Séance du
jeudi 9 décembre 2021 à
14h
2e
législature -
4e
année -
6e
session -
33e
séance
La séance est ouverte à 14h, sous la présidence de M. Diego Esteban, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Serge Dal Busco, président du Conseil d'Etat, Mauro Poggia, Antonio Hodgers, Nathalie Fontanet et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme Anne Emery-Torracinta et M. Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Antoine Barde, Jennifer Conti, Emmanuel Deonna, David Martin, Vincent Subilia, Pierre Vanek, Salika Wenger et Yvan Zweifel, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Glenna Baillon-Lopez, Denis Chiaradonna, Patrick Malek-Asghar, Aude Martenot, Corinne Müller Sontag, Françoise Nyffeler, Helena Rigotti et Pascal Uehlinger.
Procès-verbal des précédentes séances
Le procès-verbal de la session du Grand Conseil des 11 et 12 novembre 2021 est adopté.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Le président. La liste des projets de lois renvoyés sans débat vous a été transmise par messagerie.
Projets de lois renvoyés sans débat
Le président. La discussion immédiate est-elle demandée sur l'un de ces points ? Ce n'est pas le cas, ces projets de lois sont donc renvoyés dans les commissions indiquées.
De même, la liste des propositions de motions renvoyées sans débat vous a été transmise par messagerie.
Propositions de motions renvoyées sans débat
Le président. La discussion immédiate est-elle demandée sur l'un de ces points ? Ce n'est pas le cas. Mesdames et Messieurs, le Bureau et les chefs de groupe n'étant pas parvenus à un consensus en ce qui concerne le choix de la commission à laquelle renvoyer la M 2806 «Relançons le "Grand Genève" et le transfert modal par des parkings relais (P+R) en France voisine», je vais mettre aux voix le renvoi à la CACRI; en cas de refus, cette proposition de motion sera renvoyée à la commission des transports.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2806 à la commission des affaires communales, régionales et internationales est rejeté par 79 non contre 3 oui.
Le président. Cet objet est donc renvoyé à la commission des transports. Quant aux autres propositions de motions, elles sont renvoyées dans les commissions indiquées.
Enfin, la liste des propositions de résolutions renvoyées sans débat vous a été transmise par messagerie.
Propositions de résolutions renvoyées sans débat
Le président. La discussion immédiate est-elle demandée sur ce point ? (Remarque.) Je cède la parole à M. Cyril Aellen. (Un instant s'écoule.) Ah, une seconde, j'avais oublié que c'est moi qui ouvre les micros dans cette salle. Voilà, allez-y.
M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. Le PLR demande la discussion immédiate et l'urgence sur la R 981 «Ligne CFF Genève-Lausanne: pour une mobilité fluide et sans trous».
Le président. Vous sollicitez la discussion immédiate et l'urgence, Monsieur Aellen, c'est bien cela ?
M. Cyril Aellen. Oui, Monsieur le président.
Le président. Bien, alors je soumets ces requêtes aux votes de l'assemblée.
Mise aux voix, la discussion immédiate de la proposition de résolution 981 est adoptée par 69 oui contre 10 non et 1 abstention.
Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de résolution 981 est adopté par 76 oui contre 1 non et 2 abstentions.
Le président. Ce texte figurera sur la liste des urgences.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que les points suivants seront traités ensemble: les M 2555-A, RD 1186-A et RD 1276-A sur le CEVA, les PL 12581-A, PL 12582-A, PL 12583-A, PL 12650-A, PL 12652-A, PL 12653-A et PL 12654-A pour une meilleure représentation féminine en politique, les M 2498-A, R 870-A et R 878 à propos des réfugiés en Méditerranée, les PL 12799-A et M 2683-A relatifs à la tenue vestimentaire des élèves ainsi que les PL 12862-A et PL 12881-A en lien avec la mendicité.
Nous passons aux demandes d'ajout et d'urgence. En premier lieu, la commission législative sollicite l'ajout à l'ordre du jour des RD 1438 et R 982 qui concernent les arrêtés du Conseil d'Etat liés à l'état de nécessité.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du rapport divers 1438 et de la proposition de résolution 982 est adopté par 84 oui contre 2 non.
Le président. Ces objets seront traités en point fixe après le budget. Par ailleurs, Mesdames et Messieurs, sachez qu'à la demande de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève, le Bureau a également inscrit en point fixe le PL 12593-A «modifiant la loi sur l'énergie (LEn) (L 2 30) (Pour un abaissement des seuils IDC)» qui sera, lui aussi, examiné après le budget.
Nous enchaînons avec les propositions du Conseil d'Etat. Il y a d'abord l'ajout du PL 13044 «modifiant la loi relative aux centres de loisirs et de rencontres et à la Fondation genevoise pour l'animation socioculturelle (LCLFASe) (J 6 11)».
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du projet de loi 13044 est adopté par 86 oui (unanimité des votants).
Le président. A présent, nous devons choisir la commission à laquelle ce projet de loi sera renvoyé, car le Bureau et les chefs de groupe n'ont pas réussi à se mettre d'accord. J'ouvre la procédure de vote sur le renvoi à la commission des finances; si celui-ci est rejeté, le texte ira à la commission des affaires sociales.
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 13044 à la commission des finances est rejeté par 49 non contre 36 oui et 1 abstention.
Le président. Le texte est ainsi renvoyé à la commission des affaires sociales. Nous avons reçu une seconde demande d'ajout du Conseil d'Etat portant sur le PL 13047 «modifiant la loi sur l'aide aux entreprises (LAE) (I 1 37)».
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du projet de loi 13047 est adopté par 85 oui et 1 abstention.
Le président. Ce projet de loi est renvoyé à la commission de l'économie.
Nous passons aux requêtes des députés. Madame Caroline Marti, à vous la parole.
Mme Caroline Marti (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste demande l'urgence sur le PL 13043 «modifiant la loi relative à l'office cantonal des assurances sociales (LOCAS) (J 4 18) (Pour une garantie du versement des prestations aux retraités le premier jour ouvrable de chaque mois)».
Le président. Je vous remercie. L'assemblée est invitée à se prononcer.
Mis aux voix, le traitement en urgence du projet de loi 13043 est adopté par 57 oui contre 26 non et 1 abstention.
Le président. Cet objet sera inscrit sur la liste des urgences. Je laisse la parole à M. Marc Falquet.
M. Marc Falquet (UDC). Oui, merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, l'UDC voudrait que nous traitions en urgence la problématique de la mendicité vu le vide juridique actuel et les grandes attentes de la population qui, me semble-t-il, en a marre. Il s'agit du PL 12881-A «modifiant la loi pénale genevoise (LPG) (E 4 05) (Adaptation de l'interdit pénal de la mendicité en suite de l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 19 janvier 2021)», qui est lié au PL 12862-A «modifiant la loi pénale genevoise (LPG) (E 4 05) (Pour mettre un terme à la criminalisation de la mendicité et amnistier les victimes de cette disposition)».
Le président. Il en est pris note. Le vote est lancé sur cette proposition.
Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport PL 12881-A est adopté par 53 oui contre 38 non.
Le président. Je rappelle que ce rapport sera discuté avec le PL 12862-A; ils viennent tous deux compléter la liste des urgences. La parole va maintenant à M. Jean Burgermeister.
M. Jean Burgermeister (EAG). Merci, Monsieur le président. Le groupe Ensemble à Gauche sollicite l'urgence sur la M 2801 «contre des fins de mois difficiles arbitrairement prolongées par l'OCAS».
Le président. Merci, Monsieur le député. Je mets aux voix cette nouvelle demande.
Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de motion 2801 est adopté par 49 oui contre 39 non et 1 abstention.
Le président. Cette proposition de motion figurera également sur la liste des urgences. Madame Marjorie de Chastonay, c'est votre tour.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Je vous remercie, Monsieur le président. Les Vertes et les Verts proposent l'urgence sur le PL 12849-A «accordant une aide financière d'un montant total de 10 212 496 francs aux associations: Groupe sida Genève (5 320 488 francs), Dialogai (3 558 072 francs), PVA (593 976 francs) et Boulevards (739 960 francs) pour les années 2021 à 2024».
Le président. Bien, merci. Nous passons au vote.
Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport PL 12849-A est adopté par 71 oui contre 16 non et 1 abstention.
Le président. Un autre point qui sera inscrit sur la liste des urgences. Enfin, la parole retourne à M. Cyril Aellen.
M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. Le PLR souhaite ajouter à l'ordre du jour la M 2811 «Simplifions les procédures permettant de diminuer le bilan thermique des bâtiments». Elle a été déposée lundi soir, et c'est pour un renvoi à la commission de l'énergie, voilà pourquoi je demande simplement l'ajout.
Le président. D'accord, je vous remercie. Mesdames et Messieurs, c'est le moment de voter.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour de la proposition de motion 2811 est adopté par 54 oui contre 31 non et 4 abstentions.
Le président. Cet objet est donc renvoyé à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève.
Mesdames et Messieurs, nous sommes arrivés au terme des requêtes des groupes. J'attire votre attention sur le fait que le temps risque de manquer pour aborder l'ensemble des urgences.
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous informe que nous avons reçu la démission de M. Pierre Bayenet de son mandat de député suppléant. Je prie M. Forni de bien vouloir nous lire le courrier 4014.
Le président. Je vous remercie. Il est pris acte de cette démission avec effet immédiat.
Entré au Grand Conseil en mai 2018, M. Pierre Bayenet a siégé sur les bancs d'Ensemble à Gauche en qualité de député suppléant.
Au cours de son mandat, il a déposé de nombreux objets portant sur des sujets variés tels que l'égalité, les jeunes migrants non accompagnés et la politique pénitentiaire. Cette dernière thématique a particulièrement eu ses faveurs et c'est avec conviction qu'il s'est exprimé sur la question en plénière. Opposé au projet des Dardelles et à l'usage étendu de la détention préventive, M. Bayenet a par ailleurs défendu les alternatives à la privation de liberté pour les détenus peu dangereux.
Nous formons nos voeux les meilleurs pour la suite de sa carrière. Je précise que le stylo souvenir lui a été remis par anticipation. La parole est à M. Jean Batou.
M. Jean Batou (EAG). Merci, Monsieur le président. Pierre Bayenet, tout le monde a cru jusqu'ici qu'il était député titulaire tant il siégeait régulièrement sur nos bancs. En réalité, nous avons eu à déplorer des absences de longue durée liées à des grossesses, à des maladies, et Pierre Bayenet a remplacé ces personnes comme un titulaire, en déployant exactement le même type d'activité, c'est-à-dire qu'il a déposé un grand nombre d'objets qui ont été discutés dans plusieurs commissions. Nous lui sommes reconnaissants du travail considérable qu'il a accompli au sein de notre députation et nous regrettons son départ, même si nous sommes heureux qu'il ait été élu procureur.
Maintenant, il faut espérer qu'avec la relève, notre groupe continuera à soumettre autant de propositions intéressantes à ce parlement, mais je ne m'inquiète pas trop, car dans le fond, les graines qu'il a semées pousseront dans les mois à venir. Merci beaucoup à toutes les députées et à tous les députés qui ont collaboré avec Pierre Bayenet. Je le dis en son nom: il a trouvé dans ce Grand Conseil des interlocutrices et interlocuteurs avec lesquels il s'est félicité de travailler. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Monsieur Raymond Wicky, vous avez la parole.
M. Raymond Wicky (PLR), rapporteur. Oui, Monsieur le président, merci. Mesdames et Messieurs, chers collègues, lors de sa séance du 24 novembre 2021, la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil a examiné la compatibilité de Mme Aude Martenot, première vient-ensuite sur la liste d'Ensemble à Gauche, avec la fonction de députée suppléante. Nous n'avons relevé aucun élément qui empêcherait cette femme d'accéder à ladite fonction. Par voie de conséquence, nous vous recommandons d'accepter sa nomination et nous lui souhaitons par avance bienvenue dans notre hémicycle.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport oral.
Le président. Mme Aude Martenot va prêter serment immédiatement.
Liens d'intérêts de Mme Aude Martenot (EAG)
Association Solidarité Tattes - Comité
Association Stopexclusion - Comité
Collectif pour la grève féministe, Genève
FPLC
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de Mme Aude Martenot. Je prie le sautier de la faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Mme Aude Martenot entre dans la salle et se tient debout, face à l'estrade.)
Madame Aude Martenot, vous êtes appelée à prêter serment de vos fonctions de députée suppléante au Grand Conseil. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- de prendre pour seuls guides dans l'exercice de mes fonctions les intérêts de la République selon les lumières de ma conscience, de rester strictement attachée aux prescriptions de la constitution et de ne jamais perdre de vue que mes attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple;
- d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie;
- de garder le secret sur toutes les informations que la loi ne me permet pas de divulguer.»
A prêté serment: Mme Aude Martenot.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment. La cérémonie est terminée. Vous pouvez maintenant vous retirer ou siéger, selon les besoins de votre groupe. (Applaudissements.)
Communications de la présidence
Le président. Je rappelle que les normes sanitaires restent inchangées et que le port du masque est requis en permanence, exception faite pour les oratrices et orateurs.
Correspondance
Le président. L'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil vous a été envoyé par messagerie. Cet énoncé figurera au Mémorial.
Lettre de M. BAYENET Pierre annonçant sa démission du Grand Conseil à l'issue de la séance du jeudi 9 décembre 2021 à 14h (C-4014)
Lettre de Mme ARLOTTI Ariana relative au pass sanitaire (C-4015)
Lettre de la Société pédagogique genevoise relative au port du masque pour les élèves du cycle moyen (5P à 8P) (C-4016)
Annonces et dépôts
Le président. L'objet suivant est retiré par ses auteurs:
Proposition de résolution de Mmes et MM. Yves de Matteis, Marjorie de Chastonay, Jean-Charles Rielle, Didier Bonny, Alessandra Oriolo, Marta Julia Macchiavelli, Claude Bocquet, Pierre Eckert, Jean-Marc Guinchard, Jocelyne Haller, Ruth Bänziger, Pierre Bayenet, David Martin, Sophie Desbiolles, Françoise Nyffeler, Adrienne Sordet, Youniss Mussa, Emmanuel Deonna, Grégoire Carasso, Nicole Valiquer Grecuccio, Katia Leonelli : Pour un soutien du canton de Genève à l'égalité : Oui au mariage pour toutes et tous ! (R-965)
Le président. Par ailleurs, Mesdames et Messieurs les députés, la commission des pétitions nous informe qu'elle désire renvoyer les pétitions suivantes:
Pétition pour la suppression des logos officiels sur les portières des taxis (P-2134)
Pétition pour un prix minimum des courses aux hôtels à proximité de l'aéroport (P-2135)
Pétition : Non aux amendes abusives infligées aux taxis genevois (P-2136)
à la commission des transports.
Le président. La liste des élections vous a été envoyée par messagerie. Il en est pris acte.
Premier débat
Le président. Nous entamons la procédure du budget avec les projets de lois connexes, en l'occurrence le PL 12578-A, classé en catégorie II, trente minutes. Madame la rapporteure de majorité Xhevrie Osmani, vous avez la parole.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous débattons aujourd'hui d'un projet de loi qui aurait certainement pu faire l'objet d'un vote l'année dernière délivrant un message clair, à savoir le refus d'une économie de 3 millions sur le personnel de l'Etat partant à la retraite. La commission ad hoc sur le personnel de l'Etat l'a étudié fin 2019. Il s'inscrivait dans le plan de mesures annoncé en septembre 2018 avec le dépôt du budget et du PFQ. Il vise à supprimer le doublement du dernier traitement avant la retraite dont bénéficient les personnes ayant effectué au minimum dix ans de service. Pour rappel, il n'y a pas de doublement du dernier salaire pour les fonctionnaires qui sont au bénéfice d'une rente-pont entière ou partielle depuis que le Grand Conseil a remplacé le PLEND par la rente-pont AVS.
Ce n'est pas la première fois qu'une telle mesure est présentée par le Conseil d'Etat, puisqu'elle avait déjà été traitée en 2014 et plus récemment avec le refus du rapport relatif au plan quadriennal 2019-2022. Cette mesure, comme d'autres, n'a malheureusement pas fait l'objet de véritables négociations entre les associations représentatives du personnel de l'Etat et le gouvernement. Les auditions nous ont appris que la manière dont le département a annoncé les mesures aux associations représentatives n'a pas favorisé l'occasion d'entrer dans des négociations, de prioriser les choses et de discuter.
S'il est indubitable que le privé et le public ne sauraient être comparés, une évidence qu'il semble que seule la droite n'acceptera jamais, il est au moins une chose essentielle dans laquelle ils se retrouvent, c'est la reconnaissance du travail fourni. Quel que soit le milieu dans lequel vous travaillez, la reconnaissance reste un moteur essentiel de votre investissement au travail. Dans le privé, on touche des salaires plus importants, la reconnaissance au travail prend la forme de primes, de bonus. A l'Etat, on décide de remercier les fonctionnaires à leur départ en doublant leur dernier salaire, et c'est un droit et non pas une variable ajustable grâce à laquelle on pourrait d'une année à l'autre choisir qui remercier ou non. D'autre part, pour celles et ceux qui ont toujours le souci d'économies, le doublement du dernier salaire est déjà presque amorti au premier versement du salaire de la personne qu'on embauche par la suite à cause de l'effet noria, par des engagements de personnes avec moins d'annuités ou d'autres profils, ou encore par l'impôt.
La pratique du doublement du dernier traitement existe depuis plus de vingt ans. Il y a à l'Etat des classes de fonctionnaires qui gagnent très bien leur vie et d'autres moins bien, des métiers qui peuvent être passablement exigeants sur un plan physique et mental pour certaines et certains. Il y a des fonctionnaires qui passent quarante ans dans la fonction publique, comme les enseignants. Leur donner un salaire de plus semble à tout le moins le minimum de reconnaissance que l'Etat puisse leur offrir pour leur engagement auprès de la population.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Xhevrie Osmani. Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission vous invite à refuser ce projet de loi. Je vous remercie de votre écoute.
M. Alexandre de Senarclens (PLR), rapporteur de minorité. Comme l'a rappelé la rapporteure de majorité, ce projet de loi vise uniquement à supprimer le doublement du dernier traitement qui intervient juste avant la retraite pour les collaborateurs qui ont travaillé au moins dix ans et qui ne sont pas au bénéfice d'une rente-pont. C'est une économie très faible de 3,5 millions. Il faut rappeler que cette économie était soutenue par le Conseil d'Etat d'alors et l'est par l'actuel. C'est donc un texte a priori soutenu par une majorité de gauche au gouvernement.
Comme je l'ai indiqué, ce n'est pas grand-chose, une petite mesure d'économie qui vise à rééquilibrer le budget. Et puis, comme l'a indiqué la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet lorsqu'elle a été entendue par la commission, cette mesure a été discutée avec les associations représentatives du personnel et n'a pas soulevé tellement de contestations de leur part. Les associations professionnelles étant promptes et rapides à s'élever contre toute forme de discrimination qui les concernerait, c'est dire à quel point cette mesure était finalement de peu d'importance, peu ambitieuse, minime. Toutefois, même ces petites mesures sont contestées par la gauche de notre parlement. Il y a une sorte de réflexe pavlovien de clan, de caste, un réflexe protectionniste, et on a le sentiment que rien dans ce domaine ne pourra jamais être quelque peu changé ou réformé, que tout doit être sacralisé. On a aussi la triste impression que notre Grand Conseil se trouve dans un conflit d'intérêts complet par rapport à cette thématique: si les députés ici présents appliquaient l'article 24 de la LRGC en s'abstenant, je pense qu'une bonne partie de l'assemblée ne pourrait pas voter sur ce sujet.
Je rappellerai aussi que tout cela intervient après une recapitalisation de quelque 5 milliards - une bagatelle ! - de la caisse de pension de l'Etat de Genève, un effort énorme, un effort qui va se poursuivre sur de très nombreuses années. Il y a donc, d'un côté, 3,5 millions - 3,5 millions, hein, une paille dans l'équation ! -, et de l'autre, 5 milliards. Mais même pour 3,5 millions, évidemment, on défend ses propres intérêts et on ne veut en aucun cas réformer l'Etat et essayer de le faire avancer.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Alexandre de Senarclens. Contrairement à ce qu'a dit la rapporteure de majorité, les salaires au sein de l'Etat sont en général plus importants que dans le privé, en tout cas pour certaines fonctions: en particulier les bas salaires sont plus importants dans le public que dans le privé; c'est moins le cas des fonctions de cadres, mais on ne peut pas laisser dire cela.
La majorité vous invite donc à voter ce projet de loi pour accepter une mini-réformette par rapport à ce budget et au débat qui va arriver. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai, j'ai pensé que j'avais mal entendu M. de Senarclens qui parlait d'une majorité. Non, c'est bien une minorité, et la majorité - et Ensemble à Gauche avec - vous invite bien évidemment à refuser ce projet de loi, qui est particulièrement mesquin. Ce qui nous étonne surtout, ce sont les paroles de la conseillère d'Etat que M. de Senarclens s'est risqué à rappeler, en prétendant que les associations représentatives du personnel ne seraient pas tellement opposées à cette mesure. Qu'est-ce que «pas tellement» signifie ? Non ! C'est évidemment faux ! Les associations syndicales sont totalement opposées à cette mesure, l'ont fait savoir et souhaitent même le contraire, c'est-à-dire qu'on rétablisse le double salaire pour tous les employés et tous les fonctionnaires qui quittent la fonction publique, après dix ans ou pas.
Parce qu'au fond, quelle est la réalité ? En fait, il ne s'agit pas juste des personnes qui ont effectué dix ans de service et qui ne bénéficient pas d'une rente-pont. Ce sont celles et ceux qui vont jusqu'à 65 ans, jusqu'au bout; or il y en a de moins en moins qui vont jusqu'au bout, parce que les conditions de travail sont très difficiles. Par ailleurs, il y a aussi toute une catégorie de personnel que vous ignorez parfois, mais qui n'est pas des moindres: c'est le personnel enseignant, qui, lui, est engagé au 1er septembre. Et vous savez quand il va commencer à travailler à la rentrée 2022 ? Le 15 août ! Il sera déjà sur le pont, si ce n'est avant, bien sûr... (Commentaires.) ...mais cela veut dire que le nouveau personnel engagé - le nouveau personnel enseignant, en espérant qu'il y ait des postes ! - va commencer le 15 août et va faire quinze, seize jours sans être payé. Est-ce que vous faites cela dans vos entreprises, Mesdames et Messieurs de la droite ? Vous engagez des personnes qui commencent par travailler quinze jours sans être payées ? C'est bien la réalité. Alors le double salaire ne compense pas cela, on est bien d'accord. Mais c'est très malvenu de demander cette économie maintenant. Ensemble à Gauche ainsi que les syndicats et les associations professionnelles y sont tout à fait opposés. Merci de voter non et de suivre la majorité, la vraie majorité. (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède maintenant la parole à M. le député Patrick Saudan pour une minute trente.
M. Patrick Saudan (HP). Ce sera beaucoup plus court, Monsieur le président. En tant que fonctionnaire, je tiens simplement à dire que je ne participerai pas à ce vote. Merci.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). Ce projet de loi est un signal catastrophique. Après deux années de crise covid dont nous ne sommes pas encore sortis, le Conseil d'Etat veut supprimer le doublement du dernier salaire de ses employés avant le départ à la retraite.
Le groupe MCG refuse ce signal catastrophique qui s'adresse à un personnel qui était au front pendant la crise sanitaire. Pensons aux soignants des HUG ! Le groupe MCG refuse ce signal catastrophique alors qu'aucune réelle négociation n'a eu lieu. Le groupe MCG refuse ce signal catastrophique alors que le Conseil d'Etat dépense souvent de manière inconsidérée. Le groupe MCG refuse ce signal catastrophique lancé par un gouvernement à majorité de gauche. Le groupe MCG refuse ce signal catastrophique qui relève du bricolage budgétaire. Le groupe MCG refuse ce signal catastrophique qui dénote une incapacité à gérer les finances de l'Etat. Pour toutes ces raisons, le groupe MCG votera non.
M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, les auditions au sein de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat ont été édifiantes. Suite à l'audition du Cartel intersyndical, il a été affligeant de voir qu'il y a eu peu ou pas de négociations entre les syndicats et l'Etat, ce qui pose un véritable problème. Je rappelle également que la commission attend la suite de SCORE pour qu'on puisse vraiment travailler sur le fond de la problématique.
Ce projet de loi propose l'abrogation de l'article 23 de la LTrait. En commission, j'ai refusé ce texte. Dans son caucus, le groupe UDC a décidé qu'il laisserait la liberté de vote à ses membres. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Souheil Sayegh (PDC). Chers collègues, on va commencer par quelques devinettes. Qu'est-ce qui n'a pas de prix mais qui a un coût ? (Rire.) C'est clairement la sécurité de l'emploi. Qu'est-ce qui a un coût mais qui est hors de prix ? C'est clairement la caisse de pension. Et qui ne se fait vraiment aucune illusion quant au sort de ce projet de loi ? C'est l'Entente.
Même si les comparaisons n'ont plus lieu d'être, comme on l'a compris, comment expliquer au secteur privé, qui, au final, paie le salaire du secteur public - franchement, c'est de ça qu'on parle ! -, qu'on double le dernier salaire après dix ans de travail à l'Etat ? On entend ici que la fonction publique, c'est la pénibilité du travail. Non, mais quand j'entends ça, j'ai l'impression que dans le privé, on se la coule douce ! On dit que ce sont des horaires terribles, que ce sont les infirmières qui sont au front: nous savons toutes et tous ici combien elles ont travaillé pendant la crise covid, mais ce n'est pas la question qui se pose ici ! Les infirmières ne représentent de loin pas toute la fonction publique ! Il ne faut pas mélanger les pommes et les poires.
Comment expliquer que les conditions de travail des enseignants - qui, on nous l'a expliqué encore une fois, ont 13,5 semaines hors enseignement par année, quand le reste de la population rame avec quatre à six semaines de vacances - sont aujourd'hui pénibles et qu'ils méritent après quarante ans de travail un doublement du dernier salaire ? Nous ne sommes pas là en train de critiquer le travail des enseignants, qu'encore une fois, nous remercions d'élever et d'éduquer nos enfants, mais de là à expliquer que ce job est d'une pénibilité absolue, dans le privé, on a de la difficulté à le comprendre, pardonnez-nous !
On parle d'une économie mineure, il est vrai, de 3,5 millions, mais c'est un pas en avant, on ose un tout petit peu une petite réformette, qui peut-être nous fait penser qu'on a un levier potentiel sur la fonction publique que nous tentons d'améliorer autant que possible. Il s'agit bien d'une petite réforme. Encore une fois, remercions ici les enseignantes et enseignants, remercions le personnel infirmier des hôpitaux et la fonction publique dans son ensemble. Mais n'allons pas faire croire à la population que cette fonction publique dans son ensemble vit des conditions de travail pénibles et que la sécurité de l'emploi n'a pas de prix ! Elle a un prix, et pour ce qui est du privé, on viendra vous l'expliquer volontiers. Pour ces raisons, le PDC refusera le rapport de majorité et vous propose de soutenir ce projet de loi. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède la parole à M. le député Pablo Cruchon pour cinquante secondes.
M. Pablo Cruchon (EAG). Merci, Monsieur le président. M. Sayegh a une drôle de façon de remercier le personnel de la fonction publique, en lui supprimant un mois de salaire ! Plus sérieusement, il y a trois raisons de s'opposer à ce projet de loi. Premièrement, en période de pandémie, ce n'est pas le moment d'attaquer les salaires des personnes. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Deuxièmement, parce que c'est le signal d'une politique extrêmement néfaste de la part du Conseil d'Etat qui consiste à s'attaquer aux poches des salariés pendant qu'on fait des cadeaux fiscaux aux plus riches - comme cela a été voté le 17 octobre dernier. Troisièmement, et j'y reviendrai, parce que le Conseil d'Etat...
Le président. Merci.
M. Pablo Cruchon. ...n'entend pas négocier avec les organisations du personnel, il ne leur a pas soumis ce projet...
Le président. Il va falloir conclure.
M. Pablo Cruchon. ...et il faut absolument que ce genre de procédé cesse. Je vous remercie.
M. Alberto Velasco (S). Ce qu'on vient d'entendre est affligeant ! En principe, les fonctionnaires sont quand même considérés comme les serviteurs de l'Etat, et beaucoup d'entre eux - beaucoup - passent trente, parfois quarante ans à l'Etat. Entendre dire que les enseignants n'ont pas un travail difficile... Et les 13,5 semaines dont vous parlez, ce n'est pas vrai ! Deux semaines avant la rentrée, ils doivent déjà préparer leurs cours, et deux semaines après la fin de l'année scolaire, ils sont obligés aussi de préparer leur rentrée. Ce ne sont donc pas 13,5 semaines. Pour ceux et celles... (L'orateur est interpellé. Remarque.) Ceux et celles qui ont enseigné savent aussi que la pratique de l'enseignement aujourd'hui est très difficile. C'est donc très très affligeant de traiter les fonctionnaires de la sorte.
Oui, c'est normal, s'agissant de personnes qui ont travaillé pendant des années à l'Etat - je pense aussi aux éboueurs, à la voirie, aux infirmières, à ceux qui transportent les malades -, que celui-ci fasse montre d'une certaine reconnaissance avec un doublement du salaire. D'ailleurs, vous êtes pour que les gens gagnent de l'argent ! C'est donc quand même incroyable que dans un cas comme celui-ci, d'un point de vue idéologique, vous ne soyez pas d'accord ! (Commentaires.) C'est-à-dire que vous voulez absolument que les gens aient comme objectif de gagner de l'argent, mais quand il s'agit de reconnaissance, vous ne voulez pas que cela soit sous forme d'argent. Je vois que pour la droite, ce concept est à géométrie variable.
Non, Mesdames et Messieurs, eu égard à leur engagement pendant des années et des années dans un travail parfois difficile, les fonctionnaires ont effectivement droit à cette reconnaissance, et au nom des socialistes, je vous prie de bien vouloir refuser ce projet de loi. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député André Pfeffer pour une minute cinquante-neuf.
M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. Je serai très bref. Evidemment, évidemment, il faut remercier la fonction publique, le personnel des hôpitaux et de l'instruction publique, qui ont vraiment réalisé un travail fantastique. Mais lorsqu'on parle de pénibilité de la fonction publique, je pense qu'il faut quand même regarder cela d'une manière un peu plus large. Il faut aussi être juste et correct par rapport au privé. Jusqu'à preuve du contraire, dans la fonction publique à Genève, le salaire médian est d'environ 104 000 francs par année, alors que dans le secteur privé, de manière globale, il est de 74 000 francs. (Commentaires.)
Nous parlons là d'une réformette, d'un petit réajustement, et l'immense majorité des députés UDC, lors du dernier caucus, a décidé de soutenir ce projet de loi. Merci de votre attention.
Une voix. Bravo ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole échoit à M. le député François Baertschi pour une minute et quarante-six secondes.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. J'ai été très surpris par ce qu'a indiqué un député PDC, qui qualifiait les infirmières, si j'ai bien compris, de pommes ou de poires. (Commentaires.) Je pense que c'est peu respectueux pour cette honorable profession qui a beaucoup donné lors de la crise covid. Alors soit j'ai mal compris, soit il y a un problème, parce que considérer de la sorte des employés de l'Etat est inacceptable, qu'on soit pour ou contre ce projet de loi. Mais c'est bien à l'image des tenants de ce texte et de la vision que le Conseil d'Etat - de gauche - a du personnel de l'Etat de Genève. Il faut donc bien entendu refuser ce projet de loi. Merci, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je suis sûr que l'auteur de ces propos se répétera. Je me rappellerai de manger cinq fruits et infirmières par jour ! (Rires. Commentaires.) Monsieur le député Souheil Sayegh, vous n'avez plus de temps de parole. Monsieur le rapporteur de minorité Alexandre de Senarclens, je vous rends la parole pour deux minutes et vingt et une secondes.
M. Alexandre de Senarclens (PLR), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Ce débat est assez affligeant et totalement symptomatique de la crise politique et institutionnelle que nous connaissons dans cette enceinte. A peine avais-je terminé mon intervention comme rapporteur de minorité - en relevant qu'il y avait un véritable conflit d'intérêts au sein de ce parlement, un protectionnisme, un réflexe pavlovien de défense des fonctionnaires - que la personne qui me suit dans les interventions, qui n'est autre que le président du Cartel intersyndical, n'a pas la décence de se taire sur ce sujet et prend immédiatement la parole, sans aucune indépendance. Il n'agit plus comme député, il agit comme président de ce cartel, il amène le débat syndical au sein de cette enceinte, et c'est très très grave, parce que ça ruine nos institutions ! (Commentaires. Applaudissements.) A ce titre, j'aimerais souligner la décence, l'élégance, le sens des institutions de M. Patrick Saudan qui est lui-même visé par ce projet de loi et qui a l'honnêteté de se récuser et d'appliquer nos lois, à savoir l'article 24 LRGC, dans le respect strict de nos institutions. C'est ce motif qui me pousse à demander le vote nominal, Monsieur le président.
Une voix. Bravo !
Le président. Etes-vous soutenu, Monsieur le rapporteur ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous l'êtes, largement. Le vote se fera donc à l'appel nominal. En attendant, je rends la parole à M. le député François Baertschi pour cinquante-huit secondes.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Ce que je trouve véritablement affligeant, ce sont les propos du rapporteur qui parle de l'article 24, alors que lui-même ne se gêne pas de voter toutes les lois sur la justice qui le concernent directement, puisqu'il est avocat !
Une voix. Ah non ! (Commentaires.)
M. François Baertschi. Il attaque ad hominem... (Commentaires.) ...le président du Cartel, qui fait un travail difficile, et ce qu'il... (Commentaires.) ...ce qu'il fait lui-même est quelque part bien pire que ce que fait la personne qu'il critique ! Il faut arrêter ! Nous sommes un parlement de milice, avec des gens qui sont impliqués dans la vie publique, il y a beaucoup de représentants des syndicats patronaux au sein de cette enceinte...
Le président. Merci.
M. François Baertschi. ...ils y sont même plus nombreux que les représentants des syndicats d'employés. (Commentaires.)
Le président. Vous devez conclure.
M. François Baertschi. Il faut savoir raison garder...
Le président. Merci, Monsieur Baertschi, c'est la fin de votre temps de parole.
M. François Baertschi. ...et ne pas entrer dans ce genre de dérive. Merci, Monsieur le président.
Le président. Monsieur Sayegh, il ne reste plus de temps au groupe PDC.
Une voix. Il a été attaqué ! (Un instant s'écoule.)
Le président. En attendant, je vais donner la parole à M. Olivier Baud, qui a été mis en cause, pour vingt à trente secondes.
M. Olivier Baud (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je n'estimais a priori pas nécessaire d'intervenir en réponse au message assez misérable de M. de Senarclens, mais je le fais, pour remercier M. François Baertschi d'avoir assez bien traduit ce que je pensais. S'il fallait évacuer de cette enceinte tous ceux qui ont un rapport ou des intérêts ici ou là, nous ne serions plus très nombreux ! Donc, je reste là et je voterai ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur Baud. Effectivement, Monsieur Sayegh, excusez-moi, c'était vous l'auteur des propos qui avaient été mal compris. Je vous laisse répondre pour vingt à trente secondes.
M. Souheil Sayegh (PDC). Affirmatif. Merci, Monsieur le président, mais vous m'aviez devancé avec votre remarque. Je voulais rappeler à M. Baertschi qu'un proverbe anglais dit que manger une pomme par jour vous éloigne du docteur. C'était donc dans cet esprit-là. Aucune mauvaise pensée vis-à-vis du milieu infirmier que je connais plutôt très bien et dont je sais estimer la charge de travail. C'est pourquoi je me permets ici ces quelques propos, et je salue et remercie pour son travail tout le personnel infirmier qui me connaît et que je connais.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, manifestement, ces deux jours vont être longs ! (Rire.) Peut-être sied-il de rappeler que cette mesure avait été prise par le Conseil d'Etat dans le cadre du projet de budget 2020, respectivement dans le cadre du PFQ 2020-2023, et que ce projet de loi n'a pas été traité avec ces projets de budgets; il revient donc aujourd'hui à l'ordre du jour. Il visait effectivement à effectuer une économie sur les charges de l'Etat, qui sont importantes.
Je rappellerai aussi un élément pour répondre au député Baud, président du Cartel intersyndical, s'agissant de l'évocation par M. de Senarclens des propos que j'ai pu tenir à la commission des finances; il faut bien remettre ceux-ci dans le contexte. Le Cartel et les associations représentatives du personnel, de façon usuelle, sont contre absolument toute mesure déposée par le Conseil d'Etat et ils s'y opposent en demandant des négociations, qui sont des exigences et non des négociations. Dans le cadre des discussions que nous avons pu mener, celle sur le non-doublement du dernier salaire avant la retraite était la mesure pour laquelle il y avait finalement le moins de contestation. Cela ne veut pas encore dire que les associations représentatives du personnel y étaient favorables, mais si je devais à un moment donné évaluer avec des degrés le mécontentement des associations représentatives du personnel, cette mesure-là était alors celle qui en entraînait le moins. Dorénavant, je ne ferai plus de nuance et j'indiquerai spécifiquement que dans l'ensemble, le Cartel intersyndical et les associations représentatives du personnel s'opposent à toute mesure qui touche à leurs conditions et qu'ils exigent qu'elles soient maintenues, même qu'elles soient améliorées. Cela aura le mérite d'être clair, cela va rendre les deux ans qui nous restent avant les élections fort agréables et peut-être que cela limitera les besoins d'innombrables séances que nous avons en matière de discussions, de délégation RH, de consultations, de sorte à essayer de réaliser ensemble des projets dans d'autres domaines. Voilà, Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat continue à vous recommander d'accepter ce projet de loi et je vous en remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je mets aux voix l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12578 est rejeté en premier débat par 51 non contre 41 oui et 3 abstentions (vote nominal).
Le président. Nous abordons maintenant le PL 13033-A, classé en catégorie III. Personne ne souhaitant s'exprimer, nous passons directement au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13033 est adopté en premier débat par 89 oui et 2 abstentions.
Le projet de loi 13033 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13033 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 90 oui contre 1 non et 2 abstentions.
Premier débat
Le président. Nous traitons à présent de manière conjointe les PL 13021-A, 13022-A et 13023-A, classés en catégorie II, soixante minutes. Je cède la parole à l'auteure du rapport de majorité portant sur PL 13021, Mme Caroline Marti.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission des finances, composée du parti socialiste, d'Ensemble à Gauche, des Verts et du MCG, est fermement opposée à ce projet de loi 13021. Celui-ci prévoit une augmentation de la part de cotisation des employés affiliés à la CPEG et une baisse de la part de cotisation de l'employeur. Actuellement, le ratio de cotisation est de 33% pour les employés et 66% pour l'employeur. Ce projet de loi propose de le faire passer à 42% pour les employés et 48% pour l'employeur.
La conséquence de ce projet de loi, c'est très directement une baisse de salaire net pour les employés concernés, évaluée à -1,8%. Certes, cela ne concerne que les nouveaux employés, mais ce n'est pas sans poser un certain nombre de problèmes: le premier, c'est celui de l'inégalité de traitement entre les anciens et les nouveaux employés, qui pourraient occuper exactement la même fonction, faire exactement les mêmes tâches, mais ne pas obtenir le même salaire pour ce travail. La deuxième conséquence problématique, c'est évidemment une dévalorisation et une perte d'attractivité de la fonction publique, alors même que la crise que nous traversons aujourd'hui a, une fois encore, démontré le rôle essentiel assumé par la fonction publique.
Il faut aussi mentionner une autre conséquence, et non des moindres: ce projet de loi mettrait en péril l'équilibre financier à long terme de la CPEG. Ce n'est d'ailleurs pas uniquement moi, Caroline Marti, rapporteure de majorité, qui l'affirme, mais l'expert agréé de la caisse qui l'indique, et c'est retranscrit dans l'exposé des motifs lié à ce projet de loi. Je le cite: «L'application de la nouvelle répartition des cotisations uniquement aux nouveaux assurés de la CPEG ferait "perdre" environ l'équivalent de 0,3% des traitements cotisants dans l'équilibre financier à long terme» de la caisse. Il poursuit: «Il en résulterait potentiellement, toutes hypothèses restant égales par ailleurs, une perte de l'ordre de 2 points de couverture sur 30 ans (soit environ 0,9 milliard de francs à l'horizon 2052)».
Voilà, c'est la nouvelle trouvaille de la droite: les économies qui coûtent cher, qui coûtent à l'Etat. En effet, on constate que pour économiser des sommes relativement modestes à l'échelle du PFQ, à savoir 15,9 millions - si on prend, en plus du projet de loi qui concerne la CPEG, ceux qui concernent la fondation de prévoyance des TPG et la caisse de la police, cela représente un total de 15,9 millions -, la droite est prête à faire courir un risque financier de près de 1 milliard.
Alors vous me direz: pourquoi la droite, qui est si prompte à vouloir réaliser des économies, est prête à faire prendre à l'Etat un tel risque financier ? La réponse, au sens de la majorité, est extrêmement claire: le but est d'affaiblir la caisse et de préparer le terrain à une baisse des rentes des affiliés de la CPEG ainsi qu'à un changement du régime actuel de primauté de prestations en un régime de primauté de cotisations, faisant fi au passage du choix populaire exprimé de façon très claire en mai 2019, qui prévoyait une recapitalisation de la CPEG en maintenant les rentes de la fonction publique et le régime de primauté de prestations.
Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission des finances vous recommande de refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la rapporteure de majorité. Je cède la parole au rapporteur de majorité sur le PL 13022. Monsieur Baertschi, c'est à vous.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Pendant de nombreuses années, l'Etat de Genève a dû recapitaliser ses caisses de pension, menant les finances publiques au bord du gouffre. Chacun a en mémoire combien la recapitalisation de la CPEG a été douloureuse. Aujourd'hui, nous sommes sortis de ces difficultés. Malheureusement, les trois projets de lois du Conseil d'Etat qui nous sont soumis vont à nouveau nous conduire dans des incertitudes s'agissant de la gestion des finances publiques. Le Conseil d'Etat actuel est en train de commettre les mêmes erreurs que ses prédécesseurs il y a une cinquantaine d'années. L'erreur est la suivante: ne pas assurer le financement à long terme des caisses de pension. Les experts des trois caisses sont très clairs et unanimes: en modifiant le taux de cotisation employeur-employé, on va détruire l'équilibre financier de ces trois caisses à moyen et à long terme. On laisserait ainsi un sordide héritage aux générations futures.
En ce qui concerne la caisse de la police, son administrateur a indiqué que son degré de couverture serait réduit de manière importante avec le PL 13022. L'expert de la caisse a expliqué très clairement le mécanisme de ce phénomène: l'article 17 de la loi fédérale sur le libre passage a pour conséquence de potentielles augmentations de prestations de sortie des assurés avant l'âge de retraite. De manière mécanique, cette loi aurait comme conséquence un affaiblissement du financement de la caisse; c'est donc une manière de jouer aux apprentis sorciers avec l'avenir des retraités. Il convient de rappeler que la caisse de pension de la police, contrairement à d'autres, n'a pas de garantie de l'Etat et qu'elle est actuellement entièrement couverte à 109%. Malgré les taux négatifs sur les marchés financiers, cette caisse de pension a réussi à se maintenir en équilibre.
Il faut également tenir compte d'autres éléments négatifs qu'occasionnerait cette loi. Durant leur audition en commission, le président du syndicat de la gendarmerie - l'UPCP -, Marc Baudat, et le représentant du syndicat de la police judiciaire, Yves Brand, ont averti très clairement qu'un manque d'attractivité apparaîtrait, avec comme conséquence une baisse de niveau des candidats au moment du recrutement. Cela aurait également des conséquences négatives importantes à moyen terme pour le bon fonctionnement de la police. Quant à la baisse de revenus entre les nouveaux engagés et les anciens, elle créerait une mauvaise dynamique au sein des équipes.
En examinant ces éléments objectifs, on arrive à la conclusion suivante: le projet de loi 13022, comme les deux autres, est une économie qui n'en est pas une. Pire, c'est une économie qui va nous coûter cher, très cher. A un moment donné, chacun doit prendre ses responsabilités. On ne peut pas réclamer le dialogue social et voter un projet de loi dont les employés ne veulent pas. On ne peut pas dire que l'on soutient les retraites et voter contre leur financement. On ne peut pas dire qu'on soutient la fonction publique et torpiller ses retraites. On ne peut pas être un parti qui critique sans fin la fonction publique et qui compte dans ses rangs l'essentiel des membres de la haute fonction publique. On ne peut pas prôner la bonne gestion de l'Etat et obliger les caisses de pension à vivre dans le déficit. On ne peut pas critiquer le déficit de l'Etat et créer un déficit de ce même Etat à moyen terme en déstructurant les caisses de pension. On ne peut pas s'opposer à la dette de l'Etat et voter des projets de lois sournois qui auront un coût financier dangereux pour les générations futures. La majorité, qui soutient le PL 13022, vous engage vivement à voter oui à ce projet de loi.
Une voix. Non !
M. François Baertschi. Non, à voter non ! Non ! (Rires. Commentaires.) Ah là là ! (Commentaires.) Damned ! A voter non ! Merci, Monsieur le président. (Rires. Commentaires.)
Le président. Je vous avertis que nous avons une longue session devant nous, Monsieur le rapporteur de majorité ! La parole va maintenant au rapporteur de majorité sur le troisième objet, le PL 13023, M. Jean Burgermeister.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je vais essayer de ne pas trop répéter ce qui a été dit au sujet des projets de lois. Le PL 13023 est celui qui traite de la FPTPG, donc la caisse de pension du personnel des TPG. Il faut bien comprendre que ces trois projets de lois dans leur ensemble ont pour but de transférer 80 millions environ, qui sont aujourd'hui à la charge de l'Etat et qui seraient à terme, lorsque l'ensemble du personnel du grand Etat aura été renouvelé, à la charge des salariés. Voilà, Mesdames et Messieurs, la brillante idée du Conseil d'Etat en période de crise: diminuer les salaires nets de la fonction publique dans son ensemble pour réaliser quelques économies sur le long terme. En réalité, et cela a été dit, cette mesure risque de coûter beaucoup plus cher que ce qu'elle rapporte. C'est aussi le cas pour la FPTPG puisque selon la caisse elle-même, ce projet de loi, s'il était accepté, engendrerait des besoins en recapitalisation supplémentaires, variant de 35 millions, dans le meilleur des cas, à 140 millions. La caisse a d'ailleurs demandé au Conseil d'Etat des garanties pour les montants de recapitalisation, si un tel projet de loi devait être accepté - courrier qui était resté, en tout cas au moment où nous l'avions auditionnée, sans réponse de la part du gouvernement.
Il faut rappeler que la situation des assurés de la FPTPG est particulière: d'abord, ce sont les rentes les plus faibles des caisses de pension publiques. Et puis, en 2014, un accord a été passé entre les employeurs et les employés: les salariés des TPG ont accepté une hausse de l'âge de départ à la retraite d'un an, une baisse de 10% des rentes en moyenne et le passage dans une primauté hybride, c'est-à-dire une primauté de prestations se basant sur la moyenne des salaires assurés durant l'intégralité de la carrière et non pas sur le dernier salaire. C'est-à-dire des sacrifices conséquents de la part des salariés, qui, une fois de plus, ne sont pas les mieux lotis du secteur public. En échange, le taux de cotisation de la part LPP de l'employeur devait augmenter à 69% contre 31% pour la part des employés. Et c'est précisément cette unique contrepartie qui a été négociée entre les syndicats et les TPG que le Conseil d'Etat propose aujourd'hui de supprimer pour obtenir une répartition 58%-42% ! Cela entraînerait pour les salariés des TPG des baisses de salaire net de 2,1% en moyenne, mais pouvant aller jusqu'à 3,34%. Comme pour les autres caisses, la question qui se pose aussi, c'est celle de l'inégalité de traitement, puisque au sein d'une même boîte, les TPG, des personnes qui feraient par ailleurs exactement le même travail percevraient des salaires nets sensiblement différents.
Alors on peut se poser la question: à quoi joue donc le Conseil d'Etat ? Il y a seulement deux possibilités, dans le fond: soit il a décidé de jouer à la roulette et il nous dit que si rien ne se dégrade d'ici 2050, nous devrions rentrer dans les clous en matière de recapitalisation, ce qui est évidemment un pari insensé ! Personne ne peut affirmer qu'il n'y aura pas une baisse de performance des fortunes des caisses de pension ou alors une inflation, parce que c'est un risque concret et bien réel, qui s'installe de manière structurelle, ce qui aura un impact énorme sur les caisses de pension. Donc soit le Conseil d'Etat veut vraiment réaliser ces économies et il joue à la roulette d'une manière parfaitement inconsciente, suivi par l'ensemble de la droite qui a voté ces projets de lois les yeux fermés - simplement parce que, quand on dit à la droite que cela va mettre en péril les caisses de pension et que cela va baisser les salaires de la fonction publique, cela lui fait deux bonnes raisons de les voter -, soit, l'autre solution, Mesdames et Messieurs - je n'ose pas y croire, mais cela paraît objectivement la plus probable -, c'est que ces projets de lois ont comme unique but de saboter les caisses de pension du secteur public.
Les trois caisses de pension nous ont transmis leur prise de position et les trois nous ont dit qu'il était possible, voire probable, que cela les empêche d'atteindre leur chemin en termes de recapitalisation, que ces projets de lois coûteraient beaucoup plus cher que les économies qu'ils rapporteraient. Le Conseil d'Etat fait donc peut-être le pari, avec la droite, que si les caisses de pension publiques ne parvenaient pas à suivre le chemin de croissance, alors ce serait l'occasion de prendre des mesures structurelles - ce qui signifie baisser les rentes - et de venir enfin à bout de cette primauté de prestations pour instaurer la primauté de cotisations, comme le souhaitent depuis longtemps le Conseil d'Etat et la droite, et ce malgré leur défaite en votation populaire.
La réponse du Conseil d'Etat tient en une phrase dans l'exposé des motifs. Il explique que ces projets de lois - donc le changement du taux de cotisation - ne sont «pas de nature», à eux seuls, «à remettre en cause l'équilibre financier à long terme [...]». Il le dit pour la CPEG comme pour les autres caisses. «Il n'est pas de nature, à lui seul, à remettre en cause l'équilibre financier à long terme [...].» Il suffit donc - et c'est là toute l'ambiguïté - que l'entrée en vigueur de ce projet de loi soit couplée avec un autre phénomène: comme je l'ai dit, une baisse de rendement des fortunes ou l'installation d'une inflation à long terme. Par conséquent, si le Conseil d'Etat nous dit: «Nous ne pouvons pas être sûrs que cela anéantira les possibilités de recapitalisation des caisses publiques», à l'inverse, personne dans cette salle, ni le Conseil d'Etat ni aucun des députés qui voteront pour ces projets de lois, personne dans cette salle ne peut affirmer que si ces projets de lois étaient votés, ils n'engendreraient pas des besoins de recapitalisation de plusieurs centaines de millions ! C'est un fait, Mesdames et Messieurs, que personne ne peut contester !
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Jean Burgermeister. Voyez donc: on entendra la droite justifier les besoins d'économies, alors qu'elle défend des projets de lois qui risquent de coûter très très cher à l'Etat et aux salariés du secteur public. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, la commission des finances dans sa majorité vous invite à refuser fermement ces projets de lois.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. La parole va maintenant au rapporteur de première minorité sur les trois projets de lois, M. Serge Hiltpold.
M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vais tout de suite répondre à la question de M. Burgermeister et lui rappeler qu'il y a une année, le comité de la caisse a voté un changement de tabelles qui a coûté 1 milliard au contribuable, sans passer par aucune voie parlementaire. C'est la première réponse: ne vous faites pas de souci ! Lorsqu'il s'agit de défendre les intérêts de ses propres cotisants, la fonction publique fait très bien son travail, et cela a coûté 1 milliard !
Je vous rappellerai encore que la recapitalisation a coûté 5,4 milliards au contribuable. D'accord ? Ce sont des démonstrations de reconnaissance ou d'attachement à l'ensemble de la fonction publique, qu'on a pu exprimer par un vote populaire. Les gens ont pris leurs responsabilités, et ça, on ne le remet pas en question. Ce qu'on remet en question fondamentalement, c'est cette façon figée de percevoir toute réforme - toute réforme ! Un nouveau contrat ne peut pas être discuté sur un plan théorique. Cela signifie qu'en fait, ce n'est absolument pas évolutif.
Vous nous parlez de difficultés des salariés. Je rappellerai simplement que le canton de Genève, dans les comparaisons intercantonales, est bien évidemment celui où les conditions sont les plus favorables de Suisse, avec Bâle-Ville. Le canton de Genève est aussi le seul canton qui fonctionne encore avec la primauté de prestations. Vous ne voulez pas l'entendre, mais ce sont simplement des faits. Je ne pense pas que le fonctionnaire dans le canton de Vaud, de Neuchâtel ou de Soleure soit plus défavorisé. Seulement, il y a peut-être un petit peu plus de compromis au niveau législatif.
Je vous rappellerai également que ce que vous défendez, ce sont carrément des privilèges, il faut appeler ça comme ça ! Dans la fonction publique, il y a deux tiers-un tiers - on dit modestement 58%-42%. Dans le privé, dans la vraie vie, c'est 50%-50%. D'accord ? Ça, c'est déjà une leçon d'équilibre. Alors on entend: «Pour toutes et tous, sans privilèges !» Appliquez-le déjà à vos membres !
Ce qu'il faut dire encore, et c'est un élément qui me tient particulièrement à coeur, c'est que vous figez toutes les personnes jeunes. Parce qu'avec ce système, si vous partez de l'Etat avant 43 ans, vous êtes perdant, parce que vous payez pour les plus anciens. On peut relever que cela participe d'une certaine solidarité, mais ce n'est pas du tout attractif pour les jeunes, et dès que vous avez passé l'âge pivot de 43 ans, il y a une chose à faire, c'est d'en tout cas ne jamais partir de l'Etat, parce que vous êtes perdant. Ça, c'est lié notamment au système de primauté de prestations et non de cotisations. On a entendu le Cartel intersyndical: «Il ne faut surtout pas revenir sur ces sujets !» Oui, nous allons revenir dessus, oui, nous devons les prendre en main, parce que oui, ce sont des coûts énormes, chaque année, pour le contribuable.
Je vais remettre les choses à leur place par rapport à ce qu'on a entendu sur la préservation des acquis. Aucun fonctionnaire en poste ne verra son salaire diminuer. Ça, je tenais à le rappeler. Ensuite, les petites mesurettes. Les petites mesurettes, c'est quand même 16 millions sur un plan financier quadriennal. Peut-être que ce sont des chiffres qui ne vous parlent pas dans la fonction publique, mais quand on est entrepreneur, qu'on doit réaliser du chiffre d'affaires, qu'on doit donner du travail à des gens, et, une fois qu'on a fait tout ça, se faire payer pour les rémunérer, je peux vous dire que 16 millions, c'est quelque chose de très important, et que le premier franc qu'on gagne, on le gagne à la sueur de son front et on est respectueux envers ses engagements. Alors non, ce n'est pas «que» 16 millions: oui, c'est 16 millions !
Ensuite, s'agissant de certains arguments... Alors là, c'est fantastique ! On entend parler de la baisse d'attractivité de la fonction publique. Mesdames et Messieurs, on entend parler de pénibilité pour des gardes-faune et gardes-chasse à 62 ans ! Des gens qui voudraient partir à 59 ans ! Est-ce qu'un ouvrier en bâtiment part à 59 ans ? La réponse est non: il part à 60 ans, avec des cotisations paritaires ! Alors ne me dites pas que la fonction publique n'est plus attractive ! Les gens qui travaillent dans le secteur de la restauration, de l'événementiel, de l'hôtellerie ont perdu leur travail au cours de ces dernières années ! Je pense que pour le cuisinier qui va à l'Etat, il y a encore une certaine attractivité ! Donc ne mélangeons pas tout, il faut aussi savoir défendre les salariés du privé ! Parce que vous créez une caste corporatiste ! Et quand on entend le raisonnement consistant à dire qu'il ne faut pas toucher les nouveaux emplois, parce que c'est une baisse de salaire... Mais soyez corrects ! Si le contrat ne vous convient pas, vous ne le signez pas ! Et vous n'allez pas dans la fonction publique, parce que les conditions ne vous conviennent pas ! Ce n'est donc pas une baisse de salaire, si vous n'avez pas signé le contrat ! Je laisse aussi certains responsables RH répondre: lorsque vous cherchez quelqu'un dans la communication pour une mairie ou à l'Etat, en général vous n'avez pas trois réponses, vous avez 450 réponses, et il y a un élu. Donc je pense que l'attractivité est encore bien là !
S'agissant de l'inégalité de traitement, alors là, c'est le pompon - si j'ose dire ! L'inégalité de traitement - ce n'est pas possible de traiter différemment les collaborateurs... Mais c'est ce qu'on fait à longueur d'année ! Toutes les personnes travaillant à l'Etat qui sont parties avec le PLEND, c'est une inégalité de traitement, parce que ce sont des droits acquis, et c'est juste ! C'est logique ! Il y a une période transitoire. Lorsque vous votez une loi, il y a toujours une période transitoire ! C'est donc parfaitement logique.
Maintenant, ce qui est affligeant - et là, je parle avec une casquette d'employeur, et ce n'est pas pour être contre les employés -, c'est que pour toute négociation - toute négociation ! -, vous n'entrez jamais en matière ! Ça veut dire que même pour un contrat qui n'est pas conclu... Comment voulez-vous qu'un employeur, représenté ici par le Conseil d'Etat - qu'il soit de gauche ou de droite, ce n'est pas mon problème: cela reste le représentant des employeurs...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Serge Hiltpold. Il ne peut pas entrer en matière sur des contrats non conclus ! Je vous demande donc simplement un petit peu d'honnêteté, de sortir du corporatisme et de voter pour l'ensemble des Genevois, pour l'ensemble des fameuses prestations qui doivent être délivrées. Je ne pense pas que les prestations soient péjorées parce que de nouveaux contrats auront un changement de taux de cotisation. Les personnes vont toucher exactement la même somme de retraite, simplement, on va se rapprocher un tout petit peu du 50-50 qui existe dans le secteur privé. Ce n'est absolument pas un plaidoyer contre la fonction publique, c'est simplement un plaidoyer contre le corporatisme, les acquis et un manque de vision, et je peux vous dire que cette problématique des caisses de pension va revenir sur le tapis très souvent, c'est un véritable problème. Pour toutes ces raisons, pour toutes et tous sans privilèges, nous vous demandons de soutenir ces projets de lois du Conseil d'Etat. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de première minorité. Pour conclure cette ronde des rapporteurs, je cède la parole au rapporteur de deuxième minorité sur les trois projets de lois, M. Olivier Cerutti.
M. Olivier Cerutti (PDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers députés et chères députées, le débat sur les restructurations de nos charges est très mal engagé, comme je l'ai dit dans mon rapport de deuxième minorité. On peut quand même se poser quelques questions sur ces trois caisses de pension.
Premièrement, s'agissant de la CPEG, comme cela a été relevé, on voit qu'on a obtenu aujourd'hui un chemin de croissance tout à fait cohérent par rapport aux objectifs qui avaient été fixés lors de la recapitalisation, qui s'est très bien réalisée. Tout cela pour vous dire que quand on entend les constantes qui ont été rappelées tout à l'heure, notamment sur ces mini réformettes, on peut simplement se dire une chose: faire des prévisions sur trente ans, c'est faire des prévisions qui ne sont certainement pas des certitudes absolues. D'ailleurs, cela a été très clairement indiqué par les représentants de la caisse de pension. Ils ont bien rappelé que cette perte de couverture de l'ordre de 0,9 milliard, qui pourrait avoir une potentielle répercussion sur trente ans, n'était finalement qu'une extrapolation. Oui, Mesdames et Messieurs: qu'une extrapolation.
Pour la caisse de pension de la police, le débat n'est pas terminé et ne va pas se terminer aujourd'hui. Nous voyons très clairement que cette caisse a besoin de réformes, et de réformes en profondeur. La vraie question qu'on peut se poser - c'est la deuxième - est la suivante: nous avons voté ici une loi à la demande notamment des gardiens de prison, pour que ceux-ci passent à la caisse de prévoyance des fonctionnaires de police. Sachez une chose: ce sont les pourcentages de cotisation qui sont intéressants. Or quand vous êtes affilié à la caisse de pension de la police, vous cotisez 33% de votre salaire - part patronale et part employé - et quand vous êtes affilié à la CPEG, vous cotisez à 27%. Je n'ai pas très bien compris, mais certainement qu'au vu de ces chiffres et de la solidité de la caisse de pension de la police, une recapitalisation sera inévitable et il faudra trouver des solutions.
Je reviendrai maintenant sur l'aspect qui est le plus important à mes yeux, à savoir les relations entre l'employeur et l'employé. Ici on parle du Cartel intersyndical, de l'ensemble des syndicats qui sont venus s'exprimer devant nous. Malheureusement, on constate que les gens ne sont plus capables de s'écouter. Ça devient compliqué, quand plus personne n'est capable d'écouter celui qui a quelque chose à lui dire, quand on ne veut surtout pas l'entendre et qu'on vient par-dessus tout pour continuer un combat - qui est vide de sens, parce qu'il n'est pas objectif, il est subjectif et orienté en fonction de son porte-monnaie, donc pas vers l'objectif d'offrir des prestations, mais bien en fonction de ce qu'on va toucher à la fin de sa carrière professionnelle.
On a aussi pu demander au Conseil d'Etat quelle était la rente de sortie de la fonction publique dans les différents cantons suisses, de façon à avoir une véritable comparaison, notamment du point de vue du taux de cotisation. On sait en effet que ce taux de cotisation est très différent d'un canton à l'autre. Mais même si le taux de cotisation est élevé et que la rente en francs touchée à la sortie est finalement plus basse qu'avec un taux de cotisation moins élevé, ça reste des mathématiques ! Il est donc quand même intéressant d'avoir ce retour de la part du Conseil d'Etat, afin de mieux saisir quelles sont en Suisse les rentes distribuées à l'ensemble de la fonction publique d'un canton à l'autre.
La grande déception aujourd'hui, c'est de se rappeler que le budget 2021 a nécessité une concertation, que, dans cette concertation, nous avons émis un certain nombre de demandes et que, lorsque nos premières demandes sont arrivées sur le papier, il n'y avait plus personne ! Oui, Mesdames et Messieurs, j'ai eu l'occasion de dire que les promesses rendaient fou. Mais aujourd'hui, si la droite n'a plus envie de discuter, c'est bien parce qu'on nous a fait des promesses et que même les promesses les plus infimes qui étaient demandées, on n'est aujourd'hui pas capables de les mettre en oeuvre. C'est une grande déception pour les gens qui ont voté le projet de budget 2021. C'était un accord moral. Mais un accord moral peut être plus fort qu'un accord, et là, on voit que les promesses rendent fou, parce que même sur le dénominateur le plus faible, c'est-à-dire sur des nouveaux contrats, on n'arrive pas à se mettre d'accord. Le parti démocrate-chrétien vous demandera d'accepter ces trois projets, qui sont un tout petit pas. Je vous remercie de votre écoute. (Applaudissements.)
M. Eric Leyvraz (UDC). Je trouve que les blocages dans ce parlement sont affligeants. On demande quoi ? On demande simplement que, pour les nouveaux employés de l'Etat - je ne vais pas répéter tout ce qui a été dit -, les règles changent. Pour tous ceux qui sont déjà là, les règles ne changent pas. Alors évidemment que cela représente peu d'argent au départ, mais d'ici dix à quinze ans, cela représentera de grosses sommes. Il faut qu'enfin on fasse quelque chose pour retrouver des normes qui soient équivalentes à ce que l'on connaît en Suisse. Il n'y a qu'à Genève qu'on a un taux de répartition de deux tiers-un tiers. La moyenne suisse, c'est ce qu'on demande dans ce projet de loi: 42%-58%. Je ne vois pas pourquoi une fois de plus Genève serait une exception et pourquoi on ne pourrait pas faire comme les autres. C'est quand même assez extraordinaire ! On serait dans un Etat qui connaîtrait des chiffres noirs chaque année, on pourrait encore l'accepter, mais quand on voit où on en est aujourd'hui, c'est tout simplement inacceptable ! Il faut absolument qu'on accepte maintenant de mettre en place des changements au sein de cette fonction publique.
Evidemment que dans ce parlement, il y a beaucoup de fonctionnaires, et dès qu'on commence à toucher à la fonction publique, c'est un non d'office, on ne réfléchit même pas, c'est non d'avance. Je rappelle quand même que dans le temps, on était soit fonctionnaire, soit député, on ne pouvait pas être les deux. Je pense que c'était très sage ! Voilà.
Je ne veux pas rallonger trop cette intervention concernant ces projets de lois qui vont être refusés bien entendu, comme on le sait. Je regrette évidemment que pour une fois que le Conseil d'Etat nous présente un projet de loi structurel pour essayer d'économiser un peu d'argent, celui-ci va être refusé. Je remercie le Conseil d'Etat d'avoir présenté ces projets. L'UDC, à ma grande stupéfaction, n'est pas unanime concernant ces objets. En ce qui me concerne, je les voterai, tout comme d'autres de mes collègues. Je vous remercie.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, les recherches du Conseil d'Etat pour essayer de trouver des économies, sur le fond, au départ, sont louables. Simplement, la question est la suivante: est-ce que ces projets de lois vont véritablement amener des économies ? Il semble que selon les experts des caisses, les actuaires, ce ne sera pas le cas ! L'Etat employeur va réaliser quelques économies avec cette mesure, mais celle-ci va, à terme, à nouveau mettre à mal le taux de capitalisation des caisses. On cherche quoi, finalement ? On se cache les yeux, on va de l'avant, on fait quelques économies et on ne se préoccupe pas de savoir s'il faudra à un moment donné recommencer la saga ? Vous voulez recommencer avec toutes les caisses la crise que nous avons connue avec la CPEG ? La CPEG, bien sûr, celle de la police et celle des TPG ? Eh bien non ! Je pense que c'est une fausse bonne idée, si on peut appeler ça encore une bonne idée. Finalement, si à terme on doit remettre près d'un milliard dans les caisses, comment est-ce qu'on va les financer ? Ce n'est donc pas raisonnable, ce n'est pas une solution pérenne et à long terme; cela va pénaliser évidemment les nouveaux employés qui seront engagés avec des conditions moins bonnes et, en tout cas dans certaines catégories, notamment au sein de la police, cela posera des problèmes de recrutement.
Mais bon, tout cela, on peut en discuter. Il est vrai. Il est vrai que dans le privé, dans la plupart des entreprises, surtout les PME, c'est 50-50, mais bon, c'est le minimum de la loi, Mesdames et Messieurs les députés ! C'est le minimum de la loi ! C'est exigé par la LPP, la loi fédérale ! Il y a quand même quelques grandes entreprises de la place économique genevoise et en Suisse où la répartition est aussi un tiers employé, deux tiers employeur - voire plus encore dans certaines catégories. Il ne faut donc pas être monolithique. C'est vrai qu'une petite entreprise ne peut peut-être pas se le permettre. L'Etat a mis en place il y a longtemps cette répartition de deux tiers-un tiers; la modifier, c'est de nouveau affaiblir - je l'ai déjà dit - l'équilibre financier des caisses. C'est donc une mauvaise idée. Le MCG refusera ces trois projets de lois - 13021, 13022 et 13023 - car ce n'est pas une bonne solution. Merci.
M. Alberto Velasco (S). Monsieur le président, j'aimerais m'adresser à M. Hiltpold, parce que, tout à l'heure, il a parlé de ces 5,6 milliards, regrettant presque qu'on ait dû verser ce montant. J'aimerais dire que c'est à cause de la majorité de droite au Parlement à Berne, qui a exigé que les caisses publiques soient capitalisées à 80%. Une caisse comme celle de l'Etat de Genève, qui elle, avait la garantie... A l'époque, on n'avait pas besoin d'aller à ce rythme. Mais c'est à cause de ce vote de votre majorité qu'on s'est trouvé à devoir verser cette somme-là. Il faut que les choses soient dites: ce n'est donc pas du tout la gauche qui a revendiqué à travers des manifestations le versement de 5,6 milliards.
Ensuite, je regrette que vous preniez toujours des références a minima quand il s'agit des travailleurs, qu'ils soient du secteur public ou privé. Cette répartition de deux tiers-un tiers a été, je pense, négociée avec le Conseil d'Etat de l'époque. Et vous voulez maintenant qu'on revienne en arrière ! C'est quand même incroyable ! Et vous critiquez le personnel de l'Etat parce qu'il ne veut pas revenir en arrière ! Mais enfin, chaque fois qu'on veut vous prendre un peu d'impôts, vous gueulez ! Eh bien pour eux, c'est la même chose ! Chaque fois qu'il y a une initiative pour augmenter les impôts des gens que vous protégez, vous êtes contre et vous gueulez à tort et à travers ! Eh bien c'est normal que les travailleurs, chaque fois que vous voulez leur prendre quelques sous, ils gueulent aussi ! Il est donc tout à fait logique qu'ils défendent ce deux tiers-un tiers. Ce n'est donc pas une attitude anticitoyenne, qui refuserait de voir la catastrophe dont nous sommes... Je tiens à vous dire quand même que notre Etat est très riche, en comparaison à d'autres. Il faut le reconnaître ! Quand on a un PIB de 55 milliards, on ne peut pas vraiment dire qu'on est dans la dèche, hein !
Voilà, Mesdames et Messieurs, je ne comprends pas qu'on veuille à tout prix ratiboiser ces deux tiers-un tiers et qu'on s'étonne que les gens luttent pour essayer de le conserver. Les socialistes voteront donc pour le maintien des deux tiers-un tiers. Merci.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Je vais me concentrer aujourd'hui sur un seul aspect qui a déjà été mentionné par la droite et la gauche, mais avec des arguments un peu plus étayés que ceux qui consistent à dire: les nouveaux venus n'ont qu'à faire avec une nouvelle façon de fonctionner, avec un nouveau contrat, tant pis pour eux, ils n'avaient qu'à venir avant. Cette discrimination envers les nouvelles et les nouveaux employés qui intègrent la fonction publique est tout simplement inacceptable et cette situation a déjà pu être relevée dans d'autres cas, où d'ailleurs le PDC avait compris cette problématique et avait décidé de la résoudre. On ne peut pas dire que des personnes qui entrent dans la fonction publique après la négociation de nouveaux contrats n'ont qu'à faire avec parce qu'elles savaient à quoi s'attendre, que leur salaire net allait être réduit par rapport à celui de leurs collègues. Cette façon de fonctionner ne peut tout simplement pas exister dans la fonction publique. C'est peut-être vrai pour des informaticiens, pour des juristes, pour des personnes qui travaillent dans les métiers administratifs: il est possible de dire qu'ils ont cette option A lorsqu'ils vont travailler à l'Etat, cette option B lorsqu'ils vont travailler dans le privé, mais ce n'est pas vrai pour une grande partie de la fonction publique, car certaines personnes, dès leur formation, dès le début dans la carrière, se destinent à travailler dans la fonction publique, tout simplement parce que le marché actuel les y pousse. C'est le cas notamment des enseignants, ainsi que d'autres fonctions, qui, dans le marché réduit de Genève, se retrouvent au sein de la fonction publique, tout simplement en raison - je ne vais pas vous l'expliquer - de l'offre et de la demande.
Il est inacceptable que des personnes qui viennent d'arriver dans la fonction publique et qui effectuent exactement les mêmes tâches que leurs collègues se retrouvent payées avec des réductions considérables et des salaires sensiblement différents de ceux de leurs collègues, je répète, pour le même travail. Si cette discrimination ne vous choque pas, eh bien je me dis que vous avez peut-être l'habitude de les perpétuer sous la forme de discrimination du genre ou bien du sexe, de l'âge ou de l'origine... (Commentaires.) ...et qu'il y a beaucoup de choses à faire au sein du privé. Par ailleurs, ce n'est pas parce que le privé maltraite ses employés que l'Etat doit faire de même. Les personnes qui arrivent dans la fonction publique après leurs collègues méritent les mêmes conditions, tout simplement parce qu'elles effectuent le même travail à un instant «t». Or elles se retrouvent avec une diminution de salaire. C'est tout bonnement inadmissible.
Je reviens très brièvement sur la discussion déjà menée concernant la caisse de pension de la police et la CPEG, notamment avec les agents de détention qui effectuaient le même travail sur le terrain que d'autres de leurs collègues et qui se retrouvaient avec des conditions différentes. Lors de la discussion autour du PL 12049, ce Grand Conseil a fait le choix de corriger cette situation d'inégalité, de discrimination, de donner la possibilité aux personnes qui le souhaitaient de revenir dans la caisse de pension qui correspondait à celle de leurs collègues et donc de revenir à une situation où elles seraient traitées de la même manière que leurs collègues.
Je reviens sur la question du conflit d'intérêts. Ce n'est pas parce qu'on est à gauche et qu'on défend la fonction publique qu'on travaille dans la fonction publique; de même, ce n'est pas parce que vous êtes à droite et que vous êtes peut-être des employeurs que vous avez le monopole de cette casquette d'employeurs. Vous savez, à gauche, il y a aussi des personnes qui emploient d'autres personnes ! C'est une question de valeurs. Donc au bout d'un moment, arrêtez de nous mettre cette casquette de personnes privilégiées qui votent pour un privilège qui doit être maintenu au sein de la fonction publique ! C'est tout bonnement faux ! Je vous remercie de mieux connaître vos collègues, qui ne travaillent pas toutes et tous dans la fonction publique, mais qui la défendent pour des raisons d'équité et d'égalité, tout simplement. C'est notamment mon cas. Ce n'est pas en disant «mesurette», «réformette», «petits pas», «tout petits pas», qu'on va nous faire avaler cette pilule qui ne passe pas ! C'est une discrimination, la perpétuation d'une situation inéquitable envers d'autres personnes, qui font - je le répète, parce que c'est choquant - le même travail.
Pour finir, s'agissant de cette relation d'employeurs et d'employés qui ne fonctionne plus, des personnes qui n'arrivent plus à s'écouter, c'est vrai: les gens n'arrivent plus à s'écouter. Je suis contente de vous l'entendre dire, Monsieur Olivier Cerutti. Eh bien, c'est aussi votre cas ! Vous n'écoutez pas les personnes qui sont sur le terrain. Vous n'écoutez pas les personnes qui demandent des renforts, qui ont besoin de tel ou tel poste. C'est d'ailleurs le cas parce que vous ne votez pas le budget, alors même que les interlocuteurs et les interlocutrices que nous avons entendus nous ont dit cash: «Nous avons besoin de renforts, nous avons besoin de x francs pour accomplir nos tâches et les mandats que nous délègue le Grand Conseil.» C'est notamment le cas avec les investissements, mais c'est un débat que nous allons mener plus tard. Je vous invite à refuser ces projets de lois et vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
M. Cyril Aellen (PLR). Je n'aurai manifestement pas assez de temps pour revenir sur les erreurs factuelles qu'on a entendues. Je vais commencer, et je poursuivrai à l'occasion du budget, parce qu'on aura un peu plus de temps.
La première chose que je souhaiterais dire, c'est qu'avec des projets de lois comme ceux-ci, on ne vient pas avec des propositions a minima: on veut juste se mettre dans la norme du pays le plus riche du monde, la Suisse. C'est pour ça qu'on ne veut pas faire du 50-50, avec un projet de loi comme celui-là, mais du 58-42 - 58 étant la part payée par l'employeur. C'est le premier point. En réalité, ce qu'on veut défendre avec ce projet de loi, c'est: pour tous, sans privilèges.
Deuxièmement, on mentionne qu'il y a une perte d'attractivité. Pour savoir si on perd ou si on gagne de l'attractivité, il faut regarder si les gens quittent la fonction publique pour aller vers le privé ou quittent le privé pour aller vers la fonction publique. Ainsi, on arrive à distinguer le secteur attractif de celui qui ne l'est pas. Prenez le bilan social, vous constaterez que les gens arrivent massivement à l'Etat en cours de carrière, mais ne quittent pas massivement l'Etat pour le secteur privé. Si on analyse froidement la situation pour savoir quel est le secteur le plus attractif, on est donc obligé de constater, en lisant sérieusement les documents produits par l'Etat, que c'est le secteur public plutôt que le secteur privé.
Ensuite, certains parlent de l'équilibre financier de la caisse. C'est une erreur, ils se trompent: ils confondent deux notions. L'équilibre de la caisse, c'est l'équilibre entre les entrées et les sorties, notamment au niveau des rentes. La répartition de la cotisation ne touche pas l'équilibre de la caisse. Ce qui est touché, c'est le taux de capitalisation, qui est calculé en fonction de deux choses, à savoir les rentes projetées, qui ne sont pas modifiées, et le capital de prévoyance deuxième pilier que pourrait prendre avec lui un employé qui déciderait en cours de carrière de quitter son emploi au sein de la fonction publique. Et, oui, le projet de loi, avec une nouvelle répartition des cotisations, améliore la situation des employés de l'Etat; par voie de conséquence, le capital de libre passage dont un employé pourrait bénéficier s'il quittait son emploi est plus élevé et nécessite donc un taux de couverture plus grand, qui ne met pas en péril la caisse, mais c'est un calcul qui se fait différemment. Ainsi, en réalité, oui, il faudrait légèrement - parce que ce n'est pas beaucoup - augmenter la capitalisation pour permettre une prestation supplémentaire à l'employé. C'est pour cela qu'il faut un taux de couverture supérieur.
J'ai entendu dire qu'il s'agissait d'une trouvaille de la droite. J'observe que ce projet de loi a été déposé par un Conseil d'Etat à majorité de gauche, mais je ne pense pas qu'il s'agisse d'une trouvaille de droite ou d'une trouvaille de gauche: il s'agit d'un projet de loi structurel déposé par un gouvernement responsable qui n'est ni de droite ni de gauche, mais qui représente l'intégralité de nos citoyens.
On a parlé de risque pour l'Etat; puisqu'il y a le même nombre de francs qui rentrent que de francs qui sortent, il n'y a pas de risque accru. C'est un mensonge de le dire. Ce débat aura eu au moins un mérite: j'ai entendu M. Baertschi, représentant du MCG, nous expliquer et nous rappeler qu'il ne fallait pas qu'on se fasse de souci, parce que la caisse de pension de la police n'était pas garantie par l'Etat. Je le répète: il ne faut pas qu'on se fasse de souci, parce que la caisse de pension de la police n'est pas garantie par l'Etat. Je le dis une troisième fois: il ne faut pas qu'on se fasse de souci, parce que la caisse de pension de la police n'est pas garantie par l'Etat. Quand on rediscutera du taux de couverture de la caisse de pension de la police, je lui ressortirai cette phrase-là ! C'était ce que je voulais vous dire.
Ensuite, j'aimerais rectifier les propos de mon collègue PLR Serge Hiltpold, qui s'est trompé: il parlait d'une recapitalisation de la caisse de 5,4 milliards. C'est partiel: en fait, il y avait encore en 2013, au moment de la fusion, 6,4 milliards. Cela a donc été 6,4 milliards plus 5,4 milliards. En tout cas, cela méritait d'être rappelé. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
Enfin, et je m'arrêterai là pour l'instant, Monsieur le président - merci de sonner la cloche pour les trente secondes restantes, je m'y tiendrai -, quand Alberto Velasco, notre collègue - vous transmettrez - vient nous expliquer que c'était la faute de la droite, qui a augmenté le taux de couverture, il faut qu'il choisisse: soit il considère que ce taux de couverture exigible est quelque chose de bien, et à ce moment-là, ce projet de loi est bon; soit il considère que ce n'est pas bien, et ce projet de loi est mauvais. Mais il ne peut pas dire les deux choses ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je transmettrai ! Je rends la parole à M. le rapporteur François Baertschi pour trois minutes et vingt-six secondes.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Cela me permettra de rétablir certains éléments factuellement inexacts lancés par les députés PLR. D'abord, je n'ai jamais dit que la caisse de pension de la police n'avait pas de souci à se faire. La seule chose que j'ai dite, c'est qu'elle était bien gérée, que son taux de couverture était de 109%, ce qui est tout à fait appréciable, et que ce taux n'était pas le même que celui de la caisse de pension de l'Etat. Ce sont deux éléments différents, qui n'ont pas été mis dans l'ordre, et ce avec - comment dire ? - une honnêteté intellectuelle un peu limitée, par le député PLR, mais il utilise ce type de procédé de façon habituelle.
J'aborde un autre élément soulevé par un autre député qui nous disait: 16 millions, c'est une somme importante. Mais alors qu'en est-il des centaines de millions que va coûter la mesure sur laquelle nous devons voter aujourd'hui ? C'est une véritable catastrophe, à ce moment-là ! Les millions ont tous la même valeur, il s'agit juste de se placer dans le temps, mais là, on peut se placer comme on veut, et certains disent un peu n'importe quoi. La seule chose, c'est qu'on veut détruire un équilibre, on le fait de manière tout à fait malhonnête. Il y a de la malhonnêteté de la part du Conseil d'Etat - je persiste et signe - à aller dans cette direction: on peut mener une politique de gauche, de droite, une politique diverse, mais on ne peut pas agir de cette manière tout à fait déloyale envers le Grand Conseil et la population. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je rends la parole à M. le rapporteur Jean Burgermeister, qui s'exprime sur le temps de son groupe.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais corriger quelques inexactitudes des deux rapporteurs de minorité, qui se sont plaints du fait qu'il n'y avait plus de négociations possibles avec les salariés du secteur public. Mais, Mesdames et Messieurs, quand vous venez voir les représentants du personnel et que vous leur proposez une baisse des salaires sans rien en contrepartie, une baisse des retraites sans rien en contrepartie, ce ne sont pas des négociations ! Et aucun salarié, ni dans le public ni dans le privé, n'est censé accepter a priori qu'on lui baisse son salaire ou qu'on dégrade ses conditions de retraite. Par ailleurs, il est faux de dire que les négociations n'aboutissent jamais ! Je vais devoir me répéter, je l'avais pourtant déjà dit en commission, et Mme Bayrak a raison: si M. Cerutti se plaint que personne ne l'écoute, c'est avant tout parce que lui-même n'a pas écouté durant les travaux, probablement.
En ce qui concerne la FPTPG, il y a eu des discussions, il y a eu un compromis, je le rappelle ! La part patronale des cotisations LPP a été fixée à 69% précisément en contrepartie des efforts des salariés, c'est-à-dire: hausse d'un an de l'âge du départ à la retraite; passage en primauté hybride et baisse de 10% des rentes en moyenne. Ça, c'était en 2014. En 2017, les salariés ont de nouveau accepté, subi, une baisse des rentes de l'ordre de 10% en moyenne. Par conséquent, il y a eu un accord, il y a eu un compromis et des sacrifices importants de la part des salariés. Or c'est précisément sur la seule et unique contrepartie que la droite et le Conseil d'Etat veulent aujourd'hui s'asseoir, ce qui montre bien que ce regret de l'absence de négociations n'est qu'un prétexte. Lorsqu'il y a des négociations, c'est la droite qui s'apprête à revenir dessus.
Et puis, on nous dit que dans le privé, le taux de cotisation, c'est 50-50: 50% employeur, 50% employé. Mais c'est faux ! La moyenne dans le privé est de l'ordre de 60-40. (Rire.) Et pourquoi en réalité la droite invoque-t-elle ce taux de répartition 50-50 ? Parce que c'est l'objectif de la droite aussi pour les caisses de pension publiques ! Un député PLR - que je ne citerai pas, par égard pour M. Aellen - nous a dit en commission qu'ils voteraient ce projet de loi, mais qu'il ne fallait pas s'y tromper, parce que cela ne veut pas dire qu'ils considèrent qu'il est suffisant, et qu'ils souhaitaient évidemment aller vers un taux de répartition 50-50. Avec un taux de répartition 50-50, on est sûr que le chemin de croissance de la recapitalisation ne sera pas atteint. Et cela démontre bien, Mesdames et Messieurs, que le PLR veut simplement prendre prétexte de ce qui se fait de pire pour imposer à la fonction publique précisément ce qui se fait de pire. La réponse de M. Hiltpold, qui disait que, dans le fond, tous ces problèmes-là n'en seraient pas si on avait un système de primauté de cotisations et non pas de prestations - il a commencé son intervention par cela, c'était frappant -, démontre bien l'objectif de ces projets de lois et démontre bien l'objectif de celles et ceux qui vont les voter ce soir. Car ces projets de lois ne permettent pas a priori de passer en primauté de cotisations; ce n'est pas ce qui est écrit dans le texte, ce n'est pas ce que nous votons. Maintenant, ce qu'espère la droite, c'est précisément qu'avec ce petit coup de couteau, l'hémorragie se propagera dans les années à venir, mettra à terre les caisses de pension publiques et permettra alors à la droite de passer en force pour introduire la primauté de cotisations et baisser les rentes de l'ensemble du secteur public. Voilà, Mesdames et Messieurs, ce qui se cache derrière l'acceptation de ces projets de lois - et je regrette tout autant que M. Aellen qu'ils aient été déposés par un Conseil d'Etat à majorité PS-Verts.
Et puis, pour finir, une réponse à M. Cerutti qui disait que finalement, les projections sur trente ans, ce ne sont que des extrapolations. Quand la CPEG nous dit qu'elle risque de perdre 900 millions sur la couverture d'ici 2052, ce n'est pas certain, et il a raison: ce n'est pas certain ! C'est une extrapolation basée sur la situation actuelle, qui est plutôt bonne pour les caisses de pension publiques, voire très bonne. Il est tout à fait possible, tout à fait probable que vu la difficulté de se projeter sur trente ans et vu les risques importants qui planent au-dessus des caisses de pension, les manques pour la CPEG en recapitalisation soient bien davantage supérieurs à 900 millions, un chiffre basé sur une projection, toutes choses étant égales par ailleurs, et bien supérieurs aux 35 millions estimés par le Conseil d'Etat lui-même sur la base d'une situation similaire à celle que nous connaissons. Alors le risque est grand, le risque est très grand que les manques à gagner et que les besoins de recapitalisation soient bien supérieurs à ce qui a été chiffré et qu'ils se chiffrent donc en centaines de millions ou en milliards, bien avant 2052 même. J'ai terminé, Monsieur le président.
M. Olivier Cerutti (PDC), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, vous transmettrez aux personnes qui me font beaucoup de publicité ce soir que je ne leur répondrai pas, parce que je ne fais pas de la politique pour moi, je fais de la politique pour nos concitoyens.
Cela étant dit, s'agissant des extrapolations, celles-ci ont été réalisées par des actuaires. Chaque caisse a fait ses propres extrapolations, réalisées par des actuaires. Faire des extrapolations sur trente ans, cela reste quelque chose de très flou. Cela ne reste que des extrapolations.
J'aimerais, pour terminer ce débat, rappeler qu'il y a eu une votation il y a maintenant deux semaines, où les Vert'libéraux ont proposé de supprimer les parachutes dorés du Conseil d'Etat. Aujourd'hui, si nous n'arrivons pas à ajuster les rentes de la fonction publique, il est fort probable que cette même population qui a accepté cette initiative traite la fonction publique comme elle a traité le Conseil d'Etat. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe la parole à M. le rapporteur de majorité François Baertschi pour trois minutes et dix-sept secondes.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais insister sur un élément très important. On a parlé du problème pour les employés, du problème d'équité, d'égalité, des comparaisons avec d'autres cantons, de tout un ensemble d'éléments théoriques, mais moi, je me place du point de vue du contribuable, qui est quand même le grand oublié dans l'examen de ces projets de lois. Et je ne parle pas du contribuable actuel, je parle de celui dans dix, vingt, trente ans, et de ce que nous allons laisser aux générations futures, c'est-à-dire notre absence de sens des responsabilités, parce que c'est un mécanisme qui ne va pas apparaître immédiatement: le Conseil d'Etat actuel, à la rigueur même l'équipe suivante, ou les équipes qui suivront, ne seront pas elles-mêmes visées par cela, mais ce seront les équipes qui viendront ensuite qui, elles, vont devoir faire face à un mécanisme sournois, dangereux, qui pousse vers un affaiblissement du financement des caisses de pension.
Pourquoi ? Parce que ces caisses de pension ont été développées sur un principe d'un tiers-deux tiers. Si on veut changer ce système, on peut le faire, pourquoi pas ? Mais on ne doit pas le faire uniquement pour équilibrer un budget ou un plan financier quadriennal ! Je regrette ! Je regrette de le dire, il y a une part d'amateurisme, j'aimerais bien ne pas le dire, mais je suis contraint de l'exprimer dans ce Grand Conseil. Cet amateurisme risque de mettre en péril les caisses de pension à l'avenir. Il faut écouter les actuaires, les experts des caisses ! Ce sont eux qui décident de l'équilibre de ces caisses. Ce sont eux. Nous sommes dans une logique spéculative, mais c'est une logique qui est celle du deuxième pilier, la logique des caisses de pension. Nous devons nous inscrire dans cette logique-là pour ne pas les flinguer, pour ne pas ensuite laisser un héritage catastrophique aux générations à venir ! C'est pour cela qu'on ne peut pas, comme ça, en marge d'un budget, pour l'équilibrer, prendre des décisions qui sont si importantes ! Aux députés de certains groupes qui hésiteraient à voter ces trois projets de lois, j'ai même envie de dire: faites attention ! Ne prenez pas ce risque ! Vous prenez un risque pour l'avenir de ce canton.
C'est la raison pour laquelle d'ailleurs, Monsieur le président, je demanderai le vote nominal sur les trois objets. Il est important que chacun se détermine pour l'avenir, pour l'histoire de notre canton, sur la position qu'il aura prise ce soir. C'est pour cela que je vous demande le vote nominal, Monsieur le président.
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, vous l'êtes. Les trois votes d'entrée en matière se feront donc à l'appel nominal. Monsieur Sormanni, il ne reste plus de temps au groupe MCG. Madame la rapporteure de majorité Caroline Marti, vous avez la parole.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il apparaît de ce débat que nous n'arriverons pas, et c'est bien normal, à nous mettre d'accord sur un certain nombre de problématiques qui émanent de ce projet de loi. La première, c'est celle de l'inégalité de traitement. Aux yeux de la majorité, deux personnes qui effectuent le même travail mais qui ne touchent pas le même salaire, c'est un cas évident d'inégalité de traitement. Apparemment, la droite ne l'entend pas de cette oreille.
Nous ne pourrons manifestement pas nous mettre d'accord non plus sur le fait que cette baisse de salaire - parce que c'est une baisse de salaire - de près de 2% ne constitue pas une dévalorisation de la fonction. Pour nous, oui, évidemment qu'il s'agit d'une dévalorisation de la fonction d'infirmier, d'infirmière, d'éducateur et d'éducatrice sociaux, d'enseignant, puisqu'on leur demande d'effectuer exactement le même travail pour un salaire inférieur. C'est véritablement dévaloriser leur fonction et leur mission.
Mais il y a peut-être un point sur lequel nous devrions pouvoir nous mettre d'accord - même si, au vu de ce qui ressort de ce débat, cela semble difficile -, ce sont les chiffres. Ce sont les risques financiers qui ont été relevés, je le rappelle une nouvelle fois, par l'expert agréé de la caisse, et qui ont également été relevés par l'assemblée des délégués de la CPEG. Celle-ci s'est prononcée à l'unanimité, moins une abstention, en défaveur de ce projet de loi, puisqu'elle avait bien compris les risques que cela faisait courir à la caisse. Or aujourd'hui, la posture de la droite qui s'obstine à vouloir aller de l'avant avec ce texte malgré ces risques financiers considérables, majeurs pour la caisse et, partant, pour le canton de Genève, signifie une chose: il s'agit d'une posture purement dogmatique et anti-fonctionnaires. S'attacher à cette posture-là en dépit des risques qu'elle fait courir aux finances de notre canton et à la stabilité financière de la caisse est proprement irresponsable, raison pour laquelle nous vous invitons une nouvelle fois à refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Olivier Cerutti (PDC), rapporteur de deuxième minorité. La nature des risques... Mesdames et Messieurs, regardez la caisse de pension de la police: aujourd'hui, on a un taux technique de 2,5%, avec un taux de couverture de 109%. Le taux technique doit être ramené à 1,75%, voire à 1,5%, et cela nous fera passer sous la barre des 100%. Dont acte. Oui, là, il y a un vrai risque !
Au-delà de ce risque, j'aimerais quand même rappeler qu'on ne se bat pas contre la fonction publique: on vous rappelle simplement que la fonction publique à Genève a le salaire le plus élevé de Suisse ! Et que cela pose même des problèmes en lien avec les subventions de la Confédération: la moyenne de nos salaires est tellement élevée que, dans le cadre de l'octroi de subventions, ne serait-ce que pour l'Université de Genève, eh bien on ne peut pas toucher l'entier de la subvention à laquelle on a droit, parce que nos salaires font déplafonner les coûts réels nécessaires. J'en ai terminé, Monsieur le président.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, plusieurs éléments ont été relevés. D'abord, j'aimerais, comme cela a été fait, rappeler que ce sont des projets de lois déposés par le Conseil d'Etat; que ce ne sont pas des projets de lois de droite ou de gauche. Ce sont trois objets qui émanent du gouvernement.
Ensuite, j'aimerais souligner que les risques financiers graves auxquels vous vous êtes référés n'ont pas été considérés comme tels. Le Conseil d'Etat n'a pas élaboré ces projets de lois au coin d'une table. Il avait commencé par préparer trois textes qui prévoyaient une application à l'ensemble des collaborateurs et collaboratrices. Il avait échangé à leur sujet avec les différentes caisses, mais aussi avec les associations représentatives du personnel, et il en était ressorti une opposition totale, raison pour laquelle le Conseil d'Etat a décidé de revenir à des textes qui ne prévoyaient d'effet que sur les nouvelles collaboratrices et les nouveaux collaborateurs.
Et alors là, je vous avoue être extrêmement surprise des différentes déclarations que j'ai entendues selon lesquelles le fait que deux personnes effectuent le même travail et ne touchent pas exactement le même salaire, ce serait de l'iniquité. Mesdames et Messieurs les députés, c'est le cas tous les jours au sein même de l'Etat. J'en veux pour preuve le système de l'annuité, qui fait que deux personnes peuvent exercer tous les jours exactement le même travail au même poste et ne pas recevoir le même salaire. Je crois qu'il est quand même important de le rappeler. Heureusement, chacun a ses spécificités, et chaque collaboratrice et collaborateur a des spécificités liées à son parcours, liées au moment auquel elle ou il a rejoint l'Etat. Or justement, ces trois projets de lois avaient pour conséquence qu'ils ne touchaient que les nouvelles et nouveaux collaboratrices et collaborateurs.
Ensuite, Mesdames et Messieurs, vous nous faites un procès d'intention: c'est un grand fantasme que de dire que le Conseil d'Etat entend faire péricliter les trois caisses. Je vous rappelle que nous avons une garantie de l'Etat. Nous n'aurions donc aucun intérêt à faire péricliter les trois caisses. Les risques financiers ont été jugés mesurés et non pas importants voire très importants, contrairement à ce que vous avez prétendu.
Par ailleurs, j'aime beaucoup - vous savez que ce sont des mots qui me font chaud aux oreilles - lorsqu'on dit penser au contribuable, et je me réjouis véritablement d'entendre qu'un groupe pense très fort au contribuable. Mais s'il y a un groupe aujourd'hui qui ne peut pas tenir ces propos, c'est bien celui-là. Parce qu'il est inconséquent: effectivement, il s'oppose à toute augmentation d'impôts - et dans le présent contexte, il pense au contribuable -, mais dans le même temps, il vote l'ensemble des augmentations de prestations. Et c'est cela qui fait qu'aujourd'hui nous nous trouvons dans des situations budgétaires problématiques. Or, que ce soient les groupes de gauche ou ceux de droite, vous avez une ligne: s'agissant de la droite, vous ne souhaitez pas d'augmentation de prestations et vous refusez toute augmentation d'impôts; s'agissant de la gauche, vous souhaitez une augmentation des prestations et vous êtes prêts à augmenter les impôts. Alors qu'un groupe ne vienne pas nous faire la leçon sur ce qu'il faudrait faire en matière de pensée ou de soutien au contribuable !
Et puis, Mesdames et Messieurs, je vais me permettre un coup de gueule. Les mots ont une signification, ils ont un poids, et on ne peut pas prendre le Conseil d'Etat comme punching-ball. Traiter à deux reprises le Conseil d'Etat de malhonnête, c'est tout simplement inacceptable ! Jamais le Conseil d'Etat ne s'est permis de traiter des députés de malhonnêtes, et je pense que nous ne pouvons pas entamer aujourd'hui deux jours de débats avec de tels propos ! Je souhaiterais qu'ils ne se répètent pas au cours de la session. Le Conseil d'Etat n'est pas malhonnête dans le cadre de l'établissement de ces projets de lois; il a à coeur l'intérêt des fonctionnaires, sans lesquels il ne serait rien. Il faut rappeler que sans nos équipes, sans les collaboratrices et les collaborateurs de l'Etat, nous ne pourrions mener aucune politique publique. Nous ne sommes donc pas malhonnêtes lorsque nous déposons des projets de lois.
Le Conseil d'Etat continue de soutenir ces trois objets et vous remercie de bien vouloir les accepter. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13021 est rejeté en premier débat par 54 non contre 39 oui et 2 abstentions (vote nominal).
Mis aux voix, le projet de loi 13022 est rejeté en premier débat par 51 non contre 40 oui et 3 abstentions (vote nominal).
Mis aux voix, le projet de loi 13023 est rejeté en premier débat par 52 non contre 40 oui et 2 abstentions (vote nominal).
Premier débat
Le président. Nous passons au PL 13020-A, classé en catégorie II. Pour le débat d'entrée en matière, chaque rapporteur, chaque groupe et le Conseil d'Etat ont cinq minutes de temps de parole. Je cède sans plus attendre la parole, s'il veut bien la demander, à M. le rapporteur de majorité Cyril Aellen.
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'ai la rude tâche, après le premier vote partiel négatif de ce budget du fait de la gauche - on a appelé cela des projets de lois connexes, mais ils faisaient partie intégrante de ce budget au sens du Conseil d'Etat et ont été refusés par la majorité gouvernementale -, d'être le porte-parole d'une majorité de commission qui, je dois bien l'avouer, est assez hétéroclite. Nous avons tout d'abord un parti qui refuse tout et ne propose rien: l'UDC; nous avons un parti qui propose certaines choses et obtient gain de cause sur tout, mais qui refuse malgré tout le projet de budget: le MCG; et nous avons le PLR et le PDC qui font des propositions, obtiennent partiellement satisfaction et refusent in fine le budget comme ils avaient refusé l'entrée en matière. C'est dire à quel point il est difficile pour moi d'arriver avec une position qui reflète l'exacte composition de cette majorité.
Permettez-moi donc de dire brièvement - je reprendrai peut-être la parole dans un second temps - qu'il s'agit du premier budget où le gouvernement a une autre composition qu'au début de la législature. Il prévoit une augmentation sensible des dépenses, mais pas forcément de façon extrêmement différente des années précédentes, et ne profite pas plus que les années précédentes non plus - moins, d'ailleurs - des rentrées fiscales impressionnantes et des perspectives qui le sont tout autant, avec des centaines de millions supplémentaires; le déficit est toujours patent. Il y a une majorité qui veut voter ce budget et qui souhaite que ce budget-là soit voté, il faut bien le dire, mais elle a finalement une double attitude: elle se plaint que la droite ne négocie pas, ne discute pas, et, dans le même temps, que le budget n'est pas assez élevé, alors qu'il va déjà dans son sens !
A la commission des finances, la majorité de gauche - ou plus précisément, en l'occurrence, la minorité de gauche, mais on verra ce qu'il adviendra - n'a pas arrêté de déposer des amendements pour des dépenses supplémentaires. C'était le seul leitmotiv ! «Non, ça ne nous suffit pas ! Les dépenses sont insuffisantes et on refuse les projets de lois connexes; les dépenses qui augmentent n'augmentent pas assez !»
Pour conclure ces premiers propos et avant de reprendre éventuellement la parole plus tard, je voudrais dire que deux choses m'inquiètent. La première, c'est que les augmentations qui sont demandées ou les réductions de dépenses qui sont contestées ne concernent en aucun cas les prestations à la population, mais exclusivement les prestations à ceux qui sont chargés de les délivrer. Ça, c'est le premier point qu'il convient de soulever.
Le deuxième point qui m'apparaît quand même important, c'est le principe de responsabilité. On ne peut pas dire à ses adversaires qu'ils ne sont pas prêts à négocier, à discuter d'un budget, si on commence par voter ou considérer comme acquis tout ce pour quoi on a la majorité et qu'on est prêt à discuter uniquement sur ce sur quoi on n'est pas susceptible de l'avoir. Cela s'est un peu passé de cette manière: il n'y a pas eu de discussion sur les projets de lois connexes parce que la majorité leur était acquise. Idem sur le budget, s'agissant des points qui leur étaient acquis. Sur les points qui pourraient poser problème, alors là on se plaignait de ne pas avoir de discussion !
Non, Mesdames et Messieurs, quand on discute d'un budget, quand on veut créer des ponts, il faut accepter de tout mettre sur la table et de discuter de cette façon. Pour le surplus, les groupes PDC et PLR l'ont toujours dit: soit il y a un accord solide pour amender le projet de budget et le rendre acceptable, auquel cas ils le voteront, soit il n'y a pas d'accord en la matière et ils ne le voteront pas.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, j'aimerais tout d'abord dire au rapporteur de majorité que nous étions, nous, d'accord de voter ce budget - en tout cas les socialises, et je crois que les Verts aussi; Ensemble à Gauche, je ne sais pas -, bien que nous considérions que ce n'est pas un budget de gauche puisqu'il a été réalisé, façonné par l'ancien Conseil d'Etat. C'est vous qui ne vouliez pas, c'est la droite qui refusait de voter ce budget.
Ensuite, j'ai été attiré par une phrase que le rapporteur de majorité a inscrite à la page 8 de son rapport et je la cite: «La gauche est souvent très critique avec le monde économique genevois. Elle se trompe. Elle devrait lui adresser plus souvent des remerciements.» Je pense que c'est un éloge de l'altruisme du capital. Je ne vois pas en quoi on doit remercier des personnes qui offrent un emploi à d'autres qui en retour leur offrent leur force de travail ! Il y a une égalité, si vous voulez, dans ce que l'on appelle l'échange économique - mais enfin, c'est un peu l'Ancien Régime, ça.
Ensuite, le budget tel qu'il est décrit dans mon rapport n'est pas, je l'ai dit, un budget de gauche. Il répond exactement aux critères très libéraux de Maastricht que tous les libéraux et tous les économistes libéraux acceptent ! S'agissant du déficit, il est en dessous de 3%, et en ce qui concerne la dette, elle correspond parfaitement: elle est tout à fait acceptable au regard d'un PIB de 55 à 56 milliards - n'oublions pas que ce sont les chiffres d'une économie extrêmement riche. En conséquence, je pense que la droite élargie à l'UDC et en partie au MCG n'est pas dans un débat de chiffres, disons; le problème n'est pas là. Le problème n'est pas que notre république n'arrive pas à produire suffisamment de richesses pour financer ses prestations. Le débat relève tout à fait d'une posture politique, notamment parce que le gouvernement est aujourd'hui effectivement à majorité de gauche et que vous ne pouvez pas voter un budget qui le satisfasse, car à ce moment-là vous enfreignez déjà la campagne pour les élections qui est lancée.
Je dis ça, Mesdames et Messieurs, parce que le déficit que la droite - la majorité du PLR - remet en question aura en réalité facilement été résorbé quand on attaquera les comptes: l'Etat n'arrive toujours pas à effectuer la totalité des investissements. Par conséquent, aux comptes, on verra tout de suite que ce déficit aura déjà été résorbé, et cela aussi grâce à des rentrées supplémentaires. Ce débat-là, franchement, c'est un débat de pays riche, et puisque ce n'est pas un problème de manque de financement, je considère qu'il s'inscrit - c'est mon avis - dans la volonté du PLR de réduire l'activité, les prestations de l'Etat, notamment par une politique de réformes structurelles.
Mais voyez-vous, et je m'adresse là au rapporteur de majorité qui a parlé tout à l'heure des prestations, ce qui nous importe à tous - ou ce qui devrait nous importer à tous -, c'est quand même l'avenir des familles genevoises et la formation. Or, vous savez très bien que les propositions d'amendements déposées entraîneront une coupe assez importante au DIP notamment. Le rapporteur de majorité vient de dire qu'ils ne s'attaquent pas à la prestation même, disons, mais à ceux qui sont censés la délivrer; mais enfin, les enseignants sont quand même ceux qui délivrent la prestation de formation ! Or, s'attaquer au DIP, péjorer l'encadrement des classes, c'est faire en sorte que les élèves les plus démunis n'aient pas les mêmes chances que tous les autres, c'est-à-dire ceux qui ont des moyens. Vous êtes pourtant attachés, les libéraux, à ce qu'on appelle l'égalité des chances, et au départ, l'école était basée là-dessus ! Par la droite, effectivement.
Si on s'attaque à ces prestations, mais également à celles concernant le logement, on sait très bien que les familles les plus nécessiteuses n'auront plus les moyens de se payer des logements d'un nombre de pièces adéquat afin que leurs enfants puissent s'instruire et avoir un avenir convenable. Ce qui est terrible, voyez-vous, c'est que vos coupes - qui sont censées introduire des réformes structurelles, ou plutôt qui sont dues au fait que l'Etat n'a soi-disant pas introduit de réformes structurelles - vont justement s'attaquer aux plus démunis. Et c'est ce que nous trouvons inadmissible dans un Etat aussi riche que celui-ci.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Alberto Velasco. Juste trente secondes, Monsieur. En réalité, vos réformes structurelles sont censées entraîner des excédents, excédents qui vous serviront par la suite à financer des baisses d'impôts pour les plus riches aux dépens des prestations aux plus nécessiteux, ce que nous ne pouvons pas admettre. C'est la raison pour laquelle nous allons, nous, les socialistes, voter ce texte malgré le fait que nous aurions préféré un autre budget. Merci, Monsieur le président, nous voterons l'entrée en matière.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Ce projet de budget démontre une fois de plus que le Conseil d'Etat, dans sa majorité actuelle comme d'ailleurs dans l'ancienne, peine à saisir l'ampleur de la crise sociale et les difficultés que rencontre une grande partie de la population depuis le début de la crise du covid. En réalité, l'essentiel des politiques de lutte contre la crise économique a consisté en des subventions massives, à fonds perdu, aux entreprises - et sans aucune contrepartie - alors que les salariés, les travailleuses et les travailleurs, ont été les grands oubliés. C'est une majorité de la population, mais elle a été largement délaissée depuis le début de la crise; le Conseil d'Etat et la majorité de ce parlement lui ont résolument tourné le dos.
Ce n'est pas le cas de la majorité de la population qui encore récemment, lorsqu'elle s'exprimait sur les heures d'ouverture des grands magasins le samedi soir et le dimanche, a refusé nettement et avec une grosse participation cette dégradation, ce démantèlement des conditions de travail des vendeuses et des vendeurs, comme une majorité de la population avait nettement accepté le salaire minimum en 2020. Qu'est-ce que ça nous dit ? Ça nous dit que la population a conscience du fait que les inégalités sociales grandissent dans le canton et que rien n'est fait, ni par ce Conseil d'Etat ni par la majorité de ce parlement, pour attaquer précisément et réduire ces inégalités sociales. Entre ces deux votes, je vous le rappelle, il y a aussi eu une élection complémentaire à l'exécutif, lors de laquelle les partis gouvernementaux n'ont recueilli qu'une minorité des votes de la population - ceci explique peut-être cela.
D'un côté, je l'ai dit, une grande partie de la population souffre et va probablement souffrir durablement de la crise actuelle, et de l'autre, les riches - et à plus forte raison les très très riches - se portent extraordinairement bien dans ce canton ! Les chiffres qu'on nous a montrés à la commission des finances, avec les amendements du Conseil d'Etat, indiquent que l'impôt sur la fortune, selon les dernières estimations, devrait croître de 7,5% en 2021. Si on se base sur les chiffres des dernières années, l'impôt sur la fortune augmente à peu près deux fois moins vite que les fortunes elles-mêmes; on peut donc estimer qu'en 2021 les grosses fortunes de ce canton ont crû de plus de 10%, peut-être de 14% ou 15% - en pleine crise !
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce qui nous montre que les hauts revenus et les personnes aisées ne craignent pas pour leur situation, y compris pendant la période de crise - ne vous y trompez pas, c'est Mme Fontanet qui le disait, et j'essaie de la citer de mémoire, lorsqu'elle nous a présenté ses amendements. Ne vous y trompez pas, c'est vrai ! Mais une grande partie de la population est en train de tirer la langue - ne faites pas la confusion: la majorité de la population souffre, ce n'est qu'une petite partie de privilégiés qui se porte très bien, pour reprendre les propos de la magistrate et j'espère qu'elle ne m'en voudra pas. Ce n'est pas exactement sa citation mais c'était l'idée, me semble-t-il. Elle me corrigera !
On entendra certainement une fois de plus la droite et Mme Fontanet, probablement plus tard dans le débat, nous parler de la pyramide fiscale du canton: une petite minorité des contribuables paie une grande partie de l'impôt alors qu'une part croissante de la population n'en paie pas ou en paie peu. Eh bien, Mesdames et Messieurs, cette pyramide qui s'accentue nous dit justement que les inégalités sociales se creusent - elles se creusent massivement et dangereusement ! Face à cette situation, les besoins de la population eux-mêmes augmentent. Ils augmentent et c'est normal ! On entendra la droite nous expliquer qu'elle ne veut pas d'augmentation supérieure à l'augmentation démographique, mais les besoins de la population augmentent plus rapidement que la démographie elle-même. Cela est dû à plusieurs facteurs, notamment à la paupérisation et à la progression de la précarité à Genève - l'un des cantons suisses dans lequel il y a le plus de pauvreté et de précarité - et puis aussi au vieillissement de la population, avec tout ce que cela entraîne en matière d'augmentation des prises en charge médicales.
Ainsi, si l'on suivait les conseils du PLR qui rejette toute augmentation au budget supérieure à l'augmentation démographique, eh bien les HUG ne pourraient plus soigner tout le monde ! Voyez-vous, entre 2015 et 2019, alors que la croissance démographique était de 3,1%, le nombre d'hospitalisations aux HUG a augmenté de 7,9% et le nombre de prises en charge ambulatoires a crû encore plus rapidement puisqu'il a augmenté de 12,2%, soit presque quatre fois plus vite que la démographie elle-même ! Faut-il donc croire que ce que propose le PLR, c'est de ne plus soigner qu'un malade sur quatre les prochaines années ?
Le président. Vous parlez désormais sur le temps de votre groupe.
M. Jean Burgermeister. Très bien. Et puis ce budget ne prend finalement pas en compte les enseignements de la crise, et il est invraisemblable qu'aux HUG notamment aucune augmentation ne soit prévue. Pourtant, avec un personnel à bout, le risque de voir se multiplier les arrêts maladie longue durée est grand si on ne renforce pas massivement le personnel des soins - aux HUG mais également ailleurs, dans les EMS ou autre. C'est déjà le cas pour certaines - et certains, mais ce sont le plus souvent des femmes: elles ont contracté des covid longs précisément parce qu'elles sont très exposées depuis le début de la pandémie, mais aussi parce qu'il y a beaucoup de lassitude, une fatigue mentale et physique.
Ce sont les HUG eux-mêmes qui l'expliquent: l'état de fatigue et la perte de repères de nombreux collaborateurs, épuisés par deux ans de pandémie, sont extrêmement préoccupants. Les HUG devront tout mettre en oeuvre pour limiter la vulnérabilité du système de soins; autrement dit, Mesdames et Messieurs, le risque est grand que l'on mette en péril le système de soins du canton si nous ne trouvons pas une réponse à ce problème - celle que propose Ensemble à Gauche figure dans l'amendement que nous avons déposé en commission, que nous redéposerons en plénière, à savoir le renforcement du personnel, et il faudrait penser par ailleurs à sa revalorisation salariale. Il est invraisemblable que le Conseil d'Etat n'ait pas jugé utile de répondre à cette préoccupation majeure en période de pandémie.
Enfin, Mesdames et Messieurs, ce budget démontre un manque d'ambition invraisemblable du gouvernement en matière d'économies d'énergie. Personne ne peut croire, à la lecture de ce document, que le canton de Genève se dirige vers une baisse de 60% des gaz à effet de serre d'ici 2050. Personne ne peut croire que le plan biodiversité, adopté en grande pompe par l'exécutif l'année dernière, sera mis en oeuvre comme il avait été prévu. On sait pourtant que le réchauffement climatique et la dégradation des milieux naturels sont des facteurs qui favorisent la diffusion de pandémies comme celle que nous connaissons aujourd'hui. Par conséquent, il est vain de lutter contre une pandémie avec toutes les ressources possibles si nous n'en tirons pas des conclusions et ne faisons pas en sorte, à l'avenir, de diminuer la probabilité d'en voir une nouvelle apparaître et se diffuser.
Il y a pourtant dans le budget - il faut le noter - quelques augmentations bienvenues de postes; c'est en particulier le cas à l'Hospice général. Elles servent à diminuer le nombre de dossiers par assistante ou assistant social, puisque celui-ci a massivement augmenté depuis le début de la crise. Il s'agit donc ni plus ni moins de permettre à l'Hospice général de faire un vrai travail de réinsertion en faveur des personnes qui sont bénéficiaires de l'aide sociale, pour les aider à s'en émanciper. Eh bien, Mesdames et Messieurs, il n'en fallait pas plus à la droite pour pousser des hauts cris, s'opposer vigoureusement à ce budget et réclamer la suppression pure et simple de toutes les nouvelles dépenses, de tous les nouveaux postes, avec des coupes aussi linéaires qu'aveugles.
Ce que l'on constate, c'est que la sainte alliance qui avait prévalu lors du budget 2021, du PLR au parti socialiste, en passant par le MCG, a volé en éclats, et on peut se demander pourquoi. Mesdames et Messieurs, je me rappelle avoir entendu un député PLR dire sur un plateau de télé que le PLR comprend bien qu'il ne faut pas demander d'économies supplémentaires en période de crise, qu'il ne demanderait pas de restreindre les charges de l'Etat. Or les milieux patronaux estiment aujourd'hui qu'ils se trouvent dans une bonne situation et ils ne souhaitent qu'une chose: faire repartir la machine à fond la caisse. Surtout, les entreprises sont maintenant assurées des aides massives de l'Etat - des subventions massives à fonds perdu et sans contrepartie - pour les garder à flot, quelle que soit la durée de la crise.
Mais ce que fait mine d'oublier le PLR, Mesdames et Messieurs, ce que fait bien trop souvent mine d'oublier le gouvernement, c'est que la crise sociale non seulement continue, mais qu'elle ne disparaîtra pas quand bien même la totalité de la population serait vaccinée. Quand bien même nous arriverions à nous débarrasser du covid, cette crise sociale est appelée à se maintenir dans la durée ! C'est d'autant plus vrai que rien n'est fait, je l'ai dit, pour s'attaquer aux inégalités sociales. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Il est par conséquent très clair, et il faut garder cela à l'esprit à l'avenir, que nous ne pouvons pas obtenir de véritable politique sociale si nous ne demandons pas systématiquement des contreparties aux aides que ce parlement octroie aux entreprises.
Le président. Merci.
M. Jean Burgermeister. J'aimerais finir par ceci, Monsieur le président: il est très clair que sans la mobilisation de la fonction publique, mais aussi des usagères et des usagers des services publics...
Le président. Il faut conclure !
M. Jean Burgermeister. ...qui ont tout à gagner à renforcer les services publics, ce parlement vote à droite, en particulier parce que le MCG se laisse dériver vers la droite...
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de deuxième minorité.
M. Jean Burgermeister. ...et il est urgent de construire un bloc social... (Le micro de l'orateur est coupé.)
Mme Dilara Bayrak (Ve), rapporteuse de troisième minorité. J'ai cru entendre le député Cyril Aellen dire qu'il n'y a pas de prestations prévues pour la population genevoise dans ce budget; eh bien laissez-moi en citer quelques-unes. Il y a le taux d'encadrement au DIP: il permet aux élèves d'être encadrés à un niveau équivalent et si nous ne votons pas certains postes, en raison de l'augmentation de la population genevoise, les taux d'encadrement changeront. Les classes seront donc surpeuplées, avec un encadrement moindre et un accès aux enseignants - et par conséquent à l'aide qui peut être nécessaire suivant les profils - différent par rapport aux années précédentes. Ça, c'est une prestation à la population.
Le personnel administratif et technique est bien souvent aussi remis en question dans le discours de la droite, qui consiste à dire: ils ne sont pas directement sur le terrain, ils ne sont pas directement en face des élèves - ce qui est d'ailleurs faux -, on n'en a donc pas besoin. Eh bien il se trouve que tant le PAT que le personnel enseignant sont plus que nécessaires, au vu notamment de l'augmentation des troubles du déficit de l'attention et des troubles du spectre autistique constatée au niveau mondial. En fait, les étudiants et les élèves ont aujourd'hui besoin de beaucoup plus d'aide, de soutien et d'encadrement; il s'agit donc là aussi d'une autre prestation.
Allez, je continue pour le plaisir ! Il y a la convention d'objectifs fixée avec l'université: le budget prévoit 2 millions supplémentaires pour l'université, il me semble. Je ne vais même pas revenir sur la cause; on voit bien que c'est une prestation pour la population genevoise, pour les Genevois et les Genevoises qui vont à l'Université de Genève. Je continuerai avec les investissements nécessaires à la mobilité, mobilité qui - encore une fois, ô surprise ! - bénéficie à la population genevoise et aux personnes qui se déplacent sur notre territoire. Il y a encore le plan climat cantonal; le lien est peut-être là un peu plus difficile à percevoir, mais allez, je vous prends par la main et on y va ! Si on ne prend pas soin de notre climat, on va nous-mêmes en pâtir. Le réchauffement climatique a causé l'apparition dans le lac de Neuchâtel de ce qu'on appelle des cyanobactéries - elles sont directement dues au réchauffement climatique. Rien n'empêche ce phénomène de se produire aussi sur notre territoire, dans le canton de Genève.
Je continue. Les investissements, si nous les votons, requièrent des moyens pour être mis en oeuvre - on nous l'a dit à plusieurs reprises dans le cadre de ce budget: si nous ne votons pas les postes pour augmenter la cadence, pour concrétiser les investissements que nous avons acceptés auparavant, eh bien il n'y a en réalité tout simplement pas d'investissements ! Je m'adresse aux personnes qui refusent aujourd'hui d'augmenter les postes sous prétexte qu'il n'y a pas de prestations à la population: ayez l'honnêteté de refuser les investissements et de dire que vous ne voulez de toute façon pas les concrétiser. Ne nous faites pas une version bis de la COP26 et de toutes les autres COP qui l'ont précédée en disant: on veut avancer, on veut changer la situation à Genève, mais on ne votera pas les moyens. Il ne s'agit que de paroles qui restent lettre morte, qui ne servent absolument à rien si ce n'est à se donner bonne conscience et à essayer de calmer son électorat, à dire que l'existence de certains partis politiques est toujours pertinente.
Je poursuis avec les prestations, à présent avec celles relatives à l'économie. Il y a des aides aux entreprises qui sont prévues ici - si l'entrée en matière est acceptée, d'autres collègues pourront étayer ce point. Il y a aussi les conditions de détention. Toutes ces prestations - prestations à la population genevoise et aux personnes qui se trouvent sur notre territoire - sont prévues dans notre budget, le budget que vous refusez. Vous le refusez d'ailleurs pour des questions de réallocations internes des ressources. Elles sont où, ces réallocations internes des ressources ? Où est-ce que vous voulez les organiser ? En quoi les postes et les montants demandés aujourd'hui ne sont-ils pas justifiés ?
Quand on pose cette question à la droite, silence radio: elle n'arrive tout simplement pas à nous dire où il y a trop de personnes - trop de personnes qui ne font rien - qu'on va pouvoir prendre et mettre ailleurs, de manière transversale. Alors peut-être faut-il faire un travail sur la transversalité, je ne le nie pas, mais de là à affirmer qu'aucune augmentation n'est nécessaire malgré l'augmentation des besoins de la population genevoise, malgré les besoins qu'occasionnent les investissements que nous avons votés, malgré les besoins de tous les autres périmètres dont nous avons discuté dans cette enceinte ! Eh bien on nous dit que ça ne sert à rien, qu'on ne le votera pas, qu'il faut faire de la réallocation interne - et quand on leur demande où, on nous répond: ce n'est pas notre problème, c'est au Conseil d'Etat de trouver !
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Dilara Bayrak. Je finirai par ceci: on sait très bien que cette discussion ne porte pas simplement sur ce budget, sur ce qu'il y a dedans. C'est une question de posture parce qu'il y a une nouvelle majorité au gouvernement et qu'une échéance approche. Refuser ce budget et se plaindre, c'est se donner les moyens de se plaindre aussi plus tard - de dire qu'une majorité de gauche au Conseil d'Etat, ça ne fait pas bien son travail. Mais si l'exécutif n'arrive pas à matérialiser des projets, c'est tout simplement parce qu'au parlement, où la droite a encore la majorité, il y a un blocage de tous les projets concrets pour des prestations à la population, ce qui l'empêche donc de les mener à bien quoiqu'ils soient nécessaires.
C'est une posture, c'est un refus, c'est un blocage - et c'est bien évidemment inadmissible. Malheureusement, ça va continuer, et ce n'est pas une surprise pour les gens qui se trouvent dans cette enceinte. On sait que les besoins des départements sont réels, et les députés ne les réfutent d'ailleurs pas: une fois que les demandes arrivent à la commission des finances, on ne les refuse pas et on vote les postes, les budgets, etc., etc. C'est juste pour pouvoir dire: on a refusé au début, mais regardez, on est gentils, on vous donne quand même quelques postes !
Cette situation pose plusieurs problèmes, notamment du fait que quinze députées et députés se permettent de mener toute une politique étatique un peu en cachette, sans rapports, sans rien, alors que cette tâche revient à la plénière du Grand Conseil. Le deuxième problème, c'est qu'on perd du temps: le temps que ça arrive à la commission des finances, qu'on le traite, qu'on discute, qu'on débatte, qu'on repasse exactement par les mêmes sujets et les mêmes débats qu'ici, on se retrouve avec des besoins pressants dans la population, auxquels on ne peut pas remédier alors que c'est notre travail. Pour toutes ces raisons et d'autres qui seront encore étayées, la troisième minorité vous invite à accepter ce budget. Merci. (Applaudissements.)
M. Eric Leyvraz (UDC). Une fois de plus, nous voilà confrontés à un projet de budget qui sort des normes raisonnables, avec un déficit inacceptable de 314 millions alors que les rentrées fiscales sont supérieures de 620 millions aux prévisions de juin. Le Conseil d'Etat aurait aussi dû inscrire 30 millions de plus pour les HUG, qui ne manqueront pas de réclamer cette somme en avril 2022, la situation sanitaire étant préoccupante. Le gouvernement devrait arrêter de passer son temps à nous expliquer qu'il a tout fait juste et que la situation déficitaire est due aux décisions du parlement et à la covid.
Oui, la covid induit de fortes dépenses supplémentaires, mais c'est le cas également pour tous les autres cantons, qui s'en sortent beaucoup mieux que Genève; Fribourg et Neuchâtel sont même dans les chiffres noirs. Un Etat bibendum en comparaison intercantonale, sans souplesse ni transversalité, avec une fonction publique qui a complètement perdu de vue le monde réel qui l'entoure - qu'elle arrête de se plaindre: sa situation est plus qu'enviable ! Qui, dans le privé, a la sécurité de l'emploi ? Combien d'employés en RHT, dans les entreprises, ont touché 100% de leur paie ? Qui, chez le particulier lambda, voit son employeur se charger des deux tiers des cotisations de sa caisse de pension, avec une primauté des prestations ? Sans parler du fait que pour les classes inférieures de rémunération, on est nettement mieux payé que dans le privé. Evidemment, qui a le courage aujourd'hui de mettre la fonction publique devant ses responsabilités ? Tant le gouvernement que les députés ont trop peur de la critiquer: face à ce qui est devenu un Etat dans l'Etat, la moindre remise en question risque d'être éliminatoire à la prochaine élection.
L'UDC admire l'humour de l'exécutif - humour à la Buster Keaton. Les ministres changent mais le Conseil d'Etat reste, en promettant sans rire ce qu'il ne veut réaliser. J'ai relu les belles promesses des discours de Saint-Pierre, qui devraient plutôt être prononcés à la Revue pour amuser la population. Magnifique travail d'équipe aussi à la présentation du plan quadriennal: même les hauts fonctionnaires des finances arrivent à garder leur sérieux ! Un plan sur quatre ans, c'est fixer des objectifs et tâcher de les atteindre à échéance. Mais le gouvernement ayant fait la stupéfiante découverte - de portée philosophique - que les prévisions ne correspondent pas toujours à la réalité, il le corrige chaque année en promettant monts et merveilles. Il y a quelque chose d'incantatoire, une méthode Coué transcendée dans cette présentation: oui, d'ici quatre à cinq ans au plus, le Conseil d'Etat arrivera au pied de l'arc-en-ciel où se trouve la marmite pleine de pièces d'or, promesse de lendemains qui chantent ! On imagine des angelots évoluant au milieu des chiffres noirs de futurs budgets tellement mirifiques qu'ils feront pâlir d'envie tous les argentiers cantonaux de Suisse. Les rapports entre le législatif et l'exécutif ne sont pas au beau fixe - il ne faut vraiment pas s'en étonner.
Et les grandes promesses qui rendent les foules joyeuses ne datent pas d'aujourd'hui. Déjà en 2002, le député Marcet, expert-comptable, dénonçait par exemple la sous-couverture des deux caisses de pension: «On nous mène en bateau: il manque 4 milliards !» Il le disait déjà à l'époque - 4 milliards - alors qu'en 2013 le ministre des finances nous vendait la fusion des caisses de pension en assurant avec sérieux qu'il fallait mettre 800 millions, mais que c'était un «one shot» et qu'après la caisse se débrouillerait. Il fallait le faire !
L'UDC met en garde depuis des années contre la dette trop importante: elle est en vérité de 18 milliards et non proche des 13 milliards - Standard & Poor's ne s'y trompe d'ailleurs pas. Dans les prochaines années aussi, environ 8 milliards de prêts arriveront à échéance. Ces sommes ne seront pas renégociées à un taux d'intérêt de 0%, vu l'inflation qui commence. Je rappelle ce que disait le chancelier allemand social-démocrate Schröder, adepte d'une rigueur budgétaire, en 1999: «Laisser filer le déficit et la dette revient à pratiquer une gigantesque politique de redistribution du bas vers le haut. Rien n'est plus antisocial qu'un Etat surendetté qui à la fin n'est plus capable d'agir et ne peut plus intervenir pour les plus faibles.» L'UDC attend les réformes structurelles indispensables pour que l'argent du contribuable soit utilisé à meilleur escient. Ça ne tourne pas rond, à Genève, et le rapport BAK le démontre. Je vous recommande de regarder le tableau des finances cantonales 2020 où l'on retrouve facilement notre république avec sa série de chiffres rouges «1», la plus mauvaise note.
Vous aurez compris que l'UDC n'est pas satisfaite. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Augmentation des ETP largement supérieure à celle de la population, demandes toujours plus nombreuses sans rechercher, par confort, des solutions internes: l'Etat est un enfant gâté avec des citoyens travailleurs performants et des rentrées supplémentaires d'impôts à faire rêver...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Eric Leyvraz. Oui, dix secondes ! ...qui devraient permettre de diminuer la dette. L'Etat phagocyte, dévore sans mesure l'argent; une mascarade...
Le président. Merci.
M. Eric Leyvraz. ...mettant à genoux la classe moyenne qui n'en peut plus.
Le président. Merci, Monsieur.
M. Eric Leyvraz. Vous aurez compris que l'UDC va voter l'entrée en matière de cette façon: un NON en majuscules !
M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, quand on se retrouve en plénière pour le vote du budget, c'est à la suite d'un long processus qui a commencé au Conseil d'Etat déjà, avec la construction d'un budget, avec des négociations au sein du gouvernement. Le budget nous est ensuite présenté et des négociations ont alors lieu au Grand Conseil, notamment à la commission des finances, entre les chefs de groupe ainsi qu'entre les différents groupes et les membres de l'exécutif. Force est de constater que malgré l'urgence sociale, l'urgence sanitaire, l'urgence économique et l'urgence climatique, en pleine cinquième vague de covid, nous n'arrivons pas à trouver un compromis entre les partis, entre les groupes, avec le Conseil d'Etat pour voter aujourd'hui le budget.
Pourquoi n'arrivons-nous pas à trouver ce compromis, Mesdames et Messieurs ? Parce que certains groupes ont malheureusement des postures qu'on pourrait qualifier de dogmatiques. Qu'avons-nous entendu pendant toutes ces discussions à la commission des finances - et vous le savez très bien, à droite ? Nous avons entendu des mantras, comme réduire les dépenses à tout prix. Mais quand nous demandions: d'accord, où est-ce qu'il y a des dépenses superflues ? Aucune réponse. «Il faut supprimer des postes !» Où y a-t-il des postes supplémentaires ? Aucune réponse. «Il faut absolument diminuer la dette» - on l'a encore entendu tout à l'heure de la bouche de l'UDC ! Pourquoi diminuer la dette alors que son coût est aujourd'hui vraiment minime, voire neutre ? Aucune réponse.
Nous avons toutes et tous découvert les amendements déposés pour le budget - un budget qui pourrait être voté, à droite, si les partis... s'il y a une majorité pour entrer en matière - afin de couper 12 millions dans les charges de fournitures, d'entretien des bâtiments, d'entretien des terrains, d'entretien des routes, etc. Hop, on coupe 12 millions ! On veut couper aussi 10 millions pour accompagner notre économie vers plus de durabilité. Et alors le pompon, c'est une coupe de 58 millions proposée par MM. Aellen et Blondin - les deux lames du même ciseau. Ils nous proposent de couper 58 millions d'un coup, c'est-à-dire les 364 postes demandés par le Conseil d'Etat.
Messieurs-dames de la droite, et peut-être - probablement - du MCG, où ces dépenses sont-elles superflues ? Est-ce qu'on parle des nouveaux postes - on les a mentionnés avant - dans l'instruction publique ? Il y a plus de mille nouveaux élèves par année, alors qu'est-ce qu'on fait ? On n'engage personne et on les répartit dans les classes, ce qui fait que le nombre d'élèves par classe va bien entendu augmenter ? Il s'agit là, Mesdames et Messieurs, des conditions d'apprentissage, de formation de nos enfants. Vous le savez comme moi, à Genève, en Suisse, nous n'avons pas de matière première si ce n'est la matière grise ! Et c'est là-dedans qu'il faut investir.
De nombreux services, comme le SPMi, le SPAd, le SPC ou l'Hospice général, qui s'occupent de l'aide sociale et du suivi des personnes dans le besoin, connaissent une explosion des demandes. Et notre réponse, la réponse d'une majorité de droite de ce Grand Conseil, sera de dire non, on ne vous rajoute rien: ni postes ni ligne budgétaire. A l'OCPM, même chose: l'office cantonal de la population et des migrations est sous-doté depuis longtemps, on le sait par différents rapports que nous avons eu l'occasion d'étudier. Et là, de nouveau, la réponse de la majorité de droite va être: on ne vous donne rien ! Même chose pour l'office cantonal de l'emploi; je n'ai pas besoin de vous faire un dessin quant à la situation du marché de l'emploi et à l'importance d'investir dans la formation pour réorienter les personnes au chômage vers de nouveaux secteurs d'avenir plus durables, dont le numérique. Mais la réponse, ça va être une nouvelle fois: rien ! Sans parler de l'argent ou des postes au département du territoire, à la mobilité - des services, des offices qui travaillent à mettre en oeuvre le plan climat cantonal. Inutile de vous rappeler que nous sommes en pleine urgence climatique. Et alors que dire de l'hôpital ! On lit à longueur de journée, depuis dix-huit mois, des récits de la situation des personnes qui travaillent dans nos hôpitaux pour lutter contre le covid. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) A elles aussi, on va leur répondre: rien ne vous sera donné.
Mesdames et Messieurs, les socialistes vont prendre leurs responsabilités en votant l'entrée en matière et nous déplorons que le MCG, l'UDC, le PLR et le PDC aient dans l'idée de constituer une majorité pour la refuser. Pour le groupe socialiste, c'est un massacre à la tronçonneuse et nous le déplorons. Merci.
Mme Françoise Sapin (MCG). Avec des engagements massifs de 364 ETP supplémentaires, malgré 462 millions de recettes supplémentaires dans un premier temps puis 173 millions dans un deuxième temps - soit 635 millions au total -, le déficit du budget 2022 dépasse les 300 millions. Il fallait le faire ! En l'état, le budget 2022 n'est pas acceptable pour le MCG. Il y a beaucoup, beaucoup de choses à dire, mais nous en relèverons deux.
Lors des négociations pour le vote du budget 2021, il avait été convenu d'adopter des mesures structurelles; cela n'a pas été fait. On ne fait que rajouter des couches supplémentaires ! Lors des débats à la commission des finances, nous avons constaté que l'Etat de Genève se fournit massivement en dehors du canton, voire en dehors de Suisse. Les entreprises genevoises sont largement écartées: à la centrale commune d'achat par exemple, 69% des fournisseurs sont situés hors du canton. L'Etat de Genève est financé par les entreprises genevoises, aussi il se doit de se fournir en priorité auprès d'elles, qui paient leurs impôts ici. Je m'arrêterai là pour permettre à mon collègue de parler, et je vous informe d'ores et déjà que le MCG refusera l'entrée en matière.
Une voix. Bravo.
M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il y a une année, en ma qualité de rapporteur de majorité, j'avais présenté à notre plénière un budget 2021 affichant un déficit de 846,9 millions. Ce budget avec un déficit abyssal répondait aux incertitudes liées à la crise du covid et en conséquence toutes les demandes du Conseil d'Etat avaient été acceptées, nouveaux postes compris. Mais pour en arriver là, ce budget avait fait l'objet d'un accord entre les partis gouvernementaux, lesquels s'engageaient à se mettre au travail afin de trouver, pour les années suivantes, des compromis sur des mesures structurelles, indispensables à la recherche d'un équilibre budgétaire.
Des séances ont eu lieu avec le Conseil d'Etat, mais les négociations ont très rapidement tourné court. Le parti socialiste a considéré que la recherche de l'équilibre budgétaire devait passer par des mesures fiscales supplémentaires, ce qui confirmait son intention de ne pas accepter des diminutions de charges. Les Verts, quant à eux, ont fait savoir qu'ils s'opposeraient à toute mesure structurelle qui toucherait les postes de la fonction publique. Pour le centre et la droite, il était donc évident que l'accord du budget 2021 était un marché de dupes et que les discussions étaient de ce fait closes !
Il est dès lors piquant, et désolant, d'entendre et de lire dans les rapports de minorité les critiques acerbes adressées au centre et à la droite: selon les auteurs, ils réagiraient de manière politique à l'encontre d'un exécutif devenu de gauche, sans se soucier des réalités économiques et sociales. Avez-vous oublié, Mesdames et Messieurs les députés de la gauche, qu'il y a une année, lors de cette fameuse «paix des braves» qui a conduit au budget 2021 des partis gouvernementaux, les conditions d'améliorations structurelles pour le budget 2022 proposées et demandées par le centre et la droite l'étaient à l'encontre d'un gouvernement de droite ? S'il vous plaît, ne nous faites pas le reproche d'avoir provoqué depuis lors un changement de majorité au Conseil d'Etat uniquement pour justifier des restrictions budgétaires. Mesdames et Messieurs les députés, l'utilisation politique du budget 2022 est le fait de la gauche et en aucun cas du centre et de la droite.
Je parlerai du budget en quelques chiffres. Le Conseil d'Etat a présenté en septembre son projet, lequel prévoyait un déficit de 460,2 millions, à première vue satisfaisant au regard des quelque 850 millions de déficit de l'année précédente. Après analyse, on constatait toutefois que ce résultat dépendait essentiellement d'une embellie fiscale estimée à 462 millions. L'exécutif ne proposait pas ou très peu de mesures structurelles, hormis une timide modification des taux de cotisation LPP - qui vient d'être refusée - et la reprise de la loi d'écrêtage pour un transfert de charges vers les communes. Par contre, on y trouvait la création de 364 postes.
En octobre, lors de la présentation des amendements du Conseil d'Etat, le projet de budget s'améliorait pour passer à 273,8 millions de déficit. Cette embellie de 187 millions résultait essentiellement d'une nouvelle hausse des prévisions fiscales et n'intégrait aucune nouvelle mesure structurelle. Je me plais d'ailleurs à relever que le gouvernement a fait savoir qu'il n'avait pas profité de ces rentrées fiscales complémentaires pour faire ses courses et présenter de nouvelles dépenses !
En résumé, sans l'augmentation substantielle des recettes fiscales, pour près de 600 millions, nous nous serions retrouvés avec un budget pourvu d'un déficit de l'ampleur de celui de l'année dernière. La conclusion est limpide: le Conseil d'Etat n'a rien entrepris pour remettre le train sur les rails et sans la résilience de l'économie genevoise, nous aurions un tout autre chiffre en queue de budget. Les déficits importants qui se répètent d'année en année ne sont pas le résultat d'un manque de recettes mais bel et bien de dépenses excessives.
Le PDC ne remet pas en cause les prestations que l'Etat doit délivrer à la population, lesquelles doivent impérativement être fournies, ni bien évidemment la prise en charge des coûts extraordinaires de la crise sanitaire qui perturbe nos vies depuis de trop longs mois maintenant. Le PDC est cependant pour plus de transversalité au sein des départements et de l'Etat; il faut cesser de confondre la quantité avec la qualité et ne plus fonctionner en silos. Le PDC estime nécessaire de revoir le périmètre de l'Etat en remettant la subsidiarité au centre des politiques publiques. De nombreuses tâches relevant de l'action de proximité pourraient ainsi être transférées au secteur associatif, au privé et aux communes. Il est grand temps d'agir pour que les prochains budgets puissent se rapprocher de ceux des cantons voisins ayant des charges et des prestations comparables.
Vous l'avez compris, Mesdames et Messieurs les députés, faute d'accord solide pour une éventuelle entrée en matière - et ne nous faites pas le reproche d'éviter les débats: je crois que ceux qui sont à la commission des finances savent pertinemment que le PDC a tout fait pour que le débat ait lieu -, le parti démocrate-chrétien ne soutiendra pas ce projet de budget et votera non à l'entrée en matière. Merci.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Boris Calame pour deux minutes et cinquante-huit secondes.
M. Boris Calame (Ve). Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, il s'agit ici d'un débat d'entrée en matière, ou plus justement d'un jeu de poker menteur; certains sont visiblement incapables de décider du soutien ou non à la fonction publique et de l'octroi ou non des prestations nécessaires à la population. Nous sommes en crise - une crise sanitaire, sociale et environnementale -, mais rien n'y fait. C'est le dogme du moins d'Etat qui semble primer pour une probable majorité de ce parlement.
Il n'y a pas si longtemps, à la commission des finances, une majorité de gauche, avec le MCG, s'est constituée pour accepter l'entrée en matière sur le projet de budget 2022. Après nombre d'amendements portant à la baisse les charges de l'Etat, le MCG a toutefois refusé le budget qu'il prétendait alors encore trop onéreux. Nous n'avons pas entendu de la part de ce groupe beaucoup de propositions constructives pour amender ledit budget. Nous sommes à nouveau véritablement confrontés à un problème de cohérence politique du MCG; reste à voir si sa créativité sera avec nous lors de ce débat budgétaire. Permettez-moi d'en douter légitimement alors que celui-ci, aujourd'hui, refuse même l'entrée en matière.
Les Verts voteront l'entrée en matière sur ce budget, car il est primordial pour nous que l'Etat soit doté d'un budget afin de répondre aux missions qui sont les siennes. Les Verts réservent toutefois leur décision quant au vote final, qui sera fonction des décisions prises par une majorité. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède la parole à M. le député François Baertschi pour trois minutes et trente-deux secondes.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. L'Etat de Genève prévoit d'engager 364 employés supplémentaires en 2022. Combien de travailleurs frontaliers permis G parmi cette cohorte impressionnante ? L'Etat de Genève emploie déjà des frontaliers de manière excessive. Actuellement, le secrétariat général du département des finances compte 19% de frontaliers permis G ! L'office de l'urbanisme abrite 18% de frontaliers ! Et, cerise sur le gâteau, l'office cantonal des transports en dénombre 22%, ce qui explique pourquoi on circule si mal à Genève ! Nous comprenons pourquoi les dépenses sociales augmentent autant: à force d'engager hors de nos frontières plutôt que de donner une chance aux talents genevois, nous voyons augmenter le nombre des personnes condamnées à l'assistance.
Nous déplorons que le budget 2022 prévoie une cagnotte indéterminée, de plus de 10 millions, pour la nouvelle conseillère d'Etat Verte alors que le gouvernement a préparé de dangereuses économies sur le dos de retraités - elles ont heureusement été rejetées par ce Grand Conseil. Au niveau des rentrées fiscales, l'exécutif refuse de revenir sur la rétrocession à la France qui nous coûte près de 300 millions par an. Il refuse également de nouvelles rentrées fiscales comme la contribution de solidarité sur les frontaliers proposée par le MCG et évaluée à 150 millions par an.
Le MCG, dès lors, ne votera pas ce budget qui ne lui convient pas ! Si l'entrée en matière est acceptée, nous proposerons deux amendements. Nous demandons un million de francs pour la formation des infirmières et infirmiers, ce million étant pris sur la ligne de transport transfrontalière. Ainsi, nous préférons financer la formation des infirmières à Genève plutôt que de subventionner leur arrivée depuis la France. Nous demandons ensuite un million pour davantage de policiers; rappelons que la catastrophique nouvelle loi sur la police, voulue par un conseiller d'Etat PLR et contre laquelle le MCG a lancé un référendum soutenu également par d'autres partis - le PS et les Verts -, exige des centaines de postes supplémentaires, postes que nous n'avons pas. C'est pourquoi nous réclamons ce million qui doit être pris sur les lignes transfrontalières.
En résumé, ce budget ne convient pas au Mouvement Citoyens Genevois parce qu'il ne prend pas en compte les intérêts supérieurs du canton de Genève. Dès lors, le groupe MCG refusera l'entrée en matière.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, du fait que nous ne sommes pas assurés, à ce stade, d'avoir une entrée en matière, j'aimerais commencer par remercier l'ensemble des services qui ont participé à l'élaboration de ce projet de budget. Je ne souhaite pas que la séance se termine sans leur avoir signifié notre reconnaissance. Il s'agit des services financiers de l'ensemble des départements; eux, ils font leur travail et ils ne sauraient évidemment être tenus le moins du monde pour responsables d'un éventuel refus d'entrée en matière. J'aimerais également remercier, parce que les fronts sont extrêmement tendus aujourd'hui, les députés de la commission des finances ainsi que son président. En commission, on est un peu moins nombreux, et si les fronts sont tout aussi tendus, les attaques sont - souvent - moins importantes et on arrive à échanger. Donc un grand merci: nous sommes toujours reçus de façon correcte et on donne suite à nos demandes.
Mesdames et Messieurs, de quoi parlons-nous aujourd'hui ? Nous parlons d'un projet de budget avec une augmentation des charges de 1,4%, ce qui n'est pas une hausse majeure. Nous parlons d'un budget avec une augmentation des revenus de 8,5%, soit près de sept fois supérieure à l'augmentation des charges. Ainsi, nous n'avons pas profité de ces revenus supplémentaires pour augmenter nos charges, mais pour diminuer notre déficit. On peut se féliciter de ce que notre économie soit résiliente, se féliciter aussi d'avoir la chance que les recettes fiscales aient tant augmenté, ce qui nous permet de financer les politiques publiques et les prestations à la population.
Il faut effectivement rappeler que si ce temps de pandémie a été une période faste pour certains, elle a été difficile pour certaines classes sociales, et c'est grâce au rôle de redistribution de l'impôt, c'est grâce à ces revenus supplémentaires que nous pourrons financer les prestations sociales. J'aimerais aussi rappeler que les coûts covid, dans ce projet de budget, s'élèvent à 180 millions - coûts covid liés justement à l'augmentation des prestations sociales, à cette paupérisation d'une partie de la population. L'augmentation des ETP, qui est décriée, est de 1,8%; ce n'est pas rien ! Cette augmentation importante est liée à de nouveaux projets qui ont fait l'objet d'explications.
S'agissant des mesures structurelles, elles manquent en effet. Alors on peut reprocher à l'exécutif de ne faire aucun effort, le gouvernement peut vous dire qu'il fait tout juste ou pas tout juste, Mesdames et Messieurs, mais certaines mesures structurelles ont fait l'objet de textes déposés auprès de votre Conseil et vous les avez refusées pendant la première partie de la séance ! On ne peut pas non plus tout reprocher au Conseil d'Etat: chacun doit accepter de prendre ses responsabilités. Le projet de budget qui vous est proposé est conforme à la réalité; il est sincère. Nous n'avons pas tenu compte des mesures qui ont été refusées ou qui n'ont pas été adoptées par vos commissions. Le gouvernement a préparé des amendements à cet effet, il ne s'agit donc pas d'effets de manche ou de faire croire que la situation est meilleure qu'elle ne l'est. Nous avons travaillé ensemble, à l'exécutif, pour proposer différents amendements de façon que le projet de budget qui vous est présenté reflète la réalité.
Pour ce qui est du chemin de croissance, Mesdames et Messieurs, eh bien il est la conséquence de ce que votre Conseil et la population nous ont octroyé suite à l'acceptation de la réforme de la fiscalité des entreprises et du projet de loi sur les subsides d'assurance-maladie: la possibilité, pendant huit ans, de présenter des déficits. Dans le cadre du projet de budget tel qu'amendé, à savoir avec l'ensemble des amendements qui seront nécessaires pour que ce soit un budget sincère, nous regagnons ce chemin de croissance - nous sommes en dessous du déficit autorisé. Lorsqu'on fait la comparaison avec les différents cantons, on nous dit que Genève est toujours le pire; on nous demande pourquoi, avec de tels revenus, on arrive à des déficits aussi conséquents. J'aimerais rappeler la situation de deux cantons importants, qui me paraît intéressante: Vaud a présenté un budget déficitaire de 188 millions et Zurich, Mesdames et Messieurs, un projet de -334 millions ! Nous ne pouvons pas mettre de côté la période que nous vivons: nous avons vécu deux ans de crise covid, avec des situations difficiles et des augmentations des prestations sociales extrêmement importantes.
Lorsqu'on parle de projets structurels, certains s'y opposent en disant que ce sont des idées de droite; j'aimerais rappeler qu'il est tenu compte de la capacité des autorités, du parlement à les mettre en oeuvre lorsqu'on évalue la note de l'Etat. Ces projets de lois structurels visent à nous assurer de pouvoir contenir les charges. Il y a plein de moyens pour contenir nos charges; un moyen très simple, qui est souvent proposé, c'est de ne plus engager. En n'engageant pas, on contient évidemment les charges. Or l'exécutif a pris la décision de poursuivre les engagements en raison des besoins démographiques, mais aussi de ceux des projets qui tiennent à coeur à chacun de ses membres. Dans ce contexte-là, nous devons trouver d'autres mesures structurelles pour limiter l'augmentation des charges de l'Etat. Ces mesures structurelles sont celles qui vous ont été proposées et qui sont systématiquement refusées.
Nous sommes aujourd'hui face à trois possibilités: votre parlement accepte l'entrée en matière et vote un budget tel qu'il a été déposé - je ne vous cache pas que le Conseil d'Etat se fait très peu d'illusions quant à cela; votre parlement vote l'entrée en matière et finit par accepter un projet largement amendé par le biais des propositions qui figurent dans le rapport de majorité - ce n'est pas le choix du gouvernement, mais c'est probablement mieux que rien pour certaines institutions et entités, et j'aurai l'occasion d'y revenir; la troisième et dernière option, c'est que votre parlement refuse l'entrée en matière ou, même s'il l'accepte, refuse au final le budget parce qu'il n'a pas une majorité de 51 voix pour l'accepter, et nous rentrons alors en douzièmes provisoires.
Je me suis intéressée à ce que cela signifierait pour les différents départements: on a beaucoup parlé du fait qu'il n'y aurait pas de nouveaux postes si on fonctionnait en douzièmes provisoires, Mesdames et Messieurs, mais cela ne signifie pas que ça. Cela signifie que tout ce qui sort des charges ordinaires que le Conseil d'Etat, que l'Etat a assumées en 2021 ne sera pas compris dans ces douzièmes provisoires. Il faudra donc que nous passions les uns après les autres devant la commission des finances qui, à quinze députés, deviendra et remplacera le parlement pour décider de la politique que souhaiterait mener le Grand Conseil. A quinze députés, vous déciderez si oui ou non vous accepterez les postes, les crédits supplémentaires des uns et des autres. Qu'est-ce que cela signifie pour les différents départements ?
Pour le DIP, cela signifie effectivement de renoncer à de très nombreux postes visant à tenir compte de l'augmentation des effectifs d'élèves, mais également à des ressources supplémentaires pour la protection des mineurs, à des places dans les foyers thérapeutiques ou encore à l'aide au numérique.
Au DSPS, cela concerne des postes dans le domaine pénitentiaire, notamment pour lutter contre la surpopulation carcérale. Cela signifie par ailleurs de renoncer aux postes pour le convoyage des détenus dont l'internalisation a été votée par votre parlement. Sont concernés aussi des postes pour la mise en oeuvre de règles de gestion d'horaires, en particulier pour la police, et puis des postes pour le centre cantonal de biométrie.
S'agissant de la politique publique «Santé», cela implique de renoncer à 26 lits en EMS, mais également à l'augmentation de la capacité des urgences et à doter la centrale 144 de moyens supplémentaires. Cela signifie de renoncer à l'ouverture de nouveaux immeubles IEPA ou encore à des moyens supplémentaires en matière de sécurité sanitaire.
Au DT, cela revient à se priver de moyens supplémentaires pour la transition énergétique et pour la transition écologique.
Au DI, Mesdames et Messieurs, cela suppose évidemment de se passer de tous les postes et des dépenses qui permettront la mise en oeuvre de la politique du numérique au bénéfice des fonctionnaires, mais aussi la mise en oeuvre de progrès dans les services à la population - voilà ce que signifie de fonctionner en douzièmes provisoires. Cela signifie en outre de renoncer à la mise en oeuvre des plans d'action, des projets prioritaires qui sont inscrits au PDI, et puis à des projets en faveur de la mobilité.
Au DEE, cela signifie l'abandon des programmes d'accompagnement à destination des entreprises, s'agissant de la reprise et de la transition.
Au DCS, Mesdames et Messieurs, il faudra renoncer à mieux doter le service de protection de l'adulte - on sait pourtant à quel point il en a besoin -, mais aussi le service des bourses et des prêts. Il faudra en outre renoncer à 65 nouvelles places en EPH - 65 ! -, et Dieu sait si l'on a besoin de ces places, ainsi qu'à la subvention de fonctionnement de l'Hospice général pour 9 millions. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Je finis bientôt, merci, Monsieur le président. Au PJ, dont le projet de budget passe généralement sans la moindre question de la commission des finances, cela suppose de renoncer à 21,4 postes supplémentaires et à la dématérialisation de la justice.
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que signifierait de rentrer en douzièmes provisoires. Et si nous ne voulons pas de ces renonciations, eh bien ce serait à la commission des finances, à quinze députés, d'arbitrer pour déterminer si oui ou non le gouvernement, respectivement l'Etat de Genève et les citoyens auraient droit aux montants nécessaires. Le Conseil d'Etat vous encourage donc à entrer en matière et à essayer de doter l'Etat de Genève d'un budget pour 2022. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote d'entrée en matière.
Des voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenus ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien, nous passons donc au vote nominal.
Mis aux voix, le projet de loi 13020 est rejeté en premier débat par 59 non contre 40 oui (vote nominal).
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission d'aménagement du canton.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission d'aménagement du canton.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission de l'économie.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des finances.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des affaires communales, régionales et internationales.
Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission des affaires sociales.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission de l'environnement et de l'agriculture.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission de l'économie.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission des transports.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission des transports.
Cette proposition de motion est renvoyée sans débat à la commission des affaires sociales.
La proposition de résolution 965 est retirée par ses auteurs.
Le président. Mesdames et Messieurs, nous marquons une pause. Je vous retrouve à 17h20.
La séance est levée à 17h05.