Séance du
jeudi 1 juillet 2021 à
20h30
2e
législature -
4e
année -
2e
session -
12e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Diego Esteban, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Mauro Poggia, Antonio Hodgers, Nathalie Fontanet et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Serge Dal Busco, président du Conseil d'Etat, Anne Emery-Torracinta et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Diane Barbier-Mueller, Antoine Barde, Jean Batou, Beatriz de Candolle, Marc Falquet, Jean-Marc Guinchard, Youniss Mussa, Alessandra Oriolo, Jean Romain, Romain de Sainte Marie, Patrick Saudan, Salika Wenger et Christian Zaugg, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Glenna Baillon-Lopez, Pierre Bayenet, Nicolas Clémence, Virna Conti, Joëlle Fiss, Jean-Charles Lathion, Marta Julia Macchiavelli, Patrick Malek-Asghar, Jean-Pierre Pasquier et Helena Rigotti.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de magistrates du Pouvoir judiciaire. Je prie le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Les magistrates entrent dans la salle et se tiennent debout, face à l'estrade.)
Mesdames, vous êtes appelées à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyenne et comme juge;
- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Ont prêté serment:
Mme Ildiko Dao Lamunière, Mme Bénédicte Amsellem et Mme Ramona Akkawi.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Premier débat
Le président. Nous traitons notre première urgence, le PL 12766-A, et sommes en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à la rapporteure de majorité, Mme Danièle Magnin.
Mme Danièle Magnin (MCG), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Je voudrais simplement, en deux, voire trois mots, expliquer à ce Grand Conseil que le Conseil d'Etat a présenté un projet de loi visant à garantir autant que possible... (Brouhaha. L'oratrice s'interrompt.)
Le président. Excusez-moi, Madame la rapporteure. (Brouhaha.) Un peu de silence, s'il vous plaît ! Vous pouvez poursuivre.
Mme Danièle Magnin. Merci, Monsieur le président. Comme c'est chaque fois la même chose, ça devient lassant ! Ce projet de loi vise donc à garantir la souveraineté alimentaire du canton - elle est vraiment minime, puisqu'elle se situe actuellement autour de 28% - et à offrir des possibilités à la paysannerie de s'adapter au climat, notamment par des aides et des conseils. Cela a donné un joli projet de loi, que nous avons amendé, évidemment de concert avec le département, pour arriver à quelque chose qui satisfasse tout le monde. Nous avons bien entendu tenu compte des positions des différentes associations des milieux agricoles. Certaines étaient un petit peu modernistes, futuristes ! Nous avons essayé de leur donner satisfaction aussi. Voilà, je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Céline Zuber-Roy (PLR), rapporteuse de minorité. Ce rapport de minorité ne vise pas à remettre en cause le projet de modification de la loi sur la promotion de l'agriculture dans sa totalité, mais porte au contraire sur un point précis du texte. Notre opposition concerne une modification à une autre loi - l'article 2 souligné - que le département de l'aménagement du territoire a profité d'intégrer à ce projet de loi alors que la problématique dépasse largement le seul enjeu de la promotion de l'agriculture. (Brouhaha. L'oratrice s'interrompt.) Il s'agit de l'ajout d'un nouvel alinéa 4 à l'article 20, dans la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire - la LaLAT -, qui stipule que «le canton renonce à participer à tout échange intercantonal des surfaces d'assolement». A l'heure actuelle, la Confédération proscrit déjà les échanges des surfaces d'assolement entre les cantons. Ce nouvel alinéa 4 à l'article 20 n'a donc aucun impact immédiat. Toutefois, alors que notre canton se rapproche dangereusement de la limite minimale de surfaces d'assolement imposée par la Confédération, que la population ne cesse de croître, que les besoins en infrastructures deviennent criants - je pense notamment à une nouvelle patinoire, à un centre de formation pour la relève du football ou à de nouveaux établissements scolaires -, il n'est pas raisonnable de vouloir écarter d'office, sans même une étude attentive, toute ouverture que la Confédération pourrait accorder en matière d'échange de surfaces d'assolement. C'est en effet l'unique raison d'être de l'ajout de ce nouvel alinéa 4 à l'article 20 LaLAT: exclure que notre canton utilise une éventuelle dérogation que la Confédération pourrait accorder à l'avenir - je précise qu'actuellement, aucun projet fédéral allant dans ce sens n'est en discussion.
La majorité de la commission de l'environnement et de l'agriculture veut ainsi discrètement lier les générations futures pour s'assurer que, quels que soient les enjeux en présence - logement, enseignement, santé, sport - et les contreparties qui pourraient être prévues notamment par le droit fédéral, notre canton n'utilise pas une possibilité offerte par la Confédération d'échanger des surfaces d'assolement avec un autre canton en dérogation à la limite fédérale en la matière. Bien entendu, les futurs députés pourront toujours changer la loi pour autoriser un échange qui leur paraîtrait nécessaire. Mais cet argument est également valable dans l'autre sens: si la Confédération devait assouplir les possibilités dans ce domaine et que les garanties qu'elle demande en échange sont très insuffisantes, les futurs députés pourraient exclure cette possibilité par la loi, et cette fois en toute connaissance de cause.
Pour finir, la minorité regrette qu'un sujet aussi important soit intégré, plutôt discrètement, par le Conseil d'Etat dans un projet de loi portant sur un autre sujet. Une étude de cette question par la commission compétente en la matière, c'est-à-dire la commission d'aménagement du canton, aurait été pour le moins opportune. Pour ces motifs, la minorité vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter l'amendement présenté dans le rapport de minorité visant à biffer le nouvel alinéa 4 de l'article 20 LaLAT, puis à accepter le projet de loi ainsi amendé. Je vous remercie de votre attention.
Mme Claude Bocquet (PDC). Ce projet de loi vise à mettre à jour la loi sur la promotion de l'agriculture qui date d'il y a quinze ans. Il intègre la souveraineté alimentaire, acceptée par les Genevois en 2018. Il favorise la communication et sensibilise le grand public à une alimentation issue de la production locale en soutenant l'OPAGE - l'office de promotion des produits agricoles de Genève -, la marque de garantie GRTA, ainsi que la toute nouvelle Maison de l'alimentation du territoire de Genève - MA-Terre.
Ce projet de loi encourage le tourisme rural et les activités de diversification agricole. Le nombre d'exploitations diminue d'année en année, les prix à la production couvrant difficilement les frais d'exploitation. Il est donc primordial de donner des opportunités aux agriculteurs, de faire connaître leurs produits et d'en faciliter la vente. L'agritourisme est un très bon moyen; encore faudra-t-il modifier la loi genevoise sur la restauration, le débit de boissons, l'hébergement et le divertissement - la LRDBHD -, puisque cette dernière empêche tout développement de ce type d'activités, au contraire des autres cantons suisses.
Ce projet de loi introduit une subvention de participation au paiement des primes d'assurance récolte. A l'heure du changement climatique qui provoque des épisodes extrêmes de plus en plus rapprochés, ce soutien sera le bienvenu. Sans vous lister tous les changements bénéfiques qu'apporte la mise à jour de cette loi, je relève avec plaisir que le canton a décidé de protéger son territoire agricole, en renonçant à participer à tout échange intercantonal des surfaces d'assolement. Je vous invite donc à refuser l'amendement du PLR. En conclusion, le PDC soutient avec enthousiasme ce nouveau projet de loi. Merci.
M. Philippe Poget (Ve). Chers collègues, suite au dépôt de ce projet par le département, notre commission a procédé à de nombreuses auditions, toutes instructives, qui ont permis de nourrir nos débats et qui surtout ont abouti à des propositions d'amendements et de précisions du texte initial de cette loi sur la promotion de l'agriculture.
Il est important de mentionner certains de ces points, évoqués déjà en grande partie par Mme Bocquet: l'inscription du principe de souveraineté alimentaire; la volonté de favoriser une agriculture productrice, rémunératrice et diversifiée, respectueuse de l'environnement et du bien-être animal et qui fournit à la population des denrées saines; toutes les mesures permettant un renforcement des dispositions face au changement climatique, notamment en favorisant la résilience des pratiques agricoles; toutes les évolutions de la protection sanitaire, qui visent à réduire les risques liés aux intrants et à développer des méthodes alternatives; le soutien à la sensibilisation, comme l'a mentionné Mme Bocquet, à travers l'OPAGE, le label GRTA, des projets comme MA-Terre, et à travers le tourisme rural; enfin, un aspect sur lequel j'ai envie d'insister, la facilitation de la reprise des exploitations et de l'installation de la nouvelle génération. Je pense que c'est un point vraiment très important qu'il était nécessaire de faire figurer dans la loi. On rappelle qu'il existe déjà une directive du département qui permet à l'Etat de travailler sur les attributions. Il faut rappeler que celui-ci dispose quand même de 620 hectares de terres agricoles qu'il met en fermage et que les communes disposent également de plus de 300 hectares, qu'elles mettent aussi en fermage. Nous pensons donc qu'il est important que ce qui représente quand même 10% des terres agricoles genevoises puisse être attribué aussi à de nouvelles générations ainsi qu'à de nouveaux agriculteurs, qui sont au bénéfice de formations, bien sûr, et qui permettront d'étendre la population qui travaille dans l'agriculture. Le projet contient ensuite des notions concernant l'amélioration de la planification de l'espace rural et institue une commission consultative pour l'agriculture, qui remplace l'ancienne commission d'attribution.
Finalement, la commission a montré, par un soutien quasi unanime, la détermination de notre parlement de maintenir une agriculture diversifiée sur notre territoire. Le groupe des Verts vous demande donc de voter avec enthousiasme ce projet de loi. Par ailleurs, pour confirmer le soutien à la filière agricole, il faut également refuser l'amendement PLR, qui vise à supprimer un garde-fou et à permettre de potentiels échanges intercantonaux de surfaces d'assolement. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va maintenant à Mme la députée Patricia Bidaux pour une minute vingt-deux.
Mme Patricia Bidaux (PDC). Je vous remercie, Monsieur le président. J'interviens simplement pour vous informer que, conformément à l'article 24 LRGC, je m'abstiendrai lors de ce vote, étant présidente de MA-Terre et donc directement concernée par le projet de loi. Je vous remercie.
M. Jean Burgermeister (EAG). Je pense que cette loi va globalement dans le bon sens et le groupe Ensemble à Gauche votera en sa faveur. J'aimerais simplement répondre rapidement à la rapporteure de minorité, Mme Zuber-Roy, qui regrette que la loi empêche les échanges de surfaces d'assolement entre les cantons. On ne peut pas sérieusement prétendre voter une loi en faveur de la promotion de l'agriculture tout en voulant d'ores et déjà anticiper le fait que Genève échangerait ses surfaces d'assolement avec d'autres cantons ! Ça signifie précisément renoncer aux terres agricoles ! C'est ça que Mme Zuber-Roy nous demande de faire dans le cadre d'une loi pour la promotion de l'agriculture. C'est insensé. Elle nous dit: «Aucun motif ne permettrait de le faire, même pas le sport, ou autre...» Non, effectivement ! Promouvoir et défendre les surfaces agricoles du canton, ça passe par le fait de les promouvoir y compris face aux intérêts de stades de foot ou autre, et nous devons maintenant trouver d'autres solutions pour l'aménagement du territoire au lieu d'empiéter systématiquement sur les zones agricoles. Ça demande en effet une meilleure planification du territoire, qui permette de faire cohabiter surfaces d'habitations, d'agriculture ou autre au sein de ce canton. Par conséquent, Ensemble à Gauche refusera cet amendement.
M. Eric Leyvraz (UDC). En tant qu'agriculteur et vigneron, je suis directement concerné par ce projet de loi. J'estime donc que je n'ai pas le droit de participer au vote. C'est l'article 24 LRGC qui s'applique. Merci.
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, merci du bon accueil que la commission a réservé et que visiblement les groupes vont réserver à ce projet de loi, qui est, vous le savez, une mise à jour importante et restructurante de notre loi sur la promotion de l'agriculture.
Les principes fondamentaux de cette loi ont été mentionnés. Je me permets de les rappeler brièvement, parce qu'ils ne sont pas anodins. Ils font l'objet d'un consensus, donc on en parle peu, mais ils sont fondamentaux dans les objectifs du canton de Genève en matière d'agriculture. Il s'agit de valoriser la souveraineté alimentaire, tout en étant conscients que Genève n'a jamais par elle-même réussi à alimenter sa population, y compris pendant la guerre; mais nous devons tendre vers la plus grande souveraineté alimentaire possible, avec les circuits courts que cela implique. Nous devons aussi accompagner le monde paysan à travers ces prochaines décennies, qui verront assurément notre climat se réchauffer. Des études pronostiquent qu'en 2070, Genève connaîtra le climat de Naples, et en 2090, celui des Pouilles. Ce qui veut dire que l'agriculture, comme d'autres secteurs de notre société, devra fondamentalement se réajuster par rapport à la nouvelle donne climatique. Cela est possible: l'agriculture au sud de l'Italie existe; elle n'est pas tout à fait la même en matière de produits, ni en matière de rythme ou d'horaires de travail pour les ouvriers agricoles, mais elle existe et c'est bien ce changement que nous devons accompagner. D'ici là, eh bien, le réchauffement climatique n'est pas un lent réchauffement d'un dixième de degré par année: ce sont des variations beaucoup plus brutales, ainsi qu'on le constate et qu'on le vit depuis ces dernières années, et ce projet de loi met en place des systèmes de protection à l'égard des agricultrices et agriculteurs, qui n'ont pas, comme entrepreneurs et comme indépendants qu'ils sont, à payer seuls le prix collectif du réchauffement climatique. Ce projet de loi vise à un soutien dans ce contexte-là.
Ce projet de loi porte aussi - et la Suisse en a beaucoup parlé lors des dernières votations populaires - sur les questions liées aux produits phytosanitaires, sur des enjeux environnementaux et de santé. C'est un enjeu de dialogue, pour lequel le Conseil d'Etat entend voir le monde agricole évoluer - il constate par ailleurs que celui-ci évolue. Il s'agit d'épauler notamment les nouvelles générations dans le passage à des techniques d'agriculture qui soient moins dépendantes des produits phytosanitaires, ayant moins besoin de ces intrants, parce que l'on sait que ceux-ci ont aussi un impact sur l'environnement immédiat et sur l'environnement plus largement, notamment sur l'eau et sur d'autres éléments. Le secteur agricole n'est de loin pas le seul ni le premier facteur de pollution de nos sociétés, mais l'agriculture doit, comme d'autres secteurs économiques, faire ces efforts, et ceux-ci doivent se faire dans le cadre de partenariats. C'est la vision du Conseil d'Etat: nous avancerons ensemble, avec le monde agricole, dans une perspective plus écologique. Je rappelle que les producteurs et productrices de culture biologique sont passés de 1% à 14% ces dix ou quinze dernières années. On voit donc qu'une tendance s'est mise en place, et il faut la soutenir.
Je rappelle également que si cette transition vers l'agriculture biologique est bien évidemment le fait des agriculteurs et est certainement encouragée par l'appui de l'Etat, elle est surtout le fait des consommatrices et des consommateurs. A quoi cela sert-il de demander à des paysans et des paysannes de produire du bio si derrière il n'y a pas de clients pour l'acheter, avec les prix que cela implique ? Cette transition, nous devons donc la mener collectivement.
J'ajouterai un mot sur le renouvellement des générations, un point saillant signalé par M. Poget, que je rejoins tout à fait à ce propos. J'ai toujours un énorme plaisir à rencontrer le monde agricole et en particulier les jeunes qui reprennent aujourd'hui avec envie, innovation et aussi avec un esprit contemporain des traditions anciennes et les mettent au goût de ce XXIe siècle. La profession, je l'ai vu notamment dans la viticulture, se féminise beaucoup. C'est un phénomène extrêmement intéressant de l'évolution du monde agricole et nous devons accompagner, comme nous le pouvons à l'échelle de l'Etat de Genève, cette transition des générations, qui renferme aussi l'évolution des pratiques.
Mesdames et Messieurs, Madame la rapporteure de minorité, j'entends vos doléances par rapport à l'alinéa 4 de l'article 20, qui, je ne vous le cache pas, n'était pas prévu au début, dans le cadre des travaux préparatoires. Il est issu de toute une série de débats et de propositions, mais je crois que Mme Zuber-Roy a eu l'honnêteté intellectuelle, comme toujours d'ailleurs, de reconnaître que ce n'est pas un sujet. Ce n'est pas un sujet au niveau fédéral et j'aimerais vous dire qu'il y a quelques années, quand j'étais chargé de l'aménagement, j'avais eu des discussions avec certains homologues d'autres cantons qui, eux, disposent de réserves de surfaces d'assolement extrêmement importantes: aucun de ces cantons n'a montré un intérêt à un échange possible, potentiel, ni aujourd'hui ni demain. Donc, Mesdames et Messieurs, ne nous disputons pas sur une clause qui n'est somme toute que déclaratoire ! Qu'elle existe ou qu'elle n'existe pas d'ailleurs, cela ne changera rien. Donnons un soutien unanime !
Pour conclure, j'aimerais relever que, à juste titre à mes yeux, le monde paysan se sent souvent entre le marteau et l'enclume: le marteau d'un marché libéralisé au niveau européen, voire au niveau mondial, avec des denrées qui finissent dans les rayons des supermarchés alors qu'elles viennent de l'autre bout de l'Europe, produites sans considération écologique, dans des conditions sociales et d'emploi inacceptables, inacceptables, y compris sur sol européen, qui viennent sans aucune limite pour la plupart d'entre elles concurrencer des denrées de qualité produites selon de hauts standards écologiques, dans de hautes considérations sociales et dans le respect des travailleurs agricoles que nous fournit le monde paysan suisse. Ça, c'est pour le marteau. L'enclume, le peuple suisse en a débattu: nous avons ces exigences en matière environnementale, vers plus de qualité, moins d'intrants - on l'évoquait -, ce qui est juste dans la philosophie, mais qui représente évidemment un poids pour les professionnels que sont les paysannes et les paysans de notre pays. Par conséquent, de ce sentiment de ras-le-bol, de ce sentiment d'être pris en étau entre des produits de concurrence déloyale et de hautes exigences sociales et environnementales au niveau national et cantonal, nous devons tous tirer des conclusions et une prise de conscience afin de soutenir le monde agricole.
Mesdames et Messieurs, nous devons choyer nos agricultrices et nos agriculteurs. Ils sont aussi l'incarnation de l'histoire de nos peuples, ils sont notre lien à la terre, ils sont les porteurs des cultures traditionnelles, du patrimoine, du savoir-faire, et sont aussi les aménageurs du paysage, de la beauté immatérielle qui est celle des paysages dans notre canton. Tout cela repose finalement sur les épaules de très peu de gens: 1% de la population genevoise et, au niveau national, seulement 3%. Il serait facile pour notre canton de se tertiariser, non ? Nous avons tellement d'activités qui rapportent financièrement beaucoup plus que l'agriculture. Mais non ! Nous devons garder 40% de notre territoire consacré à l'agriculture, aux circuits courts, et valoriser ainsi une tradition séculaire qui est la nôtre et qui fonde aussi notre identité. Merci de réserver un bon accueil à ce projet de loi. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je soumets à vos votes l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12766 est adopté en premier débat par 71 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 1 (souligné).
Le président. Nous passons à l'article 2 souligné.
Mis aux voix, l'art. 15, al. 2 (nouvelle teneur), est adopté.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 20, présenté par Mme Céline Zuber-Roy, demandant de biffer le nouvel alinéa 4.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 27 oui.
Mis aux voix, l'art. 20, al. 3 (nouvelle teneur), al. 4 (nouveau, les al. 4 à 7 anciens devenant les al. 5 à 8), est adopté, de même que l'art. 30H, al. 2 (nouvelle teneur).
Mis aux voix, l'art. 2 (souligné) est adopté, de même que l'art. 3 (souligné).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12766 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 78 oui (unanimité des votants). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Débat
Le président. Nous traitons à présent l'urgence suivante, à savoir les trois objets liés RD 1412, R 971 et R 972. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à Mme la rapporteure de majorité Danièle Magnin. (Brouhaha.)
Mme Danièle Magnin (MCG), rapporteuse de majorité. Merci beaucoup. Je prends volontiers la parole quand il y a du silence. Apparemment, c'est mieux que tout à l'heure. Monsieur le président, la commission s'est penchée sur l'examen de ces deux arrêtés et les a trouvés conformes à l'article 113 de la constitution genevoise. Bien entendu, il s'agit de droit supérieur à appliquer au droit cantonal, et M. le conseiller d'Etat Mauro Poggia nous a bien expliqué que Genève pouvait être plus restrictive, mais pas plus «relax» que ne le prévoyait le droit fédéral.
Par conséquent, aujourd'hui, nous nous trouvons, depuis le 26 juin, dans une situation très largement allégée, qui prévaudra jusqu'au mois de septembre. En septembre, croisons les doigts pour que le covid n'ait pas refait des siennes, en particulier avec les nouveaux variants qui peuvent être assez dangereux !
S'agissant des enfants qui sont en âge d'être au cycle d'orientation, la commission a décidé de proposer un amendement, depuis que nous avons voté cet arrêté en séance. J'imagine que M. le député Mizrahi vous le proposera. Merci.
Présidence de M. Jean-Luc Forni, premier vice-président
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, ce rapport nous soumet pour discussion deux arrêtés covid. L'un d'eux, l'arrêté du 25 juin 2021, ne pose pas de problème et abroge des mesures, conformément à l'ordonnance fédérale. En revanche, l'arrêté covid du 28 mai 2021, présenté comme étant une reprise sans aucun changement d'une ordonnance fédérale, est, lui, très discutable.
Pour rappel, l'ordonnance fédérale laisse la liberté aux cantons d'établir un fichier centralisé pour les données des personnes vaccinées. Notre arrêté du 28 mai va beaucoup plus loin et propose, premièrement, à l'article 2A, de constituer un fichier central pour les personnes vaccinées. Ce fichier servirait notamment pour la levée des mesures de quarantaine pour les personnes vaccinées - le «notamment» figure d'une manière explicite. Deuxièmement, l'article 5, alinéa 4, lettre a, indique: «qui ont été vaccinés contre le COVID-19 selon les recommandations de l'OFSP durant 6 mois qui suit la vaccination entièrement effectuée». Troisièmement, l'article 5, alinéa 4, lettre b, ajoute: «[qui] ont contracté le SARS-CoV-2 et sont considérés comme guéris durant 6 mois à compter de la levée de leur isolement par le Service du médecin cantonal». Ce fichier est clairement un flicage ! Et je suis très surpris que notre gauche l'accepte sans intervention et sans aucune remarque.
Comme déjà relevé, Genève applique deux règlements différents pour la gestion d'une seule pandémie. Tous les autres cantons suisses se basent exclusivement sur les ordonnances fédérales, sur les mesures destinées à lutter contre l'épidémie de covid-19. Genève applique évidemment le droit fédéral, et en plus l'article 113 de notre constitution. Je répète par ailleurs qu'il est dommage que les débats sur les arrêtés covid ne servent à rien ! Que le Grand Conseil les accepte ou qu'il les refuse ne change rien !
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe, Monsieur le rapporteur.
M. André Pfeffer. De plus, je rappelle aussi que les nombreux débats sur les mesures covid dans les commissions de la santé et de contrôle de gestion ne font l'objet d'aucun rapport et d'aucune information. Espérons que les interventions d'urgence et la nécessité d'une législation particulière arrivent enfin à terme ! Pour les prochaines crises, notamment celles liées à la situation désastreuse de nos finances, il faut espérer que le Conseil d'Etat fera preuve de plus de leadership et surtout qu'il ne s'égarera pas avec deux règlements pour la même cause. Enfin, le groupe UDC soutiendra l'amendement sur l'arrêté covid du 25 juin. Merci de votre attention.
M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'aimerais, à l'invitation de ma collègue et préopinante Mme Magnin, rapporteuse de majorité - que je remercie pour son rapport -, intervenir plus précisément sur la question de la situation des élèves du secondaire I et II qui ont des contre-indications médicales au port du masque. C'est une des questions qui a été soulevée au cours des travaux de commission et qui justifiait une réserve de notre côté, chez les socialistes, avant qu'on ne dépose cet amendement, réserve qui serait levée au cas où cet amendement serait voté. Il est soutenu par des collègues de tous les groupes.
En effet, nous avons constaté que dans le plan de protection de l'enseignement secondaire, la règle qui prévaut pour les élèves qui ont des contre-indications au port du masque est qu'ils doivent suivre l'enseignement à distance, ce qui pose des problèmes notamment juridiques, du point de vue du droit supérieur: c'est une exclusion de principe de ces élèves qui se trouvent ne plus être avec leurs camarades et qui ne peuvent plus suivre l'enseignement en direct, ce qui n'est évidemment pas bénéfique pour ces élèves. Ce que nous demandons, c'est que le Conseil d'Etat privilégie des alternatives, des mesures de type hygiène des mains, distance, aération des locaux, voire séparation physique, pour permettre d'éviter à ce tout petit nombre d'élèves de devoir simplement rester à la maison. Bien entendu, nous partons du principe que les choses vont bien se passer, qu'il n'y aura pas besoin d'une nouvelle obligation de port du masque, mais, si cela devait se présenter, nous demandons clairement au Conseil d'Etat de revoir le plan de protection sur ce point, et nous n'avons pas été satisfaits des réponses qu'il nous a apportées. De notre point de vue, l'enseignement à distance doit demeurer l'exception et non la règle pour ces élèves, pour leur bien, et aussi en tenant compte des impératifs de santé publique. Je vous remercie donc de voter cet amendement et je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci. La parole va maintenant à M. Jacques Blondin.
M. Jacques Blondin (PDC). Merci, Monsieur le président de séance. La commission législative a examiné les deux arrêtés dont fait état le rapport de majorité. Les quelques questions concernant notamment le port du masque pour les élèves empêchés de le porter ont fait l'objet d'une réponse subséquente et écrite du magistrat du département, que la commission souhaite remercier pour sa participation active et régulière aux séances consacrées à l'examen de ces arrêtés. Nos remerciements vont également à l'ensemble de ses collaborateurs et collaboratrices, dont la disponibilité et l'efficacité doivent être relevées.
Dans ce contexte, le groupe démocrate-chrétien souhaite toutefois obtenir quelques précisions de la part du conseiller d'Etat Mauro Poggia. La vaccination semble, au début de l'été, marquer un temps d'arrêt et plusieurs centres vont être fermés, alors que le variant delta fait son apparition à Genève et que le taux global des personnes vaccinées ne dépasse guère 50%. Sachant qu'une immunité collective requiert au moins un taux de 60%, comment le magistrat envisage-t-il la suite ? On a pu lire dans la presse que la collaboration des médecins de famille n'était pas une solution envisagée. Nous sommes également inquiets du manque de volonté du personnel soignant à se faire vacciner. Comment remédier à cet état de fait ? Enfin, il est important de veiller à ce que les certificats puissent être disponibles rapidement pour ceux et celles qui en ont besoin; les vacances estivales sont devant la porte. Nous comprenons fort bien les difficultés auxquelles est confronté le département, mais nous souhaitons obtenir des assurances quant à l'efficience des mesures mises en place, ce également en vue d'une éventuelle nouvelle vague, que personne ne souhaite, cet automne.
Indépendamment de ces questions, le PDC vous demande d'accepter les résolutions 971 et 972 ainsi que le rapport 1412 et bien sûr l'amendement qui vous a été présenté par M. Mizrahi. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole échoit maintenant à M. le député Bavarel.
M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président - comme il me semble que vous présidez cette assemblée, je ne suis pas sûr qu'il faille ajouter «de séance»... Donc merci, Monsieur le président !
Je voulais simplement revenir sur ce que vient de dire mon préopinant, M. le député Blondin. C'est peut-être le moment de dire merci aussi aux autorités - on l'oublie un petit peu -, aux gens qui ont oeuvré pendant cette pandémie et qui ont dû gérer quelque chose d'assez compliqué, avec énormément d'incertitude: les services du médecin cantonal... (Remarque.) ...les différentes personnes qui se sont occupées de cette problématique et le Conseil d'Etat dans son ensemble.
Merci aussi d'avoir suivi la constitution ! Bien évidemment, tout n'est pas parfait. Bien sûr, on n'a pas fait tout juste. Personne n'a fait tout juste. On voit qu'il y a eu de nombreux moments difficiles et si la commission législative s'est penchée sur ce sujet-là, et non la commission de la santé ou une autre commission, c'est bien pour qu'on vérifie que la Constitution fédérale et la constitution cantonale sont respectées. Je vous rappelle simplement le préambule de la Constitution fédérale: «Le peuple et les cantons suisses» - je ne vous lirai pas tout -, «déterminés à vivre ensemble leurs diversités dans le respect de l'autre et l'équité» - ça me semble essentiel aujourd'hui, dans ce qu'on vit -, «conscients des acquis communs et de leur devoir d'assumer leurs responsabilités envers les générations futures» - c'est une lourde responsabilité, à laquelle les Verts tiennent beaucoup -, «sachant que seul est libre qui use de sa liberté et que la force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres, arrêtent la Constitution que voici.» C'est dans cet état d'esprit que nous devons examiner ces différents arrêtés.
Aujourd'hui, la commission législative peut vous dire que la Suisse et Genève ne sont pas devenus des dictatures. Le président Parmelin l'a répété, et on a vu des attaques extrêmement dures vis-à-vis des ministres de la santé, que ce soit au niveau fédéral ou au niveau cantonal. On sait que nombre de nos concitoyens ont souffert de cette pandémie et en souffrent toujours; on sait que les conditions économiques ont été extrêmement difficiles pour certains et que d'autres s'en sont très très bien sortis. Aujourd'hui, nous avons des arrêtés qui vont vers un allégement, dont nous espérons qu'il pourra se poursuivre, mais en même temps, rien n'est certain. Nous allons passer l'été que nous espérons le plus serein possible, mais nous ne savons pas encore ce qu'il peut se passer en automne. Je dirais que la preuve que ce n'est pas une dictature, c'est que nous pouvons amender ces textes - les Verts vont soutenir l'amendement proposé, qui nous permet d'apporter des nuances à ces arrêtés. C'est pour cela que notre groupe vous invite à accepter ces deux arrêtés ainsi que l'amendement. Merci.
M. Patrick Dimier (MCG). Je dirai juste deux mots. J'ai constaté que le rapporteur de minorité n'avait pas évoqué Bâle-Ville et je me demandais si c'était un oubli ou si ce n'était pas nécessaire ! Merci.
Mme Danièle Magnin (MCG), rapporteuse de majorité. Pour ma part, je voudrais revenir justement sur le rapport de minorité pour signaler que les propos tenus sont vraiment contraires aux besoins de la communauté, à savoir que nous soyons informés, par la tenue, en effet, de registres destinés à ce but précis et pour une courte période, de ce qu'il se passe au sein de la population. Car sinon, comment la défendre ? Je rappelle que cet article 2A stipule, en son alinéa 3: «Les données personnelles sont conservées par l'Etat dans un registre auquel seules la Médecin cantonale, la Pharmacienne cantonale ainsi que les personnes qu'elles ont désignées à cet effet ont accès, dans les limites de l'alinéa 1.» Ensuite, à l'alinéa 4, il est dit: «Ces données seront détruites lorsque la pandémie SARS-CoV-2 aura été décrétée éradiquée, sous réserve qu'elles ne doivent être conservées plus longtemps en vertu d'une base légale.» Donc, Mesdames et Messieurs, s'opposer à cet arrêté pour ce motif-là me paraît contreproductif et me semble aller à l'encontre de la protection de la population, car on ne peut pas prendre de décision sans savoir de quoi on parle. Voilà, je vous remercie, Monsieur le président.
M. Edouard Cuendet (PLR). J'irai dans le même sens que mon excellent collègue Christian Bavarel en remerciant les autorités pour le travail accompli en lien avec cette pandémie. Evidemment, le groupe PLR a exprimé plusieurs réticences concernant les mesures touchant les commerces et notamment les restaurants, cafés et hôtels, mais grosso modo, et pour prendre une image plus générale, la gestion de la crise à Genève par le gouvernement a été assez exemplaire, à tel point que notre canton a attiré une nombreuse population extérieure, qui est venue non pas pour travailler, mais pour s'établir dans notre canton, compte tenu de la bonne gestion de la crise. Par conséquent, comme je le disais, sous réserve du problème des commerces, globalement... (Remarque.) Oui, ce sont ceux qui paient des impôts ! (Remarque.) C'est Ensemble à Gauche qui a fait la remarque, comme d'habitude, eux qui n'en paient pas ! (Rires. Commentaires. L'orateur rit.) Le fait est que, vis-à-vis de l'étranger, et quand on voit ce qu'il se passe dans d'autres pays pas très éloignés, nous pouvons être fiers de nos conseillers d'Etat et de nos autorités, ainsi que des HUG et de tout le système de santé, qui a géré la crise de manière exemplaire, et je pense que cela vaut la peine d'être relevé.
C'est pour cela aussi que je prends la parole - comme mon excellente collègue rapporteure de majorité - pour m'étonner de ces rapports de minorité... (Remarque.) ...toujours un peu excessifs du groupe UDC, qui, quand même, malgré tous les bénéfices et la qualité de Bâle-Ville, devrait admettre une fois que notre canton mène une gestion tout à fait louable d'une situation très difficile. Malgré des critiques portant sur des détails - et même des détails d'importance pour l'économie - globalement la situation est satisfaisante, on le voit aujourd'hui... (Remarque.) ...et c'est le lieu de remercier nos autorités. Merci !
Une voix. Bravo, Edouard ! (Rire.)
M. Pierre Vanek (EAG). Je dirai simplement trois mots. Premièrement, pour Edouard Cuendet: les députés d'Ensemble à Gauche paient des impôts, régulièrement, et des impôts qui ne sont pas optimisés, comme le sont certains d'autres bords. (Remarque. Rires.)
Deuxièmement, nous ne retirons rien des critiques adressées aux autorités au cours de cette crise. J'ai présenté un certain nombre de rapports de minorité qui n'évoquaient pas Bâle-Ville, mais qui évoquaient certaines carences et problèmes - et c'est normal qu'il y ait des carences et des problèmes, dans une situation inattendue de crise ! Mais, du point de vue du bilan général, on ne peut pas se contenter de simplement dire que tout a été très très bien, etc. Je ne répéterai pas ces éléments de critique ici.
Pour ce qui est des deux arrêtés qui nous occupent, qui sont pour l'essentiel des arrêtés d'allégement des mesures, nous nous félicitons qu'ils puissent être pris. Nous les voterons donc, tout comme nous voterons la proposition d'amendement de Cyril Mizrahi.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie pour vos propos, que je transmets évidemment à l'ensemble des équipes de l'Etat, notamment à la direction générale de la santé, mais aussi aux Hôpitaux universitaires de Genève et à l'ensemble du secteur privé, qui s'est également beaucoup mobilisé dans le domaine de la santé pour donner la réponse la plus efficiente possible à cette crise. Une crise qui nous a enseigné l'humilité: comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, les informations arrivaient au compte-gouttes et ce qui était vrai un jour devenait douteux le lendemain, voire faux le surlendemain, et il fallait parfois rapidement corriger le tir. Alors c'est vrai que les choses auraient sûrement pu être mieux faites sur certains points, mais je pense que quand on regarde dans le rétroscope, on peut se dire que nous n'avons pas trop à rougir de la manière dont cette crise a été gérée jusqu'ici. Mais elle n'est pas terminée - j'y reviendrai dans un instant.
En ce qui concerne le rapport de minorité, vous transmettrez, Monsieur le président, que la disposition qui figure dans l'arrêté du 28 mai concernant le transfert de données a été introduite précisément pour sauvegarder les intérêts de la population. Vous le savez, les données ne peuvent pas être transférées d'un fichier à l'autre sans l'accord de l'intéressé. Nous avons, dès le début de cette épidémie, ou plus exactement dès l'arrivée des tests - parce qu'il y a eu un décalage là aussi -, en mains de la médecin cantonale, une liste des personnes qui se sont révélées positives au covid. Cette liste est intéressante, puisqu'elle permet, dans les six mois depuis la guérison, d'obtenir un certificat covid. Il est donc important que l'on puisse transférer ces données qui sont en mains cantonales sur l'application mise à disposition par la Confédération, pour que celles et ceux qui ont été atteints par la maladie puissent malgré tout obtenir, dans les conditions fixées par la Confédération, la délivrance de ce certificat. C'est donc bien dans l'intérêt de la population que ce transfert a lieu, et il faut qu'il repose sur une base légale, raison pour laquelle, plutôt que d'agir en catimini, nous avons voulu procéder clairement: c'est la légalité qui l'impose, et même si tout le monde est présumé consentant à ce qu'on lui délivre un certificat lorsqu'il peut le recevoir, nous avons voulu que les choses soient claires. Voilà pour répondre à la critique qui a été formulée.
En ce qui concerne l'amendement de M. le député Mizrahi, il est empreint de bon sens. Je dirai que ce qui va sans dire va encore mieux en le disant. Je ne vois donc pas d'objection à ce que cet amendement soit voté. En revanche, il est évident que toutes les situations sont examinées par elles-mêmes: les situations dans lesquelles des jeunes ne peuvent pas porter le masque pour des raisons médicales sont bien entendu réglées au cas par cas; il ne s'agit pas de dire simplement: «Eh bien, puisqu'il en est ainsi, vous restez chez vous !», avec les conséquences que l'on sait sur les ruptures de scolarité. Mais, encore une fois, précisons-le clairement !
En ce qui concerne les questions de M. le député Blondin, elles sont bien sûr pertinentes: aujourd'hui, la vaccination s'essouffle. Elle s'essouffle, parce que nous avons connu un engouement: Genève était sans doute le canton qui a le plus rapidement vacciné sa population, grâce à la stratégie mise en place; nous avons également souhaité concentrer dans des centres de vaccination la livraison de vaccins plutôt que de les disperser avec des risques de pertes de doses - puisque vous savez qu'une fois que le flacon est ouvert, il ne peut pas être conservé d'un jour à l'autre -, et nous avons obtenu d'excellents résultats. Maintenant, c'est vrai qu'il y a une conjonction avec le nombre incompressible de personnes sceptiques, et, même si nous devons continuer notre activité pédagogique, il est à craindre qu'entre 10% et 15% de notre population reste sceptique à la vaccination. Personnellement, je le regrette, puisque ces personnes comptent sur le sens de la solidarité du reste de la population pour éviter de se faire vacciner elles-mêmes. Ce sont évidemment les premières qui se plaindront si par malheur il faut reprendre des mesures qualifiées systématiquement de liberticides. Entre les 50% que nous allons rapidement atteindre, je pense, ces prochaines semaines, et les 70%, voire idéalement 80%, nécessaires pour obtenir l'immunité collective, il y a encore du chemin à faire.
Nous devrons aller chercher celles et ceux qui ne sont pas contre, mais qui se disent: «Finalement, les choses vont mieux: si la Confédération assouplit les mesures, c'est forcément que nous allons vers une sortie de crise. Donc attendons que l'été se passe et nous verrons comment les choses surviennent cet automne !» C'est une erreur, c'est une grave erreur, bien sûr, puisque nous savons que les variants que nous connaissons aujourd'hui - mais encore une fois, quels seront les variants présents dans deux, trois ou quatre mois ? - notamment le variant delta - le variant indien -, peuvent être stoppés efficacement par les vaccins qui sont offerts en Suisse. Je pense que nous avons, il faut le dire, les vaccins les plus efficaces au monde; cela relève aussi un peu de la chance, puisque, quand ils ont été commandés, il subsistait des doutes par rapport au choix qui était présenté à l'ensemble de la communauté internationale; mais le choix a été bien fait par la Confédération. Celles et ceux qui sont vaccinés peuvent se dire que, sous réserve évidemment des quelques pourcentages qui existeront toujours - parce que le risque zéro n'existe pas -, la vaccination est un rempart efficace contre les variants que l'on connaît, notamment le variant delta. Mais celles et ceux qui ne sont pas vaccinés risquent malheureusement d'être atteints par la covid, par l'intermédiaire de ce variant, qui est plus agressif, plus contagieux et qui peut se disséminer très rapidement au sein de la population. Aujourd'hui, parce que nous faisons un séquençage systématique de tout nouveau cas positif, nous savons que pratiquement 20% des nouveaux cas sont à attribuer au variant delta. Il est à craindre qu'avant la fin de l'été, ce variant soit dominant au sein de notre population. C'est la raison pour laquelle il ne faut pas attendre. A celles et ceux qui se disent: «Attendons encore quelques mois», je réponds: n'attendez pas ! Prochainement - et on va encore le confirmer bientôt -, les gens pourront aller se faire vacciner même sans rendez-vous. Faites-le impérativement - je ne le répéterai jamais assez ! Je sais que cela me vaut systématiquement des attaques virulentes; je les accepte bien volontiers, c'est le job qui le veut. A celles et ceux qui ont encore des doutes sur le fait que cette covid-19 n'est pas une simple grippette, je suggère de regarder ou de revoir ce film présenté hier sur Léman Bleu, intitulé «Douze mois face au covid»: vous verrez le travail des soignants, admirable, bien sûr, mais vous verrez aussi les inquiétudes et les souffrances des patients, l'espoir de ceux qui s'en sont sortis. Je crois que c'est de nature à motiver celles et ceux qui n'ont pas une aversion profonde envers la vaccination, mais qui tout simplement se disent qu'ils peuvent attendre encore un peu. N'attendons pas ! C'est aujourd'hui qu'il faut agir. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. La parole n'étant plus demandée, nous passons au vote sur la R 971.
Mise aux voix, la résolution 971 est adoptée par 76 oui contre 5 non et 3 abstentions.
Le président. Nous passons à la R 972, pour laquelle nous sommes saisis d'un amendement présenté par M. Cyril Mizrahi et consorts:
«Complément à la résolution
demande au Conseil d'Etat
que les plans de protection des établissements scolaires secondaires (art. 9A de l'arrêté), en cas d'obligation de port du masque, privilégient, pour les élèves pour lesquels il est médicalement contrindiqué, des mesures alternatives à l'enseignement à distance (tests réguliers, vaccination, maintien des distances et hygiène des mains, séparations physiques, aération des locaux, etc.) afin de limiter l'isolement de ces élèves.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 87 oui contre 1 non et 4 abstentions.
Mise aux voix, la résolution 972 ainsi amendée est adoptée par 84 oui et 1 abstention.
Le Grand Conseil prend acte du rapport divers 1412.
Premier débat
Le président. Nous traitons maintenant l'urgence suivante, le PL 12377-A, classé en catégorie II, cinquante minutes. Je donne la parole en premier lieu à M. le député de Matteis.
M. Yves de Matteis (Ve). Merci, Monsieur le président. Pour rappel, le texte de départ du PL 12377 demandait la modification de l'article 15 de la constitution genevoise pour qu'il interdise également les discriminations basées sur l'identité de genre, ce afin - je cite le titre du projet de loi - de protéger les personnes transgenres des discriminations. Je me permets d'intervenir au nom de la commission des Droits de l'Homme, ou droits de la personne, qui vous demande, à l'unanimité de ses membres, tous partis confondus, de renvoyer ce texte à la commission, pour au moins deux raisons.
Premièrement, M. Falquet a inclus dans son rapport de minorité un amendement à apporter au texte, qui fait référence à d'autres motifs non valables de discrimination, motifs dont nous n'avons pas eu l'occasion de discuter de manière approfondie en commission.
Deuxièmement, les débats que nous menons actuellement en commission ont aussi été l'occasion de discussions autour de certains motifs non valables de discrimination, et il nous a semblé du coup qu'il serait opportun de rediscuter de ces thèmes, mais au sein de la commission, et non pas en plénière, ce également afin de faire gagner du temps à notre Grand Conseil.
Pour toutes ces raisons, je demande, au nom de la commission, le renvoi de ce texte à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) de notre Conseil. Merci, Monsieur le président.
Présidence de M. Diego Esteban, président
Le président. Merci, Monsieur le député. Il est pris note de cette demande. Je donne maintenant la parole au rapporteur de majorité. Monsieur Cyril Mizrahi, vous avez la parole, sur le renvoi.
M. Cyril Mizrahi (S), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Au nom de la majorité de la commission, je vous encourage évidemment à voter ce renvoi, qui permettra des travaux coordonnés sur la révision législative en cours concernant le projet de loi 12843 d'une part, et sur cette révision constitutionnelle d'autre part, afin que nous disposions de listes exemplatives de discriminations qui soient cohérentes. Merci beaucoup.
Mme Céline Zuber-Roy (PLR), rapporteuse de première minorité. La minorité votera évidemment pour le renvoi, qui lui donne raison. Je me permets de faire référence à mon rapport de minorité, qui indiquait qu'on ouvrait la boîte de Pandore: vouloir modifier une liste exemplative pour rajouter des exemples... Le projet de loi proposait d'ajouter une liste. La commission a décidé qu'il fallait rajouter deux autres exemples et maintenant, on nous demande un retour en commission, pour en rajouter d'autres. C'est une liste à la Prévert qui s'annonce. Je vous invite à renvoyer ce projet de loi en commission et ensuite à l'y enterrer. (Rires.) Je vous remercie.
Le président. Merci. Monsieur Florey, j'imagine que vous remplacez M. Marc Falquet. Vous avez la parole comme rapporteur de seconde minorité.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de deuxième minorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Effectivement, notre collègue Marc Falquet ne sera malheureusement pas présent à cette session. Nous avons longuement parlé de cet objet au sein de notre caucus. Il nous a bien expliqué la problématique et je remercie le rapporteur de majorité pour la bienveillance de ses propos vis-à-vis de M. Falquet. En effet, nous préconisons un renvoi en commission pour les faits qui viennent d'être expliqués. Nous soutiendrons donc ce renvoi et nous vous remercions d'en faire de même.
Le président. Merci. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat ne souhaitant pas s'exprimer sur le renvoi de cet objet en commission, je vous invite à vous prononcer maintenant sur cette proposition.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12377 à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) est adopté par 65 oui et 1 abstention.
Débat
Le président. Voici l'urgence suivante: les objets liés RD 1363-A et M 2768. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de M. Murat-Julian Alder, à qui je cède la parole.
M. Murat-Julian Alder (PLR), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ces objets devaient initialement passer aux extraits... (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Monsieur le rapporteur ! (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Poursuivez.
M. Murat-Julian Alder. Je vous remercie, Monsieur le président. Ces objets devaient initialement passer aux extraits, mais leur sortie en a été demandée, ce qui fait qu'ils ont atterri dans le fond de notre ordre du jour.
La commission judiciaire et de la police de notre parlement a décidé cet après-midi de solliciter l'urgence lors de la présente session dans le but de les renvoyer en commission, en particulier pour que celle-ci auditionne le Pouvoir judiciaire, qui n'a pas été entendu sur le sujet, ainsi que la commission composée des présidents des commissions judiciaires internes aux partis politiques représentés au Grand Conseil. Pour cette raison, Mesdames et Messieurs, je vous invite à soutenir la proposition de renvoi en commission. Merci de votre attention.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur. Le Conseil d'Etat souhaite-t-il s'exprimer sur cette requête ? (Remarque.) Oui, alors vous avez la parole, Monsieur Poggia.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Le Conseil d'Etat appuie la demande de renvoi en commission.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport RD 1363-A et de la proposition de motion 2768 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 42 non contre 23 oui et 2 abstentions.
Le président. Nous poursuivons les travaux. Monsieur le rapporteur Murat-Julian Alder, vous avez maintenant la possibilité de présenter les deux textes.
M. Murat-Julian Alder (PLR), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Je prends acte du refus de renvoyer ces deux objets en commission. Le groupe PLR vient de déposer un amendement à la proposition de motion, Mesdames et Messieurs, amendement que vous... (Brouhaha.)
Le président. Un instant, s'il vous plaît ! (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.)
Une voix. Ça sonne, mais on n'a même pas le temps d'arriver !
Une autre voix. Il faut sonner pour les votes !
Le président. Allez-y, Monsieur Alder.
M. Murat-Julian Alder. Je vous remercie, Monsieur le président. Dans la mesure où l'ensemble des membres du parlement n'étaient pas présents lors du vote, je réitère ma demande de renvoi en commission, conformément à la décision prise à l'unanimité par la commission judiciaire et de la police cet après-midi. Il s'agit de lui confier le mandat d'auditionner le Pouvoir judiciaire ainsi que la commission constituée des présidents des commissions judiciaires des partis politiques représentés au Grand Conseil. Ces deux instances n'ont pas été entendues dans le cadre des travaux, il est légitime de les recevoir. La commission judiciaire peut tout à fait traiter ces textes en priorité, raison pour laquelle je reformule ma proposition de renvoi en commission.
Le président. Bien, nous sommes donc saisis d'une deuxième demande de renvoi en commission. Le conseiller d'Etat ne souhaitant pas reprendre la parole sur cette requête, je la soumets à vos votes, Mesdames et Messieurs.
Mis aux voix, le renvoi du rapport RD 1363-A et de la proposition de motion 2768 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 55 non contre 36 oui.
Le président. Le débat continue... (Commentaires. Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) L'Entente peut-elle régler ses problèmes à l'extérieur de la salle afin que nous puissions reprendre la discussion ? Madame Christina Meissner, c'est à vous.
Mme Christina Meissner (PDC). Oh, cher Monsieur le président, c'était pour le point précédent relatif aux droits humains, pas pour celui-ci qui concerne des aspects judiciaires. Je renonce !
M. Alberto Velasco (S). Mesdames et Messieurs, la proposition de motion 2768 revêt la forme d'un excellent texte rédigé par M. Murat Alder, et je m'étonne que ce même député souhaite aujourd'hui un retour en commission. Mais enfin, vous savez, les voies du procureur sont impénétrables... (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Monsieur le député !
M. Alberto Velasco. ...elles arrivent jusqu'au sein de ce Grand Conseil !
Le président. Monsieur Velasco, un instant, s'il vous plaît !
M. Alberto Velasco. Non, mais attendez, je n'ai pas terminé !
Une voix. Oui, mais il te dit d'attendre.
Une autre voix. La cloche !
Des voix. Chut !
Le président. Vous pouvez poursuivre, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco. Bien, merci. Je disais, Monsieur le président, que cet excellent texte avait été rédigé par M. Murat Alder qui, étonnamment, estime maintenant qu'il faut consulter tout le Palais à ce sujet ! J'indiquais ensuite que les voies du procureur général sont impénétrables, et elles nous viennent je ne sais comment jusqu'ici.
Mesdames et Messieurs, cette disposition avait été introduite lors de la Constituante, et il semblerait qu'à l'heure actuelle, dans la pratique, elle se révèle lourde et mérite d'être allégée. La commission judiciaire était convaincue par ce texte déposé par M. Murat Alder; franchement, eu égard au fait que la commission a des objets bien plus importants à traiter, notamment des projets de lois, un retour en commission ne ferait que lui donner encore plus de travail, elle ne pourrait pas s'occuper de sujets plus pressants.
Ce texte est parfait, Mesdames et Messieurs, c'est une proposition de motion qui demande au Conseil d'Etat de rendre le système plus efficace, et il n'y a aucune raison de la renvoyer en commission, de refaire des auditions, encore des auditions, toujours des auditions pour revenir dans une année avec un rapport dans ce Grand Conseil. Il y en a un peu marre, Mesdames et Messieurs, et je pense qu'il est temps de voter cet objet qui est très bien rédigé. Merci. (Applaudissements.)
Mme Dilara Bayrak (Ve). Pour évoquer une voie un peu plus consensuelle et rassurer les députés qui tiennent absolument à auditionner d'autres personnes, je précise que cette proposition de motion aura une suite, c'est-à-dire un projet de loi du Conseil d'Etat qui reviendra à la commission judiciaire; les auditions nécessaires pourront être effectuées à ce moment-là. Je rejoins en partie les propos de M. Alberto Velasco: les auditions menées jusqu'à aujourd'hui, celles du CSM, suffisent amplement à constater un problème, à relever les soucis qu'il faut régler. Nous pouvons sans autre renvoyer cet objet au gouvernement, lequel reviendra vers nous avec un texte de loi, et c'est lorsqu'on traitera celui-ci qu'on pourra auditionner les différents acteurs. Je vous remercie.
M. Cyril Aellen (PLR). «Chères et chers collègues membres de la commission judiciaire et de la police, je m'adresse à vous en tant que vice-président de la CoJuP, en l'absence de son président Marc Falquet, absent lors de la plénière et avec son accord. Le PLR a demandé la sortie des extraits de notre motion de commission. [...] Ce soir, vers 17h15, nous voudrions demander, au nom de la CoJuP, l'urgence pour un renvoi en commission. Je vous remercie de valider votre accord par retour de ce courriel car l'unanimité de la commission est requise dans ce cas.» Signé: Sébastien Desfayes, vice-président de la commission.
Mesdames et Messieurs, c'est sur cette base-là que le PLR a voté l'urgence, il s'agissait de répondre à la requête qui nous avait été faite expressément. C'est la parole qui nous a été donnée, et c'est pour cela que nous avons accepté l'urgence. Alors si la parole des membres de la commission judiciaire et de la police ne vaut rien, si c'est là votre façon de procéder, eh bien c'est très simple: dès demain, le PLR demandera le retrait de tous les points qui figurent aux extraits, et on les traitera selon l'ordre du jour ordinaire. Si on ne peut plus se fier au bon fonctionnement de nos institutions et à la parole donnée pas plus tard que cet après-midi, eh bien on fera les choses différemment. Franchement, cette manière d'agir relève de l'escroquerie ! (Applaudissements.)
Une voix. Tu as oublié de demander le renvoi en commission !
Le président. Merci. Je cède la parole à...
M. Cyril Aellen. Et je redemande le renvoi en commission, évidemment !
Le président. Merci. J'imagine que le rapporteur de la commission et le magistrat, ayant déjà exprimé leur avis sur le renvoi, ne vont pas reprendre la parole ? (Remarques.) Très bien, alors j'ouvre la procédure de vote sur cette nouvelle demande.
Mis aux voix, le renvoi du rapport RD 1363-A et de la proposition de motion 2768 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 44 non contre 37 oui et 1 abstention.
Le président. La parole échoit maintenant... (Commentaires. Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.)
Des voix. Chut !
Le président. La parole échoit à M. François Baertschi.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. La salle s'échauffe pour un sujet qui n'en vaut pas la peine. Il s'agit uniquement de demander au Conseil d'Etat de formuler des solutions législatives pour nous aider à effectuer le travail en commission. Le but de la proposition de motion était justement d'aboutir à un projet de loi, et actuellement, on est en train de se noyer dans un verre d'eau en se lançant des insultes, en traitant les autres de menteurs. Il est très facile de taxer les gens de menteurs, de dire que la parole donnée n'a pas été respectée; ce sont de vils procédés qui n'ont rien à voir avec les principes qui devraient régir ce parlement.
Mesdames et Messieurs, cette question démontre qu'on touche ici à un véritable tabou: la politisation des juges. Voilà le sujet que certains ne veulent absolument pas aborder, ils multiplient les mesures dilatoires et autres feintes rhétoriques de bas niveau pour ne pas en parler, et je trouve que ce n'est pas digne de notre Grand Conseil. Votons cette proposition de motion qui n'a que peu de portée, dont le seul objectif est d'accélérer et de faciliter les travaux de notre assemblée. En vous voyant agir comme vous le faites, on croirait se trouver face à une mauvaise comédie de prétoire. Il faut cesser ce petit jeu et réaliser un travail parlementaire correct. Je vous demande dès lors de voter ce texte. Merci, Monsieur le président.
M. Pierre Bayenet (EAG), député suppléant. Je vais tenter d'expliquer à cette assemblée pourquoi nous sommes ici et de quoi nous parlons, parce que jusqu'à présent, excepté le renvoi en commission... (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Monsieur le député !
M. Pierre Bayenet. Je vais tenter de vous expliquer de quoi nous parlons...
Le président. Un instant, s'il vous plaît ! (Un instant s'écoule.) Poursuivez.
M. Pierre Bayenet. ...parce que le fond du problème n'est pas la question du renvoi en commission, mais celle des préavis du Conseil supérieur de la magistrature.
Comme vous le savez, Mesdames et Messieurs les députés, l'article 127 de la constitution genevoise prévoit que le CSM délivre des préavis avant l'élection des magistrats du Pouvoir judiciaire. Or l'article 116A de la loi sur l'exercice des droits politiques limite leur durée de validité à une année, ce qui fait que tous les six ans, lorsque l'ensemble de la magistrature est réélue, le CSM doit octroyer 435 préavis individuellement, pour chacun des juges qui se représentent. C'est complètement absurde, ce d'autant que le CSM exerce en tout temps une fonction de surveillance et aurait le droit de révoquer un magistrat qui ne remplirait pas correctement ses fonctions. En réalité, le travail est fait à double.
Dès lors, nous nous trouvons face à l'interrogation suivante: faut-il améliorer le système ou faut-il supprimer le mécanisme des préavis ? Une solution serait de dire que le CSM donne un préavis seulement lors de la première élection d'un magistrat du Pouvoir judiciaire et pour une durée illimitée, préavis qui pourrait être révoqué si le magistrat ne remplit plus correctement ses fonctions. Bref, diverses pistes doivent être envisagées, celle que je viens d'évoquer en est une; on pourrait également imaginer abolir purement et simplement le système des préavis.
L'un des problèmes qui se posent, c'est que la commission interpartis s'estime liée par les préavis, c'est-à-dire que si une personne demande un préavis et ne l'obtient pas, la commission interpartis va refuser de la désigner alors même que ce préavis ne peut pas faire l'objet d'un recours, ce qui fait qu'il n'y a pas de protection juridique des personnes auxquelles on le refuse. Il est impossible de recourir contre un refus de préavis, parce qu'il ne s'agit pas d'une décision, et on ne peut recourir que contre des décisions. Ainsi, les personnes peuvent se voir barrer l'accès à la magistrature sans aucune possibilité de s'en plaindre.
Je crois que tout le monde est d'accord sur le fait que le système actuel ne fonctionne pas: la commission de contrôle de gestion l'a relevé, les magistrats nous demandent de changer le dispositif, donc il faut faire quelque chose, c'est une certitude. Nous demandons simplement au Conseil d'Etat de formuler des idées de changements et nous attendons impatiemment ces propositions qui feront sans doute l'objet d'un vote quasi unanime - peut-être sans le PLR, vu l'esclandre qui a éclaté de ce côté de la salle. C'est pourquoi je vous invite à accueillir chaleureusement cette proposition de motion qui ne vise rien d'autre qu'une amélioration du système. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Sébastien Desfayes (PDC). Je me mets debout dans la mesure où j'ai été mis en cause. Il importe de revenir sur la genèse de cette proposition de motion. Celle-ci a été votée par l'ensemble de la commission judiciaire sur l'initiative d'un député PLR, à savoir Murat Alder. Nous étions tous satisfaits de ce texte qui, comme l'a souligné Pierre Bayenet, offre une large marge de manoeuvre au Conseil d'Etat pour améliorer le système des préavis.
En effet, ces préavis sont aujourd'hui automatiques, ils sont délivrés tous les quatre ans à l'ensemble des magistrats par le Conseil supérieur de la magistrature, ce qui nécessite un temps considérable pour un résultat extrêmement négligeable, sachant par-dessus le marché qu'ils sont toujours positifs. La commission judiciaire était très heureuse de ce projet; à ce stade, elle n'estimait pas nécessaire d'entendre les présidents de la commission interpartis ni le procureur général, puisque le texte serait ensuite concrétisé par un projet de loi.
Et là, badaboum, énorme surprise: alors que l'objet était inscrit aux extraits pour être adopté à l'unanimité de ce Grand Conseil, il se trouve que suite à des dissensions internes au PLR qui ne nous concernent pas, qui ne concernent pas cet hémicycle et encore moins la justice, Murat Alder s'est retrouvé minorisé; pour parler vulgairement, il s'est fait laver la gueule par certains de ses camarades de parti. Mais, encore une fois, cela ne nous regarde pas et ce n'est pas à cette proposition de motion d'en faire les frais.
Vous avez bien compris, Mesdames et Messieurs, que la virulence des interventions de certains députés PLR à mon endroit n'a rien à voir avec le PDC, rien à voir avec ce texte, rien à voir avec les commissaires qui, je le rappelle, l'ont accepté à l'unanimité; il s'agit d'une affaire interne au PLR qui n'est pas de notre ressort. Alors s'il vous plaît, Mesdames et Messieurs du PLR, réglez vos différends entre vous ! Quant à nous, votons cette proposition de motion sur le siège et attendons un projet de loi du Conseil d'Etat. Merci. (Exclamations. Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Je vous remercie. Madame Delphine Bachmann, le micro vous revient pour vingt-quatre secondes.
Mme Delphine Bachmann (PDC). Merci, Monsieur le président. Juste pour... (Brouhaha.)
Le président. Un instant, s'il vous plaît ! Mesdames et Messieurs, vous pouvez solliciter la parole si vous souhaitez vous exprimer dans cet hémicycle, mais en attendant, merci de respecter les personnes qui interviennent.
Mme Delphine Bachmann. En vingt-quatre secondes: je siège à la commission judiciaire, je suis commissaire PDC, je n'ai pas répondu à l'e-mail, car je ne suis pas d'accord avec les propos évoqués dedans. Cette proposition de motion demande au Conseil d'Etat de déposer un projet de loi au sujet duquel nous aurons l'occasion de mener des auditions. Le courrier électronique de cet après-midi sous-entendait que le texte n'était pas clair; en l'occurrence, pour moi, il est limpide et je le soutiendrai. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Madame la députée. La parole va maintenant à M. Pierre Conne pour une minute trente et une.
M. Pierre Conne. Je renonce, Monsieur le président.
Le président. Bien, il en est pris note. Monsieur François Baertschi, c'est à nouveau à vous pour une minute dix.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. On nous parle des préavis du Conseil supérieur de la magistrature, mais ce n'est pas ça, la véritable question; la question, c'est cette commission interpartis qui n'a pas d'existence légale, qui est néanmoins là et qui répartit de manière tout à fait arbitraire les tranches d'un gâteau judiciaire entre les divers partis. C'est cette commission interpartis qui pose problème, que le MCG dénonce et continuera à dénoncer; nous ne pouvons pas accepter ce système... un système que j'hésite à qualifier, parce que les termes que j'emploierais m'amèneraient devant les tribunaux, parce que je me montrerais assez dur dans mes propos. Mais il faut savoir que le problème est là: c'est la politisation de la justice, et nous allons nous y attaquer à la commission judiciaire. Voilà le fond du problème, le reste n'est qu'un écran de fumée. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Vous avez bien fait d'hésiter, Monsieur le député ! Monsieur le rapporteur de la commission, il vous reste une minute dix.
M. Murat-Julian Alder (PLR), rapporteur. Je vous remercie, Monsieur le président. Je remercie aussi certains de mes préopinants pour l'attention qu'ils m'ont portée, cela me va droit au coeur. Il ne s'agit toutefois de faire le procès ni de la proposition de motion ni de son auteur. Si je prends la parole, c'est pour préciser que les membres PLR de la commission judiciaire et de la police n'auraient pas voté la demande d'urgence cet après-midi s'il n'y avait pas un renvoi en commission à la clé ! Or pour que cette demande d'urgence soit valable, il faut l'unanimité de la commission, unanimité qui n'aurait pas été atteinte sans le vote des commissaires PLR.
Cela étant dit, Monsieur le président, j'ai déposé un amendement tout à l'heure que j'aimerais pouvoir présenter. Il consiste à modifier l'invite de manière à intégrer en amont du processus, avant le dépôt d'un projet de loi, une consultation de la commission interpartis, à laquelle d'ailleurs le MCG participe, sauf erreur de ma part...
Une voix. Non !
M. Murat-Julian Alder. Il s'agit également de supprimer les termes «assouplir» et «abroger» au profit d'une formulation plus large et plus souple, à savoir «améliorer l'efficacité et l'efficience». Je pense qu'on peut tous se retrouver là-dessus, Mesdames et Messieurs, et si j'ai réussi à obtenir l'unanimité de la commission sur la première solution, j'espère pouvoir réunir celle de notre Grand Conseil sur l'amendement que je vous propose ici et que je vous invite toutes et tous à soutenir. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur Alder. La parole est encore sollicitée par Mme Dilara Bayrak, qui en dispose pour deux minutes.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Merci, Monsieur le président, je serai brève. Je comprends les préoccupations de mon collègue Murat Alder. Le problème, c'est que la version de l'histoire qu'il nous a décrite est tronquée: si on en est arrivé au stade de voter l'urgence, c'est parce qu'il a d'abord voulu sortir des extraits un sujet qui avait pourtant été voté à l'unanimité de la commission ! Il figurait à l'ordre du jour des extraits et vous avez tenu à l'en sortir, Monsieur, et maintenant vous nous faites tout un foin parce qu'on ne vote pas le renvoi en commission !
Cela étant, je ne suis pas rancunière, parlons du reste. Vous nous présentez un amendement que le groupe des Verts est prêt à accepter pour mettre un terme au spectacle que vous nous offrez ici. En effet, vous vous énervez en arguant qu'il n'y a pas eu suffisamment d'auditions alors que celles-ci seront toujours possibles après. Il faut savoir choisir ses combats, il faut s'agiter lorsque c'est nécessaire; en l'occurrence, ce n'est vraiment pas l'endroit, car il s'agit d'un sujet parfaitement consensuel qui a recueilli l'unanimité de la commission.
Vous vous obstinez à faire tout un foin, très bien, mais sachez que vous êtes en tort et que le regard que nous portons sur le PLR est en train de changer, et pas dans le bon sens. Encore une fois, nous adopterons l'amendement pour parvenir à un accord et conclure cette histoire, parce que franchement, ça suffit. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Alberto Velasco pour une minute neuf.
M. Alberto Velasco (S). Merci, Monsieur le président. J'aimerais dire à mon collègue Murat Alder que les députés PLR sont des gens majeurs et que lors des travaux de commission, ils ont voté ce texte avec nous à l'unanimité, alors d'où sortez-vous cette histoire selon laquelle ils ne l'auraient pas soutenu ? A l'époque, ils n'avaient pas encore consulté les voies supérieures, donc ils l'ont adopté.
Ensuite, Monsieur le président, ce texte figurait de toute façon aux extraits, nous l'aurions traité demain au plus tard. Ce que je veux dire, c'est que le PLR ne nous fait pas de cadeau, absolument pas; c'est simplement qu'on vote ce soir au lieu de demain. Voilà, c'est très simple. Merci.
Le président. Je vous remercie. A présent, la parole va à M. Jacques Béné pour quarante-trois secondes.
M. Jacques Béné (PLR). Je vous remercie, Monsieur le président. J'ai une motion d'ordre à présenter: je souhaiterais que le Bureau se prononce - ou à tout le moins vous, Monsieur le président - quant à la validité du vote sur l'urgence intervenu en début de session, parce que s'il n'y avait pas unanimité de la commission, comme j'ai cru le comprendre d'après les propos de Mme Bachmann, il ne pouvait pas y avoir de demande d'urgence sur cette proposition de motion ! Aussi, je vous remercie de prendre position. S'il se trouve que le vote d'urgence n'est pas valable, eh bien ce point se retrouve dans l'ordre du jour, on n'a plus à en traiter maintenant. (Commentaires.)
Une voix. Mais il ira dans les extraits, alors !
M. Jacques Béné. Non, parce qu'on l'a sorti des extraits.
Le président. Je peux d'emblée vous répondre, Monsieur Béné, que la demande de la commission ne nous étant pas parvenue dans les temps, c'est comme demande PDC qu'elle a été enregistrée, étant donné que c'est M. Desfayes qui l'a proposée. Cette requête est tout à fait valable, le scrutin également.
M. Jacques Béné. Mais enfin, je suis désolé, Monsieur le président, cela nous a été présenté comme une demande d'urgence de la commission !
Le président. Vous n'avez plus la parole, Monsieur le député. A présent, c'est le tour de M. le conseiller d'Etat Mauro Poggia.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, débat passionnant s'il en est, puisqu'il touche un sujet qui va au-delà de la simple question des préavis du Conseil supérieur de la magistrature: il concerne les conditions qui doivent présider au choix d'un candidat à la magistrature du Pouvoir judiciaire. Pardonnez ma candeur, une réflexion m'a traversé l'esprit - vous ne m'en tiendrez pas rigueur: comment exiger d'un juge dont la qualité première devra être l'indépendance de passer, pour être présenté à une candidature, par un acte d'allégeance partisane ? C'est un point que je me réjouis de débattre avec mes collègues du Conseil d'Etat, et je pense que cela dépasse la question que vous avez discutée aujourd'hui, puisqu'il y a derrière tout cela une commission interpartis, et je ne doute pas qu'il sera difficile de trouver des majorités sachant que tous les partis représentés dans ce parlement, à l'exception d'un seul, ont des magistrats du Pouvoir judiciaire qui ont été choisis grâce à ce système. Je vous remercie.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Il ne reste plus de temps de parole au groupe PLR...
M. Jacques Béné. Monsieur le président !
Le président. Non, vous n'avez plus de temps, Monsieur Béné, merci de respecter le bon déroulement de la séance !
M. Jacques Béné. Mais vous n'avez pas répondu à ma question, Monsieur le président !
Le président. Si, j'y ai répondu, et on va arrêter le ping-pong ici, Monsieur le député.
M. Jacques Béné. Je suis désolé, mais c'était une demande de la commission !
Le président. Ce n'est pas la première fois que vous dérangez cette séance, je vous prie de faire preuve d'un peu de tenue ! Mesdames et Messieurs, nous passons maintenant au vote de l'amendement à la proposition de motion 2768 présenté par M. Murat-Julian Alder qui reformule l'invite initiale dans le sens suivant:
«Invite (nouvelle teneur)
à soumettre, dans les plus brefs délais, en concertation avec le Pouvoir judiciaire, et après consultation de la commission constituée des présidents des commissions judiciaires des partis politiques représentés au Grand Conseil, un projet de loi à l'attention du Grand Conseil tendant à améliorer l'efficacité et l'efficience du système des préavis du Conseil supérieur de la magistrature fondé sur l'article 127 de la constitution de la République et canton de Genève, du 14 octobre 2012.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 65 oui contre 20 non. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
Mise aux voix, la motion 2768 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 73 oui contre 9 non et 3 abstentions.
Le Grand Conseil prend acte du rapport divers 1363.
Premier débat
Le président. Nous enchaînons avec notre prochaine urgence, soit le PL 12717-A... (Brouhaha. Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Nous sommes en catégorie II, trente minutes... (Brouhaha. Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.)
Une voix. La cloche, peut-être ? (Un instant s'écoule. Le président agite la cloche.)
Une autre voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Monsieur Serge Hiltpold, rapporteur de majorité, à vous le micro.
M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Tout comme le point précédent, ce projet de loi aurait pu figurer aux extraits, mais là, les rôles sont inversés: un rapport de minorité a été déposé par M. Velasco, car le groupe socialiste - enfin, un très maigre pourcentage du groupe socialiste - était opposé à la vente de cet appartement. Un peu d'histoire: puisqu'on ne pouvait pas placer l'objet aux extraits, lors de la dernière session, le parti libéral-radical avait sacrifié une demande d'urgence afin qu'on boucle rapidement l'aliénation de ce bien, mais notre proposition a été refusée pour des raisons puériles et d'ordre tactique. Du coup, l'urgence a été redemandée tout à l'heure par le Conseil d'Etat; le fond du sujet reste le même, mais les positionnements politiques ont évolué, ce qui fait que, par miracle, le texte arrive maintenant devant nous.
Il s'agit d'un projet modeste, mais qui met en lumière tous les côtés négatifs du travail parlementaire. En soi, cet appartement est d'une importance relativement mineure. Sa valeur est estimée à 800 000 francs et le produit de la vente servira, selon la Faculté de médecine de l'Université de Genève, à alimenter le fonds pour le logement étudiant. Je crois d'ailleurs que cet élément a été mal compris lors des débats, parce qu'avec un effet multiplicateur, ces 800 000 francs pourraient rapporter 4 millions à la Fondation universitaire pour le logement des étudiants.
A longueur d'année, on nous rebat les oreilles avec les difficultés que rencontrent les étudiants pour se loger... (Brouhaha.)
Le président. Un instant, s'il vous plaît ! Je ne vous entends plus, et il serait utile que je puisse écouter vos propos. (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Poursuivez.
M. Serge Hiltpold. Voilà, merci. Je disais qu'on nous rabâche à longueur d'année que les étudiants ont des problèmes de logement, ce qui est vrai, et là, en raison de la position d'un député - d'un seul député ! -, la commission des finances a perdu deux ans avec ces travaux.
Je vais simplement vous citer un extrait du rapport, Mesdames et Messieurs, parce que je ne pense pas que ce projet de loi nécessite qu'on y passe plus de temps que ça: «Pour information, la faculté de médecine de l'UNIGE a l'intention d'utiliser le produit de cette vente pour aider les étudiantes et étudiants, doctorantes et doctorants et professeurs invités à se loger au meilleur prix, notamment dans le cadre de la résidence pour étudiants qui est en cours de réalisation par la Fondation universitaire pour le logement étudiant (FULE) à proximité immédiate du centre médical universitaire.»
Pour conclure, je remercie les autres membres socialistes de la commission des finances qui se sont montrés un petit peu plus raisonnables sur le vote final, qui ont fait preuve d'une vision plus large, et je vous invite à accepter cette proposition d'aliénation qui mérite notre soutien et permettra d'alimenter le fonds pour le logement étudiant. Merci.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Personnellement, je ne comprends pas l'urgence qu'il y a pour le Conseil d'Etat et surtout - surtout ! - pour le PLR à vendre cet objet, c'est quand même douteux. Il s'agit d'un appartement qui a été donné à l'université. Parfois, Mesdames et Messieurs, l'UNIGE s'adresse à nous pour aider des étudiants qui ne trouvent pas de toit car, vous le savez, il n'y a pas de logements d'urgence; certains étudiants se trouvent dans des situations dramatiques, parfois même des couples qui connaissent des problèmes et ont besoin d'un logement dans l'immédiat. Or voici un bien libre à disposition !
On nous dit: «Les 800 000 francs seront utilisés pour construire des logements étudiants.» Mais écoutez, les taux d'intérêt sont pratiquement à zéro aujourd'hui ! L'université a suffisamment d'actifs pour aller emprunter sur le marché avec des taux aussi faibles ! Vous n'allez pas me raconter qu'elle a besoin de ce «levier», entre guillemets, pour dégoter une somme et se mettre à construire, on se paie notre tête, là !
Mesdames et Messieurs les députés, construire un immeuble à Genève, ça prend quatorze ans ! Ici, vous avez un appartement disponible sur-le-champ, opérationnel pour recevoir des gens, pour loger des étudiants, pour aider des personnes en difficulté. Et soudainement, l'université voudrait se départir de ce bien, prétextant que les 800 000 francs seront utilisés pour bâtir des logements. Mais elle peut très bien le faire aussi, elle peut conserver cet objet tout en construisant des habitations pour les étudiants !
On parle d'un actif, Mesdames et Messieurs; aujourd'hui, à Genève, le problème n'est pas l'argent pour construire, c'est le terrain à trouver pour construire, parce qu'il n'y en a plus. Disposer d'un logement pour des situations d'urgence ou pour les étudiants, cela représente une valeur plus importante que 800 000 francs à investir dans un fonds. De toute façon, l'UNIGE possède suffisamment d'actifs pour lever des capitaux et construire. Alors, Mesdames et Messieurs, je vous demande de refuser la vente de cet appartement et de dire non à ce projet de loi. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Je cède maintenant la parole à M. Jean Burgermeister. (Un instant s'écoule.)
M. Jean Burgermeister (EAG). Ah, vous m'avez donné la parole ? Pardon, je n'avais pas entendu, je croyais que quelqu'un d'autre s'exprimait. Merci, Monsieur le président. Alors évidemment, Mesdames et Messieurs, il faut que l'université ait les moyens de financer des logements pour les étudiants, lesquels en ont grandement besoin, mais je m'étonne très sincèrement que, pour ce faire, elle doive jouer le rôle d'un promoteur privé ! Cela signifie-t-il que si la personne en question n'avait pas légué son bien à l'Université de Genève, celle-ci ne pourrait pas construire de logements pour ses étudiants ?! Les possibilités d'habitations pour les universitaires dans notre canton dépendraient-elles du bon vouloir de tel ou tel propriétaire qui léguerait ou pas son appartement à sa mort ?
Présidence de M. Jean-Luc Forni, premier vice-président
Ce que vient de nous indiquer le rapporteur de majorité et ce que nous explique le Conseil d'Etat, c'est surtout qu'il y a un manque criant de ressources pour les logements étudiants, Mesdames et Messieurs. Or cela relève de la responsabilité de l'Etat, pas de celle de la commission des finances, dont une partie s'oppose à ce que l'UNIGE endosse le rôle de promoteur immobilier. En ce qui me concerne, je fais partie de la petite minorité qui a refusé l'aliénation... (Brouhaha.) Monsieur le président ? (Un instant s'écoule.) Y a-t-il encore un président ?
Une voix. Non, il n'y en a plus.
M. Jean Burgermeister. Ah bon ? C'est juste qu'il y a beaucoup de bruit...
Le président. Poursuivez, Monsieur le député, on vous entend toujours.
M. Jean Burgermeister. Vous m'entendez ?
Le président. Pour ma part, je vous entends.
M. Jean Burgermeister. Je vais être obligé de parler très fort, voilà tout.
Le président. Allez-y.
M. Jean Burgermeister. En commission, nous avons voulu obtenir plus de détails quant aux raisons qui ont poussé l'université à vendre, mais cette requête a été rejetée par la majorité qui voulait visiblement accélérer le processus. Excusez-moi, mais je ne comprends toujours pas l'urgence qu'il y a à voter ce projet de loi ! Le mois dernier, c'est le PLR qui sollicitait l'urgence; cette session-ci, c'est le Conseil d'Etat. Il est difficile de comprendre l'empressement dont certains font preuve ici à se débarrasser de cet appartement.
Je rappelle qu'il y a des besoins importants ne serait-ce qu'en logements d'urgence dans ce canton; l'Etat de Genève aurait dû, si l'UNIGE ne voulait pas ce bien, se porter acquéreur. Tout cela démontre avant tout l'absence totale de véritable politique publique en matière de logement, et c'est précisément ce que nous critiquons à travers notre refus de cette vente qui paraît aussi inutile que précipitée. (Applaudissements.)
M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, nous ne parlons pas de démolition, ici. Ce logement restera un logement, il passera simplement d'une main à une autre. Que peut faire l'université d'un appartement de 80 mètres carrés en PPE ? Effectivement, elle peut le garder, elle peut le faire gérer par une régie, mais est-ce vraiment là son rôle ? Non, Mesdames et Messieurs ! Le rôle de l'université, c'est de se donner les moyens de construire au travers de sa propre fondation, et 800 000 francs, eh bien c'est une coquette somme, c'est une part importante de fonds propres qui va lui permettre de concrétiser d'autres projets. C'est ce qu'on appelle de la saine gestion. Voilà ce qu'on peut dire à ce stade.
Présidence de M. Diego Esteban, président
J'entends les griefs formulés à l'encontre de l'OBA. Deux estimations de l'appartement ont été effectuées; le prix qui est aujourd'hui proposé sur le marché pour que l'Etat de Genève puisse aliéner le bien est certes correct, mais il pourrait être plus élevé. C'est juste de la bonne gestion, Mesdames et Messieurs: vendre un actif pour réaliser d'autres logements. Merci à l'université de nous faire cette proposition et d'utiliser raisonnablement une donation - même si les termes «donation» et «aliénation» sont des gros mots pour certains dans ce parlement ! Le parti démocrate-chrétien soutiendra ce projet de loi.
Une voix. Bravo !
Une autre voix. Très bien !
Le président. Merci, Monsieur le député. J'entends de nombreuses discussions annexes qui pourraient très bien avoir lieu à la buvette. Oui, Monsieur Burgermeister, je parlais de vous ! Madame Danièle Magnin, c'est votre tour.
Mme Danièle Magnin (MCG). Merci, Monsieur le président. Voyez-vous, moi aussi je cherche un logement à Champel, et je ne suis pas étudiante. Aujourd'hui, j'ai reçu un avis pour un appartement de trois pièces, 85 mètres carrés, sis chemin des Crêts-de-Champel, la copie conforme de celui que l'université veut vendre, et il est en location pour 3500 francs par mois. Quel étudiant peut se permettre un loyer de 3500 francs par mois ? Ici, il s'agit typiquement d'un objet de luxe dont l'UNIGE doit tirer profit pour pouvoir ensuite redistribuer l'argent différemment. Le MCG soutiendra ce projet de loi, Mesdames et Messieurs, et je vous invite tous à en faire autant, parce que dire non est une pure absurdité.
Une voix. Très bien !
Le président. Merci, Madame la députée. Je cède la parole à M. Rémy Pagani pour quarante-trois secondes.
M. Rémy Pagani (EAG). Oui, Monsieur le président, merci. Mesdames et Messieurs les députés, sur le fond, d'abord, je trouve que l'Etat comme l'université n'ont pas à spéculer sur des appartements, et je ne comprends pas comment le canton de Genève peut simultanément soutenir le logement social.
Mais la vraie question qui se pose est la suivante: à qui va-t-on vendre le bien ? J'ai interrogé notre représentant à la commission qui a traité ce sujet, et personne n'a spécifié à qui il allait être cédé. Il se trouve que j'ai un peu d'expérience dans le domaine, et l'insistance avec laquelle certains font pression sur ce parlement porte à croire, ce d'autant que les informations nécessaires n'ont pas été communiquées, que ce logement est déjà destiné à quelqu'un en particulier. Aussi, je souhaiterais que le magistrat concerné se prononce et nous indique à qui il va revenir, s'il est mis librement sur le marché ou si un acquéreur s'est déjà présenté. Merci de votre attention.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Pour répondre à mon collègue, nous avons obtenu toutes les informations par rapport à cet appartement. L'acquéreur est connu, cela fait deux ans qu'il attend, l'université elle-même ne tire aucune utilité de ce bien et a davantage besoin des fonds qui seront dégagés de la vente afin de créer de nouveaux logements pour les étudiants. Franchement, s'opposer à un tel projet alors que certains étudiants à Genève se trouvent dans des situations d'extrême précarité, à plus forte raison avec la crise covid, empêcher ces derniers d'avoir accès à des logements qui pourraient être libérés grâce au montant perçu, c'est idéologique, ça n'apporte rien au débat, ça ne fait que ralentir le processus !
Je n'avais pas accepté l'urgence sollicitée par le PLR le mois dernier, parce qu'à l'instant T, la situation ne paraissait pas pressante, mais aujourd'hui, le Conseil d'Etat revient vers nous en nous disant: «Il faut libérer cette habitation qui est inoccupée, des montants sont bloqués, un acheteur attend.» A la rigueur, l'acquéreur n'est pas si important, mais quand on sait qu'il y a un appartement vide où il n'est pas possible de loger des étudiants parce qu'il est trop vieux, sincèrement, pourquoi freiner la démarche ? Comment en est-on arrivé à ce stade ? Ça suffit ! Depuis le début de la session, c'est-à-dire 17h, on n'avance pas, on renvoie les objets en commission, on piétine... Assez de ce comportement chicanier tant à droite qu'à gauche, maintenant on vote les projets et on avance ! (Applaudissements.)
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. En effet, l'appartement est libre, donc je signale à ma collègue que passablement d'étudiants pourraient y être logés, des personnes qui recherchent une habitation et se trouvent en difficulté; s'il est scandaleusement libre, c'est la faute de ceux qui en ont la responsabilité !
Ensuite, il est quand même bizarre - très bizarre ! - que l'objet ne soit pas mis en vente publiquement. Comme l'a relevé le député Pagani, ça signifie sans doute qu'il y a déjà quelqu'un qui est sur le coup depuis deux ans, et c'est peut-être pour ça que vous êtes stressé, Monsieur le conseiller d'Etat, on vous met la pression pour finaliser la vente.
Franchement, vous demandez l'urgence, mais il n'y a pas d'urgence ! Si vous sollicitez l'urgence, ça veut dire qu'il y a une personne derrière ! Pouvez-vous nous indiquer, Monsieur le conseiller d'Etat, si la vente est publique ou si quelqu'un s'est déjà porté acquéreur et que le prix a été négocié à l'avance, bien à l'avance ? On aimerait savoir qui est l'acheteur, s'il vous plaît. Il s'agit d'un bien public, on a le droit d'être au courant. Merci. (Applaudissements.)
M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité. Cette discussion est irréelle ! Monsieur Velasco, je me demande si vous siégiez en commission avec nous ou si vous étiez en train de faire autre chose. L'acquéreur est connu, il a été nommé, mais vu que nous sommes en séance publique, je ne pense pas qu'il soit nécessaire de citer son nom devant tous les téléspectateurs.
J'aimerais vous mettre face à vos responsabilités, Monsieur Velasco. On parle de mutualisation du logement, on parle de coopératives d'habitations; vous soutenez la thèse qu'il vaut mieux conserver un appartement dans une PPE à Champel plutôt que d'alimenter un fonds pour le logement étudiant avec un effet de levier multiplié par cinq ? Est-ce que ce raisonnement tient objectivement la route ? Essayez simplement d'imaginer que je ne suis pas PLR, mais socialiste, essayez de faire cet effort. Vous qui soutenez les coopératives, la mutualisation, eh bien c'est exactement ce qu'il faut faire ! Alors stoppez là votre dogmatisme, s'il vous plaît.
Oui, il s'agit d'une urgence: je vous rappelle que cet appartement a été cédé à l'université en 2014. Ça fait sept ans ! Ça fait sept ans qu'on discute d'une vente pour alimenter un fonds et plus de deux ans que le bien est vide alors qu'un acquéreur est prêt à l'acheter, que l'université est d'accord, que l'OBA est d'accord. Et juste parce qu'un député socialiste s'obstine de façon dogmatique, on perd deux ans ? Ce n'est plus possible, ça suffit ! Je vous remercie de voter ce projet de loi.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Non, ça ne fait pas sept ans, Monsieur. Il y a combien de temps que le texte a été traité à la commission des finances ? Même pas une année ! Si le processus dure depuis sept ans, ce n'est pas la faute d'un député ni de la commission des finances, c'est peut-être que l'objet n'a pas été déposé à temps et que les choses ont traîné. Et si l'appartement est resté vide, eh bien ce n'est pas le problème de la commission des finances non plus, il y a d'autres responsables en cause.
Mais vous savez, Monsieur le député, je tiens à vous dire que je suis à la fois pour verser 800 000 francs et conserver le logement; on peut très bien alimenter le fonds de la Fondation universitaire pour le logement des étudiants tout en gardant l'habitation. Les deux sont possibles, Monsieur, il y a suffisamment de moyens pour cela, il n'y a pas besoin d'aliéner un actif qui est plus que nécessaire. Aujourd'hui, à Genève, posséder un bien immobilier est plus utile que des fonds, vous le savez très bien, eu égard à la rareté des objets sur le marché. Et on peut loger dans cet appartement des personnes, des familles, des étudiants qui sont en difficulté, je peux vous le dire. Merci.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je ne tenais pas nécessairement à prendre la parole, mais je me dois de rassurer M. le député Velasco: je ne suis pas stressé, le Conseil d'Etat n'est pas stressé. Toutefois, il est vrai que si ce projet de loi devait patienter à sa place dans votre ordre du jour ordinaire, il y a fort à parier que la vente ne se réaliserait pas avant quelques années.
Si l'université possède un appartement isolé dans un immeuble, qu'elle peut le rentabiliser en le vendant, après expertise, à la valeur du marché, que quelqu'un s'est porté acquéreur, eh bien nous avons tout intérêt à la laisser obtenir cette somme et l'investir de manière plus efficace pour poursuivre les buts qui sont les siens.
Enfin, je ne comprends pas quand on nous dit qu'il serait possible de verser les 800 000 francs tout en conservant le logement: comment peut-on obtenir le prix de vente tout en demeurant propriétaire ? Il s'agit sans doute d'une nouvelle forme d'économie qui m'échappe. Je vous remercie. (Rires. Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, c'est le moment de vous prononcer sur ce texte.
Mis aux voix, le projet de loi 12717 est adopté en premier débat par 61 oui contre 15 non.
Le projet de loi 12717 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12717 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 61 oui contre 14 non.
Premier débat
Le président. Nous poursuivons le traitement des urgences avec le PL 12989. Cet objet est classé en catégorie II, trente minutes. Avant que M. Ivanov ne refasse de remarque, je précise que la place des députés pendant la session est dans la salle; nous sonnons peu de temps avant le vote, donc se trouver à la buvette ne constitue pas une excuse pour invalider un résultat ! Cela étant dit, afin qu'elle puisse nous présenter ce projet de loi, je donne d'abord la parole à Mme la conseillère d'Etat Fabienne Fischer.
Mme Fabienne Fischer, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi que je vous présente ce soir a pour objectif de soutenir financièrement les travailleurs et travailleuses aux revenus modestes impactés par la crise covid. Il s'agit d'une aide à fonds perdu s'inscrivant dans la continuité des mesures déjà prises par la Confédération. Les personnes pour lesquelles les employeurs doivent recourir aux RHT ne perçoivent que 80% de leur traitement; lorsque vous touchez le salaire minimum, Mesdames et Messieurs, c'est-à-dire 4111 francs net par mois, ce taux correspond à environ 3200 francs. Tout le monde sait qu'il n'est pas possible de vivre correctement avec un tel montant à Genève. Pourtant, ces salariés travaillent à 100%. Ce que vise l'indemnisation proposée ici, c'est permettre aux employés modestes de s'en sortir dignement et de manière autonome, sans avoir besoin de recourir à l'aide sociale.
Dans le cadre des discussions que j'ai menées tant avec les employeurs que les représentants du personnel, les syndicats, chacun a reconnu que les RHT ont permis d'une part de maintenir notre tissu économique en vie, d'autre part de préserver l'emploi. Aujourd'hui, nous sommes tous très heureux de sentir les premiers frémissements de la reprise; les perspectives dans certains secteurs sont tout à fait positives. Toutefois, un certain nombre de domaines ne pourront prendre part au redémarrage qu'avec un certain décalage; je pense par exemple à l'hôtellerie, à l'événementiel, au tourisme, au nettoyage, autant de branches dans lesquelles les petits salaires sont légion. Pour ces gens, après seize mois de crise, seize mois de revenus à 80%, s'ils avaient encore quelques réserves, celles-ci sont dorénavant épuisées, et même depuis longtemps. Ce que nous voulons éviter, c'est que ces personnes doivent faire appel à l'aide sociale ou, pire encore, se retrouvent dans des situations de précarité parce qu'elles ne peuvent plus payer leur loyer ou leurs primes d'assurance-maladie et renoncent à se faire soigner alors qu'elles en auraient besoin. Nous devons leur offrir un coup de pouce, et c'est précisément le but du présent objet.
Concrètement, en quoi consiste le dispositif ? Il se fonde sur le système des RHT, c'est-à-dire les réductions de l'horaire de travail, mais ne consiste pas en une distribution de RHT à proprement parler. Les RHT sont financées par un budget fédéral qui relève de la loi sur le chômage et est basé sur le principe des cotisations prélevées ainsi que sur un droit d'assurance; le projet de loi ne fonctionne pas selon ce mécanisme. Il s'agit d'une aide complémentaire cantonale émargeant au budget de l'Etat et ciblant les travailleurs et travailleuses qui, aujourd'hui, ne perçoivent plus le revenu minimum, comme je l'ai expliqué tout à l'heure. Ainsi, on se réfère aux RHT, mais on n'applique pas de dispositions d'assurance sur le mode de la LACI, on octroie un supplément qui provient du budget cantonal.
L'allocation maximale apportée est de l'ordre de 800 francs par mois; elle sert à couvrir des besoins fondamentaux, des charges fixes, en particulier le loyer et les primes d'assurance-maladie. Comme bon nombre d'autres prestations sociales, telles que celles de la LMC, la loi en matière de chômage, cette aide est destinée aux personnes domiciliées dans le canton de Genève. Le critère de résidence est largement reconnu en politique sociale; on le retrouve notamment dans la LMC, dans la loi de soutien aux travailleurs et travailleuses précaires votée au mois de mars dernier ainsi que dans de nombreuses autres dispositions.
Sur le plan financier, les montants requis dans le cadre du projet de loi sont des plafonds qui ont été estimés sur la base des chiffres de mai 2021. Or, avec la reprise, le nombre de bénéficiaires des RHT diminue chaque mois. D'après les estimations, le dispositif concernerait 5000 personnes en juillet, 3700 en août, 2800 en septembre. Les montants alloués seraient dégressifs selon la même logique: 2,9 millions en juillet, 2,2 millions en août et 1,7 million en septembre. La procédure est calquée sur celle des RHT dans l'idée vraiment basique d'éviter aux employeurs de nouveaux formulaires à remplir, de nouvelles démarches à entreprendre. L'objectif est donc d'inviter les entreprises qui ont effectué des demandes de RHT à compléter celles-ci en indiquant les salariés pour lesquels elles sollicitent le complément cantonal. Il faut être pragmatique, il faut être simple, il faut être efficace pour que cette mesure déploie ses effets qui, je le rappelle, sont limités dans le temps.
Je précise que le destinataire de l'indemnité, à teneur de l'article 4, n'est pas l'employeur, mais clairement l'employé qui aura le droit de réclamer à son patron, au moment où celui-ci aura perçu la subvention, un versement direct. L'OCE s'est déjà engagé à informer toutes les sociétés susceptibles d'effectuer une requête quant à la manière dont elles devront procéder; une fois que les prestations auront été distribuées, les destinataires finaux, c'est-à-dire les salariés, seront également informés et pourront faire valoir leurs droits.
En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, nous commençons à distinguer le bout du tunnel. A ce jour, nous avons distribué quelque 280 millions de francs à fonds perdu aux entreprises genevoises pour leur permettre de rester en vie. Il faut maintenant accompagner la reprise; des difficultés spécifiques se font jour dans certains secteurs. La visée du projet de loi qui vous est soumis, c'est d'éviter que tous les efforts que nous avons consentis au cours des derniers mois soient réduits à néant et qu'un nombre important de travailleurs et travailleuses tombent dans la précarité. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
M. Jacques Béné (PLR). Je remercie Mme la conseillère d'Etat d'être venue devant la commission de l'économie nous présenter ce projet de loi. En revanche, je la remercie moins d'essayer d'utiliser des lois fédérales pour mener une politique cantonale. Ce texte détourne en effet le but premier des RHT pour faire de l'aide sociale ! Vous l'avez dit vous-même dans votre présentation, Madame, en évoquant le critère de résidence des travailleurs - critère qui est d'ailleurs contesté par certains groupes politiques qui ont déposé des amendements à ce sujet: vous avez indiqué qu'il s'agissait d'un principe courant en matière sociale. Oui, en matière sociale ! S'il s'agit ici de politique sociale, laquelle ne relève pas de votre département, alors on aurait préféré entendre M. Apothéloz nous expliquer ce qu'il compte entreprendre sur le plan social avec ce complément aux RHT.
Sur le dos de qui va-t-on verser ces indemnités, Mesdames et Messieurs ? Sur le dos des contribuables, évidemment, mais également sur celui des entreprises, car avec cette usine à gaz proposée par le projet de loi... (Remarque.) Oui, oui, c'est une usine à gaz, notamment avec tous les amendements déposés qui risquent de trouver une majorité dans ce parlement, c'est vraiment une usine à gaz. Il faudra que les sociétés procèdent elles-mêmes à la demande.
Ensuite, Madame la conseillère d'Etat, vous avez expliqué que les travailleurs toucheront directement le montant de l'aide, c'est ce que vous venez de mentionner, ou alors je ne vous ai pas comprise. S'ils perçoivent directement la somme, qui va s'en occuper ? Cela représente des postes supplémentaires au sein de l'OCE. Qui va s'en charger ? Normalement, tout ce qui a trait aux RHT est financé par la Confédération, mais là, en l'occurrence, il s'agit d'une allocation cantonale, donc elle ne sera pas prise en charge au niveau fédéral, y compris les postes de travail y relatifs. Bref, j'ai un peu de peine à suivre.
Vous avez parlé de sortie de crise, eh bien je suis désolé - vous transmettrez, Monsieur le président -, mais ce dont les entreprises ont besoin maintenant, c'est qu'on les laisse travailler. La relance passera par là: il faut les laisser travailler. On doit favoriser la reprise économique, certes, mais on n'est pas dans une situation avec un problème de demande; il y a eu un problème d'offre parce que tout a été fermé, mais il n'y a pas besoin de relance. Preuve en est qu'aujourd'hui, sans le mécanisme que vous proposez, Madame la conseillère d'Etat, on annonce... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...une augmentation du PIB genevois de 3,5% à 4%. Alors, s'il vous plaît, faites simplement en sorte que les entreprises puissent travailler, qu'elles obtiennent des réponses rapides de la part de l'Etat pour leurs démarches administratives, elles vous en seront reconnaissantes.
Une voix. Bien dit !
M. Jacques Béné. Mais surtout - surtout ! -, le point essentiel, Mesdames et Messieurs...
Le président. C'est terminé.
M. Jacques Béné. Le point essentiel, c'est qu'il n'y a pas eu de consultation, et vous l'avez confirmé en commission...
Le président. Merci...
M. Jacques Béné. ...des organismes faîtiers des hôteliers, des...
Le président. C'est vraiment fini !
M. Jacques Béné. S'il vous plaît, Monsieur le président, laissez-moi terminer, parce que j'aimerais présenter une demande... (Le micro de l'orateur est coupé.)
Le président. Vous avez dépassé votre temps, Monsieur le député, mes excuses. La parole va maintenant à M. André Pfeffer.
M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président...
M. Jacques Béné. Je sollicite le renvoi en commission, Monsieur le président !
Le président. Heureusement que vous l'avez demandé suffisamment fort, à défaut d'être dans les temps. Je soumettrai cette requête aux votes à la fin du débat. Monsieur André Pfeffer, c'est à vous.
M. André Pfeffer. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi propose une indemnité à 100% des personnes touchant des RHT et dont le revenu correspond au salaire minimum. Notre groupe, après débat en caucus, a décidé de le refuser. Les RHT ont pleinement rempli leur rôle, soit le maintien des postes. L'été dernier, environ 100 000 Genevois, c'est-à-dire un tiers des travailleurs du canton, en bénéficiaient; fin mai 2021, ce nombre a drastiquement baissé, passant de 100 000 à 18 328 très exactement. Evidemment, il est encore trop élevé, mais nous devons dorénavant favoriser le retour à l'activité.
L'arrosage gratuit était nécessaire, et l'UDC a soutenu les aides lorsqu'elles étaient justifiées, mais ce texte-ci n'est pas pertinent. Les bénéficiaires des RHT ont pu conserver leur emploi; cette catégorie de salariés a également profité de l'introduction d'un salaire minimum, de l'augmentation des subsides d'assurance-maladie et d'autres prestations cantonales et communales, notamment les chèques et le crédit de 12 millions destiné au paiement des loyers.
A présent, le canton de Genève devrait à nouveau gérer avec soin les deniers publics et limiter les dépenses à des actions qui font sens et qui sont utiles. Comme notre collègue M. Béné, le groupe UDC propose le renvoi de cet objet à la commission de l'économie pour qu'il puisse y être étudié et analysé correctement. Merci de votre attention.
M. Jean Burgermeister (EAG). Ecoutez, je ne peux que souscrire aux propos de Mme la conseillère d'Etat Fischer quant à la nécessité de compléter les revenus des personnes modestes qui ont perdu une partie de leur salaire, une partie évidemment vitale eu égard au prix des loyers et de l'assurance-maladie à Genève. Alors bien sûr, si on avait la possibilité d'instaurer des plafonds aussi bien aux loyers qu'aux primes des caisses maladie, lesquelles ont volé la population pendant l'année 2020, cela éviterait à une tranche de la population de sombrer dans la précarité.
Naturellement, il faut éviter de pousser des portions entières de travailleurs et travailleuses dans la pauvreté. A cet égard, on peut se demander ce qu'a fait le Conseil d'Etat depuis le début de la crise sur ce front-là. Pour le coup, ce n'est pas une critique à l'endroit de Mme Fischer qui a un alibi sérieux pour l'année dernière, puisqu'elle n'était pas encore en fonction, mais il est tout de même invraisemblable que le gouvernement arrive si tard avec des projets aussi fondamentaux pour les bas revenus. Rappelons, même si j'ai déjà eu l'occasion de le souligner, que pour ce qui est des employés précaires qui ont perdu la totalité de leurs revenus lors de la deuxième vague, le Conseil d'Etat n'a rien fait du tout ! Depuis mai-juin 2020, il n'a tout simplement rien fait pour les plus précarisés du canton face à la crise sociale ! C'est tout de même une performance extraordinaire.
Le député UDC parlait de l'arrosoir des dépenses à perte que la droite a soutenu jusqu'à maintenant, mais la droite s'est contentée de voter les aides aux entreprises, jamais ou presque celles pour la population ! Je rappelle aussi que l'UDC a participé au référendum lancé conjointement avec le MCG contre l'indemnisation des travailleuses et travailleurs précaires.
Malheureusement, le projet de loi qui nous est soumis ici pose un certain nombre de problèmes sérieux. Il y a d'abord la volonté de n'offrir la compensation qu'aux salariés domiciliés dans le canton de Genève.
Une voix. Eh ben oui !
M. Jean Burgermeister. On s'étonne, pour une première mesure, qu'un gouvernement à majorité de gauche reprenne ainsi les propositions du MCG. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) En réalité, pourquoi le personnel vaudois ou français ne pourrait-il pas bénéficier du dispositif sachant que certains Genevois qui officient dans le canton de Vaud perçoivent des compléments RHT versés par l'Etat vaudois ? Pourquoi ensuite limiter le mécanisme aux entreprises dont le siège est à Genève ? A Swissport, par exemple...
Le président. Merci...
M. Jean Burgermeister. ...dont le siège n'est pas situé dans notre canton, les employés ne pourraient pas toucher la prestation. Je termine tout de suite, Monsieur le président, mais comme j'ai présenté beaucoup d'amendements, ça me prend un peu de temps, forcément...
Le président. Concluez, s'il vous plaît.
M. Jean Burgermeister. ...alors je vous demande de vous montrer compréhensif !
Le président. Vous êtes maintenant au bout de votre temps.
M. Jean Burgermeister. Ces amendements, je les ai déposés avec M. Mizrahi et Mme Marti... (Le micro de l'orateur est coupé. Paroles inaudibles de l'orateur, qui poursuit son intervention.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole revient à M. Jacques Blondin. (Commentaires.) Je rassure M. Burgermeister: il sera donné lecture des amendements. Allez-y, Monsieur Blondin.
M. Jacques Blondin (PDC). Merci, Monsieur le président. J'espère que mon temps ne tourne pas depuis trente secondes ! Mesdames et Messieurs les députés, en ce qui concerne ce projet de loi déposé par Mme la conseillère d'Etat, le fond du problème est réel. Bien évidemment, il est difficile de vivre à Genève avec un petit revenu, chacun en convient. La crise a été longue et douloureuse pour tout le monde, et on ne doit pas oublier les travailleurs.
Cela étant, les craintes émises par les membres de la commission de l'économie lors de la présentation de ce texte au sujet de l'inégalité de traitement avec les pendulaires vaudois et les frontaliers sont fondées. Le fait qu'un Vaudois - je prends cet exemple pour ne pas citer celui du frontalier - ne bénéficie pas des mêmes droits qu'un Genevois au sein d'une même entreprise ouvrira inévitablement la porte à des recours. Pour information, il est estimé - cela figure dans l'exposé des motifs - que dans le domaine de l'hôtellerie, 80% des salariés ne résident pas à Genève.
De plus, utiliser les RHT pour réaliser du social est également problématique, car le but des RHT est de maintenir l'emploi alors que l'aide sociale, elle, se pratique sur la base d'autres principes tels que les revenus et plus particulièrement ceux du groupe familial.
Enfin, les deux secteurs principalement concernés par la mesure proposée, soit l'hôtellerie-restauration et le nettoyage, ne se sont pas formellement prononcés sur le projet, pas plus d'ailleurs que les syndicats, puisqu'il n'y a pas encore eu de consultation. Afin que nous puissions voter sur cet objet en toute connaissance de cause après avoir sollicité les milieux impliqués et obtenu des compléments d'information au sujet de l'exclusivité cantonale, le PDC propose lui aussi le renvoi à la commission de l'économie. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, les Vertes et les Verts partagent bien entendu les objectifs de ce projet de loi. L'indemnisation à 80% des personnes qui se sont retrouvées au chômage technique a été supportable pour certaines et certains, notamment du fait des économies de dépenses liées aux sorties ou aux voyages qui étaient devenus impossibles.
Mais ce raisonnement ne tient certainement pas pour les employés dont le salaire est déjà tout juste suffisant pour couvrir les loyers et l'alimentation; celles-là et ceux-là ont très probablement déjà épuisé leurs éventuelles réserves, celles-là et ceux-là ont peut-être déjà quelques paiements de loyer en retard et se retrouvent le cas échéant en état de poursuite, celles-là et ceux-là ont probablement fini par frapper à la porte de l'Hospice général. Les effets délétères de ce genre de situation sur la santé psychique ont été mis en évidence et doivent nous préoccuper. La possibilité d'un retour au travail peut ainsi être fortement obérée, ce qui n'est dans l'intérêt ni des employés ni des employeurs.
Maintenant, Monsieur le président, nous constatons que plusieurs amendements ont été déposés; si les Vertes et les Verts sont enclins à en soutenir certains, ils sont également conscients qu'il s'agit de conserver une certaine cohérence, et il sera difficile d'y parvenir dans le cadre d'une délibération en plénière. Dès lors, nous ne nous opposerons pas au renvoi en commission de cet objet, même si, comme mentionné auparavant, son urgence est manifeste. A contrecoeur, nous estimons qu'il vaut mieux obtenir tardivement un projet qui peut réunir une majorité que de ne pas avoir de projet du tout. Je vous remercie.
M. Sandro Pistis (MCG). En premier lieu, Mesdames et Messieurs, nous regrettons que ce projet de loi ait été uniquement présenté à la commission de l'économie, et pas examiné attentivement comme devrait l'être un texte parlementaire. Le fait d'aider en priorité les résidents genevois fait partie de la ligne politique du MCG, à laquelle nous ne pouvons que nous montrer fidèles. Malheureusement, le texte qui nous est soumis ici présente de grandes faiblesses.
D'une part, les employés de la succursale genevoise d'une société dont le siège est situé ailleurs en Suisse seront exclus du mécanisme. D'autre part, nous savons que les salariés frontaliers et les syndicats qui les représentent sont particulièrement procéduriers; les tribunaux, influencés à tort par la législation européenne, leur donnent trop souvent raison. Nous craignons que ce dispositif serve de cheval de Troie pour introduire davantage encore les frontaliers dans notre système d'aide helvétique, avec pour conséquence un afflux massif de travailleurs français; nous obtiendrions alors un effet contraire à celui recherché, puisque nous encouragerions la venue de frontaliers à Genève.
Rappelez-vous la douloureuse expérience de la déduction des frais de déplacement: le lobby frontalier était intervenu pour que les Français puissent déduire les frais de déplacement de leurs impôts. A l'époque, Genève avait perdu plus de 100 millions de recettes fiscales, ce qui avait affaibli la situation des employés genevois. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG ne soutiendra pas le projet de loi tel qu'il a été présenté, nous voterons en faveur du renvoi à la commission de l'économie. Merci. (Applaudissements.)
M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce qui me frappe dans le discours de la droite, mis à part la position habituelle du MCG qui refuse tout le paquet sous prétexte que certains salariés n'habitent pas du bon côté de la frontière, c'est sa vision du partenariat social, notamment celle du PLR. Il y a quelque temps, on nous disait: «Oui, pas de problème, aidons les entreprises.» Et une fois que les sociétés ont reçu des millions, on s'exclame: «Maintenant, il faut nous laisser tranquilles, il faut nous laisser réaliser des bénéfices !» Ce qui me sidère, c'est cette asymétrie, cette sorte de je-m'en-foutisme à l'égard des travailleurs et travailleuses pauvres dont M. Béné n'a pas fait une seule fois mention.
Ces gens touchent le salaire minimum, donc avec les RHT, ils perçoivent 80% du salaire minimum. C'est évidemment une mesure de politique sociale que de permettre à ces personnes d'être au moins au niveau du salaire minimum; c'est une mesure de politique sociale tout comme le salaire minimum, et pourtant, je le rappelle, celui-ci n'est pas réservé aux seuls résidents et résidentes, ce serait totalement incohérent.
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé, avec des collègues d'Ensemble à Gauche, un premier amendement qui porte sur le critère de résidence: il faut tout simplement que l'ensemble des employés qui travaillent dans ce canton puissent bénéficier du même soutien. Comment, en tant qu'employeurs, Mesdames et Messieurs de la droite - vous transmettrez, Monsieur le président -, allez-vous justifier le fait que certains de vos salariés obtiendront l'indemnité et d'autres pas ? C'est tout à fait absurde.
Absurde également la restriction par rapport aux entreprises dont le siège ne se situe pas à Genève, qui frappera injustement certains travailleurs et travailleuses; nous proposons dès lors de renoncer à cette condition. Nous présentons encore un amendement pour étendre la durée de la mesure jusqu'en mars 2022; les RHT étant prévues jusqu'à cette date, nous ne voyons pas pourquoi l'aide complémentaire s'arrêterait au bout de trois mois, cela n'a tout simplement aucun sens. Enfin, notre dernière proposition de modification porte sur la possibilité pour le personnel de solliciter directement l'allocation, car il est parfaitement insensé qu'un tel mécanisme dépende de la bonne volonté des employeurs, lesquels pourraient décider arbitrairement d'octroyer le versement ou pas.
Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à soutenir ce projet de loi dans l'esprit du partenariat social qui, pour certains, n'est pas qu'un chiffon de papier. Nous pensons qu'il doit y avoir un équilibre: nous avons voté les aides aux entreprises et maintenant, nous vous enjoignons de soutenir celles pour les salariés modestes. Nous vous encourageons également à accepter les amendements pour que chacun dans ce canton soit traité à égalité. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. François Baertschi pour une minute.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Enfin la gauche tombe le masque ! La gauche attaque les résidents genevois, la gauche défend les frontaliers. C'est clair, c'est net, c'est précis. La gauche ne tient absolument pas compte du fait que le coût de la vie est beaucoup plus bas de l'autre côté de la frontière, ce qui confère un avantage compétitif aux gens qui y vivent, et cela, nous ne pouvons pas l'accepter. Dès lors, le MCG refusera tous les amendements de la gauche qui produisent cet effet délétère; bien évidemment, nous voterons en faveur d'un renvoi à la commission de l'économie afin d'y examiner plus attentivement ce projet de loi. Merci, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie. Il ne reste plus de temps au groupe Ensemble à Gauche ni aux socialistes. La parole n'étant plus sollicitée, je prie l'assemblée de se prononcer sur la proposition de renvoi à la commission de l'économie.
Une voix. Sonnez le tocsin, président !
Une autre voix. C'est trop tard !
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 12989 à la commission de l'économie est adopté par 77 oui contre 2 non et 4 abstentions.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous retrouvons demain à 14h pour la séance des extraits. Bonne nuit !
La séance est levée à 22h55.