Séance du
jeudi 9 décembre 2021 à
20h30
2e
législature -
4e
année -
6e
session -
35e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Diego Esteban, président.
Assistent à la séance: MM. Serge Dal Busco, président du Conseil d'Etat, Mauro Poggia et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et M. Anne Emery-Torracinta, Antonio Hodgers, Nathalie Fontanet et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Delphine Bachmann, Christian Bavarel, Jennifer Conti, Emmanuel Deonna, Patrick Dimier, Adrien Genecand, Patrick Saudan, Vincent Subilia, Pierre Vanek, Salika Wenger et Yvan Zweifel, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Glenna Baillon-Lopez, Nicolas Clémence, Xavier Magnin, Patrick Malek-Asghar, Aude Martenot, Françoise Nyffeler, Helena Rigotti et Gabriela Sonderegger.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment d'un procureur. Je prie le sautier de le faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Le procureur entre dans la salle et se tient debout, face à l'estrade.)
Monsieur, vous êtes appelé à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme magistrat du Ministère public;
- de constater avec exactitude les infractions, d'en rechercher activement les auteurs et de poursuivre ces derniers sans aucune acception de personne, le riche comme le pauvre, le puissant comme le faible, le Suisse comme l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
A prêté serment: M. Alain-Edouard Fischer.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de magistrats du Pouvoir judiciaire. Je prie le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (Les magistrats entrent dans la salle et se tiennent debout, face à l'estrade.)
Mesdames et Messieurs, vous êtes appelés à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;
- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Ont prêté serment:
Mme Silvia Tombesi, Mme Nathalie Bürgisser Scheurlen, Mme Orianne Dorsaz, Mme Esther Alder, Mme Merita Elezi, M. Aurélien Hagger et M. Ugo Grecuccio.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Communications de la présidence
Le président. Après consultation du Bureau et des chefs de groupe, il a été décidé que la séance de demain à 8h serait annulée, notamment en raison des conditions météorologiques attendues à cette heure. Nous nous retrouverons donc à 10h - je le répéterai à la fin de cette séance - pour poursuivre nos travaux.
Débat
Le président. Nous reprenons le traitement des extraits avec la P 2107-A, classée en catégorie II, trente minutes. La parole va au rapporteur de majorité, M. Sylvain Thévoz.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition intitulée «Sécurisons les eaux du Rhône entre le barrage du Seujet et le pont de la Jonction» demande la présence de sauveteurs bénévoles ou professionnels équipés de bateaux à moteur. Elle demande également une synergie entre le canton et la Ville pour créer une unité de sauvetage fluvial opérationnelle et dotée de moyens d'action nécessaires pour intervenir immédiatement aux abords du Rhône. La majorité de la commission des pétitions vous invite à déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Ce texte part d'une intention bien évidemment louable et aussi, je dirais, d'une réaction émotionnelle face au nombre de décès dans le Rhône, évalué entre trois et quatre par an. Elle propose les mesures que je viens d'énoncer: sécuriser les eaux du Rhône, avec la présence de sauveteurs bénévoles ou de professionnels équipés de bateaux à moteur - c'est la première demande.
Les auditions - de qualité - qui ont pu être menées avec la police, la gendarmerie du lac, l'office cantonal de l'agriculture et de la nature, ainsi qu'avec la direction des eaux, ont pu montrer que cette première demande n'était pas opportune. Tout d'abord, la présence de sauveteurs bénévoles n'est pas souhaitable: il s'agit là d'un fleuve, qui est un espace dangereux, et si les personnes ne sont pas formées et régulièrement mises à niveau pour des interventions dans ces milieux dangereux, elles risqueraient de se mettre elles-mêmes en danger. Le Rhône est un fleuve dangereux, et particulièrement à ce niveau-là, en raison du barrage du Seujet, qui, vous le savez, est ouvert en fonction du niveau du lac et entraîne des hausses de débit brutales. Par conséquent, l'idée de la pétition consistant à mettre des sauveteurs bénévoles à disposition n'est évidemment pas bonne.
Concernant le fait d'engager des professionnels équipés de bateaux à moteur, suite aux auditions, nous avons pu constater qu'il était impossible de sécuriser les 80 000 mètres carrés, soit l'espace délimité par les pétitionnaires. C'est plus ou moins l'équivalent de 300 fois la piscine des Vernets, soit 800 mètres de long sur 100 mètres de large, et, évidemment, ce ne serait pas une garantie de sécurité supplémentaire.
S'agissant de la demande d'une meilleure synergie entre le canton et la Ville - c'est la deuxième demande -, là encore, l'audition des professionnels a pu montrer que cette synergie existe depuis plus de quinze ans. Je pense que la majorité de la commission a été littéralement bluffée par la qualité des interventions, par le professionnalisme et par l'expertise tant de la police que des pompiers. Il n'y a pas à demander une meilleure concertation entre la Ville et le canton: elle est efficace et efficiente.
Finalement, le véritable problème, à cet endroit, c'est la prévention, qui doit encore être renforcée. Elle existe, des efforts ont été faits ces dernières années. Il y a le projet «Lâche pas ta bouée !», dans le cadre duquel des jeunes vont au contact d'autres jeunes. Il s'agit évidemment de faire de la prévention concernant le fait de ne pas se baigner en étant alcoolisé. Et puis, les sauveteurs ont pu rappeler qu'en réalité, la première source de sauvetage est l'autosauvetage ou le sauvetage par les pairs; il faut donc intervenir en amont de la catastrophe, quand une personne est réellement en difficulté.
Trois à quatre morts par an, c'est une moyenne stable. Ce sont environ quarante décès par an à l'échelle de la Suisse. Pour information, 93% de ces décès surviennent en eau libre ou stagnante, et la majorité des personnes qui décèdent, soit 84%, sont des hommes âgés de 15 à 29 ans, contre 16% de femmes.
La commission a estimé que cette pétition n'amenait finalement pas les bonnes réponses et que c'est vraiment avec de la prévention, en ciblant ce public particulièrement susceptible de se mettre en danger, qu'on obtiendrait des résultats.
La question des installations de qualité a été évaluée. Les commissaires pensaient qu'il fallait peut-être interdire les sauts depuis le pont Sous-Terre ou surélever ses barrières. Là aussi, cela n'est pas recommandé par les professionnels.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Sylvain Thévoz. Le rehaussement des barrières du pont Butin a limité le nombre de noyades, mais vous constaterez qu'il s'agissait plutôt de personnes qui, bien que comptées comme des noyés, se jetaient du pont Butin vraiment dans le but d'attenter à leur vie. Rehausser les barrières du pont Sous-Terre n'est pas une option de sécurisation: cela empêchera les personnes de sauter, mais ce n'est pas véritablement en sautant du pont que les gens se mettent en danger; les causes sont celles que je vous ai rappelées: l'alcool, l'inexpérience et, très souvent, parce que des personnes se pensent plus fortes qu'elles ne le sont face au fleuve qui est dangereux.
Les professionnels recommandent donc de renforcer la prévention et l'autosauvetage et entament une réflexion avec les SIG consistant à se demander s'il faut signaler quand le débit du barrage change. Ils se heurtent néanmoins à des difficultés techniques: quel type d'alarme déclencher ? Par ailleurs, si les alarmes sont mal comprises, cela pourrait procurer un faux sentiment de sécurité quand le débit n'est pas haut, alors que le Rhône reste malgré tout dangereux. On a ainsi pu constater que ce sujet est suivi par des gens compétents et que les mesures actuelles sont suffisantes.
J'ajouterai un dernier mot. Vous avez constaté que la fréquentation a augmenté. C'est depuis quelques années maintenant un lieu de plus en plus peuplé, de plus en plus utilisé par les Genevois, qui manquent d'espaces d'accès à l'eau. Or le nombre de décès demeure identique. Nous sommes donc plutôt enclins à soutenir que le fait de maintenir des installations, voire les renforcer - par exemple par des chaînes pour sortir facilement, pour permettre d'anticiper la sortie du Rhône - est un véritable gage de sécurité. Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission vous invite à déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Merci.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de minorité. Comme l'a indiqué à juste titre la représentante des pétitionnaires, Mme Yasmine Menétrey, c'est la sécurité de nos habitants qui est en jeu, puisque nous dénombrons chaque année plusieurs morts dans les eaux du Rhône. Durant son audition, elle a rappelé que de nombreux jeunes sautent depuis le pont Sous-Terre et a fait remarquer que la plateforme installée en contrebas facilite l'accès à l'eau. Il est donc important d'étudier encore plus attentivement la question, même si les autorités municipales et cantonales n'ignorent pas le problème.
Le représentant du SIS a rappelé en commission l'ampleur du problème en Suisse. Depuis 2017, la baignade en eau libre est passée en troisième position dans les activités mortelles en Suisse, soit 350 décès depuis dix ans. Mme Yasmine Menétrey estime que le canton et la Ville de Genève ont une part de responsabilité, puisqu'un ponton et des marches d'escalier ont été installés pour permettre d'entrer dans l'eau. Selon de nombreux habitants du quartier avec qui elle s'est entretenue, ceux-ci se sentiraient mieux protégés avec des sauveteurs; elle suggère d'organiser un système de sauveteurs bénévoles, afin d'assurer une présence plus importante. Mme Yasmine Menétrey a relevé que la Ville de Berne explique les possibilités de descente de l'Aar sur un site web. Or elle constate qu'à Genève, aucune explication n'est donnée sur la sortie du fleuve. Elle pense que le canton pourrait suivre l'exemple bernois. Il serait en particulier judicieux de donner des informations sur le débit du fleuve et sur sa température. Elle propose également de rappeler les règles élémentaires de la baignade sur les panneaux.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, la minorité de la commission vous invite à soutenir cette pétition et à la renvoyer au Conseil d'Etat. Merci.
Mme Christina Meissner (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, quand il n'y avait pas d'aménagements, de pontons et d'échelles pour sortir de l'eau, seules les personnes qui connaissaient bien les courants se baignaient. Depuis, des milliers de personnes se sentent aptes à nager en eau vive, gonflent leurs licornes en aval du quai du Seujet, et forcément, les risques augmentent.
Cette pétition demande deux choses: d'abord, une synergie entre le canton et la Ville pour créer une unité de sauvetage fluvial opérationnelle. Eh bien, cela est réalisé depuis huit ans, grâce à la collaboration et au développement du sauvetage entre Ville et canton, car le sauvetage est impossible à assurer par une seule entité.
Quant à la deuxième demande, celle de garantir la sécurité des baigneurs dans cette zone trois mois par année, elle est réalisée elle aussi, d'abord par la prévention. L'office cantonal de l'eau a créé des vidéos pour les réseaux sociaux et engage des jeunes, à travers le projet «Lâche pas ta bouée !», qui assurent une présence constante et distribuent des flyers multilingues. Ils arpentent les rives et interpellent les personnes qui ont trop bu pour les empêcher de se jeter dans l'eau. Cette mesure semble très efficace quant à la prévention.
Le groupe d'intervention PolNav du SIS est présent tous les après-midis de 14h à 18h par beau temps et est prêt 24 heures sur 24 à intervenir en nombre au besoin. Ce doit être et ce sont des professionnels qui interviennent, et la tâche est ardue. Il faut un nombre important d'intervenants, sur terre, plongeurs, etc. On ne s'improvise pas sauveteur, il y a une formation spécifique en eau vive. Quant à augmenter le nombre d'intervenants présents sur le Rhône, ce n'est pas si simple: il y a plusieurs endroits, le Rhône est vaste, on n'est pas forcément au bon endroit en cas d'accident.
Un canal spécial coordonne les interventions. Il faut continuer cette collaboration et insister toujours sur le caractère sauvage et naturel du fleuve et sur la responsabilité individuelle. Cette prévention semble payer, puisqu'il n'y a pas eu davantage de morts par noyade depuis 2013, alors que l'été, ce sont plus de trois mille personnes par jour qui se retrouvent au bord du Rhône. Soulignons que ceux qui décèdent ne sont pas ceux qui sautent du pont Sous-Terre, mais ceux qui font un malaise dans l'eau.
Synergie, prévention, intervention existent et fonctionnent, raison pour laquelle le PDC votera le dépôt de cette pétition. Je vous remercie.
M. Pierre Nicollier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la baignade dans le Rhône n'est pas organisée, contrairement aux piscines publiques, par exemple. De son côté, la population genevoise n'a pas l'expérience de la baignade en eau vive, contrairement à celles de Bâle ou de Berne. Les baigneurs doivent appréhender les dangers que présente ce fleuve. Ils doivent être informés et décider s'ils peuvent se baigner ou pas. Il n'est pas possible d'assurer à 100% leur sécurité, comme mes préopinants l'ont mentionné. Le seul moyen serait d'interdire totalement la baignade, ce qui serait un non-sens et irréalisable.
Ces éléments de réflexion doivent nous mener plutôt vers des outils de communication, comme l'a mentionné l'excellent rapporteur de majorité. Nous pourrions par exemple avoir des indicateurs de variation de débit, similaires à ce que nous pouvons trouver en montagne s'agissant des avalanches. La proposition de créer une unité de sauvetage fluvial et de sécuriser les abords ne semble pas réaliste.
Le travail en commission a permis d'illustrer à quel point la collaboration entre le SIS et la police de la navigation était bonne, ce qui a également été mentionné par mes préopinants. Avec la caserne du Vieux-Billard à quelques brasses du Rhône, les moyens sont en place pour permettre des sauvetages rapides. Les plongeurs peuvent intervenir et les services agissent avec professionnalisme et célérité depuis longtemps. Nous estimons donc que les mesures demandées manquent leur cible. Le groupe PLR vous propose de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Merci.
M. Stéphane Florey (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, le vrai problème dans cette affaire existe justement depuis qu'on a mis en place des installations incitant les gens à se baigner dans le Rhône. Avant cela, il n'y avait pas de problèmes, pas de nuisances. Certes, il y avait des morts, mais cela s'est accentué depuis qu'on a créé ce faux sentiment de sécurité. Parce que quand vous mettez en place des installations, forcément, les gens se disent: «Ah, ben tiens, on peut aller se baigner !» Et ils se croient en sécurité, alors que c'est totalement faux. C'est là que réside tout le problème. Ici, visiblement, personne ne veut réellement investir pour la sécurité de ceux qui se croient à tort en sécurité, et c'est exactement ce que pointe du doigt cette pétition: un manque de moyens flagrant. Les pompiers l'ont dit, ils font ce qu'ils peuvent; dire qu'ils sont là constamment, c'est totalement faux. Là également, vous donnez un mauvais signal à la population. En plus, le commandant Schumacher l'explique très bien, il le dit: ils ne peuvent pas assurer une présence constante ! En définitive, cela reste uniquement une question de moyens. Par conséquent, en ce qui nous concerne, nous préconisons de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat pour qu'il étudie les possibilités réelles qui existent pour sécuriser les lieux.
Je dirai encore que pour ce qui est de prévoir des alertes quand le niveau des eaux augmente, c'est juste une blague ! Vous ne pouvez pas informer la population dans ce sens-là, parce que le niveau entre le barrage du Seujet et Verbois change tout le temps, à tout moment, à toute heure de la journée, que ce soit le matin, l'après-midi ou même la nuit. Ça dépend des besoins, mais il y a de nombreux facteurs qui entrent en ligne de compte: vous avez un orage en Haute-Savoie et tout à coup, le débit de l'Arve augmente, ce qui va forcément influer sur le Rhône. Dans ce sens-là, vous pouvez installer tout ce que vous voulez, mais tant qu'il n'y aura pas une présence humaine pour sécuriser les lieux, malheureusement, il continuera à y avoir des morts et il continuera à y avoir des problèmes dans ce secteur. Je vous remercie.
Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, je ne peux qu'abonder dans le sens de mes préopinants socialiste, PDC et PLR, et féliciter le rapporteur de majorité pour la qualité de son rapport.
Cette pétition réclame, par le biais de deux demandes que je ne répéterai pas, une sécurisation des eaux du Rhône entre le barrage du Seujet et le pont de la Jonction. Les travaux de commission ont pu démontrer que tous les services de la Ville et du canton travaillaient en synergie, ce qui répond à la première demande de cette pétition. Leur collaboration est étroite, et ce depuis désormais plusieurs années. La Ville et le canton ne se renvoient pas la balle, le SIS collabore étroitement avec la police de la navigation.
Les travaux de commission ont été très enrichissants, puisque nous avons pu beaucoup apprendre de la part d'experts de la sécurité en eau vive. Nous avons rapidement compris qu'une présence de sauveteurs dans le périmètre indiqué par la pétition ne serait ni envisageable ni même forcément efficace. En effet, la pétition désigne une surface de 80 000 mètres carrés d'espace fluvial. Même si des sauveteurs étaient présents, il serait trop dangereux de circuler avec un bateau au milieu des nageurs et il serait trop compliqué, voire impossible, encore une fois, d'avoir suffisamment de présence pour couvrir tout le périmètre, au vu de la taille de la surface en question.
J'aimerais revenir aussi sur la question des installations. Effectivement, les pontons et les échelles qui ont été installés ont accueilli un public de plus en plus large, mais nous devons aussi nous réjouir de cette affluence: ces installations offrent des activités en ville à nos concitoyens et sont particulièrement agréables en été, surtout alors que nous faisons l'expérience d'étés de plus en plus chauds.
Nous avons été convaincus par les efforts déployés depuis plusieurs années par la Ville et le canton pour sauver des vies, et ce de la manière la plus efficace possible, c'est-à-dire en grande partie à travers la prévention. Pour ces raisons, nous voterons en faveur du dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil et vous invitons à en faire de même. Je vous remercie.
Mme Françoise Nyffeler (EAG), députée suppléante. Je ne vais pas répéter encore une fois à quel point effectivement nous avons appris des tas de choses, à quel point nous avons aussi pu constater que des mesures de sécurité très importantes existaient. La question qui subsiste, c'est que, dans ces conditions d'eau vive, la sécurité totale n'existe pas. Il n'existe pas de sécurité totale quand on prend sa voiture et qu'on va sur l'autoroute; il n'existe pas de sécurité totale quand on va se baigner en eau vive. C'est une réalité.
Maintenant, il faut éviter au maximum les accidents. La façon de les éviter au maximum, c'est en effet notamment à travers l'information. Les spécialistes que nous avons entendus nous ont expliqué qu'après avoir étudié ce qu'il se passait à Berne et à Bâle - car ils se sont évidemment rendus sur place pour comprendre le contexte -, ils ont réalisé qu'une des grandes différences, c'est que la population pratique cette baignade en eau vive depuis beaucoup, beaucoup plus longtemps que la population genevoise. Cela fait des générations que les gens se baignent dans l'Aar et dans le Rhin; ils sont donc habitués à la différence entre la baignade en eau vive et celle en piscine, par exemple. A Genève, c'est nouveau. On a donc un travail d'éducation à effectuer.
Il a été suggéré, j'aimerais relever ce point, qu'il y aurait éventuellement la possibilité de se rendre dans les écoles, de la même façon que la police routière le fait déjà, afin d'informer sur les dangers - sur les côtés agréables aussi -, sur les mesures de sécurité à observer pour la baignade en eau vive, car ce n'est pas la même chose de nager en eau vive que de nager dans une piscine. Ce serait important; les personnes présentes, notamment la brigade du fleuve, étaient très intéressées par cette possibilité, et j'espère que cela a été transmis au DIP.
Ensemble à Gauche va donc évidemment accepter de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, moi je suis complètement abasourdi par ce que je viens d'entendre de la députée Nyffeler - vous lui transmettrez, Monsieur le président ! «Je ne veux pas voir ce qu'il se passe, je me cache et je mets la tête dans le sable !» A partir du moment où on autorise les citoyens et les citoyennes à se baigner dans des endroits extrêmement dangereux - il y a des courants, des différences de températures, des courants qui sont différents entre la surface et la profondeur -, soit on organise une surveillance, soit on fait en sorte de pouvoir intervenir. Cela fait des années qu'on discute de cela, on en a aussi discuté au Conseil municipal, tout le monde s'en lave les mains: «C'est pas moi, c'est ma soeur qu'a cassé la machine à vapeur !» (Commentaires.) C'est comme ça que ça se passe ! Et je ne suis absolument pas d'accord avec ce qui se dit et ce qui se fait, parce que personne ne veut véritablement faire en sorte qu'on puisse avoir un minimum de régulation et un minimum de sécurité. Ce ne sont pas forcément toujours les citoyens qui sont là depuis des lustres, Genevois, habitant à Genève depuis longtemps, qui viennent se baigner là ! Il y a toute une série de gens qui ne connaissent pas ces dangers, et on ne fait pas attention à cela ! Je pense donc qu'il est complètement erroné de s'en laver les mains et de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil ! C'est un véritable scandale ! On doit faire en sorte qu'à partir du moment où on autorise cette baignade à ces endroits, la sécurité soit assurée. Alors bien évidemment, elle ne peut jamais l'être à 100% ! Mais là, ce n'est pas qu'elle l'est à 100%: elle l'est à rien du tout ! (Commentaires.) Parce que, quand on appelle les pompiers, en général, le noyé est déjà noyé... (Commentaires.) ...si je peux me permettre cette expression ! C'est complètement erroné, c'est se moquer du monde, c'est se moquer des situations - ça va bien à la gauche, ça leur va tout à fait bien ! Nous contestons cette façon de faire; pour notre part, nous voulons renvoyer cette pétition au Conseil administratif, et je vous invite à faire de même !
Des voix. Au Conseil d'Etat !
Le président. Au Conseil administratif, Monsieur le député ?
M. Daniel Sormanni. Ah, au Conseil d'Etat, pardon !
Le président. Au Conseil d'Etat, très bien. (Commentaires.) Monsieur le député Christian Flury, vous avez la parole pour quarante secondes.
M. Christian Flury (MCG). Merci, Monsieur le président. Ce sera largement suffisant. J'ai été sauveteur bénévole et aussi professionnel sur le Rhône, sur ces tronçons-là. Effectivement, la présence de sauveteurs à demeure est une fausse sécurité. La prévention passe par l'éducation des gens à la natation, dans un contexte où les eaux sont mouvantes. J'avais déposé il y a quelques années dans ce même Grand Conseil une motion, qui avait été acceptée d'ailleurs, qui préconisait la mise en place d'un panneau informant sur la température de l'eau et la vitesse du courant. La meilleure solution, c'est quand même de porter un gilet de sauvetage quand on se baigne dans ce fleuve. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, la parole n'étant plus demandée, je vous invite à vous prononcer sur les conclusions de la majorité de la commission, à savoir le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 2107 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 60 oui contre 18 non.
Débat
Le président. Nous poursuivons avec la P 2116-A, classée en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole au rapporteur de majorité, M. Alexis Barbey.
M. Alexis Barbey (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. La pétition «Vivre ensemble aux Pâquis» a été examinée à six reprises par la commission des pétitions et a été étudiée très en détail, avec cinq auditions. La pétition alerte sur la situation jugée difficile dans le quartier des Pâquis et propose un éventail de mesures structurées dans le temps. La plupart de ces mesures tournent autour d'un renforcement de la police de proximité et d'un soutien accru aux associations locales. Un accent est aussi mis sur le contrôle des débits de boissons.
Les représentants des forces de l'ordre sont venus expliquer les efforts qu'ils développent sur place. La magistrate Marie Barbey-Chappuis est aussi venue détailler le fonctionnement des patrouilles conjointes des polices municipales et cantonales. Elle s'étonne du décalage qui existe entre les statistiques de la criminalité et les impressions des habitants, ces dernières étant beaucoup plus alarmistes que les statistiques ne le sont. On se rend compte que l'énorme majorité des demandes des pétitionnaires sont déjà réalisées, ou en cours de réalisation. S'agissant par exemple du contrôle de la vente d'alcool, la police du commerce effectue déjà de tels contrôles. Quant à la présence policière de proximité et une présence de police à pied, il s'agit d'une priorité et elle est déjà appliquée. Ainsi, ce que demandent les habitants des Pâquis, c'est exactement ce que font les autorités cantonales et communales.
A part cela, un enseignant à la Haute école des sciences appliquées de Zurich a expliqué comment s'était déplacée la scène de la drogue de la Langstrasse et à quel point une étroite collaboration entre les polices et les travailleurs sociaux était nécessaire. C'est une expérience intéressante, mais qui n'entre pas du tout dans le cadre de la pétition dont nous parlons aujourd'hui. Lors de la discussion et du vote, une courte majorité s'est dégagée pour dire que les autorités faisaient déjà leur possible et étaient bien conscientes de la situation aux Pâquis. Il a été décidé de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil et le PLR vous invite à voter dans ce sens. Je vous remercie.
M. Jean Batou (EAG), rapporteur de première minorité. Tout d'abord, il faut partir d'un constat: le quartier des Pâquis est l'un des plus denses de la ville, mais c'est aussi un de ceux où la vie associative est la plus développée. Nous devons donc écouter ses habitants, qui nous posent un certain nombre de questions et qui les ont posées à la Ville de Genève. Ce qu'on nous a dit, c'est que l'installation de la vidéosurveillance n'a fait que contribuer à déplacer la scène de la vente de drogue et que les opérations coup de poing de la police ne servent finalement pas à grand-chose. Il faut donc chercher des solutions au-delà de ces expédients.
En premier lieu, on a constaté qu'à Genève, il n'y a pas de politique de la drogue. On ne sait pas exactement ce qu'on veut: quel est le but ? Quel est l'objectif ? Ensuite, il n'y a pas d'effort de médiation, comme il en existe dans d'autres communes ou dans d'autres cantons, c'est-à-dire aller au contact des vendeurs ainsi que des consommateurs, discuter avec eux et essayer de comprendre sur quel terrain on se déplace et comment on peut le rendre compatible avec les souhaits des habitants. Enfin, il n'y a pas d'effort d'aménagement au sens de l'architecture urbaine qui permette d'améliorer le sentiment de sécurité et la possibilité pour les habitants d'occuper l'espace commun.
A partir de ces constats, il faut analyser ce qui se passe aux Pâquis - ce point était intéressant en commission. Tout d'abord, l'éradication de la scène de la drogue, c'est un rêve qui est entretenu à chaque veille d'élections par quelques partis démagogiques, mais aucune ville au monde - aucune ville au monde ! - ne peut éradiquer la scène de la drogue tant qu'il y a une demande. Le problème n'est pas l'offre, le problème, c'est la demande. Par conséquent, tant qu'il y a une demande, il est absurde de vouloir éradiquer la scène de la drogue. Donc comment faire ? Tout d'abord, il faut comprendre que l'offre dans la rue est totalement minoritaire. L'essentiel du marché de la drogue se passe en dehors de la rue. Les dealers de rue ont un revenu assez réduit, et ce ne sont pas eux qui profitent du commerce de la drogue. De plus, il semble que l'action de la police en uniforme - c'est ce que nous a dit l'intervenant zurichois - ait un impact sur les demandeurs, surtout sur les demandeurs qui ont quelque chose à perdre, parce qu'ils ont un statut social - ils voient des policiers et ne vont donc pas consommer -, mais n'ait aucun impact sur les vendeurs, qui, de toute façon, risquent d'être renvoyés et que d'autres vendeurs viendront ensuite remplacer. L'action de la police est donc utile par rapport aux demandeurs.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Jean Batou. En revanche, la politique du logement, qui permet de loger des sans-abri, est décisive - on nous l'a dit, ça a été le cas à Zurich - pour empêcher que des gens en difficulté s'adressent au marché de la rue; dès lors qu'ils ont un logement et une certaine sécurité, ils quittent ce terrain de consommation. En somme, la problématique, c'est de fixer un but. Quel est l'objectif du canton et de la Ville en matière de politique de la drogue à Genève ? C'est un élément qui fait totalement défaut pour le moment.
Ensuite, il faut écouter les doléances du quartier, parce qu'on doit commencer par écouter les gens qui ont quelque chose à dire et qui vivent au quotidien ce dont ils parlent. Par ailleurs, il faut être conscient que la police en uniforme ne peut être utile que pour déplacer la scène de la drogue en intimidant les consommateurs, mais que ça n'a aucun impact sur les vendeurs. Il faut faire un effort de médiation, de concertation, on peut discuter avec les vendeurs - ça se fait dans plusieurs cantons ou dans d'autres communes - et on peut trouver des aménagements. En outre, il y a un problème de politique migratoire. Ce n'est pas avec le type d'accueil qu'on offre aujourd'hui aux migrants venus en particulier d'Afrique subsaharienne qu'on peut résoudre le problème de la drogue. Il faut mener une politique d'intégration à l'égard de ces jeunes. Enfin, il faut mener une politique d'aménagement urbain, avec notamment le projet «Croix verte», qui permettrait de traverser d'est en ouest et du sud au nord le quartier des Pâquis avec des sites aménagés pour les habitants.
L'ensemble de cette problématique nous pousse à vous demander de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat pour qu'une réflexion commune et une politique concertée soient menées entre l'Etat et la commune de Genève - puisqu'une même pétition a été renvoyée au Conseil administratif - pour se fixer des objectifs et les réaliser en commun. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Genève pâtit d'une situation où les acteurs officiels étatiques de la politique de la drogue sont à la fois la police de proximité, la police-secours, la police municipale, la police judiciaire et les travailleurs sociaux, et où il y a très peu de concertation au sein de l'ensemble de ces unités.
Le président. Merci.
M. Jean Batou. La Ville et le canton pourraient donc y contribuer.
Le président. Il faut conclure.
M. Jean Batou. J'ai fini. Cela fait cinq minutes et cinquante-cinq secondes, d'après mon chronomètre. Merci, Monsieur le président.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, les habitants qui ont déposé cette pétition et qui nous l'ont présentée posent un constat sur les Pâquis que, je pense, personne ne peut contester: la tension s'est accrue, de nombreux habitants ont été victimes d'agressions, des personnes - en particulier les personnes âgées, les femmes, les enfants - hésitent à sortir de chez elles à certaines heures; les vendeurs de drogue s'introduisent dans les allées pour s'y réfugier et y cacher de la drogue, etc., etc. Un constat que toutes les personnes qui vivent aux Pâquis ou les fréquentent connaissent, et c'est un fait acquis.
Les pétitionnaires proposent deux temps d'action, l'un à court terme, qui met l'accent sur la police - c'est vrai que cela a pu froisser quelques membres de la commission -, en demandant une présence policière de proximité et à pied accrue; une capacité de la police à répondre rapidement aux sollicitations des habitants; un contrôle systématique des ventes d'alcool; une présence policière plus importante et d'une amplitude horaire plus grande aux abords des écoles. Il me semble, Mesdames et Messieurs, qu'il devrait y avoir une majorité assez large pour soutenir cette première étape de mesures.
A moyen terme, on continue avec l'action policière et le contrôle systématique des commerces, et on ouvre vers des patrouilles ou en tout cas une collaboration renforcée entre les travailleurs sociaux hors murs et les correspondants de nuit, un déplacement de la scène de la vente de drogue vers des zones non habitées, bref, on essaie de résoudre le problème d'une manière plus large. On a même une vision à long terme: aménager des zones piétonnes, mettre en place une politique d'accueil cohérente pour les migrants mineurs et une politique du commerce qui favorise le professionnalisme et la diversité.
Nous avons là des habitants qui se mobilisent, qui font signer une pétition et qui proposent une vraie politique pour la ville, une vraie politique avec des options qui sont sur la table. On peut dire «ça, j'aime pas; ça, je veux pas !», mais on doit constater qu'à l'échelle tant du canton que de la Ville, le travail des collectivités n'arrive pas à ce degré de vision et d'action sur le terrain pour résoudre un problème que personne ne peut nier - sauf M. Barbey qui nous dit: «La police nous indique que tout va bien, les statistiques contredisent les habitants des Pâquis, tout roule !» Désolé, mais personne ne peut croire ce discours-là ! Soit les statistiques sont biaisées parce que les gens ne vont pas automatiquement porter plainte, parce qu'il y a des types de délits qui ne conduisent pas automatiquement à des sanctions, soit il y a un décalage énorme entre la population et les forces de police. Ayant entendu les habitants qui sont venus à la commission des pétitions, je suis plutôt d'avis de croire les habitants qui faisaient état de témoignages récurrents de situations violentes, difficiles, invivables. Je demande aux députés aujourd'hui: qui aimerait aller vivre à la rue de Zurich, à la rue de-Monthoux ou à la rue de Berne ? Si des députés parmi nous le souhaitent, qu'ils lèvent la main et qu'ils déménagent pour aller vivre là-bas et on aura un vrai discours et un vrai débat de qualité !
Mme Barbey - que M. Barbey cite - dit que sa police mène très bien l'action, mais c'est la première à réclamer la clôture du préau des Pâquis, parce qu'il est devenu invivable et que quand les enfants arrivent le matin à l'école, ils trouvent urine, drogue et autres types d'incivilités qui rendent tout simplement périlleux pour les habitants le fait d'amener leurs enfants à l'école.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Sylvain Thévoz. Merci, Monsieur le président. Les habitants font le constat quotidien depuis des années de ces problèmes et proposent des solutions. Alors de grâce, ne déposons pas cette pétition sur le bureau du Grand Conseil ! Envoyons ces propositions, qui ne sont peut-être pas toutes réalisables ou parfaites, au Conseil d'Etat, qui y réfléchira et qui essaiera de les pousser, qui essaiera de faire comme Zurich a fait avec la Langstrasse en réussissant à pacifier cette rue - nous avons entendu un expert, M. Herzig, qui est venu nous l'expliquer. Comment ? En étant dans la rue, avec une présence renforcée, en organisant des patrouilles mixtes - travailleurs sociaux, policiers - et en travaillant sur les politiques en amont. Ça marche ! Comme l'ont dit M. Savary et M. Batou, la guerre à la drogue, ça ne marche pas ! Faire croire qu'on va l'éradiquer... Non ! Mais essayer une régulation à certaines heures, à certains moments, afin que les habitants des Pâquis puissent vivre dans leur quartier, oui !
Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à soutenir cette pétition, à la renvoyer au Conseil d'Etat. Les habitants des Pâquis et d'autres quartiers en souffrance - notamment Plainpalais - nous regardent et ils ont besoin de solutions pratiques. Il y en a dans ce document. Soutenons-les, améliorons-les et allons de l'avant pour une ville pacifiée ! Merci de votre attention.
Mme Christina Meissner (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, personne ne nie qu'il y a des problèmes aux Pâquis et ce n'est pas la première pétition relative à ce quartier. Nous devons écouter les habitants, car ce sont eux qui vivent au quotidien aux Pâquis et qui nous interpellent. Malgré la présence de la police, malgré les contrôles des dépanneurs, les problèmes de drogue persistent, les habitants sont interpellés dans leurs allées, les préaux des écoles demeurent des places de deal.
La démarche des pétitionnaires n'est pas négative, elle vise une amélioration de la situation qui est complexe et ose explorer toutes les options. Nous nous devons de soutenir des pétitionnaires qui sont des associations de quartier très impliquées dans la vie de quartier, qui cherchent et proposent des solutions pour apaiser leur lieu de vie.
Il est temps de remettre de la qualité de vie aux Pâquis, de renforcer la présence policière à l'évidence insuffisante, surtout après 22h. Il faut aussi tester d'autres solutions qui fonctionnent ailleurs, telle la médiation, impliquer des correspondants de nuit ou des travailleurs de rue ou encore instaurer des patrouilles mixtes composées de la police et de travailleurs sociaux. Cette solution mixte fonctionne à Zurich dans un quartier à la typologie similaire aux Pâquis. Alors pourquoi pas ici, à Genève ? Pour ces raisons, le PDC votera le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Je vous remercie.
Mme Adrienne Sordet (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, la pétition soulève une problématique récurrente dans le quartier des Pâquis et pour laquelle des réponses peinent à être trouvées. Pourtant, des solutions existent, ont été appliquées dans d'autres cantons et sont en partie proposées dans la présente pétition. En partie, car la pétition demande davantage de présence policière, alors que la police, à notre sens, est déjà bien trop présente, ce qui ne permet pas de régler réellement le problème du deal, à part peut-être à très court terme. Toutefois, s'agissant de la demande d'instaurer des correspondants et des correspondantes de nuit, cette mesure est nécessaire, et on se demande bien pourquoi elle n'est pas mise en oeuvre actuellement. Le vivre-ensemble se cultive et ces correspondants et correspondantes de nuit y contribuent. Rappelons aussi qu'un aménagement urbain mieux développé permettant de retrouver une vie de quartier facilite la réappropriation des lieux par les habitants et les habitantes et permet aussi de construire une autre dynamique de quartier.
Outre cela, le deal de rue ne peut être supprimé, pour des raisons évidentes de demande existante. Le travail doit donc être axé en amont sur la prévention, mais aussi sur l'accessibilité encadrée de ces produits. Rappelons ici que le deal de rue n'est qu'une petite part du marché de la consommation et qu'il est principalement utilisé par les personnes dans l'urgence. Ensuite, prévenir vaut mieux que guérir, et il faut se demander pourquoi tant de personnes n'ont d'autre choix que de faire du deal de rue. La politique migratoire trop répressive laisse peu ou aucune marge aux personnes arrivant en Suisse. Il faut donc travailler sur cet aspect afin de leur offrir d'autres perspectives.
Bien d'autres arguments pourraient être avancés pour soutenir cette pétition, car la situation doit effectivement être prise en main. Cela ne justifie toutefois pas d'axer les travaux concrets sur le renforcement de la police et de déplacer le problème ailleurs. Il faut plutôt se donner les moyens de travailler sur les problèmes de fond, tels que la prévention et l'encadrement quant à la consommation de drogue, le dialogue avec les personnes qui effectuent le deal et les «consommateurices», et enfin, mettre en place une politique migratoire et une politique de logement inclusive. Dès lors, le groupe des Verts soutiendra cette pétition et la renverra au Conseil d'Etat, bien que nous émettions une réserve sur les demandes de renforcement de la répression policière. Je vous remercie.
M. Jean-Marie Voumard (MCG). Je suis peut-être un des seuls députés ici qui habite aux Pâquis, je suis donc bien placé pour parler. (Commentaires.) Je crois que cette pétition est quelque peu déplacée. Ce ne sont pas les vendeurs de drogue qui sèment la zizanie aux Pâquis. Je peux vous dire que les alcooliques sont beaucoup plus à l'origine des craintes des habitants des Pâquis. Quand on les voit sur la place de la Navigation la journée, le soir en été, en train de crier, je pense que c'est là qu'il y a un problème, et ce ne sont pas les vendeurs de drogue.
Je voulais juste encore préciser que j'ai été un peu surpris par un député socialiste qui a pris la parole précédemment pour dire que les lieux liés à la drogue devaient se trouver dans des zones non habitées. Je vous rappelle que j'avais déposé il y a déjà quelques années une motion, qui a été refusée, au sujet de Quai 9, qui demandait de déplacer ce lieu qui se trouve derrière la gare et qui est donc très bien placé. Je pense qu'il y a là également un problème.
Nous allons déposer cette pétition, parce que, s'agissant de tous les problèmes énoncés, la police - que ce soit la municipale ou la cantonale - fait son travail, je la vois tous les jours. Le problème ne réside pas là, contrairement à ce que suggère cette pétition. Concernant la politique migratoire et les vendeurs de drogue, vous savez très bien de quoi il s'agit: ce sont des NEM, vous pouvez l'accepter ou non, ils sont refusés en Suisse, vous ne pouvez rien faire contre. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède maintenant la parole à M. le député François Baertschi pour une minute et vingt-sept secondes.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Juste pour compléter ce qu'a dit de manière tout à fait pertinente Jean-Marie Voumard, il faudrait quand même rappeler que des interventions demandant la fermeture des préaux d'école aux dealers avaient été shootées par la gauche. Actuellement, ces préaux d'école leur restent toujours accessibles. On a donc un peu de peine à comprendre ce que veulent les personnes qui demandent que l'on renvoie cette pétition au Conseil d'Etat. Qu'est-ce qu'il faut faire ? Est-ce qu'il faut ouvrir les frontières, accueillir le maximum d'immigrés, le maximum de dealers, comme j'ai cru comprendre en écoutant certains députés ? Avoir davantage de présence policière, moins de présence policière ? Des policiers avec des éducateurs ? Tout cela est très confus. On a pu lire un rapport très intéressant qui nous a donné des réponses tout à fait pertinentes, je crois que c'est très bien. En remerciant les auteurs de cette pétition pour leur travail, nous devons en prendre acte et la déposer sur le bureau du Grand Conseil. Merci, Monsieur le président.
M. Stéphane Florey (UDC). Il convient en effet de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Malheureusement, je constate qu'une majorité se dessine pour la renvoyer au Conseil d'Etat, ce qui est une aberration, puisque à lire et à écouter ce qui était une minorité et qui va devenir une majorité, celle-ci nie totalement le problème ! Vous voulez mettre en place des mesures, mais vous ne voulez pas régler le problème en soi, parce que vous dites que la drogue ne pose pas de problème, alors que c'est faux, puisque, en un sens, les pétitionnaires le disent. Vous ne voulez pas reconnaître que l'immigration pose un problème, alors que ce sont des gens qui s'intègrent très peu pour la plupart; ce sont eux-mêmes qui font du deal de rue, pour une majorité, mais vous refusez de prendre des mesures à leur encontre. Finalement, ce que vous demandez est totalement incompréhensible. Les demandes de la pétition sont quasiment toutes réalisées, puisque les mesures demandées sont déjà en place. Vous ne pouvez pas demander encore une fois que des mesures soient prises et en même temps ne pas vouloir régler le problème. Il faudra donc voir ce que le Conseil d'Etat compte faire de cette pétition, mais je vois mal ce qu'il pourrait faire pour améliorer la situation au vu de ce qu'elle demande. C'est pour cela qu'il faudrait la déposer sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Patrick Lussi pour cinquante-quatre secondes.
M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. Ce sera suffisant. Un député d'Ensemble à Gauche a peut-être dit une vérité. Il a dit: ce ne sont pas les dealers qui créent le problème. Oui, Mesdames et Messieurs les députés, c'est peut-être une phrase qu'on ne désire plus entendre ! Parce que si on supprime les consommateurs, si on remet par exemple les amendes à la consommation, si on la rend plus difficile, si on donne un peu moins d'argent de poche à nos enfants qui consomment shit et consorts... (Exclamation.) ...ne serait-ce pas le moyen de parvenir à... (Commentaires.) Mais évidemment, il est politiquement incorrect de dire cela, et j'entends déjà les indignations s'élever là-bas, vers la gauche ! Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va maintenant à Mme la députée Christina Meissner pour une minute et quarante et une secondes.
Mme Christina Meissner (PDC). Merci, Monsieur le président. Excusez-moi de reprendre la parole, mais là, on est en train de parler de ce que les députés ont dit. Moi j'aimerais juste rappeler ce que les habitants des Pâquis demandent: une présence policière de proximité et à pied accrue; une capacité de la police à répondre rapidement aux sollicitations des habitants; un contrôle systématique des ventes d'alcool en dehors des heures légales par la police du commerce; une présence plus importante et une amplitude horaire plus large de la police municipale aux abords des écoles; la continuité de l'action policière; la continuité des contrôles systématiques des commerces; la mise en place par la Ville de Genève, en s'inspirant de l'exemple existant à Lausanne, de correspondants de nuit et le renforcement du rôle des travailleurs sociaux hors murs, sur le terrain; un soutien aux associations de quartier afin de favoriser la réappropriation de l'espace par les habitants; de poser les bases d'un déplacement de la scène de vente de drogue vers des zones non habitées; d'aménager des zones piétonnes et de réaliser le projet «Croix verte»; de mettre en place une politique d'accueil cohérente et exigeante des migrants, en particulier des migrants mineurs; de mettre en place une politique du commerce favorisant le professionnalisme et la diversité, ainsi que le rétablissement de la brigade de nuit. Voilà ce qu'ils demandent ! (Commentaires.)
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie pour ce ruissellement de bonnes intentions. J'ai bien compris qu'il va falloir que j'engage du monde pour assurer une présence policière 24 heures sur 24. Je le ferai avec le budget que vous avez refusé de voter tout à l'heure, et comme ça... (Applaudissements.) Ceux qui applaudissent en auront aussi pour leur argent dans quelques secondes ! (Exclamations. Rires.) Il suffit d'attendre ! On nous demande effectivement de mettre en place des médiations, d'aller discuter avec les dealers pour leur faire comprendre que ce qu'ils font, ce n'est pas très bien, qu'ils devraient aller un peu plus loin pour ne pas déranger la population des Pâquis. C'est vrai que c'est un problème, mais il a plusieurs facettes: il y a tout d'abord les consommateurs, et Genève n'a pas attendu - comme cela a été dit dans cette enceinte - pour mettre en place une politique efficace contre l'addiction. Il y a plus de quarante ans, Genève était pionnière en Suisse, je ne vais pas refaire tout l'historique de ce qui a été réalisé dans ce canton pour la prise en charge des personnes toxicomanes, qui sont avant tout des personnes malades. La politique des quatre piliers constitue encore l'un des fondements de notre action dans ce domaine et nous y travaillons. C'est une coordination entre la santé et la sécurité. Le fait que ces deux politiques publiques soient réunies dans un même département permet peut-être un peu plus de fluidité entre les deux impératifs - sanitaire et sécuritaire - qui parfois peuvent paraître contradictoires.
Le travail se fait donc, mais il faut être réaliste, et comme je le disais il y a un instant, celles et ceux que j'ai sur ma gauche largement entendus nous dire qu'il faut trouver des solutions aux problèmes des habitants sont celles et ceux qui déposeront eux-mêmes des textes lorsque nous prendrons des mesures pour faire en sorte que les personnes qui n'ont plus rien à faire sur notre territoire le quittent. Ce sont des personnes déboutées de l'asile, sans titre de séjour, qui ont été condamnées à de multiples reprises, qui sont dans la rue, qui devraient arrêtées et détenues administrativement, puis renvoyées dans leur pays. Or ces personnes, qui sont au nombre d'une centaine - en tout cas s'agissant du noyau dur -, sont dans nos rues et créent, précisément, le désordre que vous allez me demander de régler. Alors que je ne vous entende pas, lorsque des gens seront renvoyés dans leur pays, hurler à la mort dans cet auditoire pour nous dire qu'il faudrait les laisser ici parce que c'est l'humanité qui doit primer !
Il faut donc être conséquent, à droite comme à gauche: à droite, en donnant les moyens pour une politique sécuritaire; à gauche - la gauche qui veut plaire ce soir à la population qui se plaint d'une situation réelle - en nous donnant les moyens de faire en sorte que les personnes qui vivent sur notre territoire respectent nos règles, que celles qui sont déboutées après avoir épuisé toutes les voies de recours quittent notre territoire et, si elles ne le font pas d'elles-mêmes, soient amenées à le faire avec les moyens de droit que nous avons à notre disposition.
Je vous demande donc de ne pas renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, qui empoigne ce problème depuis des années déjà et qui va le faire de manière plus ferme ces prochains mois - vous en entendrez parler, mais ne venez pas vous plaindre ! Je vous remercie.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur les conclusions de la majorité de la commission, à savoir le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 2116 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 44 oui contre 42 non et 2 abstentions.
Débat
Le président. L'objet qui nous occupe maintenant est la P 2115-A, classée en catégorie II, trente minutes. Madame la rapporteure de majorité Christina Meissner, vous avez la parole.
Mme Christina Meissner (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition émane du Collectif genevois pour la grève féministe. Elle ne porte pas sur la cause féministe, mais sur des locaux que le collectif veut obtenir des autorités pour pouvoir se réunir. Je cite: «Nous, féministes de Genève, avons besoin d'un lieu fixe pour nous réunir [...] Nous avons besoin d'un espace à Genève pour continuer notre combat contre le système patriarcal et pour promouvoir le monde solidaire et égalitaire que nous voulons !» (Remarque.)
Les pouvoirs publics sont souvent interpellés par les associations pour des locaux et quand ils le peuvent, ils les mettent volontiers à disposition. C'est le cas du Centre de liaison des associations féminines genevoises, le CLAFG. Pour rappel, ce centre a pour mission de regrouper les associations féminines de Genève, de les informer, de faciliter la coordination de leurs activités et de favoriser des projets communs d'intérêt général. Il dispose de locaux et les met volontiers à disposition des associations féminines.
Mais le Collectif de la grève féministe ne veut pas de ces locaux ouverts aux associations. De son propre aveu, le collectif souhaite éviter toute accointance avec des organismes qui, selon le collectif, ne sont que des prestataires de service remplissant des mandats pour le compte de l'Etat. (Remarque. Exclamation.) Le collectif ne veut pas partager ces locaux mis à disposition par les pouvoirs publics, mais cela ne le dérange pas de faire appel à ces mêmes pouvoirs publics via cette pétition pour que les autorités lui trouvent des locaux et les lui mettent à disposition gratuitement.
Les collectivités mettent volontiers et gratuitement des locaux à disposition - si elles en ont. Sans bourse délier ne veut cependant pas dire pour rien, cela signifie que la mise à disposition a lieu contre une prestation dite en nature: l'association qui bénéficie des locaux s'engage à remplir, en contrepartie, une prestation dite d'utilité publique. Cette prestation n'est en général rien d'autre que la cause même pour laquelle l'association se bat, par exemple s'engager à défendre la cause des femmes. Pour le collectif, remplir cette prestation serait une mise sous tutelle. Le collectif n'est pas d'accord de défendre la cause des femmes pour le prétendu compte de l'Etat. Il estime normal que l'Etat-providence donne sans que lui-même donne quoi que ce soit en retour, même pas pour la cause de femmes.
La manière de procéder est elle aussi surprenante. Déposer une pétition auprès du Grand Conseil pour obtenir des locaux sans avoir fait la moindre recherche préalable, c'est mettre la charrue avant les boeufs. N'aurait-il pas plutôt fallu que le collectif s'adresse d'abord à l'autorité détentrice et responsable de locaux, qu'il s'agisse du canton ou des communes, et n'interpelle le législateur par voie de pétition que si cette démarche échouait ?
Pour terminer, la cause féminine est trop importante et comporte encore trop d'objectifs non atteints pour que les forces féministes oeuvrent en ordre dispersé.
Présidence de M. Jean-Luc Forni, premier vice-président
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Christina Meissner. Merci, Monsieur le président. Mettre fin au sexisme et réaliser la pleine égalité des genres en droit et en pratique mérite que toutes les associations défendant la cause des femmes s'entraident et travaillent de concert. Des locaux partagés seraient l'occasion de le faire. Mais cela, le collectif de la grève ne le veut pas.
Pour ces raisons, la majorité de la commission vous propose le dépôt de cette pétition. Je vous remercie.
Une voix. Bravo ! (Remarque.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe maintenant la parole au rapporteur de minorité, Mme la députée Léna Strasser.
Une voix. Défends l'indéfendable ! (Rire. Protestation.)
Mme Léna Strasser (S), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président de séance. A la rapporteure de minorité ! (L'oratrice insiste sur le mot «la».) Je précise !
Le président. Excusez-moi, Madame la rapporteure ! (Commentaires.)
Mme Léna Strasser. Mesdames et Messieurs les députés, en renvoyant au Conseil d'Etat cette pétition établie sur la base des revendications des assises de la dernière grève féministe, notre parlement a l'occasion de donner de la visibilité, de la reconnaissance et du poids aux questions et aux revendications féministes dans notre canton. De nombreux groupes de travail se sont constitués en amont et autour de la grève de 2019. Des femmes de tous les âges ont pris part à l'organisation, aux discussions, à la mise sur pied de revendications, aux réflexions autour de ces questions, puis plus de 30 000 personnes ont défilé dans les rues de Genève le 14 juin. Et le mouvement se poursuit. Ses actions sont le fruit d'une mobilisation locale de femmes dans les quartiers, les communes et le canton. Genève aurait l'occasion aujourd'hui d'y apporter un soutien concret par l'octroi à nos concitoyennes de locaux leur permettant de se rencontrer, ce qu'elles n'ont plus depuis les années 1980.
La minorité de la commission des pétitions estime que le Collectif genevois pour la grève féministe a choisi, par le biais du dépôt d'une pétition, une voie peu habituelle pour ce type de requête, mais une voie finalement en phase avec son fonctionnement particulier, horizontal et très inclusif. Nous regrettons le traitement à la va-vite de cette pétition pour laquelle aucune autre audition que celle des pétitionnaires n'a été menée, pas même celle de la conseillère d'Etat chargée du Bureau de promotion de l'égalité et de prévention des violences. Cette pétition aurait toute sa place entre les mains du Conseil d'Etat et la minorité vous propose de la lui renvoyer.
M. Pierre Nicollier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition est au minimum maladroite, au pire d'une mauvaise foi crasse. Le collectif n'a mené aucune démarche auprès de l'administration de la Ville ou du canton pour demander un local préalablement à la soumission de cette pétition.
Le Centre de liaison des associations féminines genevoises a pour mission de regrouper les associations féminines de Genève, de les informer, de faciliter la coordination de leurs activités et de favoriser des projets communs d'intérêt général. Les organisations parties du Centre de liaison ont obtenu des locaux, justifiant de leurs actions au sein du canton.
Le collectif pétitionnaire n'y appartient pas, puisqu'il veut - je cite à nouveau avec délectation le collectif, qui a déjà été cité par Mme Meissner - «éviter toute accointance» avec des organismes liés à l'Etat. Mais... faire appel aux collectivités pour bénéficier de locaux est, par contre, complètement acceptable. Quelle serait alors la différence entre le collectif et les associations membres du Centre de liaison ? Aurait-il une accointance avec l'Etat, à ce moment-là ?
Le canton a indiqué que l'association devait remplir un certain nombre de conditions et être reconnue au travers d'un contrat de prestations, avoir une comptabilité tenue et révisée. Ce collectif devrait décider ce qu'il souhaite. Il n'a pas suivi le bon chemin: il aurait dû s'adresser aux administrations de la Ville et du canton pour obtenir un local. Si cette démarche n'aboutit pas, il pourrait s'adresser aux instances politiques via une pétition.
Nous ne pouvons pas demander au Conseil d'Etat s'il a fait quelque chose que personne ne lui a jamais demandé. Pour cette raison, je vous invite à déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Merci.
Mme Françoise Nyffeler (EAG), députée suppléante. J'apprécie - et je pense que les dizaines et les centaines de milliers de femmes qui se sont mobilisées en 2019 en Suisse apprécieront - l'ironie de Mme Meissner et le paternalisme de M. Nicollier. Oui, ça vous fait sourire ! Mais nous étions et nous serons encore des centaines de milliers de femmes dans la rue, et cela, vous ne pourrez l'empêcher, avec vos petits sourires et vos sarcasmes ! (Remarque.) Le mouvement féministe à Genève existe, vous l'avez vu, vous le verrez encore.
Le Collectif pour la grève féministe a décidé de déposer une pétition pour effectivement obtenir une reconnaissance, non pas en tant que prestataire, mais comme incarnant la nécessité du combat féministe à Genève et en Suisse. Ce combat féministe est essentiel: on l'a démontré, les violences continuent malgré toutes les mesures et les centres de liaison qui existent. Les violences domestiques continuent; les violences sexistes et sexuelles dans tous les lieux continuent et nous en découvrons l'ampleur chaque jour. Le nombre d'inégalités n'a absolument pas baissé et le fossé continue de se creuser, notamment au niveau salarial. Oui, Monsieur Nicollier, la droite, qui aime les inégalités, adore aussi peut-être ces inégalités-là ! (Protestations. Exclamations.) Les discriminations, il y en a tout le temps et... Voilà, ces Messieurs sont offusqués ! Oui, vous nous avez fait peur pendant longtemps, mais depuis «MeToo», nous ne nous taisons plus ! (Commentaires. Exclamation.) Aujourd'hui, le mouvement féministe permet à des femmes de se sentir non pas seules, comme elles se sont senties si longtemps, non pas un peu honteuses de se dire féministes, mais fières ! Fières ! Et elles ne sont plus seules pour dénoncer ce qu'elles subissent depuis des siècles. (Exclamation. Commentaires.) Est-ce qu'on pourrait demander à ces Messieurs de se taire ? Ce serait très respectueux. (Commentaires.)
Le président. Oui, un instant, Madame la députée. (Commentaires.) Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de bien vouloir observer un peu de silence et de respecter les propos de Mme la députée Nyffeler.
Mme Françoise Nyffeler. Ils ont un peu de peine avec le respect, hein ! Alors... (Protestations.)
Le président. Poursuivez, Madame la députée, je vous prie. (Commentaires.) S'il vous plaît !
Une voix. Mais taisez-vous ! (Commentaires.)
Le président. Poursuivez, Madame la députée.
Mme Françoise Nyffeler. Je voulais dire que depuis le début de ce mouvement féministe - qui est nouveau, c'est vrai, parce que depuis 2019, il s'est passé quelque chose de différent -, les questions féministes ont pris une grande ampleur et se sont répandues dans l'ensemble de la société. C'est vrai que ces questions interpellent, remuent, notamment au sein des partis politiques, des parlements...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Françoise Nyffeler. ...et des institutions. (Commentaires.) Ce mouvement féministe...
Le président. Il vous faut conclure.
Mme Françoise Nyffeler. ...est indispensable aujourd'hui pour défendre... (Commentaires.)
Le président. C'est terminé, Madame la députée.
Mme Françoise Nyffeler. Oui, je termine juste. Ce mouvement féministe a besoin de cette reconnaissance de l'Etat...
Le président. C'est terminé, Madame la députée.
Mme Françoise Nyffeler. ...en recevant un lieu qui l'autorise à exister et à se réunir. (Commentaires. Applaudissements.)
Mme Katia Leonelli (Ve). Monsieur le président, Mesdames les députées, Messieurs les députés, nous rejoignons en tous points les propos de la rapportrice de minorité ainsi que ceux de ma préopinante d'Ensemble à Gauche. Cette pétition rédigée par le Collectif genevois pour la grève féministe demande aux autorités de la Ville et du canton de Genève de mettre à disposition d'associations et de collectifs féministes un lieu central, visible et ouvert vers l'extérieur, situé en ville de Genève. (Remarque.) Ce lieu serait géré par le Collectif genevois pour la grève féministe et ouvert à d'autres groupes et associations féministes.
Le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat représenterait un message clair de soutien aux revendications de la grève féministe et d'autres associations actives dans ce domaine. Nous reconnaissons le caractère incongru de la démarche et regrettons le refus des pétitionnaires exprimé en commission d'envisager un contrat de prestations avec les collectivités publiques dans l'éventualité où celles-ci mettraient à disposition un lieu, ce qui représenterait une subvention en nature. Quand bien même cette attitude serait suboptimale, cela ne justifie en rien que la commission ait mis fin aux discussions sur cette pétition et n'ait pas même accepté d'auditionner le Conseil d'Etat, et cela n'empêche pas non plus un soutien politique de notre part.
Pour ces raisons et celles évoquées par mes préopinantes de la minorité, les Verts maintiennent leur position de commission et voteront pour le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.
Mme Danièle Magnin (MCG). Ecoutez, moi je ne siège pas à la commission des pétitions, j'apprends l'existence de cet objet, je lis le texte et j'ai bien entendu que les personnes qui souhaitaient un local voulaient qu'il soit sans lien avec l'Etat. C'est pour cela que je ne comprends pas la demande. Je sais qu'elle a été aussi adressée à la Ville de Genève. J'ai moi-même été membre du comité de l'association des familles monoparentales, et les dons et les aides de l'Etat sont bienvenus. Il y a une forme d'agressivité dans les propos qui viennent d'être tenus par la dame qui s'est exprimée avant ma préopinante; ils me consternent, parce qu'il me semble que la visibilité, on peut l'obtenir en demandant gentiment et qu'on peut demander de bénéficier de locaux sans dire qu'on ne veut pas que ce soit dans le cadre du CLAFG, par exemple, qui est le centre de liaison des associations féminines de Genève. Je ne comprends pas cette attitude. (Commentaires.) Je pense simplement que les propos tenus ici le sont parce qu'il s'agit d'une tribune, parce qu'ils sont rapportés ailleurs et ensuite éventuellement dans la presse et que chacun peut les suivre. Moi je serais plutôt du style à envoyer les femmes et les jeunes filles... J'ai même une amie qui est ceinture noire de karaté, énième dan, qui donne, dans le cadre de l'instruction publique, des cours de self-défense et de karaté aux jeunes filles, et ça, c'est efficace pour apprendre à se débarrasser d'un homme qui ne nous respecterait pas ! (Commentaires.) Mais refuser que le local fasse partie du groupe des associations féminines de Genève parce que l'Etat est derrière... Excusez-moi, mais c'est se moquer du monde ! En tout cas, le MCG ne soutiendra pas cela. Merci.
Une voix. Bravo ! (Commentaires.)
M. Stéphane Florey (UDC). Moi, ce que je constate, c'est que les pétitionnaires veulent le beurre et l'argent du beurre, les avantages sans les inconvénients, mais finalement, je ne vous inviterai qu'à une chose, Mesdames: c'est continuer à faire ce que vous faites de mieux, c'est-à-dire gueuler dans la rue ! (Protestations.) Au moins là, vous êtes visibles ! Parce que vouloir vous enfermer dans un local... Franchement, vous allez y gagner quoi ? (L'orateur est interpellé. Vifs commentaires.) Vous n'aurez aucune visibilité, les gens ne sauront pas ce que vous voulez, la population ne comprendra pas ce que vous faites, donc continuez à faire ce que vous faites de mieux, à savoir nous casser les oreilles ! Merci, Monsieur le président. (Rire. Commentaires. Huées.)
Une voix. Bravo !
M. Raymond Wicky (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, je me permets d'emprunter une expression du langage populaire, en disant que je vais remettre un peu l'église au milieu du village. (Exclamation.) La commission des pétitions n'a jamais mésestimé la cause que ces dames, ces femmes... (Remarque.) ...défendaient. Cause qui est parfaitement louable et qui s'inscrit pleinement dans le tournant qu'a pris notre société en la matière, certainement avec bonheur. Par contre, ce qui nous a choqués, c'est cette fin de non-recevoir systématique dès qu'on parlait de contrat de prestations en compensation de locaux, dès qu'on parlait d'un éventuel partage des locaux avec une autre association, ou même au moment où on a demandé quelles démarches elles avaient entreprises directement. Cela nous a choqués, et forts de ces considérations, nous avons décidé, en ce qui nous concerne, le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
M. Thomas Bläsi (UDC). J'aimerais vous proposer un petit interlude sur ce sujet. «Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux ou lâches, méprisables et sensuels; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées; le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange; mais il y a au moins une chose sainte et sublime, c'est l'union de ces deux êtres si imparfaits et si affreux.» Je ne vous ferai pas l'affront de vous dire qui je cite, mais voilà quelle réflexion m'inspire ce sujet. Merci. (Exclamation. Commentaires.)
Mme Christina Meissner (PDC), rapporteuse de majorité. C'était juste pour rappeler - et je pense que c'est bien que ce soit une femme qui le fasse - que ce soir, avec cette pétition, nous ne sommes pas en train de débattre de la cause des femmes - nous la respectons toutes et tous -, mais de la mise à disposition de locaux, une mise à disposition qui existe déjà par ailleurs pour les associations féminines. Merci. (Commentaires.)
Le président. Merci, Madame la rapporteure de majorité. La parole n'étant plus demandée, nous allons nous prononcer sur le préavis de la majorité de la commission, à savoir le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 2115 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 48 oui contre 35 non.
Débat
Le président. Nous passons à la pétition suivante, classée en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Stéphane Florey.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Cette pétition demande une indemnité de 2000 francs, renouvelable tous les cinq ans, pour l'achat de matériel informatique. La commission, suite à ses travaux, vous recommande le dépôt pour plusieurs raisons, mais principalement parce que pour nous, cette demande qui provient de l'Union du corps enseignant secondaire genevois, c'est finalement de la revendication syndicale.
Elle aurait pu faire partie des nombreuses revendications des syndicats lorsqu'ils rencontrent le Conseil d'Etat - il faut quand même le rappeler: les syndicats rencontrent de manière quasi permanente l'employeur, à savoir le Conseil d'Etat, et c'est dans ce cadre-là qu'ils seraient censés exprimer ce type de revendication. Ce qui se passe, à chaque fois, et c'est là le problème de ce genre de pétition, c'est qu'ils ont peut-être fait cette demande à un moment ou à un autre, mais dès qu'ils essuient un refus, ils se tournent directement vers le Grand Conseil pour qu'il prenne ce type de décision. Or, la première chose, c'est que ce n'est pas à nous de nous ingérer dans les négociations employés-employeur. Ce n'est pas à nous de trancher pour ce genre de décision.
La deuxième chose, c'est qu'elle concerne uniquement les enseignants du secondaire; si nous acceptions cette pétition, nous créerions un précédent. On prendrait le risque que tous les employés veuillent aussi cette prime qui pour nous n'est pas justifiée aujourd'hui. Nous préconisons donc le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie.
Mme Badia Luthi (S), rapporteuse de minorité. La minorité trouve tout à fait normal que le corps enseignant du secondaire reçoive des indemnités pour l'achat du matériel indispensable à son activité. Je rappelle que le travail des enseignants ne se limite pas à donner des cours à l'intérieur des classes. Tout un travail se fait en amont et en aval de l'enseignement en classe: il faut préparer des cours et les organiser, en élaborant les devoirs qui vont avec. S'ajoutent à cela les évaluations, qui suivent le même principe: il faut les préparer, les faire passer, les corriger, les restituer et les discuter. Pour assurer tout ce processus et mener à bien ses tâches, le corps enseignant a besoin d'un ordinateur personnel.
Mesdames et Messieurs les députés, je tiens à rappeler une chose très importante. Avec l'arrivée du covid, le DIP a dû se réorganiser dans la précipitation afin d'assurer les cours à distance lors du confinement total. Et pour remplir cette obligation, il était nécessaire de posséder un ordinateur afin d'exercer son activité. S'ajoute à cela ce qu'on appelle des «dispositifs de continuité pédagogique», qui relèvent de l'organisation du DIP, mis en place en cette année scolaire même, 2021-2022, pour consolider les connaissances des élèves par de l'enseignement à distance. Cette disposition contraint à posséder un ordinateur afin d'assurer l'accompagnement pédagogique à distance des élèves. Tout cela montre à quel point l'ordinateur personnel est un outil de travail nécessaire aux professeurs.
Ce que j'ai omis de mentionner, c'est que les professeurs achètent avec leurs propres ressources financières des livres, des brochures et des manuels qui leur sont nécessaires pour dispenser leurs cours - et cela pourrait être le cas pour plusieurs matières puisqu'un professeur peut enseigner une ou deux branches différentes. Nous trouvons qu'il est normal que l'Etat participe aux frais liés à l'exercice de l'activité d'enseigner - d'autant plus que le montant demandé, soit 2000 francs tous les cinq ans, ne représente que 33 francs par mois. C'est une somme ridicule au vu de tout le travail que fournissent les professeurs. La minorité ne pense pas que c'est ce montant qui ruinera l'Etat. Cette somme reste symbolique à nos yeux et n'est même pas suffisante pour exprimer toute notre reconnaissance envers le corps enseignant.
Une deuxième chose: la minorité s'étonne que la majorité considère que cette demande est l'affaire des syndicats et pense que les enseignants n'ont qu'à s'adresser à ces derniers pour la formuler.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe, Madame la députée.
Mme Badia Luthi. Merci, Monsieur le président. Je tiens à rappeler que c'est le DIP qui est l'employeur officiel du corps enseignant: c'est le DIP qui impose les contours de l'engagement, même s'il délègue la tâche de recrutement à la direction générale. Et nous savons toutes et tous que dans une relation de travail, l'employeur est tenu de rembourser à son employé toutes les dépenses qu'il fait dans le cadre de l'exécution de son travail.
Pour toutes ces raisons, nous trouvons que déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil, c'est exprimer son indifférence face à une demande légitime; c'est piétiner un droit assuré par la loi dans le cadre du rapport de travail. C'est pour cela que la minorité désire renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Merci.
M. Jean Batou (EAG). Monsieur le président, cette demande est pour nous une évidence. C'est une évidence parce qu'un instrument de travail indispensable - une place de travail équipée - est une nécessité pour n'importe quel travailleur. J'avais d'ailleurs souligné en commission que du premier assistant au dernier professeur, tout le monde a une place de travail équipée à l'université et reçoit un ordinateur. Je ne vois pas en quoi le travail d'enseignement au secondaire II diffère, dans la préparation des cours, de celui en première année à l'université; c'est une pure continuité. Par conséquent, en ce qui me concerne, je regrette seulement que la demande ne soit que de 2000 francs tous les cinq ans, parce que ça ne répond pas aux besoins réels des enseignants du secondaire II - mais ce serait un premier pas. C'est pourquoi notre groupe soutiendra cette demande.
Mme Christina Meissner (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, les enseignants avaient droit à des déductions pour frais professionnels - c'étaient les seuls. Aujourd'hui, tous les employés ont droit à ces déductions fiscales, car les enseignants ne sont pas les seuls à devoir s'équiper pour être en mesure d'accomplir leur travail. Par ailleurs, les enseignants peuvent utiliser l'équipement mis à leur disposition dans les établissements scolaires et ils ont un forfait pour acheter des livres, qui constituent également un outil fondamental dans ce métier. La nécessité est donc prise en compte; le PDC votera le dépôt de cette pétition. Merci.
Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, j'aimerais souligner en préambule que cette pétition n'est pas liée à la réforme du numérique à l'école ni à la pandémie ou à l'école à distance. Cette pétition demande d'indemniser l'équipement informatique nécessaire du personnel enseignant. Les écoles disposent de stations de travail que les enseignants peuvent utiliser, mais celles-ci restent indéniablement insuffisantes. Par ailleurs, ces espaces ne sont pas accessibles en dehors des horaires scolaires, rendant impossible le travail de préparation des cours et de correction qui constitue une grande partie du métier d'enseignant. Actuellement, les enseignants et enseignantes pallient ce manque d'infrastructures par leurs moyens personnels.
Face à ce constat, les enseignants et enseignantes du secondaire II, par le biais de cette pétition, demandent une indemnité de 2000 francs renouvelable tous les cinq ans. Un arrêt de la Chambre administrative datant de 2013 indique que la prise en charge des frais professionnels des enseignants incombe à l'employeur. L'ordinateur est un moyen de production indispensable à la réalisation de la mission des enseignants et enseignantes; dès lors, son achat devrait être indemnisé par l'Etat employeur.
Notre groupe soutient ce texte, estimant que les requêtes des pétitionnaires sont tout à fait légitimes. Il s'agit cependant d'une pétition: les montants et les délais évoqués restent indicatifs et pourraient servir de point de départ pour entamer une discussion entre le DIP et les collaborateurs. Cela serait également l'occasion, pour le département, d'engager une réflexion sur l'encouragement des collaborateurs à privilégier les achats durables.
Pour finir, la commission a fait le parallèle avec les conditions des collaborateurs de l'université. Permettez-moi de vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que cette comparaison est tout à fait pertinente. La pétition concerne les enseignants et enseignantes du secondaire II, des collaborateurs et collaboratrices disposant au minimum d'un bachelor et de deux masters universitaires, ce qui correspond au minimum à sept ans d'études supérieures. Ces enseignants sont formés à faire des recherches dignes de ce nom pour préparer du matériel scolaire de qualité, ce qui les oblige à recourir à un ordinateur, ne serait-ce que pour accéder à des plateformes de recherche, à des bases de données ainsi qu'à des contenus académiques en ligne - mais aussi pour de la simple bureautique, également au coeur de leur activité, qu'il s'agisse de produire du matériel pédagogique ou encore de s'acquitter des nombreuses tâches administratives qui leur incombent.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe des Verts soutiendra le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat et vous encourage à en faire de même.
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition est tout à fait légitime. Mme la conseillère d'Etat Anne Emery-Torracinta a parfaitement raison de dire que c'est une vieille histoire puisque c'est bien avec son prédécesseur, M. Charles Beer, que des discussions ont eu lieu entre les associations professionnelles et le Conseil d'Etat - le DIP - pour obtenir un remboursement des frais professionnels. Ces discussions n'ont malheureusement jamais abouti - il n'y a pas une discussion en permanence là-dessus, comme l'a affirmé le rapporteur de majorité; on a un peu autre chose à faire quand on enseigne !
Toujours est-il que c'est vraiment une vieille histoire, et le défaut de cette pétition - si elle en a un -, c'est le montant relativement modeste. Il devrait y avoir un véritable remboursement des frais professionnels, qui sont de plus en plus importants, mais il n'a jamais vu le jour. Cette pétition doit bien entendu être renvoyée au Conseil d'Etat pour qu'on puisse espérer que quelque chose bouge enfin; même si vous prêtez parfois beaucoup de pouvoir aux organisations syndicales et professionnelles, force est de constater qu'elles ont malheureusement échoué quant à cette requête qui aujourd'hui est quand même reconnue comme tout à fait légitime.
Mesdames et Messieurs les députés, Ensemble à Gauche vous invite à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, avec évidemment la recommandation de l'étendre à tout le corps enseignant, parce qu'il est faux d'imaginer que chaque enseignant a un poste informatique à disposition ! Certains ne peuvent même pas consulter leur bulletin de traitement ni les informations quotidiennes qui déferlent et dégoulinent sur le corps enseignant puisque tout passe maintenant par voie informatique. Et c'est juste scandaleux qu'un employé ne puisse même pas...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Olivier Baud. ...profiter de ce qu'un employeur lui donne ! Merci, par conséquent, de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.
M. Christian Flury (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, oui, notre société s'informatise chaque jour un peu plus. Il est bon de savoir, comme l'a rappelé la députée Meissner, que les gens et les membres du corps enseignant disposent d'un abattement fiscal pour frais professionnels. Les étudiants, notamment ceux de l'université, ont accès à des ordinateurs à prix cassés; il me semble qu'au poly, c'est totalement gratuit. Vu le virage que prend la société, on devrait offrir un ordinateur tous les deux ans à chaque contribuable genevois. Nous sommes pour le dépôt de cette pétition. Merci beaucoup, Monsieur le président.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de majorité. Je voudrais quand même préciser la décision du Tribunal fédéral: quand les 900 francs de déduction ont été supprimés, les enseignants ont bien évidemment fait recours et le Tribunal fédéral l'a rejeté au motif que travailler en dehors de son poste de travail est un privilège et que l'employeur n'a dès lors pas l'obligation de financer le matériel. Et c'est exactement ce que l'Etat a choisi: s'il le voulait, il pourrait finalement payer directement un ordinateur à tous les employés, mais il ne le fait pas. C'est son droit, ce que relève le tribunal. Il n'est pas certain - Mme Torracinta le dit aussi - que les enseignants resteraient à l'école pour travailler si vous mettiez un poste fixe pour tous ! Cette demande relève d'un confort personnel, c'est-à-dire pouvoir travailler à la maison, et nous ne voulons pas qu'ils bénéficient d'un montant pour ça. C'est pourquoi la majorité vous recommande de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole n'étant plus demandée, j'invite l'assemblée à se prononcer sur la proposition de la majorité de la commission.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 2120 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 42 oui contre 35 non et 1 abstention.
Débat
Le président. L'ordre du jour appelle la P 2114-A, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole au rapporteur, M. Sylvain Thévoz.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition fait suite à la votation populaire de novembre 2019 dite du Pré-du-Stand, qui empêche le déplacement de l'académie du Servette FC et l'oblige à demeurer sur son site à Vernier, à Balexert, où ce Grand Conseil a voté la construction d'un cycle pour 95 millions, rendant donc la situation complexe. Avec vitesse, et peut-être précipitation, le Conseil d'Etat a identifié le parc des Evaux comme plan B pour l'académie du Servette FC afin que des terrains puissent y être établis dès 2021.
Les pétitionnaires sont membres d'un certain nombre d'associations; ils sont venus nous démontrer l'impact que pouvait avoir l'installation de cette académie sur le parc des Evaux. Il y avait M. Jean Hertzschuch de Sauvegarde Genève, l'Association pour la sauvegarde de Confignon, l'Association qualité de vie à Bernex-Confignon et l'Association Chavabien à Onex. La commission des pétitions a également auditionné la Fondation des Evaux, le magistrat, M. Apothéloz, ainsi que d'autres responsables d'offices cantonaux, notamment le chef de projet de l'OCBA - les bâtiments - et le directeur des constructions.
Il y a divers enjeux. Pour les pétitionnaires, l'enjeu est écologique, avec l'impact que l'aménagement de quatre terrains, dont trois en synthétique, pourrait générer sur le biotope local. De nouveaux mâts d'électricité pourraient endommager une zone de circulation pour la faune, ce qui suscite des inquiétudes quant à l'impact sur la petite faune et les animaux en général. Un abattage d'arbres a été annoncé; les chiffres ont fluctué tout au long des auditions et ils sont, à ce jour, à préciser - il serait bon de bénéficier d'un éclairage du Conseil d'Etat à ce sujet également.
Présidence de M. Diego Esteban, président
S'agissant du budget, il faut mentionner que le Grand Conseil ne sera pas appelé à en voter un en vue de cette installation non pérenne de l'académie - elle est censée y rester dix ans avant d'être déplacée dans un autre lieu. L'exécutif nous a parlé de 30 millions, qui seraient pris sur des enveloppes existantes de différents départements; cela pose quand même un problème de comptabilité, mais aussi en matière de débat démocratique. Les installations n'étant pas pérennes, il n'y a pas de possibilité de référendum, il n'y a pas de vote - dont acte. L'accord de mise à disposition a été signé en juin de cette année entre le Servette FC et la Fondation des Evaux, et donc le bateau, ou plutôt les terrains de foot, avancent. La majorité de la commission estime qu'il y a là matière à redire et que cette pétition, qui demande la préservation de ce poumon de verdure...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Sylvain Thévoz. ...a des arguments à faire valoir, que ce soit au niveau écologique et budgétaire - je l'ai dit -, mais également au niveau de la mobilité, avec le risque de drainer davantage de véhicules et de personnes sur ce lieu qui, est-il utile de le rappeler, est couru. Les Genevois l'aiment et le fréquentent: c'est aujourd'hui un lieu populaire, accessible et sans barrières.
Si on prend le projet tel qu'il est développé, ce sera un bâtiment de rez plus deux, d'une surface totale de 2951 mètres carrés pour 10 290 mètres cubes. Je vous fais rapidement le listing: ce ne sont pas moins de neuf bureaux - salle de conférence, analyse vidéo, salle de réunion, bureau administratif, bureau de direction, direction recrutement, foot communautaire, bureau d'entretien; il y a un fitness de 264 mètres carrés et un espace bains - bain froid, sauna, hammam; etc. Bref, on construit quelque chose aux standards de l'ASF, un bâtiment magnifique destiné a priori à ne pas durer, à être déplacé, tout ça pour plus de 30 millions et sans que la population puisse se prononcer.
Il nous semble, à la majorité, que ce n'est pas forcément la meilleure manière de faire. Une commune - Onex - a déjà annoncé des recours juridiques; des associations menacent de faire de même. Soutenir cette pétition permettra peut-être d'influencer le gouvernement et l'invitera à dialoguer afin de remanier ce projet pour éviter l'écueil des recours juridiques et ainsi pouvoir le réaliser au plus vite et de manière aussi écologique et démocratique que possible, de préférence aux Evaux.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat - non pour opposer sport et écologie, mais pour inviter fermement l'exécutif à revoir ses méthodes, certes dans l'urgence mais en évitant toutefois la précipitation.
M. Jean Batou (EAG). Très brièvement: si les auditions ont permis de répondre, il est vrai, à une partie des inquiétudes des pétitionnaires, nous avons observé un déficit évident de concertation et, souvent, un manque d'anticipation de la part des autorités, ce qui a conduit au développement d'un sentiment d'opacité quant aux décisions prises par les pouvoirs publics. Par conséquent, il n'est pas superflu d'appeler le gouvernement à prendre des engagements pour répondre à la demande essentielle des pétitionnaires, c'est-à-dire conserver véritablement aux Evaux leur statut de poumon de verdure dans une zone fortement urbanisée et densifiée. C'est la raison pour laquelle notre groupe se ralliera au renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Merci.
Mme Adrienne Sordet (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, le groupe des Verts se rallie à la position du rapporteur et d'Ensemble à Gauche; il estime que de nombreux éléments portés à notre attention lors des auditions méritent d'être éclaircis et améliorés. D'abord, nous déplorons le manque de communication du Conseil d'Etat en amont vis-à-vis des communes, des associations et de la population directement concernée. Nous avons comme un sentiment de déjà-vu assez désagréable.
Outre le manque de transparence, le projet de mobilité ainsi que la préservation de la biodiversité ne semblent pas être ici une réelle priorité, alors même que le parc des Evaux a une vocation d'accueil pour tous et toutes, faune y comprise. Pourtant, ces aspects ne peuvent être bafoués puisqu'ils contribuent directement à l'acceptation ou non du projet par les partenaires et par la population. De plus, sport et environnement peuvent se conjuguer parfaitement, et c'est dans ce sens que nous invitons le Conseil d'Etat à revoir sa copie.
Ce qui est étonnant, c'est que l'on a entendu à de nombreuses reprises qu'il est urgent de reloger le Servette afin de pouvoir construire le cycle du Renard, mais les moyens pour que cela se passe vite et bien font défaut. Mesdames les députées, Messieurs les députés, l'urgence dans laquelle se trouve l'Etat ne justifie pas le projet provisoire qui nous est proposé - projet qui, vu la situation actuelle et les oppositions à venir, risque de prendre beaucoup plus de temps à se concrétiser que prévu. Dès lors, plutôt que de poursuivre cette piste bancale, le groupe des Verts renverra cette pétition au Conseil d'Etat et invite ce dernier à plancher sur un projet tangible. Je vous remercie.
Mme Danièle Magnin (MCG). Je voudrais apporter encore une petite information. D'après ce que je sais, l'autorisation de construire a été déposée et - selon ce que je crois me rappeler de ce dossier - les terrains ne seront pas sur le sol normal: ce seront des terrains de foot artificiels. Et pour un terrain de foot artificiel, il ne suffit pas de poser des rouleaux de matière verte: ça implique de bétonner, de préparer le sol en dessous pour que ce soit ferme, solide, etc., ce qui détruit toute la surface où sont ensuite construits les terrains de foot. C'est une chose qu'on ne nous a pas dite.
Apparemment, à la commission des pétitions, vous n'avez pas entendu l'entier de l'information puisque le rapporteur, M. Thévoz, a seulement mentionné les constructions. Mais il est aussi question de stationnement et du fait qu'on va couper un grand nombre d'arbres - et pas des petites tiges, que mon collègue Sormanni a l'habitude d'appeler des balais de cabinet. (Remarque.) Il corrige; c'est un autre mot, un peu moins délicat, mais ce n'est pas grave. (L'oratrice rit.) Je voulais donc simplement attirer votre attention sur l'impact écologique énorme sur la petite faune et la végétation, et sur le fait qu'il y aura, en plus des bâtiments, un socle bétonné pour les terrains eux-mêmes - c'est vraiment une très grande surface qui va être affectée.
Ensuite, je voudrais vous rappeler qu'au Bout-du-Monde, dans les années 70, on a détruit une grande partie de la végétation et supprimé la liberté de s'y promener, après que les moissons avaient été faites, à tous les gens qui aimaient se balader par là, pour mettre des terrains de foot ! Pour permettre à des équipes de onze personnes - fois deux - de s'ébattre quand elles en ont envie, quand elles en ont le temps, on a construit je ne sais combien de ces terrains de foot. Et en plus de les avoir construits et, je l'ai déjà dit, d'avoir bien sûr coupé la végétation, on a aussi tué tous les petits lapins parce qu'ils auraient pu faire des trous. Ça vous fait peut-être rigoler, mais j'allais me promener très régulièrement là-bas avec mon bon chien, un boxer, à qui j'avais appris à rester assis à côté de moi et à ne pas bouger pour voir les lapins sortir. Ces petits lapins sont sortis par centaines sur des camionnettes: ils avaient été massacrés. Quelque chose de ce type pourrait aussi arriver aux Evaux et, franchement, je n'en veux pas !
Le président. Merci, Madame la députée. Je vous recommande, à l'avenir, de ne pas parler trop près de votre micro, car cela engendre certains sons qui nuisent à la qualité de vos propos. Monsieur le député Pierre Nicollier, c'est à vous.
M. Pierre Nicollier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le PLR soutient le Servette FC et tout particulièrement son académie. Oui au Servette, non à des solutions confuses, obscures. Non au forcing du Conseil d'Etat, qui n'a pas pris la mesure du problème; il annonce consulter mais ne fait qu'écouter sans entendre. La gestion de ce dossier est catastrophique ! Nous avions un emplacement de qualité qui faisait partie d'un projet refusé dans les urnes en novembre 2019: le projet du Pré-du-Stand. Le modus operandi est bien connu: le peuple refuse, mais au lieu de comprendre le pourquoi du refus et d'essayer d'adapter le projet, de trouver un moyen, on enterre le tout et puis on propose une solution qui empêche le peuple de se prononcer: comme elle n'a pas de budget, cette solution ne peut pas être contestée - on ne peut pas consulter le peuple, il n'y a pas de contestation possible. C'est intéressant, tout va très bien. Eh bien en fait, non ! Tout ne va pas bien.
Imaginez-vous que les parents vont déposer leurs enfants au P+R de Bernex pour qu'ils prennent un bus qui les amènera au terrain d'entraînement, avec un sac de foot sur le dos ? Non ! Ils essaieront de déposer leurs enfants le plus près possible. Il y aura du trafic additionnel dans une zone qui n'est absolument pas en mesure de recevoir plus de voitures. Le Conseil d'Etat a-t-il déjà porté un sac avec un équipement de football ? On n'en a pas vraiment l'impression.
Est-ce que vous savez comment ce projet a été présenté ? Il a été présenté pendant une soirée et les dossiers étaient attachés aux tables ! Vous entendez bien: les dossiers étaient attachés aux tables ! La confiance règne ! La fondation a réussi à saucissonner le projet, avec trois demandes d'autorisations distinctes. La partie sensible, le bâtiment, se trouve comme par hasard sur le territoire de Confignon: comme il y aura peu de nuisances, la commune n'y est pas défavorable. De quoi la fondation a-t-elle si peur ? Qu'a-t-elle fait pour avoir tant à craindre ? Et qui va trinquer, au bout du compte ? Eh bien c'est l'académie du Servette: ce sont les jeunes, la relève de notre club phare.
Trouver une solution demande de prendre ce problème à bras-le-corps. Cela demande du courage et de la détermination. Peut-être le conseiller d'Etat concerné devrait-il aller de temps en temps aux Evaux pour comprendre la situation. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Nous aurions pu espérer, après plus de trois ans de législature, qu'il aurait compris l'importance d'une solution sérieuse, robuste. Une chose est sûre: il ne pourra pas mettre à son bilan l'identification de solutions pour l'académie du Servette - mais cela ne semble inquiéter personne. L'académie doit pouvoir poursuivre sa mission sociale et éducative auprès des jeunes footballeurs genevois.
Le président. Merci.
M. Pierre Nicollier. Le projet avance à vue, ce qui est catastrophique. Nous demandons donc le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Merci.
M. Souheil Sayegh (PDC). Chers collègues, hop Suisse ! Ici c'est Genève ! On ne peut pas vibrer pour une équipe nationale qui marque et se qualifie pour la coupe du monde et ne pas permettre à la relève d'être formée. Ces équipes de onze personnes font vibrer tout un pays, tout un canton, toute une ville et nous permettent de nous rassembler: souvenez-vous de la victoire contre la France ou encore de cette qualification pour la coupe du monde. Finalement, rien ne bouge ici, à Genève, malgré les nombreuses explications et garanties qui, contrairement à ce qui a été dit, ont été données aux usagers des Evaux.
Aujourd'hui, il faut savoir ce qu'on veut: s'occuper d'éducation - le cycle du Renard - et de formation - le Servette -, ou ni de l'un ni de l'autre. Et l'un ne va pas sans l'autre. Avec une conception de l'écologie qui implique qu'arracher une racine, couper une branche ou déplacer un arbre est interdit ou impossible, rien ne va bouger dans ce canton ! Après la patinoire qu'on fustige, voilà maintenant le foot qu'on shoote. Je pense qu'il suffirait d'éliminer la commission des sports de ce canton et comme ça, tout le monde serait tranquille !
Le rapporteur nous a détaillé le contenu du projet et peut-être sa labilité au bout de dix ans. Mais peut-être que dans dix ans, la population aux alentours des Evaux se sera approprié ces terrains nouvellement construits ! Peut-être qu'elle va s'approprier ce fitness ! Peut-être qu'elle va s'approprier ce centre thermal ! Pourquoi ne pas l'imaginer ou le penser ? La population de notre canton croît et peut-être que nous allons tous nous retrouver là-bas. Mais on ne met en avant que le Servette; et le cycle du Renard, qui en parle ? Comment formera-t-on les élèves de demain au vu du manque d'infrastructures ? C'est pourquoi le PDC vous demandera de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Stéphane Florey (UDC). Nous l'avions dit depuis le début: le déménagement aux Evaux était la pire des solutions et elle est d'ores et déjà mort-née. Nous le savons aujourd'hui, il y a approximativement quatre-vingts oppositions; la commune d'Onex fait elle-même opposition à ce projet. Nous avions par ailleurs invité Mme Torracinta à déposer des demandes de crédits d'investissement pour pallier le manque de place dans les cycles d'orientation avec des pavillons provisoires - parce que c'est exactement ce qui va se passer à court terme: il va manquer des places, à s'entêter à mettre un cycle d'orientation là où c'était peut-être aussi le pire des endroits pour le faire, alors que des terrains pour des infrastructures publiques seraient disponibles à 500 mètres environ. Mais l'Etat préfère encore une fois ne pas construire des infrastructures publiques, mais transformer la zone pour du logement et pour y construire un centre de réfugiés.
C'est le serpent qui se mord la queue et aujourd'hui on marche sur la tête ! A vouloir faire un tour de passe-passe avec les terrains - je te prends et je te mets là - on tourne en rond, et c'est ce qui se passe actuellement avec l'académie: on tourne en rond. Mais c'est la faute à qui, finalement ? Au gouvernement qui s'entête à vouloir mettre les choses où la population n'en veut pas. La solution, Mesdames et Messieurs du Conseil d'Etat, vous l'avez: c'est la Crotte-au-Loup. Avec la motion qu'il vous a renvoyée le mois dernier, ce Grand Conseil vous demande d'axer maintenant des études sérieuses sur la Crotte-au-Loup et de booster le projet - d'abandonner un projet qui ne sert à rien et qui va coûter 30 millions à la population pour du vent. Ou alors il faut accepter le fait que non, construire à Balexert n'était vraiment pas la bonne solution, construire là où il y a des terrains disponibles, c'est-à-dire à Trembley, et financer plutôt la rénovation du site de Balexert...
Le président. Merci.
M. Stéphane Florey. ...pour y laisser l'académie. Mais à un moment, il faudra faire des choix - faites les bons choix ! Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va à Mme la députée Nicole Valiquer Grecuccio pour une minute et quatre secondes.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Merci, Monsieur le président. Je prends la parole pour vous dire que le groupe socialiste aura la liberté de vote sur cet objet. Je fais partie des socialistes qui continueront à défendre le projet de politique sportive, y compris la solution transitoire aux Evaux. Je pense que mon collègue PDC, M. Sayegh, a très bien expliqué les enjeux entre le cycle, le déménagement et la recherche de solutions transitoires. J'aimerais souligner, comme commissaire aux travaux, que les collaborateurs de l'OCBA n'ont pas ménagé leurs efforts pour trouver des sites de remplacement, et celui-là en est un. On ne peut donc absolument pas dire que les collaborateurs ou les départements concernés n'ont pas travaillé. En conséquence, je soutiens également le dépôt de cette pétition au nom de plusieurs socialistes. Merci.
Le président. Merci, Madame la députée. Je cède maintenant la parole pour cinquante-six secondes à M. le député Xavier Magnin.
M. Xavier Magnin (PDC), député suppléant. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, le sport genevois doit être défendu, l'académie du Servette doit être défendue. Vous savez que les conditions à Balexert sont actuellement parmi les pires de Suisse; pour avoir vu en particulier les autres centres, que ce soit ceux de Bâle, Lucerne, Saint-Gall, Young Boys, Sion ou Lugano, on est probablement dans ce qu'il y a de pire ! Or il est extrêmement important d'offrir une formation de qualité à de jeunes footballeurs - comme à tous les sportifs - et on ne doit pas tarder, sachant qu'il faut quitter Balexert rapidement. Donc dépôt !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe encore la parole à M. le député Jean-Marc Guinchard pour vingt-deux secondes.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Merci, Monsieur le président. Je voulais simplement rappeler deux choses: Kevin Mbabu, Denis Zakaria, Ulisses Garcia et Kastriot Imeri sont quatre joueurs de la Nati dont nous sommes fiers...
Le président. Merci.
M. Jean-Marc Guinchard. ...et ils sont tous passés par l'académie du Servette. Deuxièmement, j'aimerais...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Jean-Marc Guinchard. ...rassurer Mme Magnin: la pose d'un terrain synthétique...
Le président. Je vous remercie; vous êtes au bout de votre temps de parole.
M. Jean-Marc Guinchard. ...ne demande pas de bétonnage. Merci.
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, vous avez fait, avec cette pétition, la très brillante démonstration, pour les classes de sciences politiques, du principe «y a qu'à, faut qu'on». Le peuple a décidé de ne pas aller de l'avant avec le projet du Pré-du-Stand; immédiatement, le Conseil d'Etat s'est mis au travail pour un plan B. Nous avions annoncé que c'était effectivement le meilleur plan que nous avions non seulement pour allier la question écologique avec la question sportive, mais aussi pour permettre aux élèves d'étudier dans les meilleures conditions possible - j'en ai entendu peu parmi vous évoquer la situation des élèves dans l'actuel cycle du Renard. Je n'ai pas encore entendu grand-monde dans cette enceinte parler de la situation des futurs élèves qui étudieront dans des conditions inacceptables, alors que celles et ceux qui se mobilisent pour l'égalité des chances doivent faire en sorte qu'on leur offre les conditions de travail qu'ils méritent.
Le Conseil d'Etat, ensuite de cette votation perdue, s'est mobilisé pour un plan B - nous savons très bien que plus on descend dans l'alphabet, moins les plans sont de qualité - et pour faire en sorte que le concept des Evaux puisse se concrétiser. Pourquoi avoir fait ce choix ? D'abord parce que d'un point de vue écologique, c'est un domaine qui dispose déjà de quatre terrains que nous transformerons en effet en synthétiques - d'ailleurs, Madame Magnin, les terrains naturels, comme les terrains synthétiques, ont une couche de base en béton pour stabiliser le sol. Utiliser du synthétique sur ces terrains, déjà existants aux Evaux, je le répète, offre la possibilité d'y faire jouer plus de sportives et de sportifs au lieu de recréer d'autres terrains pour accueillir des équipes.
Deuxième élément: nous nous sommes immédiatement mis en contact - contrairement à ce qui a été dit - avec les communes concernées, y compris celles qui sont membres du conseil de fondation des Evaux, puisque celui-ci en rassemble cinq. Les rencontres ont été nombreuses, soutenues, tendues, mais une solution a été trouvée et l'ensemble des questions a pu être réglé, notamment celles liées à la mobilité grâce au travail immense réalisé par le département des infrastructures pour nous permettre de gérer la mobilité aux abords de cet espace. Depuis plus de dix ans, la Ville d'Onex demande à ce que l'accès par la rue François-Chavaz soit restreint; avec le projet que nous développerons, nous pourrons répondre à cette demande - et pourtant, Onex s'oppose à cette proposition. La gestion de l'ensemble du périmètre, y compris la création d'une ligne de bus qui permette d'accéder aux Evaux, a effectivement été promise dans le cadre de la réalisation de ce projet. C'est encore une demande de la Ville d'Onex à laquelle nous répondons favorablement.
La pétition demande que les Evaux gardent leur statut de poumon de verdure. Nous faisons en sorte de répondre à cette revendication: le parc n'est en rien changé. Il garde son statut de parc de loisirs, de nature et de sport. La question écologique est largement traitée, des éclairages jusqu'à la constitution du terrain, des abattages d'arbres à leur remplacement. S'agissant de la suite des opérations, le gouvernement a en effet décidé de déposer les autorisations de construire suite à la signature d'une convention par le conseil de fondation des Evaux, ce qui nous permet d'aller de l'avant sur l'ensemble du dispositif.
Il n'y a pas de plan immédiat, Monsieur le député Florey, à la Crotte-au-Loup. Si vous estimez un seul instant que d'un coup de baguette magique, dans l'esprit «y a qu'à, faut qu'on», le projet de la Crotte-au-Loup pourrait se réaliser rapidement, la réponse est non ! Est-ce que les contacts ont déjà été pris avec la Ville d'Onex ? La réponse est oui ! (Remarque.) Avec la Ville de Vernier, merci. Mais cela nécessite du temps et nous nous sommes engagés, dans le cadre de la convention et entre collectivités publiques, à ce que ce projet des Evaux soit provisoire avant de construire un projet pérenne, car, au-delà de la question des élèves et du cadre nécessaire à leur formation, il y a aussi l'académie, à laquelle certains députés ont rendu hommage, ce dont je les remercie.
Fort de tous ces éléments, le Conseil d'Etat vous invite à déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil et à faire en sorte que nous puissions encore compter sur vous pour la suite, car suite il y a: nous aurons à travailler à la réalisation des objectifs que nous nous sommes fixés et nous aurons également besoin de votre soutien à la Crotte-au-Loup. Je vous remercie de votre attention et de votre appui au dépôt de cette pétition.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, je vous invite à vous prononcer sur les conclusions de la commission, à savoir le renvoi de la pétition au Conseil d'Etat.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2114 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 63 oui contre 18 non et 4 abstentions.
Débat
Le président. Nous enchaînons avec la M 2552, classée en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à M. le député Philippe Poget.
M. Philippe Poget (Ve). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, j'interviendrai juste pour demander le renvoi de cet objet à la commission de l'environnement. Nous traitons en effet actuellement le projet de loi sur les déchets, qui va en principe apporter une réponse à cette proposition de motion. Je pense donc qu'il est opportun de la renvoyer dans cette commission, puisque nous l'avions gelée en attendant le traitement de ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le député. Madame la députée Diane Barbier-Mueller, vous avez la parole.
Mme Diane Barbier-Mueller (PLR). Merci, Monsieur le président. Je n'ai rien à ajouter.
Le président. Très bien. Mesdames et Messieurs les députés, nous votons sur la proposition de renvoi de cet objet à la commission de l'environnement.
Mis aux voix, le renvoi pour six mois de la proposition de motion 2552 à la commission de l'environnement et de l'agriculture est adopté par 87 oui (unanimité des votants).
Un rapport doit être rendu dans les six mois (article 194 LRGC).
Débat
Le président. Nous terminons notre séance avec la R 886. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à M. le député André Pfeffer.
M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. Je demande le renvoi en commission de cette résolution. Dans ce texte, il est simplement question de demander que le taux de chômage soit établi sur le système BIT, c'est-à-dire selon les mêmes critères que ceux de l'Union européenne. (Remarque.) Il est essentiel de renvoyer cette résolution en commission, parce que pour parler de tout type de politique de l'emploi, il faut appliquer à la base les mêmes critères et les mêmes références. Merci de renvoyer cet objet en commission.
M. Serge Hiltpold (PLR). Nous avons brièvement traité cet objet à la commission de l'économie. Je mentionnerai à l'intention du plénum que nous venons de traiter en parallèle la M 2567, qui portait justement sur ce taux de chômage évalué selon les critères du BIT - donc qui comprend les demandeurs d'emploi et les chômeurs; on a pu relever les différences qui existent entre ces deux chiffres, l'un des deux se basant sur des catégories beaucoup plus précises. Je vous invite à traiter cette proposition de résolution sur le siège et à la refuser. Merci, Monsieur le président. (Commentaires.)
M. François Lefort (Ve). Je m'en veux de faire de la peine au premier signataire de ce texte, mais, comme l'a dit M. Hiltpold, nous avons déjà traité ce sujet en commission et nous sommes un peu en retard, c'est pour cela que cet objet se retrouve en délai de traitement dépassé. Mais il ne faut pas oublier ce que demande cette proposition de résolution: elle demande que la Confédération utilise ce taux du BIT comme taux officiel pour chiffrer le chômage. Ce n'est évidemment pas possible, parce que ce taux n'est pas un chiffre précis: c'est un sondage trimestriel. Par ailleurs, la Confédération utilise cette référence dans l'évaluation du chômage. L'évaluation officielle est basée sur les chiffres communiqués par les différents ORP. Cette méthode est de toute façon pratiquée par tous les pays européens, qui utilisent leurs chiffres officiels issus des ORP, qui enregistrent les gens vraiment inscrits dans leurs offices de chômage et également le taux BIT propre à leur pays.
Il est donc hors de question pour nous qu'un sondage devienne le chiffrage officiel du chômage en Suisse. Je vous propose, comme M. Hiltpold, de voter sur le siège et de refuser cet objet.
M. Rémy Pagani (EAG). Je m'étonne de ces prises de position des uns et des autres. Nous étions en faveur du renvoi en commission, puisque ce sujet a déjà été traité à la commission de l'économie, comme l'a dit M. Hiltpold. Mais comme le débat est ouvert, je dirai sur le fond que, comme l'a relevé Mme Fontanet dans le cadre du budget avorté - si j'ose dire -, Genève a un taux de chômage élevé, dû à toute une série de facteurs. Or certains chômeurs - les chômeurs malades, par exemple - ne sont pas répertoriés aujourd'hui, ils sont sortis des statistiques; d'autres chômeurs sont sortis des statistiques pour d'autres raisons, cela nous a été précisé en commission. Et puis, pire que ça - pire que ça ! -, on est passé d'un chômeur digne qui demande du travail à un assisté social, en transférant les chômeurs en fin de droit à l'Hospice général et en les stigmatisant ! Nous avons toujours dénoncé cette manière de procéder. De fait, cela vise à cacher le véritable taux de chômage. D'ailleurs, de manière générale, on lit dans les journaux internationaux que la Suisse n'a pas de chômage, mais en fait, tout ça est un peu de l'esbroufe, parce que ce taux est nettement supérieur à ce que les autorités défendent ! Nous souhaitons donc que les normes internationales soient appliquées, qu'il y ait les mêmes critères partout, non pas pour stigmatiser les chômeurs, mais pour montrer que le système capitaliste a structurellement besoin du chômage pour faire pression sur la masse salariale, sur les salariés, afin d'amasser encore plus vite du capital. On l'a vu ces cinq, six dernières années: les fortunes des super riches ont doublé, c'est ça qu'il est essentiel de protéger, et on instrumentalise le chômage contre celles et ceux qui produisent la richesse. Je vous remercie de votre attention.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Mesdames et Messieurs, chers et chères collègues, comme l'ont rappelé nos collègues Serge Hiltpold et François Lefort, nous avons effectivement traité cet objet en commission de façon approfondie et nous sommes arrivés à la conclusion que les chiffres du BIT - cela a été rappelé, mais j'aimerais le répéter ici puisque certains ne semblent pas l'avoir compris - ne sont pas une statistique: c'est un sondage qui porte sur un nombre limité de demandeurs d'emploi. Ce n'est pas une statistique mensuelle, c'est un sondage trimestriel qui ne donne pas du tout des résultats correspondant à la situation réelle du chômage. Ces chiffres sont utilisés par le SECO, ils sont complémentaires aux statistiques du chômage, et avec la façon de procéder actuelle, nous obtenons une image tout à fait représentative d'une part du nombre de demandeurs d'emploi et d'autre part du nombre de chômeurs. On ne peut pas remplacer systématiquement une statistique précise par un simple sondage qui concerne un nombre limité de personnes. Au nom du groupe démocrate-chrétien, je vous recommande de voter sur le siège et de refuser cette proposition de résolution. Je vous remercie.
M. André Pfeffer (UDC). J'aimerais quand même apporter quelques compléments. Il est évident que le taux de chômage prend en compte plusieurs critères, et le nombre de personnes inscrites aux offices régionaux de placement est bien entendu un critère important. Par ailleurs, comme l'ont mentionné plusieurs personnes, il s'agit d'un calcul qui ne requiert pas d'interprétation. Mais tous les pays de l'Union européenne utilisent le taux de chômage BIT; on prend donc en compte, en plus du nombre de personnes inscrites au chômage, le nombre de celles qui recherchent un emploi.
Je vous donne deux chiffres: actuellement, à Genève, le dernier taux de chômage annoncé était de 4,9%; il était basé sur le taux de chômage SECO, donc ce qui s'applique en Suisse. Mais si nous appliquons le taux de chômage BIT, Genève est à 11,7%. Actuellement, en France, le taux s'élève à 7,9%. A Genève, nous avons donc plus de 30% de chômage de plus qu'en France. (Remarque.) Je pense qu'il est important de prendre en compte cet élément. Pour être crédible, toute politique liée au chômage doit absolument se baser sur des critères identiques, sur des éléments comparables. Autrement, ça n'a aucun sens.
Ensuite, cette résolution est tout à fait importante, parce que s'il est vrai que la Suisse et Genève calculent également un taux de chômage selon la définition du BIT, cela est fait d'une manière tout à fait indicative et un peu légère. Je précise que plutôt que d'effectuer correctement un travail de fond, actuellement, on établit les estimations pour le taux BIT en Suisse et à Genève sur seulement quelques milliers de personnes sondées; la qualité de ces estimations est donc vraiment discutable. C'est pour cela que je pense que cette résolution mérite de retourner en commission pour que l'on mène un vrai débat sur ce sujet. Merci de votre compréhension.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je rends la parole à M. le député François Lefort pour une minute et cinquante et une secondes.
M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Il semblerait qu'il y ait une incompréhension, et pourtant les membres de la commission le savent: la Confédération utilise le taux de chômage BIT. Elle a d'ailleurs émis une référence à ce sujet, qui est consultable par tout un chacun sur le site de l'administration fédérale. Le taux de chômage BIT comprend toutes les personnes qui ne sont pas occupées par rapport à la population active réelle; il comprend donc les personnes qui pourraient faire partie de cette population active, mais qui ne travaillent pas et qui ne sont pas inscrites au chômage. Le taux officiel de la Suisse dépend, lui, des chiffres des ORP, qui sont compilés par le SECO.
La situation est bien sûr imparfaite, mais suivre l'idée de l'UDC tendrait à rendre le taux de chômage incompréhensible. Tous les pays européens cités par M. Pfeffer utilisent aussi comme référence le taux BIT. Mais de toute façon, la référence pour rendre compte du nombre de personnes qui cherchent vraiment un travail est celle des gens inscrits au chômage.
Par ailleurs, tout ce qu'a dit M. Pagani était juste; il a dit beaucoup de choses justes. Mais on ne peut pas adopter cette proposition de résolution, qui demande que le taux de chômage au sens du BIT devienne le taux officiel de la Suisse. La façon de calculer le chômage par le BIT est un sondage trimestriel, qui prend en compte les gens qui pourraient travailler mais qui ne sont pas forcément inscrits au chômage. Pour cette raison-là, nous n'allons pas suivre la proposition de renvoyer cet objet à la commission de l'économie. Nous avons étudié cette question; l'idée de la proposition de résolution est de demander que le taux de chômage officiel soit celui du BIT: cela n'est pas possible. Ce n'est qu'un sondage, qu'une évaluation, qui n'est pas juste.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède à nouveau la parole à M. le député Rémy Pagani pour cinquante-cinq secondes.
M. Rémy Pagani (EAG). Merci, Monsieur le président. Je m'inscris en faux contre ce que vient de dire M. Lefort. J'ai travaillé vingt ans avec des chômeurs, et cela fait longtemps que je connais cette situation. Elle est proprement scandaleuse, parce qu'elle repose sur un paradoxe: la Suisse a besoin de montrer à l'économie mondiale que son taux de chômage est bas; on ne prend donc pas en compte des éléments qui pourraient montrer que le taux de chômage est plus élevé. Or il est plus élevé, Mesdames et Messieurs ! Y compris en Suisse alémanique ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) On a fait passer beaucoup de gens à l'assurance-invalidité sous prétexte de diminuer le taux ou les indices de chômage, alors que ce sont des demandeurs d'emploi, des employés... (Remarque.)
Le président. Merci.
M. Rémy Pagani. ...des salariés, qui demandent à être traités dignement, parce qu'ils recherchent un travail pour nourrir leur famille !
Le président. Merci.
M. Rémy Pagani. Je vous rappelle ce principe de base, et vous essayez de cacher cette vérité ! Je vous remercie de votre attention, Monsieur le président.
M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord sur la forme et sur la demande de renvoi à la commission de l'économie, le groupe socialiste s'y opposera, pour la raison que les auditions demandées ont été menées, notamment celle de l'office cantonal de l'emploi, en la personne de son directeur. Nous avons mené les débats en commission, nous les menons également ce soir en plénière, même s'il est tard et bien que nous ne disposions pas d'un rapport sur cet objet.
Maintenant, sur le fond, je rejoins complètement la préoccupation de M. Pagani: il faut en effet disposer d'un chiffre global, prenant en compte les demandeurs et demandeuses d'emploi, et pas simplement les personnes inscrites aux ORP. Seulement, cette résolution demande d'appliquer le taux de chômage du BIT. Or c'est vrai, comme l'a indiqué François Lefort, vous pouvez aller sur le site de l'Office fédéral de la statistique et vous trouvez exactement le taux de chômage en Suisse et par canton au sens du BIT. Il y a simplement deux types de statistiques: certaines sont basées sur les éléments recensés par les ORP et d'autres sont, en effet, établies par méthode de sondage. L'office cantonal de l'emploi nous l'a indiqué.
Par conséquent, cette proposition de résolution n'a aucun sens. Imposer un seul taux et une seule statistique basés sur un sondage, alors qu'aujourd'hui nous avons les deux à disposition - ce qui permet d'établir une comparaison entre l'économie de la Suisse et celles du reste de l'Europe -, n'a pas lieu d'être. Raison pour laquelle le groupe socialiste refusera ce texte.
M. François Baertschi (MCG). On constate que le chômage reste un tabou à Genève. Les véritables chiffres du chômage, ceux qui ne sont pas publiés ou que l'on publie en catimini et que cette résolution demande de véritablement mettre sur la place publique de manière beaucoup plus visible... La situation genevoise, et je le répéterai sans fin, est due à la présence massive... (Exclamation. Commentaires.) ...des frontaliers, permis G, qui déstabilisent l'entier du marché du travail. Ils déstabilisent aussi notre société par la sous-enchère salariale et la sous-enchère massive de compétences qu'ils causent année après année. Nous devons à tout prix nous battre contre ce phénomène, et c'est uniquement par une politique de vérité que nous pourrons le faire. C'est pour cela que le groupe MCG vous demande de renvoyer en commission cette résolution ou, au pire, si par malheur ce n'était pas le cas, de l'accepter sur le siège. (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je rends la parole à M. le député Serge Hiltpold pour deux minutes trente.
M. Serge Hiltpold (PLR). Merci, Monsieur le président. Je serai plus bref. J'aimerais juste recentrer un peu le débat. Dire que les chiffres sont cachés, c'est absolument faux ! Ils sont extrêmement transparents, vous avez la possibilité de les consulter en ligne régulièrement et vous avez accès à ces deux chiffres, ceux du BIT et ceux du SECO. Ces derniers sont capitaux, c'est ce qui détermine le taux de chômage en Suisse. D'ailleurs, je m'étonne, je m'étonne que l'UDC aille chercher un modèle extranational, européen, dans d'autres pays qui en général ne font pas preuve de la plus grande ouverture du point de vue de leur politique, et veuille appliquer un taux différent de ce qui est recommandé en Suisse, de ce qui est appliqué dans tous les autres cantons. D'un point de vue institutionnel, c'est complètement erroné. Je vous demanderai donc de bien vouloir refuser cette résolution. Comme mes préopinants l'ont relevé, il n'y a absolument rien à cacher, et je crois que si on parle du chômage, d'autres chiffres sont plus intéressants, notamment le produit intérieur brut de notre pays. C'est aussi à mettre en perspective avec le chômage. Le Conseil d'Etat approuvera peut-être notre démarche et la véracité de nos propos. Je vous demande de bien vouloir refuser cette proposition de résolution. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va maintenant à M. le député Jean-Marie Voumard pour une minute et quarante-huit secondes.
M. Jean-Marie Voumard (MCG). Merci, Monsieur le président. Je renonce, M. Baertschi s'est déjà exprimé.
Le président. Très bien, merci. Monsieur André Pfeffer, il ne reste plus de temps au groupe UDC. Pour clore ce débat, je cède la parole à M. le conseiller d'Etat Mauro Poggia.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Le Conseil d'Etat vous demandera de rejeter cette proposition de résolution, ne serait-ce que pour sauver la crédibilité de Genève auprès des instances fédérales.
D'abord, j'avoue ne pas comprendre la stratégie des signataires, qui sont tous de l'UDC, le parti le plus représenté sous la coupole fédérale: par stratégie, il demanderait à sa section genevoise de déposer un texte pour aller saisir les autorités fédérales d'un sujet national ? J'avoue que cela me dépasse. Si véritablement votre parti considère qu'il faut changer les méthodes de calcul du chômage en Suisse, je pense qu'il faut s'adresser directement au Parlement fédéral à travers ceux qui y siègent.
Ensuite, j'ai relevé une perle quand même admirable de la part du premier signataire, qui nous dit que pour être crédible, la Suisse devrait faire comme l'Union européenne pour établir ses chiffres. C'est une perle, venant de celui qui a prononcé ces mots. Il faudra les retenir à l'avenir ! (Rire.)
Plus sérieusement, Mesdames et Messieurs, en ce qui concerne le calcul du taux de chômage, Genève est un des rares cantons qui applique les deux méthodes, et nous pouvons à tout moment savoir quel est le taux de chômage BIT à Genève. C'est vrai que ce n'est pas vraiment un taux de chômage, puisque c'est une statistique sur un millier de personnes, qui prend également en considération les personnes qui sont en emploi, qui n'en sont pas satisfaites et qui cherchent à changer de travail. On comprend que c'est un peu extensif et extrêmement subjectif. Il est vrai que si on reproduit la même opération durant des années, cela confère une certaine crédibilité à ces méthodes; celles-ci sont en effet reproduites de mois en mois. Mais de là à vouloir substituer cette méthode à la nôtre, qui est fiable et qui, je le rappelle, est à Genève encore plus fiable qu'ailleurs, puisqu'elle intègre dans le taux de chômage les personnes prises en charge par le service de réinsertion professionnelle de l'Hospice général... Ces statistiques comprennent donc aussi une bonne partie des personnes qui sont à l'aide sociale et qui sont considérées comme suffisamment proches du marché de l'emploi pour être prises en compte dans le taux de chômage.
Je pense que nous devons travailler avec nos taux. Nous savons qu'ils sont imparfaits. Si nous voulons établir des comparaisons - et nous l'avions fait il y a quelques années pour nous rendre compte que le taux de chômage BIT à Genève était supérieur au taux de chômage BIT de la France voisine, ce qui voulait bien dire que celle-ci, d'une certaine façon, profitait du marché de l'emploi genevois, c'est une banalité de le dire, mais les chiffres le montraient clairement -, si donc les signataires veulent obtenir ce type de renseignements, ils sont disponibles, il n'y a pas besoin de demander que toute la Suisse fasse comme nous. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer en premier lieu sur la demande de renvoi à la commission de l'économie.
Mis aux voix, le renvoi pour six mois (article 194 LRGC) de la proposition de résolution 886 à la commission de l'économie est rejeté par 62 non contre 24 oui.
Mise aux voix, la proposition de résolution 886 est rejetée par 63 non contre 23 oui.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, avant de prendre congé de vous, je vous rappelle de laisser vos cartes ici. Vous pouvez laisser vos affaires, mais je vous déconseille de laisser des valeurs. Par ailleurs, comme je vous l'ai indiqué au début de la séance, nous siégerons demain à partir de 10h, la première séance étant supprimée en raison de la météo. Je vous encourage donc à rester prudentes et prudents sur les routes demain matin et à prévoir d'importants retards. En attendant, bon retour dans vos foyers !
La séance est levée à 23h.