Séance du
jeudi 11 novembre 2021 à
20h30
2e
législature -
4e
année -
5e
session -
29e
séance
PL 12845-A
Troisième débat
Le président. Nous passons à l'urgence suivante. Il s'agit du PL 12845-A, classé en catégorie II, trente minutes. (Brouhaha. Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse. Brouhaha. Le président agite la cloche.) Un peu de tenue, s'il vous plaît ! Nous avons un programme chargé. (Remarque.) Monsieur Florey, c'est aussi valable pour vous. (Remarque.) Monsieur Florey, c'est aussi valable pour vous !
Une voix. Mais assieds-toi !
Le président. Pour rappel, nous avions traité les premier et deuxième débats lors de la session précédente, nous abordons ici le troisième débat. Monsieur Jacques Béné, vous avez la parole.
M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je vais rappeler quelques points qui avaient été évoqués lors de la dernière session, au moment où nous discutions en premier et deuxième débats. Tout d'abord, le travail de l'association Aide aux victimes de violence en couple est absolument essentiel au sein du réseau genevois, et ce pour deux raisons: d'une part parce que l'activité déployée en tant que telle est fondamentale, d'autre part parce que cela représenterait des coûts nettement supérieurs si l'Etat traitait lui-même ces problématiques.
L'ennui avec ce projet de loi, c'est que l'utilité d'augmenter la subvention, comme cela a été fait lors de la précédente session, n'a pas été démontrée. Le Conseil d'Etat a négocié avec AVVEC, il a jugé qu'une hausse n'était pas nécessaire, car toutes les prestations ont pu être délivrées même si, dans certains cas, elles l'ont été dans des délais que d'aucuns considéreraient comme non raisonnables. Toutefois, le gouvernement a estimé que la demande n'était pas légitime, que les besoins n'étaient pas avérés.
Cela pose un problème, parce que toutes les associations risquent alors de se présenter devant la commission des finances en réclamant plus d'argent, et celle-ci répondra: «Oui, d'accord; le Conseil d'Etat pense qu'il n'y a pas de raison d'augmenter l'indemnité, mais nous considérons que si, donc nous allons vous octroyer un petit peu plus.» Dans le cas d'espèce, ce n'est pas un petit peu plus, c'est beaucoup plus: il s'agit de 300 000 francs, on parle d'une progression de presque 50% !
Ensuite, un audit du SAI a montré que la diversification qui peut être attendue de l'institution n'est pas mise en pratique, notamment la prise en charge de certaines prestations par les assurances-maladie. Cela a été relevé par le SAI, cela a été indiqué aussi lors des travaux de commission, avec le Conseil d'Etat, avec l'association. La situation n'est pas jugée critique, le gouvernement nous a expliqué qu'AVVEC devait s'appuyer davantage sur le réseau existant, les personnes qui ne pourraient pas être accompagnées directement pouvant l'être par d'autres intervenants. Dans ce sens, AVVEC devrait plus recourir au réseau.
Cela a été le cas durant la pandémie, mais ce système pourrait également être mis en place hors de la crise qui, nous l'avons vu, a inévitablement...
Le président. Vous parlez sur le temps de votre groupe.
M. Jacques Béné. Oui, oui, mon groupe est très généreux avec moi, Monsieur le président, merci ! Le réseau de prise en charge pendant la pandémie a bien fonctionné et personne n'a été laissé de côté, toutes les personnes présentant un risque avéré ont toujours été mises en sécurité, il ne nous a pas été cité de cas spécifique qui nous laisserait penser que le réseau connaît des problèmes en ce qui concerne le soutien aux victimes de violence.
Pour la majorité de la commission qui est devenue une minorité, l'objectif est de ne pas accepter le projet de loi tel qu'issu du deuxième débat. Je demande le renvoi en commission pour la simple et bonne raison que nous ne disposons pas d'éléments nouveaux. Même si nous avons cru comprendre que le contrat de prestations a été modifié, si on regarde le document qui nous a été fourni pour le troisième débat, la seule différence avec le précédent, eh bien c'est le montant. Il n'y a aucune précision quant aux prestations qui devraient être fournies par AVVEC en lien avec l'augmentation de 300 000 francs. Il nous paraîtrait dès lors judicieux d'entendre les représentants de l'organisation ainsi que le Conseil d'Etat sur les indicateurs mis en place pour nous assurer que cette somme est bien utilisée en vue d'activités supplémentaires et pas simplement pour éponger les éventuelles pertes qu'aurait subies AVVEC ces dernières années.
Si je dis ça, c'est aussi parce que ce contrat de prestations, Mesdames et Messieurs les députés, nous le votons maintenant pour le 1er janvier 2021; l'année 2021 étant bientôt écoulée, nous aimerions quand même savoir si cette allocation supplémentaire est bien destinée à des services complémentaires. Voilà pourquoi nous souhaiterions étudier le contrat de prestations plus avant.
Je suis d'ailleurs surpris que les indicateurs ne nous aient pas été fournis et que le nouveau contrat de prestations mentionne seulement le montant supplémentaire. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) On inscrit les prestations que doit fournir AVVEC, les prises en charge, les actions de formation de même que le travail institutionnel et de collaboration avec les autres établissements partenaires, mais à aucun moment on ne mentionne...
Le président. Merci...
M. Jacques Béné. ...des indicateurs qui nous permettraient de contrôler qu'il y a bien une amélioration des prestations, ou si ce n'est une amélioration, du moins une hausse...
Le président. Voilà, merci.
M. Jacques Béné. ...du nombre de cas pris en charge. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés...
Le président. C'est terminé, Monsieur.
M. Jacques Béné. ...nous vous prions de bien vouloir renvoyer ce projet de loi à la commission des finances pour écouter... (Le micro de l'orateur est coupé. Applaudissements.)
Le président. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Je laisse la parole aux autres rapporteurs. Monsieur Baertschi, allez-y.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. Excusez-moi, Monsieur le président, je n'ai pas compris...
Une voix. Sur le renvoi en commission !
M. François Baertschi. Il est essentiel de voter ce projet de loi aujourd'hui, de ne pas le renvoyer en commission. Pour quelle raison ? Parce que l'on constate une augmentation massive des violences conjugales sur le territoire du canton de Genève, et l'association AVVEC n'arrive plus à répondre à la demande. C'est une organisation qui fait du bon travail, donc il faut absolument la soutenir face aux nouveaux défis auxquels elle est confrontée. Merci, Monsieur le président.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Il faut refuser le renvoi en commission, naturellement. Le travail a été réalisé, les éléments sont connus et bien connus des commissaires. Simplement, le PLR n'est pas d'accord et tente de gagner du temps en repoussant la décision à prendre. Or cette subvention est essentielle pour AVVEC. Je vous appelle dès lors, Mesdames et Messieurs, à rejeter le renvoi en commission. (Commentaires. Rires.)
Le président. Je vous remercie. Le Conseil d'Etat souhaite-t-il prononcer quelques mots sur la proposition de renvoi à la commission des finances ? (Remarque.) Non, alors nous passons directement au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12845 à la commission des finances est rejeté par 52 non contre 41 oui.
Le président. Nous poursuivons la discussion, et vu sa nature particulière, c'est à ce stade que je cède la parole à Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, suite au vote d'une majorité de votre Grand Conseil lors de la dernière session, majorité qui a accordé une augmentation de la subvention annuelle de 300 000 francs à l'association AVVEC, le contrat de prestations a été renégocié, différents éléments ont été ajoutés en matière de prestations à délivrer que je vais vous énumérer. Sachez que le contrat a été signé par les représentantes de l'organisation et moi-même en date du 9 novembre dernier.
Un indicateur de performance a été inséré pour la facilitation des moyens d'accès aux prestations et à l'information, prestation qui n'a pas été modifiée. Il était important d'ajouter cet indicateur afin de nous assurer qu'AVVEC fait tout ce qui est nécessaire pour faire connaître ses services. Par ailleurs, il est précisé que l'entité doit dorénavant prendre en charge de nouvelles situations de femmes victimes, le nombre retenu étant de 375. Le nombre de femmes accompagnées dans le cadre de consultations individuelles a également été revu, passant de 450 à 655, tandis que le nombre de consultations, lui, est passé de 2400 à 3800.
Je souligne que jusqu'à présent, ces activités n'étaient pas financées par l'Etat. AVVEC en fournissait déjà une partie, mais sans le soutien étatique. Aujourd'hui, nous exigeons qu'elles soient réalisées sur la base du financement de l'Etat, et l'association a accepté ces conditions.
Le Conseil d'Etat s'est conformé à la décision de la majorité du Grand Conseil qui a entraîné une modification du montant de l'aide financière. Nous n'avions pas le choix, nous avons donc ajusté le contrat de prestations en accord avec l'association AVVEC pour faire suite à la hausse. Mesdames et Messieurs, je vous recommande d'adopter ce projet de loi en troisième débat dès lors que nous disposons maintenant d'un contrat de prestations conforme aux sommes supplémentaires qui ont été allouées. Je vous remercie.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Je commencerai cette intervention en répondant aux propos du député Jacques Béné. Si le fait que d'autres associations risquent de venir nous demander des montants supplémentaires vous gêne, alors bienvenue au Grand Conseil ! C'est à nous d'effectuer ce travail et de déterminer si les organisations ont réellement besoin d'aide, si l'arbitrage du Conseil d'Etat va dans le bon sens, c'est notre rôle de députés que d'examiner chaque situation et, cas échéant, d'opérer un second arbitrage. Sinon, quel est l'intérêt d'avaliser les contrats de prestations négociés par le gouvernement ?
Deuxièmement, en ce qui concerne le rapport SAI et la multiplicité des sources de financement, notamment la piste de l'assurance-maladie, il a été dit et répété à plusieurs reprises que cette option n'est pas réalisable parce que l'association fournit des prestations à des personnes qui n'ont pas forcément d'accès indépendant à leur boîte aux lettres. Est-il si difficile de comprendre que des victimes de violence conjugale n'ont pas accès à leur boîte aux lettres ? Elles iraient ainsi frapper à la porte d'une association qui leur facturerait ses services à la maison, et leur agresseur trouverait la preuve qu'elles sont allées chercher de l'aide... Je vous laisse imaginer les conséquences. Franchement, arrêtez de revenir sans cesse avec cet argument !
Vous dites qu'au moment où AVVEC a été auditionnée, elle n'a pas fait valoir ses prétentions pour mériter l'argent supplémentaire, mais enfin écoutez-la ! Ecoutez ce qu'elle nous dit ! Si vous aviez bien écouté, vous auriez compris que la voie de l'assurance-maladie n'est pas viable. Vous n'écoutez pas, vous soutenez que personne parmi les victimes de violence conjugale n'a été laissé au bord du chemin; c'est précisément le contraire qu'a indiqué l'entité. Je vous remercie d'écouter aussi les représentants du PLR qui siègent dans le comité. Si vous n'écoutez même pas les membres de votre parti, c'est que vous n'avez pas la volonté d'aller de l'avant.
Enfin, arrêtez d'essayer de renvoyer le projet de loi en commission, nous savons tous très bien que c'est pour gagner du temps, pour faire traîner les choses. C'est juste la démonstration d'un comportement chicanier dont vous avez déjà fait preuve à plusieurs reprises au sein de ce parlement.
Je conclurai en remerciant la conseillère d'Etat d'avoir renégocié le contrat de prestations, AVVEC a ainsi pu expliquer ce qui n'allait pas. Je suis contente de voir que vous avez été sensible à ses arguments, lui avez apporté une aide supplémentaire et avez su écouter ses revendications. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Je constate que le Conseil d'Etat, en la personne de Mme Nathalie Fontanet, s'est rigoureusement tenu à ce qui avait été voté par ce parlement le mois dernier et a augmenté la subvention à AVVEC de 300 000 francs par année, la portant à 1,018 million. C'est le mandat qui avait été confié au gouvernement et celui-ci a parfaitement rempli sa mission dans les délais, ce qui est bien entendu un motif de satisfaction. Ce qui est un motif de satisfaction encore plus significatif, c'est de savoir qu'il y aura désormais un financement public et pérenne de prestations qui sont extrêmement importantes pour les femmes - ou les hommes, d'ailleurs, mais dans l'écrasante majorité des cas, ce sont des femmes - victimes de violence conjugale.
J'aimerais répondre à M. Béné qui disait dans son intervention: «Il n'est pas évident que les activités ont augmenté ces dernières années.» C'est pourtant clairement le cas. Depuis vingt ans, les prestations délivrées par l'association AVVEC ont été multipliées par quatre. Par quatre, Mesdames et Messieurs ! Dans le même temps, la subvention non seulement n'avait jamais été augmentée, mais elle avait même légèrement diminué suite à une coupe linéaire.
Lorsque le PLR prétend qu'il ne s'attaque jamais aux contrats de prestations négociés entre les entités subventionnées et le Conseil d'Etat, c'est tout bonnement faux. Simplement, lorsqu'il les revoit, le PLR le fait toujours à la baisse, et dans ce cas-là, il n'y a pas de problème. Je pense par exemple aux coupes linéaires votées dans le cadre des budgets qui constituent des modifications de tous les contrats de prestations de la république genevoise, mais il y a bien sûr d'autres exemples.
Ce qui dérange le PLR - et il s'abrite derrière un prétexte -, ce n'est pas que nous ayons modifié un contrat de prestations, c'est bien que nous ayons augmenté l'indemnité, même s'il est évident que c'était nécessaire pour venir en aide aux personnes qui en ont besoin, et cette association réalise un excellent travail sur le terrain.
De toute façon, se cacher derrière cet argument est ridicule au vu de la responsabilité que nous portons, celle d'assurer des prestations essentielles, parfois même vitales, à des personnes qui sont victimes de violence et qui comptent sur une association comme AVVEC, laquelle risquait malheureusement de ne plus pouvoir accompagner toutes les personnes qui en ont besoin. Aussi, je me félicite de cette hausse de l'aide financière négociée par le Conseil d'Etat sur demande du Grand Conseil et je vous invite à approuver le projet de loi.
M. Grégoire Carasso (S). Chers collègues, au nom du groupe socialiste, je salue tout d'abord l'honnêteté intellectuelle et la bonne foi politique de la conseillère d'Etat qui, entre le deuxième et le troisième débat, a pris acte du signal politique fort lancé par notre Grand Conseil et a amendé le contrat de prestations avec l'association AVVEC.
Pour contextualiser, je vais juste rappeler quel est le coeur des activités de cette entité: les consultations ambulatoires de soutien aux femmes victimes de violence conjugale et à leurs enfants. Ces prestations sont uniques au sein du réseau à Genève et reconnues comme telles par toutes les institutions partenaires. Pourquoi uniques ? Parce que les consultations ambulatoires sont multidisciplinaires et permettent de prendre en charge les victimes sous l'angle tant psychologique et social que juridique.
Voilà pourquoi, avec près de 4000 consultations par année, une augmentation de la subvention était tout simplement essentielle. Ces dernières années, l'association devait chercher entre 400 000 et 600 000 francs par an d'argent privé, instable, rarement renouvelé; voilà les montants qu'elle a dû dénicher pour réussir à financer ces consultations dont le nombre s'élève aujourd'hui à 4000 chaque année. L'augmentation de 300 000 francs que ce parlement s'apprête à voter ce soir en troisième débat ne représente en moyenne que la moitié de cette somme.
S'il faut citer un élément essentiel du rapport du service d'audit interne de l'Etat, c'est bien celui-ci: il est inacceptable, dangereux et critique de faire reposer une prestation de service public fondamentale et vitale sur un subventionnement privé aléatoire. Cette hausse est dès lors essentielle, c'est un premier pas, un grand pas, et nous espérons qu'il sera suivi d'autres en direction des femmes victimes de violence conjugale et de leurs enfants. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Il ne reste plus de temps au groupe PLR. Monsieur Jacques Blondin, vous avez la parole.
M. Jacques Blondin (PDC). Oui, merci, Monsieur le président. Le but n'est pas de refaire le débat à propos de l'association AVVEC, Mesdames et Messieurs, je crois que nous sommes tous d'accord quant à la légitimité de ses prestations et il n'est nullement question aujourd'hui de mettre en doute ses besoins, son travail et la potentialité d'un apport supplémentaire dans le financement.
Le problème, s'agissant de la procédure, c'est que la commission des finances, contrairement à la pratique qui avait été de mise au moment d'examiner le budget du Centre social protestant et de Caritas, n'a pas eu l'occasion de recevoir l'association pour discuter avec elle de la modification du contrat de prestations. Ce plénum a pris une décision qui allait à l'encontre du préavis de la commission des finances; alors c'est tout à fait possible, mais l'entité n'a pas pu justifier devant les députés le bien-fondé de sa requête.
Pour ma part, je suis tout à fait prêt à engager un montant de 300 000 francs qui est nécessaire, mais vous avouerez qu'il est tout de même étonnant de se retrouver aujourd'hui face à cette situation. Si, à l'avenir, tous les contrats de prestations qui sont signés par le Conseil d'Etat avec les institutions ne servent plus à rien, alors ça va gentiment être compliqué, on va entrer dans le domaine de la subjectivité. Je rappelle que ces contrats de prestations font l'objet d'un travail long et sérieux, avec un engagement tant de l'Etat que des associations. Là, on ouvre une boîte de Pandore des plus dangereuses.
Pour le parti démocrate-chrétien, il ne s'agit pas de dire non à ce million et des poussières en faveur d'AVVEC, mais nous demandons un renvoi en commission pour parler du document avec l'association. Je prends le pari devant vous que la contribution sollicitée sera acceptée, mais sur des bases qui me paraissent conformes. Aussi, pour cette raison uniquement, je propose à mon tour le renvoi à la commission des finances. Merci.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Les rapporteurs et le Conseil d'Etat ayant déjà eu l'occasion de s'exprimer sur la même requête formulée plus tôt, je la mets aux voix... (Remarque.) Non, vous n'avez plus de temps de parole ! (Commentaires.) Vous n'avez plus de temps de parole et c'est exactement la même demande ! (Protestations. Commentaires.)
Une voix. C'est le règlement, Monsieur le président !
Le président. Le vote est lancé.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12845 à la commission des finances est rejeté par 50 non contre 36 oui. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
Une voix. Monsieur le président, reprenez le règlement !
Une autre voix. Violation du règlement !
Le président. Monsieur Eric Leyvraz, à vous.
M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. Je dois tout d'abord relever que je suis surpris de voir un conseiller d'Etat discuter avec un député dans la salle alors que nous sommes en séance. Merci beaucoup de faire changer les choses, parce que ça ne va pas.
Le problème de fond, ce n'est pas l'association elle-même, laquelle réalise un excellent travail; le problème de fond, c'est que nous ne respectons pas les règles. Le Conseil d'Etat est chargé de négocier les contrats de prestations avec d'innombrables institutions, il y a de grandes discussions qui durent parfois très longtemps, chacun expose ses besoins et ses désirs, puis le gouvernement finit par décider du montant et le soumet à la commission des finances. Il me semble que c'est la procédure habituelle.
Et tout à coup, ce Grand Conseil décide d'ajouter 300 000 francs au budget d'une organisation en particulier. Mais, Mesdames et Messieurs, nous ouvrons une boîte de Pandore, c'est catastrophique ! Ainsi, chaque entité qui estime avoir droit à un peu plus - et elles estiment toutes avoir droit à un peu plus - va désormais intervenir auprès des députés en réclamant une hausse de sa subvention ?! Nous allons perdre un temps fou.
Il faut faire confiance au Conseil d'Etat, qui discute longuement avec chaque association avant de signer un contrat de prestations, puis accepter ledit contrat pour quatre ans; on ne peut pas revoir sans cesse les indemnités dans ce Grand Conseil. J'estime qu'il faut suivre les règles si vous voulez qu'on aille de l'avant, parce que vous constaterez que ce parlement avance très peu, l'ordre du jour n'est jamais respecté, il y a toujours des urgences.
Mesdames et Messieurs, si vous voulez qu'on parvienne un jour à un résultat normal dans cette assemblée, c'est-à-dire à épuiser l'ordre du jour et ne pas avoir en permanence deux cents points à traiter, ce qui est unique en Suisse, il faudrait prendre un peu conscience de ce qu'on fait. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va à M. Jean Burgermeister pour deux minutes cinquante-sept.
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Oui, Monsieur le président, merci. Bon, comme je l'ai dit, les opposants à ce projet de loi se cachent derrière des prétextes. L'idée qu'il faille absolument auditionner AVVEC pour déterminer ses besoins est grotesque, ou alors les membres de la droite qui siègent à la commission des finances n'ont pas effectué le travail correctement jusqu'ici. Nous avons entendu l'association, nous avons reçu les documents justifiant la demande d'un montant de 300 000 francs, nous avons auditionné cette entité qui nous a expliqué et répété tout cela. Si nous la recevons à nouveau, elle va nous redire exactement la même chose ! Il n'y a donc rien à attendre d'un renvoi en commission.
Le PLR, le PDC et l'UDC devraient au moins avoir le courage d'assumer leur position, à savoir qu'ils refusent de dépenser 300 000 francs supplémentaires pour venir en aide aux victimes de violence conjugale. Ils n'ont aucun motif concret, les arguments invoqués ici sont des excuses pour s'opposer à cette hausse de l'indemnité pourtant modeste au regard du budget du canton de Genève.
Je rappelle par ailleurs que ce Grand Conseil a voté en 2019 une pétition intitulée «Que la honte change de camp !», laquelle réclamait notamment une augmentation du nombre de postes et des subventions en faveur des institutions directement engagées auprès des femmes, des personnes trans et intersexes ayant subi des violences. Ce texte a été soutenu par des gens de la droite, parce que quand il s'agit de se gargariser avec de bonnes intentions, tout va bien, mais dès lors qu'il faut dépenser un peu plus d'argent, eh bien les fronts se figent.
Depuis le début du débat, le PLR et le PDC martèlent: «Mais enfin, on ne peut pas revenir sur un contrat de prestations négocié entre le Conseil d'Etat et une association, signé par ces deux entités !» D'abord, Mesdames et Messieurs, je signale que ces contrats de prestations nous sont soumis, nous n'avons pas l'obligation de les approuver. Si nous les étudions, c'est bien que nous avons un arbitrage politique à opérer. Sinon, ce vote ne serait qu'une mascarade ! M. Leyvraz l'a d'ailleurs indiqué: une fois négociés, les contrats sont transmis à la commission des finances pour examen, pour qu'elle puisse donner son avis, et c'est précisément ce qu'elle a fait dans ce contexte.
Sans parler du fait que l'amendement qui vient d'être déposé par Jacques Béné et Yvan Zweifel consiste bien à modifier un contrat de prestations, celui que nous discutons actuellement, qui a été travaillé et signé par le Conseil d'Etat et AVVEC ! Simplement, dans l'intervalle, il a été augmenté de 300 000 francs. Certes, ils veulent revenir au montant initial de 718 739 francs, mais il s'agit bien là d'une attaque contre la négociation menée le mois dernier entre Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat par ailleurs membre du PLR, et l'association, qui sont tombées d'accord, qui ont déterminé les besoins et les nouvelles prestations à délivrer. Tout cela a été réglé de manière conforme aux institutions, donc le PLR qui veut revenir en arrière et désavouer le travail de sa magistrate crée ici un problème institutionnel. Je vous invite à valider ce projet de loi. (Applaudissements.)
Une voix. C'est juste !
Une autre voix. Moi, ça m'inquiète !
M. Stéphane Florey (UDC). Visiblement, il y a quelques minutes, suite à la proposition très bien formulée par M. Blondin, le règlement n'a pas été respecté, donc je redemande un renvoi en commission, Monsieur le président, et je vous remercie de donner la parole à ceux qui ont le droit de s'exprimer à ce sujet, conformément à la LRGC. Je vous remercie.
Le président. Si vous le sollicitez si gentiment ! Monsieur Jean Burgermeister, sur le renvoi en commission ?
M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Je ne surprendrai personne en vous invitant, Mesdames et Messieurs, à rejeter la proposition de renvoi en commission.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité. Ecoutez, je crois qu'on a assez perdu de temps, cela coûte aussi de l'argent. Certains parlent d'économies au sein de l'Etat, mais on est en train de dépenser des dizaines de milliers de francs. Faisons des économies et votons ce projet de loi. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. De combien de temps est-ce que je dispose, Monsieur le président ?
Une voix. De trois minutes.
Le président. Soyez le plus court possible.
M. Jacques Béné. Bon. Je vous remercie de votre sollicitude à mon égard, Monsieur le président, c'est très gentil de votre part d'être revenu sur votre position précédente. Comme indiqué, j'ai donc déposé un amendement que nous voterons tout à l'heure pour revenir au montant prévu dans le projet de loi initial.
Il y a quelque chose que je ne peux pas entendre, et c'est le coeur du problème. Pourquoi un renvoi en commission ? La commission a effectué le travail, elle a voté, voilà pourquoi je suis rapporteur de majorité. Elle a fait le travail, elle a mené des auditions, elle a jugé que le Conseil d'Etat avait fait le travail aussi, qu'il avait écouté AVVEC, qu'il avait relu le rapport du SAI. Or le gouvernement a estimé que l'association n'avait pas de besoins avérés au-delà de ce qui était prévu dans le contrat de prestations au départ, et c'est bien parce qu'il y avait une majorité en commission que nous ne sommes pas allés plus loin sur les prestations que pourrait éventuellement fournir AVVEC.
Ecoutez-moi bien, Monsieur Burgermeister, parce que je crois que vous avez un problème d'ouïe: au début de mon intervention précédente, j'ai insisté sur le fait que l'activité d'AVVEC est absolument fondamentale, et c'est non seulement un constat, mais nous y croyons. Oui, le travail réalisé par cette association est essentiel; ce qui l'est moins, c'est d'octroyer des moyens supplémentaires que le gouvernement n'a pas considéré utile de donner.
Il n'y a pas de problème institutionnel, Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet a fait ce que le parlement lui a demandé de faire. Je le respecte, je n'ai pas de problème avec ça, mais en commission, Mme Fontanet a aussi très clairement expliqué que selon ses services, d'une part la situation financière du canton ne permettait pas une augmentation de la subvention, d'autre part la situation d'AVVEC ne la justifiait pas, parce qu'il y a un réseau sur lequel elle doit s'appuyer avant de solliciter des compléments financiers.
Mesdames et Messieurs, on assiste en ce moment à une floraison de demandes de crédits supplémentaires en faveur des associations. Prenons l'exemple de la dernière session: on traitait de Caritas et du Centre social protestant, pour lesquels nous avons des indemnités à verser, et il se trouve que Caritas réclamait 400 000 francs et le CSP rien du tout. Du coup, pour faire une moyenne, on a alloué 200 000 francs à chaque organisation ! Le CSP qui ne demandait rien a obtenu 200 000 francs et Caritas qui en voulait 400 000 n'en a obtenu que 200 000 ! Voilà la politique de la gauche dans ce parlement, c'est de donner de l'argent à des gens qui n'en demandent pas et de donner de l'argent à des gens qui en demandent, mais contre la volonté du Conseil d'Etat.
Le président. Merci de conclure.
M. Jacques Béné. Encore une fois, je vous prie de renvoyer ce projet de loi en commission pour qu'on obtienne les explications nécessaires qui ne figurent pas dans le contrat de prestations tel qu'il nous est présenté aujourd'hui. Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci. Une nouvelle fois, j'ouvre la procédure de vote sur le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12845 à la commission des finances est rejeté par 53 non contre 45 oui.
Le président. A présent, nous nous penchons sur l'amendement déposé par MM. Jacques Béné et Yvan Zweifel, qui modifie le montant de l'aide financière, le faisant repasser à 718 739 francs comme dans le projet de loi initial:
«Titre (nouvelle teneur)
accordant une aide financière annuelle de 718 739 francs à l'association Aide aux victimes de violence en couple (AVVEC) pour les années 2021 à 2024
Art. 2, al. 1 (nouvelle teneur)
1 L'Etat verse à l'association Aide aux victimes de violence en couple (AVVEC) un montant annuel de 718 739 francs, sous la forme d'une aide financière monétaire d'exploitation au sens de l'article 2 de la loi sur les indemnités et les aides financières, du 15 décembre 2005.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 35 oui et 1 abstention.
Le président. C'est le moment du scrutin final...
Des voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenus ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, largement.
Mise aux voix, la loi 12845 (nouvel intitulé) est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 66 oui contre 31 non et 1 abstention (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)