par année qui emménagent dans le canton, mais aussi 30 000 qui déménagent du canton. Vous savez d'ailleurs que 10% de la population suisse habite à l'étranger, et en ce qui concerne Genève, ce taux est plus important, puisque beaucoup habitent de l'autre côté de la frontière. C'est donc là finalement que se situe la question: quel est notre modèle ? Est-ce qu'on veut un modèle d'ouverture ou de fermeture ? (Remarque.) Parce que si on veut le modèle d'ouverture, qui fonde notre prospérité - modèle d'ouverture économique, d'ouverture démographique, avec la libre circulation des personnes -, et que nous n'adaptons pas nos infrastructures, que se passe-t-il ? C'est ce qui a mené, Mesdames et Messieurs les députés MCG, à la création de votre parti, d'ailleurs: nous avons, en vingt ans, multiplié par quatre le nombre de frontaliers.

Une voix. Hé ben ouais !

M. Antonio Hodgers. Mais pourquoi ? Parce qu'on octroie un permis de travailler à une personne, mais pas de logement à cette même personne ! C'est ça, un frontalier ! Sinon, ce seraient des migrants. Comme vous, Monsieur Valentin, comme le président du Conseil d'Etat, comme votre serviteur, comme beaucoup de gens dans cette salle qui ont des origines étrangères et qui ont eu à l'époque la chance de s'installer à Genève, parce qu'on a construit pour eux ! Parce que vous n'étiez pas là pour refuser les logements que vous refusez aux nouveaux migrants ! (Commentaires.) Là est le pacte, Mesdames et Messieurs les députés de la droite - populiste.

Une voix. Hé, ho ! (Commentaires.)

M. Antonio Hodgers. Là est le pacte ! C'est reconnaître que notre modèle de prospérité nous permet de disposer de la main-d'oeuvre en suffisance, d'infrastructures hospitalières, d'une économie performante, d'un des niveaux de vie les plus élevés du monde. Et pourquoi ? Parce que nous sommes dans un modèle ouvert. Or ce modèle ouvert implique qu'il y ait des migrantes et des migrants. Et leur refuser du logement, c'est dire quoi ? «On veut votre force de travail, on veut bien être soigné par vous à l'hôpital, on veut bien que vous nous serviez au bistrot, mais surtout, ne venez pas habiter chez nous !» Ce discours... (Applaudissements.) ...que M. Florey accepte avec cynisme, le Conseil d'Etat le refuse ! (L'orateur est interpellé.) Il le refuse, parce que nous ne pouvons pas avoir comme modèle de prospérité le fait de se servir de la force de travail de certaines personnes et de les renvoyer de l'autre côté de la frontière ou chez elles quand on n'en a plus besoin ! (Commentaires.) Le fait de procéder ainsi a créé cette mobilité pendulaire impossible que nous vivons à Genève: 650 000 passages par jour aux frontières cantonales ! Pourquoi ? (Commentaires.) Parce que Genève n'a pas su construire pour les gens qu'elle emploie ! Et le projet est simplement là: construire des logements pour les gens que nous employons: au PAV, avec la meilleure mixité sociale possible, au sein des fondations immobilières HBM...

Une voix. HM !

M. Antonio Hodgers. ...HBM, pour les fondations immobilières, ou des logements HM - HP, c'est autre chose, mais je pense que vous ne connaissez pas ! Pour vous dire que... (Rires.)

Des voix. Roooh ! (Commentaires.)

M. Antonio Hodgers. Pour vous dire que, bien évidemment, la loi est respectée, Monsieur le député. (Commentaires.) 60% des logements HM sont subventionnés en plein, avec des exigences liées au taux d'occupation et au taux d'effort. Pour les 40% restants, les exigences liées au taux d'occupation sont appliquées, mais les loyers sont davantage libres, c'est ce que dit la loi. Le Conseil d'Etat ne fait donc qu'appliquer la loi.

Mesdames et Messieurs, encore quelques mots pour vous dire qu'effectivement, j'ai décidé de regrouper la direction du PAV avec la Fondation PAV et la FTI dans une logique d'agilité. Ce n'est pas la direction du PAV qui est l'autorité de surveillance de la Fondation PAV - vous montrez une confusion institutionnelle complète: c'est bien le secrétariat général du département du territoire qui a la haute surveillance sur la Fondation PAV. Mais on veut de l'agilité, on veut que les gens se parlent ! (Commentaires.) Et je vais vous dire plus, Monsieur le député: non seulement elle est sur place, mais j'ai aussi demandé que les gens se partagent les locaux, entre FTI, Fondation PAV et direction du PAV, pour que les gens se parlent et pour qu'on arrête de fonctionner en silos ! Et je pense que cette remarque...

Une voix. Ben ça marche pas !

M. Antonio Hodgers. ...qui est souvent issue des bancs de droite, est pertinente. «Ça marche pas» ?! Mais ils ont emménagé il y a deux semaines ! (Rires.) Laissez-les arriver ! On a coupé le ruban il y a trois jours ! Laissez-les arriver ! (Rires. Commentaires.) Cela va nous permettre d'optimiser et de rendre opérationnel le PAV qui, comme cela a été dit, est un des premiers gisements de logements à Genève. Voilà, Mesdames et Messieurs, pour le reste, le débat sur la politique du logement continuera à se faire. (Commentaires.) Je vous remercie d'accepter ce rapport de gestion. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. (Commentaires.) Mesdames et Messieurs, nous allons donc passer... (Commentaires.)

Une voix. J'ai été interpellé ! (Exclamations. Commentaires de désapprobation.)

Une autre voix. Il a été mis en cause !

Le président. Non ! Je suis désolé, mais on ne va pas entrer dans une polémique inutile. Nous passons au vote. (Vifs commentaires.)

Une voix. Vous l'avez donnée à M. Burgermeister ! (Commentaires.)

Le président. Je l'ai donnée au rapporteur ! (Commentaires.) Je l'ai donnée au rapporteur. J'ai expliqué pourquoi. On ne va pas entrer dans une polémique inutile et stérile.

Une voix. Ah, d'accord, ok ! (Commentaires.)

Le président. Nous allons passer au vote... (Brouhaha.)

Une voix. Chut !

Le président. Nous passons au vote de cette politique publique.

Mise aux voix, la politique publique G «Aménagement et logement» est adoptée par 36 oui contre 30 non et 23 abstentions. (Commentaires pendant la procédure de vote. Exclamations et huées à l'annonce du résultat.)

Troisième partie des débats sur les comptes 2021 (suite du 2e débat): Séance du jeudi 23 juin 2022 à 20h30

Le président. Mesdames et Messieurs, nous nous retrouvons à 20h30. Je vous souhaite un bon appétit.

La séance est levée à 19h.