Séance du
jeudi 24 mai 2018 à
20h30
2e
législature -
1re
année -
1re
session -
3e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Jean Romain, président.
Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Mauro Poggia et Pierre Maudet, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Anne Emery-Torracinta, Serge Dal Busco, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Delphine Bachmann, Jean Batou, Simone de Montmollin, Rémy Pagani, Sandrine Salerno, Stéphanie Valentino et Thomas Wenger, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Olivier Baud, Pierre Bayenet, Diego Esteban, Christina Meissner, Vincent Subilia et Xhevrie Osmani.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de magistrats du pouvoir judiciaire. Je prie le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Les magistrats entrent dans la salle du Grand Conseil et se tiennent debout, face à l'estrade.)
Mesdames et Messieurs, vous êtes appelés à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;
- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Ont prêté serment:
Mme Bénédicte Amsellem, M. Michael Herrmann, Mme Bénédicte Montant et M. Aurèle Müller.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Débat
Le président. Nous avons quatre urgences à traiter. (Un instant s'écoule.) La première d'entre elles est la R 850. Nous la traiterons en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à Mme la députée Klopfenstein Broggini.
Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'administration fédérale vient de l'annoncer: elle veut réviser l'ordonnance sur le matériel de guerre en assouplissant les règles... (Brouhaha.) ...en assouplissant les règles sur l'exportation... (Brouhaha.)
Le président. Une seconde, Madame. S'il vous plaît, ceux qui veulent discuter sont priés de sortir. (Un instant s'écoule.) Je vous remercie. Désolé, Madame, c'est à vous.
Mme Delphine Klopfenstein Broggini. Je vous remercie, Monsieur le président. Je le disais: l'administration fédérale vient d'annoncer qu'elle veut réviser l'ordonnance sur le matériel de guerre en assouplissant les règles sur l'exportation d'armes. En deux mots, cela signifie que la Suisse pourrait exporter des armes dans des pays en guerre. Pour les Verts, cette démarche n'est évidemment pas digne d'un pays neutre qui dit oeuvrer pour la paix. La Suisse doit au contraire exporter son aide et des solutions pacifistes et ne doit évidemment pas, en aucun cas, exporter la guerre.
Le phénomène n'est malheureusement pas nouveau; la Suisse joue un sale jeu, et ce depuis plusieurs années. En 2016 déjà, le Conseil fédéral mettait fin au moratoire sur les exportations d'armes au Proche-Orient, permettant ainsi aux entreprises suisses de vendre du matériel de guerre à l'Arabie saoudite, alors directement liée au conflit armé au Yémen. En 2017, nous exportions pour plus de 87 millions de francs d'armement en Thaïlande, pays alors traversé par un conflit armé interne. Sans parler de la Turquie, pays impliqué dans le conflit en Syrie mais également bénéficiaire des exportations d'armes suisses. Sous la pression de certaines industries d'armement - une pression toujours plus forte - la Suisse a augmenté de 8% son exportation de matériel de guerre, soit a exporté pour 450 millions de francs d'armes et se situe glorieusement aujourd'hui en quatorzième position des pays exportateurs d'armes à travers le monde.
Les Verts ne veulent être ni témoins ni, encore moins, complices; ils refusent de menacer des populations entières sur pression des lobbies et de favoriser ainsi la violation des droits humains. Le Conseil fédéral s'exprimera avant l'été, c'est la raison pour laquelle ce sujet doit être traité aujourd'hui, en urgence. Nous devons mettre le Conseil fédéral devant ses responsabilités puisqu'il a déclaré - et il l'a dit à réitérées reprises - qu'au lieu de faire venir des gens en Suisse, il faut les aider sur place. Eh bien, vendre des armes à des pays problématiques, ce n'est évidemment pas une solution pour soutenir leur population ! Ce n'est pas en vendant des armes que nous contribuerons à améliorer leur quotidien; bien au contraire, cela ne fera qu'attiser la haine ! Parce que nous devons envoyer un message de paix et ne pas cautionner les guerres dans le monde, les Verts vous encouragent vivement à soutenir cette résolution et par là à inciter le Conseil fédéral à refuser catégoriquement l'assouplissement de cette ordonnance. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Mesdames et Messieurs les députés, vous l'aurez compris: si en ma qualité de socialiste j'ai signé cette proposition de résolution, c'est que les socialistes - tout comme moi et j'espère une majorité de députés - apporteront leur soutien à cet objet pour éviter que notre pays participe à une exportation massive de matériel de guerre. Pour la femme que je suis, c'est aussi exprimer une posture en faveur de la paix, car il est tout simplement beaucoup plus facile de faire la guerre que de faire la paix. Si l'on pense à Genève et à l'esprit de Genève, eh bien, nous devons porter la voix de notre canton qui accueille les organisations internationales, qui accueille des ONG; nous devons porter la voix de la paix. Nous devons montrer que, dans l'intérêt de la paix, il est certes plus difficile mais bien plus important d'entendre, de comprendre, de négocier, de chercher des compromis entre belligérants. Notre pays - et Genève en particulier - a souvent servi de médiateur pour contribuer à l'effort de paix. Et il y a encore un aspect qui, en tant que socialiste, est pour moi tout aussi important et que je voudrais rappeler: malheureusement, les femmes et les enfants sont souvent des victimes encore plus marquées par la guerre. Quand on donne la vie, on a beaucoup de peine à comprendre pourquoi la guerre la retire. C'est donc une posture forte et engagée que nous vous demandons d'adopter en acceptant cette résolution. (Quelques applaudissements.)
M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien va soutenir cette résolution. Pourquoi ? Quand on discute année après année avec les responsables du CICR, à chaque fois ils nous racontent la difficulté de faire appliquer les Conventions de Genève parce que les conflits actuels ne sont plus comme ceux qu'il y avait dans le temps - si on peut dire qu'il y a de bons et de mauvais conflits. Les choses sont extrêmement compliquées, intriquées, avec la participation de certains pays à des conflits sur d'autres terrains, comme on le voit avec l'Arabie saoudite et le Yémen. Les armes suisses, qui peuvent être vendues d'une façon tout à fait légale dans certaines conditions, sont susceptibles de se retrouver ailleurs et dans des conflits où le CICR intervient, comme au Yémen. Le Yémen, vous savez, c'est une sale guerre, et il faut vraiment, là, faire extrêmement attention. Je pense donc qu'on doit plutôt être strict sur l'exportation de matériel de guerre, même si c'est une industrie qui peut rapporter de l'argent au pays. Mais je ne pense pas que ça doive être l'industrie la plus rentable pour le pays. Il faut être très strict, parce que si on peut admettre que ces armes soient vendues aux Etats européens, il faut faire attention à certains pays qui utilisent leur influence pour faire la guerre ailleurs. La Turquie qui fait la guerre en Syrie, même à bas bruit, est un exemple parfait. Il faut donc faire attention; je crois que ce n'est pas utile d'assouplir les règles actuellement - il faut être strict plutôt que de les assouplir. Merci. (Quelques applaudissements.)
M. Pablo Cruchon (EAG). Mesdames et Messieurs, chers collègues, le groupe Ensemble à Gauche vous invite aussi à soutenir cette proposition de résolution déposée par les Verts. Nous vous appelons à la soutenir dans l'urgence, puisque urgence il y a. En effet, la commission concernée du Conseil des Etats a écrit au Conseil fédéral pour lui demander d'assouplir l'ordonnance sur le matériel de guerre, en particulier envers les pays impliqués dans des conflits armés. Pourtant, malgré le fait que l'ordonnance soit restrictive, on voit déjà que des armes se retrouvent au Bahreïn pour réprimer les mouvements sociaux, qu'elles se retrouvent dans le conflit avec l'Etat islamique en Turquie, qu'elles se retrouvent au Yémen. L'industrie de l'armement en Suisse pèse de tout son poids mais, au Conseil fédéral, M. Burkhalter faisait jusqu'à maintenant de la résistance à M. Schneider-Ammann et permettait qu'il y ait, disons, une certaine modération dans ces aspirations. Or, M. Burkhalter n'étant plus là, un véritable boulevard s'est ouvert pour l'industrie de l'armement au Conseil fédéral et on peut vraiment craindre une multiplication des ventes d'armes à des pays impliqués dans des conflits armés.
Je pense qu'il faut donner un signal très clair face à cette politique complètement schizophrénique de la Suisse. Pourquoi schizophrénique ? Parce que d'un côté on veut limiter le flux d'étrangers qui entrent sur notre territoire, on envoie l'armée aux frontières tessinoises, et que, de l'autre, on fournit en armes ces pays impliqués dans des conflits qui alimentent les guerres et forcent les gens à fuir ces régions. Nous avons en plus une politique fiscale qui soutient des entreprises particulièrement prédatrices dans les pays du Sud et qui font des ravages notamment environnementaux et sociaux, forçant de nouveau les gens à migrer, à quitter leur pays pour venir trouver refuge en Europe.
Pour mettre fin à cette politique schizophrène et pour dire très clairement qu'à Genève nous ne voulons pas que le matériel de guerre soit exporté dans des pays en conflit, ni d'ailleurs dans d'autres pays, nous vous appelons donc à accepter cette résolution. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, la parole n'étant plus demandée, je vais vous faire voter... (Commentaires.) La parole est à M. le député Serge Hiltpold.
M. Serge Hiltpold (PLR). Merci, Monsieur le président. Excusez ma demande relativement tardive. Je suis obligé de prendre position sur cette résolution qui est traitée en urgence. Tout d'abord, il me faut faire le constat qu'on s'occupe de nouveau, sur le plan cantonal, d'un thème réservé aux Chambres fédérales; ce n'est tout simplement pas de notre compétence. On peut marquer une volonté, c'est très bien. Mais j'aimerais aussi, dans une réflexion d'ensemble sur la politique économique, énoncer un positionnement par rapport aux secteurs industriel et aéronautique liés aux armes - ce n'est pas un tabou - qui sont très réglementés: il faut aussi penser à l'emploi et à la formation quand on évoque ces secteurs liés à l'armement, un domaine important de notre économie en Suisse. Pas à Genève, certes, mais il est important sur le plan fédéral et, considérant le développement industriel, je ne pense pas qu'il faille soutenir cette résolution. Ce n'est peut-être pas une position très sympathique, mais ça fait à mon avis partie de notre rôle. Merci. (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je crois que cette fois-ci la parole n'est plus demandée; je vais faire voter l'assemblée sur l'adoption de la résolution.
Mise aux voix, la résolution 850 est adoptée et renvoyée au Conseil fédéral et au Conseil d'Etat par 49 oui contre 33 non et 9 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Une voix. Bravo !
Premier débat
Le président. Nous passons à la deuxième urgence, le PL 11870-B, que nous traiterons en catégorie II, quarante minutes. Je cède la parole à M. Thévoz.
M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission de la santé a étudié ce projet de loi durant cinq séances. Elle l'a étudié attentivement et sérieusement; vous en conviendrez, le sujet est sensible, délicat, puisqu'il parle de vie et de mort. Il s'agit donc de le traiter avec la plus grande attention. Ont été auditionnés les HUG, l'association Exit, la FEGEMS - Fédération genevoise des EMS - et l'association des médecins genevois. Il faut souligner la bonne qualité des débats et l'attention qui a été portée à l'étude de ce projet de loi. Il faut aussi rappeler que rien n'interdit actuellement l'assistance au suicide, qu'il n'y a pas de loi en la matière, et que cet objet s'adresse uniquement aux personnes dans les EMPP - établissements médicaux privés et publics - ou dans les EMS.
Les commissaires se sont posé, en tout cas selon la majorité, les bonnes questions. Ils se sont d'abord demandé s'il fallait légiférer sur ce point; s'il est important de légiférer. A cette question, une majorité a répondu par l'affirmative: il est important de légiférer. Pourquoi ? Parce que le principe d'équité n'est aujourd'hui pas garanti. C'est-à-dire que si vous êtes par exemple en fin de vie chez vous, rien ne s'oppose à ce que vous contactiez Exit et fassiez appel aux services de cette association. C'est évidemment plus problématique si vous êtes dans un EMS ou un EMPP puisque vous courez le risque que la direction de cet établissement ne facilite pas - voire mette un frein ou empêche - votre accès à cette association, et donc à la possibilité de mourir dans la dignité. Ce projet de loi - et donc la volonté de légiférer - vise à rétablir l'équité et à éviter qu'il y ait de fait un traitement différencié, ce qui contrevient aujourd'hui aux normes fondamentales du droit et de l'équité; je pense qu'il est important de le rappeler.
Un autre élément qui appuyait le fait de légiférer est évidemment celui du changement des moeurs, des changements culturels: +30% de demandes d'assistance au suicide en Suisse, pour un total de 286 actes. Vous le savez peut-être, Exit connaît une explosion du nombre de ses membres, de personnes qui adhèrent à l'association. Il a donc semblé à la majorité des commissaires qu'il ne peut pas demeurer un vide juridique sur un enjeu aussi important, massif. Une majorité de cette commission a donc été acquise à l'idée de légiférer.
Une deuxième bonne question que les commissaires se sont posée, c'est celle du droit de mourir dans la dignité. Il semble aujourd'hui important que la personne qui souhaite mourir dans la dignité puisse voir ce droit garanti et que celui-ci ne soit justement pas soumis à l'approbation d'un établissement public ou semi-public, ou parfois à celle de proches qui freineraient l'exercice de ce droit et empêcheraient la personne capable de discernement d'exercer cette volonté. Avec prudence et avec les cautèles nécessaires, la majorité des commissaires a bien sûr souhaité encadrer ce processus et ce droit de mourir dans la dignité. Elle a donc voté des amendements. Le premier réaffirme - j'attire votre attention sur ce point fondamental - que les établissements médicaux privés et publics et les établissements médico-sociaux ne peuvent refuser la pratique d'une assistance au suicide en leur sein à un patient ou à un résident si les conditions suivantes sont remplies - celles-ci sont d'ailleurs assorties, je dirais, d'une série de précautions.
Le président. Monsieur le député, vous parlez sur le temps de votre groupe à partir de maintenant.
M. Sylvain Thévoz. Merci. Les conditions sont les suivantes: le patient ou le résident est capable de discernement, il souffre d'une maladie ou de séquelles d'accident graves et incurables et des alternatives, en particulier liées aux soins palliatifs, ont été discutées avec lui. Les commissaires sont allés plus loin avec une deuxième mesure de protection: en cas de doute, le médecin directement chargé du patient hospitalisé ou le médecin traitant du résident en EMS peuvent solliciter l'avis d'un autre praticien. Enfin, une troisième mesure de précaution a été prise - une sorte de troisième ceinture de sécurité, je dirais - à savoir l'instauration d'une commission de surveillance en matière d'assistance au suicide, dont les dispositions ont été sous-amendées par le Conseil d'Etat et M. Poggia notamment. Cette commission est quelque part chargée de surveiller la pratique de l'assistance au suicide.
La commission de la santé a voté ce projet de loi ainsi amendé: il permet d'avoir une base légale sur le sujet, de rendre équitable la pratique du suicide assisté et de combler un vide juridique. Nous appelons bien sûr à l'adopter. Merci beaucoup. (Quelques applaudissements.)
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de minorité. La liberté de ne pas continuer à vivre doit être reconnue, personne ne le conteste. Les personnes résidant en EMS ou séjournant à l'hôpital - dans ce dernier cas exclusivement lorsqu'un retour à domicile n'est pas raisonnable - doivent pouvoir exercer cette liberté, qui n'a été contestée par personne. Le conseiller d'Etat chargé de la santé est venu nous apporter les explications et les assurances nécessaires à cet égard.
Ce projet de loi pose un problème, celui du risque d'une judiciarisation de l'exercice de cette liberté. Sur la base de cette loi, des procédures pourront être engagées à l'égard tant du personnel soignant que des proches de la personne qui décide de mettre fin à ses jours, rendant plus difficile ce que l'on voudrait simplifier. Ainsi, cet objet crée le risque d'une judiciarisation de ce processus puisque des proches, la famille ou des personnes tierces pourront s'y référer afin d'engager des procédures et de bloquer abusivement l'exercice de cette liberté. Aucune loi, aussi parfaite soit-elle, ne pourra répondre à la place des professionnels de la santé à la seule question centrale qui est celle de la capacité de discernement de celui ou celle qui veut mettre fin à ses jours. Et cette capacité de discernement exige empathie, écoute et compétence. Aucune loi ne pourra s'y substituer et certainement pas celle qui nous est soumise ce soir. Au final, la minorité estime que la loi n'est pas la meilleure manière de régler ce problème délicat et nous vous recommandons de la refuser, ce d'autant qu'aucune situation de blocage n'a été démontrée dans ce canton.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Salima Moyard pour trois minutes.
Mme Salima Moyard (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, en rédigeant pour le parti socialiste ce projet de loi touchant la question de l'autodétermination face à la mort, j'ai eu l'espoir d'en faire un projet consensuel et rassembleur sur un sujet ô combien délicat. J'ai toujours cet espoir ce soir. Pour rappel, cet objet a pour but qu'une assistance au suicide soit possible; les conditions en ont été énumérées par M. Thévoz. Il donne un cadre à toutes les institutions, prévoit des conditions - capacité de discernement nécessaire, maladie ou séquelles d'accident incurables et graves et soins palliatifs déjà discutés - et des cautèles pour éviter toute dérive, et clarifie les rôles des uns et des autres. La procédure doit être relativement courte et il ne doit pas y avoir d'implication, à titre professionnel, du personnel engagé dans les soins.
Ce projet de loi permet de garantir à chaque personne remplissant les conditions, quel que soit son lieu de domicile, la liberté d'accès à une assistance au suicide. Vous vous souvenez qu'après un premier échange dans ce plénum, une très large majorité l'a renvoyé en commission pour un examen approfondi. Cet examen a eu lieu et le parti socialiste s'en réjouit. De nouvelles auditions ont été fort intéressantes, notamment celle des HUG qui ont démontré les effets du texte avant même son adoption puisqu'ils ont admis les problèmes de leur procédure et ont souhaité remédier au manque d'uniformité d'application de celle-ci - actuellement, elle est kafkaïenne, il faut bien le dire, à tel point qu'ils ont décidé de la réviser.
La FEGEMS elle aussi a été assez claire dans ses propos. Elle a montré qu'elle n'a aucune vision globale sur la question quant aux pratiques des EMS qui en sont membres, et ses nouvelles recommandations vont même moins loin que les précédentes. En 2017, l'EMS qui refuse l'assistance au suicide doit simplement en informer le patient alors qu'elle devait, en 2010, proposer une solution acceptable - paraît-il - sans que cela soit d'ailleurs précisé. A la FEGEMS, c'est donc: circulez, il n'y a rien à voir ! De notre point de vue, c'est proprement inacceptable !
Le travail parlementaire a été fructueux; il y a eu de nombreux amendements. La place du médecin traitant a été renforcée, et surtout, on a instauré cette commission de surveillance. Pour ce débat, son rôle doit être clair dans la tête de chacun: il ne s'agit pas d'un conseil de cinq sages qui déciderait à la place du patient. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Elle ne statue pas sur les assistances au suicide, elle n'est pas un organe de recours, elle n'est pas un passage obligé pour une assistance au suicide ! Elle joue simplement le rôle de sonnette d'alarme - sans se substituer au ministère public - et agira vite s'il y a effectivement un abus, mais autrement, classera l'affaire. La commission permet donc de rassurer les personnes qui doutent d'une situation...
Le président. Il faut conclure, Madame la députée !
Mme Salima Moyard. Je vais le faire, Monsieur le président. ...qui craignent des épidémies de suicides; cette commission est un moyen de les rassurer. Ce projet de loi réaffirme le droit au suicide assisté, et j'espère que chaque député pourra le voter ce soir en son âme et conscience. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à Mme la députée Marjorie de Chastonay.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a pour but de garantir un droit: le droit au suicide assisté, à l'autodétermination, pour les personnes concernées. Il vise de plus à garantir une égalité de traitement de ces personnes, et ce quel que soit le lieu où elles se trouvent: en EMS, en clinique privée, à l'hôpital ou à domicile. Actuellement, c'est l'EMS qui décide s'il autorise ou non une assistance au suicide en ses murs. Les cantons de Vaud et de Neuchâtel ont déjà légiféré en la matière et cela n'a pas produit une augmentation du nombre de suicides assistés. Les Verts sont convaincus que l'on devrait y avoir accès partout, sans inégalités selon les lieux. Nous pensons qu'il est important de donner un cadre légal à cette pratique. Bien que ce projet de loi ne soit pas parfait, les Verts le soutiennent et vous invitent à voter en sa faveur, parce qu'une réglementation précise permet d'éviter tout dérapage sur ce sujet délicat et parce qu'il est temps que Genève se modernise sur la question. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. Bertrand Buchs (PDC). En préambule, le parti démocrate-chrétien a décidé de laisser la liberté de vote sur ce sujet. J'ai été rapporteur de majorité lors du premier passage en plénière, il y a quelques mois, devant ce parlement; nous avions renvoyé ce texte en commission quasiment à l'unanimité parce que nous avions un doute sur la pratique de l'hôpital cantonal. Tous les travaux faits jusque-là en commission ont clairement démontré qu'il n'y a eu aucune difficulté ni aucun problème, que ce soit dans les EMS ou aux HUG. Nous avons toujours dit que nous voterions une loi s'il y avait des cas avérés de gens qui n'avaient pas pu choisir de mourir dans un EMS ou à l'hôpital cantonal. S'agissant du suicide assisté, tout le monde est d'accord pour dire qu'il faut que les gens puissent avoir le choix et décider du jour et de l'heure de leur mort, mais la question qui se pose - M. Thévoz l'a très bien dit - c'est de savoir s'il faut légiférer ou pas. La majorité a dit oui, mais la minorité ne croit pas que légiférer soit une bonne solution: ça ne règle pas les problèmes ! Lorsque quelqu'un décide de s'en aller, c'est sa relation avec le médecin traitant qui permet de savoir s'il y a cette possibilité ou pas. Ayant accompagné plusieurs suicides assistés de mes patients, ayant demandé plusieurs autorisations avec Exit, je peux vous dire que ce dialogue a lieu, ce dialogue est profond; il permet d'aplanir les difficultés, de discuter avec la famille et d'éviter tous les problèmes.
Ce qui me donne du souci, c'est qu'on a voulu faire une loi parfaite. Et en voulant faire une loi parfaite, on va augmenter les risques de plaintes, les risques que les gens soient empêchés de faire le choix de mourir. Ce qui me fait peur, c'est l'ajout de la commission dans le projet de loi. Cette commission, c'est un risque énorme ! Même si on dit: «Non, ce n'est pas possible, ce sont des sages qui de temps en temps donneront leur avis.» Non ! Ça veut dire qu'il y a de gros risques que des familles saisissent la commission ! Il y a de gros risques que des soignants saisissent la commission ! On l'a vu dernièrement avec un épisode à Loëx, où quelqu'un n'a pas pu faire le choix de mourir parce qu'on avait un doute sur sa capacité de discernement. Je crois que sur ces questions de société, concernant des problèmes moraux, soit le fait que chacun a le droit de décider du jour de sa mort - on peut être d'accord ou pas d'accord, selon ses convictions religieuses ou philosophiques - eh bien, il faut légiférer le moins possible ! Il faut laisser cette liberté de choix et ne pas légiférer. Sinon vous courez le risque de bloquer le système et d'avoir des gens qui ne vont pas pouvoir s'en aller parce qu'on va les en empêcher.
Vous savez, décider d'accompagner quelqu'un qui va mourir, être à côté de lui - je le vois, comme médecin - c'est une position difficile. Ce ne sont pas des moments faciles, ce sont des moments extrêmement durs. Eh bien, si vous voulez avoir une loi trop parfaite, il y aura toujours quelqu'un pour dire qu'il n'est pas d'accord: «Je ne suis pas d'accord parce que je ne suis pas sûr que cette personne soit capable de discernement.» Et ce n'est pas sûr que la personne puisse s'en aller ! Vous allez bloquer complètement la situation et vous obtiendrez le contraire de ce que vous visez, c'est-à-dire qu'en voulant permettre aux gens de s'en aller, vous allez les empêcher de le faire. Ne votez pas de loi sur ce sujet-là, je vous en prie ! Je vous remercie.
M. Thomas Bläsi (UDC). En préambule, je tiens à dire qu'au sein du groupe UDC, malgré notre opposition au fait de légiférer, nous ne sommes pas opposés à l'assistance au suicide et que nous n'en remettons absolument pas en cause le principe. Cependant, l'historique parlementaire de cet objet est particulièrement intéressant. Pour avoir participé à la Constituante, je peux dire que les travaux menés en commission ont été beaucoup plus poussés que ceux de notre commission de la santé. Au départ, 80% des constituants étaient favorables à l'idée de légiférer, mais à la fin de ses travaux, l'ensemble de la commission a estimé que ce serait une grave erreur de le faire, pour partie en raison des motifs donnés aujourd'hui par les uns et les autres.
Suite aux travaux de la Constituante, le projet socialiste est revenu à la commission de la santé où il a été étudié, travaillé. Finalement, la commission a décidé que légiférer n'était pas une bonne solution. Suite à des témoignages particulièrement émouvants qui nous sont parvenus et ont été lus au Grand Conseil, notre parlement a décidé de donner une deuxième chance à cet objet - un deuxième tour - et de le renvoyer à la commission de la santé. Au cours de ses travaux, comme vous l'a expliqué mon collègue, M. Buchs, celle-ci a pu constater que ces cas particulièrement émouvants qui nous avaient été décrits n'étaient pas basés sur des éléments solides et qu'elle ne pouvait pas les prendre en considération.
De plus, la commission a aussi pu constater qu'Exit prélève des cotisations annuelles d'environ 30 F par membre et que l'association recourt par ailleurs essentiellement, ou de manière quasiment systématique, à des bénévoles. Elle n'utilise donc pas l'argent de ces cotisations et se constitue ainsi un trésor de guerre d'environ 5 millions de francs par année. De la bouche même des membres d'Exit, ce trésor de guerre est utilisé à la seule fin de mener un combat sur la législation pour finalement assouplir et améliorer les lois concernant leur domaine d'activité. Sur cette thématique sensible, le fait qu'il puisse finalement y avoir aussi un intérêt commercial pour Exit et en tout cas des difficultés à expliquer ce qui est fait de l'argent a posé problème.
L'UDC vous le répète: nous ne sommes pas contre le principe de l'assistance au suicide, que nous soutenons, mais nous estimons que les zones d'ombre soulevées par les travaux de la commission nécessitent pour le moins de s'abstenir de légiférer. Laissons le système actuel, qui fonctionne, continuer à fonctionner de la manière la meilleure et ne mettons pas forcément tous nos oeufs dans le même panier concernant un sujet aussi sensible en confiant notre destin à une association dont les finances ne sont pour l'instant pas éclaircies. Merci, Monsieur le président.
M. Olivier Baud (EAG), député suppléant. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, Ensemble à Gauche est évidemment en faveur de ce projet de loi et condamne un peu les tergiversations auxquelles nous assistons. Exit, c'est l'association pour le droit de mourir dans la dignité ! Essayer d'entamer son procès ici, comme le fait le député Bläsi, n'est pas tout à fait correct. La réalité, c'est qu'Exit a été empêché de mener son action dans les établissements hospitaliers, en particulier aux HUG. Je crois que la lettre écrite au directeur général, M. Levrat, qui figure à la page 75 du rapport, ne laisse aucune ambiguïté ! Elle n'est pas vieille, elle date du 8 mai 2017. Exit est une association à laquelle on peut adhérer ou pas - on peut être membre ou pas, c'est la liberté de chacun - mais en Suisse, et à Genève en particulier, on a le droit de mourir dans la dignité et d'être assisté dans cette mort, comme l'a dit la députée des Verts. On en a le droit, où que l'on soit, quel que soit le lieu où on est, même si ce n'est malheureusement pas une réalité dans le monde actuel, on est d'accord !
Ce que nous ne comprenons pas très bien à Ensemble à Gauche, c'est qu'à écouter les discours, tout le monde est d'accord. Le rapporteur de minorité dit que cette liberté doit être reconnue. La liberté de choisir de mourir et d'être assisté doit être reconnue, mais il ne faudrait pas légiférer ! Au prétexte que les lois, c'est embêtant, puisqu'une loi est évidemment un texte écrit et une fois qu'une chose est écrite, on peut pinailler, dire ceci ou cela, contester, etc. Mais c'est complètement absurde ! Excusez-moi, Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes un organe législatif et nous essayons de faire des lois qui tiennent la route et qui seront respectées; des lois qui ont un sens ! Si elles sont chaque fois remises en question au prétexte qu'elles pourraient être attaquées, alors arrêtons là, levons la séance, Monsieur le président, tout cela est vain, c'est, disons, de l'agitation; ça ne sert à rien, arrêtons ! Non, vous n'êtes pas sérieux.
Le PDC a la liberté de vote; ça, c'est de la lâcheté. L'UDC commence par dire qu'elle est d'accord mais qu'il ne faut surtout pas légiférer; ça n'a aucun sens ! Je vous appelle à faire preuve d'un peu de bon sens, Mesdames et Messieurs les députés, à revenir à la raison et à voter ce projet de loi pour qu'à Genève on puisse mourir dans la dignité. Je vous remercie.
M. Charles Selleger (PLR). Ce que je viens d'entendre de la part du député d'Ensemble à Gauche est fort surprenant. Je pense qu'il ignore - s'il m'écoute, il va peut-être l'apprendre, mais il ne m'écoute toujours pas - que la plupart des assistances au suicide en Suisse ne se produisent ni dans les hôpitaux ni dans les EMS. Pourtant, vous n'avez pas réclamé de légiférer sur ces cas-là. La problématique qui nous occupe est bien précise: elle concerne les personnes qui résident en EMS ou qui séjournent à l'hôpital.
Lors de son premier examen en commission, le PLR avait refusé l'entrée en matière pour les raisons qui ont été expliquées, à savoir que l'assistance au suicide est un phénomène sociétal en cours d'évolution et qu'il n'est pas encore temps de figer les pratiques dans un carcan législatif. La situation du suicide assisté semblait par ailleurs correcte, à la fois dans les EMS et dans les hôpitaux. Le PLR avait néanmoins dit qu'il resterait vigilant au cas où il s'avérerait que ce n'était pas le cas. Lorsque nous avons été alertés par les cas qu'Exit nous a exposés, nous avons nous-mêmes demandé le renvoi de ce projet de loi en commission pour tirer l'affaire au clair. Du point de vue hospitalier - Exit nous l'a dit et les hôpitaux aussi - il n'y avait en fait pas matière à discussion: les choses étaient bien réglées et acceptées au niveau de l'hôpital. Exit nous l'a confirmé ! Toutefois, ce qui a fait vaciller le vote de notre groupe, c'est qu'une seconde audition de la FEGEMS est venue un peu contredire ce qui avait été dit lors du premier passage en commission, à savoir qu'il y a encore une différence entre EMS et que certains acceptent plus ou moins facilement Exit dans leurs murs. C'est pour ça que le PLR a voté l'entrée en matière lors de ce deuxième passage en commission.
Dès lors que nous étions entrés en matière, nous avons présenté toute une série d'amendements qui visaient principalement à éviter de désigner, de par leur fonction, des médecins ou d'autres professionnels de la santé pour qu'ils doivent obligatoirement se prononcer sur la légitimité et l'opportunité d'une demande d'assistance au suicide. Ça, pour nous, c'était exclu. Nous avons eu gain de cause sur tous nos amendements, y compris sur celui de la constitution d'une commission à laquelle on puisse s'adresser pour sonner l'alerte au cas où on suspecterait par exemple la famille d'essayer d'influencer une personne âgée. C'est ainsi que les commissaires PLR à la santé ont accepté de voter ce projet de loi. En revanche, l'ensemble de notre groupe n'est pas forcément du même avis; il s'agit d'une question extrêmement sensible, c'est pourquoi le PLR donnera la liberté de vote à chacun des membres de sa députation - et ce n'est pas par crainte, par paresse ou par peur de quoi que ce soit. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Françoise Sapin (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, s'il existe une liberté individuelle fondamentale, c'est bien celle de mourir comme on le désire ou le souhaite, en fonction de ses convictions personnelles. Le MCG reconnaît parfaitement ce droit et n'est absolument pas contre Exit. Cependant, cette loi judiciarise le processus; elle va compliquer des cas qui aujourd'hui ne posent pas problème. Lors des auditions à la commission de la santé, le procureur général et Mme la cheffe de la police ont en effet été très clairs: il existe actuellement des procédures précises qui sont suivies et qui ne posent pas problème. En plus, cette loi ne traite que des EMS et pas des autres cas qui se présentent dans le canton. Pour toutes ces raisons, le MCG refusera ce projet de loi.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Christina Meissner pour quarante et une secondes.
Mme Christina Meissner (PDC), députée suppléante. Merci, Monsieur le président. Je tiens à rappeler - et je crois qu'il faut le souligner encore une fois - que le droit de mourir dans la dignité est un droit fondamental qu'il s'agit que nous respections tous. Personnellement, je rejoins la... Comment dire, je suis mal à l'aise, parce que le premier projet de loi, celui déposé par Mme Salima Moyard, était simple ! Il demandait simplement que «le médecin responsable [...] en concertation avec l'équipe soignante, le médecin traitant et les proches désignés par le patient ou résident, vérifie que celui-ci est capable de discernement [...] souffre d'une maladie ou de séquelles d'accident» et qu'il n'y ait pas d'autre possibilité.
Le président. C'est fini, Madame la députée.
Mme Christina Meissner. C'était suffisant ! Je ne peux pas judiciariser ce processus...
Le président. C'est terminé !
Mme Christina Meissner. ...et dès lors je ne pourrai pas accepter ce projet de loi, mais j'accepte le principe de... (Le micro de l'oratrice est coupé.)
Le président. C'est terminé, Madame la députée. La parole est à M. le député Marc Falquet.
M. Marc Falquet (UDC). Merci, Monsieur le président. C'est vrai qu'on se pose des questions: pourquoi doit-on légiférer sur un thème au sujet duquel il y a eu, je crois, un problème dans un EMS ultra-catholique ? Et pour cela, on va donc faire une loi ! Alors vous parlez de liberté, de la liberté de se suicider. Mais il n'y a pas seulement la liberté de la personne qui souhaite se suicider, il y a aussi la liberté de ceux qui restent et la liberté de ceux qui ont une conscience... il y a la liberté de conscience de ceux qui ont décidé une autre approche face à l'adversité. Et c'est aussi ça qu'il faut voir: on ne doit pas imposer un suicidé à des gens qui ont une autre éthique face à la vie, qui ont peut-être décidé de défendre la vie face à l'adversité. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Ça, je trouve que ce n'est pas normal !
Un autre problème: l'amendement du PLR. Là, c'est le sommet. L'amendement du PLR, c'est vraiment le sommet ! Vous voulez qu'une commission - donc des tiers - vienne s'immiscer et auditionne la personne qui souhaite mettre fin à ses jours pour lui demander ses vraies motivations, ses motifs de se suicider ! C'est complètement hallucinant ! Il va devoir déballer devant une commission pourquoi il veut se suicider...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député.
M. Marc Falquet. ...pourquoi il veut en finir avec la vie. C'est complètement absurde, et je vous conseille de refuser cet objet.
Le président. Voilà, c'est terminé, je vous remercie. La parole est à Mme la députée Jocelyne Haller pour une minute vingt.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la liberté de mourir dans la dignité ne doit pas dépendre de l'établissement où vous êtes hospitalité ou de l'EMS où vous êtes placé. Selon le lieu où vous vous trouvez, vous pouvez effectivement avoir accès au suicide assisté mais vous risquez fort aussi de vous trouver face à une impossibilité. Pour nous, légiférer, c'est donc garantir ce droit à chacun. Il ne s'agit pas de heurter les consciences: le projet de loi prévoit qu'il n'est en aucun cas question d'obliger qui que ce soit à participer à ce processus à partir du moment où il heurte sa conscience. A nos yeux, les indispensables conditions de sécurité sont donc garanties par ce projet de loi et nous ne pouvons que vous encourager à le soutenir. Je vous remercie de votre attention.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le sujet est évidemment grave puisqu'il est question de vie, de mort, de liberté. On dit que l'enfer est pavé de bonnes intentions; je crains que ce soir une majorité d'entre vous n'ajoute une pièce de dallage. Vous l'avez dit, un premier projet de loi a été refusé - non pas par une majorité d'entre vous qui considérait qu'il n'était pas nécessaire de garantir la liberté de quitter notre monde lorsque ce souhait était exprimé par une personne capable de discernement, mais parce que le bon sens avait prévalu. Vous considériez en majorité qu'il était inutile de légiférer sur un sujet particulièrement délicat à propos duquel la société évolue et qui doit pouvoir trouver des solutions évolutives avec elle. Puis vous avez reçu un courrier de l'association Exit qui vous décrivait de manière particulièrement diabolique la situation existante à Genève, et logiquement - tout le monde l'aurait fait à votre place - vous avez renvoyé ce projet de loi en commission pour en avoir le coeur net.
Quand j'entends certains dire aujourd'hui que la possibilité de faire le choix de mourir dépend du lieu où l'on réside, je me demande si ces personnes font véritablement partie de la commission de la santé et si véritablement elles ont relu les procès-verbaux. Certains d'entre vous l'ont dit, les auditions ont établi que les cas exposés dans le courrier qui vous a amenés à décider le retour en commission ne concernaient absolument pas des situations dans lesquelles la personne n'avait pas pu exercer sa liberté. De nouveaux cas ont au contraire démontré qu'avec toute la sensibilité nécessaire, lorsque la solution exigeait que cette liberté s'exprime aux HUG, des patients ont eu accès à l'assistance au suicide. Chacun sait pourtant que la situation est différente en EMS ou à l'hôpital puisqu'on est domicilié à l'EMS mais pas dans un hôpital: on est censé avoir encore un domicile. Et lorsque l'on peut raisonnablement attendre de la personne qu'elle soit transportée jusqu'à chez elle pour y finir ses jours, c'est cette option qui doit être choisie. Dans un cas récent, les HUG ont considéré, après avoir consulté leur commission d'éthique, que la situation était telle que l'on ne pouvait raisonnablement exiger de la personne qu'elle retourne chez elle pour mourir. Il n'y a donc pas de problème. Vous êtes en train de bâtir une solution alors qu'il n'y a pas de problème - et avec cette solution, vous êtes précisément en train de bâtir des problèmes inexistants.
D'abord, le droit de mourir. Le Tribunal fédéral s'est déjà exprimé sur cette question: il n'y a pas de droit de mourir, il y a une liberté de mourir ! La liberté, c'est simplement la possibilité de faire valoir sa volonté sans entrave aucune de l'Etat. Et l'Etat doit tout mettre en oeuvre pour que cette liberté puisse s'exprimer et se réaliser. Le droit, c'est exiger de l'Etat, de la collectivité, des actions positives qui permettent d'exercer ce droit. Ici, on ne parle pas de droit de mourir; c'est une liberté de mourir. Or, avec cette loi, vous êtes en train de transformer une liberté en un droit, avec tout ce qui est pernicieux derrière cela. Parce que s'il y a un droit, il faut informer celles et ceux qui ont ce droit qu'ils peuvent l'exercer. A quand, Mesdames et Messieurs, une information destinée aux personnes qui entrent en EMS pour leur signaler qu'elles ont un droit - le droit de mourir - et que ce droit, elles peuvent l'exercer ? Est-ce dans cette société-là que vous voulez vivre ? Une société qui donne davantage les moyens de quitter notre monde que les moyens de surmonter les douleurs que nous pouvons toutes et tous à un moment éprouver ?
Ce n'est en tout cas pas ma vision de la société. Quand je dis cela, ce n'est pas contre une association largement citée ici ni contre cette liberté que je respecte profondément. C'est pour que cette liberté puisse s'exercer avec toute l'ampleur, avec toute l'empathie que nous connaissons aujourd'hui. Pour que les professionnels de la santé fassent leur travail, qu'ils proposent les alternatives - on sait à quel point les soins palliatifs ont évolué - et qu'on n'ait pas une société irresponsable dans le vrai sens du terme, c'est-à-dire une société qui se retire de ses responsabilités à l'égard de ses aînés. Aujourd'hui, on peut mourir dans la dignité, et on meurt exclusivement dans la dignité dans notre canton ! Nous n'avons pas besoin de légiférer pour cela.
Nous avons encore moins besoin d'une modification de la loi sur la santé qui instaure une commission de surveillance en matière d'assistance au suicide, à laquelle tout un chacun peut faire appel s'il a des doutes sérieux sur le fait que la personne se soit exprimée librement et sans influence. Commission qui peut saisir le ministère public avec les conséquences que vous savez: récemment, les médias ont en effet relaté le cas d'une personne qui s'est précisément vue empêchée d'exercer cette liberté parce que le ministère public, faute de pouvoir éclaircir la situation dans un délai très court, a tout simplement pris des mesures extrêmement coercitives.
Mesdames et Messieurs, je vous demande simplement de laisser la société, avec toute sa finesse, de laisser les professionnels, avec toute leur empathie et toutes les nuances de leur profession, régler ces problématiques. Ne judiciarisez pas ce processus, ne faites pas en sorte que chacun puisse dire tout simplement à la personne qui exprime le souhait d'avoir recours au suicide assisté: «La loi vous expliquera comment faire, vous n'avez qu'à suivre le vade-mecum si vous voulez nous quitter. Et finalement - pourquoi pas - tout cela réduira les coûts globaux de la santé !» Non, Mesdames et Messieurs, nous avons d'autres solutions. Je vous demande de les laisser ouvertes, et je vous demande de refuser ce projet de loi, précisément au nom du droit de chacun de mourir dans la dignité. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 11870 est adopté en premier débat par 62 oui contre 33 non et 2 abstentions.
Le projet de loi 11870 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 11870 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 60 oui contre 37 non. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Premier débat
Le président. Nous en venons à la troisième urgence, le PL 12214-A, que nous traitons en catégorie II, quarante minutes. La parole va au rapporteur de majorité, M. Mathias Buschbeck.
M. Mathias Buschbeck (Ve), rapporteur de majorité. Merci, président. Chères et chers collègues, enfin ! Nous pouvons enfin mener un débat sur l'incompatibilité entre le mandat de député et celui d'administrateur d'une régie publique ! Nous avons tenté de le faire à plusieurs reprises dans d'autres cadres, mais la discussion a chaque fois été repoussée. Avant d'aller plus loin, je m'autorise à dresser un petit historique du sujet. Les dernières législatures ont été marquées... (Brouhaha.)
Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Ceux qui souhaitent discuter sont priés d'aller dans la salle d'à côté de façon que nous puissions écouter l'orateur. Allez-y, Monsieur Buschbeck.
M. Mathias Buschbeck. Je vous remercie. Les dernières législatures ont été pourries par des conflits d'intérêts entre le mandat de député et celui de représentant d'une régie publique. Conscient de ce problème, le Conseil d'Etat avait déposé un projet de loi sur les institutions de droit public que nous nous proposons de modifier ce soir. Le texte d'origine statuait sur cet élément, mais au dernier moment, pour ne pas faire capoter toute la loi, il en a été retiré. Toutefois, nous, les Verts, l'avions annoncé alors: nous reviendrions rapidement à la charge avec un nouveau projet de loi.
La question du conflit d'intérêts s'est d'ailleurs posée lors des débats même ayant mené à l'adoption de la LOIDP. En effet, nombreux sont ceux qui ont pris la parole alors que le règlement du Grand Conseil impose de ne pas le faire en cas de liens d'intérêts. Nous avons donc déposé ce projet de loi qui a été voté il y a un mois par la commission législative et qui nous arrive aujourd'hui en urgence. Urgence il y a, car cet automne, les régies publiques vont renouveler les membres de leurs conseils d'administration, nommés par les partis et le Conseil d'Etat, et il est important de fixer le cadre légal avant ces nominations.
Sur le principe, les auteurs et la majorité estiment qu'il est temps de mettre fin à cette caste de politiciens cumulant les mandats et les postes; lorsqu'ils interviennent, on ne sait plus vraiment si c'est au nom de leur parti ou de l'entité publique qu'ils représentent. Mettons-y un terme ! Cette demande a souvent été formulée, de nombreux partis la reprennent lors des élections, mais lorsqu'il s'agit de la mettre en pratique, il n'y a plus personne. L'occasion vous est offerte aujourd'hui de donner un signal fort à la population: le temps du cumul des fonctions est révolu.
Certains objecteront que l'article 24 de notre règlement nous astreint à ne prendre part ni au débat ni au vote sur un objet en lien avec un mandat extérieur. Or la discussion que nous avons menée sur cet objet prouve que cet article ne résout pas la question, puisque les personnes concernées ont participé au débat comme au vote. Il est clair que cette disposition ne suffit pas et que nous avons besoin de contraintes supplémentaires.
Les travaux en commission furent intéressants: le Conseil d'Etat s'est dit favorable à ce projet de loi, la Cour des comptes également, qui a souligné les problèmes posés par les conflits d'intérêts, tout comme les professeurs Tanquerel et Hottelier. Selon eux, modifier la LOIDP plutôt que la constitution constitue la bonne méthode pour mettre fin au cumul des mandats.
Le président. Monsieur le député, vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Mathias Buschbeck. Merci, je termine, Monsieur le président. Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission... Ah non, j'ai oublié de dire quelque chose: dans un souci de compromis, la commission a décidé d'amender le projet de loi pour en réduire la portée, c'est-à-dire de ne pas faire valoir le principe d'incompatibilité pour l'ensemble des établissements publics, mais seulement pour ceux qui posent le plus problème, à savoir les institutions principales telles que définies par la loi. Cette décision découle d'une volonté de la majorité de parvenir à un compromis qui puisse recueillir l'adhésion d'un maximum de partis, et j'espère que cela portera ses fruits. Enfin, Monsieur le président, pour m'assurer qu'aucun député présentant un conflit d'intérêts ne se prononce ce soir, je demanderai le vote nominal. Je vous remercie.
Mme Danièle Magnin (MCG), rapporteuse de première minorité. Tout d'abord, je trouve le ton revendicateur, voire revanchard, du rapporteur de majorité extrêmement choquant. Je relève à cet égard qu'il a siégé en tant que président de la commission législative qui a examiné cet objet ! Comme je l'ai écrit, on nage en plein triple mandat, ce qui ne semble pas du tout le déranger.
Ensuite, on demande la modification de la LOIDP alors qu'elle vient à peine d'entrer en vigueur - en mars ou en avril dernier. Ça signifie que l'on saucissonne une idée afin de la faire passer petit à petit, au compte-gouttes, ce qui constitue une méthode politique contestable.
S'agissant des prétendus conflits d'intérêts, je ne peux imaginer qu'un honnête élu d'un parti donné puisse avoir des positions, des valeurs ou des idées différentes suivant qu'il siège au Grand Conseil ou dans un conseil d'administration ou de fondation. Ça ne tient pas la route, à moins qu'il ne soit là que par opportunisme, auquel cas le peuple souverain s'en aperçoit et ne le réélit en principe pas la fois suivante. Les hésitations des personnes que nous avons auditionnées étaient assez parlantes: rien ne nous oblige à modifier la LOIDP dans le sens de ne plus pouvoir siéger à la fois comme députés et administrateurs.
Mon préopinant a proposé de restreindre l'incompatibilité aux seules grandes régies, à savoir toutes celles dont le nom se termine par la lettre G: AIG, SIG, HUG, Hospice général - je crois qu'il a également mentionné l'IMAD. Une telle limitation est antidémocratique, parce que tous les partis ne disposent pas de suffisamment de têtes pensantes capables d'être à la fois députés et administrateurs d'une grande institution publique. Cela requiert des compétences, et c'est la raison pour laquelle les groupes choisissent certains membres et pas d'autres. A notre sens, les priver de ce droit est complètement antidémocratique.
On nous a aussi brandi l'argument du parlement de milice, où les députés ont par ailleurs une profession: nous ne pourrions pas exercer les deux charges en même temps. Mais enfin, pour ceux qui s'en souviennent, lorsqu'on a commencé à calculer l'espérance de vie afin de déterminer le coût de la LPP et le nombre de cotisations à fixer, c'est-à-dire combien de temps on survivait à l'âge de l'AVS, on était d'abord à dix ans, puis on est passé à quatorze ans, et maintenant on en est à beaucoup plus ! Les gens ont une telle santé à la fois physique et mentale que même en ayant dépassé l'âge de la retraite, ils restent extrêmement efficaces et efficients...
Le président. Madame la députée, vous parlez maintenant sur le temps de votre groupe.
Mme Danièle Magnin. Très bien, Monsieur le président, alors je serai brève, parce que je ne veux pas empiéter sur le temps de mes collègues. Il s'agit donc d'un mauvais argument. Quant aux autres, je les ai cités dans mon rapport de minorité. Mesdames et Messieurs, je vous remercie de refuser ce projet de loi.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Combattre les conflits d'intérêts est une volonté légitime que la plupart d'entre nous partagent, mais la démarche proposée par les auteurs du projet de loi est mauvaise et contestable. En effet, ils bafouent la décision populaire du 17 juin 2012 - le peuple genevois a refusé la LOIDP à 55,9% - se moquent des travaux parlementaires et ne comprennent pas le sens ni le rôle de cette loi. Celle-ci devrait se limiter à donner un cadre général applicable à l'ensemble des institutions de droit public. A l'époque, le Conseil d'Etat avait reconnu que l'une des principales raisons du refus populaire était l'absence de participation des partis dans les organes publics, mais sans admettre, ou en omettant de préciser, qu'une partie des référendaires reprochaient déjà l'incompatibilité entre le mandat de député et celui de membre d'un conseil d'administration.
La loi sur l'organisation des institutions de droit public votée dernièrement a été traitée durant deux années à la commission législative. Une multitude d'amendements y ont été négociés, y compris cette incompatibilité qui revient aujourd'hui sur le tapis. Est-ce qu'il faudrait rediscuter l'ensemble de cette loi avant même qu'elle ne soit entrée en vigueur ? Y aurait-il des différences d'interprétation selon que le parti auquel on appartient est concerné ou pas ? En effet, les nombreux doubles mandats - je parle de députés au Grand Conseil par ailleurs magistrats dans une commune - au sein des partis libéral-radical, des Verts et socialiste ne semblent déranger personne. Il est d'ailleurs curieux qu'un groupe comme le PLR, champion toutes catégories du nombre de membres au sein des conseils d'administration, veuille imposer aux autres des restrictions dans leurs choix.
Enfin, ce projet de loi part d'une mauvaise approche. La loi sur les institutions de droit public devrait contenir exclusivement des charges et des devoirs s'appliquant sans contestation ni favoritisme aux 26 régies concernées. Toute restriction spécifique à l'une ou l'autre d'entre elles devrait figurer dans la loi y relative. L'amendement accepté en commission, qui limite l'application de l'incompatibilité aux seuls établissements de droit public principaux, est l'exemple même de cette confusion. Il est en effet basé sur un critère arbitraire. Pour un tiers des institutions, le cumul entre le mandat de député et celui d'administrateur a été jugé injuste ou disproportionné, et uniquement pour cette raison, on a souhaité, par cet amendement, limiter l'application de la nouvelle disposition à l'une des quatre catégories d'institutions de droit public. Cette disposition ne repose sur aucune base objective, aucun critère ayant un quelconque lien avec la gouvernance. Pour ces raisons, je vous propose de refuser ce projet de loi. Merci de votre attention.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, il y a dans cette salle un certain nombre de groupes et de députés qui se moquent du monde ! Je me souviens très bien des travaux sur la LOIDP: ils ont duré plusieurs mois, voire plusieurs années, et après différents renvois en commission ainsi que des débats-fleuves en plénière, un compromis a été trouvé et la loi votée l'automne dernier. Or à peine était-elle adoptée que le groupe des Verts déposait déjà ce projet de loi, cassant ainsi l'accord entre les partis. Pour moi, cette façon d'agir, c'est se moquer du monde. Vous avez accepté le compromis avant de revenir immédiatement à la charge, donc vous avez trompé ce parlement !
Mesdames et Messieurs, je ne vois pas en quoi les fonctions de député et d'administrateur sont incompatibles. Que cherche-t-on en envoyant des représentants des partis au sein des institutions publiques ? A surveiller ces dernières et, en cas de dérapage, à les dénoncer et à les ramener dans ce Grand Conseil, parce qu'il me semble préférable que ces problèmes soient traités ici plutôt que dans la presse. Mais vous, vous cassez ça ! Qu'est-ce que vous voulez, au final ? Que ces conseils d'administration ronronnent entre eux sans qu'on sache tout ce qui s'y passe ? On ne parle pas de détails, mais bien de tricheries, de conflits d'intérêts, de collusions - d'ailleurs, on évoquera justement cette problématique demain aux extraits s'agissant d'une entité en particulier. C'est ça que vous voulez, et vous revenez à la charge en réintroduisant la notion d'incompatibilité au sujet de laquelle un compromis avait été trouvé dans la loi votée l'automne dernier. Vous faites tout faux !
Vous vous opposez au cumul des mandats, mais en l'occurrence, dans cette salle, il y a plein de partis qui cumulent les mandats - législatif cantonal, exécutifs communaux, commissions extraparlementaires - notamment les Verts et notamment à Vernier ! Mais ce ne sont pas les seuls, il y en a même qui cumulent avec des mandats au Conseil national. Ça n'a rien à voir, me direz-vous; si, ça a justement tout à voir: si on décrète l'incompatibilité des mandats, alors il faut aller jusqu'au bout de la logique, mais vous n'en êtes pas capables, vous vous servez tout en empêchant les autres de le faire.
Je m'adresse maintenant au PLR - vous transmettrez, Monsieur le président - qui a de multiples représentants dans toutes les commissions. Bon, vous êtes nombreux, dont acte, mais les partis plus petits n'ont pas forcément assez de membres pour les placer dans les conseils d'administration des institutions publiques, et c'est d'ailleurs tout aussi difficile au Grand Conseil, où il y a 35 commissions administratives, sauf erreur. Vous faites tout faux et vous blâmez ce que vous faites vous-mêmes quand ça vous arrange. Par conséquent, je vous demande de refuser ce projet de loi !
Une voix. Youpi Rintintin !
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Je serai un peu plus calme que mon préopinant, j'espère. En préambule, je souhaite remercier le rapporteur de majorité pour la qualité de son rapport.
Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, selon les principes de gouvernance, le cumul des mandats de député et de membre d'un conseil d'administration ne devrait pas être autorisé, car il cause nombre de situations gênantes au Grand Conseil: lorsqu'un administrateur d'une régie publique intervient devant ce parlement, on ne sait pas si c'est le député élu par le peuple qui prend la parole ou celui qui a un devoir de fidélité à respecter vis-à-vis de l'entité à laquelle il est lié.
Le plus problématique, c'est le double aspect de contrôleur et de contrôlé. En tant que parlementaires, nous votons des budgets et approuvons des comptes sur lesquels un député membre d'un conseil d'administration s'est déjà prononcé. A cet égard, je rappelle à l'intention du rapporteur de deuxième minorité que nous n'examinons pas les budgets et les comptes des communes.
Certains députés ont exprimé des positions divergentes selon qu'ils siégeaient au Grand Conseil ou dans leur conseil d'administration, ce qui amène à des dérives institutionnelles délicates. C'est la raison pour laquelle le groupe démocrate-chrétien est largement en faveur du principe d'incompatibilité. A notre avis, les membres de partis qui ont été députés ou qui s'intéressent aux affaires publiques peuvent tout aussi bien être désignés comme administrateurs.
A un moment donné, notre assemblée a décidé d'autonomiser les entreprises concernées. D'autres cantons n'ont pas été aussi loin; le CHUV, par exemple, est toujours un service de l'Etat de Vaud et fonctionne sans conseil d'administration. Notre parlement a fait le choix politique de mettre en place des conseils d'administration ou de fondation, c'est-à-dire de donner une sorte de personnalité juridique aux établissements avec des membres chargés des plus hautes fonctions. Laissons-leur cette autonomie que nous avons voulue.
Désigner des membres qui sont à la fois dans la strate de la plus haute surveillance, c'est-à-dire des parlementaires, et dans celle de haute direction au niveau de la surveillance interne de ces régies est un mélange des genres qui n'est pas bon. Pour le PDC, ce n'est pas qu'une question de conflit d'intérêts - ou d'un procédé antidémocratique, comme l'a suggéré la rapporteure de première minorité - mais essentiellement d'éthique. Nous vous recommandons donc d'accepter ce projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Murat Julian Alder (PLR). Je commencerai mon intervention en remerciant - fait assez exceptionnel - le groupe des Verts et surtout son représentant Mathias Buschbeck, qui a eu le courage de déposer ce projet de loi peu après l'adoption de la LOIDP à la fin de l'an dernier. Nous savons que le président Longchamp compte encore les jours, et il ne manquera sans doute pas de nous indiquer tout à l'heure que la durée de traitement de la loi s'est élevée à 1316 jours, autrement dit trois ans, sept mois et huit jours, nous rappelant ce triste écueil de la législature précédente, symptomatique du manque d'efficacité que nous pouvons malheureusement rencontrer dans ce parlement.
Comme l'a relevé à juste titre le député Sormanni, la commission législative a dû traiter la LOIDP à trois reprises, précisément parce qu'aucune majorité claire, fiable et solide ne se dégageait afin de répondre au besoin impératif, relevé par toutes les régies publiques, de légiférer en la matière. Pour le groupe PLR, les choses sont très claires: il y a une incompatibilité inhérente au conflit d'intérêts patent qui existe entre le mandat d'administrateur d'une institution de droit public et celui de député, cela a déjà été dit auparavant par mes préopinants. J'en veux pour preuve les députés qui, siégeant au conseil d'administration des TPG, pourraient être amenés à se prononcer sur les comptes de ces mêmes TPG à la commission des transports.
L'autre problème, c'est qu'une personne peut cumuler des fonctions de député, de conseiller municipal, de secrétaire général de parti et d'administrateur, réalisant ainsi un revenu mensuel qui dépasse allégrement le salaire médian ayant cours à Genève. Nous considérons que cela est parfaitement contraire au principe de milice que nous connaissons dans notre pays et dans notre canton.
Ce qui m'a beaucoup frappé, non seulement à la lecture des rapports de minorité, mais aussi en écoutant les deux rapporteurs de minorité, c'est qu'on ne nous a donné strictement aucun argument pour le maintien du statu quo. En effet, parmi les bruits que nous percevons à travers les fenêtres - il y a une manifestation à l'extérieur - je n'entends personne scander des slogans en faveur du cumul des mandats, je n'entends personne dire à quel point il est important de conserver cette possibilité. J'aimerais bien qu'on nous donne un argument crédible pour déclarer compatibles les mandats d'administrateur et de député, je n'ai encore strictement rien entendu en ce sens, ni en commission ni en plénière ce soir. J'ajoute à cela qu'en ce qui concerne les députations PLR, PDC et, sauf erreur, des Verts, aucun membre de ces trois formations ne siège dans un conseil d'administration d'une régie publique.
Une voix. Plus aujourd'hui !
M. Murat Julian Alder. La rapporteuse de minorité MCG nous dit que les députés se voient privés du droit d'être administrateurs. C'est perdre de vue le fait, Mesdames et Messieurs, chers collègues, que nous sommes également privés du droit d'être simultanément conseillers d'Etat ou magistrats du pouvoir judiciaire ou à la Cour des comptes.
Une voix. Et conseillers nationaux !
M. Murat Julian Alder. Et conseillers nationaux, c'est tout à fait juste, il y a une incompatibilité constitutionnelle à ce niveau-là.
Enfin, j'aimerais saluer ce projet de loi qui n'est rien d'autre qu'un compromis, puisqu'il ne s'applique qu'aux régies principales. Pour le PLR, en effet, il est clair que l'ensemble des conseils d'administration devraient être dépolitisés. Nous privilégions la compétence avant la couleur politique et surtout nous aurions aimé que cette règle s'applique à toutes les entités, qu'il s'agisse de grandes régies ou d'établissements de moindre importance. Je vous remercie de votre attention.
Une voix. Bravo !
M. Romain de Sainte Marie (S). Le parti socialiste s'opposera à ce projet de loi, car il ne s'agit absolument pas d'un compromis. Les trois groupes signataires ont attendu la nouvelle législature pour forcer le passage, sans réelle discussion, et assouvir leur volonté d'instaurer ce principe d'incompatibilité. Quel est le problème, au final ? En tout cas pas celui de la compétence que prône le PLR. Après deux tentatives refusées par le peuple de supprimer la représentation démocratique de celui-ci via les partis présents au Grand Conseil, le PLR n'y arrivera pas non plus par le biais de ce projet de loi. En effet, pour certaines formations politiques, la compétence passe par des députés au sein des conseils d'administration. C'est pourtant une vision relativement libérale - et c'est celle des socialistes - que de soutenir qu'il revient aux partis eux-mêmes de choisir leurs représentants en fonction des compétences et non en fonction d'un mandat ou d'un autre.
Mesdames et Messieurs, il me faut répondre à quelques contrevérités assez choquantes formulées par le député PLR Murat Alder, comme le fait que le cumul des fonctions vise à engendrer une rétribution plus élevée que le salaire médian. Monsieur Alder, si votre vision de la démocratie de milice est un parlement d'élite composé de personnes fortunées qui peuvent se permettre de faire de la politique parce qu'ils en ont les moyens, ce n'est pas celle du parti socialiste qui estime à l'inverse qu'il faut laisser cette opportunité à tout un chacun, peu importe ses ressources.
Mon préopinant a également dit, s'agissant du bruit qu'on entend dehors, qu'il n'entendait personne manifester pour laisser aux députés la possibilité de siéger tant au Grand Conseil que dans le conseil d'administration de l'une des grandes régies publiques. Monsieur le président, vous transmettrez ceci à M. Alder: je n'ai entendu personne non plus manifester en faveur du bouclier fiscal à Genève, même si M. Zacharias, qui ne siège malheureusement plus ici, a créé une association pour défendre les plus aisés de notre canton ! (Rire.) Ce n'est pas parce qu'on n'entend pas une manifestation à l'extérieur qu'il faut en conclure quoi que ce soit.
Le but de notre parlement est d'avoir un esprit de dialogue et de consensus, pas de passer en force sans écouter la population qui, par deux fois, s'est opposée à la volonté de la droite de supprimer la représentation démocratique au sein des conseils d'administration - vous transmettrez encore à M. Alder, Monsieur le président.
Mesdames et Messieurs les députés, la LRGC comporte une disposition, son article 24, sur les conflits d'intérêts directs, et celle-ci est suffisante, bien que pas toujours appliquée - c'est mon opinion personnelle. Il existe donc aujourd'hui un garde-fou pour éviter ce genre de problème.
Ce soir, nous sommes là pour conserver la possibilité offerte aux députés de siéger également dans un conseil d'administration, pas pour encourager le cumul des mandats. D'ailleurs, je crois qu'il n'y a que très peu de parlementaires de ce Grand Conseil administrateurs par ailleurs. On pourrait bien sûr faire la chasse à l'ensemble des cumuls, interdire aux députés d'exercer toute autre fonction, mais non, nous souhaitons plutôt privilégier la compétence. Si on entend faire la chasse aux doubles mandats, alors faisons-la aussi s'agissant des conseils d'administration d'entités privées; on sait qu'à Berne, cela nuit à notre système démocratique, il ne faudrait pas que cela nuise à la démocratie dans le canton de Genève. Le parti socialiste vous invite à refuser ce projet de loi.
Mme Frédérique Perler (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, ce ne sera pas une déclaration fracassante que de vous annoncer que le groupe des Verts votera ce projet de loi à l'unanimité, puisqu'il est issu de ce même groupe. On observe, et c'est très bien restitué dans le rapport de majorité, que le Conseil d'Etat est en faveur du principe d'incompatibilité, que la Cour des comptes y souscrit sans réserve et que deux éminents professeurs soutiennent ce projet de loi définissant qui peut être membre d'un conseil d'administration.
Ainsi que la Cour des comptes l'a relevé avec justesse et que M. le député Guinchard l'a rappelé tout à l'heure, il s'agit d'une question de posture pour éviter tout conflit d'intérêts. En effet, l'administrateur d'une régie publique doit aller dans le sens de l'intérêt de celle-ci, tandis que le député, par son serment, a choisi d'aller dans le sens de l'intérêt général. Lorsqu'on a compris cette donnée explicitée par la Cour des comptes lors des auditions, on a saisi l'ampleur du problème et des incompatibilités. Nous ne pouvons que souscrire à cette vision qui nous paraît parfaitement éthique, transparente et crédible. Les députés et administrateurs ne se retrouveront plus dans des situations délicates, soit en plénière de ce parlement, soit au sein de leur conseil, à devoir faire des contorsions.
Comme on l'a soulevé également, ce Grand Conseil a choisi d'autonomiser les institutions de droit public, et il s'agit d'assumer cette décision jusqu'au bout en interdisant les doubles casquettes. Cela nous paraît sage, Mesdames et Messieurs, et c'est la raison pour laquelle le groupe des Verts vous invite à voter ce projet de loi qui apportera une transparence tout à fait bienvenue s'agissant d'une thématique qui a fait couler beaucoup d'encre et de salive. Ce texte, je le répète, apporte de la transparence, davantage de crédibilité aux élus et surtout de proximité avec les citoyens. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole va à M. le député Vincent Maitre pour une minute quarante.
M. Vincent Maitre (PDC). Je vous remercie, Monsieur le président. L'essentiel a été dit, mais je me dois quand même de relever l'incohérence, pour dire le moins, de certains propos tenus de part et d'autre de ce parlement, notamment le prétendu viol de la démocratie, le mensonge que les partis qui déposent ce projet de loi et ceux qui le soutiennent auraient raconté à la population. C'est évidemment à M. Sormanni que je m'adresse affectueusement...
Le président. C'est à moi que vous vous adressez, Monsieur le député.
M. Vincent Maitre. Alors vous lui transmettrez...
Le président. Affectueusement, bien sûr !
M. Vincent Maitre. Je voudrais seulement rappeler à M. Sormanni qui nous accusait de tromper le peuple - je reprends ses mots - qu'aux points 31 et 33 de notre ordre du jour figurent des projets de lois qui cherchent à réinscrire le principe de la nationalité suisse dans la LPol, lesquels ont été déposés à peu près au lendemain de l'acceptation de celle-ci par les citoyens. A aucun moment le MCG ne s'est embarrassé de ne pas respecter la volonté populaire, donc le reproche qu'on nous adresse aujourd'hui tombe parfaitement à faux.
Au final, on peut trouver tous les exemples possibles et imaginables pour servir sa cause; qu'on le veuille ou non, c'est tout simplement la loi qui confère au Grand Conseil une compétence supérieure de surveillance des institutions de droit public. Et, ainsi que l'a indiqué le député Guinchard, on ne peut tout simplement pas - c'est d'une logique implacable - être à la fois contrôleur et contrôlé.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi sur l'organisation des institutions de droit public est revenu en plénière à trois reprises, et la position du groupe Ensemble à Gauche a toujours été claire: nous avons combattu le principe d'incompatibilité, précisant que nous ne plaidions pas pour une désignation systématique de députés dans les conseils d'administration ou de fondation, mais que nous trouvions tout à fait absurde de se priver de compétences spécifiques lorsque c'était opportun. De tout temps, nous avons défendu cette posture.
Dans le cadre des travaux de la commission et puisqu'une majorité semblait se dessiner en faveur de l'interdiction du double mandat, nous avons essayé de sauver l'essentiel, à savoir les établissements qui ne sont pas les six régies principales, et c'est pourquoi nous nous sommes abstenus. Or, ce soir, c'est le retour des vieux démons, la critique de la politisation des conseils d'administration, alors que nous savons tous qu'il ne s'agit pas de ça, il s'agit simplement d'autoriser le cumul des fonctions lorsque cela paraît pertinent.
De ce point de vue là, le discours sur l'appât du gain sur certains élus, accusés de chercher à amasser des jetons de présence par-ci par-là, est une manière de remettre en question leur probité et leur motivation, ce qui n'est pas acceptable. C'est d'autant moins acceptable que les scrupules - on en appelle à l'éthique ! - sont réservés à ce conflit d'intérêts en particulier, mais n'interviennent pas, comme l'a dit M. de Sainte Marie tout à l'heure, dans d'autres cas, par exemple de conseils d'administration ou d'organes privés où les prébendes sont plutôt largement répandues. Aussi, très sincèrement, la mesure que nous voulions observer jusqu'ici dans notre position a été réduite à néant par les déclarations de ceux qui défendent le principe d'incompatibilité, et nous penchons dès lors en faveur du non à ce projet de loi.
Pour conclure, j'aimerais indiquer à M. Alder - je vous prie de lui transmettre, Monsieur le président - qui s'est référé à la longueur des travaux relatifs à la LOIDP, que s'il voulait adresser un quelconque reproche à qui que ce soit, alors qu'il le fasse à ceux qui ont consenti à renvoyer ce projet de loi là plusieurs fois à la commission législative. Nous avons examiné la LOIDP à trois reprises en plénière, nous procédons à une quatrième révision et, ne craignez rien, il y en a une cinquième dans le pipeline, puisque la commission a également travaillé sur un texte concernant la rémunération - je ne vous rappellerai pas le scandale que nous avons connu ici à propos de cette question. Compte tenu de ce que je viens d'énoncer, le groupe Ensemble à Gauche se prononcera contre ce projet de loi. (Brouhaha.)
Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Chers collègues, il y a beaucoup trop de bruit dans la salle ! Merci d'aller discuter ailleurs ou d'écouter ceux qui se donnent la peine d'argumenter. La parole est maintenant à M. le député Pierre Vanek pour une minute.
M. Pierre Vanek (EAG). Il va se donner la peine d'argumenter pendant une minute, Monsieur le président ! D'abord, concernant ce qu'a dit M. Alder sur les incompatibilités constitutionnelles, un certain nombre de fonctions proscrites aux députés figurent en effet dans la constitution, parce que ce n'est pas une chose légère que d'interdire des mandats aux élus du peuple, de leur dire qu'ils ne peuvent pas faire ceci ou cela. Les charges en question sont celle de conseiller national - vous l'avez dit, Monsieur le député - d'un mandat électif à l'étranger et, cela coule de source au regard de la séparation des pouvoirs, de magistrat.
Or là, vous voulez nous glisser quelque chose qui est manifestement de rang constitutionnel, qui a été traité par la Constituante, laquelle a défini une liste d'incompatibilités ! En un post-scriptum un peu honteux à votre travail de constituant, vous tentez d'introduire un appendice législatif à l'article 83 de la constitution. Ce n'est pas bien, Monsieur le député !
J'ai entendu un truc délirant - enfin, non, je mesure mes propos: disons surprenant - de la part de Mme Perler. Selon elle, il y a conflit parce que les députés doivent défendre l'intérêt général, tandis que les représentants d'une régie soutiennent l'intérêt de celle-ci. C'est absurde, Mesdames et Messieurs !
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Pierre Vanek. Quand on siège dans un établissement de droit public...
Le président. Nous avons bien compris, Monsieur, c'est terminé.
M. Pierre Vanek. ...on défend l'intérêt général dans le domaine particulier dont s'occupe celui-ci...
Le président. S'il vous plaît !
M. Pierre Vanek. ...c'est une évidence !
Le président. Merci. Monsieur Alder, vous n'avez plus de temps de parole. Le micro revient à M. Pfeffer.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Combattre les conflits d'intérêts est une volonté légitime que la plupart d'entre nous partagent, je le répète, mais il est ici question de déterminer si une loi se justifie en raison d'un ou deux cas problématiques qu'on cherche à punir. La réponse est non.
S'il existe réellement une incompatibilité entre les fonctions de député et d'administrateur au sein d'un institut, il faut amender la loi spécifique à l'établissement concerné. Il est contestable et même contre-productif d'édicter des interdictions tous azimuts comme le fait ce texte de loi. De ce fait, Mesdames et Messieurs, je vous propose de le rejeter.
Le président. Merci, Monsieur. Madame Magnin, vous n'avez en principe plus de temps de parole, mais je vous accorde trente secondes pour nous communiquer la conclusion qui est la vôtre.
Mme Danièle Magnin (MCG), rapporteuse de première minorité. Merci, Monsieur le président. Ma conclusion, c'est que lorsqu'on siège dans une régie publique ou au Grand Conseil, on défend l'intérêt général, et que quand un chef d'entreprise fait de la politique, est élu et siège dans différents comités, contrairement à ce qu'a dit M. Alder, il ne gagne pas d'argent, il en perd. Merci.
Le président. Merci pour votre concision. Monsieur Buschbeck, vous ne disposez plus de temps de parole non plus, mais je vous alloue les mêmes trente secondes pour conclure.
M. Mathias Buschbeck (Ve), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste revenir sur l'idée qu'on essayerait de lutter contre la représentation politique au sein des conseils d'administration. Non seulement ce n'est vraiment pas l'objet de ce débat, mais c'est justement le contraire que nous, les Verts, cherchons à faire, à savoir augmenter la représentativité en élargissant le champ des personnes s'impliquant dans la vie publique, que ce soit au Grand Conseil ou dans les grandes régies. Nous ne croyons pas à la personne providentielle qui peut cumuler l'ensemble des tâches, c'est complètement contraire à nos principes, en particulier celui de bonne gouvernance. Pour cette raison, Mesdames et Messieurs, nous vous appelons à accepter ce projet de loi.
M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, durant les 1316 jours, si je ne m'abuse, qu'ont duré les travaux de la commission législative, le Conseil d'Etat a manifesté une position constante, défendant le principe d'incompatibilité entre le mandat de député et celui d'administrateur au sein des institutions de droit public. En effet, les règles élémentaires de bonne gouvernance doivent nous amener à séparer ces deux fonctions, car le rôle qui est le vôtre en tant que députés n'est pas le même que celui attendu des personnes siégeant dans les grandes régies publiques.
Je vous rappelle, même si ce cas ne s'est pas présenté durant cette législature-ci, mais la précédente, que l'un d'entre vous, qui ne siège plus sur ces bancs, avait défendu des positions au sein du conseil d'administration des TPG qui étaient l'exact inverse de celles adoptées sur le même sujet devant ce Grand Conseil, quelques semaines plus tard. Il avait d'ailleurs tenu des propos totalement déconcertants, soutenant que son rôle d'administrateur n'était pas le même que celui de député et qu'il avait donc des opinions divergentes sur la même question en fonction du lieu où il s'exprimait !
Ces règles élémentaires de bonne gouvernance, ce sont celles que la Confédération s'est appliquées à elle-même dans le cadre des régies publiques fédérales, celles que l'OCDE a établies sous forme de recommandations aux différents pays membres qui composent cette organisation intergouvernementale, et ce sont celles que le Conseil d'Etat, respectivement - je crois que cela a été indiqué - la Cour des comptes, pour autant que ce soit un exemple, vous proposent de respecter. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons à suivre le rapport de majorité et à instaurer un principe d'incompatibilité.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le président du Conseil d'Etat, et lance le vote sur cet objet...
Une voix. Vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien, nous procédons au vote nominal.
Mis aux voix, le projet de loi 12214 est adopté en premier débat par 54 oui contre 39 non et 2 abstentions (vote nominal).
Le projet de loi 12214 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12214 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 54 oui contre 39 non et 2 abstentions (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Débat
Le président. Nous sommes à la dernière urgence, classée en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole au député Cruchon - s'il veut bien appuyer sur le bouton.
M. Pablo Cruchon (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ça va, vous m'entendez ? (Commentaires.) Vous ne m'entendez pas ? Alors je peux me rapprocher !
Des voix. Non !
M. Pablo Cruchon. Pour ma deuxième intervention au sein de cette assemblée, je vous invite à soutenir un objet qui a pour but de défendre un monde politique transparent, impartial et garantissant des procédures démocratiques pour la population - rien de moins ! En effet, j'ai la délicate tâche d'intervenir sur ce qu'il est convenu d'appeler l'affaire Maudet.
Cette affaire, comme tout le monde, je l'ai découverte dans la presse, par un certain nombre d'interviews et d'articles qui m'ont alerté puisqu'ils font état de suspicions graves à l'encontre du conseiller d'Etat Pierre Maudet. Je ne vais pas m'étendre sur les faits, vous connaissez les suspicions: c'est à la justice de les établir. Je vais m'arrêter ici sur un cadre que je souhaite le plus démocratique, le plus transparent et le plus impartial possible, qui doit permettre l'établissement de faits précis. On parle ici de cadeaux reçus, à hauteur de 70 000 F; on parle d'éventuelles interférences dans l'adjudication d'une concession à l'aéroport. (Commentaires.) Une enquête a été effectuée, une procédure pénale est ouverte. Bref, nous ne sommes à l'abri d'aucun scandale, nous ne sommes à l'abri d'aucun des pires scénarios ! D'ailleurs, le Conseil d'Etat et notre assemblée ont pour responsabilité d'assurer qu'aucun doute ne puisse entacher la procédure en cours, qu'aucun soupçon de conflit d'intérêts ou d'autres problèmes ne vienne semer le doute parmi la population genevoise.
Or, quelle n'a pas été ma surprise lors de l'annonce par le Conseil d'Etat élu de la proposition de répartition des départements: ce futur Conseil d'Etat a proposé que M. Maudet reste chargé du département de la sécurité et garde la responsabilité de l'aéroport. Ce dossier et ce département sont extrêmement problématiques, de même que ce choix, car le ministère public délègue à la police des actes d'enquête dans ce cadre-là - à des policiers qui sont sous les ordres de M. Pierre Maudet ou dépendent hiérarchiquement de lui. Même si nous faisions entièrement et pleinement confiance au conseiller d'Etat Pierre Maudet, il nous paraît hautement problématique que des personnes chargées d'enquêter sur ces événements soient subordonnées à une des personnes ciblées par l'enquête. Si la situation devait rester la même, les doutes sur le conflit d'intérêts ou l'interférence ne pourraient être levés. Il en va de même avec la gestion de l'aéroport puisque de potentiels témoins travaillant à l'aéroport pourraient être appelés à déposer dans le cadre de la procédure et devraient pouvoir le faire sans pression ni crainte.
Ainsi, il nous paraît indispensable, pour permettre la procédure la plus démocratique, la plus transparente et la moins entachée de doute, que M. Maudet soit remplacé de manière temporaire à la tête du département de la sécurité et de l'aéroport. Il nous semble que c'est le minimum requis pour réaliser l'ensemble des démarches afin de faire la lumière sur ces événements, démarches qui auront lieu au tribunal, mais aussi à la commission de contrôle de gestion. Ce d'autant plus que la situation du ministère public n'est de loin pas satisfaisante: il n'existe aucune procédure spécifique à Genève en cas d'enquête sur un procureur ou un conseiller d'Etat, ce qui existe pourtant au niveau fédéral. Et l'appartenance partisane commune du procureur général et du conseiller d'Etat n'est déjà pas une garantie d'objectivité ! Donc, ni le Conseil d'Etat ni le parquet ne peuvent garantir à la population une procédure au-dessus de tout soupçon: c'est à nous de le faire ! C'est donc un prérequis démocratique et une garantie de transparence et de probité que nous vous invitons à prendre ce soir en acceptant notre proposition de résolution. (Applaudissements.)
M. Jean Rossiaud (Ve). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, les Verts demandent le renvoi de cette proposition de résolution à la commission de contrôle de gestion. Les Verts sont très préoccupés par ce que la presse appelle désormais l'affaire Maudet. C'est notre rôle en tant que parlement de contrôler le gouvernement, et personne ne comprendrait que nous ne le fassions pas ! Parmi nous, Mesdames et Messieurs les députés, c'est bien à la commission de contrôle de gestion qu'incombe la responsabilité de se saisir de cet objet. Les Verts demanderont la création d'une sous-commission de la commission de contrôle de gestion qui soit spécifique à cette affaire. Nous vous demandons par conséquent le renvoi de ce texte en commission. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous voterons à la fin du débat sur cette demande de renvoi à la commission de contrôle de gestion. Quant à la sous-commission, ce sera à la commission elle-même d'en décider. Je passe maintenant la parole à M. le député Thomas Bläsi.
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Dans le groupe UDC, bien sûr, nous sommes également soucieux du fait de cette situation qui a passablement occupé les médias. Nous pensons pour notre part que, dans un premier temps, la procédure judiciaire en cours doit prévaloir. D'ailleurs, nous nous permettons de dire à nos collègues d'Ensemble à Gauche que le procureur général a pris la précaution de s'entourer dans ce cas-là de magistrats d'accointances différentes pour être certain de ne pas pouvoir être mis en cause sur ce point. En ce qui nous concerne, nous avons confiance en la procédure judiciaire en cours et nous souhaitons en attendre les résultats pour voir si une démarche parlementaire supplémentaire est nécessaire. Ce ne sera visiblement pas le cas ce soir. L'UDC tient à dire ici qu'elle s'inquiète également à propos des divers liens d'intérêts et des diverses polémiques suscitées par ce voyage.
L'UDC s'interroge également par rapport à un volet qui n'a par ailleurs pas été abordé par la presse ni par les différentes personnes que nous avons pu entendre jusqu'à présent: nous nous inquiétons de la situation fiscale de M. Maudet en 2015. En effet, nous nous demandons de quelle manière ce cadeau de 50 000 F sur un revenu de 300 000 F a été implémenté dans sa déclaration d'impôts. Logiquement, le fait de recevoir un tel cadeau aurait dû être inscrit dans sa déclaration fiscale. Il serait intéressant de savoir si les dons faits aux deux associations ont bien été déduits de sa déclaration fiscale, ce qui semble logique puisqu'il s'agit de dons à des associations caritatives, mais il serait également légitime que le gain soit inscrit dans la déclaration fiscale de M. Maudet. En l'occurrence, seul le pouvoir judiciaire peut fournir cette information, compte tenu du secret fiscal que nous défendons par ailleurs. Nous estimons que cette réponse-là est particulièrement importante dans le développement de cette histoire.
Le groupe UDC vous demande donc, par gain de paix et surtout pour aller de l'avant dans ce dossier, de renvoyer cette proposition de résolution à la commission de contrôle de gestion, qui est finalement la seule commission du Grand Conseil ayant la possibilité d'enquêter sur cette affaire pour faire la lumière.
M. François Baertschi (MCG). Cette proposition de résolution pose un grave problème institutionnel, un problème institutionnel qui n'a jusqu'ici pas été résolu. Il devra bien être résolu à un moment ou à un autre, sinon de graves dangers vont survenir.
J'aimerais quand même dire qu'il faut laisser à Pierre Maudet la présomption d'innocence. Cette présomption d'innocence est importante, mais elle est pour l'instant entièrement bafouée par les médias et par l'opinion publique auprès de qui Pierre Maudet a perdu une aura qui était importante, ce qu'on peut regretter. On doit d'abord le regretter parce qu'il y a des incohérences, des versions multiples ont été données, ce qui n'est pas acceptable ! Je vois mal le chef de la police ou plutôt le conseiller d'Etat chargé de la police entendre un policier lui donner trois ou quatre versions d'un fait: il le licencierait immédiatement, soyons clairs ! On connaît la détermination de Pierre Maudet, c'est ce qu'il ferait ! On est donc dans une situation véritablement impossible et le grave problème, actuellement, c'est le soupçon. Ce soupçon insidieux est là, au-dessus de nos têtes, il reste et il va rester si on n'a pas le courage d'éclairer la situation dans laquelle nous sommes. Il faut à tout prix permettre une enquête - une enquête indépendante - et trouver une issue à la situation institutionnelle actuelle, dans laquelle un conseiller d'Etat a dans son département les policiers qui doivent enquêter sur une affaire qui le met en cause lui-même ! C'est une situation impossible ! Il aurait fallu véritablement prendre des mesures: soit suspendre la fonction de Pierre Maudet liée à la police judiciaire, soit, je ne sais pas, trouver une formule ou une autre qui permette de garder l'indépendance de la justice et l'indépendance de la police dans une enquête qui met en cause un conseiller d'Etat, qu'on le veuille ou pas ! La situation actuelle, c'est une condamnation publique de Pierre Maudet au travers de soupçons, des soupçons insidieux. Il faut à tout prix sortir de cela ! Le groupe MCG demande le renvoi à la commission de contrôle de gestion et il vous demande de faire preuve de responsabilité.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Nous avons enregistré cette demande que je ferai voter après le débat. La parole est à M. le député Romain de Sainte Marie.
M. Romain de Sainte Marie (S). Merci, Monsieur le président. Une chose est certaine concernant cette affaire, si on peut l'appeler ainsi, c'est que la lumière doit être faite. La lumière doit être faite, en effet, sur les aspects publics ou privés de ce voyage, sur la corrélation avec l'octroi d'une concession pour l'entreprise Dnata par l'Aéroport international de Genève, qu'elle ait eu lieu ou pas. Une chose est certaine, si on veut faire la lumière sur ces éléments, nous n'allons pas le faire en débattant en séance plénière, car nous n'avons absolument pas les moyens de faire la lumière sur ça ce soir !
C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste votera le renvoi à la commission de contrôle de gestion. Il est certain que cette résolution peut paraître choquante puisqu'elle va à l'encontre du président du Conseil d'Etat nouvellement nommé et qui entrera en fonction très prochainement, mais elle ne viole en aucun cas la présomption d'innocence ! Elle souhaite simplement pouvoir éloigner le conseiller d'Etat des départements concernés par les reproches formulés dans les médias, mais cette résolution n'accuse et ne condamne en aucun cas Pierre Maudet. Pour ces différentes raisons, nous souhaitons que cette proposition de résolution soit étudiée par la commission de contrôle de gestion et nous appuierons cette demande.
M. Cyril Aellen (PLR). Chacun doit rester dans son rôle ! La presse fait son travail, elle enquête selon ses propres méthodes et elle publie des articles; les lecteurs lisent et se font une opinion. Le parlement, haute autorité de surveillance, a aussi un rôle à jouer et dispose d'une commission de contrôle de gestion pour mener les enquêtes qu'il estime juste de mener. Le gouvernement - le gouvernement élu - s'organise comme il le souhaite: il prend ses responsabilités par rapport à la répartition des départements et les personnes qui doivent les assumer, il joue son propre rôle de cette façon-là. La justice fait son travail, saisie suite à une dénonciation, semble-t-il - je n'en ai aucune idée, si ce n'est que c'est ce que la presse a relevé. La justice fait son travail en regardant s'il y a lieu de mettre en cause l'une ou l'autre des personnes qui seraient le cas échéant soit citées dans cette dénonciation soit retrouvées par le ministère public. Si le ministère public souhaite mettre en cause l'un des magistrats du pouvoir exécutif, il devra saisir notre parlement qui, à ce moment-là, devra se prononcer sur la requête qui lui aura été faite.
Pour le surplus, il conviendrait de respecter les institutions et leur façon de procéder en refusant purement et simplement cette résolution qui fait fi à la fois de la séparation des pouvoirs et de la présomption d'innocence. Toutefois, dans un souci de pragmatisme et pour éviter un débat inutile, le groupe PLR acceptera le renvoi à la commission de contrôle de gestion.
M. Pablo Cruchon (EAG). Je crois que je me suis mal exprimé: je ne veux pas remplacer le ministère public ni le Conseil d'Etat ! Je crois qu'on a là une affaire qui nous mobilise, nous, en tant que Grand Conseil. Il y a eu une atteinte, il y a des suspicions très graves. Je rappelle qu'à l'époque, M. Giscard d'Estaing avait reçu des diamants d'une valeur de 4000 F, et on parle ici d'un cadeau à hauteur de 70 000 F ! Alors il y a une présomption d'innocence, certes, mais nous avons la responsabilité de permettre que cette procédure soit menée dans le calme, dans la transparence et sans aucune suspicion. Or, le choix du Conseil d'Etat élu est un mauvais choix, de ce point de vue là. En tant que Grand Conseil et autorité de surveillance, nous avons le devoir de dire au Conseil d'Etat élu que c'est un mauvais choix. Et nous devons lui dire que M. Maudet doit se retirer, le temps de cette affaire. D'ailleurs, ça lui servira si la procédure l'innocente: il n'y aura alors plus le moindre doute au sujet de M. Maudet. Sachez que s'il ne le fait pas, il y aura toujours ce doute ! Je pense donc qu'il est nécessaire aujourd'hui, non pas de renvoyer cette proposition de résolution en commission, mais de la voter, et je trouve dommage qu'on ait proposé le renvoi en commission avant même de pouvoir en débattre sérieusement. (Commentaires.)
M. Pierre Bayenet (EAG), député suppléant. Mesdames et Messieurs les députés, chacun doit rester à sa place, chacun doit rester dans son rôle, comme l'a indiqué le député Cyril Aellen. Aujourd'hui, le rôle de ce Grand Conseil est de préserver et de sauvegarder la confiance que la population peut avoir en ses institutions. Pour cela, il faut des mesures urgentes. Pourquoi ? Parce qu'une enquête est en cours, une enquête de la police judiciaire. Pour que cette enquête puisse aboutir, il faut bien entendu que les policiers qui en sont chargés puissent agir librement. Or, comme vous le savez, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, l'inspection générale des services est rattachée administrativement au département de la sécurité et, donc, potentiellement, sous son influence - tout comme le sont d'ailleurs les employés de l'aéroport qui devront être entendus dans le cadre d'une enquête pénale. Si on veut établir ce qui s'est passé, eh bien, tous les employés ayant participé au processus d'attribution des mandats et des concessions devront être entendus. Cela est impossible dans une situation où nous avons un conseiller d'Etat, potentiellement impliqué dans une affaire, qui dirige - qui plus est d'une main de fer, vous le savez - les départements dans lesquels travaillent les personnes à entendre.
Il y a un blocage institutionnel majeur, c'est du jamais vu. Cela implique donc une action immédiate et énergique. Bien sûr, le rôle du parlement n'est pas de mener l'enquête, le rôle du parlement est de s'assurer que la justice puisse fonctionner. Malheureusement, aujourd'hui, il n'y a pas d'autre manière de faire institutionnellement que d'obtenir de M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet qu'il ne prenne pas les postes qui lui ont été trop aimablement attribués par le collège. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission de contrôle de gestion.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 851 à la commission de contrôle de gestion est adopté par 85 oui contre 5 non et 3 abstentions.
Le président. Nous arrivons au point suivant de notre... (Remarque.) Il faut appuyer sur le bouton ! (Remarque.) Monsieur Florey, oui ?
M. Stéphane Florey (UDC). Monsieur le président, ça n'aura pas d'incidence sur le vote, mais c'est juste pour vous signaler qu'apparemment le bouton de notre collègue André Pfeffer ne fonctionne pas !
Le président. Merci, on va voir ce qu'il en est.
Débat
Le président. Nous reprenons notre ordre du jour. Pour cet objet, nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Le rapporteur de minorité, M. Riedweg, est remplacé par M. Lussi. Monsieur Raymond Wicky, la parole est à vous.
M. Raymond Wicky (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, de quoi s'agit-il ? Cette proposition de motion avait pour but de réclamer à la France une participation pour la prise en charge des indigents sur la base d'un accord étatique passé entre la Confédération helvétique et la France, il y a nombre d'années. Il faut reconnaître que, dans ce dossier, la France ne conteste pas fondamentalement ce contentieux ni la somme demandée, mais elle estime que les nouveaux accords passés entre la Suisse et la France annulaient de facto ou rendaient caducs les anciens accords interétatiques sur lesquels se basent les motionnaires pour leur démarche. En ce qui concerne la Confédération - car c'est un problème qui n'est pas traité par notre gouvernement cantonal mais par le Conseil fédéral - elle n'entend pas entrer en matière sur ce problème directement: elle n'entend pas entrer en matière ou faire pression sur la France par rapport à cette démarche et à cette demande, car cela serait sans doute particulièrement préjudiciable aux accords internationaux qui viennent d'être conclus ou qui sont en cours d'élaboration avec notre pays voisin. Cela induirait certainement une forme de discorde dans la relation entre la France et la Suisse. Il faut dire aussi que la Confédération n'est pas restée inactive; elle a fait un geste - un beau geste, je dirais - en remboursant 4,18 millions de francs sur les quelque 6 millions dus à Genève. Genève a donc récupéré une bonne partie de cette somme.
Comme je le disais tout à l'heure, et je le répète encore une fois, c'est la Confédération qui est à la manoeuvre et c'est à la Confédération qu'il appartient de décider en dernier ressort si elle entend entrer en matière ou non. Il s'agit d'échanges d'Etat à Etat et non pas du canton avec l'Etat français. Pour ces raisons sommairement exprimées devant vous, la majorité de la commission refuse cette motion.
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Monsieur le président, vous me permettrez pour une fois de solliciter votre indulgence: je reprends au pied levé ce rapport, vu que M. Riedweg n'est plus dans ce Grand Conseil et que je n'avais pas encore siégé à la CACRI à propos de cela. De quoi s'agit-il ? D'un accord datant du 1er novembre 1931, qui dit que les frais des gens qui deviennent indigents et se retrouvent à la charge du pays hôte doivent être remboursés. Nous remarquons qu'en 2005, contrairement aux propos du rapporteur de majorité, la France a décidé unilatéralement que cet accord n'avait plus grande valeur. La France ne conteste pas devoir cet argent, à l'Hospice général essentiellement et aux HUG pour quelques dettes. Le rapporteur de majorité a dit que la Confédération travaillait bien, et le but de cette motion n'est pas de la critiquer. C'est dans le rapport de minorité, la Confédération a effectivement remboursé 4,18 millions de francs au canton de Genève entre 1998 et 2008. A la fin du rapport de minorité, il est relevé que le conseiller fédéral Didier Burkhalter a dit en aparté à M. François Longchamp que le Conseil fédéral était conscient que le canton de Genève devait encore récupérer 6,7 millions de francs.
Mesdames et Messieurs les députés, à une époque où nous sommes tous en train de courir après l'argent, pourquoi ne pas récupérer celui qu'on nous doit ? C'est la raison pour laquelle cette motion invite le Conseil d'Etat à dresser l'inventaire exhaustif de toutes ces obligations et - pourquoi pas ? - à exercer la compensation. Je rappelle que, par rapport à d'autres accords, nous donnons profusion d'argent à l'Etat français, vu que 3,5% de la masse salariale des frontaliers est prélevée chaque année puis reversée à la France, ce qui est loin d'être négligeable. En conséquence de tout cela, le groupe UDC vous demande d'accepter cette motion et de la renvoyer au Conseil d'Etat.
M. Alberto Velasco (S). Voilà encore un objet anti-français ! C'est gênant, parce que c'est quand même un pays qui nous a donné sa langue et sa culture ! Quelle ingratitude envers ce pays, Mesdames et Messieurs les députés ! Les frontaliers viendraient chez nous nous piquer le travail et, maintenant, les frontaliers nous enverraient leurs indigents ! Cette motion concerne les indigents, c'est-à-dire les personnes qui se trouvent sur notre territoire et qui n'ont pas les moyens de se soigner et de manger. La collectivité suisse, genevoise, devrait les accueillir et les soigner, par générosité, c'est ça qui serait logique ! Le président du Conseil d'Etat nous a dit en commission que la France faisait de même et que beaucoup de citoyens de notre pays résidant en France étaient indigents. Même si la Suisse est un pays riche, des concitoyens sont dans des situations difficiles.
Je reviens en arrière: avant et après la guerre de 14-18, beaucoup de Suisses ont émigré en France et se sont trouvés dans des situations très difficiles. Est-ce qu'on va faire un calcul remontant au début du siècle dernier pour connaître le nombre de concitoyens qui ont émigré et qui ont bénéficié de soins et d'aide de ces pays-là et pour savoir combien on doit, non seulement à la France, mais à l'Espagne et à l'Allemagne ? C'est ça la question, ici ! L'important n'est pas une question de pognon, l'important, c'est l'humanité et la générosité ! La Suisse, justement, a grandi grâce à cette attitude humanitaire, en recevant des indigents sans passer la facture. Aujourd'hui, on nous demande de transmettre la facture, c'est quand même gravissime, chers collègues ! Moi, je souhaite que ces motions anti-frontaliers et anti-français s'arrêtent et qu'on développe un esprit de collaboration avec nos voisins de l'autre côté de la frontière. Effectivement, quand ces gens viennent travailler chez nous, on leur donne des salaires: ils fournissent de la technologie et du travail, ils produisent des richesses chez nous et, en contrepartie, nous leur donnons des salaires sur lesquels ils paient des impôts - des impôts à la source souvent bien supérieurs à ce qu'ils devraient payer s'ils devaient remplir une déclaration d'impôts !
Donc, dans cette histoire, je crois qu'on est gagnants ! Il ne faut pas trop remuer le fumier parce que, sinon, on va payer plus ! Monsieur le président, vous nous avez expliqué en long et en large en commission que si la France nous soumettait une facture, ce serait à nous, Genevois, de payer. J'espère que j'entendrai vos explications tout à l'heure. Mesdames et Messieurs les députés, il est temps d'en finir avec ce type de motions !
M. André Python (MCG). Je voulais juste relever, par rapport à cette motion, l'excellent travail de notre conseiller d'Etat Mauro Poggia qui a mené des négociations avec la France en obtenant la restitution de 40 millions de francs pour la Suisse, dont 5 millions pour Genève. Nous considérons donc cette motion comme caduque et notre groupe va s'abstenir lors du vote.
Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, M. Velasco a raison: il faut en finir avec ce genre de motions qui pointent du doigt la France et les frontaliers ! Les commissaires qui ont siégé à la CACRI l'ont vu de près: la France ne conteste en aucun cas la somme évoquée dans cette motion. Cette proposition de motion se heurte par ailleurs principalement au fait que l'invite consistant à demander au Conseil d'Etat d'exercer la compensation des créances dont il est question est simplement irréaliste, parce que c'est la Confédération qui est le partenaire de la France concernant les thèmes que touche ce texte. Nous avons constaté que la Confédération n'entend pas pousser la France dans la direction proposée par la motion, puisque la Suisse serait dans l'ensemble tout simplement perdante ! Il est illusoire de penser, comme le suggère cette motion, que le canton de Genève ressortirait gagnant dans cette histoire, ceci d'autant plus qu'il y a des aspects tactiques et politiques de portée générale qui doivent naturellement être considérés en la matière. M. Longchamp nous en dira un peu plus; en commission, il avait dit qu'il pourrait informer ce Grand Conseil sur le dossier, et je pense qu'il faudra être attentif à ses propos tout à l'heure.
M. François Lance (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, malgré plusieurs demandes en commission, il faut regretter que le groupe UDC n'ait pas retiré cette proposition de motion. On l'a dit, la problématique découle d'un accord datant de 1931 qui réglait la prise en charge des indigents de part et d'autre de la frontière. Les dettes dont il est question remontent à plus de vingt ans, de 1997 à 2002. Or, en 2002, les accords bilatéraux sont entrés en vigueur et cet accord-là est devenu caduc. Comme cela a été dit, plusieurs cantons sont dans la même situation et l'ensemble de la dette représente - ou représentait - 28 millions de francs dont 6,7 millions de francs pour Genève. C'est la Confédération, soit le département fédéral des affaires étrangères, qui est chargée de récupérer cet argent, et non pas Genève.
Concernant la demande de compensation, elle n'est pas possible, car la rétrocession fiscale faite à la France est soumise à des règles très précises et, depuis le traitement de cette motion, comme il a été dit, il semblerait qu'un accord ait été trouvé pour le remboursement partiel de cette dette par la Confédération. Dans ces conditions, ce texte est caduc et le groupe PDC vous demande de le refuser.
M. André Pfeffer (UDC). Cette proposition de motion demande uniquement et seulement l'établissement d'un inventaire des dettes et des créances et, bien entendu, de compenser ces dettes et créances par rapport à la rétrocession annuelle à la France de 3,5% de la masse salariale des frontaliers. Pour rappel, il existe une convention entre la Suisse et la France pour que chaque pays assume les coûts et les frais de ses indigents nationaux résidant chez le voisin. La France a une dette envers Genève de plusieurs millions de francs et cette dette s'alourdit de mois en mois; il y a environ deux indigents français en Suisse pour un indigent suisse en France. Le recouvrement est certes de la responsabilité de la Confédération, mais la France comme la Suisse connaissent le principe de la compensation.
Cette motion n'est pas dirigée contre la France ou contre les frontaliers, mais il s'agit de respecter les accords conclus, de respecter les engagements et d'obtenir le paiement de ce dû. Pour ces raisons, le groupe UDC vous sollicite pour renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, afin qu'elle soit appliquée et que le Conseil d'Etat défende nos intérêts.
Mme Beatriz de Candolle (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, je ne vais pas rallonger notre débat, tout a été dit par le rapporteur et mes collègues préopinants socialistes, Verts et PDC. Le groupe PLR refusera vivement cette motion !
Le président. Merci, Madame la députée. Puisque tout a été dit, je passe la parole à M. le député Lussi.
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Ça va être très court, Monsieur le président ! Mesdames et Messieurs, si bon nombre d'entre vous avaient les mêmes largesses, la même compréhension humaniste lorsqu'il s'agit de payer vos impôts ! Je ne remarque qu'une chose: il s'agit simplement d'un contrat et d'une dette, il ne s'agit pas d'être anti-frontalier ou anti-Français. Des accords ont été passés, il ne s'agit pas de dire que tant que nous ne serons pas remboursés, nous ne soignerons ni n'assisterons les nouveaux indigents; il s'agit simplement d'un contrat, avec une dette. Vous semblez vouloir passer outre avec vos grandes considérations. Pourquoi pas ? En ce qui nous concerne, nous pensons avoir vu juste en disant qu'à un moment donné il faut respecter ce qui est fait. Vous pensez le contraire, la majorité - nouvelle ou ancienne - en décidera, mais vous ne nous empêcherez pas de penser que vous avez largement tort !
M. Raymond Wicky (PLR), rapporteur de majorité. Rapidement, deux précisions. Une première chose qui a été évoquée par un de mes préopinants, à savoir M. Velasco, c'est que la vision de cette motion est unilatérale. On dit que la France nous doit de l'argent, mais on n'a pas évalué ce que nous devions à la France, pour une raison assez simple - je ne vais pas m'étaler sur le sujet, le président du Conseil d'Etat vous en dira peut-être un peu plus: si le fameux traité précisait qu'il y avait une réciprocité des frais facturés par les deux pays, l'inventaire des indigents côté français n'est pas aussi simple à faire que dans la structure helvétique. Il n'y a pas de chiffres précis en la matière, mais uniquement des évaluations telles qu'évoquées par M. Pfeffer, à savoir un pour deux.
Deuxième chose, par rapport à la problématique de la compensation sur la redevance genevoise aux communes voisines. Si je me souviens bien des débats de la commission, cette compensation est juridiquement impossible et inacceptable. Nous ne pouvons pas procéder de la sorte, ce n'est pas une dette qu'on règle avec l'épicier du coin en disant que puisque c'est comme ça, dorénavant je ne paierai plus mon pain ! C'est un tout petit peu plus compliqué que cela. Forts de ces considérations, nous vous invitons encore une fois à refuser cette motion.
M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, un certain nombre de choses se sont déroulées depuis les travaux sur cette proposition de motion. Cela a été dit, un accord a été trouvé avec la France, pour lequel l'engagement de mon collègue Mauro Poggia a été déterminant. Cet accord a permis de régler les sommes en souffrance, et j'aimerais ici rappeler que les sommes dues n'étaient pas contestées par la France à l'endroit de la Suisse, mais qu'il y avait aussi des dettes dues par la Suisse à l'endroit de la France pour un certain nombre de nos ressortissants. Ceux-ci sont nombreux, notamment dans le sud de la France où ils vont s'installer et où ils ont recours, eux aussi, aux prestations sociales, à l'aide sociale ou à des prestations hospitalières ou médicales, sans être en mesure de les payer. Cet accord a été trouvé et il met un terme à ce litige - pour autant que ce soit un litige, les sommes n'ayant jamais été contestées, mais simplement l'ampleur de celles-ci.
Il ne nous aurait de toute façon pas été possible de compenser ces différentes sommes parce qu'il n'y avait pas identité des créanciers et des débiteurs, ce qui est la condition juridique essentielle à la compensation. C'est la raison pour laquelle nous n'entendions pas procéder ainsi.
Nous n'entendions pas procéder de cette manière aussi parce que, fondamentalement, les relations entre deux pays voisins et amis - deux pays qui partagent la même langue - ne se règlent pas par des oukases, mais par des accords financiers négociés qui sont respectés ensuite et qui sont honorés enfin. C'est le cas de ces diverses dettes. Les nouvelles dispositions sont désormais également applicables pour les cas à venir et elles seront bien évidemment appliquées avec respect par les deux pays. Je vous invite donc à refuser cette proposition de motion qui n'a plus aucune actualité et qui n'a, à vrai dire, plus aucun sens; elle aurait dû être retirée il y a bien longtemps, surtout lorsqu'on voit qu'il est bientôt 23h et que ce Grand Conseil a peut-être envie d'autre chose !
Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. J'invite l'assemblée à se prononcer sur cet objet.
Mise aux voix, la proposition de motion 2312 est rejetée par 73 non contre 7 oui et 11 abstentions.
Le président. Je rappelle au Bureau que nous avons une brève réunion à la salle Nicolas-Bogueret et je vous dis à toutes et à tous à demain, 14h, pour la séance des extraits.
La séance est levée à 22h50.