Séance du
vendredi 13 septembre 2019 à
14h
2e
législature -
2e
année -
4e
session -
19e
séance
M 2489-B
Débat
Le président. Nous abordons la M 2489-B. La parole est à Mme Léna Strasser.
Mme Léna Strasser (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, le rapport que nous avons sous les yeux a la teneur d'un «Circulez, y a rien à voir». La motion 2489 ne demandait pas une énième explication sur le bien-fondé de ce nouveau centre fédéral, elle demandait que celui-ci ne soit pas construit.
Alors que le centre d'asile de Kappelen, dans le canton de Berne, ne sera plus exploité, que celui de Muttenz, à Bâle-Campagne, ferme jusqu'à nouvel avis et que celui des Verrières a déjà fermé faute de requérants d'asile récalcitrants - ce sont les termes du SEM - une nouvelle structure devrait être construite à Genève ? Vous transmettrez à qui de droit, Monsieur le président: à notre avis, ce n'est pas raisonnable. Encore moins à côté de l'aéroport, de si grande taille, sous cette forme, avec des mesures dites de sécurité disproportionnées et un couvre-feu.
Cette volonté de construire à tout prix dans le contexte actuel confirme que l'optique d'un tel centre est bel est bien l'attente et le renvoi, non pas l'accueil. Non, décidément, pas de centre d'attente et de départ à Genève ! Accueillir oui, mais dignement. Le groupe socialiste vous propose de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, comme Mme Strasser, les Verts sont extrêmement surpris et même choqués par la réponse du Conseil d'Etat. J'aimerais relever plusieurs points. Premièrement, même si la population a décidé à plusieurs reprises de durcir la loi sur l'asile, à aucun moment elle n'a souhaité poser des fils de fer barbelés autour des centres fédéraux d'accueil. La campagne de votation avait porté essentiellement sur l'accélération des procédures d'asile et la protection juridique gratuite, donc c'est un argument fallacieux.
Ensuite, pourquoi sans cesse insister sur le fait que cette nouvelle structure genevoise sera un centre de départ ? Pourquoi ne pas parler de centre d'accueil ? Il y a une grosse lacune à cet égard. Un autre aspect, c'est le principe d'une école à l'intérieur même du centre fédéral d'accueil - enfin, de départ, malheureusement, pas d'accueil. Nous sommes très étonnés par cette décision, c'est bien la première fois que le canton entend procéder à une scolarisation des enfants sur site, donc nous attendons les explications du DIP à ce sujet. Est-ce qu'un engagement a déjà été pris ? Ce n'est en tout cas pas la direction que nous aimerions suivre ici.
Enfin, il faut souligner que si la plupart des centres ferment à l'heure actuelle, ce n'est pas parce que la crise humanitaire est en train de s'apaiser, bien au contraire; les drames humains sont à leur sommet au niveau international, et la question de l'asile doit être prise au sérieux, certainement pas de la manière dont elle est décrite dans ce rapport. C'est la raison pour laquelle les Verts souhaitent également renvoyer son rapport au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, dans la même veine que mes préopinantes, je rappelle que la motion 2489 a été votée en mars dernier, que son texte est particulièrement clair et son unique invite limpide: elle demande au Conseil d'Etat de renoncer à la construction d'un centre fédéral d'attente et de départ à Genève. Pourtant, dans la foulée de cette décision, le gouvernement participait à une conférence de presse avec le SEM pour présenter le projet à la population, faisant fi de la volonté du Grand Conseil, à tel point qu'on peut se demander à quoi bon se décarcasser, puisqu'il n'en est pas tenu compte.
Pour nous, il est évident que ce centre de départ n'est pas la bonne solution, qu'il s'agit d'une manière de traiter plus rapidement les demandes et d'évacuer les personnes qui sollicitent l'asile dans notre canton. La réponse du gouvernement est un bel exemple de langue de bois, on est face à un exercice qui mérite véritablement d'être relevé. A nos yeux, c'est une marque de mépris à l'égard des décisions prises par ce parlement, c'est ne pas faire cas à la fois des intérêts des requérants d'asile et du principe démocratique qui doit animer notre assemblée. C'est pourquoi nous soutiendrons le renvoi au Conseil d'Etat, estimant qu'il n'a pas répondu à la motion qui lui avait été adressée. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
M. Marc Fuhrmann (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, nous avons déjà voté sur cette thématique, c'est vrai, mais pour revenir au rapport dont il est question, il s'agit d'obligations que nous avons envers la Confédération, que tous les cantons partagent, chacun à son niveau. En soi, ce centre constitue plutôt une amélioration de la situation actuelle, qui est mauvaise en ce qui concerne les infrastructures existantes. Par respect pour les autres cantons suisses qui n'ont pas accepté certains réfugiés, nous devons offrir aux personnes sur le départ un logement et une infrastructure qui soient dignes de notre pays. Cela étant dit, je pense qu'il n'y a plus besoin d'en parler. Merci beaucoup.
M. Bertrand Buchs (PDC). Le PDC s'associe à la demande de renvoi au Conseil d'Etat. Il faudra qu'on nous explique pourquoi on ferme des centres existants en Suisse et, dans le même temps, on cherche à construire un nouveau centre à Genève. Puisque des structures existent, il faut les utiliser; après, s'il y a trop de personnes, on peut discuter de l'éventualité de nouveaux centres, mais exploitons déjà les structures à disposition avant de faire des investissements. Sans parler du fait que l'entité prévue à Genève est mal placée. Franchement, installer des enfants et des familles à côté des pistes d'avions...! On ne comprend pas le rôle de ce centre à cet endroit-là. Enfin si, on le comprend très bien: il s'agit de renvoyer les gens le plus vite possible chez eux. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci. Il y a une demande de renvoi au Conseil d'Etat, je prie l'assemblée de se prononcer.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 2489 est adopté par 49 oui contre 34 non.
Le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2489 est donc refusé.